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Les manoeuvres financières du Président Trump et sa famille : du jamais vu dans l’histoire américaine

27 mai, par Amy Goodman, Éric Lipton — , ,
Amy Goodman : (…) Le New York Times a titré récemment un article : « Trump part pour le Moyen Orient avec un seul but : deals, deals, deals ». Notre prochain invité, Eric (…)

Amy Goodman : (…) Le New York Times a titré récemment un article : « Trump part pour le Moyen Orient avec un seul but : deals, deals, deals ». Notre prochain invité, Eric Lipton, y à contribué parce qu'il suit de près les ententes et contrats que réalise l'administration Trump. Il est récipiendaire d'un prix Pulitzer, journaliste d'investigation au New York Times ces derniers articles s'intitulent : « Auction to Dine With Trump Creates Foreing Influence Opportunity » et « TRump Sons' Deals on Three Continents Directly Benefit the President ».

Tiré de Democracy Now, 13 mai 2025
Unprecedented” in U.S. History : Trump & Family Rake In Money from Gulf States, Crypto & Real Estate
Democracy now !
https://www.democracynow.org/2025/5/13/qatar_air_force_one
Traduction, Alexandra Cyr

Soyez le bienvenu sur Democracy Now, Eric Lipton. Pourquoi ne pas commencer ici. Nous nous arrêtons sur ce premier voyage international important du Président Trump avec un premier arrêt a Riad. Nous voyons le défilé de PDGs américains et autres qui serrent la main de Mohammed ben Salman et bien sûr l'allié bien en vue du Président, l'homme le plus riche au monde, Elon Musk. Pourriez-vous nous dire qui est derrière ce voyage comme son beau-fils Jared Kushner qui donne ses avis et ceux que nous ne voyons pas encore, ses fils Eric et Donald jr. Qu'ont-ils à gagner ?

Eric Lipton : Actuellement c'est au Moyen Orient que l'Organisation Trump a ses liens les plus importants pour ses opérations d'affaire. C'est clairement là qu'elle réalise ses plus importants profits et de beaucoup. Il y a les revenus du gaz et du pétrole qui depuis des décennies ont été placés dans des fonds souverains. Il se trouve que, actuellement, les administrateurs.trices de ces fonds cherchent à investir globalement, à devenir des acteurs économiques importants dans le monde. C'est pour cela que tant de ces représentants.es d'entreprises capitalistes et aussi d'intelligence artificielle et de technologie se dirigent vers le Moyen Orient. Et c'est aussi cela qui fait que les Trump et Jared Kushner sont si liés à cette région, ils ont des centaines de milliards de dollars à placer. Et de même pour les représentants.es d'entreprises américaines qui accompagnent le Président Trump dans ce voyage.

Au cours des dernières semaines, le gouvernement d'Abu Dhabi a annoncé qu'il investirait une valeur de 2 milliards de dollars dans World Liberty Financial, la compagnie de crypto monnaie des Trump qui va s'en servir pour financer la plus importante entreprise d'échange de cette monnaie dans le monde. Mais, pendant que cette somme est déposée dans World Liberty Financial, la famille Trump et ses partenaires vont toucher deux milliards de dollars en intérêts. Nous parlons donc de millions de dollars par année.

Pas très loin de là, au Qatar, le gouvernement est propriétaire d'un terrain où la famille Trump va créer un terrain de golf et construire des villas. C'est la compagnie DarGlobal, qui coordonne la plupart de ces projets au Moyen Orient. C'est une filiale de Dr Al Arkan, une compagnie immobilière basée en Arabie Saoudite étroitement alignée avec le gouvernement du royaume. DarGlobal a six projet différents qui comporteront le nom de Trump comme Rober Weissman l'a indiqué. La famille Trump fait des millions de dollars en vendant son nom et elle encaisse aussi souvent des frais de licences et de gestion. Les Trump ont donc des projets en Arabie Saoudite, à Oman et aux Émirats arabes unis avec DarGlobal. C'est là que se trouve le plus productif des opérations immobilières de la famille Trump à travers DarGlobal et ces projets marquage.

J'ai examiné de près la liste des personnes présentes aux rencontres saoudiennes et je n'ai vu personne de DarGlobal. Même s'ils devaient être là … et je n'ai pas vu non plus de noms de leurs partenaires sur cette liste assurant qu'ils étaient présents. Mais de simplement être dans cet espace est positif. Pour Jared Kushner, que le Président soit là c'est productif. Il a reçu plus de deux milliards de dollars de Public Invesment d'Arabie saoudite pour son propre fonds d'investissement. Et ce Public Investment Fund est le plus grand investisseur dans le LIV Golf où se sont tenus quatre tournois de suite sur le golfe Doral de la famille Trump en Floride.

Donc, l'argent du Moyen Orient avec la crypto monnaie, les golfs et les hôtels et l'action de Jared Kushner, inonde les opérations de la famille Trump. Il n'est donc pas surprenant que ce voyage soit si important. Le Président visite les Émirats arabes unis, le Qatar et l'Arabie saoudite les trois partenaires d'affaire de sa famille.

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États-Unis : Trump au pied des monarchies du Golfe

27 mai, par Dan La Botz — , ,
Le président Donald Trump s'est rendu dans la semaine du 12 mai dans trois monarchies du golfe Persique, où il a été adulé, a fait l'éloge des régimes féodaux, a conclu des (…)

Le président Donald Trump s'est rendu dans la semaine du 12 mai dans trois monarchies du golfe Persique, où il a été adulé, a fait l'éloge des régimes féodaux, a conclu des accords et a accepté des pots-de-vin, tout en opérant un changement important dans la politique américaine au Moyen-Orient. Au milieu de magnifiques palais et mosquées, entourés de chevaux arabes et sous l'effet des danses à l'épée, M. Trump et les monarques se sont mutuellement fait des éloges.

Tiré de Inprecor
21 mai 2025

Par Dan La Botz

La responsabilité du prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane (MBS) dans le meurtre horrible du journaliste Jamal Khashoggi, lors d'une visite au consulat saoudien à Istanbul, comme l'avait précédemment signalé la CIA, n'a jamais été mentionnée. Les gouvernements autoritaires et les violations des droits humains de l'Arabie saoudite, du Qatar ou des Émirats arabes unis n'ont pas non plus été mentionnés. Au contraire, Trump a fait l'éloge de MBS pour avoir fait entrer l'Arabie saoudite dans l'ère moderne. Il a rejeté les critiques précédentes du gouvernement américain à l'encontre des monarchies en déclarant : « C'est à Dieu de juger, mon travail consiste à défendre l'Amérique et à promouvoir les intérêts fondamentaux de la civilité, de la prospérité et de la paix ».

Le voyage de Trump était axé sur les accords conclus avec les entreprises américaines. Il a affirmé avoir conclu des contrats d'une valeur de 2 000 milliards de dollars, notamment pour la vente d'avions Boeing et de moteurs General Electrics. Il a signé un accord visant à faire des Émirats arabes unis la plus grande installation d'IA en dehors des États-Unis. Il a également affirmé que les monarchies du Golfe allaient investir des milliers de milliards de dollars en Amérique. Une alliance entre puissances pétrolières semble scellée. L'émir du Qatar a adopté le slogan de Trump, « Drill baby, drill ». Les monarchies accueillent depuis des décennies des bases militaires américaines, et des milliers de soldats américains font des États-Unis la puissance militaire dominante de la région.

Affaires de la famille Trump

La corruption de Trump et sa propension à accepter des pots-de-vin ont été mises en évidence. Le Qatar a offert à Trump un avion de luxe Boeing 747-8 d'une valeur de 400 millions de dollars, destiné à remplacer l'actuel Air Force One. Ou peut-être s'agissait-il d'un cadeau au département de la défense des États-Unis ? Quoi qu'il en soit, Trump a déclaré qu'il accepterait l'avion et qu'il le placerait dans sa bibliothèque présidentielle à la fin de son mandat. Ses détracteurs estiment qu'il s'agit d'un pot-de-vin qui viole la clause d'émoluments de la Constitution, laquelle interdit au président d'accepter des cadeaux de la part de gouvernements étrangers. Les Émirats arabes unis ont conclu un accord sur les cryptomonnaies d'une valeur de 2 milliards de dollars avec World Liberty Financial, qui appartient… aux fils de Trump, Donald Jr. et Eric.

Bien que le sujet ait été évité, la visite de Trump a également renforcé les nombreux autres investissements de sa famille dans la région : une tour résidentielle à Riyad, une Trump Tower de 47 étages à Jeddah. Trump International Hotel and Tower à Dubaï, Trump International Golf Course à Doha et Trump International Hotel & Golf Club à Oman.

Politique étrangère

Le voyage ne s'est toutefois pas résumé à des pots-de-vin et à des transactions commerciales. Le président des États-Unis a profité de l'occasion pour opérer un sérieux changement dans la politique étrangère du pays. Tout d'abord, il convient de noter qu'il ne s'est pas rendu en Israël et n'a pas rencontré le Premier ministre Benjamin Netanyahou, pas plus qu'il n'a adapté ses décisions pour lui plaire. Trump a annoncé qu'il levait les sanctions contre la Syrie et a rencontré le président intérimaire de la Syrie, Ahmed al-Charaa, qui était autrefois affilié à Al-Qaïda et dont la tête était mise à prix pour 10 millions de dollars jusqu'en décembre dernier. Netanyahou, cependant, craint que la Syrie ne devienne un agresseur et l'a attaquée plus de 600 fois depuis qu'Assad a été évincé en décembre 2024.

Trump a également annoncé que les États-Unis et l'Iran s'étaient « en quelque sorte » mis d'accord sur un accord nucléaire, ce qui pourrait conduire à une normalisation des relations. Ici aussi, Netanyahou ne sera pas satisfait de cette évolution, car il souhaite que les États-Unis se joignent à Israël pour bombarder l'Iran.

Et tandis qu'Israël poursuivait ses bombardements sur Gaza et avançait dans ses projets de nouvelle invasion et d'occupation, Trump a mentionné en passant à ses hôtes et aux médias la famine qui sévit à Gaza et qu'Israël nie.

Trump est versatile, il est donc difficile de savoir ce qui se passera en fin de compte. Pour l'instant, il semble que le président américain place sa confiance dans les monarchies du Golfe, et non en Israël.

Dan La Botz, traduit par la rédaction de l'Anticapitaliste et publié le 22 mai 2025

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Haïti, notre dette : Une étincelle du feu qui nous embrase

Dans sa belle introduction, Haïti, notre dette, Frédéric Thomas parle du passé « On vous a arrachés à vos terres et à vos familles. Enlevés de la Côte d'Or, du Dahomey, du pays (…)

Dans sa belle introduction, Haïti, notre dette, Frédéric Thomas parle du passé « On vous a arrachés à vos terres et à vos familles. Enlevés de la Côte d'Or, du Dahomey, du pays des Aradas. Parqués à fond de cale, vous n'aviez rien, vous n'étiez rien. On vous a jetés, couverts de chaînes, à des milliers de kilomètres de là sur un territoire qui vous était étranger » et jette un pont vers le présent et le futur : « Le temps est passé, mais votre promesse demeure. Je vous dois une part de mon confort, de mes droits et de mes armes. Et moi, contrairement à la France, je paie mes dettes ».

Avril 2025 | tiré du site d'Inprecor

Un petit livre, mais contrairement à d'autres Frédéric Thomas ne caricature pas, n'oublie pas, n'efface ni les un·es et ni les autres, ne gomme pas des contradictions. Un coup pour coup magnifiquement écrit…

Des personnes esclavisées et d'ancien·nes esclaves, des afro-caraïbien·nes se sont libéré·es, seul·es. Un événement inouï, « L'onde de choc se poursuit jusqu'à nous et continue de faire vaciller les pouvoirs », impardonnable pour les maitres du monde. « L'exemple toxique de ce premier État noir, issu d'une révolte d'esclaves, a de quoi hanter le présent, entretenir les rêves, les révoltes et les peurs ».

L'auteur parle des politiques de la France, des réécritures de l'histoire, de l'inégalité entre États, du regard colonial d'un temps bloqué, de l'Ordonnance de Charles X (17 avril 1825), « une victoire acquise par la lutte se mue en une indépendance concédée par le pouvoir vaincu ». Il revient sur la révolution, les plantations de cannes à sucre, les administrateurs et les propriétaires, les petits blancs, les noirs libres, les esclaves des plantations, « et toutes les relations sociales sont saturées, structurées et surdéterminées par la violence esclavagiste », Les Jacobins noirs de C.R.L. James, le racisme et la peur panique des colons, François-Dominique Toussaint Louverture.

« La révolution s'inscrit dans la voie ouverte par les révolutions américaine et française ». Le décret de la liberté générale, l'abolition de l'esclavage, le rôle de Léger-Félicité Sonthonax, « l'écho de l'insurrection est désormais mondial ». Il ne faut pas se tromper, « l'initiative réelle revient aux esclaves qui se sont soulevés et exercent une pression prodigieuse sur toutes les forces en présence ». Ce geste libérateur ne peut être accepté, il sera nié, transformé en concession du pouvoir (une habitude des dominants, hier comme aujourd'hui !). Et pourtant, l'auteur a raison de le souligner, « la révolution haïtienne dessine d'autres “nous”, qui se rient de ces autorités »…

Dans le chapitre suivant, Frédéric Thomas analyse le pacte néocolonial, « L'enjeu est pourtant de penser ensemble la domination internationale et celle de la classe dominante haïtienne », la situation néocoloniale de dépendance, l'architecture de la société coloniale et le nouveau pouvoir qui émerge de la révolution haïtienne, le modèle d'agriculture intensive, « La plantation est une plateforme d'import-export dont le centre de décision est délocalisé », le travail libre qui rappelle le temps de l'esclavage, « la résistance têtue des anciens esclaves, refusant de retourner dans les plantations », le maintien du marqueur de l'esclavage et du colonialisme, et aussi « un projet d'agriculture et de société alternative », les clivages internes à la société haïtienne, l'oligarchie, le mythe fondateur et l'échec économique. L'auteur conclut ce chapitre sur les comptes à rendre de l'État français et sur la mise en place d'une politique de réparation...

Des soulèvements, le moment 1825, « Haïti est la nation la plus inégalitaire du continent le plus inégalitaire du monde », la répétition des chocs « sur fond de catastrophes naturelles, d'instabilité politique et de pauvreté », l'humanitaire et « les manières de passer à côté d'Haïti », celles et ceux qui parlent d'urgence mais pas d'histoire et qui oublient les droits et les résistances, les mobilisations de 2008, les colères contre la corruption et la vie chère, la confusion internationale entre « la pire des politiques [et] la politique du pire », les regards partagés par les ONG et les diplomates internationaux, les gravats du silence, « les peurs enfouies depuis cette fameuse nuit d'août 1791 », le pouvoir d'occulter le pouvoir, les responsabilités invisibilisées, l'humanitaire comme justification de « ce que l'on fait, ce qu'on ne fait pas et ce qu'on laisse faire », le refus d'une « transition de rupture », l'accord de Montana, le gouvernement d'Ariel Henry, les bandes armées et le refus « de mettre en place un réel embargo sur les armes en provenance des États-Unis », l'oligarchie et les élites, les fonctionnements mafieux. Contre la construction de réalités falsifiées et mensongères, contre l'occultation des pouvoirs et des responsabilités, il nous faut réhabiliter l'histoire et les paroles des populations haïtiennes pour rompre avec les stratégies du pacte néocolonial…

Frédéric Thomas termine par un chapitre « réparation ». Contre l'idée qu'il ne s'est rien passé, il faut regarder les Haïtiens et les Haïtiennes en face, reconnaître les faits, les responsabilités, fixer une politique de réparations, « La France a une dette envers Haïti qu'elle doit rembourser ».

Donnons à voir l'extraordinaire du soulèvement de 1791, démystifions les lectures monochromes de la modernité, analysons le « double mécanisme d'extraversion et de dépossession » et la superposition des scènes internationale et nationale, refusons le nationalisme étroit sans dimension anticoloniale et internationaliste, défaisons ce qui se fait en notre nom...

Nous avons besoin de tels livres pour que nos luttes quotidiennes se confondent avec l'embrasement du monde… « La révolution haïtienne est une promesse qui doit être tenue ».

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222 ans après : un drapeau à 400 millions pour couvrir l’échec d’un État

« Yon sèl Drapo, Yon sèl Pèp, Yon sèl Nasyon ». Le slogan est beau. Il évoque l'unité, la souveraineté, le patriotisme. Mais à l'heure où le Pouvoir exécutif prévoit de (…)

« Yon sèl Drapo, Yon sèl Pèp, Yon sèl Nasyon ». Le slogan est beau. Il évoque l'unité, la souveraineté, le patriotisme. Mais à l'heure où le Pouvoir exécutif prévoit de débourser environ 400 millions de gourdes pour les festivités du 18 mai 2025, ce message résonne comme une gifle donnée au visage d'un peuple affamé, traqué, trahi.

Par Smith PRINVIL

À Cap-Haïtien, ville-héroïne de notre histoire révolutionnaire, se prépare un événement de prestige : décorations, vols charters pour les officiels, sécurité renforcée, spectacles culturels — tout, sauf la sincérité. Le paradoxe saute aux yeux : pendant que les autorités fuient la Plaine du Cul-de-Sac devenue zone rouge, elles s'envolent pour célébrer le drapeau dans une ville à l'abri, comme pour maquiller l'effondrement de la République par un folklore national.

Mais quelle nation célèbre-t-on à 400 millions de gourdes quand des enfants meurent de faim à La Saline, quand les hôpitaux publics ferment faute de moyens, quand des enseignants attendent des mois de salaires impayés, quand des milliers de familles vivent dans des camps sous des tentes depuis des années ? Quel peuple honore-t-on quand on ignore les cris des déplacés internes, fuyant les gangs armés qui ont annexé des communes entières avec la complicité tacite de l'État ?
Les critiques fusent et elles sont légitimes. Car il ne s'agit pas ici d'un acte patriotique, mais d'une manœuvre de diversion, voire de détournement de fonds publics. Un gouvernement sans légitimité, incapable de garantir la sécurité ou de redresser l'économie, choisit de noyer le désespoir national dans des paillettes commémoratives. C'est une stratégie vieille comme le monde : quand on ne peut gouverner, on parade.

Ce 18 mai, les uniformes seront repassés, les discours seront écrits à la hâte, les caméras seront braquées sur les estrades. Mais ce qu'on ne verra pas, c'est la blessure profonde du peuple haïtien, trahi une fois de plus par ceux qui parlent en son nom. Car derrière chaque gourde dépensée, il y a un choix. Et ce gouvernement a choisi le spectacle plutôt que la justice, l'image plutôt que l'action, l'oubli plutôt que la mémoire.

Haïti ne se libérera pas à coups de fanfares, ni de slogans vides. Le drapeau n'est pas un décor, c'est un symbole de lutte, né dans le sang des esclaves insurgés, levé par Dessalines et Catherine Flon comme promesse de liberté et de dignité. Ce drapeau ne saurait être réduit à un alibi budgétaire pour un pouvoir discrédité.

Le véritable hommage au bicolore, c'est le respect de la vie humaine, la reddition de comptes, la justice sociale. C'est de permettre aux enfants d'apprendre sans peur, aux agriculteurs de cultiver sans être rançonnés, aux citoyens de marcher dans les rues sans tomber sous les balles.

Le peuple haïtien ne demande pas une fête, il demande un futur.

Et ce futur ne viendra pas des podiums officiels, mais du réveil de la conscience collective.

Smith PRINVIL

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L’Appel de Paris pour la protection du peuple palestinien

La protection du peuple palestinien est devenue une urgence absolue. À Gaza, après quelques semaines de suspension, les massacres de masse ont repris, accompagnés d'un siège (…)

La protection du peuple palestinien est devenue une urgence absolue. À Gaza, après quelques semaines de suspension, les massacres de masse ont repris, accompagnés d'un siège total et d'une famine généralisée ainsi que des déplacements forcés de populations ; au moins 53 000 Palestinien·es ont été tué·es suite aux opérations militaires israéliennes ; la bande de Gaza est dévastée et devenue inhabitable.

Tiré d'Orient XXI.

En Cisjordanie — y compris Jérusalem-Est — en dix-neuf mois, plus de 1 500 attaques de l'armée et des colons ont fait près de 962 morts et plus de 7030 blessé·es palestinien·es ; plus de 40 000 Palestinien·es y ont été déplacé·es de force.

Cependant, alors que le peuple palestinien vit la pire période de son histoire, la légitimité de son combat pour la justice et l'autodétermination face à la volonté d'effacement dont il fait l'objet, est réaffirmée par le droit international. Dans le prolongement de l'avis de la Cour internationale de justice (CIJ), l'Assemblée générale des Nations unies a exigé par son vote du 18 septembre 2024 la fin de l'occupation israélienne du territoire palestinien et le démantèlement des colonies avant le 18 septembre 2025.

Dès lors, la France et l'Europe doivent s'acquitter de leurs obligations. Elles doivent, comme le précise la résolution de l'ONU, « favoriser, conjointement avec d'autres États ou séparément, la réalisation des droits du peuple palestinien à l'autodétermination et s'abstenir d'entretenir des relations conventionnelles avec Israël dans toutes les situations où celui-ci prétend agir au nom des Palestiniens ou pour des questions les concernant ».

Il y a 80 ans se construisaient les bases d'une justice internationale avec la création de l'ONU, dont la Charte fondait les conditions de la paix. Les États membres adoptaient trois ans plus tard la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Marquons cet anniversaire par notre refus solennel que la loi du plus fort l'emporte sur le droit international en Palestine.

L'Assemblée générale de l'ONU a décidé le 3 décembre 2024 de la tenue d'une conférence internationale. Elle se tiendra du 17 au 20 juin 2025 à New York. Elle aura pour mission « d'examiner l'application des résolutions de l'Organisation des Nations Unies relatives à la question de Palestine ».

En préalable de cette conférence internationale sous l'égide de l'ONU, nous lançons solennellement un appel pour la protection du peuple palestinien et la mise en œuvre du droit international.

Nous, signataires de cet appel, sommes convaincu·es que c'est l'application du droit international qui garantira la protection du peuple palestinien en lui permettant de vivre enfin en paix et en sécurité. Pour cette raison, nous demandons à la France de reconnaître l'État de Palestine dans le cadre du droit à l'autodétermination du peuple palestinien.

De la même façon, nous sommes convaincu·es que seuls la fin de l'occupation et l'arrêt de l'oppression du peuple palestinien permettront à Israël de connaître également la paix et la sécurité. En conséquence nous demandons à la France et aux États membres de l'Union européenne d'appliquer sans tarder les mesures énoncées par la résolution votée par l'Assemblée générale des Nations unies le 18 septembre 2024.

Liste des 55 premiers signataires

Xavier Dolan, cinéaste réalisateur

Ken Loach, cinéaste réalisateur

Adèle Haenel, actrice

Reda Kateb, acteur

Roger Waters, auteur-compositeur-interprète

Blanche Gardin, actrice

Swann Arlaud, acteur

Yvan Le Bolloc'h, acteur

Annie Ernaux, romancière

Corinne Masiero, actrice

Robert Guédiguian, cinéaste

Ernest Pignon-Ernest, plasticien

Elias Sanbar, ancien ambassadeur de la Palestine auprès de l'UNESCO

Edwy Plenel, journaliste

Fabien Gay, journaliste rédacteur en chef de l'Humanité, Sénateur de Seine Saint-Denis

Denis Sieffert, journaliste, directeur de Politis

Denis Robert, réalisateur

Alain Gresh, journaliste, fondateur et directeur d'Orient XXI

Catherine Tricot, directrice de la revue Regards

Thomas Vescovi, cofondateur de Yaani

Daniel Mermet, journaliste

Rony Brauman, ex-directeur de Médecins sans frontières

Raphaël Pitti, médecin urgentiste

Yanis Varoufakis, économiste grec

Marine Tondelier, secrétaire nationale des Ecologistes

Olivier Faure, député de Seine et Marne, 1er secrétaire du Parti socialiste

Olivier Besancenot, porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste

Manuel Bompard, député des Bouches-du-Rhône, coordinateur de La France insoumise

Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français

Aymeric Caron, député de Paris, président de Révolution écologique pour le vivant

Gisèle Jourda, sénatrice, présidente du groupe d'amitié France Palestine au Sénat

Richard Ramos, député du Loiret, président du groupe d'amitié France-Palestine à l'Assemblée nationale

Clémentine Autain, députée de Seine-Saint-Denis

Thomas Portes, député de Seine-Saint-Denis

Raymonde Poncet-Monge, sénatrice du Rhône

Elsa Faucillon, députée des Hauts-de-Seine

Johann Soufi, avocat et procureur, spécialisé en droit international

Monique Chemillier-Gendreau, professeure émérite de droit public

Ziad Majed, politologue, professeur universitaire et chercheur

François Dubuisson, professeur de droit international à l'Université libre de Bruxelles

Agnès Levallois, vice-présidente de l'iReMMO

Anne-Marie Eddé, professeure émérite à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Bertrand Badie, professeur émérite à l'IEP de Paris, chercheur au CERI

Didier Fassin, professeur au Collège de France

Sylvain Cypel, journaliste

Pascal Boniface, géopolitologue

Sophie Bessis, historienne et journaliste, secrétaire générale adjointe de la FIDH

Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT

Caroline Chevé, secrétaire générale de la FSU

Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT

Nathalie Tehio, présidente de la Ligue des Droits de l'Homme-LDH

Pierre Stambul, porte-parole de l'Union juive française pour la paix

Youlie Yamamoto, porte-parole d'ATTAC

Anne Tuaillon, présidente de l'Association France Palestine Solidarité-AFPS

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Pour les dirigeants de l’Inde et du Pakistan, la fièvre de la guerre est une aubaine

27 mai, par Farooq Sulehria, Sushovan Dhar — , , ,
Les gouvernements de l'Inde et du Pakistan se sont éloignés du bord du gouffre à propos du Cachemire parce qu'aucun des deux ne peut se permettre une guerre à grande échelle. (…)

Les gouvernements de l'Inde et du Pakistan se sont éloignés du bord du gouffre à propos du Cachemire parce qu'aucun des deux ne peut se permettre une guerre à grande échelle. Une rhétorique belliqueuse et un climat de nationalisme strident ont aidé les deux gouvernements à faire face à des problèmes sur le front intérieur.

Tiré du site du CADTM.

Le conflit armé entre l'Inde et le Pakistan représentait une menace considérable pour le sous-continent. Cela aurait été une guerre qu'aucun pays ne peut se permettre. Le 10 mai, le président américain Donald Trump aurait négocié un premier cessez-le-feu entre les deux parties.

Cette annonce a été suivie d'une réunion des directeurs généraux des opérations militaires (DGMO) le 12 mai, lors de laquelle les deux parties ont accepté de respecter leur engagement de ne pas s'engager dans des actions agressives ou hostiles. En outre, l'Inde et le Pakistan « envisageront des mesures immédiates pour assurer la réduction des troupes ».

L'accord de paix actuel semble fragile, notamment en raison des nouvelles prises de position du premier ministre indien Narendra Modi et de son homologue pakistanais Shehbaz Sharif. Néanmoins, toute désescalade des tensions doit être saluée dans l'intérêt de la stabilité et de la paix régionales. Il semble improbable que l'une ou l'autre des parties puisse remporter une victoire décisive, qui entraînerait probablement la région dans une période de crise et d'incertitude prolongée.

Battre le tambour

Tout a commencé le 7 mai, lorsque l'armée de l'air indienne a mené une série de frappes aériennes visant des sites au Pakistan et au Cachemire administré par le Pakistan. Cette offensive avait pour nom de code « Opération Sindoor ». L'agression militaire a été déclenchée par une attaque meurtrière contre des touristes à Pahalgam, au Cachemire, le 22 avril, qui a entraîné la mort de vingt-six civils.

Les autorités indiennes ont affirmé que les opérations visaient neuf sites identifiés comme des « infrastructures terroristes ». En réponse, l'armée pakistanaise a affirmé que les frappes n'avaient visé que six sites, entraînant la mort de trente et un civils. Du côté indien, des rapports indiquent qu'au moins quarante civils ont été tués et de nombreux blessés, principalement dans le secteur de Poonch à Jammu, lorsque les troupes pakistanaises ont procédé à des tirs d'artillerie lourde le long de la ligne de contrôle (LoC) en représailles à l'attaque indienne.

L'incident de Pahalgam s'est avéré avantageux pour Modi, dont l'administration était déjà aux prises avec divers problèmes. Le gouvernement indien a dû faire face à une forte contestation publique, notamment pour la loi controversée sur le Waqf (amendement), ainsi qu'à des arrêts de la Cour suprême qui ont mis en évidence des violations constitutionnelles de la part de l'administration. En outre, les défis économiques et la hausse du chômage ont contribué au mécontentement croissant. En outre, la décision de l'administration Trump d'imposer des droits de douane à l'Inde a introduit des incertitudes supplémentaires.

Modi et ses alliés n'ont pas assumé la responsabilité des graves lacunes en matière de sécurité qui ont contribué à l'incident tragique de Pahalgam. Au lieu de cela, ils ont exploité la situation pour susciter la panique, la frénésie, l'hystérie guerrière, le chauvinisme et une nouvelle vague d'islamophobie. Ils ont réussi à galvaniser une nation entière autour d'une menace sécuritaire perçue comme étant posée par des terroristes soutenus par le Pakistan. La quasi-totalité de la nation s'est ralliée à eux dans leur quête de vengeance à la suite de l'attaque.

Les principales chaînes de médias ont facilité cette situation en propageant quotidiennement des fake news sur le Pakistan. Ces médias se sont transformés en champs de bataille, enflammant des millions de citoyens à travers le pays à coup d'informations erronées. Le gouvernement a même dû intervenir le 9 mai pour empêcher les médias de continuer à diffuser de fausses informations et d'attiser l'animosité.

Le gouvernement Modi a intentionnellement orchestré ce climat pour renforcer sa popularité, en particulier à l'approche des élections législatives dans l'État du Bihar. Il sert également à détourner l'attention des masses laborieuses de l'Inde des problèmes matériels auxquels le pays est confronté, tels que la hausse du chômage, les inégalités, la pauvreté et diverses formes de privation. Des rapports indiquent que le taux de chômage des jeunes a atteint 16,1 % lors du premier trimestre 2025.

Le compte de médias sociaux de l'unité d'information publique de l'armée indienne a salué les frappes transfrontalières comme un cas de « justice rendue ». Pourtant, il n'y a aucun signe d'arrestation des militants qui étaient réellement responsables des attaques terroristes à Pahalgam, tandis que la « justice » dont parle l'armée a impliqué des actions meurtrières dirigées contre des civils non armés, y compris des enfants.

La réponse du Pakistan

Les actions de l'Inde sont arrivées à point nommé pour les dirigeants pakistanais. Le pays est aux prises avec de graves crises économiques et d'endettement, des troubles politiques au Baloutchistan et une détérioration des relations avec l'Afghanistan. Autant de facteurs qui ont rendu le gouvernement actuel, dirigé par Sharif et les militaires, impopulaire auprès de la population du pays.

La réponse pakistanaise à l'attentat terroriste de Pahalgam, en même temps officieuse et semi-officielle, a été de prétendre qu'il s'agissait d'une « opération sous fausse bannière ». L'incident a été suivi d'une éruption de manie guerrière chauvine.

Les présentateurs télévisés, comme leurs homologues indiens, ont joué un rôle important dans le développement de l'hystérie guerrière. Les ministres, les hommes politiques de l'opposition et les chefs militaires ont fait des déclarations belliqueuses à l'unisson. Dans les jours qui ont précédé les premières frappes indiennes, le sentiment dominant au Pakistan était que l'Inde reculait par peur.

Deux points méritent d'être soulignés pour replacer l'attitude du Pakistan dans son contexte. Tout d'abord, l'establishment a encouragé et protégé les groupes djihadistes, du moins dans le Cachemire administré par le Pakistan. Ensuite, une réponse impétueuse de l'Inde a objectivement aidé le régime hybride pakistanais assiégé de l'intérieur, qui est au pouvoir depuis l'éviction d'Imran Khan.

Dans ce régime hybride, ce sont les militaires qui mènent la danse. Les représentants du gouvernement civil, le Premier ministre Sharif et le président Asif Ali Zardari, tiennent le rôle de serviteurs obéissants pour assurer leur maintien au pouvoir. Ayesha Siddiqa, spécialiste reconnue de l'armée pakistanaise, a rapporté en février dernier qu'« une source bien informée à Islamabad » estimait que les dirigeants militaires « se préparaient à relancer le militantisme – à une échelle comparativement plus faible mais perceptible » après l'hiver, afin de faire pression sur l'Inde pour qu'elle négocie sur la question du Baloutchistan.

Le Pakistan est confronté à un mouvement séparatiste armé au Baloutchistan, qui est géographiquement la plus grande de ses quatre provinces, limitrophe de l'Iran et de l'Afghanistan. La Chine a construit un énorme port à Gwadar sur la côte du Baloutchistan, et le Baloutchistan est un maillon crucial de l'initiative « la Ceinture et la Route ». Le Pakistan a accusé à plusieurs reprises l'Inde d'armer et d'entraîner l'Armée de libération du Baloutchistan, une organisation militante responsable d'attaques de guérilla contre des installations de sécurité et des travailleurs chinois au Baloutchistan.

Guerre de basse intensité

Malgré la fanfare qui entoure cette prétendue guerre et l'hystérie généralisée qui règne de part et d'autre de la frontière, bien sûr, aucune des deux armées n'a réellement pénétré en territoire ennemi. Des missiles et des drones ont été lancés en sus des tirs d'artillerie et des attaques transfrontalières. Les gouvernements et les médias des deux pays ont célébré avec beaucoup d'enthousiasme chaque fois que leurs forces ont intercepté un drone ou un missile « ennemi » à l'intérieur de leurs frontières respectives.

Selon Pravin Sawhney, éminent spécialiste militaire indien, le pays n'était même pas dans une situation de pré-guerre, qui implique généralement une mobilisation considérable des forces terrestres à travers les frontières. Nous avons assisté à une crise militaire – une version intensifiée des incidents habituels le long de la ligne de contrôle, en particulier au Jammu-et-Cachemire.

L'Inde et le Pakistan se sont livrés à trois guerres de vaste ampleur au sujet du Cachemire dans le passé, et les deux pays sont dotés de l'arme nucléaire. Aucun des deux pays ne peut supporter le coût d'un nouveau conflit à part entière. L'économie pakistanaise est actuellement confrontée à de graves difficultés ; elle est très endettée et doit rembourser de nombreux prêts. Avec un taux de croissance économique faible d'un peu plus de 2 %, il ne peut se permettre de s'engager dans une nouvelle guerre majeure.

Bien que l'économie indienne soit considérablement plus forte et plus grande, Modi a fait miroiter à l'Inde la perspective de devenir une économie de 5 000 milliards de dollars et d'émerger comme puissance économique et géopolitique majeure. Toute chance d'atteindre ces objectifs repose sur la stabilité de l'Inde, et une guerre avec un voisin doté de l'arme nucléaire a peu de chances d'attirer les investisseurs, sans parler des dommages qui en résulteraient pour le tourisme. Nous avons déjà assisté à des annulations de vols dans les deux pays, et il n'est dans l'intérêt stratégique ou économique d'aucune des deux nations que les récentes tensions dégénèrent en quelque chose de plus grave.

En outre, l'Inde comprend qu'il est peu probable que les Chinois restent passifs en cas d'attaque contre le Pakistan. Cela n'est et dû aux hostilités traditionnelles entre l'Inde et la Chine, mais également au fait que la Chine a investi environ 62 milliards de dollars dans le corridor économique Chine-Pakistan. Cet investissement englobe un large éventail de projets d'infrastructure et d'énergie destinés à relier la région occidentale de la Chine au port de Gwadar, au Pakistan.

Le golfe du Bengale et la mer d'Oman sont indispensables pour l'initiative « la Ceinture et la Route ». La Chine serait profondément préoccupée si les actions belliqueuses de ce qu'elle perçoit comme des gouvernements irresponsables dans ces deux nations finissaient par mettre en péril ses investissements. Impliquer les Chinois dans un conflit pourrait s'avérer désastreux pour l'Inde, car la guerre moderne repose largement sur des technologies de pointe, pour lesquelles la Chine possède un avantage considérable.

Il est donc dans l'intérêt de l'Inde et du Pakistan de maintenir des actions militaires de faible intensité, car cette stratégie leur procure des avantages politiques significatifs à un coût minime. Toutefois, cette approche impose un lourd fardeau à leurs populations civiles. Après l'euphorie initiale qui a suivi les attentats, l'atmosphère en Inde – en particulier dans les régions du nord et de l'ouest – est passée de la célébration à la panique et à l'appréhension quant aux victimes potentielles. Cela est survenu lorsque le Pakistan a indiqué qu'il riposterait.

Si les capitalistes indiens ont d'abord soutenu la ferveur guerrière, la fermeture des aéroports et le détournement des vols qui s'en est suivi les ont considérablement inquiétés. Le secteur industriel indien a depuis lors publié des déclarations appelant à la retenue. Le 9 mai, les marchés boursiers indiens et la roupie ont subi une baisse notable avant de regagner le terrain perdu le 12 mai avec l'accord de cessez-le-feu.

Nouvelle normalité

Les deux parties cherchaient à désamorcer l'escalade après les premières manifestations d'agression, en attendant le moment propice pour apaiser leur public national. Une méthode viable pour y parvenir consistait à pouvoir invoquer la pression internationale.

Si la Chine entretient des relations étroites avec le Pakistan, son influence sur l'Inde est limitée. Les États du Golfe ont une certaine influence sur les deux pays, mais pas autant que les États-Unis. Des pays comme la Russie et l'Iran pourraient éventuellement jouer un rôle de médiateur et contribuer à empêcher la situation de dégénérer en une crise plus grave ; toutefois, leur influence ne serait pas suffisante pour éviter de nouvelles tensions.

Dans l'état actuel des choses, la seule puissance à laquelle l'Inde et le Pakistan se sentent obligés de prêter attention est celle des États-Unis. Historiquement, les États-Unis ont joué un rôle dans la facilitation de la paix entre les deux États. Après le début des actions militaires indiennes, des signes ont montré que Washington façonnait indirectement les actions et les communications de l'Inde, en soulignant la nature « ciblée, mesurée et non escalatoire » des frappes, conçues pour répondre aux attentes de Donald Trump.

M. Trump a affirmé que les États-Unis avaient facilité une série de discussions qui ont abouti à un accord ; le gouvernement indien n'a ni confirmé ni infirmé cette affirmation. Pour soutenir ses partisans et entretenir un sentiment de ferveur guerrière, Modi a adopté un ton défiant et triomphant lors d'un discours à la nation le 12 mai.

Il a proclamé que l'Inde avait établi une « nouvelle normalité » en matière de réponse aux attaques terroristes et a présenté le cessez-le-feu comme une suspension temporaire des opérations du côté indien, les actions du Pakistan devant être surveillées de près dans les jours à venir. La réaction de l'establishment pakistanais a été tout aussi belliqueuse.

Si le cessez-le-feu a mis fin aux opérations armées, les agressions verbales et diplomatiques se sont poursuivies. À ce jour, la suspension du traité sur les eaux de l'Indus n'a pas été annulée. Ces mesures concernent aussi bien l'arrêt des visas que l'expulsion des diplomates, la fermeture des frontières, la restriction de l'espace aérien et la suspension des échanges commerciaux. En fin de compte, ce sont les citoyens des deux pays, ainsi que les Cachemiris de part et d'autre de la frontière, qui ont été les plus touchés et qui restent les otages de cette crise persistante.

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Chhattisgarh (Inde) : Arrêt immédiat de la guerre contre les citoyens

27 mai, par Alternative Viewpoint — , ,
Lors d'une opération « anti-Naxal » mercredi (21 mai 2025), les forces de sécurité ont tué vingt-sept maoïstes, dont Nambala Keshav Rao, également connu sous le nom de (…)

Lors d'une opération « anti-Naxal » mercredi (21 mai 2025), les forces de sécurité ont tué vingt-sept maoïstes, dont Nambala Keshav Rao, également connu sous le nom de Basavaraju, le secrétaire général du Parti communiste indien (maoïste) interdit, dans le district de Narayanpur au Chhattisgarh. Le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur ont exprimé leur jubilation et leur fierté concernant le succès de l'opération Kagaar.

Tiré d'Europe solidaire sans frontière.

Alternative Viewpoint dénonce fortement cet assassinat ciblé. Le motif sous-jacent semble être une campagne de longue date visant à s'emparer des terres, des eaux et des forêts des communautés [indigène] adivasi du Chhattisgarh, présentée sous le couvert d'opérations anti-maoïstes qui profitent réellement aux intérêts des puissances économique. Le mouvement maoïste indien a initialement émergé en réponse à l'aliénation des terres. Cependant, il a depuis évolué en un mouvement plus large s'opposant à l'aliénation des ressources naturelles, en particulier des forêts. L'État a été responsable de l'orchestration de massacres pour réprimer la résistance, la région de Bastar au Chhattisgarh étant un exemple notable.

Le gouvernement porte la responsabilité des décès de ses citoyens, le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur semblant prendre plaisir aux exécutions ciblées se produisant sous leur surveillance. Depuis le début de l'« opération Kagaar », la simple suspicion d'affiliations maoïstes a conduit à la mort de 31 personnes, dont 15 femmes, en seulement 21 jours. De plus, il y a eu de nombreux rapports de violations des droits de l'homme à travers le Chhattisgarh.

Il est essentiel de comprendre que le maoïsme est associé à des régions souffrant de pauvreté endémique, d'exploitation, de corporations envahissantes et de perte de terres et de moyens de subsistance. Il l'est également à des questions liées à la dignité et à l'autonomie tribales. Cette question va au-delà d'un problème élémentaire de maintien de l'ordre ; elle englobe des thèmes plus larges de privation et d'aliénation. Le ministre de l'Intérieur a fixé une date limite pour l'éradication des Naxalites au 31 mars 2026. Cette perspective réductionniste et intéressée, qui suppose que l'aliénation peut être résolue uniquement en éliminant ceux qui sont aliénés, soulève des préoccupations cruciales.

Malgré la proposition d'accord de paix du CPI (maoïste), le gouvernement a intensifié sa répression. Le meurtre indiscriminé des peuples autochtones pour s'approprier les ressources naturelles est un phénomène troublant aux racines historiques profondes. Le gouvernement Modi-Shah a poursuivi cette approche répressive avec un nouvel élan depuis l'« opération Green Hunt » du Parti du Congrès. « L'opération Kagaar » se présente comme la manifestation la plus flagrante de cette violence persistante.

Bien que nous ne soutenions pas nécessairement les politiques maoïstes, Alternative Viewpoint condamne les meurtres ciblés et inhumains des membres du CPI (Maoïste) et des peuples tribaux, ainsi que l'autoritarisme antidémocratique qui a permis ces actions. Nous nous opposons à la guerre menée par l'État contre les citoyens afin de priver les communautés indigènes de leurs droits. Nous appelons tous les démocrates à résister à chaque instance de répression et de meurtre de l'État.

Alternative Viewpoint

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L’extermination comme moyen de négociation : comprendre la stratégie d’Israël à Gaza

Depuis le dévoilement de l'« opération Chars de Gédéon », la nouvelle offensive israélienne visant à « conquérir » définitivement toute la bande de Gaza, il est devenu de plus (…)

Depuis le dévoilement de l'« opération Chars de Gédéon », la nouvelle offensive israélienne visant à « conquérir » définitivement toute la bande de Gaza, il est devenu de plus en plus évident que les décisions prises au sein du gouvernement israélien ne visent pas un objectif stratégique unique, mais plutôt une logique récurrente d'épuisement.

Tiré d'Agence médias Palestine.

Israël ne choisit pas entre la conquête totale et le confinement technocratique via un plan de cessez-le-feu négocié par les pays arabes. Il utilise ces options comme des moyens de prolonger la guerre et d'instrumentaliser sa durée plutôt que d'y mettre fin. Aucune n'est une véritable alternative à l'autre.

Ce n'est pas un paradoxe, mais une méthode. L'opération « Gideon's Chariots », qui vise à concentrer plus de deux millions de Palestiniens à Rafah et à « nettoyer » le reste de Gaza, n'est pas seulement un plan de conquête. C'est un fantasme de stérilisation déguisé en rationalité logistique. Sa brutalité ne réside pas seulement dans ses intentions – militaires et démographiques – mais aussi dans son caractère illimité, car il s'agira d'une occupation sans gouvernance ni responsabilité.

Elle imagine Gaza comme un champ chirurgical : vide de densité sociale et de politique, un terrain aplati où l'armée israélienne peut opérer sans entrave et où les civils sont transformés en captifs ou en débris. Là où l'extermination peut se poursuivre derrière le voile de la logistique humanitaire. Mais voilà : si Israël annonce son planen divulguant une grande partie de ses contours, s'assurant que l'issue finale de l'extermination est connue de tous, il en retarde également la réalisation.

Le rejet de la proposition égyptienne pour la gouvernance d'après-guerre à Gaza, quant à lui, relève moins d'une réfutation stratégique que d'une manœuvre temporaire : il reporte la stabilisation de Gaza, suspend la possibilité d'une architecture d'après-guerre et garantit à Israël son rôle d'arbitre unique en matière de circulation, d'aide, de reconstruction et de survie. La proposition, qui avait obtenu le soutien de la Ligue arabe, prévoyait un cessez-le-feu, la libération des prisonniers et la création d'une administration technocratique palestinienne à Gaza sous l'égide régionale et internationale. L'autorité gouvernementale serait civile, non affiliée au Hamas et éventuellement liée à l'Autorité palestinienne. Les forces de sécurité arabes, principalement égyptiennes et émiraties, auraient maintenu l'ordre public. Israël aurait, en théorie, conservé la possibilité de frapper si le Hamas se réarmait, mais la logique fondamentale était celle d'une gouvernance pacifiée et d'une reconstruction supervisée de l'extérieur.

Mais cette alternative, présentée comme un endiguement pragmatique, révèle sa propre structure de contrôle. Elle n'offre ni libération ni souveraineté aux Palestiniens. Elle ne rétablit pas la vie politique palestinienne. Au contraire, elle imagine une Gaza dépolitisée, administrée par des technocrates étrangers, où la gouvernance est réduite à la gestion et où la résistance est métabolisée en menaces pour la sécurité.

Oui, cela met fin aux massacres, mais cela poursuit le processus de destruction par d'autres moyens. Oui, il met fin au nettoyage ethnique et au génocide, mais il n'offre qu'un répit minimal.

Dans ce scénario, le Palestinien devient administrable mais non représentable — visible dans les tableurs et les systèmes de surveillance, mais invisible en tant que sujet de l'histoire. Là où « Gideon's Chariots » propose l'élimination de l'interlocuteur, le plan égyptien offre sa neutralisation. Là où le premier vise l'effacement, le second garantit le confinement.

De cette manière, Israël ne se contente pas de combattre le Hamas. Il gère le temps de l'effondrement des infrastructures de Gaza, de la diplomatie régionale et de ses propres contradictions internes. Les soi-disant « plans » qu'il fait circuler ne sont pas des plans d'action, mais des instruments de désorientation. En alternant escalade militaire et non-engagement diplomatique, Israël piège ses adversaires comme ses alliés dans un théâtre d'attente sans fin.

Ces plans ne deviennent pas des résolutions, mais des pièges littéraux : ils enhardissent certains, humilient d'autres et érodent la cohérence de toute vision alternative. Mais Israël reste dans le terrain suspendu des deux plans. D'un côté, il cherche à récupérer ses prisonniers avant d'anéantir complètement Gaza. D'autre part, il vise à apaiser les gouvernements arabes qui sont restés silencieux, n'ont pas rompu leurs liens avec Israël et ont progressivement – mais sûrement – proposé une alternative au génocide par une politique de stérilisation. Sans oublier que la perspective de détruire complètement la population de Gaza reste d'actualité, ce qui sert la gestion de la coalition par Netanyahou et son désir d'émerger comme un leader historique ayant mis fin de manière décisive à la question palestinienne.

Cela n'est nulle part plus évident que dans les relations d'Israël avec les États du Golfe. En signalant son ouverture à la normalisation et à des accords de sécurité régionale – tout en aggravant la catastrophe humanitaire –, Israël évite de se voir imposer des ultimatums clairs. La perspective d'une Gaza reconfigurée sous contrôle arabe est présentée comme une hypothèse, une possibilité lointaine, tandis que des faits irréversibles sont fabriqués sur le terrain : des quartiers entiers sont rayés de la carte, des populations déplacées, des infrastructures réduites en poussière.

Derrière le langage de la planification se cache une campagne de stérilisation et de concentration, une vision de Gaza non pas comme un foyer, mais comme un lieu de détention. Des rapports divulgués font état de transferts forcés, de Palestiniens envoyés en Libye ou ailleurs en Afrique, esquissant un avenir marqué par l'expulsion sous le couvert du pragmatisme. En d'autres termes, Israël manœuvre, cajole, accepte, revient sur sa parole, recommence à verser le sang et, en fin de compte, hésite à mettre en œuvre ses propres plans.

Mais même cette stratégie montre des signes de fatigue. L'armée est à bout. Les réservistes sont épuisés. Le soutien public, autrefois monolithique, est désormais fracturé, en particulier autour de l'incapacité du gouvernement à récupérer les prisonniers israéliens et de son mépris pour leur vie. L'élite politique peut afficher son unité, mais la cohésion sociale s'effrite. La confiance même qui liait autrefois la nécessité militaire à la légitimité civile s'érode.

Ces signes d'érosion ne sont pas seulement internes. Plus la guerre se prolonge, plus Israël perd sa légitimité internationale. Les mandats de la CPI, les décisions de la CIJ, les accusations de génocide qui s'intensifient ne sont pas seulement des condamnations morales, mais les signes d'un début d'isolement institutionnel.

Et pourtant, plutôt que de changer de cap, Israël redouble d'efforts, s'appuyant sur l'ambiguïté et l'usure, espérant épuiser l'indignation mondiale comme il espère épuiser la résistance palestinienne : par le retard, la confusion, la normalisation de l'effondrement et, bien sûr, par la coercition via l'instrumentalisation de l'antisémitisme.

À l'heure actuelle, ce qu'Israël recherche, c'est une « instabilité stable » dans laquelle Gaza est rendue inhabitable mais gouvernée, massacrée mais silencieuse, présente mais politiquement annulée. Les deux plans – celui qu'il met en œuvre et celui qu'il rejette – servent cette logique. Que ce soit par une guerre totale ou un confinement contrôlé, l'objectif reste le même : effacer la Palestine en tant que sujet de l'histoire et la remplacer par une population qui peut être contrôlée, administrée ou éliminée. La réussite de cette entreprise reste incertaine. Mais les fissures sont visibles dans la désillusion des soldats et dans la rage des familles des prisonniers israéliens.

Les négociations de cessez-le-feu comme forme d'interrogatoire

La manière dont Israël a mené les négociations de cessez-le-feu, pris dans un cycle perpétuel de propositions, de rejets, de reprise des hostilités et d'insistance sur des positions inacceptables, ressemble beaucoup à la dynamique entre les interrogateurs israéliens du Shin Bet et les prisonniers palestiniens soumis à leurs tactiques de pression.

Dans les salles du Shin Bet, la manipulation du temps devient une arme et le langage un outil de désorientation. La vérité n'est pas révélée par la clarté ou le dialogue, mais extraite par l'épuisement : torture physique, jeux psychologiques, faux-semblants d'amitié et promesses facilement trahies. Le but n'est pas de comprendre le sujet, mais de le détruire – pas seulement d'obtenir des aveux, mais de le faire s'effondrer.

« Si tu parles, je te donnerai une cigarette. Si tu donnes un nom, tu pourras te reposer. Si tu nous donnes une personne, une seule, nous t'apporterons peut-être de la nourriture, une couverture ou quelque chose pour te réchauffer. » Chaque geste se fait passer pour de la miséricorde, chaque acte est lié à la logique de l'accord. C'est une gouvernance par l'épuisement.

Mais il ne s'agit pas seulement d'une scène d'interrogatoire. C'est une relation dans laquelle le massacre, la négociation et la mesure s'alimentent mutuellement : le massacre produit la crise qui rend la négociation lisible ; et la négociation devient l'espace où l'impact de la violence est mesuré. Chaque bombardement israélien n'est pas suivi d'un silence, mais d'une évaluation : la résistance s'est-elle adoucie ? La communauté s'est-elle brisée ? Sont-ils prêts à céder ?

La négociation n'est pas une déviation de la violence ; c'est l'une de ses modalités — stratégique, affective, diagnostique. Parler de négociation ici, c'est parler d'un calibrage de la ruine et d'un test de l'esprit et de la fatigue. Tout comme l'interrogateur teste les limites de l'endurance du prisonnier.

Et pourtant, dans son cachot, le prisonnier palestinien aspire parfois à revoir son interrogateur, car dans un monde aux portes closes et à la famine lente, celui-ci devient le seul à confirmer son existence, la seule socialité possible.

L'ironie est que plus vous montrez de faiblesse, plus ils vous privent. Plus vous vous soumettez, plus ils serrent la vis. C'est pourquoi il ne s'agit pas d'une négociation de besoins, mais d'une architecture de l'humiliation calibrée pour que même votre volonté de parler devienne une marque supplémentaire de dépossession, ou un moment pour soutirer tout ce que vous pouvez à votre interlocuteur et vous assurer qu'il ne cache rien.

Lorsque les analystes, les diplomates et les commentateurs invoquent le terme « négociations », il s'agit en réalité d'un interrogatoire, car sa structure est conçue pour épuiser l'autre jusqu'à ce qu'il s'effondre. Et lorsque l'effondrement ne suffit pas, l'élimination suit. Dans ce paradigme, Israël ne recherche pas d'interlocuteurs, mais cherche à démanteler ceux qu'il convoque à la table des négociations.

Au-delà du binaire

Si les négociations israéliennes fonctionnent comme une forme d'interrogatoire, il est tout aussi important de rappeler que les Palestiniens ont non seulement reconnu cette structure, mais qu'ils ont également saboté à plusieurs reprises son fonctionnement. En effet, l'histoire de la lutte palestinienne est celle du refus des conditions imposées par l'occupant : celle de parler sans permission, de refuser de s'exprimer lorsqu'on y est contraint, de survivre sans chercher à être reconnu. Il ne s'agit pas d'une rébellion romantique, mais d'une lucidité forgée sous la pression. Une ruse politique forgée dans les cellules de prison, les salles d'interrogatoire, les maisons en ruines et les tables de négociation.

On demande depuis longtemps aux Palestiniens de jouer leur défaite, d'incarner la retenue tout en faisant preuve de modération et en dénonçant la violence de manière sélective. Mais à chaque fois, ils refusent ce rôle. Le prisonnier qui choisit le silence plutôt que les aveux ; le gréviste de la faim qui déplace la temporalité de la domination en soumettant son corps au temps lui-même ; la mère qui insiste pour nommer son enfant mort non pas victime, mais martyr ; le camp qui refuse de se dissoudre dans la poussière de l'humanitarisme — ce ne sont pas seulement des actes de résistance, mais des refus de capture.

C'est précisément ce refus qui brise le faux dilemme que l'Israël offre aujourd'hui au monde : extermination ou confinement, « chars de Gédéon » ou plan égyptien.

Il ne s'agit pas d'alternatives, mais plutôt de complicités structurelles. L'une éliminerait les Palestiniens en tant que sujets par la stérilisation militaire, l'autre les désarmerait et les contrôlerait par le biais d'une bureaucratie internationale. L'une est un génocide déclaré, l'autre une disparition contrôlée.

Cette dichotomie elle-même devient instable, car les fractures traversent désormais l'architecture morale de l'ordre international, dont la complicité et le deuil sélectif sont quotidiennement démasqués. Elles traversent les fondements mêmes d'Israël : une armée à bout de souffle, un leadership politique incohérent et une société qui se fracture sous le poids d'une guerre sans fin et de l'attente du retour du messie. Ces fractures traversent tous les lieux où le choix entre extermination et confinement est refusé, et où une troisième possibilité, fugitive, commence à poindre.

Cette troisième voie, bien que difficile à nommer, est déjà en train de se concrétiser. Elle bat au cœur des réseaux de solidarité mondiale qui ne demandent plus la permission, mais exigent des comptes. Elle grandit dans toutes les salles d'audience où le mot « génocide » est prononcé, non pas comme une métaphore, mais comme une accusation juridique. Elle vit dans la reconnaissance que la Palestine n'est pas une crise humanitaire à gérer, mais une cause politique à revendiquer.

Elle vit dans la conscience que la Palestine a vidé de leur sens les revendications de l'ordre libéral, mis à nu ses fondements et saturé son vocabulaire, tout en continuant d'affirmer sa présence.


Traduction : JB pour l'Agence Média Palestine

Source : Mondoweiss

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Le règne de l’indignité et de l’irraison : Adresse à signer !

27 mai, par Gilbert Achcar, Mireille Fanon-Mendès France — , , , ,
A la destruction systématique de la bande de Gaza et à l'hécatombe de sa population, s'ajoutent la famine et la destruction des moyens médicaux comme compléments de la guerre (…)

A la destruction systématique de la bande de Gaza et à l'hécatombe de sa population, s'ajoutent la famine et la destruction des moyens médicaux comme compléments de la guerre génocidaire

L'État d'Israël a décidé qu'aucun Palestinien ne doit rester sur sa terre.

Nous regardons, anéantis et envahis d'une incommensurable honte en l'universalité, la première phase du nettoyage ethnique de l'enclave qui se prolonge par celui annoncé en Cisjordanie.

Laisserez-vous le Président des États-Unis faire de Gaza une « Riviera » ?

Le peuple palestinien subit un génocide, une guerre d'extermination au sens où Raphaël Lemkin l'entendait : « acte de génocide dirigé contre un groupe national en tant qu'entité et les actes en cause sont dirigés contre des individus, non pas à titre individuel, mais en tant que membres de leur groupe nationali ».

Si la Charte des Nations Unies reconnait à l'État agressé le droit de se défendre (article 51), ce droit s'applique -t-il à une puissance exerçant une occupation illégale ? Cela mérite discussion. En tout état de cause, aucun État n'a le droit d'utiliser une force disproportionnée, ainsi qu'en fait usage actuellement l'État colonisateur. Le principe de proportionnalité introduit le fait qu'une action ne doit pas être plus dévastatrice que les dommages déjà subis. Pourtant, dans sa riposte, l'État d'Israël a fait le choix d'une violence aveugle qui viole le principe de proportionnalité en ne respectant aucun équilibre entre l'objectif, sauver les otages, et les moyens employés. L'objectif véritable : étant d'exterminer le maximum de Palestiniens.

Si la notion de principe énonce des exigences d'optimisation des valeurs et des intérêts, alors que les normes et les règles sont souvent présentées comme de nature ontologique, logique ou méthodologique, le principe de proportionnalité ne prime-t-il pas sur les autres règles et normes ? N'est-ce pas encore plus vrai lorsqu'un Premier ministre affirme qu'il faut éradiquer le Hamas et qu'il reçoit en retour le soutien d'une grande partie de la communauté internationale, et notamment de ses soutiens occidentaux, qui s'élèvent comme lui contre la « barbarie » ? Dans ces conditions, il lui est facile de décider du quota de proportionnalité.

Qui est le plus barbare ? Celui qui lutte contre une occupation coloniale illégale et pour son droit inaliénable à l'auto-détermination, même s'il commet ce faisant des actes criminels, ou celui qui, pour se venger et surtout pour réaliser des desseins coloniaux et expansionnistes d'extrême droite, cherche à éliminer de sa terre tout un peuple ? Celui qui aide un État à commettre, sur une grande échelle et de manière planifiée et systématique, des crimes de génocide, des crimes de guerre ? Celui qui détourne les yeux faisant semblant de ne pas savoir, alors que les corps s'amoncellent sous les gravats, ou de ne pas voir dans la profondeur des yeux des enfants l'inhumanité d'un monde se réclamant de la démocratie et des droits humains ?

Pourquoi face à ce désastre pour l'humanité, des pays, sans aucun état d'âme, aident l'État d'Israël en lui fournissant une aide soit militaire soit financière ?

Vous ne pouvez ignorer qu'en aidant ou en assistant ce pays, en lui reconnaissant son droit à se défendre alors qu'il est l'occupant, ces pays engagent la responsabilité internationale de leur État et se rendent complices de l'occupation illégale, de la colonisation, de l'apartheid, du nettoyage ethnique en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et même en ce qui concerne les Bédouins en territoire sous juridiction israélienne, sans oublier les crimes de guerre commis depuis plus de 78 ans et qui violent, malgré les nombreuses résolutions du Conseil de Sécurité ou celles de l'Assemblée générale, aussi bien l'ensemble des droits humains que les droits des populations civiles en temps de guerre garantis par la 4e Convention de Genève.

Affirmerez-vous en août prochain, lors du 75e anniversaire de l'adoption de cette Convention, qu'elle est une grande avancée pour la protection des populations civiles alors que l'armée d'occupation israélienne détruit systématiquement les écoles, les hôpitaux, les refuges, les centres de l'UNRWA et que la réunion des Hautes Parties Contractantes des Conventions de Genève, prévue le 7 mars dernier, a été annulée à la dernière minute en raison de la position déplorable du gouvernement suisse et de l'Europe ?

Faut-il vous rappeler qu'un État tiers n'a pas besoin de participer directement à un acte internationalement illicite – à l'instar des États-Unis, coresponsables de la guerre génocidaire menée par leur allié israélien – pour en partager la responsabilité ; il suffit qu'il fournisse une aide volontaire à la réalisation d'un fait illicite ou à la prolongation dans le temps de cet acte et cela concerne tous les États favorisant, entre autres, leurs entreprises afin qu'elles signent des contrats de ventes de composants ou d'armes à l'État israélienii.

Notons que, dans le cas du peuple palestinien et par rapport à l'acte internationalement illicite israélien, sont en cause des obligations considérées comme « essentielles » pour la « communauté internationale tout entière ». Rappelons ici qu'en 1970, dans un arrêt célèbre la Cour internationale de Justice avait précisé qu'« une distinction essentielle doit être établie entre les obligations des États envers la communauté internationale dans son ensemble et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre État ....

Par leur nature même, les premières concernent tous les États. Vu l'importance des droits en cause, tous les États peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés ; les obligations dont il s'agit sont des obligations erga omnesiii ».

Il va de soi que l'une des conséquences directes du fait internationalement illicite est qu'il existe à la charge de tous les sujets de droit international l'obligation de réparation. La réparation, qui consiste dans l'obligation d'effacer les conséquences du fait internationalement illicite, apparaît avant tout comme un mécanisme de sanction de la violation du droit international.

Pourquoi assumez-vous une telle précipitation au chevet de l'Ukraine envahie, tandis que la Palestine est abandonnée, isolée, emmurée, meurtrie, ethniquement « nettoyée », depuis plus de 78 ans sans susciter une véritable indignation de votre part ?

La dignité de la communauté internationale exige que cette dernière soutienne l'État sud africain pour avoir rappelé les principes intangibles du jus cogens (norme impérative) et qu'elle se dresse contre les attaques et les menaces dont ce pays est la cible, notamment celles de la nouvelle administration états-unienne.

Que répondez-vous au fait que les mesures provisoires de la Cour Internationale de Justice n'ont pas été respectéesiv, et encore moins mises en œuvre ?

Au nom de l'universalité, au nom de l'humain, assumez-vous d'avaliser encore plus de famine, plus de destruction massive, plus de déplacements de population ?

N'êtes-vous pas là, en tant que membres de la communauté internationale, pour contrer le fait que les rapports de force politiques ne l'emportent pas sur les normes du jus cogens quant au droit international et au droit humanitaire international mis en place pour réguler les usages de la force et protéger les populations civiles ?

Nous, Peuple des Nations, exigeons que vous, les États, en tant que membres de la communauté internationale représentant le Peuple des Nations, vous œuvriez en toute urgence à la mise en place de garde-fous pour éviter la déstructuration du droit international, voire le déchirement de la régulation des rapports de force afin que les rapports sociaux internationaux et les relations internationales ne soient pas façonnés par le rôle dominant des États-Unis dont la dérive à l'extrême droite est aujourd'hui le principal danger qui pèse sur la planète.

Soyez humains, si vous en êtes encore capables : vous avez la possibilité de stopper le génocide et le nettoyage ethnique du peuple palestinien !

Du futur de la Palestine dépend le futur de notre monde !

SIGNEZ ET FAITES SIGNER

ic.intl.responsibility.palestine@gmail.com

Mireille Fanon Mendes France
Pour la Fondation Frantz Fanon
https://fondation-frantzfanon.com/
https://centenaire.fondation-frantzfanon.com/

Gilbert Achcar
Professeur émérite en relations internationales, SOAS, Université de Londres

Notes
iAxis Rule in Occupied Europe : Laws of Occupation, Analysis of Government, Proposals for Redress,
Washington, Carnegie Endowment for International peace, 1944, p. 79
ii Companies Profiting from the Gaza Genocide : https://afsc. org/companies-2023-attack-gaza
iii CIJ, Arrêt Barcelona Traction, Recueil, 1970, § 33. « Erga omnes » means « in relation to everyone ».
iv https://news.un.org/fr/story/2024/03/1144476

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Contre les faiseurs de guerre, construisons le chemin de la paix

27 mai, par Réseau d'Actions contre l'Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR) — , , , ,
52 000 vies palestiniennes détruites par le gouvernement Netanyahou à Gaza, dont 16 000 enfants selon l'UNICEF. 1200 Israéliens tués lors l'attaque terroriste du Hamas le 7 (…)

52 000 vies palestiniennes détruites par le gouvernement Netanyahou à Gaza, dont 16 000 enfants selon l'UNICEF.
1200 Israéliens tués lors l'attaque terroriste du Hamas le 7 octobre, près 600 autres et depuis.
57 otages, dont 34 déclarés morts, toujours retenus dans les tunnels du Hamas dans la Bande de Gaza.
Plus de deux millions de déplacé(e)s de force à Gaza et en Cisjordanie, parfois plusieurs fois.

Tiré du site de Avaaz
https://secure.avaaz.org/community_petitions/fr/emmanuel_macron_president_de_la_republique_et_son__contre_les_faiseurs_de_guerre_construisons_le_chemin_de_la_paix/?eemail&utm_source=email&utm_medium=social_share&utm_campaign=1744003&utm_term=email%2Bfr&share_location=do_postaction

Signer la pétition cliquez ici

photo Serge D'Ignazio

Après plus de deux mois de blocage de l'aide humanitaire par Israël, la famine s'installe. Face à la mort et à la destruction semée avec le plus grand mépris des vies humaines par le Hamas et la coalition d'extrême droite au pouvoir en Israël, nous devons agir.

Un autre chemin est possible. En Israël et Palestine des milliers de citoyens se mobilisent pour exiger une paix juste et durable pour les deux peuples.

Plus de 1500 réservistes ont signé une lettre ouverte dénonçant la poursuite de la guerre à Gaza. Et nombre d'entre eux refusent de reprendre les armes. D'autres sont objecteurs de conscience et refusent de faire leur service militaire obligatoire.
Le gouvernement israélien tente de faire taire les voix d'opposition de la société civile.

Les Gazaouis protestent également. Ils sont descendus dans les rues par centaines pour dénoncer la responsabilité du Hamas dans la fin du cessez-le-feu avec des slogans forts – « Hamas dehors », « Hamas terroristes » ou encore « Nous ne voulons pas mourir ».
Ces manifestations ont été réprimées de manière brutale et sanglante par le Hamas.

Nous affirmons notre solidarité internationale envers les manifestants palestiniens et israéliens, et notre admiration pour leur courage.

Depuis 2015, Standing Together, mouvement de citoyens juifs et palestiniens d'Israël, se bat quotidiennement, comme nombre d'ONG israéliennes et palestiniennes sur le terrain, contre l'occupation, et pour qu'une solution pacifiste, juste et équitable émerge.

Après le 7 octobre, des “gardes humanitaires” ont été organisées, s'opposant physiquement aux colons israéliens qui bloquaient le passage de camions apportant de l'aide à Gaza. Des campagnes d'affichage pour montrer la réalité de la guerre ont également été menées. Et des manifestations ont lieu toutes les semaines pour s'opposer à la politique meurtrière de Netanyahou, Smotrich et Ben Gvir.

Ces voix, ainsi que celles d'ONG israélo-palestiniennes, comme Women Wage Peace, Women of the sun, les Combattants pour la paix, et le Cercle des familles endeuillées, doivent être relayées et amplifiées, afin que leurs revendications soient défendues par la communauté internationale, et par la France en particulier.
L'association Les Guerrières de la Paix œuvre également chaque jour sans relâche, sur le terrain, en lien direct avec les activistes de ces ONG pour porter leurs voix.

Comme l'expliquent inlassablement les militants de Standing Together, deux camps s'opposent dans ce conflit, mais ce ne sont pas ceux que l'on nous présente habituellement. En fait, il y a le camp des faiseurs de guerre, composé du gouvernement israélien et du Hamas, et celui de la paix, incarné par les sociétés civiles israéliennes et palestiniennes, dont de larges secteurs refusent la guerre.

Nous appelons donc le gouvernement français à répondre à leur appel, et à mettre en œuvre au plan international les revendications du camp de la paix :

Un cessez le feu immédiat dans la bande de Gaza,
La libération de tous les otages,
La libération des prisonniers palestiniens détenus arbitrairement,
La fin de l'occupation, de la colonisation et de la politique d'apartheid, conformément à la résolution de l'ONU du 18 septembre 2024,
L'opposition à tout projet de nettoyage ethnique,
Un embargo total et immédiat sur les armes, munitions et composants militaires livrés à Israël,
L'entrée massive de l'aide humanitaire aux populations civiles,
La reconnaissance d'un État de Palestine souverain et indépendant,
L'arrestation de Benjamin Netanyahou, Yoav Gallant et les dirigeants du Hamas afin qu'ils soient jugés par la Cour Pénale Internationale pour crimes de guerre et crimes contre l'Humanité.

Un “sommet des peuples pour la paix” s'est tenu à Jérusalem les 8 et 9 mai et fut la plus grande convention de paix jamais tentée au Moyen-Orient. Ce doit être l'occasion pour la communauté internationale d'intensifier la pression sur le gouvernement israélien afin qu'il accepte le plan régional pour la paix soutenu par l'Union européenne, les Nations Unies, les chefs de la Ligue arabe et l'Autorité palestinienne.

Seul un plan pour une paix juste et durable, sur la base d'une égalité de droits, permettra aux peuples palestinien et israélien de vivre en sécurité. Contre les faiseurs de guerre, faisons triompher les bâtisseurs de paix.

Suite à la tribune à l'initiative du Réseau d'Actions contre l'Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR) publiée le 14 mai 2025 dans le Nouvel obs*, le RAAR lance une pétition nationale pour amplifier et promouvoir plus largement les revendications des voix de la paix en Israël et Palestine :

https://www.nouvelobs.com/idees/20250514.OBS103872/israel-palestine-contre-les-faiseurs-de-guerre-construisons-le-chemin-de-la-paix.html

***
Rédacteur :

Réseau d'Actions contre l'Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR)

***
Premiers signataires :

Alexis Corbière, député de la Seine-Saint-Denis ; Geneviève Garrigos, conseillère de Paris, Pierre Tartakowsky, président d'honneur de la LDH, Marine Tondelier, secrétaire nationale Les Ecologistes-EELV, Raymonde Poncet Monge, sénatrice écologiste du Rhône ; François Sauterey, Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples (MRAP) ; Emma Rafowicz, députée européenne, présidente des Jeunes Socialistes ; Christian Picquet, exécutif national du Parti communiste français ; Raquel Garrido, ancienne députée, fondatrice de L'Après ; Corinne Narassiguin, sénatrice de Seine-Saint-Denis ; Aminata Niakaté, porte-parole Les Ecologistes, conseillère de Paris ; Benjamin Stora, historien ; Dominique Soppo, Président de SOS Racisme ; Fabienne Messica, Ligue des Droits de l'Homme ; David Belliard, candidat écologiste à la Mairie de Paris ; Sandrine Rousseau, députée écologiste de Paris ; Karim Ziady, conseiller de Paris délégué ; Sophie Wahnich, directrice de recherche CNRS ; Kader Chibane, président du Pôle Ecologiste Région IDF ; Annie Lahmer, conseillère régionale IDF ; Frédérique Reibell, membre du Raar ; Rachel Lefevre, avocate et membre du Raar ; Lisa Hazan, étudiante et écrivaine ; Aurélien Taravella, conseiller départemental Place publique (31) ; Leila Kennouda, Génération.s 46 ; François Béchieau, secrétaire national du Mouvement des Progressistes, conseiller de Paris ; Gérard Delahaye, CGT UD Paris, collectif confédéral travailleurs migrants, conseil d'administration de la fondation Copernic ; Rosa Bursztein, humoriste ; Natacha Chetcuti-Osorovitz, sociologue ; Philippe Marlière, politiste ; Albert Herszkowicz, membre du Raar ; Philippe Corcuff, professeur des universités en science politique à Sciences-Po Lyon ; Sara Horchani, fondatrice de l'association Libertés-Culture et artiste ; Alain Policar, politiste ; Mohamed-Nour Hayed, écrivain, poète et conférencier franco-syrien ; Claudie Bassi, présidente du MRJ-MOI ; Liliane Turkel, vice-présidente de MRJ-MOI ; Benjamin Bibas, journaliste ; Emmanuel Revah, humoriste, membre du Raar ; Diane Richard, militante féministe ; Paul Lévy, membre du Raar ; Thérèse Filippi, membre du Raar ; Jan Feigenbaum, bibliothécaire militant à Pantin solidaire, à SUD-CT et à la FSU ; Martine Leibovici, membre du Raar ; Lorenzo Leschi, Collectif Golem ; Dan Zisso, Défendre la Démocratie israélienne (membre de la coordination), Jcall et La Paix maintenant ; Ludovic Arberet, syndicaliste ; Zéphyr Isard, cosecrétaire des Jeunes Ecologistes Midi-Pyrénées ; Wassim Allouka, Belgian Friends of Standing Together ; Sylvie Cohen, Amis de Standing Together en France ; Gérard Lévy, conseiller municipal aux Clayes, conseiller communautaire SQY78 ; Gaspard Ringelheim, étudiant ; Aurélien Ringelheim, comédien ; Fouad Benyekhlef, militant associatif (Belgique) ; Sophie Bournazel, syndicaliste CNT ; Aurélie Brenta, Amis de Standing Together ; Marianne de Brunhoff, Amis de Standing Together en France ; David Desmartis, membre du Raar ; Sharon Geczynski, socio-anthropologue ; Mohamed Ghili, Mouvements des progressistes ; Renaud Barne, Belgian Friends of Standing Together ; Lucie Cariès, réalisatrice ; Léo Lévy-Lajeunesse, membre du Raar ; Hélène Henry, militante de la LDH (section-régional-comité national) ; Eva Hadas-Lebel, Les Amis de Standing Together France ; Laure Vermeersch, cinéaste ; Sender Vizel, dessinateur ; Héloïse Godet, actrice, autrice ; Celine Benzekry, retraitée ; Grégory Benzekry, musicien (Dubamix) et syndicaliste ; Martine Lalande, Syndicat de la Médecine générale ; Francis Kandel, Amis de Standing Together en France ; Paule Ouanhnon, EELV ; Julie Palkowski-Amimeur, Amis of Standing Together ; Aurélie Pavis, militante du Raar ; Pierre Philibert, LDH ; Sarah Pinto, professeure ; Nenad Rabrenovic, musicien ; Thibault Moers, enseignant ; Cécile Moscovitz, journaliste ; Andreas Motsch, professeur agrégé, université de Toronto ; Denis Renard, PCF ; Jean-Loup Kastler, conseiller municipal Ferney-Voltaire ; Yoram Krakowski, psychologue ; Antoine Malamoud, L'Après ; Catherine Markstein, Amis de Standing Together ; Rosita Winkler, retraitée, Amis de Standing Together ; Clothilde Ménard, professeure ; Harsh Kapoor ; Yaël Aberdam ; Ben Assor, hôtelier ; Fatima Bendahmane ; Ylhem Benhacene, EELV ; Bernard Bloch ; Charles Bouhanna ; Danielle Bouhanna ; Véronique Bover, culture ; Julien Chanet, membre du Raar ; Jacques Chastrusse, retraité ; Claire Chastrusse ; Frédéric Chastrusse, ingénieur ; Théo Ferroni ; Véronique Friocourt, tech ; Nicole Garosi, membre du Raar ; Estelle Gauron ; Déborah Gol ; Nathan Hancart, université d'Oslo ; Ka In 't Zandt, psychologue ; Hugues Joscaud, retraité ; Maria Kakogianni ; Laetitia Kramarz ; Elise Levy ; Muriel Lutz, bénévole ; Clémence Miellet ; Sandra Naranjo, société civile ; Tù-Tâm Nguyen, bibliothécaire médicale ; Jean-Pierre Rafier ; Simon Rakovsky ; Nadine Raquillet, retraitée ; Romain Roussel ; Lila Routier Dalnoky ; Catherine Saltiel, retraitée ; Julie Samit ; Jérôme Sclafer, médecin ; Anne-Marie Simonpoli, médecin ; Lea Sitbon ; Myriam Suchet ; Shana Weber ; Bastien Zaouche, musicien ; Michèle Zmirou ; Emmanuel Gottlob ; Françoise Balais, attachée culturelle ; Julia Leschi, travailleuse ; Robert Hirsch, membre du Raar ; Daniel Aptekier-Gielibter, membre du RAAR,UJRE ; Johanna Cincinatis, Journaliste ; Lucas Pisano, Étudiant ; Philippe Sultan Copernic ; Alice Timsit, Conseillère de Paris ; Éric Audrain, membre du RAAR, Syndicaliste ; Patrick Vergain, LDH ; David Quesemand, Cinéaste ; Jean-Pierre Fournier, enseignant ; Dominique David, Retraité ; Denis MARX, militant associatif Lyon ; Janette Habel, Politologue ; Sarah Raquillet, Ergothérapeute.

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Israël accélère son plan pour prendre « tout le contrôle » de la bande de Gaza

Pour ne pas perdre le soutien international, le premier ministre Benyamin Nétanyahou annonce parallèlement une reprise minimale de l'aide humanitaire dans l'enclave assiégée et (…)

Pour ne pas perdre le soutien international, le premier ministre Benyamin Nétanyahou annonce parallèlement une reprise minimale de l'aide humanitaire dans l'enclave assiégée et affamée. Son objectif reste la réoccupation de Gaza et le nettoyage ethnique. Le Canada, la France et le Royaume-Uni disent lundi soir s'opposer « fermement à l'extension des opérations militaires israéliennes à Gaza ».

Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
19 mai 2025

Par Rachida El Azzouzi

« Nos meilleurs amis dans le monde – des sénateurs que je connais comme de fervents partisans d'Israël – ont prévenu qu'ils ne pourraient pas nous soutenir si des images de famine massive apparaissaient […]. Nous devons éviter la famine tant pour des raisons pratiques que diplomatiques. Sans soutien international, nous ne pourrons pas mener à bien notre mission victorieuse. »

Ce message a été diffusé par le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, qui cède ainsi aux pressions de ses plus précieux soutiens, notamment les États-Unis, pour mieux atteindre ses objectifs : dérouler son plan dévoilé le 5 mai, qui passe par la prise de contrôle « de tout le territoire » de la bande de Gaza, et le déplacement de la plupart de ses 2,4 millions d'habitant·es vers l'extrême sud du territoire. Ni plus ni moins qu'une annexion, et un nettoyage ethnique, en violation flagrante du droit international, allègrement bafoué depuis plus d'un an et demi par le gouvernement le plus extrémiste de l'histoire d'Israël.

Dans une vidéo publiée sur son compte Telegram, Nétanyahou a confirmé lundi 19 mai son feu vert de la veille : il a autorisé « une aide humanitaire minimale – nourriture et médicaments uniquement – » pour ne pas perdre le soutien international, alors qu'une famine généralisée menace Gaza après près de trois mois du plus long blocus qu'ait connu l'enclave, où l'armée israélienne intensifie depuis ce week-end sa guerre génocidaire. Depuis le 2 mars, plus rien n'entre dans le territoire anéanti et affamé. Tout est bloqué : l'aide humanitaire, les médicaments, le carburant, la nourriture.

« Nous sommes engagés dans des combats intenses et de grande ampleur à Gaza, et nous progressons », a déclaré Benyamin Nétanyahou, promettant « d'agir de manière à ce que personne ne puisse […] arrêter [Israël] ». Le ministre des finances d'extrême droite, Bezalel Smotrich, a appuyé ses déclarations, affirmant qu'Israël « détruisait tout ce qu'il reste de la bande de Gaza » et que « l'armée ne ménageait aucun effort ». Il a ajouté : « Nous conquérons, purifions et restons à Gaza jusqu'à la destruction du Hamas. »

Depuis la reprise des attaques israéliennes sur Gaza le 18 mars et la rupture d'un cessez-le-feu de deux mois, « la situation est pire que jamais », témoigne auprès de Mediapart un travailleur humanitaire palestinien par messagerie WhatsApp. « Plusieurs enfants sont morts de malnutrition, tandis que beaucoup d'autres sont toujours hospitalisés pour recevoir des soins. Nous subissons actuellement des pénuries alimentaires et des prix exorbitants. »

La litanie macabre du bilan quotidien des bombardements israéliens qui tuent ou mutilent la population s'élève ces derniers jours à plusieurs centaines de victimes, dont des dizaines d'enfants. Au total, au moins 53 339 personnes ont été tuées à Gaza, en majorité des civils, selon les dernières données du ministère de la santé à Gaza.

Ordres d'évacuation

Les personnalités politiques israéliennes les plus fanatiques s'en frottent les mains, à l'image du député Zvi Sukkot, qui s'enorgueillissait vendredi 16 mai, dans une émission de débat à la télévision israélienne, et alors que des dizaines de Palestinien·nes avaient été tué·es la veille au soir : « Tout le monde s'est habitué à ce que l'on puisse tuer 100 Gazaouis en une nuit, en temps de guerre, et tout le monde s'en fiche. »

Lundi 19 mai, au lendemain d'un week-end meurtrier, la défense civile de Gaza a annoncé la mort de plus d'une vingtaine de personnes dans des bombardements à Khan Younès, notamment autour de l'hôpital Nasser, au sud du territoire (les hôpitaux demeurent des cibles). C'est dans ce gouvernorat notamment qu'Israël entend en partie déployer son opération militaire de grande ampleur pour réoccuper le territoire et instaurer une présence durable, baptisée « Chariots de Gédéon », en référence au personnage biblique.

L'armée israélienne a ainsi appelé lundi 19 mai au matin des habitant·es de l'enclave à évacuer divers secteurs du sud de la bande de Gaza. « À l'attention des habitants du gouvernorat de Khan Younès, Bani Suheila et Abasan : l'armée de défense israélienne va lancer une offensive sans précédent pour détruire les capacités des organisations terroristes dans cette zone. Vous devez évacuer immédiatement vers l'ouest », a écrit en arabe Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne sur Telegram. « À partir de maintenant, le gouvernorat de Khan Younès est considéré comme une zone de combat dangereuse », a-t-il ajouté.

Parallèlement, Israël mène des pourparlers indirects, qui n'ont guère de chances d'aboutir, pour un cessez-le-feu avec le Hamas.

Lundi soir, dans un communiqué transmis par l'Élysée, la France, le Royaume-Uni et le Canada ont haussé le ton face à la politique israélienne. Les quatre pays disent s'opposer « fermement à l'extension des opérations militaires israéliennes à Gaza » et jugent « le niveau de souffrance humaine à Gaza intolérable ». « Nous demandons au gouvernement israélien d'arrêter ses opérations militaires à Gaza et d'autoriser immédiatement l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza », déclarent les trois pays.

« Nous ne resterons pas les bras croisés pendant que le gouvernement Nétanyahou poursuit ces actions scandaleuses. Si Israël ne met pas fin à la nouvelle offensive militaire et ne lève pas ses restrictions sur l'aide humanitaire, nous prendrons d'autres mesures concrètes en réponse », ajoute le texte, qui se conclut par la réaffirmation de leur détermination « à reconnaître un État palestinien ».

Les ONG court-circuitées

L'incertitude demeure totale quant à la reprise très limitée de l'aide humanitaire et à ses modalités de distribution, alors que les ONG alertent toutes depuis des semaines sur le risque de « famine de masse », et que le chef de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a de nouveau sonné l'alarme lundi, à l'ouverture de la réunion annuelle des États membres de l'organisation à Genève.

La diplomatie israélienne a annoncé lundi 19 mai que des camions transportant de la nourriture pour bébé allaient être autorisés à passer et que, « dans les jours à venir, Israël [faciliterait] l'entrée de dizaines de camions d'aide ». Mais aucune date précise n'a été donnée. Le bureau des affaires humanitaires de l'Organisation des Nations unies (Ocha) a confirmé « être en pourparlers avec les autorités israéliennes sur la façon dont cela se déroulerait compte tenu des conditions sur le terrain ».

Des sources évoquent une trentaine de camions, ce qui est dérisoire au vu des besoins humanitaires immenses dans l'enclave, et alors que des tonnes de nourriture sont bloquées à la frontière.

Le ministre des finances suprémaciste, Bezalel Smotrich, a, de son côté, réaffirmé qu'une entreprise civile américaine commencerait bientôt à distribuer une « aide minimale » à Gaza directement aux civils, sans passer par le Hamas. « Pas un seul grain n'atteindra le Hamas ni ne mettra en danger nos soldats », a-t-il déclaré.

Smotrich fait référence à la très controversée Gaza Humanitarian Foundation (GHF). Enregistrée à Genève (Suisse) au début de l'année 2025 et fondée par les États-Unis, principaux alliés militaires d'Israël, elle inquiète les ONG, qui doutent de son impartialité. Aux contours encore flous, cette structure vise à court-circuiter les organisations humanitaires traditionnelles, avec le soutien de l'administration américaine et grâce à des accords privilégiés avec les autorités israéliennes. Elle a annoncé mi-mai qu'elle entendait commencer à distribuer de l'aide dans la bande de Gaza assiégée d'ici la fin du mois.

Dans un message posté sur Telegram, le ministre de la sécurité nationale, autre figure de l'extrême droite israélienne, Itamar Ben Gvir, qui permet à Nétanyahou de se maintenir au pouvoir, a dénoncé la reprise de l'aide humanitaire, une « décision prise […] dans l'urgence », qui est une « grave erreur » et qui donnera « de l'oxygène » au Hamas. Smotrich lui a répondu indirectement en l'accusant de « mélange de populisme de la part de quelqu'un qui cherche toujours à être plus à droite que la droite »…

Vingt-deux pays, dont la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Canada, le Japon et l'Australie, ont exigé lundi d'Israël une « reprise complète de l'aide à la bande de Gaza, immédiatement », demandant qu'elle soit organisée par les Nations unies et les ONG. L'ONU et les organisations humanitaires « ne peuvent pas soutenir » le nouveau modèle pour la livraison de l'aide à ce territoire palestinien décidé par le gouvernement israélien, ont écrit les services diplomatiques de ces pays dans une déclaration commune transmise à l'AFP par le ministère allemand des affaires étrangères.

Rachida El Azzouzi

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Nés d’une résistance : nous sommes un journal à Kyiv, et voici notre histoire

27 mai, par The Kyiv Independent — , ,
Si vous lisez Mediapart, il y a de fortes chances que vous vous intéressiez au journalisme qui ne répond pas aux pressions politiques ou économiques. Ici, au Kyiv Independent, (…)

Si vous lisez Mediapart, il y a de fortes chances que vous vous intéressiez au journalisme qui ne répond pas aux pressions politiques ou économiques. Ici, au Kyiv Independent, nous sommes faits du même bois. Nous sommes un journal ukrainien sans paywall, sans propriétaire et sans influence extérieure, soutenue par sa communauté.

Tiré du blogue de l'auteur.

Nous sommes une rédaction basée à Kyiv, en Ukraine. Nous racontons la guerre à grande échelle menée par la Russie depuis l'intérieur du pays qu'elle tente activement de détruire. Et nous le faisons en anglais, pour que le monde entier puisse comprendre ce qui se passe - directement par la voix des journalistes ukrainiens sur le terrain.

Cette semaine, Mediapart nous a généreusement offert un espace pour partager notre histoire et inviter ses lecteur·ices à soutenir le journalisme indépendant d'Ukraine à un moment où il est le plus important.

Nous avons récemment lancé une campagne visant à agrandir notre communauté mondiale de membres. Notre objectif est d'atteindre 20 000 membres - et nous voulons expliquer pourquoi c'est important et comment nous en sommes arrivés là.

Un journal né d'une résistance

The Kyiv Independent a été lancé en novembre 2021 par un groupe de journalistes licenciés du Kyiv Post, le plus ancien journal ukrainien en langue anglaise, pour avoir résisté à des volontés d'ingérence dans leur travail.

Plutôt que d'abandonner, nous avons commencé quelque chose de nouveau. Un journal indépendant dès sa conception - n'appartenant pas à un milliardaire, n'étant pas lié à un État ou à un oligarque, et n'étant pas enfermé derrière un paywall.

Nous nous sommes lancés avec une petite équipe et une mission simple : offrir à nos lecteur.ices un journalisme précis et fiable en provenance d'Ukraine, avec une liberté éditoriale totale. Nous ne nous attendions pas à ce que, trois mois plus tard, la Russie lance une invasion à grande échelle.

Lorsque la guerre a commencé, nous avons continué à faire des reportages, souvent depuis des sous-sols, des abris anti-bombes ou en nous déplaçant d'une ville à l'autre. En quelques semaines, des millions de personnes ont lu notre travail. Aujourd'hui, nous sommes l'une des sources de journalisme en langue anglaise les plus fiables d'Ukraine.

Pourquoi nous comptons sur nos lecteur·ices

Aujourd'hui, The Kyiv Independent est une équipe de près de 70 personnes, dont des journalistes, des rédacteur.ices, des gestionnaires et des producteurs basés pour la plupart en Ukraine. Nous rendons compte de la guerre, mais aussi de la politique européenne, de la culture ukrainienne, de la corruption, des droits de l'Homme, des affaires et de l'économie, de la désinformation et de la réalité quotidienne d'une invasion à grande échelle.

Mais ce qui nous différencie, ce n'est pas seulement ce que nous racontons, c'est aussi la manière dont nous sommes financés.

Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire. Nous ne recevons pas d'argent de l'État ukrainien. Et nous n'avons pas de paywall.

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Nous nous concentrons particulièrement sur des pays comme la France, où le soutien à l'Ukraine et au journalisme indépendant ne va pas de soi, mais où nous avons constaté une réelle solidarité et des lecteur.ices qui se soucient profondément de la liberté de la presse.

C'est pourquoi nous prenons la parole ici sur Mediapart. Nous considérons ce partenariat non seulement comme une tribune, mais aussi comme une mission commune. Nous savons que les lecteur.ices de Mediapart soutiennent les mêmes principes que nous : l'indépendance éditoriale, la recherche de la vérité et un journalisme au service du public et non du pouvoir.

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Primaire de la gauche : « Il faut que ça décolle sinon on va s’emmerder »

27 mai, par Regards.fr — , ,
François Ruffin, député Picardie Debout de la Somme, est l'invité de #LaMidinale. Pablo Pillaud-Vivien fait cette entrevue avec François Ruffin. 21 mai | tiré de Regards.fr (…)

François Ruffin, député Picardie Debout de la Somme, est l'invité de #LaMidinale. Pablo Pillaud-Vivien fait cette entrevue avec François Ruffin.

21 mai | tiré de Regards.fr
https://www.youtube.com/watch?v=W7jrIMqmo9I&list=PLJjNfOGIs5-uydm58YFs0qu9nIW_mO4yC

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Pour un Arctique libre et démilitarisé – Défendre l’indépendance du Groenland – Défendre le peuple groenlandais et la nature

27 mai, par Socialistisk Arbejderparti — , , ,
Avec les demandes répétées de Donald Trump pour que les États-Unis prennent le contrôle du Groenland, et les déclarations de son vice-président J. D. Vance sur le nombre de (…)

Avec les demandes répétées de Donald Trump pour que les États-Unis prennent le contrôle du Groenland, et les déclarations de son vice-président J. D. Vance sur le nombre de militaires américains présents sur le territoire, la compétition impérialiste autour du Groenland a franchi une nouvelle étape décisive.

20 mai 2025 tiré de la revue International Viewpoint | Photo : Le vice-président des États-Unis J. D. Vance et son épouse Usha Vance posent avec le personnel de la base spatiale de l'armée américaine Pituffik, au Groenland, le 28 mars 2025.
https://internationalviewpoint.org/spip.php?article9006

Le long combat pour protéger l'Arctique et les peuples inuits contre la guerre et la militarisation traverse une crise profonde. La menace d'une course aux armements au sommet du monde, et d'une nouvelle ruée effrénée vers les ressources naturelles de la population locale, menace non seulement l'existence des Groenlandais·es, mais aussi celle du monde entier. La plus grande garantie de paix et la seule gestion viable de l'Arctique résident dans les organisations et instances représentatives des peuples autochtones, y compris le Parlement groenlandais, l'Inatsisartut, et le Conseil circumpolaire inuit.

Trump dit tout haut ce que l'impérialisme danois « poli » cherche à dissimuler : que dans la logique du capitalisme, les pays, les personnes et les peuples sont, au mieux, des marchandises – au pire, des butins de guerre. C'est pourquoi l'exigence de Trump de renégocier l'alliance vieille de près de 200 ans entre les bourgeoisies danoise et américaine a plongé le Danemark dans une hystérie coloniale complète. Le summum de cette hystérie est sans doute la censure du documentaire sur l'exploitation minière de cryolithe par le Danemark, retiré d'internet cette semaine sous une pression politique évidente impliquant les plus hauts niveaux de l'État. Cette censure profondément partiale, accompagnée de la suppression des sources, rend désormais difficile, voire impossible, pour de nombreux·ses citoyen·nes de s'orienter dans un débat de société crucial.

L'importance de la cryolithe

La panique bourgeoise au Danemark doit être comprise à la lumière de l'immense richesse que les capitalistes danois ont réussi à piller au Groenland par l'extraction de cryolithe. Malgré le fait que l'État danois ait fait payer les capitalistes danois pour leur permettre de voler les ressources minières du Groenland, les héritiers de Theobald Weber (fondateur de l'usine de cryolithe de l'Øresund) ont chacun touché un rendement d'au moins 40 % du million reçu à la mort de leur père. De tels revenus ne proviennent pas d'activités économiques normales, mais uniquement de monopoles et de rentes coloniales. La réinjection de ces profits a bâti le Danemark tel que nous le connaissons aujourd'hui. C. F. Tietgen, le parrain de la bourgeoisie danoise moderne, est à l'origine de la construction de la mine d'Ivittuut. L'extraction de cryolithe doit donc être considérée comme une étape décisive de l'accumulation primitive qui a permis la transformation du Danemark en société industrielle.

Sans la cryolithe, l'aluminium ne serait probablement jamais devenu un métal d'usage courant, et ses potentialités n'auraient pas profité à l'humanité. Le Danemark et les États-Unis se sont partagé les profits de l'exploitation de la cryolithe plus ou moins équitablement. Pour les États-Unis, elle a permis le développement rapide de leur aviation militaire, qui, depuis la Seconde Guerre mondiale, leur garantit une influence décisive sur le marché mondial. La richesse et la puissance qui en ont découlé ne peuvent être quantifiées. Ce que valait le fait d'avoir un lieu unique au monde où ces minéraux rares étaient disponibles à ciel ouvert – utilisés par la population locale pour tanner les peaux – s'est perdu dans les débats éthiques historiques. Comme d'autres peuples colonisés, les Inuit du Groenland se retrouvent avec un trou dans le sol là où auraient pu se poser les bases du développement de leur propre société et de leur propre économie.

Colonialisme aux États-Unis – et au Danemark

La revendication brutale de Trump pour le contrôle du Groenland n'est que la poursuite du raisonnement colonial, impérial et raciste qui a longtemps défini les politiques danoise et américaine envers le Groenland. Grâce à une longue et difficile lutte politique, le peuple groenlandais a conquis des droits juridiques et formels à l'indépendance. Mais l'impérialisme américain voit d'un œil profondément suspicieux toute formation étatique autochtone. C'est pourquoi, même sous direction démocrate, les États-Unis ont œuvré activement à influencer l'élite groenlandaise et à l'arrimer aux intérêts américains.

Le simple fait que cette exploitation soit aujourd'hui révélée déclenche une hystérie coloniale au Danemark, où le racisme colonial envers nos concitoyen·nes groenlandais·es se déchaîne librement – notamment à travers des idées selon lesquelles l'indépendance du Groenland devrait avoir des conséquences pour les Groenlandais·es vivant au Danemark. Il faut rejeter catégoriquement que le statut du Groenland ait la moindre incidence sur celles et ceux qui vivent au Danemark et font partie de la société danoise. Il est également profondément critiquable que le gouvernement danois, qui affirme pourtant soutenir le slogan groenlandais « Rien sur le Groenland sans le Groenland », ait sillonné l'Europe – sans le Groenland – pour obtenir un appui à la défense du « Royaume » ! Le gouvernement groenlandais est parfaitement capable de négocier les questions de sécurité – comme il le fait déjà pour les concessions et le commerce.

Nos tâches

La classe ouvrière danoise et la gauche ont une responsabilité particulière envers le peuple groenlandais. Il est malheureusement vrai qu'une complaisance marquée a caractérisé une grande partie du mouvement ouvrier danois à l'égard des Groenlandais·es. À quelques exceptions près, trop d'entre nous ont estimé qu'il suffisait de « laisser les Groenlandais décider », évitant ainsi d'avoir à affronter les questions historiques et contemporaines complexes qui concernent le Groenland. Il faut remédier à cela.

Cela commence par l'organisation de débats sur l'histoire et la réalité actuelle du Groenland, en invitant des activistes et des Groenlandais·es vivant au Danemark à partager leurs analyses et points de vue – pas seulement sur le Groenland, mais dans toute la société danoise. Nous pouvons le faire dans tous les milieux où nous sommes actifs. En parallèle, nous voulons que l'enseignement de l'histoire du Groenland et du colonialisme danois soit intégré aux programmes scolaires. Aucun enfant ne devrait voir l'Église de marbre sans savoir qu'à l'époque de son achèvement, elle était aussi surnommée « la mine d'aluminium ».

Nous devons également approfondir notre compréhension des conflits postcoloniaux et des angles morts des populations colonisatrices, notamment parmi les classes populaires. Un exemple monstrueux de cette ignorance est visible lorsque des « experts économiques » s'autorisent à vitupérer, presque sans contradiction, contre l'évaluation de la valeur brute d'une matière première (la cryolithe) comme mesure de ce qu'un pays colonisateur a pris à un pays colonisé. Même si des chercheurs en colonialisme soulignent la pertinence de cet indicateur – puisque pratiquement toute cette valeur a été transférée du PIB groenlandais à celui du Danemark. Il faut également accorder une attention particulière à la question des droits reproductifs et aux efforts délibérés de l'État danois pour empêcher la naissance d'une demi-génération d'enfants groenlandais.

Revendications pour soutenir la lutte des Groenlandais·es pour l'indépendance

Tout en soutenant pleinement le désir d'indépendance du Groenland et en comprenant que les Groenlandais·es ne peuvent croire à un traitement égalitaire, nous voulons entretenir les meilleures relations possibles avec le peuple groenlandais. Nous sommes liés non seulement par l'histoire, mais aussi par des relations familiales et d'amitié. Toutefois, ce désir n'a de sens que si le Groenland est soutenu dans sa pleine maîtrise de son territoire, et nous devons exiger qu'aucune pression économique ne soit exercée pour influencer les choix politiques du peuple groenlandais. De même, nous exigeons que les déplacements entre le Danemark et le Groenland soient rendus abordables pour toutes les personnes ayant de la famille au Groenland. Nous nous opposerons à toute indépendance contrainte par des concessions destructrices ou par des pressions militaires. Nous rejetons aussi toute démarche visant à court-circuiter le peuple groenlandais au profit d'élites réduites.

Nous exigeons donc que le Groenland ait un accès complet et sans entrave à toutes les études sur son sous-sol, et que tous les accords militaires concernant l'Arctique soient soumis à la population arctique. Lorsque l'État danois et la bourgeoisie danoise continuent de clamer combien il est « difficile » de faire de l'argent avec le pillage de l'Arctique, nous exigeons que tous les comptes soient publiés, y compris les paiements de dividendes.

Le développement d'un programme digne de ce nom concernant la relation entre le Groenland et le Danemark, ancienne puissance coloniale, doit se faire avec la pleine implication et l'indépendance du Groenland. Nous saluons à ce titre la contribution de la gauche danoise au parti Inuit Ataqatigiit, et nous leur souhaitons bonne chance pour les élections.

23 février 2025

Traduit par SAP à partir de [Socialistisk Information → https://socinf.dk/for-et-frit-og-afmilitariseret-arktis-forsvar-groenlands-selvstaendighed-forsvar-den-groenlandske-befolkning-og-natur/.**]

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Portugal. « PS menacé, BE et PCP marginaux : les quatre cartes qui montrent la droitisation »

27 mai, par Liliana Borges — , ,
Une nuit noire [du dimanche 18 au lundi 19 mai] pour le PS, un recul de la gauche (à l'exception de Livre – écologistes), une majorité plus importante pour l'Alliance (…)

Une nuit noire [du dimanche 18 au lundi 19 mai] pour le PS, un recul de la gauche (à l'exception de Livre – écologistes), une majorité plus importante pour l'Alliance démocratique [AD-droite] et une victoire qui devrait encore s'accroître pour Chega [Assez !, extrême droite]. Le résultat des élections anticipées [après la démission du gouvernement de Luis Montenegro, suite à un vote de confiance lié au débat sur un « conflit d'intérêts », le 11 mars au soir] n'est pas encore définitif et attend l'attribution des quatre mandats par les circonscriptions d'émigration [le 21 mai à 14h le résultat du dépouillement des votes dans les consulats n'est pas disponible]. Mais le tableau est tracé. Le pays a changé, le rose a pâli et la fin du bipartisme décrétée il y a un an s'est imposée.

21 mai 2025 | tiré du site alencontre.org
https://alencontre.org/divers/portugal-ps-menace-be-et-pcp-marginaux-les-quatre-cartes-qui-montrent-le-nouveau-pays-a-droite.html

Avec 20 députés de moins, le PS réalise son troisième plus mauvais résultat au législatif depuis 1975, passant de 28,66% (en 2024) à 23,38% et risquant, une fois les votes de l'émigration comptés, de devenir le troisième parti au Parlement, derrière Chega. La chute est désastreuse.

Le PS perd 107 concelhos

Si, en 2024, le PS était le parti le plus voté dans 140 communes/municipalités [concelhos : subdivision des districts/circonscriptions électorales : au nombre de 22], le dimanche 21 mai ce chiffre est tombé à 33. En plus d'avoir perdu la première place dans 107 concelhos (dont 58 sont passées à l'AD et 49 à Chega) du nord au sud du pays, dans 60 concelhos les socialistes n'ont même pas atteint 20% des voix, ce qui, sur un total de 308 concelhos, équivaut à environ un cinquième du pays. Dans les circonscriptions de Beja et Setúbal, le PS n'avait pas perdu depuis 1991.

Le pire résultat du PS a été enregistré dans le concelho de Calheta, dans circonscription de Madère, où les socialistes ont obtenu seulement 7,7% des voix. La Calheta était déjà le concelho où le PS avait obtenu son pire résultat en 2024, mais cette année il a perdu encore plus de voix, tandis que Chega est passé de 9,3% à 17% des voix. Ce n'est que dans les circonscriptions de Bragança, Portalegre, Evora, Beja et Setúbal que le PS a réussi à obtenir plus de 20% des voix dans au moins un concelho.

Avec la progression de Chega de 18,06% à 22,56% des voix sur l'ensemble du territoire national, le nombre de concelhos dans lesquelles le parti a obtenu plus de 30% des voix a également augmenté (avec notamment la circonscription de Faro, où dix concelhos ont dépassé la barre des 30%, comme Vila Real de Santo António, Portimão et Albufeira). Au total, Chega a obtenu plus de 30% des voix dans 37 concelhos.

Chega franchit la barre des 30%

Dans la circonscription de Faro, où le parti avait déjà été le plus voté en 2024, s'ajoutent désormais les circonscriptions de Beja, Portalegre et Setúbal, consolidant ainsi l'implantation de Chega dans le sud du pays. Dans le nord du pays, Chega n'a obtenu plus de 30% des voix que dans un seul concelho : Valença, dans la circonscription électorale de Viana do Castelo. Mais dans le sud, il reste très fort. Il y a un an, le meilleur résultat du parti avait été obtenu à Elvas avec 36,53% des voix. Ce dimanche 18 mai, le parti a réitéré cet exploit, mais a augmenté le nombre de voix à 43,51% du total recueilli dans ce concelho.

L'Iniciativa Liberal (IL) a quant à elle réussi à se hisser à la quatrième place des partis les plus représentés au Parlement, en élisant un député supplémentaire (elle en compte désormais neuf), même si la progression en termes de voix n'a pas été très significative (de 5,08% à 5,53%). Les libéraux ont obtenu leurs meilleurs résultats dans la zone côtière du pays, avec 60 concelhos enregistrant plus de 5% de leurs suffrages en faveur de l'IL. Le parti de Rui Rocha a obtenu son meilleur résultat à Oeiras [région métropolitaine de Lisbonne], où il a presque doublé le nombre de votes par rapport à la moyenne nationale : 9,7 %. A Braga, où Rui Rocha était tête de liste, à Lisbonne et à Cascais, les libéraux ont également obtenu plus de 9% des votes.

La quatrième place au Parlement était encore convoitée par Livre [écologistes], mais il n'a obtenu que six députés (trois pour Lisbonne, deux pour Porto et un pour Setúbal). Malgré cela, il a été le seul vainqueur à gauche, dépassant la CDU (Coalition démocratique unitaire, PC et les Verts-Os Verdes) et le BE (Bloco de Esquerda, Bloc de gauche) et augmentant sa représentation parlementaire de deux députés. Livre a gagné 50 000 voix, passant de 3,26% à 4,2%, et a dépassé sa moyenne nationale dans 40 concelhos. Cela s'est produit dans les circonscriptions électorales de Braga, Porto, Coimbra, Leiria, Aveiro, Lisbonne, Setúbal et Faro. Le meilleur résultat a été obtenu à Lisbonne, avec 9,4% des voix, suivie par Oeiras, Porto et Almada [district de Lisbonne].

La croissance de Livre s'est particulièrement marquée sur le littoral du pays, mais il a également progressé dans la circonscription de Faro. Livre, qui est entré au Parlement pour la première fois en 2019, a devancé le BE dans 18 circonscriptions et la CDU dans six. Rui Tavares avait également pour ambition d'être élu à Braga et Aveiro et de ravir des députés à Rui Rocha (IL), mais il n'y est pas parvenu. Néanmoins, Livre a réussi à devancer l'IL, en particulier dans les circonscriptions de Beja, Setúbal, Evora, Castelo Branco et Coimbra.

Tout comme le PS, la Coalition démocratique unitaire (CDU) et le Bloc de gauche (BE) ont également vu leur représentation parlementaire diminuer. La plus grande perte a été celle du BE, qui a été réduit à une seule députée : l'actuelle coordinatrice du parti, Mariana Mortágua. La CDU recule également, mais dans une moindre mesure. La coalition qui réunit le PCP et Os Verdes n'a réélu que des députés communistes.

Dans le nord et le centre, on observe une prédominance significative des concelhos où le total des votes du BE et de la CDU ne dépasse pas 3% du total des votes enregistrés. Cette tendance met en évidence la faible implantation électorale de ces forces politiques dans ces régions, contrairement au sud du pays, où, bien que Chega ait progressé en termes de votes, le BE et la CDU restent au-dessus de leur moyenne nationale.

Bragança et les îles les plus abstentionnistes
Avec les votes de l'émigration encore à compter, le taux d'abstention s'élève à 35,62%, légèrement supérieur à celui enregistré en 2024. Toutefois, ce chiffre devrait augmenter, car c'est la tendance observée ces dernières années. Selon les données du secrétariat général du ministère de l'Intérieur, parmi les 20 circonscriptions électorales déjà dépouillées, 17 ont enregistré des concelhos où l'abstention a été supérieure à la moyenne nationale. C'est le cas des Açores, de Madère [45,69% d'abstention] et de Bragance [47,29% d'abstention], par exemple, où aucune commune n'a enregistré une participation supérieure à la moyenne nationale.

Les Açores restent la circonscription électorale avec le taux d'abstention le plus élevé aux élections législatives : 56,19 % des électeurs ne se sont pas rendus aux urnes. Braga est quant à elle la circonscription avec le taux d'abstention le plus faible : 30,29 %. En termes de concelhos, Ribeira Grande a été le concelho le plus abstentionniste, avec 62,34%. Le Sardoal, à Santarém, a été le concelho avec le taux d'abstention le plus faible : 26,95 %. (Article publié par le quotidien Publico le 19 mai 2025 ; traduction rédaction A l'Encontre)

PS : Nous publierons dans les jours qui viennent le message adressé aux membres du Bloco par la commission politique (21 mai) et l'analyse que le BE fait des élections et de la situation.

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Stop austérité : de l’argent pour le non-marchand !

27 mai, par Gauche anticapitaliste — , ,
Nous publions ci-dessous la version longue du tract que nous distribuerons lors de la grève-manifestation du secteur non marchand, ce jeudi 22 mai à Bruxelles, lors de laquelle (…)

Nous publions ci-dessous la version longue du tract que nous distribuerons lors de la grève-manifestation du secteur non marchand, ce jeudi 22 mai à Bruxelles, lors de laquelle nous marcherons au sein du bloc de Commune Colère. Le tract est également disponible en version courte et bilingue fr/nl au format PDF en cliquantici.

19 mai 2025 | tiré du site de la Gauche anticapitaliste
https://www.gaucheanticapitaliste.org/stop-austerite-de-largent-pour-le-non-marchand/

Face à la casse sociale programmée par l'Arizona et les autres niveaux de pouvoirs, il est urgent de nous unir pour lutter. Cette manifestation est un point de convergence pour toutes les luttes en cours depuis l'arrivée du nouveau gouvernement. La santé, le social, les services publics, l'enseignement, la culture, l'associatif : servons-nous de ce moment pour amplifier la résistance et la faire durer. Toustes dans la rue le 22 mai : l'Arizona veut la guerre de classe, les travailleur·euses ripostent en masse !

Alors que le secteur non-marchand se mobilise massivement depuis plusieurs années(1) pour un refinancement et des conditions de travail dignes, le gouvernement Arizona et ses émanations régionales en Flandre et en Wallonie dessinent une offensive sociale de grande ampleur contre les travailleur·euses du secteur. Dans la santé, la norme de croissance prévue par le fédéral est insuffisante pour répondre aux besoins réels, malgré les fausses promesses de Vooruit ou des Engagés ; les subsides des structures associatives sont rabotés ou menacés d'austérité alors que le secteur est déjà sous-financé ; la petite enfance, en lutte depuis des années contre la pénurie de personnel et pour une révision de la norme d'encadrement, voit ses revendications reportées indéfiniment (alors que le taux de couverture atteint à peine 40% en FWB). Par ailleurs, si les travailleur·euses des arts sont parvenu·es à faire reculer l'Arizona sur le statut d'artiste, les conditions d'octroi de ce statut seront désormais plus strictes. La culture est toujours l'objet d'une offensive trumpiste de George-Louis Bouchez.

De façon plus générale, les graves attaques contre l'ensemble des travailleur·euses (offensives contre les pensions et les allocations sociales, flexibilisation du travail, …) impacteront de plein fouet les femmes*, et toucheront particulièrement un secteur déjà précarisé par des décennies d'austérité néolibérale, dans lequel la pénibilité des conditions de travail cause de nombreuses souffrances, physiques et psychiques.

La plupart de ces métiers ont en commun de concerner le soin, c'est-à-dire de répondre aux besoins sociaux, affectifs, relationnels et éducationnels de la population. Ces fonctions indispensables à la société sont majoritairement portées par des femmes*, comme l'illustre la large féminisation du secteur : la défense du non-marchand est un enjeu féministe et sociétal majeur. En s'attaquant à ce secteur, les gouvernements s'en prennent non seulement aux travailleur·euses, mais également aux usager·ères, qui dépendent de ces structures pour des besoins vitaux : nous sommes toustes concerné·es ! Par leur mépris et leurs sous-financements, l'Arizona et les coalitions régionales illustrent bien la nature de leurs programmes, conformes aux intérêts des capitalistes et en faveur d'un monde soumis à la loi du profit, dans lequel les humain·es n'ont de valeur que s'iels sont productif·ves pour le capital !

Les secteurs de la culture et de l'enseignement se mobilisent déjà depuis plusieurs mois contre la guerre sociale orchestrée par la droite ; la petite enfance était en grève le 16 avril, et le secteur associatif porte de son côté de plus en plus sa voix parmi les mobilisations : nous plaidons pour que la manifestation du 22 mai crée un espace de convergence pour toutes ces revendications et constitue une nouvelle impulsion dans le cadre du plan d'action contre les gouvernements de droite, vers la chute de l'Arizona !

Nous revendiquons :

  • Le financement massif et structurel des services publics et non-marchands, à hauteur des besoins (crèches, santé, éducation, culture, services sociaux, infrastructures d'accueil, homes).
  • Recrutement massif pour alléger la charge de travail et pour améliorer les services, allant de paire avec une réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauche compensatoire.
  • Une sécurité financière pour toustes : pensions pour toustes ; augmentation des allocations sociales garantissant ainsi une vie digne pour chacun·e ; fin du statut de cohabitant÷e ; fin des temps partiels imposés qui maintiennent dans la précarité économique.
  • Un système de soin soustrait aux logiques de marché : assurant la gratuité des soins, capable de prendre en compte les réalités des femmes*, des personnes racisées, des personnes sans-papier et des personnes LGBTI+ et orienté en fonction des besoins grâce à une planification démocratique.
  • Une société du prendre soin où les fonctions de soins (crèche, soins aux malades, aux personnes âgées,…) ne sont plus assurées majoritairement par les femmes mais collectivisées.
  • Une école qui répond à nos besoins et non ceux du capital : ouverte, démocratique et émancipatrice.
  • La fin des politiques migratoires racistes et la régularisation sans condition de toutes les personnes sans-papiers pour mettre fin à leur exploitation et garantir un accès complet aux soins et aux droits sociaux.
  • Dehors l'Arizona : pour une alliance large des mouvements sociaux et des syndicats, en défense d'une autre société : solidaire, démocratique, féministe, anti-raciste et écologiste !
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L’accord sur les minerais est-il bénéfique pour l’Ukraine ?

Aujourd'hui, la Verkhovna Rada vote la ratification de l'accord entre les gouvernements de l'Ukraine et des États-Unis sur la création du Fonds d'investissement pour la (…)

Aujourd'hui, la Verkhovna Rada vote la ratification de l'accord entre les gouvernements de l'Ukraine et des États-Unis sur la création du Fonds d'investissement pour la reconstruction américano-ukrainienne. Malgré les promesses bruyantes de « partenariat » et d'« investissement », le document suscite de sérieuses inquiétudes.

8 Mai 2025 | tiré du site Arguments pour la lutte sociale
https://aplutsoc.org/2025/05/08/declaration-du-sotsialnyi-rukh-sur-laccord-sur-les-terres-rares/

L'accord, signé le 30 avril, reflète la volonté du capital américain d'accéder sans entrave au sous-sol ukrainien. Dans le même temps, la partie ukrainienne bénéficie de beaucoup moins de droits et d'opportunités. Le document stipule que l'accord prime sur la législation ukrainienne, ce qui limite la capacité à protéger les intérêts nationaux. Les entreprises américaines pourront retirer leurs bénéfices d'Ukraine sans entrave.

Tout cela s'inscrit dans des conditions où le processus d'approbation a été mené en secret, sans débat public. Aucun accord supplémentaire n'a encore été rendu public et il n'existe pas d'évaluation d'experts du projet. Cela porte atteinte à la légitimité de l'accord et prive la société du droit d'influencer les décisions décisives et porte atteinte à la gestion de ses propres terres et de son sous-sol.

L'accord fixe également la voie à suivre pour un modèle d'extraction de matières premières dans la politique économique de l'Ukraine – au lieu de développer des technologies ou l'industrie, il s'agit principalement d'extraire des ressources. Les aspects sociaux et environnementaux sont complètement ignorés. Ni les syndicats, ni les organisations environnementales n'ont été impliqués dans la discussion.

Finalement, l'accord est présenté comme un instrument de sécurité, mais ne garantit rien de concret : l'aide américaine reste conditionnelle et politiquement vulnérable. Dans le même temps, cela crée le sentiment que l'Ukraine a perdu le contrôle de ses propres ressources.

Ce n'est pas une catastrophe, mais un signal d'alarme. La seule façon de changer la situation est de construire une économie véritablement démocratique et socialement orientée, où le peuple contrôle les ressources et où les partenariats internationaux sont basés sur l'égalité et non sur la subordination.

8 mai 2025

Sotsialnyi Rukh

Publication originelle de cette déclaration : https://rev.org.ua/chi-korisna-ukra%d1%97ni-ugoda-pro-korisni-kopalini-top-5-problem/

Source : RESU / PLT.

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« Creuse, bébé, creuse » : comment l’extraction et l’exportation de matières premières essentielles peuvent aggraver le piège des ressources en Ukraine

L'intérêt pour les richesses minérales de l'Ukraine a explosé dans un contexte de concurrence mondiale pour les matières premières essentielles à la transition vers les (…)

L'intérêt pour les richesses minérales de l'Ukraine a explosé dans un contexte de concurrence mondiale pour les matières premières essentielles à la transition vers les énergies vertes et les nouvelles technologies. Cette transition, présentée comme une voie vers le développement durable et la lutte contre le changement climatique, cache de plus en plus une lutte géopolitique acharnée pour les ressources, où différents acteurs s'efforcent de s'assurer le contrôle des chaînes d'approvisionnement.

20 mai 2025 | tiré du site Entre les lignes entre les mots

L'attention mondiale se concentre désormais particulièrement sur « l'accord minier » entre l'Ukraine et les États-Unis, dans lequel les premières propositions de Donald Trump visant à échanger l'aide militaire américaine contre l'accès à une partie importante des richesses minérales de l'Ukraine ont révélé la nature cynique de cette course mondiale. Cet accord, présenté comme « des minerais en échange d'armes », a déclenché de vifs débats sur la question de savoir si l'Ukraine possède réellement la quantité et la qualité de minerais stratégiques capables de justifier des attentes aussi astronomiques et les ambitions coloniales de la nouvelle administration américaine.

Après l'invasion à grande échelle de la Russie en 2022, le gouvernement ukrainien a intensifié ses efforts pour positionner des ressources telles que le lithium, le titane, le graphite et les terres rares comme des atouts stratégiques destinés à attirer les investisseurs étrangers. L'objectif principal est de canaliser ces investissements vers la reconstruction d'après-guerre, en mettant particulièrement l'accent sur une « reprise menée par le secteur privé », qui sera coordonnée par BlackRock, la plus grande société de gestion d'actifs au monde.

Dans le même temps, il est bien connu que les accords basés sur l'exploitation des ressources naturelles profitent rarement aux pays où ces ressources se trouvent. L'expérience de nombreux pays d'Afrique et d'Amérique latine en est la preuve.

L'exemple de la République démocratique du Congo (RDC) est particulièrement révélateur. En février 2024, l'Union européenne et le Rwanda ont signé un accord sur les minerais visant à établir un partenariat stratégique sur des matières premières essentielles telles que le tantale, l'étain, le tungstène, l'or et le niobium. Dans le même temps, il est bien établi que les groupes rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, contrôlent des zones minières dans l'est de la RDC et font passer clandestinement des minerais au Rwanda, qui entrent ensuite dans les chaînes d'approvisionnement mondiales. Ces rebelles sont accusés de graves violations des droits humains, notamment de violences sexuelles systématiques et de crimes de guerre. Cette spirale de violence a régulièrement suscité des appels à l'UE pour qu'elle mette fin à son accord sur les matières premières avec le Rwanda afin d'éviter de contribuer à une nouvelle escalade du conflit.

La course mondiale aux matières premières essentielles peut provoquer des ingérences étrangères et mettre en danger les pays et les communautés qui deviennent la cible d'un extractivisme prédateur. La Bolivie, par exemple, est depuis longtemps au centre de la lutte mondiale pour les ressources minérales stratégiques. Le président bolivien Evo Morales a nationalisé les vastes réserves de ressources naturelles du pays, y compris le lithium, peu après son arrivée au pouvoir en 2006. Dans le cadre de plans visant à industrialiser la chaîne de production du lithium, des accords ont été signés avec la Chine et la Russie, prévoyant des partenariats avec la société publique YLB, des investissements dans les infrastructures locales et des transferts de technologie. La destitution de Morales en 2019 est directement liée à sa politique de nationalisation du lithium, qui a restreint l'accès des entreprises occidentales, dont Tesla, et favorisé le rapprochement avec la Chine et la Russie. Cet extractivisme prédateur dans la course aux matières premières est illustré par la réaction d'Elon Musk aux accusations selon lesquelles Tesla aurait été impliqué dans le coup d'État en Bolivie : « On fera un coup d'État contre qui on veut ! Faites avec. »

L'exploitation minière et l'utilisation des ressources minérales représentent environ la moitié de la capacité industrielle de l'Ukraine et jusqu'à 20% de sa main-d'œuvre. En 2024, les recettes provenant des exportations de minerais ne représentaient que 8,1% des exportations totales. Par rapport à 2021, ces chiffres ont baissé de près de 60%. En même temps, l'expérience de l'Ukraine avec ses propres ressources minérales — du charbon, qui a alimenté l'industrialisation soviétique, au lithium moderne, essentiel à la transition énergétique — montre un schéma familier : tant les acteurs externes qu'internes ont toujours cherché à profiter de cette richesse, souvent au détriment de la souveraineté du pays et de son développement économique durable.

Ce cycle d'exploitation s'inscrit parfois dans une dynamique mondiale plus large associée à ce qu'on appelle la « malédiction des ressources » ou le « syndrome hollandais », un paradoxe selon lequel les pays riches en ressources naturelles sont souvent confrontés à l'instabilité économique, à la montée de la corruption et aux abus des intérêts étrangers. Le « syndrome hollandais » apparaît généralement lorsque d'importants afflux de devises étrangères, provenant principalement des exportations de matières premières, entraînent un renforcement de la monnaie nationale, rendant les autres secteurs d'exportation moins compétitifs et entraînant le déclin de l'industrie manufacturière ou des exportations à forte valeur ajoutée. En même temps, cette vision, qui utilise les notions de « malédiction » et de « nature », a tendance à essentialiser la dynamique coloniale qui consiste à extraire systématiquement les ressources de la périphérie pour le développement du centre. Le discours sur la « malédiction » des pays riches en ressources présente les questions de dépendance et d'inégalité comme inévitables, découlant du simple fait de posséder des ressources. Ce faisant, il néglige souvent la persistance des structures de pouvoir coloniales.

Dans le contexte de l'intégration de l'Ukraine dans l'UE, les matières premières critiques sont devenues l'un des sujets de négociation, d'autant plus que l'UE cherche à garantir la continuité des chaînes d'approvisionnement pour la transition énergétique et à réduire sa dépendance vis-à-vis de la Chine. En 2021, dans le cadre du partenariat stratégique entre l'Ukraine et l'UE sur les matières premières, les réserves ukrainiennes de 22 des 34 minéraux essentiels à l'UE ont été identifiées. Depuis lors, la coopération s'est approfondie : l'Union européenne propose un « accord gagnant-gagnant » visant à promouvoir le développement durable et le partenariat stratégique.

Le piège des ressources : l'économie ukrainienne et les exportations de matières premières

L'Ukraine figure parmi les leaders mondiaux en matière de réserves et de production de minéraux essentiels, notamment le minerai de fer, le charbon, le manganèse, le titane, le graphite et les terres rares. Cette richesse minérale a joué un rôle crucial dans le développement de l'Empire russe et de l'Union soviétique. L'exploitation des gisements de charbon, de minerai de fer, de manganèse et d'uranium de l'Ukraine a été essentielle à l'industrialisation et à la puissance militaire de l'URSS. L'Ukraine a également joué un rôle clé dans la production de concentrés de titane, fournissant 90% de la production totale de l'ancienne Union soviétique. Les concentrés de titane sont utilisés comme matières premières pour la production d'alliages et de pigments de titane, largement utilisés dans les industries aérospatiale, militaire, médicale et chimique. Fait intéressant, sous la loi martiale, l'Ukraine a vendu la United Mining and Chemical Company (UMCC), la plus grande entreprise publique de production de minerai de titane du pays. Cette entreprise a été créée en 2014, lorsque l'État a repris le contrôle de deux entreprises clés du secteur du titane qui appartenaient auparavant à l'oligarque Dmytro Firtash. L'objectif stratégique de l'UMCC était de passer de l'exportation de matières premières à la fabrication de produits plus avancés technologiquement. Cependant, malgré son potentiel, l'entreprise n'a pas modernisé sa production et est restée un exportateur de matières premières. L'État n'a finalement pas réussi à exploiter le potentiel de l'UMCC et a perdu le contrôle de cet actif stratégique : à la suite d'une vente aux enchères en octobre 2024, à laquelle une seule entreprise a participé, l'homme d'affaires azerbaïdjanais Nasib Hasanov est devenu le nouveau propriétaire.

À l'époque soviétique, l'Ukraine produisait une large gamme de biens industriels et était l'un des principaux fournisseurs de charbon, de fonte, de minerai de fer et d'acier. Cependant, elle restait dépendante des importations de composants et de technologies de haute précision provenant d'autres républiques soviétiques. La plupart des fabricants ukrainiens ne disposaient pas de cycles de production complets, ce qui rendait la coopération avec les usines de l'URSS coûteuse. Au lieu de transformer ses propres matières premières, l'Ukraine les exportait vers d'autres républiques pour y être transformées, renforçant ainsi sa dépendance économique et les déséquilibres structurels façonnés par les priorités de l'Union plutôt que par son propre développement industriel.

Depuis son indépendance en 1991, la structure des exportations de l'Ukraine est restée principalement orientée vers les matières premières. L'industrie ukrainienne a continué à dépendre d'intrants bon marché, principalement l'énergie provenant de Russie, tout en exportant des produits à faible valeur ajoutée à des prix mondiaux plus élevés. Cependant, au lieu de profiter des termes de l'échange favorables pour diversifier et moderniser l'économie, les profits supplémentaires ont été distribués à un cercle restreint de « l'élite », ce qui a conduit à la concentration d'actifs importants entre les mains d'un petit groupe d'oligarques. En 2000, les métaux et les produits minéraux représentaient la moitié des exportations de l'Ukraine et, avec les produits agroalimentaires et chimiques, ces secteurs représentaient un peu plus de 70% des exportations totales du pays.

Certaines études citent l'Ukraine comme un exemple peu étudié du « syndrome hollandais » causé par une dépendance excessive aux ressources. Selon les chercheurs, la dépendance excessive de l'Ukraine à l'égard des exportations d'acier et de métaux ferreux, qui représentent près de 30% du total des exportations, a conduit à une structure économique faussée, caractérisée par la désindustrialisation, la vulnérabilité aux fluctuations mondiales des prix des matières premières et la stagnation de la production de haute technologie. Ils affirment que l'Ukraine souffre d'une variante du « mal hollandais », qui n'est pas due aux exportations d'énergie, mais à un modèle basé sur les matières premières qui canalise les ressources vers des secteurs à faible productivité et à la recherche de rentes plutôt que vers l'innovation et la fabrication. Lorsque les prix mondiaux de l'acier et des métaux ferreux ont augmenté, les recettes d'exportation de ce secteur ont considérablement augmenté, stimulant la demande de hryvnia sur les marchés des changes et renforçant ainsi la monnaie. Ça a rendu les produits ukrainiens plus chers pour les acheteurs étrangers, ce qui a profité aux exportateurs d'acier pendant le boom des marchés des matières premières, mais a nui à d'autres secteurs, comme la construction mécanique et la technologie, dont les produits sont devenus moins compétitifs à l'étranger. Dans le même temps, bien que l'Ukraine présente des symptômes similaires à ceux du syndrome hollandais, tels que la désindustrialisation, la prédominance des exportations de matières premières et la faiblesse des secteurs de haute technologie, il convient de noter que le déclin des industries de haute technologie a commencé plus tôt, après l'effondrement de l'Union soviétique, lorsqu'elles n'ont pas été en mesure de rivaliser au niveau mondial. La rupture des liens de coopération dans l'espace post-soviétique, le manque d'investissements et la perte de marchés, en particulier après la crise financière de 1998 en Asie et en Russie, ont accéléré le déclin des producteurs ukrainiens. L'orientation de l'Ukraine vers les matières premières est donc devenue une adaptation forcée plutôt que le résultat d'un effet d'éviction causé par l'appréciation de la monnaie induite par les exportations de matières premières.

La crise économique mondiale de 2008 a porté un coup dur à l'économie ukrainienne. Le secteur financier s'est effondré, révélant la dépendance critique de l'Ukraine à l'égard des matières premières, qui avait alimenté la croissance au début des années 2000. La crise a aussi entraîné un déclin rapide des industries à valeur ajoutée restantes qui n'avaient pas réussi à se moderniser : par exemple, la production de voitures, d'autobus et de tracteurs a baissé respectivement de 98%, 90% et 77% entre 2007 et 2021. En fin de compte, la dépendance à l'égard des exportations de matières premières a créé un cercle vicieux dans lequel la croissance économique est restée liée à la volatilité des marchés mondiaux des matières premières, entravant la modernisation d'autres secteurs.

Aujourd'hui, la structure des exportations de l'Ukraine reste dominée par les matières premières et les produits peu transformés.

Cependant, alors qu'en 2008, les produits métallurgiques représentaient 43,2% des recettes totales d'exportation de l'Ukraine, leur part était tombée à 24,9% à la fin de 2017. Cette baisse est principalement due à la chute des prix mondiaux de l'acier, à la perte de compétitivité de l'acier ukrainien sur les marchés internationaux, à une baisse importante des investissements dans le secteur sidérurgique et, enfin, à la guerre. Aujourd'hui, le secteur agricole génère environ la moitié des recettes d'exportation de l'Ukraine. En 2024, les matières premières représentaient plus de 66% des exportations totales de l'Ukraine, les https://eba.com.ua/en/bdo-v-ukrayini-pidtrymuye-plan-dlya-ukrayiny-pro-zbilshennya-eksportu-na-50-do-2030-roku-vid-logistyky-do-tehnologij/] restant les principales sources de revenus d'exportation. La part de l'industrie manufacturière dans le PIB est actuellement d'environ 10%, soit la moitié seulement de la référence de l'OCDE.

Depuis son indépendance, l'économie ukrainienne est restée dépendante des exportations de matières premières peu transformées. Cette dépendance a rendu l'Ukraine vulnérable aux fluctuations des prix sur les marchés mondiaux des matières premières, contribuant à la désindustrialisation et entravant le développement des industries de haute technologie.

La géopolitique des matières premières essentielles de l'Ukraine

Les matières premières essentielles telles que le lithium, le cobalt, le nickel, le graphite, les terres rares, le cuivre et le silicium sont indispensables à la fabrication de semi-conducteurs, de batteries et d'une large gamme d'appareils de haute technologie. Leur rôle important est particulièrement évident dans le secteur des énergies renouvelables. Les terres rares sont essentielles à la production d'aimants permanents, qui sont des composants essentiels des éoliennes et des moteurs de véhicules électriques. Parallèlement, les réseaux électriques nécessitent des quantités importantes de cuivre et d'aluminium , le cuivre étant le matériau de base de presque toutes les technologies liées à l'électricité.

La saisie agressive des ressources naturelles de l'Ukraine est un élément clé de la stratégie militaire de la Russie. L'occupation des territoires ukrainiens a permis au Kremlin de prendre le contrôle de vastes réserves de minéraux essentiels, de ressources énergétiques et de terres agricoles. Il n'est donc pas surprenant que la Russie se soit récemment fixé pour objectif de supprimer complètement sa dépendance vis-à-vis des importations de matières premières essentielles d'ici 2030. Selon le directeur de Rosnedra, Evgeny Petrov, « grâce à une série de mesures prises,nous prévoyons d'éliminer d'ici 2030 notre dépendance vis-à-vis des importations de 12 matières premières rares, notamment le lithium, le niobium, le tantale, les métaux rares, le zirconium, le manganèse, le tungstène, le molybdène, le rhénium, le vanadium, le spath fluor et le graphite. Pour une ressource high-tech comme le lithium, on espère y arriver d'ici 2028. » Depuis 2014, et surtout après l'invasion à grande échelle de 2022, la Russie cible systématiquement les gisements de lithium, de titane, de terres rares, de charbon, de pétrole et de gaz. La Russie se prépare déjà activement à l'exploration géologique de minéraux critiques dans les territoires temporairement occupés de l'Ukraine, en particulier dans les régions de Donetsk, Louhansk, Zaporijia et Kherson. Les médias russes ont accordé une attention particulière au gisement de lithium de Shevchenkivske dans la région de Donetsk et au gisement de lithium de Kruta Balka dans la région de Zaporijia. Au final, le contrôle de la Russie sur les réserves ukrainiennes va accélérer son expansion dans les chaînes d'approvisionnement mondiales et augmenter considérablement sa pression sur l'UE et d'autres pays en consolidant son contrôle sur les matières premières critiques. Les ambitions de la Russie sont encore renforcées par son partenariat de plus en plus étroit avec la Chine. Des commentateurs russes ont évoqué la coordination des stratégies de la Russie et de la Chine en matière de métaux rares comme une « arme commune » contre l'influence occidentale et pour contrôler les chaînes d'approvisionnement essentielles aux technologies de pointe. En même temps, la Russie développe activement sa coopération avec les pays du Sud dans le domaine des matières premières essentielles. Par exemple, fin 2023, la Bolivie et la Russie ont annoncé un investissement de 450 millions de dollars dans un projet pilote de production de lithium dans le désert de sel d'Uyuni, en Bolivie. En échange, Rosatom construit un centre de recherche et de technologie nucléaire en Bolivie.

La Chine occupe une position dominante dans la chaîne d'approvisionnement mondiale de matières premières essentielles, tant au niveau de l'extraction que de la transformation, comme le cuivre, le cobalt, le lithium, le graphite et les terres rares. Par exemple, la Chine représente près de 100% de la transformation mondiale du graphite sphérique, environ 80% du gallium, environ 60% du raffinage du lithium et du germanium, et plus de 60% de la transformation du cobalt.

Compte tenu de la domination mondiale de la Chine et de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le gouvernement ukrainien a intensifié ses efforts pour promouvoir les matières premières essentielles du pays en tant qu'atout stratégique afin d'attirer les investissements occidentaux et de soutenir la reconstruction après la guerre. Le Premier ministre Denys Shmyhal a déclaré que l'une des principales priorités du gouvernement était de développer un nouveau modèle économique pour l'Ukraine, dans le but de faire du pays un centre de ressources pour l'Europe. Selon le Guide de l'investissement en Ukraine, publié par la Kyiv School of Economics et le ministère de l'Économie, l'Ukraine possède 117 des 120 types de minéraux les plus courants. Le gouvernement souligne également que l'Ukraine figure parmi les dix premiers producteurs mondiaux de plusieurs minéraux stratégiques, notamment le titane, le manganèse, le minerai de fer, le zirconium, le graphite et l'uranium.

Dans le même temps, les États-Unis font pression sur l'Ukraine pour qu'elle accélère l'extraction et l'exportation de matières premières essentielles dans le cadre de leur stratégie visant à réduire la dépendance américaine vis-à-vis de la Chine. Étant donné que la Chine représente plus de 70% des importations américaines de terres rares et qu'elle a récemment imposé des restrictions à l'exportation, toute nouvelle restriction pourrait avoir de graves conséquences. En 2023 et 2024, la Chine a imposé des restrictions à l'exportation de gallium, de germanium, de graphite et d'antimoine, et en décembre 2024, elle a complètement interdit la fourniture de gallium, de germanium et d'antimoine aux États-Unis, invoquant la sécurité nationale. Ces mesures faisaient suite aux restrictions imposées par les États-Unis au secteur chinois des semi-conducteurs. En réaction, Washington a commencé à voir les vastes réserves minérales de l'Ukraine comme une alternative pour renforcer sa sécurité nationale. Les restrictions à l'exportation imposées par la Chine sur les technologies de pointe en matière de transformation sapent directement les efforts des États-Unis et de l'UE pour développer leur capacité industrielle dans ce domaine, alors que les deux parties recherchent activement des équipements et des compétences de pointe. Cependant, la plupart de ces solutions de haute technologie sont concentrées en Chine, ce qui n'est pas surprenant compte tenu des quatre décennies d'investissement. Au cours de cette période, les États-Unis et l'UE ont non seulement réduit leur capacité de production, mais aussi considérablement réduit le financement de la recherche et du développement dans ce secteur, ce qui les a placés dans une position désavantageuse. Ces dernières années, les États-Unis se sont efforcés de retrouver leur rôle dans le secteur des terres rares. La seule mine de terres rares de Mountain Pass, en Californie, qui était à l'arrêt depuis longtemps, a repris sa production en 2017. Cependant, jusqu'à récemment, les matières premières extraites étaient envoyées en Chine pour être transformées.

La coopération de l'Ukraine avec les États-Unis est devenue de plus en plus transactionnelle depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, qui a présenté l'accès aux ressources ukrainiennes comme une compensation pour les milliards de dollars d'aide fournis par les États-Unis pendant la guerre. Les négociations actuelles sont tendues : l'Ukraine cherche à obtenir des garanties de sécurité, mais l'approche américaine reflète la logique de Trump, qui consiste à rechercher des avantages directs des investissements étrangers tout en limitant l'influence de la Chine sur les chaînes d'approvisionnement critiques. Cette stratégie est similaire au modèle chinois « ressources contre infrastructures », notamment l'accord Sicomines de 2007 en République démocratique du Congo, dans le cadre duquel la Chine devait investir 3 milliards de dollars dans les infrastructures en échange de droits miniers évalués à 93 milliards de dollars. Si cet accord a apporté à la RDC des capitaux dont elle avait grand besoin, le pays a par la suite cherché à le renégocier, exprimant ses inquiétudes quant au fait de ne pas recevoir une part équitable des bénéfices. Une partie des infrastructures promises n'a pas été entièrement réalisée ou a été construite avec des matériaux de mauvaise qualité. Parallèlement, les bénéfices des activités minières sont principalement allés à des entreprises chinoises, tandis que la RDC n'a reçu qu'une part relativement faible des revenus réels. L'accord sur les minerais conclu entre les États-Unis et l'Ukraine risque de perpétuer les schémas de contrôle extérieur et de répartition inégale des bénéfices, au détriment de ce pays riche en ressources. De tels accords peuvent entraîner une augmentation des coûts des projets, car ils obligent souvent les gouvernements à coopérer avec des entreprises spécifiques sans appel d'offres concurrentiel. Des problèmes de qualité et de contrôle peuvent survenir, car les entrepreneurs contrôlent généralement le financement et la mise en œuvre des projets, ce qui limite la capacité de surveillance du gouvernement. La structure complexe et non transparente augmente le risque de mauvaise gestion, et l'absence de concurrence et la nature à long terme de ces accords peuvent créer des déséquilibres financiers qui profitent à l'investisseur au fil du temps. L'accord signé par l'Ukraine et les États-Unis le 30 avril 2025 accorde aux États-Unis un accès quasi exclusif à de nouvelles licences pour l'extraction de minéraux et de matières premières essentielles, comme le souhaitait le président Trump. Si l'accord n'oblige pas l'Ukraine à rembourser l'aide américaine antérieure ni à transférer la pleine propriété des ressources, il ne prévoit pas non plus de garanties de sécurité de la part des États-Unis.

L'Union européenne dépend à 100% de la Chine pour tous les éléments de terres rares lourds, notamment le dysprosium (aimants dans les véhicules électriques et les éoliennes), l'erbium (dispositifs à fibre optique, lasers), le lutétium (détecteurs, imagerie médicale), le terbium (phosphores pour écrans), le thulium (lasers, appareils de radiographie portables) et autres – et à 85% des éléments de terres rares légères, comme le cérium (matériaux de polissage), le lanthane (batteries, verre optique), le néodyme (aimants, lasers, verre), le praséodyme (alliages, aimants, verre) et le samarium (aimants, réacteurs nucléaires, verre). Bien que la dépendance de l'UE à l'égard de la Chine pour d'autres matières premières essentielles soit légèrement moins importante, elle reste significative. Par exemple, la Chine fournit 71% des importations de gallium de l'UE, 97% de son magnésium, 40% de son graphite naturel et 62% de son vanadium. En raison de cette dépendance, l'UE s'intéresse de plus en plus à l'Ukraine depuis quelques années comme fournisseur potentiel de matières premières essentielles.

Les matières premières critiques de l'Ukraine dans le contexte de l'intégration européenne

En juillet 2021, avant l'invasion russe, l'Union européenne et l'Ukraine ont signé un protocole d'accord visant à renforcer l'intégration des chaînes de valeur dans les secteurs des matières premières critiques et des batteries. À la suite de la signature du protocole d'accord, une feuille de route a été élaborée, décrivant les mesures spécifiques convenues par les deux parties pour établir un partenariat stratégique. Il est à noter que cet instrument ne prévoit pas la création d'un organisme indépendant chargé de surveiller les activités dans ce domaine. La participation du public n'est pas envisagée, tandis que les représentants des secteurs économique et industriel sont prioritaires. Dans l'ensemble, la formulation de ces documents reste assez vague. Bien que l'UE exprime son intention d'intégrer l'Ukraine dans la chaîne de valeur des matières premières et des batteries, les documents signés ne mentionnent pas explicitement la production de produits finis directement en Ukraine.

En mars 2023, le gouvernement ukrainien a adopté la loi « sur les modifications de certains actes législatifs ukrainiens visant à améliorer la législation dans le domaine de l'utilisation du sous-sol », qui vise à déréglementer le secteur. Elle supprime notamment la nécessité d'obtenir l'autorisation des autorités locales, du Service national de géologie et des ressources minérales, du Service national du travail et d'autres organismes pour accéder au sous-sol, exploiter des gisements, prélever de l'eau et concevoir des installations minières. Ces changements, qui visent à attirer les investissements et à réduire les charges administratives pour les entreprises, ont en fait exclu les communautés du processus décisionnel. La loi autorise aussi la délivrance de permis spéciaux d'utilisation du sous-sol sans enchères aux entreprises qui ont fait des études géologiques à leurs frais. Même si cette pratique existe dans d'autres pays pour stimuler les investissements, elle comporte souvent des risques de corruption : les entreprises peuvent faire des recherches minimales et ensuite acquérir des actifs précieux sans concurrence. L'absence de vérification indépendante des résultats des recherches géologiques crée d'autres possibilités d'abus. En plus, dans le cadre des efforts de déréglementation en cours, le Conseil des ministres a adopté la résolution n°749 le 4 juillet 2023, qui supprime l'obligation de coordonner avec le ministère de la Protection de l'environnement et des Ressources naturelles la vente de permis pour les sites où des explorations géologiques ont déjà été menées. Le cas du secteur naturel de la forêt vierge de Makove Boloto (« marais aux coquelicots ») dans la région de Rivne, où un permis d'extraction de tourbe a été accordé, illustre clairement ce problème. Ce permis couvrait toute la superficie du secteur, officiellement créé fin 2021, et ouvrait effectivement la voie à sa destruction, car l'extraction de la tourbe implique l'élimination complète de la végétation et de la couche arable. Des cas similaires se sont produits dans la réserve naturelle de Starovyzhivskyi et à proximité de la réserve historique et culturelle de Busha.

Les matières premières critiques font désormais l'objet d'une section spécifique dans l'instrument « Ukraine Facility » doté de 50 milliards d'euros pour la période 2024-2027. Selon le plan de l'Ukraine au titre de cet instrument, le partenariat avec l'UE vise à approfondir l'intégration des chaînes de valeur dans les secteurs des matières premières critiques et des batteries en développant les ressources minérales de l'Ukraine sur la base d'une approche durable et socialement responsable. En même temps, le secteur devrait être réglementé selon les normes de l'UE, en tenant compte des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), ainsi que des lignes directrices de l'OCDE pour les entreprises multinationales sur la conduite responsable des entreprises et des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. Cependant, les normes spécifiques auxquelles le gouvernement fait référence ne sont pas précisées. Ces documents internationaux sont volontaires et fournissent des orientations pour des pratiques commerciales éthiques, mais ils n'ont pas force de loi s'ils ne sont pas intégrés dans la législation nationale. De même, si le gouvernement fait référence au respect des principes ESG, il ne précise pas quelles normes, quels indicateurs ou quels mécanismes de vérification seront appliqués. Le paysage des normes ESG est lui-même fragmenté, avec des niveaux d'ambition et d'application variables. L'une des réformes décrites dans le plan est l'élaboration d'une étude visant à évaluer la législation actuelle en matière de reporting environnemental, social et de gouvernance dans le secteur minier. Le fait que le gouvernement prévoie d'« approuver et publier l'étude » alors qu'il a déjà mis en œuvre des mesures de déréglementation importantes dans le secteur montre clairement que les considérations ESG n'ont pas été systématiquement intégrées dans les réformes initiales. Des formulations telles que « introduction progressive de l'obligation de reporting ESG » et le respect du principe « ne pas causer de préjudice significatif » – dans la mesure du possible dans des conditions de guerre ou de reconstruction après-guerre – soulignent plutôt une approche formelle, orientée vers l'UE, de ces engagements.

L'adoption du règlement de l'UE sur les matières premières critiques en mars 2024 renforcera encore la coopération déjà établie. En décembre 2024, le Parlement ukrainien a approuvé un programme national actualisé pour le développement de la base minérale et des matières premières de l'Ukraine pour la période allant jusqu'en 2030, qui sert d'indicateur de la mise en œuvre de la facilité pour l'Ukraine. Le programme actualisé définit les critères de classification des ressources minérales comme stratégiquement importantes. Dans l'ensemble, cette loi vise à élargir considérablement les projets d'extraction à grande échelle. Il est à noter que dans la section consacrée à la tourbe, la loi souligne que l'exploitation de nouveaux gisements de tourbe, qui nécessite un drainage, entraîne la perte des fonctions biosphériques, une augmentation des risques environnementaux dans la région et la transformation des tourbières de puits de carbone en sources importantes d'émissions de gaz à effet de serre. Bien que le document reconnaisse la nécessité d'aligner l'extraction de la tourbe sur la politique climatique et environnementale de l'État, il ne prévoit pas de mécanismes pratiques ni de garanties pour assurer cette harmonisation. La loi prévoit également la poursuite des investissements dans les gisements de houille et l'expansion de l'extraction du lignite (charbon brun). À l'heure actuelle, le programme national semble contredire le plan national de l'Ukraine en matière d'énergie et de climat, qui prévoit l'élimination progressive du charbon dans le secteur de l'électricité d'ici 2035, conformément aux objectifs du Pacte vert européen.

Les risques du piège des ressources : les leçons à tirer

La proposition du gouvernement ukrainien d'utiliser les ressources minérales comme un moyen d'attirer l'aide internationale risque de reproduire les modèles d'exploitation typiques d'autres pays dépendants des ressources. Mettre l'accent sur l'exportation de matières premières essentielles pour garantir un soutien extérieur pourrait renforcer la dépendance à long terme vis-à-vis des acteurs étrangers, compromettant ainsi les efforts visant à reconstruire une économie diversifiée et autosuffisante. Une dépendance excessive à l'exportation de matières premières essentielles pourrait donner aux États étrangers un moyen de pression sur la politique économique de l'Ukraine. Un exemple parlant est la dépendance de l'Ukraine vis-à-vis des ressources énergétiques russes et leur impact sur les processus politiques et économiques ukrainiens, en particulier lorsque la Russie a utilisé ses approvisionnements en gaz comme moyen de pression politique et de chantage économique, tentant à plusieurs reprises de prendre le contrôle d'infrastructures stratégiques, notamment le réseau de transport de gaz ukrainien.

L'histoire du contrôle oligarchique en Ukraine, en particulier dans des secteurs tels que la métallurgie et la production de titane, où les matières premières étaient exportées au lieu d'être transformées dans le pays, montre comment la mainmise des élites sur les ressources et la faiblesse de la gouvernance peuvent détourner les revenus miniers destinés à la reconstruction nationale vers des intérêts privés. Ça risque de renforcer le rôle de l'Ukraine en tant que fournisseur de matières premières plutôt que de la transformer en producteur de biens à forte valeur ajoutée. Exporter des matières premières, c'est aussi passer à côté d'opportunités de développer les secteurs manufacturiers nationaux, et avec eux, des revenus et des emplois potentiels.

En même temps, l'exploration et l'extraction de matières premières essentielles sont des projets à haut risque et à forte intensité de capital, généralement accessibles uniquement à un petit nombre de grandes entreprises. Ces initiatives minières nécessitent des investissements initiaux importants, allant de 500 000 à 15 millions d'euros par projet, et impliquent des étapes longues et complexes : exploration géologique, études de faisabilité et obtention des permis d'exploitation. La mise en production industrielle d'un gisement minéral peut prendre des années et coûter entre 1 million et plus d'un milliard de dollars américains, selon le type de mine. Des études indiquent que, en moyenne, il faut jusqu'à 16,5 ans entre la phase d'exploration et le début de la production. Les grands groupes commerciaux ukrainiens qui ont accès à des capitaux sont capables de participer à des projets miniers à grande échelle. Mais leur implication soulève de sérieuses questions sur la transparence, la répartition équitable des bénéfices et le risque que les profits tirés des ressources essentielles de l'Ukraine finissent une fois de plus entre les mains d'un petit groupe d'individus, au lieu de contribuer à un développement économique global et à l'intégration avec l'Union européenne.

La volatilité des prix mondiaux des matières premières peut aussi déstabiliser l'économie ukrainienne. L'expérience de l'Ukraine en tant qu'exportateur de métaux ferreux illustre clairement ce risque. Au cours de la dernière décennie, les entreprises sidérurgiques ukrainiennes ont été très vulnérables aux fluctuations imprévisibles des prix mondiaux, qui ont eu un impact direct sur les volumes d'exportation, les revenus des entreprises et la balance des paiements du pays. Actuellement, les perturbations de la chaîne d'approvisionnement causées par la guerre, la stagnation du marché intérieur et les conditions d'exportation de plus en plus défavorables, notamment les droits de douane, limitent les activités du secteur sidérurgique ukrainien. Selon les représentants du secteur, la production d'acier devrait baisser de 9% en 2025, avec une chute des exportations de 16%. Cette dépendance vis-à-vis des exportations de matières premières signifie que les chocs extérieurs peuvent rapidement déstabiliser l'économie, perturber les recettes budgétaires de l'État et mettre en péril des emplois.

En plus, l'extraction de matières premières essentielles pose des risques environnementaux importants, tels que des émissions importantes de gaz à effet de serre, la pénurie et la pollution de l'eau, la dégradation des sols et la perte de biodiversité. L'utilisation de l'eau constitue un défi supplémentaire, car de nombreuses mines sont situées dans des régions déjà confrontées à des pénuries, et les activités d'extraction et de transformation contaminent souvent les ressources en eau locales avec des substances toxiques et des métaux lourds. L'extraction du cuivre et du lithium est particulièrement gourmande en eau, ce qui exerce une pression supplémentaire sur des ressources déjà limitées. L'expansion physique des zones minières entraîne la déforestation, l'érosion des sols et la destruction des habitats naturels, menaçant la biodiversité locale. En plus, dans l'extraction des terres rares, même dans les meilleures conditions, seulement environ 2% de la masse extraite contient des matériaux précieux, même si les concentrations peuvent atteindre jusqu'à 20% dans certains gisements. Ces minerais contiennent souvent des impuretés nocives comme l'arsenic, le thorium, le fluor et l'uranium. Pendant des décennies, des quantités importantes de ces sous-produits toxiques ont été rejetées dans l'environnement, se répandant dans l'air et l'eau. En conséquence, les polluants sont entrés dans la chaîne alimentaire, et des études à grande échelle ont établi un lien entre l'exposition à ces polluants et des effets graves à long terme sur la santé, notamment des troubles du développement chez les enfants, une augmentation de l'incidence des maladies osseuses et d'autres maladies chroniques.

En fin de compte, alors que le gouvernement se concentre entièrement sur la participation du secteur privé à la reconstruction de l'Ukraine, en donnant la priorité aux projets d'extraction de matières premières essentielles à long terme, le pays risque une fois de plus d'être pris au piège dans le cercle vicieux qui consiste à servir de fournisseur de matières premières pour d'autres économies.

Maryna Larina, 14 mai 2025
https://commons.com.ua/en/resursna-pastka-ukrayini/
Traduction de l'ukrainien : Pavlo Shopin en Français Deepl revue ML
https://www.reseau-bastille.org/2025/05/18/creuse-bebe-creuse-comment-lextraction-et-lexportation-de-matieres-premieres-essentielles-peuvent-aggraver-le-piege-des-ressources-en-ukraine/

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Retour à la table des matières Droits et libertés, printemps / été 2025

Le tournant identitaire : nos valeurs priment sur vos droits

Louise Pelletier, membre du comité exécutif et du CA de la Ligue des droits et libertés Maryève Boyer, membre du comité exécutif et du CA de la Ligue des droits et libertés Déposés à l’hiver 2025, deux projets de loi s’attaquent directement à la Charte et aux droits humains au Québec, au nom de « nos valeurs québécoises ». Récemment, le premier ministre Legault, en parlant de prières dans l’espace public, statuait que selon lui ce n’est pas quelque chose « qu’on devrait voir au Québec ». Un cadre de référence bien arbitraire et malléable qu’emploie le gouvernement, alors que des obligations claires lui incombent en matière de respect des droits humains de tout-e-s. Il nous parait important de replacer les débats actuels sur la laïcité de l’État dans leur contexte historique : la crispation identitaire dont nous sommes témoins actuellement doit être prise fort au sérieux. En assimilant le hijab au voile des religieuses enseignantes, le gouvernement Legault nous a présenté comme progressiste une posture d’arrière-garde : comme si être laïc, c’est rejeter le hijab, c’est affirmer sa laïcité, qui serait une valeur collective des Québécois-e-s. Pourtant, la société québécoise est loin d’être consensuelle! Tel que dans une opération de propagande classique, le gouvernement Legault s’appuie sur des mythes pour faire de la Loi sur la laïcité de l'État la pièce maîtresse de sa législation. Au fondement de cette loi, un mythe selon lequel les Québécois-e-s auraient chassé la religion de leurs écoles lors de la Révolution tranquille, conquête historique qu’il faut préserver par fidélité à notre glorieux passé. Tout est faux dans ce récit : la Révolution tranquille n’a pas sorti la religion de l’école, la population était loin d’être unanime sur cet enjeu, ce n’est qu’après de longues négociations, tant avec des groupes sociaux qu’avec le clergé, que le gouvernement Lesage a fait adopter en 1964 la loi qui crée le ministère de l’Éducation enlevant aux Églises le contrôle du système scolaire. Les écoles restent confessionnelles, exigence de l’Assemblée des évêques qui a cédé sur un point : les écoles catholiques seront désormais ouvertes aux enfants des non croyants. Il s’agit d’une bien petite ouverture : pendant les cours de religion, ces enfants ont le droit d’attendre dans le corridor. Même quand la Charte des droits et libertés de la personne du Québec adoptée en 1975, oblige les écoles à offrir le choix de l’enseignement moral, 90 % des parents continuent d’inscrire leurs enfants aux cours de religion. La plupart des Québécois-e-s, devenus majoritairement non pratiquant-e-s, associent encore la religion à l’identité nationale. En 1995, un rapport gouvernemental propose une conception de l’école basée sur l’égalité et liberté de conscience et de religion pour toutes et tous : fin des commissions scolaires catholiques et protestantes. Il faudra attendre la loi 118, en 2000, pour que finalement les commissions scolaires confessionnelles soient abolies pour être remplacées par des commissions scolaires basées sur la langue et que les écoles soient déconfessionnalisées. Près de 45 ans après la création du ministère de l’Éducation, l’enseignement religieux est retiré des programmes. Avec l’école neutre, des enfants de toutes les religions se retrouvent sur les bancs des écoles francophones, ce qui réveille de vieilles peurs. En 2001, dans la cour de son école, un jeune sikh nommé Gurbaj Singh Multani échappe accidentellement son kirpan, poignard rituel que les sikhs portent sous leurs vêtements. L’école lui interdit de le porter. Les parents protestent au nom de la liberté de religion. En 2006, la Cour suprême leur donne raison soulevant un tollé dans une partie de la population, qui y voit une mise en péril du droit de la majorité à exister : les religions des autres sont désormais suspectes. Les médias dénoncent la prière musulmane dans une cabane à sucre, le menu halal à l’école et les accommodements raisonnables. « Nos valeurs collectives, tout autant que les droits individuels, doivent être reconnues. » Ainsi s’exprime Guy Rocher, dans un manifeste signé par 3 000 « Intellectuels pour la laïcité ». Le gouvernement Marois y trouve son mantra - les valeurs collectives – et propose en 2013 le projet de loi sur la laïcité, nommée « Charte des valeurs québécoises », qui prétend rendre les droits conditionnels au respect de valeurs qui sont issus des peurs et préjugés ambiants. Peur de l’Islam et du sort qu’il réserve aux femmes ? La laïcité de l’État, une valeur collective, garantit l’égalité à toutes. Peur du hijab et autres signes religieux? La loi les interdit. Peur des accommodements raisonnables? La loi les restreint. Une partie de la société, incluant des organisations de droits humains, résiste et parvient à renverser la vapeur : la loi ne sera pas adoptée. Mais l’idée de rogner les droits des minorités au nom des valeurs gagne des adeptes. L’islamophobie aussi. En 2019, deux ans après l’attentat de la Grande Mosquée de Québec, le gouvernement Legault fait adopter sous bâillon la Loi sur la laïcité de l’État, où le respect des droits est conditionnel au respect des valeurs de la majorité. Une loi qui déroge de façon préemptive aux deux Chartes, canadienne et québécoise, tout en mettant de l’avant une conception erronée et instrumentalisée de la laïcité qui, plutôt que de garantir la neutralité de l’État face aux différentes religions, viole les droits humains de plusieurs groupes de Québécois-e-s. La véritable laïcité était-elle en danger? La réponse du professeur Louis-Philippe Lampron est claire : « Si l’on abrogeait, demain matin, la Loi sur la laïcité de l’État, le Québec serait toujours un État où le principe de la séparation du religieux et de l’État s’applique ». Plus de cinq ans après son application, il est avéré que la loi 21 discrimine les femmes portant le hijab, contredisant la soi-disant valeur collective de l’égalité femmes-hommes, et viole les libertés de conscience, d’expression et de religion de nombreuses personnes. Contrairement aux droits, les valeurs n’ont jamais protégé personne. Pourtant, elles apparaissent maintenant dans plusieurs textes de loi du gouvernement. En flattant l’ego national, elles ont pour rôle de faire accepter par la population des mesures discriminatoires envers les minorités. En 2024, on apprend qu'à l’école Bedford, des enseignant-e-s musulman-e-s sont soupçonné-e-s de faire du prosélytisme. Pour répondre à ce type de situations, le ministre Bernard Drainville dépose en mars 2025,  le projet de loi no 94 qui interdit les signes religieux à tout le personnel des centres de services scolaires et des services de garde foulant aux pieds les droits de centaines de femmes, en plus d’autres mesures qui risquent de faire obstacle à la participation de tou-te-s et à l’exercice du droit à l’éducation… alors que les mis en cause de l’école Bedford ne portaient pas de signes religieux. Le projet de loi no 84 sur l’intégration nationale (PL84) fait reposer le fardeau de l’intégration sur les immigrant-e-s et insiste pour leur adhésion, et pour l’intégration des minorités culturelles, aux valeurs québécoises, suggérant à nouveau que ces valeurs soient en péril. Ce PL84 prétend même assujettir la Charte québécoise au modèle d’intégration nationale, plutôt que d’adopter un modèle d’intégration qui y serait conforme ! En donnant l’impression de valoriser Notre histoire, Notre culture, Notre nation, les lois du gouvernement dirigent la colère du peuple vers les autres : ceux qui ne parlent pas la langue nationale, qui portent des signes religieux, qui n’adhèreraient pas assez à notre culture, à nos valeurs, le tout en ignorant délibérément les nations autochtones présentes sur le territoire québécois. Partout en Occident les démolisseurs de la démocratie procèdent de la même manière. Ils sont à nos portes.

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Les postiers prêt « à continuer de se battre » en vue de la grève

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Les membres du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes se sont rassemblés jeudi devant le centre de tri de Postes Canada de la rue Almon, à Halifax, en prévision de la grève à venir. Les travailleurs voulaient démontrer leur volonté de continuer à lutter, cinq mois après avoir été (…)

Les travailleurs et les étudiants condamnent les coupes dans les Cégeps

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Droit à la ville vs Capitalisme : Les résistances s’organisent lors du FSMI

22 mai, par Mario Gil Guzman
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Dans le cadre de l’École de formation politique en économies transformatrices pour la vie et le Forum Social Mondial des intersections FSMI Montréal, 28 mai 2025 – À Montréal comme ailleurs, nos villes se transforment en machines à exclure. Spéculation immobilière, gentrification effrénée, (…)

Activité du Journal à LGT-FSMI sur les États-Unis : Combattre l’oligarchie ! Fighting Oligarchy !

22 mai, par Ronald Cameron
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Panel sur la mobilisation de la gauche américaine contre l’oligarchie ! Le 31 mai, 16 h à l’UQAM, Pavillon Hubert Aquin, salle A-1760 Depuis le 5 novembre aux États-Unis, la mobilisation n’a pas cessé de se développer. Toutefois, les attaques sont sévères et elles viennent de tous les côtés. (…)

Ce n’est plus le temps des paroles, c’est le temps d’agir !

21 mai, par Coalition du Québec URGENCE Palestine
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Escalade militaire entre l’Inde et le Pakistan : remettre de l’avant la perspective cachemirie

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