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Climat : l’année 2024 est la première au-dessus du seuil de 1,5°C de réchauffement

10 décembre 2024, par El Watan — , ,
Le Service changement climatique (C3S) de l'observatoire européen Copernicus a confirmé que 2024 avait été plus chaude que 2023 après un mois de novembre marqué par une (…)

Le Service changement climatique (C3S) de l'observatoire européen Copernicus a confirmé que 2024 avait été plus chaude que 2023 après un mois de novembre marqué par une succession de typhons dévastateurs et de sécheresses historiques.

Tiré d'El Watan.

Après un mois de novembre exceptionnellement chaud, le Service changement climatique (C3S) de l'observatoire européen Copernicus annonce que 2024 sera, de fait, l'année la plus chaude jamais enregistrée, dépassant de plus de 1,5 °C les niveaux préindustriels. Ce mois de novembre, marqué par des typhons dévastateurs en Asie et des sécheresses persistantes en Afrique australe et en Amazonie, a affiché une température moyenne mondiale supérieure de 1,62 °C à celle d'un mois de novembre normal avant l'industrialisation.

Selon la base de données ERA5 de Copernicus, novembre est le 16e mois sur les 17 derniers à enregistrer une anomalie de 1,5 °C par rapport à la période 1850-1900. Cette limite correspond à l'objectif le plus ambitieux fixé par l'Accord de Paris de 2015, qui vise à contenir le réchauffement bien en dessous de 2 °C et à poursuivre les efforts pour le limiter à 1,5 °C. Cependant, cette limite s'applique aux tendances de long terme : une moyenne de réchauffement d'1,5 °C doit être observée sur une période d'au moins 20 ans pour être considérée comme franchie. Actuellement, la moyenne mondiale est d'environ 1,3 °C, et le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) estime que le seuil sera probablement atteint entre 2030 et 2035, indépendamment des réductions d'émissions de gaz à effet de serre.

Les derniers calculs de l'ONU montrent que le monde est loin d'atteindre ses objectifs en matière de réduction des émissions de carbone, exposant la planète à un réchauffement « catastrophique » de 3,1 °C d'ici la fin du siècle, ou 2,6 °C si les engagements climatiques supplémentaires sont tenus. Les pays ont jusqu'à février pour soumettre des révisions de leurs contributions climatiques nationales (NDC), mais l'accord minimal de la COP29 risque de justifier un manque d'ambition.

Les nations en développement ont obtenu des promesses d'aide annuelle de 300 milliards de dollars de la part des pays riches d'ici 2035, soit moins de la moitié de leur demande pour financer la transition énergétique et l'adaptation aux changements climatiques. Le sommet de Bakou s'est conclu sans engagements concrets pour accélérer la sortie des énergies fossiles, malgré un accord de principe à la COP28 de Dubaï.

En 2024, les catastrophes naturelles liées au réchauffement climatique ont causé des pertes économiques mondiales estimées à 310 milliards de dollars, selon Swiss Re, un des principaux assureurs mondiaux.

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Marilyn Monroe, une femme brisée par la violence patriarcale

10 décembre 2024, par Aurore Van Opstal, Francine Sporenda — ,
Interview d'Aurore Van Opstal par Francine Sporenda Aurore Van Opstal est journaliste et réalisatrice. Diplômée en sciences du travail de l'université libre de Bruxelles, (…)

Interview d'Aurore Van Opstal par Francine Sporenda

Aurore Van Opstal est journaliste et réalisatrice. Diplômée en sciences du travail de l'université libre de Bruxelles, elle vient de publier « Les hommes qui ont tué Marilyn », préface de Muriel Salmona, (éditions l'Esprit du temps).

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/12/06/marilyn-monroe-une-femme-brisee-par-la-violence-patriarcale/?jetpack_skip_subscription_popup

FS : Pourquoi as-tu voulu écrire cette fiction sur Marilyn ? Qu'est-ce qui t'a intéressée dans cette personnalité mythifiée ?

AV : Ce qui m'a poussée à écrire sur Marilyn, c'est la dissonance déchirante entre l'image publique, stéréotypée et hypersexualisée, et la femme profondément humaine, complexe et vulnérable qu'elle était. En tant que féministe, je ne peux ignorer le fait qu'elle incarne à la fois un objet façonné par le patriarcat et un sujet luttant pour affirmer son humanité dans un monde qui cherchait à l'effacer. Marilyn est devenue une icône parce que son existence a mis en lumière ce que la société attend des femmes : qu'elles soient belles, disponibles, consommables. Mais elle a aussi montré, dans ses moments de fragilité et de rébellion, qu'elle ne se réduisait pas à ces attentes. C'est cet aspect tragique et profondément humain qui m'intéressait : Marilyn Monroe n'est pas qu'un sex-symbol, c'est une femme qui a vécu l'oppression patriarcale à un degré extrême, et elle mérite d'être racontée autrement.

FS : Marilyn Monroe, dit un autre de tes personnages, cherchait avant tout à être aimée. Je vois ça comme une manifestation de son aliénation, de son conditionnement par sa socialisation féminine, qui enjoint aux femmes de placer l'amour au centre de leur vie, alors que l'amour n'est pas du tout une priorité dans la vie des hommes, socialisés à l'égocentrisme. Tes commentaires ?

AV : Je partage entièrement cette analyse. Marilyn a été façonnée, dès son plus jeune âge, pour chercher la validation extérieure, notamment celle des hommes. Ce conditionnement n'est pas propre à elle : il est imposé à toutes les femmes par la socialisation patriarcale. On apprend aux filles à se définir par le regard d'autrui, à se sentir « valides » seulement si elles sont désirées, aimées ou choisies par des hommes. C'est une forme d'aliénation insidieuse, mais puissante, car elle incite les femmes à se mettre au service des autres, à se sacrifier pour être « dignes » d'amour, tout en étant encouragées à occuper la marge. Pendant ce temps, les hommes, socialisés à l'égocentrisme, ne sont pas conditionnés à placer l'amour au centre de leur existence. Ils sont socialisés à occuper l'espace, à s'affirmer, à exiger, tandis que les femmes, comme Marilyn, apprennent à se plier, à plaire. C'est ce qui rend son histoire tragique et, en même temps, universelle : elle est un miroir des luttes intérieures imposées par une société patriarcale à chaque femme qui aspire à exister par elle-même

FS : Agressée sexuellement plusieurs fois dans l'enfance, MM se serait ensuite vue toute sa vie comme un objet sexuel, un « vagin sur pattes », destiné à être utilisé par les hommes, d'où son devenir de sex-symbol. Tu décris aussi MM comme incapable de dire non aux hommes qui veulent coucher avec elle. Pourquoi cette annihilation de la volonté chez elle selon toi ?

AV : L'anéantissement de la volonté de Marilyn face aux hommes qui la désiraient est la conséquence directe d'un système qui a objectifié son corps dès son plus jeune âge. Lorsqu'une fille subit des violences sexuelles, surtout dans l'enfance, elle apprend que son corps ne lui appartient pas. Elle intériorise l'idée que sa valeur est réduite à sa capacité à satisfaire les désirs masculins. Marilyn n'a jamais eu l'occasion de se réapproprier son corps ; elle est passée de l'abus familial à une industrie du divertissement qui a érigé son objectification en norme. Elle a été entraînée à dire « oui » pour survivre, pour éviter la violence, pour recevoir un semblant de validation. Mais ce « oui » était souvent un « non » bâillonné par la peur, la manipulation, et la conviction que refuser lui aurait coûté encore plus cher. Cette annihilation de sa volonté est le résultat d'un patriarcat oppressif qui détruit la capacité des femmes à s'affirmer et à dire « non » par la peur, le trauma, et le conditionnement systémique. Marilyn n'était pas une femme « faible » ; elle était une femme brisée par un système impitoyable.

FS : Marilyn, agressée de multiples façons par les hommes, a pourtant à son époque souvent été vue comme une coupable, une tentatrice induisant les hommes à la lubricité, une aguicheuse, une pécheresse. Tu peux commenter ?

AV : C'est là l'un des mécanismes les plus pervers du patriarcat : blâmer la victime tout en sanctifiant le bourreau. Marilyn a été réduite à son apparence, hypersexualisée à outrance, tout en étant culpabilisée pour l'effet qu'elle produisait. Elle était perçue comme une tentatrice, alors que cette image de « pécheresse » lui avait été imposée par la société et les hommes qui l'exploitaient. C'est une forme de double peine : elle était « coupable » de susciter le désir, mais ce désir, c'était la société patriarcale qui l'avait construit, qui avait fait d'elle l'objet de fantasmes collectifs pour ensuite la condamner moralement. Cette hypocrisie révèle à quel point les femmes sont toujours placées sous la coupe d'un regard masculin jugeant et oppresseur. La sexualisation des femmes, suivie du blâme pour leur propre sexualisation, est une stratégie utilisée pour les maintenir dans un état de soumission et de honte permanentes. En réalité, Marilyn ne cherchait qu'à exister, à trouver sa place, à être vue pour qui elle était, mais le système n'a jamais cessé de lui rappeler que sa valeur résidait uniquement dans son corps et son utilité pour le désir masculin

FS : Une de tes personnages, Margaret, dit que, après les agressions sexuelles de l'enfance, les hommes qui entrent plus tard dans la vie de ces femmes sentent leur vulnérabilité et « achèvent le travail commencé par nos agresseurs ». Peux-tu commenter ?

AV : C'est une observation douloureusement juste, et elle mérite d'être entendue. Le trauma de l'agression sexuelle, particulièrement durant l'enfance, laisse des marques indélébiles sur l'esprit et le corps. Ces femmes portent des stigmates que certains hommes, consciemment ou non, exploitent. Il y a une sorte de prédation continue qui survit dans les recoins les plus sombres de notre société patriarcale. Les hommes qui perçoivent cette vulnérabilité – une faille laissée par le premier agresseur – peuvent en effet la manipuler pour asseoir leur propre pouvoir, pour continuer à instrumentaliser ces femmes, à les réobjectifier et à renforcer leur soumission. C'est une continuité du contrôle patriarcal qui se réinvente à chaque relation abusive, chaque homme qui profite du trauma d'une femme. Le « travail » de l'agresseur initial ne s'arrête pas au premier crime ; il se propage comme une maladie dans les structures sociales, affectant les interactions des femmes longtemps après que les violences originelles ont eu lieu. Pour ces femmes, la lutte pour retrouver leur pouvoir sur leur corps et leur esprit est constante, et chaque relation toxique qui s'insinue dans leur vie est une blessure supplémentaire infligée par une société qui ne protège pas ses victimes.

FS : Le même personnage dit « je sais qu'être féministe n'implique pas d'être misandre », mais elle ajoute « si tu savais comme je hais les hommes parfois ». La misandrie est-elle incompatible avec le féminisme, ou est-elle au contraire une attitude de protection raisonnable de la part de femmes polytraumatisées par les hommes ?

AV : Ce que Margaret exprime ici est la douleur et la colère d'une femme polytraumatisée, pas un appel à la haine aveugle. Il est important de comprendre que le féminisme n'a jamais été une lutte contre les hommes en tant qu'individus, mais bien contre le patriarcat, une structure qui privilégie les hommes et opprime les femmes. Dire que certaines femmes ressentent de la haine ou de la défiance envers les hommes n'est pas contradictoire avec le féminisme ; c'est une réalité vécue pour celles qui ont souffert, été trahies, blessées de manière répétée. Dans ce contexte, ce sentiment est une réponse humaine et compréhensible à des violences réelles.

Il est crucial de ne pas confondre la misandrie avec l'institutionnalisation de la misogynie. La haine des femmes est systémique et tue. La défiance des femmes vis-à-vis des hommes est souvent une stratégie de survie, une manière de se protéger, de se reconstruire en s'éloignant de ceux qui leur ont fait du mal. Elle peut, bien sûr, devenir un fardeau, un mur à abattre pour guérir pleinement. Mais elle n'est pas intrinsèquement incompatible avec le féminisme, tant qu'elle ne devient pas l'objet du mouvement. Le féminisme lutte pour la libération de toutes et tous. Pourtant, il serait inhumain et injuste de demander aux femmes qui souffrent de réprimer leurs émotions, y compris la colère, pour paraître « acceptables » aux yeux du patriarcat

FS : Marilyn aurait toute sa vie « réalisé de mauvais choix amoureux ». Pourquoi les femmes comme elles sont-elles attirées toute leur vie par des hommes particulièrement destructeurs ? Que penses-tu de la notion de trauma bonding ?

AV : Les « mauvais choix » de Marilyn en matière amoureuse ne peuvent être dissociés de son histoire de violence et de traumatisme. Lorsqu'une femme est blessée de manière répétée, elle intègre souvent, même inconsciemment, une dynamique où elle recherche des relations qui reproduisent ces schémas destructeurs. C'est une forme de répétition traumatique. Le trauma bonding, ou le lien traumatique, désigne précisément ce phénomène où la victime reste attachée à son agresseur ou à des partenaires toxiques par un lien émotionnel complexe, mêlant peur, dépendance et espoir de réparation.

Les femmes comme Marilyn, qui ont été brisées dès l'enfance, finissent par intérioriser un sentiment d'indignité, par croire que la souffrance fait partie de ce qu'elles méritent ou qu'elle est nécessaire pour être aimées. Cette croyance est renforcée par le patriarcat qui valorise la douleur féminine et romantise les relations toxiques. C'est pourquoi elles se retrouvent souvent attirées par des hommes qui renforcent leur sentiment d'infériorité et perpétuent ce cycle. Comprendre ce mécanisme, c'est comprendre que ces « mauvais choix » ne sont pas une question de volonté ou de faiblesse, mais le résultat d'un conditionnement profondément enraciné dans le trauma et la violence.

FS : Ton livre va bien au-delà du personnage de Marilyn, qui est un peu un prétexte à une réflexion sur les violences masculines envers les femmes et les enfants. Il y a un déni persistant dans la société face à ces violences, qui sont encore vues comme le fait de fous et de monstres, et ayant un caractère exceptionnel :« il ne peut pas y avoir autant d'agresseurs en ce bas monde ! ». Ce déni est très présent chez beaucoup de femmes, pourquoi sont-elles dans le déni par rapport à ces violences ?

AV : Ce déni, qu'on retrouve dans une grande partie de la société, y compris chez les femmes, est une réaction de défense. Admettre que les violences masculines sont systémiques et omniprésentes serait un choc insoutenable pour beaucoup, car cela remet en cause l'idée que l'on est à l'abri, que les hommes de notre entourage ne peuvent pas être dangereux. Ce déni est également nourri par une culture patriarcale qui minimise, normalise et invisibilise la violence faite aux femmes. Les agresseurs sont souvent présentés comme des « monstres » isolés pour protéger l'idée que les hommes, dans leur ensemble, ne sont pas coupables. C'est une stratégie de dissociation qui évite de remettre en cause les fondements mêmes de la société patriarcale.

Pour les femmes, reconnaître l'ampleur des violences masculines, c'est aussi accepter que les hommes qu'elles aiment – pères, frères, amis, maris – puissent faire partie du problème. C'est une prise de conscience douloureuse, qui met en lumière leur propre vulnérabilité et les limites de leur sécurité. Ce déni est donc une manière de se protéger psychologiquement, de ne pas affronter une réalité trop dure à accepter. Mais il perpétue malheureusement la culture du silence et laisse les agresseurs impunis.

FS : MM était accro à son psychanalyste Greenson et accordait une grande confiance au freudisme. Considères-tu que Greenson et son approche freudienne ont joué un rôle dans la détérioration mentale de sa patiente ?

AV : Il est clair que l'approche freudienne adoptée par Greenson n'a pas aidé Marilyn à guérir. Au contraire, elle a peut-être aggravé sa détérioration mentale. La psychanalyse freudienne, en particulier à cette époque, était marquée par une pathologisation du désir féminin, par des explications réductrices centrées sur la sexualité et par une hiérarchisation des rôles genrés qui renforçait les normes patriarcales. Greenson a maintenu Marilyn dans une relation de dépendance psychologique malsaine, créant un lien de contrôle sous couvert de soin.

La psychanalyse, dans son approche traditionnelle, tend à voir la femme comme « hystérique », à la rendre responsable de ses souffrances et à nier les causes sociales et systémiques de ses traumatismes. Dans le cas de Marilyn, au lieu de l'aider à se reconstruire, l'approche freudienne a perpétué son auto-objectivation et son sentiment d'être « défectueuse » sur le plan mental. Plutôt que de l'émanciper, elle a été enfermée dans une dynamique où elle dépendait d'un homme censé la guérir, mais qui, au final, a contribué à son aliénation

FS : Une de tes personnages dit : « les hommes me fatiguaient autant qu'ils me fascinaient » et plus loin, on lit « que c'est harassant d'être féministe et hétérosexuelle . Ça résume parfaitement le vécu de beaucoup d'hétérosexuelles, et les contradictions dans lesquelles elles se débattent. Tes commentaires ?

AV : Ces contradictions font partie du fardeau que beaucoup de femmes doivent porter. Être féministe et hétérosexuelle, c'est naviguer constamment entre désir et désillusion. D'un côté, il y a l'attrait, la volonté de croire en des relations égalitaires, en des partenariats respectueux, et de l'autre, il y a la réalité d'un système patriarcal où les rapports de domination imprègnent souvent les dynamiques amoureuses. Les hommes, en tant qu'individus, ne sont pas tous des oppresseurs, mais ils bénéficient d'un système qui les place en position de pouvoir, parfois même inconsciemment. Cette contradiction crée une fatigue morale et émotionnelle pour les femmes hétérosexuelles qui cherchent à concilier leurs désirs avec leurs convictions.

Elles sont confrontées à un double défi : lutter contre les oppressions structurelles tout en essayant de construire des relations affectives sincères et épanouissantes dans un contexte qui ne les favorise pas. Ce va-et-vient entre fascination, déception, colère et amour est un cycle épuisant, une danse complexe entre l'intime et le politique. Il n'y a pas de solution simple à ce dilemme, mais il mérite d'être nommé et exploré. Être féministe, c'est vouloir mieux pour soi et pour toutes, y compris dans les relations amoureuses, même si cela implique de remettre constamment en question les modèles qui nous sont imposés

FS : En conclusion, ton personnage de MM déclare : « les hommes m'ont tuée en bouffant toute force de vie en moi ». On connaît le mythe de la « femme fatale », mais c'est une inversion patriarcale : il y a beaucoup plus d'« hommes fatals », beaucoup plus de dominées détruites par des dominants que l'inverse, pour des raisons évidentes. Tes commentaires ?

AV : Absolument. Le mythe de la « femme fatale » est l'une des nombreuses inversions patriarcales destinées à détourner l'attention des véritables rapports de domination. La femme fatale est dépeinte comme une manipulatrice, une séductrice qui détruit les hommes par son pouvoir sexuel, mais c'est une fiction qui sert à masquer une réalité bien plus cruelle : celle de la domination masculine et de la destruction qu'elle inflige. Les « hommes fatals » sont bien réels et omniprésents, car ils exercent leur pouvoir non seulement sur le plan intime, mais aussi au niveau social, économique et politique. Les femmes qui s'opposent à ce pouvoir ou qui ne se conforment pas aux attentes sont souvent broyées par ce système.

Marilyn est un exemple tragique de cette dynamique. Ce sont les hommes autour d'elle – ceux qui l'ont exploitée, objectifiée, trahie et contrôlée – qui ont épuisé sa force vitale, pas l'inverse. C'est pourquoi il est crucial de déconstruire ces mythes patriarcaux qui inversent la réalité des rapports de force. Le féminisme a pour mission de révéler ces mécanismes, de nommer les véritables oppresseurs et de redonner aux femmes leur voix et leur humanité. Ce que Marilyn, à travers sa souffrance, nous montre, c'est qu'il n'y a rien de fatal dans le désir des femmes de vivre libres ; ce sont les systèmes de domination, incarnés par les « hommes fatals », qui rendent cette liberté si difficile à atteindre.

https://revolutionfeministe.wordpress.com/2024/11/23/marilyn-monroe-une-femme-brisee-par-la-violence-patriarcale/

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« Femmes, vie, liberté » : l’Iranienne, prix Nobel de la paix, Narges Mohammadi, libérée de prison… temporairement

10 décembre 2024, par Julia Hamlaoui — , ,
Libérée pour raisons médicales, la journaliste et militante Narges Mohammadi n'a été autorisée à quitter sa prison de Téhéran que pour trois semaines. Les appels à une remise (…)

Libérée pour raisons médicales, la journaliste et militante Narges Mohammadi n'a été autorisée à quitter sa prison de Téhéran que pour trois semaines. Les appels à une remise en liberté définitive se sont multipliés depuis sa sortie.

Tiré de L'Humanité, France, le jeudi 5 décembre 2024
https://www.humanite.fr/feminisme/droits-des-femmes/femmes-vie-liberte-liranienne-prix-nobel-de-la-paix-narges-mohammadi-liberee-de-prison-temporairement
Par Julia Hamlaoui

« Femmes, vie, liberté », a scandé la prix Nobel de la Paix 2023, <https:/www.humanite.fr/monde/iran/...>'>Narges Mohammadi , à sa sortie de prison mercredi 4 décembre, selon son mari Taghi Rahmani. Si le slogan du mouvement de contestation né après la mort de Mahsa Amini en septembre 2022 est devenu emblématique, la liberté n'est pour le moment que « temporaire » pour journaliste iranienne enfermée depuis 2021 à la prison d'Evin, près de Téhéran, capitale de la République islamique.

Âgée de 52 ans, la militante, maintes fois <https:/www.humanite.fr/monde/empri...>'>condamnée et emprisonnée depuis 25 ans pour son engagement contre le voile obligatoire pour les femmes et contre la peine de mort, a pu sortir provisoirement pour raisons médicales. « Selon l'avis du médecin légiste, le parquet de Téhéran a suspendu l'exécution de la peine de Narges Mohammadi pour trois semaines », a indiqué son avocat, Me Mostafa Nili, précisant qu'elle « a été libérée de prison ». « La raison de sa libération est son état physique après l'ablation d'une tumeur et une greffe osseuse réalisées il y a 21 jours », a ajouté Me Nili sur le réseau social X, bloqué en Iran.

« Appel à une libération immédiate et inconditionnelle »

Une libération temporaire « insuffisante », a réagi depuis Paris son comité de soutien. « Après une décennie d'emprisonnement, Narges a besoin de soins médicaux spécialisés dans un environnement sûr », a déclaré dans un communiqué la fondation Narges Mohammadi dont l'appel a été rejoint par le comité Nobel. « Nous demandons aux autorités iraniennes de mettre un terme définitif à son emprisonnement et de veiller à ce qu'elle reçoive un traitement médical adéquat pour ses maladies », a affirmé son président, Jørgen Watne Frydnes, lors d'une conférence de presse à Oslo.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a également réclamé la « libération immédiate et inconditionnelle » de Narges Mohammadi, même s'il juge « important »qu'elle ait été remise temporairement en liberté mercredi pour raison médicale. « Nous réitérons notre appel à la libération immédiate et inconditionnelle de Mme Mohammadi, ainsi que de toutes les Iraniennes et de tous les Iraniens qui sont détenus ou emprisonnés pour avoir légitimement exercé leur liberté d'expression et d'autres droits de l'homme », a réagi un porte-parole du Haut-Commissariat, Thameen Al-Kheetan, auprès de l'AFP.

En juin, la militante iranienne avait été condamnée à une nouvelle peine d'un an de prison pour « propagande contre l'État ». Elle avait refusé d'assister à l'audience de son procès après avoir demandé, sans succès, que celui-ci soit ouvert au public. Emprisonnée et malade, elle n'en poursuit pashttps://www.humanite.fr/monde/iran/...>
.">moins son combat En mars, elle avait diffusé un message audio depuis sa prison dans lequel elle dénonçait une « guerre à grande échelle contre les femmes » dans la République islamique.

Fin septembre, à l'occasion de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, elle avait aussi envoyé, toujours de sa prison, une lettre aux principaux dirigeants mondiaux pour qu'ils demandent la libération des prisonniers politiques et la fin de la répression des femmes et de la société civile en Iran.

Début novembre, elle a soutenu une étudiante iranienne arrêtée après <https:/www.humanite.fr/monde/iran/...>'>s'être dévêtue en public devant une université à Téhéran. L'étudiante « a transformé son corps en symbole de dissidence », a-t-elle alors affirmé, réclamant « sa libération et la fin du harcèlement des femmes » en Iran.

Après l'ablation d'une tumeur et une greffe osseuse réalisées il y a 21 jours, Narges Mohammadi a pu sortir provisoirement de prison pour trois semaines.

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*Une suggestion de lecture de André Cloutier, Montréal, 6 décembre 2024

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La loi « chasteté et voile » : Une nouvelle vague répressive contre les femmes et les filles iraniennes

10 décembre 2024, par Commission des femmes du Conseil national de la Résistance iranienne — , ,
Il faut s'y opposer avec le slogan « Femme, Résistance, Liberté » Tiré de Entre les lignes et lesmots https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/12/04/un-nom-plusie

Il faut s'y opposer avec le slogan « Femme, Résistance, Liberté »

Tiré de Entre les lignes et lesmots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/12/04/un-nom-plusieurs-vies-le-mythe-de-la-femme-musulmane-autres-textes/?jetpack_skip_subscription_popup

Après des mois de débats entre le Majlis (parlement) et le Conseil des gardiens du régime et un an et demi après sa rédaction par le pouvoir judiciaire, la loi dite « chasteté et voile » a finalement été publiée le 30 novembre 2024. La loi se compose de 74 articles répartis sur cinq chapitres. Intitulé à l'origine « Soutien à la culture de la chasteté et du voile », le projet a été préparé après le soulèvement de 2022 et soumis au Majlis par Ebrahim Raïssi.

Le 27 novembre 2024, Mohammad Bagher Ghalibaf, président du Majlis, a annoncé lors d'une conférence de presse que la loi « chasteté et voile », adoptée par le Majlis, serait mise en œuvre à partir du 13 décembre 2024. Il a affirmé que la loi n'impliquait pas de « patrouilles de moralité ou d'emprisonnement ». Cependant, le texte, divisé en cinq chapitres, attribue des responsabilités répressives à diverses institutions officielles, notamment le ministère de la culture et de l'orientation, la radiodiffusion publique (IRIB), le ministère de l'éducation, le ministère de la santé, les municipalités, le ministère de la science et d'autres organismes gouvernementaux.

Par exemple, le chapitre trois viole de manière flagrante la Déclaration universelle des droits de l'homme, les conventions internationales telles que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et les conventions relatives aux droits des femmes. Il oblige de nombreux ministères, organisations et municipalités à aller au-delà des patrouilles de moralité pour réprimer le port incorrect ou l'absence de hijab.

La clause 8 de l'article 16 charge spécifiquement les municipalités et les conseils de village de tout le pays, en collaboration avec des organismes comme l'Organisation de la propagande du régime, le ministère de la culture et de l'orientation, le ministère des sports et de la jeunesse, l'IRIB et le siège de la promotion de la vertu et de la prévention du vice, de « maintenir une surveillance permanente des espaces publics dont ils ont la charge, tels que les parcs, les centres culturels, les sites historiques et les transports publics urbains. Ils sont tenus de prendre les mesures nécessaires pour promouvoir les conditions de chasteté et de hijab, d'assurer la présence active des promoteurs de la vertu et de soutenir leurs actions dans ces espaces ».

En plus de cibler les femmes sous prétexte de faire respecter les règles relatives au voile, cette loi impose des sanctions sévères aux fonctionnaires, aux chefs d'entreprises et aux autres personnes qui refusent de coopérer avec les mesures du régime. Ceux qui ne signalent pas ou n'agissent pas contre les personnes qui s'opposent au voile obligatoire, ou qui refusent d'appliquer la loi, s'exposent à des sanctions allant de cinq à six ans de suspension de la fonction publique, à des amendes équivalant à deux à six mois de revenus de l'entreprise, ou à d'autres sanctions financières significatives.

Afin de réprimer les protestations et d'empêcher la propagation de la dissidence parmi les femmes et la société en général, la loi charge également le ministère du renseignement, l'unité de renseignement de la police (FARAJA) et l'organisation de renseignement des pasdarans de mettre en œuvre des mesures contre le non-respect des règles relatives au voile.

La commission des Femmes du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), faisant écho à la déclaration de Mme Maryam Radjavi, considère cette loi « criminelle et inhumaine » comme une nouvelle étape dans les efforts du régime pour réprimer les femmes et les filles iraniennes, dans le but d'étouffer les soulèvements. La commission appelle toutes les organisations internationales et les organes compétents à condamner cette loi.

La commission des Femmes exhorte toutes les femmes iraniennes éprises de liberté à résister à cette loi oppressive et inhumaine sous la bannière “Femme, Résistance, Liberté”.

Commission des femmes du Conseil national de la Résistance iranienne
Le 1er décembre 2024
https://wncri.org/fr/2024/12/01/la-loi-chastete-et-voile-femmes-iraniennes/

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Toutes les dix minutes, une femme dans le monde est tuée par un proche

10 décembre 2024, par news.un.org — ,
Selon un nouveau rapport de l'ONU, publié ce lundi 25 novembre, 85 000 femmes ont été tuées de manière intentionnelle en 2023 et le domicile reste « l'endroit le plus dangereux (…)

Selon un nouveau rapport de l'ONU, publié ce lundi 25 novembre, 85 000 femmes ont été tuées de manière intentionnelle en 2023 et le domicile reste « l'endroit le plus dangereux » pour elles, puisque 60 % ont été tuées par « leur conjoint ou d'autres membres de leur famille ».

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/12/03/les-femmes-forcees-de-fuir-leur-foyer-sont-confrontees-a-des-risques-accrus-de-violence-sexuelle-previent-le-hcr-et-autres-textes/?jetpack_skip_subscription_popup

Chaque jour, 140 femmes ou filles meurent sous les coups ou agissements de leur partenaire ou d'un parent proche, ce qui signifie qu'une femme/fille est tuée toutes les 10 minutes.

Plus élevé que l'estimation de 48 800 victimes de 2022, ce changement n'indique pas une augmentation réelle car il est largement dû aux différences dans la disponibilité des données au niveau des pays.

À l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, célébrée le 25 novembre, le rapport publié par ONU Femmes et l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), intitulé Féminicides en 2023, révèle que le féminicide – la forme la plus extrême de violence à l'égard des femmes et des filles – est omniprésent dans le monde.

Des meurtres qui pourraient être évités

Il s'agit d'un « niveau alarmant » de meurtres qui pourraient pourtant être « évités », et une violence « qui dépasse les frontières, touche toutes les catégories sociales et groupes d'âge », insiste le rapport de l'ONUDC et d'ONU Femmes.

« La violence à l'égard des femmes et des filles n'est pas inéluctable – elle peut être évitée ! Nous avons besoin à cette fin d'une législation solide, d'une meilleure collecte de données, d'une plus grande redevabilité gouvernementale, d'une culture de tolérance zéro et de moyens financiers accrus pour les organisations de défense des droits des femmes et les organes institutionnels compétents », a affirmé dans un communiqué, la Directrice exécutive d'ONU Femmes, Sima Bahous.

L'Afrique enregistre le nombre le plus élevé de victimes de féminicides

Sur le continent américain et en Europe (58% et 64% respectivement), les féminicides sont majoritairement perpétrées par le conjoint ou l'ex-conjoint, tandis que dans le reste du monde, ce sont des membres de la famille qui sont le plus souvent en cause.

L'Afrique continue d'enregistrer le plus grand nombre de victimes en termes globaux, bien qu'il soit conseillé d'interpréter les estimations régionales avec prudence, car elles sont sujettes à une grande incertitude en raison des limitations persistantes en termes de disponibilité des données.

Le détail du rapport montre que le nombre le plus élevé de victimes de féminicides commis par un partenaire intime ou un membre de la famille a été enregistré en Afrique en 2023, avec 21 700 victimes. Suivent l'Asie avec 18 500 victimes, les Amériques avec 8 300 victimes, l'Europe avec 2 300 victimes et de l'Océanie avec 300 victimes.

« Le nouveau rapport sur le féminicide souligne le besoin urgent d'une justice pénale solide qui condamne les auteurs responsables de tels actes, tout en assurant un soutien adéquat aux survivantes, notamment l'accès à des mécanismes de signalement sûrs et transparents », a déclaré Ghada Waly, Directrice exécutive d'ONUDC.

« Dans le même temps, nous devons nous opposer aux préjugés de genre, aux inégalités de pouvoir et aux normes néfastes qui perpétuent la violence à l'égard des femmes et les démanteler ». « ..... »

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Les femmes forcées de fuir leur foyer sont confrontées à des risques accrus de violence sexuelle, prévient le HCR

10 décembre 2024, par news.un.org — ,
Alors que la violence sexiste reste l'une des violations des droits de l'homme les plus répandues dans le monde, le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) avertit (…)

Alors que la violence sexiste reste l'une des violations des droits de l'homme les plus répandues dans le monde, le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) avertit que les risques sont accrus pour les femmes et les filles qui vivent des situations de conflit ou qui ont été forcées de fuir leur foyer.

Tiré de Entre les lignes et lesmots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/12/03/les-femmes-forcees-de-fuir-leur-foyer-sont-confrontees-a-des-risques-accrus-de-violence-sexuelle-previent-le-hcr-et-autres-textes/?jetpack_skip_subscription_popup

Selon les données de l'ONU, les rapports de violence sexuelle liée aux conflits ont augmenté de façon choquante de 50% l'année dernière par rapport à l'année précédente. Les femmes et les filles représentaient 95% des cas vérifiés.

Ces chiffres ne représentent qu'une petite fraction de la réalité, car de nombreux cas de ces abominables violations et violences affectant la santé, la dignité, la sécurité et l'autonomie des femmes et des filles ne sont pas signalés.

Dans le monde entier, plus de 60 millions de femmes et de filles déplacées de force ou apatrides sont exposées à des risques élevés de violence sexiste. Dans de nombreux endroits reculés, l'accès humanitaire est coupé ou les ressources et l'assistance sont rares. L'accès à la justice reste également limité et les survivantes craignent les représailles et la marginalisation sociale.

Les corps des femmes, une extension du « champ de bataille »

« Nos collègues continuent d'entendre des survivantes parler des horreurs auxquelles elles ont été confrontées, qu'il s'agisse de violence brutale, de torture, d'exploitation sexuelle, de violence sexuelle, y compris en tant qu'arme de guerre », a déclaré lors d'un point de presse régulier de l'ONU à Genève, Shabia Mantoo, porte-parole du HCR.

Par exemple, en République démocratique du Congo (RDC), les femmes et les filles sont confrontées à une situation insupportable, leur corps étant devenu une extension du « champ de bataille » dans un contexte de violence cyclique et d'insécurité croissante, y compris dans les sites de déplacement désignés. Selon les données humanitaires, les rapports de violence sexiste ont augmenté cette année, la majorité de ces violations étant signalées comme des viols.

Au Tchad, des femmes ont déclaré avoir été violées alors qu'elles fuyaient le conflit au Soudan voisin.

Outre les violences sexuelles liées aux conflits, les femmes et les filles déplacées de force sont également confrontées à des risques élevés de violence de la part de leur partenaire intime. Dans certains contextes de déplacement, les risques pour elles ont été estimés à 20% de plus que pour les femmes et les filles non déplacées.

En Afghanistan, les restrictions croissantes imposées aux femmes et aux filles, les taux élevés de violence domestique et la détérioration générale de la situation économique contribuent à une crise de santé mentale.

90% des femmes empruntant la route de la Méditerranée sont violées

Par ailleurs, parmi la litanie de risques et d'abus auxquels sont confrontés les réfugiés et les migrants se déplaçant sur les routes vers la Méditerranée, la violence et l'exploitation sexuelles, la réduction en esclavage et la traite des êtres humains continuent d'être signalées. Selon les estimations humanitaires, 90% des femmes et des jeunes filles qui empruntent la route de la Méditerranée sont violées.

Selon le HCR, il ne s'agit là que de quelques illustrations de cette pandémie chroniquement sous-estimée. Comme pour aggraver les choses, le HCR craint que, faute d'un financement adéquat, des millions de femmes et de filles déplacées de force ne puissent pas accéder à des services essentiels l'année prochaine.

Par exemple, pour six grands plans régionaux de réponse aux réfugiés – couvrant les besoins humanitaires des réfugiés de la RDC, de l'Afghanistan, du Soudan, de l'Ukraine, du Sud-Soudan et de la Syrie – les programmes de lutte contre la violence sexiste pour l'ensemble de l'année pour toutes les organisations participantes, d'un montant de 236 millions de dollars, ne sont actuellement financés qu'à hauteur de 28%.

https://news.un.org/fr/story/2024/11/1150996

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Déclaration collective du Mouvement féministe anti-guerre du Caucase : Contre l’autoritarisme de l’Azerbaïdjan, la COP29, le capitalisme vert, les guerres et le glissement régional vers l’autoritarisme

10 décembre 2024, par Mouvement féministe anti-guerre du Caucase — , ,
Face à l'oppression, nous élevons nos voix pour celles et ceux qui sont réduit·es au silence. Dans le sillage de celui de l'écoblanchiment, nous faisons tomber le masque de (…)

Face à l'oppression, nous élevons nos voix pour celles et ceux qui sont réduit·es au silence. Dans le sillage de celui de l'écoblanchiment, nous faisons tomber le masque de l'exploitation. Dans l'ombre de la guerre, nous demandons justice pour les peuples du Caucase : Arméniens, Azerbaïdjanais, Géorgiens, Talysh, Lezgins, Avars, Tats, Kurdes, Tchétchènes, Kabardins, Tatars, Abkhazes, Ossètes, Tcherkesses, au total plus de 50 groupes ethniques qui habitent notre patrie.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Aujourd'hui, nous sommes unies – militantes arméniennes, azerbaïdjanaises et géorgiensne, ainsi que leurs allié·es du monde entier – pour exiger la fin des systèmes d'oppression qui dévastent nos terres et nos communautés.

Nous, une coalition de militantes, nous sommes réunis pour faire entendre nos voix et délivrer plusieurs messages au monde.

Ensemble, nous déclarons

1. Stop à l'Azerbaïdjan : un hôte de la COP29 qui masque l'autoritarisme par un écoblanchiment

Le régime azerbaïdjanais a enfermé les personnes dans une prison à ciel ouvert. Ses frontières terrestres sont fermées pour quatre ans depuis 2020 sous le prétexte de la pandémie de COVID. Le régime veut avoir le contrôle total de nos corps et de nos esprits. Il emprisonne celles et ceux qui pensent différemment, il exile celles et ceux qui sont déclaré·es être d'autres ethnies et d'autres orientations politiques, il empêche celles et ceux qui sont dans le pays de partir et de trouver refuge ailleurs, il enfonce les personnes dans la pauvreté et opprime la dissidence en prenant en otage les proches des dissident·es.

Celles et ceux qui s'expriment – journalistes, activistes, féministes ou des courageux/courageuses sans étiquette de villages comme Söyüdlü et Nardaran – sont confronté·es à la brutalité policière, à l'emprisonnement et, dans certains cas, au risque de disparition sans même l'illusion d'un procès. Il ne s'agit pas seulement d'une persécution politique, mais de l'effacement systématique des voix qui osent envisager un Azerbaïdjan plus libre. Mais comme nous le voyons aujourd'hui, le régime ne parvient pas à nous faire taire, car nous faisons partie de celles et ceux qui refusent de renoncer à leur existence et continuent donc à résister.

Nous sommes ici pour nos ami·es et camarades détenu·es dans les prisons azerbaïdjanaises :
Pour Sevinj Vagifqizi
Pour Nargiz Absalamova
Pour Elnara Gasimova
Pour Bahruz Samadov
Pour Igbal Abilov
Pour Farid Mehralizada
Pour Gubad Ibadoghlu
Pour Afiyaddin Mammadov
Pour Fazil Gasimov
Pour Aykhan Israfilov
Pour Elvin Mustafayev
Pour Mahammad Kekalov
Pour Ulvi Hasanli
Pour Hafiz Babali
et les 300 autres prisonnier·es politiques.

Alors que ces prisonnier·es politiques languissent derrière les barreaux, torturé·es dans le silence, le monde regarde ailleurs. Pendant des décennies, le monde a détourné le regard et toléré un dictateur qui opprime son propre peuple. Ces puissances ont non seulement toléré un dictateur, mais elles ont rendu son règne possible en alimentant son clan avec l'argent du pétrole. Ce n'est qu'au moment où cette dictature est devenue dangereuse pour les pays voisins que certains ouvrent les yeux. Aliyev n'a pas réussi à résoudre ce conflit pendant près de 20 ans au pouvoir. Il a déclenché une guerre avec l'Arménie et à procédé à un nettoyage ethnique des Arménien·nes. Cependant, même à cette époque, nous voyons comment le profit peut rendre à nouveau indifférent·es ceux qui ont une voix.

Aujourd'hui, nous disons : C'en est fini de l'autoritarisme. L'autoritarisme ne peut pas être « blanchi ». L'hypocrisie doit cesser. Nous appelons les participant·es à la COP29 à exiger la libération des prisonnier·es politiques en Azerbaïdjan et à rejeter toute forme de complicité avec la dictature d'Aliyev. La justice environnementale doit être synonyme de liberté, et non d'oppression déguisée en durabilité.

2. Faire en sorte que notre région cesse d'être un champ de bataille pour les intérêts capitalistes et impériaux

Depuis que les premiers puits de pétrole ont été forés en Azerbaïdjan, notre région a souffert du joug des forces impériales. Aujourd'hui, la Russie et l'Occident, ainsi que des puissances régionales comme la Turquie, exploitent notre région à des fins de profit et de contrôle, aggravant les divisions au sein de notre peuple. Sous couvert d'« énergie verte », l'Occident cherche de nouveaux marchés d'extraction, tandis que la Russie et la Turquie s'accrochent à leurs ambitions impériales. Nos pays sont utilisés comme des pions, des lieux de conflit et de profit, déchirés par des intérêts extérieurs. Rien n'a vraiment changé en un siècle : la logique coloniale et impériale du « diviser pour régner » se poursuit.

Mais aujourd'hui, elle revêt un nouveau masque, celui de l'énergie « verte et durable ». Sous le nom d'énergie verte – un nouveau masque pour l'extractivisme enveloppée dans la rhétorique de la durabilité et ancrée dans le profit – les alliés du Nord visent à profiter du transit de l'énergie verte et des biens en provenance de l'Est. Mais pour les empires « intermédiaires » comme la Russie, nous ne sommes qu'un atout et une ex-colonie – la périphérie de l'Empire, qu'elle ne veut pas perdre.

Le fait d'être au carrefour des empires et du capital mondial est synonyme d'effusions de sang, de guerres et d'énormes souffrances pour nous, les peuples indigènes de ces terres. Nos élites nationales font partie du même club que les puissances coloniales et le capital et ne seront jamais de notre côté. Elles n'hésiteront jamais à nous imposer la guerre et la dévastation pour conserver leur pouvoir. C'est ce que le régime azerbaïdjanais a fait en 2020 en menant une guerre et, plus tard, en 2023, en procédant au nettoyage ethnique des Arménien·nes de leurs maisons. Soyons clairs : les plans de l'Azerbaïdjan visant à transformer le Haut-Karabakh en une soi-disant « zone verte » est un programme d'exploitation fondé sur le déplacement ethnique, l'extraction de matières premières et la monopolisation des ressources.

Aux profiteurs : la « transition verte » de notre région ne doit pas se faire aux dépens de notre peuple, ni aggraver les inégalités, ni exploiter nos ressources. Nous exigeons une transition qui soit au service des populations, et non des entreprises ou des empires mondiaux.

3. Tenir les tyrans locaux responsables

L'impérialisme nous entube, mais cela ne rend pas nos dictateurs locaux meilleurs pour autant. Ces soi-disant dirigeants n'apportent que dévastation, insécurité et pauvreté. Après plus de 20 ans de règne d'Aliyev, qui a succédé aux 30 ans de règne de son père, le peuple azerbaïdjanais n'a connu que la souffrance : absence de nourriture décente, de soins de santé, d'emplois, d'éducation et de liberté.

En Géorgie, cela fait plus d'une décennie que l'on souffre sous le règne du Rêve géorgien et d'Ivanichvili. La population a été confrontée à un système de santé défaillant, à des emplois précaires et à une économie néolibérale qui n'offre rien d'autre que la misère. Aujourd'hui, M. Ivanishvili veut supprimer la liberté d'expression et de réunion, en se cachant derrière l'excuse d'une conspiration du « Parti de la guerre mondiale », qui permet commodément à la Russie d'échapper à toute responsabilité dans sa guerre en Ukraine et dans le chaos qui règne dans notre région.

Ces aspirants monarques détiennent une part considérable de nos économies. Ivanishvili contrôle à lui seul un tiers du PIB de la Géorgie, tandis qu'Aliyev et sa famille, sans parler de ses filles, sont assis sur une somme estimée à 13 milliards de dollars, soit près de la moitié du budget national de l'Azerbaïdjan.

À nos soi-disant dirigeants, nous disons : « Le peuple mérite la dignité, pas les dictateurs.

4. Soutenir le Caucase : Non isolé, mais comme un élément essentiel de la lutte mondiale

Les pays du Caucase du Sud – l'Azerbaïdjan, l'Arménie et la Géorgie – ne sont pas isolés et dépendent fortement de la politique mondiale, mais ce n'est pas une voie à sens unique.

Aujourd'hui, le régime azerbaïdjanais est désespéré et revendique donc un pouvoir régional. Il tente d'accueillir la COP29, d'influencer les élections en Géorgie, de s'engager activement dans la politique en Turquie, d'avoir un bastion en Asie centrale, d'acheter des politiciens européens, de s'engager dans un lobbying illégal aux États-Unis et, bien sûr, de forcer l'Arménie à se soumettre politiquement après la défaite de 2020. Ce qui est le plus ignoble, c'est le rôle qu'elle joue et le soutien qu'elle apporte au génocide de Gaza en approvisionnant Israël en pétrole et en gaz. Plus de 40 000 personnes sont massacrées par le régime israélien avec le soutien du régime azerbaïdjanais, et sa compagnie pétrolière nationale – SOCAR – en est honteusement complice.

Nous ne sommes pas séparé·es de la politique mondiale, de ce qui se passe dans le reste du monde. Nous ressentons le chaos et les turbulences des relations internationales plus que les habitant·es des métropoles.

Nous, les peuples du Caucase, rejetons la cupidité, la violence et l'hypocrisie de nos élites et de leurs alliés mondiaux.

Notre appel à l'action

Nous appelons toutes les personnes, tous les mouvements et tous les dirigeants à reconnaître que le régime de l'Azerbaïdjan est l'antithèse de la justice. Unissons-nous pour dénoncer ces crimes, pour amplifier les voix de celles et ceux qui sont réduit·es au silence et pour nous réapproprier les discours sur la justice sociale. Seul un monde qui donne la priorité à la liberté et à l'égalité sur le profit, et à la résilience des communautés sur la croissance capitaliste, peut maintenir la vie sur cette planète.

À celles et ceux qui tentent de nous diviser, nous disons :

Nous ne choisirons pas entre le fascisme génocidaire et le fascisme non génocidaire.

Nous ne choisirons pas entre la Russie et l'Occident.

Nous ne choisirons pas entre la famine et une fausse liberté.

Nous ne choisirons pas entre vos valeurs traditionnelles imposées et vos valeurs « civilisées ».

Nous rejetons ces fausses dichotomies. Nous disons : La peste est dans vos deux maisons.

Notre lutte est mondiale, notre solidarité indéfectible, notre engagement inébranlable. Fini le silence. Finie la complicité.

22 novembre 2024
https://links.org.au/caucasus-feminist-anti-war-movement-against-azerbaijans-authoritarianism-cop29-green-capitalism
Publié pour la première fois – 18 novembre 2024 sur LeftEast

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Pétrole en Afrique : avec l’UE, c’est sang pour sang de profits

10 décembre 2024, par Paul Martial — ,
Cabo Delgado, situé au nord du Mozambique, est le lieu d'une guérilla djihadiste qui a débuté en 2017 lors d'une attaque de postes de police de la ville de Mocímboa da Praia. (…)

Cabo Delgado, situé au nord du Mozambique, est le lieu d'une guérilla djihadiste qui a débuté en 2017 lors d'une attaque de postes de police de la ville de Mocímboa da Praia. Ce groupe est formé de jeunes qui ont mis en cause les pratiques de l'islam des populations, la jugeant non conforme.

Tiré d'Afrique en lutte.

Le péril jeune

Cette milice baptisée Ash-Shabab, signifiant « les jeunes », a fait allégeance à l'État islamique. Au-delà de la dimension religieuse, leur propagande dénonce la corruption du gouvernement et l'appropriation des terres des villageoisEs pour piller les ressources naturelles. Aux causes religieuses et économiques de cette guérilla s'ajoutent des motivations communautaires. Au fil des ans, les djihadistes se sont renforcés grâce à l'adhésion, forcée ou non, d'une partie des populations.

Cette situation est le principal obstacle pour l'exploitation d'un des plus grands gisements de gaz. Des entreprises états­unienne (Exxon Mobil), italienne (Eni) ou française (TotalEnergies) s'y sont positionnées. Cette dernière a investi plus de 20 milliards de dollars dans l'installation d'infrastructures qui ont causé l'expulsion des populations de leurs terres.

Au service des multinationales

Le gouvernement mozambicain s'est refusé à tout dialogue ou réformes qui auraient pu désamorcer le conflit. Il a choisi la manière forte en utilisant l'armée pour régler cette affaire en vain, puis l'emploi des mercenaires de Wagner qui a tourné au désastre. Les autorités ont fait appel à la SADC, la communauté de développement de l'Afrique australe. Elle a déployé une mission militaire qui a pris fin en juillet 2024 avec un bilan mitigé. Les forces rwandaises, également présentes, ont réussi seulement à établir un cordon protecteur autour des ­installations industrielles.

L'Union européenne a participé aux financements de toutes ces interventions militaires par le biais de la FEP (Facilité européenne pour la paix) et par des missions de formation militaire dans le cadre de EUMAM-Mozambique, ­financées à hauteur de plus de 80 millions d'euros.

Financer un pays envahisseur

Les troupes rwandaises ont bénéficié également de 20 millions d'euros l'année dernière. La France et l'Italie ont insisté avec succès pour que cette aide soit reconduite en dépit de l'agression militaire du Rwanda en République démocratique du Congo. Le récent rapport d'Human Rights Watch documentant la pratique systématique de la torture dans les geôles rwandaises n'aura pas infléchi la décision. Si ce versement est assujetti à des conditionnalités pour la forme, elles ne pourront être contrôlées, si tant est que l'Union européenne en ait la volonté.

Quant à TotalEnergies, elle participe à la politique de sécurisation en versant des primes aux militaires mozambicains de la Joint Task Force, structure dédiée à la protection du site gazier. Elle s'est illustrée par des graves violations des droits humains dans l'enceinte même de la multinationale, mais peu importe pour elle, business is business.

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RDC : Une guerre de trente ans

10 décembre 2024, par Paul Martial — , ,
Le dernier rapport de l'ONG Médecins sans frontières (MSF) fait état d'une très forte augmentation des violences sexuelles au Kivu, région orientale de la RDC. Plus de 25 000 (…)

Le dernier rapport de l'ONG Médecins sans frontières (MSF) fait état d'une très forte augmentation des violences sexuelles au Kivu, région orientale de la RDC. Plus de 25 000 femmes ont été soignées, sans compter celles qui préfèrent se taire. Un chiffre qui en dit long sur le calvaire que subit la population. Des violences dont sont coupables autant les différentes milices qui pullulent que les acteurs étatiques de la région. Quant aux puissances occidentales, si la France est à l'origine de cette guerre continue, les autres restent dans un attentisme confinant à une complicité garante d'un approvisionnement en minerais indispensables aux industries de haute technologie.

Tiré d'Afrique en lutte.

En 1994, c'est un dictateur sur le déclin qui cède aux pressions des représentants de la France pour faire de la région du Kivu la base arrière de l'opération militaire Turquoise au Rwanda, présentée comme une action humanitaire.

Du génocide rwandais à la guerre du Congo

Mobutu, alors au pouvoir depuis près de trente ans au Zaïre, qui deviendra plus tard la République démocratique du Congo (RDC), ne savait certainement pas que son accord allait ouvrir non seulement la fin de son règne mais le début de trois décennies de conflits. Une guerre hélas qui se prolonge toujours devenant une des plus longues et des plus meurtrières de l'histoire moderne de l'Afrique.

Bien que soutenu par la France, le pouvoir génocidaire rwandais n'est pas parvenu à contenir l'offensive du Front patriotique rwandais (FPR) dirigé par Paul Kagame et composé en grande majorité d'exilés tutsis mais aussi d'opposants hutus. Le FPR, en conquérant le pouvoir, a mis fin à l'extermination des Tutsis, provoquant la déroute du régime rwandais. Ce dernier a entrainé la population dans sa fuite, notamment vers le Zaïre, encadrée par l'opération française Turquoise.

Cette opération militaire a permis l'exfiltration des principaux dirigeants et de nombreux acteurs du génocide. À partir des camps de réfugiés, ils ont ensuite tenté de reconquérir le pouvoir par la force avec les armes conservées lors de leur exil mais aussi par des livraisons qui ont eu lieu en RDC sans que les autorités françaises ne s'y opposent.

Alors que le Rwanda était dévasté, les nouvelles autorités ont considéré les camps de réfugiés comme des menaces graves pour la sécurité du pays. C'est à partir de ces camps que les génocidaires ont recruté des combattants pour lancer leurs attaques contre le pays dans l'objectif captieux de reconquérir le pouvoir. Ils se sont installés durablement dans la région orientale du Congo et ont créé une milice, le Front démocratique de libération du Rwanda (FDLR).

Paul Kagame a mené des opérations armées contre les camps sans faire de distinction entre civils et génocidaires, et, avec l'aide de l'Ouganda, il a provoqué la chute du régime de Mobutu considéré comme bien trop conciliant avec les membres de l'ancien régime rwandais.

L'interventionnisme rwandais et ougandais

Le Rwanda et l'Ouganda ont participé à la création d'une guérilla l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) conduite par Laurent Désiré Kabila qui au bout de quelques mois s'est emparé du pouvoir. Ce fait militaire est considéré comme la première guerre du Congo.

Une fois nommé président, Laurent Désiré Kabila a souhaité le départ de ses anciens alliés rwandais et ougandais qui espéraient influencer le gouvernement à leur profit. Leur objectif étant de transformer le Congo en une sorte de dominion permettant à la fois la sécurisation de leur frontière respective et l'exploitation des richesses du pays. Cette volonté de domination de la RDC a été la principale raison de la seconde guerre du Congo, dans laquelle seront impliqués d'autres pays et qui a vu la multiplication de milices.

Un accord de paix a été conclu, débouchant sur des élections remportées par Joseph Kabila, le fils de Laurent Désiré. Cependant, les problèmes de fond perdurent et alimentent les conflits successifs que connait le pays.

La politique rwandaise

L'apparition des FDLR a été un élément supplémentaire de crise. Cette milice s'en est pris aux populations et plus particulièrement à la communauté tutsi. Une communauté composée des Banyamulenge, une population présente au Congo depuis le 19e siècle, ainsi que des Tutsis venant du Rwanda, issus d'une immigration plus récente initiée par les colons belges. Cette communauté est régulièrement victime d'un ostracisme alimenté par des politiciens l'accusant de soutenir le Rwanda et remettant en cause la « congolité » de ses membres. Dans ce contexte s'est créé le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), une milice qui entendait protéger les Tutsis de RDC et qui sera soutenue par le Rwanda.

En parallèle de cette politique, l'exploitation des richesses congolaises a pris au fil du temps de plus en plus d'importance pour le Rwanda. Dès 1999 les troupes rwandaises et ougandaises alliées qui soutenaient l'AFDL se sont affrontées pour le contrôle des mines d'or dans la région de Kisangani, débouchant sur l'accord de Mweya. C'est cette compétition entre l'Ouganda et le Rwanda pour l'exploitation des richesses qui au fur et à mesure déterminera la politique rwandaise en RDC.

Le CNDP et le gouvernement congolais ont signé un accord de paix le 23 mars 2009. Celui-ci a donné son nom, M23, à la prochaine milice qui se crée, trois ans plus tard, pour contester l'application de l'accord. Le M23 a pris de l'ampleur et est arrivé à s'emparer de la grande capitale régionale Goma. Inquiets par la déstabilisation potentielle du pays, les occidentaux ont alors fait pression sur les autorités rwandaises en suspendant une aide de 200 millions de dollars pour qu'elles cessent leur soutien au M23. En parallèle s'est créé un bataillon offensif de la Mission de l'Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), composé de 3 000 soldats provenant d'Afrique du Sud, du Malawi et de la Tanzanie qui réussiront à vaincre cette milice en 2013.

La contre-offensive de Kagame

Alors que le M23 après sa défaite ne faisait plus parler de lui, il est réapparu en novembre 2021. Au départ, aucun élément particulier n'est à signaler. Les FDLR depuis longtemps ne représentent plus une menace pour le Rwanda, on n'enregistre pas non plus d'attaques contre la communauté banyamulenge. Le seul fait marquant est, six mois plus tôt, la signature d'un accord de construction d'infrastructure routière avec l'Ouganda sur deux axes Kasindi-Beni-Butembo et Bunagana-Goma, cette dernière route passant à quelques kilomètres de la frontière rwandaise. Cet investissement marque la volonté des autorités congolaises de développer un partenariat économique avec l'Ouganda, qui conduirait à marginaliser le Rwanda. Le M23 devient donc un élément de pression sur Kinshasa. Il mène des opérations militaires de conquête de territoires, soutenues massivement par Kigali (capitale du Rwanda) qui lui fournit des hommes et des armements lourds et sophistiqués. Il occupe une grande partie des territoires de Rutshuru, Masisi et Nyiragongo. Le M23 tente aussi de jouer une partition politique remettant en cause le pourvoir de Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo depuis 2019, avec l'intégration en tant qu'aile politique de l'Alliance Fleuve Congo (AFC) de Corneille Nangaa, ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et artisan de l'élection truquée de Tshisekedi en 2019. Cette Alliance Fleuve Congo tente de fédérer l'ensemble des oppositions au gouvernement et de se présenter comme une alternative politique.

D'une certaine manière, Kagame a deux fers au feu, s'il doit faire des concessions au niveau militaire, il pourra toujours garder une influence sur la vie politique intérieure du pays. Même si c'est de manière feutrée, Kagame évoque aussi la remise en cause de la frontière coloniale en se référant aux conquêtes du roi rwandais Rwabugiri au 19e siècle qui aurait conquis les actuels territoires de Rutshuru, de Masisi et de Walikale. Une interprétation réfutée par la plupart des historiens qui ne font état que de quelques prises de chefferies accolées au Rwanda comme celles de Jomba et de Bwisha.

L'impuissance du gouvernement congolais

Félix Tshisekedi caressait l'espoir de réitérer ce qui s'était passé avec le CNDP, une pression financière des occidentaux à l'encontre du Rwanda et une offensive militaire d'ampleur de la MONUSCO. Cette option n'est plus possible. Le Rwanda est devenu un point d'appui des politiques africaines des USA et de l'Europe, de par sa participation efficace aux missions de paix onusiennes, son rôle de sécurisation de l'installation des majors pétrolières comme TotalEnergies au Mozambique et son acceptation des migrants refoulés de Grande-Bretagne – même si ce projet a été abandonné par le nouveau gouvernement britannique. Acculés par les preuves des experts de l'ONU, les occidentaux se sont contentés d'assortir leur condamnation du Rwanda de quelques sanctions pour des officiers rwandais directement impliqués dans l'intervention en RDC. Pourtant, les pays occidentaux ont les moyens de faire cesser cette politique d'agression du Rwanda. En 2021, le pays a bénéficié de 1,25 milliard de dollars d'aide, l'équivalent des deux tiers de son budget.

Les autorités congolaises ont alors fait appel à la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC en anglais). La Force régionale de la Communauté de l'Afrique de l'Est (EACRF en anglais) débarque dans le pays en novembre 2022. Elle est composée essentiellement de troupes du Kenya, qui espère un retour économique de son investissement militaire. Cependant le Kenya n'était pas prêt à une confrontation militaire avec le Rwanda et a essayé de déployer des efforts diplomatiques. En vain. Elle a été renvoyée au bout d'un an en raison de son inaction et les autorités se sont tournées vers les pays de l'Afrique australe. Ainsi, mi-décembre 2023 a été mise en place une mission militaire composée de soldats de Tanzanie, du Malawi et d'Afrique du Sud. La South African National Defence Force étant la force principale avec un déploiement de 2 900 soldats, sans que les résultats sur le terrain soient très probants.

Au niveau national, Tshisekedi a décrété l'état d'urgence dans les zones des Kivu. Cela a impliqué le plein pouvoir des militaires, pas forcément aptes à gérer des régions, et surtout cela a débouché sur une totale impunité de leur politique arbitraire, voire violente, contre les populations. Cette mesure a permis aussi aux officiers de s'enrichir en mettant la main sur les services de douanes, d'impôts, et d'achat des services municipaux et régionaux. Un rapport de synthèse des auditions sur l'évaluation de l'état de siège établi en 2021 indique que sur la somme de 37 millions de dollars débloquée pour ces régions, 53 % ont fini dans les poches des officiers supérieurs à Kinshasa.

Les autorités congolaises sont parfaitement conscientes de l'état déplorable des Forces armées de la RDC (FARDC). Elles sont une sorte de mille-feuille composé de milices armées qui, au gré des accords de paix, ont été intégrées dans l'institution, leurs chefs ayant des statuts d'officier. La plupart n'ont eu aucune formation militaire et conservent leur fonctionnement de milices avec des lignes de commandement parallèles. À cela s'ajoute la corruption. Une partie des soldes est détournée par les officiers, tout comme l'argent pour le matériel et l'énergie. Les soldats n'hésitent pas à vendre leurs munitions et parfois leurs armes aux milices locales. Le reste des soldes est tellement dérisoire que peu de soldats sont motivés pour combattre. De plus l'essentiel des émoluments des officiers viennent des primes d'opérations, souvent données de manière discrétionnaire. Ce système favorise une relation clientéliste entre subordonnés et supérieurs hiérarchiques ainsi que la pérennisation des conflits. Le gouvernement de Tshisekedi, au lieu de tenter de régler ces problèmes endémiques, préfère organiser des procès contre les soldats qui fuient les combats avec, à la clef, des condamnations à la peine capitale, sans pour autant qu'il y ait des résultats concrets sur le terrain.

Autres mesures problématiques, l'appel aux civils dans le cadre du programme des « volontaires de défense de la patrie » et la coopération avec les différentes milices qui écument la région. Ces groupes ont trouvé une nouvelle virginité – en dépit de leurs nombreux crimes – en se baptisant Wazalendo (« les patriotes » en kiswahili). Le pouvoir leur fournit des armes et ferme les yeux sur les violations des droits humains. Si leur efficacité est variable selon les milices, elle est aussi réelle, du fait de leur connaissance du terrain et de la motivation à défendre leur terre, et cette politique renforce la fragmentation communautaire du pays. Les conséquences sont graves car les communautés sont souvent en compétition entre elles pour l'accès à la terre ou/et aux richesses minérales.

On note enfin depuis quelque temps la présence des sociétés de mercenaires, comme Agemira, enregistrée en Bulgarie et dirigée par un ancien gendarme français, ou la société roumaine Asociatia RALF.

Économie de guerre

La situation de la RDC dépend fortement de la politique extérieure des pays voisins. Ainsi, les rapports conflictuels entre le Rwanda et l'Ouganda ont des effets directs sur les conditions sécuritaires du pays. C'est ainsi que les experts de l'ONU, tout en montrant le soutien fort et actif du Rwanda au M23, ont souligné également l'aide de l'Ouganda à cette milice, conséquence directe du réchauffement des relations diplomatiques entre les deux pays. Une des questions de fond est l'absence de l'État et la corruption à grande échelle exercée par toutes les personnes dépositaires d'un pouvoir aussi minime soit-il. L'État est absent dans les zones rurales, et déliquescent et prédateur dans les villes. Les politiciens, pour la plupart, activent les ostracismes communautaires dans le but de se construire une popularité permettant d'accéder à des responsabilités politiques qui ouvrent la voie aux sources d'enrichissement. Le coût du Parlement congolais entre 2021 et 2023 s'élève à 1,1 milliard de dollars, dont un tiers de dépenses irrégulières.

Les mines deviennent l'objet de conflits sans fin entre différentes milices. Dernier exemple en date, la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO) s'est affrontée au « Groupe Zaïre » pour le contrôle du site minier de Bianda sur le territoire de Djugu, entraînant la mort de cinq personnes. Le Groupe Zaïre, en représailles, a assailli le village de Gbata, entrainant d'autres attaques de la CODECO qui s'est emparée du site minier de Mambeu, avec 21 morts. Ce type de confrontations violentes a lieu sur l'ensemble des territoires de l'est de la RDC.

Ainsi se développe une véritable économie de guerre basée sur les exploitations minières dites des trois T : la cassitérite pour produire l'étain, la wolframite pour le tungstène et le coltan pour le tantale. L'extraction de ce minerai se fait dans des conditions indignes où les populations, y compris les enfants, sont astreintes à un travail forcé sous la menace de milices armées et parfois même des FARDC. Le système de traçabilité certifiant que ces minéraux ne sont pas produits par le travail des enfants et ne financent pas les milices, est, de l'avis de tous, totalement défaillant et a souvent joué contre les intérêts des populations.

Cette exploitation participe à l'enrichissement des élites du Rwanda qui l'exporte vers les principales industries de haute technologie bénéficiant du soutien de l'Union européenne (UE) qui déclare « le pays est un acteur majeur au niveau mondial dans le secteur de l'extraction de tantale. Il produit également de l'étain, du tungstène, de l'or et du niobium, et dispose de réserves de lithium et de terre rares ». Et l'UE rajoute que ce protocole « contribuera à assurer un approvisionnement durable en matières premières », en particulier en matières premières critiques, « ce qui est une condition préalable essentielle à la réalisation des objectifs en matière d'énergie verte et propre ». Seul problème, le Rwanda ne produit aucun de ces minerais, et ceux qu'il fournit sont issus du pillage de la RDC.

Les milices, lorsqu'elles ne contrôlent pas des mines, vivent sur le racket des populations avec l'instauration de checkpoints installés dans les différents lieux de passage. Une autre activité fort lucrative, notamment dans le parc national des Virunga, est le commerce du charbon de bois, qui peut rapporter près de 60 000 dollars par jour aux différents groupes armés mais détruit un site caractérisé par une biodiversité exceptionnelle. D'autres sources de financement sont mobilisées comme le braconnage pour la vente de l'ivoire et la vente de viande de brousse 1 ou les activités de pêche illicite.

Une diplomatie dans l'impasse

Dans cette guerre aux multiples acteurs, l'impunité règne et ne fait que favoriser les violences contre les civils. D'autant que les armements des deux camps deviennent plus lourds avec l'utilisation de l'artillerie mais aussi de l'aviation et des drones. C'est ainsi que le M23 n'hésite pas à bombarder des camps de réfugié·es.

On compte plus de sept millions de personnes déplacées à cause des violences. Les populations n'ont comme seul choix que de quitter leur village pour rejoindre les camps de réfugié·es surpeuplés autour des grandes villes, considérées comme plus sûres.

Pour tenter de dénouer cette situation, une politique diplomatique s'est mise en place autour deux initiatives de paix, celle de Nairobi et d'Angola. La première est dédiée aux réunions entre milices armées et gouvernement congolais, la seconde se concentre sur des solutions régionales. Les autorités de la RDC refusent que le M23 soit présent dans les discussions de Nairobi, arguant qu'il ne s'agit pas d'une milice congolaise mais d'une émanation de l'armée rwandaise. Ceci étant dit, les liens entre les deux pays ne sont pas totalement rompus, des réunions entre hauts dignitaires des deux régimes continuent sous la houlette de João Lourenço, le présidant angolais. Ce dernier a annoncé, en marge de la 79e session de l'Assemblée générale de l'ONU du mois de septembre 2024, une proposition d'accord de paix entre les deux pays qui s'articulerait autour de deux axes, le retrait des troupes rwandaises et la neutralisation des FDLR. Reste un point en suspens, l'exigence de l'Alliance Fleuve Congo d'une négociation directe avec le gouvernement congolais qui s'y refuse catégoriquement. Dernièrement les FARDC ont commencé à s'attaquer aux FDLR, une façon pour le pouvoir congolais de montrer sa volonté de trouver une issue diplomatique au conflit.

Un gouvernement répressif

Le rétablissement de la peine de mort en RDC, utilisée contre les déserteurs mais aussi contre les dirigeants de l'Alliance Fleuve Congo, s'inscrit dans une politique volontaire de restrictions de la vie publique. Preuve en est l'augmentation des attaques contre le droit de réunion et de manifestation, les limites aux libertés d'expression et de la presse ou sur les réseaux sociaux avec l'adoption du nouveau code numérique, tout comme les harcèlements et les enlèvements des militants de l'ONG la LUCHA, voire les assassinats des opposants politiques comme pour Chérubin Okende, porte-parole du parti Ensemble pour la République de Moïse Katumbi. Fin août 2023, la garde présidentielle a tiré à bout portant sur les membres d'un groupe mystico-religieux, « Foi naturelle judaïque et messianique vers les nations » qui manifestaient pacifiquement contre la présence de la MONUSCO, tuant au moins 57 personnes.

Pour réprimer les oppositions, les autorités ont à leur main des structures comme l'Agence nationale de renseignements (ANR), la Détection militaire des activités anti-patrie (DEMIAP) ou le Conseil national de sécurité qui possèdent chacun des prisons secrètes où les tortures sont fréquentes.

Tshisekedi, au-delà de ces déclarations, n'a nullement rompu avec la gouvernance des pouvoirs antérieurs, que ce soit sur les fraudes électorales, la corruption ou les politiques de division ethnique. Certes, le président rwandais Paul Kagame a une lourde responsabilité dans la détérioration du tissu social. Les premières victimes sont les membres de la communauté tutsie de RDC, qu'ils et elles soient Banyamulenge ou issu·es des immigrations de l'époque coloniale. Mais cette dégradation de la capacité du vivre ensemble est accentuée par la politique des autorités congolaises qui favorisent les Wazalendo, leur offrant une impunité pour leurs crimes passés et obère ainsi le futur du pays en encourageant ces milices armées, véritable terreur pour les populations.

Le 7 octobre 2024

Notes

1- La viande de brousse est un terme collectif désignant la viande provenant de mammifères, de reptiles, d'amphibiens et d'oiseaux sauvages vivant dans la jungle, la savane ou les zones humides.

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Soudan, 930 000 réfugiés dans l’est du Tchad

10 décembre 2024, par MondAfrique — , ,
Depuis le mois d'avril 2023, les Forces armées soudanaises (FAS), dirigées par le général Abdel Fattah al-Burhan, sont engagées dans une lutte de pouvoir avec les Forces de (…)

Depuis le mois d'avril 2023, les Forces armées soudanaises (FAS), dirigées par le général Abdel Fattah al-Burhan, sont engagées dans une lutte de pouvoir avec les Forces de soutien rapide (FSR), contrôlées par son ancien adjoint, Mohamed Hamdan « Hemedti » Dagalo. (1)

Tiré de MondAfrique.

Les FSR sont une force paramilitaire qui trouve son origine au Darfour, une vaste région de l'ouest du Soudan dont une partie jouxte le Tchad. A partir de 2003, l'ancien président du Soudan, Omar el-Béchir, a mobilisé des milices majoritairement arabes pour réprimer des mouvements rebelles issus des communautés non arabes du Darfour, qui accusaient le pouvoir central de les opprimer. Hemedti faisait partie du commandement des Janjawids, l'une des milices progouvernementales les plus puissantes. Dix ans plus tard, le régime de Khartoum a formalisé l'intégration de ces milices dans son appareil sécuritaire en créant les FSR. Après avoir joué un rôle important dans la chute du président el-Béchir en 2019, ces forces paramilitaires ont, en octobre 2021, participé avec l'armée régulière à un coup d'Etat contre le gouvernement de transition mixte, dirigé par des civils et des militaires.

Les négociations visant à fusionner les deux forces ont exacerbé les tensions entre Burhan et Hemedti, ce qui a conduit à un conflit violent en avril 2023. Les combats ont dévasté plusieurs régions et mené le Soudan à l'effondrement.

Depuis dix huit mois, l'est du Tchad a accueilli plus de 930 000 personnes fuyant la guerre au Soudan voisin. Le conflit soudanais s'intensifiant, ce chiffre risque encore de s'accroître alors que l'aide humanitaire ne suffit déjà pas à satisfaire les besoins des réfugiés et des populations hôtes.

Les populations de l'est du Tchad, notamment celles du Ouaddaï, où se concentre la majorité des réfugiés, faisaient déjà face à une extrême pauvreté et à des divisions entre communautés arabes et non arabes. L'accroissement soudain de la population et l'importation des fractures communautaires soudanaises risquent de déstabiliser la région.

Une enquète de Crisis Group

Fuyant la guerre qui ravage le Soudan voisin, plus de 930 000 personnes ont trouvé refuge dans l'est du Tchad depuis avril 2023. La majorité s'est installée dans la province du Ouaddaï, qui souffrait déjà d'un taux élevé de pauvreté, d'une pénurie de services de base et de tensions communautaires, notamment entre groupes arabes et non arabes. L'arrivée d'un nombre de personnes supérieur à la moitié de la population totale de la province a amplifié ces vulnérabilités. Les rixes entre bénéficiaires d'une aide humanitaire insuffisante, ainsi qu'entre réfugiés et populations locales autour de l'accès aux ressources, sont désormais courantes, tandis que les tensions interethniques s'accentuent. Alors que le conflit soudanais s'intensifie, une hausse du nombre de réfugiés dans les mois à venir risque d'aggraver ces problèmes. Pour éviter ce scénario, le gouvernement tchadien devrait, avec l'appui de ses partenaires internationaux, travailler à réduire les tensions à travers un soutien économique d'urgence et des actions de sensibilisation visant à prévenir de nouveaux épisodes de violences communautaires.

La guerre au Soudan a éclaté en avril 2023, poussant vers l'exode près de vingt pour cent des quelques 50 millions d'habitants de ce pays d'Afrique du Nord-Est. Plus de huit millions de personnes se sont déplacées à l'intérieur du Soudan, tandis que trois millions ont fui à l'étranger, principalement en Egypte, au Tchad et au Soudan du Sud. Les Soudanais qui ont trouvé refuge à l'est du Tchad proviennent principalement de l'Etat du Darfour occidental, dont la capitale, Al‑Geneina, a été le théâtre en 2023 de graves exactions contre les populations non arabes, et de celui du Darfour septentrional. De nombreux Tchadiens installés au Darfour, pour des raisons familiales ou économiques, ont aussi été contraints de regagner leur pays.

La province du Ouaddai, épicentre de la crise

Les autorités de N'Djamena ont permis le déploiement rapide de l'aide humanitaire, tout en contrôlant la frontière pour empêcher l'entrée d'armes sur leur territoire. La province du Ouaddaï, frontalière du Darfour, est devenue l'épicentre de la crise : cette région semi-aride d'environ un million d'habitants, où les conditions de vie étaient déjà très précaires avant-guerre, accueille plus de 70 pour cent des personnes arrivées au Tchad pour fuir le conflit soudanais. Malgré les contraintes logistiques et sécuritaires, les agences onusiennes et les ONG internationales ont rapidement mis en place une assistance d'urgence à la frontière.

Mais cette aide ne suffit pas à satisfaire les besoins des nouveaux venus, dont la plupart sont logés dans des camps, d'autant que l'arrêt des importations depuis le Soudan entraîne une forte inflation des prix de la nourriture et que la pression démographique durcit la compétition pour l'accès à l'emploi et au logement. Au chômage et sans perspectives d'avenir, des centaines de jeunes Tchadiens rejoignent des groupes armés au Soudan dans l'espoir de s'enrichir. Les réfugiés, quant à eux, importent fréquemment au Tchad leurs griefs identitaires, en particulier à l'encontre des communautés arabes, qu'ils accusent des massacres à l'origine de leur exode. Ces ressentiments se superposent et renforcent les fractures communautaires déjà présentes dans une région qui a connu, lors de la guerre au Darfour dans les années 2000, une autre crise majeure de réfugiés.

Plusieurs facteurs risquent d'accroître la fréquence et la gravité des violences qui touchent le Ouaddaï. Alors que les combats dans la région du Darfour s'intensifient, le nombre de personnes cherchant refuge au Tchad devrait continuer à augmenter, ce qui risque d'accentuer les tensions au sein des populations locales et nouvellement arrivées sur le partage de l'aide humanitaire et l'accès aux opportunités économiques. Cette situation pourrait entraîner une augmentation des agressions à l'encontre des réfugiés, accusés par certains membres de la population hôte de faire monter les prix et de s'accaparer les ressources essentielles, notamment l'eau et le bois.

La protection contre les violences basées sur le genre est l'un des grands défis de cette crise. Les femmes et les enfants, qui constituent la majorité des nouveaux arrivants, sont en effet souvent chargés d'aller repérer ces ressources à l'extérieur des camps, et sont donc les plus exposés à ces attaques. La détérioration de la situation socioéconomique pourrait également pousser plus de jeunes hommes Tchadiens à s'enrôler dans le conflit soudanais, creusant encore davantage les fractures communautaires.

Alors que les ingérences régionales dans le conflit soudanais se multiplient et qu'un règlement négocié de la crise semble peu probable, les autorités tchadiennes, avec l'appui de leurs partenaires internationaux, devraient prendre des mesures urgentes pour limiter ces tensions. Les bailleurs de fonds devraient honorer leurs promesses de dons pour pallier les carences d'une réponse humanitaire que les Nations unies estiment sous financée. Avec davantage de fonds, les ONG et agences onusiennes pourraient cibler les principaux points de tension, en particulier l'accès à l'eau et au bois de chauffe.

Le gouvernement tchadien devrait, quant à lui, apporter un soutien économique direct pour soulager les habitants du Ouaddaï, tout en planifiant, à moyen terme, la construction d'infrastructures, notamment de routes et de systèmes d'adduction d'eau. Les autorités devraient également travailler à réduire le sentiment anti-arabe, qui a été fortement exacerbé par la guerre au Soudan. A cette fin, des messages forts de solidarité et de cohésion sociale provenant de N'Djamena, y compris via des visites du président Mahamat Déby Itno dans la région, seraient particulièrement utiles. Ils devraient être coordonnés avec l'action de réconciliation menée sur le terrain par les comités mixtes composés d'autorités locales, de chefs coutumiers et de représentants des nouveaux arrivants. Enfin, en profitant des liens familiaux et communautaires transfrontaliers, les autorités tchadiennes pourraient assumer un rôle de médiation locale entre les parties au conflit au Darfour.

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