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La Global Sumud Flotilla attaquée en pleine nuit par des drones

30 septembre, par Agence Média Palestine — , , ,
La flottille humanitaire partie la semaine dernière a essuyé hier plusieurs attaques attribuées à Israël il y a à peine 48 heures. La communauté internationale a exhorté les (…)

La flottille humanitaire partie la semaine dernière a essuyé hier plusieurs attaques attribuées à Israël il y a à peine 48 heures. La communauté internationale a exhorté les Etats à tout mettre en œuvre pour protéger leurs ressortissants membres du convoi qui se dirige vers Gaza.

Tiré de Agence Médias Palestine
25 septembre 2025

Par l'Agence Média Palestine

Les 51 bateaux qui composent cette flottille humanitaire internationale, la Global Sumud Flotilla, se sont élancés la semaine dernière avec une dizaine de jours de retard vers leur destination finale : Gaza. Alors qu'ils naviguaient en mer Méditerranée, 14 embarcations du convoi ont été visées hier par des attaques attribuées à Israël.

Grenades assourdissantes et fusées éclairantes explosives

Mardi 23 septembre à 23h, l'équipage de la flottille alerte. Une quinzaine de drones sont en train de tourner autour de l'Alma, un des bateaux du convoi, au large de la Grèce. Quelques heures plus tard, une nouvelle alerte est lancée : des explosions ont été entendues tout autour de la flottille. Sur le canal Telegram du mouvement, les participants restent déterminés : “Explosions, drones non identifiés et brouillage des communications. Nous sommes actuellement témoins directs de ces opérations psychologiques, mais nous ne nous laisserons pas intimider”.

Un communiqué de presse est publié par l'organisation du convoi dans la foulée. On y apprend notamment qu'en plus des grenades assourdissantes et des fusées éclairantes explosives, de nombreux objets non-identifiés ont été largués sur différents navires de l'expédition. Heureusement, les attaques n'ont fait aucun blessé dans les rangs du convoi.

La flottille dénonce une campagne de communication orchestrée par Israël déjà depuis plusieurs semaines pour délégitimer cette initiative et la criminaliser. L'Etat israélien fait d'ailleurs référence à ce convoi en l'affublant du nom de “flottille du Hamas”. Pour les organisateurs du convoi humanitaire, le jeu auquel s'adonne le régime génocidaire israélien ne fait aucun doute : “Cette campagne de désinformation est une tentative de justifier de manière préventive une action militaire contre une mission humanitaire non violente menée par des civils.

Les membres de la Global Sumud Flotilla tiennent le cap et ont déclaré qu'ils ne se laisseraient pas intimider par ces tentatives d'Israël de miner la plus grande initiative humanitaire à voir le jour pour mettre un terme au blocus israélien sur la bande de Gaza. Ils ont réclamé la protection des Etats et des organisations internationales : “Nous exigeons que tous les États membres de l'ONU, et en particulier ceux dont les ressortissants se trouvent à bord des navires de la flottille mondiale Sumud, garantissent et facilitent immédiatement une protection efficace, notamment une escorte maritime, la présence d'observateurs diplomatiques accrédités et une présence protectrice manifeste de l'État, afin que la flottille puisse poursuivre sa route en toute sécurité, que la mission puisse se dérouler sans entrave et que la loi prévale sur les actes d'anéantissement.

Le soutien international à la flottille

Peu après les attaques contre le convoi et à la suite de ces demandes de protection de l'équipage composé de plus de 500 volontaires de tous pays et tous horizons, plusieurs pays et organisations ont officiellement apporté leur soutien à la Global Sumud Flotilla.

L'Italie a annoncé hier par la voie du ministère de la Défense l'envoi d'un navire militaire dans la zone où se trouve actuellement la flottille, pour “d'éventuelles opérations de secours”. Guido Crosetto, le ministre de la Défense, a déclaré : “Pour garantir l'assistance aux citoyens italiens présents sur la flottille, j'ai autorisé l'intervention immédiate de la frégate Fasan de la marine militaire, qui naviguait au nord de la Crète, et qui se dirige vers la zone”. La cheffe du gouvernement Giorgia Meloni a par la suite tenté de réduire l'engagement italien en faveur de la flottille, en se prononçant en faveur d'un déchargement de l'aide à Chypre plutôt qu'à Gaza, une proposition rejetée par la délégation italienne membre de la flottille.

Peu après, dans la même journée, une lettre est adressée aux instances dirigeantes de l'Union européenne et aux gouvernements des pays membres, par des centaines de parlementaires de différentes nations européennes. Cette lettre “appelle urgemment” les gouvernements à assurer un passage sécurisé pour les membres de la flottille dans les eaux internationales, interpellant également l'Agence de sécurité maritime européenne.

L'Espagne s'est également jointe à l'initiative italienne en annonçant qu'un navire de la marine prendrait la mer ce matin pour porter assistance et sécurité au convoi humanitaire. Le premier ministre Pedro Sanchez a déclaré lors de l'Assemblée générale des Nations Unies à New York : “Le gouvernement espagnol exige que le droit international soit respecté et que le droit de nos citoyens de naviguer en toute sécurité en Méditerranée soit respecté”. La France, de son côté, s'est contentée d'appeler au respect du droit international maritime, sans pour autant prendre de mesures similaires à celles de ses voisins italiens et espagnols.

La coalition a salué l'envoi de ces deux navires pour assurer la sécurité de la flottille. Thiago Avila, un des membres de la flottille, a quant à lui réaffirmé la détermination de l'équipage de la Global Sumud Flotilla : “La Global Sumud Flotilla est une mission humanitaire pacifique et non-violente, qui respecte le droit international, lequel stipule dans la décision provisoire de la CIJ (Cour internationale de justice) qu'aucun pays ne peut entraver l'aide humanitaire destinée à Gaza “.

Un dernier communiqué publié par la communication de la flottille il y a quelques heures fait état d'une escalade probable des attaques israéliennes sur le convoi humanitaire dans les prochaines 48 heures, au moyen d'un arsenal qui pourrait “couler des bateaux, blesser ou tuer les membres de l'équipage”.

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De Tunis à Gaza. Nous, le monde

L'image présente une scène sombre avec une source de lumière éclatante au centre, semblant provenir d'un feu ou d'un soleil couchant. Les contours des objets et des formes sont (…)

L'image présente une scène sombre avec une source de lumière éclatante au centre, semblant provenir d'un feu ou d'un soleil couchant. Les contours des objets et des formes sont flous, créant une ambiance mystérieuse.

Tiré de Afrique XXI
25 septembre 2025

Par Zukiswa Wanner

L'environnement pourrait évoquer un paysage naturel ou urbain, sans détails précis visibles. On ressent une intensité et une chaleur émises par cette lumière, contrastant avec l'obscurité environnante.
Pluie de drones sur la flottille, mardi 23 septembre.
© Capture d'écran

Zukiswa Wanner, Vignettes of a People in an Apartheid State, Periferias, 2023 (uniquement en anglais).

Épisode 4 · Zukiswa Wanner, écrivaine et activiste sud-africaine, publie dans Afrique XXI son journal de bord de la flottille Global Sumud, en route pour Gaza. Dans la nuit de mardi 23 à mercredi 24 septembre, les survols de drones israéliens se sont intensifiés. La flottille a essuyé des tirs et subi des opérations de brouillage.

Mardi 23 septembre.

Ça a commencé. Dimanche soir, nous l'avons vécu pour la première fois. Des drones suivaient nos bateaux dans la nuit. Ça a recommencé lundi soir. J'écris ces lignes mardi soir, nous ne sommes pas encore à mi-route de Gaza et je m'attends à ce que cela se reproduise. Nos exercices quotidiens nous rappellent que nous avons affaire à une entité véritablement maléfique. Dans les médias, le gouvernement israélien a commencé à accuser la flottille d'être liée à tel ou tel groupe militant.

Il y a quelques années, les gens auraient gobé facilement leur hasbara[Réthorique d'Israël à destination de la communauté internationale, NDLR]. Aujourd'hui, les Israéliens ne font même plus semblant de vouloir être crus. Parce que le monde ne les croit pas. Nous avons tous vu de nos propres yeux l'extermination d'un peuple et de Gaza, et, pire encore, le Financial Times a révélé les plans des Seigneurs diaboliques pour faire de Gaza une station balnéaire. On a déjà connu ce scénario à Bali. Le terrain de jeu des yuppies. Sauf que dans les années 1960 la censure de l'information était plus facile. Aujourd'hui, aucun d'entre nous ne peut faire mine de ne pas voir, et c'est pourquoi nous ne laisserons pas Gaza mourir en restant sourds et muets. Nous crierons pour sa survie jusqu'à en perdre la voix, et nous échaufferons nos cordes vocales pour pouvoir crier de nouveau. Car, parfois, même les manifestations pacifiques peuvent faire du bruit.

Zukiswa Wanner

Au cours des dernières vingt-quatre heures, j'ai vu deux personnages politiques s'empêtrer. Le premier, Barack Obama, a tenté de dire qu'il n'était pas le président tout en s'empressant de jouer les arbitres entre les deux camps. Je l'ai écouté essayer d'échapper à ce qui se passe à Gaza, et, pour la première fois, j'ai entendu cet homme bégayer. Comment a-t-il pu tromper le monde si longtemps alors qu'il n'était, en réalité, qu'un homme de paille de l'Empire ? Pourtant, il fut autrefois un militant propalestinien. La politique aux États-Unis est triste.

En Afrique du Sud, l'une des dirigeantes du principal parti d'opposition (L'Alliance démocratique) – qui fait actuellement partie du Gouvernement d'unité néolibérale aux côtés du Congrès national africain après l'échec de ce dernier à obtenir la majorité absolue aux dernières élections – vient de se retirer de la campagne. Helen Zille passe pour la future candidate à la mairie de Johannesburg. Dans une interview accordée à la télévision nationale, en réponse à une question sur le génocide à Gaza, elle a dit : « Génocide est un mot très fort. Je ne suis jamais allée à Gaza, donc je ne sais pas. »

Écraser par la violence, en paroles et en actes

Cher lecteur, les ancêtres juifs de Mme Zille, du côté maternel aussi bien que paternel, sont arrivés d'Allemagne en Afrique du Sud dans les années 1930. Elle est née à Johannesburg six ans après la Seconde Guerre mondiale. Je me demande si elle a déjà entendu parler de l'Holocauste et si elle le reconnaît puisqu'elle n'y était pas. C'est typique des sionistes, n'est-ce pas ? Ils n'essaient même pas de raconter des mensonges bien tournés. Ce qu'ils font, c'est vous écraser par la violence, en paroles et en actes. Le problème, c'est que beaucoup d'entre nous refusent de s'engager en feignant l'ignorance. Or nous savons qu'ils savent. Et nous leur demanderons des comptes lorsque viendra notre Nuremberg.

Bien que j'aie l'air en colère aujourd'hui, et j'aurais des motifs valables de l'être, je ne le suis pas. Et il y a trois raisons à cette humeur positive. La première est qu'après avoir accompli des tâches banales, comme notre lessive et notre vaisselle à l'eau de mer (car nous devons économiser l'eau), nous avons eu une conversation plutôt intéressante au sein de la famille. Nous avons échangé sur les raisons qui nous avaient poussés à embarquer sur la flottille Global Sumud. C'était magnifique de les écouter tous, originaires de pays différents, unis dans un même but. Et de comprendre que l'ennemi n'est pas seulement celui des Palestiniens, mais le nôtre à tous. Aujourd'hui, c'est Gaza, demain ce sera nos villes natales. Car les sionistes et leurs semblables semblent empressés de désensibiliser le monde au mal et aux meurtres (sauf quand c'est celui de Charlie Kirk 👀). Mais comme nous l'ont montré les Italiens par leur grande manifestation, nous, qui sommes des centaines, des millions voire des milliards de personnes, pouvons faire la différence et repousser un ennemi qui veut que nous soyons plus intéressés par le classement Forbes des personnes les plus riches que par la faim endurée par des êtres humains n'ayant pas mangé depuis des jours. Nous sommes nombreux. Nous avons une voix. Et nous en userons jusqu'à ce que le mal soit vaincu. Nous sommes les POZ (People Opposing Zionism, les opposants au sionisme).

Laundry hung on Mendi Reincarnated with banner incorporating SA and Palestinian flags reading « Free Palestine »23 septembre 2025.
© Zukiswa Wanner

Sur une note littéraire plus légère, parce que j'adore les histoires et que je cherche toujours un moyen de les partager, mercredi dernier, le jour où j'ai embarqué, j'ai lancé un club de lecture de la flottille Global Sumud. Je voulais qu'on lise (ou relise, dans mon cas) un texte en commun pendant notre voyage vers Gaza. Je voulais un livre qui nous éclaire sur Gaza tout en nous donnant un aperçu de notre destination. Le roman que j'ai choisi est The Bitterness of Olives [« L'Amertume des olives »] d'Andrew Brown (Karavan Press, 2023). Pour que ce ne soit pas trop fastidieux pour les lecteurs, j'ai demandé à Andrew de lire le prologue. Ensuite, j'ai lu la première page du premier chapitre et, à tour de rôle, quelqu'un d'autre a lu la première page du chapitre suivant, et ainsi de suite. Tout ça pour dire que les salons littéraires sud-africains sont admirablement engagés dans cette initiative ! Nous sommes mardi aujourd'hui et j'ai déjà des lecteurs inscrits jusqu'à lundi prochain. Cela témoigne, comme j'aime souvent le dire, de la manière dont la plupart des artistes nous montrent que l'aspect « humain » des sciences humaines passe par l'action et l'engagement.

Un poème de Rifka

Enfin, la troisième raison de mon humeur, même si elle est plus sombre que les autres, c'est que Rifka m'a envoyé un poème hier soir. Et pendant que je le lisais, alors que nos bateaux étaient survolés par les drones, je n'ai pas pu m'empêcher de dire à Eurozone que je suis convaincue que c'est parce qu'ils veulent anéantir Gaza avant notre arrivée qu'ils envoient leurs drones pour nous intimider si loin de la côte israélienne. Mais je pense qu'ils ne comprennent pas notre volonté et notre amour pour l'humanité.

Chaque personne à bord de ce bateau restera, sans nul doute, pour aider à reconstruire Gaza. Car, comme je l'ai déjà dit, notre humanité est plus forte que notre peur. Voici le poème de Rifka, que je partage avec son autorisation. Je m'arrête là pour ce soir.

Tal El-Hawa, sud de Rimal,
Des noms désormais gravés dans le feu et les décombres,
Pris dans les filets d'un génocide.

Je suis originaire de Zarnouqa, dans le district occupé de Ramleh.
Née dans le camp de Nusseirat,
J'ai bâti ma vie avec mon mari et mes enfants,
Dans le sud de Rimal,
Où chaque battement de cœur résonnait dans les rues de Tel al-Hawa.

Là-bas, nous ne vivions pas seulement dans des maisons,
Nous vivions dans les rires les uns des autres,
Dans la chaleur partagée des trottoirs et des devantures de magasins,
Dans le langage doux et tacite de l'appartenance.

L'hôpital El-Quds – où j'ai vu mon visage renaître,
Dans les yeux de mes filles lorsqu'elles sont venues au monde.

Leur école se trouvait non loin,
De la boulangerie qui réveillait le quartier tous les matins à l'aube,
Du magasin de falafels où les salutations précédaient les prix,
Et du vendeur de katayef qui accrochait des lampes à sa porte pour le ramadan.
L'homme qui vendait des awama en hiver.
Et le café Mazaj,
Ce breuvage sacré épicé à la cardamome,
Versé directement dans le cœur et non dans la tasse.
Roi de tous les cafés.

Quand les jours devenaient lourds de tristesse,
Je m'échappais dans la nuit de Tal El-Hawa
Seule, mais jamais solitaire.
Les rues m'accueillaient.
Leur silence était une chanson familière.
Leur obscurité, une amie.
L'air frais caressait mes joues,
Et soulageait mon cœur.
Sur le chemin du retour,
Je m'arrêtais à la boutique de falafels,
Toujours bondée, toujours animée.
Mais j'étais servie la première.
Non par charité,
Mais pour des raisons plus anciennes,
Sacrées.
Les enfants de cette terre ne vous font pas attendre,
Quand vous êtes une femme.

Je n'ai jamais considéré cela comme une atteinte à mon féminisme.
Je voyais cela comme une ancre,
Des racines,
Un lien supplémentaire qui m'attachait,
À cette terre que je n'ai jamais quittée,
À cette maison dont je n'ai jamais douté.

Et Gaza,
Belle Gaza,
Gaza chérie,
Est brûlée, détruite,
Mais jamais effacée.
Gaza est perdue, mais ne périt pas.
Gaza est détruite, mais ne meurt jamais.

Post-scriptum : j'ai écrit et envoyé ce texte mardi soir. Puis, avec la lâcheté qui caractérise les sionistes (car le mal est plus à l'aise sous le couvert de la nuit, et nous nous réveillons souvent avec la nouvelle de nouveaux Palestiniens tués), ils ont envoyé plus de dix drones au-dessus de notre flottille, et nous avons subi quelques attaques et le brouillage de nos communications. Ces sbires sont assez stupides pour ne pas comprendre qu'en tant que mission humanitaire pacifique, nous voyageons sous surveillance étroite, pour pouvoir prouver, une nouvelle fois, au monde entier, qui sont les auteurs de la violence. Ils peuvent brouiller nos signaux, mais nos signaux émettent des signaux et des images qui démasquent leurs tentatives d'intimidation. Une fois encore, je soupçonne qu'ils veulent nous retarder pour nous empêcher d'arriver à Gaza ou nous empêcher d'arriver avant qu'ils aient totalement décimé Gaza. Mais nous sommes du monde entier. Nous avons le monde avec nous. Et nous sommes et restons déterminés dans notre lutte pour que l'humanité prévale.

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La Flottille de la Liberté : quand la mer se fait chemin d’humanité

Jamais, depuis que les hommes naviguent, la mer n'avait vu une telle convergence. Plus de 70 navires, venus des quatre coins du monde, ont pris la même direction, portés par (…)

Jamais, depuis que les hommes naviguent, la mer n'avait vu une telle convergence. Plus de 70 navires, venus des quatre coins du monde, ont pris la même direction, portés par une même conviction : secourir un peuple assiégé. Leur destination : la bande de Gaza. Leur mission : briser un blocus maritime jugé illégal par le droit international. Leur mot d'ordre : Paix.

À bord, pas d'armes, pas de soldats, pas d'agenda militaire. Seulement des vivres, des médicaments, des volontaires, et une certitude partagée : qu'il est encore possible, par la solidarité, de desserrer l'étau de la violence.

Cette mobilisation internationale sans précédent est menée par la Freedom Flotilla Coalition, qui a rassemblé autour d'elle d'autres initiatives : le Mouvement Global vers Gaza, la Flottille Sumud maghrébine (Le Maroc y participe aussi) ou encore la Flottille Sumud Nusantara. Ensemble, ils portent ce projet humanitaire hors norme, lancé en 2025, avec le soutien de centaines de citoyens engagés.

À bord des navires se trouvent des médecins, des journalistes, des membres d'ONG, des militants pour la paix, mais aussi de simples citoyens animés par une même volonté : ne pas laisser le silence recouvrir Gaza.

Depuis 2007, Gaza vit sous blocus terrestre, maritime et aérien. Israël a imposé ce verrouillage après la victoire du Hamas aux élections législatives palestiniennes de 2006, des élections jugées libres et régulières par les observateurs internationaux, mais que ni Israël, ni l'Union européenne, ni les États-Unis n'ont reconnues.

Près de deux millions d'habitants subissent depuis un isolement presque total. L'accès à la nourriture, aux soins, aux médicaments, à l'électricité et à l'eau y est contrôlé, restreint, conditionné. Des ONG parlent d'une « prison à ciel ouvert », d'autres d'un blocus parmi les plus déshumanisants de l'histoire contemporaine.

Les offensives israéliennes ont régulièrement ravagé l'enclave : 2008, 2012, 2014, 2021, 2022 et 2023. Selon l'ONU, entre 2008 et 2023, plus de 6 000 Palestiniens ont été tués et 65 000 blessés. Depuis le 7 octobre 2023, après l'attaque du Hamas et la riposte israélienne, le bilan est effroyable : plus de 65 000 morts et 162 000 blessés.

Dans ce contexte, chaque tentative pacifique visant à briser le blocus prend une dimension à la fois politique et morale.

La mémoire des flottille est marquée par un épisode tragique : celui du Mavi Marmara, en mai 2010. Parti de Turquie avec des vivres et du matériel médical, il transportait des médecins, des journalistes et des parlementaires. Attaqué en pleine mer internationale par un commando israélien, il laissa derrière lui un lourd bilan : neuf passagers tués, un dixième décédé plus tard, et une cinquantaine de blessés. Les survivants furent arrêtés, et le navire confisqué.

Ce drame avait provoqué une onde de choc mondiale, révélant au grand jour la brutalité du blocus. Depuis, chaque volontaire qui s'engage dans une telle flottille sait qu'il s'expose à la prison, parfois à la mort.

Le 10 septembre 2025, les navires de la nouvelle flottille ont quitté Tunis dans une quasi-indifférence médiatique. Peu de caméras, peu de unes, peu d'attention. Comme si l'ampleur de ce geste pacifique, inédit et courageux, n'avait pas sa place dans le récit dominant.
Et pourtant, ces volontaires désarmés rappellent au monde entier une vérité fondamentale : il est encore possible d'agir, même sans fusil ni bombe. Ils opposent la solidarité des peuples à la raison d'État, l'audace civile au mutisme diplomatique.

L'absence de relais médiatique contraste avec la portée symbolique de l'événement. Ces bateaux désarmés témoignent d'une force morale qui n'a rien à envier aux grandes pages de courage de l'histoire moderne. Certains osent comparer leur audace à celle des débarquements de la Seconde Guerre mondiale : moins d'armes, mais plus d'humanité.

La question qu'ils posent, par leur simple navigation, dépasse Gaza :

Que diront nos enfants, et les enfants de nos enfants, de nous, face au génocide en cours ?

Peut-être se souviendront-ils que, malgré les bombes et l'indifférence, malgré les vagues et les populismes, malgré les bruits de guerre et les silences complices, 500 femmes et des hommes venus de 44 pays ont choisi de naviguer pour la dignité.
Ils diront que, dans la nuit de l'Histoire, certains ont refusé le confort de l'oubli. Qu'ils ont choisi la mer comme chemin d'espérance. Et qu'ils auront écrit, avec leurs voiles fragiles et leurs coques modestes, une page de résistance pacifique qui défie le temps.
Ils sont désormais l'avant-garde de l'humanité.

Mohamed Lotfi
12 septembre 2025

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Palestine : reconnaître le peuple avant l’État

En novembre 1988, l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) en exil proclamait à Alger l'indépendance de l'État de Palestine. Dans la foulée, la plupart des pays (…)

En novembre 1988, l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) en exil proclamait à Alger l'indépendance de l'État de Palestine. Dans la foulée, la plupart des pays arabes, africains, asiatiques, ceux de l'ex-URSS, Cuba, le Nicaragua et la Yougoslavie reconnurent l'État palestinien. S'ouvrait alors le cycle des négociations pour une solution à deux États qui aboutit aux fameux accords d'Oslo.

Tiré de Contrtetemps
https://www.contretemps.eu/palestine-reconnaissance-etat-peuple/

Depuis, une Autorité palestinienne s'est érigée sur une infime partie du territoire de la Palestine historique et a peu à peu perdu toute légitimité auprès de la population en raison de son rôle de collaboration avec la puissance coloniale.

En 2025, près de deux ans après le début de la guerre génocidaire menée par l'État colonial israélien à Gaza, comment comprendre la reconnaissance de l'État de Palestine par une partie des pays occidentaux ? C'est à cette question que Gilbert Achcar, auteur notamment de Gaza, génocide annoncé. Un tournant dans l'histoire mondiale (La Dispute, 2025), offre des éléments d'analyse et de réponse.

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Le gouvernement le plus extrémiste de l'histoire de l'État sioniste – celui formé fin 2022 par le chef du principal parti d'extrême droite israélien, Benyamin Netanyahou, avec des groupes sionistes encore plus extrémistes que son propre parti, les sortant ainsi du statut marginal auquel ils étaient jusque-là confinés – a saisi l'occasion qu'il a trouvée dans l'opération du 7 octobre 2023, moins de dix mois après sa formation, pour mener une guerre génocidaire dans la bande de Gaza qui a surpassé en horreur toutes les guerres précédentes d'Israël.

Cela s'est produit sous un président américain qui professait ouvertement son sionisme, tandis que l'impact de l'opération Déluge d'al-Aqsa créait un climat incitant la plupart des autres gouvernements occidentaux à déclarer leur soutien sans réserve à l'horrible agression lancée par les forces armées sionistes, et ce sous prétexte de soutenir le droit d'Israël à « l'autodéfense ». Ces circonstances combinées ont encouragé le gouvernement sioniste d'extrême droite à perpétrer un génocide dans la bande de Gaza, la détruisant avec une brutalité extrême, et à chercher à expulser les résidents restants, tout en resserrant l'étau sur la population de Cisjordanie en préparation de sa propre expulsion.

De nombreux dirigeants occidentaux, ainsi que des dirigeants arabes, ont supposé que l'agression israélienne se limiterait à éliminer le contrôle du Hamas sur la bande de Gaza, permettant ainsi de replacer ce territoire sous le contrôle de l'Autorité palestinienne (AP) basée à Ramallah. Pour ce faire, ils ont compté sur l'administration de Joe Biden, qui soutenait ce scénario. Cependant, quelques mois après le début de l'invasion, il est devenu clair pour eux, comme pour Biden lui-même, que Netanyahou n'était pas prêt à poursuivre dans cette voie. Ce dernier s'est longtemps vanté d'avoir éliminé la perspective d'un « État palestinien », en particulier en consolidant la division continue entre la Cisjordanie et Gaza au moyen d'un feu vert au financement par le Qatar du pouvoir du Hamas dans l'enclave, empêchant ainsi ce dernier d'être redevable à l'AP de Ramallah.

Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, et après un pari illusoire sur son ambition de remporter le prix Nobel de la paix, ces dirigeants européens et arabes ont été choqués par ses déclarations appelant à la déportation de la population de Gaza et à la saisie de l'enclave pour la transformer en station balnéaire. En revanche, ces mêmes déclarations ont été applaudies par Netanyahou et l'extrême droite sioniste. Peu de temps après, la trêve qui a précédé la nouvelle investiture de Trump s'est transformée en un nouveau chapitre hideux du génocide en cours à travers une famine orchestrée par le régime sioniste en collusion avec Washington, accompagnée d'un assassinat barbare d'habitants de la bande de Gaza au vu et au su du monde. Cela a été suivi d'une nouvelle offensive israélienne meurtrière visant à s'emparer des zones peuplées restantes de la bande de Gaza et à les détruire. Ces développements ont conduit à une évolution croissante de l'opinion publique dans les pays occidentaux, passant de la sympathie pour Israël, qui a culminé après le 7 octobre, à la sympathie pour les civils affligés de Gaza, en particulier les enfants.

Ces développements ont embarrassé les dirigeants européens et les ont incités à chercher une posture symbolique pour faire oublier leur complicité dans la guerre génocidaire à Gaza, complicité qui a duré plus d'un an et qui a compris leur rejet des appels à un cessez-le-feu pendant plusieurs mois, outre le maintien de toutes leurs relations, y compris militaires, avec l'État sioniste. Ils virent dans la reconnaissance du soi-disant « État de Palestine », près de quarante ans après sa proclamation (voir « Le mirage d'un État palestinien », 30 juillet 2025), un moyen de compenser politiquement au moindre coût leur soutien antérieur à la guerre menée par Israël. Cette position symbolique a acquis plus de crédit grâce à sa condamnation véhémente par Netanyahou, qui craint maintenant que sa prise de contrôle de Gaza ne se transforme en occasion de pression sur lui pour la réunification de l'enclave avec la Cisjordanie sous une autorité unique, ravivant ainsi la perspective d'un « État palestinien » qu'il a longtemps cherché à étouffer.

Ce qui décidera certainement de la question, c'est la position qu'adoptera Donald Trump. Les prises de positions européennes ne sont « pas importantes » à cet égard, comme l'a dit Trump en commentant l'annonce faite par Emmanuel Macron de sa décision de reconnaître « l'État de Palestine ». En effet, seule la position américaine peut forcer Netanyahou à revenir à la « solution à deux États », qu'il rejette jusqu'à présent, même si elle consiste essentiellement en un mini-État palestinien soumis à l'État d'occupation sioniste, à l'instar de l'actuelle AP de Ramallah.

Ce qui influencera Donald Trump, cependant, c'est la position des États arabes du Golfe, qui sont certainement plus chers au cœur du président américain (et à son portefeuille) que Netanyahou et Israël. C'est pourquoi le président français a tenu à impliquer le royaume saoudien dans la conduite de ses efforts aux Nations unies, offrant à la partie arabe l'occasion de participer à la campagne en faveur de la « solution à deux États », pour faire oublier leur réticence collective à exercer une réelle pression pour arrêter le génocide. Quant à « l'État de Palestine », ils le considèrent comme conditionné (comme dans la Déclaration de New York publiée il y a deux mois dans le cadre de l'initiative franco-saoudienne) à la restriction des droits politiques à ceux qui acceptent la politique actuelle de l'AP de Ramallah, et à ce qu'il reste démilitarisé au-delà de l'armement nécessaire pour réprimer sa population.

En fait, la pression du Golfe ne saurait obtenir de la part de l'administration Trump plus que le retour du président américain à ce qu'il a appelé à l'époque « l'accord du siècle », un projet élaboré par son gendre, Jared Kushner, en 2020. Ce plan prévoyait l'établissement d'un « État de Palestine » dans trois enclaves en Cisjordanie, Israël annexant les terres environnantes – la plupart des terres de la zone C, telle que définie lors de la mise en œuvre des accords d'Oslo, y compris la vallée du Jourdain. Quinze colonies sionistes devaient rester à l'intérieur des enclaves attribuées à « l'État de Palestine », sous souveraineté israélienne.

En échange des terres annexées à l'État d'Israël, le plan Kushner prévoyait d'accorder aux Palestiniens deux enclaves dans le désert du Néguev, à la frontière avec l'Égypte. L'ensemble de la bande de Gaza faisait partie de « l'État de Palestine » dans le plan de 2020, mais sa réoccupation permet à présent de lui étendre le type de « solution » envisagé pour la Cisjordanie. Israël s'emparerait de parties de la bande de Gaza et les annexerait officiellement, tandis que les réfugiés gazaouis seraient confinés dans une ou deux enclaves, une partie d'entre eux étant déplacée vers le Néguev. Kushner lui-même a recommandé ce déplacement dans une conférence qu'il a donnée à l'Université Harvard en février de l'année dernière.

En 2020, l'AP de Ramallah avait catégoriquement rejeté le plan Kushner-Trump, tout comme la Ligue arabe, pour son mépris flagrant des droits et revendications des Palestiniens. Aujourd'hui, certains de ceux qui l'ont rejeté pourraient y voir un moindre mal (par opposition à une expulsion totale) et appeler donc à son acceptation. Même s'ils gagnaient gain de cause, et que « l'État de Palestine » était établi d'une façon que Netanyahou peut accepter (il avait salué le plan Kushner-Trump en 2020), cela ne représenterait rien de plus qu'une « solution » encore pire que ce qui existait avant le 7 octobre. En d'autres termes, cela ne résoudrait rien, et la résistance palestinienne sous toutes ses formes continuerait certainement.

Les gouvernements qui souhaitent vraiment soutenir la cause palestinienne doivent commencer par reconnaître le droit du peuple palestinien à l'autodétermination avant de reconnaître un État hypothétique, et cela sans désigner l'AP de Ramallah, rejetée par la plupart des Palestiniens, comme modèle de l'État qu'ils souhaitent. En effet, le consensus national palestinien s'est exprimé en 2006 dans une série de revendications qui comprenaient le retrait de l'armée israélienne et des colons de tous les territoires palestiniens occupés en 1967, y compris Jérusalem-Est, le démantèlement du mur d'apartheid, la libération de tous les prisonniers palestiniens détenus par Israël et la reconnaissance du droit des réfugiés palestiniens au retour et à l'indemnisation. Aux yeux de la plupart des Palestiniens, tout « État » établi sans que ces revendications ne soient satisfaites ne serait rien de plus qu'une nouvelle tentative de liquider leur cause nationale et d'attribuer une fausse souveraineté à la prison à ciel ouvert dans laquelle l'État sioniste confine le peuple palestinien dans les territoires de 1967, dans une aire géographique de plus en plus réduite.

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Photo : Wikimedia Commons.

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Et si le Hamas avait vu juste ?

L'offensive du Hamas contre Israël du 7 octobre 2023 a créé une onde de choc partout dans le monde ; elle a illustré crument toutes les dimensions du conflit (…)

L'offensive du Hamas contre Israël du 7 octobre 2023 a créé une onde de choc partout dans le monde ; elle a illustré crument toutes les dimensions du conflit israélo-palestinien.

photo Serge D'Ignazio

Jusque là, la stratégie dominante parmi les chancelleries occidentales était d'en parler le moins possible afin de ménager l'image de marque de leur protégé israélien, sauf pour dénigrer la résistance palestinienne. Depuis l'offensive du Hamas, les répercussions du conflit ont acquis une envergure inédite au point que plusieurs pays occidentaux, et non parmi les moindres (France, Grande-Bretagne, Canada), ont reconnu, au moins sur papier, un État palestinien. Quant à le mettre sur pied, il faudra sans doute attendre encore longtemps, mais un pas décisif vient d'être franchi concernant la légitimité des revendications palestiniennes.

Toutefois, deux problèmes majeurs se posent.

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D'abord, la question du Hamas comme interlocuteur légitime pouvant participer de plein droit aux futures négociations de paix. Les gouvernements occidentaux, même les plus ouverts à la création d'un État palestinien, lui refusent ce droit. Ils exigent sa dissolution comme organisation, son désarmement et la libération inconditionnelle des otages israéliens qu'il détient encore. On note là une vieille tendance de la diplomatie occidentale dans le dossier du conflit israélo-palestinien dont l'Organisation de libération de la Palestine (l'OLP) de Yasser Arafat a été longtemps l'objet : isoler les organisations palestiniennes (même les plus représentatives) jusqu'à ce qu'elles reconnaissent l'État hébreu. Rappelons que le Hamas a été élu en bonne et due forme à Gaza en 2006, ce qui n'a pas empêché Tel-Aviv d'établir et de maintenir un blocus maritime et terrestre autour de l'enclave et aussi de continuer impunément sa politique de colonisation en Cisjordanie où chaque année, les Palestiniens perdaient du terrain, au vu et au su des classes politiques occidentales. Il y a eu la guerre de Gaza en 2014 qui a fait 2251 victimes, dont 550 enfants, à la suite du lancement par le Hamas de roquettes sur Israël en représailles d'un raid aérien israélien antérieur.

Personne, dans les cercles gouvernementaux occidentaux alliés d'Israël, n'a tenu compte depuis 2006 de l'élection du Hamas, eux qui pourtant soutiennent l'État hébreu en tant que « seule démocratie du Proche-Orient ». Le gouvernement (ou ce qu'il en reste), issu de l'élection a toujours été considéré comme « terroriste », une étiquette commode et passe-partout qui permet de délégitimer les groupes qui résistent par les armes à l'expansionnisme israélien et de manière plus générale, à la domination occidentale.

Les classes politiques occidentales et certains commentateurs invoquent aussi comme prétexte pour boycotter le Hamas que celui-ci serait formé de fanatiques religieux qui rêvent d'établir un califat de la Méditerranée au Jourdain, bref qui veulent détruire Israël au profit d'un État islamiste intégriste. Mais entre les principes et la pratique, il existe une différence. Il y a sûrement des modérés au sein du Hamas, prêts à accepter l'existence de l'État hébreu en échange d'un État palestinien en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et à Gaza. Après tout, rappelons-nous qu'au sein de la classe politique israélienne et d'une partie de l'opinion publique de ce pays, il existe également une extrême-droite qui tient mordicus à reconstituer « le grand Israël biblique » des rivages de la Méditerranée aux rives du Jourdain. Pourtant, Tel-Aviv, quelle que soit la couleur politique de son gouvernement, demeure l'interlocuteur privilégié des puissances occidentales. On remarque donc à cet égard un double standard de leur part.

Les classes politiques occidentales refusent de voir que la meilleure façon de résoudre un conflit consiste à établir des ponts avec la partie adverse et non à la tenir à l'écart sous des prétextes fallacieux. Elles doivent résister à la tentation d'essayer de se confectionner une délégation palestinienne malléable et plus ou moins capitularde face à Israël pour imposer, par son intermédiaire, une paix à rabais à la population palestinienne. L'Autorité palestinienne, qui contrôle jusqu'à un certain point 40% de la Cisjordanie est discréditée auprès de la population en raison de sa corruption, de son incompétence et surtout de sa collaboration avec Israël. Que cela plaise ou non, le Hamas est un pion majeur sur l'échiquier politique palestinien, en dépit des pertes immenses qu'il subit actuellement à Gaza. On ne pourra jamais l'éliminer complètement. La boucherie à laquelle se livre le gouvernement Netanyahou ne peut que susciter une haine génératrice de volonté de vengeance de la part des Gazaouis et des Palestiniens en général.

Les différents gouvernements qui se sont succédé en Israël ont toujours beaucoup misé sur l'usage de la force dans leurs relations avec la Palestine, mais cette méthode comporte des limites et de sérieux dangers pour Israël lui-même.

Ensuite, si certains des pays qui ont reconnu officiellement l'État palestinien essaient de passer des belles paroles aux actes, c'est-à-dire tenter d'exercer des pressions commerciales et économiques sur Israël, cette orientation va inévitablement provoquer de sérieuses tensions avec d'autres pays qui soutiennent inconditionnellement l'État hébreu, en particulier les États-Unis, lesquelles pourraient entraîner des représailles économiques à l'encontre des gouvernements ayant reconnu l'État de Palestine.
Par conséquent, on ne peut être certain que ces derniers soient prêts à affronter la puissance hégémonique mondiale. Ils vont sans doute s'en tenir à leurs habituelles « exhortations » envers Tel-Aviv et au mieux, à exclure Israël d'événements sportifs et culturels, ce dont le gouvernement israélien se fout, tant que le pognon et les armes continuent d'être fournies par Washington. Mais même plutôt symboliques, ces sanctions représentent un pas dans la bonne direction.

Le Hamas a risqué gros avec son offensive du 7 octobre 2023. Ses dirigeants (presque tous tués depuis) n'avaient sans doute pas prévu l'ampleur et la brutalité de la riposte ordonnée par le cabinet Netanyahou. Gaza paraît à veille d'être entièrement occupé par l'armée israélienne, les pertes civiles sont énormes et les destructions, massives.

Cependant, la question du règlement du conflit israélo-palestinien a été remise de manière incontournable à l'ordre du jour et provoqué de profondes divisions jusque dans les rangs des alliés les plus déterminés de l'État hébreu. L'administration Trump est plus isolée que jamais dans le monde, et d'ailleurs pas seulement sur ce problème.

C'est triste à dire, mais il a fallu un énième recours aux armes pour provoquer le modeste déblocage dont nous sommes témoins en faveur d'un peuple dépossédé de sa patrie. Mais après tout, l'établissement de l'État hébreu s'est réalisé en recourant à une grande violence anti-arabe et anti-britannique.
Selon la formule de Marx, la violence n'est-elle pas la grande accoucheuse de l'histoire ?

Jean-François Delisle

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Microsoft retire ses services cloud à l’unité 8200 israélienne, suite à une révélation de +972

Le géant de la technologie a bloqué l'accès après que la révélation par le média +972 l'armée israélienne utilisait ses serveurs pour stocker des millions d'appels (…)

Le géant de la technologie a bloqué l'accès après que la révélation par le média +972 l'armée israélienne utilisait ses serveurs pour stocker des millions d'appels téléphoniques interceptés de Palestiniens.

Tiré d'Agence médias Palestine.

Microsoft a mis fin à l'accès de l'armée israélienne aux technologies qu'elle utilisait pour stocker d'énormes quantités de renseignements sur les civils palestiniens en Cisjordanie et à Gaza, a annoncé le géant technologique au ministère israélien de la Défense dans une lettre envoyée à la fin de la semaine dernière, selon le Guardian.

Cette décision fait suite à une révélation publiée le mois dernier par +972 Magazine, Local Call et le Guardian, qui dévoilait comment l'Unité 8200, l'agence d'élite de l'armée israélienne spécialisée dans la cyberguerre, stockait des enregistrements interceptés de millions d'appels téléphoniques passés par des Palestiniens sur la plateforme cloud Azure de Microsoft, créant ainsi l'une des bases de données de surveillance les plus intrusives au monde sur un seul groupe de population. Selon l'enquête conjointe, ces données ont été utilisées au cours des deux dernières années pour planifier des frappes aériennes meurtrières à Gaza, ainsi que pour arrêter des Palestiniens en Cisjordanie.

À notre connaissance, c'est la première fois qu'une grande entreprise technologique américaine révoque l'accès de l'armée israélienne à l'un de ses produits depuis le début de la guerre à Gaza. Microsoft continue néanmoins de travailler avec d'autres unités militaires israéliennes qui sont des clients de longue date.

La lettre adressée par Microsoft au ministère israélien de la Défense, dont le Guardian a pris connaissance, indique que la société a lancé une enquête externe « urgente » à la suite de notre révélation, concluant que l'armée israélienne avait violé les conditions d'utilisation de Microsoft en utilisant sa plateforme cloud pour stocker les données de surveillance. Selon le Guardian, la lettre précise que, ayant « identifié des preuves » corroborant notre reportage, l'entreprise a décidé de suspendre les services de stockage et d'intelligence artificielle liés au projet en question. Elle ajoute que Microsoft « n'a pas pour vocation de faciliter la surveillance de masse des civils ».

Jeudi, selon The Guardian, le vice-président et président de Microsoft, Brad Smith, a envoyé un e-mail au personnel pour l'informer de cette décision, expliquant que l'entreprise avait « cessé et désactivé une série de services destinés à une unité du ministère israélien de la Défense ». Il a ajouté : « Nous ne fournissons pas de technologie facilitant la surveillance de masse des civils. Nous appliquons ce principe dans tous les pays du monde et nous l'avons réaffirmé à plusieurs reprises depuis plus de deux décennies. »

Cette mesure sans précédent intervient dans un contexte de protestations croissantes contre Microsoft et d'autres géants de la technologie dont Israël s'est servi pendant ses deux années d'offensive à Gaza, où les civils ont constitué la grande majorité des victimes. Le mois dernier, des militants ont organisé une manifestation devant le centre de données de Microsoft aux Pays-Bas après que notre enquête a révélé qu'il hébergeait 11 500 téraoctets de données militaires israéliennes, soit l'équivalent d'environ 195 millions d'heures d'enregistrements audio.

Selon le Guardian, l'unité 8200 a rapidement transféré la masse de données de surveillance hors des serveurs de Microsoft à l'étranger quelques jours après la publication de notre enquête ; selon leurs sources, l'unité prévoyait de transférer les données vers la plateforme cloud Amazon Web Services, dont l'armée est également de plus en plus dépendante depuis le 7 octobre.

Toutefois, de nombreux autres projets militaires israéliens impliquant les services de Microsoft ne sont pas affectés. En janvier, une enquête menée par +972, Local Call et le Guardian sur la base de documents divulgués par le ministère israélien de la Défense et la filiale israélienne de Microsoft a révélé que le géant technologique « est présent dans toutes les principales infrastructures militaires en Israël », des dizaines d'unités de l'armée israélienne — notamment les forces aériennes, terrestres et navales — s'appuyant sur les services cloud de Microsoft.

De plus, pendant la période la plus intense des bombardements aériens israéliens sur Gaza, les ventes des services d'IA de Microsoft au ministère israélien de la Défense ont considérablement augmenté. Le projet de surveillance de masse hébergé sur les serveurs cloud de Microsoft a vu le jour en novembre 2021, lorsque Yossi Sariel, alors commandant de l'unité 8200, s'est rendu au siège du géant technologique à Seattle pour rencontrer le PDG Satya Nadella.

Selon un document interne de Microsoft résumant la réunion, obtenu par le Guardian, Sariel a informé les hauts responsables de l'entreprise qu'il souhaitait stocker de grandes quantités de renseignements — jusqu'à 70 % des données de l'unité, y compris des documents hautement confidentiels — sur les serveurs Azure.

Un officier du renseignement a déclaré à +972, Local Call et au Guardian qu'avant son partenariat avec Microsoft, l'unité 8200 ne disposait que de la capacité de stockage de ses serveurs internes pour héberger les enregistrements des appels téléphoniques de dizaines de milliers de Palestiniens que l'armée considérait comme « suspects ». Mais grâce à la capacité de stockage quasi illimitée d'Azure, l'unité a pu commencer à enregistrer sur ses serveurs les appels interceptés d'un nombre beaucoup plus important de Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie, permettant ainsi de réaliser ce que plusieurs sources israéliennes ont décrit comme l'objectif ambitieux du projet : stocker « un million d'appels par heure ».

Cette collecte massive de données de surveillance a permis à l'armée d'obtenir des informations potentiellement incriminantes sur pratiquement tous les Palestiniens de Cisjordanie, des données qui, dans la pratique, pouvaient être utilisées à des fins de chantage, de détention administrative, voire pour justifier rétroactivement des meurtres.

Tout le monde au sein de l'unité n'a pas vu d'un bon œil la décision de Sariel de transférer les renseignements classifiés de l'armée sur les serveurs de Microsoft à l'étranger, en raison à la fois du coût que cela impliquait et du caractère sensible des informations. Mais Sariel a insisté, exprimant clairement son enthousiasme pour le potentiel du projet.

Notre enquête a également révélé que la direction de Microsoft considérait le développement de relations avec l'unité 8200 comme une opportunité commerciale lucrative. Lors de la réunion de 2021 à Seattle, Nadella a déclaré que le partenariat avec l'unité 8200 était « essentiel » pour Microsoft, tandis que des documents internes décrivaient le projet commun comme « un moment incroyablement puissant pour la marque ».

Mais face à l'indignation croissante de l'opinion publique et au sein même de l'entreprise, et alors qu'un nombre croissant d'organisations de défense des droits humains ont conclu qu'Israël commettait un génocide à Gaza, Microsoft a peut-être revu son calcul.

L'entreprise avait initialement annoncé en mai, à la suite de notre enquête de janvier, qu'un examen interne n'avait trouvé aucune preuve que l'armée israélienne utilisait sa technologie pour nuire aux Palestiniens. Mais l'enquête externe lancée en réponse à notre dernière enquête, supervisée par les avocats du cabinet américain Covington & Burling, a conduit l'entreprise à bloquer l'accès de l'Unité 8200 à certains de ses services de stockage dans le cloud et d'intelligence artificielle.

Selon le Guardian, M. Smith a indiqué dans un e-mail adressé à son personnel que notre enquête avait mis en lumière « des informations auxquelles [Microsoft] ne pouvait pas accéder compte tenu de ses engagements en matière de confidentialité vis-à-vis de ses clients ». Il a ajouté : « Notre examen est en cours. »


Yuval Abraham est journaliste et cinéaste basé à Jérusalem.

Traduction : JB pour l'Agence Média Palestine

Source : +972 Magazine

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Trump veut mettre fin à la liberté d’expression aux États-Unis

30 septembre, par Dan La Botz — , ,
Trump a lancé une offensive visant à mettre fin à la liberté d'expression aux États-Unis. La liberté d'expression n'est pas seulement protégée par la Constitution et par la (…)

Trump a lancé une offensive visant à mettre fin à la liberté d'expression aux États-Unis. La liberté d'expression n'est pas seulement protégée par la Constitution et par la loi, elle fait aussi partie de l'histoire et de la culture américaines.

Tiré de Inprecor
24 septembre 2025

Par Dan La Botz

Marche des femmes à New York, le 21 janvier 2017 © Narih Lee - Freedom of Speech

Trump ne censure pas littéralement les contenus : il utilise plutôt sa richesse personnelle et les pouvoirs de contrainte économique du gouvernement pour intimider les médias et les universités.

Contrôler la télévision

La semaine dernière, Trump et son administration ont provoqué le licenciement de Jimmy Kimmel, un humoriste connu pour ses critiques acerbes contre Trump. Kimmel avait plaisanté en suggérant que Tyler Robinson, l'assassin du podcasteur d'extrême droite Charlie Kirk, pourrait être « l'un des leurs », ce qui a indigné l'extrême droite. Brendan Carr, président de la Commission fédérale des communications (FCC), a aussitôt suggéré la suspension de Kimmel. La FCC n'a aucun pouvoir légal sur le contenu médiatique, mais Carr a laissé entendre que si la chaîne ne se conformait pas à cette exigence, le réseau et ses filiales pourraient perdre leur droit de diffusion. ABC, la chaîne de télévision américaine appartenant désormais au groupe Walt Disney, a donc licencié Kimmel, qui avait une audience d'environ 1,7 million de spectateurEs chaque soir.

En juillet, CBS, la Columbia Broadcasting Network, aujourd'hui détenue par Paramount Global, avait déjà annoncé le licenciement de Stephen Colbert. Suivi par trois millions de spectateurs, il est lui aussi un critique acerbe de Trump. Les deux chaînes, ABC et CBS, dépendent de l'approbation de la FCC pour mener à bien des opérations de plusieurs milliards de dollars (fusions et acquisitions), ce qui les rend particulièrement vulnérables aux pressions.

Attaquer la presse écrite

Trump s'en est aussi pris à la presse écrite. En juillet, il a porté plainte contre le Wall Street Journal, News Corporation et son propriétaire Rupert Murdoch pour avoir publié un article évoquant la carte d'anniversaire qu'il aurait signée pour le pédocriminel Jeffrey Epstein. Et en septembre 2025, Trump a poursuivi le New York Times pour diffamation, réclamant 15 milliards de dollars, l'accusant d'avoir nui à ses affaires avant l'élection de 2024.

Mettre la pression sur les universités

Trump a également mené campagne pour transformer le visage des universités américaines, qu'il accuse d'antisémitisme, de promouvoir les « idéologies » LGBT et trans, et de mener des politiques de diversité, d'équité et d'inclusion prétendument « racistes envers les blancs ». Il a affirmé que l'enseignement supérieur était de gauche, voire communiste. Il a coupé des centaines de millions de dollars de financements pour la recherche et a intenté des procès afin de contraindre certaines universités à changer leurs programmes et leurs personnels.

Trump suggère désormais que tout média audiovisuel le critiquant devrait perdre sa licence. Il faut continuer à défendre la liberté d'expression aux États-Unis d'Amérique.

Traduit pour L'Anticapitaliste du 25 septembre 2025

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Shawn Fain : « La solidarité ne s’arrête pas à la frontière »

30 septembre, par Shawn Fain — , ,
Comme beaucoup de familles dans ce pays, la mienne vient d'origines modestes. Nous étions des travailleurs et des travailleuses qui croyaient qu'en travaillant dur, on pouvait (…)

Comme beaucoup de familles dans ce pays, la mienne vient d'origines modestes. Nous étions des travailleurs et des travailleuses qui croyaient qu'en travaillant dur, on pouvait bâtir une vie meilleure. Mes grands-parents ont quitté le Sud pendant la Grande Dépression, à la recherche d'opportunités. Ils ont fini par s'installer dans l'Indiana, où ils ont trouvé des emplois syndiqués à l'UAW qui ont changé le cours de l'avenir de notre famille.

29 septembre 2025 | tiré de la lettre de Jacobin magazine

Ce même espoir — l'espoir d'une vie meilleure — est ce qui pousse des gens à se rendre aujourd'hui à nos frontières. La crise à la frontière est une crise humanitaire, causée par la cupidité des grandes entreprises. C'est une crise provoquée par des compagnies géantes qui traversent les frontières chaque jour à la recherche de bas salaires et de lois faibles, et par des politiciens qui accusent les immigrants tout en ignorant les véritables ravages laissés derrière par ces entreprises.

Quand nous voyons des familles déchirées par les déportations ou que nous entendons parler de travailleurs immigrants enlevés par des agents fédéraux ou maltraités sur leur lieu de travail, nous devrions tous être en colère. Pas seulement en tant que syndiqué·e·s, mais en tant qu'êtres humains. Ce ne sont pas des accidents. Ce système est construit pour diviser les travailleurs — par la race, par le pays, par le statut migratoire — afin que les riches continuent de s'enrichir pendant que le reste d'entre nous se bat pour les miettes.

À l'UAW, nous croyons que chaque travailleur mérite la dignité, la sécurité et le droit de s'organiser — peu importe d'où il vient ou comment il est arrivé ici. Nous croyons qu'aucun être humain n'est illégal. Et nous croyons que la solidarité ne s'arrête pas à la frontière. Nous devons mettre fin à cette course vers le bas, alimentée par les grandes entreprises, qui nous monte les uns contre les autres à travers les frontières, et nous devons réécrire les règles de l'économie mondiale afin que la classe travailleuse reçoive sa juste part partout.

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L’appel de Petro depuis Times Square : une armée de volontaires pour sauver Gaza !

30 septembre, par Isabel Cortés
Isabel Cortés, correspondante Au cœur de New York, le président colombien Gustavo Petro a pris un mégaphone, vendredi 26 septembre 2025, pour lancer un appel. Entouré par une (…)

Isabel Cortés, correspondante Au cœur de New York, le président colombien Gustavo Petro a pris un mégaphone, vendredi 26 septembre 2025, pour lancer un appel. Entouré par une marée de manifestant.es portant des keffiehs et des pancartes clamant « Liberté pour la Palestine », Petro ne s’est pas (…)

Des postiers et leurs alliés bloquent un entrepôt de Purolator

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Lundi matin, des dizaines de postiers et de militants ouvriers ont empêché des camions d'entrer dans un entrepôt de Purolator à Montréal. Les postiers, représentés par le STTP, ont entamé une grève jeudi dernier après que le gouvernement fédéral ait autorisé Postes Canada à réduire (…)

Gabon : une histoire de solidarité numérique

29 septembre, par Razvan Ngazouzet
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Razvan Ngazouzet, correspondant en stage Les résultats provisoires de l’élection législative de samedi 27 septembre donnent à l’Union démocratique des bâtisseurs (UDB), parti du président Brice Clotaire Oligui Nguema, une large majorité à l’Assemblée nationale face au Parti démocratique gabonais (…)

New York : Une gauche dispersée derrière la campagne de Mamdani – Michael Pelias

29 septembre, par Laila Abed Ali
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Laila Abed Ali, correspondante en stage Alors que le retrait du maire sortant, Eric Adams, annonce un front contre Zohran Mamdani à la mairie de New York, le contexte aux États-Unis jette une ombre sur la campagne fulgurante du socialiste. Nous avons rencontré Michael Pelias*, professeur à New (…)

Kaïs Saïed en guerre contre l’UGTT, un rempart de la démocratie tunisienne

29 septembre, par Claire Comeliau
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Claire Comeliau, correspondante en stage Début août 2025, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) a été la cible d’attaques frontales émanant des autorités, sous la gouvernance de Kaïs Saïed. Mais en face, un bloc dur résiste et descend dans les rues pour défendre ses droits, défiant ainsi (…)

La MMF 2025 : un front de résistance ici comme ailleurs

29 septembre, par Mégane Arseneau
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Mégane Arseneau, correspondante en stage « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. » — Simone de Beauvoir Alors que les crises politiques, économiques et sociales se multiplient, les droits des femmes (…)

Appel de textes Mouton Noir novembre-décembre 2025

29 septembre, par Marc Simard
APPEL DE TEXTES : Vol. XXXI, no 2 novembre-décembre 2025 Date de tombée : 15 octobre 2025 700 mots maximum Pour notre numéro de novembre-décembre, les élections municipales au (…)

APPEL DE TEXTES : Vol. XXXI, no 2 novembre-décembre 2025 Date de tombée : 15 octobre 2025 700 mots maximum Pour notre numéro de novembre-décembre, les élections municipales au Québec seront passées. Mais parlez-nous de vos attentes envers les gouvernements municipaux. Les enjeux, les (…)

Haïti : pour les classes laborieuses, le mépris et la répression

29 septembre, par Regroupement des Haitiens de Montreal contre l’Occupation d’Haiti REHMONCO
Renel Exentus et Frank W. Joseph pour le Regroupement des Haïtiens de Montréal contre l’Occupation d’Haïti (REHMONCO) Beaucoup d’organisations de la société civile ont critiqué (…)

Renel Exentus et Frank W. Joseph pour le Regroupement des Haïtiens de Montréal contre l’Occupation d’Haïti (REHMONCO) Beaucoup d’organisations de la société civile ont critiqué l’absence de volonté de l’État dans le rétablissement de la sécurité publique dans le pays. En effet, les exemples ne (…)

Les cols bleus et les travailleurs de la STM font front commun

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Depuis lundi, le personnel d'entretien de la Société de transport de Montréal est en grève. Au début du mois de septembre, les cols bleus de la ville ont voté en faveur de (…)

Depuis lundi, le personnel d'entretien de la Société de transport de Montréal est en grève. Au début du mois de septembre, les cols bleus de la ville ont voté en faveur de moyens de pression pour forcer la ville à négocier de bonne foi. L'Étoile du Nord a assisté à une manifestation qui a réuni (…)

Les collèges ontariens sous-financés font l’objet d’une grève historique

https://etoiledunord.media/wp-content/uploads/2025/09/Untitled-scaled-e1759010513448-1024x978.jpg27 septembre, par Southern Ontario Committee
Le 11 septembre, après 21 jours de négociations sans résultat, 23 000 travailleurs ont entamé une grève contre le Conseil des employeurs des collèges (CEC). Les travailleurs (…)

Le 11 septembre, après 21 jours de négociations sans résultat, 23 000 travailleurs ont entamé une grève contre le Conseil des employeurs des collèges (CEC). Les travailleurs sont des employés de soutien travaillant dans les 24 collèges de l'Ontario, en contact direct avec les étudiants et en (…)

Ford n’a pas d’autres chats à fouetter que les jeunes chômeurs

https://etoiledunord.media/wp-content/uploads/2025/09/ford.jpg27 septembre, par L'Étoile du Nord
L’article Ford n’a pas d’autres chats à fouetter que les jeunes chômeurs est apparu en premier sur L'Étoile du Nord.

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Lancement double le 14 octobre !

La parution du numéro 104 (et son dossier sur l'Acadie) et du numéro 105 (et son dossier sur l'internationalisme) seront soulignés à la librairie N'était-ce pas l'été (6702 (…)

La parution du numéro 104 (et son dossier sur l'Acadie) et du numéro 105 (et son dossier sur l'internationalisme) seront soulignés à la librairie N'était-ce pas l'été (6702 St-Laurent, Montréal).

Mardi 14 octobre à 18h30. Entrée libre, bienvenue à toutes et à tous !

Rouyn-Noranda vs. Glencore : « Ça concerne tout le monde »

Le 26 août 2023, 900 personnes se mettent en marche au centre-ville de Rouyn-Noranda. Il fait plein soleil, l'ambiance est à la fête, mais l'indignation demeure au rendez-vous, (…)

Le 26 août 2023, 900 personnes se mettent en marche au centre-ville de Rouyn-Noranda. Il fait plein soleil, l'ambiance est à la fête, mais l'indignation demeure au rendez-vous, comme en témoignent les slogans repris en chœur par la foule. Dans le dernier droit, avançant de pied ferme vers l'imposante silhouette de la Fonderie Horne, on scande sans relâche : « Nos vies, nos vies, valent plus que leurs profits ! »

Pour Jennifer Ricard-Turcotte, l'une des organisatrices de l'événement, c'est mission accomplie. La coalition de groupes militants à l'origine de la mobilisation a réussi à faire crier haut et fort par la population la rumeur qui circulait entre les branches et les microparticules d'arsenic depuis le printemps : « Y'en a pas, d'acceptabilité sociale. »

« C'est pas vrai qu'on va se taire »

Retour à l'automne 2022. En pleine campagne électorale, François Legault se présente à Rouyn-Noranda. Le climat social est tendu. Les mois précédents ont été fastes en révélations scandaleuses concernant les impacts des activités de la Fonderie Horne sur la santé des citoyennes et des citoyens. La population est inquiète et réclame des changements. En point de presse concernant les cibles de l'usine pour la réduction de ses émissions d'arsenic et de métaux lourds, le premier ministre déclare : « C'est pas à moi de prendre la décision, c'est à la population de Rouyn-Noranda ». Lesdites cibles prévoient une diminution des émissions d'arsenic de la Fonderie Horne pour atteindre une concentration maximale de 15 nanogrammes par mètre cube d'air d'ici 2028, soit cinq fois plus que la norme québécoise de 3 ng/m3, sans délai imposé pour atteindre cette norme, et avec des dépassements allant jusqu'à 22 fois la quantité permise dans les premières années. Ce plan, qui fait l'objet d'une consultation publique, est majoritairement rejeté par les personnes répondantes. Le message paraît clair : les objectifs sont insuffisants.

Pourtant, le 16 mars 2023, la nouvelle entente ministérielle annoncée entre le gouvernement du Québec et la Fonderie Horne reprend très exactement ces cibles, assorties de la création d'une zone tampon nécessitant la relocalisation d'environ 200 ménages et la mise à terre de 80 bâtiments dans le rayon le plus rapproché de la fonderie. Sur ce projet, la population n'a jamais eu son mot à dire. À ce jour, le processus de relocalisation et d'indemnisation demeure flou pour les personnes concernées, à qui on refuse une place à la table de négociations. Pourtant, les conséquences potentielles sur le tissu social et sur la précarité des citoyen·nes sont nombreuses. En pleine crise du logement, on s'apprête à relocaliser les gens d'un quartier riche d'histoire, de culture et d'entraide, mais aussi marqué par de nombreux problèmes sociaux. Au vu du prix des loyers actuels, ces derniers ne peuvent que se retrouver en HLM.

Johanne Alarie, une organisatrice locale, résume le contexte de mobilisation du 26 août : « La marche, c'était vraiment pour dire qu'on n'accepte pas l'autorisation ministérielle. C'est pas vrai qu'on va se taire pendant cinq ans, qu'on va arrêter de bouger. Y'a des choses qu'on veut qui restent, mais c'est insuffisant, ça va pas assez vite. Quinze nanogrammes, on a dit que c'était ok pour la première année, that's it, pas dans cinq ans. »

Une mobilisation pas comme les autres

Dès le mois de juillet, les organisateurices de la marche commencent à se rencontrer chaque semaine. Cinq comités et des dizaines de citoyen·nes prennent part aux préparatifs de la marche du 26 août et des activités qui l'entourent. S'ajoutent à cela des membres de collectifs citoyens engagés pour la justice environnementale venant de partout au Québec. Pour les personnes organisatrices interrogées, la présence de ces nouvelles voix a eu des effets très bénéfiques. Elle a permis de donner à la lutte une ampleur nationale, de revalider l'indignation des groupes locaux, de tisser des liens humains et de partager des expertises nouvelles : « Le non-respect des normes, ça concerne tout le Québec. Les gens sont venus en support à Rouyn-Noranda, mais aussi parce qu'ils se sentent concernés. On a pu sensibiliser de nouveaux porteurs de dossier ailleurs au Québec qui comprennent notre situation », exprime Johanne Alarie.

Cette mise en relation a été grandement facilitée par le Campement d'autodéfense populaire, qui a organisé une série d'activités dans les jours entourant la marche. Le comité a invité les gens à camper sur les lieux de la future zone tampon grâce à la complicité de propriétaires et de locataires qui ont prêté leur terrain. Visites guidées du quartier Notre-Dame, quiz post-ironique sur Glencore, repas communautaires et assemblées démocratiques ont donné l'occasion aux personnes réunies d'échanger sur de nouveaux moyens de résistance et d'action directe, qui se sont concrétisés de plusieurs façons pendant la fin de semaine. Si l'ambiance est demeurée plutôt bon enfant malgré le sérieux des discussions, Glencore n'entendait pas à rire. La multinationale avait engagé une agence de sécurité dont la présence s'est fait sentir toute la fin de semaine : « Tous nos mouvements étaient documentés », témoigne Samuel Touchette, membre du comité. Plusieurs personnes campeuses ont également témoigné d'actes d'intimidation de la part de personnes dont l'identité demeure inconnue, et qui leur ont fait subir les sons de klaxon et d'insultes tard dans la nuit. Comme le dit Johanne Alarie : « On s'attaque à un monstre ». Face à ce constat, le comité n'entend pas lâcher prise : « À un moment donné, ça suffit les actions qui sont symboliques qui en appellent à la bonne foi, on les a toutes faites. Maintenant, il faut avoir un effet concret sur la compagnie, se mettre devant la machine pour l'arrêter », déclare Frédérique Godefroid.

Et la suite ?

Le 27 août, le député caquiste Daniel Bernard publiait sur sa page Facebook une vidéo affirmant sa grande satisfaction par rapport à la gestion du dossier de la Fonderie Horne. Au conseil municipal suivant, la mairesse Diane Dallaire se montrait à son tour aveugle au mouvement social ayant pris forme dans les rues de sa ville et réitérait son accord avec l'autorisation ministérielle en ajoutant : « aucun nouvel élément ne justifie de changer notre position ». Venu·es dénoncer cette inaction décomplexée dans une séance du conseil qui s'est soldée par le retrait de la mairesse, au bord des larmes, le lundi 25 septembre, les citoyennes et les citoyens présent·es ont été dépeint·es dans les médias comme des « adversaires » et des « opposant·es ». Pour les militant·es interrogé·es, cette victimisation des élu·es doublée d'un confinement des groupes militants au rôle de bourreaux s'avère problématique. « C'est ça le défi, c'est de pas se faire camper dans le rôle des madames fâchées, qui sont jamais contentes, mais continuer d'escalader, d'augmenter les moyens de pression », dit Isabelle Fortin-Rondeau. « Ça m'a profondément heurtée de nous faire dire qu'on faisait une campagne de salissage envers la ville, je trouve que c'est d'un affront. On sait que le conseil municipal travaille super fort, mais ils travaillent fort à mettre en place toutes sortes de comités, de mécanismes pour qu'on s'adapte à quelque chose qu'on a refusé », ajoute Jennifer Ricard-Turcotte. Pourtant, c'est précisément l'attachement à leur communauté, la conviction de vivre dans un lieu de beauté et la volonté de le préserver qui motivent ces femmes à prendre la parole.

Le traitement médiatique de la dernière année a laissé croire à un clivage profond au sein de la population de Rouyn-Noranda. Pourtant, sur le terrain, même au-delà des cercles militants, même chez celles et ceux qui le disent à voix basse pour protéger leurs salaires, un consensus semble se répandre : la Fonderie doit prendre ses responsabilités. À mon sens, le véritable clivage s'opère plutôt entre la population générale et les institutions politiques prônant le statu quo et la tradition mercantile à laquelle la ville est soumise depuis sa naissance. Dans ce contexte d'apparence stagnante, la mobilisation du 26 août a tout de même insufflé de l'espoir. La lutte pour la qualité de l'air gagne en visibilité, entre autres grâce au mouvement national de Mères au front, qui en a fait son principal cheval de bataille. Pour les personnes organisatrices, les mois à venir devront être consacrés au maintien des liens et à un soutien mutuel des luttes à travers la province. « On a collectivement refusé cette autorisation-là, on n'y consent pas. Il en va de notre dignité collective de résister », dit Jennifer Ricard-Turcotte. Qu'il en soit ainsi.

Gabrielle I. Falardeau est citoyenne de Rouyn-Noranda et militante pour la justice climatique et sociale.

Photo : Williams Noury

Pour la défense de nos espaces verts

Depuis 2016, le collectif citoyen Mobilisation 6600 lutte contre la destruction d'un espace vert dans l'Est de Montréal par plusieurs projets de développement industriel. En (…)

Depuis 2016, le collectif citoyen Mobilisation 6600 lutte contre la destruction d'un espace vert dans l'Est de Montréal par plusieurs projets de développement industriel. En plus d'être menacé par les ambitions d'agrandissement du boulevard L'Assomption par le ministère des Transports du Québec, ce territoire boisé a été acheté par Ray-Mont Logistiques, une compagnie spécialisée en transbordement, qui souhaite y aménager un terminal de conteneurs. Dans un quartier affecté par les îlots de chaleur et par les effets néfastes de la circulation autour du port de Montréal, la destruction de cet espace est un exemple concret de la primauté de la logique capitaliste sur l'environnement et la santé des populations. En octobre 2023, le groupe a mobilisé la population locale ainsi que ses allié·es pour planter des arbres sur une partie de ce territoire à sauver. La journée fut un vif succès et la mobilisation se poursuit pour préserver cet espace vert, essentiel à la qualité de vie du quartier.

Photo : Valérie Beauchamp

Plan fédéral de décarbonation de l’économie : un échec annonce

Le plus récent plan de transition du gouvernement fédéral présenté lors du budget de mars 2023 illustre clairement la crise du modèle de développement dominant. La bêtise des (…)

Le plus récent plan de transition du gouvernement fédéral présenté lors du budget de mars 2023 illustre clairement la crise du modèle de développement dominant. La bêtise des mesures annoncées est le reflet d'une classe politique indifférente et incapable de sortir du néolibéralisme et du capitalisme fossile qui sont pourtant à l'origine de l'effondrement écologique de nos sociétés.

Dans les 20 dernières années, chaque nouvelle unité d'énergie renouvelable produite au Canada a été accompagnée par treize unités additionnelles d'énergies fossiles. Les 20 prochaines années s'annoncent comme une vaste répétition de cette catastrophe, la Régie de l'énergie du Canada estimant que la production de gaz naturel et de pétrole augmentera toutes deux de 20 % d'ici 2040. En dépit de ces faits, tant les décideurs publics que privés se réclament d'une transition énergétique, dont on annonce ad nauseam la mise en œuvre, même à l'occasion d'une approbation d'un énième projet d'infrastructure fossile qu'on présentera sans sourciller comme vert et durable.

Le néolibéralisme contre la transition

Le plan de transition énergétique annoncé par Ottawa est accompagné d'une enveloppe de 80 milliards $ sur 10 ans. Ce fonds sera essentiellement transformé en subventions publiques versées à des entreprises privées pour les inciter à investir dans des projets de transition énergétique. Outre la notion large de transition énergétique mise de l'avant dans ce plan – des projets d'exploitation de gaz naturel et d'énergie nucléaire pourront bénéficier de subventions –, cette approche trahit un État dépendant de capitaux privés pour mettre en œuvre les grands chantiers à accomplir.

Dans les années 1970, le taux d'imposition fédéral statutaire des entreprises avoisinait 40 %, alors qu'il n'est plus que de 15 % aujourd'hui. Que s'est-il passé ? L'évitement fiscal par les multinationales est devenu une pratique endémique, ce à quoi les gouvernements ont répondu en abaissant le taux d'imposition des entreprises pour « compétitionner » avec les paradis fiscaux. Une course fiscale vers le bas s'est jouée à travers la planète, avec pour conséquence que la moyenne mondiale des taux d'imposition des entreprises est passée de 49 % à 24 % entre 1985 et 2018.

Après des décennies de pertes fiscales additionnées à travers le monde, un budget fédéral canadien typique des budgets des pays de l'OCDE peut candidement affirmer en 2023 : « Des milliers de milliards de dollars en capital privé attendent d'être dépensés en vue de bâtir l'économie propre mondiale ». Le retournement discursif ne surprend pas, mais est tout de même saisissant. Plutôt qu'une catastrophe issue d'une déréglementation fiscale historique, on présente ces sommes comme une opportunité d'affaires pour une société dont l'économie sale sera magiquement lavée par des capitaux privés. Évidemment, sous cette rhétorique, l'option d'enfin imposer comme il se doit ces « milliers de milliards de dollars » est évacuée de facto.

Face à de graves crises que traversent les sociétés actuelles (comme le péril écologique), les pertes fiscales cumulées se révèlent particulièrement préjudiciables, l'État ne disposant plus que de deux options pour surmonter la crise : s'endetter massivement auprès d'institutions financières qu'ils n'imposent presque plus et affronter les discours de la droite économique condamnant les déficits publics, ou prévoir un bouquet de subventions stimulant l'investissement de capitaux privés pour compenser l'insuffisance des capitaux publics. Le plus récent plan de transition du gouvernement fédéral favorise principalement la seconde approche, dont le désavantage majeur est celui de devoir apparaître rentable aux yeux du privé, alors que l'exigence de profits est précisément ce qui a contribué à l'abîme écologique dans lequel nous nous trouvons.

Toute analyse sérieuse à propos de l'économie politique de la transition écologique parvient à la conclusion que la transition à accomplir ne sera pas rentable d'un point de vue financier. Au contraire, elle impliquera la dévalorisation massive de capitaux et d'infrastructures, appelés à devenir des actifs dits « irrécupérables » ou « échoués ». Une grande partie des infrastructures fossiles, par exemple, devront être fermées avant leur terme initialement prévu. Les théories économiques de la transition énergétique qualifient ces actifs d'« irrécupérables », puisque n'ayant plus aucune utilité dans un monde postfossile. On estime à cet égard que le Canada est le 5e pays du monde sujet aux plus importantes pertes de capitaux découlant de la transition énergétique, derrière le Royaume-Uni, la Chine, la Russie et les États-Unis. Or, c'est précisément à cette dévalorisation annoncée à laquelle les grandes entreprises détentrices d'actifs fossiles résistent.

Malheureusement, leur lobbyisme et leur intrusion dans la sphère politique portent fruit. En témoigne le plan de transition fédéral, dont le quart des 80 milliards de dollars est destiné à financer des projets de capture et stockage de carbone installés sur les lieux d'extraction et de raffinage des énergies fossiles. Alors que les mérites de ces technologies sont largement surestimés (en 2022, elles sont parvenues à dévier de l'atmosphère plus ou moins 0,1 % des GES mondiaux), elles auront pour effet de prolonger la durée de vie des infrastructures fossiles canadiennes et repousser leur dévalorisation inéluctable.

La planification démocratique et écologique de l'économie

L'histoire du capitalisme est une histoire de dépossession, et la mouture actuelle de la transition écologique à la sauce néolibérale se présente comme un nouveau chapitre de cette histoire. Par exemple, la ruée du secteur privé subventionné vers les minéraux critiques et stratégiques, qui vise à électrifier un système de production et de consommation infernal, signifie plus d'appropriations de terres habitées par les populations rurales et autochtones du monde, plus de destruction d'écosystèmes et d'habitats, et ce, pour un résultat pas plus durable étant donné la rareté des ressources minières du monde et le caractère hautement destructeur et polluant de leur extraction.

À l'encontre de cette trajectoire mise de l'avant par les élites extractivistes et financières, soutenues par les pouvoirs publics, les mouvements social et écologiste débattent tous des moyens et des institutions en mesure d'accomplir une autolimitation des sociétés. Différents modèles, comme la décroissance, l'écosocialisme, l'écoanarchisme, le communalisme, la biorégion, etc., sont mis de l'avant pour tenter d'articuler les enjeux de justice sociale aux impératifs de viabilité écologique. Ces contre-modèles au capitalisme et à l'impérialisme portent tous à divers degrés une forme ou une autre de planification de l'économie, où les leviers économiques à l'origine des grands secteurs de production et de consommation de nos sociétés deviendraient l'objet d'une délibération démocratique ayant pour visée première le bien commun viable plutôt que le profit privé.

À l'heure actuelle, la seule planification de l'économie qui prévaut en est une antidémocratique, où tous et toutes sont placé·es devant le fait accompli de systèmes de production et de consommation issus d'une lutte permanente que se livrent de grands oligopoles déréglementés pour plus de gains. En découlent des logiques banalisées d'obsolescence, le triomphe de l'usage unique, des marchandises toujours plus complexes, mais néanmoins inutiles, une mondialisation superflue des chaînes de production, bref, un vaste gaspillage à l'origine de plusieurs des maux écologiques contemporains, sans parler de l'exploitation inique de travailleurs et travailleuses réduit·es à des ressources humaines interchangeables.

En somme, le plan fédéral de transition énergétique et de décarbonation, qui propose ni plus ni moins qu'une privatisation de la transition, s'inscrit en parfaite continuité avec la logique néolibérale dominante. On ne peut toutefois reprocher au budget de manquer de transparence idéologique lorsqu'on lit certains passages de ses 290 pages, dont celui-ci : « pour exploiter pleinement le potentiel du pays en minéraux critiques, le gouvernement fédéral doit veiller à mettre en place un cadre qui accélérera l'investissement privé ». En laissant les rênes de l'économie entre les mains des forces du marché et de ses grandes entreprises, les politiques publiques fédérales vont contribuer à un échec écologique prévisible, que le vernis vert tout à fait craqué du gouvernement Trudeau et de ses successeurs pourra de moins en moins camoufler.

Colin Pratte est chercheur à l'Institut de recherches et d'informations socio-économiques.

Photo : Jim Choate (CC BY-NC 2.0)

Bruno Marchand et le piège de l’extrême centre

Bruno Marchand a créé la surprise en devenant maire de Québec le 7 novembre 2021. Se présentant comme centriste lors de la campagne électorale, il séduit une partie de (…)

Bruno Marchand a créé la surprise en devenant maire de Québec le 7 novembre 2021. Se présentant comme centriste lors de la campagne électorale, il séduit une partie de l'électorat progressiste par sa personnalité. Or, depuis qu'il est au pouvoir, ce dernier essuie de vives critiques sur son aile gauche.

La victoire de Bruno Marchand est en partie due au contexte lui ayant permis de récupérer l'électorat progressiste des quartiers centraux, apeuré par l'idée qu'une division du vote puisse porter la droite populiste de Jean-François Gosselin et Québec 21 au pouvoir. Si Marchand a su rallier ces votes pour ravir la mairie in extremis, c'est en raison de ses qualités indéniables de communicateur.

En effet, dès les premières semaines suivant son élection, il se construit une image attractive avec sa verve et ses fameux souliers de course. À l'extérieur des frontières de sa municipalité, on le considère comme un maire actif, issu d'une nouvelle génération d'acteur·trices municipaux·ales. Cependant, la première moitié de son mandat nous aura rappelé qu'au-delà de l'image, Bruno Marchand est un maire sans expérience politique qui joue souvent ses cartes de façon malhabile.

L'inexpérience n'est pas réprimandable en soi, mais elle pèse lourd lorsqu'on manie avec plus d'aisance l'art oratoire que l'art de faire cheminer un dossier et qu'on maîtrise davantage le discours que les sujets dont on se fait le porteur. Les incohérences qui en résultent sur le terrain et l'absence de gestes concrets pour appuyer les valeurs qu'on expose irritent les acteur·trices concerné·es dont les attentes sont déçues.

L'extrême centre

Le maire Marchand est entré en poste en promettant, comme d'autres avant lui, de faire la politique autrement. Grandement influencé par le discours classique de l'extrême centre accédant au pouvoir, il se présente comme un homme d'action qui n'aime pas les joutes partisanes ni les idéologies et qui préfère le consensus. Minoritaire en début de mandat, il joue la carte de la collaboration avec des partis d'opposition disloqués ou affaiblis par la perte de leurs leaders. Il promet de faire avancer les dossiers par la coopération et une complicité qu'il saura faire émaner entre tous les acteur·trices de la scène municipale. Sans surprise, la lune de miel annoncée au conseil municipal ne verra jamais vraiment le jour.

Rapidement, les écologistes se retrouvent confronté·es à l'une des conséquences agaçantes de cette volonté des centristes de jouer la modération et se placer entre deux camps, c'est-à-dire l'incapacité de trancher ou de dire les choses telles qu'elles sont. Pour froisser le moins de gens possible, mieux vaut se taire que de prendre des positions fermes dans des dossiers chauds. Cette stratégie relève soit d'un cynisme malhonnête, soit d'un aveu que les dossiers ne sont pas encore maîtrisés.

Par exemple, l'incapacité du maire à se prononcer à propos du troisième lien, malgré la clarté de la littérature scientifique sur les effets néfastes sur l'environnement et les milieux de vie d'un tel projet d'infrastructure, en a déçu plus d'un. Dans un même ordre d'idées, nous l'avons entendu parler des deux côtés de la bouche en faisant la promotion du tramway, des pistes cyclables et du verdissement tout en se défendant de vouloir diminuer l'espace réservé à l'automobile.

Avec le dossier de la qualité de l'air, on constate que la rhétorique de l'inclusion de tous les partenaires dans l'élaboration de solutions le mène surtout à établir des relations fort questionnables. Sa proximité affichée avec le PDG du Port de Québec a de quoi faire sourciller les militant·es qui sont confronté·es à ce personnage depuis plus d'une décennie. Entendre Bruno Marchand, un maire soi-disant environnementaliste, faire des points de presse au côté de ce PDG pour discuter de qualité de l'air sur un ton bon enfant laisse évidemment perplexe. Le Port nous a habitué·es au déploiement de tout un arsenal de stratégies pour se défaire de ses responsabilités dans la pollution de notre air et défendre les intérêts des grandes compagnies minières.

L'inaction

Cette difficulté à trancher, à être cohérent et à mettre son poing sur la table lorsque nécessaire et cette confiance amicale presque naïve qu'il accorde à des acteur·trices dont le travail est de défendre des intérêts privés s'opposant à ceux de la population sont les mêmes attitudes qui ont probablement nui à sa capacité de livrer du concret. En effet, sans devenir un·e potentat·e, un·e maire·esse qui a promis de faire bouger les choses a le devoir de s'imposer au sein de sa fonction municipale, sans avoir peur de froisser certains égos. Lorsqu'on a l'ambition de changer les choses et qu'on demande à la population de nous en accorder la légitimité, il faut avoir confiance en nos idées et maîtriser suffisamment nos sujets afin d'établir des lignes politiques claires et bien comprises, qui percolent à l'interne. Sans quoi, les citoyen·nes se retrouvent témoins d'une véritable dichotomie entre ce qui sort de la bouche de l'élu·e et ce que la Ville fait, ou ne fait pas, sur le terrain.

Les premiers mois du mandat de Bruno Marchand ont donc laissé l'impression d'un maire qui n'était pas prêt à exercer ses responsabilités. Au-delà des slogans, nous n'avions pas affaire à un programme mûrement réfléchi par des militant·es de longue date sur les enjeux de l'écologie et de la justice sociale. Nous avions devant nous un maire ayant de la difficulté à s'imposer comme leader, maîtrisant mal les dossiers majeurs et ayant une propension à faire confiance à des acteur·trices beaucoup plus expérimenté·es, déjà confortablement installé·es dans les rouages d'un système qu'on doit travailler à déconstruire pour qu'une véritable transition écologique et sociale se mette en branle. Son penchant naturel pour la politique de l'extrême centre l'a finalement mené à trop de mollesse et d'incohérence, et à l'image d'un politicien qui parle beaucoup et qui agit peu.

L'électrochoc

Décevant dans le dossier du tramway et du transport actif et collectif, du logement et de l'itinérance, du droit de manifester ou de la protection des milieux naturels… Le ton de l'opposition a monté. Nous l'avons attaqué sur sa gauche aux côtés des acteurs du communautaire, des groupes environnementalistes et des collectifs de défense des droits. Le maire a démontré qu'une fois échaudé, sa réplique pouvait le faire mal paraître et le placer devant ses contradictions. Il était alors atteint dans ce qu'il a de plus précieux et ce qui lui a permis d'accéder au pouvoir : son image.

Cette offensive menée par plus progressistes que lui a porté ses fruits. À l'aube du mi-mandat, des initiatives sur la mobilité active se concrétisent, une vision sur l'itinérance s'élabore et des politiques sur le logement et un plan d'action sur la qualité de l'air viennent tout juste d'être déposés. Nous sommes loin de la coupe aux lèvres, mais il y a là des bases qui sont enfin posées et sur lesquelles la gauche pourra construire afin de voir émerger la ville qu'elle imagine.

Avec cette deuxième moitié de mandat qui commence, est-ce que le maire Marchand réussira à nouveau à rallier suffisamment de progressistes sans s'aliéner son électorat de centre droit ? Pour notre part, nous ne souffrons pas de ce dilemme des partis qui visent le centre et qui se retrouvent pris entre l'arbre et l'écorce. Notre projet repose sur un programme cohérent et sans ambiguïté, fondé sur l'expérience militante et une bonne connaissance des enjeux actuels. Avec une seule élue, nous faisons des gains. Nos idées, d'abord balayées du revers de la main, finissent par ressurgir dans les initiatives de la Ville et des concepts tels que l'écofiscalité, que nous étions seul·es à promouvoir, sont maintenant défendues par nos collègues.

À tous les partis municipalistes et écologistes qui émergent aux quatre coins du territoire, ne vous laissez pas décourager par la puissance apparente de vos adversaires et de la position précaire que vous semblez occuper sur l'échiquier politique. Ce sont d'abord nos gains politiques qui comptent, pas le pouvoir en soi. Et en misant sur nos forces, ces gains finissent par arriver.

Jackie Smith est cheffe de Transition Québec et conseillère municipale de Limoilou.

Illustration : Elisabeth Doyon

Élues à l’Assemblée nationale : quelle égalité politique ?

Les femmes représentent actuellement 46 % de la députation à l'Assemblée nationale du Québec. On pourrait s'en réjouir et penser que l'égalité dans la représentation est (…)

Les femmes représentent actuellement 46 % de la députation à l'Assemblée nationale du Québec. On pourrait s'en réjouir et penser que l'égalité dans la représentation est atteinte. Cependant, dans ce domaine comme dans d'autres, les chiffres sont trompeurs et font état d'une égalité de façade construite sur des sables mouvants.

En effet, d'une élection à l'autre, le nombre de femmes connaît des mouvements contradictoires : il baisse de 2003 à 2007 et encore une fois en 2014 ; nous ne sommes donc pas à l'abri des reculs. De plus, le nombre de femmes ne dit rien sur leur influence politique : qui détient les postes de pouvoir dans le cabinet ? Quelle part du budget de l'État revient à des ministères dirigés par des femmes ?

La volonté des partis politiques

En l'absence de législation contraignante ou même incitative, les partis politiques doivent eux-mêmes se doter de règles internes, car c'est principalement par le biais d'un parti politique que les femmes (et les hommes) parviennent à se faire élire. En ce domaine, on peut dire que pour les partis politiques, on assiste plus à des vœux pieux qu'à des règles contraignantes. Avec des résultats parfois surprenants. Le seul parti qui prône l'égalité dans les candidatures, Québec solidaire, n'a que le tiers de femmes dans sa députation, le PQ n'en compte aucune, alors que la CAQ en compte 64 % et le PLQ 58 %.

Si l'on prend en considération les dernières élections générales au Québec, le nombre de femmes candidates a été très élevé. La CAQ, dont les investitures dans les circonscriptions dépendent du chef, a choisi de présenter un grand nombre de femmes et plusieurs ont été élues, le parti ayant raflé un nombre considérable de sièges. Dans les autres partis, ce sont plutôt les militant·es dans les circonscriptions (au PLQ, il peut y avoir parachutage) qui choisissent les candidatures. Au PQ, on a préféré miser sur les députés sortants et sur le nouveau chef, ce qui donne le résultat que l'on sait. Dans les partielles qui ont suivi l'élection générale, QS a choisi de présenter deux hommes, malgré le déséquilibre sexué dans sa députation.

En fait, les partis politiques disposent d'outils pour déterminer les circonscriptions gagnables. Ils ne sont pas infaillibles, mais donnent une bonne indication. Longtemps, la tendance dominante a été de confiner les candidates aux circonscriptions perdues d'avance ou à celles où uniquement des femmes se présentaient. Ce n'est manifestement plus le cas. Mais viser l'égalité numérique dans la députation implique à la fois de déterminer les circonscriptions gagnables et de s'assurer que les femmes y sont présentées à égalité, ce qui ne dépend pas de la direction des partis (sauf à la CAQ), mais des associations de circonscriptions. D'où l'extrême volatilité des résultats.

Force est de constater que si, sur le plan des principes, les partis politiques semblent beaucoup moins frileux à présenter des candidates susceptibles de remporter leur circonscription, il n'en va pas de même en ce qui concerne les directions de parti : les deux seules femmes ayant été cheffes d'un parti politique représenté à l'Assemblée nationale ont été victimes d'une forte contestation de leur leadership, qu'il s'agisse de Dominique Anglade au PLQ ou de Pauline Marois au PQ. À Québec solidaire, lors de la dernière campagne électorale, le porte-parole masculin a été nettement plus mis en évidence que la porte-parole féminine. Quant à la CAQ, son chef fait preuve d'une condescendance paternaliste digne d'une époque préféministe.

Le mode de scrutin

Le mode de scrutin joue également un rôle dans le pourcentage de femmes élues. Avec le mode de scrutin uninominal à un tour, ce n'est pas vraiment une élection générale qui se joue, mais 125 élections partielles. Si ce mode de scrutin est relativement fonctionnel dans une situation de bipartisme, ce n'est pas du tout le cas lorsqu'il y a plusieurs partis en lice. On l'a vu lors des dernières élections où un parti a obtenu plus de 70 % des sièges tout en ne récoltant que 40 % du vote.

Les scrutins proportionnels permettent aux appareils des partis d'intervenir directement sur la composition genrée des candidatures puisqu'ils font appel à des listes nationales ou régionales. Cependant, ce n'est que sur les listes qu'ils peuvent établir un principe d'égalité de genre dans les candidatures et non sur l'ensemble des candidatures. Dans un tel contexte, il serait possible d'envisager les listes de candidatures comme un correctif et permettre de suppléer aux inégalités dans la députation par comté en présentant par exemple plus de candidatures féminines en position éligible sur les listes soumises à la proportionnelle.

Mais il est évident que la réforme du mode de scrutin dans un sens plus proportionnel n'est pas pour demain, tous les partis ayant été au gouvernement au cours des 30 dernières années nous ayant habitué·es à des volte-face sur cette question une fois qu'ils sont parvenus au pouvoir en profitant des distorsions inhérentes au mode de scrutin actuel, surtout en contexte multipartiste.

L'égalité numérique est-elle suffisante ?

La question de l'égalité entre les hommes et les femmes semble être passée dans les mœurs lors de la présentation des équipes ministérielles tant à Québec qu'à Ottawa, du moins lors de la formation du premier cabinet d'une législature. C'est beaucoup moins évident lorsqu'il y a des remaniements ministériels.

Si à Ottawa on peut noter que certaines femmes jouissent d'une grande influence avec Chrystia Freeland aux Finances, Mélanie Joly aux Affaires étrangères ou Anita Anand à la Défense, la situation semble être sensiblement différente à Québec. L'économie, les finances, la santé, l'éducation, ces ministères sont tous dirigés par des hommes et accaparent une grande part du budget du Québec. Mais là encore, la situation est fragile et dépend en grande partie de la volonté politique des premiers ministres, ce qui ne garantit aucune pérennité dans le temps ou en cas de changement de parti ou même de chef de parti au pouvoir.

Cela montre que la parité est loin d'être atteinte ou même souhaitée dans les cercles gouvernementaux. Cela montre aussi que les chiffres peuvent s'avérer trompeurs et que l'on doit se préoccuper autant de la quantité que de la qualité.

Des solutions ?

Au cours des multiples débats concernant la réforme du mode de scrutin, de nombreuses pistes de solution ont été esquissées par les féministes. Celles-ci tournent autour de l'obligation de résultat faite aux partis : il s'agit moins de déterminer uniquement l'égalité dans la présentation de candidatures que de récompenser ou de sanctionner les partis qui se trouvent ou non dans la zone paritaire en ce qui concerne le nombre de personnes élues. Une telle obligation pourrait tout à fait être inscrite dans la loi électorale et assortie soit de récompenses, soit de sanctions en ce qui concerne le financement public des partis politiques. Elle aurait pour effet d'encourager les partis politiques à pérenniser des habitus égalitaires.

Mais il faudrait aller plus loin si l'on veut atteindre l'égalité de genre en politique. Le harcèlement sexiste ou hétérosexiste envers les élu·es devrait être passible de sanctions, qu'il émane de collègues ou d'électeurs ou électrices. C'est un motif évoqué par plusieurs femmes pour expliquer qu'elles quittent la politique. Il serait également possible d'intervenir législativement pour garantir une zone paritaire dans la gestion du budget de l'État.

Surtout, il faudrait que « l'égalité entre les femmes et les hommes » ne soit pas un principe creux que l'on brandit lorsqu'on veut se faire du capital politique et devienne une préoccupation réelle de tous les instants tant en ce qui concerne les postes de responsabilités que les rémunérations. Pour l'instant, nous sommes loin du compte.

Photo : Monument en hommage aux femmes en politique par Jules Lasalle en face de l'Assemblée nationale (Crédit : Paul VanDerWerf, CC BY 2.0)

Mark Carney, le Premier ministre canadien, et Donald Trump, l'ancien président des États-Unis, posent ensemble dans le Bureau ovale, tous deux souriants et levant le pouce en signe d'approbation.

Pourquoi le Canada abdique devant Trump

27 septembre, par Archives Révolutionnaires
Archives Révolutionnaires ouvre un dossier spécial sur l’impérialisme ! Face aux nouvelles tensions avec les États-Unis, les libéraux fédéraux ont fait la promesse du (…)

Archives Révolutionnaires ouvre un dossier spécial sur l’impérialisme !

Face aux nouvelles tensions avec les États-Unis, les libéraux fédéraux ont fait la promesse du patriotisme et de l’union sacrée de la grande nation canadienne. Dociles, les médias traditionnels se font la courroie de transmission du discours des élites et éludent les critiques dans ce moment trouble. Considérant le manque criant d’analyses sérieuses sur la nouvelle dynamique impériale et le rôle que le Canada sera amené à y jouer, notre comité éditorial espère contribuer à développer un espace de débats et de réflexions pour la gauche canadienne et québécoise. Dans ce dossier spécial sur l’impérialisme, les analyses et propositions stratégiques n’engagent que leurs auteurs et autrices ; Archives Révolutionnaires les présente principalement dans l’objectif de susciter une discussion publique et critique.

Biographie de l’auteur : Owen Schalk est l’auteur de Targeting Libya (Lorimer Books, 2025), une enquête sur le rôle déterminant – quoique peu connu – du Canada dans l’histoire de la Libye, entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et la destruction du pays par l’OTAN en 2011.

Mark Carney, le Premier ministre canadien, et Donald Trump, l'ancien président des États-Unis, posent ensemble dans le Bureau ovale, tous deux souriants et levant le pouce en signe d'approbation.

Par Owen Schalk (traduction de l’anglais par Archives Révolutionnaires)

Le premier ministre canadien Mark Carney n’a pas tenu tête au président des États-Unis Donald Trump. En fait, il n’en a jamais eu l’intention. Pour être élu en avril 2025, Carney a surfé sur la montée d’une vague de nationalisme canadien, mais ses cinq mois comme premier ministre ont apporté bien peu, si ce n’est une capitulation face à Trump, en plus d’une croissante intégration du Canada à la machine de guerre américaine. La plupart des Canadiens détestent l’administration Trump – rappelons-nous des huées du public au moment de l’hymne national américain pendant les matchs de la LNH et du mouvement « Achetez canadien » – mais, pour Carney (et l’opposition conservatrice), Washington continue de dicter l’agenda. Et ce, bien que la multipolarisation croissante du monde offre au Canada plusieurs occasions de diversifier ses relations commerciales – si seulement la classe dirigeante canadienne voulait en tirer parti. Ce qui soulève la question suivante : pourquoi le Canada refuse-t-il de diversifier ses relations face aux menaces de Trump ? Et que signifie le fait que la classe dirigeante canadienne ait choisi le réarmement impérialiste commandé par les États-Unis plutôt que le non-alignement et la paix internationale ?

Atlantisme et compétition entre grandes puissances

La Guerre froide est terminée, mais la classe dirigeante canadienne se voit encore comme partie intégrante d’un projet économique et militaire de coopération avec les États-Unis et l’Europe occidentale. Cette alliance est soudée par l’OTAN, une coalition militaire dominée par Washington. L’OTAN n’a jamais été une alliance défensive. En fait, sa création en 1949 s’inscrivait dans le cadre d’une stratégie complexe du gouvernement américain et de ses alliés visant à relancer le capitalisme américain et les conditions de l’accumulation en Europe occidentale. Cet effort comprenait un volet économique (à travers le plan Marshall) et culturel (à travers le Congrès pour la liberté culturelle et d’autres organisations similaires). Pendant la Guerre froide, le théâtre d’opérations de l’OTAN était essentiellement limité à l’Europe. Une fois le conflit terminé, l’OTAN a évolué, passant d’une force de sécurité cherchant à consolider le capital d’Europe occidentale à une alliance impérialiste effrontée qui mène la guerre partout où ses membres, dont le plus important est Washington, considèrent que le capitalisme mondial a besoin d’être renforcé, comme en ex-Yougoslavie, en Afghanistan, en Libye ou en Ukraine.

Alors que les guerres de l’OTAN pré-ukrainiennes étaient largement motivées par la volonté de mondialiser le capitalisme dans des régions n’ayant pas encore été conquises par l’alliance occidentale, la montée de la rivalité entre les grandes puissances, d’un côté les États-Unis et leurs alliés, de l’autre la Russie et la Chine, a progressivement changé la donne. L’OTAN post-Guerre froide s’est adaptée, délaissant les petits pays qui n’étaient pas suffisamment intégrés (ou soumis) à l’ordre impérial américain pour se concentrer sur des conflits destinés à nuire aux grandes puissances concurrentes de Washington. À chaque étape du développement de l’OTAN, Ottawa s’est empressé de s’aligner sur les objectifs impérialistes américains. Avec la montée en puissance de la Russie et de la Chine, l’un des principes fondamentaux de l’alliance atlantiste est l’augmentation massive des dépenses militaires, avec dorénavant une cible de 5 % du PIB réclamée par Trump. C’est peut-être le domaine le plus important dans lequel Mark Carney a renoncé à ses promesses de campagne et s’est plié aux exigences de Trump.

Une analyse marxiste – fondée sur le matérialisme historique et dialectique – notera que Trump et Carney ne sont pas les véritables décideurs. Ils ne sont que les représentants des relations matérielles sous-jacentes entre les classes dirigeantes, c’est-à-dire capitalistes, de leur pays respectif. Ces classes capitalistes nationales considèrent l’essor de la Russie et de la Chine, et plus largement l’émergence des BRICS, comme une menace pour les processus impérialistes qui leur permettent d’exploiter la main-d’œuvre bon marché et les matières premières des pays du Sud. De l’Amérique latine aux Caraïbes en passant par l’Afrique, l’industrie minière canadienne s’étend sur tous les continents et représente 60 % des sociétés minières mondiales. Ce secteur extractif représente peut-être la manifestation la plus frappante de la manière dont le Canada tire profit de l’ordre mondial inéquitable que les BRICS cherchent à remettre en cause.

Loin de reconnaître ce changement de paradigme géopolitique et de l’utiliser à son avantage, la classe dirigeante canadienne continue d’identifier ses intérêts à ceux de Washington et de l’alliance atlantique. En d’autres termes, les capitalistes canadiens et leurs représentants politiques veulent rester dans les bonnes grâces de Trump, car ils tirent profit de l’ordre mondial que Trump et l’OTAN cherchent à sécuriser. Il en résulte que c’est l’apaisement, et non la confrontation, qui est devenu l’approche de facto d’Ottawa à l’égard de l’administration Trump. Ce sont la Russie et la Chine, et non les États-Unis, qui continuent de susciter la colère diplomatique et l’attention militaire d’Ottawa. Cela contredit les promesses de Carney à l’électorat canadien, révélant à quel point les opinions et les intérêts de la classe dirigeante canadienne divergent de ceux de la majorité de la population. Cette rupture entre dirigeants et dirigés souligne l’importance, pour l’État canadien, de la propagande médiatique visant à réorienter la colère des Canadiens vers la Russie et la Chine, pays que la classe dirigeante considère comme la véritable menace pour ses intérêts, compte tenu de l’identification inébranlable de la bourgeoisie du Canada avec l’alliance atlantique et le capitalisme mondial dirigé par les États-Unis.

Les coudes en l’air ?

Depuis janvier 2025, l’administration Trump menace le Canada de sabotage économique et d’annexion. Peu après sa seconde entrée en fonction, Trump a imposé des droits de douane dits « de rétorsion » au Canada, à savoir des droits de douane de 25 % sur les produits canadiens et de 10 % sur les ressources énergétiques et minérales canadiennes. Le Canada a réagi en imposant des droits de douane de 25 % sur une gamme de produits américains et, depuis, les deux pays se livrent une guerre commerciale accompagnée de déclarations incendiaires du président américain qui décrit ses plans d’annexion du Canada par la « force économique »[1].

Cette agressivité des États-Unis envers leur voisin du Nord a rapidement alimenté le ressentiment populaire, remodelant de manière spectaculaire le discours politique canadien à l’orée des élections d’avril 2025. Les Canadiens en sont venus à considérer les États-Unis comme une menace bien plus grande pour leur pays que la Russie ou la Chine, les deux bêtes noires perpétuelles de la classe politique et des commentateurs canadiens[2].  Le Parti libéral, qui avait vu sa cote de popularité s’effondrer après une décennie au pouvoir, a bénéficié d’un regain de popularité à la suite des agressions verbales de Trump. Le leader conservateur, Pierre Poilievre, dont la rhétorique du « Canada d’abord » et les politiques réactionnaires l’avaient rapproché de Trump aux yeux des électeurs, n’a pas réussi à prendre le pouvoir, en dépit des sondages prédisant une victoire écrasante. Le Parti libéral, sous la direction de Mark Carney, a évité la déconfiture, en obtenant un gouvernement minoritaire.

Carney a promis de « lever les coudes » (elbows up) face à l’administration Trump, une expression issue du monde du hockey qui réfère à une manière efficace de se protéger de l’équipe adverse. Le premier ministre a affirmé que le processus « d’intégration profonde » entre les armées américaine et canadienne était terminé : « Nous sommes désormais dans une position où nous coopérerons lorsque cela est nécessaire, a-t-il déclaré, mais nous ne coopérerons pas nécessairement.[3] » Pourtant, le Canada est-il vraiment en train de réduire son intégration avec les États-Unis, ou la classe dirigeante canadienne tente-t-elle simplement d’apaiser l’opinion publique pendant qu’elle renégocie les termes de son adhésion à l’alliance atlantique ?

La fausse promesse de la diversification

Actuellement, plusieurs pays du Sud, réunis au sein du bloc économique des BRICS, cherchent à se prémunir des fluctuations d’un ordre mondial de plus en plus sclérosé et irrationnel, dominé par les États-Unis. Cela s’est traduit par une coopération Sud-Sud accrue, notamment dans le domaine des technologies vertes où la Chine excelle, et par la mise en place d’alternatives aux réseaux financiers contrôlés par les États-Unis, comme le système SWIFT, ce qui permet aux États participants de réduire leur exposition aux sanctions unilatérales, devenues ces dernières années un outil central du pouvoir économique américain. Au total, les 10 membres et 10 pays partenaires du BRICS représentent 56 % de la population internationale et 44 % du PIB mondial[4]. Ils constituent la majorité de la population du globe et pourraient bientôt devenir majoritaires en termes de production économique. Au même moment, 95 % des exportations canadiennes sont destinées aux États-Unis, alors que le marché américain ne représente que 5 % des consommateurs mondiaux. Si le gouvernement canadien souhaitait diversifier son économie afin de se prémunir contre l’ingérence américaine, l’option la plus sensée aurait été de se tourner vers le marché majoritaire incarné par le bloc des BRICS.

Compte tenu du manque de fiabilité, de la volatilité et de la stagnation croissante du capitalisme américain, le Canada pourrait théoriquement se protéger des vicissitudes de son voisin en intensifiant ses échanges commerciaux avec les pays du BRICS en général et la Chine en particulier. Sur le plan militaire, le Canada pourrait affirmer sa souveraineté en se détachant du complexe militaro-industriel américain et en mettant fin à ses engagements de plus en plus coûteux envers l’OTAN qui, sous Carney, pourraient désormais 5 % du PIB canadien, soit 150 milliards de dollars par an. Dans l’ensemble, le non alignement en matière de politique étrangère et un virage économique vers la majorité mondiale apporteraient au Canada une série d’avantages, dont le plus important serait son indépendance, qui garantirait à son tour la pertinence du Canada sur la scène internationale pour les années à venir.

Depuis la victoire de Carney, les discussions sur l’avenir du Canada manquent de cette nécessaire ambition. Ses programmes de diversification commerciale se concentrent principalement sur l’Union européenne, qui souffre d’une faible productivité et d’une croissance anémique, en particulier depuis l’imposition de sanctions sur l’énergie russe en 2022[5]. Carney a également renforcé l’intégration sécuritaire du Canada avec l’Europe, ce qui ne constitue guère une diversification compte tenu du fait que tous les pays concernés sont membres de l’OTAN et obéissent aux États-Unis. Lorsqu’on analyse les politiques de Carney sur le fond plutôt que sur la forme, on constate que le gouvernement canadien : 1) ne tire pas parti des marchés dynamiques des BRICS, s’en tenant plutôt à une vision atlantiste de la « diversification » commerciale qui ne protège guère le Canada de la coercition économique américaine, et 2) s’aligne encore plus étroitement sur les objectifs militaires et géopolitiques des États-Unis. Les politiques du premier ministre ressemblent en tout point à celles de « l’intégration profonde » à laquelle sa victoire était censée mettre fin.

Carney a tenté de présenter son adhésion au militarisme comme une renaissance économique pour le Canada. L’analyste politique Abbas Qaidari décrit la présentation par Carney des politiques de son gouvernement comme « une forme typiquement canadienne de militarisme keynésien, qui ne repose pas sur le chauvinisme ou l’expansionnisme, mais sur une fusion sophistiquée entre crédibilité fiscale, intervention productive de l’État et contrôle stratégique du discours ». Selon Qaidari, le gouvernement Carney « refond la défense comme une source d’activité économique souveraine[6] ».  Une telle analyse ignore la dimension impériale de cette politique, en particulier le fait que l’administration Trump a exigé des États membres de l’OTAN qu’ils augmentent leurs dépenses militaires afin de contrer les puissances qui se rassemblent autour de la Russie et de la Chine. Dans ce contexte, il apparaît clairement que la décision de Carney de participer à la relance du militarisme atlantiste s’inscrit dans une stratégie occidentale plus large visant à contenir la multipolarité, et ce, afin de renforcer un ordre mondial en déclin orienté vers l’Occident. Le bellicisme de Carney profite à ceux qui s’engagent à maintenir l’impérialisme dirigé par les États-Unis, ainsi qu’à l’industrie de l’armement atlantique qui alimente la militarisation des membres de l’OTAN et l’expansion de l’alliance. Il ne profite pas à la majorité des Canadiens qui exhortent leur gouvernement à poursuivre une véritable diversification des relations commerciales et militaires.

Le Canada et l’impérialisme

Le système mondial dirigé par les États-Unis, qui a prévalu après la fin de la Seconde Guerre mondiale, était fondamentalement impérialiste. Comme l’avance les travaux de Samir Amin, le capitalisme se caractérise depuis ses origines au XVIe siècle par une « polarisation entre centres et périphéries, qui n’a fait que s’accentuer au cours du développement ultérieur de sa mondialisation ». En ce sens, Amin remet en question la vision de Lénine et de Boukharine selon laquelle l’impérialisme du XXe siècle était une « nouvelle » étape du capitalisme. Il précise : « Le système pré-monopoliste du XIXe siècle n’était pas moins impérialiste [que le système monopoliste du XXe siècle]. La Grande-Bretagne a maintenu son hégémonie précisément grâce à sa domination coloniale sur l’Inde.[7] » Cette information est importante puisque l’État capitaliste-colonial du Canada a bénéficié de son intégration au système impérial britannique[8].

Comme le souligne l’économiste canadien John Rapley : « Dès les débuts de la colonisation européenne, le Canada s’est intégré au commerce triangulaire qui exploitait les excédents générés par les économies esclavagistes des Caraïbes et du Sud des États-Unis, permettant ainsi aux colons européens de tirer profit du travail forcé des Africains tout en se tenant à distance des horreurs de cette institution.[9] » Une classe capitaliste canadienne a émergé et s’est consolidée sous la tutelle de l’Empire britannique. Au début du XXe siècle, le journaliste d’investigation Gustavus Myers a découvert que « moins de cinquante hommes contrôlent 4 000 000 000 $, soit plus d’un tiers de la richesse matérielle du Canada, sous forme de chemins de fer, de banques, d’usines, de mines, de terres et d’autres propriétés et ressources ». Myers a également qualifié de « prodigieux » le montant du capital britannique présent au Canada, soit plus de 2 milliards de dollars, représentant environ 55 milliards de dollars actuels[10]. Le capital britannique s’est alimenté grâce à l’extraction de superprofits dans les colonies de l’empire, et c’est grâce à l’investissement d’une part de ces gains dans notre pays que le Canada a pu s’industrialiser et, en 1867, se formaliser en tant que nation. En bref, les capitalistes britanniques ont tiré des rentes impérialistes de l’Inde et d’autres colonies, puis ils ont redirigé une partie de cette plus-value vers le Canada et d’autres « dominions blancs », contribuant à la croissance rapide de leur économie. « De cette manière, écrit Rapley, le Canada s’est retrouvé au sommet d’un réseau d’exploitation mondiale, capable de s’assurer la plupart des avantages économiques de la domination impériale tout en assumant peu de ses coûts : guerres coloniales, marine coûteuse, administrations impériales.[11] »

L’économiste politique Jerome Klassen va dans le même sens et affirme : « Si le système-monde capitaliste est constitué par une structure du pouvoir impérialiste à travers laquelle les excédents économiques sont répartis de manière inégale en raison des stratégies concurrentes des États-nations et de leurs classes capitalistes respectives, alors le Canada doit se situer près du sommet de ce système hiérarchique, et la question de l’impérialisme canadien doit être explorée[12] ». Après la Seconde Guerre mondiale, le Canada est demeuré dans les hautes sphères impérialistes, même s’il s’est détaché progressivement de la Grande-Bretagne au profit des États-Unis. Le Canada a participé avec enthousiasme à la création des institutions de Bretton Woods, dominées par la perspective occidentale et en particulier américaine. En avril 1949, il est devenu membre fondateur de l’OTAN. Au début de la Guerre froide, les États-Unis ont défini l’Amérique du Nord comme une seule « unité stratégique » et sécurisé un approvisionnement régulier en ressources énergétiques et minérales canadiennes. Parallèlement, le Canada a renforcé son intégration économique et militaire avec les États-Unis, le nouveau centre impérial mondial. La vigueur de l’économie canadienne est alors devenue dépendante de l’armée américaine et des entreprises impériales des États-Unis[13].

La capacité du Canada à tirer profit des marchés sécurisés par l’impérialisme occidental sans avoir à supporter le poids du maintien de l’appareil politique et militaire destiné à l’extraction de la rente impérialiste a permis au pays de maintenir un système de protection sociale, y compris des soins de santé universels, et d’orienter les dépenses militaires vers des missions internationales « pacifiques » plutôt que vers des campagnes militaires agressives. Seule exception : les campagnes agressives menées, au sein même du Canada, contre les peuples autochtones qui s’opposaient à l’expansion et à la consolidation du capital canadien, par exemple lors de la résistance des Métis de la rivière Rouge en 1870, de leur lutte dans le Nord-Ouest en 1885, et du combat des Mohawks de Kanesatake en 1990. Pour revenir aux missions internationales de maintien de la paix, elles ont souvent été décrites comme la preuve des valeurs de multilatéralisme et de compromis du Canada, contrastant avec le militarisme américain. Cependant, c’est précisément grâce au système impérialiste maintenu par la puissance militaire américaine que la classe dirigeante canadienne a pu se réorienter vers la protection sociale et les efforts de maintien de la paix. L’économiste et politologue Paul Kellogg décrit la stratégie du Canada à cette époque comme un « parasitisme militaire », ce qui signifie que « le capitalisme canadien a investi et tiré profit des sphères d’influence « protégées » par le plus proche allié du Canada, les très militarisés États-Unis[14] ».  De plus, l’armée canadienne n’a jamais été uniquement une force de maintien de la paix, comme le souligne le politologue Todd Gordon :

« Depuis la Seconde Guerre mondiale, l’armée canadienne a participé à au moins cinq interventions impérialistes dans des pays étrangers : Corée (1950-1953), Irak (1991), Yougoslavie (1999), Haïti (2004) et Afghanistan (depuis 2002). Le Canada n’a pas participé à la guerre du Vietnam. Mais il a vendu pour des milliards de dollars de matériel de guerre aux États-Unis à l’époque et a utilisé son siège à la Commission internationale de contrôle et de surveillance – la force internationale créée en 1954 pour superviser la mise en œuvre des accords de Genève qui ont mis fin à la première guerre d’Indochine – pour soutenir l’effort de guerre américain. Le Canada a envoyé deux destroyers dans la région vers la fin de la guerre américaine pour soutenir les soldats canadiens qui y servaient. Et bien que le Canada n’ait pas officiellement participé à la guerre en Irak en 2003, des soldats et des officiers canadiens participant à des programmes d’échange ont néanmoins combattu aux côtés de l’armée américaine et occupé des postes de commandement dans les forces d’occupation[15] ».

Certaines de ces interventions, menées dans le contexte du retour de la Russie et de l’ascension de la Chine, peuvent être en partie comprises comme des efforts visant à endiguer l’émergence d’un monde multipolaire qui remet en cause le système impérialiste occidental et la position privilégiée du Canada au sein de celui-ci. Comme le note Klassen, la guerre en Afghanistan, à laquelle le Canada a contribué en envoyant 40 000 soldats pendant treize ans, a été « utilisée pour contrer l’expansion chinoise, privatiser les ressources afghanes et, de manière générale, étendre l’espace du capitalisme mondial et de l’empire américain ». Plus précisément, Klassen soutient que le Canada « menait une guerre pour étendre l’hégémonie occidentale à travers l’Eurasie et le système mondial au sens large, pour élever le rang politique, économique et militaire du Canada au sein de ce système, et pour étendre les intérêts du capital canadien à l’échelle nationale, régionale et mondiale[16] ».

À mesure que le capital canadien se mondialisait à la fin du XXe siècle, les entreprises canadiennes ont davantage tiré parti de la main-d’œuvre et des ressources bon marché du Sud global, clamant une plus grande part des superprofits versés vers le Nord. Cela s’est accompagné d’une diminution des contributions du Canada au maintien de la paix aux Nations unies et d’une augmentation de la participation canadienne aux guerres impérialistes. Klassen décrit ce processus comme l’émergence d’un « néolibéralisme blindé », une « fusion du militarisme et de la lutte des classes dans les politiques et les pratiques de l’État canadien » qui avait un triple objectif : « mondialiser la portée des entreprises canadiennes ; assurer une position centrale à l’État canadien dans la hiérarchie géopolitique ; et discipliner toutes les forces d’opposition – étatiques et non étatiques – dans l’ordre mondial[17] ».

Au début des années 1980, la crise mondiale de la dette a frappé de plein fouet les pays du Sud et « les pays capitalistes avancés ont utilisé le FMI et la Banque mondiale pour modifier radicalement le paysage politique et économique du tiers-monde[18] ». Ces institutions financières dirigées par l’Occident ont accordé un allègement de la dette en échange d’une libéralisation économique. En conséquence, « les marchés ont été ouverts aux capitaux du premier monde, les services publics et les terres ont été privatisés, les dépenses sociales et les subventions ont été réduites, les monnaies ont été dévaluées et les ressources naturelles ont été transformées en marchandises, ce qui a déclenché une vague d’investissements à la recherche de ressources naturelles, de main-d’œuvre bon marché et d’actifs vendus à prix cassés[19] ». Le Canada s’est joint à cette ruée vers le Sud. Entre 1990 et 2005, les investissements directs canadiens dans les marchés du Sud ont considérablement augmenté, en fait, « à un rythme supérieur à celui de l’économie canadienne[20] ».

Cette conjoncture n’a pas entraîné une sortie canadienne du bloc atlantiste, mais a plutôt correspondu à une contribution accrue du Canada aux conquêtes militaires visant à étendre la puissance de l’Atlantique Nord. L’intérêt du Canada pour les pays du Sud était et demeure de nature impérialiste, dans le sens où l’État canadien se préoccupait de l’expansion de l’hégémonie occidentale et de la capacité des entreprises canadiennes à obtenir des sources de survaleur pour alimenter la croissance de son économie. De plus, les réformes imposées aux pays du Sud ont activement sapé leur souveraineté nationale. L’orientation du Canada vers le Sud n’était clairement pas un arrangement mutuellement avantageux, comme en témoigne l’opposition généralisée des populations aux entreprises canadiennes, en particulier aux sociétés minières, dans les pays d’Amérique latine, des Caraïbes et d’Afrique. Leurs dénonciations visaient à juste titre les pratiques corrompues et l’impact écologique négatif de ces entreprises[21].  Au cours des années suivantes, la préférence des pays du Sud pour les alliances économiques menées par la Chine, qui ne portent notamment pas atteinte à la souveraineté nationale par l’imposition de réformes néolibérales, s’est manifestée par la croissance rapide des BRICS (fondés en 2008, élargis en 2014 pour inclure l’Afrique du Sud) et de l’initiative des Nouvelles routes de la soie (lancées en 2013).

À mesure que ces blocs économiques Sud-Sud se sont consolidés, l’ordre mondial capitaliste dirigé par les États-Unis a perdu de son influence, et les pays qui alimentaient les superprofits occidentaux semblent moins disposés à sacrifier leur souveraineté nationale en échange d’investissements américains. Plutôt que de considérer l’avènement d’un ordre mondial multipolaire comme une opportunité, l’État canadien se sent apparemment menacé par la perspective de perdre des sources potentielles de survaleur. Cette menace est également profondément ressentie aux États-Unis ; l’inquiétude des États-Unis face à un monde multipolaire l’a conduit à s’impliquer à l’étranger, notamment en Ukraine, et a alimenté la montée de ce que John Bellamy Foster, rédacteur en chef de la Monthly Review, appelle « l’impérialisme MAGA ».

La première administration Trump (2017-2021) a lancé une nouvelle guerre froide contre la Chine dans le but de vaincre son principal concurrent mondial. En Amérique latine, Trump a cherché à éradiquer les alternatives socialistes représentées par la République bolivarienne du Venezuela et la République de Cuba. Au Moyen-Orient, il a tenté de soumettre la région à l’hégémonie israélienne. Pour sa part, le Canada a soutenu ces objectifs, imposant ses propres sanctions au Venezuela et commettant un « enlèvement judiciaire » sur la personne de Meng Wanzhou, cadre dirigeante de l’entreprise chinoise Huawei, à la demande de Trump. Le Canada a aussi continué de fournir des armes et un soutien diplomatique à l’État d’Israël, de plus en plus ouvertement génocidaire. L’administration de Joe Biden (2021-2025) a élargi la guerre menée par les États-Unis contre le multipolarisme pour y inclure la guerre en Ukraine, dont l’objectif est d’affaiblir la Russie, comme l’a déclaré l’ancien secrétaire à la Défense Lloyd Austin[22].  Le Canada est profondément impliqué dans ce conflit. En outre, l’armée canadienne s’est déployée en mer de Chine méridionale pour mener des exercices provocateurs au large des côtes chinoises, ce qui témoigne de l’engagement du Canada dans une campagne sur deux fronts visant à défier simultanément la Russie et la Chine. Ces tendances en matière de politique étrangère se sont poursuivies et se sont même intensifiées sous la gouverne de Mark Carney. Ainsi, les libéraux canadiens suivent les objectifs américains, même s’ils proclament défendre la souveraineté et l’indépendance canadiennes.

Manquer le bateau des BRICS

La riposte la plus importante de Mark Carney aux agressions de Trump a été d’augmenter les livraisons de pétrole vers la Chine par l’entremise l’oléoduc Trans Mountain[23].  Cependant, lorsqu’on examine tous les domaines potentiels de collaboration avec la Chine et les BRICS, ces livraisons apparaissent comme négligeables. Dans le contexte du soutien continu du Canada aux objectifs géopolitiques des États-Unis, elles sont encore moins impressionnantes. Depuis près de deux décennies, les économistes et les observateurs avertissent que le Canada ne tire pas profit des opportunités offertes par les pays du BRICS. En 2008, un an avant la première réunion officielle du groupe des BRIC, le think thank Conference Board of Canada a noté que le pays faisait peu d’efforts pour approfondir ses liens avec les économies des BRIC. Cette année-là, moins de 2 % des exportations canadiennes étaient destinées à la Chine, tandis que les investissements canadiens dans ce même pays représentaient moins de 1 % du total des investissements directs étrangers du Canada. Les investissements canadiens en Inde étaient, quant à eux, « pratiquement invisibles ». Le groupe de réflexion notait : « Le Canada passe à côté d’énormes opportunités offertes par les pays des BRIC. […] La part du Canada dans le commerce et les investissements avec les BRIC est faible et les liens avec ces pays […] doivent être approfondis. » La chercheuse Sheila Rao a fait valoir « qu’il existe également d’énormes opportunités d’exportation et d’investissement pour le Canada dans ces pays. La Chine et l’Inde sont avides de ressources, ont des besoins massifs en infrastructures et leur population moyenne, gigantesque et en pleine croissance, stimule la demande de produits dans le monde entier[24]. »

Plus récemment, les professeurs Laura MacDonald et Jeremy Paltiel ont averti que la volonté du Canada d’approfondir ses liens avec les États-Unis au détriment des pays du BRICS était imprudente. « Le choix antérieur des gouvernements de poursuivre une intégration économique plus profonde avec les États-Unis au détriment de la diversification commerciale s’est avéré problématique dans une période de stagnation de l’économie américaine et de montée en puissance de nouvelles puissances économiques », ont fait valoir les auteurs. « Le Canada est confronté non seulement à une crise économique, mais aussi à une crise identitaire, car il doit faire face à de nouveaux puissants rivaux qui remettent en cause l’ordre mondial qu’il a contribué à établir et dont il a tiré profit. » Ils ajoutent : « La réponse du gouvernement canadien a été inadéquate et […] le Canada prend du retard dans le remaniement de l’ordre mondial. Si ce bilan reflète peut-être les limites de l’administration canadienne précédente [le Premier ministre conservateur Stephen Harper], nous pensons qu’il est également lié à des problèmes plus profonds auxquels sont confrontés les bénéficiaires du statu quo pour s’adapter aux nouveaux rivaux […]. Compte tenu du déclin relatif des États-Unis, son partenaire économique le plus puissant, le Canada a tout intérêt, sur le plan économique, à diversifier ses relations commerciales et d’investissement.[25] » Cette diversification n’a pas eu lieu.

À l’approche du deuxième mandat de Trump, le Globe and Mail, l’un des plus anciens journaux d’Amérique du Nord et considéré comme le « journal de référence » au Canada, a publié un article d’Emerson Csorba soulignant la nécessité pour le Canada de se rapprocher de la majorité mondiale. Dans cet article, Csorba appelait le Canada à adhérer au BRICS. « L’idée derrière l’adhésion au BRICS, affirme l’auteur, est qu’il vaut mieux s’engager directement dans ce forum plutôt que de garder ses distances, ce qui garantirait presque à coup sûr une dépendance croissante vis-à-vis des États-Unis et un rôle négligeable du Canada dans la géopolitique. » Il poursuit :

« Tout en tirant des avantages économiques, le Canada peut protéger ses intérêts en entretenant des relations avec un plus large éventail de partenaires. Il existe un précédent historique dans l’engagement stratégique du Canada avec l’URSS, la Chine et Cuba en tant qu’interlocuteur de l’Amérique pendant la Guerre froide. Le Canada peut également s’engager davantage dans des plateformes telles que la Francophonie, en établissant des liens avec les puissances émergentes du Sud. […] Le Canada ne peut plus supposer, comme cela a été le cas dans le passé, que l’Amérique servira de protecteur.[26] »

En juillet 2025, alors que Carney multipliait les capitulations devant Trump, le Globe and Mail publiait un autre article appelant le Canada à « se libérer des États-Unis et à nouer des liens plus étroits avec la Chine ». La publication de cet article dans un grand journal canadien montrait que même les médias capitalistes privés ne pouvaient ignorer la montée populaire du sentiment anti-américain dans le pays. Les auteurs, Julian Karaguesian et Robin Shaban, déclaraient :

« Pour atteindre la souveraineté économique, le Canada doit se libérer du discours colporté par Washington selon lequel la Chine serait un partenaire commercial peu fiable cherchant à dominer le monde. Le Canada doit plutôt forger ses propres relations avec la Chine, des relations fondées sur les intérêts canadiens et non américains. […] Pour atteindre l’indépendance économique, le Canada doit changer de cap. Entre 2018-2019 et la fin de 2023, le commerce entre le Mexique et la Chine a augmenté de 66 % tout en maintenant les liens avec les États-Unis. Pourquoi ne pourrions-nous pas en faire autant ? Nous devons également améliorer le transfert de technologies depuis la Chine de manière à renforcer notre puissance économique, accélérer notre innovation et protéger notre souveraineté… La plus grande menace pour la souveraineté canadienne n’est pas l’ingérence chinoise, mais notre servilité envers les États-Unis, qui nous traitent de plus en plus comme un vassal. Alors que 95 % des consommateurs mondiaux vivent en dehors des États-Unis, le fait que nous dépendions d’un partenaire de moins en moins fiable pour 75 % de nos exportations n’est pas une tactique, mais une faute stratégique.[27] »

Néanmoins, le gouvernement Carney préfère approfondir toujours plus l’intégration militaire du Canada avec les États, et ce, malgré une administration américaine agressive. Il poursuit sa « diversification » commerciale dans un cadre atlantiste restreint, ce qui ne contribue guère à garantir la souveraineté canadienne vis-à-vis des États-Unis et sert en fait les intérêts américains en maintenant le Canada sous la domination de Washington.

Mark Carney : un impérialiste MAGA ?

L’actuelle administration Trump considère la Chine comme le principal adversaire de l’hégémonie américaine. À ce titre, Trump cherche à obtenir un cessez-le-feu en Russie afin de concentrer les efforts américains sur la lutte contre l’influence mondiale de la Chine. L’équipe de politique étrangère de Trump est composée de rapaces anti-Chine tels que Marco Rubio, Pete Hegseth et Elbridge Colby, qui prônent une « stratégie de refus » de grande envergure à l’encontre de la Chine, qui viserait à paralyser l’économie de ce pays. Pour ces derniers, la Russie ne représente pas une menace du même ordre. Parallèlement, Trump et son équipe de conseillers financiers – à savoir Peter Navarro, Scott Bessent et Stephen Miran – ont déstabilisé l’économie mondiale en imposant des mesures tarifaires radicales visant à intimider le monde entier afin qu’il se soumette davantage aux exigences des États-Unis. Miran affirmait que le Canada, parmi d’autres, pouvait facilement être contraint de se plier aux intérêts américains[28]. Il semble qu’on lui ait donné raison.

Alors que le second mandat de Trump marque une rupture historique dans l’opinion publique canadienne à l’égard des États-Unis, avec des opinions extrêmement négatives, les dirigeants politiques canadiens ne se sont pas adaptés à cette réalité. En effet, au niveau de la gouvernance nationale, Mark Carney représente une remarquable continuité avec les politiques qui durent depuis plusieurs décennies et qui ont vu le Canada soutenir les objectifs impérialistes des États-Unis face aux défis posés par la périphérie. Même les menaces d’annexion de Trump n’ont pas perturbé cette fidélité. Carney et Trump ont quelque chose en commun : aucun d’eux n’est disposé à s’adapter à l’ordre mondial non occidental émergent. Lorsque l’administration « impérialiste MAGA » de Trump est arrivée au pouvoir en janvier 2025 – Bellamy Foster définit l’impérialisme MAGA comme « un rejet du rôle traditionnel des États-Unis en tant que puissance mondiale hégémonique au profit d’un empire hypernationaliste America First » –, elle a présenté un programme visant à rétablir l’hégémonie américaine à une époque où la coopération Sud-Sud s’intensifie[29].  Bellamy Foster affirme que le bellicisme de Trump envers les gouvernements alliés, y compris l’Union européenne, pourrait générer une « rivalité interimpérialiste » entre les puissances occidentales mais, pour l’instant, cela ne semble pas se produire de manière substantielle. L’Europe, tout comme le Canada, a adopté une position conciliante envers Washington, notamment par le biais de programmes de réarmement massifs visant à soulager l’empire américain du fardeau de la défense européenne[30].

En fait, l’augmentation des dépenses militaires des membres de l’OTAN était une exigence clé de la vision impérialiste américaine. Comme l’a déclaré le secrétaire à la Défense Pete Hegseth en février 2025 : « La sauvegarde de la sécurité européenne doit être un impératif pour les membres européens de l’OTAN. Dans ce cadre, l’Europe doit fournir la majeure partie de l’aide létale et non létale future à l’Ukraine… Les États-Unis donnent la priorité à la dissuasion d’une guerre avec la Chine dans le Pacifique.[31] » Ainsi, les membres de l’OTAN contribuent au rééquilibrage impérialiste de l’administration Trump vis-à-vis de la Chine en assumant le fardeau de la guerre atlantiste contre l’ascendant économique de la Russie. Le gouvernement de Mark Carney a affirmé de manière peu convaincante que la capitulation du Canada face aux exigences de Trump en matière de dépenses militaires – qui constituent la plus forte augmentation des dépenses d’armement de l’histoire du Canada – est en fait la preuve de l’engagement du Canada en faveur de la diversification de la sécurité, le réarmement canadien se déroulant sous l’égide de l’OTAN. Cependant, ceux qui connaissent l’histoire de l’OTAN comprennent que ce sont les États-Unis qui prennent les décisions au sein de l’alliance. Comme l’a fait remarquer Richard Nixon, l’OTAN est « le seul organisme collectif qui a jamais fonctionné » parce que « nous [les États-Unis] sommes aux commandes[32] ».

Sous Carney, le Canada rejoindra probablement le système nord-américain de défense antimissile de Trump, le « Golden Dome », qui coûtera 61 milliards de dollars aux Canadiens. Carney dépensera sans doute 19 milliards de dollars pour des avions de combat F-35 fabriqués aux États-Unis, dont les pièces de rechange seront détenues et contrôlées par le gouvernement américain[33]. Aucune de ces initiatives ne protégera la souveraineté canadienne. Elles soumettront encore davantage les impératifs militaires canadiens aux États-Unis.

Selon l’économiste marxiste Prabhat Patnaik, la vision de Trump d’un empire « America First » est une « stratégie de renaissance de l’impérialisme[34] ». Son administration impérialiste MAGA souhaite voir échouer la Chine, les BRICS et la majorité mondiale, afin que l’empire américain reste dominant à l’échelle mondiale, en maintenant un flux en constante expansion de superprofits sous forme de main-d’œuvre et de ressources naturelles provenant des économies périphériques. Malgré l’opinion publique anti-américaine au Canada et l’ouverture populaire à de nouvelles relations commerciales, le premier ministre Carney a choisi le renforcement impérialiste plutôt que la majorité mondiale, le militarisme lié aux États-Unis plutôt que la promesse de la multipolarité. Cela n’augure rien de bon pour l’avenir du Canada, ni pour la sécurité des populations du globe.

Les dangers du militarisme dans un contexte multipolaire

La riposte canadienne aux pressions économiques et aux menaces d’annexion de Trump – ou plutôt l’absence de riposte – est représentative de la complaisance de l’État capitaliste canadien, créée par des siècles de privilèges impérialistes. La faible réponse d’Ottawa au déclin des États-Unis a révélé la réalité suivante : l’establishment politique canadien n’est pas disposé à abandonner sa position privilégiée dans le statu quo de plus en plus obsolète du capitalisme impérialiste dirigé par les États-Unis. L’impérialisme capitaliste (d’abord britannique, puis américain) a enrichi l’économie canadienne, et plus particulièrement sa classe capitaliste coloniale, depuis les origines du pays jusqu’à aujourd’hui. Pourtant, les changements inexorables de l’ordre mondial actuel ont révélé que la dépendance du Canada à l’égard de l’impérialisme américain était avant tout un problème en termes d’influence géopolitique et de moyens de subsistance matériels pour la plupart des Canadiens. Les capitalistes et les politiciens canadiens ont pris peu de mesures pour rapprocher le Canada de la majorité mondiale, malgré le désir du public de voir des changements audacieux et profonds dans les relations commerciales du Canada.

Pour notre pays, les dangers liés à la poursuite d’un militarisme aligné sur les États-Unis plutôt que d’une intégration souveraine dans un monde multipolaire sont nombreux. Si le gouvernement canadien ne parvient pas à le reconnaître, le Canada sombrera dans l’insignifiance à mesure que l’hégémonie américaine déclinera. Avec une classe dirigeante attachée au capitalisme et à l’atlantisme, un tel destin semble inévitable.


[1] Cité dans Rhianna Schmunk, “Trump says he would use ’economic force’ to join Canada with U.S.”, RCI, January 7, 2025, https://ici.radio-canada.ca/rci/en/news/2131198/trump-says-he-would-use-economic-force-to-join-canada-with-u-s

[2] Kelly Geraldine Malone, “Growing number of Canadians view the U.S. as a top threat, poll shows”, Global News, July 8, 2025, https://globalnews.ca/news/11280397/united-states-threat-canadians/

[3] Cité dans Sean Boynton, “U.S. Golden Dome among ‘options’ for Canada’s defence, Carney says”, Global News, May 21, 2025, https://globalnews.ca/news/11190806/carney-golden-dome-us-trump-security/

[4] Ben Norton, “BRICS expands to 56% of world population, 44% of global GDP: Vietnam joins as partner country”, Geopolitical Economy, July 4, 2025, https://geopoliticaleconomy.com/2025/07/04/brics-expansion-population-gdp-vietnam/

[5] Matthew Karnitschnig, “Europe’s economic apocalypse is now”, Politico, December 19, 2024, https://www.politico.eu/article/europe-economic-apocalypse/

[6] Abbas Qaidari, “How Mark Carney is turning military spending into a force for economic renewal”, Policy Options, June 19, 2025, https://policyoptions.irpp.org/magazines/june-2025/defence-spending-economy/

[7] Samir Amin, « Contemporary Imperialism », Monthly Review, 1er juillet 2015, https://monthlyreview.org/2015/07/01/contemporary-imperialism/

[8] Tyler Shipley, professeur au Humber College, précise : « Le Canada était fondé sur la volonté d’établir un marché privé des biens fonciers et du travail, et de créer les conditions propices à l’accumulation de richesses capitalistes. Ainsi, comme tout État capitaliste colonial, le Canada a été conçu pour détruire les populations autochtones – par l’extermination, l’expulsion, l’assimilation ou toute autre méthode – et remplacer leurs sociétés par une société dominée par une poignée de capitalistes riches et par des lois et des institutions qui soutiennent une société capitaliste. » Voir Shipley, Canada in the World: Settler Capitalism and the Colonial Imagination (Winnipeg: Fernwood Publishing, 2020), 2.

[9] Rapley, “Canada benefits from a world order that empires built. As the latest one declines, so does our economy”, The Globe and Mail, August 25, 2023, https://www.theglobeandmail.com/opinion/article-canada-benefits-from-a-world-order-that-empires-built-as-the-latest/

[10] Myers, History of Canadian Wealth (Chicago: Charles H. Kerr & Company, 1914), i-iii.

[11] Rapley, “Canada benefits from a world order that empires built”, The Globe and Mail.

[12] Jerome Klassen, “Empire, Afghanistan, and Canadian Foreign Policy,” in Empire’s Ally: Canada and the War in Afghanistan (Toronto: University of Toronto Press, 2013), edited by Klassen and Greg Albo, 12.

[13] Cité dans Stephen J. Randall, United States Foreign Oil Policy Since World War I (Montreal & Kingston: McGill-Queen’s University Press, 2005), 266.

[14] Cité dans Schalk, “Canada’s Militarization and the End of U.S. Hegemony,” Monthly Review, September 6, 2024, https://mronline.org/2024/09/06/canadas-militarization-and-the-end-of-u-s-hegemony/

[15] Gordon, Imperialist Canada (Winnipeg : ARP Books, 2010), 305. Écrit en 2010, le livre de Gordon ne mentionne pas la destruction de la Libye par l’OTAN, dans laquelle le Canada a joué un rôle majeur.

[16] Klassen, “Empire, Afghanistan, and Canadian Foreign Policy”, 17, 30.

[17] Klassen, “Joining empire: Canadian foreign policy under Harper”, Canadian Dimension, October 7, 2015, https://canadiandimension.com/articles/view/joining-empire-canadian-foreign-policy-under-harper

[18] Gordon, “Canada in the Third World: The Political Economy of Intervention” in Empire’s Ally, 215.

[19] Gordon, “Canada in the Third World”, 216.

[20] Gordon, Imperialist Canada, 175.

[21] Il existe une littérature abondante sur ce sujet, notamment : Alain Denault and William Sacher, Imperial Canada Inc.: Legal Haven of Choice for the World’s Mining Industries (Vancouver: Talonbooks, 2012); Capitalism & Dispossession: Corporate Canada at Home & Abroad (Halifax & Winnipeg: Fernwood Publishing, 2022), edited by David P. Thomas and Veldon Coburn; Gordon, Imperialist Canada; Gordon and Jeffery R. Webber, Blood of Extraction: Canadian Imperialism in Latin America (Halifax & Winnipeg: Fernwood Publishing, 2016); Paula Butler, Colonial Extractions: Race and Canadian Mining in Contemporary Africa (Toronto: University of Toronto Press, 2015); Peter McFarlane, Northern Shadows: Canadians and Central America (Toronto: Between the Lines, 1989); Testimonio: Canadian Mining in the Aftermath of Genocides in Guatemala (Toronto: Between the Lines, 2021), edited by Catherine Nolin and Grahame Russell; Shipley, Canada in the World and Ottawa and Empire: Canada and the Military Coup in Honduras (Toronto: Between the Lines, 2017); Yves Engler, The Black Book of Canadian Foreign Policy (Vancouver & Winnipeg: Fernwood Publishing and RED Publishing, 2009) and Canada in Africa: 300 Years of Aid and Exploitation (Vancouver & Winnipeg: Fernwood Publishing and RED Publishing, 2015).

[22] Julian Borger, “Pentagon chief’s Russia remarks show shift in US’s declared aims in Ukraine”, The Guardian, April 25, 2022, https://www.theguardian.com/world/2022/apr/25/russia-weakedend-lloyd-austin-ukraine

[23] “China emerging as top customer for Canadian oil shipped via Trans Mountain Pipeline”, CBC, May 16, 2025, https://www.cbc.ca/news/business/china-canada-oil-trans-mountain-pipeline-1.7537530

[24] “Canada missing out on opportunities to build relationships with BRIC countries”, Canada NewsWire, January 11, 2008.

[25] MacDonald and Paltiel, “Middle power or muddling power?”

[26] Emerson Csorba, “Canada should get closer to the non-Western BRICS economic alliance”, The Globe and Mail, November 20, 2024, https://www.theglobeandmail.com/business/commentary/article-canada-should-get-closer-to-the-non-western-brics-economic-alliance/

[27] Julian Karaguesian and Robin Shaban, “Let’s free ourselves of the U.S. and forge closer ties with China”, The Globe and Mail, July 14, 2025, https://www.theglobeandmail.com/business/commentary/article-lets-free-ourselves-of-the-us-and-forge-closer-ties-with-china/?utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter

[28] John Bellamy Foster, “The Trump Doctrine and the New MAGA Imperialism,” Monthly Review, June 2025, vol. 77 no. 2, 7, 16.

[29] Bellamy Foster, “The Trump Doctrine,” 2.

[30] Bellamy Foster, “The Trump Doctrine,” 9.

[31] Hegseth, “Opening Remarks by Secretary of Defense Pete Hegseth at Ukraine Defense Contact Group”, Brussels, February 12, 2025, https://www.defense.gov/News/Speeches/Speech/article/4064113/opening-remarks-by-secretary-of-defense-pete-hegseth-at-ukraine-defense-contact/

[32] Schalk, “Carney’s military buildup benefits the US, not Canada”, Canadian Dimension, June 13, 2025, https://canadiandimension.com/articles/view/carneys-military-buildup-benefits-the-us-not-canada

[33] Kevin Maimann, “Donald Trump says Golden Dome would cost Canada $61 billion US”, CBC, May 27, 2025, https://www.cbc.ca/news/politics/golden-dome-61-billion-1.7545414 ; David Pugliese, “Spare parts for Canada’s F-35 fleet will be controlled by the U.S.”, Ottawa Citizen, May 5, 2025, https://ottawacitizen.com/public-service/defence-watch/f-35-fighter-jet-spare-parts-u-s-canada

[34] Cité dans : Bellamy Foster, “The Trump Doctrine,” 3.

Le président d’Amazon au Canada se déresponsabilise des fermetures

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