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Trump à la Knesset et à Charm el-Cheikh

21 octobre, par Gilbert Achcar — , , ,
Si les scènes de célébration de Donald Trump à la Knesset israélienne et à Charm el-Cheikh étaient destinées à une exploitation cinématographique ou théâtrale, elles se (…)

Si les scènes de célébration de Donald Trump à la Knesset israélienne et à Charm el-Cheikh étaient destinées à une exploitation cinématographique ou théâtrale, elles se classeraient sans aucun doute parmi les pires mises en scène de l'histoire.

15 octobre 2025
Gilbert Achcar
Professeur émérite, SOAS, Université de Londres
Abonné·e de Mediapart
https://blogs.mediapart.fr/gilbert-achcar/blog/151025/un-festival-d-obsequiosite

Ces deux spectacles ont formé ensemble un festival d'adulation, sans précédent pour un président américain ou pour tout dirigeant élu par une élection libre. Ils rappellent davantage l'adulation dont sont l'objet les despotes dans leur propre pays ou au sein de leur empire – comme celle du dirigeant nord-coréen chez lui ou le culte de la personnalité qui a entouré Staline dans les républiques et les États satellites de l'Union soviétique.

De ce point de vue, cependant, l'obséquiosité affichée à la Knesset était en fait plus sincère que celle du sommet de Charm el-Cheikh. Comme Benyamin Netanyahou l'a dit à son ami américain, ce fut le résultat de « l'alliance sacrée entre nos deux terres promises » – faisant ainsi allusion aux caractéristiques communes des États-Unis et d'Israël en tant qu'États nés d'un colonialisme de peuplement et d'une guerre génocidaire contre les populations autochtones. Le parallèle historique entre les deux États est aujourd'hui complet. De plus, il ne fait aucun doute que Trump est, de tous les présidents américains, celui qui a été le plus favorable à l'État sioniste, et pas seulement à l'État lui-même, mais aussi au pouvoir néofasciste de Netanyahou, une caractérisation politique qui s'applique d'ailleurs à Trump lui-même.

Le président américain a répondu à l'adulation du premier ministre israélien en le louant, soulignant sa contribution au plan de paix annoncé par Trump en sa présence à Washington, deux semaines plus tôt. L'impudence de Trump est même allée jusqu'à demander au président israélien, assis à sa gauche, de gracier Netanyahou pour les accusations de corruption auxquelles il fait face, les rejetant avec cette remarque désinvolte : « Des cigares et du champagne, qui diable s'en soucie ? » Trump faisait référence aux accusations de pots-de-vin contre Netanyaohu (estimés à 260 000 dollars), qui sont en effet bien modestes par rapport aux cadeaux somptueux que Trump lui-même a reçus de gouvernements étrangers, en particulier des monarchies du Golfe – dans le cadre d'une pratique mondiale de la corruption à grande échelle.

Comme l'avait prédit un ancien conseiller politique de Netanyahu dans une interview citée par un correspondant du Financial Times vendredi dernier : « Il n'y a pas de meilleur directeur de campagne pour Netanyahu que Trump. Son discours [à la Knesset] marquera le début de la campagne électorale. » En effet, Trump a bel et bien inauguré la campagne de réélection de Netanyahu, dans la perspective des élections à la Knesset qui doivent avoir lieu dans pas plus tard qu'un an. En fin de compte, les plus grands bénéficiaires du plan du président américain et de sa visite ne sont pas seulement Trump lui-même, qui s'est prélassé dans les éloges flagorneurs de Netanyahu et du chef de l'opposition israélienne, mais aussi Netanyahou.

Le plan Trump est, en fait, le résultat d'un accord entre les deux hommes, en réaction aux négociations qui se sont rapidement enlisées après l'échange initial de prisonniers survenu à la suite de la trêve déclarée à la veille de la deuxième investiture de Trump, en janvier dernier. Trump a exigé que le Hamas libère tous ses otages en même temps, afin de l'empêcher d'utiliser leur libération progressive comme moyen de négociation. Il a ensuite donné le feu vert à Netanyahou pour reprendre les opérations militaires et poursuivre la destruction et l'occupation par Israël des zones résidentielles restantes de Gaza. Alors que l'action militaire israélienne battait son plein, l'administration Trump fit pression sur les gouvernements régionaux pour qu'ils exercent à leur tour leur pression sur le Hamas, obligeant finalement le mouvement à libérer ses derniers captifs, diminuant ainsi largement sa capacité d'affecter l'avenir de la bande de Gaza, ou de la cause palestinienne en général.

Cette libération des derniers captifs israéliens a ôté un fardeau important des épaules de Netanyahou, car elle était le principal thème de ralliement du mouvement populaire contre lui. Il était pris entre le marteau de l'opposition et l'enclume d'alliés encore plus à droite que lui. Une fois de plus, comme au début de l'année, Netanyahou a utilisé la pression américaine comme prétexte pour accepter ce à quoi ses alliés s'étaient jusque-là opposés. Les deux principaux dirigeants de l'ultradroite sioniste ont fini par assister à la session de la Knesset et applaudir tant Trump que Netanyahu. Le premier ministre israélien et ses alliés savent pertinemment que le plan de Trump est voué à l'échec, tandis que le Hamas et toutes les autres fractions palestiniennes n'ont plus de moyen d'empêcher Israël d'envahir et occuper davantage de ces parties de la Palestine qu'il lui reste encore à annexer officiellement (voir « Après l'“accord du siècle”, l'“accord du millénaire” ». Al-Quds Al-Arabi, 30 septembre 2025).

Quant à la cérémonie de Charm el-Cheikh, elle était moins une célébration de la « grandeur » de Trump qu'un reflet du caractère saugrenu de l'obséquiosité dont il est l'objet de la part des dirigeants mondiaux présents. Pour croire que leurs flatteries étaient sincères, il faudrait douter de leurs capacités mentales, en particulier si l'on considère l'humiliation que Trump a infligée à beaucoup d'entre eux. Aucun président américain avant Trump n'a traité la scène mondiale avec un tel mépris et pourtant aucun n'a été l'objet d'une telle obséquiosité. Cela montre qu'en cette époque de décadence politique, de loi de la jungle et de montée du néofascisme, de nombreux dirigeants contemporains sont prêts à abandonner leur dignité et à se soumettre à ceux qui ont plus de pouvoir et de richesse.

Quant au fier peuple palestinien, il a prouvé un siècle durant son refus de se soumettre à ses oppresseurs – qu'il s'agisse des autorités du mandat britannique ou du gouvernement sioniste. Les Palestiniens ne baiseront pas la main de Donald Trump et ne lui témoigneront pas de « reconnaissance », quoi que fassent ceux qui prétendent les représenter. Ils ne se soumettront pas au soi-disant Conseil de la paix présidé par Trump, qui comprend des personnalités comme Tony Blair, le partenaire de George W. Bush dans l'occupation de l'Irak. Le peuple palestinien poursuivra plutôt sa lutte pour l'intégralité de ses droits. Il lui faut maintenant tirer les leçons de la Karitha (grande catastrophe) d'aujourd'hui, comme de la Nakba d'hier, et trouver le moyen de retrouver l'élan qui fut le sien lors des deux glorieuses Intifadas populaires de 1936 et 1988 – points culminants de sa longue histoire de résistance.

* Dernier ouvrage paru :Gaza, génocide annoncé. Un tournant dans l'histoire mondiale.

Traduit de ma chronique hebdomadaire dans le quotidien de langue arabe, Al-Quds al-Arabi, basé à Londres. Cet article est d'abord paru en ligne le 14 octobre. Vous pouvez librement le reproduire en indiquant la source avec le lien correspondant.

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Des millions de personnes manifestent contre Trump, pour la démocratie et la justice sociale

21 octobre, par Dan La Botz — ,
Des millions de personnes, dans 2 600 villes des 50 États américains, ont participé à la deuxième vague de manifestations « No Kings » contre le gouvernement de plus en plus (…)

Des millions de personnes, dans 2 600 villes des 50 États américains, ont participé à la deuxième vague de manifestations « No Kings » contre le gouvernement de plus en plus autoritaire et inhumain du président Donald Trump.

21 octobre 2025 | Hebdo L'Anticapitaliste - 772
traduction Henri Wilno

J'étais l'un d'eux, marchant dans un cortège syndical à New York. Les organisateur·ices ont affirmé qu'au moins sept millions d'entre nous ont défilé et se sont rassemblé·es, ce qui en ferait la plus grande journée de manifestations de l'histoire des États-Unis.

Contre quoi protestions-nous ?

D'après les pancartes, les slogans et les commentaires des manifestantEs, les gens sont en colère contre les raids cruels et violents de l'ICE (Immigration and Customs Enforcement, la police de l'immigration et des frontières), contre l'envoi par Trump de la Garde nationale et d'unités militaires dans plusieurs villes, contre le licenciement de centaines de milliers de fonctionnaires fédéraux, contre les attaques visant les programmes de santé, d'éducation et de logement, contre la suppression de la liberté d'expression et de la liberté académique, et contre le racisme des politiques telles que les modifications apportées par Trump au programme d'accueil des réfugiéEs afin de favoriser les Blanc·hes.

Une mobilisation massive

No Kings est organisé par une coalition de 200 groupes, dont les plus importants sont des courants du Parti démocrate comme Indivisible et MoveOn, des ONG comme Public Citizen et l'American Civil Liberties Union, ainsi que le réseau militant 50501. Ce dernier a déclenché le vaste mouvement de résistance en appelant, il y a plusieurs mois, à 50 manifestations dans 50 États en une seule journée.

Trump, le vice-président J.D. Vance et d'autres républicains ont affirmé, de manière absurde, que les rassemblements et les marches étaient remplis de manifestantEs payéEs par George Soros, le milliardaire juif, philanthrope libéral et démocrate. Ils ont suggéré que les manifestations étaient organisées par « antifa », un surnom donné au vaste mouvement antifasciste, qu'ils qualifient d'organisation terroriste violente – bien qu'il n'existe aucune organisation de ce type.

Interrogée sur les manifestations, la porte-parole de Trump a déclaré : « Qui s'en soucie ? Le reste de l'Amérique regardera le football universitaire. » Mais le président n'a pas pu les ignorer et a publié une vidéo générée par intelligence artificielle le montrant en pilote de chasse coiffé d'une couronne, survolant les manifestations et déversant des excréments sur les manifestantEs – démontrant ainsi le mépris qu'il éprouve pour le peuple américain.

Un mouvement populaire et festif

Les gens portaient des banderoles et des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Pas de rois, pas de tyrans ». Partout, les manifestantEs scandaient « Pas de haine, pas de peur, les immigrantEs sont les bienvenu·es ici ». Les manifestations étaient pacifiques partout et, même si les manifestantEs étaient en colère, les rassemblements avaient souvent un caractère festif, célébrant le fait d'être ensemble dans la résistance et de lutter pour des valeurs progressistes.

Si les manifestations étaient sérieuses, certainEs ont également veillé à ce qu'elles soient joyeuses. Des participantEs, imitant les récentes manifestations de Portland, dans l'Oregon, se sont déguiséEs en animaux géants, comme ceux que l'on voit dans les fêtes d'enfants, pour montrer à quel point il était ridicule de prétendre qu'il s'agissait de manifestations violentes de terroristes.

Reprendre les symboles de la démocratie

Pendant des décennies, la gauche a rejeté le drapeau américain, le considérant comme un symbole du racisme national et des guerres menées par les États-Unis contre le Vietnam, l'Irak et l'Afghanistan. Mais aujourd'hui, de nombreux·ses manifestantEs brandissent le drapeau, revendiquant l'Amérique pour la démocratie et la justice sociale.

Un manifestant portait une pancarte sur laquelle on pouvait lire « Make America America Again » (Rendre à l'Amérique son identité américaine), accompagnée d'une liste de ce qu'il considérait comme les valeurs américaines : la liberté d'expression, la science, la liberté de la presse, l'État de droit, la démocratie, le pro-choice (le droit des femmes à choisir l'avortement), la procédure régulière et la diversité.

Pour aller plus loin

No Kings a été un succès, mais nous avons besoin d'un mouvement plus militant, avec des grèves et des manifestations perturbatrices, qui puissent vraiment contester les attaques agressives de Trump contre nos droits et notre bien-être.

Dan La Botz, membre de DSA (Democratic Socialists of America)
Traduit par Henri Wilno

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Discours du maire de Chicago, Brandon Johnson – 18 octobre 2025

Eh bien, êtes-vous prêts à défendre cette démocratie ?

Êtes-vous prêts à combattre le fascisme ?

Êtes-vous prêts à détruire l'autoritarisme, une fois pour toutes ?

Alors que le monde vous entende : pas de rois !

Pas de rois !

Écoutez : il y a, dans ce pays, des gens qui ont décidé — sur l'ordre de ce président — de déclarer la guerre à Chicago et aux villes américaines partout dans ce pays.

Ils ont clairement décidé qu'ils voulaient une revanche de la guerre de Sécession.

Mais nous sommes ici pour tenir bon, pour rester fermes et déterminés : nous ne plierons pas, nous ne nous inclinerons pas, nous ne nous cacherons pas, nous ne nous soumettrons pas à l'autoritarisme qui s'abat sur nous.

Je veux que ce soit parfaitement clair : la tentative de diviser et de conquérir cette nation ne réussira pas, car quand le peuple est uni, la justice triomphe toujours.

Donald Trump utilise ICE comme sa force d'occupation militarisée privée.

Les seules institutions plus financées qu'ICE sont l'armée américaine et l'armée chinoise.

Mais nous disons, et c'est clair : nous ne voulons pas de trouppes dans notre ville. Nous ne permettrons pas que nos villes soient occupées.

Voici maintenant le dernier point : nous devons être absolument clairs non seulement sur ce pour quoi nous nous battons, mais aussi sur ce que nous voulons abattre.

Donald Trump vient de transférer la plus grande concentration de richesse ascendante de l'histoire de ce pays entre les mains des ultra-riches et des grandes entreprises.

C'est un combat pour les travailleuses et travailleurs de ce pays et du monde entier, un combat contre les milliardaires et les intérêts des grandes entreprises.

Certains milliardaires et dirigeants d'entreprise veulent qu'on ait de la compassion pour eux, alors qu'ils viennent de recevoir les plus grandes baisses d'impôt de l'histoire, au détriment de la santé, du logement, de l'éducation, des transports et des bons emplois.

Alors voici ce que nous devons faire maintenant :

Si mes ancêtres, réduits en esclavage, ont pu mener la plus grande grève générale de l'histoire de ce pays — contre les ultra-riches et les grandes entreprises — nous pouvons faire la même chose aujourd'hui.

J'en appelle aux Noirs, aux Blancs, aux Latinos, aux Asiatiques, aux immigrants, aux personnes LGBTQ+ de ce pays : levez-vous pour résister, pour envoyer un message clair aux riches et aux grandes entreprises.

Nous allons les obliger à payer leur juste part d'impôts pour financer nos écoles, nos emplois, notre santé, nos transports.

La démocratie survivra grâce à cette génération.

Êtes-vous prêts à mener le combat devant les tribunaux et dans les rues ?

Dans les villes du monde entier, nous avons déclaré que nous défendrons notre démocratie, que nous défendrons notre humanité, que nous renverserons la tyrannie — et que nous le ferons ensemble.

Que Dieu vous bénisse toutes et tous.

Que Dieu bénisse la plus grande ville du monde.

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Fin de règne (France) : la crise politique dans ses méandres

21 octobre, par Léon Crémieux — ,
Le jeudi 16 octobre, avec le rejet de la motion de censure de la France insoumise (pour 18 voix) contre le gouvernement Lecornu renommé après un premier échec, Macron a réussi (…)

Le jeudi 16 octobre, avec le rejet de la motion de censure de la France insoumise (pour 18 voix) contre le gouvernement Lecornu renommé après un premier échec, Macron a réussi à mettre sur pied pour un temps un nouveau gouvernement dont l'assise sera encore plus faible que les deux derniers (Barnier et Bayrou) qui ont géré les affaires depuis les élections législatives de juin 2024, et n'auront chacun duré que quelques mois.

Tiré d'Europe Solidaire Sans Frontières
19 octobre 2025

Ces dernières semaines, du 8 septembre au 15 octobre, une valse de désignation et démission de Sébastien Lecornu, un fidèle de Macron aura finalement abouti à un gouvernement n'ayant l'appui réel que du président lui-même. Même les groupes partie prenante du « bloc du centre » (Renaissance, Horizon et le Modem) sont en train d'afficher leur prise de distance avec Macron et son gouvernement de fin de règne. Edouard Philippe (Horizon), ancien premier ministre de Macron appelle ouvertement et avec insistance à la démission de ce dernier et à une présidentielle anticipée. Gabriel Attal (Renaissance) lui aussi ancien premier ministre de Macron ne se manifeste que pour marquer ses distances avec celui-ci. Enfin, les Républicains, soutien des deux gouvernements précédents, ont décidé de ne pas participer au gouvernement finalement mis sur pied par le macroniste Lecornu, ne voulant pas être contaminés par la radioactivité de Macron et de ses derniers fidèles.

En clair, on assiste à une fin de règne et un délitement du macronisme, reflet du rapport de force social dans le pays, du rejet massif de sa politique et de ses responsables politiques. Ce désaveu va largement de pair avec une exaspération qui cible les superprofits des grandes entreprises et la richesse toujours plus arrogante des « super riches » (le 15 octobre, en une seule journée, grâce à un bond en Bourse de l'action LVMH, Bernard Arnaud a vu sa fortune -la première de France et la septième au niveau mondial- bondir de 16 milliards d'euros, atteignant 164 milliards d'euros), l'affirmation grandissante de la nécessité d'une justice sociale et fiscale. Cette affirmation s'était reflétée dans les mobilisations sociales de ces dernières semaines, notamment les 10 et 18 septembre.

Cet isolement grandissant, au sein même de la majorité présidentielle, avait amené Lecornu à renoncer à former un gouvernement le 6 octobre dernier après la perte du soutien des Républicains de Bruno Retailleau. Le risque le plus grand était un échec total amenant à une dissolution de l'Assemblée nationale et de nouvelles élections législatives 16 mois après les précédentes. La plupart des sondages prédisent dans ce cas une hécatombe pour les partis politiques du « camp présidentiel » (Renaissance, MODEM, Horizons et UDI) perdant un tiers de leurs voix et la moitié des sièges (162 sur 577 aujourd'hui). Quelle que soit la valeur de cette prévision, aujourd'hui une majorité de la population rejette le président, les deux tiers veulent son départ.

Macron avait mandaté à nouveau Lecornu le jour de sa démission, le 6 octobre, pour arriver à mettre sur pied un gouvernement qui soit surtout capable d'éviter la dissolution et arrivant à faire voter un budget 2026, en reprenant, grosso modo, les mêmes orientations que les deux gouvernements précédents, mais sans être immédiatement renversé. Vu les rapports de force parlementaires, la seule issue était d'obtenir la bienveillance du Parti socialiste, pour éviter qu'une nouvelle motion de censure ne soit majoritaire à l'Assemblée nationale. La France insoumise avait dans tous les cas appelé à censurer tout nouveau gouvernement. Le PCF et les Verts, firent de même, après deux entrevues avec Lecornu qui leur avait enlevé toute illusion sur un changement d'orientation. Comme le RN annonçait aussi qu'il voterait immédiatement la censure, la seule possibilité restait de faire un geste pour obtenir l'aval du PS sans remettre en cause la politique globale pro-patronale d'austérité et sans trop heurter les groupes politiques du camp néolibéral. D'ailleurs, Lecornu, dans sa déclaration de politique générale a voulu aussi flatter la droite et l'extrême droite en s'engageant à écrire dans la Constitution les clauses de l'accord de Bougival sur la Kanaky qui vise à mettre à bas tout processus de décolonisation et qui est dénoncé par le FLNKS.

Au-delà des impératifs politiciens, il y a surtout une crainte et une exigence venant des rangs du patronat, des grands groupes capitalistes. La crainte que le mécontentement social ne débouche sur une explosion sociale, ou tout au moins une forte mobilisation prolongée comme la France en a connu en 1995 ou 2023, une situation qui, vu la faiblesse des partis du centre et de la droite, au minimum remettrait en cause toutes les réformes libérales de la « politique de l'offre » réalisées au profit des capitalistes depuis 2012 et la présidence de Hollande. Sentant la faiblesse politique du pouvoir, le MEDEF avait annoncé un grand rassemblement national le 13 octobre, appelant tous les chefs d'entreprise à venir à Paris pour, explicitement, s'opposer à toute pression fiscale supplémentaire - en clair au maintien de leurs privilèges fiscaux -, s'opposer à toute politique amenant à remettre en cause les quelque 200 milliards d'aides et de dégrèvements budgétaires accordés aux entreprises, à toute politique fiscale frappant les grandes fortunes et leur patrimoine. Un exemple de ces privilèges fiscaux est la loi Dutreil qui permet d'exonérer de l'essentiel des droits de succession, de la fiscalité commune sur les héritages, les donations ou héritages concernant des parts ou des actions de sociétés industrielles ou de « holding animatrice » (une société mère). Cette exonération de classe coûte 4 milliards par an.

Macron a donc réussi à sortir provisoirement de l'impasse. Le PS a volontairement affaibli le front politique de rejet de Macron, la marche chaotique, mais réelle, vers un affrontement social, aidant par la même une majorité des directions syndicales (CFDT, CGC et CFDT et FO) à se sortir de la dynamique de mobilisation engagée depuis le début du mois de septembre. Pour faire cela, Macron a dû faire une grosse concession symbolique : promettre une pause dans l'allongement de l'âge de départ et de la durée de cotisation pour une retraite à taux plein. En clair le gel à 62 ans et 9 mois comme âge de départ à taux plein (avec la condition d'avoir versé 170 trimestres de cotisations), gel jusqu'en 2027, c'est-à-dire la prochaine élection présidentielle. Sans ce gel, chaque année, 3 mois de plus (en âge et en durée de cotisations) seraient nécessaires pour partir à taux plein.

Vu que la question des retraites a été l'affrontement social et politique central depuis notamment 2023, la mesure du gel a pu apparaitre, au moins symboliquement, comme un recul important. 300000 personnes pourraient ainsi en théorie partir trois mois plus tôt à la retraite en 2026 et 2027. Cela pourrait apparaître comme un encouragement, un recul des politiques patronales devant le mouvement social, un recul qui en appellerait d'autres. Mais le PS a préféré se vendre pour un plat de lentilles, et Macron a réussi à réaliser un « gambit », un petit sacrifice qui peut lui faire espérer d'éviter la catastrophe immédiate. Pour l'instant, il sauve l'essentiel, et notamment le peu de crédibilité qui lui reste auprès des groupes capitalistes.

La « suspension » promise n'est qu'un engagement oral de Lecornu qui ne se retrouve pas dans le projet de budget déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale et devrait prendre la forme d'un amendement à la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) qui doit être débattu et voté en novembre/décembre. Les promesses n'engagent donc que ceux qui croient. Mais surtout toute la structure financière des projets de budget de l'Etat et de la Sécurité sociale prévoient plus de 30 milliards d'économies, essentiellement au détriment des classes populaires, salariéEs, retraitéEs. Gel du montant des retraites, du salaire des fonctionnaires, des prestations sociales. Gel aussi du barème des impôts, ce qui amène mécaniquement à une hausse des impôts. Augmentation des impôts des millions des retraités frappant près de 2 millions de foyers, déremboursements de médicaments et des indemnités de maladie. Compression des budgets publics et suppression de 3000 postes de fonctionnaires, aucun tournant pour investir massivement dans la transition écologique, avec une division par deux du Fonds vert, passant à 600 millions d'euros pour les financements des collectivités locales pour les projets concrets vis-à-vis des changements climatiques et du développement des énergies renouvelables. Tout un symbole : le budget des armées augmente de 6,7 milliards quand le projet de budget prévoit 7,1 milliards d'économies pour la Santé.

D'un autre côté, aucune remise en cause des 91 milliards d'exonérations de cotisations sociales dont bénéficient les entreprises, une nouvelle baisse de plus de 1 milliard des impôts de production. Depuis 2021 la baisse de l'ensemble de ces impôts de production (CVAE et CFE) est de 10 milliards par an.

Quant à la justice fiscale, la ligne rouge de Lecornu est la même que celle des gouvernements précédents : pas question de toucher à la fiscalité des entreprises ni celle des revenus venant de l'entreprise. La taxe Zucman qui proposerait 2% d'imposition sur les patrimoines est rejetée d'un même chœur par l'extrême droite, la droite et les macronistes comme sapant les fondements de l'investissement et mettant en péril les entreprises. Pourtant, touchant les 1800 plus gros foyers fiscaux (patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros), elle pourrait rapporter d'après Gabriel Zucman, 25 milliards d'euros par an. En pratique, cela n'aurait pas comme effet de diminuer le patrimoine des ces gros privilégiés mais de diminuer l'accroissement de leur fortune, ce qui est déjà un crime pour les défenseurs du système. Entre 2003 et 2023, en France les 500 plus gros propriétaires d'entreprises ont vu leur fortune multipliée par 9,3, atteignant 1200 milliards d'euros en 2021 (124 milliards en 2003). La taxe ne serait donc qu'un petit correctif dans cet accroissement des richesses sur le dos des classes populaires.

Donc, pas question pour Macron (ni pour les Républicains ou le RN) de remettre en cause les piliers du capitalisme, les « biens professionnels ».

Pour essayer d'éviter les dangers d'une mobilisation sociale, le gouvernement a aussi annoncé une nouvelle conférence sociale sur la retraite et le travail, remettant sur les rails le passage d'une retraite par répartition à une retraite par capitalisation, en faisant miroiter une gestion paritaire syndicat-patronat, avec comme dans de nombreux pays, la porte ouverte à la gestion des groupes bancaires et d'assurances. Le problème est que, comme début 2025, où Bayrou avait mis sur pied un conclave sur les retraites, la majorité des directions syndicales (CFDT, CFTC, CGC et FO) s'engouffrent dans ce nouveau piège dont le seul but est de diviser et de freiner les mobilisations frontales contre la politique d'austérité de ce gouvernement et de ce président fragile.

L'enjeu se décale donc ces derniers jours. Il va s'agir de contrer ces ferments de divisions ouvertes et d'œuvrer à des rassemblements unitaires, des mobilisations autour des exigences de justice sociale, budgétaire et fiscale autour d'axes qui étaient déjà mis en avant dans le programme du Nouveau Front Populaire (NFP). La direction du PS espère se servir électoralement sur les restes du macronisme en se présentant à nouveau sous un visage de gestionnaire compatible avec le néolibéralisme. C'est pourtant cette orientation qui a coulé le PS avec la présidence de François Hollande et beaucoup de militants socialistes ne l'ont pas oublié. Beaucoup, dans les directions des partis de gauche, ont toute leur attention tournée vers les péripéties parlementaires ou la préparation des élections municipales de 2026. Pourtant, l'attention devrait plutôt être tournée vers l'organisation unitaire de la riposte sociale et politique aux politiques patronales.

Les budgets doivent être votés dans les deux mois qui viennent. Semaine après semaine vont apparaître les attaques qu'ils contiennent et la droite elle-même va tenir à y renforcer les attaques sociales.

Aussi comme il y a un an, le PS aura du mal à maintenir une position de bienveillance vis-à-vis d'un gouvernement encore plus faible que ses deux prédécesseurs. Cela rend d'autant plus important que le mouvement social trouve la force de disloquer cet attelage réactionnaire.

Léon Crémieux

P.-S.

• Article écrit pour la revue Viento Sur.

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Menaces américaines au Venezuela : derrière la « guerre contre la drogue »

La tension est à son comble entre le Venezuela et l'administration Trump. Alors qu'elle a déployé plusieurs navires de guerre au large des côtes vénézuéliennes, se disant prêt (…)

La tension est à son comble entre le Venezuela et l'administration Trump. Alors qu'elle a déployé plusieurs navires de guerre au large des côtes vénézuéliennes, se disant prêt à éradiquer un « narco-État » supposément responsable de l'exportation de cocaïne sur son sol, Nicolas Maduro mobilise ses soutiens à Caracas et se dit prêt à « lutter contre l'envahisseur ». Pour légitimer cette confrontation, les États-Unis usent d'une rhétorique de « guerre contre la drogue » employée depuis maintenant cinquante ans pour tenter de liquider la gauche anti-impérialiste. Dans le même temps, l'Équateur, à présent premier pays exportateur de cocaïne au monde, conserve les bonnes grâces de Washington…

28 septembre | tiré de la lettre de Le Vent Se Lève
Donald Trump et son secrétaire d'État Marco Rubio

Frappes militaires en mer des Caraïbes

2 septembre. Les images satellites sont saisissantes : le petit bateau, qui navigue au large des côtes vénézuéliennes mais hors de son espace maritime, est littéralement pulvérisé par une série de frappes provenant de navires militaires nord-américains sillonnant les mers à proximité. Bilan : onze morts.

15 septembre : une deuxième frappe vise un autre bateau, faisant trois morts. Dans les jours qui viennent, les frappes se poursuivent, coulant des navires similaires, avec un nombre de victimes non précisé. A chaque fois, la Maison-Blanche invoque la même rhétorique : ces petits bateaux interceptés au large des côtes vénézuéliennes seraient liés à des gangs actifs dans le trafic de drogues en provenance du Venezuela et à destination des États-Unis. Ils seraient captifs des gangs, à l'instar du « Tren de Aragua », le grand cartel de drogues vénézuélien présent jusque sur le sol étatsunien, et directement mentionné par Donald Trump au cours de plusieurs discours.

Dans sa déclaration à la presse faisant directement suite à cet événement, Donald Trump annonce qu'il a lui-même supervisé l'opération du 2 septembre et que les frappes menées contre les « narcoterroristes » ont permis de détruire des cargaisons de drogue, notamment de fentanyl et de cocaïne, sans pourtant apporter la moindre preuve publique détaillée. Donald Trump affirme également que les frappes menées en mer des Caraïbes pourront laisser place, dans un futur proche, à des frappes terrestres. Dans le même temps, son secrétaire d'état aux affaires étrangères, Marco Rubio, accuse directement Nicolas Maduro d'être un narcotrafiquant à la tête d'un des plus importants cartels de drogue d'Amérique du Sud.

Ces frappes interviennent dans un contexte d'intensification des pressions mises en œuvre par l'administration Trump à l'égard du gouvernement vénézuélien. Elle débute avril 2025 par la mise en place d'un train de sanctions visant une série de haut responsables vénézuéliens. Sont concernés des haut-fonctionnaires de PDVSA, l'entreprise pétrolière nationale vénézuélienne, mais aussi de hauts dignitaires militaires et policiers dont la Maison-Blanche gèle les avoirs. Dans le même temps, le département du Trésor annonce que la récompense associée à la transmission d'informations pouvant mener à la capture du « narcotrafiquant » Nicolas Maduro atteint désormais 25 millions de dollars – un montant qui double quelques mois plus tard.

Le 24 mars 2025, un décret exécutif annonce quant à lui l'imposition d'un tarif douanier de 25% sur tous les biens importés aux États-Unis en provenance de pays qui importeraient du pétrole vénézuélien – qui constitue 79% des exportations du pays. Dans le même temps, le gouvernement de Donald Trump annule la licence autorisant notamment la compagnie américaine Chevron à exploiter et exporter du pétrole vénézuélien vers les États-Unis – pourtant bon marché en comparaison d'autres sources d'approvisionnement. Cette licence, concédée par son prédécesseur, avait pour fonction de pallier les effets du conflit ukrainien sur la fourniture de pétrole.

Finalement, à partir du 7 août 2025, la marine américaine est déployée en mer des Caraïbes. Les frappes militaires et les menaces d'intervention terrestre intervenues début septembre 2025 sont donc l'aboutissement d'un long processus, qui vise à faire du Venezuela un paria de la communauté internationale, au même titre que Cuba ou l'Iran.

Toute communication diplomatique entre l'administration de Trump et celle de Maduro est à présent rompue, au grand dam de ce dernier. Jusqu'à l'élection de Donald Trump, plusieurs leviers étaient activés de part et d'autres en faveur d'une normalisation politique, qui n'a jamais aboutie : accords portant sur la libération de prisonniers américains, octroi de licences pétrolières, permis de travail accordés à des ONG, garantie apportée par Maduro à l'égard de la droite vénézuélienne. Suite à l'accession au pouvoir de Donald Trump et la nomination de son secrétaire d'état Marco Rubio, violemment hostile à la gauche latino-américaine, ces leviers ont disparu.

Milices d'« auto-défense populaire » à Caracas

Ces tentatives de déstabilisation en rappellent d'autres. Le 11 avril 2002, un coup d'État menée par la droite vénézuélienne avec l'appui de l'administration de George W Bush renversait, pour quelques heures, le président Hugo Chávez. Arrêté par des membres de l'État-major vénézuélien à la suite de manifestations anti-gouvernementales – partiellement financées par des fonds américains qui transitaient via la National Endowment for Democracy (NED). Le chef du patronat vénézuélien, Pedro Carmona, en contact direct avec l'administration Bush, s'était alors autoproclamé président intérimaire et avait été immédiatement reconnu par les États-Unis. Leur intérêt dans l'affaire était évident : la nationalisation de l'industrie pétrolière amorcée par Hugo Chávez lésait directement les entreprises américaines. En moins de 48 heures, cependant, une contre-offensive populaire permettait à Chávez de revenir au pouvoir. La nationalisation était sauve, les Américains allaient demeurer persona non grata dans le secteur de l'or noir vénézuélien. Et les années fastes du « chavisme » – marquées par une réduction historique de la pauvreté – allaient commencer.

Vingt-trois ans plus tard, la configuration est autre. Ébranlé par une décennie de désastre économique, au cours duquel le PIB vénézuélien a été divisé par dix – malgré une embellie récente, consécutive à la hausse des cours post-pandémie –, le chavisme tente néanmoins de réactiver la dynamique anti-impérialiste qui avait permis à Hugo Chávez de demeurer au pouvoir. Les centaines de milliers de sympathisants descendus dans les rues de Caracas en 2002 pour exiger le retour du Comandante sont devenus un leitmotiv clef de l'épopée chaviste. Leur souvenir en tête, Nicolas Maduro a lancé un grand plan de « mobilisation populaire » dans les semaines qui ont suivi l'annonce du déploiement naval américain en mer des Caraïbes. Dès le 19 août, 4,5 millions de miliciens « d'auto-défense » sont mobilisés.

Ces dispositifs de « mobilisation populaire », axés sur la mobilisation de la population civile, ont été élaborés par Cuba durant la guerre froide, notamment au cours du débarquement avorté dit de la baie des Cochons (1961) avant d'être exportés à Caracas au cours des années 2000. Levier de contrôle pour le parti chaviste, ils se sont également convertis en réseaux clientélistes, permettant au pouvoir de drainer ses maigres ressources vers ses sympathisants.

« Guerre contre la drogue » et anti-impérialisme

Cette rhétorique de « guerre contre la drogue » est loin de constituer une nouveauté. Elle trouve son origine dans un discours du président républicain Richard Nixon, prononcé le 17 juin 1971, et faisant de la drogue « l'ennemi public numéro un », alors même que la Guerre froide bat son plein. Il s'agit à l'époque de combattre l'explosion d'un marché en plein essor – notamment celui du cannabis – accusé de menacer les valeurs « chrétiennes » et de nuire à la stabilité économique du pays.

Dans le sillage du discours de Nixon, la Drug Enforcement Agency (DEA, Agence Anti Drogue) est créée. Dans les années 1980 puis 1990, la « guerre contre la drogue » prend un tournant interventionniste, en particulier en Amérique latine, principal foyer d'exportation du cannabis, puis de la cocaïne depuis les Andes boliviennes et péruviennes. La Colombie, considérée comme le principal foyer de production et d'exportation de cocaïne, fait l'objet d'un ciblage particulier : ce sera le « Plan Colombie ». Il favorise la mise sous perfusion de l'armée colombienne qui doit désormais se dédier toute entière à l'éradication des cartels de Medellin et de Cali.

Cette « guerre contre la drogue » prend rapidement une autre tournure. En Colombie, comme au Pérou ou en Bolivie, elle est bientôt le prétexte d'une offensive menée par les États-Unis et la droite latino-américaine contre des organisations sociales et syndicales.

Le cas bolivien est particulièrement éclairant. Les années 1990 voient l'émergence dans le Chapare – l'une des principales régions productrices de feuille de coca, associée par les États-Unis à la cocaïne – d'un large mouvement paysan opposé à l'impérialisme américain, bientôt symbolisé par le leader syndical Evo Morales. Les cocaleros boliviens rejettent l'implantation de la « guerre contre la drogue » et réclament notamment le droit de cultiver la feuille de coca, dont la production se destine historiquement en Bolivie à un marché de consommation traditionnelle parfaitement légal. Ils réclament aussi la fin de la mainmise des Etats-Unis sur l'armée bolivienne, cette dernière étant largement acquise à leurs intérêts.

Les différents gouvernements de droite qui se succèdent en Bolivie mettent alors en place des mesures de répression et des campagnes d'éradication de nombreuses cultures traditionnelles de feuilles de coca. Plusieurs cocaleros meurent sous les balles de l'armée bolivienne, directement appuyée par la DEA. Ainsi, l'objectif initial de lutte contre le narcotrafic, se transforme bientôt sous couvert de « guerre contre la drogue » par un véritable programme de liquidation d'un mouvement paysan bolivien perçu à juste titre comme résolument anti-impérialiste.

La même logique se déploie en Colombie. Alors que le « Plan Colombie » se destine au départ à l'éradication des cartels de drogue de Medellin et de Cali, ses objectifs sont progressivement redéfinis par les gouvernements colombiens, avec l'assentiment des États-Unis. L'armée colombienne, mise sous perfusion économique par Washington, s'oriente rapidement vers l'éradication des guérillas aux discours « anti-impérialistes » aux prises avec l'État colombien, mais aussi de nombres d'organisations syndicales, sociales ou indigènes jugées complices des cartels de drogue, souvent sans fondement. De même, elle favorise l'apparition de groupes paramilitaires dans les campagnes du Magdalena Medio ou d'Antioquia, auteurs de nombreuses exactions à l'encontre des populations, et devenant eux aussi des acteurs centraux du circuit de la cocaïne. Progressivement, les acteurs de la « guerre contre la drogue » deviennent, avec les narcotrafiquants, les principaux responsables des atteintes aux droits de l'homme commis contre les populations civiles dans les années 1980 et 1990.

L'un des derniers bastions d'opposition aux États-Unis ?

Si le gouvernement de Nicolas Maduro se démarque, depuis son tournant autoritaire à la fin des années 2010, se démarque d'une gauche latino-américaine résolument progressiste et démocrate, le Venezuela demeure l'un des rares États latino-américains encore opposés à la politique étrangère américaine. Cette campagne massive de déstabilisation, qu'elle vise à un véritable « changement de régime » ou simplement à un affaiblissement de ce que les États-Unis perçoivent comme le pouvoir de nuisance du Venezuela au niveau régional, entend ainsi faire tomber l'un des derniers bastions de l'anti-impérialisme en Amérique latine.

Du reste, derrière la rhétorique actuelle des États-Unis se cache une politique anti-drogue incohérente. La principale route de la drogue à destination des États-Unis passe toujours par la Colombie puis par le Mexique, et non par les côtes vénézuéliennes. En termes de part dans la production mondiale de cocaïne, le Venezuela, qui ne figure même pas sur la liste des pays producteurs de substances narcotiques selon le Rapport mondial sur les drogues de l'ONU, fait bien pâle figure face à la Colombie, qui représente toujours 70% de la production mondiale de cocaïne, ou même face au Pérou et ses 20%, deux pays qui ne pâtissent pourtant pas des mêmes tentatives de déstabilisation. Le cas de l'Équateur est lui aussi particulièrement révélateur. Alors que la production et le trafic de cocaïne y ont explosé depuis la fin de la séquence progressiste entamée en 2006 par Rafael Correa et l'installation au pouvoir de Daniel Noboa à partir de 2024 – générant l'un des taux d'homicide les plus élevés d'Amérique latine : 47 pour 100 000 habitants en 2023 -, le gouvernement de droite néolibérale de Daniel Noboa fait toujours figure d'allié indiscutable pour les tenants nord-américains de la « guerre contre la drogue ». Une guerre qui fait rage depuis maintenant cinquante ans dans une Amérique latine toujours en lutte pour sa souveraineté.

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Monocratie, nomocratie, régime démo-autoritaire… Sur le caractère unicolore du gouvernement caquiste

21 octobre, par Guylain Bernier, Yvan Perrier — , ,
La monocratie correspond à une « forme de gouvernement où le pouvoir effectif réside dans la volonté du chef de l'État » (Dictionnaire Le Robert). Manifestement, François (…)

La monocratie correspond à une « forme de gouvernement où le pouvoir effectif réside dans la volonté du chef de l'État » (Dictionnaire Le Robert). Manifestement, François Legault présente de plus en plus, par les temps qui courent, des signes inquiétants qu'il entend imposer ses choix et ses volontés à certains de ses ministres (Duranceau, Boulet et Jolin-Barrette notamment), à ses députéEs caquistes (qui vont voter pour l'adoption des lois voulues par le chef), aux députéEs de l'Opposition de l'Assemblée nationale et ultimement à la totalité de la population du Québec. En ce sens, il se comporte en pure et authentique monocrate. À l'horreur de ce gouvernement d'un seul homme s'ajoute la parole mensongère et insupportable d'au moins un de ses ministres les plus en vue en ce moment…

Du monocrate au nanocrate

Il s'agit de son ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette. Au sujet de son projet d'inscription dans une éventuelle constitution québécoise du droit des femmes à l'avortement, il prononce des déclarations loufoques, ronflantes et complètement insignifiantes, lire même absolument débilitantes. Il est convaincu que l'inscription de ce droit dans un document législatif, pompeusement coiffé du titre de « Constitution », en ferait une chose immuable et intouchable par les prochaines et les prochains parlementaires. Pour ce qui est des éléments de démonstration irréfutables à ce sujet ? Ils se font attendre. Monsieur Simon Jolin-Barrette n'apporte aucun fait vérifiable ou incontestable ici. Il demande, autrement dit, à être cru sur parole. Au Canada, l'immuabilité constitutionnelle n'existe pas, sauf erreur de notre part, il ne semble y avoir que les droits ancestraux des autochtones qui semblent jouir d'une protection à l'épreuve du temps et des gouvernements changeants (voir à ce sujet les articles 25 et 35 de la Loi constitutionnelle de 1982). La preuve que des modifications constitutionnelles sont possibles au Canada la voici : le gouvernement du Québec est parvenu, en 1997, à faire modifier, avec l'assentiment des deux chambres du Parlement canadien et de l'Assemblée nationale du Québec, l'article 93 de l'AANB de 1867[1]. Nous en avons déjà trop d'avoir à endurer un monocrate. Il ne faut quand même pas nous prendre pour des cruches à remplir jusqu'à ras bord. Nous ne vivons pas encore dans une nomocratie, c'est-à-dire un régime dans lequel une loi s'avère fixée ad vitam aeternam, une fois pour toutes ou à tout jamais. Ce qui n'est pas le cas des lois en vigueur au Canada et au Québec. Il est même prévu, à l'article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982, une formule d'amendement concernant « la charge de la Reine ». Même le principe monarchique peut être modifié ou aboli éventuellement au Canada. S'imaginer que l'inscription du droit à l'avortement dans la « Constitution du Québec » protègerait ce droit à tout jamais, relève du domaine de la fabulation fantaisiste, d'une idée saugrenue, d'une illusion absurde et du mensonge grotesque.

Sur le caractère démo-autoritaire du gouvernement Legault

En cette dernière année d'exercice du pouvoir par François Legault, si personne ne l'arrête, ou le rappelle à la raison, nous semblons nous diriger vers un gouvernement qui présente les caractéristiques d'un État démo-autoritaire. C'est-à-dire, quand le groupe parlementaire majoritaire s'incline devant la volonté du chef du gouvernement, quand la direction politique du chef s'exerce de manière autoritaire (en voulant notamment interdire aux associations, aux groupes, aux organismes, etc., leur droit de contester devant les tribunaux certaines lois déclarées par le gouvernement comme protégeant la « nation québécoise »), il y a lieu de s'interroger sur la nature de ce pouvoir politique qui s'appuie sur des résultats électoraux largement minoritaires et décide de suspendre, au nom d'un principe discutable, le droit de contester certaines lois gouvernementales devant des juges. On peut se demander si la démocratie parlementaire ne prend pas alors une direction autoritaire, c'est-à-dire, pour être plus précis, une direction démo-autoritaire.

Sur la légitimité du gouvernement Legault

Il faut rappeler ici que lors de l'élection générale du 3 octobre 2022, sur 6 302 789 électrices et électeurs inscritEs, la Coalition avenir Québec a obtenu 1 685 573 votes (soit 26,74% des voix). Elle a fait élire 90 députéEs sur 125. Un résultat étonnant qui présente une distorsion aberrante. La CAQ a certes la légitimité de pouvoir gouverner, mais jusqu'à quel point peut-elle prétendre être l'incarnation de la voix du peuple ? À une certaine époque, la volonté du roi était réputée conforme à celle du peuple : Rex est populus. Il y a, par contre dans une démocratie élective, une limite à avoir à supporter une fiction sans mot dire et sans maudire… Il n'y a, en ce moment, comme depuis fort longtemps, en raison du mode de scrutin uninominal à un tour, aucune adéquation automatique entre la volonté gouvernementale ou celle du premier ministre avec la volonté du peuple. Jusqu'à quel point avons-nous à accepter les fantasmes législatifs ou constitutionnels d'un seul homme ? Nous ne sommes pas dans un régime de souveraineté absolue. Ce gouvernement moribond, qui est à la traîne dans les sondages, peut bien prétendre se référer à la nation, il n'en reste pas moins que nous sommes témoins d'une démarche de François Legault qui relève de la volonté chimérique d'un politicien provincial qui veut affaiblir les syndicats et se présenter, sur d'autres enjeux, en authentique pseudo défenseur des droits des femmes. Les alignements du premier ministre comptable et affairiste trouvent plutôt leur inspiration dans une pure volonté de commandement unilatéral, car tout porte à croire qu'en ce moment, hors de son point de vue et de ses croyances, point de salut !

Une réaction compréhensible néanmoins

Malgré les critiques avancées, auxquelles s'ajoutent notamment des tergiversations qui ont fait réagir (la saga du troisième lien), des investissements perdus (Northvolt), des dépassements de coûts excessifs sur certains projets numériques (SAAQclic) et des décisions sur l'augmentation de salaires des députéEs, avant de régler les conventions collectives, il y a lieu de reconnaître qu'aucun parti politique n'est parfait (ce qui inclut le nôtre). Mais c'est devant l'adversité que se mesure la valeur d'un parti. Autrement dit, les représentantEs de la CAQ, en premier lieu le premier ministre, ont alors le devoir de démontrer à la population québécoise à la fois leur humilité par rapport aux décisions prises qui ont mené à des résultats douteux et de contrebalancer le défaitisme à leur égard en mettant l'accent sur des réalisations positives autant passées qu'à venir. Un grand facteur joue malheureusement contre le parti, c'est-à-dire le temps. Dans l'empressement, les faux pas peuvent se produire plus souvent qu'autrement, d'où l'importance de choisir des objectifs avec finesse. Cela signifie donc d'identifier des projets en nombre limité, mais suffisamment importants pour attirer les regards et susciter la curiosité. Mais la tâche exige aussi d'établir un échéancier plausible, tout en exposant la justesse de la planification en cours qui mériterait d'être poursuivie par ses initiatrices et initiateurs déjà en position de pouvoir.

Si la démarche suggérée insinue en quelque sorte une stratégie de charme auprès de la population, une seconde partie exige de miser non sur l'image à communiquer, mais sur les compétences des personnes ; autrement dit, sur leur capacité à la fois de dresser les étapes d'élaboration des projets – de loi ou autres –, de définir les échéanciers et surtout d'expliquer, dans l'art de la communication claire, les raisons derrières ces initiatives. Ces raisons ne doivent pas simplement reposer sur ce qui est attendu, bien plutôt sur les effets recherchés au nom de l'État et de la société civile, tant du point de vue économique, certes, que du point de vue social et sociétal, ce qui devient présentement essentiel en situation d'incertitude provinciale, nationale et avec l'international, à laquelle s'ajoute la morosité exprimée à l'endroit de l'actuel gouvernement.

Sans conteste, la pente est ardue pour les caquistes. L'annonce d'une constitution québécoise semble donc faire partie des quelques projets sur lesquelles le parti mise afin d'attirer les regards et donc d'inciter une discussion. Or, le temps devient un facteur majeur qui peut créer l'inverse de ce qui est recherché. En restant abstrait dès le départ sur les étapes de la discussion, les échéanciers ainsi que la valeur ajoutée perçue et susceptible d'être désirée par la population québécoise, le ministre Jolin-Barrette dévie de l'idéal d'une planification qui donnerait plus de poids à sa démarche. Voilà les risques de l'empressement, alors qu'un autre projet aurait peut-être été préférable dans les circonstances. L'enjeu du temps crée en plus une tendance à vouloir tout mener de front, sans recul, ce qui donne l'impression d'un autoritarisme qui peut effectivement devenir réel. Cette poigne sert à qualifier ipso facto la personne placée à la tête du parti, à savoir le chef et premier ministre. Bien que cette situation ne soit pas désirée par le principal intéressé, ses actions prouvent le contraire et donnent du poids à l'explication par l'empressement, du moins en raison du contexte, en espérant qu'il ne s'agit point d'une volonté délibérément disposée en ce sens. Si les présidents et premiers ministres autoritaires semblent avoir la cote, avec tous les effets pervers sous-jacents, il y a lieu de se questionner sur le type de dirigeantE que souhaite avoir les Québécoises et les Québécois. Une déduction rapide voudrait que leur choix penche du côté d'une personne raisonnable, soucieuse du bien commun, apte à réagir devant l'adversité, mais jamais celle-ci ne devra brimer les droits et libertés des individus et des collectivités.

Néanmoins, il y a une réaction, même si certaines personnes la juge trop peu trop tard. Pour la CAQ, il s'agit d'être convaincante aux yeux de la population québécoise, peu importe les critiques journalistiques et autres. Reste à savoir si les projets associés à cette réaction peuvent résonner jusque dans les intentions de vote. À la lumière de la présente critique, il faudrait faire plus et mieux. Le projet d'une constitution québécoise ne peut se faire sans un grand débat, ce qui ne semble pas apparaître jusqu'ici dans les intentions de la CAQ.

Conclusion

Le projet de constitution comporte une disposition qui vise à neutraliser, voir annihiler, la possibilité pour certains groupes de contester juridiquement certaines lois votées par l'Assemblée nationale. Ceci, selon nous, ouvre toute grande la porte à l'arbitraire de la décision politique. Place dorénavant – si le projet annoncé est adopté – à l'absolutisme du « décisionnisme caquiste ». Le souci d'affirmation de la suprématie de la souveraineté (parlementaire ou non) risque de l'emporter sur celui de la gouvernementalité. Il fait de moins en moins de doute que nous sommes maintenant devant un gouvernement qui présente des signes inquiétants de « décisionnisme discrétionnaire » habité par de l'inimitié, de la haine et de la vengeance face aux organisations syndicales.

Il faut oser interroger la légitimité des fins poursuivies par le gouvernement Legault. La légitimité s'articule ou prend forme sur le consentement des citoyenNEs et, lors de la dernière élection générale au Québec, c'est légèrement plus d'unE électeurTRICE sur quatre qui a accordé son vote à la CAQ. Nous pouvons aussi nous demander qu'en sera-t-il des lois imposées unilatéralement – pour ne pas dire à la va-vite – par un gouvernement de fin de mandat, voire de fin de règne ? Le prochain gouvernement n'aura probablement pas d'autre choix que de « scrapper » (pour reprendre une expression de Jacques Parizeau) ce que le premier ministre – mal avisé en ce moment – veut imposer, le tout grâce à sa majorité parlementaire aux assises électorales fragiles et largement minoritaires.

Le gouvernement de la CAQ ferait mieux de faire adopter des lois pour combattre la crise du logement, la dégradation du climat, le sous-financement de l'éducation, la pauvreté qui atteint de nouvelles couches de la population et ce autant chez les personnes âgées que les jeunes, etc…

La droite que représente François Legault n'est pas l'incarnation du droit. Le droit implique le droit de s'adresser au juge qui elle ou lui aura à définir le juste, le légal ou le constitutionnel. Il découle de ce précepte que nulle ou nul, selon nous, ne doit voir son droit limité par le législateur de contester devant les tribunaux la constitutionnalité des lois adoptées par une législature ou un Parlement. Et nous ajoutons que le droit des femmes à l'avortement n'a pas besoin d'être inscrit dans une loi ou une constitution.

Dans son Testament politique, Richelieu a écrit ceci : « en matière d'État, qui a la force a souvent la raison ». Nous ajoutons et précisons à notre tour que le parti qui détient la majorité parlementaire n'a pas nécessairement raison dans les orientations qu'il veut imposer unilatéralement et arbitrairement à la population ou à certains groupes ciblés.

Terminons le tout par une brève remarque de Hobbes (1971, p. 717) au sujet de la tyrannie : « Le nom de tyrannie ne signifie rien de plus, ni rien de moins, que celui de souveraineté ».

François Legault semble vouloir profiter des derniers mois qui lui restent, à titre de premier ministre, pour agir en souverain… souverain tyran, au sens hobbesien bien entendu.

Yvan Perrier

Guylain Bernier

17 octobre 2025

22h

Note

[1] Il y a eu huit modifications à la Constitution du Canada depuis 1982 : « 1. Proclamation de 1983 modifiant la Constitution – Modification multilatérale sur les droits des Autochtones, selon la règle des sept provinces représentant 50 % de la population. 2. Modification constitutionnelle de 1987 (Loi sur Terre-Neuve) – Portait sur l'inscription dans la Constitution des droits des écoles confessionnelles des Assemblées de la Pentecôte à Terre-Neuve. 3. Proclamation de 1993 modifiant la Constitution (Loi sur le Nouveau-Brunswick) – A consacré l'égalité des communautés francophone et anglophone du Nouveau-Brunswick. 4. Modification constitutionnelle de 1994 (Île-du-Prince-Édouard) – A dégagé le Canada de l'obligation d'assurer un service de traversier à l'Île-du-Prince-Édouard une fois que serait achevée la construction du pont de la Confédération. 5. Modification constitutionnelle de 1997 (Québec) – A permis au Québec d'offrir un système scolaire linguistique plutôt que confessionnel. 6. Modification constitutionnelle de 1997 (Loi de Terre-Neuve) – A permis à la province de créer un système scolaire laïc. 7. Modification constitutionnelle de 1998 (Terre-Neuve) – A permis à la province d'abolir le système scolaire confessionnel. 8. Modification constitutionnelle de 2001 (Terre-Neuve-et-Labrador) – A changé dans les conditions de l'union de Terre-Neuve le nom de cette province, qui est devenu « Terre-Neuve-et-Labrador » (https://www.canada.ca/fr/affaires-intergouvernementales/services/sujet-canada.html. Consulté le 17 octobre 2025).

Références

Hobbes, Thomas. 1971. Léviathan. Paris : Éditions Sirey, p. 717.

Thucydide. 1966. Histoire de la guerre du Péloponnèse. Tome I. Paris : GF-Flammarion, p. 151 (II : chap. LXVI).

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Les élections municipales et l’oubli de Nooran

21 octobre, par Jonathan Durand Folco — , ,
Les élections municipales battent leur plein un peu partout au Québec, mais il reste un gros éléphant dans la pièce : la violence policière. Le cas récent d'un jeune tué par la (…)

Les élections municipales battent leur plein un peu partout au Québec, mais il reste un gros éléphant dans la pièce : la violence policière. Le cas récent d'un jeune tué par la police à Longueil a suscité beaucoup d'émoi dans les médias, avant de retomber aussitôt dans l'oubli, comme si rien ne s'était passé. Or, cet événement est particulièrement révélateur d'un angle mort de la politique municipale, y compris parmi les personnes qui se réclament d'une vision progressiste et inclusive.

16 octobre 2025 | tiré de Métapoliques | Photo : Des participants à la marche silencieuse en hommage à Nooran Rezayi ont déposé des fleurs à l'intersection des rues Joseph-Daigneault et de Monaco le 27 septembre 2025. Photo : Radio-Canada / Emma Guerrero Dufour.
https://metapolitiques.ghost.io/les-elections-municipales-et-loubli-de-nooran/

Beaucoup de choses ont été écrites sur Nooran Rezayi, cet ado de 15 ans abattu par un agent Service de police de l'agglomération de Longueuil (SPAL) le 21 septembre dernier. Cette tragédie est d'autant plus déplorable qu'elle était malheureusement prévisible, comme l'a bien souligne Philippe Néméh-Nombré dans sa lettre ouverte Il n'y a rien à espérer du BEI :

Tout était en place. Une construction de la jeunesse racisée comme menaçante, dangereuse. Un accès à l'espace public différemment distribué. Des voisins inquiets devant la menace perçue et la présence pour eux incongrue de ces jeunes, assez inquiets pour convoquer une institution, la police, dont la fonction historique est précisément d'assurer le confort de certains aux dépens d'autres. Et puis l'oreille tendue de celle-ci, sa capacité de tuer, son autorisation de tuer, sa rapidité à tuer.

Dans le cas spécifique de Nooran, un mystère demeure entourant sa mort. S'agit-il d'un "meurtre gratuit", considérant que le jeune n'était pas armé ? S'agit-il d'une d'une simple bévue policière, comme il s'en fait trop souvent avec les jeunes hommes racisés ? Certains témoignages affirment que Nooran aurait mis la mis dans son sac avant que le policier tire, mais un reportage troublant de Pivot met en lumière une autre version. L'avocate Sondes Jelassi relate que "durant toute l'intervention des policiers, ses mains étaient au niveau de ses épaules et son sac à dos était dans sa main." De plus, le policier était connu des jeunes du quartier, plusieurs ayant souligné son comportement problématique et raciste.

« Le monsieur qui a fait l'acte, qui a tué Nooran, il était connu des jeunes et plusieurs fois ils ont été intimidés par cette personne-là », explique aussi Hadjira Belkacem. « On a déjà eu des affaires avec ce policier-là, c'est-à-dire qu'on connaissait déjà le policier », affirme l'un d'eux. « J'ai eu une contravention, lui aussi a eu une contravention, et lui aussi à cause de ce policier. À chaque fois, il nous faisait des discours haineux, il nous insultait, nous criait dessus. » « Il faisait de l'abus de pouvoir », lance un deuxième jeune. « Il nous disait : “fermez-la, vos gueules”, à chaque fois, en nous visant, même », poursuit le premier.

Face à ce meurtre tragique et préoccupant, quelques enquêtes seront menées pour faire la lumière sur les événements. Il y a d'abord le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), qui est une institution maintes fois critiquée pour son opacité. Comme le souligne la professeure en sciences juridiques Aurélie Lanctôt dans sa chronique Qui surveille la police ? :

Depuis son entrée en activité en 2016, le mal nommé BEI est critiqué à la fois pour son manque d'indépendance, d'impartialité et de transparence. Dans ses communications publiques, le BEI choisit les faits qu'il met de l'avant pour appuyer les conclusions de ses enquêtes. La preuve administrée — par exemple, la version des événements d'autres témoins de l'intervention — , on n'y a pas accès. Des communiqués laconiques sont publiés, les policiers sont exonérés, on passe à un autre appel.

Faut-il faire confiance au BEI ? Selon un article de Radio-Canada, 467 enquêtes ont été mené depuis la création de ce bureau en 2016. "Deux d'entre elles se sont conclues par des procédures judiciaires en raison d'accusations criminelles, ce qui représente 0,43 % des enquêtes. Et aucune n'a conduit, pour l'instant, à une condamnation devant les tribunaux pour une personne tuée par un policier." Voilà qui est rassurant.

Parallèlement, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) mènera sa propre enquête pour savoir ce qui s'est passé durant les deux heures qui se sont écoulées entre la mort de Nooran et l'arrivée des agents du BEI. Encore une fois, ce sont des policiers qui enquêteront sur d'autres policiers. Pour sa part, le député solidaire Andrés Fontecilla a réclamé une enquête publique, et le ministre de la Sécurité publique, Ian Lafrenière, ne semble pas fermé à l'idée. Mais "il a toutefois précisé que ce serait seulement au terme des processus déjà en cours au BEI et à la police de Montréal (SPVM), si ces enquêtes ne vont pas au fond des choses." D'ici là, la CAQ aura perdu ses élections, et qui sait si l'ex-policier Ian Lafrafrenière ira rejoindre ses anciens collègues.

À ce moment-ci, il est naïf et même irresponsable de faire confiance aux corps policiers pour mener ce genre d'enquêtes. Nous devons nous tourner vers d'autres institutions, comme les municipalités qui ont une responsabilité directe vis-à-vis les services locaux de police.

La démission tranquille des municipalités

Les problèmes du profilage racial et des violences policières sont déjà bien connus, mais à peu près rien n'a été fait concrètement pour endiguer ces problèmes. Les élu·e·s municipaux n'hésitent pas à faire preuve d'empathie, par des messages de condoléances bien sentis, mais pour affirmer aussitôt qu'il faut faire confiance aux institutions, à la police et aux bureaux d'enquête qui ont maintes fois montré leur manque de transparence. La mairesse de Longueuil Catherine Fournier (que j'apprécie par ailleurs), a publié ceci sur sa page Instagram le 25 septembre :

Les proches de Nooran Rezayi ont besoin de réponses. J'ai écrit au Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) pour exprimer ma préoccupation à l'effet que tous les détails pertinents concernant la mort troublante de Nooran devraient être entièrement communiqués au public au terme de l'enquête. La transparence est essentielle. Il en va de la confiance envers nos institutions.

On y voit là une déclaration empathique qu'il faut saluer, mais qui reste au niveau des gestes symboliques. Le professeur Ted Rutland, géographe spécialiste des violences policières, a mis en évidence la réponse laconique de la mairesse de Longueuil lors d'une séance du conseil municipal du 1er octobre 2025 :

Catherine Fournier s'est fait demander mercredi soir ce qu'elle ferait, concrètement, pour mettre fin à la violence policière. Le citoyen (Jean Christophe) a mentionné trois actions qui pourraient réellement réduire la violence policière : retirer la police des 80% d'appels 911 qui n'ont rien à voir avec le crime, désarmer la police, définancer la police et réinvestir dans les programmes communautaires. Mme Fournier a répondu que nous devons faire confiance à nos institutions publiques et qu'elle "réitère son plein soutien et sa confiance à la police, qui est extrêmement affectée et ébranlée" par le meurtre de Nooran.

On comprend certes la grande difficulté pour une élue de commenter le meurtre d'un ado sur son territoire en pleine campagne électorale, alors que l'enquête ne fait que débuter. Mais ce sont précisément ce genre de réponses vagues et convenues qui brisent le lien de confiance avec les élu·e·s d'une part, puis les communautés concernées et les groupes militants pour la justice sociale d'autre part. On fait preuve d'empathie, mais rien ne bouge. On réitère son entière confiance envers la police, alors que celle-ci met tout en œuvre pour préserver le système établi. Comme le souligne Ricardo Lamour dans une récente chronique, l'assassinat de Nooran n'est pas un incident isolé.

De Longueuil à Montréal, les "municipalités amies des enfants" se parent de labels, pendant que des enfants comme Péniel, Nooran, Nicholas et Ariel paient le prix du déni politique. [...] Cette accréditation de « municipalité amie des enfants » offre-t-elle vraiment les fondations d'une protection des enfants face à la violence d'État ?

Longueuil a reçu la certification "municipalités amies des enfants" décerné par l'organisme Espace Muni et UNICEF Canada en 2018. Comme beaucoup de certifications dans le domaine du développement durable et de l'écologie, le diable se trouve dans les détails ; il faut toujours se demander si les étiquettes méritent la confiance qu'on leur accorde, surtout lorsqu'on sait que c'est la logique marketing qui prime, en affaires comme en politique.

Longueuil n'est pas la seule ville dans cette situation. À Montréal, rappelons que la mairesse sortante Valérie Plante a reconnu l'existence du racisme systémique en juin 2020, puis a créé un Bureau de lutte contre contre le racisme et les discriminations systémiques en 2021. Ce fut là un gain important suite eu meurtre de Joyce Echaquan, des pressions des groupes militants locaux et des grandes mobilisations suivant l'assassinat de George Floyd aux États-Unis, dans un contexte de déni complet du racisme systémique par le gouvernement Legault. Après cela, notons la nomination de Fady Dagher comme directeur du SPVM en 2023, policier d'origine libanaise qui s'est démarqué par son approche innovante de police communautaire (le programme RÉSO) qu'il avait expérimenté à Longueuil quelques années plus tôt. Les choses ont-elles changé depuis ? Plus ou moins. Comme le souligne Ricardo :

Le chef Fady Dagher s'est longtemps vanté d'avoir instauré à Longueuil une culture policière plus humaine, mais il avoue lui-même que ses réformes, bien que suscitant curiosité et intérêt, se heurtaient à une forte résistance syndicale. Il faut voir toute la force du syndicat policier doté d'un immense pouvoir de pression sur les administrations municipales. Peut-être est-ce là aussi ce qui explique l'absence de véritables réformes en matière de répartition des ressources aux unités de l'administration. Les budgets policiers explosent année après année, au détriment du reste.

Cela ne veut pas dire que les administrations municipales ne font rien pour changer les choses en la matière. Elles tentent des réformes, souvent timides, qui n'osent pas remettre en question le puissant lobby policier qui exerce un pouvoir démesuré sur les villes. Ces mesures sont donc vouées à l'échec : il y a parfois des avancées mineures, mais au final, elles reproduisent le statu quo. C'est la fameuse "confiance envers les institutions" qu'on martèle, alors qu'il faudrait les bouleverser de fond en comble. C'est en ce sens qu'on peut parler de "villes démissionnaires", c'est-à-dire de municipalités qui n'osent pas mettre leurs culottes en matière d'encadrement des forces de l'ordre. Comme l'affirme Ricardo :

Les candidat·es municipaux évitent de se positionner sur les enjeux de fond – au-delà des timides communiqués suite à des tragédies humaines causés par leurs employés –, et de s'attaquer à ce qui relève de leurs véritables prérogatives, soit : l'adoption des budgets municipaux, l'orientation des conseils de sécurité publique, la reddition de comptes et l'encadrement des pratiques policières.

Cela n'est pas une fatalité, mais un choix politique. Comment peut-on "réformer la police" au-delà de belles déclarations solennelles ? Plusieurs propositions existent déjà dans la littérature académique et les milieux militants, et certains pays vivent déjà dans un monde où la police n'est pas aussi armée et dangereuse pour la population. Il est temps d'avoir un débat public sérieux sur les options existantes pour créer une société plus juste et décente, où les forces policières auront un rôle moindre à jouer pour assurer la sécurité publique.

Désarmer et/ou définancer la police ?

À quoi ressemblerait un programme progressiste en matière d'encadrement des forces policières ? Prenons l'exemple la plateforme électorale de Projet Montréal en 2025, à la section 3.3. Protéger tout le monde :

Combattre les violences faites aux filles et aux femmes : Pérenniser l'équipe spécialisée en violence conjugale du SPVM et soutenir l'hébergement destiné aux femmes victimes de violence et à leurs enfants, afin d'assurer un soutien rapide et concret.

Doter les policiers et les policières de Montréal de caméras corporelles : Renforcer la transparence, la responsabilité et la confiance entre la population et le corps policier en instaurant des caméras corporelles.

Augmenter les équipes mixtes avec civils : Améliorer l'efficacité des interventions des équipes mixtes policier·ères-civil·es formées au travail social pour mieux répondre aux situations impliquant des personnes en situation de vulnérabilité.

Réviser des règlements pouvant induire du profilage : Aller de l'avant avec la modification des règlements municipaux pouvant induire du profilage racial et social."

Voilà de belles réformes, pertinentes en soi, mais qui évacuent la reddition de comptes, la proportion du budget du SPVM par rapport au budget global de la Ville, l'armement des policiers et la question névralgique des interpellations. Rappelons d'ailleurs qu'en mai 2025, Fady Dagher n'a pas annoncé l'abolition des interpellations policières, mais une réforme de surface :

« Vous êtes libre de quitter. » Les policiers montréalais devront désormais aviser les citoyens interpellés qu'ils ne sont ni arrêtés ni détenus. Une mesure insuffisante aux yeux des défenseurs des minorités, qui accusent le SPVM de faire du profilage racial lors de ces interpellations.

De son côté, le parti Transition Montréal dirigé par Craig Sauvé va un peu plus loin dans son programme, qui "propose une sécurité publique centrée sur la dignité, la prévention et l'efficacité. Nous voulons mettre fin aux abus systémiques, créer un service civil pour répondre aux urgences sociales, et abolir les interpellations de rue discriminatoires. En contrôlant le gaspillage budgétaire du SPVM, nous réinvestirons dans des solutions qui rendent réellement nos communautés plus sécuritaires." Transition Montréal veut ainsi investir 25 millions$ annuellement en prévention, créer un service civil 24h/24 pour répondre aux appels d'urgence non criminels, instaurer un contrôle serré des heures supplémentaires du SPVM (40 millions$ par année en moyenne entre 2019 et 2023), et abolir carrément les interpellations policières. On touche enfin à la question du budget policier et à des réformes plus fortes.

Un autre point est amené par l'entrepreneur et chroniqueur Fabrice Vil qui remet en question le besoin d'armer la police ordinaire. Certains pays font ainsi le choix délibéré de limiter le port d'armes à des unités consacrées à certaines formes de crime, la majorité des agents de la paix travaillant sans fusil.

Une police sans arme à feu, est-ce envisageable ? Je conçois bien qu'un tel changement ne s'opère pas en claquant des doigts. Cela dit, je rappelle qu'on trouve ailleurs dans le monde des États, au Royaume-Uni par exemple, où les patrouilleurs ordinaires travaillent sans arme à feu, mises seulement à la disposition d'unités spéciales dans les situations exceptionnellement dangereuses. Ici, la question de l'armement des policiers mérite à tout le moins d'être débattue en plaçant en priorité la sécurité de tous.

Plutôt que d'avoir un débat binaire entre deux camps opposés, réclamant d'un côté l'abolition immédiate de la police ou du système carcéral, et de l'autre l'augmentation drastique du budget des forces policières et militaires pour restaurer la "loi et l'ordre", tout un monde de nuances est possible. Faut-il augmenter ou réduire le budget de la police, si on constate par ailleurs le sous-financement des services publics, du transport collectif, du logement social, etc.? Doit-on armer plus les policiers qui se retrouvent toujours plus militarisés, avec des drones et des équipements à la fine pointe de la technologie, alors qu'on continue de démanteler les campements de personnes sans-abri faute de ressources adéquates ? Comment assurer la sécurité dans le métro de Montréal, au-delà des mesures anti-flânage qui déplacent le problème au lieu de le régler ?

Faire bouger la fenêtre d'Overton

À nos yeux, il est essentiel de déplacer la fenêtre d'Overton vers la gauche en matière de sécurité publique. Qu'est-ce que cela veut dire ? Prenons le contre-exemple de l'extrême droite états-unienne. L'administration Trump mise sur une stratégie radicale de renforcement de l'État policier, que ce soit en triplant le budget de la police de l'immigration (ICE), en multipliant les camps de détention (ex : Aligator Alcatraz) et en envoyant la Garde nationale pour occuper militairement des villes démocrates comme Los Angeles, Washington DC, Chicago, et Portland, qui ont pourtant un taux de criminalité en baisse. Le but de Trump n'est pas seulement d'intimider ses adversaires politiques, d'exécuter son plan de déportations massives et de faire une démonstration de force, mais de normaliser la présence de l'armée, de la police et d'agents paramilitaires dans les rues. Bref, il cherche à "dédiaboliser" l'État policer, à le rendre acceptable pour la population.

Dans ce contexte de fascisme décomplexé, la gauche n'a pas intérêt à rester timide et à réclamer une simple "modération" des forces de l'ordre qui laisse la structure inchangée. En misant sur une stratégie centriste, on fait apparaître la situation actuelle comme "de gauche" ou un statu quo viable, tandis que la stratégie réactionnaire apparait comme source de "changement". Or, la situation actuelle est intenable, surtout pour les personnes noires et racisées comme Nooran qui paient les frais de notre inaction, de cette "démission tranquille" qui combine compassion et incapacité à réformer réellement nos institutions désuètes.

À l'heure où les différents paliers de gouvernement mettent en place des mesures d'austérité et sabrent dans les services publics (notamment le gouvernement Carney et le gouvernement Legault qui sortent leur tronçonneuse dans les derniers mois), il semble que deux postes budgétaires sont épargnés : l'armée et la police. Comme l'a remarqué le militant et chroniqueur Alexandre Popovic dans Pivot, le définancement de la police est le grand absent des élections municipales alors que leur budget ne cesse d'augmenter dans les grandes villes du Québec depuis 2020, avec une augmentation de 13,3 à 40,7%.

Plutôt que d'avoir peur des réactions du lobby policier ou de l'électorat, la situation politique appelle plutôt à la posture inverse : une forte dose de courage. Il faut faire bifurquer l'opinion publique dans le sens opposé, en montrant que la sécurité publique passera d'abord par un monde plus juste, la prévention des injustices et des mécanismes de sécurité menés par et pour la communauté. Le système policier actuel est désuet, conservateur, trop cher et inefficace pour réduire le crime. C'est à nous de le transformer pour rétablir un meilleur partage des ressources et une plus grande autonomie en termes de sécurité pour les communautés locales.

Il faut donc nommer un chat un chat. En matière de sécurité publique, Projet Montréal occupe une position centriste. Sans embrasser le discours sécuritaire ambiant qui nous pousse vers l'extrême droite, les réformes proposées sont timides. Un parti comme Transition Montréal va un peu plus loin, mais encore là, on reste à l'étape de réformes utiles et nécessaires, qui ne remettent pas en question le système policier. On n'est pas encore au niveau des revendications de la Coalition pour le définancement de la police créee en juin 2020, qui propose des mesures plus ambitieuses. Si des gens accusent encore Projet Montréal ou Transition Montréal d'être de "gauche radicale", alors ils n'ont rien vu. Il suffit de jeter un coup d'oeil aux 10 revendicationsde cette coalition :

  1. Définancer : Couper immédiatement au moins 50 pourcent des 665 millions de dollars du budget du SPVM pour rediriger les fonds vers des programmes et des services opérés par et pour les communautés affectées qui sont listées ici-bas.
  2. Désarmer : Bannir le port d'armes pour les agents de police, incluant les pistolets paralysant (Taser), les matraques, les armes à feu, les balles en caoutchouc, le gaz lacrymogène, le poivre de cayenne, les canons à son ; démanteler les unités de police militarisées, incluant les équipes SWAT et les autres unités qui utilisent des armes de types militaires et du matériel de surveillance.
  3. Décoloniser : Investir dans des modèles autochtones de justice et autonomiser les communautés autochtones afin qu'elles puissent utiliser ces modèles de justice pour répondre aux offenses commises au sein de leurs communautés ; favoriser la reprise du pouvoir d'autres communautés oppressées, telles que les communautés noires, afin de développer des approches similaires de justice.
  4. Investir dans des programmes créés et gérés par les communautés pour prévenir les torts (incluant les préjudices liés à la violence, aux problèmes de santé mentale et aux drogues) et supporter les initiatives de justice transformatrice ; habiliter les communautés à développer et gérer les programmes qu'elles jugent adéquats, dans la compréhension que les communautés ne sont pas monolithiques, subissent des axes d'oppression multiples et croisés, et requièrent un leadership et des programmes qui intègrent et utilisent une approche intersectionnelle (E.g. LGBTQ2S, handicap, travail du sexe, utilisation de drogue).
  5. Créer et subventionner des équipes de service non armées et externes à la police pour répondre aux crises reliées à la santé mentale et à l'utilisation de drogue, aux infractions de la circulation, à la violence sexuelle, aux infractions juvéniles et aux cas de personnes disparues.
  6. Investir dans des programmes et services, tels que des programmes de jeunes, des programmes récréatifs et des logements sociaux, dans des communautés présentement criminalisées ; donner les ressources à ces communautés pour qu'elles développent et gèrent des programmes qu'elles jugent adéquats.
  7. Décriminaliser toutes les drogues, le travail du sexe et le statut du VIH ; éliminer l'escouade anti-drogue du SPVM, l'escouade de moralité, l'unité Eclipse et les autres unités visant les communautés marginalisées, ainsi que tous les programmes de surveillance proactive ; libérer les détenus et supprimer les casiers judiciaires reliées aux drogues et au travail du sexe.
  8. Abroger les règlements administratifs reliés aux “incivilités” ; libérer et supprimer tous les dossiers reliés à ces règlements administratifs (incluant les amendes non payées), incluant celles reliées à la surveillance et aux contrôles dans les transports en commun.
  9. Retirer de façon permanente la police des programmes scolaires et sportifs, et cesser les patrouilles de police dans les parcs publics, dans les événements communautaires et dans les autres espaces typiques de rassemblement de jeunes.
  10. Mettre fin à la criminalisation et à la surveillance de l'immigration en éliminant toute collaboration entre la police et les agents de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et toute autre forme d'implication du SPVM dans des enjeux d'immigration.

Si on va encore plus loin dans la ligne de la "gauche radicale", j'ai récemment vu passer une initative visant à créer un parti décentralisé mettant de l'avant des réformes radicales pour Montréal : rejet du statut de métropole pour se sortir de la logique de ville internationale ; soutien aux luttes autochtones et allocthones ; dérèglementation complète de l'espace public (terrasses, parcs, raves, campements, salles de spectacles, rues) ; reprise des logements des mains des grands promoteurs immobiliers ; désarmer, définancer et démanteler le SPVM.

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L’impact des barrages hydroélectriques sur la vie nomade des Innus : conversation entre Justine Gagnon et Jean Luc Kanapé

21 octobre, par Jean Luc Kanapé, Justine Gagnon — , , ,
Justine et Jean Luc ont collaboré dans le cadre de la série balado Sous les barrages : Tshishe Manikuan, la première à titre d'idéatrice et chercheuse et le second à titre de (…)

Justine et Jean Luc ont collaboré dans le cadre de la série balado Sous les barrages : Tshishe Manikuan, la première à titre d'idéatrice et chercheuse et le second à titre de réalisateur. La série a été produite par Nikan Héritage.

14 octobre 2025 | riré de la lettre de l'IRIS
https://iris-recherche.qc.ca/blogue/autre/barrages-impact-communautes-innus/?utm_source=Liste+de+diffusion&utm_campaign=2421e8cd58-sous_la_loupe_20241114_COPY_01&utm_medium=email&utm_term=0_831b3c6b78-2421e8cd58-126405189

Justine : Jean Luc, on s'est connus toi et moi il y a une dizaine d'années maintenant, alors que je faisais ma thèse de doctorat en collaboration avec la communauté de Pessamit au sujet de l'impact des grands barrages hydroélectriques sur le mode de vie innu. À l'époque, tu possédais une entreprise touristique, Mashkuss aventure, dont les activités se sont brutalement arrêtées à la suite de l'inondation du site à l'automne 2017. Veux-tu nous rappeler ce qui s'est passé ?

Jean Luc : Effectivement, nous avons eu un une entreprise touristique à Pessamit qui s'appelait Mashkuss aventure. On avait débuté ce projet avec Kim Picard en 2015 sur la Pessamiushipu (rivière Betsiamites) et ça a fonctionné pendant près de 3 ans. En 2017, le site a été complètement inondé, une inondation provoquée par Hydro-Québec. C'était durant la période où la compagnie d'État poussait à pleine capacité ses barrages, dans le but de vendre cette énergie aux États-Unis, mais finalement ça n'a pas abouti.

Au moment de son élaboration, le projet d'interconnexion Northern Pass, piloté par Hydro-Québec et son partenaire américain Eversource, visait à acheminer, via une ligne traversant le New Hampshire, un certain volume d'hydroélectricité vers le Massachusetts (projet qui devait démarrer en 2020 et prévu pour une durée de 20 ans). Présenté par ses promoteurs comme un projet « vert », ayant pour but de réduire considérablement les émissions de carbone de la région américaine, Northern Pass a finalement été rejeté par le New Hampshire. L'État américain et Hydro-Québec ont par conséquent décidé de se rabattre sur le projet New England Clean Energy Connect (NECEC), piloté conjointement par Hydro-Québec et la société Central Maine Power, une filiale D'Avangrid. Ce projet prévoyait l'acheminement de l'électricité grâce à une ligne de transmission qui passerait cette fois à l'ouest de l'État du Maine. En 2021, un référendum citoyen du Maine a mené à la suspension des travaux, une décision contestée par Hydro-Québec et Central Maine Power.

On a beaucoup parlé des précipitations anormalement abondantes pour justifier le haut niveau d'eau dans les réservoirs. Il y avait eu quelques jours de pluie c'est vrai, mais à ma connaissance, rien qui ne puisse expliquer cette situation exceptionnelle. Ce n'était pas comme en 1996, lors du déluge du Saguenay. En réalité, les réservoirs étaient déjà à leur niveau le plus élevé, alors les quelques jours de pluie ont entrainé un débordement. Ils ont donc dû déverser les surplus par l'évacuateur de crue. Les infrastructures de notre entreprise sont malheureusement passées sous ce « tsunami » dans la rivière et on a tout perdu. Nous aimions beaucoup accueillir des gens, partager nos connaissances traditionnelles, pour apprendre à mieux nous connaître mutuellement. Il y a encore des gens qui ne savent pas qu'il y a des Innus, des Autochtones au Québec.

On s'est relocalisés sur le territoire depuis cet événement, en un lieu où Hydro-Québec ne risque pas de nous faire du mal. Mais malgré cela, je remarque de plus en plus de projets d'éoliennes autour de notre campement actuel. Ça n'arrête jamais autrement dit.

Justine : Pour moi, cet événement était une exposition sans équivoque des conséquences du développement hydroélectrique là où cette énergie prend sa source, soit, dans ce cas-ci, les rivières du Nitassinan de Pessamit. Dans les années 1950-60, la voix des Innus ne résonnait pas autant, mais en 2017, on ne pouvait plus tellement l'ignorer. Peux-tu nous parler un peu de ce que représentent les rivières pour les Pessamiulnuat ? Et la Pessamiushipu pour toi en particulier ?

Jean Luc : Les rivières, ce sont nos routes ancestrales, les voies qu'empruntaient nos grands-parents, nos ancêtres, pour rejoindre les territoires du Nord. Sur le Nitassinan de Pessamit, on parle des rivières Sault-aux-Cochons (Kuakueu shipu), Betsiamites (Pessamiushipu), aux Outardes (Piletipishtiku), Manicouagan (Manikuakanishtiku) et Toulnustouc (Kuetutinushtiku). Ma famille à moi fréquentait particulièrement la Pessamiushipu et j'ai donc plusieurs souvenirs d'enfance qui s'y rattachent. C'est là où mon grand-père pêchait le saumon et c'est aussi là qu'il amenait ses enfants à l'époque des pensionnats pour empêcher le gouvernement de les prendre de force. J'ai grandi sur la rivière. Mes grands-parents sont décédés quand j'avais huit ans, mais d'autres membres de la famille ont pris le relai ensuite. Au fil du temps, je suis littéralement tombé en amour avec cette rivière, mais il a fallu que je l'apprivoise, car la Pessamiushipu est très difficile à remonter, il faut avoir beaucoup d'expérience. Mais je voulais apprendre à naviguer sur ce cours d'eau, comme l'ont fait mes ancêtres, et je me suis débrouillé pour y arriver.

Depuis qu'on a perdu notre entreprise en 2017 et que je me suis installé plus au Nord sur le territoire, je ne remonte plus la rivière. Et elle me manque. On avait développé notre projet sur ses berges en raison de la beauté du lieu, de ses montagnes, de ses rapides, de sa faune. On y voit des orignaux, des ours et du poisson. C'est un endroit que je n'oublierai jamais, car j'ai grandi grâce à la rivière. Un jour j'y retournerai avec mes petits-enfants, c'est certain.

Justine : La relation que tu nous partages m'apparaît en dissonance avec le discours énergétique et économique qui domine, selon lequel la rivière est avant tout une ressource à exploiter. Ce même discours présente de surcroît l'hydroélectricité comme une énergie « verte » et « renouvelable ». Dans le balado Sous les barrages, on comprend que les rivières sont des lieux de vie, de naissance et de mort. Des espaces sacrés. Et ce qui a été perdu est loin d'être renouvelable.

Jean Luc : Effectivement, quand le gouvernement parle des rivières, c'est généralement parce qu'il est fier de promouvoir les grands projets d'ingénierie qui ont permis à des complexes hydroélectriques comme Manic-Outardes de voir le jour. Mais moi ce qui me brise le cœur dans tout ça, c'est qu'on a tout perdu : notre identité et notre culture, qui est en voie de disparaître aussi. Pour moi, ces pertes font partie du génocide culturel. C'est la continuité du projet colonial visant notre assimilation et notre disparition. Nous aussi, on utilise l'hydroélectricité aujourd'hui bien sûr, mais on pleure. La population pleure, mais sans vraiment savoir que c'est à cause des barrages. C'est plus que de perdre une rivière, c'est notre identité.

Justine : Tout ça explique les relations historiquement tendues entre les Pessamiulnuat et Hydro-Québec, bien que des ententes plus respectueuses soient aujourd'hui en négociation. Peux-tu nous parler un peu de l'entente sur le saumon dont il a beaucoup été question ? As-tu l'impression qu'on entre dans une nouvelle ère ?

Jean Luc : De mon point de vue, l'entente sur le saumon, comme beaucoup d'ententes proposées par Hydro-Québec, suscite des réserves et des suspicions au sein de notre communauté parce que c'est toujours perçu comme une façon de nous amadouer par d'importantes compensations financières.

L'entente sur le saumon est une entente de 23 millions de dollars proposée au printemps 2025 par Hydro-Québec à la communauté de Pessamit afin de protéger l'habitat du saumon et de restaurer les infrastructures sur la rivière Betsiamites. Elle se distingue d'une entente-cadre globale proposée en 2024 pour régler différents litiges historiques et rétablir la relation entre la Première Nation et Hydro-Québec.

Les gens de Pessamit ont, à ce jour, refusé d'entériner l'entente parce que la communauté ne voit pas les choses de cette façon. Il y a aussi une certaine désillusion du fait que certaines ententes passées ont eu des répercussions somme toute minimes pour les membres, en permettant par exemple la création d'emplois pour quelques personnes, mais pas un réel développement interne. Ce qu'on veut, c'est plus d'autonomie sur notre territoire et nos ressources et un plein exercice de nos droits.

Justine : Dans la dernière décennie, ton rôle de gardien du territoire a aussi pris de l'ampleur, particulièrement dans le dossier du caribou forestier. Et avec le PL97, la résistance autochtone qui s'organise, c'est un sujet qui est sur toutes les lèvres actuellement. Quelle est ta perspective sur ce dossier et sur ce qui se passe actuellement ? Le projet de loi 97 – « Loi visant principalement à moderniser le régime forestier » – donnait plus de pouvoir à l'industrie forestière. Il était dénoncé à la fois par les syndicats, les groupes écologistes et les communautés autochtones. Le gouvernement Legault a annoncé son retrait le 25 septembre.

Jean Luc : J'ai toujours été gardien du territoire dans l'âme, mais c'est seulement depuis 2017 que j'exerce ces fonctions dans le cadre de mon travail pour le Conseil des Innus de Pessamit. La première fois que j'ai aperçu un troupeau de caribou, je leur ai fait la promesse d'être leur porte-parole. Encore aujourd'hui,

je tiens ma promesse et c'est pour ça que je vis en territoire à temps plein. Quand j'ai décidé de me dédier entièrement à la protection du caribou forestier (Minashkuau atiku), il n'y avait personne pour parler des enjeux des caribous du Pipmuakan. En quelques années, j'ai réussi à mettre ce dernier cheptel sur la map. Et tout s'est enchainé. D'autres gardien·ne·s du territoire d'autres communautés se sont levé·e·s aussi, notamment dans le contexte du PL97, qui est selon moi inacceptable. C'est comme nous dire « enlevez vos vêtements, on part avec, vous allez être nus et n'aurez droit à rien, ce n'est pas vous qui menez ». C'est ce que je comprends dans le projet de loi. On s'est regroupé pour former Mamo Premières Nations, avec d'autres gardien·ne·s d'un peu partout. Et tout le monde a vu ce qui s'est passé cet été avec les divers blocus en territoire. On dit « blocus », mais on devrait plutôt parler d'« affirmation sur le territoire ». C'est une nouvelle ère pour les Autochtones ; nous sommes maintenant beaucoup plus visibles que le peuple invisible d'autrefois.

Beaucoup de Québécois·es commencent à reconnaître nos droits et je pense que la plupart sont nos allié·e·s. Et c'est ce que je nous souhaite, qu'on travaille main dans la main, ensemble. Des gouvernements comme la CAQ, j'appelle ça des dinosaures, car ils demeurent coincés dans un passé très lointain. Ils ne veulent pas évoluer sur les questions environnementales. Mais quand on vit sur le territoire, on devient plus conscient des enjeux, parce qu'on voit les saccages, le dérangement. Et ça concerne tout le monde. Je suis content de ce que les Gardiens du territoire ont fait jusqu'à maintenant. C'est juste le début et je pense que tout le monde va se lever un moment donné.

Justine : C'est vrai que les consciences s'éveillent sur la question des droits autochtones, mais certains principes semblent encore nébuleux pour certains comme le consentement préalable, libre et éclairé ou encore l'autodétermination. Ces éléments sont pourtant au cœur de notre cohabitation sur le territoire. Ils sont aussi garants d'un avenir commun, voire de notre survie comme humains dans le contexte de la crise actuelle. Comment tu envisages l'avenir et le vivre-ensemble ?

Jean Luc : Je pense que la cohabitation entre allochtones et Autochtones, telle qu'elle se déploie sur nos territoires ancestraux, peut nous servir d'inspiration à cet effet. Là où je demeure, il y a aussi des personnes allochtones qui y vivent à l'année. Quand je me suis installé ici en 2017, je sentais beaucoup d'appréhension et de peur ; les gens craignaient que je menace leur confort, que je dérange le territoire. Je suis donc allé les voir un par un pour discuter et, au fil du temps, ce sont devenus mes amis. Aujourd'hui, ensemble, on dénonce et on travaille pour améliorer notre cohabitation, être de bons voisins.

Ce ne sont pas les gouvernements qui vont sauver l'humain. C'est nous-mêmes, en prenant des décisions collectivement, en travaillant main dans la main. Pour moi, c'est le vrai sens de la « réconciliation » : survivre ensemble. Je le vis, le changement en territoire, la cohabitation possible. Il y aura toujours des personnes réticentes, qui ne veulent pas aller à notre rencontre, mais je suis convaincu qu'en travaillant ensemble, c'est nous qui allons changer le monde. Innu ça veut dire « être humain ». Donc normalement on devrait se comprendre.

Justine Gagnon est professeure adjointe au département de géographie de l'Université Laval.
Jean Luc Kanapé est membre de la Première Nation des Pessamiulnuat et Gardien du territoire pour le Conseil des Innus de Pessamit.

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Quel avenir pour le financement des universités ?

21 octobre, par Institut de recherche et d'informations socio-économiques (IRIS) — , , ,
Les universités québécoises dépendent plus des frais de scolarité pour boucler leur budget qu'en 2011. Alors que l'argent reçu des frais de scolarité a augmenté de 51 % entre (…)

Les universités québécoises dépendent plus des frais de scolarité pour boucler leur budget qu'en 2011. Alors que l'argent reçu des frais de scolarité a augmenté de 51 % entre 2011et 2023, le financement public n'a crû que de 13,2 %.

16 octobre 2026 | publication de l'IRIS | Photo : Groov3 (Wikipédia)

Pour lire la publication, cliquez sur le lien

« Ces chiffres peuvent étonner, considérant que le mouvement étudiant a quand même réussi à faire reculer le gouvernement sur la hausse des frais de scolarité en 2005 et en 2012.
Que s'est-il passé et qu'est-ce que ça veut dire pour l'avenir du
financement des universités québécoises ? »

– Eve-Lyne Couturier, chercheuse à l'IRIS

En 2018, le gouvernement a décidé de déréglementer les frais de scolarité pour les étudiantes et les étudiants internationaux, ce qui a permis aux universités de charger les montants qu'elles voulaient aux personnes qui viennent de l'extérieur du Québec. Les universités peuvent aussi désormais conserver les montants supplémentaires plutôt que de les partager entre tous les établissements universitaires, comme c'était le cas avant.

Quatre ans plus tard, alors que la population étudiante québécoise a reculé de 5,2 %, celle des étudiant·e·s canadien·ne·s non résident·e·s du Québec a augmenté de 9,1 %, tandis que celle des étudiant·e·s provenant de l'étranger a connu une hausse considérable de 31,0 %.

Toutes les universités ne s'enrichissent pas autant. Si McGill empoche en moyenne plus de 25 000 $ par étudiant·e international·e, de plus petites universités, comme l'UQAR, l'UQAC ou l'UQAT ont vu leurs revenus par étudiant étranger diminuer entre 2019 et 2023.

« Clairement, le modèle de financement des universités ne fonctionne pas. Plutôt que de faire porter le poids du financement sur la population étudiante, il faudrait augmenter le financement public et ainsi en faire profiter l'ensemble de la population. »
– Eve-Lyne Couturier

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La mobilisation pour la Palestine de la jeunesse scolarisée à Montréal

21 octobre, par Emma Soares — , , ,
La semaine dernière, dans un amphithéâtre bondé du département de science politique de l'université de Montréal, se pose une question fondamentale pour la jeunesse engagée de (…)

La semaine dernière, dans un amphithéâtre bondé du département de science politique de l'université de Montréal, se pose une question fondamentale pour la jeunesse engagée de l'Association des étudiant.es en Science politique et Études Internationales de l'Université de Montréal : Allons-nous faire grève en solidarité avec la Palestine ?

15 octobre 2025 | tiré du Journal des Alternatives | Photo : crédit : SDHPPUDEM
https://alter.quebec/la-mobilisation-pour-la-palestine-de-la-jeunesse-scolarisee-a-montreal/

Une question qui retentit dans plusieurs assemblées étudiantes des collèges et universités québécoises et aussi mondiales, à peine cinq jours avant le 7 octobre. Une date qui marque les deux ans depuis les attaques du Hamas et le déclenchement des interventions israéliennes à Gaza.

Une mobilisation contre le blocus alimentaire

Si les étudiant.es du Québec sont encore prêt.es à se mobiliser, c'est contre le blocus humanitaire à Gaza et pour une fin paisible au conflit qui a fait entre 55 000 et 78 000 morts d'après une étude de Lancet. 45 000 étudiants et étudiantes sont concerné.es par cette grève, une mobilisation inédite qui rejoint les revendications étudiantes déjà annoncées l'année dernière.

Leur protestation avait même conduit à l'occupation du parc en face du campus de l'université McGill pendant plus de deux mois. Une action coordonnée à l'international où des milliers d'étudiant.es avaient occupé les locaux de leurs établissements à travers le monde. Le mardi 7 octobre marque également une date sombre : plus de 1 000 personnes sont tuées lors de l'attaque du Hamas en Israël. Beaucoup voient les grèves étudiantes comme une invisibilisation de la mémoire des victimes, mais pour les associations qui ont choisi cette date, c'est un rappel de l'escalade du conflit et non de son commencement.

À l'UdeM, toutes les associations étudiantes du département de science politique ont voté en faveur d'une grève les 6 et 7 octobre. Des piquetages devant les salles de classe et des protestations pacifistes devant le département se sont tenus pendant ces deux journées. Le journal des Alternatives était présent mardi 7 octobre pour discuter avec celles et ceux mobilisé.es du département.

Olivier Labrecque, trésorier de l'AÉSPÉIUM était présent pour piqueter pendant les deux jours de mobilisation et soutient l'aspect pacifique de l'évènement. En général, il y a eu peu d'opposition du corps professoral et étudiant. Pour sa part, le rectorat de l'Université peine à répondre aux revendications.

Une campagne contre tout investissement avec les entreprises israéliennes

Comme aux États-Unis et en Europe, les mouvements étudiants mobilisés demandent à leurs établissements de cesser tout investissement envers des entreprises israéliennes et celles qui font affaire avec le gouvernement. Ils demandent également de mettre fin à leur collaboration avec les universités israéliennes.

Des revendications semblables sont portées par la Fédération des Associations Étudiantes du campus (FAÉCUM) à l'assemblée universitaire du lundi 6 octobre. Le recteur de l'UdeM, Daniel Jutras, a eu l'occasion d'y répondre alors que le cortège de grève s'était rendu devant le bâtiment où il siégeait. La FAECUM et ses étudiant.es ont trouvé insuffisantes les justifications « bureaucratiques ». Les mouvements étudiants réclament plus de transparence sur les investissements de l'université.

En coordination transnationale

Les mobilisations font preuve d'une coordination transnationale. Les associations étudiantes ont envoyé des délégations pour rencontrer les personnes représentantes d'autres associations étudiantes universitaires. Elles ont échangé sur leurs propres expériences des actions organisées à vocation nationale et mondiale, même si la peur de la répression policière est toujours présente.

Aux États-Unis, les populations étudiantes mobilisé.es en soutien à la Palestine avaient subi la répression de l'Administration Trump de plein fouet. Des centaines d'arrestations ont eu lieu sur place et des milliards de dollars de fonds publics ont été retirés des établissements académiques pour les forcer à réprimer plus strictement leurs mouvements étudiants.

À l'UQAM, l'Association facultaire des étudiants en sciences humaines (AFESH) et l'Association étudiante de la faculté d'éducation (ADEESE) ont également voté en faveur d'une grève les 6 et 7 octobre.

Si les associations étudiantes se sont mises d'accord sur la même semaine de mobilisation, c'est aussi pour faire écho à la semaine d'action pour la Palestine organisée par Désinvestir pour la Palestine (D4P).

À Concordia, diverses associations étudiantes ont annoncé leur participation à cette mobilisation croissante les 6 et 7 octobre. Leurs motivations ciblent particulièrement les liens qu'entretient l'université avec des compagnies d'armement comme Lockheed Martin ou des groupes qui font affaire avec le gouvernement israélien.

Renforcer le boycott académique

À la suite des mobilisations de l'an passé, on observe une hausse de 66% du boycott académique contre Israël dans le monde. En 2024, le gouvernement israélien a dû allouer 22 millions de dollars de fonds pour compenser ses liens rompus avec les universités étrangères. Contacté par le journal des Alternatives, le rectorat de l'UdeM affirme reconnaître « le droit de la communauté étudiante à s'exprimer et manifester politiquement » mais ne souhaite pas se positionner plus amplement sur le conflit ou les revendications étudiantes.

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Collectif pour un Québec sans pauvreté : contre l’exclusion sociale des personnes en situation de pauvreté

21 octobre, par Collectif pour un Québec sans pauvreté — , ,
Le Collectif pour un Québec sans pauvreté propose un outil de réflexion s'adressant aux personnes et aux groupes qui veulent agir à l'échelle municipale pour lutter contre (…)

Le Collectif pour un Québec sans pauvreté propose un outil de réflexion s'adressant aux personnes et aux groupes qui veulent agir à l'échelle municipale pour lutter contre l'exclusion sociale des personnes en situation de pauvreté. Il propose des pistes pour identifier des revendications ainsi que nourrir vos mobilisations et interventions dans le cadre des élections municipales et au-delà.

Tiré de L'info lettre de l'R des Centre de femmes et de Outil de réflexion du Collectif pour un Québec sans pauvreté

Informations générales

Le gouvernement municipal passe souvent sous le radar lorsqu'il est question de lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale. C'est surtout le gouvernement provincial qui administre les programmes de soutien au revenu, avec un certain apport du gouvernement fédéral.

Cependant, les gouvernements municipaux ont des compétences et des responsabilités qui ont un impact direct sur l'inclusion et l'exclusion sociales des personnes en situation de pauvreté. Le palier municipal est la plus petite échelle de gouvernement au Québec. C'est celui qui est le plus proche de la vie quotidienne.

Les contextes municipaux varient beaucoup à travers le Québec, particulièrement entre les très grandes villes, les villes, les banlieues et les milieux ruraux. Dans les petits milieux, les communautés tendent à être « tricotées serrées », ce qui peut présenter des avantages en matière d'inclusion et de solidarité. Cependant, le poids des étiquettes peut y être très fort.

La pauvreté en milieu rural peut être plus difficile à percevoir qu'en milieu urbain, et les élu∙es sont souvent moins outillé∙es pour en mesurer l'ampleur. Conséquemment, la lutte à l'exclusion sociale des personnes en situation de pauvreté est rarement prise « de front » dans les municipalités rurales : on préfère souvent parler de développement local ou de revitalisation.

Les contextes ruraux et urbains présentent également des différences marquées sur le plan de la politique municipale. Dans plusieurs municipalités rurales, les élections procèdent par acclamation (le nombre de candidat∙es étant égal au nombre de postes à pourvoir) et les élu∙es n'y sont pas nécessairement des politicien∙nes de carrière. Au contraire, dans les grandes villes comme Québec ou Montréal, les campagnes électorales sont des moments politiques très forts où s'affrontent des personnes politiques chevronnées aux plateformes très développées.

Les types d'intervention pour lutter contre l'exclusion sociale des personnes en situation de pauvreté dans nos municipalités doivent tenir compte de ces différents contextes sociaux et politiques.

(.........)

Cet outil de réflexion1 s'adresse aux personnes et aux groupes qui veulent agir à l'échelle municipale pour lutter contre l'exclusion sociale des personnes en situation de pauvreté.

Il propose des pistes pour identifier des revendications ainsi que nourrir vos mobilisations et vos interventions dans le cadre des élections municipales, et au-delà.

Qu'est-ce que ma Municipalité pourrait faire, ou pourrait faire mieux, pour faciliter la vie des personnes en situation de pauvreté ? Et qu'est-ce que ma Municipalité ne fait pas, ou ne fait pas suffisamment, et qui entraîne des conséquences fâcheuses pour elles ? Les préjugés ont-ils quelque chose à voir là-dedans ?

Comment ma Municipalité pourrait-elle améliorer les conditions de vie des personnes en situation de pauvreté ? Quels moyens concrets pourrait-elle mettre en œuvre pour y arriver ? À quelle(s) instance(s) dois-je m'adresser pour faire valoir mes revendications pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale dans ma Municipalité ?
Plus concrètement

Participation citoyenne

Qu'est-ce qui pourrait faciliter l'inclusion sociale et la participation des personnes en situation de pauvreté à la vie démocratique municipale ? Quelles ressources ma Municipalité pourrait-elle mettre à leur
disposition à cet effet ?

Espace public

Que pourrait faire ma Municipalité pour favoriser l'inclusion dans l'espace public ?

Lutte aux préjugés

Que pourrait faire ma Municipalité pour combattre les préjugés et mettre fin au profilage social des personnes en situation de pauvreté ?

Loisirs, culture, sport

Qu'est-ce que ma Municipalité pourrait faire pour assurer aux personnes en situation de pauvreté un meilleur accès aux activités sportives, aux loisirs et à la culture ?

Logement, transport collectif, internet

Qu'est-ce que ma Municipalité devrait faire pour s'assurer que les personnes en situation de pauvreté ont accès à des ressources qui répondent à leurs besoins ?

Environnement

Qu'est-ce que ma Municipalité pourrait faire pour réduire la pollution, notamment dans les quartiers économiquement défavorisés où ses impacts sont plus importants ? Que pourrait-elle faire aussi pour aider les personnes en situation de pauvreté à affronter les défis des changements climatiques (vagues de chaleur, inondations, etc.) ?

Pistes pour faire bouger les choses

Y a-t-il dans ma Municipalité des personnes déjà mobilisées autour de l'enjeu qui me préoccupe ? Existe-t-il un groupe ou un organisme qui milite pour cette cause ? Quel moyen serait le plus efficace pour faire connaître aux élu∙es de ma Municipalité l'enjeu qui me préoccupe, ou pour leur mettre de la pression en vue d'arriver à une solution ? Un communiqué de presse, de l'affichage, une lettre ouverte, une pétition, un rassemblement ?
Quelle(s) question(s) pourrais-je poser aux candidat∙es aux élections municipales pour les amener
à se prononcer sur l'enjeu qui me préoccupe ?

Pour en savoir plus sur la structure municipale et les enjeux démocratiques et sociaux à cette échelle, consultez le guide Élections municipales 2025 produit par le Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec (MEPACQ) :
https://mepacq.qc.ca/tool/elections-municipales-2025/

La Table nationale des Corporations de développement communautaire (TNCDC) a publié une plateforme de
revendications destinée aux candidat·es sur les thèmes de la crise socio-écologique, du logement social et de l'itinérance, du transport public collectif et adapté, du développement social local
et du vivre-ensemble :https://www.tncdc.com/publications/nospositionnements/
Note
1.
Il s'agit d'une mise à jour de l'outil développé à l'origine en 2021 dans le cadre des élections municipales.

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Marche mondiale des femmes : Des ateliers vivants

21 octobre, par Ginette Lewis — , ,
Le 18 octobre 2025, plus de 16, 000 personnes ont manifesté contre les violences faites aux femmes, contre la pauvreté que vivent les femmes et pour un climat sain protégeant (…)

Le 18 octobre 2025, plus de 16, 000 personnes ont manifesté contre les violences faites aux femmes, contre la pauvreté que vivent les femmes et pour un climat sain protégeant la terre.

Le parcours de la manifestation a effectué un carré autour du Parlement. Et sur les trottoirs, les militantes avaient créédes tableaux vivants.

sur la question des hormones
Mères au Front pour l'écologie et la Palestine
la situation des femmes immigrantes
le cimetières des femmes assassinées,
femmes-danse et nature
la pauvreté des femmes par le Collectif pour un Québec sans pauvreté
les violences faites aux femmes
les standards de beauté
les chansons politiques des Amères Noëlles
etc.

Ces tableaux rendaient la manif, déjà haute en couleur, plus vivante et plus conscientisante.

Voici quelques photos.

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17 octobre : un village féministe

21 octobre, par Ginette Lewis — , ,
À Québec, au Patro Laval, s'est déroulé toute la journée le Village féministe . Ce sont environ 300 femmes qui ont visité, assisté, bricolé. Tout cela en préparation du (…)

À Québec, au Patro Laval, s'est déroulé toute la journée le Village féministe . Ce sont environ 300 femmes qui ont visité, assisté, bricolé. Tout cela en préparation du lendemain, soit la manifestation 2025 de la Marche Mondiale des Femmes .

Dès leur arrivée, les femmes pouvaient voir des bannières installées sur le devant du Patro.

L'organisation de l'avant-midi mettait l'accent sur la réflexion. C'est d'abord un panel avec les trois porte-paroles nationales, Pénélope Guay, Émila Castro et Julie Antoine qui ont répondu aux questions de l'animatrice Houmou, super enthousiaste et super mobilisante. Elle a d'ailleurs fait un rap en début de conférence pour nous mettre dans l'action.

Pénélope a mis en évidence le sort des femmes autochtones. Julie Antoine a mentionné la situation des femmes aux prises avec des violences et Émilia Castro a insisté sur la nécessaire convergence des luttes dans le climat politique actuel.

Les femmes pouvaient ensuite choisir différents ateliers de réflexion sur la ville, l'écoféminisme, la diversité, etc.

Dans les aires ouvertes, des biographies de femmes expliquaient le problème Mathilde qui consiste à mettre en évidence des femmes qui ont vu leurs recherches et leurs découvertes spoliées par des collègues masculins, invisibilisant tout leur apport à la science.

D'autres biographies de femmes permettaient de valoriser le courage des femmes qui devenaient les premières à franchir des chasses gardées des hommes que ce soit en génie, dans le domaine de la justice, celui du pouvoir autochtone, etc.

Une donnerie a aussi connu du succès et les vingt kiosques animés par des bénévoles de groupes ont aussi été visités. Beaucoup de femmes se sont fabriqué des t-shirt avec des slogans à l'atelier de sérigraphie. D'autres ont posé des questions sur la grossesse et les services à la maternité, les problématiques reliées aux hormones, les statistiques sur la pauvreté des femmes. D'autres ont travaillé avec des femmes artistes pour réaliser une peinture collective et aussi pour marquer des empreintes dans l'argile.

Dans l'après-midi, ce sont des ateliers créatifs qui ont été mis sur pied : fabrication de macarons, de pancartes, création de chansons, auto-défense féministe, etc.

À 15h, les femmes ont assisté à une pièce de théâtre qui, a partir des trois thèmes de la Marche : pauvreté, violence et climat, ont mis en scène des situations concrètes que vivent les femmes. Ce fut très apprécié.

Le Village féministe a transformé les corridors du Patro en boulevards féministes avec des noms de femmes. De même que les escaliers et les salles d'atelier. Des noms de femmes discriminées comme autochtones, femmes noires ou femmes handicapées ont aussi eu leur place dans la toponymie du Village.Tout ceci pour préparer l'action de visibilité qui clôturait la rencontre et qui consistait à afficher des noms de femmes en protestation contre la toponymie de la Ville de Québec presqu'exclusivement masculine.

Une belle journée qui mettait bien la table pour la manifestation du lendemain.

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Marche mondiale des femmes : Manifestation 18 octobre au Québec

21 octobre, par Ginette Lewis — ,
Ce sont plus de 16 000 femmes de partout à travers le Québec qui ont manifesté à Québec ce 18 octobre dans le cadre de l'action mondiale de la Marche Mondiale des Femmes. (…)

Ce sont plus de 16 000 femmes de partout à travers le Québec qui ont manifesté à Québec ce 18 octobre dans le cadre de l'action mondiale de la Marche Mondiale des Femmes.

C'est autour de trois thèmes que la Marche Mondiale des Femmes a organisé sa 6ième action internationale soit la lutte à la pauvreté des femmes, les luttes contre les violences faites aux femmes et la nécessité de défendre les revendications climatiques et la paix.

Vidéo de la manifestation de la Marche mondiale des femmes, le 18 octobre 2025 à Québec

Deux photos du cortège

Une vidéo de la chanson JE MARCHE AUJOURD'HUI ;

Je marche aujourd'hui pour défendre nos libertés
Je marche aujourd'hui pour des choix libres et éclairés
Ensemble et solidaire pour ne plus jamais se taire
J'avance aujourd'hui pour sauver notre terre-mère.

La video des porte-paroles du Québec

La manif s'est terminé par un spectacle alliant discours et prestations artistique.

Voici des photos de la scène

Voici la chanson de la marche sur l'air de Bella chao.

Voici le lien vers le flash mob

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Lettre ouverte | Violence conjugale | Dix jours pour changer la trajectoire de sa vie

21 octobre, par L'Intersyndicale des femmes — , ,
L'Intersyndicale des femmes demande au gouvernement d'agir et d'accorder 10 jours d'absence rémunérés aux victimes de violence conjugale. La violence conjugale touche des (…)

L'Intersyndicale des femmes demande au gouvernement d'agir et d'accorder 10 jours d'absence rémunérés aux victimes de violence conjugale.

La violence conjugale touche des milliers de femmes chaque année au Québec. Parmi elles, 70 femmes ont été assassinées dans un contexte conjugal depuis 20201. Au moment d'écrire ces lignes, il y a déjà eu 15 féminicides depuis le début de 2025 dont 9 en contexte de violence conjugale (1).

Au début du mois d'août, trois tentatives de féminicides ont été perpétrées par des hommes dans des contextes de violence conjugale, dont deux avaient été remis en liberté en attendant leur procès pour des actes de violence2.

Ces souffrances et ces décès sont inacceptables. Le gouvernement du Québec peut et doit en faire plus pour aider les victimes de violence conjugale à s'en sortir.

L'Intersyndicale des femmes, qui regroupe sept organisations syndicales, est intervenue à plusieurs reprises pour réclamer l'inclusion de 10 jours d'absence rémunérés pour les victimes de violence conjugale dans la Loi sur les normes du travail. Une première lettre ouverte d'appui à cette demande a été publiée en 2021, une pétition a été déposée en 2022 et un rassemblement a eu lieu devant l'Assemblée nationale. À l'occasion de l'étude des projets de loi 42 (Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail) et 101 (Loi visant l'amélioration de certaines lois du travail), les organisations syndicales ont également interpellé directement le ministre du Travail.

Ces actions visaient toutes à faire reconnaître un droit fondamental : celui de se protéger sans avoir à choisir entre sa sécurité et son revenu.

Le coût de ne pas agir

Dix jours d'absence, c'est bien peu pour reconstruire sa vie, mais c'est une occasion unique d'en changer la trajectoire. Ces journées permettraient aux victimes de faire des démarches pour s'en sortir, à l'abri du contrôle de l'agresseur et sans perdre de revenu ou risquer de rompre leur lien d'emploi.

Cette mesure aurait un coût, bien sûr, mais rappelons que le coût de ne pas agir est bien plus élevé. L'incidence économique de la violence conjugale sur l'ensemble de la société canadienne s'élèverait à 7,4 milliards de dollars3, selon les dernières données disponibles.

La problématique de la violence conjugale, c'est l'affaire de toutes et tous. L'État et les employeurs ont un rôle à jouer pour prévenir la violence conjugale et pour protéger les victimes.

Les employeurs sont déjà tenus de prendre certaines mesures de prévention et de soutien aux victimes, en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Mais il faut encore aller plus loin parce que les chiffres nous montrent que le problème est loin d'être réglé.

La plupart des provinces et des territoires canadiens permettent d'ailleurs aux victimes de violence conjugale ou familiale de prendre trois à cinq jours d'absence rémunérés. La fonction publique fédérale accorde, quant à elle, 10 jours d'absence rémunérés à ses employées et employés victimes de violence familiale.

Au Québec, les victimes n'ont droit qu'à un maximum de deux jours, et ce, seulement si ces journées n'ont pas déjà été prises pour d'autres raisons (maladie, congés personnels, etc.). Il suffirait de modifier la Loi sur les normes du travail pour plutôt en prévoir 10 et ainsi devenir un chef de file en matière de prévention de la violence conjugale et de protection des victimes.

Chaque jour sans cette mesure, des femmes doivent choisir entre leur sécurité et leur revenu. Le gouvernement a entre les mains une occasion concrète et profondément humaine d'agir. En profitant de l'étude du projet de loi 101 pour intégrer ces 10 jours d'absence rémunérés, il ferait preuve de courage politique, de compassion… et contribuerait, tout simplement, à sauver des vies.

L'Intersyndicale des femmes : Émilie Charbonneau (APTS), Luc Vachon (CSD), Nadine Bédard-St-Pierre (CSQ), Annie-Christine Tardif (FAE), Françoise Ramel (FIQ), Franck Di Scala (SFPQ) et Sophie Ferguson (SPGQ) et 115 autres signataires*

*Cosignataires : Magali Picard, Caroline Senneville, Louise Harel, Françoise David, Ruba Ghazal, Simon Lapierre, Rachel Cox, Cathy Allen, Ingrid Falaise, Martine Delvaux, Monique Simard et de nombreux autres.

*Consultez la liste complète des cosignataires

1- Consultez la page « Meurtres conjugaux au Québec depuis janvier 2020 »

2- Lisez « Trois femmes auraient été poignardées en contexte conjugal cette semaine »

3- Consultez « Une estimation de l'incidence économique de la violence conjugale au Canada en 2009 »

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La FFQ s’oppose au projet de loi C-12 !

21 octobre, par Fédération des femmes du Québec — , ,
Imaginez : une mère monoparentale, ayant fui la violence dans son pays, pourrait voir son permis de résidence annulé du jour au lendemain. Resterons-nous silencieuses, comme (…)

Imaginez : une mère monoparentale, ayant fui la violence dans son pays, pourrait voir son permis de résidence annulé du jour au lendemain. Resterons-nous silencieuses, comme féministes, devant une telle injustice ?

Tiré de L'info lettre de la FFQ
https://mail.google.com/mail/u/0/#inbox/WhctKLbmqHjKsljhgPbDKHjPPLZZZJQzhgkLxGkGQbBKJhgMBsvSZSrJtSRXBPvhhvqmWmQ

C'est pourtant ce que le projet de loi C-12 rendrait possible !

Sous prétexte de renforcer la sécurité aux frontières, ce projet de loi modifie près d'une dizaine de lois existantes, dont la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Entre autres, le PL C-12 donne au gouvernement fédéral le pouvoir d'annuler ou de suspendre, par simple décret, des demandes d'immigration ou des permis de résidence (permanente ou temporaire), et ce, que la personne soit au Canada ou à l'étranger.

Le projet de loi vient aussi restreindre considérablement les conditions de recevabilité des demandes d'asile. De ce fait, C-12 entre en contradiction directe avec les obligations internationales du Canada.

Ce projet de loi aura des conséquences graves pour les femmes et personnes de la diversité sexuelle et de genre migrantes, sujettes à différents types de violences basées sur le genre, l'exploitation et la précarité économique. Il est donc légitime de se demander : quelle sécurité protège réellement ce projet de loi ?

Joignez-vous au Front uni contre C-12 Vous partagez nos inquiétudes ? Vous voulez agir ?
Rejoignez dès maintenant les forces collectives qui s'opposent à ce projet de loi.
Suivez-nous pour rester informées sur le PL C-12 La FFQ partagera bientôt des outils, analyses et appels à l'action pour mieux comprendre les enjeux du projet de loi C-12 et s'y opposer collectivement

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Projet de loi sur la criminalité : Sécurité ou religion d’état ?

21 octobre, par Mohamed Lotfi — , ,
La sécurité d'une société ne se mesure pas au nombre de personnes qu'elle enferme, mais à la manière dont elle choisit de les libérer. Si ce principe figurait dans la (…)

La sécurité d'une société ne se mesure pas au nombre de personnes qu'elle enferme, mais à la manière dont elle choisit de les libérer. Si ce principe figurait dans la Constitution canadienne, Mark Carney aurait sans doute hésité avant de présenter son nouveau projet de loi sur la criminalité. En voulant durcir la loi sur les crimes violents, le premier ministre Mark Carney prétend restaurer la sécurité des Canadiens, mais derrière son discours se cache une faillite bien plus profonde : celle d'un système carcéral qui punit sans guérir et qui fabrique du crime au nom de la sécurité.

Son objectif affiché est d'assurer « une plus grande sécurité » aux Canadiens. Sa méthode consiste à rendre plus difficile la remise en liberté provisoire pour les accusés de crimes graves. Autrement dit, ce sera désormais à l'accusé de prouver qu'il mérite de ne pas être enfermé. Un « renversement du fardeau de la preuve », comme disent les juristes, mais aussi, disons-le clairement, un renversement du bon sens.

Devant un parterre de policiers de la GRC à Etobicoke, en Ontario, Carney a promis, le 16 octobre dernier, d'« inverser le scénario qui fait en sorte que les délinquants violents retournent rapidement dans nos rues ». Une phrase calibrée pour les manchettes, mais personne ne lui a posé la question qui fâche : dans quelle sorte de prisons compte-t-on enfermer tous ces prévenus ?

Carney, comme une bonne partie de l'opinion publique, semble ignorer qu'une prison surpeuplée est souvent plus dangereuse que les criminels qui s'y trouvent. Beaucoup d'établissements canadiens de juridiction provinciale débordent ; les gardiens le savent, les détenus le vivent, les chiffres le prouvent. Certaines prisons accueillent jusqu'à 134 % de leur capacité. Promiscuité, détresse, oisiveté et violence s'y alimentent mutuellement.

Le nouveau projet de loi vise particulièrement les prévenus, ceux qui attendent leur procès et n'ont, officiellement, accès à aucun programme de réinsertion. Au Québec, ces personnes n'ont même pas droit aux activités de réhabilitation offertes aux autres détenus. Déjà que les programmes disponibles aux détenus sont largement insuffisants. On les enferme pour « protéger la société », mais on les relâche dans un état pire qu'avant, ce qui commence, mine de rien, à ressembler à un crime d'État.

Le gouvernement prétend « inverser le scénario » du laxisme judiciaire. En réalité, il prolonge celui d'un système qui punit sans guérir, enferme sans comprendre et confond fermeté avec efficacité. Voilà donc comment on « assure la sécurité publique » : en transformant la détention provisoire en école du désespoir.

Pour soutenir sa nouvelle croisade, Ottawa prévoit d'engager mille nouveaux agents de la GRC, d'augmenter le nombre de gardiens et, peut-être, de construire de nouvelles prisons. Coût estimé : un milliard de dollars sur quatre ans. Un milliard pour plus de murs, plus de barreaux, plus de clés. Tout cela alors que le taux global de criminalité au Canada n'est pas en hausse. Seuls certains crimes violents, très médiatisés, ont connu une augmentation, mais ces chiffres suffisent à nourrir une politique de peur. Parce que le sentiment d'insécurité, c'est la matière première du pouvoir politique moderne : on s'y alimente, on le façonne, on le vend.

Sur les ondes, à Midi Info, le débat est verrouillé. L'invité appelé à commenter la nouvelle est un ancien sous-commissaire de la GRC, aujourd'hui consultant en sécurité privée. Pas un criminologue, pas un intervenant en réinsertion sociale, pas un ancien détenu. La complexité du réel dérange, alors on l'évacue.
Depuis au moins vingt-cinq ans, la sécurité est devenue une religion d'État. Le dogme est simple : plus de lois, plus de prisons, plus de répression. Et gare à celui qui ose douter : on le taxe de laxisme, de naïveté ou de complicité. Les gouvernements alternent, mais la liturgie reste la même : faire peur, promettre la fermeté, proclamer la tolérance zéro.

La sécurité, telle qu'on la présente souvent au public, sert moins à protéger qu'à rassurer, et surtout à enrichir ceux qui vendent la peur. Des entreprises et des gouvernements ont fait de l'insécurité un argument permanent pour vendre des systèmes de surveillance, des armes ou des politiques restrictives. Ainsi, la peur devient un marché, et la sécurité, un produit dont le principal bénéfice n'est pas la tranquillité des citoyens, mais le profit de ceux qui l'exploitent.

Si la prison fabrique du crime, si elle rend plus dangereux ceux qu'elle prétend réhabiliter, alors elle échoue fondamentalement à remplir sa mission. Elle ne rend pas service aux victimes, car elle ne prévient pas la récidive ; elle ne protège pas la société, car elle entretient un cycle de violence, d'exclusion et de désespoir. L'enfermement, lorsqu'il ne s'accompagne d'aucune réflexion, d'aucune perspective de reconstruction, devient une simple suspension du problème, un temps mort où rien ne se transforme, où la souffrance se recycle.

La justice, si elle devient vengeance, cesse d'être justice. Elle se contente de punir sans comprendre, d'exclure sans guérir. Or la vengeance ne répare rien : elle ne rend pas la dignité aux victimes, elle ne restaure pas le lien social, elle ne permet pas à l'auteur de prendre conscience du tort causé. Au contraire, elle enracine les blessures de part et d'autre. Une société qui se venge à travers ses institutions ne fait que reproduire ce qu'elle condamne : la violence, l'humiliation, la peur.

C'est pourquoi une justice véritablement humaine ne peut se penser qu'en termes de réhabilitation. Accueillir les personnes jugées dans un système qui cherche à les reconstruire, c'est leur offrir la possibilité d'un changement réel. C'est aussi protéger les victimes, non pas en isolant indéfiniment les coupables, mais en empêchant que d'autres ne le deviennent à leur tour. La sécurité collective repose moins sur la sévérité des peines que sur la capacité d'une société à transformer la faute en apprentissage, la chute en relèvement.

« La sécurité d'une société ne se mesure pas au nombre de personnes qu'elle enferme, mais à la manière dont elle choisit de les libérer. » Cette phrase, que je place en ouverture de ce texte, résume une philosophie de la justice fondée sur la dignité humaine. Libérer, ce n'est pas seulement ouvrir une porte ; c'est redonner une place, une chance, une responsabilité. C'est croire que nul n'est condamné à être le pire de lui-même. J'ose voire dans chaque être humain non pas un danger à neutraliser, mais une conscience à éveiller.

On martèle au public qu'il doit se sentir en sécurité, même si la sécurité qu'on lui vend n'est qu'une illusion comptable. Pourtant, le jour où les micros feront grève devant certaines déclarations populistes, peut-être entendra-t-on enfin le murmure que les murs des prisons répètent depuis toujours : une société se juge non à la facilité avec laquelle elle enferme, mais à l'intelligence avec laquelle elle libère.

Dans cette vidéo de 23 minutes, les détenus me confient leurs témoignages sur le concept de réhabilitation. Attachez vos tuques :

https://youtu.be/yl8YENGLRo4
Réhabilitation - 23 fev 2023
youtu.be

https://youtu.be/yl8YENGLRo4

Que disent les statistiques ?

Que l'Indice de gravité de la criminalité a baissé de 4 % en 2024 après avoir augmenté pendant plusieurs années.

Que l'indice de gravité de la criminalité non violent (vols, délits de propriété, infractions liées aux drogues, etc.) a chuté de 6 % en 2024.

Violence vs crimes moins graves : Bien que l'Indice de gravité de la criminalité violent ait légèrement baissé en 2024, plusieurs types de crimes violents sont en hausse sur des périodes plus longues. Par exemple :
Depuis 2013, le taux de criminalité violente serait environ 30 % plus élevé qu'alors.
Le taux d'homicide a par ailleurs chuté entre 2023 et 2024 légèrement (de 1,99 à 1,91 homicides pour 100 000 habitants).

Vols de véhicules : baisse de 17 % depuis 2023.

Extorsion, exploitation sexuelle (enfants), crimes haineux, etc. : augmentation significative dans certains cas récents.

Tendance sur plusieurs années : Globalement, il y a eu une montée de certains crimes violents depuis le début des années 2010, par exemple, agressions sérieuses, extorsion, trafic humain.

Mais ces augmentations ne se traduisent pas nécessairement par une montée nette dans tous les indicateurs ou dans tous les types de crimes.

Mohamed Lotfi
Réalisateur du programme radiophonique Souverains anonymes à la prison de Bordeaux, pendant 35 ans.
17 octobre 2025

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Journée mondiale de l’alimentation 2025 - Les coupes budgétaires de Mark Carney mettent en péril la sécurité alimentaire du Canada

21 octobre, par Syndicat de l'Agriculture — , ,
Déclaration du Syndicat de l'Agriculture à l'occasion de la Journée mondiale de l'alimentation 2025 La sécurité alimentaire nécessite des investissements, pas de l'austérité (…)

Déclaration du Syndicat de l'Agriculture à l'occasion de la Journée mondiale de l'alimentation 2025 La sécurité alimentaire nécessite des investissements, pas de l'austérité

À l'occasion de la Journée mondiale de l'alimentation (16 octobre, 2025), le Syndicat de l'Agriculture <http://www.syndicatagr.com> dénonce les compressions budgétaires proposées par Mark Carney, qui pourraient avoir
des conséquences désastreuses sur la sécurité alimentaire et le secteur agricole du Canada. Notre syndicat représente 7 500 fonctionnaires fédéraux à travers le pays, dont la majorité travaille pour l'Agence canadienne
d'inspection des aliments (ACIA) et Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC).

Alors que des sécheresses sans précédent menacent les fermes canadiennes, et que le démantèlement de la Food and Drug Administration par Donald Trump au sud de la frontière met en péril les alimentaires, nous
exigeons que le gouvernement canadien recule sur les compressions budgétaires qui pourraient mettre en danger la vie des Canadiens et l'économie du pays.

En cette Journée mondiale de l'alimentation 2025, le Syndicat de l'agriculture se joint à l'appel mondial pour bâtir un avenir pacifique, durable et sécurisé sur le plan alimentaire. Le thème de cette année nous rappelle qu'en travaillant ensemble — entre gouvernements, secteurs et communautés — nous pouvons transformer les systèmes agroalimentaires afin de garantir à tous un accès à une alimentation saine, tout en vivant en
harmonie avec la planète.

Mais ici au Canada, et plus largement en Amérique du Nord, notre sécurité alimentaire est menacée.

Nous dénonçons fermement les compressions de 15 % proposées par Mark Carney à l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) et à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC). Ces compressions ne compromettraient pas seulement la sécurité alimentaire et la résilience agricole du Canada — elles mettraient également en péril notre capacité à atteindre les objectifs mêmes que défend la Journée mondiale de l'alimentation.

Compromettre la sécurité alimentaire dans un système fragile

L'ACIA est la première ligne de défense du Canada contre les maladies d'origine alimentaire, la contamination et les importations non sécuritaires. Ses inspecteurs, scientifiques et techniciens veillent à ce que ce qui se retrouve dans nos assiettes soit sûr et digne de confiance. Mais les effectifs de l'ACIA ont déjà diminué de 3 % depuis 2012, alors que la population canadienne a augmenté de 13 %. D'autres compressions mettraient à rude épreuve une main-d'œuvre déjà insuffisante.

Pendant ce temps, au sud de la frontière, le démantèlement de la Food and Drug Administration par l'administration Trump a affaibli le filet de sécurité alimentaire de l'Amérique du Nord. Le Canada ne peut se permettre de suivre cet exemple. Affaiblir l'ACIA maintenant nous rendrait plus vulnérables aux épidémies de maladies d'origine alimentaire.

Menace sur la résilience climatique et l'innovation

AAC joue un rôle essentiel en aidant les agriculteurs à s'adapter aux changements climatiques, à développer des pratiques durables et à maintenir le leadership mondial du Canada en matière d'innovation agricole. Des cultures résistantes à la sécheresse à la recherche sur la santé des sols, le travail de l'AAC est essentiel pour bâtir un système alimentaire résilient.

Pourtant, les effectifs de l'AAC ont diminué de près de 1 000 postes depuis 2012. Des programmes comme Agri-stabilité, qui aident les agriculteurs à faire face aux chocs économiques et environnementaux, sont déjà sous
pression. L'AAC est un pilier essentiel du secteur agricole canadien, et ses employés fournissent des services clés aux agriculteurs, afin que ceux-ci puissent à leur tour nous maintenir en bonne santé et bien nourris.

Un appel au leadership

La sécurité alimentaire est une question de sécurité nationale. Il s'agit de protéger nos familles, de soutenir nos agriculteurs et de garantir que le Canada puisse se nourrir dans un monde de plus en plus incertain. Les
membres du Syndicat de l'agriculture travaillent chaque jour pour atteindre ces objectifs. Mais ils ne peuvent pas faire plus avec moins.

Nous exhortons les députés à rejeter ces compressions à courte vue et à investir plutôt dans les personnes et les programmes qui assurent la sécurité, la santé et la nutrition des Canadiens.

Parce qu'un avenir sécurisé sur le plan alimentaire ne se construit pas par l'austérité — il se construit par la solidarité.

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Non au détournement de 150 G$, non à l’austérité, non à l’Otan

21 octobre, par Mouvement québécois pour la paix — , ,
Le Mouvement québécois pour la paix organise un rassemblement en faveur de la paix et du désarmement, le 19 octobre 2025 à 14 h au parc Place du Canada (8047 Rue Peel, (…)

Le Mouvement québécois pour la paix organise un rassemblement en faveur de la paix et du désarmement, le 19 octobre 2025 à 14 h au parc Place du Canada (8047 Rue Peel, Montréal,

Ce rassemblement s'inscrit dans le contexte du détournement de 150 G$/année de fonds publics pour l'achat de machines de guerre, annoncé par Mark Carney. Cette décision a été prise sous la pression des exigences de Donald Trump, alors que le premier ministre se présente comme un pilier face aux menaces des États-Unis. Équivalent à plus de 33 % du budget total de l'État canadien, cette somme colossale, inégalée depuis la Seconde Guerre mondiale, constitue une véritable subvention déguisée aux multinationales de l'armement des États-Unis et de leurs alliés de l'OTAN, déterminés à étendre leur domination sur les marchés mondiaux.

La militarisation tous azimuts de notre économie, sous la contrainte de l'OTAN qui exige que les États membres consacrent 5 % du PIB aux dépenses militaires, s'accompagne nécessairement d'une austérité brutale : coupes dans les services publics, démantèlement des systèmes de santé et d'éducation et recul des salaires. Tandis que les gouvernements provinciaux et fédéraux privilégient les profits des marchands de canons, c'est la population en général qui en paye le prix fort en étant privée de logements abordables, d'écoles en bon état et d'hôpitaux fonctionnels.

Cette course à la guerre menace l'humanité tout entière. Elle alimente le génocide en Palestine et la guerre en Ukraine, attise les tensions avec la Chine et nous précipite vers une Troisième Guerre mondiale.

Les organisations suivantes prendront la parole :

● Mouvement québécois pour la paix ;
● L'Association des travailleurs grecs du Québec ;
● Le Parti communiste du Québec ;
● Le Parti vert du Québec ;
● Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes - section locale de Montréal ;
● Le Canadian Peace Congress ;
● Yves Engler (candidat à la chefferie du NPD).

Source : Mouvement québécois pour la paix

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Invitation à participer à notre "action média" annuelle de la campagne du coquelicot blanc

21 octobre, par Collectif Échec à la guerre — , ,
Comme vous le savez, le Collectif Échec à la guerre mène présentement – du 21 septembre au 11 novembre – sa 15e campagne annuelle du coquelicot blanc, sous le thème Pour (…)

Comme vous le savez, le Collectif Échec à la guerre mène présentement – du 21 septembre au 11 novembre – sa 15e campagne annuelle du coquelicot blanc, sous le thème Pour l'humanité... Bas les armes !.

Cette année, nous vous invitons à participer à une "action média" collective visant à faire entendre la voix des Québécoises et des Québécois qui s'opposent aux politiques militaristes du Canada et à son odieuse complicité avec le génocide commis par Israël à Gaza, qui est récemment entré dans sa troisième année !

Il s'agit de recueillir les noms de personnes et d'organisations qui endossent la déclaration ci-dessous et de la publier grâce aux contributions financières des signataires. Cette année encore, en plus d'une parution dans une pleine page du journal Le Devoir, le samedi 8 novembre 2025, nous visons aussi une publication dans d'autres médias, pour élargir la visibilité de la campagne et de notre déclaration.

TEXTE DE LA DÉCLARATION À ENDOSSER CETTE ANNÉE

Ci-dessous (ou en cliquant sur ce lien)

NON À L'AUGMENTATION DES DÉPENSES MILITAIRES DU CANADA !

Sous prétexte de nous protéger, le premier ministre Carney a récemment annoncé une augmentation faramineuse du budget de la défense pour atteindre 150 milliards de dollars CAen 2035.

En 2024 seulement, 2718 milliards de dollars US ont été consacrés aux dépenses militaires dans le monde. C'est une augmentation record depuis la fin de la Guerre froide (1989). Pourtant la sécurité sur notre planète ne s'est pas améliorée pour autant. Il n'y a jamais eu autant de guerres. Qui plus est, l'immense majorité des victimes de ces guerres sont des civil·es.

L'équation est impitoyable : plus d'armes = plus de guerres.

Et à qui profitent ces guerres ? Aux pilleurs de ressources précieuses, locaux et étrangers, tel qu'on le constate particulièrement au Congo et au Soudan. Aux vendeurs d'armes. Et aux pays qui, comme les États-Unis particulièrement, cherchent à maintenir leur hégémonie. Messieurs Carney et Legault rêvent de rafler les contrats militaires en citant leurs prétendus bénéfices économiques alors que des études démontrent que les investissements dans l'économie civile (éducation, santé, économie verte) génèrent plus d'emplois. Notons que lebudget fédéral de la
défense est déjà plus de 20 fois supérieur à celui de l'environnement alors que nous faisons face à une crise climatique qui menace notre survie.

L'augmentation des dépenses de défense à 5 % du PIB équivaudrait à 32 % du budget canadien, ceci alors que des mesures d'austérité frappent les services publics aux dépens des besoins sociaux de la population. Ce virage vers une économie de guerre se fait sans notre consentement. Dans un contexte de mépris de plus en plus flagrant du droit international, nous sommes entraînés dans une course folle aux armements qui augmente les risques, déjà très élevés, d'une conflagration mondiale nucléaire.

La militarisation encourage le commerce des armes qui alimente les conflits à travers le monde. Le génocide en cours en Palestine, auxquels plusieurs pays occidentaux, dont le Canada, ont contribué par leurs exportations d'armes, en est un exemple flagrant.

On est bien loin ici de s'armer pour la paix !

Non à la militarisation qui n'assure en rien la sécurité des peuples et menace la survie de l'humanité !
Pour le respect des droits humains et du droit international !
Non à une économie de guerre : exigeons un débat public !

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L’assurance-emploi est pleine de trous !

21 octobre, par Conseil national des chômeurs et chômeuses — , ,
Au lieu de raccommoder sans cesse, le gouvernement fédéral doit profiter du prochain budget pour mettre en place des mesures pérennes pour l'assurance-emploi, qui permettront (…)

Au lieu de raccommoder sans cesse, le gouvernement fédéral doit profiter du prochain budget pour mettre en place des mesures pérennes pour l'assurance-emploi, qui permettront de faire face aux conséquences de la guerre commerciale actuelle et à celles des crises à venir.

En compagnie de ses partenaires syndicaux et sociaux, le Conseil national des chômeurs et chômeuses (CNC) revendique dès maintenant la mise en place des mesures suivantes pour faire face aux crises d'aujourd'hui et de demain :

• Une norme universelle d'admissibilité de 420 heures ;
• Une augmentation du montant des prestations et l'établissement d'un seuil plancher à 500$ ;
• L'exclusion pour fin d'emploi invalide circonscrite au dernier emploi occupé (un-e demandeur-se sur quatre, qui a travaillé et cotisé au régime au cours de la dernière année, est refusé-e en raison de ces sanctions) ;
• Un prolongement de la mesure actuelle permettant de recevoir des prestations plus tôt en simplifiant les règles qui régissent le traitement des indemnités de départ et autres sommes versées à la suite d'une cessation d'emploi ;
• Que les barrières qui empêchent les femmes d'avoir accès aux prestations d'assurance-emploi, en cas de perte d'emploi après un congé de maternité, soit retirées.

Le CNC revendique également, dès maintenant :

• Que le gouvernement renonce à la division artificielle entre les travailleur-se-s qu'il a créé avec sa mesure temporaire pour les « travailleur-se-s de longue date » ;
• Une mesure permanente pour les travailleur-se-s des régions où les industries saisonnières ont une place prépondérante ;
• Que l'admissibilité aux prestations spéciales soit basée sur une norme universelle d'admissibilité de 420 heures ;
• Que la période de prestations pour proches aidant-e-s d'un-e adulte gravement malade ou blessé-e passe de 15 à 26 semaines et que la nécessité que la vie de la personne soit en danger soit retirée des critères d'admissibilité.

Il est temps de régler le problème !

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200 manifestant·e·s dénoncent le projet de loi C-12 sur l’immigration

21 octobre, par Solidarité sans frontière — , ,
Dimanche (le 19 octobre), quelque 200 personnes étaient rassemblées sur la place de la Gare-Jean-Talon pour manifester contre le projet de loi C-12 déposé le 8 octobre dernier (…)

Dimanche (le 19 octobre), quelque 200 personnes étaient rassemblées sur la place de la Gare-Jean-Talon pour manifester contre le projet de loi C-12 déposé le 8 octobre dernier devant le Parlement canadien. Celui-ci vise à « renforcer le système d'immigration et la frontière du Canada ».
« Nous sommes ici parce que nous refusons de nous taire et pour dire non au projet C-12, non à l'Entente sur les tiers pays sûrs [ETPS], et oui à la régularisation », ont clamé Samira Jasmin et Hady Kodoye Anne, les porte-parole de Solidarité sans frontières, devant la foule, peu de temps avant le début de la marche.
Le projet de loi C-12 et l'ETPS « ne sont pas des textes juridiques, mais des lois incarnant une vision du monde où certaines vies valent moins que les autres, où l'immigration devient un crime et la frontière, un mur contre l'espoir », a dénoncé Mme Jasmin. Présenté le 8 octobre dernier au Parlement, C-12 est la nouvelle version du projet de loi C-2. (tiré du site du journal Le Devoir, article et photo de Sarah Collardey, 19 octobre 2025)

Nous publions ci-dessous un article de Solidarité sans frontières qui explique les enjeux de ce projet de loi. (PTAG)

Régularisation maintenant ! Bloquons la loi C-2 ! Se retirer de l'ETPS !

Solidarité sans frontières appelle tou·te·s les migrant·e·s (sans papiers ou qui risquent de se retrouver sans papiers en raison du système d'immigration injuste du Canada, qui va empirer avec C-2), ainsi que tous leurs soutiens et mouvements alliés à se joindre à nous pour une « marche des prisonniers » le dimanche 19 octobre.

Nos revendications sont claires : nous voulons le respect de notre dignité, de l'égalité et de la liberté de circuler, de rester, et de revenir. Dans notre contexte actuel, cela signifie la régularisation immédiate de tou·te·s les migrant·e·s au Canada, la fin du projet de loi C-2, et de se retirer de l'Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS).

Nous rejetons le discours raciste qui accuse les migrant·e·s de tous les maux sociaux créés par des structures sociales injustes. Nous rejetons les frontières coloniales qui participent au système mondial d'apartheid. Nous nous unissons aux peuples autochtones de l'Île de la Tortue, aux travailleur·s·es de toutes origines et à toutes celles et ceux qui sont opprimé·e·s par le colonialisme raciste, le capitalisme et le patriarcat, afin de lutter pour notre liberté et la justice pour tou·te·s.

Nous exigeons la régularisation, le retrait du projet de loi C-2 et la fin de l'Entente sur les Tiers Pays Sûrs.

Pourquoi une marche de prisonniers ? Les migrant·e·s sans papiers, et toutes celles et ceux qui ont un statut d'immigration précaire, sont prisonnier·e·s au Canada. Elles et ils ne peuvent pas partir, ni travailler de façon légale ; elles et ils sont exploité·e·s sur leur lieu de travail encore plus que d'autres travailleur·se·s ; elles et ils sont constamment menacé·e·s de détention arbitraire. Elles et ils sont ici parce que le Canada et d'autres pays occidentaux riches ont rendu leurs foyers invivables. Elles et ils sont ici, aspirant à une vie meilleure pour elles et eux-mêmes et pour leurs enfants. Elles et ils sont confronté·e·s à la violence bureaucratique et juridique du Canada mais luttent dans la dignité et la résilience.

Qu'est-ce que la régularisation ? La régularisation est un terme juridique qui signifie que les migrant·e·s qui ne sont pas égaux en droit sont reconnu·e·s par l'État canadien comme disposant des mêmes droits que les personnes nées au Canada. C'est un terme technique pour désigner l'égalité devant la loi. Si vous croyez en l'égalité, vous êtes pour la régularisation.

Qu'est-ce que le projet de loi C-2 ?

Le projet de loi C-2 est un projet de loi déposé par le nouveau gouvernement libéral de Mark Carney qui propose des modifications à plusieurs lois canadiennes. Loin du tweet « Bienvenue aux réfugiés » et des promesses de régularisation du gouvernement libéral précédent, C-2 est l'expression de la haine anti-migrant·e·s de Trump, de Poilièvre et de l'extrême-droite. S'il est adopté, le projet de loi C-2 augmentera considérablement le nombre de migrant·e·s sans papiers au Canada, entraînera encore plus de décès parmi les personnes tentant d'entrer au Canada depuis les États-Unis et donnera à l'État canadien davantage de pouvoirs de surveillance. Si vous croyez en la liberté et à l'égalité, vous êtes contre le projet de loi C-2.

Qu'est-ce que l'Entente sur les tiers pays sûrs ?

L'Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS) vise à empêcher les migrant·e·s présentement aux États-Unis d'entrer au Canada. En réalité, elle force les gens à emprunter des routes encore plus dangereuses pour entrer au Canada et a déjà entraîné des décès dus aux noyades et au froid extrême. L'Amérique de Trump n'est pas sûre ; ni pour les migrant·e·s, ni pour les personnes homosexuel·le·s et trans, ni pour les personnes racialisées et colonisées, ni pour les femmes. Sous Trump, plus de migrant·e·s que jamais recherchent désespérément la sécurité. Avec les modifications de l'ETPS qu'implique le projet de loi C-2 de Carney, elles et ils ne pourront plus obtenir de régularisation au Canada et le nombre de sans papiers va augmenter encore plus. Si vous croyez à la liberté, à l'égalité et au respect, vous êtes contre l'ETPS.

Liberté de circuler. Liberté de rester. Liberté de revenir. PERSONNE N'EST ILLÉGAL SUR LES TERRES AUTOCHTONES VOLÉES !

solidaritesansfrontieres@gmail.com
www.solidarityacrossborders.org

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Pour des municipalités plus inclusives

21 octobre, par Conseil québécois LGBT — , ,
Le Conseil québécois LGBT propose d'envoyer à vos candidat·es les 10 recommandations de son guide Municipalités inclusives des personnes LGBTQIA2+. Tiré du site du Conseil (…)

Le Conseil québécois LGBT propose d'envoyer à vos candidat·es les 10 recommandations de son guide Municipalités inclusives des personnes LGBTQIA2+.

Tiré du site du Conseil LGBT et de L'Infolettre de l'R des Centres de femmes

10 recommandations :

01 Désigner un·e fonctionnaire et nom mer un·e élu·e membre du comité exécutif comme responsables des dossiers LGBTQIA2+.

02 Sensibiliser et former les personnes travaillant dans le milieu municipal aux réalités des communautés LGBTQIA2+.

03 Créer des liens privilégiés avec les organismes LGBTQIA2+ de votre région en les rencontrant et en montrant de l'intérêt envers leur travail.

04 Poser des gestes symboliques, comme la levée du drapeau le 17 mai (Journée internationale de lutte contre l'homophobie et la transphobie).

05 Collaborer avec le service de police qui dessert votre territoire pour développer des pratiques d'intervention qui tiennent compte des réalités LGBTQIA2+.

Pour en savoir plus, visitez www.conseil-lgbt.ca/muni

06 Aménager des vestiaires et des toilettes accessibles et non genrés dans toutes les installations de la municipalité.

07 Adopter une politique détaillée pour accompagner les employé·es qui entreprennent un parcours de transition en milieu de travail.

08 Adopter une politique contre le harcèlement qui comporte une procédure claire pour le traitement des plaintes et un mécanisme de sanctions.

09 Mobiliser des outils pour avoir une vue d'ensemble des enjeux auxquels font face les populations LGBTQIA2+ dans votre milieu (ADS, ADS+).

10 Inclure les enjeux LGBTQIA2+ dans la planification stratégique et les divers plans d'action qui en résultent

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Marche mondiale des femmes : La CSN fait front pour une réelle égalité

21 octobre, par Confédération des syndicats nationaux (CSN) — , ,
Des centaines de travailleuses et de travailleurs affiliés à la Confédération des syndicats nationaux (CSN) provenant de toutes les régions convergent aujourd'hui vers Québec (…)

Des centaines de travailleuses et de travailleurs affiliés à la Confédération des syndicats nationaux (CSN) provenant de toutes les régions convergent aujourd'hui vers Québec pour le grand rassemblement de la Marche mondiale des femmes (MMF).

« Il est évident que la CSN est présente à Québec. Car malheureusement, encore aujourd'hui, les inégalités entre les femmes et les hommes persistent et les acquis se voient de plus en plus remis en question. Mais nous ne cesserons pas de faire front », déclare la secrétaire générale de la CSN, Nathalie Arguin.

Madame Arguin rappelle que les femmes demeurent plus pauvres que les hommes en 2025. « Le gouvernement Legault semble l'avoir oublié ou bien il ne s'en préoccupe pas, car plusieurs des décisions prises contribuent à accentuer l'écart entre les riches et les pauvres. Et quand on sait que l'écart salarial entre les femmes et les hommes diminue quand les femmes sont syndiquées, on mesure bien à quel point les attaques du gouvernement Legault envers les syndicats peuvent avoir des impacts concrets sur l'autonomie économique des femmes », continue-t-elle.

Autre décision qui affecte davantage les femmes : les abolitions de postes imposées à la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, pour ne nommer que celles-là. « Ces compressions affecteront en premier lieu les femmes qui réclament l'équité salariale et celles victimes de violences. Et parlant de violence, quinze femmes ont été assassinées depuis le début de l'année. C'est horrifiant ! », enchaîne Mélanie Pelletier, vice-présidente à la condition féminine du Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches, lequel est au cœur de l'organisation de ce grand rassemblement.

Nathalie Arguin souligne que l'inaction de la CAQ devant la crise environnementale ajoute de l'huile sur le feu des inégalités. « Chaque été, ici, on voit les feux de forêt se multiplier. En ce moment, plusieurs réservoirs d'eau à travers la province sont à sec en raison du manque de précipitations. Avec l'accélération de ces catastrophes climatiques, ce sont majoritairement les femmes qui verront leur charge mentale et leur insécurité économique s'accroître, car ce sont elles qui, de manière générale, prennent soin de leurs proches », ajoute-t-elle.

En conclusion, Mélanie Pelletier rappelle que depuis plusieurs années, des groupes anti-choix se rassemblent devant des établissements de santé qui dispensent des services d'avortement ou bien devant l'Assemblée nationale pour dénoncer la liberté des femmes à disposer de leur corps. « Nous sommes présents à ces moments-là pour nous opposer à toutes ces tentatives de restreindre les droits des femmes. Aujourd'hui, nous marchons. Mais le combat contre les rétrogrades qui souhaitent voir les droits des femmes reculer est quotidien. Et la CSN le prend de front », termine la vice-présidente.

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Le CTC organise un forum axé sur les travailleuses et travailleurs avec les candidats à la direction du NPD

21 octobre, par Congrès du travail du Canada (CTC) — , ,
Le mercredi 22 octobre, le Congrès du travail du Canada (CTC) tiendra un forum axé sur les travailleuses et travailleurs avec les candidats officiels à la direction du NPD, un (…)

Le mercredi 22 octobre, le Congrès du travail du Canada (CTC) tiendra un forum axé sur les travailleuses et travailleurs avec les candidats officiels à la direction du NPD, un événement de course à la direction officiellement reconnu par le NPD du Canada.

Le forum réunira Avi Lewis, Heather McPherson, Rob Ashton, Tanille Johnston, Tony McQuail pour une série de discussions modérées axées sur leur vision et leur approche du leadership pour le NPD du Canada.

Animé par Bea Bruske, présidente du CTC, chaque candidat disposera de dix minutes pour s'exprimer, offrant ainsi aux électeurs et aux travailleuses et travailleurs l'occasion d'entendre, directement et en détail, comment le ou la prochain·e chef·fe du NPD prévoit d'obtenir des résultats concrets pour les travailleuses et travailleurs.

« Les travailleuses et travailleurs ont bâti ce parti, et les syndicats du Canada sont là pour s'assurer qu'il demeure concentré sur leurs priorités. Ce forum vise à placer les travailleuses et travailleurs au cœur de la conversation sur la direction. » – Bea Bruske, présidente du CTC

QUOI : Forum axé sur les travailleurs et travailleuses avec les candidats à la direction du NPD

QUAND : Mercredi 22 octobre 2025 – de 18 h à 19 h (ouverture des portes à 17 h 30 HE)

: Le Westin Ottawa – Salle Twenty Two (11, promenade Colonel By, Ottawa)
Ou via Zoom : https://us02web.zoom.us/j/83681751548?pwd=C5emRbJlJRWlvdNrinIshF0Hb2dqxs.1

QUI : Modératrice Bea Bruske – Présidente, Congrès du travail du Canada

Candidats à la direction du NPD

Avi Lewis – Journaliste, militant, professeur agrégé

Heather McPherson – Députée du NPD

Rob Ashton – Président, Syndicat international des débardeurs et magasiniers du Canada (ILWU)

Tanille Johnston – Directrice des programmes communautaires à la First Nations Health Authority, conseillère municipale à Campbell River

Tony McQuail – Agriculteur biologique du comté de Huron

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Faire front pour le Québec

21 octobre, par Caroline Senneville — , ,
Malmené dans les sondages, le gouvernement Legault a fait son lit : il embrasse une vision conservatrice en pointant des coupables plutôt qu'en trouvant des solutions aux (…)

Malmené dans les sondages, le gouvernement Legault a fait son lit : il embrasse une vision conservatrice en pointant des coupables plutôt qu'en trouvant des solutions aux problèmes qui préoccupent la population.

Tiré de l'infolettre En mouvement

15 Oct 2025

Caroline Senneville
Présidente de la Confédération des syndicats nationaux

Malmené dans les sondages, le gouvernement Legault a fait son lit : il embrasse une vision conservatrice en pointant des coupables plutôt qu'en trouvant des solutions aux problèmes qui préoccupent la population.

Les citoyennes et les citoyens ont perdu confiance envers les troupes de François Legault. La crise du logement continue de faire rage et des milliers de travailleuses et de travailleurs ont du mal à joindre les deux bouts. L'attente est toujours aussi longue dans le réseau de la santé et des services sociaux et l'état des écoles fait trop souvent pitié. Que propose de faire le gouvernement ? Bruit de criquets. Il n'en a que pour ces boucs émissaires préférés, les personnes issues de l'immigration et les syndicats. La restriction du droit de grève n'était pas suffisante, la CAQ veut maintenant s'en prendre aux cotisations syndicales. La droite souffle fort et les droits des travailleuses et des travailleurs sont dans la mire.

La CSN n'entend pas rester silencieuse face à ces attaques. C'est pourquoi nous lançons la campagne Faire front pour le Québec. Nous entendons déjà les ténors de la CAQ en rajouter une couche en dénonçant le fait que nous serons visibles dans l'espace public pour défendre cette campagne, notamment avec de la publicité. Nous n'avons pas de leçon à recevoir quand on sait que la CAQ vient de mettre des centaines de milliers de dollars dans une campagne publicitaire télévisuelle qui vante ses mérites et qui s'attaque une fois de plus aux organisations syndicales.

Si le gouvernement ne propose rien de moins que de casser le modèle syndical, il faut croire que nous avons bien joué notre rôle dans les dernières années, soit mettre en lumière ses mauvaises décisions comme la privatisation du réseau de santé et de services sociaux et les compressions budgétaires dans les services publics. La CAQ n'a toujours pas digéré que des milliers de travailleuses et de travailleurs remportent des victoires syndicales majeures récemment, notamment celle, importante, du personnel du secteur public. La CAQ ne fait rien non plus pour les travailleurs et les travailleuses de bien des secteurs d'activité, notamment celui de la forêt. Face à la guerre commerciale que nous subissons, nous aurions tout intérêt à faire front pour une économie résiliente. Il faut croire que le gouvernement en entend autrement.

Disons-le clairement : ce que le gouvernement veut faire avec les organisations syndicales, c'est l'équivalent des poursuites-bâillons menées par des multinationales. À quelques mois de la fin de son mandat, le gouvernement veut faire plaisir aux grands patrons. Pendant qu'il attaque les travailleuses et les travailleurs et leurs syndicats, il n'a rien à proposer pour freiner les excès du patronat. Que propose le gouvernement pour serrer la vis aux patrons qui utilisent des briseurs de grève ? Rien. Que propose-t-il pour freiner les écarts de salaire entre les salarié-es et les grands dirigeants ? Rien non plus. Et quand agira-t-il pour baliser le lobby de certains milieux patronaux ? Visiblement jamais.

Ce gouvernement a fait son temps. Le Québec peut faire mieux. Le Québec doit faire mieux. Car le Québec de l'avenir doit donner les moyens aux travailleuses et aux travailleurs de bien vivre en plus de consolider les services publics et bâtir une économie verte qui crée des emplois durables. C'est pourquoi la CSN va faire front dans les prochaines semaines en invitant toute la population à participer au grand rassemblement qui se tiendra le 29 novembre prochain à Montréal.

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Renaud-Bray, Amazon, même combat !

21 octobre, par Confédération des syndicats nationaux (CSN) — , ,
Alors qu'un conflit de travail perdure depuis 10 mois en raison de l'entêtement du groupe Renaud-Bray à ignorer les demandes de négociation de ses salarié-es, la CSN condamne (…)

Alors qu'un conflit de travail perdure depuis 10 mois en raison de l'entêtement du groupe Renaud-Bray à ignorer les demandes de négociation de ses salarié-es, la CSN condamne vigoureusement la fermeture de la succursale située aux Galeries de la Capitale. Pour la CSN, il s'agit d'un geste profondément antisyndical : il y a quelques jours à peine, le groupe avait remplacé l'enseigne d'un magasin Archambault, situé juste en face de la libraire en grève, pour une bannière… Renaud-Bray.

Tiré de l'infolettre En mouvement
https://mail.google.com/mail/u/0/#inbox/WhctKLbmpHJTHZhGLDBXwCWZCMwGhBhgrNCChkFJXtrPssBzSZtGbzLdWRhDxLbgCDNHRNB


La CSN condamne la fermeture d'un Renaud-Bray à Québec

« Il s'agit d'une violation directe du droit à la négociation collective des employé-es de Renaud-Bray », décrie la présidente de la CSN, Caroline Senneville.

« Que fait le ministre du Travail dans ce dossier ? Depuis le début de cette négociation, l'entreprise dirigée par Blaise Renaud a bafoué plusieurs règles prévues au Code du travail, que ce soit en négociant de mauvaise foi, en entravant les activités du syndicat ou encore en embauchant des briseurs de grève, des violations reconnues par les tribunaux. Nous allons évidemment contester cette fermeture, avec la même énergie que nous poursuivons Amazon pour ses fermetures illégales », d'affirmer la présidente de la CSN.

L'attitude cavalière du groupe Renaud-Bray à l'égard de ses employé-es irrite particulièrement la présidente du Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches, Barbara Poirier. « Il y a quelques jours, l'enseigne Archambault du magasin sur le boulevard Lebourgneuf a été remplacée par une bannière Renaud-Bray. Un magasin juste en face de la succursale des Galeries de la Capitale, dont on annonce la fermeture aujourd'hui. Nous ne sommes pas dupes : Renaud-Bray se débarrasse du syndicat afin de pouvoir continuer à exploiter ses employé-es en les payant à peine le salaire minimum. C'est indécent ! »

Le président de la Fédération du commerce, Serge Monette, assure que tous les moyens seront pris afin de faire respecter les droits des travailleuses et des travailleurs. « En fermant son magasin des Galeries de la Capitale, Renaud-Bray tente d'intimider les employé-es de l'ensemble de ses succursales du Québec. “ Si vous n'acceptez pas mes salaires de misère, je ferme boutique ! ”, c'est le message envoyé par Blaise Renaud aujourd'hui, malgré le fait que son entreprise soit très rentable. Nous ne nous laisserons pas faire, nous défendrons les travailleuses et les travailleurs jusqu'au bout. »

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Semaine SST 2025 | Détresse morale : le vice caché du réseau de la santé

21 octobre, par Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) — , ,
À l'occasion de la Semaine de la santé et de la sécurité du travail (SST), qui se tiendra du 19 au 25 octobre 2025, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec–FIQ (…)

À l'occasion de la Semaine de la santé et de la sécurité du travail (SST), qui se tiendra du 19 au 25 octobre 2025, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec–FIQ choisit de mettre en lumière un enjeu trop souvent passé sous silence : la détresse morale vécue par les professionnelles en soins.

Quand le travail empêche de bien soigner

La détresse morale survient lorsqu'une personne sait ce qu'il faudrait faire pour offrir des soins de qualité, mais ne peut y parvenir en raison de contraintes organisationnelles, d'un manque de ressources ou de décisions imposées. Ce sentiment d'impuissance nuit à la santé psychologique et physique : fatigue, anxiété, troubles du sommeil et épuisement professionnel en sont souvent les conséquences.

Selon un sondage mené par la FIQ en 2023, 83 % des professionnelles en soins estiment que la charge de travail est le principal facteur derrière l'omission de soins. Ce phénomène, appelé « qualité empêchée », devient un risque majeur pour la santé et la sécurité du personnel.

Un enjeu reconnu par la loi

Depuis l'adoption de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST), la prévention des risques psychosociaux (dont la détresse morale) fait désormais partie des obligations des employeurs. Les établissements doivent donc adapter leur organisation du travail et leurs pratiques afin de protéger à la fois la santé physique et mentale des professionnelles en soins.

Pour un réseau plus humain

En mettant ce thème à l'avant-plan, la FIQ réaffirme l'urgence de repenser l'organisation du travail dans le réseau de la santé. La détresse morale n'est pas un problème individuel : elle est le symptôme d'un système qui empêche les professionnelles en soins d'exercer leur jugement et leur expertise dans des conditions saines et sécuritaires.

Protéger celles qui soignent, c'est aussi protéger la qualité des soins offerts à la population.

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Élections municipales 2025 : 81 % des Québécois et des Québécoises veulent que leur municipalité agisse contre les changements climatiques

21 octobre, par Coalition Vire au vert, Vivre en ville — , ,
Alors que plusieurs signaux laissent craindre un recul de l'action climatique au Québec, les électeurs, eux, n'ont pas tourné la page. À moins d'un mois des élections (…)

Alors que plusieurs signaux laissent craindre un recul de l'action climatique au Québec, les électeurs, eux, n'ont pas tourné la page. À moins d'un mois des élections municipales, 81 % des Québécois et des Québécoises estiment qu'il est important que leur municipalité agisse pour lutter contre les changements climatiques, selon un sondage Léger dévoilé par Vivre en Ville, en collaboration avec plusieurs organismes membres de la coalition Vire au vert. Après un été marqué par des inondations, des feux de forêt et des vagues de chaleur, la population réclame des conseils municipaux capables de protéger et d'adapter leurs villes et villages face à la crise climatique. Cette donnée confirme ce que l'on constate partout au Québec : la population souhaite un leadership local fort pour protéger et adapter ses milieux de vie.

« Les municipalités sont en première ligne pour agir face aux changements climatiques et en subissent les impacts directs. Au cours des dernières années, leur leadership s'est fait sentir partout au Québec, et ce sondage le confirme : les futurs maires et mairesses ont un mandat clair de la population pour agir et adapter nos villes et villages afin de prévenir les impacts climatiques. Le gouvernement est peut-être fatigué d'entendre parler du climat, mais pas la population : c'est un sujet de préoccupation important pour les Québécoises et les Québécois », affirme Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville.

La population québécoise demande des villes qui agissent

Le sondage, mené par Léger du 3 au 5 octobre 2025 auprès de 1 010 personnes, montre un soutien très élevé aux 12 propositions de la plateforme Les 12 travaux de nos collectivités, présentée par Vivre en Ville au printemps.

Chacune des 12 propositions obtient une large majorité favorable et aucune ne suscite d'opposition substantielle, qu'on parle de redéveloppement des milieux déjà bâtis, de réduction des émissions des bâtiments, de revitalisation des centres-villes, de verdissement des milieux de vie ou de protection des milieux naturels face à l'étalement urbain.

« Les gens demandent à leurs conseils municipaux d'agir pour la lutte et l'adaptation aux changements climatiques. Nous le voyons partout au Québec : la volonté de protéger les milieux naturels et de limiter l'empiètement sur la nature n'a jamais été aussi forte. Nous devons être du bon côté de l'histoire face à la pire crise que l'humanité ait connue. Les élu-e-s ont la responsabilité d'écouter la population québécoise, pas les architectes du recul climatique », affirme Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec, une organisation membre de Vire au vert.

Les municipalités : un leadership à maintenir

Face à la crise climatique à laquelle se superpose la crise de l'habitation, Vivre en Ville et Vire au vert lancent un appel clair aux candidats et candidates aux élections municipales du 2 novembre : s'engager à maintenir et renforcer le leadership municipal en matière d'action climatique. La population soutient des mesures concrètes pour transformer nos villes et villages et améliorer la qualité de vie de toutes et tous.

« On ne peut plus séparer le climat, l'habitation, l'économie et l'environnement : tout est lié. La population le comprend, et ce sondage le confirme. Celles et ceux qui veulent exercer un véritable leadership municipal ont le soutien des électeurs pour agir maintenant, redoubler d'efforts pour mettre en place des mesures concrètes d'atténuation et d'adaptation, et ne laisser personne derrière », souligne M. Savard.

Fruit de trois décennies d'expertise, la plateforme Les 12 travaux de nos collectivités propose 12 engagements concrets, adaptables à toute plateforme électorale, pour aider les municipalités à relever les défis pressants de notre époque — climat, logement, mobilité et qualité de vie.

La plateforme complète, incluant les 12 propositions détaillées, est disponible ici.

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Lecture bénéfice pour l’UNRWA de la pièce L’Affiche de Philippe Ducros

Communiqué USINE C – Les productions Hôtel-Motel et l'USINE C s'associent pour présenter une lecture-bénéfice de la pièce L'AFFICHE de Philippe Ducros, en soutien aux réfugiés (…)

Communiqué USINE C – Les productions Hôtel-Motel et l'USINE C s'associent pour présenter une lecture-bénéfice de la pièce L'AFFICHE de Philippe Ducros, en soutien aux réfugiés palestiniens.

  1. Tous les fonds recueillis seront reversés à l'Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), délivrant de l'aide humanitaire.

Déjà, avant le 7 octobre 2023, près de 70 % de la population de la bande de Gaza dépendait directement de cet organisme pour leur survie. Convaincue par l'urgence et la nécessité d'agir ici et maintenant, Angela Konrad et l'USINE C souhaitent accueillir cet événement essentiel, initié par Philippe Ducros et Isabelle Vincent, en ouvrant grand leurs portes et en espérant compter sur le soutien des publics de tous les théâtres de Montréal.

« Nous organisons une lecture de L'AFFICHE pour répondre au sentiment d'impuissance face à ce génocide qui se passe en direct à Gaza et en Cisjordanie (comme le nomme aujourd'hui officiellement une commission de l'ONU), face à ses répercussions qui s'étendent au Liban, à la Syrie, à l'Iran, partout en fait », souligne Philippe Ducros, auteur de L'AFFICHE et directeur artistique des Productions Hôtel-Motel. « Et parce que L'AFFICHE se termine sur un appel au dialogue pour que le sang arrête de couler. L'occupation doit cesser. »

L'Affiche

Ce texte percutant écrit entre 2004 et 2009 documente les impacts de l'occupation militaire des territoires palestiniens, et ce, des deux côtés du mur. L'AFFICHE raconte l'indicible en décrivant la violence insupportable d'un impossible quotidien. Elle met des visages sur les voix brisées, sur les petites résistances, sur les espoirs que l'occupation met à rude épreuve.

Parce que le conflit actuel n'a pas commencé le 7 octobre 2023. L'occupation militaire dure depuis des décennies. Il y a actuellement urgence de briser le silence, de parler des effets réels d'un conflit largement médiatisé sur le vécu de milliers de gens, un conflit qui fragilise l'ensemble de la région.

Cette lecture publique se veut un geste de solidarité spontané porté par des membres de la distribution originale ainsi que par de nouveaux venus : Karim Bourara, François Bernier, Sylvie De Morais-Nogueira, Justin Laramée, Marie-Laurence Moreau, Mireille Naggar, Etienne Pilon, Richard Thériault et Isabelle Vincent. La lecture sera suivie d'une discussion.

Philippe Ducros est auteur et metteur en scène d'une vingtaine de pièces de théâtre et d'un roman. Autodidacte, sa démarche reste ancrée dans ses errances aux quatre coins du monde (Syrie, Palestine, Israël, Liban, Iran, etc.). À la suite d'une résidence en Syrie, il écrit L'affiche (Éditions Lansman). Pour l'écrire, il est allé à trois reprises en Palestine occupée et en Israël. Il y était en 2009 lors des bombardements sur Gaza et les 1 300 morts qui en ont découlé. Il a aussi fait de nombreux séjours dans les camps de réfugiés palestiniens en Syrie et au Liban. Il a encore des ami·e·s là-bas, des deux côtés du mur, avec qui il correspond. Il est le directeur artistique des Productions Hôtel-Motel.

Les Productions Hôtel-Motel souhaitent sortir les spectateur·trice·s des cuisines du Québec pour ancrer notre question identitaire dans une vision macroscopique du monde. Depuis sa création, Hôtel-Motel a créé plus d'une quinzaine de pièces présentées au Québec, au Canada, en Europe et en Afrique, dont La porte du non-retour, Bibish de Kinshasa, La cartomancie du territoire, Chambres d'écho et (Dé)tourner sa langue.

  1. Tous les revenus de billetterie seront remis à l'Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA). Les personnes qui ne peuvent pas assister à la lecture-bénéfice et qui souhaitent faire un don, peuvent le faire directement via le site de l'UNRWA
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Embrasser les pieds de son enfant

21 octobre, par Mohamed Lotfi — , ,
À force de le lui répéter, il avait fini par les croire, ses geôliers : « Ta famille est morte, tu n'as plus rien. » Ni maison, ni épouse, ni lueur au bout de la nuit. Les (…)

À force de le lui répéter, il avait fini par les croire, ses geôliers : « Ta famille est morte, tu n'as plus rien. »

Ni maison, ni épouse, ni lueur au bout de la nuit. Les bombes lui auraient tout pris : le toit, la table, le pain partagé, la douceur d'une voix aimée et le rire de son fils qui le gardait vivant. Derrière les barreaux de l'ennemi, il avait appris à respirer comme un mort : juste assez pour ne pas disparaître, pas assez pour espérer.

Il savait qu'à Gaza, chaque jour, des familles entières étaient effacées du monde en un souffle, sous les décombres. Les rues s'effondraient sur des corps sans sépulture. La mer, elle-même, semblait lasse de porter tant de désespoir. Sa famille, pensait-il, avait été engloutie parmi tant d'autres.

Et puis, le matin du 13 octobre 2025, ses geôliers vinrent le chercher. Son nom figurait sur la liste des 1 968 captifs palestiniens libérés dans le cadre d'un accord d'échange d'otages. Une liberté sans contours, presque irréelle. Dans le bus, les libérés, vêtus de gris, portaient en eux une absence, un deuil suspendu. Quand les roues touchèrent enfin la terre de Gaza, le vent lui apporta l'odeur mêlée de la poussière et du sel. Il marcha vers ce qu'il restait de son immeuble. Il monta les escaliers comme un revenant revenu d'un autre monde. Ses pas pesaient autant que les ruines. C'était un homme qui n'attendait plus rien.

Avant de tourner vers le couloir qui menait à son appartement, une femme, qui ressemblait étrangement à la sienne, apparut et se jeta sur lui. Une silhouette frêle, vêtue d'un voile noir, le visage creusé. Elle était là. Vivante. Amaigrie, tremblante, mais debout. Il crut à un mirage. Son cœur se souleva, un coup de tonnerre dans la poitrine. Il la prit dans ses bras, la serra, la broya presque, haletant, ivre de joie et d'effroi. Il aurait voulu mourir là, contre elle, tant la vie redevenait brûlante, insoutenable.

Et puis, derrière la femme, une petite ombre s'avança. Un enfant. Son fils. Leur fils. Aussi vivant et aussi beau qu'il l'avait laissé. L'homme tomba à genoux. Il se jeta sur les pieds de l'enfant pour les embrasser. Ses lèvres se posèrent sur ces pieds nus, écorchés, ces pieds qui avaient marché, tremblé, survécu à la guerre. De tout son corps, il se pencha, comme on prie. Comme on demande pardon à la vie d'avoir cessé d'y croire. D'avoir douté d'elle.

Puis une petite fille se présenta à son tour, dans les bras de sa grand-mère, plus intimidée que son frère. Ce hall d'immeuble éventré fut le théâtre d'un retour, d'une renaissance.

Autour de la famille de nouveau réunie, Gaza restait en ruines. Mais dans ce geste, humble et infini, il y avait tout ce que les bombes n'avaient pas su détruire : le cœur indestructible d'un peuple qui, même blessé jusqu'à l'âme, continue d'aimer et d'exister.

Mohamed Lotfi
14 Octobre 2025

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Regroupement des médias critiques de gauche (RMCG)

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Gauche.media est un fil en continu des publications paraissant sur les sites des médias membres du Regroupement des médias critiques de gauche (RMCG). Le Regroupement rassemble des publications écrites, imprimées ou numériques, qui partagent une même sensibilité politique progressiste. Il vise à encourager les contacts entre les médias de gauche en offrant un lieu de discussion, de partage et de mise en commun de nos pratiques.

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