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Soyons clivants !

29 avril, par Hélène Bissonette — , ,
Devenir une voix de la classe ouvrière, dénoncer le capitalisme, c'est nécessairement être « clivant » et s'aliéner les riches. Tant que QS reste incapable de prendre cette (…)

Devenir une voix de la classe ouvrière, dénoncer le capitalisme, c'est nécessairement être « clivant » et s'aliéner les riches. Tant que QS reste incapable de prendre cette posture, il se condamne à l'insignifiance.

Hélène Bissonnette

Tiré du web Révolution Communiste

jeu. 24 avr. 2025

Le 16 avril dernier, je suis allée à la conférence « Comment combattre les droites ? » avec Jean-Luc Mélenchon, le leader de la France Insoumise qui était de passage à Montréal, et Ruba Ghazal, la co-porte-parole de Québec solidaire.

Pour lutter contre la droite, la première chose que la gauche doit faire c'est de s'assumer en tant que gauche, a dit Mélenchon. Dans un contexte où la direction de QS modère son discours depuis des années, et plie sans cesse sous le poids de l'establishment capitaliste, j'ai trouvé cela rafraîchissant à entendre.

Ensuite, interrogé par Ghazal sur l'approche que QS et la gauche devraient prendre par rapport aux médias, Mélenchon a dit qu'il ne fallait pas pleurnicher que les médias ne soient pas nos alliés. « Ils sont dans l'autre camp », a-t-il dit. Il faut « renoncer à être bien vu », et « accepter d'être clivant ». Sans le savoir, Mélenchon a mis le doigt sur le problème de QS, qui cherche à garder une image « respectable » aux yeux de l'establishment politique.

Il a insisté sur la nécessité de « faire confiance à l'intelligence populaire » afin d'éventuellement déceler les mensonges de la droite contre la gauche. Mélenchon n'est certes pas un communiste, mais son message fait écho à une vérité profonde pour tout révolutionnaire : sachant que nous avons les bonnes idées et ayant pleinement confiance dans la classe ouvrière, jamais nous ne devrions avoir peur d'être clivants et de défendre nos idées haut et fort. C'est la seule façon de rallier des masses de gens à nos idées.

Cependant, le lendemain de cette conférence, Ruba Ghazal a donné une entrevue dans laquelle elle a expliqué ce qu'elle en a retiré. Ayant appris que la gauche doit « s'assumer », elle affirme cependant son désaccord avec Mélenchon sur une question : « En France, être clivant, ici au Québec, ce n'est pas la même chose. C'est-à-dire que la recherche du consensus social, ça fait partie des valeurs québécoises. »

Autrement dit, Ghazal n'a rien compris de ce que Mélenchon a expliqué. Surtout, elle n'a rien appris des déboires de QS. Le parti croupit dans les sondages précisément parce que la direction du parti s'imagine bêtement qu'il existe une telle chose qu'un « consensus social » et évite d'écorcher l'establishment détesté. Les efforts de QS pour plaire à tout le monde – alors que le capitalisme est de plus en plus discrédité – font en sorte qu'il ne plaît à personne.

En réalité, la société est clivée : en classes. Il y a les travailleurs et les pauvres d'un côté, et la minorité de riches banquiers et patrons de l'autre. Devenir une voix de la classe ouvrière, dénoncer le capitalisme, c'est nécessairement être « clivant » et s'aliéner les riches. Tant que QS reste incapable de prendre cette posture, il se condamne à l'insignifiance.

Cela dit, par-delà la grande éloquence de Mélenchon et son discours beaucoup plus acerbe que Ghazal contre la classe dirigeante, il n'a présenté aucun vrai plan pour lutter contre la droite, ni pour nous sortir de la crise du capitalisme. C'est malheureusement là où QS et La France insoumise se rejoignent. Si Mélenchon est très critique des vieux partis de gauche qui ont, a-t-il dit, « accepté le capitalisme », il n'a lui-même aucun plan pour sortir de ce système.

Ce qui manque pourtant à la gauche pour lutter contre la droite, c'est de proposer une véritable solution de rechange à la misère capitaliste. Cela passe par un programme socialiste, qui puisse couper court à la rhétorique de la droite « anti-establishment » et rallier des masses de jeunes et travailleurs. C'est ce discours pleinement « clivant » que nous, communistes, défendons fièrement !

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La CAQ nous handicap !

29 avril, par Ex Aequo — , ,
La CAQ nous handicape ! C'est le titre de notre campagne. Cette image illustre un visuel qui met de l'avant le titre et une France-Élaine Duranceau en parodie. Tiré du site (…)

La CAQ nous handicape ! C'est le titre de notre campagne. Cette image illustre un visuel qui met de l'avant le titre et une France-Élaine Duranceau en parodie.

Tiré du site web Ex Aequo

En novembre dernier, le gouvernement du Québec annonçait la suspension temporaire du Programme d'adaptation de domicile (PAD), invoquant un manque de financement. Cette mesure, qui passe inaperçue pour une grande partie de la population, a pourtant des répercussions majeures sur la vie quotidienne de milliers de personnes en situation de handicap et de personnes âgées. En leur permettant d'adapter leur logement à leurs besoins spécifiques, le PAD garantit leur autonomie et leur sécurité, tout en contribuant à leur maintien à domicile.

La suspension de ce programme représente bien plus qu'un simple retard administratif : elle signifie des mois, voire des années d'attente supplémentaires pour des personnes qui ne peuvent plus utiliser leur salle de bain de façon sécuritaire, qui peinent à entrer et sortir de chez elles sans assistance, ou qui risquent des chutes aux conséquences irréversibles. Pire encore, cette interruption temporaire risque d'alourdir davantage un système déjà engorgé, créant un effet domino qui compliquera la reprise des services lorsque la suspension sera levée.

Dans cette lettre adressée aux décideurs politiques, nous soulignons les dangers de cette décision et l'urgence d'un réinvestissement immédiat. Non seulement la suspension du PAD compromet la qualité de vie et la dignité des personnes concernées, mais elle entraîne aussi des coûts sociaux et économiques bien plus élevés à long terme. Il est impératif que les responsables politiques prennent position pour assurer le rétablissement et le financement adéquat de ce programme essentiel.

Ex aequo vous invite à signer cette lettre. Vous pouvez aussi la transmettre à vos membres, partenaires et aux personnes de votre entourage afin de les encourager à la signer et à la diffuser. Plus nous sommes nombreux à signer cette lettre, plus nous revendiquons haut et fort la levée de la suspension du Programme d'adaptation de domicile et un financement suffisant de ce programme essentiel.

Rejoignez 4 ministres et 4 députées en participant ci-dessous ! (François Legault, Éric Girard, France-Élaine Duranceau, Andrés Fontecilla, Virginie Dufour, Joël Arseneau, Sonia Bélanger) + 1 députéEs selon votre adresse postale)

Veuillez notez que cette campagne est prolongée pour une durée indéterminée. (la date de fin initiale était le 3 avril)

Lettre

À l'attention de le nom complet du destinataire ira ici,

Je vous écris pour vous faire part de mon indignation concernant la suspension du programme d'adaptation de domicile (PAD) et son manque de financement.

En effet, le gouvernement du Québec a annoncé en novembre dernier la suspension temporaire du Programme d'adaptation de domicile, faute de financement. C'est à l'aide de cette subvention que les personnes en situation de handicap peuvent obtenir des adaptations de leur domicile pour que celui-ci demeure sécuritaire.

La suspension de ce programme est une catastrophe qui aura des conséquences désastreuses. Les délais d'attente pour obtenir les adaptations (déjà très longs) vont nécessairement exploser. En plus des mois où les nouvelles demandes ne seront pas traitées, la suspension va créer un goulot d'étranglement qui compliquera les démarches lorsque la suspension sera levée. En effet, il n'y a pas beaucoup d'entrepreneurs, en particulier dans certaines régions du Québec, qui sont en mesure de réaliser certaines adaptations. Ils ne seront pas en mesure de répondre à la demande et il est à prévoir que certains augmenteront leurs soumissions, ce qui fera en sorte que les travaux admissibles au PAD coûteront plus cher. De plus, une des raisons de la lenteur des démarches est que le temps d'attente pour qu'une ou un ergothérapeute du réseau de la santé puisse faire l'évaluation des besoins d'adaptations d'une personne est très long et celui-ci risque fort d'augmenter lorsque la suspension du programme sera levée.

Pour les personnes en attente d'adaptation, cette décision a des conséquences dramatiques. De nombreuses personnes attendent ces adaptations pour pouvoir se laver, et ce d'une manière sécuritaire, ou encore pour pouvoir sortir de leur logement sans devoir recourir à l'aide de proches, qui sont alors eux aussi à risque de se blesser. Une personne qui attend ces adaptations et doit continuer à habiter un logement qui ne répond pas à ses besoins est davantage à risque de blessures causées, par exemple, par des chutes.

Celles-ci peuvent entraîner une perte d'autonomie et une baisse de la qualité de vie globale. Elles sont également la principale cause d'hospitalisations liées à des blessures chez les personnes âgées au Canada. Pas moins de 69 % des chutes ayant entraîné une hospitalisation se sont produites à l'intérieur d'un bâtiment résidentiel. De plus, en 2019, les chutes ont représenté 61 % des décès par blessure, en moyenne 15 décès par jour au Canada. En 2019, le coût direct annuel des chutes a été estimé à 5,6 milliards au Canada. Au Québec, le ministère de la Santé et des Services sociaux évaluait à 300 000 par année le nombre de chutes chez les aînées.

Ce n'est peut-être pas le même ministère qui paiera la facture, mais la hausse des hospitalisations causées par les blessures et du nombre de personnes qui se retrouveront en CHSLD qu'engendrera nécessairement l'augmentation des délais pour obtenir la subvention du PAD coûtera beaucoup plus cher au gouvernement du Québec.

Le vieillissement de la population et le choix de favoriser le maintien à domicile rendent prévisible la hausse des demandes pour bénéficier de ce programme. Il est urgent que la suspension de ce programme soit levée et de s'assurer qu'il sera suffisamment financé à l'avenir pour répondre aux besoins de la population.

La pression sur ce programme est en plus exacerbée par l'abandon du programme Accès Logis, puisque les normes d'accessibilité et d'adaptabilité et les subventions qui y étaient associées dans ce programme n'existent plus dans le Programme d'habitations abordables Québec (PHAQ). Dorénavant, il n'est plus possible de prévoir l'installation d'adaptations dès le moment de la construction, ce qui coûtait beaucoup moins cher et permettait aux personnes d'emménager dans des logements qui répondent déjà à leurs besoins. Les personnes doivent maintenant attendre d'y déménager pour ensuite faire une demande au PAD.

L'augmentation du nombre de demandes reflète également une autre nécessité : l'adoption de normes de construction plus inclusives et plus rigoureuses en matière d'accessibilité et d'adaptabilité des logements. Il serait possible, par règlement, d'appliquer des exigences sans obstacle pour tous les nouveaux immeubles à logements.

La norme du logement minimalement accessible est désuète et insuffisante pour loger les personnes en situation de handicap ainsi qu'une population vieillissante. Il faut adopter des normes supérieures à celles prévues actuellement au Code de construction du Québec, par exemple en adoptant la norme CSA B 652 : 23 - logement accessible.

Je vous invite donc à prendre publiquement position en faveur des revendications suivantes :

Lever immédiatement la suspension du Programme d'adaptation de domicile (PAD) et qu'il soit suffisamment financé dès maintenant pour répondre aux besoins de la population dans des délais raisonnables.

Augmenter le montant destiné à la Ville de Montréal pour le PAD montréalais, dans le but de répondre aux besoins de la population dans des délais raisonnables.

Adopter des normes plus rigoureuses et inclusives en matière d'accessibilité et d'adaptabilité pour tous les nouveaux logements construits.

Appliquer les normes d'accessibilité et d'adaptabilité qui existaient dans le programme Accès Logis à tout projet d'habitation financé par des fonds publics.

Sincères salutations,

votre nom complet ira ici
votre email ira ici, votre résidence ira ici

* AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA,Rapport de surveillance sur les chutes chez les aînés au Canada, mars 2022, page 7.

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Le chantier inachevé du ministre (André) Lamontagne

29 avril, par Collectif — , ,
Après une vaste consultation sur le territoire agricole, le ministre de l'Agriculture, André Lamontagne, a fait adopter la loi 86, la Loi visant à assurer la pérennité du (…)

Après une vaste consultation sur le territoire agricole, le ministre de l'Agriculture, André Lamontagne, a fait adopter la loi 86, la Loi visant à assurer la pérennité du territoire agricole et sa vitalité. Elle modifie une loi majeure de 1978 : la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA).

Voix citoyenne, Claire Binet
et 9 cosignataires :
Institut Jean-Garon, Simon Bégin, porte-parole
Protec-Terre, Hubert Lavallée, président
Comité citoyen, Action climatique et environnement Durham-Sud, Jean Falaise
SOS terres agricoles et milieu de vie Saint-Augustin-de-Desmaures, Denis Guénette
Groupe Forêt Charlesbourg, Martine Sanfaçon, co-porte-parole
Mouvement pour une ville Zéro Déchet, Michèle Dumas Paradis
Cercle citoyen au coeur de la cité, Renaud Blais, président
Les AmiEs de la Terre de Québec, Karen Busque, coordonnatrice
Villes et Régions Innovantes (VRIc) et Réseau de l'économie circulaire, Pierre Racicot, Ph. D., dg.

Le jeudi 24 avril 2025

Cette loi devait soutenir « Nourrir le Québec », le projet d'autosuffisance alimentaire de l'ex-ministre Jean Garon. Cet objectif est plus d'actualité que jamais avec la guerre économique planétaire déclenchée par le président américain. La gestion de l'offre, pilier de l'agriculture québécoise, est dans la mire des États-Unis et la Chine frappe une fois encore l'exportation de nos porcs. Parmi les actions du gouvernement québécois, la campagne publicitaire En achetant québécois, on ne se trumpe pas.

Un territoire agricole adéquatement protégé ?

Pour manger québécois, il faut d'abord avoir accès à un capital territorial protégé, accessible et pérenne. C'était le but de la loi 86, avec de nombreuses mesures, mais toutes ne répondent pas adéquatement aux enjeux.

Saluons les dispositions resserrant la surveillance du territoire agricole et sanctionnant plus sévèrement les contrevenants, une recommandation de la Commissaire au développement durable. Mais les ressources de la Commission de protection du territoire agricole devront augmenter substantiellement.

M. Lamontagne a timidement entrepris de remédier à la spéculation et à l'accaparement des terres agricoles, avec un moratoire transitoire limité à certaines parties du territoire agricole et visant seulement les non-agriculteurs. Cette situation permet aux grands domaines agricoles de continuer à s'accroître, en attendant les règlements complétant la loi, et pourrait contribuer à accentuer la hausse pharamineuse du prix des terres et les difficultés d'accès à la terre pour la relève agricole.

Le point d'achoppement majeur concerne l'élargissement des demandes à portée collective permettant la construction de résidences dans certaines parties de la zone agricole. Le ministre s'est montré intraitable devant la levée de boucliers de nombreuses organisations mais complaisant envers des revendications municipales. Pourtant, 40 000 maisons sont déjà autorisées dans 67 MRC ; moins de 15% auraient été construites. Le saupoudrage actuel de résidences sans lien avec l'agriculture pourra s'intensifier dans certaines MRC, affaiblissant davantage la zone agricole et menaçant sa pérennité.

Un territoire agricole méconnu, sous-utilisé et mal utilisé

Pour manger québécois, le territoire agricole doit être en production. Or, le MAPAQ a manqué à ses responsabilités depuis plusieurs décennies en ignorant l'enfrichement croissant des terres agricoles (estimation : plus de 60 000 hectares). Qu'attend le ministre pour agir, notamment afin de favoriser une relance agricole et du même coup faciliter l'établissement de la relève ?

Un développement optimal du territoire agricole requiert une fine connaissance de son état (propriété, utilisation, etc.). Des données existent : éparses, fragmentées, incomplètes. La création d'un Observatoire sur le territoire agricole a été vainement proposée, notamment dans la perspective de mieux composer avec les changements climatiques.

De plus, notre territoire agricole est en partie mal utilisé en raison de programmes qui n'ont pas évolué, comme le soutien de centaines de millions $ à la filière mais-soya-porc dont l'avenir est plutôt incertain. Nous sommes pourtant à un moment charnière : les changements climatiques déstabilisent la production agricole tandis que l'insécurité économique et politique mondiale inquiète grandement.

Un territoire agricole toujours sous pression

Malgré une loi protégeant le territoire agricole depuis 1978, les pressions persistent : urbanisation, infrastructures, projets économiques, spéculation. À plusieurs égards, les intérêts opposés en 1978 restent les mêmes : à défaut d'une réforme de la fiscalité municipale, le revenu principal des municipalités demeure la taxation foncière, moteur de l'étalement urbain.

D'autres interventions gouvernementales affectent aussi le territoire agricole, principalement la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme (LAU) de 1979. Le père de la LPTAA disait que ces lois de la même époque sont comme les deux rails d'une voie de chemin de fer : ils vont dans la même direction mais sans jamais se croiser. Cette image illustre la primauté de la LPTAA sur toute autre loi inconciliable en zone agricole, tel qu'inscrite dans la loi initiale. Si cette primauté a prévalu depuis, les actions récentes du gouvernement suscitent des doutes quant à ses intentions.

Ainsi, la LPTAA semble dorénavant plutôt considérée comme un chapitre en aval de la Politique nationale de l'architecture et de l'aménagement du territoire adoptée en 2023 et de la LAU alors modifiée. De plus, les nouvelles Orientations gouvernementales en aménagement du territoire découlant de la LAU accordent des pouvoirs aux MRC pour régir les activités agricoles, ce qui risque de susciter des tensions et d'altérer la primauté de la LPTAA ainsi que l'équité des conditions de production entre les entreprises agricoles d'une MRC à l'autre.

Malgré des avancées notables, la volonté politique semble manquer pour compléter le chantier afin d'assurer la pérennité et la vitalité du territoire agricole pour « Nourrir le Québec ».

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Tarification de services de soutien à domicile : on a déjà payé, Madame Bélanger !

29 avril, par Coalition Solidarité Santé — , ,
MONTRÉAL, le 24 avril 2025 /CNW/ - Entre le fiasco SAAQclic, NorthVolt et les coupures dans le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS), le gouvernement annonce (…)

MONTRÉAL, le 24 avril 2025 /CNW/ - Entre le fiasco SAAQclic, NorthVolt et les coupures dans le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS), le gouvernement annonce qu'ilsonge à tarifer certains services de soutien à domicile (SAD).

Depuis plus de 30 ans, la Coalition solidarité santé se positionne contre toute forme de tarification. Pourquoi ? Parce que la tarification n'a pas sa place dans un système public accessible. Nous souffrons déjà des systèmes à plusieurs vitesses pour voir le médecin, pour nous faire opérer et pour envoyer nos enfants à l'école. « Il ne faut pas répéter cette erreur avec le soutien à domicile : ouvrir la porte à la marchandisation des services à la population, c'est ouvrir la porte aux inégalités », soutien Sophie Verdon, coordonnatrice de la Coalition solidarité santé.

Le SAD : un investissement et non une dépense

Les services de soutien à domicile doivent être intégrés au système de santé et des services sociaux, tout simplement. Les services de SAD servent à désengorger notre système de santé. Ce sont des investissements ainsi qu'une façon concrète d'exaucer le vœu de plusieurs usagers : rester chez soi et jouir de leur pleine autonomie. « Les services à domicile sont importants pour les aînés, mais aussi pour une grande proportion de personnes vivant avec un handicap. Faire payer pour le soutien à domicile, c'est taxer le handicap et la vieillesse », soutient Hugo Vaillancourt, président de la Coalition solidarité santé.

Financer les besoins des personnes et non ceux des entreprises

Nous proposons un réel virage vers un système de soutien à domicile fort, accessible et équitable. Pour ce faire, des investissements majeurs sont nécessaires. Si Mme Bélanger veut que des gens plus fortunés paient plus, elle n'a qu'à demander à son collègue Éric Girard d'augmenter les impôts des plus riches et de revoir la contribution des entreprises au Fonds des services de santé. C'est d'ailleurs ce qu'a proposé cet automne l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS), pour financer un soutien à domicile à la hauteur des besoins à venir de la population.

Parlons le langage du gouvernement : d'un point de vue économique, le SAD est un investissement gagnant. Il réduit les coûts dans le reste du système de santé et des services sociaux. En effet, les travaux récents de l'IRIS démontrent que d'ici 2050, sans même améliorer les services, les dépenses en soins de longue durée au Québec, qui sont actuellement de 7,7 milliards de dollars, atteindront 25,6 milliards, si aucun changement n'est fait dans le modèle actuel de prise en charge de la perte d'autonomie. Ces mêmes estimations évaluent à plusieurs milliards de dollars les économies potentielles d'un virage réussi vers le SAD avec des services publics et accessibles.

« Le Québec est une société riche qui peut s'inspirer des meilleurs modèles dans le monde. Il suffit d'investir notre argent et nos ressources aux bons endroits, pour s'assurer d'un écosystème social qui peut subvenir aux besoins de tous et toutes. C'est non seulement possible ; c'est nécessaire », de conclure Sophie Verdon.

À propos

La Coalition solidarité santé est un regroupement québécois d'organisations syndicales, communautaires et de comités de citoyennes et citoyens. Elle comprend également des groupes féministes, de personnes âgées, de personnes en situation de handicap et de personnes proches aidantes. La défense des grands principes qui constituent les pierres angulaires du réseau de santé depuis sa mise sur pied, à savoir le caractère public, la gratuité, l'accessibilité, l'universalité et l'intégralité, sont à la base de toutes les interventions de la Coalition solidarité santé.

SOURCE Coalition Solidarité Santé

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Le Collectif pour un Québec sans pauvreté se joint à la grande manifestation pour exiger des solutions à la crise du logement

29 avril, par Collectif pour un Québec sans pauvreté, Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) — , ,
Québec, le 24 avril 2025 – Le Collectif pour un Québec sans pauvreté participe aujourd'hui à la manifestation nationale organisée à Drummondville par le Regroupement des (…)

Québec, le 24 avril 2025 – Le Collectif pour un Québec sans pauvreté participe aujourd'hui à la manifestation nationale organisée à Drummondville par le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) à l'occasion de la 13e Journée des locataires. Le Collectif exige lui aussi des engagements fermes de la part du gouvernement pour répondre à la crise du logement et soutenir les personnes en situation de pauvreté.

Alors que le Québec traverse la pire crise du logement de son histoire, de plus en plus de ménages locataires doivent consacrer plus de 30 % de leurs revenus pour se loger. Une pression financière qui rime trop souvent avec insécurité alimentaire, privations et risques d'itinérance.

Selon le Rapport de la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) de l'automne 2024, ce sont les logements les plus abordables qui sont les plus rares. À Montréal, le taux de vacance pour les logements à 999 $ ou moins oscille entre 0,0 % et 0,8 %. Dans ces conditions, toute hausse de loyer ou tout départ forcé menace directement la capacité des ménages à faible revenu de se loger.

«  Alors que le salaire minimum n'augmentera que de 2,2 % cette année, la hausse recommandée des loyers par le Tribunal administratif du logement (TAL) est de 5,9 % au 1er juillet, la plus forte hausse en 30 ans. Et la situation ne risque pas de s'améliorer de sitôt avec la nouvelle méthode de calcul du Tribunal. Quand les prestations d'aide sociale ne permettent même pas de couvrir les loyers les plus abordables, ça ne fonctionne plus », d'affirmer M. Serge Petitclerc, porte-parole du Collectif.

Le Collectif s'indigne de l'inaction gouvernementale et soutient les revendications du RCLALQ :

* Un gel des loyers immédiat pour freiner l'explosion des coûts ;

* La création d'un registre obligatoire des baux, pour assurer un véritable contrôle des loyers ;

* Un réinvestissement massif et durable dans le logement social, seul capable de répondre aux besoins criants des moins nanti∙es.

En collaboration avec le RCLALQ, le Collectif pour un Québec sans pauvreté invite tous les locataires et allié·es à se joindre à la grande manifestation nationale pour le droit au logement, aujourd'hui à 13 h à Drummondville.
Point de rassemblement : Pavillon du parc Woodyatt – 53, rue du Pont à Drummondville

Parce qu'un logement est un droit, pas un luxe.


À propos du Collectif

Actif depuis 1998, le Collectif pour un Québec sans pauvreté regroupe 40 organisations nationales québécoises, populaires, communautaires, syndicales, religieuses, féministes, étudiantes, coopératives ainsi que des collectifs régionaux dans la plupart des régions du Québec. Des centaines de milliers de citoyen·nes adhèrent à ces organisations qui ont dans leur mission la lutte à la pauvreté, la défense des droits et la promotion de la justice sociale. Depuis le début, le Collectif travaille en étroite association AVEC les personnes en situation de pauvreté.

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QS veut mettre à contribution les multimillionnaires pour financer les services publics

29 avril, par Québec solidaire — , ,
Alors que la décote du Québec coûtera cher en taux d'intérêts, la porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal, et la responsable solidaire en matière de Finances, Alejandra (…)

Alors que la décote du Québec coûtera cher en taux d'intérêts, la porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal, et la responsable solidaire en matière de Finances, Alejandra Zaga Mendez, demandent à la CAQ d'imposer une taxe sur la fortune nette des multimillionnaires détenant plus de 50 millions de $.
Cette mesure toucherait 4000 ménages, soit le 0,1% le plus riche de la population, et rapporterait annuellement 3 milliards $ supplémentaires par année afin d'éviter des coupures dans les services publics.

« Pourtant, malgré un déficit de plus de 13 milliards $, la CAQ n'a qu'une vision : couper dans les services à la population. Je demande à François Legault et Éric Girard de regarder du côté de la colonne des revenus et d'avoir le courage d'aller chercher l'argent là où il est, en taxant la fortune du 0,1% le plus riche. Ça aurait un impact immédiat sur les services. L'austérité et les coupures ne sont pas une fatalité. On peut faire d'autres choix comme société, accroître les revenus de l'État et mieux répartir la richesse. Même l'agence S&P l'a dit : la décote du Québec est causée par l'écart entre les dépenses et les revenus », a déclaré Mme Zaga Mendez.

Cette mesure serait mise en place en rendant obligatoire pour tout ménage possédant des actifs dépassant 25 M$ de les déclarer dans un formulaire à Revenu Québec. Les dettes et autres passifs seraient ensuite retranchés pour identifier les fortunes et ainsi appliquer une imposition annuelle de 1 % sur les actifs nets entre 50 M$ et 500 M$ et de 2 % sur les actifs nets de plus de 500 M$.
Dans la pratique, Revenu Québec devra essentiellement surveiller plus attentivement les 4000 ménages dont la fortune dépasse 50 M$.

Une mesure fiscale qui existe à l'international

« Les milliardaires s'enrichissent alors que nos services publics craquent de partout. En ce moment, le PDG de Couche-Tard a les moyens de s'acheter 18 000 maisons, alors que la majorité des Québécoises et des Québécois n'arrivent même pas à acheter leur première maison, c'est indécent. Ils ont les moyens, faisons-les contribuer. Je demande à M. Legault de suivre l'exemple de la Suisse, de l'Espagne, de la France, de la Norvège et de la Colombie, qui ont déjà ce genre de mécanisme pour que les plus fortunés paient leur juste part. C'est une mesure qui ne demande que du courage politique, et qui va permettre d'éviter de vivre de l'austérité en santé, en éducation, en transports », a complété Mme Ghazal.

Interventions de Ruba Ghazal et d'Alejandra Zaga Mendez à l'Assemblée nationale demandant que les multimillionnaires paient leur juste part d'impôt. Écoutez les réponses démagogiques du premier ministre Legault et de son ministre des Finances.

Interventions de députées de Québec solidaire, Ruba Ghazal et Alejandra Zaga Mendez le 24 avril dernier à l'Assemblée nationale demandant que les multimillionnaires paient leur juste part d'impôt. Les réponses du Premier ministre et du ministre des Finances démontrent que le gouvernement de la CAQ est au service de la classe dominante.(PTAG). Voici le fichier audio de ces échanges :

(Extrait de la vidéo du Secrétariat de l'Assemblée nationales)

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Décryptage. Il est grand temps que les Canadiens prennent la menace Trump au sérieux

Non seulement le président américain menace d'annexer le Canada, mais il est en train d'instaurer un régime autoritaire aux États-Unis. De quoi faire peser un risque sur la (…)

Non seulement le président américain menace d'annexer le Canada, mais il est en train d'instaurer un régime autoritaire aux États-Unis. De quoi faire peser un risque sur la souveraineté et les valeurs démocratiques canadiennes, souligne, avant les élections fédérales du 28 avril, cette journaliste et productrice canadienne dans le magazine “The Walrus”.

24 avril 2025 | tiré du site du Courrier international | Dessin de Cameron Cardow paru dans The Ottawa Citizen, Canada. © Cagle Cartoons

Il y a environ un mois, j'ai participé à une réunion de famille, le genre d'événement où l'on discute de tout et de rien en engouffrant de grosses bouchées de lasagne. À un moment, ma voisine a commencé à parler des droits de douane imposés par Donald Trump et de ses menaces d'annexer le Canada. Après qu'on eut échangé quelques blagues cyniques avec les gens autour de nous, elle a dit à mi-voix :

“Ça commence à faire peur.”

Pendant longtemps, la plupart des gens avec qui je discutais considéraient comme une blague – ou ignoraient simplement – la menace de Trump de faire du Canada le 51e État des États-Unis. Deux amis américains m'ont assuré que ça n'arriverait jamais, l'un d'eux affirmant que, sur le plan électoral, ce ne serait pas avantageux pour les républicains, puisque les Canadiens voteraient démocrate.

Je lui ai fait remarquer que si les États-Unis annexaient illégalement le Canada, on peut supposer que les pratiques électorales normales ne s'appliqueraient pas. À l'époque, rares étaient les Canadiens qui semblaient vouloir aborder le sujet sérieusement. Aucun d'entre nous ne souhaitait envisager que notre pays puisse être l'objet des visées impérialistes de son voisin.

Une aversion pour la peur et l'anxiété

Certains diront que le simple fait de parler des menaces de Trump contribue à les banaliser. Cet argument fait écho à une conception plus large de la manière dont les médias devraient couvrir les autres menaces impérialistes formulées par Trump, notamment contre Gaza, le Panama et le Groenland.

Voir aussi : Vidéo. Cartes sur table : pourquoi Trump menace d'annexer le Groenland

Récemment, par exemple, Jelani Cobb, doyen de l'école de journalisme de l'université Columbia, a dit que les médias devraient aborder les menaces de Trump de s'emparer de Gaza “de la même manière qu'on traiterait un caprice d'enfant. Ce qui compte, c'est ce qui est fait concrètement. Alors à moins que [Trump] ne nous montre les plans des appartements qu'il a prévu de faire construire à Gaza, ça reste du verbiage.”

Je sais qu'il est difficile de couvrir Trump. Mais en traitant le président américain comme un gamin capricieux, les médias ne lui donnent-ils pas la permission tacite d'agir comme tel ? Par ailleurs, considérant le pouvoir immense qu'il exerce, je me demande si la réticence des Canadiens à réagir aux menaces concernant l'annexion de leur pays ne relève pas davantage d'une aversion pour la peur et l'anxiété que d'une approche stratégique.

À lire aussi : Analyse. Donald Trump ravive dangereusement le rêve de l'empire américain

Soyons francs : Trump n'a-t-il pas déjà banalisé la menace simplement du fait de sa position ? Comment devrait-on interpréter sinon le fait qu'il publie sur son réseau Truth Social deux cartes sur lesquelles le Canada n'apparaît nulle part, les États-Unis englobant l'ensemble des provinces et des territoires ?

Et les politiciens et les médias américains ne banalisent-ils pas la menace en refusant de la dénoncer publiquement, voire en lui donnant une certaine légitimité ? Cette approche n'est pas sans rappeler la façon dont les démocrates et leur candidate, Kamala Harris, ont réagi aux mensonges racistes de Trump, qui a affirmé pendant lla campagne électorale que les immigrés haïtiens de Springfield, en Ohio, mangeaient les animaux de compagnie : on en a fait des blagues et des mèmes. Aujourd'hui, Trump a mis fin au statut de protection temporaire dont bénéficiait un demi-million d'Haïtiens vivant sur le territoire américain.

Un projet colonial toujours d'actualité

Les menaces expansionnistes du président américain sont choquantes, certes, mais elles constituent l'aboutissement du projet fasciste qui vise à “rendre sa grandeur à l'Amérique”. Le slogan évoque un passé imaginaire glorieux, celui d'une Amérique forte où la vie était bonne pour les Américains (blancs).

La densité de population au Canada.La densité de population au Canada. SOURCES : STATISTIQUE CANADA, ATLAS DU CANADA.

J'admets avoir cru que le locataire de la Maison-Blanche concentrerait ses efforts sur les enjeux nationaux. J'aurais dû me douter que les choses ne se passeraient pas ainsi. Après tout, au fil de l'histoire, les États-Unis se sont approprié à maintes reprises des territoires souverains pour servir leurs intérêts. Les terres autochtones, en particulier, ont été l'objet de leur convoitise : elles ont été conquises par la violence ou parfois achetées à d'autres puissances étrangères comme la Russie ou la France.

Les États-Unis se sont aussi emparés de vastes pans de territoires situés à l'ouest et au sud-ouest pendant la guerre américano-mexicaine, entre 1846 et 1848. Le pays s'est ensuite intéressé à des territoires plus éloignés : il a appuyé le coup d'État à Hawaï en 1893, a envahi Porto Rico et a acheté les Philippines à l'Espagne. Encore aujourd'hui, l'empire américain possède un vaste réseau de bases militaires à l'étranger.

À lire aussi : Opinion. Face à Trump, le Canada se cherche désespérément une identité

Les ambitions expansionnistes qu'affiche Trump ces jours-ci marquent simplement un autre chapitre de cette tradition funeste. Après tout, les États-Unis sont nés d'un projet colonial qui est toujours d'actualité en 2025. Si nous sommes choqués, c'est que la croyance naïve que nous serons toujours épargnés par les visées impérialistes de notre voisin a été profondément ébranlée. Mais peut-être serons-nous finalement épargnés. Qui sait quels desseins le président américain décidera-t-il de poursuivre ?

Une sidération, voire un déni collectif

“Elbows up !” un cri de ralliement anti-Trump
“Elbows up” ou “Jouer des coudes”. C'est le nouveau slogan des Canadiens exaspérés par les attaques de Donald Trump contre leur pays. Inspirée du hockey, l'expression a gagné en ampleur sur les réseaux sociaux, dans la rue et jusqu'au pouvoir à Ottawa. C'est le comédien d'origine canadienne Mike Myers qui a ouvert le bal dans l'émission américaine culte “Saturday Night Live”. Le 1er mars, il est apparu vêtu d'un tee-shirt sur lequel était écrit “Le Canada n'est pas à vendre”. Il a ensuite levé le coude et dit : “Elbows up”.
L'expression, rappelle The Globe and Mail, a été inventée par le légendaire hockeyeur canadien Gordie Howe décrivant “un moyen efficace de se protéger d'un joueur adverse”. Face aux menaces que fait peser le président américain sur le Canada, elle s'est transformée en véritable slogan. Le 9 mars, des centaines de personnes munies de pancartes “Elbows Up” ont manifesté à Ottawa. Puis un site Internet “Elbows Up – Jouons du coude, Canada” a été créé, pour annoncer les manifestations prévues à travers le pays. Le premier ministre libéral, Mark Carney, en pleine campagne électorale, a même participé au mouvement, de concert avec Mike Myers.
Remarquant que le slogan est désormais repris “partout sur les réseaux sociaux”, un journaliste du Winnipeg Free Press y voit l'expression de l'agressivité canadienne. Dans ses rêves, il aimerait voir Mark Carney “s'emparer d'un des secrétaires du cabinet de Trump, renverser sa veste sur sa tête et lui asséner une série de crochets”. Avant de conclure : “Je sais que ce genre de comportement serait vraiment mal. Mais ça ferait du bien.”
Une retenue que n'ont pas manifestée les joueurs de l'équipe nationale de hockey sur glace le 15 février. Ce jour-là, les équipes des États-Unis et du Canada se rencontraient à Montréal dans le cadre de la Confrontation des quatre nations. Le match a viré à l'empoignade : trois bagarres en neuf secondes, l'hymne américain hué… Une violence qui a stupéfié le public et les téléspectateurs, pourtant habitués à une bonne dose d'adrénaline dans ce sport.
Courrier International

Et pourtant, face à cet élargissement de l'idéologie de “l'Amérique d'abord” et aux ambitions explicitement impérialistes de Trump, les Canadiens doivent infléchir le discours public qui, par moments, semble toujours réticent à prendre au sérieux ces menaces. Nous devons corriger notre “biais de normalité” ou notre “biais de statu quo”, que l'épidémiologiste Adam Kucharski définit comme “la tendance à préférer au changement le maintien de l'état actuel des choses”.

Sur la plateforme Substack, Kucharski compare la régression actuelle de la démocratie aux États-Unis aux premiers jours de la pandémie de Covid-19.

“Avant et après le début de la pandémie, les gens étaient généralement réticents à admettre que la crise était bien réelle […]. De la même manière, on a aujourd'hui l'impression que de nombreux journalistes et personnalités publiques ont du mal à voir qu'il se passe quelque chose d'inédit et de désastreux aux États-Unis. Je soupçonne que cela vient souvent d'une incapacité, voire d'une réticence à regarder la réalité en face. La pandémie de Covid-19 et la situation actuelle aux États-Unis illustrent toutes deux une variante cruciale de ce biais : alors que le statu quo s'est déjà effondré, les gens continuent d'agir comme s'il était intact.”

À lire aussi : Reportage. Menaces sur la bibliothèque Haskell, “petite Suisse” à la frontière canado-américaine

Quand la réalité est inimaginable et effrayante, on comprend que les gens soient nombreux à s'accrocher à ce qui leur est familier. D'après Kucharski, l'humain a aussi tendance à croire qu'en admettant la réalité d'une crise, on court le risque de lui donner un caractère inévitable. Or, selon lui, cette tendance n'est pas sans risque : “Puisqu'ils n'ont pas encore pleinement intégré ce changement, les individus se résolvent par défaut à l'inaction. Au lieu d'admettre qu'un changement fondamental s'est déjà produit, ils s'accrochent à la croyance d'un retour à la normale.”

On sait déjà que le biais du statu quo favorise l'inaction face à l'urgence climatique. Je crains qu'il ait aussi pour effet de teinter la vision qu'ont certains Canadiens de la crise nationale qui se profile. S'il est vrai que l'on parle davantage des menaces de Trump ces jours-ci, on a souvent tendance à tenir pour acquise la continuité de la souveraineté canadienne. Nos politiciens nous assurent que le Canada ne fera jamais partie des États-Unis, mais ils n'expliquent pas concrètement comment ils comptent s'y prendre pour empêcher que cela se produise.

Les politiciens sous-estiment les dangers qui pèsent sur le pays

Il ne s'agit pas ici d'un plaidoyer en faveur d'un accroissement des dépenses militaires ou d'une démonstration de patriotisme. Il ne suffit pas d'acheter canadien et de boycotter les produits américains : il faut admettre la réalité du régime autoritaire que Trump est en train d'instaurer aux États-Unis et le risque inhérent que cela fait peser sur la souveraineté et les valeurs démocratiques canadiennes.

À lire aussi : Analyse. Au Canada, un sursaut de patriotisme

Mark Carney, l'ambitieux

Les Canadiens sont appelés aux urnes le 28 avril pour désigner leurs 343 députés. Des élections sur fond de tensions avec le voisin américain : “Nous ne pouvons pas contrôler le président américain, mais nous pouvons contrôler notre destin. Nous sommes maîtres chez nous”, a déclaré le chef du Parti libéral Mark Carney le 23 mars, donnant le coup d'envoi à la campagne électorale neuf jours après avoir été assermenté pour remplacer le Premier ministre démissionnaire, Justin Trudeau. L'ancien grand argentier de la Banque du Canada et de la Banque d'Angleterre a vite annoncé ses couleurs. Celui qui est perçu comme le meilleur leader pour faire face à Trump a déclaré que la “vieille relation” canado-américaine “est terminée”. Il veut créer “un corridor national de commerce et d'énergie”, note Le Devoir. Il a milité pour la lutte contre le changement climatique et veut désormais faire du Canada une superpuissance énergétique en favorisant le développement des énergies renouvelables et conventionnelles, rapporte La Presse. Recul de ses valeurs ? Non, dit ce novice en politique de 60 ans. Son rêve de “dominer” le marché conventionnel passe par la diminution de la pollution générée par la production et les transports.Courrier International

C'est la situation dans laquelle se trouve actuellement le Canada avec ce qui était, jusque très récemment, son plus proche allié, un pays que l'on peut considérer comme le plus puissant au monde. La campagne pour l'élection fédérale canadienne qui se déroule actuellement est dominée par Trump et ses droits de douane, certes, mais elle ne donne pas toute la mesure des dangers qui guettent le Canada. Mark Carney [Parti libéral du Canada] et Pierre Poilievre [Parti conservateur du Canada], les deux principaux candidats [aux élections générales du 28 avril ], affirment qu'ils peuvent bâtir “un Canada fort” et mettre “le Canada d'abord”.

Pierre Poilievre, le combatif
Politicien de carrière, élu député conservateur en 2004 à l'âge de 25 ans, Pierre Poilievre a pris la tête de son parti il y a trois ans après avoir embrassé la cause des camionneurs antivaccins en pleine pandémie. En imposant ses thèmes, comme la hausse du coût de la vie ou encore la crise du logement, cet adversaire coriace de Justin Trudeau s'était forgé une formidable avance dans les sondages, avance qui a fondu comme neige au soleil avec l'arrivée de Mark Carney et les multiples menaces de Donald Trump, analyse La Presse. Celui que l'on a surnommé le “Trump canadien” promet désormais de tenir tête au chef de la Maison-Blanche, qui veut faire du Canada le 51e État américain. “C'est à notre avantage de rendre le Canada plus souverain et plus fort face aux Américains”, a-t-il déclaré. Mais, note Le Devoir lors d'un rassemblement le 7 avril en Alberta, “ce qu'il a peut-être moins aimé, c'est la façon dont les applaudissements se taisaient à chaque fois qu'il évoquait la menace américaine”.Courrier International

Mais jusqu'à présent, une grande partie des mesures qu'ils ont proposées concernent les réductions d'impôts et l'économie, même si le candidat libéral a récemment admis que la relation qu'entretenait traditionnellement le Canada avec les États-Unis “n'existait plus”.

Les politiciens aiment dire que les temps sont durs et promettre des jours meilleurs. Cependant, répondre à Trump par des mesures économiques ne changera rien au fait que les États-Unis ont pris un virage autoritaire et que leur président parle désormais ouvertement de son désir d'annexer le Canada.

À lire aussi : Société. Ces universitaires experts du fascisme qui quittent les États-Unis pour le Canada

D'autres pays, comme la Suède, la Finlande, la Norvège et la France, qui ont déjà été envahis ou menacés d'invasion par de puissants voisins, ont commencé à préparer leurs citoyens à cette période d'instabilité géopolitique. Ils distribuent des manuels de préparation aux situations d'urgence qui traitent entre autres de conflits armés, de menaces à la sécurité et de catastrophes climatiques.

Pourtant, ici au Canada, l'idée que l'on puisse distribuer de tels manuels semble impensable. Ce serait sans doute vu comme un aveu de faiblesse plutôt que comme une précaution judicieuse. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que la possibilité que Trump tente d'annexer de force le Canada est bien réelle. Il est temps de commencer à envisager le pire au lieu d'espérer que tout se passe au mieux.

Melissa J. Gismondi

La solitude du coureur de fond

Les sondages n'ont pas cessé de confirmer la débandade électorale du Nouveau Parti démocratique (NPD). LA SOLITUDE DU COUREUR DE FOND De 18% des voix obtenues au scrutin (…)

Les sondages n'ont pas cessé de confirmer la débandade électorale du Nouveau Parti démocratique (NPD).

LA SOLITUDE DU COUREUR DE FOND

De 18% des voix obtenues au scrutin fédéral de 2021, il a descendu à 7% aux dernières nouvelles. Il ne réussira peut-être même pas à faire élire assez de députés pour obtenir le statut de parti reconnu à la Chambre des Communes.

Pourtant, le bilan de son action en Chambre n'est pas négligeable. Il a profité du fait de détenir la balance du pouvoir afin d'arracher aux libéraux quelques gains pour la population, en particulier le Régime canadien de soins dentaires gratuits. Mais en fin de compte, c'est le gouvernement minoritaire de Justin Trudeau qui en a retiré le crédit.

Jagmeet Singh est bien sympathique, la sincérité avec laquelle il défend ses causes est évidente. Mais la formation qu'il dirige ressemble à certains égards au libéraux. Ils sont tous deux multiculturalistes et centralisateurs, partageant la même conception stricte du fédéralisme canadien. Tous deux se méfient du nationalisme québécois, que ce soit dans sa version indépendantiste ou autonomiste.

Mais en politique, la sympathie que peut inspirer un leader ne suffit pas à assurer le succès électoral de son parti. Il manque à monsieur Singh l'indispensable crédibilité nécessaire pour faire du NPD un parti à vocation de pouvoir. La plupart des gens le voient comme un défenseur dévoué de la cause des démunis, mais pas comme un premier ministre. L'incompréhension qu'il démontre à l'endroit du nationalisme québécois l'empêche de répéter l'exploit de Jack Layton en 2011, qui lui, avait bien saisi l'importance d'accepter le nationalisme québécois. Il parlait (en termes plutôt vagues, il est vrai) de respecter les champs de compétence des provinces et d'un droit de retrait avec compensation des programmes fédéraux. Il qualifiait sa proposition de "fédéralisme asymétrique". Il est parvenu, à la surprise générale, à faire élire cinquante-neuf députés dans la Belle Province. Du jamais vu !

Maintenant, quatorze ans plus tard, l'arrivée au pouvoir de Donald Trump à la Maison-Blanche a changé la donne. Ses menaces annexionnistes ont ébranlé la classe politique canadienne, même les conservateurs, pourtant assez proches des républicains américains sur le plan idéologique. Il en est résulté une remontée spectaculaire les libéraux qui semblaient en perdition sous Justin Trudeau au détriment des conservateurs de Pierre Polievre. Mark Carney a pris la direction du parti et du gouvernement. Une vague de patriotisme déferle présentement sur le Canada. Le nouveau premier ministre est vu comme le leader tout désigné pour tenir tête à Trump parce que plus rassembleur. On le considère comme le seul chef apte à refréner les velléités annexionnistes de Trump, et ce même au Québec. Le Parti libéral y devance le Bloc par environ vingt points d'avance.
Dans ce concert de nationalisme, le NPD paraît isolé. Il se livre aux dénonciations convenues de Trump bien sûr, mais il met l'accent sur des thèmes sociaux plutôt que nationaux, par exemple imposer comme il se doit les ultrariches. En effet, le problème des inégalités sociales se pose avec acuité d'un océan à l'autre.

En résumé, les difficultés internes du pays ne peuvent être ignorées au profit du "patriotisme". C'est le mérite de monsieur Singh que de le rappeler sans relâche. Après tout, le Canada n'est toujours pas annexé aux États-Unis et ne le sera sans doute jamais. Jagmeet Singh a donc raison de dénoncer des inégalités sociales qui ne font que se creuser toujours davantage.
Si on doit prendre la juste mesure de la menace que le trumpisme fait peser sur le Canada, cela ne doit pas pour autant détourner l'attention des problèmes internes qui l'affligent. Ce faisant, le Nouveau parti démocratique respecte sa vocation première : celle de répartir le plus équitablement possible la richesse produite ici. C'est le mérite de monsieur Singh que de faire entendre une voix discordante de gauche dans le concert du patriotisme pancanadien, et ce, peu importe le résultat final sur le plan électoral.

Jean-François Delisle

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Élections fédérales : protestation écarlate

En marge du débat des chefs en anglais, tenu le jeudi 17 avril dernier, des dizaines de manifestantes ont revêtu la célèbre tenue des Servantes écarlates. Par ce geste fort, (…)

En marge du débat des chefs en anglais, tenu le jeudi 17 avril dernier, des dizaines de manifestantes ont revêtu la célèbre tenue des Servantes écarlates. Par ce geste fort, elles ont voulu lancer un avertissement aux politiciens : il est urgent de protéger la société contre la dystopie qui semble prendre forme chez nos voisins du Sud.

Tiré de Ma CSQ.

Les droits des femmes, encore fragiles, sont attaqués de plein fouet depuis les dernières années, et encore plus ces derniers mois. Qu'il s'agisse du recul du droit à l'avortement ou de l'interdiction pour les chercheuses et chercheurs américains d'utiliser le mot « femmes » dans leurs travaux sous peine de perdre leur financement fédéral, les mises en garde de Simone de Beauvoir résonnent désormais comme une prophétie inquiétante.

Les militantes de différentes organisations se sont mobilisées pour dénoncer l'invisibilisation des enjeux féministes tout au long de la campagne électorale, en particulier la défense du droit à l'avortement.

Le mouvement féministe reste vigilant et engagé pour les droits des femmes. Comme l'ont affirmé les manifestantes, lors de l'événement : « Nous ne redeviendrons jamais des citoyennes de seconde zone » !

Meilleure reconnaissance de la violence conjugale dans le Code criminel : les chefs de partis appelés à s’engager

Cet hiver, le Canada était à deux doigts de devenir l'un des États pionniers dans la criminalisation du contrôle coercitif. À ce jour, seule une poignée de juridictions dans le (…)

Cet hiver, le Canada était à deux doigts de devenir l'un des États pionniers dans la criminalisation du contrôle coercitif. À ce jour, seule une poignée de juridictions dans le monde ont franchi ce pas : l'Angleterre et le Pays de Galles, l‘Écosse, l'Irlande et quelques États américains et australiens.

À la veille de la prorogation du parlement, un projet de loi majeur en ce sens s'apprêtait à franchir les toutes dernières étapes avant la sanction royale, après avoir été adopté unanimement par la Chambre des communes. Concrètement, cette nouvelle infraction allait permettre de reconnaître l'ensemble des dimensions de la violence conjugale, au-delà des coups, du harcèlement ou des menaces. De reconnaître une série de comportements qui visent à isoler, terrifier, contrôler et priver une partenaire intime de sa liberté. De reconnaître les atteintes graves que portent ces comportements au droit à la sécurité et au droit à la liberté des femmes et des enfants qui en sont les principales victimes.

Le lien entre le contrôle coercitif et le danger est désormais bien établi : dans plus de 90% des cas de féminicides, il y avait du contrôle coercitif. Alors que pour près d'une victime sur trois, le meurtre ou la tentative de meurtre était le premier acte de violence physique.

Remettre la violence conjugale à l'agenda politique

Avec le projet C-332, des milliers de victimes de violence conjugale s'apprêtaient à pousser un soupir de soulagement : ce qu'elles endurent depuis des années, sans avoir aucun levier juridique, allait enfin être reconnu, et puni par la loi. Mais les circonstances politiques ont eu raison de ce projet de loi pourtant si attendu.

La criminalisation du contrôle coercitif faisait consensus auprès de tous les partis fédéraux, après des années d'efforts de la part de différents acteurs pour faire reconnaître la gravité et la dangerosité de ces comportements de contrôle qui se perpétuent souvent des années durant.

Aujourd'hui, dans le cadre de cette campagne électorale fédérale, plusieurs associations de maisons d'aide et d'hébergement implorent les chefs de partis à s'engager, sans l'ombre d'un doute, à déposer un nouveau projet de loi dans la prochaine législature pour créer une infraction criminelle de contrôle coercitif. Ce projet de loi devrait s'appuyer sur les nombreux travaux et consultations déjà réalisés, qui rencontraient l'appui général à la Chambre des communes.

C'est l'occasion de mettre de l'avant un Canada qui agit concrètement en faveur de l'égalité des genres et de s'afficher comme chef de file en matière de lutte contre les violences faites aux femmes. Monsieur Blanchet, Monsieur Carney, Monsieur Pedneault, Monsieur Poilièvre, Monsieur Singh : il est temps de l'affirmer haut et fort.

Organisations signataires

Louise Riendeau, coresponsable des dossiers politiques, Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale (Québec)

Jo-Anne Dusel, Directrice générale, Provincial Association of Transition Houses and Services of Saskatchewan (PATHS) (Saskatchewan)

Maïra Martin, Directrice générale, Action ontarienne contre la violence faite aux femmes (Ontario)

Maureen Levangie, Directrice exécutive, Association contre la violence familiale du Nouveau-Brunswick (Nouveau-Brunswick)

Manon Monastesse, Directrice générale, Fédération des maisons d'hébergement pour femmes (Québec)

Amy S. FitzGerald, Directrice générale, BC Society of Transition Houses (BCSTH) (Colombie-Britannique)

Nomazulu Khumalo, Directrice générale par intérim (pour Hawa Dumbuya-Sesay), YWCA NWT (Territoires du Nord-Ouest)

Catherine (Cat) Champagne – Directrice générale, Conseil des refuges pour femmes de l'Alberta (ACWS)

Hayfa Ben Miloud – Coordonnatrice du Volet Intervention – Recherche et Formation – Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Québec)

La politique canadienne favorable au gaz naturel liquéfié (GNL) soutient la nouvelle forme de fascisme de D. Trump alimenté par les énergies fossiles

29 avril, par Nick Gottlieb — , ,
Le Président Trump rend les contradictions de la politique climatique canadienne vraiment visibles. La production du soit disant gaz naturel américain (un mélange (…)

Le Président Trump rend les contradictions de la politique climatique canadienne vraiment visibles. La production du soit disant gaz naturel américain (un mélange d'hydrocarbures où le méthane domine) a commencé à exploser sous l'administration Obama et n'a cessé de progresser depuis. Le processus de liquéfaction nécessaire pour que le gaz puisse être expédié a débuté en 2016 et a augmenté sans arrêt chaque année. Les régulations ne sont pas le plus grand problème de cette industrie, au contraire, ce sont les marchés.

Nick Gottlieb, Canadian Dimension, 4 avril 2025

Traduction, Alexandra Cyr

L'adoption des énergies renouvelables en Asie dépasse toute les attentes et on s'attend à ce que les marchés du GNL soient dramatiquement en surplus de production dans les prochaines années.

Pour gérer cette situation, l'industrie a deux approches possibles : limiter la production en mettant un arrêt sur la construction de nouvelles infrastructures ou élargir le marché pour absorber le surplus tout en maintenant les prix à un niveau durable.

Le Président Trump, dont le Secrétaire à l'énergie provient directement de l'administration de Liberty Energy, la deuxième plus grande compagnie de fracturation aux États-Unis, semble vouloir aider cette industrie à poursuivre une plus grande stratégie à savoir de déployer le pouvoir économique américain pour imposer et développer la demande de GNL partout dans le monde. Déjà, début février, Taîwan, l'Inde et le Japon ont indiqué qu'ils augmenteraient leurs importations de GNL américain pour apaiser l'administration Trump et éviter des droits de douanes punitifs. La Corée du sud, le Vietnam et l'Union européenne semblent aller dans le même sens ce que Bill McKibben décrit justement dans sa chronique de « faire se coucher ».

Ici au Canada, les politiciens.nes se sont vite distancés.es de D. Trump à cause de sa menace d'annexion du pays pour en faire le 51ième État américain. Mais en même temps, en criant bien fort leur opposition à D. Trump et à ses plans pour le monde entier, le partenariat s'est poursuivi pour élargir le marché du GNL par tous les moyens possibles dont le déploiement du pouvoir politique pour soutenir les compagnies gazières et de gazoduc qui ont des liens étroits avec l'administration Trump.

Bien sûr ce n'est rien de nouveau c'est une des caractéristiques de l'État capitaliste. L'étendue de l'adhésion à l'automobile par exemple ne s'est pas produite à cause de la demande (pour ce type de transport) ou sa supériorité naturelle sur les transports en commun (détestés de tous) mais à cause de décisions sur les infrastructures et de la propagande poursuivie par l'État dans des campagnes introduites dans le système d'éducation qui incitaient les gens à acheter des voitures. Même à ça, l'adoption de la voiture individuelle et le mode de vie américain reposant fortement sur le pétrole, s'est répandu lentement en dehors des États-Unis. Après la deuxième guerre mondiale, Washington s'est servi du Plan Marshall pour lui donner un coup de pouce magistral. Il a reconstruit l'Europe de l'ouest de telle sorte que la dépendance au pétrole y était installée au grand bénéfice des compagnies américaines qui contrôlent la majorité du flot de pétrole dans le monde. Les exemples en sont incalculables mais le plus important est que de manières remarquables, l'allure de ces marchés n'est pas déterminée par la nature humaine qui définit la « demande » mais par les réserves et l'habileté des entreprises avec leurs alliés étatiques à créer la demande voulue. Cette distinction a de profondes conséquences dans notre compréhension de l'avenue des changements, comment notre économie s'est retrouvée en surproduction et, probablement plus important encore en ce moment, pour comprendre comment nous pouvons amoindrir les changements climatiques.

Tout cela pour dire que l'utilisation du pouvoir étatique pour créer des marchés pour des productions intérieures a été la norme depuis des siècles. Qui y a-t-il de différent aujourd'hui dans notre situation politique ? D. Trump a effrontément poussé la menace à un niveau qui lui assure un marché à long terme pour la production la plus rapide d'un produit d'énergie fossile dans le monde : le gaz de schiste. Les politiques climatiques sont pleines de rumeurs et de mystifications mais, dans le cas présent, D. Trump révèle le non-dit. Ce faisant, il rend les contradictions de la politique climatique canadienne clairement visibles.

Notre gouvernement déclare « croire » dans le changement climatique et même d'être un leader dans ce domaine. Mais depuis des années il déploie des moyens en arrière scène pour aider des compagnies comme TC Energy, la compagnie impliquée dans le Coastal GasLink, pour enfermer d'autres pays dans les infrastructures des énergies fossiles repoussant ainsi les énergies renouvelables et affaiblissant la lutte contre le réchauffement climatique. Une grande partie de ce projet est fait en collaboration très proche, mais occultée, avec les États-Unis et d'autres alliés dont les pays membres du réseau de renseignement connus sous le nom de Five Eyes. Ce sont les États-Unis, l'Australie, le Royaume uni, la Nouvelle Zélande (et le Canada).

Cette collaboration n'est pas dirigée que par des intérêts communs mais aussi par des personnels communs. La direction de TC Energy déborde de « douzaines de liens entre le géant du gaz naturel et l'administration Trump », selon la Fondation pour le journalisme d'investigation. Elle a toujours été le principal moteur du projet Prince Rupert Gas Transmission, le gazoduc contre lequel les Premières nations et des groupes communautaires se battentdevant les tribunaux. L'été dernier, elle a vendu le projet à un groupe de partenaires, (joint venture) Western LNG et une petite entreprise basée à Houston (Texas) alliée de D. Trump, avec aussi le gouvernement de Nisga'a Lisims (Première nation). Plusieurs anciens employés de TC poussent le projet vers l'avant sous cette nouvelle propriété. Les détails des enjeux auxquels fait face TC avec cette vente restent nébuleux. PRGT et ses installations d'exportation proposées par Ksi Lisims, sont tous les deux soutenus par des compagnies de financement américaines comme par le PDG de Blackstone, Steve Schwarzman qui était aussi un financier majeur de la campagne présidentielle américaine en 2024.

L'industrie canadienne du gaz de schiste n'est pas qu'alignée sur l'administration Trump, elle y est imbriquée. Malheureusement c'est aussi le cas de l'État canadien.

Les effronteries de D.Trump obligent les politiciens.nes de notre pays, à répondre à cette question : en ce moment, êtes-vous opposés.es au projet fasciste lié aux énergies fossiles des Américains ? Sinon vous ne faites que bavarder pour gagner sans peine des points de politique nationaliste pendant qu'en arrière scène vous continuez à travailler avec l'administration Trump et ses alliés à la promotion de l'expansion mondiale du gaz de schiste minimisant ainsi les pauvres petits progrès qui ont été faits dans la lutte pour le climat.

Une sérieuse opposition à D. Trump voudrait dire de mettre fin au soutien de l'extension de l'énergie du GNL, de faire cesser la mainmise des dirigeants.es des entreprises liées à l'administration Trump et d'annuler toutes les opérations militaires et diplomatiques qui cherchent à incruster la dépendance au gaz dans le monde.

Au moins la position de Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur, est claire. Son appel à la création de zones prêtes à l'emploi est une reprise canadienne transparente du capitalisme anarchique américain lié aux monopoles de l'industrie des énergies fossiles qui offre aux géants canadiens de ce secteur tout ce qu'ils ont toujours demandé. Malheureusement, de l'autre côté du spectre, les politiciens à l'idéologie étroite que nous avons dans ce pays, soit le Premier ministre Mark Carney et le Premier ministre de la Colombie britannique, David Eby, ont fait la preuve de la faiblesse de leur opposition à D. Trump. D. Eby donne une poussée à des projets qui augmentent la production et l'exportation du gaz de schiste du bassin gazier de Montney Shale. Un des premiers gestes du Premier ministre Carney a été de verser 200 millions de dollars à Cedar LNG un nouveau projet d'exportation sur la côte nord-ouest de la Colombie britannique. Plutôt que de travailler avec d'autres pays à renforcer et augmenter la production de l'industrie des renouvelables et affaiblir le pouvoir des États-Unis dans ce secteur en ne soutenant pas l'industrie du GNL, le Canada continue à s'aligner sur les belligérants États-Unis, les leaders de l'obstruction à la lutte pour le climat.

Que les États-Unis sombrent dans le fascisme représente une crise mondiale. Mais c'est aussi une chance pour que des pays comme le Canada se séparent de la main de fer américaine sur les politiques globales, particulièrement sa propension à faire de l'obstruction à propos des changements climatiques. Est-ce qu'un Parti canadien nous présentera une vision pour un futur durable, ou somme nous condamnés.es à suivre nos voisins vers un avenir de plus en plus autoritaire défini par la domination militaire occidentale sur quiconque tente de s'éloigner du pétrole et du gaz ?

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Le démantèlement de l’USAID a aussi des impacts sur les organismes d’aide canadiens et les communautés. Voici comment

29 avril, par Karine Robitaille, Marie-Claude Savard — , ,
Le démantèlement de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) par l'administration de Donald Trump n'affecte pas que les États-Unis et les pays qui (…)

Le démantèlement de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) par l'administration de Donald Trump n'affecte pas que les États-Unis et les pays qui reçoivent cette aide. Ses impacts se font aussi sentir sur les organismes d'aide canadiens, leur personnel et les populations qu'elles desservent.

17 avril 2025 | tiré du site thenconversation.com | AP Photo : Des personnes déplacées par les combats entre les rebelles du M23 et les soldats gouvernementaux quittent leur camp sur instruction des rebelles à Goma, en République démocratique du Congo, en février 2025. Ces personnes déplacées internes subissent les conséquences du demantèlement de l'USAID. Moses Sawasawa/
https://theconversation.com/le-demantelement-de-lusaid-a-aussi-des-impacts-sur-les-organismes-daide-canadiens-et-les-communautes-voici-comment-253886

Rappelons que le 20 janvier, le président Trump annonçait une suspension de l'aide étrangère américaine. Fin mars, l'administration informait que le personnel de l'USAID serait réduit de 10 000 à environ 15 postes. On peut anticiper une perte par cascade d'innombrables emplois au sein des organisations sous-traitantes de l'USAID, ainsi qu'un préjudice incalculable pour les millions d'individus qui n'ont désormais plus accès à des biens et services vitaux.

Le démantèlement rapide de l'agence américaine laisse peu d'espoir quant à une reprise de ses activités.

Une enquête menée le 14 février par l'Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI) s'est penchée sur les multiples impacts du démantèlement de USAID. Elle a mobilisé une quarantaine d'individus représentant 26 organismes québécois de coopération internationale, six de leurs partenaires de mise en œuvre dans les pays du Sud global, et des chercheurs et chercheuses du milieu académique spécialisées en aide internationale, dont nous faisons partie. Les résultats ne sont pas publics, mais nous vous en donnons ici les grandes lignes.

Je me spécialise en gestion de projets d'aide internationale et je dirige l'Observatoire canadien sur les crises et l'action humanitaires. Ma co-autrice, Katherine Robitaille, est doctorante et chercheuse en gestion de la coopération climatique internationale à l'Université Laval. Nous tenons à souligner l'apport dans cette recherche de Denis Côté, analyste des politiques à l'AQOCI. Il a piloté l'enquête sur l'impact des coupes de l'USAID auprès des membres.

Une femme porte un tshirt bleu
Une employée de l'USAID exhibe son t-shirt après avoir récupéré ses effets personnels au siège de l'agence à Washington, en février 2025. Jose Luis Magana/AP photo

Fin de l'âge d'or des États-Unis en matière d'aide

Né des cendres de la Seconde Guerre mondiale et des rivalités idéologiques de la Guerre froide, l'USAID a été créé en 1961 en réponse à l'insécurité mondiale qui menaçait le bien-être américain.

Grâce à l'USAID, les États-Unis ont ouvert la voie à la création d'autres agences bilatérales en Occident. Le pays a ensuite été essentiel dans la création du Comité d'aide au développement (CAD) de l'Organisation de coopération et de développement économiques(OCDE). Celui-ci établit les normes en matière d'aide publique au développement (APD).

Le démantèlement de l'USAID sonne le glas de l'âge d'or des États-Unis en APD. Les coupes s'élèvent à 60 milliards de dollars. Le pays, qui occupait depuis longtemps le premier rang parmi les donateurs du CAD, chutera à la huitième place, selon les données compilées par l'OCDE.

Certes, les États-Unis conservent leur influence idéologique et politique. En réaction aux reconfigurations des dynamiques géopolitiques provoquées par Trump, certains donateurs (l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France) ont réduit leur enveloppe d'APD. Ces pays ont opté de consacrer une plus grande part de leur budget à la sécurité nationale.

Le Canada pourrait emboîter le pas : le chef conservateur Pierre Poilièvre a proposé une réduction de l'APD pour financer la défense de l'Arctique.

Des impacts sur les organisations d'aides canadiennes et québécoises

Pour les organismes québécois et canadiens et leurs partenaires locaux, les conséquences sont multiples et profondes.

L'enquête de l'AQOCI révèle que pour les organisations dont la programmation inclut un financement de l'USAID, ou dont les partenaires de mise en œuvre en bénéficient, les pertes d'emplois sont massives.

Une organisation québécoise a rapporté qu'en République démocratique du Congo (RDC), elle a dû mettre fin aux contrats de 77 individus, coupant ainsi les services d'eau et d'assainissement pour plus de 400 000 personnes déplacées. Au Ghana, l'un des 28 pays où cette organisation mène des projets, un partenaire de mise en œuvre a dû licencier 40 travailleurs et travailleuses du jour en lendemain en réponse au gel des financements de l'USAID.

L'organisme Humanité & Inclusion indique que sur 29 projets employant plus de 700 personnes, 400 ont perdu leur travail. Selon le Carrefour de solidarité internationale, un organisme de coopération internationale situé en Estrie, ces mises à pied créent un effet domino ; ceux et celles qui conservent leur emploi subissent une pression accrue pour soutenir leurs familles dans des contextes déjà précaires.

L'incertitude règne parmi les organisations. Un autre organisme, Mission inclusion a évoqué des craintes chez certains partenaires de devoir fermer définitivement leurs portes. SUCO rapporte que plusieurs organisations qui étaient sur le point de signer des ententes se retrouvent face à des contrats gelés ou annulés. D'autres organisations doivent fermer temporairement leurs bureaux sans savoir si elles reprendront leurs activités.

Des effets importants sur les populations déjà vulnérabilisées

Les coupes de l'USAID affectent même les projets que l'agence ne finançait que partiellement. Terre sans Frontières souligne qu'au Mali, la moitié des fonds du Programme alimentaire mondial provenaient de l'USAID. La sécurité alimentaire de centaines de milliers d'individus est désormais en péril. Au Congo-Brazzaville, Humanité & Inclusion estime que 225 000 personnes ne reçoivent plus de services essentiels.

La réduction des financements depuis le gel de l'USAID en janvier entraîne la fermeture de centres de santé et limite l'accès aux médicaments essentiels. Toujours selon l'enquête de l'AQOCI, les hôpitaux soutenus par l'USAID en Haïti, qui prennent en charge des individus atteints de la tuberculose et du VIH/Sida, sont désormais menacés. Faute de soins, les transmissions et les décès évitables augmenteront.

Deux hommes passent devant un hôpital
Des gens passent devant le centre hospitalier Fontaine, temporairement fermé le lendemain de son attaque par un gang armé à Port-au-Prince, en Haïti. Les hôpitaux haïtiens sont aussi touchés par le démantèlement de l'USAID. Odelyn Joseph/AP Photo

Voici d'autres exemples :

  • En RDC, les personnes déplacées internes subissent les conséquences de l'arrêt des financements, ce qui aggrave la situation d'urgence déjà marquée par des violences physiques et sexuelles, notamment sur les filles et les femmes.
  • Au Nigéria et au Mali, les programmes agricoles et alimentaires sont suspendus, mettant en péril l'approvisionnement en nourriture pour des milliers de familles.
  • Au Guatemala, un refuge pour enfants et femmes victimes de violence a dû fermer complètement.
  • En Colombie, la réduction des financements compromet les programmes de reconstruction de la paix, et menace la stabilisation et la lutte contre l'impunité. Un projet de déminage en Colombie employant plus de 100 personnes y est à l'arrêt.
  • En Haïti, au Honduras et en Colombie, les programmes de soutien aux communautés LGBTQIA2S+ et de lutte contre les violences de genre sont en arrêt.

Le constat est clair parmi les membres de l'AQOCI et leurs partenaires : la perte de l'USAID entraîne des répercussions catastrophiques.

Vers une nouvelle solidarité internationale

Face aux coupes, rappelons l'importance de la solidarité internationale informelle et citoyenne qui demeure une force essentielle de résistance et d'adaptation aux crises.

L'ALNAP, un réseau de recherche qui pilote une méta-étude sur le système humanitaire tous les quatre ans, estime qu'en 2022, les transferts de fonds provenant de la diaspora étaient dix fois plus élevés que le volume annuel d'aide humanitaire publique. Il s'agit d'une solidarité à l'échelle humaine.

Le désinvestissement des pays donateurs de l'Occident signifie-t-il un réinvestissement des pays du sud ?

Citons par exemple la coopération médicale de Cuba, qui a déployé depuis 1960 plus de 400 000 médecins dans des pays du Sud global, selon La Havane, et qui forme gratuitement des étudiants et des étudiantes issues de pays du sud. Au Vanuatu, la réponse au cyclone Harold, qui s'est abattu sur l'archipel en pleine pandémie de Covid-19, a pu compter sur la solidarité interîles au lieu de l'aide étrangère.

Grâce à la Déclaration de Biketawa, un cadre de coopération régionale qui affirme la volonté des États insulaires du Pacifique de collaborer en matière économique, politique et sociale, les pays frappés par les crises et catastrophes ont de plus en plus recours à la solidarité de proximité.

Des centaines de tels exemples pourraient être fournis. Ils rappellent que la solidarité internationale ne se résume pas à l'aide des habituels pays donateurs.

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Résistance féministe contre le pouvoir des grandes entreprises : La vie plutôt que le profit, la paix plutôt que la guerre

29 avril, par Marche mondiale des femmes — ,
Il y a douze ans, plus de 1.100 travailleurs.euses – dont une majorité de femmes – ont été tués dans l'effondrement de l'usine Rana Plaza au Bangladesh. Il ne s'agissait pas (…)

Il y a douze ans, plus de 1.100 travailleurs.euses – dont une majorité de femmes – ont été tués dans l'effondrement de l'usine Rana Plaza au Bangladesh. Il ne s'agissait pas d'un accident, mais d'une conséquence brutale du système capitaliste qui priorise le profit avant la vie. Aujourd'hui, cette même logique alimente l'exploitation mondiale, la guerre et la destruction de l'environnement – menée par ces corporations transnationales qui agissent en toute impunité.

24 avril 2025 Journée de solidarité internationale contre les sociétés transnationales

Ces entreprises internationales prospèrent grâce à l'exploitation de la main-d'œuvre, au pillage des territoires et à la destruction des biens communs. Nos biens communs sont attaqués par les sociétés transnationales qui imposent des mégaprojets d'extraction, privatisent l'eau, la santé et l'éducation, et transforment la nature et le travail de soin en profit. Que ce soit par l'exploitation minière, l'agriculture industrielle, les mégaprojets énergétiques ou le capitalisme numérique, elles cherchent à tout transformer – même nos données, nos corps, notre air – en source d'accumulation.

Ils sont validés et protégés par les accords de libre-échange, les institutions financières internationales comme le FMI et la Banque mondiale, et même les organisations multilatérales comme les Nations unies, qui ont permis aux entreprises d'influencer les politiques publiques. Sous le couvert de « partenariats public-privé », elles légitiment un modèle de développement fondé sur l'exploitation, l'exclusion et l'effondrement écologique.

Les multinationales ne profitent pas seulement de l'exploitation du travail et de la nature – elles sont également complices de la guerre, de l'occupation et de la militarisation. L'industrie mondiale de la guerre est dominée par des géants qui produisent des armes, des systèmes de surveillance et des infrastructures militaires utilisés pour renforcer la domination géopolitique et protéger les intérêts extractifs et économiques.

Ces entreprises fournissent les armes utilisées dans les invasions militaires, les régimes répressifs et les occupations illégales. Leurs actionnaires profitent des souffrances et des destructions infligées à des populations entières – en particulier aux femmes et aux enfants.

De la Palestine au Sahel, du Congo à l'Amazonie, les intérêts des sociétés transnationales sont ancrés dans la militarisation des frontières, la persécution des défenseurs.euses de l'environnement et la répression des mouvements de résistance à l'extraction.

En outre, les grandes entreprises technologiques collaborent avec les armées et les gouvernements pour fournir des technologies de surveillance, de reconnaissance faciale, d'intelligence artificielle et de drones utilisées pour contrôler, surveiller et tuer.

Le militarisme ne se manifeste pas seulement dans les zones de conflit. Il est reproduit dans nos vies quotidiennes, à travers la répression policière, les frontières sécurisées, la violence patriarcale et la propagande corporatiste qui présente la résistance comme du terrorisme. La militarisation est un outil qui permet de garantir les profits des sociétés transnationales.

Les femmes résistent – en défendant la paix, les semences, l'eau, les soins et le savoir. Elles construisent des économies alternatives, créent des souverainetés féministes et s'organisent pour protéger la vie et les biens communs. Dans chaque crise – climat, soins, alimentation, migrations, guerres – les femmes sont en marche.

Nous marchons pour la vie plutôt que pour le profit, pour la paix plutôt que pour la guerre. Nous rejetons la marchandisation de la vie et exigeons une transformation radicale. Ce 24 avril, à l'occasion de la Semaine internationale de solidarité féministe contre les sociétés transnationales, nous lançons un appel à toutes et à tous :

– Agissez dans vos territoires.

– Dénoncez la violence des entreprises.

– Amplifiez les alternatives féministes.

Nos corps, nos territoires, nos biens communs ne sont pas à vendre.

Mondialiser la résistance, mondialiser la solidarité féministe, démanteler le pouvoir des grandes entreprises !

Nous marchons contre les guerres et le capitalisme,

nous défendons la souveraineté des peuples et le Buen Vivir !

Marche mondiale des femmes

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Portrait des Québécoises édition 2024 – Violence

29 avril, par Conseil du statut de la femme — , ,
Le CSF a rendu publique la plus récente édition du Portrait des Québécoises. Grâce à différents indicateurs statistiques, l'édition 2024 brosse un portrait de l'ampleur et de (…)

Le CSF a rendu publique la plus récente édition du Portrait des Québécoises. Grâce à différents indicateurs statistiques, l'édition 2024 brosse un portrait de l'ampleur et de l'évolution de la violence faite aux femmes au Québec.

Tiré de l'Infolettre de L'R des Centres de femmes Nouvel'R du 23 avril 2025

Il aborde plus spécifiquement :

• la violence dans les relations intimes

• la violence sexuelle

• la violence dans différents contextes, soit en milieu sportif, en milieu de travail et en ligne

• les féminicides.

Violence conjugale

Selon la définition retenue par le gouvernement du Québec en 1995, la violence conjugale « se caractérise par une série d'actes répétitifs, qui se produisent généralement selon une courbe ascendante […]. Elle ne résulte pas d'une perte de contrôle, mais constitue [plutôt] un moyen choisi pour dominer l'autre personne et affirmer son pouvoir sur elle ». La violence conjugale peut prendre plusieurs formes (psychologique, économique, physique, sexuelle, etc.) et survenir au cours d'une relation intime ou à son terme.

L'Enquête québécoise sur la violence commise par des partenaires intimes 2021-2022 montre que 40 % des femmes et 26 % des hommes de 18 ans et plus déclarent avoir subi au moins un acte de violence entre partenaires intimes au cours de leur vie. Elle ne permet toutefois pas de distinguer les actes de violence conjugale de l'ensemble des actes violents pouvant être commis entre partenaires intimes.

D'après les données du Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC), le nombre d'infractions commises en contexte conjugal qui font l'objet d'un signalement et qui sont déclarées par la police est en hausse.

Le taux de femmes victimes d'infractions commises en contexte conjugal passe globalement de 451 à 520 femmes sur 100 000 de 2005 à 2022.

Les femmes constituent 75 % des victimes d'infractions commises en contexte conjugal.

La proportion de femmes victimes d'infractions commises en contexte conjugal est supérieure dans les catégories d'infractions plus graves.

En 2022, les femmes représentent :

100 % des victimes d'homicides ;
96 % des victimes d'agressions sexuelles ;
93 % des victimes d'enlèvement, de traite ou de séquestration.

Violence sexuelle

« […] le concept de violence sexuelle […] fait notamment référence aux problématiques d'agression sexuelle, d'exploitation sexuelle et de harcèlement sexuel » et dont les manifestations sont « ancrées dans une dynamique de rapport de force » (Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle). Différentes enquêtes récentes permettent d'en prendre la mesure.

L'Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire révèle que :

15 % des filles et 3 % des garçons de 14 ans et plus déclarent, en 2020-2023, avoir déjà été forcés à avoir une relation sexuelle ;

la proportion de filles qui disent avoir déjà vécu cette situation est passée de 10 % à 15 % entre 2010-2011 et 2022-2023.

Selon l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés de 2018, réalisée par Statistique Canada :

25 % des femmes et 6 % des hommes déclarent avoir subi au moins une agression sexuelle depuis l'âge de 15 ans ;

les femmes qui sont plus susceptibles d'avoir subi cette forme de violence sont : celles appartenant à un groupe minoritaire en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (41 % c. 25 % pour les femmes hétérosexuelles et cisgenres) ;

celles ayant une incapacité (32 % c. 21 % n'ayant pas d'incapacité).

Les données du Programme DUC relatives aux infractions qui font l'objet d'un signalement et qui sont déclarées par la police montrent que :

les femmes représentent 87 % des victimes d'infractions sexuelles en 2022 et d'infractions liées à l'exploitation sexuelles en 2019 ;

le nombre d'infractions sexuelles signalées par des femmes et déclarées par la police est en hausse, notamment dans la foulée des dénonciations en ligne (2016-2018) et de la pandémie de COVID-19 (2020-2022). Il passe de 4 751 en 2015 à 7 470 en 2018 et à 10 334 en 2022 ;

l'auteur présumé est un homme dans 95 % des infractions sexuelles en 2022 et 86 % des infractions liées à l'exploitation sexuelle en 2019 ;

l'auteur présumé fait partie de l'entourage de la victime dans 90 % des infractions sexuelles en 2022 et 71 % des infractions liées à l'exploitation sexuelle en 2019.

Violence dans différents contextes

En milieu sportif

Chez les jeunes du secondaire de 14 ans et plus pratiquant un sport organisé en 2022-2023, les adolescentes sont proportionnellement plus nombreuses que les adolescents à affirmer avoir subi de la violence psychologique, instrumentale ou sexuelle (d'après l'Étude sur le vécu des adolescents et adolescentes dans les milieux sportifs au Québec).

En milieu de travail

15 % des femmes ont déclaré, en 2020-2021, avoir vécu du harcèlement psychologique ou sexuel au travail dans la dernière année, comparativement à 11 % des hommes (selon les données de l'Enquête québécoise sur la santé de la population).

25 % des femmes et 13 % des hommes ont affirmé avoir subi, en 2018, au moins un comportement sexuel non désiré au travail au cours des 12 derniers mois (selon les données de l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés).

En ligne

15 % des femmes et 12 % des hommes ont déclaré, en 2018, avoir subi au moins un comportement non désiré en ligne au cours des 12 derniers mois.

Certaines femmes sont proportionnellement plus nombreuses à rapporter avoir subi au moins un comportement non désiré en ligne :

celles issues de minorités en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (31 % c. 14 % pour les femmes hétérosexuelles et cisgenres) ;

celles ayant une incapacité (22 % c. 11 % pour celles n'ayant pas d'incapacité) ;

celles appartenant à une minorité visible (20 % c. 14 % pour celles n'appartenant pas à une minorité visible).

Source : Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés.

Les féminicides

On définit le féminicide comme le meurtre d'une femme ou d'une fille en raison de son sexe. Les féminicides ne sont pas reconnus comme des crimes distincts dans le Code criminel du Canada, de sorte qu'aucune donnée ne permet d'en comptabiliser officiellement les occurrences. Des données sont toutefois disponibles sur les femmes victimes d'un meurtre.

En 2022 au Québec :

19 femmes ou filles ont été tuées par un accusé de sexe masculin (données de l'Observatoire canadien du fémicide pour la justice et la responsabilisation).

13 femmes ont été tuées en contexte conjugal (données du Programme DUC).

Pour en savoir plus sur la violence faite aux femmes, consultez ces productions du CSF :

50 ans d'évolution en matière d'égalité entre les femmes et les hommes – Section 2.3 (« Violence »)

L'avis sur le recours à la justice réparatrice par des femmes qui ont déjà subi de la violence conjugale

L'étude sur les femmes et le sport – Section 2.2. (« La sécurité des filles et des femmes dans le milieu sportif »)

L'étude sur les personnes victimes d'agressions sexuelles ou de violence conjugale face au système de justice pénale

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Le projet de loi 94 ou comment priver des femmes de leurs droits

29 avril, par Collectif — , ,
Nous, groupes féministes de tous horizons, dénonçons avec force l'interdiction du port de signes religieux dans le réseau de l'éducation proposée par le projet de loi 94 du (…)

Nous, groupes féministes de tous horizons, dénonçons avec force l'interdiction du port de signes religieux dans le réseau de l'éducation proposée par le projet de loi 94 du ministre de l'Éducation, Bernard Drainville. Cette nouvelle loi élargirait la portée de mesures discriminatoires introduites par la loi 21, qui proscrit déjà aux figures d'autorité et aux personnes enseignant dans le réseau public de porter des signes religieux visibles. Désormais, cette interdiction s'étendrait aux étudiant·es, aux parents, à l'ensemble du personnel scolaire et aux personnes travaillant dans le cadre d'ententes avec les établissements scolaires. Cela, alors même que la constitutionnalité de telles mesures est actuellement contestée devant la Cour suprême du Canada.

Une lettre ouverte du Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec, de la Fédération des femmes du Québec et de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, appuyée par 17 autres groupes signataires, dont L'R des centres de femmes du Québec.

Lettre ouverte ― Le projet de loi 94 ou comment priver des femmes de leurs droits

Lettre ouverte au ministre de l'Éducation, Bernard Drainville
Nous, groupes féministes de tous horizons, dénonçons avec force l'interdiction du port de signes religieux dans le réseau de l'éducation proposée par le projet de loi 94 du ministre de l'Éducation, Bernard Drainville. Cette nouvelle loi élargirait la portée de mesures discriminatoires introduites par la loi 21, qui proscrit déjà aux figures d'autorité et aux personnes enseignant dans le réseau public de porter des signes religieux visibles. Désormais, cette interdiction s'étendrait aux étudiants, aux parents, à l'ensemble du personnel scolaire et aux personnes travaillant dans le cadre d'ententes avec les établissements scolaires. Cela, alors même que la constitutionnalité de telles mesures est actuellement contestée devant la Cour suprême du Canada.

Le gouvernement prétend agir au nom de l'égalité entre les femmes et les hommes pour justifier son projet de loi. Nous nous y opposons fermement justement parce que nous défendons les droits de toutes les femmes à l'égalité, à la sécurité, à l'autonomie et au travail. Pour les femmes pratiquant diverses religions, c'est l'ensemble de ces droits qui seront à nouveau fragilisés, tout comme ils le furent avec l'adoption de la loi 21. La Cour supérieure du Québec a d'ailleurs reconnu l'effet disproportionné de cette loi sur les femmes musulmanes.

La loi 21 adoptée en 2019 a eu de multiples conséquences négatives directes et indirectes, frappant principalement les femmes québécoises musulmanes portant le voile, surtout dans le milieu de l'éducation, mais affectant même celles ne le portant pas. Comme le témoignent plusieurs femmes, l'interdiction du port de signes religieux a des impacts désastreux sur leur parcours professionnel, les limite dans leurs choix de carrière et porte atteinte à leur sécurité économique. À cela s'ajoute une augmentation des violences psychologiques et physiques à leur endroit. Ces femmes, bien souvent racisées, relatent vivre plus de harcèlement au travail et être davantage les cibles d'intimidation et d'insultes dans l'espace public ou sur les réseaux sociaux. Elles doivent constamment faire preuve de stratégies et d'hypervigilance pour faire face à l'exclusion, la discrimination et la haine légitimées par cette loi.

Tous ces contrecoups ont amené les femmes musulmanes à se sentir écartées de la vie publique et exclues de la société québécoise. Selon une étude de Metropolis, 64 % d'entre elles ont vu leur volonté de participer à la vie sociale et politique diminuer depuis l'adoption de la loi 21. Au lieu de favoriser l'inclusion et l'harmonie sociale, qui sont les objectifs déclarés de nos dirigeants politiques, cette loi a eu précisément l'effet inverse.

Sachant toutes ces répercussions, comment le ministre Drainville ose-t-il déposer le projet de loi 94 ? Plutôt que de remettre en question la loi 21, il redouble d'ardeur. Il propose d'étendre l'insécurité aux femmes portant le voile et travaillant notamment au service de garde, à la cafétéria, comme conseillères pédagogiques, comme psychologues ou s'impliquant comme parents bénévoles ; des rôles essentiels à notre réseau d'éducation publique. Jusqu'où ce gouvernement ira-t-il ? Où ces femmes ont-elles encore le droit d'exister, de travailler et de s'épanouir ?

De surcroît, la Ligue des droits et libertés nous alerte que le projet de loi 94 fera fi de 38 articles de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, dont précisément le droit à l'égalité ! En tant que groupes féministes, nous refusons une telle vision sélective de l'égalité qui nie ce droit à certaines catégories de femmes. Le féminisme que nous défendons est un féminisme de l'autonomie, du respect et de la dignité. Il est intersectionnel, antiraciste et solidaire.

Notre constat est clair : le projet de loi 94 du ministre Drainville étend la portée de mesures discriminatoires ayant un impact disproportionné sur les femmes et, pour ce faire, contourne la Charte, un levier juridique qui a historiquement permis aux femmes d'améliorer leurs conditions de vie et le respect de leurs droits. C'est pourquoi il est hautement contradictoire d'affirmer que ce projet est motivé par l'égalité entre les femmes et les hommes. À cet égard, nous déplorons que les groupes féministes critiques de la loi 21 et du projet de loi 94 n'aient pas été invités en commissions parlementaires.

Les femmes musulmanes décident de porter le voile pour de multiples raisons et adhèrent fortement aux valeurs touchant l'égalité des genres. Nous, groupes féministes, soutenons leur autonomie et rejetons toute imposition de porter ou de retirer le voile. Au nom de l'égalité, nous demandons au ministre Drainville de retirer le projet de loi 94 et d'abroger la loi 21, d'engager un véritable dialogue avec les organisations musulmanes et féministes et de garantir l'accès à l'école sans condition religieuse.

Signé par :

Audrey Gosselin Pellerin, organisatrice féministe politique
Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec

Sara Arsenault, responsable des dossiers politiques
Fédération des femmes du Québec

Stephan Reichhold, directeur général
Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes

Et 17 autres groupes signataires :

Fédération des maisons d'hébergement pour femmes

L'R des centres de femmes du Québec

Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail (CIAFT)

L'Observatoire pour la justice migrante

DTMF – Association pour les droits des travailleur•ses de maison et de ferme

Réseau québécois d'action pour la santé des femmes (RQASF)

Regroupement Naissances Respectées

Le conseil canadien des femmes musulmanes

YWCA

Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN)

L'Association canadienne contre la violence sexuelle

DAWN Canada

Co-Savoir

Regroupement québécois des CALACS

Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes (FAEJ)

Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI)

Relais-femmes

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Jorge Bergoglio, contre l’idolâtrie du capital

Avec la mort de Jorge Bergoglio, le pape François, disparaît une figure peu commune, qui se distinguait, dans une Italie gouvernée par les néofascistes, et une Europe de plus (…)

Avec la mort de Jorge Bergoglio, le pape François, disparaît une figure peu commune, qui se distinguait, dans une Italie gouvernée par les néofascistes, et une Europe de plus en plus réactionnaire, par un engagement éthique, social et écologique surprenant.

Billet de blog 22 avril 2025
https://blogs.mediapart.fr/michael-lowy/blog/220425/jorge-bergoglio-contre-lidolatrie-du-capital

Avec la mort de Jorge Bergoglio, le pape François, disparaît une figure peu commune, qui se distinguait, dans une Italie gouvernée par les néofascistes, et une Europe de plus en plus réactionnaire, par un engagement éthique, social et écologique surprenant.

Depuis que Pie XII a excommunié les communistes, la gauche ne pouvait s'attendre qu'à des anathèmes du Vatican. Jean-Paul II et Ratzinger n'ont-ils pas persécuté les théologiens de la libération, accusés d'utiliser des concepts marxistes ? N'ont-ils pas tenté d'imposer à Leonardo Boff un « silence obéissant » ? Certes, depuis le XIXe siècle, il y a toujours eu des courants de gauche dans le catholicisme, mais ils n'ont rencontré que l'hostilité des autorités romaines. D'autre part, les courants cléricaux critiques à l'égard du capitalisme étaient généralement assez réactionnaires. Critiquant le socialisme féodal ou clérical dans Le Manifeste communiste, Marx et Engels constataient « son incapacité absolue à comprendre le cours de l'histoire » ; mais ils reconnaissaient dans ce mélange « d'échos du passé et de grondements du futur » une « critique mordante et spirituelle » qui pouvait parfois « frapper la bourgeoisie en plein cœur ».

Max Weber propose une analyse plus générale de la relation entre l'Église et le capital : dans ses travaux sur la sociologie des religions, il constate la « profonde aversion » (tiefe Abneigung) de l'éthique catholique envers l'esprit du capitalisme, malgré les adaptations et les compromis. C'est une hypothèse à prendre en compte pour comprendre ce qui s'est passé à Rome avec l'élection du pape argentin.
1. Jorge Bergoglio, le pape François

Que pouvions-nous attendre du cardinal Jorge Bergoglio, élu Pontifex Maximum en mars 2013 ? Certes, il était latino-américain, ce qui restait un signe de changement. Mais il avait été élu par le même conclave qui avait intronisé le conservateur Ratzinger, et il venait d'Argentine, un pays où l'Église n'est pas réputée pour son progressisme, plusieurs de ses dignitaires ayant activement collaboré avec la dictature militaire sanglante. Ce n'était pas le cas de Bergoglio : selon certains témoignages, il aurait même aidé des personnes persécutées par la junte à se cacher ou à quitter le pays. Mais il ne s'est pas non plus opposé au régime : un « péché d'omission », pourrait-on dire. Alors que certains chrétiens de gauche, comme Adolfo Pérez Esquivel (prix Nobel de la paix), l'ont toujours soutenu, d'autres le considéraient comme un opposant de droite au gouvernement des « péronistes de gauche » Néstor et Cristina Kirchner.

Quoi qu'il en soit, une fois élu, François – nom qu'il a choisi en référence à saint François, l'ami des pauvres et des oiseaux – s'est immédiatement distingué par sa position courageuse et engagée. D'une certaine manière, il rappelle le pape Roncalli, Jean XXIII : élu « pape de transition » pour garantir la continuité et la tradition, il a initié le changement le plus profond de l'Église depuis des siècles : le concile Vatican II (1962-65). Bergoglio avait d'ailleurs initialement pensé prendre le nom de « Jean XXIV » pour honorer son prédécesseur des années 1960.

Le premier voyage du nouveau pontife hors de Rome a eu lieu en juillet 2013 dans le port italien de Lampedusa, où des centaines de migrants clandestins arrivaient, tandis que beaucoup d'autres se noyaient en Méditerranée. Dans son homélie, il n'a pas hésité à s'opposer au gouvernement italien - et à une grande partie de l'opinion publique - en dénonçant la « mondialisation de l'indifférence » qui nous rend « insensibles aux cris des autres », c'est-à-dire au sort des « immigrants morts en mer, dans ces embarcations qui, au lieu d'être un chemin d'espoir, étaient un chemin de mort ». Il reviendra à plusieurs reprises sur cette critique de l'inhumanité de la politique européenne envers les migrants.

En ce qui concerne l'Amérique latine, un changement notable s'est également produit. En septembre 2013, François a rencontré Gustavo Gutiérrez, fondateur de la théologie de la libération, et le quotidien du Vatican Osservatore Romano a publié pour la première fois un article favorable à ce penseur. Un autre geste symbolique a été la béatification, puis la canonisation, de l'archevêque Romero du Salvador, assassiné en 1980 par les militaires pour avoir dénoncé la répression anti-populaire, un héros célébré par la gauche catholique latino-américaine mais ignoré par les pontifes précédents. Lors de sa visite en Bolivie en juillet 2015, Bergoglio a rendu un hommage intense et vibrant à la mémoire de son compagnon jésuite Luis Espinal Camps, prêtre missionnaire, poète et cinéaste espagnol assassiné sous la dictature de Luis García Meza le 21 mars 1980 pour son engagement dans les luttes sociales. Lors de sa rencontre avec Evo Morales, le président socialiste bolivien lui a offert une sculpture réalisée par le martyr jésuite : une croix appuyée sur une faucille et un marteau en bois...

Lors de sa visite en Bolivie, François s'est rendu à une rencontre mondiale des mouvements sociaux dans la ville de Santa Cruz. Son discours à cette occasion illustre la « profonde aversion » pour le capitalisme dont parlait Max Weber, mais à un degré jamais atteint par aucun de ses prédécesseurs. Voici un passage désormais célèbre de son discours :

« Nous punissons la terre, les peuples et les individus d'une manière presque sauvage. Et derrière tant de douleur, tant de mort et de destruction, il y a l'odeur de ce que Basile de Césarée appelait « le fumier du diable » ; l'ambition effrénée de l'argent qui gouverne. Le service du bien commun passe au second plan. Lorsque le capital s'érige en idole et domine toutes les options humaines, lorsque la cupidité de l'argent guide tout le système socio-économique, il ruine la société, condamne l'homme, le transforme en esclave, détruit la fraternité entre les hommes, oppose les peuples entre eux et, comme nous le voyons, met même en danger notre maison commune ».

Comme on pouvait s'y attendre, l'approche de François a rencontré une résistance considérable dans les secteurs les plus conservateurs de l'Église. L'un des opposants les plus actifs est le cardinal américain Raymond Burke, fervent partisan de Donald Trump, qui a également pris contact, lors d'un voyage en Italie, avec Matteo Salvini, le leader de la Ligue du Nord... Certains de ces opposants accusent le nouveau pontife d'être un hérétique, voire un... marxiste déguisé.

Lorsque Rush Linebaugh, un journaliste catholique réactionnaire (américain), l'a qualifié de « pape marxiste », François a répondu en réfutant poliment cet adjectif, tout en ajoutant qu'il ne se sentait pas offensé car « il connaissait beaucoup de marxistes qui étaient de bonnes personnes ». En effet, en 2014, le pape a reçu en audience deux éminents représentants de la gauche européenne : Alexis Tsipras, alors chef de l'opposition au gouvernement de droite d'Athènes, et Walter Baier, coordinateur du réseau Transform, formé par des fondations culturelles liées au Parti de la gauche européenne (comme la Fondation Rosa Luxemburg en Allemagne). À cette occasion, il a été décidé d'entamer un processus de dialogue entre marxistes et chrétiens, qui s'est concrétisé par plusieurs rencontres, dont une université d'été commune en 2018 sur l'île de Syros, en Grèce. En 2014, le pape a reçu une délégation des participants (chrétiens et marxistes) à ce dialogue (dont l'auteur de la présente note).

Il est vrai que lorsqu'il s'agit du droit des femmes à disposer de leur propre corps et de la morale sexuelle en général – contraception, avortement, divorce, homosexualité – François s'en tient aux positions conservatrices de la doctrine de l'Église. Mais il y a quelques signes d'ouverture, dont le violent conflit de 2017 avec la direction de l'Ordre de Malte, une institution riche et aristocratique de l'Église catholique, est un symptôme frappant. Le Grand Maître ultra-conservateur de l'Ordre, le prince (?!) Matthew Festing, a exigé la démission du chancelier de l'Ordre, le baron de Boeselager, pour le terrible péché d'avoir distribué des préservatifs aux populations pauvres menacées par l'épidémie de sida en Afrique. Le chancelier a fait appel au Vatican, qui a statué en sa faveur contre Festing ; ce dernier, soutenu par le cardinal Burke, a refusé d'obéir et a été démis de ses fonctions par le Vatican. Ce n'est pas encore l'adoption de la contraception par la doctrine morale de l'Église, mais c'est un changement...

Bien sûr, il n'y a rien de marxiste chez le pape François, et sa théologie est très éloignée de la forme marxiste de la théologie de la libération. Sa formation intellectuelle, spirituelle et politique doit beaucoup à la théologie du peuple, une variante argentine non marxiste de la théologie de la libération, dont les principaux inspirateurs sont Lucio Gera et le théologien jésuite Juan Carlos Scannone. La théologie du peuple ne prétend pas se fonder sur la lutte des classes, mais elle reconnaît le conflit entre le peuple et l'« anti-peuple » et soutient l'option préférentielle pour les pauvres. Elle s'intéresse moins aux questions socio-économiques que d'autres formes de théologie de la libération et accorde une plus grande attention à la culture, en particulier à la religion populaire.

Dans un article de 2014, « Le pape François et la théologie du peuple », Juan Carlos Scannone souligne à juste titre combien les premières encycliques du pape, comme Evangelium Gaudí (2014), décriées par ses détracteurs de gauche comme « populistes » (au sens argentin, péroniste, et non européen, du terme), doivent à cette théologie populaire. Cependant, il me semble que Bergoglio, dans sa critique de « l'idole du capital » et de tout le « système socio-économique » actuel, va plus loin que ses inspirateurs argentins. Surtout dans sa dernière encyclique, Laudato si' (2015), qui mérite une réflexion marxiste.

Laudato si'L'« encyclique écologique » du pape François est un événement d'importance planétaire, d'un point de vue religieux, éthique, social et politique. Compte tenu de l'énorme influence de l'Église catholique, il s'agit d'une contribution cruciale au développement d'une conscience écologique critique. Si elle a été accueillie avec enthousiasme par les véritables écologistes, elle a suscité l'inquiétude et le rejet des conservateurs religieux, des représentants du capital et des idéologues de l'« écologie de marché ». Il s'agit d'un document d'une grande richesse et d'une grande complexité, qui propose une nouvelle interprétation de la tradition judéo-chrétienne - rompant avec le « rêve prométhéen de domination du monde » - et une réflexion critique sur les causes de la crise écologique. Sur certains aspects, comme l'association indissociable entre le « cri de la terre » et le « cri des pauvres », il est évident que la théologie de la libération – en particulier celle de l'éco-théologien Leonardo Boff – a été l'une de ses sources d'inspiration.

Dans les brèves notes qui suivent, je voudrais souligner un aspect de l'encyclique qui explique la résistance qu'elle a rencontrée dans les milieux économiques et médiatiques : son caractère antisystémique.

Pour le pape François, les catastrophes écologiques et le changement climatique ne sont pas uniquement le résultat de comportements individuels – même s'ils jouent un rôle –, mais des « modèles actuels de production et de consommation ». Bergoglio n'est pas marxiste, et le mot « capitalisme » n'apparaît pas dans l'encyclique... Mais il est très clair que pour lui, les problèmes écologiques dramatiques de notre époque sont le résultat des rouages de l'économie mondialisée actuelle - rouages constitués par un système global, « un système structurellement pervers de relations commerciales et de propriété » (section 52 du document. Souligné par l'auteur).

Quelles sont, pour François, ces caractéristiques « structurellement perverses » ? Tout d'abord, un système dans lequel prédominent « les intérêts limités des entreprises » et « une rationalité économique discutable », une rationalité instrumentale dont le seul objectif est de maximiser les profits. En conséquence, « le principe de maximisation du profit, qui tend à s'isoler de toute autre considération, est une distorsion conceptuelle de l'économie : si la production augmente, peu importe de produire au détriment des ressources futures ou du bien-être de l'environnement ». (195) Cette distorsion, cette perversité éthique et sociale, n'est pas propre à un pays plutôt qu'à un autre, mais à un « système global, où prédominent la spéculation et la recherche de rendements financiers, qui tendent à ignorer tout contexte et tout effet sur la dignité humaine et l'environnement ». Il semble donc que la dégradation de l'environnement et la dégradation humaine et éthique soient intimement liées ». (56)

L'obsession de la croissance illimitée, le consumérisme, la technocratie, la domination absolue de la finance et la déification du marché sont des caractéristiques perverses du système. Dans une logique destructrice, tout se réduit au marché et au « calcul financier des coûts et des bénéfices ». Cependant, il faut comprendre que « l'environnement est l'un de ces biens que les mécanismes du marché sont incapables de défendre ou de promouvoir de manière adéquate ». (190) Le marché est incapable de prendre en compte les valeurs qualitatives, éthiques, sociales, humaines ou naturelles, c'est-à-dire « des valeurs qui dépassent tout calcul » (36).

Le pouvoir « absolu » du capital financier spéculatif est un aspect essentiel du système, comme l'a mis en évidence la récente crise bancaire. Le commentaire de l'encyclique est démystificateur : « Sauver à tout prix les banques, en faisant payer le prix aux citoyens, sans une décision ferme de revoir et de réformer l'ensemble du système, réaffirme une domination absolue de la finance qui n'a pas d'avenir et qui ne peut que générer de nouvelles crises après une longue et coûteuse reprise apparente. La crise financière de 2007-2008 était une occasion de développer une nouvelle économie plus attentive aux principes éthiques et favorable à une nouvelle réglementation de l'activité financière spéculative et de la richesse fictive. Mais il n'y a eu aucune réaction conduisant à une remise en question des critères obsolètes qui continuent de régir le monde » (189).

Cette dynamique perverse du système mondial qui « continue de régir le monde » est la raison de l'échec des sommets mondiaux sur l'environnement : « les intérêts personnels sont trop nombreux et il est trop facile pour les intérêts économiques de prévaloir sur le bien commun et de manipuler l'information pour éviter que leurs projets ne soient affectés ». Tant que les impératifs des puissants groupes économiques prédominent, « on ne peut s'attendre qu'à quelques déclarations superficielles, à des actions philanthropiques isolées et même à quelques efforts pour montrer une certaine sensibilité à l'environnement, alors qu'en réalité, toute tentative des organisations sociales pour changer les choses sera considérée comme une nuisance causée par des utopistes romantiques ou comme un obstacle à contourner » (54).

Dans ce contexte, l'encyclique dénonce l'irresponsabilité des « responsables », c'est-à-dire des élites dominantes, des oligarchies intéressées à préserver le système, face à la crise écologique : « Beaucoup de ceux qui détiennent la majeure partie des ressources et du pouvoir économique ou politique semblent surtout faire tout leur possible pour masquer les problèmes ou dissimuler les symptômes, en essayant seulement de réduire certains impacts négatifs du changement climatique. Mais de nombreux symptômes indiquent que ces effets continueront à s'aggraver si nous maintenons nos modèles actuels de production et de consommation ». (26)

Face à la destruction dramatique de l'équilibre écologique de la planète et à la menace sans précédent que représente le changement climatique, que proposent les gouvernements ou les représentants internationaux du système (Banque mondiale, FMI, etc.) ? Leur réponse est ce qu'on appelle le « développement durable », un concept dont le contenu est de plus en plus vide, un véritable flatus vocis comme le disaient les scolastiques du Moyen Âge. François ne se fait aucune illusion sur cette mystification technocratique : « Le discours de la croissance durable a l'habitude de devenir un moyen de distraction et de réduction de la culpabilité qui absorbe les valeurs du discours écologique au sein de la finance et de la technocratie, et la responsabilité sociale et environnementale des entreprises a l'habitude de se réduire à une série d'actions de marketing et d'image » (194).

Les mesures concrètes proposées par l'oligarchie techno-financière dominante sont totalement inefficaces, comme les « marchés du carbone ». La critique du pape à l'égard de cette fausse solution est l'un des arguments les plus importants de l'encyclique. Se référant à une résolution de la Conférence épiscopale bolivienne, Bergoglio écrit : « La stratégie d'achat et de vente de « crédits carbone » peut donner lieu à une nouvelle forme de spéculation et nuire au processus de réduction des émissions mondiales de gaz polluants. Ce système semble être une solution rapide et facile, qui donne l'apparence d'un certain engagement en faveur de l'environnement, mais qui, en tout état de cause, ne constituerait pas un changement radical à la hauteur des circonstances. Pire encore, il pourrait devenir un remède qui encourage la consommation excessive dans certains pays et certains secteurs » (171).
Des passages comme celui-ci expliquent le manque d'enthousiasme des milieux « officiels » et des partisans de l'« écologie de marché » (ou du « capitalisme vert ») pour Laudato si'...

En liant la question écologique à la question sociale, François insiste sur la nécessité de mesures drastiques, c'est-à-dire de changements profonds pour relever ce double défi. Le principal obstacle à cela est la nature « perverse » du système : « la même logique qui nous empêche de prendre des décisions drastiques pour inverser la tendance au réchauffement climatique est celle qui nous empêche d'atteindre l'objectif d'éradication de la pauvreté » (175).

Si le diagnostic de Laudato si' sur la crise écologique est d'une clarté et d'une cohérence impressionnantes, les actions qu'elle propose sont plus limitées. Certes, nombre de ses suggestions sont utiles et nécessaires, par exemple : « proposer des formes de coopération ou d'organisation communautaire qui défendent les intérêts des petits producteurs et préservent les écosystèmes locaux de la prédation ». (180) Il est également très significatif que l'encyclique reconnaisse la nécessité, pour les sociétés les plus développées, de « se contenir un peu, de fixer certaines limites raisonnables et même de faire marche arrière avant qu'il ne soit trop tard », c'est-à-dire « le moment est venu d'accepter une certaine décroissance dans certaines parties du monde, tout en mettant en œuvre les remèdes pour que d'autres puissent croître sainement ». (193)

Mais ce sont précisément des « mesures drastiques » qui font défaut, comme celles proposées par Naomi Klein dans son livre This changes everything : rompre avec les combustibles fossiles (charbon, pétrole) avant qu'il ne soit trop tard, en les laissant sous terre. Nous ne pouvons pas changer les structures perverses du mode de production et de consommation actuel sans un ensemble d'initiatives antisystémiques qui remettent en cause la propriété privée, par exemple celle des grandes multinationales des combustibles fossiles (BP, Shell, Total, etc.). Certes, le pape évoque l'utilité de « grandes stratégies qui freinent efficacement la dégradation de l'environnement et inculquent une culture du respect qui imprègne toute la société », mais cet aspect stratégique est peu développé dans l'encyclique.

Reconnaissant que « le système mondial actuel est insoutenable », Bergoglio recherche une alternative globale, qu'il appelle « culture écologique », un changement qui « ne peut se limiter à une série de réponses urgentes et partielles aux problèmes croissants de dégradation de l'environnement, d'épuisement des ressources naturelles et de pollution. Il doit s'agir d'une perspective différente, d'une façon de penser, d'une politique, d'un programme éducatif, d'un style de vie et d'une spiritualité qui acceptent la résistance à l'avancée du paradigme technocratique ». (111) Mais il y a peu d'indices d'une nouvelle économie et d'une nouvelle société correspondant à cette culture écologique. Il ne s'agit pas de demander au pape d'adopter l'écosocialisme, mais l'alternative pour l'avenir reste quelque peu abstraite.

Le pape François fait sienne « l'option préférentielle pour les pauvres » des Églises latino-américaines. L'encyclique l'expose clairement comme un impératif planétaire : « Dans les conditions actuelles de la société mondiale, où il existe tant d'inégalités et où les personnes sont de plus en plus marginalisées et privées des droits humains les plus élémentaires, le principe du bien commun se transforme immédiatement, comme une conséquence logique et inéluctable, en un appel à la solidarité et en une option prioritaire pour les plus pauvres ».

Mais dans l'encyclique, les pauvres n'apparaissent pas comme les acteurs de leur propre émancipation, le projet le plus important de la théologie de la libération. Les luttes des pauvres, des paysans et des peuples autochtones pour défendre les forêts, l'eau et la terre contre les multinationales et le commerce agricole, ainsi que le rôle des mouvements sociaux, qui sont précisément les principaux acteurs de la lutte contre le changement climatique - Via Campesina, Justice climatique, Forum social mondial - sont une réalité sociale qui n'apparaît pas beaucoup dans Laudato si'.

Ce sera toutefois un thème central des rencontres du pape avec les mouvements populaires, les premières de l'histoire de l'Église. Lors de la rencontre de Santa Cruz (Bolivie, juillet 2015), François a déclaré :

« Vous, les plus humbles, les exploités, les pauvres et les exclus, vous pouvez et vous faites beaucoup. J'ose vous dire que l'avenir de l'humanité est, en grande partie, entre vos mains, dans votre capacité à vous organiser et à promouvoir des alternatives créatives, dans la recherche quotidienne des 3 T (travail, logement, terre) et aussi dans votre participation en tant que protagonistes aux grands processus de changement, nationaux, régionaux et mondiaux. Ne vous sous-estimez pas ! Vous êtes les semeurs du changement. »

Bien sûr, comme le souligne Bergoglio dans l'encyclique, la tâche de l'Église n'est pas de se substituer aux partis politiques en proposant un programme de changement social. Avec son diagnostic antisystémique de la crise, qui lie indissociablement la question sociale et la protection de l'environnement, « le cri des pauvres » et « le cri de la terre », Laudato si' est une contribution précieuse et inestimable à la réflexion et à l'action pour sauver la nature et l'humanité de la catastrophe.

Il appartient aux marxistes, communistes et écosocialistes de compléter ce diagnostic par des propositions radicales visant à changer non seulement le système économique dominant, mais aussi le modèle pervers de civilisation imposé à l'échelle mondiale par le capitalisme. Des propositions qui incluent non seulement un programme concret de transition écologique, mais aussi une vision d'une autre forme de société, au-delà du règne de l'argent et des marchandises, fondée sur les valeurs de liberté, de solidarité, de justice sociale et de respect de la nature.


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Il est difficile de prévoir quel sera l'avenir de l'Église après la mort du pape François : qui sera élu par le prochain conclave ? Suivra-t-il l'orientation critique et humaniste de Bergoglio, ou reviendra-t-il à la tradition conservatrice des pontifes précédents ? De nombreux nouveaux cardinaux ont été nommés par François, mais quelle est leur conviction intime ?

Les prochaines semaines décideront si Bergoglio n'était qu'une parenthèse ou s'il a ouvert un nouveau chapitre dans la longue histoire du catholicisme.

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Une vaste coalition dénonce l’échec annoncé de la réforme du‬ ‭régime forestier‬

29 avril, par Collectif — , ,
"Le projet de loi de la ministre Blanchette Vézina laisse‬ malheureusement 100 % de la planification dans les mains de l'industrie forestière. Dès le‬ rapport Coulombe, qui a (…)

"Le projet de loi de la ministre Blanchette Vézina laisse‬ malheureusement 100 % de la planification dans les mains de l'industrie forestière. Dès le‬ rapport Coulombe, qui a suivi le film L'erreur boréale, on savait déjà que c'était une erreur", Dominic Tourigny, vice-président de la FIM–CSN.

Une vaste coalition rassemblant‬‭ un large éventail d'acteurs‬‭ de la‬ forêt – groupes environnementaux, organisations syndicales représentant les travailleuses et les travailleurs de‬ la filière forestière québécoise, dont la FIM–CSN, gestionnaires de zecs et de pourvoiries – condamne le‬ projet de loi no 97 déposé par la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina. Les‬ organisations parlent d'une même voix pour dénoncer l'échec annoncé de la réforme du‬ régime forestier si ce projet de loi, longuement attendu, n'est pas revu en profondeur,‬ puisqu'il ne répond ni aux enjeux actuels ni aux défis à venir.‬

Des reculs environnementaux et sociaux‬

‭Les organisations dénoncent d'importants reculs environnementaux et sociaux,‬‭ notamment‬ la concentration du pouvoir décisionnel vers le forestier en chef et les aménagistes‬ forestiers régionaux,‬‭ un zonage qui cède minimalement‬‭ 30 % du territoire forestier public à‬ l'industrie‬, l'abolition des Tables de gestion intégrée‬‭ des ressources et du territoire,‬ l'affaiblissement de la‬‭ définition de l'aménagement‬‭ écosystémique et un flou dans le‬ mécanisme de con‬‭sultation du public et des acteurs‬‭ du milieu.‬La coalition demande à la ministre une réelle modernisation du régime forestier qui assure‬ une foresterie véritablement durable et inclusive au Québec‬‭. Cette réforme doit être‬ impérativement‬‭ couplée à une nouvelle stratégie de‬‭ développement industriel et de transition‬ juste, qui permettront ensemble de diminuer les pressions sur les écosystèmes et les‬ espèces, d'apaiser les conflits avec les autres usagères et usagers de la forêt, de répondre aux menaces‬ tarifaires, d'assurer la pérennité des emplois et d'adapter les forêts à la crise climatique.‬

Absence de véritable dialogue social‬

Les organisations dénoncent aussi un processus opaque ayant mené à la rédaction de ce‬ projet de loi et l'absence d'un véritable dialogue social sur cette importante réforme. Les‬ propositions qui s'y retrouvent n'ont pas fait l'objet d'une consultation de la société civile en‬ bonne et due forme, outre durant des rencontres à huis-clos, liées à des ententes de‬ confidentialité.‬

Sommet sur la forêt le 20 mai prochain : mobilisation pour une vision commune du‬ régime forestier‬

Les organisations estiment que le secteur de la forêt n'a pas besoin d'une réforme‬ polarisante, mais d'un dialogue inclusif pour trouver des solutions durables. C'est pourquoi‬ les organisations syndicales représentant les travailleuses et les travailleurs de la filière forestière québécoise‬ organisent le Sommet sur la forêt, qui se tiendra le 20 mai prochain à Saguenay. Cet‬ événement rassemblera une diversité d'acteurs du milieu forestier désireux de contribuer à‬ l'avancement d'une foresterie durable et équitable, en explorant des alternatives aux enjeux‬‭ actuels et en abordant de manière concrète la question de la transition juste du secteur‬ forestier. Les organisations demandent à la ministre de modifier son projet de loi à la suite‬ des discussions et des propositions qui émaneront de ce sommet.‬

Citations

« La réforme proposée ne permettra pas de résoudre la crise économique, sociale et‬ environnementale en forêt. Si le projet de loi 97 n'est pas modifié, cette réforme va attiser la‬ contestation et les tensions sociales, fragiliser davantage les écosystèmes forestiers, rendre‬ nos forêts plus vulnérables aux changements climatiques, nuire à la prévisibilité et précariser‬ les travailleurs, les travailleuses et les communautés qui dépendent d'une forêt en bonne‬ santé »,‬‭ Alice-Anne Simard, directrice générale de‬‭ Nature Québec‬‭.‬

« Dans sa forme actuelle, le projet de loi visant à moderniser le régime forestier est un‬ rendez-vous raté avec la protection du territoire, des écosystèmes et des espèces. C'est le‬ fruit d'un ministère état dans l'état qui impose sa vision industrielle étroite sans véritable‬ égard aux autres missions gouvernementales et autres usagers. Ce nouveau régime‬ contient tous les ingrédients pour nuire à l'acceptabilité sociale, à la pérennité des emplois et‬ à la protection d'une ressource collective chère aux Québécoises et aux Québécois, notre forêt publique »,‬‭ Alain‬ Branchaud, directeur général à la SNAP Québec‬‭.‬

« Face à la crise économique que traverse l'industrie forestière et à la nécessité de‬ préserver les écosystèmes, les travailleurs et travailleuses sont à la recherche de solutions‬ pérennes. Malgré les prétentions de la ministre, ce projet de loi échouera à protéger les‬ emplois tout en attisant les tensions déjà palpables avec de nombreux partenaires du milieu‬ forestier. Les conflits créeront une plus grande imprévisibilité et un environnement d'affaires‬ qui éloignera les investisseurs dont nous avons cruellement besoin. Pour rendre nos emplois‬ durables, nous avons besoin d'un approvisionnement en bois fiable et d'une nouvelle‬ stratégie industrielle pour la filière. Sur ces deux fronts, le projet de loi rate sa cible »,‬‭ Daniel‬ Cloutier, directeur québécois d'Unifor‬‭.‬

« Nous avons participé activement tout au long du processus qui nous laisse profondément‬ déçus du projet de loi visant la réforme du régime forestier. Il doit impérativement faire l'objet‬ de travaux supplémentaires, car il ne répond ni aux attentes ni aux besoins de protection du‬ territoire, de la biodiversité et du développement des activités à plus faible impact‬ environnemental, comme les activités fauniques, récréotouristiques et de villégiature. De‬ surcroît, la vision proposée accentuera les iniquités dans le dialogue social au bénéfice de la‬ productivité ligneuse, tout en mettant en péril la protection de la forêt publique et le‬ développement économique régional durable et moderne »,‬‭ Myriam Bergeron, directrice‬ générale de la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs et de la Fédération‬ québécoise pour le saumon atlantique‬‭.‬

« Ça fait des années que le secteur forestier passe d'une insécurité à l'autre, dans l'attente d'une véritable évolution. Les personnes et les communautés qui en vivent ont attendu‬ longtemps, et ce qui est sur la table aujourd'hui reste flou et grandement incomplet.‬ Certaines pistes sont intéressantes, mais leur mise en œuvre soulève encore trop‬ d'inconnus. Ce qu'on a devant nous, ce sont des bases de travaux qui laissent en suspens‬ une foule de questions et d'incertitudes. Ce qu'on souhaite, c'est un régime forestier inclusif,‬‭ capable d'assurer la pérennité des emplois et la vitalité des communautés. Pour y arriver, il‬ faudra sécuriser et impliquer l'ensemble des intervenantes et intervenants, et espérer une écoute réelle lors‬ des études du projet de loi »,‬‭ Luc Vachon, président‬‭ de la Centrale des syndicats‬ démocratiques (CSD)‬‭.‬

‭« Qu'on assure un approvisionnement stable aux entreprises, c'est légitime. Mais le faire‬ sans dialogue réel, sans diversification, sans créer davantage de transformation ici même au‬ Québec, c'est rater une occasion historique. La ministre prétend parler en notre nom, il‬ faudrait qu'elle commence par nous écouter. On ne bâtira pas une foresterie durable en‭ sacrifiant la voix de ceux et celles qui en vivent »,‬‭ Nicolas Lapierre, directeur adjoint,‬ Syndicat des Métallos‬‭.‬

‭« Le gouvernement parle d'aménagement durable, mais oublie des acteurs de première‬ ligne qui aménagent, entretiennent et protègent activement nos forêts publiques depuis des‬ décennies. Nous sommes des passionnés de la forêt, engagés dans nos communautés et‬ avons une vision de développement durable pour nos territoires visités par plus d'un‬ demi-million de Québécoises et de Québécois chaque année. Ce projet de loi nous inquiète par son absence de‬ vision intégrée et de cohérence économique »,‬‭ Dominic‬‭ Dugré, président – directeur‬ général de la Fédération des pourvoiries du Québec.‬

« Pour les travailleuses et les travailleurs, on déplore que le projet‬‭ de loi ne contienne pas de conditions claires‬ pour que les compagnies puissent avoir droit aux volumes de bois de notre forêt publique.‬ Ce bois devrait soutenir le développement des régions, ça devrait être clair, dans la loi, et ne‬ pas dépendre du bon vouloir du ou de la ministre qui sera en place quand un industriel voudra‬ déménager nos jobs. Le projet de loi de la ministre Blanchette Vézina laisse‬ malheureusement 100 % de la planification dans les mains de l'industrie forestière. Dès le‬ rapport Coulombe, qui a suivi le film L'erreur boréale, on savait déjà que c'était une erreur.‬ Ça l'est encore. On s'inquiète aussi de l'aménagement intensif qui est prévu dans le tiers de‬ nos forêts. Ça risque de nous faire perdre la certification environnementale FSC qui est‬ importante pour vendre notre bois, notamment en Europe. Cet aménagement intensif devrait‬ être discuté et planifié, notamment avec celles et ceux qui effectuent le travail et avec les Premières‬ Nations‬‭ »,‬‭ Dominic Tourigny, vice-président de la‬‭ FIM–CSN.‬

À propos‬

Les organisations signataires de ce communiqué comprennent : Nature Québec, Unifor‬ Québec, la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), le Syndicat des Métallos, la‬ Fédération de l'industrie manufacturière (FIM–CSN), la Société pour la nature et les parcs‭ (SNAP Québec), la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs, la Fédération des‬ pourvoiries du Québec et la Fédération québécoise pour le saumon atlantique. Ces‬ organisations se rassemblent pour défendre un avenir durable et équitable pour les forêts du‬ Québec, dans le respect des communautés et des écosystèmes.‬

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Pape François (1936-2025) : un pape progressiste dans une Église conservatrice

Le Pape François est décédé le 21 avril 2025, lundi de Pâques. Avec lui, une partie du mouvement social, écologiste, pro-palestinien et du soutien aux réfugiés, perd un allié (…)

Le Pape François est décédé le 21 avril 2025, lundi de Pâques. Avec lui, une partie du mouvement social, écologiste, pro-palestinien et du soutien aux réfugiés, perd un allié inattendu et de poids, qui a tenu des positions très éloignées de celles de la bourgeoisie catholique d'extrême droite française. Un pape restant un pape et l'Eglise catholique restant l'Eglise catholique – cela n'a bien sûr pas empêché des positions aussi conservatrices sur d'autres sujets.

21 avril 2025 | tiré du site de Frustrations
ttps ://frustrationmagazine.fr/pape-francois-eglise

Un pape argentin et jésuite

Le Pape François, dont le nom vient de Saint François d'Assise, aura marqué la période la plus progressiste de l'Eglise depuis Vatican II (1962-1965), un concile qui s'était ouvert sous Jean XXIII et qui s'était terminé sous Paul VI et qui avait réformé l'Eglise catholique afin de l'ouvrir au monde moderne, aux questions sociales et à favoriser le dialogue avec les autres religions et les non-croyants.

Le Pape François a incarné un changement majeur dans la géographie catholique : le passage du pôle de gravité du christianisme de la vieille Europe vers le Sud global.

Le Pape François a incarné un changement majeur dans la géographie catholique : le passage du pôle de gravité du christianisme de la vieille Europe vers le Sud global. Pape François fut le premier pape non-européen de l'époque moderne et le premier pape originaire d'Amérique latine. Ce n'est pas un hasard : le catholicisme s'est beaucoup développé en Amérique latine et en Afrique tandis qu'il décline en Europe. C'est une des explications de ce retour vers l'intérêt envers les pauvres.

L'Amérique latine a notablement été marquée par la théologie de la libération, courant des années 1960 qui lisait l'Evangile à partir des luttes des pauvres et des opprimés et appelant à leur émancipation sur Terre.

Sans être de ce courant, Pape François fut toutefois le premier pape jésuite de l'Histoire, c'est-à-dire issu de la Compagnie de Jésus, un ordre religieux fondé par Ignace de Loyola au XVIe siècle qui se distingue par une approche pastorale tournée vers les démunis (justice sociale, accompagnement des marginalisés, engagement auprès des pauvres). Les jésuites sont également formés à vivre avec sobriété : le Pape François aura ainsi refusé les signes extérieurs de pouvoir comme les chaussures rouges ou l'appartement papal luxueux.

Le refus des kermesses des dominants

Ce retour aux pauvres, Pape François aura essayé de l'incarner en refusant les grandes kermesses des dominants.

Le dernier exemple le plus remarquable aura été son refus de venir à la réouverture de Notre Dame de Paris aux côtés de Trump, Macron, et Bernard Arnault pour préférer aller à Ajaccio pour une messe populaire.

“Entre Paris et la Corse, il n'y a pas photo. La Corse coche toutes les cases. (…) C'est une périphérie. Il

met le centre aux périphéries et les périphéries au centre. »
Constance Colonna-Cesari, journaliste spécialiste du Vatican, pour France Inter

Constance Colonna-Cesari, journaliste spécialiste du Vatican précisait à ce moment-là : “Entre Paris et la Corse, il n'y a pas photo. La Corse coche toutes les cases. (…) C'est une périphérie. Il met le centre aux périphéries et les périphéries au centre. C'est une île et il les a quasiment toutes faites, Lesbos, Lampedusa, etc. Ce ne sont pas des îles touristiques. Il ne va pas aux Baléares. Il va là où l'église peut se déployer, comme un hôpital de campagne, dans les périphéries géographiques existentielles, là où les gens souffrent”

L'écologie : un problème de modèle économique et social

Le Pape François avait montré une compréhension assez fine de la catastrophe environnementale et placé l'écologie au cœur de son pontificat. Dans son encyclique (une lettre officielle écrite par le pape, adressée aux évêques et souvent à tous les fidèles, pour donner un enseignement sur une question importante de foi, de morale ou de société) Laudato si' publiée en 2015, il appelait à une “écologie intégrale”, refusant d'isoler ce sujet des autres et rappelant que “tout est lié” : crise environnementale, sociale, économique. Il y dénonçait “la logique de l'exploitation et l'égoïsme” et invitait à une “conversion écologique” des systèmes économiques et du rapport à la nature.

Critique du capitalisme

Sans être, évidemment, anticapitaliste, le Pape François aura toutefois formulé des critiques très vives du capitalisme.

« Personne n'est scandalisé si je bénis un entrepreneur qui exploite potentiellement des gens, et cela est un péché très grave. Alors que si je bénis un homosexuel, des gens sont choqués… C'est de l'hypocrisie ! »
Pape François en février 2024

Il avait ainsi dénoncé une finance qui “piétine les gens”, et encourage la guerre, un système économique profondément inégalitaire qui traite les pauvres comme des “déchets”. Il défendait un accès plus équitable aux richesses, s'en était pris aux multinationales pratiquant les délocalisations pour exploiter des travailleurs moins chers. Pape François appellait également à l'annulation des dettes qui enrichissent les pays riches au détriment des pays pauvres.

En février 2024, il dénonçait l'hypocrisie de ceux qui acceptent qu'il bénisse des “entrepreneurs véreux” mais pas des homosexuels : « Personne n'est scandalisé si je bénis un entrepreneur qui exploite potentiellement des gens, et cela est un péché très grave. Alors que si je bénis un homosexuel, des gens sont choqués… C'est de l'hypocrisie ! »

Favorable à l'accueil des réfugiés

Alors que les catholiques français se sont massivement tournés vers l'extrême droite (RN et Zemmour), extrêmement hostile à l'immigration et aux réfugiés, le Pape François n'aura eu de cesse de défendre leur accueil, leur protection et leur intégration.

« La Méditerranée et la mer Égée sont devenues un cimetière insatiable, une image de notre conscience insensible et endormie”
Pape François en 2016

En juillet 2013, pour son premier voyage hors du Vatican, il s'était rendu à Lampedusa, refusant de voir la Méditerranée devenir un “cimetière” (« La Méditerranée et la mer Égée sont devenues un cimetière insatiable, une image de notre conscience insensible et endormie” déclarait-il en 2016), critiquant “la mondialisation de l'indifférence”. Dans les années qui avaient suivies, il avait fait de l'accueil des migrants un “devoir chrétien” et des politiques de rejet “un péché grave”. Pour lui il ne s'agissait pas que de déclarations de vertu abstraites : en 2015 il avait demandé « que chaque paroisse, chaque communauté religieuse, chaque monastère, chaque sanctuaire d'Europe accueille une famille » de réfugiés.

“Un ami fidèle du peuple palestinien”

Pendant que le camp occidental s'est largement vautré dans le soutien à Israël et au massacre des Palestiniens, Pape François n'a eu de cesse de dénoncer les horreurs à Gaza.

Il avait condamné la “cruauté” des frappes israéliennes, puisparlé de “terrorisme” les concernant, refusant les condamnations à géométrie variable que l'on a vu fleurir depuis presque deux ans.

Le Pape François au Vatican, le 7 décembre 2024 (photo par Reuters/Remo Casilli)

Dans son livre L'espérance ne déçoit jamais. Pèlerins vers un monde meilleur, publié en novembre 2024, il écrivait que « selon certains experts, ce qui se passe à Gaza présente les caractéristiques d'un génocide », déclenchant des réactions extrêmement hostiles du gouvernement israélien. Il avait enfoncé le clou un mois plus tard, en décembre 2024, en inaugurant une crèche au Vatican avec l'enfant Jésus sur un keffieh, le foulard traditionnel des Palestiniens. Cette crèche était l'œuvre du Comité présidentiel supérieur pour les affaires de l'Église en Palestine, organe de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), et de l'ambassade palestinienne au Vatican. L'OLP en avait profité pour redire sa « profonde gratitude au pape pour son soutien indéfectible à la cause palestinienne et ses efforts inlassables pour mettre fin à la guerre contre Gaza”.

Presque déjà mourant, en février, alors qu'il était hospitalisé,c'est pour Gaza qu'il adressait ses rares paroles et ses prières. À peine sorti de son hospitalisation, il appelait à la fin “immédiate” des frappes israéliennes.

« Selon certains experts, ce qui se passe à Gaza présente les caractéristiques d'un génocide »
Pape François dans L'espérance ne déçoit jamais. Pèlerins vers un monde meilleur (novembre 2024)
En réaction à son décès, Mahmoud Abbas a salué “un ami fidèle du peuple palestinien”.

Le scandale des crimes sexuels dans l'Eglise

Depuis vingt ans, des révélations de crimes sexuels massifs, souvent pédocriminels, parfois organisés et souvent couverts par la hiérarchie ecclésiale, se sont succédées.

En 2019, le Pape François avait levé le secret pontifical dans les cas de violences sexuelles et d'abus sur mineurs commis par des membres du clergé.

Après avoir demandé pardon au nom de l'Eglise, ce qui marquait une reconnaissance importante, Pape François a mené sur ce sujet un certain nombre d'actions. En 2019, le Pape François avait levé le secret pontifical dans les cas de violences sexuelles et d'abus sur mineurs commis par des membres du clergé. Il avait changé le droit canonique afin de rendre obligatoire le signalement de tout soupçon d'agression sexuelle. Les diocèses sont désormais obligés de mettre en place des lieux spécifiques pour recevoir les plaintes.

Enfin, il avait créé des instances de réparation comme la Commission Reconnaissance et Réparation.

Toutefois de nombreuses victimes ont également dénoncé un manque de transparence, une absence de compréhension des causes systémiques, des méthodes inadaptées et des formes de mise en scène non suivies des faits. Sur ce thème, Pape François n'aura pas été aussi radical que sur d'autres combats et sûrement pas à la hauteur du mal commis.

Des avancées sur les LGBTQ+ mais peu de progrès sur la place des femmes et la laïcité

Alors que le catholicisme est un des vecteurs majeurs de l'homophobie dans le monde, que ce soit en Europe – La Manif pour Tous, mouvement de masse homophobe était largement catholique, encouragé, organisé et subventionné par l'Eglise – en Afrique ou en Amérique latine, Pape François aura tenté de mettre à distance cette obsession homophobe d'une grande part de la population catholique en appelant à un meilleur accueil des “fidèles LGBT”.

Pape François aura tenté de mettre à distance cette obsession homophobe d'une grande part de la population catholique

En 2024,il avait autorisé la bénédiction des couples homosexuels, créant une large fronde au sein même de l'Eglise catholique.

Par ailleurs, le pape aura accueilli régulièrement des groupes de personnes transgenresdans des audiences générales au Vatican, pour notammententendre leurs témoignages et discuter de leur accueil dans l'Eglise et déclarant que “dans l'Église, il y a de la place pour tous”. En novembre 2023, il avait fait préciser par le Vatican qu'elles pouvaient recevoir le baptême et être parrains ou marraines.

Le pape aura accueilli régulièrement des groupes de personnes transgenres dans des audiences générales au Vatican

Malgré ces avancées, le chemin reste long puisque l'homosexualité est toujours considéré comme un “péché” par l'Eglise et Pape François sera resté opposé au mariage homosexuel. Il avait lui-même proféré des insultes homophobes.

Sur d'autres sujets, le Pape François sera resté conservateur ou réactionnaire. Il n'y aura pas eu, pendant son pontificat, de changements majeurs sur la conception patriarcale de l'Eglise, sur l'avortement ou la contraception. Lors des attentats contre Charlie Hebdo, celui-ci avait tenu des propos très ambigües semblant en faveur de l'interdiction du blasphème, déclarant que celui qui insultait sa mère pouvait “s'attendre à un coup de poing”.

Il n'y aura pas eu, pendant son pontificat, de changements majeurs sur la conception patriarcale de l'Eglise, sur l'avortement ou la contraception

La mort du Pape François marque la fin d'un pontificat à bien des égards exceptionnel. Pris dans les contradictions inhérentes à l'institution qu'il dirigeait, il aura pourtant ouvert des brèches inattendues dans l'édifice rigide de l'Église catholique. En assumant une parole critique sur le capitalisme, en défendant les réfugiés, les opprimés et les exclus, en tendant la main aux personnes LGBTQ+ et en dénonçant les massacres commis par Israël à Gaza, il s'est placé là où peu l'attendaient, surtout en France où la bourgeoisie catholique se range massivement dans le camp de la fascisation. Sans être une révolution, le Pape François aura pris des positions rares et courageuses, assez pour que sa disparition laisse un vide. Esperons que ce souffle venu du Sud survivra à celui qui l'incarnait.

Photo de couverture : Pape François en juillet 2015 aux côtés d'Evo Morales (Reuters)

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Marche funèbre silencieuse contre Stablex

29 avril, par Climat Québec, Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex — , ,
Loin d'être résignée, la mobilisation contre l'expansion toxique de Stablex ne fait que grandir. Blainville, dimanche 27 avril à 13 h Blainville, vendredi le 25 avril (…)

Loin d'être résignée, la mobilisation contre l'expansion toxique de Stablex ne fait que grandir.

Blainville, dimanche 27 avril à 13 h

Blainville, vendredi le 25 avril 2025 – Martine Ouellet, cheffe de Climat Québec, et Marie-Claude Archambault, de la Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex, annoncent une Marche funèbre silencieuse ce dimanche 27 avril à 13 h. Le départ se fera devant les installations de Stablex, au 760 boulevard Industriel à Blainville, pour se diriger vers la Montée St-Isidore, face à la Grande tourbière. Arrivé à destination, les participants seront invités à accrocher un message, un dessin, une fleur ou un symbole personnel sur la clôture longeant ce milieu naturel menacé – un geste de mémoire, de résistance et d'espoir.

Complicité du PM Legault et de la mairesse Poulin

Climat Québec et la Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex dénoncent non seulement les agissements de Stablex, mais aussi la complicité des autorités politiques. D'un côté, le gouvernement Legault impose un projet d'agrandissement par expropriation, à coups de bâillon. De l'autre, la mairesse Liza Poulin propose que l'agrandissement se fasse sur un terrain « alternatif »... encore plus près des résidences. Dans les deux cas, c'est le même scandale environnemental et humain qui se poursuit.

«

L'acharnement du gouvernement Legault à défendre Stablex coûte que coûte, malgré tous les drapeaux rouges, dépasse l'entendement. On parle d'expropriation forcée, de procédés défaillants, de dépassements de normes, de protections environnementales contournées. Il flotte une odeur de complaisance... et elle pue.

», déclare Martine Ouellet cheffe de Climat Québec.

« La mairesse Poulin doit cesser de faire semblant de défendre les citoyens tout en proposant un site alternatif d'enfouissement des déchets toxiques encore plus près des maisons. Elle a le pouvoir politique de financer une campagne d'échantillonnage exhaustive indépendante avec les fonds de la Ville et de s'opposer clairement à tout agrandissement. Mais elle refuse systématiquement depuis plus d'un an, préférant s'en remettre à un ministère qu'elle sait trop proche de Stablex. Pourtant, avec une nouvelle preuve de toxicité émanant d'une autorité municipale, le gouvernement ne pourrait plus, politiquement, continuer à se fermer les yeux sur un problème aussi grave de contamination. »

, dénonce Marie-Claude Archambault pour Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex .

Un appel à l'unité, à la paix et à la vie

Les organisateurs lancent un appel à toute la population de Blainville et des environs : venez marcher avec nous, en blanc(ou une couleur pâle). Cette couleur de paix, de lumière et de pureté symbolise ce que nous voulons protéger : la santé de nos proches, de nos enfants, de nos écosystèmes, et notre avenir collectif.

Dimanche, marchons ensemble pour faire entendre le silence de notre colère.

AIDE-MÉMOIRE

MARCHE FUNÈBRE SILENCIEUSE CONTRE STABLEX

DATE : DIMANCHE 27 AVRIL

HEURE : 13 H

PRISES DE PAROLE DÈS 13 H

DÉPART : DEVANT STABLEX

760 boulevard industriel, Blainville

DESTINATION : MONTÉE ST-ISIDORE

Devant la Grande tourbière

SOURCE :

https://climat.quebec/2025/04/25/communique-marche-funebre-silencieuse-contre-stablex/

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Projet de loi 69 : Une parodie de consultation sur l’énergie

29 avril, par Collectif — , ,
Nous sommes des citoyens et citoyennes qui avons récemment participé aux consultations sur le Plan de gestion intégrée des ressources énergétiques du Québec (PGIRE). Ces (…)

Nous sommes des citoyens et citoyennes qui avons récemment participé aux consultations sur le Plan de gestion intégrée des ressources énergétiques du Québec (PGIRE). Ces consultations doivent avoir lieu dans 13 villes, pour se terminer à Québec le 13 juin.

Rappelons que le PGIRE est au cœur du projet de loi 69, la Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives,de l'ex-ministre Fitzgibbon. Ce projet de loi, qui ouvre grande la porte à la privatisation des services énergétiques au Québec, est présentement à l'étude à l'Assemblée nationale.

L'enjeu du PGIRE est important puisque la manière d'utiliser nos ressources énergétiques a une incidence directe sur notre capacité à décarboner notre économie et à mener la lutte au changement climatique. Pourtant, l'annonce de la consultation n'a pas été rendue publique. Nous avons appris l'existence de cette consultation via les réseaux de communications entre les groupes citoyens actifs sur les questions environnementales. Une d'entre-nous a reçu l'invitation à participer moins de 24 heures à l'avance.

Dans leur discours d'ouverture la Ministre Fréchette (à Montréal ) et le député Yves Montigny (à St-Jean-sur-Richelieu) ont précisé le contexte de la consultation : le monde entier est en transition ; nos ressources énergétiques doivent servir à cette transition, mais aussi au développement économique. Un peu comme si on disait à un médecin urgentologue que les gestes qu'il pose doivent servir à sauver des vies et enrichir l'industrie pharmaceutique.

Les participant.es à la consultation étaient réparti.es autour de 9 tables, selon leurs différentes affiliations : une table pour les municipalités, une pour l'industrie, une autre pour les groupes environnementaux, etc. Nous avons disposé d'environ 30 minutes pour discuter entre nous de chacun des deux enjeux proposés (Comment envisager la demande énergétique ? Quelles orientations pour l'offre d'énergie ?), et avons été invité.es à inscrire le plus lisiblement possible le fruit de nos échanges sur les feuilles généreusement mises à disposition sur chacune des tables. Les élus présents dans la salle circulaient entre les tables pour prêter une oreille bienveillante aux discussions.

À la fin de l'exercice, une personne par équipe devait résumer en 8 à 10 minutes les propositions. Après les résumés, madame la ministre ou monsieur le député commentaient les idées émises : « J'entends que vous proposez d'éliminer le gaz des bâtiments,…etc. » Mais de toute évidence, le temps alloué était trop court pour discuter sérieusement ne serait-ce que sur le quart des propositions. Heureusement, les organisateurs se sont faits rassurants en nous invitant à remettre nos feuilles de notes aux responsables de la consultation à la fin de la rencontre. Disons qu'il est plutôt cocasse d'imaginer le personnel du MEIE penché sur des notes manuscrites jetées pêle-mêle sur des feuilles de papier pour en retranscrire le contenu et en faire un rapport. Si rapport il y a, et pour qui...

Il ne fait donc pas de doute qu'avec sa tournée de consultations sur le PGIRE, le gouvernement Legault veut montrer qu'il est fidèle à sa promesse, lancée lors de son élection de 2022, de tenir un grand débat de société sur les enjeux énergétiques. Mais la démonstration s'avère bien peu convaincante.

Le Québec possède pourtant une longue expérience de consultations publiques. En s'inspirant des procédures du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), la ministre Fréchette aurait pu annoncer publiquement ces consultations plusieurs semaines avant le début des audiences, de manière à permettre aux participant.es de se préparer. Le cadre et les enjeux de la consultation auraient été soumis à l'examen pour être bonifiés selon les expertises disponibles. Les documents de la consultation auraient été bien étayés et accessibles à tous. Les participant.es auraient été bien identifié.es et invité.es à transmettre leurs questions et recommandations par écrit, sous forme de mémoire, ou oralement, en s'adressant à une commission indépendante. Celle-ci aurait été chargée de faire rapport au gouvernement. Et toutes les présentations orales, tous les mémoires ainsi que le rapport de la commission auraient ainsi été publics et faciles d'accès.

Avec cette parodie de consultation sur le PGIRE qui se déroule présentement, le gouvernement Legault s'assure de demeurer en contrôle du message qui sera livré à la fin de l'exercice. Même si la ministre Fréchette a annoncé que les citoyen.nes pourront faire part de leurs recommandations en ligne et que le scénario du fameux PGIRE sera soumis à la discussion avant d'être adopté, tout est déjà en place pour éviter qu'ait lieu un véritable débat de fond sur la manière de nous affranchir des énergies fossiles et de limiter les impacts des différentes filières énergétiques sur le climat, l'environnement, la biodiversité, l'économie et les communautés.

Les groupes de la société civile et les experts ont été, et sont encore, nombreux à réclamer l'abandon ou le report du projet de loi 69 tant et aussi longtemps qu'une véritable discussion ouverte sur l'énergie du Québec ne sera pas menée dans le cadre d'une commission indépendante. Ce simulacre de consultation sur le PGIRE n'a rien pour nous satisfaire. Force est de constater que nous sommes encore loin de la ligne de départ.

Louise Morand, L'Assomption en Transition
Katherine Massam, Mouvement d'Action Régional en Environnement
Émilie Laurin-Dansereau, ACEF du Nord de Montréal
Jacques Tétreault, Secrétaire de Solidarité populaire Richelieu-Yamaska
Gilles Cazade, Président du syndicat des spécialistes et professionnels d'Hydro-Québec
Jean-Philippe Waaub, Collectif scientifique sur les enjeux énergétiques au Québec

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Avenir de l’éolien au Québec : après 25 ans d’audiences du BAPE, un nouveau rapport de recherche propose des solutions concrètes d’apaisement

29 avril, par Front commun pour la transition énergétique — , ,
Montréal, le 24 avril 2025 - Le Front commun pour la transition énergétique rend public un rapport indépendant portant sur les conditions d'un dialogue apaisé sur l'éolien au (…)

Montréal, le 24 avril 2025 - Le Front commun pour la transition énergétique rend public un rapport indépendant portant sur les conditions d'un dialogue apaisé sur l'éolien au Québec.

Cette publication offre une analyse détaillée des préoccupations émises vis-à-vis des parcs éoliens développés au Québec depuis 25 ans, souligne les faiblesses des mécanismes de participation existants et pointe les occasions à saisir afin d'améliorer l'acceptabilité sociale des projets éoliens sur le territoire.

La recherche, menée en résidence au Front commun pour la transition énergétique, est basée sur cinq axes de travail : une revue de littérature sur l'acceptabilité sociale et la consultation des peuples autochtones, vingt entretiens de cadrage avec des représentant·es d'intérêts et de structures varié·es, une enquête terrain dans deux MRC et une analyse de l'ensemble des vingt-huit dossiers éoliens des archives du BAPE.

En croisant les données issues de ces cinq axes, le rapport propose huit grands constats :

Des demandes récurrentes du BAPE n'ont pas trouvé de réponses depuis 25 ans.

Certains effets de l'éolien restent mal connus et doivent être étudiés et documentés (santé, écosystèmes, impacts cumulés).

Les municipalités sont au cœur de la transmission de l'information : elles ont besoin d'être outillées (informations exploitables, ressources humaines).

Il existe une grande quantité de données disponibles mais dispersées concernant les projets éoliens au Québec ; les archives du BAPE sont une mine d'informations sous-exploitée.

Une consultation générique sur l'éolien et des consultations sur la transition énergétique des MRC (que certaines ont déjà initiées) permettraient d'anticiper les enjeux sur le terrain et de gagner du temps dans la mise en œuvre des projets.

La clarification du processus de prise de décision par le gouvernement concernant la politique énergétique et la délivrance des autorisations contribuerait à améliorer l'acceptabilité sociale des projets.

La perspective d'ouvrir les consultations à des contributions créatives et des recherches participatives permettrait à la fois de bonifier les projets et d'élargir la participation du public.

Il est possible (et souhaitable) d'inclure un « indicateur d'acceptabilité sociale » dans la grille d'analyse des projets éoliens.

Ce rapport a été produit par Amandine Volard, ingénieure en congé sabbatique de l'ADEME (Agence de la transition écologique en France).

Pour consulter le rapport

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" Nous faisons de l’information politique, pas de l’électoralisme "

29 avril, par Réseau québécois des groupes écologistes — , ,
Bien qu'il contienne de belles propositions quant à l'accessibilité pour les électeurs et électrices vulnérables ou pour combattre la désinformation, le projet de loi 98 (Loi (…)

Bien qu'il contienne de belles propositions quant à l'accessibilité pour les électeurs et électrices vulnérables ou pour combattre la désinformation, le projet de loi 98 (Loi modifiant la Loi électorale principalement afin de préserver l'intégrité du processus électoral), tel que présenté à l'Assemblée nationale, comprend, de l'avis du RQGE, des modifications très problématiques à la Loi mettant en danger la liberté d'expression de la société civile.

par l'insertion de la notion de dépenses électorales et préélectorales faites par des tiers ;

par l'absence de définition de ce qu'est un acte avantageux ou désavantageux pour une entité politique ;

en imposant une période préélectorale plus longue aux tiers que pour les entités politiques ;

le tout assorti de mécanismes et lourdeurs bureaucratiques et amendes abusives pour le tiers état.

Le RQGE est très inquiet face à ces insertions pouvant décourager, voire judiciariser et appauvrir des personnes ou groupes de la société civile de bonne foi, et ce de façon disproportionnée, dans un encadrement législatif mal défini, portant à interprétation et même à l'arbitraire.

Pour plus de détails quant aux problématiques de ce projet de loi, voire soutenir une parole citoyenne sans entrave, nous vous invitons à consulter et partagerle Mémoire RQGE PL98 que nous avons présenté le 23 avril 2025 devant la Commission parlementaire des Institutions.

Réseau québécois des groupes écologistes RQGE

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Programme de stabilisation des berges du lac : Un BAPE s’impose !

29 avril, par Mouvement Onésime-Tremblay — , ,
Le processus de renouvellement du programme de stabilisation des berges est déjà commencé et doit aboutir en 2026, exactement 100 ans après la fermeture des vannes du barrage (…)

Le processus de renouvellement du programme de stabilisation des berges est déjà commencé et doit aboutir en 2026, exactement 100 ans après la fermeture des vannes du barrage d'Îles Malignes qui ont rehaussé le niveau moyen du lac d'une dizaine de pieds.

Mouvement Onésime-Tremblay

Après cent ans, il est plus que temps de se poser les bonnes questions et d'arrêter de jouer au pompier.

Nous, du Mouvement Onésime-Tremblay, croyons qu'un BAPE s'impose compte tenu de l'ampleur des problèmes. Résultat de rafistolages à la pièce, ces derniers sont légions. Pensons à la sortie de la Belle-Rivière qui cause beaucoup de soucis aux utilisateurs nautiques. La réorganisation de la sortie réalisée il y a quelques années n'a pas donné les résultats escomptés étant donné que des roches se sont déplacées dans le chenal et que le sable s'est accumulé causant ainsi des dommages aux utilisateurs en plus de limiter l'accès au lac. Pensons aussi à la disparition des plages à St-Gédéon-sur-le-lac, remplacées par des perrés ce qui est une autre conséquence d'un lac trop haut vulnérable aux grands vents.

Le problème le plus épineux est sans nul doute celui de la Pointe Langevin où deux expropriations ont déjà eu lieu et d'autres sont à venir. Devant l'ampleur du problème, Rio Tinto a lâchement pris les jambes à son cou et s'est déresponsabilisé. Pourtant, tout le monde sait bien que tout ça est indissociable du niveau élevé du lac et du débit élevé de la rivière Péribonka en hiver. C'en est au point où même le village de Péribonka est menacé. Cent ans après, la tragédie du lac Saint-Jean se poursuit. Onésime Tremblay a des raisons de se retourner dans sa tombe.

Les gens du lac Saint-Jean doivent prendre en main leurs problèmes. Rio Tinto n'était pas là il y a plus de cent ans et ne sera pas là éternellement. Les gens du Lac l'étaient et le seront. Un BAPE est l'occasion parfaite pour que s'expriment tous ceux et celles qui le désirent et nous souhaitons qu'ils soient nombreux.

Le premier objectif du Mouvement Onésime-Tremblay créé l'automne dernier est « de favoriser l'expression et la diffusion d'un point de vue citoyen axé sur le bien commun face à l'impact des actions passées, présentes et futures d'Alcan et de Rio Tinto ». La tenue d'un BAPE s'inscrit parfaitement dans cette démarche.

Naturellement, parce qu'un BAPE se doit d'examiner l'ensemble de la situation, sa tenue disqualifie à l'avance toute entente préalable à la réalisation du processus d'audience. L'état du lac concerne tout le monde et pas seulement un petit groupe de personnes tout autant élus qu'ils soient. Il en va de la crédibilité même du processus du Bureau des audiences publiques. Il ne faut pas contribuer à diminuer son rôle.

Compte tenu des décisions anti-environnementales (Northvolt, Stablex…) du gouvernement Legault, nous sommes conscients que la pression populaire devra être importante. Dans le but de favoriser une dynamique, nous invitons toutes les personnes et organismes qui appuient la démarche de le faire savoir sur la page Facebook du Mouvement Onésime-Tremblay.

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Amazon : Alliance Ouvrière lance une semaine de perturbation *économique du 27 avril au 3 mai

29 avril, par Alliance ouvrière, Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) — , ,
Montréal et Québec, 25 avril 2025 — Alliance Ouvrière lance une semaine d'action et de perturbation économique du 27 avril au 3 mai, sous le thème « Jusqu'à la victoire finale (…)

Montréal et Québec, 25 avril 2025 — Alliance Ouvrière lance une semaine d'action et de perturbation économique du 27 avril au 3 mai, sous le thème « Jusqu'à la victoire finale ».

Chaque jour, des actions de protestation mettront en lumière la complaisance du gouvernement du Québec envers Amazon et ses pratiques. L'organisation dénonce également les réformes du ministre du Travail Jean Boulet, notamment le projet de loi 89.

Pour lancer la semaine, le groupe organise une manifestation-convoi à Trois-Rivières le dimanche 27 avril 2025 sous le titre « Boulet, réveille ! ». Elle partira du Parc de Normanville à 13h, situé au coin de la rue de Normanville et de la rue Nérée-Beauchemin.

Cinq actions de perturbation, qui se tiendront dans la grande région de Montréal entre le lundi 28 avril et le samedi 3 mai, ne seront pas annoncées publiquement avant les faits. Elles seront publicisées par voie de communiqué au moment où elles commenceront. Toutes ces actions auront pour but de perturber le cours normal des activités économiques.

D'autres actions déjà publiques :

- Mardi 29 avril : la section de Québec d'Alliance Ouvrière organise une action de visibilité au centre-ville de la capitale nationale.

- Jeudi 1er mai à Montréal : la section montréalaise organise un contingent dans la manifestation syndicale, au Parc Lalancette à 17h30. Elle sera présente en compagnie de la campagne citoyenne « Ici, on boycotte Amazon » ainsi que le Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval.

- Jeudi 1er mai à Québec : La section de Québec se joindra à la manifestation à la Place de l'Université du Québec à 16h30.

- Samedi 3 mai : à 14h, la section de Québec organise une action de solidarité intersyndicale à Sainte-Foy.

Des organisations et syndicats ont déjà indiqué à Alliance Ouvrière leur intention de tenir des actions supplémentaires au courant de la semaine.

Citations

*Félix Trudeau, président du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) et membre d'Alliance Ouvrière :
-

« Les travailleurs licenciés d'Amazon ont tout fait pour réveiller Legault et son gouvernement, mais ils continuent de nous ignorer. Et ça, malgré une rencontre en personne avec le ministre du Travail ! Rendu là, il ne reste plus d'alternative. La seule voix que ce gouvernement écoutera peut-être, c'est celle qui menace les profits de ses amis. »

Benoît Dumais, porte-parole d'Alliance Ouvrière :
-

« Legault, Carney, Bezos... Est-ce qu'ils pensent qu'on va rester tranquilles pendant qu'ils nous arrachent nos droits un à un, comme ils l'ont fait aux travailleurs d'Amazon ? Qu'on va regarder nos conditions de vie se détériorer pendant qu'eux engrangent les profits ? Ils devraient relire leurs livres d'histoire. La classe ouvrière s'est déjà soulevée, et elle pourrait bien le refaire. »

-

« Amazon a orchestré sans conséquence un des plus grands licenciements collectifs de l'histoire du Québec, tout en faisant un doigt d'honneur à ses lois. C'est inacceptable. Le gouvernement doit la sanctionner sévèrement et la forcer à compenser sérieusement les travailleurs qui ont perdu leur emploi. »

Page Facebook : facebook.com/alliance.ouvriere

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Occupation du siège social d'Hydro-Québec pour dénoncerla vente à rabaisd'ébergie aux Américains et à AWS*

Montréal, 28 avril 2025 — *Un groupe de manifestant occupent depuis quelques minutes le siège social d'Hydro-Québec à Montréal. Cette action été organisée par Alliance Ouvrière, qui est accompagné du Syndicat d'Amazon Laval-CSN. Alors que la population canadienne se dirige vers les urnes pour choisir son approche envers les États-Unis et leur guerre commerciale, les militants dénonce comment Hydro-Québec vend son énergie à rabais à des méga-entreprises américaines comme Amazon Web Services (AWS).*

En effet, à l'aide de tarifs préférentiels, Amazon paie presque deux fois moins chers son électricité qu'un travailleur québécois moyen. La multinationale a aussi reçu des rabais supplémentaires de 20% la première année, diminuant de 5% par année.

C'est sans compter que le gouvernement provincial et fédéral continuent d'octroyer des contrats majeurs à AWS, indirectement financés par les québécois ordinaires qui payent le plein pris pour leur électricité, chaque mois.

Finalement, il convient de rappeler en cette journée d'élection que le PDG d'Intelcom (qui a repris le contrat de distribution de Prime) est le frère de Mélanie Joly1, qui joue son siège aujourd'hui. Celle-ci est également ministre des affaires étrangères et directement responsable de la relation
avec les États-Unis.

Un parti osera-t-il remettre en question le statu-quo où les institutions gouvernementales donne des contrats publiques important, des rabais et des subventions à d'immenses multinationales américaines, proche de Donald Trump ?

CITATIONS

*Benoît Dumais, porte-parole d'Alliance Ouvrière :*

« François Legault utilise Hydro-Québec pour forcer les québécois ordinaires à payer l'électricité d'AWS, en nous chargeant quasiment deux fois plus qu'à Amazon. Pendant ce temps-là, les libéraux fédéraux font semblant de se tenir debout face aux États-Unis, mais ne semble pas trop se soucier qu'ils utilisent nos ressources à rabais. »

« À force d'attaques contre les syndicats et de vendre nos ressources aux américains, Legault et Joly commencent à nous rappeler Maurice Duplessis. »

*Félix Trudeau, président du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL-CSN) et membre d'Alliance Ouvrière :*

«

Amazon ferme ses entrepôts et nous laissent avec des miettes. Et quelle est la réaction de François Legault ? Rien du tout. Pendant ce temps là, le gouvernement provincial et fédéral continuent de gaver Amazon Web Services d'argent public, entres autres à l'aide d'Hydro-Québec. »

*À propos d'Alliance Ouvrière :* Alliance Ouvrière vise à constituer la classe ouvrière en force politique indépendante. Elle organise et mobilise la classe ouvrière dans les milieux de travail et les autres sphères de la vie sociale afin de récupérer l'outil de la grève politique. Page Facebook :
facebook.com/alliance.ouvriere

*À propos du Syndicat des Travailleuses et Travailleurs d'Amazon Laval (STTAL) :* Le STTAL regroupe les travailleurs et travailleuses de l'entrepôt DXT4 d'Amazon, à Laval. Il a été fondé en mai 2024. Il est le premier syndicat de la multinationale au Canada.

MISE À JOUR :

Les manifestants ont quitté les lieux vers 12h45 après avoir occupé les bureaux pendant environ 30 minutes.

Ils ont ensuite manifesté devant les bureaux pendant un 15 minutes supplémentaire.

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Jour de deuil : la sécurité et le bien-être des travailleuses et travailleurs doivent être en tête des priorités

29 avril, par Congrès du travail du Canada (CTC) — , ,
Chaque année, le 28 avril, les travailleuses et travailleurs du Canada soulignent le Jour de deuil national, une occasion solennelle de commémorer et honorer les personnes qui (…)

Chaque année, le 28 avril, les travailleuses et travailleurs du Canada soulignent le Jour de deuil national, une occasion solennelle de commémorer et honorer les personnes qui sont blessées, rendues malades ou mortes en raison de leur travail. Aujourd'hui, nous nous réunissons en souvenir et en solidarité, et nous réfléchissons aux vies changées à jamais par ces tragédies. Nous renouvelons notre engagement à veiller à ce que les travailleuses et travailleurs rentrent à la maison sains et saufs à la fin de chaque journée.

Cette année, les syndicats du Canada appellent à des mesures urgentes pour éliminer non seulement les dangers visibles en milieu de travail, mais aussi ceux qui ne peuvent pas être vus. Les environnements de travail dangereux, sous-financés ou stressants ont des effets bien réels sur la santé mentale. L'exposition à des substances dangereuses et la mauvaise qualité de l'air intérieur peuvent également causer des séquelles permanentes. Ce n'est pas parce qu'une blessure ou une condition ne laisse pas de cicatrices physiques qu'elles ne changent pas la qualité de vie.

Pendant la seule année 2023, il y a eu au Canada 1 057 décès en milieu de travail et plus de 274 000 réclamations pour blessures entraînant une perte de temps. Ce ne sont pas seulement des chiffres : il s'agit de personnes dont la vie a été écourtée ou modifiée de façon permanente. Et ces chiffres ne représentent que la partie visible de l'iceberg. De nombreuses autres blessures et maladies ne sont jamais signalées, reconnues ni prises en charge, surtout lorsqu'elles sont invisibles.

« Ce n'est pas uniquement la question des accidents — mais des défaillances systémiques », déclare Bea Bruske, présidente du CTC. « Quand on tourne les coins ronds, quand on ignore ou qu'on n'applique pas la réglementation et quand les profits passent avant les personnes, les travailleuses et travailleurs en paient le prix. La loi Westray a pour but de tenir les employeurs criminellement responsables des décès en milieu de travail causés par la négligence. Mais sans application cohérente, le pouvoir de la loi est limité. La vie d'un travailleur n'est pas une dépense d'affaires. »

Les jeunes travailleurs sont particulièrement vulnérables. Un grand nombre d'entre eux intègrent le marché du travail sans connaître les risques qui ne sont pas évidents ; des risques qui peuvent mener à des séquelles durables. Chaque travailleuse et travailleur a le droit de savoir à quoi il est exposé, et chaque employeur a le devoir de fournir un milieu de travail sécuritaire et sain, notamment en protégeant les travailleurs contre les risques invisibles et en reconnaissant que les blessures liées à la santé mentale sont valides et indemnisables.

Le Jour de deuil national de cette année tombe le même jour que les élections fédérales. Les syndicats du Canada exhortent les électeurs à garder à l'esprit le bien-être des travailleurs lorsqu'ils se rendront aux urnes.

« Il est possible de prévenir les blessures et les maladies en milieu de travail ; elles ne font pas partie du travail. Chaque travailleuse ou travailleur mérite de rentrer à la maison en santé et en sécurité à la fin de son quart de travail », indique madame Bruske. « Alors aujourd'hui, nous pleurons, mais nous luttons aussi. Nous luttons pour les vivants. Nous luttons pour la justice. Et nous luttons pour un avenir où aucune personne ne doit risquer sa vie ou son bien-être pour un chèque de paie. »

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La Fédération autonome de l’eneignement (FAE) demande le retrait du projet de loi 94 : Loi visant à renforcer la laïcité dans le réseau de l’éducation.

29 avril, par Fédération autonome de l'enseignement (FAE) — , ,
Le mémoire de la FAE souligne particulièrement les point suivants. Avirl 2025 • La profession enseignante est actuellement suffisamment encadrée. Le projet de loi no 94, (…)

Le mémoire de la FAE souligne particulièrement les point suivants.

Avirl 2025

• La profession enseignante est actuellement suffisamment encadrée. Le projet de loi no 94, qui reprend en grande partie les encadrements légaux déjà en vigueur, n'est pas nécessaire ;

• La réponse à des événements condamnables et isolés ne doit pas être l'ajout et l'usage de mesures de contrôle disproportionnées et généralisées à l'ensemble du réseau de l'éducation ;

• Le projet de loi no 94 met à mal le jugement professionnel du personnel enseignant et pour cette raison, il nuira à leur travail ;

• Le projet de loi no 94 ne règle pas les problèmes qui affectent le réseau scolaire, qui sont nombreux, et en crée de nouveaux ;

• Par le projet de loi no 94, le gouvernement nous rappelle qu'il préfère imposer et sanctionner, plutôt que négocier ;

• La Fédération autonome de l'enseignement privilégie la mise en place d'un plan d'action ministériel pour s'assurer de l'application des encadrements existants ;
Considérant ce qui précède, la Fédération autonome de l'enseignement demande le retrait du projet de loi no 94.

Pour lire l'ensemble du mémoire cliquez sur l'icône

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Des soins dans des murs en ruine : quand l’état des lieux menace la santé et la sécurité

29 avril, par Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), Julie Bouchard — , , ,
Il faut le voir pour le croire. Des murs gangrenés par la moisissure, des équipements défectueux, des fuites d'eau à répétition, des ascenseurs constamment en panne, de la (…)

Il faut le voir pour le croire. Des murs gangrenés par la moisissure, des équipements défectueux, des fuites d'eau à répétition, des ascenseurs constamment en panne, de la vermine qui rôde, des bâtiments infestés d'amiante. Et au milieu de ce chaos, des professionnelles en soins qui continuent, avec courage et dévouement, à offrir les meilleurs soins possibles à la population. Voilà le quotidien dans trop d'hôpitaux et de centres de soins au Québec en 2025.

À Drummondville, Montréal, Sorel, Saint-Jérôme, Mont-Laurier — et bien d'autres endroits —, des établissements de santé tombent en ruine, sous le regard indifférent d'un gouvernement plus préoccupé par des mégaprojets inutiles que par la sécurité de son personnel et de ses citoyen-ne-s. Ces lieux censés être synonymes de guérison sont devenus, dans bien des cas, des zones à risque.

Si les murs de certains de nos hôpitaux pouvaient parler, ils hurleraient à l'abandon. Et leur cri serait celui de toutes les professionnelles en soins du Québec, épuisées de devoir soigner dans des conditions dignes d'un autre siècle. Comment parler de qualité des soins quand les outils manquent, quand les infrastructures menacent de céder, quand les milieux de travail sont à ce point insalubres que la santé de celles qui y exercent est elle-même compromise ?

Pendant ce temps, que fait le gouvernement ? Il investit à coups de millions dans des projets qui n'ont aucun lien avec les besoins urgents du réseau de la santé. Plus de soixante millions de dollars pour des études sur un troisième lien mort-né. Des centaines de millions engloutis dans le fiasco SAAQclic. Sept millions pour séduire une équipe de hockey millionnaire à venir faire du tourisme à Québec. Et bien sûr, une pluie de millions versés à Northvolt, sans débat public, sans transparence, sans conditions.

Mais lorsqu'il s'agit de rénover un hôpital, de réparer un ascenseur ou de s'assurer que les salles d'urgence ne débordent pas, les coffres sont soudainement vides. On nous répète qu'il faut faire des choix responsables, que le budget est serré, que les ressources sont limitées. Mais il semble que ces contraintes ne s'appliquent qu'à la santé et à l'éducation. Quand vient le temps de satisfaire des intérêts économiques ou politiques, l'argent, lui, coule à flots.

Ce désintérêt chronique pour l'état des infrastructures de soins est non seulement un affront aux professionnelles en soins, mais aussi à la population. Car il ne s'agit pas seulement de conditions de travail indignes : il s'agit de sécurité, de décence, de respect. Chaque dollar gaspillé dans un projet douteux est un dollar qui manque pour protéger une vie, prévenir une chute, éviter une infection.

Et dans un contexte où les besoins en santé explosent, où la population vieillit et où la santé mentale devient un enjeu majeur, continuer de négliger l'entretien et la modernisation de nos établissements, c'est foncer droit dans le mur. La situation actuelle favorise l'exode des professionnelles en soins vers des milieux plus sécuritaires, plus modernes, plus respectueux. Peut-on vraiment les blâmer ?

Le gouvernement doit se ressaisir. La santé n'est pas une ligne comptable ni un levier de marketing politique. C'est un pilier fondamental de notre société. Il est impératif de réinvestir massivement dans nos infrastructures, de garantir des milieux de soins sécuritaires et salubres, et de respecter l'expertise de celles qui, jour après jour, prennent soin de nous.

Il est plus que temps de cesser de jouer au Monopoly avec les fonds publics. Ce qui est en jeu ici, ce n'est pas une partie de stratégie financière. Ce sont nos vies. Nos corps. Notre dignité.

Julie Bouchard
Présidente de la Fédération Interprofessionnelle de la santé du Québec—FIQ

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Notes sur une mobilisation anti-impérialiste planétaire : « Hands off Ethiopia »

29 avril, par Martin Gallié — , ,
Ce texte propose de revenir sur une mobilisation exceptionnelle dans l'histoire du mouvement ouvrier et de l'internationalisme, encore peu documentée en français : la campagne (…)

Ce texte propose de revenir sur une mobilisation exceptionnelle dans l'histoire du mouvement ouvrier et de l'internationalisme, encore peu documentée en français : la campagne menée en solidarité avec l'Éthiopie entre 1934 et 1936 contre l'invasion italienne, plus connue en anglais sous le nom de « Hands off Ethiopia ».

À travers ce bref retour historique, par un auteur qui n'a aucune compétence et aucune prétention d'historien, il s'agit de mettre en perspective certains débats qui traversent actuellement la gauche radicale concernant la solidarité armée avec l'Ukraine. L'objectif est notamment de tenter de faire ressortir certaines difficultés rencontrées à l'époque par les militant·es socialistes pour construire une solidarité internationale avec l'Éthiopie qui articule tout à la fois le soutien aux luttes de libération nationale et la lutte des classes ; le soutien à la lutte contre le fascisme et la lutte contre toute forme de colonialisme et d'impérialisme.

  • « Si Mussolini l'emporte, cela signifiera le renforcement du fascisme, la consolidation de l'impérialisme et le découragement des peuples coloniaux en Afrique et ailleurs. La victoire du Négus, en revanche, constituerait un coup terrible pour l'impérialisme dans son ensemble et donnerait un élan puissant aux forces rebelles des peuples opprimés. Il faut vraiment être complètement aveugle pour ne pas le voir ». Léon Trotsky, « Le conflit Italo-éthiopien », juillet 1935"

À l'heure où la gauche internationale se fracture sur la question du soutien militaire à apporter à la résistance ukrainienne afin qu'elle puisse, ou ne puisse pas, se défendre contre l'impérialisme Russe, nous proposons ici de faire un pas en arrière. Il s'agit de revenir sur une mobilisation internationale exceptionnelle contre une autre agression impérialiste : la campagne de solidarité avec l'Éthiopie entre 1934 et 1936 contre l'invasion italienne, plus connue en anglais sous le nom de « Hands off Ethiopia ».

Cette mobilisation reste étrangement peu documentée en français alors qu'il s'agit d'une des plus importantes mobilisation internationale de l'histoire ouvrière du XXe siècle [1]. Pendant plus d'une année, elle donne lieu à d'innombrables manifestations de solidarité à travers le monde mais également, ce qui est encore plus rare, à de très nombreuses actions pour bloquer les livraisons d'armes, voire même pour encourager un enrôlement militaire dans l'armée éthiopienne. Cette campagne est également exceptionnelle en ce qu'elle marque « un tournant dans l'organisation politique antiraciste et anticoloniale sur le continent africain et dans la diaspora » [2]. Des figures devenues incontournables du mouvement de lutte contre le colonialisme et le racisme, comme C. L. R. James, Tiémoko Garan Kouyaté, George Padmore, Amy Ashwood Garvey, se mobilisent et tissent des liens amenés à perdurer bien au-delà de la campagne. Enfin, une dernière particularité remarquable de cette mobilisation est qu'elle se construit à la base, comme « une sorte de globalisme par en bas » [3], c'est-à-dire en dehors – voire contre - les principaux partis politiques et les organisations syndicales internationales. C'est ainsi une mobilisation en réaction à l'hypocrisie et à la passivité des États et des organisations internationales, comme la Société des Nations mais également des organisations ouvrières qu'elles soient sociales-démocrates, comme la Seconde internationale ou la Fédération syndicale internationale (FSI) ou communistes, comme le Komintern et le Profintern. Bref, pour Joseph Fronczak, auteur d'une précieuse étude sur le sujet et sur laquelle nous nous appuyons ici, cette campagne est « l'un des tournants les plus critiques dans la formation d'une gauche mondiale au XXe siècle, avec des effets sur l'histoire internationale qui se sont poursuivis jusqu'à la Seconde Guerre mondiale et ont duré jusqu'à l'ère de la décolonisation de l'après-guerre » [4].

Et aujourd'hui encore, ce retour historique permet de mettre en perspective certains des débats qui divisent la gauche sur la solidarité à apporter à l'Ukraine : comment articuler soutien à la lutte de libération nationale et la lutte des classes ? Comment articuler lutte contre le fascisme et lutte contre le colonialisme et l'impérialisme [5] ? Comment construire une solidarité internationale avec un peuple envahi sans soutenir les impérialismes concurrents ?

Brève mise en contexte historique

Depuis le début des années 1930, l'Italie fasciste de Mussolini planifie politiquement et militairement d'envahir l'Éthiopie [6]. En décembre 1934, des affrontements à la frontière somalienne (« l'incident de Welwel ») lui fournissent un prétexte. Des négociations de mauvaise foi pendant toute la première partie de l'année 1935, lui donne le temps d'amasser des armes et d'envoyer en Érythrée, une colonie italienne, la plus grande armée coloniale jamais envoyée en Afrique, soit environ 500 000 hommes, en comptant des ouvriers, des responsables des communications, des médecins etc. Finalement, le 2 octobre 1935, elle envahit l'Éthiopie du dictateur Haïlé Sélassié 1er, dit le Négus. Addis-Abeba tombe le 5 mai 1936, date qui marque officiellement la fin de la guerre mais pas celle de la résistance éthiopienne qui ne cessera de harceler les forces italiennes jusqu'à prise de pouvoir par les britanniques en 1941. Les estimations varient beaucoup mais selon certains au moins 760 000 éthiopien·nes perdront la vie (dans un pays d'environ six millions d'habitant·es) - dont nombre empoisonné·es par du gaz moutarde, de faim, de maladie [7].

La guerre consacre l'impuissance de la Société des Nations à s'opposer aux ambitions impérialistes de l'Italie. Elle révèle également l'absence de volonté politique des principales puissances occidentales comme de l'URSS stalinienne à s'y opposer.

De fait, dans un premier temps, les États européens, la France et le Royaume-Uni en tête, espèrent éviter de pousser Mussolini « dans les bras de Hitler ». Ils ne feront donc rien dans les premier mois de l'année 1935 pour contrarier ses ambitions en Éthiopie. Au contraire, la France signe en janvier une entente de non-intervention avec l'Italie et le Royaume-Uni décrète un embargo sur les armes à destination de l'Éthiopie. Après le début de l'invasion, la France et, surtout le Royaume Uni, insistent et réussissent à imposer des sanctions via la SdN. Ils développent alors, selon Florence Oppen, « la propagande bourgeoise comme quoi ce conflit était une lutte des « démocraties » (Angleterre, France, USA) contre le « fascisme » (Italie) » [8] et ils présentent les sanctions économiques comme une alternative crédible au soutien armé à la résistance éthiopienne [9]. Ces sanctions ne ciblent pourtant pas l'essentiel à savoir le charbon, le pétrole et l'acier, qui restent alors de précieuses sources de revenus pour les britanniques et les français, et sans lesquelles Mussolini n'aurait pas pu mener à bien son projet colonial [10].

Les États-Unis de Roosevelt s'engagent quant à eux dans une politique dite de non-intervention, voire isolationniste. Le Département d'État étatsunien contraint même la Standard-Vacuum Oil co. à renoncer à un « contrat pétrolier » conclut pendant la guerre avec l'Empereur éthiopien dans une tentative désespérée de ce dernier d'impliquer les États-Unis dans le conflit [11]. Ce « deal », qui avait toute les apparences d'un racket, prévoyait la « location » de la moitié du territoire éthiopien à la compagnie pétrolière [12].

Enfin, pour les Soviétiques, derrière un discours de lutte contre « les fascismes » Italien et Éthiopien, il s'agit de ne pas se brouiller avec les Italiens dans l'espoir de contrer l'expansionnisme de l'Allemagne Nazie [13]. Par ailleurs, à la même époque, l'Union soviétique entretient d'importants échanges commerciaux avec l'Italie et continue de lui vendre, plus ou moins discrètement, des matières premières dont du pétrole. Bref, en mettant sur le même plan le fascisme italien et éthiopien, l'Union soviétique renonce à lutter contre le colonialisme et l'impérialisme italien et instrumentalise la lutte contre le fascisme à ses propres fins.

La lutte contre le fascisme et la marginalisation des luttes anti-impérialistes et anti-racistes

En effet, depuis les années 1924-1925 Staline et Boukharine considèrent que l'URSS est assiégée par les États bourgeois. Contre les thèses de Marx, Engels, Lénine et Trotsky notamment, ils défendent alors l'idée qu'il est possible de réaliser le « socialisme dans un seul pays ». Dans cette perspective, la priorité de la politique étrangère soviétique n'est plus d'encourager la révolution internationale mais de défendre la « patrie du prolétariat » contre les partis fascistes mais également contre la social-démocratie identifiée comme complice si ce n'est comme une variante du fascisme. Cette analyse sera théorisée lors sixième congrès de 1928 du Komintern, sous le nom de la stratégie dite « classe contre classe ». Concrètement, les partis communistes du monde entier doivent alors refuser toute alliance électorale, tout « front unique » avec la social-démocratie, désormais formellement qualifiée de sociale-fasciste ; y compris dans le cas de luttes contre le fascisme ou de décolonisation [14].

Finalement, après la prise de pouvoir par les nazis en 1933, Staline change progressivement de cap. L'Allemagne, et dans une moindre mesure l'Italie fasciste et le Japon impérial, sont désormais perçus comme les principales menaces militaires qui pèsent sur l'URSS. Le rapprochement entre l'Union soviétique et les démocraties occidentales (Royaume-Uni et France en particulier) est donc considéré comme le meilleur moyen de lutter contre les nazis.

Dans ce contexte, la critique des démocraties occidentales, et donc la critique de leur politique coloniale et impérialiste, est secondarisée, « mise en sourdine » [15]. La consigne est donnée aux partis communistes à travers le monde, via le Komintern, de centrer la lutte contre le fascisme et d'encourager les « fronts populaires » avec les sociaux-démocrates [16]. À partir de ce moment, souligne Tom Buchanan, seule une minorité de militant·es s'engage dans une lutte qui articule tout à la fois la lutte contre le fascisme et la lutte contre l'impérialisme. En fait, la majorité du mouvement ouvrier « se concentre sur la menace militaire et politique immédiate posée par l'Allemagne, l'Italie et le Japon plutôt que sur les iniquités de l'empire » [17].

À l'inverse, au même moment, les militants anticolonialistes, antiracistes et anti-impérialistes s'éloignent des instances staliniennes, du Komintern et du Profintern. Georges Padmore par exemple, qui avait activement participé à la Ligue contre l'impérialisme et l'oppression coloniale et au Comité international des travailleurs noirs, deux organisations étroitement liées au parti communiste soviétique, quitte le Komintern en 1933. Pour l'organisation communiste G. Padmore accorde une place trop importante à la lutte contre le racisme et le colonialisme au détriment de la lutte des classes. À l'inverse G. Padmore accuse « le Komintern de modérer son anticolonialisme, afin de permettre à l'Union soviétique de rechercher des alliances anti-allemandes avec la Grande-Bretagne et la France » [18]. Dans le même sens, en 1933 également, Tiémoko Garan Kouyaté, l'un des fondateurs de la Ligue de Défense de la Race Nègre (LDRN) en France est exclu du parti communiste français, officiellement pour des questions de malversation mais officieusement pour avoir refusé de se plier à la stratégie du « classe contre classe » et pour avoir priorisé les luttes anticoloniales [19].

Un antifascisme impérialiste

En ce qui concerne le conflit Italo-éthiopien, cette ligne politique signifie, pour les partis communiste, d'occulter le caractère colonial et impérialiste de la conquête italienne et, à l'inverse, de mettre en exergue du caractère fasciste des régimes italiens mais également éthiopiens. Une politique qui permet alors, au nom de la lutte contre "les fascismes", de légitimer l'absence de soutien matériel à l'Éthiopie. À un point tel que de la fin de l'année 1934 jusqu'au mois d'août 1935, l'URSS comme le Komintern restent largement inactifs et développent un discours incohérent pour se justifier.

D'un côté ils affichent un timide soutien verbal à l'intégrité territoriale de l'Éthiopie et au « peuple éthiopien », par opposition à « l'Éthiopie fasciste ». Mais d'un autre côté, ils refusent d'accorder un quelconque soutien militaire au régime du Négus, qualifié de bourgeois et d'impérialiste au même titre que l'Italie. Les partis communistes et de nombreux partis de gauche européens suivent alors cette ligne et refusent de s'engager dans des campagnes de solidarité avec le Gouvernement éthiopien. À titre d'exemple, l'exécutif de l'International Labour Party anglais estime que « la différence entre les deux dictateurs rivaux et les intérêts qui les sous-tendent ne valent pas la perte d'une seule vie britannique », adoptant ainsi une posture de neutralité, pacifiste, contrairement à la position défendue par de nombreux membres du parti [20]. Les régimes italien et éthiopien sont donc renvoyés dos à dos, que ce soit au nom de la priorité donnée à la lutte contre le fascisme et à la défense de l'URSS ou du pacifisme.

Bref, le Komintern et les partis communistes notamment, occultent délibérément la dimension coloniale, raciste et impérialiste de la conquête de l'Éthiopie par l'Italie ce qui fait dire à Tom Buchanan que par bien des aspects l'anti-fascisme de l'époque est en fait impérialiste :

  • « to a surprising degree the anti-fascism of the later 1930s rested on imperial assumptions » [21].

L'absence de solidarité des partis communistes et la division du mouvement

Concrètement cette posture légitime l'absence de tout soutien à l'Éthiopie. L'URSS comme la plupart des partis communistes et des démocraties occidentales, n'apportent aucune aide, aucun soutien militaire au gouvernement éthiopien [22]. George Padmore, par exemple, dénoncera violemment la passivité et l'absence de soutien de l'URSS et des organisations communistes rappelant que « not one rouble was sent to Abyssinia, not one bandage, not one ton of wheat » [23]. Et il faut attendre la fin du mois d'août 1935, soit quelques semaines avant le déclenchement de la guerre et alors que la campagne « Hands off Ethiopia » est déjà à son sommet à travers le monde, pour que le Komintern prenne officiellement position. Il dénonce alors, toujours très timidement, l'Italie fasciste et accepte implicitement l'idée d'un front commun avec les organisations sociales-démocrates [24].

Concrètement toujours, cette politique centrée sur la dénonciation des fascismes italien et éthiopien, signifie que la campagne Hands off Ethiopia va se construire malgré ou contre les partis communistes. De fait, au nom de la priorité accordée à la lutte contre le « social-fascisme », ils s'opposent à la construction de liens de solidarité avec les organisations qui se mobilisent alors en défense de l'Éthiopie. À titre d'exemple, en France, le Parti communiste français et le Komintern s'opposent à des actions communes entre l'Union des travailleurs noirs - qui est alors plus ou moins contrôlée par le parti communiste - et la Ligue de défense de la race noire (LDRN), une organisation indépendantiste qui se mobilise alors activement contre la guerre [25].

Mais si le mouvement se construit malgré tout c'est que pour de nombreux militant·es soutenir l'Éthiopie, c'est défendre un projet politique d'émancipation plus large que l'antifascisme et la lutte des classes : c'est également celui de la lutte pour l'indépendance, contre le colonialisme, contre le racisme, contre l'impérialisme et pour le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Le mouvement de solidarité se construit alors contre la réthorique soviétique, des partis communistes et leurs pratiques. C.L.R. James, militant trotskyste en Angleterre au sein de l'Independent Labour Party anglais (ILP), considère ainsi que la priorité accordée par les staliniens à la lutte antifasciste revient à donner la priorité aux intérêts des européens sur les intérêts des non-européens colonisés [26]. C'est notamment pour cette raison qu'il fonde en 1935, avec Amy Ashwood Garvey, l'International African Friends of Ethiopia (IAFE) et organise de nombreuses manifestations, en défense de la souveraineté éthiopienne [27].

Dans le même sens, la féministe britannique Sylvia Pankhurst déclare que l'antifascisme ignore les souffrances des victimes non blanches du fascisme. Pour elle, l'accent mis sur l'antifascisme contribue à masquer le caractère colonial et raciste de la conquête éthiopienne [28].

Enfin, tout une étude reste à faire sur le sujet, mais on relèvera que lorsque les partis communistes s'engagent finalement dans la campagne Hands Off Ethiopia, à l'automne 1935, ils continuent de s'attaquer aux groupes qui se sont constitués aux États-Unis autour de la question raciale et de la solidarité des afro-américains avec les Éthiopiens et qui dénoncent l'attitude hypocrite de l'URSS. À titre d'exemple on peut lire dans The Communist International l'organe officiel de propagande de la IIIe Internationale (Komintern) à l'automne 1935 :

  • "Les réactionnaires bourgeois nègres ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour brouiller les pistes, d'abord en en faisant une question de race, Nègres contre Italiens, en fermant les magasins italiens avec des escadrons volants, etc. (A New York et dans le New Jersey, il y a eu de petites émeutes entre Italiens et Nègres.Et, deuxièmement, en calomniant l'U.R.S.S. affirmant qu'elle soutien l'Italie (traduction deepl). [29]

Cette analyse est également développée par les dirigeants communistes aux États-Unis. "Not a Race War" écrit ainsi James W. Ford, un des représentants du Parti communiste étatsunien, lui-même noir :

  • Il y a cependant certaines sections du peuple noir qui considèrent les événements d'Ethiopie comme une guerre de tous les hommes noirs contre tous les hommes blancs, en d'autres termes une « guerre raciale ». C'est inexact ! La guerre d'Ethiopie est une guerre défensive nationale contre une attaque impérialiste de pillage et devrait et doit recevoir le soutien de toutes les forces antifascistes et anti-impérialistes. C'est sur cette base que peut se construire le front uni de tous les alliés du peuple éthiopien" (traduction deepl) . [30].

L'action de l'Internationale des gens de la mer et du Comité syndical international des travailleurs noirs

Si le Komintern et la plupart des partis communistes restent largement inactifs jusqu'à l'automne 1935, des travaux révèlent toutefois l'action de deux organisations communistes internationales, pourtant étroitement dépendantes du Komintern et qui ont malgré tout tenté de mobiliser leurs membres : l'Internationale des gens de la mer (ISH) et le Comité syndical international des Travailleurs noirs (ou International Trade Union Committee of Negro Workers - ITUCNW).

Au cours de l'année 1935, l'ISH - un syndicat international communiste de dockers - lance des appels au boycott des livraisons d'armes à l'Italie, à au moins deux reprises. La première campagne est lancée en mars 1935. Selon H. Weiss, elle échoue car l'ISH est alors largement dysfonctionnelle depuis la prise du pouvoir par les nazis et le déménagement en urgence de son siège à Amsterdam. Mais cet échec est également dû à la stratégie déployée. De fait, conformément à la stratégie définie par les instances soviétiques, l'ISH invite les dockers et les marins à défendre le « peuple abyssin » mais pas « l'Abyssinie », c'est-à-dire l'empereur et le système politique. Une telle position n'est clairement pas « inclusive », note H. Weiss, en ce sens qu'elle mine la construction de solidarité avec le gouvernement éthiopien d'une part et d'autre part avec ceux et celles attachés à la décolonisation et au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Bref, le mot d'ordre ne convint pas grand monde.

En octobre 1935, après le VIIe congrès mondial du Komintern d'août 1935, le secrétariat de l'ISH lance un second appel au boycott international des navires italiens. Mais là encore l'appel est un échec. L'ISH refuse toujours d'appeler à la solidarité avec le Gouvernement éthiopien et l'International Transport Workers Federation (ITF) – le principal syndicat des gens de mer associé à la Seconde internationale quant à lui – refuse de s'associer avec des syndicats communistes [31].

Le Comité syndical international des travailleurs noir tente également très tôt de mobiliser et joue un rôle important grâce, notamment, à son journal The Negro Worker et à l'investissement de son dirigeant Otto Huiswoud. Celui-ci, qui a remplacé George Padmore à la tête de l'organisation, milite activement pour faire de la Ligue l'avant-garde de la campagne. C.L.R James, pourtant anti-stalinien et qui s'implique activement dans la campagne au Royaume Uni, soulignera le rôle joué par le mensuel The Negro Worker qui circule de port en port et diffuse les appels au boycott un peu partout dans le monde [32].

Mais l'action des communistes, d'Huiswoud et de la Ligue, comme celle de l'ISH restent limitées et ils peinent à mobiliser a contrecourant du Komintern.

L'hypocrisie soviétique mise à nue

De fait, c'est surtout la politique et l'hypocrisie éhontée de l'URSS qui mine les efforts déployés par les membres de l'Internationale des gens de la mer ou du Comité syndical international des travailleurs noirs en les plaçant clairement « en porte-à-faux » [33]. En effet en septembre 1935, le New York Times publie en première page un article révélant le soutien matériel apporté par l'URSS à l'Italie. Le journal expose alors la complicité du régime stalinien qui tout en condamnant formellement la campagne de Mussolini, poursuit des échanges très lucratifs avec l'Italie et soutient activement la colonisation éthiopienne [34].

Un mois plus tard, un article de George Padmore publié dans The Crisis, le journal fondé par W.E.B. du Bois et organe officiel de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) étatsunienne, donne le « coup de grâce » à l'action de Huiswoud et du Comité, en rapportant à son tour les échanges commerciaux de l'URSS avec l'Italie fasciste. Selon H. Weiss,

  • « La nouvelle fit le tour de l'Atlantique africain, ce qui eut pour conséquence que de nombreux militants noirs, sinon la plupart, rompirent avec les partis et les organisations communistes » [35].

Une tentative d'articulation entre soutien aux guerres de libération nationale et lutte contre les impérialistes

La rhétorique contradictoire de l'URSS et du Komintern qui tout en affirmant timidement leur soutien au « peuple éthiopien », refusent de s'engager concrètement et ne cessent de renvoyer dos à dos les régimes fascistes italien et éthiopien, n'échappent pas à Léon Trotsky. Celui-ci, dans un texte de juillet 1935, revient sur ce conflit « de la plus haute importance » et se dissocie alors clairement de cette position stalinienne. Il insiste alors pour soutenir l'Éthiopie au nom de la lutte contre l'anti-impérialisme :

  • « Bien entendu, nous sommes pour la défaite de l'Italie et pour la victoire de l'Éthiopie, et nous devons donc faire tout notre possible pour empêcher, par tous les moyens en notre pouvoir, que d'autres puissances impérialistes soutiennent l'impérialisme italien et en même temps faciliter du mieux que nous pouvons la livraison d'armes, etc. à l'Éthiopie.
    Néanmoins nous devons faire valoir que cette lutte n'est pas dirigée contre le fascisme mais contre l'impérialisme. Quand c'est de guerre qu'il s'agit, il n'est pas question pour nous de savoir qui est « le meilleur » du Négus ou de Mussolini, mais d'un rapport de forces et du combat d'une nation sous-développée pour se défendre contre l'impérialisme »
    [36].

Plus tard, en avril 1936, Trotsky dénonce de nouveau les partis de gauche socialistes ou staliniens qui prônent le pacifisme, qui refusent de prendre parti en faveur de l'Éthiopie, au motif qu'il s'agit de deux dictateurs fascistes en conflit. Comme si l'Éthiopie sous-développée et l'Italie puissance coloniale pouvaient être mises sur un pied d'égalité ; comme si des dictateurs n'avaient jamais pu jouer un rôle progressiste dans l'histoire (il cite notamment Cromwell et Robespierre) ; comme si la victoire de Mussolini ou du Negus aurait les mêmes conséquences pour la classe ouvrière.

  • « Si Mussolini l'importe, cela signifiera le renforcement du fascisme, la consolidation de l'impérialisme et le découragement des peuples coloniaux en Afrique et ailleurs. La victoire du Négus, en revanche, constituerait un coup terrible pour l'impérialisme dans son ensemble et donnerait un élan puissant aux forces rebelles des peuples opprimés. Il faut vraiment être complètement aveugle pour ne pas le voir » [37].

Trotsky qualifie alors ceux qui se contentent de parler de « querelles entre dictateurs », comme « un modèle exemplaire de l'impuissance spirituelle et morale du pacifisme » [38].

Dans le même temps cependant, il insiste sur l'importance et la nécessité pour la classe ouvrière de dénoncer l'hypocrisie et les pratiques de tous les impérialistes, y compris des soutiens affichés à l'Éthiopie. Il invite alors à soutenir un agenda d'actions distinct de celui des États de la SdN, à développer des « sanctions ouvrières » :

  • « La vérité́, c'est que si les ouvriers commencent à appliquer contre l'Italie leurs propres sanctions, leurs actions vont inévitablement atteindre leurs propres capitalistes et la S.D.N. sera alors contrainte d'abandonner toute sanction. Elle ne propose aujourd'hui de sanctions que parce que les voix des ouvriers ne s'élèvent dans aucun pays. L'action ouvrière ne peut commencer qu'en opposition absolue à la bourgeoisie nationale et à ses combinaisons internationales. Soutien de la S.D.N. et soutien des actions ouvrières sont comme l'eau et le feu : on ne les marie pas". [39].

Cette position sera notamment activement défendue aux États-Unis par les des militants trotskystes du Socialist Appeal, qui défendent alors la nécessité d'articuler un soutien actif à l'Éthiopie et une critique radicale de tous les impérialismes.

  • « Nous devons œuvrer pour un boycott de l'Italie, un boycott si efficace qu'il vaincra l'Italie. Mais nous devons également lutter contre toute implication dans une guerre au nom de « notre » gouvernement impérialiste (…) nous rejetons l'idée de boycotter à la fois l'Italie et l'Éthiopie » [40].

Une mobilisation ouvrière à l'échelle planétaire

Certes, la mobilisation ne part pas uniquement de la base. Il y a bien eu des appels internationaux à la solidarité avec l'Éthiopie provenant d'organisations ou de partis de gauche. Outre le soutien de certains organisations trotskystes, on a vu que les appels au boycott lancé par l'ISH ont eu une diffusion mondiale, notamment grâce à journal The Negro Worker. Mais ces appels, estime H. Weiss, sont le plus souvent des réactions à des actions déjà menées localement, par des syndicats, par les comités anti-guerres locaux ou des équipages, indépendants du Komintern.

Ainsi, à la différence de la campagne internationale « Hands off China » lancée contre le Japon suite à l'invasion de la Mandchourie en 1932 et qui avait été dirigée et menée par les organisations politiques et syndicales communistes, le Komintern et le Profintern en particulier, la campagne « Hands off Ethiopia » est surtout le fait d'organisations nationales, de terrain, syndicales, antiracistes, religieuses etc [41].

C'est donc un mouvement qui part de la base mais qui ne vient pas de nulle part. Il s'inscrit notamment dans la continuité d'autres grandes mobilisations internationales, comme celles pour les « Scottsboro boys », pour Angelo Herndon ou Sacco et Vanzetti [42], autant de campagnes populaires, qui « contrastent avec l'inertie et la division de la gauche institutionnelle durant ces années » selon Fronczak [43]. Toutefois, la mobilisation contre la guerre en Éthiopie marque un changement d'échelle [44]. À la différence de ces précédentes mobilisations, qui concernaient des enjeux nationaux et des individus, des « causes célèbres » pour reprendre la formule de Buchanan [45], il s'agit ici d'une mobilisation contre une guerre impérialiste, entre deux États, au cours de laquelle tout le répertoire d'actions militantes est mobilisé ; des plus classiques, comme les pétitions, sit-in, manifestations, aux plus radicales comme des effigies brulées, des grèves, des boycotts, des blocages, du vandalisme, des actes de sabotages, des mutineries.

De fait, ce mouvement donne lieu à d'innombrables mobilisations à travers le monde. T. Kouyaté et plus récemment J. Fronzcak ont identifié des dizaines de manifestations ou des actions en France, au Royaume-Uni, aux États-Unis, au Japon, au Brésil, en Égypte, en Tunisie, en Inde, en Guyane, dans les Caraïbes, en Afrique du Sud etc. Il s'agit parfois de petites actions directes. Ainsi, à Chicago le 22 juin 1935, une jeune femme blanche de 19 ans et une autre noire de 24 ans s'attachent avec des menottes au consulat italien de Chicago, vêtues de T-shirt avec les inscriptions, « Hands off Ethiopia », devant une trentaine de soutiens, communistes ou non, blancs, noirs, hommes et femmes [46]. Mais très souvent, il s'agit d'importantes manifestations, regroupant des milliers de personnes. À titre d'exemple, le 17 juillet à Johannesburg une importante manifestation est organisée, regroupant des blancs et des noirs contre le fascisme italien ; une effigie de Mussolini est brulée. Le 5 août, plus de 100 000 personnes manifestent à Harlem. À Paris, le 22 août 1935, Messali Hadj, figure de la lutte anticoloniale algérienne, se souvient d'un « gargantuan meeting », au cours de laquelle il prend la parole et appelle à la solidarité de tous les travailleurs, indépendamment de leur religion ou couleur de peau, contre le fascisme . De même, les britanniques se mobilisent massivement contre la guerre tandis que les socialistes de Rio de Janeiro organisent « a mammouth demonstration » . Et selon Fronzcak, « [n]ulle part dans le monde, le sentiment d'identification à l'Éthiopie n'a été aussi aigu que dans toute l'Afrique » . Il a notamment identifié des actions et des manifestations au Sierra Léone, au Nigéria, au Ghana, Kenya etc [47].

À noter enfin que cette campagne suscite parfois d'importantes confrontations, qui peuvent être très violentes. Ainsi une émeute éclate à Harlem en mars 1935 au cours de laquelle les manifestants dénoncent le fascisme italien. En août 1935, les rues de Jersey City sont, trois jours durant, le lieu de violentes confrontations entre fascistes et antifascistes d'origine italienne. En octobre, des jets de pierres sont jetée sur le consulat italien de Rio de Janeiro, du piquetage est organisé devant celui de New York ; le 3 octobre une violente bagarre éclate à Toulouse quand le bruit circule que des immigrés italiens souhaitaient répondre à l'appel à la mobilisation lancé par Mussolini etc [48].

Blocage des livraisons d'armes et appels à la mobilisation armée

Mais ce mouvement ne se limite pas à manifester son opposition à la guerre. D'innombrable actions de boycott, des grèves et même des mutineries se déploient pour empêcher les livraisons de matériel, militaire ou non, à l'Italie, ce qui est relativement exceptionnel dans l'histoire ouvrière. Et encore une fois, comme l'ont déjà relevé H. Weiss et J. Fonczak, si certains partis de gauche se sont parfois mobilisés pour mener de telles actions [49], la plupart d'entre elles sont réalisées plus ou moins spontanément par les organisations syndicales locales, des marins et des dockers, indépendamment des consignes des organisations syndicales internationales.

Et la liste des actions menées et recensées, notamment par H. Weiss, est impressionnante :

  • « L'équipage de cinq navires grecs lancent une grève pour protester contre l'envoi de matériel de guerre destiné aux troupes italiennes. Les travailleurs portuaires d'Alexandrie (Égypte), du Cap et de Durban (Afrique du Sud), de Bombay (Inde) et de Marseille (France) refusent de charger des navires italiens. Il semble qu'aucune de ces activités n'ait été coordonnée par le secrétariat de l'ISH, mais par des comités locaux et des activistes. Des grèves et des boycotts similaires ont été organisés aux États-Unis (San Pedro), au Royaume-Uni (Cardiff ; Londres), en France (Port Saint-Louis-Du-Rhône ; Marseille), en Belgique (Anvers), en Grèce (Le Pirée), en Égypte (Port Saïd), en Algérie (Bone) et en Afrique du Sud-Ouest / Namibie (baie de Lüderitz) » [50].

J. Fonczak rajoute de nombreuses autres actions comme des dockers qui refusent de charger un bateau italien à San-Francisco, à Marseille, (le SS Vildemetz), à Seattle (le SS Cellini) à Bône en Algérie ou à Port of Spain, à Trinidad et Tobago ; en mer noire, des marins grecs et roumains se mutinent à bord d'un tanker italien ; à Montréal, des pierres sont jetées sur un bateau avec des tracts invitant les marins à ne pas livrer d'armes à l'Italie etc [51].

Enfin, des militant·es ont également lancé des appels à s'engager militairement. Ainsi, « [à] Istanbul, les partisans de l'Éthiopie organisent une campagne d'enrôlement pour l'armée éthiopienne » [52]. Dans le même sens, suite à une réunion à Nairobi, les participants, demandent à la Grande-Bretagne de lever une armée noire en cas d'invasion italienne » tout en réclamant la fin de l'Empire britannique [53]. Enfin, C.L.R. James propose en 1935 de « former une brigade militaire composée de Britanniques noirs volontaires pour rejoindre la résistance éthiopienne contre les troupes italiennes », une initiative qui ne débouchera pas. C.L.R. James affirmera plus tard dans le journal de l'ILP, New Leader, avoir alors voulu s'enrôler comme volontaire dans l'armée éthiopienne :

  • « Mon espoir était d'entrer dans l'armée. Cela m'aurait donné l'occasion de prendre des contacts non seulement avec des abyssins et d'autres africains, mais à leurs côtés, j'aurais eu la meilleure opportunité́ de défendre le socialisme internationaliste » [54].

Si ces appels à s'enrôler dans l'armée éthiopienne ne débouchent pas, ils lancent toutefois une idée qui sera reprise l'année suivante, avec les Brigades internationales pendant la guerre civile espagnole. Par ailleurs, force est de constater que ce sont bien ces appels à la solidarité armée avec l'Éthiopie et à ne pas dissocier la lutte contre le fascisme, contre le colonialisme et contre les impérialismes – et non pas les mots d'ordre des partis communistes appelant à lutter exclusivement contre les fascismes – qui ont fortement contribué à mobiliser les travailleurs et les travailleuses un peu partout dans le monde, bien au-delà des milieux syndicaux communistes [55].

Remarques conclusives

Alors pour conclure, nous avons bien conscience que l'Italie et l'Éthiopie de 1935 ne sont pas la Russie et l'Ukraine de 2022 et qu'il est toujours très délicat de faire des analogies historiques. Toutefois, il nous semble difficile de ne pas faire un lien ici entre l'opposition des partis communistes d'hier à soutenir militairement l'Éthiopie colonisée et le refus de toute une partie de la gauche radicale d'aujourd'hui à soutenir militairement l'Ukraine envahie.

Dans le premier cas, cette opposition était justifiée au nom du pacifisme, de la stratégie dite de « classe contre classe » ou de la lutte contre le régime fasciste du Négus et de ses alliés. Dans le second cas, c'est toujours au nom du pacifisme, de la stratégie « classe contre classe » ou de la lutte contre le régime néo-libéral de Volodymyr Zelensky et de ses alliés que toute une partie de la gauche s'oppose à soutenir militairement l'Ukraine.

Dans les deux cas, les puissances impérialistes proposent des « deals » qui sont de véritables rackets. Dans les deux cas, les sanctions internationales ne ciblent pas les matières premières nécessaires à la conquête coloniale. Dans les deux cas, la lutte contre le fascisme est instrumentalisée à des fins de politiques nationalistes et chauvines et pour refuser de soutenir militairement un pays colonisé. Dans les deux cas, la lutte contre le colonialisme et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes sont secondarisés au nom de la lutte des classes. Dans les deux cas, la volonté des premier·ères concerné·es, celle des travailleurs et des travailleuses, est passée sous silence et le principe de solidarité internationale, l'internationalisme, abandonné.

Martin Gallié


[1] Voir Holger Weiss, « Against Japanese and Italian Imperialism : The Anti-War Campaigns of Communist International Trade Union Organizations, 1931–1936 », Moving the Social 60 (2018) : 121-146 ; Joseph Fronczak, « Local People's Global Politics : A Transnational History of the Hands Off Ethiopia Movement of 1935 », Diplomatic History (2015/2), p. 245-274 ; Arlena Buelli, « The Hands Off Ethiopia campaign, racial solidarities and intercolonial antifascism in South Asia (1935–36) », Journal of Global History 18.1 (2023) : 47-67 ; Clayton Vaughn-Roberson, « Grassroots Anti-Fascism : Ethiopia and the Transnational Origins of the National Negro Congress in Philadelphia, 1935–1936 », American Communist History 17.1 (2018) : 4-15 ; Tom Buchanan, « ‘The dark millions in the colonies are unavenged' : Anti-fascism and anti-imperialism in the 1930s », Contemporary European History 25.4 (2016) : 645-665 ; Sabine Dullin et Brigitte Studer, « Communisme+transnational. L'équation retrouvée de l'internationalisme au premier XXe siècle », Monde(s), 2016/2 (N° 10), p. 9-32 ; Florence Oppen, La seconde guerre italo-éthiopienne (1935-1936), 2022, https://aplutsoc.org/2024/02/27/la-seconde-guerre-italo-ethiopienne-1935-1936-et-la-politique-trotskyste-par-florence-oppen/

[2] Arlena Buelli, « The Hands Off Ethiopia campaign, racial solidarities and intercolonial antifascism in South Asia (1935–36) », Journal of Global History 18.1 (2023) : 47-67

[3] Joseph Fronczak, « Local People's Global Politics : A Transnational History of the Hands Off Ethiopia Movement of 1935 », Diplomatic History (2015/2), p. 245-274, p.256 (“a sort of grassroots globalism »)

[4] Joseph Fronczak, « Local People's Global Politics : A Transnational History of the Hands Off Ethiopia Movement of 1935 », Diplomatic History (2015/2), p. 245-274.

[5] Sur la distinction à l'époque, voir par exemple Michael Goebel, « Anticolonialism and Anti-Imperialism », The Interwar World. Routledge, 2023. 569-582.

[6] Pour l'historique nous nous sommes principalement appuyé sur : Holger Weiss, « Against Japanese and Italian Imperialism : The Anti-War Campaigns of Communist International Trade Union Organizations, 1931–1936 », Moving the Social 60 (2018) : 121-146 ; Joseph Fronczak, « Local People's Global Politics : A Transnational History of the Hands Off Ethiopia Movement of 1935 », Diplomatic History (2015/2), p. 245-274

[9] Nicholas Mulder, The Economic Weapon : The Rise of Sanctions as a Tool of Modern War, Yale University Press, 2022. Les sanctions sont imposées le 18 novembre 1935 (embargo sur les armes et les importations, interdictions d'exportation de certains produits et création d'un fond de soutien et exclusions explicites du pétrole, de l'acier et du charbon)

[11] Joseph Fronczak, « Local People's Global Politics : A Transnational History of the Hands Off Ethiopia Movement of 1935 », Diplomatic History (2015/2), p. 245-274, p.262-263 ; voir aussi, “Haile Selassie gives a mighty concession”, New York Times, 1er septembre 1935, https://www.nytimes.com/1935/09/01/archives/haile-selassie-gives-a-mighty-concession-however-standard-oil-knows.html

[12] À noter qu'en mars 1945, une fois revenu au pouvoir, l'Empereur conclut de nouveau un accord avec Harry Ford (« Sinco ») Sinclair, 69 ans, le président de Sinclair Oil Corp. Selon le Time, ce dernier aurait « obtenu d'Hailé Sélassié une concession de 50 ans lui donnant des droits exclusifs sur tout le pétrole qu'il pourrait trouver sur les 350 000 miles carrés de l'Éthiopie… En échange de la concession, Sinclair a promis de consacrer une partie de ses bénéfices éthiopiens - s'il y en a - à la construction d'écoles, d'hôpitaux, de cliniques, d'installations sanitaires « et d'autres institutions publiques pour l'amélioration, l'éducation, la santé, la culture et la prospérité du peuple ». On ne peut s'empêcher ici de mentionner qu'environ 90 ans plus tard, en février 2025, le Gouvernement des États-Unis tente à son tour d'imposer à l'Ukraine un « deal » globalement homologue, l'acquisition de la moitié des ressources minières de l'Ukraine, mais cette fois-ci sans contrepartie. « Oil Sinco places a bet », Time, https://time.com/archive/6792001/oil-sinco-places-a-bet/ ; sur le « Deal » avec l'Ukraine ; « Trump vient-il de signer un traité inégal ? », Le Grand Continent, 27 février 2025, https://legrandcontinent.eu/fr/2025/02/27/trump-vient-il-de-faire-signer-a-lukraine-un-traite-inegal-le-texte-integral-de-laccord-etats-unis-ukraine-sur-les-mineraux-critiques/

[13] Holger Weiss, « Against Japanese and Italian Imperialism : The Anti-War Campaigns of Communist International Trade Union Organizations, 1931–1936 », Moving the Social 60 (2018) : 121-146, p.136

[14] « Front unique », Wikirouge, https://wikirouge.net/Front_unique

[15] Tom Buchanan, « ‘The dark millions in the colonies are unavenged' : Anti-fascism and anti-imperialism in the 1930s », Contemporary European History 25.4 (2016) : 645-665.

[16] « Front unique », Wikirouge, https://wikirouge.net/Front_unique

[17] Tom Buchanan, « ‘The dark millions in the colonies are unavenged' : Anti-fascism and anti-imperialism in the 1930s », Contemporary European History 25.4 (2016) : 645-665, p.665

[18] Théo Williams, « L'International African Service Bureau entre marxisme et panafricanism », 2021 https://www.contretemps.eu/read-offline/27196/international-african-service-bureau-marxisme-panafricanisme.print

[19] Tiémoko Garan Kouyaté, fiche Le Maitron, https://maitron.fr/spip.php?article173285

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Monde arabe : pour un regard lucide sur Israël

29 avril, par Yassine Al Haj Saleh — , , ,
Yassin al-Haj Saleh (né en 1961) est sans doute l'auteur politique progressiste et le dissident syrien le plus respecté de notre époque. Dans sa jeunesse, il a passé 16 ans, de (…)

Yassin al-Haj Saleh (né en 1961) est sans doute l'auteur politique progressiste et le dissident syrien le plus respecté de notre époque. Dans sa jeunesse, il a passé 16 ans, de 1980 à 1996, dans les prisons de la dictature syrienne d'Hafez al-Assad. À partir de 2011, il a accompagné, analysé et expliqué les sources du « printemps arabe » dans les médias arabes et occidentaux et est devenu une figure centrale de la résistance démocratique et de la défense des droits de l'homme en Syrie. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur la révolution syrienne, la prison, la torture et la violence génocidaire du régime, notamment The Impossible Revolution : Making Sense of the Syrian Tragedy (Hurst, Londres, 2017).

Tiré d'À l'encontre.

Réfugié en Turquie en 2013, il est installé en Allemagne depuis 2017. Son épouse Samira al-Khalil, elle aussi militante de la révolution syrienne, a été enlevée par un groupe islamiste armé à Douma en décembre 2013 et n'est jamais réapparue. Dans cet article publié dans le magazine en ligne New Lines, le 4 octobre 2024, sous le titre « Seeing Israel Clearly Through Arab Eyes », il se propose de dissiper les impensés et les confusions qui empêchent les Arabes de porter un regard lucide sur Israël en distinguant analytiquement les trois dimensions de la réalité israélienne et en proposant de penser cette complexité historique pour mieux affronter le défi posé par le sionisme. (Marc Saint-Upéry)

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Le conflit avec Israël fait désormais partie de la conscience collective du monde arabe depuis plusieurs générations, mais la nature de l'État israélien et de ses fondements idéologiques ont rarement fait l'objet d'une réflexion sérieuse en dehors de certains cercles palestiniens. Dans certains pays voisins, comme la Syrie et le Liban, l'existence d'Israël a servi aux dirigeants locaux de prétexte pour justifier l'imposition de politiques injustes. Pour d'autres, plus éloignés, l'État juif est perçu de manière apolitique comme une entité maléfique et un objet de haine ou bien, à l'inverse, comme l'incarnation d'un destin inéluctable qui justifierait l'inaction, voire l'acquiescement.

La réalité est plus complexe. Depuis sa naissance, l'existence d'Israël a engendré un mélange de détresse psychologique, de difficultés politiques et de dilemmes intellectuels pour les peuples du monde arabe. Le défi israélien a fait beaucoup de victimes, et ses effets toxiques persisteront probablement pendant longtemps.

En dernière analyse, la question israélienne est une question arabe, et pour que le peuple arabe s'émancipe et surmonte son impuissance, les Arabes devront apprendre à rationaliser et clarifier leur perception de cette force redoutable qui, en tout état de cause, les considère comme un tout unifié. Pour comprendre Israël, il faut reconnaître qu'il s'agit d'un État qui présente aux mondes trois facettes principales : la dimension coloniale, la dimension juive et la dimension sacrificielle. Chacun de ces piliers sur lesquels repose l'État d'Israël mérite d'être analysé dans ses propres termes, ce afin d'amorcer le processus de connaissance de cette entité politique qui a remodelé le Moyen-Orient tout entier depuis des générations.

Une entité coloniale

Israël est avant tout une puissance coloniale. En tant qu'État, il est le prolongement de la vague colonialiste dont la plupart des pays arabes ont fait l'expérience au cours des XIXe et XXe siècles. Mais la forme de colonialisme qu'il incarne est tout à fait spécifique : il s'agit d'un colonialisme de peuplement, soit d'un projet politique que, parmi les autres nations arabes, seule l'Algérie a connu. Dans la littérature palestinienne, on voit parfois le terme « remplaçant » accolé à celui de « colon », pour mettre en exergue l'idée qu'il s'agit d'un processus de déracinement de la population indigène visant à la remplacer par des étrangers.

Le colonialisme de peuplement a souvent un fort potentiel génocidaire, comme en témoignent l'exemple historique des États-Unis, du Canada et de l'Australie. Ce potentiel génocidaire peut également se manifester à travers l'éradication du peuple visé en tant qu'entité politique, ou « politicide », terme auquel a recours le sociologue israélo-canadien Baruch Kimmerling dans un livre du même nom. Dans le cas d'Israël-Palestine, Kimmerling attribue toutefois la responsabilité de cette forme d'oblitération aux seules actions de l'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon, considéré comme un faucon, plutôt qu'au projet colonial sioniste dans son ensemble [1].

Le politicide peut également se manifester sous la forme d'une combinaison de colonialisme de peuplement et de ségrégation raciale ou d'apartheid, comme le décrit Amnesty International dans un rapport publié début février 2022, ou encore l'intellectuel palestinien Azmi Bishara dans un article intitulé « Colonialisme de peuplement ou apartheid : faut-il choisir ? » [2]. Enfin, le politicide peut prendre la forme d'un génocide à grande échelle visant indistinctement civils et combattants non seulement par les armes, mais aussi en assiégeant la population, en l'affamant et en instaurant un contrôle strict ou un blocage de l'accès à l'aide humanitaire, comme l'a fait Israël avec les habitants de Gaza pendant la guerre en cours.

L'une des justifications idéologiques initiales du colonialisme de peuplement en Palestine était l'affirmation selon laquelle il s'agissait d'une « terre sans peuple pour un peuple sans terre ». C'est ainsi que le sioniste britannique Israel Zangwill (1864-1926) le présentait à l'époque. Ce déni de l'existence du peuple palestinien est similaire à certains des discours utilisés pour justifier le nettoyage ethnique pendant les guerres yougoslaves des années 1990, et la négation de l'identité palestinienne a trouvé son illustration la plus exemplaire lors de la Nakba [3] en 1948, lorsque les trois quarts de la population palestinienne, soit environ 750 000 personnes, ont été expulsés en masse sous la menace de massacres et de diverses formes de violence.

Quant aux Palestiniens qui sont restés sur leurs terres, ils ont vécu sous régime militaire jusqu'en 1966. Pendant longtemps, ils ont été réduits à la condition de peuple vulnérable et opprimé, vivant dans ce que le philosophe italien Giorgio Agamben définit comme un « état d'exception », soit une situation dans laquelle les individus existent en dehors de la protection de la loi. La notion d'« homo sacer » développée par Agamben s'inspire d'un concept du droit romain désignant une personne qui ne peut faire l'objet d'un sacrifice rituel, mais qui peut être tuée en toute impunité, et s'appuie en outre sur l'expérience des détenus des camps de concentration nazis [4]. On peut également l'appliquer aux sujets de la domination coloniale qui, comme l'a montré Hannah Arendt dans Les Origines du totalitarisme, sont gouvernés par des directives administratives plutôt que par des normes juridiques [5].

Arendt prenait comme exemple Lord Cromer, gouverneur britannique de l'Égypte pendant près de 30 ans, mais la situation des Palestiniens est bien pire que celle des Égyptiens sous Cromer. Ils sont traités comme des étrangers dans leur propre pays, des milliers d'entre eux – plus de 10 000 à ce jour – sont détenus dans des prisons israéliennes en vertu de décisions rendues par des tribunaux militaires, et Israël les soumet à une pression incessante pour qu'ils quittent le territoire. Cet état de violence légitimée n'a fait qu'empirer pendant la guerre actuelle à Gaza.

L'idée des origines coloniales de l'État israélien est renforcée par le fait qu'il a émergé à l'époque du mandat britannique sur la Palestine. Dans son ouvrage intitulé The Palestine Problem and the One-State/Two-States Solution [6], l'universitaire palestinien Raef Zreik explique que les principes constitutifs de ce mandat, établis pour la première fois lors de la conférence de San Remo en avril 1920 et officiellement adoptés par la Société des Nations en juillet 1922, intégraient la déclaration Balfour [7]. Le deuxième paragraphe du préambule du texte qui les résume fait explicitement référence à cette déclaration et à son adoption par les pays alliés. La forme « mandat » était l'expression spécifique du colonialisme européen dans certains pays du Levant, notamment en Syrie et au Liban, contrôlés par les Français. En ce sens, le mandat britannique a joué le rôle de « matrice » de l'entité israélienne, qu'il a nourrie pendant trois décennies. En 1938, le général britannique Orde Wingate déclarait : « Nous sommes ici pour créer l'armée sioniste [8]. »

Le projet colonial sioniste n'a pas vu le jour en Palestine ou au Moyen-Orient, mais en Europe, à la convergence de trois phénomènes européens : l'essor d'un nationalisme agressif, l'expansion de l'impérialisme européen et la propagation de l'antisémitisme, ou sentiment anti-juif, en tant que forme distincte de racisme. L'impérialisme, qui a permis à l'Europe de dominer une grande partie du monde, a créé les conditions nécessaires à la concrétisation du projet sioniste.

Dans son livre intitulé Comment la terre d'Israël fut inventée, l'historien israélien Shlomo Sand explique que Theodor Herzl, le père du sionisme, était un « colonialiste » qui estimait qu'en tant qu'elle était une projection du monde bourgeois civilisé, l'acquisition d'une patrie en dehors de l'Europe n'avait besoin d'aucune autre justification [9].

En deçà de toute discussion historique ou théorique, le peuple palestinien et les élites arabes ont vécu la création de l'État d'Israël comme une forme de violence coloniale imposée par les armes, violence qui persiste depuis le moment de son émergence jusqu'à nos jours. Cette perception subjective du colonialisme israélien est essentielle, car elle reflète la manière dont les personnes concernées appréhendent la présence continue d'Israël comme une attaque non provoquée contre leur existence même. En réponse à cette agression, diverses formes de résistance ont vu le jour. Dans les années 1960 et 1970, cette résistance reposait plus souvent sur des fondements progressistes qu'au cours des dernières décennies, mais elle a échoué en raison de la nature sui generis de l'ennemi auquel elle était confrontée – un ennemi bénéficiant d'un soutien militaire écrasant de la part de ses alliés occidentaux –, ainsi que du déclin depuis cette même époque des valeurs émancipatrices jadis au principe des politiques intérieures et de la diplomatie arabes.

On attribue au premier chef du gouvernement et père fondateur d'Israël David Ben Gourion la phrase suivante : « Ce qui ne peut être obtenu par la force peut être obtenu par plus de force encore. » Cette affirmation reflète une mentalité coloniale qui non seulement reconnaît le refus palestinien du projet israélien, mais anticipe aussi la vocation belliciste d'Israël et sa volonté durable d'imposer la soumission par la violence

Elle implique également quelque chose de plus important encore, à savoir l'idée d'une garantie continue de la supériorité de l'État juif en matière d'armement, fondement du principe de l'application de « plus de force encore ». Les paroles de Ben Gourion se sont révélées prophétiques à bien des égards. Depuis les années 1970, cette garantie de la supériorité militaire israélienne a pris la forme d'un engagement de Washington à maintenir la suprématie qualitative des armes israéliennes sur l'ensemble des pays arabes. Le fait que cet engagement n'ait plus été mis en avant dans le discours public étasunien ces dernières années ne signifie pas pour autant qu'il ait été abandonné. Bien au contraire, il a été sanctionné par le Congrès en 2008 sous la forme d'une loi a interdisant toute vente d'armes à un pays arabe qui serait susceptible de menacer « l'avantage militaire qualitatif » d'Israël. On peut en tirer la conclusion que ce n'est pas seulement Israël qui considère les Arabes comme un tout unifié, mais les États-Unis eux-mêmes.

Identité juive et racines bibliques

L'identité d'Israël ne se limite toutefois pas à son statut d'entité coloniale. Elle comporte deux autres aspects, qu'il serait grave d'ignorer. Le premier, et peut-être le plus évident, est son caractère juif. Israël se définit comme un État juif. Cette identité juive ne signifie pas nécessairement qu'il s'agit d'un État religieux, mais reflète l'existence d'un lien profond avec toute une histoire et une géographie bibliques sacrées centrées sur la Palestine, ou « Eretz Israël », et ayant Jérusalem en son cœur.

Le récit biblique reste une source fondamentale de légitimité pour de nombreux penseurs et critiques sionistes. Dans son livre Zionist Thought in the Labyrinth of Renewal and Regeneration, le chercheur palestinien Amal Jamal cite le journaliste et essayiste Uri Elitzur (1946-2014), qu'il décrit comme « l'un des représentants les plus éloquents de la pensée néo-sioniste », et qui affirme que « sans la Bible, nous [les Israéliens] ne sommes rien de plus qu'une colonie européenne au Moyen-Orient » [10].

Même si Israël avait à ses débuts un caractère laïc et vaguement socialiste, son histoire depuis la guerre de 1967 a été marquée par la montée des mouvements religieux et des partis de droite. Cette évolution s'est consolidée avec la victoire du Likoud aux élections de 1977, la première depuis la création de l'État. Israël est marqué par une contradiction politique inhérente entre sa dimension religieuse et ses fondements laïques, et cette contradiction se résout de plus en plus en faveur du côté religieux.

La composante juive joue un rôle important dans la définition de l'État d'Israël et constitue également l'un des piliers garantissant le soutien continu de l'Occident, un soutien qui va au-delà de sa nature coloniale ou de son rôle de « forteresse de l'Occident », comme le décrivait le chancelier allemand Konrad Adenauer. Il est révélateur qu'Adenauer ait tenu ces propos au lendemain de la guerre de 1956, lorsque Israël s'est joint au Royaume-Uni et à la France pour attaquer l'Égypte suite à la nationalisation du canal de Suez par Nasser. Mais le soutien à Israël ne disculpe en rien l'Occident de pratiquer une forme d'antisémitisme déguisé. Il est désormais plus facile de soutenir une entité politique juive dès lors qu'elle est établie au Moyen-Orient et non plus en Europe.

Dans son livre The Jew, the Arab : A History of the Enemy (Le Juif, l'Arabe : une histoire de l'ennemi), le chercheur franco-américain Gil Anidjar explique que les Européens ont toujours considéré les Juifs comme un ennemi théologique interne, tandis que les musulmans étaient considérés comme un ennemi politique externe [11]. Dans cette perspective, il devient utile que ces deux ennemis soient occupés à s'affronter mutuellement. Ce sentiment trouve un écho dans certains cercles de la droite antisémite en Europe et en Occident, qui, de nos jours, plutôt que de viser les Juifs, incitent à la haine contre les musulmans, les immigrés et les minorités. Le gouvernement du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou est aujourd'hui aligné avec ces groupes fascistes ou semi-fascistes dans une guerre religieuse et civilisationnelle contre les Arabes et les musulmans, reflétant la dérive réactionnaire du soutien occidental à Israël.

L'ombre de la Shoah

La troisième dimension fondamentale du caractère national israélien est liée à la Shoah, une catastrophe historique souvent perçue comme caractérisée par sa singularité absolue et qui s'est traduite par l'extermination de 6 millions de Juifs aux mains de l'Allemagne nazie. Après la chute du régime hitlérien en 1945 et l'occupation de l'Allemagne par l'Union soviétique, les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, il ne restait plus personne pour défendre le nazisme. Tout au contraire, ses victimes, en particulier les Juifs, ont suscité une immense sympathie en raison de l'horreur de ce qu'elles avaient enduré et aussi parce que, contrairement aux Russes, aux Polonais, aux Ukrainiens, aux Biélorusses, aux Tchèques, aux Slovaques ou aux Français, elles ne disposaient pas d'un État ou d'une entité politique susceptible de les protéger.

Le sionisme, alors actif en Europe depuis plus d'un demi-siècle, a su capitaliser sur cette sympathie en présentant la Shoah comme la preuve de la nécessité d'un État juif, afin de garantir que de telles atrocités ne se reproduisent plus jamais. C'est l'essence même de l'expression « plus jamais », utilisée dans un sens excluant qui sous-entend qu'un tel événement ne doit plus jamais se reproduire au détriment des Juifs, oblitérant l'interprétation plus généreuse selon laquelle une telle tragédie ne devrait plus arriver à personne.

Cet aspect de l'identité israélienne l'enracine dans un sacrifice monumental, quelque chose de si profond qu'on pourrait en faire le fondement d'une religion – ce qui est d'une certaine manière le cas. La Shoah est bien devenue une sorte de religion, non seulement en Israël, qui a réussi à s'approprier politiquement et moralement de cet événement extraordinairement tragique, mais aussi dans l'ensemble de l'Occident. Cette dimension sacrale est encore renforcée par le fait que les victimes étaient membres d'un groupe religieux et que, du fait du sentiment de culpabilité et de repentance suscité par la Shoah, les Juifs furent dès lors considérés comme des co-fondateurs de la civilisation occidentale.

Dans cette nouvelle « religion », les Juifs exterminés ont en quelque sorte remplacé le Christ crucifié, occupant désormais la place symbolique du « Fils de Dieu ». Comme l'écrivait Charlotte Delbo, survivante de la Shoah, « vous qui avez pleuré deux mille ans / un qui a agonisé trois jours et trois nuits / quelles larmes aurez-vous / pour ceux qui ont agonisé / beaucoup plus de trois cents nuits et beaucoup plus de trois cents journées / combien / pleurerez-vous / ceux-là qui ont agonisé tant d'agonies / et ils étaient innombrables » [12].

Dans ce poème, Delbo fait bien sûr référence aux horribles souffrances infligées aux Juifs par les nazis. Il s'agit d'une immense tragédie qui mérite d'être mieux reconnue et méditée dans le monde arabe, surtout dans le contexte de la description et de l'analyse des souffrances vécues dans notre propre région, y compris en Palestine.

Penser le problème dans sa complexité

Les échecs répétés des confrontations arabes avec Israël, et le succès durable du projet sioniste, nous obligent à remettre en question notre compréhension de ce projet, qui a dévasté l'existence de générations entières, affectant plusieurs dizaines de millions d'Arabes, soit bien plus que la population juive mondiale, estimée à environ 15 à 16 millions de personnes.

Le dramaturge syrien Saadallah Wannous, aujourd'hui décédé, déclarait dans un documentaire réalisé par le regretté Omar Amiralay qu'Israël lui avait « volé sa vie », un sentiment né de l'humiliation et de la perte de dignité qui ont empoisonné son existence entre 1941 et 1997 [13]. Après la visite du président égyptien Anouar el-Sadate à Jérusalem en 1977, Wannous avait tenté de mettre fin à sa vie. Bien qu'il ait finalement survécu, il a alors choisi une forme de suicide symbolique en restant silencieux pendant des années. De tels exemples sont plus fréquents qu'on ne pourrait le croire dans le monde arabe, même s'ils ne prennent pas toujours des formes aussi dramatiques. Yassin al-Hafez, un intellectuel syrien décédé en 1978 à l'âge de 48 ans, a lui-même expliqué qu'il avait envisagé le suicide après la défaite de 1967, mais qu'il en avait été dissuadé par « un reste de confiance métaphysique dans les capacités du peuple arabe ». Le poète libanais Khalil Hawi (1919-1982) s'est suicidé lors de l'occupation de Beyrouth par Israël pendant l'été 1982. Tous ces exemples, qui ne représentent que la partie émergée de l'iceberg, montrent bien que nous avons des raisons non seulement politiques, militaires, juridiques et morales, mais aussi psychologiques, de considérer l'existence d'Israël comme une question cruciale qui exige une réponse.

La création de l'État israélien a engendré un problème chronique pour les peuples du monde arabe. Il s'agit d'une question qui pousse des intellectuels au suicide, qui répand un sentiment d'humiliation chez des millions de personnes, qui empoisonne l'existence d'une multitude d'êtres humains et qui se traduit périodiquement par des explosions d'hostilité et de haine ; au cours des deux dernières générations, elle a alimenté des conflits nihilistes entre les Arabes eux-mêmes.

Pour affronter avec succès cette question à l'avenir, il est nécessaire de mener une réflexion approfondie, d'exercer notre jugement politique et d'offrir une vision. Tout à la foi défi spirituel, épreuve de la volonté et dilemme intellectuel, elle exige de notre part un effort sérieux de compréhension pour dépasser l'impuissance. Nous ne deviendrons des acteurs historiques efficaces que si nous transformons nos sentiments confus en un programme susceptible d'être mis en œuvre concrètement.

Une des manifestations les plus patentes de l'incapacité à établir une ligne de conduite efficace est sans doute l'idéologie dite de la « mumanaa », qui signifie en gros « empêcher l'ennemi de parvenir à une domination totale ». Au Moyen-Orient, cette prétention d'intransigeance a en fait toujours été associée à la dictature, à la corruption et au sectarisme. À l'inverse, et avec des effets tout aussi autodestructeurs, on a l'« anti-mumanaa », une position qui accepte les exigences radicales d'Israël sous couvert de modération.

Alors que la mumanaa se traduit par la perpétuation de la lutte pour le contrôle politique, l'anti-mumanaa est incarnée par de groupes qui collaborent avec Israël ou acceptent sans réserve son comportement agressif, suprémaciste et raciste. Mais comme le dit un proverbe levantin, « peu importe ce que nous leur cédons, ils ne sont jamais satisfaits ». Les résultats des accords d'Oslo au cours des trente dernières années en sont la preuve flagrante.

Il est déconcertant de constater que certains pays acceptent un déséquilibre de pouvoir aussi flagrant en faveur d'un État de la région, d'autant que cet État s'est fondé sur le nettoyage ethnique et refuse d'accorder la moindre portion de justice à ses victimes ou de traiter ses voisins sur un pied d'égalité. Avant la Seconde Guerre mondiale, les nations européennes ont souvent été en guerre pendant un siècle et demi sous prétexte de corriger des déséquilibres de pouvoir. Pourquoi les Arabes devraient-ils penser et agir autrement ?

Ceux qui prônent la normalisation avec Israël font preuve de myopie politique s'ils estiment possible d'intégrer l'État juif dans des relations « normales » avec le reste de la région. Israël n'est pas un État « normal » et ne se considère pas comme une entité politique comme les autres – susceptible d'être critiquée, d'être boycottée, de se heurter à des résistances et des condamnations, de conclure des traités et des accords de paix ou de gagner la confiance de ses voisins. Car Israël n'accepte pas ses voisins arabes comme des égaux.

Prendre en compte les trois dimensions de l'État israélien peut nous aider à proposer de nouvelles manières de répondre au défi qu'il pose au monde arabe. En ce qui concerne sa dimension juive, il est important de reconnaître que la présence juive en Palestine et dans le monde arabe ne posait pas problème avant l'essor du sionisme.

La présence des Juifs dans le monde arabe doit être reconnue et saluée. Cela inclut non seulement les Juifs arabes – ceux qui vivaient dans les pays arabes et parlaient notre langue –, mais aussi les Juifs originaires d'autres régions du monde. Le Moyen-Orient, berceau des religions abrahamiques, s'est arabisé à partir de l'expansion de l'islam, mais n'a jamais cessé d'accueillir une certaine diversité religieuse. Cette diversité a décliné au cours des deux derniers siècles sous l'influence de l'Occident moderne et, plus encore, sous l'effet de l'émergence du sionisme et de la création d'Israël.

En outre, au lieu d'embrasser la diversité, les infrastructures intellectuelles et politiques du monde arabe moderne, qu'elles soient nationalistes ou islamiques, ont souvent rejeté les éléments faussement perçus comme étrangers à leurs sociétés. L'ouverture à la présence juive ne menace pas plus le caractère arabe de la région que la présence de musulmans en Europe ne menace l'existence de ces pays, malgré ce que prétendent les fascistes et la droite en Occident.

En ce qui concerne la Shoah et son aspect sacrificiel, on aurait pu soutenir un droit à l'existence de l'État d'Israël dans un pays européen comme l'Allemagne, voire la Pologne ou la République tchèque. Mais c'est sur les épaules des Palestiniens et des Arabes qu'on a injustement jeté tout le poids de l'immense sacrifice de la Shoah, et à qui on exige de le respecter.

Pour ce qui est de la dimension coloniale d'Israël, qui a entraîné le déplacement des trois quarts de la population palestinienne à travers diverses formes de massacre et d'intimidation – une situation qui persiste et s'aggrave depuis plus de 76 ans –, l'État israélien tel qu'il est actuellement constitué n'a aucun droit légitime d'exister, au sens où aucune forme de colonialisme ou d'apartheid n'a le droit d'exister.

Nous devons cependant reconnaître qu'Israël, tel qu'il existe, est une combinaison de ces trois dimensions. Son identité juive lui confère une profondeur historique mythique et s'appuie sur l'idée d'une « mission éternelle » liée à la terre. Sa dimension sacrificielle lui confère une aura de justice et de légitimité, quels que soient les actes qu'il commet. Et sa dimension coloniale lui confère un potentiel génocidaire, capable de prendre pour cible tous les Arabes et pas seulement les Palestiniens.

Cet Israël-là, selon Shlomo Sand, comprend à la fois « une société, une culture et un peuple » qui n'existent que depuis trois générations. Mais nombre de ses habitants juifs ne connaissent pas d'autre patrie.

Existe-t-il un moyen de conceptualiser la question israélienne qui soit susceptible de nous conduire un jour à une solution globale de cet immense problème ? L'intellectuel palestinien Edward Said a toujours rejeté l'idée de déplacer telle ou telle population de ce qui constitue aujourd'hui – et constituait déjà à son époque – la terre d'Israël et de Palestine ; mais il prônait avec fermeté l'élimination de la dimension coloniale et raciste d'Israël.

Comprendre la question israélienne dans cette perspective ouvre la voie à des solutions complexes capables de prendre en compte ces trois dimensions à la fois. On peut par exemple insister sur le respect du droit international en ce qui concerne le retrait d'Israël des territoires occupés en 1967 et sur le retour des réfugiés palestiniens, ou bien sur une indemnisation équitable s'inspirant des réparations versées par l'Allemagne à Israël. Cette approche pourrait constituer la pierre angulaire d'une solution à la dimension coloniale.

Les chances de succès sont susceptibles d'augmenter si l'on déploie parallèlement des efforts pour traiter les deux autres dimensions : favoriser l'ouverture à la présence juive en Palestine et dans le monde arabe, notamment en restituant les biens des Juifs arabes désirant retourner dans leurs foyers, ce en échange d'une compensation similaire pour les Palestiniens. Il convient en outre de mettre davantage l'accent sur la Shoah en tant que modèle de génocide et expression emblématique de la capacité humaine à commettre le mal. On pourrait par exemple stimuler la traduction en arabe d'ouvrages clés sur la Shoah, ainsi que l'organisation de conférences et de séminaires sur cet événement et sur d'autres génocides dans le monde, dans le but de favoriser une meilleure compréhension. Une telle approche ne serait pas une concession à Israël, au sionisme ou même au peuple juif, mais plutôt une occasion pour les Arabes de participer à la défense des opprimés dans le monde entier.

Victimes d'une des plus grandes injustices de l'époque moderne, commise à leurs dépens sans qu'ils y soient pour rien, les Arabes ont vécu une profonde crise émotionnelle en voyant les opprimés d'hier devenir les oppresseurs d'aujourd'hui, bardés d'arrogance et de justifications fallacieuses, soutenus par les nations les plus puissantes du monde. En abordant de front la question israélienne, on ferait un premier un pas vers la résolution de cette crise existentielle et la réparation des blessures profondes engendrées par plus d'un siècle de confrontation fatidique entre le sionisme et le monde arabe.

La question israélienne comme question arabe

En ce sens, la question israélienne est devenue une question arabe, un enjeu et un défi pour les Arabes. Il est peu probable qu'ils parviennent à une véritable liberté s'ils ne font pas de progrès dans ce domaine.

Dire que la question israélienne est une question arabe signifie que ces possibles progrès sont liés à la solution d'autres problèmes que les Arabes ont créés pour eux-mêmes et pour le reste du monde. Cela mérite un débat à part, mais il nous suffira de dire que les Arabes sont aujourd'hui parmi les peuples les moins libres du monde en raison de leur lutte contre une triple tyrannie. Le premier aspect de cette tyrannie est le fait que tous les régimes arabes, sans exception, pratiquent le politicide. Le deuxième aspect est la présence coloniale, occidentale et non occidentale, dont Israël est l'expression la plus manifeste, mais en aucun cas la seule. Enfin, il faut signaler l'essor d'un fondamentalisme religieux nihiliste à tendance fascisante.

Cette exigence de comprendre la question israélienne est un appel à la raison, à l'action politique et à la générosité. C'est aussi une exhortation à faire revivre les traditions pluralistes et œcuméniques qui prospéraient jadis dans le monde arabe et islamique avant la période coloniale et l'émergence des États-nations modernes.

On a injustement imposé aux Palestiniens et aux Arabes la tâche de résoudre la question juive, qui est un problème européen. Les Arabes n'ont joué aucun rôle dans la Shoah, sauf dans l'esprit d'individus comme Netanyahou. Son affirmation selon laquelle Hitler aurait été inspiré par le mufti de Jérusalem, Amin al-Husseini, a suscité les protestations de nombreuses personnalités juives et allemandes, avant même celles des Arabes.

Les Arabes n'ont joué aucun rôle non plus dans le développement historique de la diaspora juive. Ils ont pris la Palestine aux Byzantins, et non à une entité juive. Pendant les six siècles qui ont précédé la conquête arabe, les Juifs n'ont eu aucune présence politique constituée dans la région, et à aucun moment les Arabes n'ont chassé les Juifs de Palestine ou des terres voisines. Quant au colonialisme européen, les Palestiniens et les Arabes en sont les victimes au même titre que les Africains, les Indiens et d'autres peuples, tandis qu'Israël a bénéficié de ce même colonialisme avant et après sa création. La responsabilité de cette injustice historique revient à l'alliance occidentale-sioniste. L'Allemagne a versé des réparations à Israël pour les crimes nazis commis contre les Juifs, mais ni l'Allemagne ni aucune autre entité occidentale ou internationale n'ont versé de compensation aux Palestiniens pour le vol de leur patrie ou l'injustice coloniale qu'ils ont subie.

Pourtant, si nous réfléchissons à la question, nous arriverons probablement à la conclusion que ce qui nous empêche de développer une compréhension nuancée de la question israélienne, ce n'est pas du côté israélien qu'il faut le chercher, mais du côté arabe. Quelle est la subjectivité arabe qui tente de formuler une vision et une politique à l'égard d'Israël ? Cette subjectivité est-elle capable de se remettre en question et de réfléchir en termes historiques ? À l'heure actuelle, aucune entité arabe n'en semble capable. Cette incapacité maintient la perception de la question israélienne dans un cadre arbitraire, infra-politique et infra-historique.

Une affaire de longue haleine

Dans quel délai sera-t-il possible de résoudre la question israélienne ? Car si l'on parle d'une « question », cela implique de discuter d'une solution, et la recherche d'une solution implique une certaine maîtrise de la réalité représentée par cette question – une maîtrise qui requiert que l'on passe d'un statut de sujet passif à celui de sujet actif.

De par sa nature, il s'agit d'une question à long terme. On ne parle pas ici de quelques années, mais de décennies et de générations entières. Le concept de « question juive » circulait déjà lorsque Marx rédigeait un texte portant ce titre en 1843. Au cours du siècle qui s'est écoulé entre la publication de ce texte et la création d'Israël, on a assisté à l'essor d'un antisémitisme qui s'enracinait dans le nationalisme plutôt que dans ses fondements chrétiens traditionnels. Après quoi sont advenues l'émergence du nazisme et la Shoah, tentative nazie d'apporter une « solution finale » à la question juive. À bien des égards, Israël est la solution finale de cette solution finale : un accord conclu après la Seconde Guerre mondiale et le génocide entre les élites ashkénazes influentes en Occident, le « Yishouv » (les immigrants juifs en Palestine) et les puissances coloniales occidentales.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, on a vu aussi émerger une « question d'Orient » lorsque l'Empire ottoman a commencé à être qualifié d'« homme malade de l'Europe », selon l'expression du tsar Nicolas Ier de Russie. Dès le départ, cette soi-disant question d'Orient a été en fait une préoccupation occidentale, comme l'observera plus tard Arnold Toynbee. Elle a été « résolue » à la fin de la Première Guerre mondiale par l'effondrement et le démembrement de l'Empire ottoman. Mais du point de vue des populations les plus directement concernées, en particulier les Arabes, la « question » a été modifiée, mais pas résolue. Tant sur le plan intellectuel que sur le plan politique, elle n'a d'ailleurs jamais été correctement comprise ni traitée par les parties concernées. La question d'Orient est donc devenue une question arabe rendue encore plus problématique par la question israélienne. La fragmentation que nous observons aujourd'hui au sein du monde arabe est le résultat de l'incapacité à résoudre ces deux questions. Elle exprime aussi l'effondrement ou la désintégration d'une subjectivité capable de les résoudre, voire tout simplement de les comprendre pleinement. Essayer de conceptualiser la question israélienne revient en fait à s'efforcer de résister à cette désintégration.

Certes, discuter d'un horizon temporel s'étendant sur plusieurs décennies ou plusieurs générations sera perçu par d'aucuns comme profondément insatisfaisant. Il y aura toujours des critiques pour s'empresser d'accuser les partisans d'une telle approche de prôner la capitulation, la normalisation ou pire encore. Mais c'est justement la crainte de telles accusations qui a contribué à notre situation actuelle et à sa dynamique autodestructrice et catastrophique. Face aux porte-parole de la mumanaa et à ceux de l'anti-mumanaa, face à ceux qui sont prêts à se battre pour qu'on leur accorde quelques miettes, des voix doivent s'élever parmi nous pour exprimer leurs convictions sans crainte ni autocensure. Problématiser Israël comme un triple défi s'enracinant dans une longue histoire constituera un premier pas dans cette direction. (Traduction par Marc Saint-Upéry)

Notes

[1] Baruch Kimmerling, Politicide : Sharon's War Against the Palestinians, Verso, Londres, 2003.

[2] Azmi Bishara, « Settler Colonialism or Apartheid : Do We Have to Choose ? », Omran, vol. 10, n° 38, automne 1981, https://omran.dohainstitute.org/en/038/pages/art02.aspx.

[3] Littéralement, la « catastrophe », en arabe.

[4] Giorgio Agamben, Homo Sacer : le pouvoir souverain et la vie nue, Seuil, Paris, 1997.

[5] Hannah Arendt, Les origines du totalitarisme : Tome 2, L'Impérialisme, Seuil, Paris, 2006.

[6] Raef Zreik, The Palestine Problem and the One-State/Two-States Solution, Institute for Palestine Studies, Beyrouth, 2014.

[7] La Déclaration Balfour est une lettre ouverte datée du 2 novembre 1917 et signée par Arthur Balfour, secrétaire d'État britannique aux Affaires étrangères dans le gouvernement de David Lloyd George. Elle était adressée à Lionel Walter Rothschild (1868-1937), personnalité de la communauté juive britannique et financier du mouvement sioniste, afin d'être communiquée à l'Organisation sioniste mondiale, fondée par le père du sionisme Theodor Herzl. Le Royaume-Uni s'y déclarait en faveur de l'établissement en Palestine d'« un foyer national pour le peuple juif ».

[8] Cité in Ari Shavit, My Promised Land : The Triumph and Tragedy of Israel, Random House, New York, 2013. Orde Charles Wingate (1903-1944) était un officier supérieur britannique affecté en Palestine en 1936. Sympathisant affiché du sionisme, il promeut en 1938 la création de commandos juifs conduits par des officiers britanniques expérimentés, les Special Night Squads (escadrons de nuit spéciaux) pour combattre les insurgés arabes et mener des opérations punitives contre les villages ayant aidé ou hébergé des saboteurs palestiniens. Considéré comme un héros par les sionistes, Wingate était particulièrement apprécié par Moshe Dayan, qu'il avait entraîné et qui déclarait avoir tout appris de lui.

[9] Shlomo Sand, Comment la terre d'Israël fut inventée, Flammarion, Paris, 2012.

[10] Amal Jamal, Zionist Thought in the Labyrinth of Renewal and Regeneration : The Dialectic of Internal Contradictions and their Practical Ramifications, Institute for Palestine Studies, Beyrouth, 2016.

[11] Gil Anidjar, The Jew, the Arab : A History of the Enemy, Stanford University Press, Redwood City (CA), 2003.

[12] Charlotte Delbo, Auschwitz et après, 4 tomes, Minuit, Paris, 2018-2025.

[13] Omar Amiralay, There Are So Many Things Still to Say, ARTE France/Grains de Sable, 1997.

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L’IA arrive dans les soins à domicile au Québec

29 avril, par Emma Soares — , ,
La privatisation des services sociaux dans le monde pose des défis considérables pour les équipes sur le terrain. L'intégration de méthodes axées sur la productivité et le (…)

La privatisation des services sociaux dans le monde pose des défis considérables pour les équipes sur le terrain. L'intégration de méthodes axées sur la productivité et le rendement est souvent inadaptée à la réalité que traverse le personnel. L'intelligence artificielle est perçue comme un poids qui renforce les tensions entre l'État, les professionnel.les et les patient.es. Rencontre avec Eugénie Loslier, responsable de la mobilisation, communication et négociation à la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ).

Tiré de la page web du Journal des Alternatives

Par Emma Soares -23 avril 2025

Crédit photo : Jernej Furman

L'Organisation Internationale du travail (OIT) a publié aujourd'hui unrapportsur les risques encourus par ces nouvelles technologies dans le secteur du travail. Ils identifient déjà des dangers liés à ce nouveau partenariat humain-robot, où les défaillances et imprévisibilité des systèmes amènent des obstacles sur le chemin de l'automatisation.

À travers le monde, les syndicats et associations s'opposent à ces logiciels, inquiets des risques de dégradation de la qualité des soins et des conditions de travail, qui pousseraient les personnes soignantes vers la sortie. L'incorporation de nouvelles technologies tel que l'IA dans les services de soins à domicile est un enjeu croissant.

Au Québec, l'application canadienne Alayacare, diffusée à travers le monde a été introduite, il y a plus d'un an, dans les soins à domicile du nord de l'île de Montréal et l'adaptation du personnel se montre difficile. Eugénie Loslier, représentante de 4000 soignant.es de ce secteur, nous éclaire sur les défis que cette nouvelle application impose au personnel à domicile.

Une surveillance accrue du travail de soins à domicile

L'application d'intelligence artificielle, Alayacare est un système de gestion de soins intégré dans les cellulaires des professionnel.les qui répertorie toutes les données essentielles à leur travail : les dossiers de patient.es, les calendriers de travail et les notes de visite.

Depuis son intégration comme projet pilote dans les services à domicile, de graves enjeux techniques et éthiques ont été soulevés par le personnel qui l'utilise. Elle implique une standardisation des soins, les soignant.es sur le terrain se voient imposés des temps stricts pour chaque visite et tâche comprise. Toutes les données récoltées par Alayacare sont mises à disposition des responsables qui peuvent scruter la localisation du personnel, mais aussi leurs performances en temps réel. Une surveillance accrue qui impacte significativement le climat de travail.

Eugénie Losllier nous explique qu'au quotidien, le travail du personnel soignant et des auxiliaires à domicile est lourdement affecté par l'imposition de ce nouvel outil. En standardisant leurs services, on leur impose un calendrier effréné où chaque minute compte et le temps manque souvent pour délivrer des soins et un accompagnement humain de qualité.

En arrivant au domicile de leur patient.e, la personne soignante évalue souvent un besoin supérieur à celui indiqué sur l'application, ce qui nécessite plus de temps pour allouer ces soins. Travailler à domicile, au plus près de la population est essentiel pour le personnel soignant, qui peut tenir compte de la globalité des besoins en évaluant la condition de vie et le soutien social pour mettre en place des soins adaptés.

Cette standardisation bloque les évaluations au cas par cas et nuit à la mission préventive des services. La FIQ a enquêté en récoltant des témoignages provenant de cinq équipes du secteur du nord de l'île, afin de cerner les enjeux et défis qu'englobent ces nouveaux outils dans leur profession. En collectant ces données directement sur le terrain et à partir de sondages et de consultations, les inquiétudes de base se confirment.

Des impacts marquants sur la qualité des soins

L'application comporte des problèmes techniques préoccupant, le personnel soignant est régulièrement déconnecté et perd accès aux données indispensables à l'exécution de leur travail. Certains membres du personnel sont contraints de sortir du domicile de leur patient pour tenter de se reconnecter sur le trottoir. En plus de perdre accès aux données, des dossiers de patients sont fusionnés, des formulaires perdus… la liste est longue. Les soignants subissent le coût de ses erreurs techniques au quotidien, ralentissant leur productivité et impactant leurs conditions de travail.

Un des principaux enjeux des soins à domicile est d'établir une approche humaine et un lien de confiance avec les patients. En utilisant Alayacare, la productivité et le rendement attendu du personnel est visiblement augmenté. Le corps soignant est imposé des temps réduits et prédéterminés pour chaque soin dans le but d'augmenter le nombre de visite sur leur route.

Les équipes doivent désormais couvrir 12 à 16 personnes dans leur journée de travail, soit 7,5 heures au cours desquelles elles doivent aussi prendre leur pose, manger et rédiger leurs notes. Une surcharge conséquente qui alourdis gravement leur charge de travail et pose des risques psychologiques non négligeables. L'inadaptation d'Alayacare sur le terrain dégrade le lien thérapeutique entre patient.e et soignant.e, leur route surchargée les empêche d'avoir le temps de construire adéquatement et progressivement ce lien.

Parmi les professionnel.les interrogés par la FIQ, sept sur dix affirment qu'Alayacare impacte la qualité des soins délivrés. Les objectifs d'efficacité et de sécurité qui ont poussé la direction et le gouvernement à implanter Alayacare dans les services de soins à domicile ne sont pas atteints. Les retombées négatives de son utilisation pèsent lourds sur les professionnels de santé.

Le personnel espère que les nouvelles technologies aident leur profession et améliore la gestion des soins, mais les outils actuels demeurent mal adaptés au terrain. Parmi les efforts des gouvernements et industries privés, il manque un point crucial sur lequel ces nouvelles technologies ne s'attardent pas : la qualité des services.

Malgré les preuves d'inefficacité d'Alayacare, elle va continuer d'être appliquée et même exportée à d'autres équipes à Québec. Le personnel soignant poursuive leur lutte pour recentrer la qualité des soins au cœur du développement des services de santé. L'OIT appelle à renforcer les politiques mondiales et nationales pour garantir une gestion globale des nouveaux risques et dangers qui émergent à l'ère du numérique.

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