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Budget 2025-2026 en santé et services sociaux pour les organismes communautaires autonomes

Gatineau, 1er mai 2025 - Lors de l'étude des crédits gouvernementaux tenue le 30 avril, le ministre Carmant a publiquement affirmé qu'il se réservait une somme d'un million sur les 10 millions annoncés dans le budget de rehaussement de financement à la mission des organismes communautaires autonomes en santé et services sociaux pour la prochaine année. Selon ses propos, ce montant est réservé « pour des urgences, des organismes à risque de fermeture ». Le ministre reconduit ainsi une mesure de l'an dernier qui avait soulevé un tollé chez les organismes communautaires indignés par son irrespect des règles d'un programme de financement géré par son propre ministère.
Pour Daniel Cayley-Daoust, président de la Coalition des Tables Régionales d'Organismes Communautaires (CTROC), « le ministre s'octroie de l'argent de poche qu'il pourra saupoudrer selon son bon vouloir. Ce qu'il ne semble pas vouloir comprendre malgré toutes nos tentatives pour le lui rappeler, c'est que le financement à la mission globale fait partie d'un programme normé dont l'objectif est d'assurer une stabilité aux organismes quand ils répondent aux critères. C'est loin d'être un fonds d'urgence ou un budget discrétionnaire ».
Mis en place au début des années 1970, le programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC) encadre les exigences auxquelles doivent se soumettre les organismes communautaires autonomes une fois qu'ils ont été reconnus admissibles au financement.
C'est avec une grande froideur que la CTROC accueille cette nouvelle. « Déjà l'an dernier, nous avons fait des pieds et des mains pour tenter de convaincre le ministre Carmant de la nécessité de ne pas amputer un investissement très loin de correspondre aux besoins de rehaussement exprimés par les organismes communautaires. D'ailleurs, près de 1 600 organismes ont signé une lettre ouverte en juin dernier lui signifiant qu'il y avait des limites au manque de reconnaissance », insiste Daniel Cayley-Daoust. Selon les formulaires de demande de rehaussement de 2024-2025, le total des montants inscrits par un peu plus de 3 000 conseils d'administration d'organismes s'élevait à 830 M$. En amputant 1 million de l'enveloppe de rehaussement prévue, le montant à répartir entre les organismes communautaires représente à peine un peu plus de 1% de leurs besoins.
La CTROC rencontrera le ministre Carmant le 26 mai prochain pour lui rappeler à nouveau sa responsabilité de respecter les règles d'attribution des fonds entourant le PSOC. Par ailleurs, le PSOC étant régionalisé, le fait de passer outre les normes entraîne des conséquences sur les ententes de répartition convenues entre les établissements et les regroupements régionaux représentant les organismes communautaires, ce dont il sera question également lors de cette
rencontre.
Combien de fois la CTROC devra-t-elle insister auprès du ministre Carmant afin qu'il se conforme à ses propres règles ministérielles qui sont établies et connues ? « Nous pressons le ministre Carmant de rectifier le tir pour le meilleur intérêt des organismes communautaires autonomes financés par son ministère, et de verser l'entièreté des 10 millions supplémentaires en financement à la mission globale. Monsieur le ministre, le PSOC n'est pas un fonds d'urgence, mais il y urgence d'agir ! », conclut Daniel Cayley-Daoust.
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Où était le vote d’espoir au Canada ?

À la suite des dernières élections fédérales au Canada, les réseaux sociaux ont été envahis d'analyses spontanées et de célébrations de la victoire de Mark Carney et de la défaite de Pierre Poilievre. Peut-être à cause de l'algorithme, la majorité des commentaires que je vois saluent ce qu'ils perçoivent comme un recul du conservatisme. Pourtant, en y regardant de plus près, les résultats électoraux suscitent de sérieuses inquiétudes.
L'arrivée de Mark Carney à la tête du gouvernement ne saurait masquer la progression fulgurante du Parti conservateur, qui a su capter un large vote de protestation venant de tous les milieux sociaux. Elle ne saurait non plus occulter l'effondrement de l'électorat progressiste, en grande partie absorbé par les libéraux, laissant le NPD presque exsangue.
La stratégie de la peur, axée sur la menace d'un retour du trumpisme, n'a fonctionné qu'en partie. Certes, elle a permis de relancer un Parti libéral en déclin, mais elle n'a pas suffi à garantir une majorité parlementaire. Mark Carney devra maintenant gouverner sans majorité, contraint de négocier à la fois avec sa droite et avec sa gauche. Pendant ce temps, la moitié du pays a résisté à cette stratégie de la peur, et a consolidé le Parti conservateur — un parti qui, loin de se distancier de Donald Trump, semble en partager plusieurs visions.
L'écart entre les deux grands partis ne dépasse pas 400 000 voix. Le fait que le mécontentement social se soit dirigé vers le Parti conservateur, plutôt que vers le NPD, est un signal profondément préoccupant. Cette élection semble avoir été tranchée entre ceux qui ont voté libéral par peur, et ceux qui ont voté conservateur par colère. Mais une question essentielle demeure : où était le vote d'espoir ?
Aucun des deux grands partis n'a proposé une vision véritablement transformatrice du pays. Tous deux ont opté pour une approche conservatrice, en l'absence d'un horizon de changement clair : un Canada plus ouvert, plus juste, plus inclusif, plus humain, plus écologique et plus intelligent. Le NPD et le Parti vert, quant à eux, n'ont pas su construire un discours autonome et percutant, capable de remettre en question la narration dominante — une narration qui, même dans sa version la plus « modérée », reste façonnée par un centre politique toujours plus influencé par la droite.
Il faut toutefois saluer certains gestes courageux. Jagmeet Singh a été l'un des rares dirigeants politiques à avoir qualifié de génocide ce qui se passe à Gaza, et à soutenir ouvertement les mobilisations en faveur de la Palestine. Ce geste restera dans les mémoires. C'est peut-être là que réside la graine d'un NPD renouvelé : plus audacieux, plus cohérent, et davantage connecté aux personnes exclues du système politique actuel.
Car on ne transforme pas la société en imitant les gestes et le langage du centre — un centre qui, dans les sociétés capitalistes, penche presque toujours vers la droite. On la transforme en élargissant les frontières du débat, en intégrant celles et ceux que ce centre a historiquement laissés de côté. C'est à cette condition seulement qu'un véritable espace politique porteur d'espoir pourra émerger.
Manuel Tapial
Membre du Conseil d'administration de Palestine Vivra
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Le Canada est menacé : il est d’autant plus urgent de revoir la souveraineté et l’identité nationale des Premières nations

Au début de son second mandat en tant que président des États-Unis, Donald Trump a commencé à explicitement menacer le Canada de devenir le 51e État américain.
Tiré de The conversation.
Mardi 8 avril 2025 / DE : Frank Deer
Traduction Johan Wallengren
Dans le cadre de sa rhétorique absurde et de temps à autre irrespectueuse, qui comprend également une proposition d'acquisition du Groenland et de la bande de Gaza, certains ont affirmé que l'intérêt de Trump pour l'annexion du Canada relevait d'une impulsion impérialiste.
En tant qu'éducateur Kanien'kehà:ka ayant à cœur l'enseignement des langues autochtones, l'éducation civique et la réconciliation, j'estime qu'il est essentiel de se pencher sur la façon dont les Canadiens abordent le concept de nation autochtone dans un contexte où des menaces pèsent sur la souveraineté de leur pays. J'ajouterai qu'une annexion du Canada par les États-Unis serait dévastatrice pour les peuples autochtones.
Réaffirmer la nation canadienne face aux menaces
Trump a déclaré que le Canada est susceptible d'être annexé par la force économique, tandis que d'autres ont émis l'hypothèse qu'une invasion militaire pourrait faire partie de cette tentative de conquête.
Bien que les menaces de Trump dirigées contre le Canada semblent aberrantes, de nombreux Canadiens les prennent au sérieux et considèrent la rhétorique impérialiste actuelle comme une menace pour la souveraineté canadienne.
Les personnalités politiques, les intellectuels et les citoyens canadiens ont vivement réagi à cette menace en se ralliant autour de la nation, de la souveraineté et de l'identité canadiennes. Certains suggèrent qu'un sentiment d'unité nationale a été attisé au Canada pour la première fois depuis des générations.
Cependant, ce sentiment d'unité que beaucoup ressentent au Canada – et qui pourrait inciter les votants à changer l'issue des élections fédérales qui approchent – camoufle les réalités de la nation canadienne. L'état de nation du Canada mérite à plus d'un titre qu'on s'y attarde, en particulier sous l'angle de l'unité face aux menaces américaines actuelles. Mais je suis particulièrement préoccupé par le fait que l'ancrage national des Premières nations, des Inuits et des Métis puisse être particulièrement menacé par une annexion américaine.
Peuples autochtones
Le Canada est un État-nation qui occupe les territoires traditionnels de nombreuses nations autochtones représentant une vaste diversité de cultures et de langues. Les peuples autochtones de ces nations ont été les gardiens des territoires de l'Amérique du Nord bien plus longtemps que les colonisateurs européens qui ont fini par s'emparer de ceux-ci.
De nombreux comportements coloniaux et postcoloniaux du gouvernement canadien, secondé par ses institutions (par exemple, les églises de diverses confessions), ont été de nature génocidaire.
Ces interventions coloniales ont eu pour conséquence que les communautés autochtones sont devenues des éléments constitutifs d'une nation unifiée – le Canada. Sur la scène publique, les narratifs omettent très souvent que les peuples autochtones avaient en amont établi leurs propres concepts de nation et d'appartenance à une nation. Ces concepts ont été supplantés par ceux des puissances qui ont pris le contrôle des territoires.
Le concept de nation autochtone
Aussi bien jadis qu'aujourd'hui, les peuples autochtones appréhendent leurs liens et leurs responsabilités communautaires comme étant issus de leur nation.
Tout un ensemble de valeurs fondatrices caractérisent les nations autochtones. Le sociologue Stephen Cornell, qui a travaillé avec des nations et des organisations autochtones en Amérique du Nord, en Australie et en Nouvelle-Zélande, dégage à cet égard cinq axes principaux recouvrant les liens avec la terre et ceux du sang, les récits et l'histoire associés à la terre et à la culture, l'autogestion et le bien-être collectif.
Par exemple, de nombreux Anishinaabe considèrent que la nation est fondée sur des histoires et des traditions et qu'elle est façonnée par les relations et les communautés. La diversité des peuples autochtones enrichit donc leur vision du monde.
Les Haudenosaunee (Iroquois) partagent de nombreuses histoires, traditions et langues qui influencent la façon dont ils se perçoivent en tant que nation et leur approche des traités et conventions (tels que l'entente de Kaswenta). Mais les Haudenosaunee se composent également de différentes nations autochtones – dont la mienne, les Kanien'kehà:ka –, chacune ayant ses propres formes de savoir, de réminiscences et de conscience autochtones.
Ces différentes nations ont eu des fonctionnements synergiques reposant sur des alliances et des ententes de partage de terres entre elles.
Le Canada n'est pas une nation unique et homogène
Les incursions colonialistes des autorités françaises, britanniques et, plus tard, canadiennes ont obscurci la façon dont les notions autochtones de nation peuvent être comprises par les Canadiens.
Une ombre a été jetée sur différents attributs des nations autochtones du fait de l'exploitation des terres, de la division des familles et des communautés, de la dénaturation de récits historiques, de l'étouffement de l'autogestion et du primat de la jouissance individuelle par rapport au sens collectif, marginalisant ainsi le concept de nation autochtone dans la conscience du grand public au Canada.
Au demeurant, la perception générale de la population canadienne est que le Canada est une nation unique et relativement homogène. Cela peut sembler souhaitable pour certains, voire idyllique, mais il s'agit là d'un mythe.
Acquis juridiques et chemin de la réconciliation
Quel rapport peut-on établir entre le concept de nation autochtone et les menaces d'un président américain à l'encontre de la souveraineté canadienne ?
Le concept de nation autochtone ne fait pas seulement partie de la conscience et du mode de vie des autochtones depuis des siècles, mais elle est désormais étroitement liée aux principes juridiques et constitutionnels établis et en cours d'élaboration au Canada.
Après des générations de surveillance et d'assujettissement, ces principes permettent enfin aux nations autochtones d'explorer et de mettre en œuvre des approches d'autodétermination et d'autogouvernance.
Les menaces de Trump impliquent l'abolition des cadres juridiques et constitutionnels canadiens existants. Elles suggèrent également que les mœurs culturelles et linguistiques des nations autochtones seraient plus menacées que jamais. Le processus de réconciliation – qui s'est appuyé sur les travaux de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada – serait presque certainement abandonné.
Le 51e État et les traités et conventions
Les menaces de Trump sont inquiétantes pour les nations autochtones, dont certaines ont plus à craindre que d'autres dans des domaines particuliers. Par exemple, de nombreuses Premières nations ont conclu des traités et des conventions avec la Couronne.
Ces traités et conventions servent à codifier les relations des Premières nations avec le gouvernement du Canada. De nombreux travaux sont actuellement en cours pour mieux les conceptualiser dans le contexte de l'ère moderne. Si le Canada devient le 51e État américain, il sera mis fin aux dispositions des traités et conventions, ainsi qu'aux efforts pour mieux les contextualiser.
Les peuples autochtones ont fait beaucoup de chemin – dans certains cas en collaboration avec des partenaires non-autochtones – pour ce qui est d'améliorer leur situation et de mieux se positionner dans le monde, en vue de tracer des pistes pour l'avenir.
Bien entendu, il reste encore beaucoup à faire. La pauvreté, par exemple, est encore très répandue parmi les peuples autochtones, les langues et les cultures de beaucoup d'entre eux sont menacées et les femmes et les filles autochtones continuent d'être traitées de manière horrifiante. Mais le parcours des nations autochtones vers le mieux-vivre et l'autodétermination a débouché sur des réalisations dont les peuples autochtones peuvent être fiers.
Ce voyage se poursuivrait-il au sein d'un 51e État ? J'ai des raisons d'en douter.
Frank Deer est professeur à la Faculté d'éducation de l'Université du Manitoba.
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Un échec capitaliste dont Trump exploite à fond la faille albertaine

Les résultats électoraux canadiens signalent un tournant droitier non banal de l'échiquier politique canadien. Le parti Libéral minoritaire du banquier Mark Carney vire à droite par rapport à l'ex-gouvernement Libéral Trudeau allié implicitement avec le NPD de centre-gauche. Le parti Conservateur à tendance trumpiste augmente son score de près de huit points de pourcentage par rapport à l'élection de 2021 soit à 41% par rapport au 44% des Libéraux.
Il a fallu une remontée Libéral de plus de onze points de pourcentage pour devancer les Conservateurs, non pas à leurs dépens mais principalement à ceux du NPD qui perd aussi plus de onze points de pourcentage par rapport à 2021 obtenant son plus bas score électoral relatif depuis sa fondation en 1961. Une plus grande proportion des gens ayant voté NPD en 2021 a voté Conservateur en 2025 que Libéral notamment dans « le corridor Hamilton-Windsor — le cœur industriel du pays ». Le Bloc québécois nationaliste est le seul des tiers partis qui a évité une dégringolade mais il a quand même perdu plus d'un point de pourcentage et près de 30% de sa députation.
C'est la première fois depuis l'élection de 1958 que les deux grands partis traditionnels depuis la Confédération (1867) obtiennent ensemble plus de 80% des suffrages. Le choc Trump à coup de menaces tarifaires et annexionniste a ramené au bercail l'électorat canadien tout en le clivant de chaque côté de la barrière non pas conservateur-progressiste mais démocratique-néofasciste. Car néofasciste est tendanciellement le parti Conservateur de Pierre Poilievre… à la mode canadienne pourrait-on dire. Quand on sait que la clef de la conquête de la majorité électorale réside dans le Grand Toronto où, selon le Recensement de 2021, plus de la moitié de la population était née à l'étranger, on comprend que les Conservateurs ne se soient pas lancé dans une charge anti-immigration à la Trump. Toutefois le chef Conservateur ne s'est pas gêné pour dénoncer, à une émission francophone de grande écoute, les « faux réfugiés » tout comme il a promis de couper le financement à l'UNWRA au détriment d'un peuple palestinien que l'Occident en voie de néo-fascisation laisse mourir de faim.
Sous prétexte anti-Trump, les Libéraux déroulent le tapis aux entreprises
Pour bien voir le tournant droitiste Libéral commençons par mettre le projecteur sur l'enjeu climatique, épine dorsale de la politique du XXIe siècle. De constater les excellents journalistes du Devoir en la matière, « le chef Libéral parle d'énergie solaire, d'hydrogène vert et d'un réseau électrique transcanadien. Mais l'ancien apôtre de la finance climatique pense qu'il est « impératif » d'assurer la compétitivité des énergies traditionnelles, c'est-à-dire du pétrole et du gaz. ‘‘Oui, plus de pétrole, afin de réduire nos importations'', a-t-il lancé pour se défendre au débat des chefs du 17 avril. Ce pétrole devra toutefois être ‘‘bas carbone'', a-t-il ajouté, cela grâce aux technologies (immatures et coûteuses) de captage et de stockage de carbone. […] Le plafonnement des émissions du secteur pétrogazier — une mesure phare de l'ère Trudeau, qui n'est pas encore finalisée — était absent du programme de M. Carney, sans que celui-ci la renie pour autant. […] Rappelons que le Canada est en voie de rater ses cibles climatiques. » Ayant capitulé au slogan « Axe the [carbon] tax » des Conservateurs, « le premier ministre promet d'‘‘améliorer'' la tarification industrielle du carbone, qui cible les aciéries, les raffineries, les cimenteries, etc.. Tous les détails de cette amélioration ne sont pas connus, mais on sait que M. Carney veut donner ‘‘plus d'options'' aux grands pollueurs qui désirent compenser leurs émissions. »
Côté emploi d'observer une commentatrice du Globe and Mail,« [l]e pays a perdu 33 000 emplois en mars, le pire mois depuis trois ans pour le marché du travail, la menace des droits de douane américains ayant pesé sur la confiance des entreprises et ralenti l'embauche. » Comme politique palliative à court terme pour empêcher la hausse du chômage, « [a]près des années de recours accru aux travailleurs migrants pour occuper des emplois faiblement rémunérés, les Libéraux ont déclaré qu'ils ramèneraient l'immigration à des "niveaux viables", ce qui laisse de nombreux résidents temporaires dans l'incertitude et soulève des questions quant à la manière de combler les lacunes persistantes en matière d'emploi. Le parti s'est engagé à plafonner le nombre total de travailleurs temporaires et d'étudiants étrangers à moins de 5 % de la population canadienne d'ici à la fin de 2027, et à moins de 1 % les années suivantes. » Fini l'illusion des frontières ouvertes à la mode Trudeau alors que les ÉU ne peuvent d'aucune façon être considérés comme un « pays sûr » au titre de la loi.
Par contre, les milliards vont pleuvoir sur les entreprises : « un fonds de 2 milliards de dollars pour soutenir le secteur automobile, ainsi qu'un réseau "tout au Canada" destiné à produire davantage de pièces automobiles nationales. À cela s'ajoutent un fonds de 5 milliards de dollars pour améliorer les infrastructures liées au commerce et un mécanisme de crédit à l'exportation de 25 milliards de dollars pour aider les entreprises à trouver de nouveaux marchés. M. Carney a également évoqué la suppression, d'ici au 1er juillet, de toutes les barrières commerciales réglementées par le gouvernement fédéral entre les provinces, ainsi que la conclusion d'accords commerciaux avec des partenaires d'Amérique du Sud et d'Asie du Sud-Est. » Cependant, de constater un expert consulté par le Globe, « …diversifier les échanges est plus facile à dire qu'à faire. L'énorme marché américain exerce depuis longtemps une attraction sur le commerce canadien, en raison de la proximité et de la force de ses consommateurs. Peter Morrow, professeur agrégé d'économie à l'université de Toronto, a déclaré au Globe qu'il n'était pas réaliste de s'attendre à ce que les industries clés du pays - notamment l'automobile, le pétrole, le gaz et l'acier - se désintéressent des États-Unis dans un avenir proche. »
Plus prometteur paraît l'ambition des Libéraux de régler la crise du logement. « Ce pays a désespérément besoin de plus de logements – 3,5 millions de plus que ce que nous sommes censés construire au cours des cinq prochaines années, pour être exact, et ce uniquement pour ramener l'accessibilité au logement à ce qu'elle était il y a un quart de siècle. Les Libéraux ont promis de doubler la vitesse de construction pour atteindre près de 500 000 nouveaux logements par an, avec une nouvelle agence fédérale qui aiderait à développer et à financer des logements abordables. […dont] 25 milliards de dollars de financement pour les constructeurs de logements préfabriqués et modulaires, ce qui, selon les partisans de cette mesure, rendra la construction de logements moins coûteuse et plus rapide […et] tout en gagnant de l'argent sur les projets afin que le capital puisse être réinvesti pour augmenter l'offre. Il s'agit toutefois d'une tâche complexe, et l'économiste Mike Moffatt n'est pas sûr qu'Ottawa puisse la mener à bien. » On constate l'absence de référence aux logements sociaux, encore plus à ceux écoénergétiques. Toute l'affaire doit être rentable et profiter aux développeurs immobiliers désormais impliqués dans le logement populaire faute d'occasions suffisantes d'investissements payants dans le logement de luxe et les édifices commerciaux.
Un nationalisme canadien à deux faces qui a abouti à un échec capitaliste
On pourrait qualifier cette élection comme celle du triomphe du nationalisme canadien. On aura droit aux deux côtés de ce nationalisme soit la défiance envers un voisin écrasant — ‘trop près des ÉU, trop loin de l'Europe et d'ailleurs' pour paraphraser le dictateur mexicain Porfirio Diaz — mais aussi le néolibéralisme d'une moyenne puissance impérialiste :
Jusqu'alors, l'opposition Conservatrice de Pierre Poilievre détenait une avance significative dans les sondages de l'été 2023 au début de 2025, mais après les fanfaronnades de Trump, Carney a pu renverser la situation en faveur des Libéraux, d'autant plus que les Conservateurs avaient adopté des politiques "trumpistes" - une grave erreur après que Trump a parlé de mettre fin à la souveraineté du Canada. Par son appel flagrant au nationalisme canadien, Carney a pu obtenir le soutien de la plupart de ceux qui votent habituellement pour les Néo-démocrates à tendance travailliste et le Bloc québécois à tendance nationaliste française.
À bien des égards, M. Carney s'apparente à un Mario Draghi canadien que l'Italie et l'Europe n'ont cessé d'appeler de leurs vœux. Tous deux étaient des anciens de Goldman Sachs, tous deux étaient des banquiers centraux et tous deux sont devenus des héros du capital - Draghi pour l'Europe et maintenant Carney pour le Canada. Il semble que dans certains pays, lorsque la classe dirigeante est en difficulté, elle se tourne vers les "hommes d'argent" pour la sortir d'affaire. Parallèlement à sa rhétorique nationaliste anti-Trump, Carney a adopté la formule économique néolibérale habituelle : les réductions d'impôts et de dépenses publiques comme solution aux problèmes économiques du pays.
Toujours selon l'économiste anticapitaliste Michael Roberts, le Canada est malgré sa pléthore de richesses naturelles un échec capitaliste :
Le pays est indépendant sur le plan énergétique et possède les plus grands gisements d'uranium à haute teneur au monde et les troisièmes réserves prouvées de pétrole. Il est également le cinquième producteur de gaz naturel. Le Canada dispose également d'une grande quantité d'autres matières premières, notamment les plus grandes réserves de potasse (utilisée pour fabriquer des engrais), plus d'un tiers des forêts certifiées du monde et un cinquième de l'eau douce de surface de la planète. Il possède en abondance du cobalt, du graphite, du lithium et d'autres éléments des terres rares, qui sont utilisés dans les technologies renouvelables. Malgré ces avantages comparatifs en matière de ressources naturelles, la croissance du PIB du Canada a longtemps été inférieure à celle de ses pairs du G7, se classant seulement au 16e rang mondial en termes de parité de pouvoir d'achat. Un pays doté d'une telle géographie devrait produire davantage. Mais les capitalistes canadiens ont pris du retard dans les investissements productifs (hors énergie) et dans l'augmentation de la productivité de leur main-d'œuvre. […]
La population du Canada a augmenté de 30 %, contre seulement 11,5 % pour l'ensemble du G7. L'ajout d'un million de personnes en un an à une population de base d'environ 40 millions est sans précédent. Mais le niveau de vie des Canadiens, mesuré par le PIB réel par personne, n'est guère plus élevé en 2024 qu'en 2014, soit une stagnation de dix ans. […] En effet, la croissance de la productivité dans les industries productrices de biens au Canada a non seulement ralenti, mais s'est inversée. En conséquence, le secteur des biens a soustrait en moyenne 0,4 point de pourcentage à la croissance globale de la productivité du Canada chaque année depuis la pandémie. […] Le Canada est l'un des pays les moins densément peuplés du monde. Mais, fait remarquable, il connaît également l'une des pires pénuries de logements du monde développé. Les prix moyens des logements ont triplé au cours des deux dernières décennies, et l'endettement hypothécaire élevé pèse sur les dépenses de consommation.
Toujours selon Roberts, « [l]e taux d'investissement a diminué en raison d'une forte baisse de la rentabilité du capital canadien. La trajectoire du taux de profit canadien a toujours été fortement influencée par le prix du pétrole brut. » Bien que Roberts n'en parle pas, cette crise de rentabilité se traduit par une importante fuite des capitaux vers les ÉU depuis au moins 2016 si ce n'est depuis le début de la Grande Récession de 2008 :
Canada : Taux de profit par rapport au stock de capital net en pourcentage
Bilan net des investissements internationaux du Canada, selon la région
Source : Michael Roberts, Canada : election under the shadow of Trump,Statistique Canada
Le secteur des entreprises canadiennes est aujourd'hui accablé par les coûts du service de la dette, plus de la moitié des revenus des entreprises étant consacrée au paiement des intérêts et du capital des emprunts. Environ 25 % des entreprises canadiennes cotées en bourse peuvent être considérées comme des entreprises zombies, c'est-à-dire qu'elles ne gagnent pas suffisamment de revenus pour couvrir les paiements d'intérêts sur leurs dettes en cours.
Le coup de pied trumpien dans un édifice fragile et à la faille albertaine
Le Canada, bien avant la victoire de Trump, était un pays d'où la rentabilité capitaliste sur le marché mondial avait disparu sauf pour l'exploitation des ressources naturelles en particulier le pétrole albertain. Son secteur manufacturier lié au marché mondial, dont le cœur est l'automobile ontarienne, ne survit que grâce à son intégration à celui étatsunien au sein de l'ACEUM. En 2023, le Canada exportait en produits aux ÉU près de 20% de son PIB sans compter ses exportations de services ce qui donne en tout près du quart de son PIB, rien de moins. Pour les quatre grandes provinces canadiennes, leurs exportations de produits, sans les services, aux ÉU par rapport à leur PIB comptaient respectivement pour 35% pour l'Alberta, essentiellement du pétrole, 18% pour l'Ontario surtout la fabrication très intégrée avec les ÉU de véhicules routiers, de l'acier, des minéraux ,15% pour le Québec dont l'aluminium (soit de l'électricité cristallisée), du bois de construction, de l'électricité brut mais aussi des aéronefs, et seulement 7% pour la Colombie britannique qui exporte beaucoup en Asie.
Et voilà que le trumpisme flanque un magistral coup de pied tarifaire et annexionniste dans cette édifice fragile. Maquillée d'un nationalisme de façade l'élite canadienne s'est empressée illico à accommoder le monstre par un renforcement des frontières et une substantielle augmentation de ses dépenses militaires au sein du NORAD, particulièrement pour la défense de l'Arctique. Puis, par Libéraux interposés, elle promet de laisser tomber de grands pans de sa déjà insuffisante et biaisée politique climatique et d'imiter sa baisse des impôts tout en promettant d'investir dans les infrastructures pour « ‘‘faire du Canada une superpuissance des énergies propres et traditionnelles'', disait Mark Carney en campagne. » Mais il n'est nullement question de répondre au sabotage étatsunien du libre-échange des marchandises par un contrôle canadien de l'éperdue fuite des capitaux vers les ÉU. Comment ne pas poser la question de la capacité existentielle du Canada que la récession déjà en coursmettra durement à l'épreuve ?
L'Alberta (et la Saskatchewan) est le tendon d'Achille de la résilience existentielle canadienne. Tout près des deux tiers des votes sont allés aux Conservateurs dans ces deux provinces, soit au moins cinq points de plus que lors des élections de 2021, bien qu'il faille distinguer les zones rurales au score stalinien pro-PCC et les grandes villes quand même en moyenne à nette majorité Conservatrice. Inutile d'ajouter que la victoire Libéral laisse un goût amer d'autant plus que jusqu'aux menaces trumpiennes les Conservateurs s'annonçaient les grands gagnants des élections. Afin de mesurer la propension vers l'annexion dans ce maelstrom, le média alternatif Ricochet a tenté d'y apprécier la tentation séparatiste, voie royale d'une éventuelle annexion de ces provinces archi-dépendantes de leurs exportations de ressources naturelles.
Un sondage réalisé ce mois-ci[avril 2025] montre que 30 % des Albertains et 33 % des Saskatchewanais voteraient en faveur de la séparation si les Libéraux étaient réélus, soit à peu près le même niveau de soutien à la sécession qu'au Québec. Le sentiment séparatiste est régulièrement amplifié par la Première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, par des journalistes comme Rick Bell, un chroniqueur du Calgary Herald […] et par l'ancien leader du parti Réformiste, Preston Manning, […] Le message de Bell, Smith et Manning est que les électeurs des Prairies sont pleins d'une juste colère à l'égard des politiques environnementales fédérales qui frustrent l'industrie pétrolière et d'un programme de péréquation qui prend l'argent de l'Ouest pour subventionner le Québec, où les gens sont hostiles au pétrole et au gaz. Le ressentiment se concentre dans les zones rurales. […]
Il n'y a pas de répartition régionale au sein de l'Alberta rurale, mais une étude réalisée par Jared Wesley, professeur de sciences politiques à l'université de l'Alberta, a montré que les séparatistes sont généralement des hommes blancs plus âgés, nés en Alberta, qui ont participé au "Convoi de la liberté" contre les restrictions de santé imposées par le COVID ou qui ont été sympathisants de ce mouvement. […] Bratt [professeur de sciences politiques à l'Université Mount Royal] pense qu'elle [Danielle Smith] aime une grande partie du programme de M. Trump, mais il est également clair qu'elle subit des pressions de la part de la base de son parti pour s'attaquer à Ottawa. Elle a pris la tête du parti Conservateur unifié après qu'une rébellion liée au mouvement anti-mandat [COVID] a fait tomber l'ancien premier ministre Jason Kenney. La base de son parti est en colère face à la perspective d'un nouveau gouvernement Libéral à Ottawa, et c'est cette colère qu'elle cherche à canaliser.
Mme Smith a prévenu que si les Canadiens élisaient un gouvernement Libéral, elle mettrait en place un groupe d'experts chargé d'examiner les options de l'Alberta, et elle a évoqué la possibilité d'un référendum à l'initiative des citoyens. Mais la procédure actuelle n'autorise un référendum sur une question constitutionnelle qu'après que les citoyens ont recueilli les signatures de 20 % des électeurs inscrits (près de 600 000), ce qui semble être un seuil impossible à atteindre. Mme Smith fait maintenant l'objet de pressions pour faciliter les choses.
Par un tarif différentiel, Trump joue à fond le réactionnaire régionalisme albertain
Nul doute que les trumpiens joueront à fond cette frustration qui ne s'apparente nullement à une volonté indépendantiste du Québec assise sur l'oppression nationale s'exprimant avant tout dans la menace envers sa langue et sa culture que l'annexion aux ÉU n'arrangerait certainement pas, au contraire. Le parti-pris des « Canadiens » lors de l'invasion étatsunienne tant de 1775 que de 1813 reste prémonitoire. Mais il ne faut rien exclure d'autant plus qu'une bonne partie de la jeunesse québécoise s'entiche de l'anglais et de la culture commerciale étatsunienne. Le séparatisme albertain est un régionalisme réactionnaire assis sur le pétrole bien qu'il soit l'héritier d'un sentiment d'abandon par le « Canada central » qui s'industrialisait à ses dépens.
On peut être assuré que les stratèges trumpiens ont bien compris la faille albertaine comme point faible pour rompre ce long longiforme Canada le long de la frontière étatsunienne quand on visualise sa densité de peuplement d'est en ouest. Trump n'a pas pour rien imposer un tarif de « seulement » 10% au pétrole, au gaz et à la potasse de l'Ouest canadien contrairement à celui de 25% à l'aluminium québécois, à l'acier surtout ontarien et à l'automobile ontarienne quoique partiellement et graduellement. L'éventuel succès de l'annexionnisme trumpien pour dominer les Amériques afin de se colletailler en position de force avec les oligarchies des autres grandes puissances mondiales dépend moins de la résilience canadienne que de la capacité du trumpisme de s'imposer au peuple étatsunien et même à sa classe dominante afin de renouer avec « le rêve américain de prospérité à l'intérieur et de suprématie à l'étranger » qui n'a jamais rien eu de démocratique.
Marc Bonhomme, 4 mai 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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Les victimes de l’agence de recrutement et de placement IRIS continuent leur lutte

Tio'tià:ke (Montréal), le 5 mai 2025. – Aujourd'hui, devant les bureaux de l'agence de recrutement et de placement IRIS, seront rassemblé·es des travailleurs et travailleuses migrant·es et leurs allié·es, pour dénoncer les abus vécus aux mains de cette agence et exiger leurs salaires impayés, leurs feuilles de paie et leur relevé d'impôts, nécessaires pour leurs démarches d'immigration, ainsi que faire entendre leurs revendications concernant les agences de placement et le programme de travailleurs étrangers temporaires. Les porte-paroles convient les médias au point de presse qui aura lieu au début du rassemblement.
M. Dieudonné Nidufasha, directeur de l'Agence IRIS, doit plusieurs dizaines de milliers de dollars en salaires impayés. Suite aux révélations parues dans Le Devoir le 09 et 10 avril dernier concernant les abus commis par l'Agence de recrutement et de placement des employés Iris Inc., le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTTI) tient à montrer sa solidarité avec les victimes et à dénoncer ces violences.
Le CTTI et ses allié·es se réjouissent de la suspension du permis d'opération de l'agence IRIS. Toutefois, plusieurs travailleuses et travailleurs victimes de cette agence attendent depuis plus d'une année la compensation des frais illégalement perçus et des salaires non payés. Qui plus est, le cas de l'agence IRIS n'est pas un cas isolé. Malgré la mise en place du règlement portant sur les pratiques des agences de recrutement de placement en 2020 par le gouvernement du Québec et des clauses interdisant la perception des frais de recrutement auprès des travailleuses et travailleurs en 2022 par le gouvernement du Canada, les pratiques abusives d'intermédiaires privés demeurent malheureusement largement répandues.
« Nous sommes doublement victimisé·es : d'abord par l'agence IRIS, puis par le système d'immigration, qui nous maintient dans une situation précaire » indique un des travailleurs, qui a préféré garder l'anonymat. « L'immigration se ferme les yeux, ne veut pas accepter que cette situation est la conséquence naturelle d'un système dysfonctionnel. » a renchéri une autre travailleuse.
Les travailleuses et travailleurs victimes de l'agence IRIS, le CTTI et leurs allié·es revendiquent la régulation efficiente des pratiques des intermédiaires privés et la mise en place des mesures de protection pour les travailleuses et travailleurs contre leurs pratiques abusives. Elles et ils réitèrent d'ailleurs leurs revendications pour que le gouvernement fédéral abolisse le permis de travail fermé qui expose continuellement les travailleuses et travailleurs migrant·es à ces situations d'exploitation et de traite. En outre, le CTTI note que de plus en plus de personnes migrantes perdent leur statut migratoire à la suite de telles situations abusives, et réaffirme l'urgence de la mise en place d'un programme de régularisation complet et inclusif pour les personnes sans statut.
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"Le vide de la vérité : le silence médiatique qui se transforme en pouvoir"

Pour comprendre le biais médiatique au Canada, il suffit de comparer le fonctionnement de ses médias à celui d'autres pays.
Prenons, par exemple, l'attaque récente contre la Flottille de la Liberté : aucun média canadien ne l'a rapportée, ni n'a donné la parole aux activistes à bord. En revanche, les médias espagnols, arabes, britanniques et même américains ont consacré un temps d'antenne considérable à couvrir l'attaque, la situation dramatique de famine à Gaza, et à relayer les témoignages des personnes directement concernées.
Les médias ont un pouvoir immense dans la façon dont nous percevons le monde, et dans la formation du débat public. Dans les pays souvent qualifiés d'autoritaires, le contrôle des médias par l'État est évident : l'information est soigneusement filtrée pour maintenir les discussions dans des cadres acceptables pour le pouvoir en place. Au Canada, les mécanismes sont plus discrets, mais l'effet est tout aussi préoccupant.
Nous sommes habitués à critiquer les chaînes comme RT en Russie, Al Jazeera au Qatar ou Telesur au Venezuela pour leur proximité avec les gouvernements. Mais nous refusons trop souvent de nous regarder dans le miroir et d'analyser nos propres médias, leur silence, et les intérêts qu'ils protègent. Ce manque d'autocritique est un danger pour toute démocratie.
Sous la dictature franquiste en Espagne, de nombreux citoyens se tournaient vers les médias étrangers pour savoir ce qui se passait réellement dans leur propre pays. Ironiquement, aujourd'hui au Canada, beaucoup d'entre nous, attentifs à ce qui se passe dans le monde — voire ici même — en viennent à faire la même chose. Nous dépendons de médias étrangers pour rester informés, face à un black-out quasi total ou à une couverture biaisée, dénuée de neutralité et de sensibilité.
Dans les années à venir, il est inévitable que de nouveaux médias indépendants voient le jour — par nécessité. Pour continuer à être humains. Pour servir les communautés que les grands médias ne représentent plus. Des médias qui oseront dénoncer le génocide en Palestine, les attaques contre les bateaux humanitaires à destination de Gaza, le vol des terres des Premières Nations au Canada, les disparitions de leurs membres, et les innombrables actes de solidarité que les médias ignorent systématiquement sur notre propre territoire.
Un pays où les médias ne parlent que de ce qui arrange les élites — en ignorant les victimes et en renonçant à leur rôle de contre-pouvoir — est un pays dangereux pour ses citoyens.
Se taire n'est jamais neutre. Se taire, c'est choisir un camp.
Manuel Tapial, membre du Conseil d'administration de Palestine Vivra
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Lettre au premier ministre du Canada

Alors que le Canada se prépare à tourner une nouvelle page politique, nous militantes de la Marche mondiale des femmes au Québec portons à votre attention les valeurs et les revendications qui animent notre mouvement.
29 avril 2025
À vous qui serez appelé·e à guider ce pays, nous rappelons que les rapports sociaux de sexe et de genre ne sauraient être relégués au second plan, et par conséquent, le maintien d'une ministre et d'un ministère des Femmes et de l'Égalité des genres est primordial. Nous exigeons que le féminisme soit un moteur d'action publique, que la justice sociale guide toutes décisions, et que l'environnement soit enfin reconnu comme un bien commun vital, à protéger urgemment et résolument.
Nous attendons de votre gouvernement :
Des actions fermes contre toutes les formes de discrimination, de violence et de pauvreté, particulièrement envers les femmes, les personnes autochtones, racisées, migrantes, en situation de précarité et les personnes de la diversité sexuelle et de la pluralité des genres.
Une transition écologique juste, qui place le vivant et la dignité humaine au cœur des priorités économiques.
Une défense sans compromis des droits humains, ici comme ailleurs, en solidarité avec les peuples du monde.
Le respect, la reconnaissance et la réparation envers les Premiers Peuples, dans une perspective de justice décoloniale.
Les crises actuelles nous montrent que le statu quo n'est plus une option. Il est temps de construire, avec courage et détermination, un avenir féministe, écologiste et internationaliste.
Car nous savons que l'exercice de la citoyenneté ne se limite pas aux urnes : il se vit chaque jour, dans les luttes, dans les solidarités et dans les gestes quotidiens. Et nous serons des milliers, le 18 octobre prochain, à démontrer haut et fort que nos valeurs ne sont pas négociables.
La Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes (CQMMF)
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Brésil : La résolution transphobe du Conseil fédéral de médecine (CFM) et l’attaque de l’extrême droite contre les personnes trans L’offensive transphobe du CFM représente un énorme recul

Le 8 avril 2025, dans le cadre d'une offensive contre les personnes trans, le Conseil fédéral de médecine a publié sa résolution n° 2.427/2025. Cette réglementation restreint l'accès aux thérapies d'affirmation de genre, en interdisant l'utilisation de bloqueurs hormonaux pour les moins de 18 ans, les chirurgies d'affirmation de genre pour les moins de 21 ans et en instaurant l'obligation d'un suivi psychiatrique pendant plus d'un an avant que les adultes transgenres puissent commencer une thérapie hormonale.
Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
22 avril 2025
https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article74800
Ces mesures, critiquées depuis longtemps par le mouvement transgenre, sont fondées sur de fallacieux arguments médicaux utilisés pour harceler cette population. Les bloqueurs hormonaux sont des substances utilisées chez les enfants et les adolescents afin de ralentir la puberté. Il s'agit de médicaments utilisés et approuvés depuis des décennies chez les enfants cisgenres présentant une puberté précoce ou un retard idiopathique de croissance.
Chez les enfants et les adolescents trans, ils sont utilisés dans le but de retarder le développement des caractéristiques sexuelles secondaires, qui sont permanentes et souvent sources d'une dysphorie importante pour ces personnes. L'idée derrière ce traitement est de donner aux jeunes plus de temps pour consolider leur identité de genre, ce qui facilite la thérapie de substitution hormonale si le jeune décide de poursuivre sa transition. Il s'agit d'un traitement réversible, traditionnellement utilisé chez les personnes cisgenres, qui présente de nombreux avantages pour les jeunes transgenres, leur évitant de passer par une puberté qui peut très souvent être traumatisante.
L'obligation d'un accompagnement psychiatrique, quant à elle, découle d'une pathologisation de la transidentité qui est extrêmement violente pour nous. Depuis toujours, les milieux conservateurs s'efforcent de faire passer dans l'imaginaire collectif la transidentité et l'homosexualité pour des maladies. Il est important que nous gardions en mémoire que l'Organisation mondiale de la santé considérait l'homosexualité comme une maladie jusqu'en 1990 et la transidentité jusqu'en 2019. Qualifier la « différence » de « maladie » implique qu'il y a quelque chose à soigner, et le CFM, en rendant obligatoire le suivi psychiatrique pour que les personnes trans aient accès à des traitements qui sauvent leur vie, s'inscrit dans cette logique.
Face à une décision qui, de toute évidence, ne repose pas sur des fondements scientifiques solides, mais qui a un impact considérable sur la vie de milliers de personnes transgenres, la question se pose : pourquoi le CFM s'en prend-il à cette population ? La vérité est que la résolution n° 2.427/2025 n'est pas un acte isolé, mais seulement un petit élément d'une offensive mondiale de l'extrême droite contre les personnes transgenres. Aux États-Unis, le gouvernement Trump délivre des visas et des passeports aux personnes transgenres sous le genre auquel elles ont été assignées à la naissance et transfère les femmes transgenres emprisonnées dans des prisons pour hommes. Au Royaume-Uni, sous la pression de groupes féministes « radicaux », alliés à l'extrême droite et financés par la bourgeoisie britannique, la Cour suprême a adopté une définition du terme « femme » qui exclut délibérément les personnes transgenres.
Au niveau international, l'extrême droite met en œuvre une nouvelle stratégie pour rallier les masses à son projet mortifère : créer un climat de panique morale où certaines populations (personnes transgenres, immigrés, musulmans, etc.) sont prises pour cibles. Partant de l'amalgame homophobe entre la communauté LGBT et la pédophilie, on construit un discours selon lequel les personnes trans chercheraient à s'en prendre à la jeunesse et donc que notre lutte pour que les enfants et les adolescents trans puissent avoir accès à des traitements qui sauvent leur vie ferait partie de ce projet. C'est dans ce contexte de prétendue attaque contre l'enfance que des dirigeant·es fascistes se présentent comme les seul·es à avoir le courage de mener ce combat.
Au Brésil, l'effet de cette nouvelle stratégie de l'extrême droite est déjà visible, non seulement avec l'offensive du CFM, mais aussi à travers des figures telles que Lucas Pavanato, conseiller municipal le mieux élu de São Paulo, qui non seulement s'est fait élire en promettant d'exclure les personnes transgenres de certains espaces publics tels que les sanitaires et les installations sportives, mais qui, dès son premier mois de mandat, a déposé trois projets de loi antitrans. Dans un contexte de crise du bolsonarisme, avec l'inéligibilité de Bolsonaro, la persécution des personnes transgenres a été l'une des stratégies de ce secteur pour conserver son audience et tenter de reprendre le pouvoir.
De ce point de vue, il convient de rouvrir les débats précédemment menés par cette plateforme sur les moyens de vaincre l'extrême droite. Contrairement à ce que certains secteurs de la gauche défendent, on ne peut pas dire que l'emprisonnement de Bolsonaro, uniquement et simplement décidé par la Cour suprême, suffira à mettre fin au bolsonarisme, qui reste profondément enraciné dans les masses. Pour défaire définitivement le fascisme, il faut entretenir des processus de mobilisation qui font progresser la conscience de la population et démoralisent l'extrême droite. Ainsi, si nous voulons aller jusqu'au bout dans la lutte contre l'extrême droite, le rôle des révolutionnaires est d'être aux côtés des personnes trans, car nous savons qu'elles ont été systématiquement utilisées comme épouvantails par ces milieux qui n'y regardent pas à deux fois avant de sacrifier leurs droits afin d'en tirer un gain politique.
Cela signifie, entre autres tâches, qu'il nous faut être aux côtés des personnes transgenres dans leur lutte pour leur droit à la santé et contre la résolution n° 2.427/2025 du CFM. Cette lutte, qui connaîtra un moment fort le 24 avril avec la manifestation nationale organisée par l'IBRAT et l'ANTRA, a mobilisé des milliers de jeunes transgenres, prêts à affronter l'extrême droite pour défendre leurs droits. Nous devons descendre dans la rue non seulement pour la dignité et le droit à la santé des jeunes trans, mais aussi parce que nous comprenons que ces attaques font partie d'une stratégie du bolsonarisme pour conserver son influence.
Ekop Novis
P.-S.
• Traduit pour ESSF par Pierre Vandevoorde avec l'aide de DeepLpro
Source - Movimento revista 22 avril 2025, 11h51. 22 avril 2025, 11h51 :
https://movimentorevista.com.br/2025/04/a-resolucao-transfobica-do-cfm-e-o-ataque-da-extrema-direita-as-pessoas-trans/
• Ekop Novis est militante du collectif Juntos !, étudiante en droit, directrice du DCE Livre de l'USP et membre du collectif Intertransvestigênere Xica Manicongo
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En temps de guerre, l’accent mis sur les « valeurs traditionnelles » met en péril la communauté LGBTQ en Russie

En 2020, des militants LGBT ont participé à une manifestation contre les amendements à la Constitution russe et les résultats d'un vote national sur les réformes constitutionnelles, à Moscou. La pancarte photographiée ici dit : « Je ne reconnais pas l'autorité qui m'empêche d'avoir une famille » [Archive : Shamil Zhumatov/Reuters]
Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
3 mars 2025
Par Niko Vorobyov
Moscou réprime de plus en plus cette communauté minoritaire, forçant certains à fuir.
Dans la vingtaine, Mikhail* (ce n'est pas son vrai nom), un homme gay de la ville d'Oufa en Russie, faisait ce qu'il aimait : des spectacles de drag.
« Je partais en tournée, à des compétitions ; je rencontrais de nouveaux artistes et je prévoyais que le drag serait le grand-père de ma vie », a-t-il confié à Al Jazeera.
À ce moment-là, Mikhail a déclaré qu'il vivait sa vie ouvertement et n'avait pas connu beaucoup d'hostilité manifeste de la part du public au quotidien. Mais ces dernières années, les choses ont commencé à changer.
« Des préoccupations sont apparues dans l'industrie des clubs », a-t-il déclaré. « Des restrictions ont été imposées sur le nombre d'artistes ukrainiens, une interdiction a été placée sur la mention de sujets liés aux LGBT. Dans la vie quotidienne, c'était simplement une anxiété éternelle ».
La goutte d'eau qui a fait déborder le vase est venue lorsque la police a ciblé l'établissement où travaillait Mikhail pour une descente.
« J'ai été pris dans des descentes plus d'une fois, mais ma dernière descente a été la plus brutale et la plus terrible », se souvient-il.
« S'en sont suivis deux interrogatoires de huit ou neuf heures chacun, exerçant une pression psychologique sur moi sans relâche. Après cela, j'ai été forcé de quitter le pays afin de préserver ma liberté. »
La Russie ne fait pas seulement la guerre à l'Ukraine, mais aussi à ce qu'elle considère comme des ennemis intérieurs. La persécution des individus, organisations et communautés LGBTQ s'est intensifiée ces dernières années, le Kremlin cherchant à défendre les « valeurs traditionnelles ».
Le coordinateur du programme de surveillance de l'organisation russe LGBTQ Sphere, qui a demandé à rester anonyme, a déclaré à Al Jazeera qu'avant 2022, la majorité des abus ciblant les individus LGBTQ « concernaient la discrimination quotidienne et institutionnelle, plutôt que la répression directe ».
Depuis les amendements à l'interdiction de la « propagande gay » en 2022, suivis par l'interdiction de la transition de genre et la désignation du « mouvement LGBT international » comme « organisation extrémiste » en 2023, maintenant au moins deux tiers des abus se produisent aux mains des autorités.
L'ancienne URSS a été l'un des premiers pays au monde à dépénaliser l'homosexualité en 1917, abrogeant les lois de l'ère tsariste qui elles-mêmes étaient à peine appliquées. Mais dans les années 1930, sous Joseph Staline, l'homosexualité est devenue perçue comme une menace pour le tissu de la société soviétique et en 1934, la « sodomie » était punissable de trois à cinq ans d'emprisonnement.
Plus tard, elle a été considérée comme une maladie mentale et les gays et lesbiennes ont été enfermés de force dans des asiles. Ce n'est qu'en 1993, après l'effondrement du communisme, que l'interdiction a été levée à nouveau.
Une nouvelle vague de persécution a commencé dans les années 2010 avec des lois visant à prévenir la « propagande gay », ostensiblement pour protéger les enfants.
Le gouvernement du président Vladimir Poutine a dépeint le mouvement pour les droits des LGBTQ comme un agenda étranger visant à saper les valeurs familiales traditionnelles de la Russie.
« Les autorités russes ne font pas la distinction entre la pédophilie et les orientations 'non traditionnelles', ce qui est clairement évident dans les statistiques publiées du Département judiciaire de la Cour suprême de la Fédération de Russie pour 2023, où les statistiques pour les trois articles de 6.21 sont présentées sur une seule ligne », a expliqué Noel Shaida, chef du département des communications de Sphere.
Fin 2023, la Cour suprême de Russie a qualifié le « mouvement LGBT international » d'« organisation extrémiste ». Bien sûr, une telle entité formelle n'existe pas, mais ce flou crée un très large éventail de cibles.
« Les employés de toute organisation [aidant les LGBTQ] risquent d'être accusés de participer à ou d'organiser une activité extrémiste – ce qui implique des poursuites pénales injustes et politiquement motivées, potentiellement avec des peines de prison à deux chiffres comme résultat », a déclaré le coordinateur de surveillance de Sphere.
« Pour cette raison, de nombreuses initiatives ont annoncé la cessation de leurs activités dans le pays. Certaines organisations ont fait sortir des employés de Russie afin de poursuivre leur travail. Il ne reste pas beaucoup d'initiatives queer dans le pays qui ne sont pas forcées d'opérer clandestinement. »
En novembre dernier, la police de Moscou a effectué une série de descentes dans des bars et établissements à travers la ville, soupçonnés de servir une clientèle queer.
« Selon nos données, il y en a eu au moins 43 dans tout le pays de novembre 2023 à janvier 2025 », a déclaré le représentant de Sphere.
« Les résultats varient : des poursuites pénales contre les propriétaires d'établissements pour 'organisation et participation à une organisation extrémiste' aux mêmes protocoles et amendes pour propagande. Souvent, les descentes ne conduisent pas formellement à d'autres persécutions, mais les établissements où elles ont lieu changent rapidement leur format de travail et démontrent activement leur loyauté envers les politiques du gouvernement, ou ferment tout simplement. »
Le surveillant de Sphere a ajouté que les participants reçoivent parfois des convocations à un bureau d'enregistrement militaire, ce qui signifie qu'ils pourraient être enrôlés pour combattre en Ukraine.
« Les images publiées montrent souvent que les visiteurs des établissements sont forcés de s'allonger nus sur le sol froid pendant la descente, qui dure généralement plusieurs heures », ont-ils poursuivi.
« La violence peut être utilisée, entre autres, pour convaincre les visiteurs récalcitrants de se conformer aux demandes illégales de la police : donner accès au contenu d'un téléphone portable ou répondre aux questions d'intérêt pour la police. Par exemple, dans l'un des établissements, les gens ont été forcés de faire des squats jusqu'à ce que leur ami donne à la police le mot de passe de leur téléphone. Dans ce cas, on parle de torture. »
En outre, les forces de l'ordre font régulièrement des descentes dans les fêtes gays et piègent des individus en utilisant des applications de rencontre, les arrêtant sous des accusations telles que les stupéfiants ou la « propagande gay », ce qui pourrait signifier afficher des symboles de la Fierté gay ou parler positivement des relations homosexuelles.
La répression cible l'activité queer dans la sphère publique et la vie privée.
En décembre, Andrei Kotov, directeur de l'agence Men Travel à Moscou, a été arrêté pour « organisation d'activités extrémistes » et a ensuite été retrouvé mort dans sa cellule, les autorités ayant conclu à un « suicide ».
Le site d'information russe indépendant Meduza, opérant désormais en exil depuis la Lettonie, a récemment rapporté que les autorités semblent compiler les données recueillies lors des descentes dans les fêtes gays - comme les empreintes digitales et les échantillons d'ADN - ainsi que les dossiers médicaux des personnes transgenres pour créer une base de données des individus LGBTQ.
L'objectif d'une telle base de données n'est pas clair, mais la police russe dispose déjà d'une base de données similaire pour les toxicomanes, qui serait utilisée pour identifier des cibles pour des pièges ou pour planter des preuves lorsque des officiers corrompus doivent atteindre leurs quotas.
« Les données collectées pourraient être utilisées pour initier une affaire criminelle majeure sous l'accusation d'extrémisme contre le 'Mouvement LGBT international' inexistant, qui aurait des cellules dans des dizaines de régions de Russie », a déclaré Irina, responsable du plaidoyer de Sphere.
« Cela pourrait également être utilisé comme un outil d'intimidation, créant une atmosphère de peur constante parmi les personnes queer ; un outil de persécution ; et pour recruter des personnes LGBT+ comme informateurs 'volontaires', leur offrant le retrait de la base de données en échange de leur coopération. »
En raison de la pression continue, beaucoup tentent de fuir la Russie.
« Être une famille ou avoir une orientation non traditionnelle en Russie peut être dangereux pour la liberté et la vie en général », a déclaré Anastasia Burakova, avocate des droits humains et fondatrice de Kovcheg (l'Arche), une organisation qui aide les émigrants russes.
« Nous avons des logements d'urgence temporaires dans des pays comme la Serbie, la Turquie, et parfois on nous demande de fournir ces logements d'urgence pour les personnes LGBTQ. Pour l'instant, nous constatons qu'il y a beaucoup de demandes pour ces personnes qui sont persécutées. »
Néanmoins, Sphere reste optimiste quant à l'avenir.
« Malgré tous les obstacles que l'État met devant nous, nous croyons sincèrement qu'il y a un avenir pour la communauté LGBT+ en Russie, au minimum, et au maximum, il y aura de l'acceptation, pas de discrimination, et ainsi de suite », a déclaré Noel Shaida.
« Après tout, les régimes politiques ne sont pas éternels, les fonctionnaires ne sont pas immortels. Et même s'il semble que l'avenir est sans espoir, nous croyons et essayons de démontrer par toutes nos activités qu'aucune interdiction d'État ne peut nous annuler. »
Mais Mikhail est plus sombre, du moins à court terme.
« Les gens ne pourront pas s'exprimer, ils essaieront de surveiller leur comportement pour se fondre dans les normes que l'État dicte maintenant », a-t-il remarqué.
« Aussi triste que cela puisse être, je pense que les statistiques de suicide vont augmenter. »
Niko Vorobyov
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P.-S.
Aljazeera
Traduit pour l'ESSF par Adam Novak
Pas de licence spécifique (droits par défaut)
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Éoliennes : Autant en emporte le vent

Après les complexes porcins et le gaz de schiste, voici venir le nouvel assaut dans le paysage rural agricole : les éoliennes. Le processus est similaire. Des promesses de richesse sans aucun fondement ni analyse autre que l'intérêt des promoteurs, des consultations bidon, la zizanie.
Agriculteur biologique dans le comté de Lotbinière, je suis témoin de l'enthousiasme maladif de la MRC pour l'implantation de plus de 18 gigantesques éoliennes sur le territoire, essentiellement sur les meilleures terres de la région, sinon de la province. Pour le promoteur Innergex, c'est du gâteau : des sites plats, accessibles, drainés, épierrés. La MRC a même modifié ses règlements pour permettre la construction de ces tours de plus de 200 m de hauteur à 3 mètres de distance des propriétés voisines. En somme, la même distance que votre voisin doit respecter s'il veut placer un cabanon pour ranger sa brouette et son calendrier que son épouse ne veut pas voir dans la maison.
Mais qui suis-je pour ainsi m'opposer à ces magnifiques projets de transition énergétique ? Suis-je donc resté au stade cromagnonesque de consommation de pétrole ? Le premier problème apparent dans cette logique simpliste réside d'une part dans le fait que, de façon globale, les énergies renouvelables ne remplacent pas le pétrole mais ne font que s'y ajouter. Personne n'a jamais réussi à construire ou même entretenir une éolienne sans pétrole. Le plastique employé, mais également les métaux, les lubrifiants, le cuivre pour le transport de l'électricité produite, tout repose sur l'utilisation du pétrole.
Je me permets ici de citer la présentation de l'ingénieur Jean-Marc Jancovici sur la consommation mondiale de l'énergie. Il est assez clair que les énergies d'origine fossile ne font l'objet d'aucune réduction, peu importe quelle autre source énergétique apparaît dans le décor.

Je croirai au scénario de la transition énergétique lorsqu'on me présentera au préalable un plan de réduction des sources d'énergie fossile. Sinon, ce n'est que du vent, au sens propre comme au figuré.
J'ajouterais que le Québec aurait grand intérêt à réduire sa consommation d'énergie au lieu de conclure avec nos voisins du sud des ententes de livraison d'électricité à bas prix sur des périodes de 30 ans. La construction d'éoliennes en zone agricole et habitée y perdrait sans aucun doute son intérêt. Et à propos, j'aimerais qu'on me présente quelqu'un qui, dans le contexte actuel, tiendrait mordicus au respect des ententes de livraison d'électricité à bas prix avec les États-Unis… Si j'y repense, j'en glisserai un mot aux 115 personnes qui ont perdu leur emploi récemment dans mon petit village en raison des sautes d'humeur de l'oncle Donald.
Diviser pour régner
Une vieille recette : traiter les habitants du milieu rural comme des citoyens de seconde classe. Des distances séparatrices de plus de 2 km pour ceux qui résident dans les villages ou les villes (en fait beaucoup plus parce qu'on considère le périmètre urbain), mais de l'ordre de 750 m pour la partie des résidences rurales, dont le fameux 3 m des lots voisins. Fini la tranquillité pour ceux qui circulent sur leurs terres. Avec en prime un bon nanane de 35 000$ par an et par éolienne pour celui qui en fait construire une sur ses champs, mais sans rien pour le voisin. Avec ce genre de projet, on ne fait pas qu'écorcher le paysage, on pourrit le climat social.
La privatisation des profits, la socialisation des dépenses
Dans le cadre de mon parcours du combattant pour comprendre le dossier, je suis allé rencontrer mon conseil municipal. Évidemment, j'avais raté la séance « d'information publique », aucune des trois municipalités où je paie des taxes n'ayant jugé pertinent de m'informer de la tenue d'un tel événement. Idem pour ma MRC. Je me suis donc pointé au conseil avec quelques questions, dont une sur un éventuel fonds de réserve en cas de faillite du promoteur. Qui devra payer si le meneur de projet disparaît et qu'il faut démanteler ? Mon tracteur et moi ? Mon conseil ne disposant d'aucune réponse, on me référa au conseil des maires, où je me rendis, deux fois, avec les mêmes questions. Je prends rendez-vous avec le directeur général, qui ne le sait pas plus. Il me semble pourtant qu'il s'agit d'un élément important. C'est quand même la communauté qui doit financer la moitié du projet, même si mon maire affirme haut et fort qu'il n'en coûtera pas un sou aux citoyens.
J'ai donc assisté aux deux séances publiques subséquentes. L'agent de liaison du promoteur ne sait rien à propos d'un éventuel fonds de réserve. J'obtiens finalement de la part du représentant officiel de l'entreprise l'aveu que s'il y a un problème, le gouvernement assure la garantie. En toute honnêteté, j'avoue que je m'y attendais.
Il en est allé de même avec le plan de financement, la totalité de mon conseil municipal faisant entièrement confiance à une quelconque entreprise comptable, sans en connaître les détails.
Dans tout ce processus, la phrase que j'ai entendue systématiquement, c'est : « Il faut avoir confiance ». Je ne sais pas pour vous, mais chez moi, ça provoque exactement le contraire.
Maxime Laplante,
agronome et agriculteur biologique
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Accélérer l’incompréhension et la confusion climatique locale

Les élections fédérales sont maintenant derrière nous, et si les résultats en ont surpris plusieurs, le nouveau gouvernement, oppositions incluses, ne nous surprendra pas : il ne prendra pas la mesure du réchauffement planétaire et des crises qui s'ensuivent… jusqu'à ce que celles-ci nous rattrapent.
Jacques Benoit et Marc Brullemans
Co-rédacteurs du Plan de la DUC, membres de GMob
Certain.e.s se tournent maintenant vers les élections municipales qui auront lieu dans un peu plus de six mois. La dernière fois, beaucoup avaient voté et élu de nouvelles personnes, espérant une plus grande conscience des enjeux qui nous menacent.
Quatre ans plus tard, les déceptions sont nombreuses : de la part d'élu.e.s qui ont écrit aux partis politiques lors de l'élection fédérale, mais aussi de la part de la population qui s'est vue trahie par des promesses vertes non tenues. L'exemple type est celui de la mairesse de Longueuil, qui appelait récemment à “notre devoir d'agir et notre responsabilité collective” suite à des extrêmes météos s'étant abattus sur sa ville, tout en faisant la promotion de l'expansion de l'aéroport de Saint-Hubert, une infrastructure qui aggrave le réchauffement climatique causant ces extrêmes météos.
Alors, à quoi pouvons-nous nous attendre dans l'année “municipale” qui vient ?
Le 20 avril dernier, Radio-Canada annonçait « Bientôt un plan climatique dans la région de Bécancour ».
Le plan en question découle du programme “Accélérons la transition climatique locale” annoncé l'an dernier par le ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCCFP), Benoît Charette. Le ministre avait mentionné que son gouvernement verserait jusqu'à 500 M$ aux municipalités participantes.
Et sans doute pour accélérer la démarche :
• le ministre en avait fait l'annonce endébut février,
• les municipalités (ou MRC) devaient acheminer leur intention d'engagement au plus tard le 15 mars par courriel, et
• l'aide financière serait versée aux bénéficiaires au plus tard le 31 mars 2024.
Le tout, en un mois et demi ! Après quoi, l'élaboration ou la mise à jour de leur plan climat pourrait débuter.
Urgence climatique ? Ou urgence de vider les tiroirs avant la fin de l'année financière ?
À la page 6 duGuide d'élaboration d'un plan climat, sur la définition des objectifs, on pouvait lire :
« Si les élus de l'organisme se sont déjà engagés publiquement pour la lutte contre les changements climatiques, par exemple en adhérant à la Déclaration d'urgence climatique, les objectifs devraient être cohérents avec les engagements déjà existants. »
Mais le guide ne facilitait en rien cette cohérence, puisqu'aucun lien ne conduisait à laDéclaration d'urgence climatique - DUC.
Le guide ne faisait pas plus référence au Plan de la DUC, publié en mars 2021 et transmis à toutes les municipalités. Ce plan, qui est la suite logique de la DUC, énonce les actions à entreprendre : 98 pour les gouvernements fédéral et provincial, 53 pour les municipalités et 59 pour les citoyen.ne.s, pour un total de 210 mesures réparties dans onze chantiers. Ce plan a fait le sujet de 15 articles hebdomadaires consécutifs, entre autres dans les Coops de l'Information au printemps 2021.
Le guide gouvernemental ne référait pas non plus au document « LAST CALL CLIMATIQUE - Pour une mobilisation vitale », publié à la fin août 2021, qui avisait des dangers croissants de tout délai, ou d'action non globale ou incomplète.
Cependant, sachant que l'élaboration du “plan climat local”, sa planification et sa mise en œuvre devaient être approuvées par le MELCCFP, et sous la responsabilité du ministère des Affaires municipales et de l'Habitation (MAMH), on comprend mieux que le gouvernement voulait s'assurer que l'action reste au niveau « local » ! L'exemple de ladémarche de participation publique à Trois-Rivières montre bien la limite tolérée.
Suivant la liste des 101 municipalités – MRC ayant signifié leur intention, le montant total versé par le gouvernement atteint 127 734 500 $, soit en moyenne 1 264 698 $ par plan climat. Les villes et MRC devraient rendre leurs plans publics dans les prochains mois. Certain.e.s l'utiliseront aux élections municipales de l'automne comme faisant partie de leurs réalisations, voire de leurs prochaines politiques.
Malheureusement, si leurs plans climatiques ne tiennent pas compte des divers niveaux de responsabilités, incluant le fédéral et le provincial, si les mesures prévues ne sont pas à la hauteur des défis qui sont à notre porte, si les actions visent à ne pas nuire au développement économiquequi nous a conduits au précipice actuel, alors cet exercice n'aura servi qu'à augmenter le déficit budgétaire provincial, sans possibilité de réduire nos émissions de gaz à effet de serre.
Au moment où le monde est entièrement bouleversé par l'irresponsabilité américaine, la campagne électorale fédérale n'a parlé que de fossiles, de pipeline transcanadien, de corridor énergétique, d'exploitation de ressources et de nouveaux marchés. Pour sa part, le gouvernement Legault additionne les tourbières sacrifiées et un troisième lien supposément pour notre bien. Alors que les scientifiques ne cessent de nousalerter sur les impacts de notre inaction, nos dirigeant.e.s ne nous amènent vraiment pas dans la bonne direction.
Dans une récente entrevue radiophonique, une mairesse signataire de la lettre des élu.e.s municipaux disait que « le fédéral a l'argent, le provincial a le pouvoir et les municipalités ont les responsabilités ».
Mais où est le plan ? 101 mini-plans locaux ne font pas un plan global, mais peuvent accélérer localement l'incompréhension et la confusion climatique !
Nous avions un tel plan global : le plan de la DUC, où tous les paliers gouvernementaux sont impliqués ensemble, et avec les citoyen.ne.s, dans une même optique, dans un même plan, chacun selon son niveau. Et il n'a jamais été aussi urgent de le mettre en place !
Et qu'on cesse de nous parler et de se gargariser avec l'adaptation climatique.
"La première adaptation, c'est limiter la cause !"
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Maisonneuve-Rosemont : un hôpital qui met en danger celles qui soignent

Le 29 avril au soir, des orages violents ont frappé Montréal. À l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, le pire a été évité de justesse. Une panne de courant majeure a paralysé des secteurs névralgiques.
Le 29 avril au soir, des orages violents ont frappé Montréal. À l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, le pire a été évité de justesse. Une panne de courant majeure a paralysé des secteurs névralgiques : le bloc opératoire, les soins intensifs, la salle de réveil, l'unité coronarienne. Des fenêtres ont explosé dans des chambres de patients. Des ascenseurs sont restés bloqués avec du personnel à l'intérieur. Une infirmière a été blessée par une vitre brisée. Des professionnel-les-s de la santé ont dû continuer leur travail dans le noir, à la lueur de lampes frontales et de cellulaires. Tout cela, dans un hôpital public du Québec, en 2025.
C'est un miracle qu'aucun-e patient-e n'ait été gravement blessé ou n'ait perdu la vie cette nuit-là. Mais il ne faut pas se leurrer : ce genre d'incident pourrait à tout moment tourner à la tragédie. Et il n'a rien d'imprévisible. Le problème n'est pas la météo. Le problème, c'est un bâtiment vétuste, surchargé, aux systèmes défaillants, où chaque panne expose la vie des patient-e-s… et celle du personnel.
Ce n'est pas un hôpital, c'est un champ de mines. Et ce sont les professionnelles en soins qui doivent s'y aventurer chaque jour. Partout au Québec, des établissements de santé tombent en ruine pendant que le gouvernement mise sur des mégaprojets, négligeant la sécurité du personnel soignant et de la population. Ces lieux de soin sont devenus des zones à risque.
Le gouvernement parle de reconnaissance. Mais pendant que les ministres félicitent les équipes en conférence de presse, ce sont nos membres qui doivent composer avec des installations délabrées et dangereuses. Ce sont elles qui courent d'une urgence à l'autre, sans savoir si l'ascenseur va fonctionner ou si la génératrice va partir. Ce sont elles qui absorbent les conséquences de la négligence gouvernementale.
Maisonneuve-Rosemont est devenu un repoussoir. Qui voudrait travailler dans un établissement où la simple tempête du mois de mars peut transformer une salle de soins en zone sinistrée ? Comment attirer et retenir du personnel quand la sécurité physique elle-même n'est plus garantie ?
Le ministre Christian Dubé se dit rassuré. Nous, non. Nous sommes inquiètes, épuisées et en colère. Les excuses ne suffisent plus. Les beaux discours non plus. Depuis des mois, le gouvernement recule, temporise, remet les projets à plus tard sous prétexte de rigueur budgétaire. Pendant ce temps, la situation se détériore. Et ce sont nos membres et nos patient-e-s qui paient le prix.
Qui peut croire que si un immense trou s'ouvrait sur une autoroute et menaçait la vie des automobilistes, on attendrait trois ans pour le réparer ? On comblerait ce trou en urgence. On sécuriserait la zone sans délai. Parce que c'est une question de sécurité publique. Eh bien cette logique doit s'appliquer à Maisonneuve-Rosemont. Un hôpital vétuste qui met en péril la vie du personnel et des patients, c'est un gouffre dans notre réseau de la santé. Il faut le réparer. Maintenant.
Tout comme le Collège des médecins du Québec, nous lançons un cri du cœur. Et un cri d'alarme.
Le gouvernement doit immédiatement donner un échéancier clair, contraignant et public pour la réfection complète de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Il doit cesser de soumettre le personnel à des risques évitables. Il doit investir sans délai dans un environnement digne pour celles et ceux qui sauvent des vies.
Tant que cet hôpital ne sera pas reconstruit, nous ne pourrons plus nous contenter de la rassurante formule « tout le monde est en sécurité ». Parce que ce n'est tout simplement plus vrai. À l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, la coupe est pleine. Et elle déborde.
Julie Bouchard, Présidente, Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec—FIQ
Crédit photo : Jeangagnon, Wikimedia Commons, sous licence CC BY-SA 3.0
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L’Alliance Ouvrière est avec le Syndicat d’Amazon Laval CSN à Montréal : Ici, on boycotte Amazon

Environ 75 manifestants répondant à l'appel d'Alliance Ouvrière bloque actuellement le passage de toute marchandise au terminal intermodal du CN à Côte-Saint-Luc.
“3” mai 2025
tiré de la page facebook d'Alliance ouvrière
Cette action marque l'apogée de la semaine de perturbation économique lancée par l'organisation le 27 mai. Alliance Ouvrière cible ce centre pour son rôle stratégique dans la logistique à Montréal, afin de perturber au maximum la circulation des marchandises et les livraisons sur l'Île.
Nous tentons, par une perturbation directe des opérations économiques, à forcer le gouvernement à répondre aux demandes des travailleurs d'Amazon licenciés et aux exigences citoyennes. Alliance Ouvrière espère que le blocage des profits des collaborateurs de la CAQ brisera enfin le silence du gouvernement, qui détourne ou ignore le débat.
CITATIONS :
"On a rencontré le ministre, puis un candidat CAQ. Aucune réponse. On a manifesté devant chez Jean Boulet, et Legault a dit que c'était honteux. Ensuite, on s'est rendus à l'Assemblée nationale comme il l'avait demandé. Mais encore une fois, rien. Rendu là, il ne reste plus d'alternative. La seule voix que ce gouvernement écoutera peut-être, c'est celle qui menace les profits de ses amis."
– Félix Trudeau, président du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) et membre d'Alliance Ouvrière
"Les milliardaires comme Bezos et les politiciens comme Carney et Legault feraient bien de se préparer : Alliance Ouvrière entend mettre fin au pouvoir des riches pour le redonner aux travailleurs. L'action d'aujourd'hui n'est qu'un simple avant-goût de ce que la population leur réserve s'ils continuent à faire à leur tête. "
– Benoît Dumais, porte-parole d'Alliance Ouvrière
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Semaine de mobilisation et de perturbation économique

29 mai 25
Alliance Ouvrière bloque toutes les livraisons d'un des plus grands bureaux de poste au pays*
*Alliance Ouvrière bloque depuis quelques minutes toutes les livraisons au 333 rue Chabanel, à Montréal. L'action du groupe vise à perturber les livraisons d'Amazon dans l'un des plus grands bureaux de poste au Canada, doté d'infrastructures stratégiques pour la livraison de colis.*
Depuis qu'Amazon a cessé ses livraisons directes au Québec, Postes Canada a pris le relais (avec Intelcom) en signant un contrat de distribution. Une entente vivement dénoncée par Alliance Ouvrière, qui critique le refus de la société d'État de se joindre au boycott d'Amazon et appelle à mettre fin à « l'Amazonification » du service postal.
Pour le groupe, la fermeture des entrepôts d'Amazon et les ordres de retour au travail imposés aux postiers, débardeurs et cheminots s'inscrivent dans une même logique : affaiblir la capacité de la classe ouvrière à obtenir de meilleures conditions de vie face à une concentration croissante du pouvoir entre les mains de l'oligarchie et du patronat.
À l'approche du dépôt du rapport de la commission Kaplan, prévu pour le 15 mai, et alors que la grève pourrait reprendre dès le 22, Alliance Ouvrière réaffirme son appui aux postiers et postières en lutte. Le groupe exige que la surcharge causée par l'afflux des colis d'Amazon soit résolue par la
création de bons emplois stables, et non par le recours au modèle Amazon. Il demande également que les livraisons de fin de semaine soient confiées à des employés à temps plein, et que Postes Canada cesse de viser à la création d'emplois instables.
Cette mobilisation s'inscrit dans la semaine d'action et de perturbation économique organisée par Alliance Ouvrière, du 27 avril au 3 mai. Une action est prévue chaque jour dans le cadre de cette campagne.
*CITATIONS :*
*Félix Trudeau, président du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) et membre d'Alliance Ouvrière :*
« Même si le syndicat des postes n'a pas pris position en faveur du boycott, nous serons toujours présents pour supporter les postiers et postières de la base. Vous n'êtes pas seul face aux attaques antisyndicales, nous avons subi cette vague de plein fouet aussi, et nous sommes avec vous. »
«
Les postiers veulent offrir des services essentiels à la population, les dirigeants de Postes Canada veulent être à la traîne d'une industrie qui les dépasse. Ils ne seront jamais et ne doivent jamais devenir Amazon, même si c'est ce qu'ils voudraient le plus.
»
*Benoît Dumais, porte-parole d'Alliance Ouvrière :*
«
Les ordres de retour au travail, le projet de loi 89, la fermeture d'Amazon après la syndicalisation... Tout ça, c'est dans la même logique, celle d'empêcher à la classe ouvrière de s'organiser et se battre pour ses conditions de vie.
»
*À propos d'Alliance Ouvrière* :
Alliance Ouvrière vise à constituer la classe ouvrière en force politique indépendante. Elle organise et mobilise la classe ouvrière dans les milieux de travail et les autres sphères de la vie sociale afin de récupérer l'outil de la grève politique. Page Facebook :
facebook.com/alliance.ouvriere
*****
Blocage en cours du centre de donné d'Amazon Web Services à Varennes par des militants d'Alliance Ouvrière*
*Varennes, 30 avril 2025* — *Alliance Ouvrière bloque actuellement le passage des employés d'Amazon Web Services (AWS) qui allaient rentrer au travail. Les militants cherchent à perturber le fonctionnement normal du centre de données de Varennes pour mettre de la pression afin que
l'entreprise, qui a renvoyé 4700 travailleurs en janvier, rembourse tout l'argent public qui lui a été accordé.*
Les gouvernements fédéral et provincial ont accordé au cours des dernières années plus de 400 millions de dollars de contrats publics ou subventions à Amazon, dont la majorité à AWS. Par exemple, l'aide de tarifs préférentiels, Amazon paie presque deux fois moins cher son électricité
qu'un travailleur québécois moyen. La multinationale a aussi reçu des rabais supplémentaires de 20% la première année, diminuant de 5% par année.
AWS représentait environ 67% des profits d'Amazon en 2024, comparé à seulement 17% des revenus. C'est donc la division d'hébergement web qui fournit à Amazon les ressources nécessaires pour investir massivement dans une région… et pour s'en retirer aussi rapidement qu'ils sont arrivés.
*CITATIONS*
*Benoît Dumais, porte-parole d'Alliance Ouvrière :*
« Si on dérange, c'est parce qu'eux, ils écrasent. Perturber le centre de données à Varennes, c'est le minimum quand Amazon vide nos coffres, met 4700 personnes à pied, puis continue de rouler sur l'or au Québec. On va se le dire, elle n'est
jamais vraiment partie ! Si elle voulait partir, qu'elle le fasse pour vrai. Nous, on demande que ses actifs soient saisis et remis à la collectivité. »
*Félix Trudeau, président du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) et membre d'Alliance Ouvrière :*
« Quand une multinationale fait ses profits avec nos taxes et notre électricité, elle ne devrait pas avoir le droit de sacrer son camp sans conséquence. Ce modèle-là profite à une poignée d'oligarques et laisse les travailleurs du Québec les mains vides. Amazon peut partir, si elle
rembourse tout ce qu'on lui a donné, autant contrats que subventions. »
*****
AMAZON : Comité d'accueil des travailleurs au ministre Boulet à Québec ce matin*
*Québec, 1er mai 2025* — *Ce matin, les travailleurs licenciés d'Amazon étaient devant l'Assemblée nationale pour accueillir le ministre Boulet. Ils poursuivent leur mobilisation amorcée dimanche à Trois-Rivières, où ils s'étaient rendus devant la maison du ministre pour réclamer une rencontre, en vain. M. Boulet refuse toujours de qualifier le licenciement massif de 4700 personnes comme une crise et d'entamer un dialogue sérieux avec le syndicat.*
Les travailleurs réclament des formations, des compensations justes et des sanctions contre Amazon, qui a violé les lois du Québec en fermant ses entrepôts pour bloquer leur syndicalisation. C'est une pratique illégale, qui est restée sans conséquence.
Le gouvernement ignore toujours des obligations légales claires, c'est-à-dire de mettre en place un comité d'aide au reclassement qui ferait un plan pour s'assurer que les travailleurs licenciés ne resteraient pas trop longtemps sans emplois. À la place, Amazon a remis un contrat à une agence américaine qui propose un simple « coaching ». Selon M. Boulet lui-même, seulement 800 des 4700 licenciés y ont eu accès. La CAQ a pourtant autorisé cette solution.
Le Syndicat des travailleuses et travailleurs d'Amazon (STTAL–CSN) a aussi recueilli des témoignages de chauffeurs qui n'ont reçu aucune compensation suite au congédiement. Bien qu'employés par des sous-traitants (les "DSP", qui n'existaient que dans le contexte d'Amazon, avec leur siège social dans les entrepôts), c'est Amazon qui gérait leur embauche, leurs horaires,
leurs trajets et leur congédiement. Ces compagnies ont été mises en place par Amazon afin d'éviter ses responsabilités légales.
De plus, les travailleurs de l'entrepôt syndiqué DXT4 n'ont reçu que 12 semaines d'indemnités, alors que la loi en exige 16 en cas de licenciement collectif de plus de 300 personnes.
Leurs demandes sont claires : un an de salaire et bénéfices pour compenser les torts, ainsi qu'un soutien gratuit à une formation de reclassification. Le gouvernement a démontré par le passé qu'il pouvait fournir des bourses d'études en contexte de crise, notamment avec la pénurie en santé et en construction. En parallèle, les travailleurs exigent le remboursement des subventions et contrats publics accordés à Amazon, pour sanctionner son non-respect des lois et de leurs droits.
Rappelons qu'en février, les travailleurs avaient arraché une rencontre de cinq minutes avec le ministre Boulet, lors d'un dîner au Château Frontenac. Il leur avait alors affirmé qu'il n'interviendrait pas. Pourtant, des mesures peuvent être mises en place par décret ou via un projet de loi spéciale. Ils avaient aussi rencontré le candidat caquiste Alex Gagné (Terrebonne), qui avait promis d'en parler au ministre Boulet et à la ministre Jourdain.
Cette action s'inscrit dans une semaine de mobilisation et de perturbation économique appelée par l'Alliance Ouvrière.
*CITATIONS :*
*Wesley Marceau, vice-président du STTAL-CSN :*
« Mes collègues ont travaillé fort et se sont blessés à maintes reprises pour cette entreprise. Et qu'est-ce qu'on reçoit en retour ? Un licenciement, un coach de vie, et quelques semaines de salaire. On voulait améliorer nos conditions, et Amazon nous a écrasé. Aujourd'hui, Legault et Boulet ferment les yeux sur une crise qui se passe sous leurs nez. »
*Félix Trudeau, président du STTAL-CSN :*
« On a tout essayé pour que M. Boulet nous entende, mais il continue de faire la sourde oreille. On est allés chez lui samedi et il n'a pas aimé ça, alors on est venus à l'Assemblée nationale. Va-t-il enfin écouter les travailleurs, ou recommencer à dire dans les médias qu'on exagère pour
éviter de parler du vrai problème ? »
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Alliance Ouvrière bloque les marchandises au terminal intermodal du CN à Cote-St-Luc*
*Montréal, 3 mai 2025* - *Environ 75 manifestants répondant à l'appel d'Alliance Ouvrière bloque actuellement le passage de toute marchandise à l'entrée **** de la gare de triage du CPKC de Côte-Saint-Luc. **Cette action marque l'apogée de la semaine de perturbation économique lancée par l'organisation le 27 mai. Alliance Ouvrière cible ce centre pour son rôle stratégique dans la logistique à Montréal, afin de perturber au maximum la circulation des marchandises et les livraisons sur l'Île. *
L'organisation tente, par une perturbation directe des opérations économiques, à forcer le gouvernement à répondre aux demandes des travailleurs d'Amazon licenciés et aux exigences citoyennes. Alliance Ouvrière espère que le blocage des profits des collaborateurs de la CAQ
brisera enfin le silence du gouvernement, qui détourne ou ignore le débat.
Les travailleurs licenciés et les citoyens de la campagne "Ici, on boycotte Amazon" exigent :
- Une indemnité d'un an pour les travailleurs
- Une formation de requalification gratuite
- Le remboursement des fonds publics accordés à Amazon et AWS
- La saisie des actifs d'Amazon au Québec et l'interdiction d'y opérer
Depuis le début de la semaine, Alliance Ouvrière a organisé au moins une action d'envergure par jour :
- Dimanche, les membres de l'organisation, le Syndicat d'Amazon Laval et la campagne de boycott citoyenne ont manifesté devant la résidence personnelle du ministre du Travail Jean Boulet.
- Lundi, Alliance Ouvrière a occupé les bureaux d'Hydro-Québec à Montréal pour dénoncer la vente d'énergie à rabais à Amazon Web Services (AWS).
- Mardi, l'organisation a bloqué l'entrée du bureau de poste Chabanel (où circule beaucoup de colis d'Amazon) pendant plus de deux heures. Le 333 Chabanel est une des plus grosses installations du genre au pays.
- Mercredi, les militants ont bloqué pendant plus de 2h30 l'entrée des employés d'AWS, à Varennes, afin de perturber les opérations du centre de donné.
- Jeudi, Alliance Ouvrière a fait une entrée remarqué à la manifestation du 1er mai, au Parc Lalancette à Montréal, avec une guillotine de deux mêtres de haut.
- Vendredi, Alliance Ouvrière et Désinvestir pour la Palestine ont été faire le ménage du printemps à la Caisse de Dépôt, qui investit massivement dans Amazon, en sortant les meubles du 1er étage de l'Espace CDPQ, à la Place Ville-Marie.
*CITATIONS* :
"On a rencontré le ministre, puis un candidat CAQ. Aucune réponse. On a manifesté devant chez Jean Boulet, et Legault a dit que c'était honteux. Ensuite, on s'est rendus à l'Assemblée nationale comme il l'avait demandé. Mais encore une fois, rien. Rendu là, il ne reste plus d'alternative. La
seule voix que ce gouvernement écoutera peut-être, c'est celle qui menace les profits de ses amis."
– *Félix Trudeau, président du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) et membre d'Alliance Ouvrière*
"Les milliardaires comme Bezos et les politiciens comme Carney et Legault feraient bien de se préparer : Alliance Ouvrière entend mettre fin au pouvoir des riches pour le redonner aux travailleurs. L'action d'aujourd'hui n'est qu'un simple avant-goût de ce que la population leur
réserve s'ils continuent à faire à leur tête. "
– *Benoît Dumais, porte-parole d'Alliance Ouvrière*
*À propos d'Alliance Ouvrière* :
Alliance Ouvrière vise à constituer la classe ouvrière en force politique indépendante. Elle organise et mobilise la classe ouvrière dans les milieux de travail et les autres sphères de la vie sociale afin de récupérer l'outil de la grève politique. Page Facebook :
facebook.com/alliance.ouvriere
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Notes sur la situation mondiale et les risques de guerres

Le monde au moment présent bruisse de risques de conflits armés, dont trois concernent des secteurs où ces conflits auraient une portée mondiale immédiate : l'Europe centrale et orientale, le Proche-Orient, la mer de Chine, auxquels vient de se joindre la question indo-pakistanaise. Dans les deux premiers les risques prennent appui sur les développements concernant deux guerres déjà engagées, celle de la Russie contre l'Ukraine et celle d'Israël contre le peuple palestinien.
Seconde guerre en Europe en 2025 ?
Concernant l'Europe centrale et orientale, les personnes sensées et raisonnables qui nous expliquent que la Russie ne peut avoir ni la volonté, ni les moyens, de déclencher à échéance rapprochée une nouvelle guerre ont raison, dans l'optique d'un monde censé et raisonnable.
Dans l'optique, toutefois, du monde réel, ils oublient trois facteurs :
1°) L'Etat et l'économie russe sont voués à la guerre et risquent de disjoncter en cas d'arrêt : ils tiennent par la dynamique guerrière, ils se sont piégés eux-mêmes dans ce processus, qui ne peut pas s'arrêter d'un coup. Une démobilisation poserait encore plus de problèmes que la mobilisation, y compris sur la sécurité intérieure.
2°) Il y a le facteur Trump. Le facteur Trump signifie qu'en cas d'attaque par exemple sur la Baltique il n'y a pas d'OTAN qui tienne. En outre on ne sait pas encore si Trump va rendre son pouvoir durable ou si les contradictions qui sont en train de monter aux Etats-Unis vont le balayer avant.
3°) Compte tenu des points 1 et 2 Poutine n'a pas forcément intérêt à attendre, car attendre, c'est attendre éventuellement la chute de Trump, d'une part, et une réaction européenne sérieuse, d'autre part, plus, éventuellement, le développement de liens économiques Europe/Chine prenant à revers l'ordonnancement actuel des alliances.
Le réarmement européen s'il s'engage sérieusement aurait cinq années devant lui – s'il s'engage sérieusement -, et les gens sensés et raisonnables les moins confiants disent que Poutine se prépare pour « dans 5 ans » : du point de vue de Poutine ceci n'est ni sensé ni raisonnable, il a intérêt à bousculer ce calendrier hypothétique.
S'il est donc tout à fait sensé et raisonnable de penser que la Russie n'a nulle intention d'attaquer qui que ce soit d'autre que l'Ukraine en 2025, dans le monde réel avec ses facteurs non pas sensés et raisonnables, mais réels, ce serait rigoureusement logique.
Attaquer où ? Des troupes russes sont en cours de concentration en Carélie, face à la Finlande. Le pouvoir chinois estimant avoir intérêt au moment présent d'appuyer sur son alliance militaire avec Moscou (y compris, par ailleurs, pour ne pas être débordé par la Corée du Nord), les entreprises chinoises du secteur militaire ne prennent actuellement plus de commandes, se tenant en réserve. La Baltique (plutôt l'Estonie et la Lettonie que la Finlande, et/ou la Lituanie et la Pologne au niveau du corridor de Suwałki) et l'Arctique (donc la Norvège) semblent être les zones immédiatement menacées.
En outre, les menaces des Etats-Unis sur le Canada et sur le Groenland ont été, de fait, un message à Poutine lui disant : le moment venu, tu pourras y aller, comme nous – et on fera la partition du grand Nord.
Pas seulement le grand Nord. J.D. Vance depuis son discours de Munich a proposé, de fait, le partage de l'Europe à Moscou, voire plus encore car son soutien à l'AfD, assorti des mesures de départ/réduction des troupes US restant en Allemagne, comporte un message mettant en cause les acquis des années 1989-1991, réunification allemande y compris (regardez la carte électorale de l'Allemagne actuelle et vous comprendrez). La politique du pouvoir US dans sa pointe avancée ne propose ni plus ni moins qu'un nouveau partage de Yalta.
Pour que ce danger ni sensé ni raisonnable mais d'autant plus réel risque le plus de se réaliser, un « cessez-le-feu » à la sauce Trump-Poutine est nécessaire en Ukraine, c'est-à-dire un cessez-le-feu au maximum aux conditions de la Russie, qui affaiblisse au maximum l'Ukraine tout en permettant à la Russie d'ouvrir un nouveau front.
Un tel « cessez-le-feu » visant à entériner l'occupation de la Crimée, du Donbass et des régions ukrainiennes méridionales, pourrait théoriquement permettre à Poutine de préparer un nouvel assaut contre l'Ukraine voire la Moldavie, mais l'armée ukrainienne de 900 000 hommes et femmes et le peuple ukrainien qui s'y attendent constitueraient un obstacle de taille : le meilleur, ou plutôt le pire, cessez-le-feu trumpo-poutinien, ne semble pas en mesure à ce stade d'annuler ou d'affaiblir ce facteur (d'où la reprise par Trump, à la demande de Poutine, des pressions visant à délégitimer Zelensky) .
Si Poutine veut exploiter la fenêtre de tir que lui fournirait ce dit « cessez-le-feu », ce serait donc plutôt ailleurs, à savoir la Baltique.
Inversement, aider l'Ukraine au maximum et immédiatement constituerait la chose la plus efficace à faire au service de la paix. Le réarmement européen tel qu'il est programmé par les chefs d'Etat et par la Commission européenne est loin d'y répondre : il enrichirait les trusts de l'armement, il pourrait donner lieu à nouveau à des achats aux Etats-Unis bien que l'objectif de « l'indépendance » soit de plus en plus mis en avant, et il mettrait l'accent sur le nucléaire français et britannique. Il ne répond donc pas à l'objectif d'aide immédiate à l'Ukraine, bien qu'il soit vrai que la question d'un réarmement européen se pose bel et bien.
L'aide immédiate à l'Ukraine, elle, peut se faire en puisant dans les stocks existants, en stoppant les ventes aux dictatures (la France depuis 2022 est devenue le second exportateur d'armes et ses clients sont les dictatures et monarchies pétrolières et l'Inde) et les livraisons à Israël, pour réorienter les livraisons vers l'Ukraine.
En apportant rapidement et massivement (ainsi que tentent de le faire les pays baltes) drones, artillerie de défense, moyens de renseignement, et aviation déconnectée des Etats-Unis, à l'Ukraine, elle interdirait toute nouvelle progression aux troupes russes et produirait leur recul, lequel aurait des conséquences déstabilisatrices sur le régime poutinien.
La question militaire européenne est donc une question politique immédiate qui concerne avant tout l'aide à l'Ukraine et qui demande une autre politique que celles de Macron, Merz, Starmer, et bien entendu que celle de Meloni qui cherche à se tenir au plus près de Trump.
Le fait que la gauche et le syndicalisme ne mènent pas campagne pour cette autre politique militaire, laquelle serait bien entendu un aspect de l'autre politique d'ensemble, démocratique, sociale et écologique, qu'il faut défendre, est un manque décisif contribuant à la montée du risque de guerre. En s'illusionnant sur la « paix en Ukraine » à quelque condition que ce soit, en faisant fi des populations sous occupation, voire en préconisant le « cessez-le-feu partout », on fait en réalité le jeu de la guerre. C'est donc le « pacifisme » à gauche qui, en empêchant de lutter pour une politique militaire démocratique immédiate, contribue le plus au risque de guerre.
La résistance ukrainienne reste le principal facteur de paix, la seule lutte réelle pour la paix et le seul antifascisme digne de ce nom étant la lutte contre l'Axe Trump/Poutine. La puissante mobilisation prolongée de la jeunesse serbe, entrainant toute la société, pointe avancée des mobilisations populaires montante dans les Balkans, ainsi qu'en Turquie, défie aussi l'ordre de Trump/Poutine. Or, l'Union Européenne qui dit défendre la démocratie, traite le pouvoir serbe comme s'il était légitime, et la France de Macron a fait de ce pouvoir proche de Poutine l'un de ses clients pour les Rafales. Question sociale, question démocratique et question militaire, là aussi, devraient être liées par les forces dites de gauche, car elles sont liées.
Le salut de Gaza passe par la défense de la révolution syrienne.
En ce qui concerne maintenant le Proche et le Moyen Orient, les personnes sensées et raisonnables au moment présent n'osent plus dire grand-chose, car le viol massif du cessez-le-feu suivi de la pire offensive contre le peuple de Gaza, par le pouvoir et l'armée israéliens, faisant totalement fi du sort des otages israéliens du Hamas, depuis le 18 mars 2025, apparaissent ouvertement comme n'étant vraiment ni sensés, ni raisonnables.
Ils sont pourtant, hélas, parfaitement logiques du point de vue de Netanyahou, tant pour son intérêt personnel étroit que pour la ligne de fuite en avant de l'extrême-droite raciste qui le soutient, et qui se sent pousser des ailes en raison de l'Axe Trump/Poutine.
L'alternative sensée et raisonnable en effet, celle, ici, du cessez-le-feu, conduisait à la chute de deux pouvoirs politiques aux destins liés : celui du Hamas et celui de Netanyahou.
A Gaza l'irruption de manifestations contre le Hamas, violemment réprimées par celui-ci mais aussi, de fait, par les bombardements israéliens, est un fait récent marquant. Et s'il est vrai que le clivage principal dans la société judéo-israélienne ne porte pas directement sur le rapport colonial aux Palestiniens (à l'exception de Standing Together), le clivage aigu sur la démocratie, l'Etat de droit et la corruption, envers Netanyahou et ses sbires, est essentiel pour les possibilités de défense de leurs droits par les Palestiniens.
Mais le fait central dont Netanyahou, et derrière lui Trump et Poutine, veulent annuler la portée, c'est la révolution syrienne. Une Syrie souveraine et démocratique serait un exemple pour toute la région, et un appui décisif aux Palestiniens pour se débarrasser du Hamas, de l'« axe de la résistance » et donc pour pouvoir combattre efficacement Netanyahou et la colonisation, ainsi qu'aux Libanais pour reconquérir Etat de droit et démocratie. Netanyahou a donc intérêt à exploiter et aggraver au maximum la crise du nouveau régime syrien.
Celle-ci peut s'expliquer globalement : la victoire populaire massive sur le régime d'Assad contredisait totalement l'ordre de Trump, de Poutine, de Netanyahou, de l'Iran, tous ensemble et à la fois, mais si le nouveau pouvoir formé par le Hayat-Tahir-al Cham (HTC) ne présentait pas le danger de vouloir instaurer un soi-disant Etat islamique comme bien des commentateurs l'ont prétendu, il n'avait guère d'autre boussole que de tenter de passer pour le garant d'un ordre bourgeois acceptable.
Un pouvoir démocratique déterminé aurait sans doute engagé rapidement un processus électoral constituant allant de pair avec la formation d'une armée nationale populaire prenant la place des milices. Là, le HTC a combiné compromis avec l'ancien appareil d'Etat d'Assad et règlements de comptes quasi privés. Voici quelques semaines, le « dérapage » s'est produit, attisé par les provocations extérieures (en l'occurrence : iraniennes d'un côté et turques de l'autre) : des alaouites ont subis des massacres de masse. Il ne s'agissait pas de règlements de comptes avec des hommes de l'ancien régime, lesquels ont bien sûr utilisé la situation, mais de massacres communautaires.
Ceci a ouvert une nouvelle situation, dans laquelle Netanyahou s'engouffre, en cherchant à manipuler les druzes, avec un objectif : surtout pas une Syrie souveraine et démocratique, exemple pour toute la région et appui politique inédit aux Palestiniens et aux Libanais.
La révolution syrienne, avec la résistance ukrainienne, est la pointe avancée de la contre-offensive des peuples à l'Axe Trump/Poutine. Il faut la soutenir impérativement, en exigeant la levée de toutes les sanctions toujours maintenues, et en diffusant des informations issues de la Syrie.
Et soutenir la résistance palestinienne, qui ne consiste pas dans les opérations armées du Hamas dont le trait n°1, outre son orientation pogromiste envers les Juifs, est de dessaisir les Palestiniens de toute autonomie, mais dans la manière héroïque, formidable et terrible, dont ce peuple résiste avec ses pieds en ne partant pas.
Le soutien à cette véritable résistance palestinienne passe par le soutien à la révolution syrienne et par le combat contre l'Axe Trump/Poutine, porteur d'une politique dans laquelle tout est lié : menace génocidaire sur les Ukrainiens, menace génocidaire sur les Palestiniens, menace de déportation massive des migrants, menace contre l'Etat de droit.
La menace génocidaire contre les Palestiniens, indépendamment de l'emploi fétichiste du terme « génocide » jusque-là, par un mouvement dit propalestinien aussi impuissant qu'il est étendu, risque de se concrétiser maintenant, maintenant que « Genocide Joe » a été battu (et que ce mouvement y a contribué) : par la destruction totale de Gaza et la concentration, en un camp, de ses deux millions d'habitants qui y seront affamés, au Sud du territoire, par l'accélération drastique de la colonisation en Cisjordanie, le tout allant avec la transformation de la société israélienne en un Etat policier et totalitaire.
Ajoutons que la séance de longue durée de « ball-trap à Bab-el-Mandeb » – voir à ce sujet monarticle de décembre 2023 – n'a rien à voir avec le « soutien à la résistance palestinienne » mis en avant par les Houthis, et participe d'un grand jeu stratégique renchérissant conditions et tarifs du fret maritime et des compagnies d'assurance, dans lequel les Houthis, qui partagent avec l'Arabie saoudite la mission de réprimer les aspirations démocratiques des Yéménites, sont les instruments combinés de l'Iran, de la Russie et de la Chine, les Etats-Unis menant la bataille maritime contre eux depuis 2023.
En outre, la rive africaine de la mer Rouge, théâtre de la guerre en réalité la plus sanglante de ces dernières années, à peu près totalement passée sous silence, de la part du régime néo-impérial éthiopien contre le peuple du Tigré, suscite les intérêts impérialistes, avec l'Ethiopie, nouveau champ d'investissement de capitaux des « BRICS+ » dont elle est membre, et les Etats fantômes issu de la Somalie où l'administration Trump agite le délire de déporter les Gazaouis …
Or, les affaires croquignolesques de fuites du ministre taré et suprématiste de la Défense américaine, Pete Hegseth : successivement invitation par erreur d'un journaliste non trumpiste sur une boucle de messagerie Signal non sécurisée portant sur les frappes anti-Houthis, boucle comportant Vance et autres hauts dirigeants, dont l'un se trouvait à Moscou, puis nouvelle révélation sur le fait qu'Hegseth partage avec sa famille et son avocat les informations confidentielles sur ce même sujet …, le tout associé à la pénétration de l'appareil d'Etat US par les services russes sous l'administration Trump, ne laisse guère de doute sur le fait que la Russie est parfaitement au courant des gesticulations US en mer Rouge et dans l'océan Indien, censées menacer l'Iran.
Gaza : contre le Hamas et les bombardements israéliens, « Nous refusons de mourir ».
Mer de Chine, Taiwan … et grèves, grèves, grèves.
Concernant la mer de Chine, la menace de guerre pour « reprendre » Taiwan, de la part de la RPC (République Populaire de Chine), s'est accentuée, ce que des exercices et provocations militaires fréquents, ainsi que des opérations de « guerre hybride » ne cessent de manifester, depuis l'arrivée de Trump.
On sait que la ligne générale de Trump, mais pas seulement de lui, était de séparer la Russie de la Chine en livrant l'Ukraine à la Russie. C'est manifestement très mal engagé.
Mais à la tentative d'un ordre mondial antichinois à deux (« duplice » Etats-Unis/Russie) pourrait se substituer, au moins pour un temps, celle d'un partage à trois (« triplice ») incluant la Chine, et lui livrant donc Taiwan en même temps que l'Europe, au moins orientale et centrale, serait livrée à la Russie, et que les Etats-Unis mettraient la main sur l'Amérique du Nord jusqu'au Groenland.
Le transfert, qui est engagé, des ateliers de production de la première firme productrice de semi-conducteurs au monde, TSMC, de Taiwan aux Etats-Unis, faciliterait le « deal » temporaire.
L'érection de la Corée du Nord en acteur de l'ordre impérialiste multipolaire, comme centre de production d'armes et fournisseur de la Russie, suivi de l'envoi de troupes nord-coréennes contre l'Ukraine, a « doublé » la Chine, qui ne contrôle pas Pyongyang, mais a pour l'heure plutôt poussé le régime chinois à renforcer son orientation eurasiatique.
Cependant, intervient depuis le 2 avril dernier, massivement, un facteur supplémentaire, la guerre tarifaire de Trump. Le partage impérialiste du monde est associé à la fragmentation du marché mondial et de la division internationale du travail, combinée à la « mondialisation », reproduisant, dans des conditions aggravées, la situation mondiale de fragmentation des années 1930. Et la première offensive tarifaire était très défavorable à la Chine, en fait destructrice de son commerce extérieur. Elle était, par contre, favorable à la Russie, qu'elle épargnait ainsi que la Corée du Nord, mais l'affectait par ricochet par la déflation des prix pétroliers.
Cette offensive globale a été perdue par Trump : les taux d'intérêts de la dette publique états-unienne se sont mis à monter, l'ensemble de la finance internationale cherchant à s'en dessaisir, signe d'une perte historique de confiance dans la solvabilité de ce qui est encore la première puissance impérialiste mondiale, et facteur d'endettement aggravé pour elle. D'où les manœuvres de recul de Trump qui n'ont cependant absolument pas ramené « la stabilité ». Et, dans le krach boursier des 2-5 avril, la firme TSMC est de celles, avec les « GAFAM », qui ont le plus perdu.
Ces développements donnent l'impression d'une Chine patiente et sûre d'elle et d'un pouvoir qui se joue de cet agité de Trump en voyant loin, lui. Or il faut le dire : cette représentation est fausse. Toute la période de guerre des tarifs commerciaux a vu des signes d'affolement dans les sommets chinois, de longues absences de Xi Jinping et la poursuite de purges concernant les appareils militaires et de sécurité. Mais surtout, il y a une nouvelle vague de grèves en Chine. Je donne ici un long extrait, il le mérite, en traduction de l'italien du très précieux blog d'Andrea Ferrario, qui a lui-même résumé le texte chinois des informations provenant de la chaine Telegram d'un groupe chinois d'opposition dénommé « Bolchevik » :
« L'article des activistes chinois commence par décrire la mobilisation importante des travailleurs de BYD [construction automobile] à Wuxi [près de la côte Sud, au Fujian] et Chengdu [énorme ville au Sichuan] qui, entre fin mars et début avril, ont organisé une grève coordonnée dans plusieurs provinces impliquant des milliers de personnes. Cet événement est identifié comme un modèle pour les luttes ultérieures des travailleurs chinois. Malgré la répression violente des forces de police, qui a temporairement freiné le mouvement, l'expérience accumulée de lutte a continué à prospérer ailleurs, contribuant à construire une base matérielle solide pour la croissance des luttes de classe.
Selon les données recueillies par la plateforme « Yesterday » (yesterdayprotests.com), jusqu'au 22 avril 2025, en plus de la grève de BYD, au moins 17 autres grèves et manifestations à grande échelle ont eu lieu. L'article les énumère méticuleusement, en fournissant des dates, des lieux et les revendications de chacun. Parmi eux se trouvent 200 employés d'hôtel qui ont fait grève à Shenzhen du 31 mars au 20 avril pour réclamer des salaires impayés ; des milliers de travailleurs de l'aciérie d'Anyang dans le Henan, qui ont manifesté le 1er avril pour réclamer leurs salaires et leurs avantages sociaux suite à la fermeture de l'usine ; des dizaines de médecins et d'infirmières de Fuzhou, dans le Jiangxi, se sont rendus au gouvernement de la ville le 7 avril pour réclamer leurs salaires impayés.
La liste continue avec les travailleurs de l'automobile en grève à Wenzhou et Nanjing entre le 7 et le 8 avril ; des centaines de travailleurs d'une usine de conteneurs à Fuqing, dans le Fujian, se sont mis en grève les 9 et 10 avril ; les travailleurs de l'industrie de précision à Shenzhen qui ont organisé une deuxième grève le 10 avril pour exiger des avantages de redéploiement ; des centaines d'ouvrières d'une usine d'électronique à Wuhan, dans le Hubei, qui se sont mises en grève le 10 avril mais ont été réprimées ; et de nombreuses autres manifestations dans diverses villes et secteurs industriels.
L'article se concentre ensuite sur trois cas considérés comme particulièrement significatifs.
Le premier est la lutte des chauffeurs de camions de déchets de construction à Chongqing [autre ville majeure du Sichuan], du 11 au 16 avril. Ces travailleurs, qui font un travail sale et éreintant mais ne reçoivent que des « miettes », se sont regroupés pour protester contre les tentatives du service de gestion de la ville de les exclure du marché de l'enlèvement des déchets ou de les forcer à accepter des salaires inférieurs par le biais d'un système de certification qui favorise les entreprises monopolistiques. Leur action coordonnée dans plusieurs quartiers a conduit le service de gestion urbaine à abandonner temporairement ces pratiques. L'article souligne qu'il s'agit d'un exemple rare de victoire du jour au lendemain dans le contexte économique actuel, attribuant ce succès à la capacité des travailleurs à s'unir au niveau de la ville et à paralyser efficacement la production. Les auteurs émettent l'hypothèse que derrière un tel mouvement organisé, il doit y avoir des dirigeants ouvriers déterminés et des structures organisationnelles efficaces.
Le deuxième cas examiné concerne les manifestations dans une mine chinoise en Indonésie, où le 16 avril des centaines de travailleurs chinois ont entamé une lutte pour récupérer les salaires et les comptes impayés. Inspirés par cette action, les travailleurs indonésiens ont rejoint la grève le 18 avril, démontrant ainsi comment la solidarité internationale peut émerger naturellement des luttes des travailleurs malgré les différences culturelles. L'article souligne comment l'intégration du marché mondial et la migration centralisée de la main-d'œuvre ont créé des intérêts communs parmi les travailleurs de nationalités différentes.
Le troisième cas concerne les ouvriers d'une usine de papier à Zhaoqing, dans le Guangdong, qui ont manifesté du 7 au 22 avril contre les licenciements et les salaires impayés. Face à la police armée qui bloquait l'entrée de l'entreprise, les travailleurs ont réagi par des moqueries collectives en dialecte local [cantonais], démontrant qu'ils ne craignaient pas la répression et manifestant une haine ferme envers la classe dirigeante. Cette attitude est interprétée comme emblématique de l'esprit militant des travailleurs à travers le pays alors que la vague de grèves s'intensifie.
L'article conclut en soulignant que la récession économique et la guerre commerciale mondiale qui ont déclenché la vague actuelle de grèves ne font que commencer, ce qui suggère que les luttes des travailleurs pourraient s'intensifier davantage dans le contexte d'un probable ralentissement économique mondial.
Un texte similaire, mais moins détaillé, a également été publié par le China Labour Bulletin, qui donne également un bref aperçu des luttes de mars. Vous pouvez également y consulter ses cartes détaillées des grèves et des manifestations des travailleurs. Autres sources qui suivent quotidiennement les luttes sociales en Chine : Labor Power et Yesterday [v. ci-dessus], Labor Fact qui publie occasionnellement des informations. La chaîne Telegram du célèbre dissident Teacher Li se concentre principalement sur les phénomènes généraux de protestation et d'insubordination, mais publie également souvent des documents sur les actions des travailleurs. »
Ce sont là des données centrales. Est-il besoin de préciser que ce sont là des grèves économiques, mais qu'en tant que telles leur contenu politique est décisif, chacune constituant un affrontement avec le pouvoir du PCC, le « Parti Capitaliste Chinois » : « La lutte de classe à classe est une lutte politique » (Marx, Misère de la Philosophie).
La grève en Indonésie indique en outre que la lutte des classes en Chine intérieure et la lutte des classes dans toute la région interagissent. Ce sont ces données fondamentales, et non pas les Etats-Unis, qui font avant tout hésiter Xi Jinping et son oligarchie à propos de Taiwan. Ils sont en train de digérer Hong-Kong, et ce n'est pas fini. Taiwan pose un autre problème. Traditionnellement, une vision « anti-impérialiste » considère sommairement que la nation chinoise s'est réunifiée contre les Japonais et les occidentaux et donc que Taiwan en fait partie, mais en fait Taiwan n'a été liée à la Chine que tardivement et épisodiquement et sa population est plus diverse, par la présence de diverses couches de chinois et par celles de peuples austronésiens, que dans les régions chinoises côtières proches. Elle aurait peut-être adhéré à une Chine démocratique, unifiée réellement par en bas, celle pour laquelle combattait le vrai fondateur du communisme chinois, Chen Duxiu, autour du mot d'ordre de constituante. Mais la Chine de Mao, de Deng puis de Xi est restée un empire, qui opprime des nationalités, construit militairement par en haut et qui est devenu un repoussoir pour les Taiwanais, qui doivent être libres de s'autodéterminer. Leur intégration à la Chine de Xi ne pourrait qu'être un écrasement totalitaire. Réciproquement, leur aspiration à l'indépendance peut être une source d'inspiration pour les Chinois continentaux.
Lutte des classes et lutte démocratique sont plus que jamais liées et l'Asie orientale l'illustre avec force : en Corée du Sud, la population et au premier rang la classe ouvrière ont chassé un président qui aspirait à la dictature en se référant à Trump. Mauvaise nouvelle pour Trump, mais aussi pour Xi Jinping, mais aussi pour Kim-Jong-Un.

Grèves de masses en Chine, avril 2025.
Inde/Pakistan, en plus du reste …
Cependant, alors qu'une chaleur mortelle approchant les 50 degrés, au mois d'avril dans l'hémisphère Nord, accable les peuples pendjabi, cachemiri, sindhî … présents de part et d'autre de la « frontière » taillée par la violence en 1947, les chefs d'Etat Modi, en Inde, ethno-nationaliste hindou, affaibli par les dernières élections et par l'effervescence sociale dans le pays, et le premier ministre Sharif, au Pakistan, de la Ligue musulmane, sont tentés par la fuite en avant guerrière pour surmonter les mouvements sociaux et frapper des boucs émissaires dans leurs deux pays.
L'attentat de Pahalgam, au Cachemire, 26 morts le 22 avril dernier, a été saisi par Modi pour intensifier la terreur antimusulmane en Inde et annoncer que le Pakistan allait subir des représailles militaires. Dans l'immédiat, les victimes sont les populations à nouveau expulsées de part et d'autre d'une frontière qui ne vient pas de la lutte des peuples, mais d'une manipulation coloniale relayée par des forces réactionnaires.
Modi doit rétablir une autorité ébréchée et l'Inde, dans le concert de la multipolarité impérialiste, doit s'affirmer. Il joue donc avec le feu, les deux Etats ayant l'arme nucléaire. Chine, Etats-Unis et Iran leur ont demandé de se calmer !
La dynamique d'un éventuel conflit armée indo-pakistanais pousserait la Chine, allié et tuteur économique du Pakistan, à intervenir, ce qui ne semble pas lui convenir à cette étape.
Il n'est donc pas impossible qu'en plus de tout ce qui précède, un « accident » majeur n'éclate aussi de ce côté-là. Cependant, les dirigeants indien et pakistanais sont principalement mus par l'utilisation de leur conflit récurrent pour calmer menaces et contestations internes. Ils ne cherchent pas à entrer dans un conflit armé total. Mais ils sont capables de le provoquer, au risque de déchainer également la révolution dans le sous-continent.
* * *
Les quatre zones dont il vient d'être question sont les plus « sensibles » en raison de la connexion immédiate entre les évènements militaires qui s'y produisent et peuvent s'y produire, et les grandes puissances impérialistes de la planète. Ce sont loin d'être les seules zones de guerre : cet article ne prétend pas à l'exhaustivité.
La situation dans l'Est du Congo, où le Ruanda se comporte comme une sorte de mécano sous-impérialiste et prédateur, ce que ne légitime en rien le fait que son régime ait pris le pouvoir suite au génocide de 1994 ; les tensions en Afrique occidentale notamment entre le Mali et l'Algérie, l'impérialisme russe étant maintenant le gardien prétorien des dictatures au Mali, au Burkina, au Niger, en Centrafrique ; la guerre des factions militaires au Soudan, qui a joué le rôle d'une contre-révolution et qui menace de génocide certains peuples comme les Massalits ; la dictature mafieuse au Venezuela tentée d'opérer une diversion armée au Guyana … : tous ces foyers d'horreurs sont réactivés dans le désordre mondial de l'Axe Trump/Poutine et du grand partage avec Xi.
Ce n'est pas un retour au XIX° siècle, c'est pire : à l'ère au grand réchauffement climatique, c'est la barbarie impérialiste qui arrive. Il est illusoire, où que vous soyez, de croire y échapper. Seule issue, la lutte sociale, bien sûr, et seule perspective réaliste (et non grigri culturel) : la révolution, démocratique et prolétarienne, mouvement réel qui est déjà là car il s'agit de notre survie et de celle de nos enfants. A ces généralités, il convient d'ajouter que la question militaire s'impose dans toute stratégie révolutionnaire. Le survol auquel je viens de me livrer, dans chaque secteur, la pose à sa manière. La question militaire, c'est-à-dire celle des armes pour la révolution et les combats populaires, combinée à celle de leur attitude envers les conflits armées, en toute indépendance de classe, c'est-à-dire de la manière d'intervenir dans ces conflits, qu'elle soit, selon les cas, pacifiste, belliciste, défaitiste ou défensiste.
Or, par-delà l'impression de diversité voire d'éclatement que peut donner le tableau des « points chauds », ils ont un point commun qui est la marque de la réaction sur toute la ligne que constitue la multipolarité impérialiste, c'est l'abaissement de l'Europe.
On voit arriver d'une part la liquidation des restes de possessions « outremer » des puissances européennes. Le Groenland est ici symbolique, dernière possession européenne de très grande taille relevant du continent américain. S'opposer, comme le fait sa population, à la menace étatsunienne, ne conduira pas à réaffirmer son appartenance danoise, mais conduit à sa véritable souveraineté et indépendance.
La France, pour le reste, est en première ligne au plan mondial. On a la liquidation engagée de la Françafrique, qui va conduire au heurt des peuples avec l'impérialisme russe : ce heurt ne ramènera pas la Françafrique, mais est la voie vers la vraie indépendance. De même pour l'outremer française, avec cette anomalie mondiale que constitue le parc français de Zones Economiques Exclusives (ZEE) maritimes : la menace chinoise en Kanaky/Nouvelle-Calédonie n'est évidemment pas un argument contre son indépendance. Mais il est clair que les restes coloniaux européens ne sont pas convoités par les autres impérialismes pour leur assurer la liberté !
D'autre part et surtout, on voit arriver le projet d'asservissement du continent européen lui-même, soit par livraison de l'Europe centrale et orientale à la Russie, soit par soumission de tout le continent via des gouvernements d'extrême droite, éventuellement flanqués de populo-staliniens « de gauche » à la sauce Wagenknecht.
Que l'on se comprenne bien : le fait que les puissances impérialistes européennes soient l'objet d'une tentative les visant de mise hors-jeu, de la part des mastodontes américain, chinois et russe, est en soi indifférent aux intérêts de l'humanité et n'appelle nulle défense des dits impérialismes européens, ancêtres de tous les autres et concepteurs premiers de tous leurs crimes.
Mais le rétablissement d'une domination russe, qui serait le relais des capitaux chinois et du retour partiel des capitaux américains mais exercerait directement son knout, sur l'Est du continent, n'est pas indifférent au « statut » notamment de l'Allemagne, où le spectre de la partition du pays revient à travers la carte électorale, et aussi à la situation de la France, de l'Italie et du Royaume-Uni.
De ce fait, les réflexions du genre « la menace russe concerne les baltes mais pas l'Europe occidentale » sont déplacées et erronées, si l'on comprend qu'il ne s'agit pas seulement de la « menace russe » en tant que telle, mais de la décadence impérialiste comme forme barbare du capitalisme au XXI° siècle, dans le cadre d'un partage du monde qui, lui-même, ne conduira pas à l'entente entre les mastodontes qui se le seront partagés, mais à la guerre entre eux.
Le vrai combat pour empêcher cette guerre, c'est donc le combat pour l'indépendance de l'Europe, mais une Europe non impérialiste. Les forces politiques qui cherchent à réagir dans le sens d'une résistance, d'un réarmement, européens, en gros les libéraux, conservateurs « classiques », démocrates-chrétiens, social-démocrates et écologistes à l'échelle du continent, ne peuvent l'engager vraiment, car leur base est celle de la défense des impérialismes européens.
Il ne s'agit pas de défendre les impérialismes et le capitalisme européens, il s'agit de défendre les conquêtes sociales, démocratiques et culturelles. Et cette bataille sera une bataille centrale de l'affrontement mondial entre les classes. Elle va faire de l'Europe, non pas le foyer de la domination capitaliste et impérialiste qu'elle a été, mais un épicentre révolutionnaire mondial, à rebours de toutes les phrases sur le « Sud global », qui n'existe pas mais dans lequel des dizaines de peuples se battent pour survivre contre le désordre barbare actuel.
L'union démocratique et socialiste des peuples européens comme perspective, et dans l'immédiat la défensive pour sauver les Ukrainiens, les Palestiniens et l'Etat de droit : cette perspective stratégique en Europe, avec sa dimension militaire qui ne sera pas un à-côté mais un aspect essentiel, c'est la forme contemporaine concrète de la révolution prolétarienne et démocratique pour sauver un avenir humain dans un monde habitable.
VP, le 02/05/25.
Source : APLUTSOC https://aplutsoc.org/2025/05/02/notes-sur-la-situation-mondiale-et-les-risques-de-guerres-par-vincent-presumey/
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2000 départs à la retraite : Le gouvernement gère mal ses ressources

Québec, le 1er mai 2025 — Le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) juge que le premier ministre François Legault néglige de bien gérer ses ressources humaines et financières en misant sur le non-remplacement de 2000 nouveaux retraités de l'État cette année.
« Demander aux gens de toujours faire plus avec moins, sans tenir compte de l'expertise des personnes qui partent de surcroît, est une solution simpliste, inefficace et carrément nuisible. Si le personnel a augmenté dans les dernières années, c'est en partie pour répondre aux besoins de la population qui augmente, mais aussi pour gérer la multiplication des programmes et des exigences mis en place par le gouvernement lui-même. Nos membres sont fiers de servir la population québécoise, mais il y a des limites à presser le citron. Plusieurs d'entre eux sont tout simplement au bout du rouleau », souligne Guillaume Bouvrette, président du SPGQ.
Le syndicat rappelle que le non-renouvellement des contrats occasionnels est maintenu également, ce qui donne aussi lieu à des situations particulièrement absurdes. « Le contrat d'une de nos membres du ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs n'a pas été renouvelé, par exemple. Mais comme elle détenait une expertise très pointue que ses collègues n'avaient pas, son ex-employeur lui a offert un contrat comme consultante. Voilà ce qui arrive quand on fait n'importe quoi n'importe comment », déplore M. Bouvrette.
Le gouvernement maintient son gel d'embauche et mise sur des consultants beaucoup plus coûteux pour répondre aux besoins. « On a bien vu avec SAAQclic les dérives qui peuvent survenir quand la sous-traitance devient incontrôlable. Miser sur l'expertise interne serait une mesure beaucoup plus économique, mais elle ne permettrait pas au premier ministre d'adopter un discours populiste en se vantant de couper des fonctionnaires », ironise M. Bouvrette.
En attendant, les exemples de réduction de services se multiplient. « Dans les cégeps, des jeunes auront difficilement accès aux services de psychologues et de conseillers en orientation, par exemple, parce qu'on coupe les heures supplémentaires. À la CNESST, certaines inspections ne se font plus parce que des entreprises sont tout simplement trop loin et qu'on a réduit les dépenses de déplacement. Le gouvernement a même gelé les embauches d'agents de probation responsables du suivi de détenus en liberté conditionnelle, mettant ainsi à risque la population. Quand le gouvernement dit que les services ne sont pas affectés, c'est un mensonge éhonté », dénonce M. Bouvrette.
À propos du SPGQ
Le SPGQ est le plus grand syndicat de personnel professionnel du Québec. Créé en 1968, il représente plus de 35 000 spécialistes, dont environ 26 000 dans la fonction publique, 6 000 à Revenu Québec et 3 000 répartis dans les secteurs de la santé, de l'enseignement supérieur et au sein de diverses sociétés d'État.
Source
Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec
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1er mai : Des rues pleines contre un gouvernement vide d’écoute

Des centaines de personnes se sont rassemblées dans les rues de Montréal, le 1er mai, dans le cadre de la Journée internationale des travailleuses et des travailleurs, afin de dénoncer les mesures d'austérité imposées par le gouvernement Legault, qui s'attaque aux droits de la personne et érode l'édifice social dont s'est doté le Québec.
Tiré de Ma CSQ. Photos : Félix Cauchy-Charest.
Parmi les marcheuses et marcheurs, des militantes et militants de la CSQ ont tenu à prendre part à l'événement, organisé par la Coalition du 1er mai, qui a eu lieu sous le thème « Toujours debout contre l'austérité ».
« Si le gouvernement a fait le choix de l'austérité, ce n'est certainement pas celui des travailleuses et des travailleurs. C'est un film dans lequel le Québec a déjà joué et dont les grands gagnants sont les mêmes qui votent ces mesures d'austérité : le patronat et les plus riches. Et, ô surprise, on retrouve plusieurs de leurs représentantes et représentants au gouvernement », ont déclaré par voie de communiqué les porte-paroles de la Coalition, Dominique Daigneault, du Conseil central du Montréal métropolitain-CSN, et Cheolki Yoon, du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTTI).
Selon la Coalition, dont fait partie la CSQ, les mesures d'austérité fragilisent considérablement la société, les services publics et le filet social, affectant en premier lieu les populations les plus vulnérables. Le gouvernement a choisi de se priver de revenus en appliquant des baisses d'impôt plutôt que d'investir dans les services publics et les programmes sociaux, qui profitent à toutes et tous.
Les organisations syndicales rencontrent le premier ministre
En marge de la Journée internationale des travailleuses et des travailleurs, les représentantes et représentants de la CSQ, de la CSN, de la FTQ et de la CSD ont rencontré le premier ministre, François Legault, afin de discuter du projet de loi no 89. Déposé par le ministre du Travail, Jean Boulet, ce projet de loi vient restreindre le droit de grève des travailleuses et des travailleurs.
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1er mai : Les centrales rencontrent le premier ministre du Québec

Les leaders syndicaux de la FTQ, de la CSQ, de la CSN et de la CSD ont rencontré le premier ministre du Québec et le ministre du Travail dans le cadre de la traditionnelle rencontre du 1er mai, Journée internationale des travailleuses et travailleurs.
Le dossier du projet de loi no 89 sur le droit de grève a fait l'objet de l'ensemble des discussions. Les leaders syndicaux ont rappelé que ce projet de loi remet en question le droit de grève et est une attaque sans précédent contre les travailleurs et travailleuses ! Les leaders syndicaux sont déçus par le manque d'écoute du premier ministre et le ministre du Travail qui rejettent tout dialogue social.
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Comptes rendus de lecture du mardi 6 mai 2025


Manifeste du Parti communiste
Karl Marx et Friedrich Engels
Traduit de l'allemand
Ça m'a toujours déçu qu'on ne nous parle jamais dans nos cours et livres d'histoire de véritables grands moments de notre histoire commune comme le Printemps des peuples, la Première internationale – de son vrai nom l'Association internationale des travailleurs – ou encore la Commune de Paris. Peut-être ce grand déchaînement d'idées nous aurait-il trop permis à nous et à nos pères et mères de rêver d'un monde meilleur ? Ce débat, pourtant si important entre les communistes de Karl Marx, favorables à la gestion centralisée et à la création de partis politiques, et les libertaires anti-autoritaires et anti-politiques réunis autour de Mikhaïl Bakounine, serait fort éclairant, encore et surtout de nos jours. Le « Manifeste du Parti communiste » est un court manifeste qui établi les bases de la pensée communiste, avec les germes d'une dictature du prolétariat comme phase transitoire dans la lutte contre la bourgeoisie... Sa lecture est formatrice. Je ne saurais trop, dans la même veine, vous recommander la lecture des libertaires pour bien connaître l'autre option, l'option libertaire, toujours possible de nos jours, qui s'offrait aussi alors aux travailleurs et aux sans-voix.
Extrait :
L'histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire des luttes de classes.

Le canard de bois
Louis Caron
« Le canard de bois » est un très beau roman et de loin le meilleur des trois de la trilogie de Louis Caron « Les fils de la liberté ». C'est sans doute aussi le plus émouvant qu'on ait jamais écrit sur les événements de 1837. L'histoire raconte la vie de plusieurs personnages du village de Port Saint-François dans les mois précédant la Rébellion de 1837. Hyacinthe Bellerose, le villageois insoumis, Marie-Moitié, son amante métisse, le notaire Plessis, bourgeois canadien fidèle aux autorités coloniales, le major Hubert, député du Parti des Patriotes, le marchand anglais Smith, l'abbé Mailloux, qui condamne la révolte, et le seigneur Cantlie réagissent à ce soulèvement populaire qui sera durement réprimé. Caron insiste dans ses descriptions sur les conditions de vie misérables des paysans canadiens et sur la mainmise des nobles et des commerçants britanniques sur la colonie. Un de nos très bons romans historiques.
Extrait :
Un bleu de fin de jour. La neige commençait à se tasser au pied de bouleaux. Bruno Bellerose finissait de couper des repousses sur le tracé d'un chemin qui n'avait pas servi depuis plusieurs années. C'était sur la concession des McBride, à une heure de marche du camp, à six heures de camion du plus haut relais de la forêt, à quatre heures d'autobus ensuite de La Tuque, la ville la plus au nord, puis à deux heures de train de Trois-Rivières, d'où il fallait encore prendre le Jean-Nicolet, un bon petit bateau blanc, pour traverser le fleuve jusqu'au Port Saint-François, après quoi il restait encore une bonne demi-heure de marche pour arriver à la maison du père, si jamais il vous prenait l'envie de rentrer chez vous.

J'avoue que j'ai vécu
Pablo Neruda
Traduit de l'espagnol
Cette autobiographie a été publiée en 1974, un an après la mort du poète. Parfois drôle et souvent touchante, elle est éclairante sur cette période de l'histoire qui s'étend du début du siècle aux années 1970. J'ai vraiment beaucoup aimé.
En voici un extrait :
Je veux vivre dans un pays où il n'y ait pas d'excommuniés. Je veux vivre dans un monde où les êtres soient seulement humains, sans autres titres que celui-ci, sans être obsédés par une règle, par un mot, par une étiquette. Je veux qu'on puisse entrer dans toutes les églises, dans toutes les imprimeries. Je veux qu'on n'attende plus jamais personne à la porte d'un hôtel de ville pour l'arrêter, pour l'expulser. Je veux que tous entrent et sortent en souriant de la mairie. Je ne veux plus que quiconque fuie en gondole, que quiconque soit poursuivi par des motos. Je veux que l'immense majorité, la seule majorité : tout le monde, puisse parler, lire, écouter, s'épanouir.
Comme si nous étions déjà libres
David Graeber
Traduit de l'anglais
Un autre bon bouquin publié chez Lux sur lequel il y aurait beaucoup à dire. David Graeber sait remettre les choses en perspective et les faits à leur place. Il soutient ici que seule une « véritable démocratie » – basée sur des principes d'égalité, de participation citoyenne et de recherche du consensus – peut nous permettre de jeter les bases de la société juste et équitable que nous souhaitons. Il s'agirait, pour y arriver, de faire comme si nous étions déjà libres.
Un extrait :
La démocratie n'est pas une invention de la Grèce antique. Le terme démocratie a été inventé dans la Grèce antique, je le concède, mais par des gens qui n'aimaient guère le concept. Et la démocratie comme telle n'a jamais été 'inventée'. Pas plus qu'elle n'émane d''une quelconque tradition intellectuelle. Elle n'est pas même une forme de gouvernement. Essentiellement, elle repose sur l'idée que les humains sont fondamentalement égaux et devraient pouvoir prendre leurs propres affaires en main, d'une façon égalitaire, et par les moyens qu'ils jugent les plus appropriés.
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Une histoire du cinéma soudanais : l’art comme résistance politique (1/2)

Dans cette série de deux articles, nous explorons comment le cinéma soudanais a tenté de résister à des décennies de dictature et de violences d'Etat visant à détruire, à travers l'art, l'identité même du pays. Dans ce premier volet, Abeer et Anan Abdulla retracent l'histoire du cinéma soudanais, qu'elles définissent comme un « artivisme », au croisement de l'art et de l'activisme politique.
Tiré du blogue de l'auteur.
Anan et Abeer Abdulla sont des cinéastes soudanaises et des militantes des droits humains qui s'intéressent à la politique et au changement social à travers leur travail artistique. Elles ont commencé leur carrière d'« artivisme » au début de la révolution soudanaise en 2018 et ont été contraintes de demander l'asile en France en 2022. Leur dernier court-métrage « Survivante » évoque le trauma de la jeunesse soudanaise qui a vécu la révolution, puis la guerre et l'exil. Ce texte est issu d'une présentation qu'elles ont faites lors de la journée d'étude « Cinéma soudanais : défis et résiliences » organisée par le groupe de recherche Arts, Médias, Exils (AME) (IRCAV/Sorbonne Nouvelle)[1] le vendredi 28 mars 2025 à Paris.
Qu'est-ce que l'artivisme ?
L'artivisme associe « art » et « activisme », en utilisant la créativité pour susciter des changements sociaux et politiques. Il s'agit de faire de l'art, qu'il soit visuel, musical, performant ou numérique, pour sensibiliser aux droits humains, à l'égalité des sexes et à la justice sociale afin de créer un changement significatif dans la société.
Contexte historique du cinéma soudanais
L'histoire du cinéma soudanais commence avec la période coloniale. La première projection cinématographique de l'histoire du Soudan a eu lieu en 1912. Le film était un documentaire britannique sur l'ouverture de la ligne de chemin de fer entre El Obeid et Khartoum, qui a été projeté à El Obeid.
Le cinéma est né au Soudan comme un outil de propagande coloniale. Le colonialisme britannique a introduit le cinéma au Soudan grâce à son intérêt pour la documentation des événements politiques, sociaux et militaires. L'objectif des colons britanniques était de documenter ce qu'ils présentaient comme leurs « glorieuses réussites » au Soudan. Une unité appelée "Travelling Cinema Section", une camionnette mobile équipée d'un projecteur, a été créée pour projeter des films dans les zones rurales et les petites villes, afin de diffuser des informations sur le pouvoir royal anglais et de promouvoir l'influence britannique.

En 1935, le « Coliseum Cinema » a été construit à Khartoum, l'une des premières salles de cinéma au Soudan. À l'époque, il n'était pas ouvert au public, mais plutôt réservé à l'élite coloniale et soudanaise. D'autres cinémas ont été créés par la suite dans la capitale, tels que « Halfaya » et « Blue Nile », qui ont permis d'introduire le cinéma à la population soudanaise. A l'époque, les Soudanais·es qui s'asseyaient dans les fauteuils du public regardaient uniquement des films étrangers : ils et elles ne voyaient donc le Soudan et le monde qu'à travers les yeux des étranger·es.
Cette situation a perduré jusqu'en 1949, date de la création de la « Sudan Film Unit » ou « SFU », comme nous aimons l'appeler, qui a constitué un véritable tournant.
La première génération de cinéastes soudanais
Au début des années 1950 est apparue la première génération de cinéastes soudanais, c'est-à-dire les premiers Soudanais à s'être approprié le cinéma pour parler des enjeux du Soudan.
La « Sudan Film Unit » a été fondée pour couvrir l'actualité et produire de courts documentaires au service de la colonisation britannique, à l'aide d'une caméra 16mm. Mais les cinéastes Kamal Mohamed Ibrahim et Gadalla Gubara, qui ont rejoint l'unité, se sont approprié la structure pour produire un véritable cinéma soudanais, en écrivant leurs propres scénarios et en produisant leurs propres films. En 1960, La SFU avait ainsi déjà produit plus de cinquante films, la plupart réalisés par Gadalla Gubara.

Grâce aux efforts de Kamal Ibrahim, la section de cinéma itinérante créé par les britannique a été réappropriée par les Soudanais·es, avec pour nouvel objectif de rendre le cinéma accessible à toute la population en organisant des projections dans les zones rurales. Cette première initiative s'inscrit dans un mouvement d'art populaire et engagé pour la société soudanaise. Kamal Mohamed Ibrahim a ainsi écrit aux gouvernements locaux pour les informer de la création du département cinématographique et leur demander de fournir des propositions spécifiques pour produire des courts métrages liés à leurs régions, afin de représenter toute la diversité régionale du Soudan.

Certains réalisateurs de l'époque ont réalisé des courts métrages, des documentaires ou des films d'enregistrement. À l'époque, le cinéma était utilisé pour sensibiliser l'opinion publique sur des faits de société : par exemple, le film « Al-Mankub », sorti en 1952, a permis d'attirer l'attention sur l'épidémie de tuberculose qui se propageait à cette période. La SFU a ainsi joué un rôle-clé dans les campagnes de santé contre les épidémies et dans l'éducation agricole, en documentant la culture du coton et en mettant l'accent la lutte contre les parasites. Ces films ont été très efficaces pour sensibiliser les citoyen·nes à des questions de santé publique et de sécurité au travail.
L'Unité disposait également d'un « Département Oral », dont les membres étaient chargés d'expliquer les films projetés dans les camionnettes de cinéma itinérantes au public qui ne savait pas lire.
La deuxième génération de cinéastes soudanais
À cette époque, l'industrie cinématographique ne bénéficiait d'aucun soutien gouvernemental ou institutionnel. Ce manque de soutien, paradoxalement, a entraîné l'essor des films indépendants :
– En 1970, le premier long métrage soudanais « Amal Wa Ahlam » ("L'espoir et les rêves"), produit par Ibrahim Malasi, a été l'un des premiers films indépendants ;
– L'un des grands réalisateurs de cette génération est Tayeb Mahdi, dont les messages artivistes sont illustrés dans des films comme « Aldarih » (1977), qui traite de l'illusion des croyances religieuses et du contrôle qu'elles exercent ;
– L'une des productions les plus connues de cette génération est le film de Hussein Mamoun Sharif « Aintizae Alkahrman » (1975), qui raconte l'histoire de la ville abandonnée de Sawakin ;
– On peut citer également « Arbae maraat lil'atfali » (1983), sur l'éducation des enfants handicapés au Soudan ;
– Ou encore « Almahata » (1989), qui traite du système capitaliste et de son impact sur les communautés pauvres.

En 1969, Wesal Musa Hassan est considérée comme la première femme cinéaste, non seulement au Soudan mais dans tout le Moyen-Orient. A 18 ans, elle rejoint la "Sudan Film Unit" et travaille sur plusieurs films en tant que camerawoman.

Au cours des années 1980, les politiques du gouvernement du dictateur Jaafar Nimeiry n'ont pas soutenu le cinéma, mais ont au contraire imposé une censure stricte sur les films, mise en œuvre par le ministère des affaires religieuses.
En avril 1989, les cinéastes les plus influents de l'époque, comme Ibrahim Shaddad, Tayeb Mahdi et Manar Al-Hilu ont réussi à créer le « Sudanese Film Group », qui visait à sensibiliser la population à la culture, aux questions de société et à la politique. Le réalisateur Suleiman Mohamed Ibrahim, à la tête du Sudanese Film Group, a déclaré : « L'avenir du cinéma soudanais dépend de la liberté d'expression ». Ces réalisateurs mobilisaient explicitement la caméra comme un outil pour résister à la dictature.

Malheureusement, alors que le cinéma soudanais était en plein développement, le coup d'État du dictateur Omar El-Béshir a mis un frein brutal à cet essor, contrôlant fermement toutes les productions médiatiques et artistiques et arrêtant toutes les personnes soupçonnées d'être des opposant·es politiques.
La troisième génération d'artistes cinématographiques soudanais
Cette troisième génération - la génération actuelle - s'est formée sous le régime des Frères musulmans dans un contexte de suppression de libertés, ce qui a contraint de nombreux cinéastes à produire leurs œuvres en secret.
Malgré la répression très forte, de nombreuses formes de création résistance ont perduré, comme la « Sudan Film Factory », une plateforme de culture cinématographique indépendante, qui rassemble les créateurs soudanais pour renforcer leur capacité de production. Plusieurs films ont réussi à être produits malgré la dictature :
« Nyerkuk » (2016) du réalisateur Mohamed Kordofani, qui parle de la vie d'un enfant des rues ;
« Beats of the Antonov » (2014) de Hajooj Kuka, qui documente le conflit entre le Soudan et les Forces de Soutien Rapide dans les régions du Nil Bleu et des Monts Nouba, en mettant en lumière le rôle de la musique pour aider les communautés affectées à résister culturellement et spirituellement face au conflit en cours.

“L'artivisime” en temps de conflit
Lorsque la révolution a eu lieu en 2018, toutes les formes d'art et d'activisme ont connu un essor spectaculaire, qui s'est traduit par des œuvres d'une immense diversité : les graffitis sur les murs, les poèmes politiques, la musique révolutionnaire... Une nouvelle filmographie a également émergé, permettant de transmettre des histoires de Soudanais·es qui n'avaient pas pu être racontées au cours des 30 dernières années de dictature. Pour la première fois, les cinéastes soudanais·es n'avaient plus besoin de se cacher, et étaient fièr·es de se présenter comme artistes. Quelques exemples de films produits pendant la révolution :
« A Tour in the Republic of Love » (2020) réalisé par Mohamed Kordofani, sur le sit-in devant le siège du commandement général des forces armées pendant la révolution ;
« Khartoum Offside » (2019), un documentaire de la réalisatrice Marwa Zein sur les débuts du club de football féminin à Khartoum.

Lorsque la guerre a commencé le 15 avril 2023, le rôle des artistes soudanais·es a changé. Il est maintenant de notre devoir, en tant qu'artistes et activistes, de documenter et de mettre en lumière le conflit en cours. Nous utilisons la photographie et l'art visuel pour montrer l'impact catastrophique de la guerre et représenter notre identité soudanaise de manière créative. Notre objectif est de s'assurer que le monde sache que notre guerre n'a pas été oubliée de la communauté internationale, mais intentionnellement ignorée. Grâce à notre art, nous rendons impossible le fait d'ignorer nos souffrances. Notre rôle est aussi d'humaniser les victimes de la guerre, montrer les vies des êtres humains derrière les chiffres. Deux exemples nous semblent très inspirants :
Nas Shagala est une campagne d'impact social de la jeunesse soudanaise qui vise à documenter les histoires et les luttes du peuple soudanais pendant la guerre par le biais de films documentaires ;
Ayin Network est un groupe de journalistes activistes, qui couvre les événements dans les zones du Soudan rendues les plus inaccessibles à cause du conflit, notamment au Darfour et dans les montagnes Nouba, difficiles d'accès pour les autres médias. Ils réalisent majoritairement des reportages, mais ont également produit quelques films documentaires.

Conclusion
L'histoire du cinéma au Soudan nous montre que depuis ses débuts, le cinéma soudanais s'est toujours constitué comme un « artivisme », un art né et développé dans le conflit qui a toujours été mobilisé comme outil de résistance. A cause de la particularité de l'histoire soudanaise traversée par les guerres, les révolutions et les dictatures, il est impossible de dissocier la politique de la vie quotidienne. Ainsi, tous les films soudanais parlent du contexte politique, que ce soit de manière explicite ou de manière subtile. Depuis la première génération qui a travaillé pour le changement à partir de l'échelle locale, la deuxième génération qui a lancé l'industrie cinématographique indépendante et la troisième génération qui a travaillé dans des circonstances misérables et dans la clandestinité, le cinéma soudanais a continué et continuera de lutter pour transmettre les histoires qui n'ont pas été racontées.
-------------------
Par Abeer et Anan Abdulla
Traduction : Equipe de Sudfa
[1] Pour en savoir plus sur ce programme de recherche : https://ircav.fr/event/cycle-de-films-et-journee-detudes-cinema-soudanais-defis-et-resiliences/
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Le cas Trump : Portrait d’un imposteur

Un portrait saisissant de Donald Trump autour de trois grands pôles : mensonge, narcissisme et destructivité.
Qui est Donald Trump ? Qu'est-ce qui motive la quête du pouvoir de cet homme que sa propre nièce, psychologue clinicienne, a décrit comme le plus dangereux du monde, et son proche conseiller comme un Hitler américain ? S'appuyant sur une abondante documentation et sa participation à un rallye trumpiste, Alain Roy offre un portrait saisissant et inquiétant du playboy ayant dilapidé l'immense fortune dont il a hérité de son père.
Contrairement à l'image d'homme d'affaires à succès qu'il a voulu projeter tout au long de sa vie et que la téléréalité est venue cristalliser, Trump a fait faillite à maintes reprises. Objet de risée de la part des élites, il s'est fabriqué une identité de « gagnant » pour cacher ses failles et sa honte, jusqu'à se hisser à la tête de la Maison-Blanche. Mais que se passe-t-il lorsque le réel se confronte aux mensonges de l'imposteur ? Jusqu'où peuvent aller sa rage et ses désirs de vengeance ? Dans un contexte où s'agite autour de lui une extrême droite triomphante et décomplexée, ses penchants agressifs et transgressifs forment un cocktail explosif.
À travers les prismes du mensonge, de la faille narcissique et de la dangerosité, Alain Roy plonge au cœur de la psyché de Donald Trump afin de cerner la nature de cette figure politique à la fois grotesque et malfaisante, qui force le monde entier à jouer dans un très mauvais film.
Parution Canada 2025
Parution Europe 2025
Prix 24,00 $/16,00 €
Pages 222
ISBN 9782898570452
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Santé planétaire : Prescriptions médicales pour un environnement sain

Une médecin tire la sonnette d'alarme pour recadrer la crise climatique comme un enjeu de santé.
Claudel Pétrin-Desrosiers
Préface de Dre Joanne Liu
Postface de Jérôme Dupras
« L'un des sentiments que j'ai appris à détester le plus, comme médecin, c'est de savoir que je ne peux pas offrir au patient devant moi ce qui ferait réellement une différence pour lui : un environnement sain. » Voilà le constat qui s'impose à la Dre Claudel Pétrin-Desrosiers lorsqu'elle pratique dans certains quartiers défavorisés de Montréal. Et cette limite de la médecine clinique lui rappelle constamment les défis posés par la triple crise écologique actuelle que sont les changements climatiques, la pollution atmosphérique et le déclin de la biodiversité.
Avec fougue et rigueur, la Dre Pétrin-Desrosiers défend l'approche de la santé planétaire, une démarche scientifique transdisciplinaire selon laquelle notre santé est indissociable de celle des écosystèmes et du monde vivant. Après avoir exposé les conséquences de la crise écologique sur la santé humaine (chaleur extrême, inondations, feux de forêt, mauvaise qualité de l'air, allergies, infections, insécurité alimentaire, écoémotions, déplacements migratoires et instabilité géopolitique), elle défend l'idée que la communication sur ces enjeux mériterait d'être recadrée comme un enjeu de santé – une valeur que tout le monde partage. Selon elle, c'est la meilleure façon de provoquer les changements de société qui s'imposent. Verdissement urbain, exposition à la nature, réduction de notre dépendance aux énergies fossiles, transports actifs et communs, modification de nos régimes alimentaires… Les solutions qu'elle préconise nous libèrent en plus d'une vision strictement curative et individualiste de la santé.
En fait, l'approche de la santé planétaire reprend une idée toute simple : celle de vivre en harmonie avec la nature. Comme le souligne la Dre Joanne Liu dans la préface, « ce livre est un excellent vaccin contre le “climatoscepticisme” et contre notre apathie face à la triple crise écologique ».
Parution Canada 2025
Prix 25,00 $
Pages 224
ISBN 9782898570643
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Combattre la gentrification : Témoignage d’une ex-conseillère municipale

Le témoignage qu'offre Sophie Thiébaut dans Combattre la gentrification est d'abord celui d'une ancienne élue de la politique municipale, conseillère dans le Sud-Ouest de Montréal pendant plus d'une décennie. Forte de cette expérience, l'autrice dresse un bilan nuancé mais sans concession du travail politique de « proximité ». Elle raconte également les débuts de Projet Montréal, son évolution de petit parti politique d'opposition à parti au pouvoir en 2017, ainsi que la transformation de la question du logement au sein de la formation politique.
Combattre la gentrification, c'est ensuite et surtout le récit d'une « citoyenne ordinaire » qui, comme des milliers d'autres locataires, subit les impacts destructeurs de la gentrification. Quartier par quartier, projet par projet, Sophie Thiébaut évoque les mutations radicales qui ont affecté les secteurs longeant le canal Lachine et qui, dans certains cas, ont pu être ralenties, voire bloquées par l'action populaire. C'est pourquoi l'autrice en appelle à des mobilisations collectives pour préserver nos quartiers de la spéculation immobilière.
Parution : Mai 2025
Prix :
Pages :
Format : 4,5 x 6,75 pouces
ISBN : 978-2-924924-48-8
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Mobilisation : Organiser la lutte des classes en milieu de travail

De 1971 à 1975, la revue Mobilisation a joué un rôle structurant dans la recomposition de la gauche québécoise. Désireuse de rompre avec un militantisme qu'elle juge désorganisé, l'équipe de la revue cherche à combler la distance idéologique et culturelle qui la sépare des travailleur·ses.
Si Mobilisation publie des textes d'analyse politique et des articles de fond sur les enjeux internationaux, l'originalité de sa contribution réside dans sa réflexion sur les différentes stratégies de liaison entre les intellectuel·le·s et le mouvement ouvrier et, plus particulièrement, dans ses bilans pratiques sur l'implantation dans les lieux de travail.
Au fil de leurs expériences dans les usines et les hôpitaux, les militant·e·s de Mobilisation ont élaboré une approche singulière de l'implantation, centrée sur la création de comités de travailleurs, et ont ainsi contribué à démocratiser – voire à radicaliser – les luttes ouvrières de l'époque.
Cinquante ans après la parution de son dernier numéro, à l'heure où la combativité du mouvement syndical souffre de la bureaucratisation des grandes centrales, cette anthologie des réflexions stratégiques de Mobilisation éclaire les possibilités et les défis de la jonction entre les militant·es de gauche et les travailleur·euses du Québec.
Textes choisis et présentés par Guillaume Tremblay-Boily, auteur d'une thèse de doctorat sur l'implantation marxiste-léniniste.
En librairie dès juin 2025
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Lutter contre l’effacement : les archives soudanaises face à la guerre (2/2)

Dans cette série de deux articles, nous explorons comment le cinéma soudanais a tenté de résister à des décennies de dictature et de violences d'Etat visant à détruire, à travers l'art, l'identité même du pays. Face à cet effacement, des artistes, militant·es et archivistes, comme la réalisatrice Sara Suliman, se battent pour conserver les traces de l'histoire du Soudan et lutter contre l'oubli.
Tiré du blogue de l'auteur.
"Sudan's forgotten films" - Les films oubliés du Soudan
Fin mars, nous sommes plusieurs de l'équipe de Sudfa à nous être rendu·es à la rencontre « Cinéma soudanais : défis et résiliences » organisée par le groupe de recherche Arts, Médias, Exils (AME) (IRCAV/Sorbonne Nouvelle)[1] à Paris.
Un des premiers films projetés était « Sudan's Forgotten Films » de Suhaib Gasmelbari (2014). Il nous plonge dans le quotidien de deux archivistes : Awad et Benjamin. Ces deux hommes âgés, figures historiques du cinéma soudanais, se battent pour sauver les archives cinématographiques du pays.
« Le Soudan a parmi les plus nombreuses archives de cinéma en Afrique », affirme l'un d'entre eux. Mais cette collection inestimable a souffert de décennies de négligence : stockée dans de mauvaises conditions, elle a subi les dégradations du temps. Dans le film, on voit les deux vieillards écrire de façon répétée au gouvernement pour demander des outils adaptés, comme un système de refroidissement, et le supplier de recruter des ouvriers pour les aider à transporter les nombreux cartons.

Mais le gouvernement d'Omar El-Béshir fait la sourde oreille. Entièrement dévoués à sauver ces archives, les deux hommes travaillent sans relâche, bénévolement, achetant eux-mêmes le rouleau de scotch pour réparer les bandes abîmées. A eux seuls, ils sont les gardiens de plus de 13 000 films, dont une grande partie n'ont jamais été visionnée. Les deux vieux amis tiraient la force de leur combat dans cette croyance inébranlable, exprimée par Awad dans le documentaire : « Il ne faut pas qu'on perde ces films, parce qu'il faut que les enfants du Soudan connaisse leur histoire. Quand tu n'as pas d'histoire, tu n'es personne ».
Le visionnage de « Sudan's Forgotten Films » a ouvert des discussions sur le devenir des archives cinématographiques soudanaises qui se sont poursuivies durant toute la rencontre. Ce film très émouvant rappelle les dommages inestimables causés par la dictature d'Omar El Béshir, resté plus de 30 ans au pouvoir, sur l'art et la culture au Soudan. Il nous rappelle aussi que la violence du régime, si elle a pu prendre des formes de répression brutale, a également pu opérer de manière plus silencieuse, à travers l'abandon du soutien aux artistes et archivistes et la négligence du patrimoine culturel du pays.
Sara Suliman, réalisatrice, mobilise les archives dans son travail de cinéaste. Elle témoigne des nombreuses barrières que l'administration d'El Béshir a placées sur son chemin pour l'empêcher d'avoir accès aux archives visuelles, et de l'état de dégradation dans lequel elle a trouvé les cartons qui contenaient des photographies et des bandes vidéographiques d'une valeur exceptionnelle :
« Ils étaient couverts de poussière, et très abîmés par la saleté », décrit-elle avec colère. « Le Soudan était sous une dictature militaire pendant 30 ans, qui a détruit l'art, opprimé les artistes de toutes les disciplines, et particulièrement les cinéastes. Parce que l'art, c'est du pouvoir, et ils le savent. Il y a des générations extraordinaires, avec une grande créativité, qui ont été réprimées. Les histoires étaient là, les idées étaient là, mais tout était réprimé. Les artistes soudanais ont beaucoup plus de choses à mettre en avant. »
La révolution de 2018 : filmer la liberté, retrouver les traces de l'histoire soudanaise
Dans une interview à Sudfa, Sara Suliman raconte le tournant qu'a constitué la révolution de 2018 : « Puis la révolution est arrivée, et a ouvert un moment de liberté. Il n'a pas duré, mais c'était comme prendre une respiration. Quand tu as connu la liberté, c'est difficile qu'on te la reprenne. »
Quand la révolution est arrivée, elle tournait son film Heroic Bodies (2022) : « Je filmais le "Zar" c'est une pratique religieuse considérée comme superstitieuse par le gouvernement soudanais (…) qui utilisait la religion comme prétexte pour opprimer la population. Pendant ces 30 ans ils ont interdit le "Zar", c'est un rituel pendant lequel les femmes dansent avec des percussions très fortes, pour faire ressortir les esprits mauvais en exauçant certaines de leurs demandes. Cette pratique était interdite, mais après la révolution, pendant une année de liberté avant que le coup d'État qui a repris le pouvoir aux civils, les femmes ont pu le pratiquer, et j'ai pu le filmer. Dans cet extrait de film, on peut voir les femmes danser, reprendre place dans l'espace, créer un espace safe. On a commencé cette fête à 10 heures du matin et jusqu'à 7 heures du soir ça continuait encore ! C'est cette liberté que les artistes et les personnes créatives ont trouvé pendant la révolution. C'est pourquoi tant de choses se sont passées cette année-là, plein de films sont sortis, plein d'idées se sont développées. »

Elle explore dans son travail l'intersection des multiples formes de violences (physique, politique, structurelle) auxquelles sont soumises les femmes soudanaises, mais aussi la manière dont les femmes utilisent leurs corps pour résister, et la transmission de ces luttes à travers les différentes générations de femmes. Pour elle, l'accès aux archives est également un enjeu féministe : « Nous, les femmes soudanaises, nous avons besoin qu'on nous garantisse l'accès à l'information. C'est notre droit. Il faut des lois fortes qui soient mises en place pour nous garantir ce droit à connaître notre histoire. »
Grâce au combat de quelques cinéastes soudanais·es, des projets de numérisation ont vu le jour à la fin de la dictature d'Omar El Béshir, financés par des universités étrangères (Durham Université et King's College), à travers des projets comme le site internet « Sudan Memory ». Mais ces projets, portés par des institutions étrangères, posent aussi la question de la colonialité dans la gestion des archives du Soudan.
Rashid Saïd, ancien ministre de la Culture pendant le gouvernement de transition suite à la révolution (2019-2021), et présent lors de la rencontre à Paris, affirme que des projets de numérisation des archives ont avancé pendant cette période avec plus de 100 000 photographies qui ont pu être numérisées et mises en ligne sur un cloud. « Le gouvernement de transition avait voulu faire une loi pour développer le cinéma. On a projeté le film "Sudan Offside" à Khartoum », déclare l'ancien ministre. « On avait fait un comité avec les anciens cinéastes, les nouveaux, la société civile… Mais le coup d'Etat militaire a mis fin à tous ces projets.

Détruire les archives, détruire l'identité nationale
Le coup d'État militaire de 2021, puis la guerre qui a éclaté le 15 avril 2023, ont porté brutalement atteinte à la préservation de ces archives. La tragédie est évoquée par de multiples participant·es à la rencontre : malgré les projets de numérisation qui avaient été mis en place, malheureusement, le gouvernement soudanais n'a jamais donné son autorisation pour que les disques durs sortent du pays. Les disques durs sont donc restés sur place, aux archives nationales à Omdurman.
En plus des nombreuses destructions de bâtiments provoquées par les combats, depuis le début de la guerre, les Forces de Soutien Rapide (milice paramilitaire, autrefois alliée de l'armée soudanaise, qui affronte aujourd'hui l'armée) ont procédé méthodiquement au pillage et à la destruction de tous les espaces culturels. Ces dernières semaines, suite à la reprise de la capitale, Khartoum, par l'armée soudanaise, les Soudanais·es du monde entier ont constaté avec effroi que l'intégralité du musée national avait été pillé, ne laissant que quatre statues à l'intérieur. Les œuvres volées dans les musées, qui sont les rares témoignages de l'histoire du Soudan, ont été revendues sur Internet par les mercenaires, afin de financer la guerre ou pour leur enrichissement personnel.

Dans l'assemblée, tout le monde se demande ce qui a bien pu arriver aux archives nationales, mais les participant·es ne sont pas optimistes. « Si elles sont dans le même état que celui dans lequel on a retrouvé le siège national de la télévision… » murmure une des participantes soudanaises, faisant référence à la destruction de ce bâtiment occupé par les Forces de Soutien Rapide (RSF) depuis le début de la guerre. Les acteurs de la guerre, en s'attaquant au patrimoine culturel et mémoriel du Soudan, ont mené une attaque brutale contre l'identité du pays.
Repenser le travail des cinéastes en temps de guerre
Pour Sarah Suliman, les archives jouent un rôle central dans la résistance de la population soudanaise face à la guerre : « La guerre nous a fait prendre conscience de l'importance des archives et l'importance de la documentation. Dans cette guerre, les RSF détruisent les musées, détruisent les archives nationales, détruisent les archives télévisées du ministère de la culture et de l'information… On a l'impression que c'est une guerre contre l'identité. Être menacé·es de perdre notre identité, qui nous sommes, est une question essentielle pour nous. C'est pourquoi il faut que l'on contre-attaque. Nous avons une diversité extraordinaire, une histoire extraordinaire, nous ne pouvons pas perdre cela. Nous devons nous défendre et les empêcher de nous effacer de l'univers. »

Cette question est venue également transformer le travail des artistes soudanais·es : « La plupart d'entre nous, maintenant, nous essayons de sauver ce qui reste – c'est pourquoi j'étais heureuse de découvrir ce film aujourd'hui – parce que c'est de la documentation de l'histoire, d'une histoire précieuse. Parce que la mémoire est tout. C'est tout ce qui compte. C'est infiniment précieux », affirme Sara Suliman. « Comme nous faisons face à une crise d'identité, parce que nous sommes en train de perdre notre identité, il faut que nous travaillions là-dessus. Ça nous pousse à nous focaliser, dans notre travail, sur la question culturelle, et nous rappelle l'importance de documenter. Même si on fait de la fiction, ça doit être à propos du Soudan, et de tous les détails de notre identité. Parce que même si c'est de la fiction, c'est aussi de la documentation. »
Ainsi, lutter contre la disparition des archives, c'est lutter contre l'effacement de l'histoire et de la culture soudanaise. Mais comment protéger ces archives de la destruction quand on est exilé·e, loin de son pays ? Comment la population locale peut-elle se soucier du sort des archives, alors qu'elle est confrontée à la famine et à des questions de survie immédiate ? Pour les exilé·es soudanais·es présent·es lors de la rencontre, à travers cette lutte pour conserver la mémoire du pays, c'est toute la question de la transmission des connaissances et de la culture soudanaise pour les générations futures qui est en jeu.
Par Equipe de Sudfa
[1] La rencontre a eu lieu qui avait lieu du 27 au 30 mars 2025 à Paris. Pour en savoir plus sur ce programme de recherche : https://ircav.fr/event/cycle-de-films-et-journee-detudes-cinema-soudanais-defis-et-resiliences/
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Elinor Hammarskjöld, la conseillère juridique de l’ONU, rappelle à Israël son obligation d’acheminer l’aide humanitaire à Gaza
Devant la Cour internationale de justice (CIJ), à La Haye, la secrétaire générale adjointe aux affaires juridiques de l'ONU, Elinor Hammarskjöld, a rappelé les obligations d'Israël en vertu du droit international : celle de permettre et de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire à la population gazaouie.
Tiré de l'Humanité
https://www.humanite.fr/monde/bande-de-gaza/elinor-hammarskjold-la-conseillere-juridique-de-lonu-rappelle-a-israel-son-obligation-dacheminer-laide-humanitaire-a-gaza
Publié le 28 avril 2025
Antoine Portoles
À Gaza, le nouveau blocus humanitaire orchestré par le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou entre ce mardi 29 avril dans son 59e jour. La veille, la secrétaire générale adjointe aux affaires juridiques de l'ONU, Elinor Hammarskjöld, a plaidé devant la Cour internationale de justice (CIJ), à La Haye (Pays-Bas), dans le cadre une semaine d'audiences consacrées aux obligations humanitaires d'Israël envers le peuple palestinien.
L'État d'Israël, en tant que puissance occupante, a une responsabilité claire en vertu du droit international : celle de permettre et de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire à la population gazaouie. « Ces obligations impliquent d'autoriser et d'aider toutes les entités compétentes des Nations Unies à mener leurs activités au profit de la population locale », a affirmé Elino Hammarskjold au siège de la plus haute juridiction onusienne, à La Haye.
Aux côtés de l'arrière-petite-fille d'un ancien premier ministre suédois, le représentant de Palestine auprès des organisations internationales, Ammar Hijazi, a notamment affirmé que ce blocage systématique était utilisé telle une « arme de guerre » dans la bande de Gaza. À l'issue de ces audiences, les juges prononceront un avis juridique sur ce qui incombe à la puissance coloniale vis-à-vis des agences onusiennes et de tous ceux engagés dans la fourniture de l'aide humanitaire.
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30 avril 2004 : Haïti sous tutelle, la souveraineté bradée
Il y a 21 ans, jour pour jour, le 30 avril 2004, le Conseil de sécurité des Nations Unies adoptait à l'unanimité la résolution 1542, entérinant la création de la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti). Cette mission, présentée comme une solution de paix, marquait en réalité le début d'un long cycle d'ingérence internationale, d'occupation déguisée et de dérives qui ont durablement affaibli l'État haïtien.
Une souveraineté suspendue
La résolution 1542 faisait suite au renversement, le 29 février 2004, du président constitutionnel Jean-Bertrand Aristide. Ce coup d'État, cautionné par des puissances étrangères, a ouvert la voie à une mise sous tutelle complète du pays, sous prétexte de stabilisation. Les forces onusiennes, arrivées sur le sol haïtien avec l'étiquette du maintien de la paix, se sont progressivement imposées comme des acteurs de premier plan dans les affaires internes du pays, reléguant les institutions nationales au rang de figurants.
Une mission controversée
Pendant plus d'une décennie, la MINUSTAH a été synonyme de bavures, de violences sexuelles, de violations des droits humains, et surtout d'un désastre sanitaire majeur : l'introduction du choléra, qui a fait des dizaines de milliers de morts. Ce triste épisode reste un stigmate indélébile dans la mémoire collective haïtienne, révélateur du mépris dont ont souvent fait preuve certaines puissances à l'égard du peuple haïtien.
Une leçon ignorée
Vingt-et-un ans plus tard, les blessures sont encore ouvertes. Pire, l'histoire semble se répéter. Alors que le pays traverse une crise sans précédent, des voix s'élèvent de nouveau pour appeler à une intervention internationale. Mais peut-on réellement reconstruire un pays sans respecter sa souveraineté ? Peut-on restaurer la paix sans justice, ni mémoire ?
En guise d'avertissement
Le 30 avril 2004 doit rester une date d'alerte, un moment de lucidité pour rappeler que toute prétendue stabilisation imposée de l'extérieur finit par créer plus de fractures que d'unité. Haïti n'a jamais manqué de ressources humaines ni de volonté populaire : ce qui lui a manqué, c'est qu'on la laisse respirer, décider, reconstruire par elle-même et pour elle-même.
À ceux qui parlent aujourd'hui de solutions, souvenez-vous du 30 avril 2004. Ne répétez pas les erreurs d'hier.
Smith PRINVIL
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Haïti : La jeunesse prend la rue, la révolte s’organise
Port-au-Prince, 3 mai 2025 – En Haïti, le désespoir n'est plus silencieux. Il gronde. Il s'organise. Il se transforme en appel à l'action. À la veille d'une grande mobilisation citoyenne prévue pour ce dimanche 4 mai, deux figures de la jeunesse haïtienne se dressent contre le système : Stevenson Telfort, alias Atros, chanteur du groupe Rockfanm, et Madame Francesse Baptismé, porte-voix du Mouvement Jeunesse Debout.
Ils lancent ensemble un cri d'alarme, un appel au réveil citoyen, face à ce qu'ils qualifient de « dérives graves du gouvernement », de dévoyage de la jeunesse, et d'une instabilité généralisée qui gangrène le pays. Selon eux, trop c'est trop. Le peuple ne peut plus rester spectateur d'un effondrement qui menace sa dignité et son avenir.
Depuis des années, la gouvernance haïtienne s'enlise dans le mépris des plus jeunes. Le chômage endémique, la fuite des cerveaux, la montée des gangs, l'effondrement des institutions éducatives et sanitaires, tout cela compose un quotidien intenable pour une majorité de la population, dont plus de 60 % a moins de 30 ans.
Mais que fait l'État ? Il s'enferme dans ses privilèges, s'accroche à ses routines bureaucratiques, multiplie les démonstrations de pouvoir sans vision. Pendant que des milliers de jeunes risquent leur vie en mer ou croupissent sans perspectives dans les quartiers populaires, les élites vivent dans une autre réalité, coupée du peuple, aveugle aux cris de détresse qui montent des rues.
C'est à cette rupture brutale qu'Atros et Francesse Baptismé veulent répondre. Leur appel dépasse les clivages partisans. Il vise à replacer la jeunesse au cœur de la nation. « Il n'y a pas d'avenir sans jeunesse », martèle la militante. « Et il n'y a pas de citoyenneté sans justice sociale, sans éducation, sans inclusion », ajoute le chanteur, connu pour ses textes politiquement tranchants.
La marche prévue ce dimanche n'est pas une simple démonstration de force. C'est un acte de foi. Une résistance. Une proposition. Celle d'un pays qui veut se relever à travers ceux qu'il tente d'étouffer.
“Nous ne marcherons pas pour demander, nous marcherons pour affirmer”, disent-ils. Car cette mobilisation vise à dénoncer un mode de gouvernance instauré sans la jeunesse, contre la jeunesse, mais aussi à proposer une autre voie : celle de la solidarité, de la justice et de la responsabilité collective.
Ce 4 mai, Port-au-Prince pourrait redevenir ce qu'elle n'aurait jamais dû cesser d'être : une ville debout. Un peuple debout. Une jeunesse debout.
Smith PRINVIL
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"La pensée Wittig : une introduction"

Natacha Chetcuti-Osorovitz vous présente son ouvrage "La pensée Wittig : une introduction", co-écrit avec Sara Garbagnoli, aux éditions Payot.
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1er mai : une mobilisation imposante à Paris et partout en France.

Arrachée non sans peine, la journée de lutte du 1er mai 2025 ne se limite, désormais, pas à la célébration des conquêtes sociales, leur revendication, mais à l'extériorisation d'une indignation collective permanente contre le système capitaliste, le génocide et le racisme. Plus de 300.000 personnes dont 100.000 à Paris ont battu le pavé.
De Paris, Omar HADDADOU
L'Intersyndicale a sorti la grosse artillerie, en ce 1er Mai, ! Les revendications étant nombreuses, elles requièrent un second souffle. Dans une France terrassée par une dette publique abyssale (plus de 3 Milliards d'euros), l'exécutif se complait dans sa politique extérieure conquérante et élogieuse vis-à-vis du patronat, tournant le dos au peuple. Aussi sont ils relégués au second plan, le génocide à Gaza, le racisme, le pouvoir d'achat, la retraite à 60 ans, les impôts, les conditions de travail, les licenciements, etc.
La Journée Internationale des Travailleurs (es), ce jeudi, à Paris a été un moment de « flagellation » et d'injures à l'égard du parti socialiste (PS) d'Olivier Faure. La formation, rappelons-le- s'est tirée une balle après que son leader a rallié la Macronie avec reptation. D'où la prise à partie en ce 1er mai, Boulevard de l'Hôpital, du Député Jérôme Guedj (exfiltré) et ses collègues par les militants antifascistes et les Black-Blocs, proférant des insultes : « Collabos ! Fachos ! Cassez-vous ! ».
Hormis cet incident, 270 cortèges (300.000 personnes) se sont ébranlés dont celui de Paris et ses 100.000 manifestants, entre Place d'Italie et celle de Nation. Des banderoles, des pancartes, et dans la foulée du cortège, une multitude des tags. Au sein de la procession, on peut lire :
« Les racistes, ça dégage ! Taxer les riches ! Non au racisme ! Stop génocide à Gaza ! L'argent pour les salaires, pas pour les guerres ! L'argent pour les pensions, pas pour les marchands de canons ! Des sous pour les grands parents pas pour l'OTAN ! Mettre au pas le grand Capital, faire revivre la République sociale ! Elle n'est pas terminée la Révolution française, Macron, Macron, souviens-toi Louis seize ! »
Dans ce système de rapacité capitaliste où 1% de la population contrôle plus de 25% de la richesse nationale, les profits des entreprises, selon une source syndicale, explosent. La guerre en Ukraine et le génocide en Palestine constituent une opportunité singulière pour l'industrie française de l'armement. Thales et Dassault Aviation ont vu leurs commandes exploser. En adoptant la Loi Programmation Militaire (2024-2030), le gouvernement a gonflé le budget pour ce secteur dans un contexte de tensions savamment entretenu. Au moment où la Santé et l'Education accusent des coupes budgétaires criantes, une somme déroutante de 413 milliards d'euros est consacrée à l'armement. En vertu de « l'effort de guerre », Macron a opté pour la paupérisation de la masse populaire au profit d'une poignée de puissants magnats de la Finance.
La tribune frappée du slogan « Pour la Paix, contre la guerre sociale », Mélenchon, chef de file de La France Insoumise (LFI), tonne : « Le 1er Mai est un rassemblement politique où s'exprime l'Unité des Travailleurs (ses) de la classe ouvrière. Le travail dont nous parlons est celui qui dispute au capital sa part de richesse ! »
Le Ton coléreux, la gestuelle à l'avenant, il poursuit : « quoi qu'il arrive, nous continuerons cette bataille pour les 8 heures de travail, pour la semaine des 35 heures, et pour la retraite à 60 ans qui demeure l'objectif et la valeur qui nous ont été volés ».
Rebondissant sur l'ancrage de la haine envers la communauté musulmane, Mélenchon fulmine : « Oui, j'ai dit Islamophobie, c'est-à-dire une chose qui tue. C'est de la folie ! Une folie qui va au bout du racisme ! »
Et De s'égosiller avec autant de rage : « La guerre est toujours le fléau qui foudroie les mêmes. Les peuples manifestent leur refus de la guerre et leur envie de vivre. Vivre ! Vivre ! Comme on voudrait vivre et survivre à Gaza, en dépit du génocide ! Que tous les Gazaouis (es)sachent que notre coueur est avec eux. Que l'horreur nous serre la gorge ! »
De la grève générale du 1er mai 1886, insufflée par les Anarchistes au pays de l'oncle Sam, à la Résistance du peuple palestinien, un seul combat : déconstruire le mythe de la domination et sa puissance de feu, par la Solidarité !
O.H








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