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RDC : En pleine guerre, le ROJECF rassemble les jeunes pour protéger l’environnement

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Entrevue avec Ladislas Witanene, coordonnateur du ROJECF, réalisée par Marie-Ève Godin, participante au Parcours d’éducation à la citoyenneté de Katalizo et correspondante stagiaire au Journal des Alternatives Le Réseau des organisations des jeunes engagés dans le changement climatique, (…)

« Palestine : une histoire qui n’a pas commencé le 7 octobre 2023 »

27 avril, par Coalition Québec Urgence Palestine — , , , ,
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10 avril 2025
Troisième d'une série de cinq soirées d'information sur les racines du génocide à Gaza, sous le thème « Palestine : une histoire qui n'a pas commencé le 7 octobre 2023 », organisées par la Coalition du Québec URGENCE Palestine.

THÈMES ABORDÉS : La Palestine et le Proche-Orient dans la tourmente des rapports entre grandes puissances au 20e siècle. Les enjeux régionaux et les magouilles de l'impérialisme britannique dans l'entre-deux-guerres. Le malaise européen vis-à-vis de la Shoah et le déplacement de la question juive. La guerre froide : soutien soviétique aux pays arabes et soutien occidental à Israël ; les enjeux du canal de Suez. Évolution de la politique des USA. La politique ambigüe des États arabes voisins. L'instrumentalisation de la Shoah. L'impunité israélienne. Les enjeux géopolitiques actuels.

00:00 Mot de bienvenue par Diane Lamoureux, professeure émérite de science politique à l'Université Laval et militante de la Coalition du Québec URGENCE Palestine.

06:45 Jean-Michel Landry, professeur d'anthropologie et de sociologie à l'Université Carleton et chercheur affilié à l'Institut français du Proche-Orient.

40:08 Lecture de Paul Ahmarani, acteur.
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Site web de la Coalition : https://urgencepalestine.quebec

Quelques repères analytiques pour cerner la personnalité de certainEs dirigeantEs politiques

27 avril, par Guylain Bernier, Yvan Perrier — ,
Qui est fait pour gouverner ? Quelles qualités doit avoir une personne aspirant à diriger ? Ce genre de questionnement, tout à fait légitime, sous-entend son contraire. Parce (…)

Qui est fait pour gouverner ? Quelles qualités doit avoir une personne aspirant à diriger ? Ce genre de questionnement, tout à fait légitime, sous-entend son contraire. Parce qu'il serait tout autant nécessaire de se demander : qui n'est pas fait pour gouverner ? Et quels défauts ou limites viendraient miner les aspirations d'une personne à vouloir diriger ? Nous le savons, les dirigeantEs politiques ont parfois un « ego » surdimensionné, comme si ce trait distinctif était utile, quoique l'idéal demeure, selon un point de vue largement partagé, de subordonner cet ego de façon à veiller au mieux-être collectif. Évidemment, l'exercice présent exposera notre choix intéressé à la seconde série de questionnements. Car feindre des qualités est devenu soudainement aisé, en manipulant les discours et l'image de manière à mieux plaire, voire à mieux flatter l'opinion publique qui détient le pouvoir de faire élire des représentantEs. Mais au-delà de cacher l'« ego surdimensionné », du moins pour le temps nécessaire à atteindre le pouvoir, ou encore de l'afficher ouvertement comme étant une qualité recherchée chez la personne méritant de gouverner, s'ajoutent d'autres types entrant dans les troubles de la personnalité, tels que la « personnalité histrionique » et la « personnalité narcissique ». Derrière ces notions se trouve une unité sémantique d'apparition récente, pour laquelle l'Office québécois de la langue française a reconnu la pertinence. Nous y reviendrons d'ailleurs à la fin. Mais d'abord quelques lignes au sujet des personnalités « histrionique » et « narcissique ».

Du côté du DSM-5-TR

Dans l'édition de 2013 du volumineux DSM-5-TR[1], il est précisé que la « personnalité histrionique » affecte une personne qui a manifestement besoin de beaucoup d'attention (« quête d'attention ») et doit présenter alors « au moins cinq des manifestations suivantes » :

1. Le sujet est mal à l'aise dans les situations où il n'est pas au centre de l'attention d'autrui.
2. L'interaction avec autrui est souvent caractérisée par un comportement de séduction sexuelle inadaptée ou une attitude provocante.
3. Expression émotionnelle superficielle et rapidement changeante (ce qui donne l'impression d'une personnalité superficielle).
4. Utilise régulièrement son aspect physique pour attirer l'attention sur soi.
5. Manière de parler trop subjective mais pauvre en détails (p. ex. la personne est extrêmement vague et manque trop souvent de détails dans ses accusations à l'emporte-pièce).
6. Dramatisation, théâtralisme et exagération de l'expression émotionnelle.
7. Suggestibilité, est facilement influencé par autrui ou par les circonstances.
8. Considère que ses relations sont plus intimes qu'elles ne le sont en réalité
(pp. 956-957).

Pour ce qui est maintenant de la personne qui souffre d'un trouble de la personnalité apparenté à la « personnalité narcissique », les symptômes correspondants sont minimalement les suivants : un schéma persistant de grandiosité, un grand besoin d'admiration et un manque prononcé d'empathie. Ce modèle implique la présence de cinq ou plus des éléments suivants :

1. Le sujet a un sens grandiose de sa propre importance (p. ex. surestime ses réalisations et ses capacités, s'attend à être reconnu comme supérieur sans avoir accompli quelque chose en rapport — voir à ce sujet : mégalomanie).
2. Est absorbé par des fantaisies de succès illimité, de pouvoir, de splendeur, de beauté ou d'amour idéal.
3. Pense être « spécial » et unique et ne pouvoir être admis ou compris que par des institutions ou des gens spéciaux et de haut niveau.
4. Besoin excessif d'être admiré.
5. Pense que tout lui est dû : s'attend sans raison à bénéficier d'un traitement particulier favorable et à ce que ses désirs soient automatiquement satisfaits.
6. Exploite l'autre dans les relations interpersonnelles : utilise autrui pour parvenir à ses propres fins.
7. Manque d'empathie : n'est pas disposé à reconnaître ou à partager les sentiments et les besoins d'autrui.
8. Envie souvent les autres, et croit que les autres l'envie.
9. Fait preuve d'attitudes et de comportements arrogants et hautains
(p. 960).

Chose certaine, ces troubles de la personnalité marquent une distinction importante avec l'idéal recherché chez la personne qui souhaite diriger une nation — pour ne nommer que quelques qualités espérées, tels que l'abnégation, la tempérance, la prudence, la bienveillance, la franchise, l'attitude proactive, etc. La difficulté perçue ici avec les personnalités histrionique et narcissique revient au fait que les personnes les incarnant cherchent à se mettre au-dessus des aspirations collectives, voire même à faire des leurs une réclame absolue, universelle. Par ailleurs, l'obtention du pouvoir et de l'autorité contribue à amplifier ces troubles, alors que les mécanismes de contrainte à la citoyenne ou au citoyen ordinaire semblent disparaître aux yeux de celles-ci. Autrement dit, tout devient possible pour ces personnes et toute entrave doit être écartée de leur chemin. Dès lors s'élèvent des étiquettes bien connues, telles que despote, dictateur, tyran, absolutiste et ainsi de suite. Mais est-ce dire que tous les personnages qualifiés de la sorte porteraient se même trait, voire ces mêmes troubles ? Sans tomber dans la généralisation hâtive, le réflexe revient effectivement à leur trouver des ressemblances : la primauté de leur personne sur celle des autres, l'aptitude à devenir cruel, l'ambition souvent exagérée, le besoin de faire l'histoire… Mais s'agit-il nécessairement d'une quête d'attention ? de volte-face inexplicables ? de pertes de contrôle émotionnelles ? Même si la tendance aux typologies peut être utile à classer des troubles de la personnalité ou toute autre déviance du genre, il reste que chaque cas reste unique. De là se comprennent les listes servant à condenser une certaine exhaustivité, dans le but de rapporter divers cas au type décrit. Malgré tout, un bémol demeure sur cette façon de faire, dans la mesure où il est impossible de tout décrire. Sur le plan politique et de la société dans son ensemble, les actions posées sont celles qui donnent le plus de couleur au type de personne qui dirige. Et à partir de cette couleur, il devient alors possible de porter un jugement sur les bienfaits ou les torts affectant le bien-être général. Cela revient non seulement aux attributs recherchés chez la personne souhaitant diriger, mais surtout à ses actes envers la population qui l'a choisie. Autrement dit, on revient au droit des citoyenNEs de destituer une personne d'État pour ses décisions aux effets néfastes pour la société, comme le disaient les Locke, Montesquieu et Rousseau de ce monde. La difficulté revient toutefois à clarifier ce qui est bon et bien pour celle-ci, en raison des diverses formes d'aspirations prêchées par une pluralité de groupes. Le despote parlera au nom de la liberté, en créant un climat de peur et d'instabilité, comme Robespierre, tombé dans la paranoïa, qui a fait guillotiner des gens soi-disant opposantEs à la République de la Révolution ; pour lui, la démocratie était terreur et vertu. Ainsi, à ce qui a été souligné précédemment au sujet des troubles de la personnalité, mérite d'être jointe une conception du bien et du mal ; rappelons d'ailleurs en plus des propos de Hannah Arendt (2009) sur la transformation de la morale allemande chez les nazis, prétendant à faire d'un mal un bien. Cette base devient essentielle pour statuer sur la capacité d'une personne à diriger.

« Ultracrépidarien[2] »

Nous avons cru remarquer, tout au long de notre existence consciente, qu'il y a de nombreuses et de nombreux politicienNEs qui donnent leur avis sur de nombreux sujets. Or, selon l'Office québécois de la langue française (2025, s.p.), une « [p]ersonne qui agit comme si elle était spécialiste d'un domaine, ou d'un sujet, qu'elle ne maîtrise pas » correspond à une « ultracrépidarienne » ou un « ultracrépidarien ». Évidemment, une dirigeante ou un dirigeant d'État ne possède pas toutes les connaissances pour s'immiscer dans une discussion qui porte sur des thèmes « spécialistes », soit en médecine, soit en ingénierie, soit en science en général. De là, l'importance de savoir s'entourer et d'écouter l'expertise des autres. L'humilité devient alors une qualité nécessaire, car il n'y a aucun mal à reconnaître notre incapacité à traiter d'un sujet précis ; bref, la force de l'humilité revient à savoir s'unir. On revient ici à la discussion de Socrate avec Alcibiade (Platon, 2000), dans laquelle le dernier devait d'abord reconnaître ses propres compétences, mais aussi ses faiblesses, avant d'entreprendre le saut en politique. Reconnaître son ignorance représente la première étape pour devenir meilleur. D'ailleurs, les personnes qui aspirent à gouverner ont-elles réellement les compétences et les qualités pour y parvenir ? Cette question ne se pose pas seulement par les électrices et les électeurs, mais par ces personnes elles-mêmes. Il faut savoir donc éduquer celle ou celui qui veut diriger, leur apprendre en quelque sorte l'art de gouverner. CertainEs attesteront d'une qualité innée chez des gens à être leader, n'étant donc pas le cas de tout le monde. Cela est vrai. Mais une autre interrogation s'impose à savoir : savons-nous vraiment les repérer correctement ? La première ou le premier venuE qui ose s'afficher publiquement, prêchant un changement souhaitable, prenant appui sur des assises discutées par la population fatiguée d'une certaine situation, se proposant volontaire pour améliorer les choses, se disant alors compétentE dans le domaine, qu'elle doit être alors notre première réaction ? Il n'y a aucun mal à suspecter la supercherie, à se questionner sur ses véritables intentions et à exiger des preuves. Mais doit-on se verser dans une démocratie de contrôle ? Doit-on réguler de la sorte toutes nos représentantes et nos représentants ? Déjà il est difficile de recruter et souvent les candidatEs ne sont pas nécessairement les plus qualifiéEs. Et si ce soin est appliqué par les partis politiques, des cas nous montrent des ratés. Or, la question finalement posée concerne surtout la personne qui est nommée au titre suprême, soit de présidentE, soit de premier.IÈRE ministre, susceptible de détourner le pouvoir démocratique à des fins personnelles. À ce titre, il est question de réguler les chefs de parti, en songeant aux régimes semblables au nôtre. Déjà, le portrait s'agrandit. Il faut comprendre aussi qu'une ligne de parti existe et qu'une cheffe ou un chef doit l'incarner. De la sorte, cela nous ramène pratiquement au point de départ, alors qu'il faudrait peut-être contrôler les effectifs de chaque parti, pour garantir le respect du bien commun pour toutes et tous, en raison d'écarts de nature idéologique susceptibles de causer des torts. Pouvons-nous vraiment obtenir cette garantie ? S'ajoute en plus la façon de procéder : qui mettra en place la structure requise ? sera-t-elle convenable ? comment fonctionnera-t-elle ? qu'est-ce qui doit être prioritaire, afin de séparer les bonnes des mauvaises personnes aspirant au pouvoir ? enfin, que deviendra la démocratie face à ce système d'exclusion risquant d'être imparfait ? Voilà que nous tournons en rond. Au final, nous renouons avec une perspective posée plus tôt : juger en fonction des décisions et des gestes entrepris par les dirigeantEs. Cela impliquerait un droit pour les citoyenNEs d'agir en dehors du vote aux périodes électorales.

Conclusion

Sur ce fondement tiré de la psychologie, il appartient aux spécialistes du domaine de diagnostiquer les dirigeantEs qui ont exercé le pouvoir ou qui sont en ce moment en position de commandement de leur État-nation ; il appartient à ces spécialistes de nous dire de quoi certaines ou certains parmi les dirigeantEs politiques souffrent. Est-ce dire que nous leur accordons de facto une nouvelle responsabilité ou un devoir socio-politique ? Peut-être. Reste qu'un état psychologique chez une personne est susceptible de changer au cours du temps, en fonction de toutes sortes de variables à la fois environnementales, personnelles, biologiques et passons les autres. Il n'empêche que, de notre côté, nous n'hésiterons pas à dire au sujet d'une personne qui donne son avis, comme s'il s'agissait d'un avis professionnel sur un domaine ou un sujet qu'elle ne maîtrise pas, qu'il s'agit bel et bien d'unE ultracrépidarienNE. Oser le faire, c'est aussi revendiquer un droit à l'humilité chez ces personnes, dont celles qui s'y opposeront révèleront peut-être alors leur côté histrionique ou narcissique.

Guylain Bernier
Yvan Perrier
26 avril 2025
17h30

Références

Arendt, Hannah. 2009. Responsabilité et jugement. Paris : Payot & Rivages, 362 p.

Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, et des troubles psychiatriques. 2013. Arlington, VA : Association américaine de psychiatrie, 1 216 p.

Ultracrépidarien. 2025. In Office québécois de la Langue française.
https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/fiche-gdt/fiche/26577164/ultracrepidarien. Consulté le 25 avril 2025.

Platon. 2000. Alcibiade. Paris : Granier-Flammarion, 245 p.

Notes

[1] Le DSM-5 est la cinquième et plus récente édition, publiée en 2013, du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, et des troubles psychiatriques (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) de l'Association américaine de psychiatrie (APA : American Psychiatric Association).

[2] Voir https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/fiche-gdt/fiche/26577164/ultracrepidarien.

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Alors que le Nord-Ouest de l'Ontario est envisagé pour accueillir les futurs déchets nucléaires du Canada, des groupes locaux et des Premières Nations ont formé We the Nuclear Free North (WTNFN) pour s'opposer au transport, à l'enfouissement et à l'abandon de déchets radioactifs dans leurs bassins versants. À Bâbord ! a rencontré l'une de leurs membres, Brennain Lloyd. Propos recueillis par Louise Nachet.

The english version of this article is available here.

À Bâbord ! : Pourquoi et comment cette coalition s'est-elle formée ?

Brennain Lloyd : À l'automne 2020, il y a eu une conversation entre des personnes qui s'organisaient nouvellement autour de la gestion des déchets nucléaires avec des organisations qui travaillaient dessus depuis longtemps, comme Northwatch, Environment North ou Citizens United for a Sustainable Planet. Nous leur avons tendu la main, avons organisé une réunion, et ceux qui étaient intéressés ont fondé WTNFN.

Au cours des dernières années, l'accent a été mis sur le nord-ouest de l'Ontario en matière de transport et d'enfouissement. Mais au départ, la Société de gestion des déchets nucléaires (SGDN) a enquêté dans 13 zones différentes. Mais en 2020, ils n'ont présélectionné qu'un site dans le nord-ouest et le sud-ouest de l'Ontario. On parle donc du Nord-Ouest de l'Ontario, parce que c'est là que se trouve le site. Mais les impacts dû au transport seront plus importants dans le nord-est.

ÀB ! : Pourriez-vous décrire la relation du Nord-Ouest de l'Ontario avec les déchets et la pollution ?

B.L : En vertu de la loi provinciale, les normes environnementales sont différentes pour le Nord et le Sud de l'Ontario. Le gouvernement utilise la rivière des Français comme ligne de démarcation. Il y a quelques années, il y a eu une amélioration de la réglementation sur la qualité de l'air. Cameco est une entreprise d'uranium qui exploite une mine en Saskatchewan et possède une raffinerie à Blind River (dans le nord) et une usine de conversion et de fabrication de combustible à Port Hope (dans le sud). Plutôt que de se conformer à ces nouvelles normes, Cameco a fermé son incinérateur à Port Hope et a commencé à envoyer ses déchets par camion à Blind River. C'est un exemple de la façon dont le Nord de l'Ontario porte le double fardeau. Nous avons des normes moins strictes, donc nous sommes moins protégés par la loi et les entreprises du Sud de l'Ontario envoient leurs déchets dans notre région.

Nous avons aussi un long historique d'entreprises à la recherche de sites d'élimination de déchets dans la région pour les BPC, les déchets médicaux, les déchets radioactifs de faible et de haute activité. Pour les déchets solides (c'est-à-dire les ordures ménagères, commerciales et industrielles), nous avons lutté pendant 14 ans contre les déversements de la ville de Toronto dans un site du district de Temiskaming. Concernant les déchets radioactifs, cela a commencé dans les années 1970 lorsque Énergie atomique du Canada Ltd a effectué sa première recherche d'un site pour l'enfouissement de tous les déchets de haute activité du Canada. Jusque dans les années 1990, l'hypothèse était qu'ils iraient au nord de l'Ontario. Nous étions dépeints comme étant un endroit isolé et sauvage, comme si cela nous rendait disponibles pour un tel traitement. Il y avait aussi un processus distinct pour le déversement des déchets de faible activité qui était géré à Port Hope et à Port Granby dans le Nord de l'Ontario. 19 communautés ont fait l'objet d'une enquête, et à la fin, toutes l'ont rejetée.

Puis la SGDN est créée en 2002, et le même exercice a recommencé. En 2010, ils ont lancé la recherche de site. Pour solliciter de l'intérêt, la SGDN s'est rendue à des conférences municipales et à des conférences sur le développement économique pour les municipalités du Nord de l'Ontario. « Êtes-vous intéressé de savoir comment votre communauté pourrait bénéficier d'un projet d'infrastructure national de 16 à 24 milliards de dollars ? ». Ils n'ont pas souligné qu'il était question de 50 ans de déchets nucléaires piégés et enterrés dans votre communauté, mortels à perpétuité. 13 collectivités du Nord de l'Ontario ont dit qu'elles aimeraient en savoir plus. Il s'agissait, presque sans exception, de communautés en difficulté économique. L'usine ou la mine avait cessé ses activités et elles avaient beaucoup de mal à payer leurs factures. Le Nord de l'Ontario a donc été entraîné dans ce dernier cycle en raison des disparités économiques et des difficultés que connaissent ces villes « boom-and-bust », ce qui n'est pas différent de certaines villes du Québec et du Nouveau-Brunswick.

ÀB ! : Quels sont les principaux enjeux concernant les peuples autochtones et la SGDN ?

B.L : Nous avons beaucoup d'autochtones qui participent à l'alliance et qui la dirigent, mais nous ne parlons pas en leur nom, ils parlent pour eux-mêmes et pour leurs communautés.

Le 28 novembre, la SGDN a annoncé qu'elle avait choisi un site de dépôt géologique en profondeur entre Ignace et Dryden, en plein cœur du territoire du Traité no 3. Il y a quelques tensions parce que la Nation ojibwée de Wabigoon Lake (WLON) est la communauté située immédiatement en aval du site et la plus proche du site. Et c'est cette Première Nation que la SGDN considère être la communauté d'accueil et sur laquelle elle se concentre. Mais il y a beaucoup d'autres Premières Nations qui ont aussi des activités traditionnelles sur le territoire, et leurs droits issus de traités doivent donc être également respectés. Bien que la SGDN ait approché un grand nombre d'entre elles et qu'elle leur ait fourni un peu de financement afin qu'elles puissent en apprendre davantage sur le projet et le commenter, aucune d'entre elles n'a exprimé d'appui au projet, y compris WLON. Depuis plus de 10 ans, la SGDN dit qu'elle n'ira de l'avant que si elle a une communauté d'accueil informée et disposée à le faire, et qu'il doit y avoir une démonstration convaincante de la volonté de cette communauté, sans jamais vraiment préciser ce que cela voulait dire. Or, ce que WLON a dit, c'est qu'ils sont prêts à passer à l'étape suivante de l'enquête sur le site, et qu'ils entreprendront leur propre évaluation et processus d'approbation [1] Leur vote pour passer à l'étape suivante n'est pas une expression de soutien au projet.

Donc, en matière de consentement préalable, libre et éclairé, qui est nécessaire en vertu de la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Autochtones, nous n'y sommes pas, même dans le cas de WLON. En revanche, le contraire est vrai dans le cas des 27 autres Premières Nations signataires du Traité no 3. Et la Première nation d'Eagle Lake, qui est la prochaine communauté en aval, a intenté une action en justice parce qu'elle dit qu'elle aurait dû être considérée comme une communauté d'accueil capable de dire oui ou non.

ÀB ! : Quels ont été les défis de votre campagne ?

B.L : Le plus grand défi, c'est que l'industrie nucléaire dispose de ressources nettement supérieures aux nôtres. La SGDN compte de nombreux employés à temps plein dans plusieurs endroits en Ontario. Ils sont constamment en mode financement. Par exemple, Ignace est une communauté qu'ils considèrent comme une communauté d'accueil. Nous ne sommes pas d'accord avec cela car Ignace est à 45 kilomètres à l'est du site. Ils se trouvent dans un bassin versant différent, mais ils étaient désespérés. Il y a une station-service, une taverne, quelques dépanneurs, mais il n'y a pas d'industrie autre que ces emplois de service ou l'école. Ils avaient une mine il y a des décennies et ils ne se sont jamais remis de sa fermeture et sont coincés dans l'attente de la prochaine mine. Ils pensent que le projet de la SGDN va rendre la situation telle qu'elle était à l'époque de l'ouverture et de l'exploitation de la mine Matabbi. Mais ce ne sera pas le cas.

Ensuite, certaines personnes qui sont des employés ou ex-employés de l'industrie nucléaire mènent des campagnes d'attaques très négatives en ligne. Lorsque des gens posent une question ou expriment une opinion, ils sont vite attaqués. Les médias sociaux sous leur pire jour, et il n'y a pas de journal local à Ignace ou à Dryden, donc il s'agit de l'outil de communication principal.

Auparavant, nous allions à Ignace, et nous faisions un atelier ou une projection de film. Nous recevions 30 à 50 personnes. Pour une ville d'un millier d'habitants, c'est plutôt bien. Maintenant, c'est plus 2 à 4 personnes. Les gens me disent qu'ils ne viennent pas parce qu'ils ne veulent pas que les gens voient leur voiture garée là où nous avons une réunion, ils ne veulent pas que les gens le sachent. Lorsque nous avons fait du porte-à-porte, nous n'avons pas demandé s'ils étaient pour ou contre le projet. Nous demandions aux gens s'ils estimaient qu'ils obtenaient suffisamment d'information indépendante sur le projet et le promoteur, et qui, selon eux, devrait prendre la décision. La grande majorité des gens, y compris ceux qui soutiennent le projet, ont dit qu'il devrait y avoir un référendum.

Vers 2021, Ignace a embauché des consultants de Hardy Stevenson et d'autres cabinets qui travaillent pour l'industrie nucléaire. Ils ont organisé des événements, des soirées à la taverne, le petit-déjeuner au centre pour personnes âgées, ainsi que des interviews et un sondage en ligne. La question n'était pas de savoir si vous êtes favorable à ce que des déchets nucléaires soient transportés par camion jusqu'à votre ville et enterrés 45 kilomètres plus loin. La question était « Êtes-vous favorable à ce qu'Ignace poursuive le processus de la SGDN ? Et pour les habitants d'Ignace, cela signifie continuer à obtenir des financements. Ils avaient recueilli environ 12 millions de dollars à ce stade. La majorité des personnes qui ont participé au sondage ont donc répondu par l'affirmative. Ce n'était pas la majorité des habitants d'Ignace, mais c'est ainsi que la ville s'est déclarée volontaire. Puis ils ont signé un l'accord d'accueil qui les engage à soutenir le projet à perpétuité, même s'il change. Ignace est piégé.

ÀB ! : Cela peut être très difficile pour les villes qui ont perdu leur prospérité suite à la fermeture d'une mine ou d'une usine. Les industries extractives transforment souvent la culture locale et les attentes de ce qui est possible pour parvenir à une communauté durable et florissante.

B.L : Oui. Mais prenons l'exemple de Wawa [2]. Ils ont aussi eu des difficultés économiques. Il y a quelques mines dans la région, mais la plus proche a fermé. En 2025, la SGDN a donné 12 millions de dollars à Ignace et lorsque vous traversez la ville, elle ressemble à ce qu'elle était en 2010. Le seul changement visible est que la SGDN a pavé le stationnement du centre commercial, où se trouvent ses bureaux. Les autres bâtiments sont toujours fermés. En revanche, au cours de la même période et sans l'aide financière de la SGDN, Wawa a mis en place une grande usine de myrtilles, ainsi qu'un établissement vinicole. Il y a peu de différences entre Ignace et Wawa. La population est presque la même, les deux villes ont connu l'exploitation minière, elles sont situées sur le même axe de transport, même si Ignace bénéficie d'un meilleur accès au réseau ferroviaire que Wawa. Mais dans l'ensemble, Wawa est allée de l'avant. Wawa a maintenant un grand employeur qui ne dépend pas de l'exploitation minière ou forestière, ce qui est très important pour une ville du nord de l'Ontario.

ÀB ! : Qu'en est-il des autres communautés environnantes ?

B.L : La SGDN s'efforce d'obtenir un accord de bon voisinage avec la ville de Dryden, qui se trouve en aval du site. Il y a beaucoup d'opposition à Dryden, et les résidents s'inquiètent beaucoup de ce que pourrait contenir cet accord. Si le projet se concrétise, Dryden aura une augmentation de la demande de services, les pénuries de logements s'aggraveront, il y aura plus de demande pour les services médicaux, sociaux, etc. La SGDN indique que ses employés déménageront à Ignace. Je ne le crois pas. À Dryden, vous pouvez voir un optométriste et un médecin, votre enfant peut jouer dans une équipe de hockey, il y a des cours de ballet et de musique, et cela n'existe pas à Ignace. Dryden est donc dans une situation difficile, car ils n'ont pas invité la SGDN dans la région, mais ils pourraient bien être coincés avec les impacts. Certaines entreprises de la ville auront plus de clients, elles vendront plus de bois d'œuvre, bien sûr. Mais c'est la ville qui va gérer l'augmentation des services et des pressions sur les infrastructures.

Ensuite, il y a un certain nombre de communautés qui sont beaucoup plus proches du site. Borups Corners, Dyment, Dinorwic, Wabigoon... Mais ce sont tous des territoires non organisés. Certains d'entre eux ont des conseils de service, mais ils n'ont pas d'administration municipale, alors ils sont tout simplement exclus du processus. C'est une autre façon dont cette histoire de communauté d'accueil consentante est trompeuse parce que ces communautés très proches du site ne sont pas seulement en aval, mais elles se trouvent dans le même bassin atmosphérique.

ÀB ! : Quelle est la voie à suivre ?

B.L : La première étape, c'est d'arrêter de produire des déchets nucléaires. Le Québec l'a fait ; l'Ontario pourrait le faire. Des études montrent que la province pourrait faire la transition vers un réseau renouvelable à mesure que des options de stockage deviennent disponibles. Nous ne disons pas qu'il faut fermer tous les réacteurs demain. Nous comprenons qu'il faudra adopter une approche par étapes. En 2023, en Ontario, les deux dernières unités de Pickering (A) ont été fermées. Mais malheureusement, ils prévoient d'en construire davantage. En ce qui concerne les déchets qui se trouvent dans les centrales nucléaires, nous avons besoin d'étendre le stockage sur place, mais avec un système plus robuste, et dans le cas de l'Ontario, de les éloigner des lacs. Et puis se concentrer sur le passage à d'autres sources d'énergie. Le discours actuel sur l'électrique est basé sur de grandes platitudes. Pour répondre à nos besoins énergétiques, nous avons besoin d'une stratégie réfléchie fondée sur les services énergétiques et non sur la source d'énergie.

On dit aux communautés proches des réacteurs que les déchets disparaîtront, mais c'est faux. Il faudra attendre la fin du siècle avant que les déchets ne soient déplacés, même si nous arrêtons de les produire. C'est irresponsable. Nous pourrions éviter de contaminer un autre site comme nous le ferions avec le prochain dépôt en formations géologiques profondes, éviter le risque de transport et rendre les déchets plus sûrs à leur emplacement actuel.

Pour plus d'informations, n'hésitez pas à consulter le site We The Nuclear Free North.


[1] Il y aura également une évaluation fédérale en vertu de la Loi sur l'évaluation d'impact et un processus d'autorisation mené par la Commission canadienne de sûreté nucléaire.

[2] Wawa est une communauté rurale situé près du lac Supérieur, à 220 kilomètres au nord de Sault-Sainte-Marie

Brennain Lloyd est coordinatrice de projet chez Northwatch.

Photo : Située sur la rive nord du lac Ontario, la centrale nucléaire de Pickering est un excellent exemple d'installation ancienne qui constitue une menace directe pour l'environnement et les communautés locales. Crédit : Jason Paris

The english version of this article is available here.

La réforme de l’augmentation des loyers apaise les grands propriétaires

https://etoiledunord.media/wp-content/uploads/2025/04/490992707_1044753474382998_98554095384921742_n-e1745533378600-1024x594.jpg24 avril, par Comité Ottawa-Gatineau
La semaine dernière, la ministre de l'Habitation du Québec, France-Élaine Duranceau, a annoncé qu'elle simplifierait le mode de calcul des augmentations de loyer. Cette réforme (…)

La semaine dernière, la ministre de l'Habitation du Québec, France-Élaine Duranceau, a annoncé qu'elle simplifierait le mode de calcul des augmentations de loyer. Cette réforme a été dénoncée par les associations de locataires, car elle est remarquablement similaire au projet proposé en janvier (…)

Liste de candidat·es pro-choix

22 avril, 2025 – La Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN) dévoile la liste des candidat·es qui se sont engagé·es à voter contre tout projet de loi (…)

22 avril, 2025 – La Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN) dévoile la liste des candidat·es qui se sont engagé·es à voter contre tout projet de loi anti-avortement en signant une déclaration d'engagement (voir à l asuite de l'article) .

Tiré de l'infolettre de l'R des Centres de femmes
https://fqpn.qc.ca/article/elections-federales-2025#bas-saint-laurent-01-

Cette initiative s'inscrit dans le cadre de la campagne « Je vote PRO-CHOIX », déployée à travers les 78 circonscriptions au Québec grâce à l'implication de centaines de militantes.

Depuis plusieurs semaines, ces militantes ont contacté les candidat·es dans chaque circonscription afin de leur demander de prendre position clairement : s'engager à voter contre tout projet de loi visant à restreindre le droit à l'avortement.

En date du 24 avril, 113 candidat.es ont signé l'engagement, soit :

41 candidat·es du Bloc Québécois
26 candidat·es du Nouveau Parti Démocratique
24 candidat·es du Parti Libéral du Canada
18 candidat·es du Parti Vert du Canada
1 candidat du Parti Conservateur du Canada
1 candidat Indépendant
1 candidat du Parti Rhinocéros
1 candidate du Parti Marxiste-Léniniste du Canada
Ces candidat·es ont signé la déclaration qui énonce :

« Je m'engage publiquement, durant la campagne électorale fédérale 2025, ainsi qu'après les résultats des élections en tant que députée ou député à la Chambre des communes :
1- À défendre l'accès universel aux services d'avortements ;
2- À voter contre tout projet de loi ou motion qui pourrait restreindre le droit à l'avortement ;
3- À défendre et à maintenir les services d'avortement par médicament ou par instruments, peu importe les oppositions ;
4- À lutter contre toute attaque, intimidation et agression contre les cliniques de soins en santé sexuelle et les personnes ayant recours aux services.

Si je suis élu·e, je m'engage à m'impliquer activement pour la mise en application de ces revendications qui contribuent à défendre les droits collectifs de la population. »

Pour toutes questions sur la liste de candidat.es pro-choix, veuillez communiquer avec Jess Legault, jlegault@fqpn.qc.ca.

BAS-SAINT-LAURENT (01)
Circonscriptions
Côte-du-Sud – Rivière-du-Loup – Kataskomiq – Témiscouata
Diane Sénécal – Bloc Québécois
Rimouski-La Matapédia
Maxime Blanchette-Joncas – Bloc Québécois
Alexander Reford – Parti Libéral du Canada
SAGUENAY-LAC-SAINT-JEAN(02)
Circonscriptions
Chicoutimi-Le Fjord
Raphaël Émond – Nouveau Parti Démocratique
Stéphane Proulx- Parti Libéral du Canada
Jonquière
Lise Garon – Nouveau Parti Démocratique
William Van Tassel – Parti Libéral du Canada
Lac-Saint-Jean
Denis Lemieux – Parti Libéral du Canada
CAPITALE-NATIONALE(03)
Circonscriptions
Beauport-Limoilou
Julie Vignola – Bloc Québécois
Steeve Lavoie – Parti Libéral du Canada
Dalila Elhak – Parti Vert du Canada
Charlesbourg – Haute-Saint-Charles
Bladimir Laborit Infante – Bloc Québécois
Louis-Hébert
Valérie Savard – Bloc Québécois
Louis-Saint-Laurent-Akiawenhrahk
Martin Trudel – Bloc Québécois
Rhode-Malaure Pierre – Parti Libéral du Canada
Montmorency – Charlevoix
Caroline Desbiens – Bloc Québécois
Portneuf – Jacques-Cartier
Christian Hébert – Bloc Québécois
Antonin Leroux – Parti Libéral du Canada
Québec-Centre
Simon Bérubé – Bloc Québécois
Tommy Bureau – Nouveau Parti Démocratique
MAURICIE(04)
Circonscriptions
Saint-Maurice – Champlain
Thierry Bilodeau – Bloc Québécois
Nathalie Garceau – Nouveau Parti Démocratique
Marie-Claude Gaudet – Parti Vert du Canada
Jean-Pierre Fraser – Parti Rhinocéros
Trois-Rivières
Yves Lévesque – Parti Conservateur du Canada
Caroline Desrochers – Parti Libéral du Canada
David Turcotte – Parti Vert du Canada
ESTRIE(05)
Circonscriptions
Brome-Missisquoi
Joanne Brouard – Nouveau Parti Démocratique
Michelle Corcos – Parti Vert du Canada
Compton-Standstead
Nathalie Bresse – Bloc Québécois
Marianne Dandurand – Parti Libéral du Canada
Mégantic – L'Érable-Lotbinière
Gabriel D'Astous – Nouveau Parti Démocratique
Richmond-Arthabaska
AUCUNE SIGNATURE
Shefford
Andréanne Larouche – Bloc Québécois
Patrick Jasmin – Nouveau Parti Démocratique
Audrey-Ann Turcot-Brochu – Parti Vert du Canada
Sherbrooke
Jean-Pierre Fortier – Nouveau Parti Démocratique
Élisabeth Brière – Parti Libéral du Canada
Kevin McKenna – Parti Vert du Canada
MONTRÉAL(06)
Circonscriptions
Ahuntsic-Cartierville
Nabila Ben Youssef – Bloc Québécois
Bourassa
AUCUNE SIGNATURE
Dorval-Lachine-Lasalle
AUCUNE SIGNATURE
Hochelaga – Rosemont-Est
Rose Lessard – Bloc Québécois
Marie-Gabrielle Ménard – Parti Libéral du Canada
Jacob Pirro – Parti Vert du Canada
Honoré-Mercier
AUCUNE SIGNATURE
La Pointe-de-l'Île
Geneviève Royer – Parti Marxiste-Léniniste du Canada
LaSalle – Émard – Verdun
Louis-Philippe Sauvé – Bloc Québécois
Craig Sauvé – Nouveau Parti Démocratique
Bisma Ansari – Parti Vert du Canada
Lac-Saint-Louis
Tommy Fournier – Bloc Québécois
Gregory Evdokias – Nouveau Parti Démocratique
Raymond Frizzell – Parti Vert du Canada
Laurier – Sainte-Marie
Nimâ Machouf – Nouveau Parti Démocratique
Mont-Royal
AUCUNE SIGNATURE
Notre-Dame-de-Grâce – Westmount
Félix-Antoine Brault – Bloc Québécois
Malcolm Lewis-Richmond – Nouveau Parti Démocratique
Arnold Downey – Parti Vert du Canada
Outremont
Ève Péclet – Nouveau Parti Démocratique
Jonathan Pedneault – Parti Vert du Canada
Papineau
Marjorie Michel – Parti Libéral du Canada
Pierrefonds – Dollard
Katrina Archambault – Bloc Québécois
Rosemont – La Petite-Patrie
Alexandre Boulerice – Nouveau Parti Démocratique
Benoît Mortham – Parti Vert du Canada
Saint-Laurent
AUCUNE SIGNATURE
Saint-Léonard – Saint-Michel
Laurie Lelacheur – Bloc Québécois
Ville-Marie – Le Sud-Ouest – Île-des-Soeurs
Kevin Majaducon – Bloc Québécois
OUTAOUAIS(07)
Circonscriptions
Argenteuil – La Petite-Nation
Michel Welt – Nouveau Parti Démocratique
Bertha Fuchsman-Small – Parti Vert du Canada
Gatineau
Richard Nadeau – Bloc Québécois
Hull – Aylmer
Pascale Matecki – Nouveau Parti Démocratique
Pontiac-Kitigan Zibi
AUCUNE SIGNATURE
ABITIBI-TÉMISCAMINGUE(08)
Circonscriptions
Abitibi – Témiscamingue
Sébastien Lemire – Bloc Québécois
CÔTE-NORD(09)
Circonscriptions
Côte-Nord – Kawawachikamach – Nitassinan
Marilène Gill – Bloc Québécois
Marika Lalime – Nouveau Parti Démocratique
Kevin Coutu – Parti Libéral du Canada
NORD-DU-QUÉBEC(10)
Circonscriptions
Abitibi – Baie-James – Nunavik – Eeyou
AUCUNE SIGNATURE
GASPÉSIE-ÎLES-DE-LA-MADELEINE(11)
Circonscriptions
Gaspésie – Les Îles-de-la-Madeleine – Listuguj
Diane Lebouthillier – Parti Libéral du Canada
CHAUDIÈRE-APPALACHES(12)
Circonscriptions
Beauce
Gaétan Mathieu – Bloc Québécois
Annabelle Lafond-Poirier – Nouveau Parti Démocratique
Bellechasse – Les Etchemins – Lévis
Gaby Breton – Bloc Québécois
Marie-Philippe Gagnon-Gauthier – Nouveau Parti Démocratique
Glenn O'Farrell – Parti Libéral du Canada
Lévis – Lotbinière
Pierre Julien – Bloc Québécois
Ghislain Daigle – Parti Libéral du Canada
LAVAL(13)
Circonscriptions
Alfred-Pellan
AUCUNE SIGNATURE
Laval – Les Îles
Étienne Loiselle-Schiettekatte – Nouveau Parti Démocratique
Marc-Aurèle-Fortin
AUCUNE SIGNATURE
Vimy
AUCUNE SIGNATURE
LANAUDIÈRE(14)
Circonscriptions
Berthier—Maskinongé
Yves Perron – Bloc Québécois
Ruth Ellen Brosseau – Nouveau Parti Démocratique
Joliette-Manawan
Gabriel Ste-Marie – Bloc Québécois
Marc Allaire – Parti Libéral du Canada
Erica Poirier – Parti Vert du Canada
Montcalm
Luc Thériault – Bloc Québécois
Repentigny
Patrick Bonin – Bloc Québécois
Pierre Richard Thomas – Parti Libéral du Canada
Ednal Marc – Indépendant
Terrebonne
Nathalie Sinclair-Desgagné – Bloc Québécois
Maxime Beaudoin – Nouveau Parti Démocratique
LAURENTIDES(15)
Circonscriptions
Laurentides – Labelle
Michel Le Comte – Parti Vert du Canada
Les Pays-d'en-Haut
Ariane Charbonneau – Bloc Québécois
Mirabel
Albert Batten – Nouveau Parti Démocratique
Rivière-des-Mille-Îles
AUCUNE SIGNATURE
Rivière-du-Nord
AUCUNE SIGNATURE
Thérèse-De Blainville
AUCUNE SIGNATURE
MONTÉRÉGIE(16)
Circonscriptions
Beauharnois – Salaberry – Soulanges – Huntingdon
Claude DeBellefeuille – Bloc Québécois
Tyler Jones – Nouveau Parti Démocratique
Miguel Perras – Parti Libéral du Canada
Kristian Solarik – Parti Vert du Canada
Beloeil – Chambly
Marie-Josée Béliveau – Nouveau Parti Démocratique
Brossard – Saint-Lambert
AUCUNE SIGNATURE
Châteauguay – Les Jardins-de-Napierville
AUCUNE SIGNATURE
La Prairie-Atateken
Jacques Ramsay – Parti Libéral du Canada
Longueuil – Charles-LeMoyne
Beritan Oerde – Bloc Québécois
Sherry Romanado – Parti Libéral du Canada
Longueuil – Saint-Hubert
Denis Trudel – Bloc Québécois
Nesrine Benhadj – Nouveau Parti Démocratique
Natilien Joseph – Parti Libéral du Canada
Mont-Saint-Bruno-L'Acadie
Noémie Rouillard – Bloc Québécois
Pierre-Boucher – Les Patriotes – Verchères
Xavier Barsalou-Duval – Bloc Québécois
Saint-Hyacinthe – Bagot – Acton
Simon-Pierre Savard-Tremblay – Bloc Québécois
Mélanie Bédard – Parti Libéral du Canada
Saint-Jean
Christine Normandin – Bloc Québécois
Vincent Piette – Parti Vert du Canada
Vaudreuil
Christopher Massé – Bloc Québécois
CENTRE-DU-QUÉBEC(17)
Circonscriptions
Bécancour – Nicolet – Saurel-Alnôbak
Pierre Tousignant – Parti Libéral du Canada
Yanick Lapierre – Parti Vert du Canada
Drummond
Martin Champoux – Bloc Québécois
*****
Déclaration d'engagement des candidates et candidats aux élections fédérales

➔ Considérant le recul des droits des femmes en matière d'autonomie corporelle dans le
contexte politique international actuel ;
➔ Considérant que les femmes, les hommes trans, les personnes non-binaires et
bispirituelles ont le droit inaliénable de disposer de leurs corps, d'avoir ou non des
enfants, d'en déterminer le nombre et le moment, d'avoir à leur disposition les moyens
efficaces, sécuritaires et adéquats pour y parvenir ;
➔ Considérant que les femmes, les hommes trans, les personnes non-binaires et
bispirituelles ont le droit d'avoir accès à des services complets, de qualité et gratuits
en contraception, avortement, planning et sexualité ;
➔ Considérant l'importance du respect du choix libre et éclairé des femmes concernant
la contraception, l'avortement, le planning et la sexualité ;
➔ Considérant que toutes les personnes vivant au Canada ont droit à la sécurité et la
dignité :
Je m'engage publiquement, durant la campagne électorale fédérale 2025, ainsi qu'après les
résultats des élections en tant que députée ou député à la Chambre des communes :
1- À défendre l'accès universel aux services d'avortements ;
2- À voter contre tout projet de loi ou motion qui pourrait restreindre le droit à l'avortement ;
3- À défendre et à maintenir les services d'avortement par médicament ou par instruments,
peu importe les oppositions ;
4- À lutter contre toute attaque, intimidation et agression contre les cliniques de soins en
santé sexuelle et les personnes ayant recours aux services.
Si je suis élu·e, je m'engage à m'impliquer activement pour la mise en application de ces
revendications qui contribuent à défendre les droits collectifs de la population.


Nom


Circonscription


Signature


Parti politique

La Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN) est un regroupement féministe de défense de droits et d'éducation populaire en matière de santé sexuelle et reproductive.

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Déclaration du CNC en réaction au dévoilement de la plateforme conservatrice

24 avril, par Conseil national des chômeurs et chômeuses — , ,
Montréal, le 22 avril 2025 – Déclaration de Selma Lavoie et Milan Bernard, co-porte-paroles du Conseil national des chômeurs et chômeuses (CNC) : « À moins d'une semaine de (…)

Montréal, le 22 avril 2025 – Déclaration de Selma Lavoie et Milan Bernard, co-porte-paroles du Conseil national des chômeurs et chômeuses (CNC) :

« À moins d'une semaine de la fin de la campagne, alors que plus de deux millions de personnes ont déjà voté par anticipation, le chef conservateur Pierre Poilievre a enfin dévoilé la plateforme de son parti.

Il n'y a pratiquement rien sur l'assurance-emploi, si ce n'est que mesures pro-patronales de formation. Néanmoins, on peut dire que nous connaissons bien ses positions en la matière. En effet, Pierre Poilievre ne peut renier sa virulente opposition au programme d'assurance-emploi, lui qui considérait, en 2009[1], en pleine crise économique, et en 2016[2], qu'améliorer l'admissibilité de l'assurance-emploi conduirait à « une augmentation permanente du chômage ». Ce n'est pas tout, en pleine pandémie[3], il disait que les programmes d'aide sont une façon pour le gouvernement de « payer les gens pour ne pas travailler ». Partisan de l'ignoble contre-réforme de Stephen Harper, il a déclaré que moins de gouvernement permettait aux citoyens de s'entraider et que le meilleur programme social était un emploi.[4]Il semble ainsi favoriser un modèle où le filet social est réduit au minimum. Une ancienne députée l'avait même déjà ciblé comme étant rien de moins qu'un blocage à l'amélioration du programme ![5]

D'autres questions importantes se posent. Si les Conservateurs sont portés au pouvoir, est-ce qu'ils vont « pacter » les postes des nouveaux tribunaux de l'assurance-emploi avec des nominations partisanes suivant la méthode Harper ? Est-ce qu'ils vont réduire le budget de l'assurance-emploi pour faire plaisir aux lobbys patronaux ? Que feront-ils pour les travailleurs et travailleuses affectés par les conséquences de la guerre commerciale, des menaces américaines et de l'incertitude politique et économique généralisée ?

Le NPD, le Bloc Québécois et les Verts s'affichent clairement, dans leurs plateformes et leurs engagements, pour une réforme globale de l'assurance-emploi et un élargissement de la couverture. Du côté libéral, le parti s'engage à « renforcer le filet social » et à « travailler pour que l'assurance-emploi soit mieux adapté aux réalités modernes du travail en offrant un soutien flexible et fiable ». Il conserve ainsi son orientation des dernières années, qu'il devra toutefois clarifier et surtout mettre en œuvre le plus rapidement possible s'il est reporté au pouvoir.

Les positions de ces partis font en sorte qu'il est pratiquement certain qu'une majorité de citoyens et de citoyennes soutienne des partis en faveur de l'amélioration de l'assurance-emploi. Avec l'appui de la société civile et des experts de différents horizons, après plusieurs rondes de consultations et des engagements répétés, il sera le temps d'agir. Cela sera toutefois impossible avec un gouvernement conservateur. »

Le CNC en campagne !

Avec le slogan, « QUAND LA MENACE PLANE, ÇA PREND UNE VRAIE ASSURANCE-EMPLOI ! », le CNC a voulu faire de l'assurance-emploi un enjeu important de l'élection. Dans cet objectif, il s'est inscrit comme « tiers » auprès d'Élections Canada, et a déployé en ce moment sur l'ensemble du territoire québécois des milliers de pancartes de type électoral et une large panoplie d'outils de communication en ligne.

Pour en savoir plus : www.lecnc.com/pensezy<http://www.lecnc.com/pensezy>

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Déclaration de la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes

24 avril, par Comité de solidarité internationale de la Coordination du Québec de la marche mondiale des femmes (CQMMF), Emilia Castro, Julie Antoine, Pénélope Guay — ,
Cette vidéo a été filmé le 24 avril à Québec par le Regroupement des groupes de Femmes de Québec comme action de visibilité pour souligner le 24 avril

Cette vidéo a été filmé le 24 avril à Québec par le Regroupement des groupes de Femmes de Québec comme action de visibilité pour souligner le 24 avril

24 avril 2025

Le 24 avril 2013, l'effondrement du Rana Plaza au Bangladesh a tué plus de 1 100 personnes, majoritairement des femmes, en a blessé des milliers d'autres et mis en lumière les conditions de travail inhumaines imposées par les grandes entreprises transnationales.

Cette tragédie nous rappelle que les femmes subissent de plein fouet les effets d'un modèle économique archaïque qui place le profit au-dessus de toute considération humaine et de l'environnement. Ce système engendre des violences systémiques : exploitation de la main-d'œuvre, destruction des écosystèmes, violation des droits fondamentaux.

Chaque 24 avril, la Journée de solidarité féministe contre les entreprises transnationales est l'occasion de dénoncer ces injustices, en mémoire des personnes décédées au Rana Plaza.

Au Québec, les militantes de la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes (CQMMF) rappellent que ces violences perdurent, sous diverses formes : conditions de travail précaires, accaparement des ressources, pollution des territoires — particulièrement ceux des communautés autochtones — et absence de reddition de comptes des grandes entreprises.

Les femmes sont en première ligne des crises environnementales en subissant les conséquences de manière disproportionnée. C'est pourquoi notre féminisme est résolument écologique. Nous exigeons un environnement sain, une justice climatique et sociale, ainsi qu'une transition juste qui respecte les droits de toutes et de tous, sans laisser personne derrière.

Dans le contexte actuel de campagne électorale fédérale, nous lançons un appel urgent à toutes et tous : où sont les engagements en matière de justice environnementale et sociale ? Alors que la planète vit une crise climatique sans précédent, les enjeux environnementaux sont relégués aux marges du débat, noyés dans les discours sur les baisses de taxes, l'inflation, les tarifs et surtout d'une relance économique qui oblitère les mises en garde scientifiques sur l'exploitation de nos ressources et qui, à terme, exacerbera les crises sociales et environnementales.
Une relance économique où la tarification du carbone recule, avec son abolition envisagée pour les consommateurs, et même la possibilité d'éliminer le prix du carbone pour l'industrie, favorisant ainsi les grands pollueurs. Une relance économique où les projets pétroliers et gaziers refont surface. Une relance économique où les cibles climatiques sont floues ou carrément absentes, et où l'on semble refuser de reconnaître, consciemment ou inconsciemment, la responsabilité humaine dans les changements climatiques, et ce, allant jusqu'à proposer le retrait du Canada de l'Accord de Paris.

Nous exigeons que nos choix d'une société respectueuse et nos valeurs féministes soient pris au sérieux et que l'on cesse la promotion d'un développement économique qui exploite le travail des femmes et l'environnement. Cela implique de dire non à l'exploration et l'exploitation pétrolière et gazière sur le territoire québécois. Cela implique aussi de mettre fin aux subventions des énergies fossiles, encore défendu directement ou indirectement par l'inaction. Cela implique de penser à l'avenir avec un projet et une vision de société digne pour les prochaines générations.

Et cette lutte prendra la rue. Le 18 octobre prochain, lors de la 6e action de la Marche mondiale des femmes 2025, des milliers de féministes marcheront dans les rues de Québec -et partout dans le monde- pour dénoncer tous les enjeux qui touchent les femmes : le droit des femmes de vivre en paix et en sécurité, l'accès aux services publics gratuits et de qualité, le droit de décider pour nous-mêmes, un revenu décent et des conditions de travail sécuritaires, un environnement sain.

À toutes les électrices et tous les électeurs : interrogez les partis, lisez leurs plateformes, posez des questions. Refusez le silence. Notre avenir, et celui de nos enfants en dépend.

Et à toutes les femmes du monde qui luttent encore pour leur dignité et leurs droits : vous n'êtes pas seules.
En solidarité,

Julie Antoine, Coalition féministe contre la violence envers les femmes et porte-parole de la Marche mondiale des femmes 2025 au Québec
Emilia Castro du Regroupement des groupes de femmes de la Capitale-Nationale et porte-parole de la Marche mondiale des femmes 2025 au Québec
Pénélope Guay, Maison communautaire Missinak et porte-parole de la Marche mondiale des femmes 2025 au Québec

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Liberate the North from nuclear waste

As northwestern Ontario is currently being considered to host all of Canada's current and future nuclear fuel waste, local citizens and groups, including First Nations, have (…)

As northwestern Ontario is currently being considered to host all of Canada's current and future nuclear fuel waste, local citizens and groups, including First Nations, have formed We the Nuclear Free North (WTNFN) to oppose the transport, burial and abandonment of radioactive waste in northern watersheds. À Bâbord ! met one of their members, Brennain Lloyd, Project Coordinator at Northwatch. Interview by Louise Nachet.

L'article est disponible en français ici.

À Bâbord ! : Why and how was this coalition formed ?

Brennain Lloyd : In the Fall of 2020 there was a conversation among people who were newly organizing around nuclear waste management with organizations who had been long working on it like Northwatch, Environment North, or Citizens United for a Sustainable Planet. We reached out, we held a networking meeting, and those who were interested founded WTNFN.

A lot of the focus on the last years over transportation and burial has been on Northwestern Ontario. But initially the Nuclear Waste Management Organization (NWMO) investigated 13 different areas, mostly in northern Ontario, with four in the northwest and nine in the northeast. But they shortlisted in 2020 to just one site in northwestern Ontario and one site in southwestern Ontario. So, we tend to talk about it in terms of Northwestern Ontario, because that's where the NWMO's candidate site is. But the transportation impacts will be greater in the northeast, in terms of kilometres travelled.

ÀB ! : Could you describe Northern Ontario's relationship with the issue of waste and pollution ?

B.L : By provincial law, there are different environmental standards for Northern Ontario than for Southern Ontario. The government uses the French river as the dividing line. A few years ago, there was an improvement in the air quality regulations. Cameco is a uranium company who operates a mine in Saskatchewan and owns a refinery in Blind River (in the north) and a conversion and fuel manufacturing facility in Port Hope (in the south). Rather than meet those new standards, Cameco closed their incinerator in Port Hope and began sending their waste by truck to Blind River. It's an example of how Northern Ontario bears the double burden. We have lower standards, so we're less protected by law and companies in Southern Ontario send their waste to our region.

We also have a long history of companies looking for waste disposal sites in Northern Ontario for PCBs, medical waste, low-level and high-level radioactive waste. For solid waste (i.e. household, commercial and industrial garbage), we had a 14-year fight against the city of Toronto dumping in a site in Temiskaming district. On radioactive waste, it began in the 1970s when Atomic Energy of Canada Limited did their first site search for a site for the burial of all of Canada's high-level waste. Until the 1990s, the assumption was that it would go to Northern Ontario. We were depicted as being a remote and wild place, as if that is makes us available for the disposal of these wastes. There was also a separate process for the dumping of low-level waste that was located at Port Hope and Port Granby into Northern Ontario. 19 communities were investigated, and in the end all of them rejected it.

Then the NWMO is created in 2002, and they began the whole exercise again. In 2010, they launched their site investigation. The approach that the NWMO took in soliciting that interest was they went to municipal conferences and economic development conferences for Northern Ontario municipalities, and they pitched it. “Are you interested in learning how your community could benefit from a 16 to 24 billion dollars national infrastructure project ?”. They didn't highlight that it was 50 years of having nuclear waste transported to and then buried in your community and the wastes being lethal into perpetuity. 13 communities in Northern Ontario said they would like to “learn more”. They were almost without exception communities that were in economic difficulty, in most cases the mill or the mine had gone out and they were having a lot of trouble paying their bills. So Northern Ontario got drawn in this most recent round through the economic disparities and difficulties that those boom-and-bust towns experience which isn't different from some towns in Quebec and New Brunswick.

ÀB ! : What are the main issues regarding Indigenous people and the NWMO ?

B.L : We have a lot of indigenous people participating in and directing the alliance, but we don't speak for indigenous people, they speak for themselves and for their communities.

In November 28, the NWMO announced that it had selected a deep geological repository site between Ignace and Dryden, right in the heart of Treaty 3 territory. There are some tensions because Wabigoon Lake Ojibwe Nation (WLON) is the community immediately downstream from the site and the closest to the site. And it is that First Nation that the NWMO has focused on and has deemed to be the host community. But there are many other First Nations who also have traditional land uses in that area and so their treaty rights need to be upheld too. While the NWMO has approached many of them and has provided some funding to some of them through this “learn-more” agreement so that the communities could learn about the project and respond to it, none of the communities have expressed any support for the project, including WLON. The NWMO has been saying for more than 10 years that they will only proceed if they have an informed and willing host community, and there must be a compelling demonstration of willingness made by that host community but never clarified what that was. What WLON has said is, they are willing to proceed to the next step of site investigation, and they will undertake their own review assessment and approval process [1]. Their vote to move to the next step is not an expression of support for the project.

So, in terms of free prior and informed consent, which is necessary under the United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples, it's not there, not even in the case of Wabigoon Lake Ojibwe Nation. But the opposite is there in the case of the other 27 First Nations in Treaty 3. And Eagle Lake First Nation which is the next community downstream, have actually initiated legal action because they say that they should have been considered as a host community able to say yes or no.

ÀB ! : What have been the challenges through your campaign ?

B.L : The biggest challenge is that we are so seriously out resourced by the nuclear industry. The NWMO has many full-time staff in multiple locations in Ontario. They are constantly in funding mode. For example, Ignace is a community which they consider to be the host community. We disagree with it as Ignace is 45 kilometers east of the site. They're in a different watershed, but they were desperate. You know, there's a couple of motels and gas stations, a tavern, couple of convenience stores, but there's no actual industry other than those service jobs or the school. They had a mine decades ago and they've never recovered from the mine closure. So, they're stuck in this mode of waiting for the next mine. They think that the NWMO project is going to make it like it was when the Matabbi Mine was open and operating. But this project is not going to do that.

Then, there are certain people who are employees or former employees of the nuclear industry running very negative attack campaigns online. So, when local people ask a question or express an opinion online, they are attacked. It's social media at its worst. There's no local newspaper in Ignace or Dryden so social media is a main communication tool.

When we went door to door, we didn't ask whether they support or oppose the project. We ask people whether they felt they were getting enough independent information about the project and the proponent, and who they thought should make the decision. Overwhelmingly, even the people who told us that they support the project, people said there should be a referendum.

Around 2021, Ignace hired some consultants who have worked for the nuclear industry for decades and they had tables at vaccination clinics during covid and distributed a survey that had a very low response rate and came to the conclusion that the residents wanted council to make the decision on nuclear waste coming to the region. Different consultants came in. In 2023 the town hired a different group of consultants who held events, fun nights at the tavern and such, Mayor's breakfast at the senior center, did some interview and made an online poll. The question wasn't “do you support nuclear waste being truck to your town and buried 45 kilometers down the road ?”. The question was “do you support Ignace continuing the NWMO process ?”. And for the people of Ignace that means continuing to get funding. So, the majority of people who participated in the poll said, yes. It was not the majority of people in Ignace. And it was not a clear question about support for the NWMO project. But that's how Ignace came to declare that they were willing. And then Ignace went to sign the hosting agreement which commits them to supporting the project into perpetuity. Even if the project changes, they have to support the project. Ignace is locked in.

ÀB ! : It can be very difficult for towns who lost prosperity with mine or mill closure. Extractive industries often deeply transform local culture and expectations of what is possible to achieve a sustainable and thriving community.

B.L : Yes. But if you take for instance, Wawa [2]. They had economic difficulties, there are some mines in the area, but the most local one had closed. Here we are, 2025, NWMO has given 12 million dollars to Ignace and when you drive through Ignace it looks just the same as it did in 2010. The only visible change is NWMO paved the parking lot of the mall, where their offices are. Other buildings are still closed. On the other hand, in the same period of time and without NWMO money, Wawa has started a huge blueberry facility, including a winery. There are few differences between Ignace and Wawa. The population is almost the same size, they were both post-mine communities, they're both on the same transportation route even though Ignace has better rail access than Wawa does. But overall, Wawa has moved forward. Wawa now got a large employer which is not dependent on mining or forestry, which for a Northern Ontario town it really important.

ÀB ! : How about the other surrounding communities ?

B.L : NWMO are working to get what they call a significant neighbor agreement with the city of Dryden, which is downstream from the site. There is a lot of opposition in Dryden, and there's a lot of concern from Dryden residents about what might be in that agreement. If the project goes through, Dryden will have an increase in demand for services, their housing shortages will worsen, there will be more demand for you know all the basic services, like medical services, social services, and so on. NWMO says their employees will move to Ignace. I don't believe that. In Dryden you can get an optometrist and a doctor, and your kid can play on a hockey team, there's music lessons, and that doesn't exist in Ignace. So, Dryden is in a tough spot, because they didn't invite NWMO in the area, but they could be stuck with the impacts. Some of the businesses in town will have more customers, they'll sell more lumber, sure. But it's the city that's going to manage the increase in services and infrastructure strains.

Then there are a number of communities that are much closer to the site. Borups Corners, Dyment, Dinorwic, Wabigoon… But they are all unorganized townships. Some of them have service boards but they don't have municipal government, so they're just shut out of the process. It's another way that this willing host story is misleading because those communities very close to the site are not only downstream, but they're in the same air shed.

ÀB ! : What's the way forward ?

B.L : The first step is we need to stop producing the waste. We need to make that shift. Quebec has done that ; Ontario could do that. There are studies showing that Ontario could make the transition to a renewable grid as storage options become available. We're not saying shut down all the reactors tomorrow. We understand that it will have to be a phased approach. In 2023 in Ontario, the two last units of Pickering (A) were shut down. But unfortunately, they're planning to build more. Most immediately about the waste that's at the reactor stations, we need extended on-site storage but with a more robust storage system, and in the reactors on Lake Ontario's case (Pickering and Darlington) the waste has to be moved back from the lake shore. And then focus on moving to different energy sources. The current push on electric is based on large platitudes. We need a thoughtful strategy to meet our energy needs that's based on energy services, not on energy source.

The reactors communities are being told the waste will go away but the waste will not go away. It's going to be the end of the century till the waste is moved, even if we stop producing it. That's irresponsible. We could avoid contaminating another site as we would with the deep geological repository, avoid the risk of transportation, and make the waste more secure in its current location.

For more information, feel free to consult the website of We the Nuclear Free North


[1] There will be also a Federal assessment under the Impact Assessment Act and a licensing process carried out by the Canadian Nuclear Safety Commission.

[2] Wawa is a rural community located near Lake Superior, 220 kilometers north of Sault-Sainte-Marie.

Photo : Located on the north shore of Lake Ontario, the Pickering nuclear power plant is an excellent example of an old facility that poses a direct threat to the environment and local communities. Credit : Jason Paris

La version française de cet article est disponible dans notre numéro 103.

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Plusieurs organismes en employabilité, c'est à dire des organismes qui aident des personnes souvent pauvres, marginalisées et moins instruites à reprendre leur place dans la société et au travail sont menacées de fermetures dans le contexte des coupures actuelles du gouvernement Legault. J'ai moi-même travaillé pendant des années comme conseiller en employabilité dans ces organismes et j'y ai vécu beaucoup de beaux moments à aider ces personnes à reprendre leur dignité et leur place dans la société, et ces mêmes personnes courageuses et persévérantes m'ont beaucoup apporté en retour à travers toutes ces années. Dans un organisme communautaire comme ceux menacés actuellement ces gens pouvaient retrouver un accueil chaleureux, une belle écoute et un soutien indéfectible malgré les nombreux obstacles sur leur route. Rare étaient les personnes pour qui j'étais amené après 6 mois d'intervention à dire à leur agent d'aide sociale qu'il n'y avait rien à faire.

Pensons un instants aux conséquences de cette approche d'austérité budgétaire sur ces personnes dont certains,nes risquent de grossir les rangs des décrocheurs,cheuses itinérants,es montant leur tente sur le rue Notre-Dame n'étant plus en mesure de payer leur loyer et de subvenir à leurs besoins. Pour Monsieur Legault et ses acolytes ces personnes ne sont pas rentables et il ne vaut plus la peine ‘' d'investir ‘' dans ces gens qui ne seront pas assez vite des travailleurs,euses, consommateurs,trices et payeurs,euses d'impôt. Mieux vaut selon les calculs de nos hommes d'affaires et banquiers au pouvoir verser un maigre chèque d'aide sociale à ces gens pour sauver l'image que de les aider à remonter la pente. Imaginez également le coût des soins de santé qu'il sera nécessaire de prodiguer à ces personnes de plus en plus isolées dan leur peine et leur misère. Je pleure sur leur sort dans un monde déshumanisé où seul compte le ‘' cash ‘' et le pouvoir qu'il procure et de voir voler en éclat tout ce que nous avons construit collectivement au Québec depuis des décennies et que nous aurions voulu laisser aux générations qui nous suivent. Et pourtant ce n'est pas l'argent qui manque au Québec mais d'identifier les grosses poches dans lesquelles elle se trouve et d'aller fouiller dedans au nom du bien collectif pour mieux prendre soin les uns des autres.

Yves Chartrand
Intervenant en employabilité retraité

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Pour tuer les démocraties, les autocrates s’attaquent d’abord au journalisme

22 avril, par Yavuz Baydar — , ,
Encouragés par l'administration Trump, les autocrates du monde entier intensifient leurs attaques contre le journalisme, ciblant son essence même. Tel fut le thème central du (…)

Encouragés par l'administration Trump, les autocrates du monde entier intensifient leurs attaques contre le journalisme, ciblant son essence même. Tel fut le thème central du plus grand rassemblement européen à Pérouse, où l'on s'est penché sur les moyens de contrer les conséquences des « techno-oligarques » agissant comme leurs complices — une « coalition toxique des volontaires ».

Tiré du blogue de l'auteur.

« Salut, bienvenue au club ! » Cette phrase d'accueil récurrente résonnait chaque fois qu'un collègue, venu de n'importe quel coin du monde, rencontrait un journaliste américain. Elle reflétait inévitablement l'ambiance mondiale de bouleversement, perceptible de multiples façons lors du très fréquenté Festival international du journalisme — le plus grand événement public indépendant en Europe. Le thème central était, comme l'a exprimé un journaliste ukrainien, « un niveau multiplié de menaces existentielles pour notre profession à l'échelle mondiale ».

Chaque année, au moins 500 intervenants participent à ce rassemblement à Pérouse, qui ouvre ses magnifiques espaces médiévaux à des discussions modernes et des échanges de haut niveau lors de plus de 200 sessions, réunissant des journalistes du monde entier, y compris des lauréats du prix Nobel, du Pulitzer et du Prix Européen de la Presse (EPP), des bailleurs de fonds — et un large public qui y assiste librement. Comme lors des éditions précédentes, aucun sujet crucial ou sensible n'a été laissé de côté, notamment Gaza, mais bien d'autres encore.

Durant ces quatre jours intenses, à courir d'un panel à l'autre, on ne pouvait qu'éprouver le sombre climat ayant pris le journalisme en otage.

Ainsi, le thème central : des menaces à plusieurs niveaux contre l'épine dorsale du journalisme indépendant, à travers des « fiefs technologiques », des « broligarches » et des autocraties occupées à construire des réseaux. Des collègues américains nous ont rejoints en exprimant des préoccupations qui nous occupaient depuis plus d'une décennie, « rejoignant le club ».

Il n'était pas surprenant de voir une figure éminente de la lutte mondiale pour les droits de l'homme intervenir lors de certaines sessions, s'exprimant haut et fort, lançant des alertes à tous les participants. Il s'agissait de Ken Roth, l'ancien directeur de Human Rights Watch, qu'il a dirigé pendant trois décennies, et auteur d'un livre récemment publié, « Righting Wrongs ».

Alors que nous nous rencontrions entre deux panels, il m'expliqua : « Les autocrates comprennent que la clé de leurs efforts pour saper les freins et contrepoids est de s'en prendre aux médias. » « Nous le voyons dans des pays comme l'Inde ou la Turquie, mais en général, nous constatons maintenant que la défense du journalisme est une défense de la démocratie dans le monde entier. »

« Nous sommes dans un moment de crise, où le journalisme dans son ensemble est menacé », m'a confié Jodie Ginsberg, directrice du Comité pour la protection des journalistes (CPJ). « Il n'est plus seulement menacé dans les autocraties, mais aussi désormais dans les grandes démocraties. Nous devons travailler ensemble pour riposter. »

Patricia Campos Mello, journaliste éminente du Folha de São Paulo, qui a été récemment sévèrement ciblée par le régime Bolsonaro, a acquiescé :

« Nous nous préparons tous à un impact mondial. Ce qui se passe aux États-Unis aura des répercussions dans tous nos pays. Oui, certains pays comme l'Inde et la Turquie subissent une 'autocratisation', mais les risques n'ont pas disparu, par exemple, au Brésil ou ailleurs. Le besoin est donc plus grand pour un reportage précis et équitable, plutôt que pour un espace disproportionné accordé aux batailles d'opinion. »

L'épreuve causée par les autocrates a été un sujet revisité. Lors d'un panel spécial, j'ai mis en lumière la « nouvelle norme » en développement, basée sur le nouveau livre d'Anne Applebaum, « Autocracy Inc. », selon lequel les autocrates enhardis non seulement attaquent les journalistes ou les salles de rédaction, mais intimident également les gouvernements démocratiques pour qu'ils ne financent plus le journalisme indépendant dans leurs pays ou les journalistes qu'ils ont forcés à l'exil.

Ma collègue exilée d'Azerbaïdjan, Arzu Geybulla, a confirmé cela en lançant un avertissement à l'audience : « Les défis se multiplient à toute vitesse », a-t-elle déclaré. « Tout ce que nous savions change rapidement. Nos défenses ne sont plus suffisantes pour atténuer les risques. Nous avons besoin de tout le soutien possible. »

Nous avons appris de Steffan Lindberg de l'Institut V-Dem que trois personnes sur quatre dans le monde vivent dans des pays qui ne sont pas démocratiques. Cela représente un total de 72 % des personnes vivant aujourd'hui sous des régimes autocratiques, contre 49 % en 2004. Selon Lindberg, la liberté des médias a été attaquée et sapée dans 44 pays au cours des 10 dernières années.

Lors d'une session extrêmement émouvante, le public a rencontré Alsu Kurmasheva, journaliste à Radio Free Europe/Radio Liberty, qui a été emprisonnée en Russie pendant neuf mois et libérée grâce à un échange spécial l'année dernière. Accompagnée de l'avocat expert dans des affaires internationales similaires, Can Yeginsu, elle a raconté en détail les conditions horribles qu'elle a endurées dans une prison russe, son calvaire entre espoir et désespoir, et le moment où elle a retrouvé la liberté, partageant avec nous les instantanés de la joyeuse réunion avec sa famille.

À ce moment-là, Can Yeginsu pleurait. Dans la salle, quelques personnes aussi. Cette session a déclenché un élan de réflexions et de conversations autour de celles et ceux qui restent emprisonnés. Au fil des jours du festival, un nom est revenu à plusieurs reprises dans les échanges : celui de Joakim Medin, journaliste suédois·e du journal ETC, récemment emprisonné·e en Turquie dès son arrivée, venu·e couvrir les récentes manifestations.

Un autre sujet brûlant a surgi : la prolifération des lois dites sur les « agents étrangers », un instrument de plus en plus utilisé pour criminaliser le journalisme. Yeginsu a partagé quelques pistes nouvelles pour y faire face : « La Turquie a présenté un projet de loi très sophistiqué sur les agents étrangers en octobre 2024, puis l'a retiré en novembre. Si vous êtes responsable de l'économie d'un pays qui cherche à attirer des investissements directs étrangers, présenter une loi de ce type ne vous aide pas. Les pays à économie ouverte commencent à comprendre que ce genre de législation a un coût. Alors, allez voir les ministères des finances. Je ne dis pas que cela marchera à chaque fois, mais vous seriez surpris », a-t-il lancé.

Plus tard, autour d'un dîner, j'ai retrouvé un groupe de collègues venus de Palestine et d'Égypte. L'atmosphère était morose. Les médias indépendants égyptiens subissent de plein fouet les réductions de financement initiées sous l'administration Trump.

Lorsque j'ai échangé avec Muamar Orabi, rédacteur en chef expérimenté et prolifique basé à Ramallah, sa voix transpirait le désespoir.

« Les organisations internationales punissent sévèrement le journalisme en Palestine, m'a-t-il confié. Notre principal soutien financier, la SIDA (agence de développement suédoise), a mis fin à son aide, tout comme les Américains. Depuis des mois, nous sommes au point zéro, financièrement. Comment le monde peut-il s'attendre à ce que je — que nous — fassions notre travail dans de telles conditions ? »

Peter Erdelyi, un confrère hongrois, a estimé que près de 50 % du financement public mondial a disparu. Une réalité qui pousse à une remise en question profonde des modèles économiques du journalisme, et à rebâtir, plus que jamais, une relation de confiance avec les lecteurs.

Ce soir-là, j'ai rencontré Yuval Abraham, journaliste israélien, rédacteur du site critique +972 et co-réalisateur du film oscarisé No Other Land. Nous avons longuement comparé les manières dont Erdoğan et Netanyahou harcèlent le journalisme, chacun à sa manière. Puis Yuval a abordé un autre domaine de censure : son film a été catégoriquement refusé par Netflix, HBO, Disney et les autres grandes plateformes — sans explication. « La seule plateforme qui a montré un intérêt, c'est MUBI. Elle est plus petite, mais on va sans doute choisir cette voie », m'a-t-il dit.

La censure numérique mondialisée a été un fil rouge de tout le festival. Les projecteurs se sont braqués sur les tech-oligarques — Musk, Zuckerberg, Bezos. L'un des aspects les plus sombres ? L'élimination progressive des cellules de vérification des faits par les grandes plateformes. Certains fact-checkers étaient présents, pour témoigner de ce climat devenu toxique, menaçant.

Harcelés par des voix partisanes agressives, ils ont détaillé lors d'un panel cette ambiance délétère, aggravée depuis la décision de Meta de supprimer son programme de vérification des faits. Ils ont expliqué comment leur travail est discrédité par des responsables politiques et des magnats du numérique, qui sèment la méfiance parmi les audiences, pour des intérêts politiques ou économiques.

Le lendemain, j'ai échangé avec Natalia Antelava, fondatrice et rédactrice en chef de Coda Story, originaire de Géorgie. Elle m'a confié, comme dans plusieurs sessions, sa préoccupation centrale — partagée par tant d'autres. « C'est triste de voir à quel point nous nous alignons sur les grandes entreprises tech, en pensant qu'elles sont nos alliées », a-t-elle soupiré. « Ce n'est pas le cas. Il faut comprendre qu'elles ne sont pas neutres. Tout cela est contrôlé par une poignée d'hommes assoiffés de pouvoir. »

Il est évident que le moment est venu de sortir des cadres établis.

Et pourtant, Alan Rusbridger, rédacteur en chef du magazine Prospect, a su garder une note d'optimisme. Il s'est dit encouragé par « l'extraordinaire solidarité envers les collègues dans les pays qui se battent pour les fondements même du journalisme », ajoutant : « Il y aura toujours une nouvelle génération prête à faire un travail essentiel, en exploitant les nouvelles technologies que nous, les anciens, ne maîtrisons pas. Elle n'a pas peur. »

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Vous saviez que CNews était une chaîne d’extrême droite ? Nous pouvons le prouver

22 avril, par Sleeping Giants France — , ,
Une analyse des données publiques permet de démontrer sans ambiguïté l'orientation éditoriale de CNews, et même de dire précisément quand le virage a vraiment commencé. Plongée (…)

Une analyse des données publiques permet de démontrer sans ambiguïté l'orientation éditoriale de CNews, et même de dire précisément quand le virage a vraiment commencé. Plongée dans les marqueurs sémantiques du discours identitaire.

Tiré du blogue de l'auteur.

Même si tout cela ne laisse guère place au doute, l'impression générale, les multiples propos outranciers tenus à l'antenne, les sanctions de l'Arcom constituent un lourd faisceau d'indices mais pas une preuve formelle. Que peut-on faire de mieux ? Peut-on prouver de manière indiscutable que CNews est une chaîne militante d'extrême-droite ?

Notre collectif, dès octobre 2019 avec l'arrivée de Zemmour comme pilier de CNews, a alerté les acteurs économiques de la ligne éditoriale réactionnaire, anti-immigration, populiste et identitaire adoptée par la chaîne, orientation ensuite confirmée par les autres médias du milliardaire breton.

Pour alerter les annonceurs publicitaires, d'abord de leur présence sur l'émission de Zemmour (quasiment vidée de ses pubs) puis sur celle de Morandini après sa première condamnation (créneau vidé aussi), et même sur la chaîne tout entière, nous avons commencé à collecter en continu des données sur l'ensemble de la diffusion.

À partir de 2023, nous avons ainsi stocké l'ensemble des bandeaux-titres de CNews (les bandeaux sous l'image annonçant le sujet abordé) (1).
Ces données permettent-elles de prouver le parti-pris idéologique imposé par Bolloré à sa chaîne d'info ?

L'immigration et l'Islam

On s'aperçoit que les sujets de prédilection de CNews, l'immigration et l'Islam, marqueurs des obsessions identitaires de l'extrême-droite, sont surreprésentés à l'antenne. Nous avons cherché les bandeaux contenant des termes liés à ces thèmes sur l'ensemble de 2024 (1a)(1b).

Les bandeaux prouvent que les deux thèmes sont à l'ordre du jour de CNews entre 328 et 334 jours dans l'année 2024. La même étude que nous avions menée sur 2023 avait abouti à un résultat similaire (335 jours). Ce chiffre a abondamment été repris pour exposer l'orientation de CNews, dans des articles de notre média préféré, mais aussi lors des débats parlementaires ou dans une note thématique de la commission des lois de l'Assemblée Nationale sur l'islamophobie et la discrimination. On peut maintenant affirmer que rien n'a changé sur la chaîne en 2024.

Bien sûr, immigration et Islam sont des sujets qu'une chaîne d'info peut aborder, et le doit parfois en fonction de l'actualité. Mais est-ce un sujet à ce point primordial qu'il mérite d'être traité ainsi en permanence sans le moindre répit ? Une telle obsession confine au matraquage.

Ces thèmes seraient-ils présentés sous un jour positif ? Ceux qui connaissent CNews esquissent un sourire : la religion musulmane et l'immigration sont abordées exclusivement de manière négative, caricaturale et anxiogène.

Contrairement aux propos tenus oralement en plateau, la rédaction des bandeaux passe au travers du filtre du politiquement correct : les affirmations sont présentées sous forme de questions mais ne masquent pas le parti-pris clairement anti-immigration, reprenant les mythes racistes des “idéologues” de l'extrême-droite, minimisant les actes islamophobes et normalisant l'intolérance religieuse contre l'Islam.

On peut rapprocher cette formulation de la technique de Pascal Praud qui abuse du “je pose juste la question”. Cette rhétorique hypocrite permet d'exprimer publiquement des positions les plus outrancières sans s'exposer juridiquement.

Quelques exemples :

GRAND REMPLACEMENT : LA GAUCHE EN TRAIN DE CÉDER ?
"ISLAMOPHOBIE" ; UNE INTOXICATION IDÉOLOGIQUE ?
IMMIGRATION : LE SENTIMENT D'UNE SUBMERSION ?
L'ISLAM EST-IL COMPATIBLE AVEC LA REPUBLIQUE ?
HAINE ANTI-MUSULMANS, QUID DES AUTRES RELIGIONS ?
DES PRIÈRES MUSULMANES DANS DES ÉCOLES À NICE
ABAYA : LES OFFENSIVES DU MONDE MUSULMAN
PAU : UN COLLÈGE CÈDE AUX PRESSIONS DE PARENTS MUSULMANS
UNE PRIÈRE MUSULMANE À L'UNIVERSITÉ
ROISSY-CDG : UNE PRIÈRE MUSULMANE DANS L'AÉROPORT
LES MUSULMANS, GRANDS ABSENTS DE LA MARCHE ?
PRIÈRE DANS UNE ÉCOLE : DES ENFANTS ENDOCTRINÉS ?
DEUX ÉLÈVES DE CE2 ORGANISENT UNE PRIÈRE MUSULMANE
PRIÈRE MUSULMANE EN CE2 ; LE "FRÉRISME" DÈS L'ÉCOLE ?
COMMENT ASSIMILER LES MUSULMANS FRANÇAIS ?
D. BERNARD : TOUS LES MUSULMANS NE CONDAMNENT PAS
COMMENT STOPPER LÉGALEMENT L'IMMIGRATION ?
LES FRANÇAIS DISENT STOP A L'IMMIGRATION
L'ETAT VEUT-IL IMPOSER L'IMMIGRATION PARTOUT ?
LA VIOLENCE EST-ELLE UN COROLLAIRE DE L'IMMIGRATION ?
IMMIGRATION MASSIVE ; FAVORISÉE PAR NOS LOIS ?
UN LIEN ENTRE IMMIGRATION ET ÉMEUTES ?
UN LIEN ENTRE IMMIGRATION ET DÉLINQUANCE ?
QUEL LIEN ENTRE IMMIGRATION ET DÉLINQUANCE ?
LA RÉALITÉ DU LIEN ENTRE IMMIGRATION ET DÉLINQUANCE
EXISTE-T-IL UN LIEN ENTRE IMMIGRATION ET INSÉCURITÉ ?
LIEN ENTRE IMMIGRATION ET SUBMERSION DE LA JUSTICE ?
SUBMERSION MIGRATOIRE : MYTHE OU RÉALITÉ ?
L'EUROPE FACE A L'IMMIGRATION DE MASSE

La parole d'extrême-droite

CNews ne cible pas seulement les immigrés et les musulmans : les positions d'extrême-droite ou de droite dure sont visibles dans le choix des chroniqueurs et présentateurs, issus majoritairement de médias de cette mouvance. À notre connaissance, aucune autre chaîne d'info n'a eu autant de salariés ou d'intervenants réguliers sans orientation politique signalée qui aient quitté l'antenne du jour au lendemain pour se présenter à des élections :

Eric Zemmour, star d'une quotidienne devenu candidat à l'élection présidentielle et chef de parti identitaire

Guillaume Bigot, présentateur d'une quotidienne, devenu député RN

Pierre Gentillet, chroniqueur devenu candidat RN aux législatives (de retour à l'antenne après son échec)

On peut aussi noter :

Jean Messiha, à l'antenne en moyenne 4 fois par semaine en 2023, obligé de cesser dès que l'Arcom considère que son temps de parole doit être comptabilisé pour l'extrême-droite (malgré les protestations outragées de l'intéressé et de la chaîne), et qui se présente pour Reconquête aux européennes de 2024

Matthieu Valet, policier syndicaliste invité en moyenne deux fois par semaine en 2023, qui ne cessera que pour y revenir en 2024 en tant qu'eurodéputé RN et porte-parole du parti d'extrême-droite.

Philippe de Villiers, ancien chef de parti souverainiste qui a actuellement son émission hebdomadaire sur la chaîne

Grâce aux autres données que nous avons collectées, notamment le nom de tous les intervenants en plateau, nous avons également pu effectuer en 2023/2024 quelques études plus ciblées, notamment sur la représentation des différents syndicats. Le résultat ne laisse guère place au doute : ceux proches de l'extrême-droite ou à défaut les plus à droite sont favorisés, et les syndicats policiers omniprésents :

Même si les données sont accablantes, nous sommes conscients que notre méthodologie est incomplète : d'abord, elle n'analyse que les bandeaux écrits, à la teneur bien plus policée que les propos tenus quotidiennement en plateau.
Ensuite, faute de moyens techniques et humains, nous ne collectons des infos que sur CNews, ce qui rend impossible la comparaison avec les autres chaînes d'info.

L'I(N)A à la rescousse

C'est là qu'entre en jeu l'Institut National de l'Audiovisuel (INA).

Il a récemment mis à disposition du public un outil d'analyse extrêmement puissant : la recherche de termes dans les propos tenus oralement sur les 4 chaînes d'info. C'est à ce jour une des rares utilisations pratiques de l'IA qui ne pille pas le travail des artistes ou des chercheurs, et qui ne prenne le travail de personne.

Il est impensable sans IA de transcrire manuellement par écrit tous les propos tenus par les 4 chaînes d'info 20 heures par jour depuis 2016, d'autant plus que faire subir à une équipe le visionnage de 60000 heures d'antenne de CNews, dont 5200h de Pascal Praud serait à notre avis contraire aux droits humains.
Une IA l'a donc fait, et permet de lancer des opérations de comptage sur les termes employés.

L'INA possède le texte complet des transcriptions mais légalement n'a pas le droit de les mettre en ligne intégralement pour des raisons de droits d'auteur.

Qu'importe. Avec ce dont nous disposons, nous avons pu confirmer les biais idéologiques de CNews.

Nous avons cherché, sur l'année 2024, des termes similaires à ceux utilisés pour l'étude des bandeaux (2).

Les propos tenus sur l'immigration et l'Islam

Sur le thème de l'immigration, on peut ainsi calculer, mois par mois, la part de chaque chaîne d'info dans la couverture de ce thème (2a).

Dans les faits, on s'aperçoit que CNews surreprésente le sujet, par rapport à n'importe laquelle des autres chaînes : en moyenne CNews occupe à elle seule 44% du traitement

Pour l'Islam et les musulmans, même chose que pour l'immigration (2b), le matraquage de CNews ne fait pas débat (moyenne 43%).

Étonnamment, en décembre cela semble plus ou moins s'équilibrer. Il faudra cependant attendre les données de 2025 pour savoir s'il s'agit d'un accident ou d'une tendance.

Le vocabulaire de l'extrême-droite identitaire

Le fait d'aborder systématiquement ces thèmes suffit-il à prouver que CNews est de loin la chaîne d'info la plus ancrée dans les idéologies de l'extrême-droite identitaire ?

Une dernière analyse finit d'enfoncer définitivement le clou : l'utilisation de termes directement issus du militantisme d'extrême-droite. On s'aperçoit que CNews en use et abuse (2c)

Aucune gêne ni honte à dérouler à l'antenne des qualificatifs bien peu journalistiques comme gauchiste, woke ou bobo, ou de surenchérir sur la décivilisation, les francocides, la cathophobie, le racisme anti-blanc ou l'islamo-gauchisme : CNews se taille la part du lion dans l'utilisation de ces termes avec 68% de moyenne. Elle est plus que largement en tête, elle fait pour ainsi dire cavalier seul dans cet exercice.

Le point Z(éro)

Au-delà de tous ces comparatifs qui portent seulement sur l'année 2024, peut-on dater le début de la dérive idéologique de CNews ?

Rappelons en effet que la grève historique d'iTélé contre l'ingérence de l'actionnaire Bolloré dans la ligne éditoriale ne visait pas tant son positionnement politico-idéologique que son glissement vers la trash-TV avec l'arrivée de Morandini.

Le basculement vers la rhétorique réactionnaire et ultra-droitière ne s'est donc fait clairement sentir qu'un peu plus tard. Voyons la part des chaînes dans l'utilisation du vocabulaire d'extrême-droite depuis 2017

Avant fin 2019, les 4 chaînes se partageaient plus ou moins équitablement l'utilisation de ce vocabulaire, avec un léger “avantage” à LCI.

Lorsque Zemmour a été propulsé à l'antenne à l'automne 2019, la rédaction de iTélé/CNews était déjà fortement épurée. Les molles protestations de la SDJ de Canal+, encore vivante à l'époque, n'avaient pas su infléchir la décision de Bolloré et c'est à ce moment que la bascule idéologique s'est opérée pour de bon, de manière de plus en plus marquée. Le cap catho-identitaire n'a pas changé depuis, il devient même de plus en plus évident avec l'abandon par l'Arcom de toute velléité de contrôle effectif.

On peut donc affirmer, preuves à l'appui, qu'à partir de fin 2019, CNews a abandonné sa neutralité de façade pour embrasser et diffuser l'idéologie de l'extrême-droite identitaire et catholique. Au mépris de la convention signée avec le CSA/Arcom elle s'est positionnée en chaîne d'opinion, voire de militantisme ou même de propagande, utilisant le vocabulaire de cette mouvance et en martelant inlassablement ses thèmes. Elle n'a pas cessé à l'heure actuelle, et son succès d'audience relatif lui permet de manipuler en masse les esprits et de guider l'opinion vers les sujets auxquels Bolloré désire donner de l'importance.

Lorsqu'on souligne le parti-pris idéologique de CNews, son obsession dirigée contre les “wokistes”, les migrants et les musulmans, on s'entend souvent répondre que les autres chaînes d'info font pareil. C'est faux et c'est maintenant prouvé objectivement : l'orientation éditoriale extrémiste de CNews est sans commune mesure avec celle des chaînes concurrentes.

Sleeping Giants France, Section Analyse de données

Annexe méthodologique

(1) Bandeaux-titres

Extraction des 75527 bandeaux-titres diffusés sur CNews du 01/01/2024 au 31/12/2024 (moins 6 jours en janvier 2024 non traités pour des raisons techniques) et recherche de mots et d'expressions. Comptage des jours où au moins un bandeau-titre contient l'un de ces termes, et cumul de la durée d'affichage en secondes de tous les bandeaux-titres contenant au moins l'un de ces termes

(1a) Thème “Immigration”

Liste des termes (regex) :

MIGR|OQTF|EXPULS|CLANDESTIN|REGULARIS|NATURALIS|PASSEUR|RETENTION|EXPULS|MINEURS ? ETRANGER|MINEURS ? ISOLE| CRA | CRA$

(1b) Thème “Islam”

Liste des termes (regex) :

ISLAM|IMAM|CORAN|MUSULMAN|MOSQUEE|ABAYA|HIJAB|BURKINI|LE VOILE|DU VOILE| VOILEE|COMMUNAUTARI|COMMUNAUTAIRE|FONDAMENTALIS|FRERISME|INTEGRIS|RADICALIS|SALAFIS|PRECHES|CHARIA|JIHAD|RAMADAN|MOLLAH

Exclusions (regex)

LOI IMMIGRATION|TARIQ|\. RAMADAN

(2) Données INA

Utilisation du frontal Web de l'INA https://data.ina.fr/perimetres/chaines-information-continu

(2a) Immigration

migration, immigration, immigré, migrant, migratoire, OQTF, clandestin, régulariser, régularisé, régularisation, naturalisé, naturaliser, naturalisation, passeur, rétention, expulsion, expulsé, expulser

(2b) Islam

Islam, islamisé, islamiser, islamisation, islamisme, islamiste, imam, Coran, musulman, mosquée, abaya, hijab, burkini, communautarisme, communautariste, communautaire, fondamentaliste, fondamentalisme, frérisme, intégriste, intégrisme, radicalisation, radicaliser, radicalisé, salafisme, salafiste, prêches, charia, djihad, ramadan, mollah, voilée, “le voile”, “du voile”

(2c) Termes de droite dure/extrême

francocide, christianophobe, christianophobie, cathophobie, ensauvagement, décivilisation, racaille, gauchiste, gauchisme, gaucho, gauchisant, woke, wokisme, wokiste, bobo, antifa, "islamo-gauchiste", "islamo-gauchisme", "anti-france", “anti-blanc”

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Gaza : « Le gouvernement israélien mène une guerre contre les faits et contre la vérité »

22 avril, par Yunnes Abzouz, Laurent Richard — , , , ,
Laurent Richard, directeur de Forbidden Stories, a coordonné une série d'enquêtes sur la manière dont l'État hébreu ne se contente pas de viser les journalistes, mais met en (…)

Laurent Richard, directeur de Forbidden Stories, a coordonné une série d'enquêtes sur la manière dont l'État hébreu ne se contente pas de viser les journalistes, mais met en œuvre divers stratagèmes pour n'avoir jamais à rendre compte de ses violations du droit international.

Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
14 avril 2025

Par Yunnes Abzouz, Laurent Richard

Cent soixante-treize selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), presque deux cents d'après Reporters sans frontières, deux cents dix pour le Syndicat des journalistes palestiniens : le bilan humain de la guerre contre l'informationque mène Israël à Gaza diffère d'une organisation à l'autre, selon que l'on compte les blogueurs et blogueuses comme journalistes ou non, notamment. Mais quelle que soit la méthode, le constat est unanime. Jamais autant de journalistes n'ont été tué·es en si peu de temps, ni durant les deux guerres mondiales, ni au cours d'aucune autre guerre.

Le conflit à Gaza ne fait pas figure d'exception à ce seul titre. Jamais les organisations de défense du droit d'informer n'ont observé pareil acharnement contre les journalistes dans un conflit armé. À Gaza, tous les moyens sont bons pour recouvrir les crimes israéliens d'une chape de plomb. Depuis le 7 octobre 2023, aucun journaliste étranger n'a été autorisé à pénétrer dans l'enclave, sous blocus médiatique. Et quand les intimidations, les arrestations arbitraires et la torture ne suffisent pas à réduire au silence les journalistes palestinien·nes, Israël les cible délibérément.

Parmi les plus de 170 journalistes tué·es par l'armée israélienne, beaucoup portaient un gilet « press » et étaient clairement identifiables lorsqu'ils ou elles ont été pris·es pour cible par un drone, une frappe ou un tir d'artillerie. Dans l'enclave palestinienne, les journalistes sont fui·es comme la mort, associé·es dans l'esprit des habitant·es à l'idée d'une fin imminente.

Réunissant cinquante journalistes issu·es de dix-huit médias internationaux, le réseau international Forbidden Stories a enquêté sur les ciblages systématiques des reporters à Gaza et entrepris de poursuivre le travail inachevé de plusieurs d'entre elles et eux. Surtout, le « Projet Gaza » met en évidence la manière dont l'État israélien ne se contente pas de viser les journalistes, mais met en œuvre diverses stratégies pour n'avoir jamais à rendre compte de ces violations flagrantes du droit international. Entretien avec Laurent Richard, fondateur et directeur de Forbidden Stories.

Mediapart : Comment vous est venue l'idée de conduire cette enquête et comment l'avez-vous menée ?

Laurent Richard : Cette enquête s'est imposée brutalement et de façon très évidente. Face à l'hécatombe des journalistes à Gaza, on a vite saisi la nécessité, avec plusieurs partenaires, de mener un projet d'ampleur pour documenter les ciblages de journalistes. On a alors essayé d'assembler une équipe complémentaire, avec des compétences différentes. L'idée était à la fois de mener un travail en sources ouvertes ou en visualisation 3D, mais aussi un travail de terrain, avec des confrères beaucoup plus connectés aux journalistes locaux à Gaza, pour recueillir des témoignages et des données cartographiques, et enfin une autre équipe plus qualifiée sur le volet du droit international et du droit de la guerre.

Le Projet Gaza poursuit deux objectifs : d'une part, déterminer dans quelles conditions des journalistes à Gaza ont pu être tués, savoir s'ils ont été tués parmi d'autres civils en tant que civils ou si certains ont été visés précisément parce qu'ils étaient journalistes. Ensuite, une fois qu'on comprenait qu'ils avaient été délibérément ciblés, notre travail a consisté à repérer les récurrences afin d'identifier des méthodes de ciblage.

Ce que je veux aussi souligner, c'est qu'on a travaillé avec des journalistes israéliens et palestiniens, mais aussi américains, allemands, français, etc. Et je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de projets collaboratifs, depuis le 7-Octobre, qui incluent autant de nationalités, compte tenu de la sensibilité du sujet, devant lequel des rédactions ont parfois reculé. C'est un vrai signal, pas seulement de solidarité avec nos confrères palestiniens, mais aussi de responsabilité journalistique, éditoriale, devant un conflit où l'accès au terrain nous a été interdit, fait inédit dans l'histoire moderne des guerres, où plus de 50 000 personnes ont déjà été tuées, et où ceux qui essayent de raconter, de témoigner de ces crimes, de ces ravages au quotidien sont directement visés.

Nous ne sommes pas en train de dire que les vies des journalistes valent plus que celles des autres. À travers ce projet, on a voulu rappeler l'importance du journalisme dans les zones de guerre, pour défendre aussi ce qui relève du droit international et pour rappeler que les guerres doivent pouvoir être observées par des ONG et des journalistes sur le terrain.

Au bout de plusieurs mois d'enquête, vous arrivez à la conclusion qu'Israël a délibérément tué des journalistes de la bande de Gaza, pour empêcher la documentation des crimes de guerre qu'il y commet.

Au-delà des crimes de guerre, Israël cherche à empêcher la documentation de la situation sanitaire catastrophique à Gaza, où 95 % des infrastructures hospitalières ont été endommagées, et de l'état de famine, en grande partie causée par le blocage de l'aide alimentaire. Or, si les journalistes ne peuvent documenter ces crimes, ceux-ci risquent de se multiplier en toute impunité.

À Forbidden Story, notre ADN n'est pas de faire du plaidoyer pour demander au gouvernement de mener des enquêtes et de prendre des sanctions, des organisations remplissent déjà très bien cette fonction. Notre rôle, comme réseau de journalistes d'investigation, est de s'attacher aux faits, de les raconter et de les publier. Or, le problème de la bande de Gaza et de la guerre qui s'y déroule depuis le 7 octobre 2023, c'est que le gouvernement israélien mène une guerre contre les faits et contre l'avènement de la vérité. Et ce, en différents points.

Plusieurs sources internes à l'armée israélienne nous ont fait part de consignes qui ne font aucune distinction entre journalistes et combattants.

D'abord, évidemment, en ciblant ceux qui portent les faits et rendent compte de la réalité : les journalistes. À Gaza, le gilet pare-balles ne protège plus, au contraire, il expose. Les salles de rédaction, ultimes refuges des journalistes de l'enclave, sont aussi ciblées par l'armée israélienne. On avait par exemple montré, en géolocalisant les chars depuis lesquels les munitions avaient été tirées, que la tour qui abritait les bureaux de l'AFP à Gazaavait été délibérément visée par l'armée israélienne, alors qu'elle avait été clairement identifiée et déclarée auprès des autorités israéliennes comme le siège d'une agence de presse internationale. La connexion internet et l'électricité sont également régulièrement coupées.

Vous documentez notamment la manière dont l'armée israélienne cible particulièrement les journalistes utilisant des drones. Pourquoi ? Qu'ont-ils à montrer au public qu'Israël voudrait cacher ?

En situation de guerre, les drones sont extrêmement importants pour les journalistes dans la collecte d'informations, en ce qu'ils permettent de montrer de façon très précise et factuelle la destruction et les ravages de la guerre. Dans le Projet Gaza 2, on a réalisé une première, en tout cas à l'échelle de Gaza : on a fait tourner des drones au-dessus de deux villes de Gaza, Jabalia et Al-Shati, pour ensuite modéliser ces images en 3D et avoir une vision des destructions à échelle humaine. Une sorte de « Google Ruines View ».

Nous avons documenté plusieurs cas de journalistes opérant des drones qui ont vu leur appareil être abattu, ou ont eux-mêmes été abattus, comme Mahmoud Islim al-Basos, avec qui on a travaillé jusqu'à ce qu'il soit tué, ou Mustafa Thuraya, accusé sans preuve par l'armée israélienne d'être un terroriste travaillant pour le Hamas. Plusieurs journalistes ont aussi essuyé des tirs après avoir utilisé des drones.

Des documents internes à l'État israélien montrent que les dispositifs d'enquête propres à l'armée israélienne sont détournés pour la protéger de poursuites internationales.

De manière générale, plusieurs sources internes à l'armée israélienne nous ont fait part de consignes qui ne font aucune distinction entre journalistes et combattants : si les soldats voient un drone, ils doivent l'abattre, peu importe qui en est l'opérateur. Cette absence de distinction, nous l'avons observée dans des mémos internes auxquels nous avons pu accéder.

En 2020, une note interne du bureau du procureur général israélien s'inquiétait ainsi des propos tenus par le ministre de la défense de l'époque, Avigdor Liberman, qui avait déclaré, à la suite du ciblage du reporter Yasser Murtaja, tué alors qu'il couvrait la Grande Marche du retour en 2018 : « Je ne sais pas qui il est, photographe ou non, mais quiconque utilise un drone au-dessus des soldats des forces de défense israéliennes doit comprendre qu'il se met en danger. » Des déclarations donnant l'indication qu'aucune différence n'est faite entre « les journalistes et les activistes qui lancent des drones au-dessus des forces armées israéliennes », s'alarme une note interne. Or, le droit de la guerre prévoit qu'on ne peut tirer sur une cible que si elle participe activement au combat.

Il y a les crimes que commet Israël à Gaza, largement documentés par la presse internationale et les ONG, et ce qu'il met en œuvre pour assurer son impunité. Vous documentez aussi la manière dont Israël fait entrave à la marche de la justice.

On montre effectivement, dans le deuxième volet de notre Projet Gaza, la manière dont les autorités israéliennes, le ministère de la justice en tête, tentent de s'exonérer de leurs responsabilités juridiques, en développant des stratagèmes destinés à éviter les poursuites de la Cour pénale internationale (CPI). Par exemple, le principe de complémentarité prévoit qu'une affaire n'est pas recevable devant la CPI si une poursuite est déjà engagée pour les mêmes crimes devant un tribunal national. Sauf que ces enquêtes sont généralement artificiellement enlisées et dépassent rarement un taux d'élucidation de 1 %. Rien qu'entre 2001 et la guerre actuelle, au moins dix-huit journalistes palestiniens et deux étrangers avaient été tués par l'armée israélienne. Selon le CPJ, personne n'a jamais été inculpé.

Des documents internes à l'État israélien montrent ainsi que les dispositifs d'enquête propres à l'armée israélienne sont détournés pour la protéger de poursuites internationales. Par ailleurs, le ministère de la justice a aussi obtenu le vote d'une loi qui prévoit de sanctionner toute entité israélienne qui participerait aux actions demandées, aux requêtes portées par la CPI.

Ensuite, nous démontrons aussi qu'Israël mène de manière systémique de puissantes campagnes de discrédit en ligne pour faire croire que les journalistes tombés sous ses balles ou ses bombes sont des terroristes, en apportant toujours des preuves assez fragiles. Nous documentons notamment le cas du photographe Yasser Qudih, accusé par une ONG pro-israélienne d'avoir été prévenu par le Hamas en amont de l'attaque du 7 octobre 2023, alors que nos analyses, s'appuyant sur les métadonnées de son appareil photo, attestent qu'il est entré en Israël pour prendre des photos plus de deux heures après les attaques. Sur la base de ces allégations non vérifiées, sa maison a été bombardée, tuant huit membres de sa famille. Il a ensuite été contraint de renoncer à son métier et à fuir vers l'Égypte.

Yunnes Abzouz

P.-S.

• MEDIAPART. 14 avril 2025 à 18h27 :
https://www.mediapart.fr/journal/international/140425/gaza-le-gouvernement-israelien-mene-une-guerre-contre-les-faits-et-contre-la-verite

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Discussion Mélenchon – Ghazal : quelles directions pour la gauche québécoise ?

22 avril, par Gaëtan Beghin — ,
Hier était l'occasion d'une discussion entre Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France Insoumise et Ruba Ghazal, co-porte-parole féminine de Québec solidaire. Le thème (…)

Hier était l'occasion d'une discussion entre Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France Insoumise et Ruba Ghazal, co-porte-parole féminine de Québec solidaire. Le thème annoncé : comment contrer la montée des droites ?

Le format de discussion autour de ce thème est resté flou jusqu'au dernier moment. On parlait de conférence, tantôt de meeting. Toutefois, sans avoir le don de voyance, ou être dans les petits papiers des organisateurs, il était possible d'imaginer qu'il existerait une opposition de lecture politique et stratégique entre les deux figures politiques.

La rupture et l'accompagnement

Depuis son départ du parti socialiste en 2008, Jean-Luc Mélenchon développe sa théorie politique de l'ère du peuple et de la révolution citoyenne. Pour écorcher son travail en peu de mots : l'humanité, majoritairement citadine au XXIe siècle, est dépendante de réseaux collectifs pour sa survie (p.ex., eau électricité, gaz, téléphonie, etc.). Le rapport de force politique se structure autour de l'accès et du contrôle de ces réseaux : qui en a le contrôle entre le collectif ou des intérêts particuliers privés ? De cette théorie découle un programme politique. Schématiquement : il faut placer sous contrôle démocratique les réseaux et, pour ce faire, il faut entrer en rupture avec le système productif capitaliste, qui menace la survie de l'humanité. La stratégie politique qui en résulte est en cohérence avec la pensée et le programme. Pour accéder au pouvoir, la France Insoumise cherche à faire voter les plus susceptibles de pâtir du manque d'accès à ces réseaux : les classes populaires. Ce sont toutefois les personnes qui sont les plus susceptibles de ne plus voter du fait de l'échec de la social-démocratie à tenir ses promesses (p. ex., mandat de François Hollande en 2012 en France). Dit autrement, la France Insoumise cherche à se faire élire par ceux qui ne votent plus, mais sont susceptibles de partager leurs intérêts. Il semble important de noter que cet électorat est difficilement mobilisable. Par ailleurs, il n'est pas certain qu'un recul important de l'abstention ne bénéficierait pas aussi à l'extrême droite dans le cas français.

En contraste, Québec solidaire a fait un autre choix stratégique. À ma connaissance, la pratique politique chez Québec solidaire n'est pas guidée par une théorie politique spécifique. Le parti se fonde sur sa déclaration de 2006 et de son programme (en cours de révision). Dans la déclaration de principes, nous retrouvons la volonté de rompre avec le système néolibéral pour défendre les intérêts communs. Dans la déclaration de 2009, QS se donne pour mission de dépasser le capitalisme. Ici aussi, nous retrouvons l'idée d'une rupture avec le système en place. Le parti a initialement connu une progression dans les centres urbains et a même fait une percée historique en Abitibi en 2018. L'arrivée de Gabriel Nadeau-Dubois (GND) comme co-porte-parole masculin a affirmé le changement stratégique du parti. Pour obtenir le pouvoir, les dirigeants ont fait le choix d'aller chercher les voix des personnes qui votaient déjà, mais pas pour eux, c'est-à-dire les voix du centre. Apparait alors le mouvement de centralisation du parti. Toutefois, si vous cherchez à obtenir les voix des votants moins à gauche que vous, vous devez modifier vos positions pour qu'elles correspondent à celles des personnes à votre droite. Cela vient toutefois avec le risque que, bien que vous soyez la figure de gauche préférée des gens de droite, ils préfèrent voter pour l'original plutôt que pour la copie.

La centralisation du parti a été critiquée par une part significative des militant.es et s'est soldée par la démission de GND il y a quelques semaines. Depuis, la stratégie du parti est moins évidente. Les dirigeants envoient des signaux à leur aile gauche, mais poursuivent les réformes entamées précédemment (p. ex., révision des statuts et du programme). À ce stade, les intentions du parti ne sont pas claires : vont-ils entamer un véritable virage stratégique ou vont-ils chercher à jouer sur les deux tableaux pour ménager la chèvre et le chou ?

Quoi qu'il en soit, il semble préexister à cette rencontre des divergences stratégiques et politiques entre LFI et QS. Nous pouvions donc nous attendre à retrouver cette divergence lors de la rencontre.

Cachez cette gauche que je ne veux pas voir

L'ambivalence du parti dans sa stratégie politique s'est fait sentir dans l'organisation de la conférence avec JLM. Après l'annonce de la visite de la délégation insoumise au Québec, il n'a pas fallu trop attendre pour avoir une réaction médiatique qui offrirait à QS la possibilité ou non de se distancier de JLM. Finalement, la position fut entre les deux : « une discussion, sans plus », « pas un mariage, une conférence », la chèvre et le chou.

Par ailleurs, celle-ci a continué dans l'organisation même de l'évènement : une salle de 400 places a été réservée pour l'évènement alors que la conférence de la veille - avec Jean-Luc Mélenchon seul - faisait salle comble à prêt de 600 personnes. Face à l'engouement pour l'évènement (1000 personnes auraient communiqué leur intérêt), le parti a dû finalement s'adapter et mettre en place une billetterie et une diffusion live. Les militants n'ont pas été sollicités pour l'organisation.
Résultat : de la confusion chez les militants et des participants dans la file de l'évènement qui ne savaient pas à quoi s'en tenir. Une centaine de personnes sont restées dehors. La chèvre grignote le chou.

Nous pouvons nous questionner à savoir si cette situation est la résultante d'une erreur d'organisation, d'une crainte du parti d'assumer clairement ses liens avec la gauche qui ne se veut pas respectable ou d'une impossibilité (une honte ?) à imaginer qu'il existe un public nombreux pour une telle gauche.

Le format du compromis

Le format tombe au début de l'évènement : 30 minutes chacun pour un discours (un beau défi pour le président de l'institut la Béotie) et une discussion finale où JLM répondait à des questions de stratégie. La question de l'opposition est écartée – les divergences ne seront pas nommées ou discutées.

Le discours de la co-porte-parole de Québec solidaire était plus à gauche qu'à l'habitude ou plus assumé. Exit la psychologisation de Donald Trump comme le « psychopathe ». On parle de « capitalisme financiarisé, dérégulé, destructeur et générateur d'inégalités socioéconomiques », on nomme les origines coloniales du Québec, on reconnait la construction de l'autre jusqu'à l'Assemblée Nationale. Finalement, au-delà du dispositif qui écarte les divergences entre QS et LFI, il semble qu'elles se soient volatilisées à la porte d'entrée du théâtre. Au contraire, on donne des gages à gauche. Le chou prend sa revanche sur la chèvre.

Dans ses réponses, Mélenchon aborde frontalement les questions stratégiques qui traversent la gauche - et particulièrement QS. Il souligne l'importance du clivage, rejette la question de la respectabilité auprès de nos adversaires politiques et médiatiques. Le mot d'ordre est clair : le clivage c'est l'inverse la confusion, ne cherchez pas à vous faire respecter de gens qui sont vos adversaires, au contraire, faites-vous aimer des gens que vous défendez.

Les militants ressortent de cette conférence électrisés, mais la méfiance demeure. Le chou va-t-il vraiment prendre le pas sur la chèvre ?

La chèvre qui se prenait pour un bœuf

Que conclure de cet évènement ? Est-elle l'amorce de la nouvelle réflexion stratégique de QS tant demandée par ses militants ou une façade qui a pour fonction de calmer l'aile gauche du parti et paraitre respectable auprès de la gauche française ?

Le risque est qu'après le passage de JLM, les choses reviennent « business as usual ». Ce qui est certain, c'est que le parti va devoir prendre une décision, car le statuquo semble difficilement tenable. Les crises se succèdent dans le parti, les militants se démobilisent et les sondages n'augurent rien de bon.

QS est aujourd'hui le seul parti de gauche institutionnel au Québec. Il semble toutefois suivre le même chemin que les partis socio-démocrates et socio-libéraux du monde entier (du PS français, au NPD canadien), ce qui signifie le risque de partager le même destin. La nature a horreur du vide, si QS laisse son espace pour aller plus au centre, il risque d'être pris à revers par d'autres propositions.

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Le Buy Canadian Act du Bloc ou l’abdication de l’idée de l’Indépendance

22 avril, par Climat Québec, Martine Ouellet — , ,
La prise de position d'Yves-François Blanchet en faveur d'un Buy Canadian Act est hautement révélatrice. Après avoir annoncé la mise sur pause de la souveraineté pendant au (…)

La prise de position d'Yves-François Blanchet en faveur d'un Buy Canadian Act est hautement révélatrice.

Après avoir annoncé la mise sur pause de la souveraineté pendant au moins un an et répété, pour une troisième élection consécutive, son intention de collaborer avec le gouvernement canadien élu, cet engagement électoral ajouté à celui de doter le Canada d'un ministre de la frontière canadienne confirment que le Bloc ne travaille pas pour la création de la République du Québec, bien au contraire. En pleine campagne électorale, au moment où la couverture médiatique est à son apogée, Yves-François Blanchet prend des engagements électoraux pro-Canada en contradiction totale avec l'idée d'indépendance du Québec. Il agit ainsi comme n'importe quel parti fédéraliste canadien.

Pourquoi favoriser les compagnies canadiennes avec un Buy Canadian Act, si cela signifie que des entreprises d'ailleurs au Canada viendront rafler les contrats aux dépens des compagnies québécoises ? L'exemple de la Davie qui a été désavantagée à outrance face à Irving illustre bien cette réalité. Quant aux slogans du Bloc– « Je choisis la laïcité », « Je choisis le français » – ils sonnent creux. En tant que parti confiné au Québec, le Bloc n'a aucune chance de prendre le pouvoir et donc de « choisir » quoi que ce soit. Même la laïcité qu'il veut défendre est contestée par Ottawa. Pire encore, en agissant comme n'importe quel parti d'opposition à Sa Majesté le roi, il confirme qu'il ne se distingue en rien des autres oppositions fédéralistes. En reniant ses convictions indépendantistes, le Bloc revient à la même question existentielle : qu'est-ce que ça donne le Bloc ?

La nouvelle dérive indépendantiste : La stabilité économique

Cette dérive vers le fédéralisme ne se limite pas au Bloc. Paul St-Pierre Plamondon adopte la même approche, comme en témoigne la partielle dans Terrebonne. Une nouvelle condition a été ajoutée à la réalisation de l'indépendance : la stabilité économique. Il a affirmé qu'il ne fera pas de référendum en pleine guerre tarifaire. C'est loin d'être la première guerre tarifaire et ce ne sera pas la dernière – il suffit de regarder le dossier du bois d'œuvre. Au contraire, face à Trump, l'indépendance du Québec est plus que jamais essentielle pour protéger notre économie et notre territoire. Ce n'est certainement pas le Canada qui le fera à notre place ; l'histoire nous enseigne plutôt que le Québec a souvent été sacrifié pour favoriser les intérêts du « Rest of Canada ». Rendu à ce point, croire que collaborer avec le Canada nous aidera relève non plus de la naïveté, mais du syndrome de Stockholm.

La République du Québec plus nécessaire que jamais

Il faut le dire haut et fort : un Québec pays serait bien mieux équipé pour négocier face à Trump que toutes les manœuvres des Trudeau, Carney, Poilievre ou Ford. Il est évident, qu'un Québec en marche vers son indépendance posséderait bien plus de poids à l'international qu'un Québec qui se met sur pause. Nous sommes une grande nation avec de nombreux atouts. Ne laissez pas messieurs St-Pierre Plamondon et Blanchet vous convaincre du contraire. Pour réussir la République du Québec, il va falloir que les indépendantistes arrêtent d'appuyer des leaders qui ne font qu'inventer des épouvantails pour justifier leur démission de la cause.

Martine Ouellet
Cheffe, Climat Québec
Ancienne cheffe du Bloc québécois

SOURCE :

climat.quebec

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Sommet santé et sécurité du travail 2025 : Bilan et perspectives 2025

22 avril, par Confédération des syndicats nationaux (CSN) — ,
Cette édition de Bilan et perspectives se place juste après un grand événement intersyndical qui visait à couronner le processus de cinq années de mobilisation suivant la (…)

Cette édition de Bilan et perspectives se place juste après un grand événement intersyndical qui visait à couronner le processus de cinq années de mobilisation suivant la réforme des régimes de santé et de sécurité du travail (SST). Ces deux derniers jours, nous avons partagé la juste mesure des changements et des défis en SST et avons échangé entre travailleuses et travailleurs sur les meilleures stratégies à adopter pour prendre en charge la SST dans les milieux de travail. Cette troisième journée sera l'occasion d'entrevoir nos perspectives politiques, propres à la CSN, qui guideront nos actions à venir.

Un rappel du chemin parcouru

Le 30 septembre 2021, le projet de loi no 59 modernisant le régime de santé et de sécurité du travail a été adopté. Cette mesure législative est venue créer la nouvelle loi 27 qui a ajouté plusieurs articles à la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) et de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) ou qui en a modifié plusieurs articles.

Cette réforme prévoyait également une échéance pour adopter au sein de la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) un règlement afin de mettre en vigueur le nouveau régime de prévention. Durant cette période, les organisations syndicales présentes au conseil d'administration de la CNESST ont mis tous leurs efforts afin de négocier le règlement le plus favorable possible pour les travailleuses et les travailleurs.

La prévention en milieu de travail a toujours été au cœur des revendications de la CSN. Conséquemment, en marge de ces négociations, la confédération et les autres organisations syndicales et sociales actives en SST se sont mobilisées pour dénoncer les nombreux contrecoups que doivent encaisser les syndiqué-es et les non-syndiqué-es, suivant l'adoption de la loi 27. De plus, durant les négociations, les organisations syndicales siégeant à la CNESST ont maintenu la pression pour empêcher que les groupes prioritaires perdent certaines protections en matière de prévention. Elles ont défendu des revendications essentielles face aux représentants patronaux, qui cherchaient à affaiblir ces protections. Ensemble, nous avons également milité pour que les mêmes protections soient applicables de façon intégrale à toutes et à tous, et ce, peu importe le secteur d'activité.

Bilan et perspectives 2025 sera donc l'occasion pour la CSN de partager nos bilans tout en explorant les nombreuses implications des nouveaux régimes en SST pour nos milieux de travail.

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États-Unis : L’essor du fascisme de fin des temps

22 avril, par Naomi Klein, AstraTaylor — ,
L'idéologie dominante de l'extrême droite est devenue un survivalisme suprémaciste monstrueux. Notre tâche est de construire un mouvement suffisamment fort pour les arrêter. (…)

L'idéologie dominante de l'extrême droite est devenue un survivalisme suprémaciste monstrueux. Notre tâche est de construire un mouvement suffisamment fort pour les arrêter.

Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
13 avril 2025

Par Naomi Klein, Astra Taylor

Le mouvement pour les cités-États corporatives n'en croit pas sa chance. Depuis des années, il promeut l'idée extrême que les personnes fortunées allergiques aux impôts devraient créer leurs propres fiefs high-tech, qu'il s'agisse de nouveaux pays sur des îles artificielles en eaux internationales (« seasteading ») ou de « villes de liberté » favorables aux entreprises comme Próspera, une communauté fermée glorifiée combinée à un spa médical de type far west sur une île hondurienne.

Pourtant, malgré le soutien de capitalistes-risqueurs influents comme Peter Thiel et Marc Andreessen, leurs rêves libertariens extrêmes n'ont cessé de s'enliser : il s'avère que la plupart des riches qui se respectent ne veulent pas réellement vivre sur des plates-formes pétrolières flottantes, même si cela signifie des impôts plus bas, et si Próspera peut être agréable pour des vacances et quelques « améliorations » corporelles, son statut extra-national est actuellement contesté devant les tribunaux.

Aujourd'hui, ce réseau autrefois marginal de sécessionnistes corporatifs se retrouve soudainement à frapper à des portes grandes ouvertes au cœur même du pouvoir mondial.

Le premier signe que la fortune changeait de camp est venu en 2023, lorsque Donald Trump, en campagne, a promis, comme sorti de nulle part, d'organiser un concours qui mènerait à la création de 10 « villes de liberté » sur des terres fédérales. Ce ballon d'essai est passé presque inaperçu à l'époque, perdu dans le déluge quotidien de déclarations outrancières. Depuis l'entrée en fonction de la nouvelle administration, cependant, les aspirants fondateurs de pays se sont lancés dans une offensive de lobbying, déterminés à transformer la promesse de Trump en réalité.

« L'énergie à Washington est absolument électrique, » s'est récemment enthousiasmé Trey Goff, le chef de cabinet de Próspera, après un voyage au Capitole. Selon lui, une législation ouvrant la voie à une multitude de cités-États corporatives devrait être finalisée d'ici la fin de l'année.

Inspirés par le philosophe politique Albert Hirschman, des personnalités comme Goff, Thiel et l'investisseur et écrivain Balaji Srinivasan défendent ce qu'ils appellent la « sortie » – le principe selon lequel ceux qui en ont les moyens ont le droit de se soustraire aux obligations de la citoyenneté, notamment les impôts et les réglementations contraignantes. Réadaptant et rebaptisant les anciennes ambitions et privilèges des empires, ils rêvent de fragmenter les gouvernements et de découper le monde en havres hypercapitalistes, libérés de la démocratie, sous le contrôle exclusif des plus fortunés, protégés par des mercenaires privés, servis par des robots IA et financés par des cryptomonnaies.

On pourrait penser qu'il est contradictoire pour Trump, élu sur une plateforme patriotique « L'Amérique d'abord », de cautionner cette vision de territoires souverains gouvernés par des milliardaires se prenant pour des dieux. Et on a beaucoup parlé des guerres enflammées entre le porte-parole de MAGA Steve Bannon, fier nationaliste et populiste, et les milliardaires alliés à Trump qu'il a attaqués comme des « technoféodalistes » qui « se fichent complètement de l'être humain » – et encore moins de l'État-nation. Des conflits existent certainement au sein de la coalition bancale et improvisée de Trump, atteignant récemment un point d'ébullition sur la question des tarifs douaniers. Pourtant, les visions sous-jacentes ne sont peut-être pas aussi incompatibles qu'elles le paraissent au premier abord.

Le contingent des pays start-up envisage clairement un avenir marqué par les chocs, la pénurie et l'effondrement. Leurs domaines privés high-tech sont essentiellement des capsules de sauvetage fortifiées, conçues pour que quelques élus puissent profiter de tous les luxes possibles et des opportunités d'optimisation humaine, leur donnant, à eux et à leurs enfants, un avantage dans un avenir de plus en plus barbare. Pour dire les choses crûment, les personnes les plus puissantes du monde se préparent à la fin du monde, une fin qu'elles-mêmes accélèrent frénétiquement.

Ce n'est pas si éloigné de la vision plus grand public des nations fortifiées qui a saisi la droite dure à l'échelle mondiale, de l'Italie à Israël, de l'Australie aux États-Unis : en ces temps de périls incessants, des mouvements ouvertement suprémacistes dans ces pays positionnent leurs États relativement riches comme des bunkers armés. Ces bunkers sont brutaux dans leur détermination à expulser et emprisonner les humains indésirables (même si cela nécessite une détention indéfinie dans des colonies pénales extra-nationales, de l'île de Manus à la baie de Guantánamo) et tout aussi impitoyables dans leur volonté de s'emparer violemment des terres et des ressources (eau, énergie, minéraux critiques) qu'ils jugent nécessaires pour résister aux chocs à venir.

Fait intéressant, à une époque où les élites autrefois laïques de la Silicon Valley trouvent soudainement Jésus, il est à noter que ces deux visions – l'État corporatif à accès prioritaire et la nation-bunker grand public – partagent de nombreux points communs avec l'interprétation fondamentaliste chrétienne de l'Enlèvement biblique, lorsque les fidèles seront supposément élevés vers une cité dorée au ciel, tandis que les damnés resteront pour endurer une bataille apocalyptique finale ici-bas.

Si nous voulons être à la hauteur de ce moment critique de l'histoire, nous devons reconnaître la réalité : nous ne sommes pas confrontés à des adversaires que nous avons déjà vus. Nous sommes confrontés au fascisme de fin des temps.

Réfléchissant à son enfance sous Mussolini, le romancier et philosophe Umberto Eco a observé dans un essai célèbre que le fascisme a typiquement un « complexe d'Armageddon » – une fixation sur la destruction des ennemis dans une grande bataille finale. Mais le fascisme européen des années 1930 et 1940 avait aussi un horizon : une vision d'un futur âge d'or après le bain de sang qui, pour son groupe d'appartenance, serait paisible, pastoral et purifié. Pas aujourd'hui.

Conscients des dangers existentiels réels de notre époque – du bouleversement climatique à la guerre nucléaire, en passant par l'inégalité montante et l'IA non réglementée – mais financièrement et idéologiquement engagés à approfondir ces menaces, les mouvements d'extrême droite contemporains manquent de toute vision crédible d'un avenir prometteur. L'électeur moyen ne se voit offrir que des remix d'un passé révolu, aux côtés des plaisirs sadiques de la domination sur un assemblage toujours plus grand d'autres déshumanisés.

Et c'est ainsi que nous avons l'administration Trump qui s'emploie à diffuser un flux constant de propagande réelle et générée par l'IA, conçue uniquement à des fins pornographiques. Des séquences d'immigrants enchaînés embarqués dans des vols d'expulsion, accompagnées de bruits de chaînes qui s'entrechoquent et de menottes qui se verrouillent, que le compte X officiel de la Maison Blanche a étiquetées « ASMR », en référence à des sons conçus pour calmer le système nerveux. Ou le même compte partageant la nouvelle de la détention de Mahmoud Khalil, un résident permanent américain qui était actif dans le campement pro-palestinien de l'Université de Columbia, avec les mots narquois : « SHALOM, MAHMOUD. » Ou n'importe laquelle des séances photo sadiques-chic de la secrétaire à la Sécurité intérieure Kristi Noem (juchée sur un cheval à la frontière américano-mexicaine, devant une cellule de prison bondée au Salvador, portant une mitrailleuse lors de l'arrestation d'immigrants en Arizona...).

L'idéologie dominante de l'extrême droite à notre époque de catastrophes croissantes est devenue un survivalisme suprémaciste monstrueux.

C'est terrifiant dans sa perversité, oui. Mais cela ouvre également de puissantes possibilités de résistance. Parier contre l'avenir à cette échelle – miser sur son bunker – c'est trahir, au niveau le plus fondamental, nos devoirs les uns envers les autres, envers les enfants que nous aimons, et envers toute autre forme de vie avec qui nous partageons une maison planétaire. C'est un système de croyances génocidaire dans son essence et traître à l'émerveillement et à la beauté de ce monde. Nous sommes convaincus que plus les gens comprendront jusqu'à quel point la droite a succombé au complexe d'Armageddon, plus ils seront prêts à riposter, réalisant que tout est désormais en jeu.

Nos adversaires savent parfaitement que nous entrons dans une ère d'urgence, mais ils ont réagi en embrassant des illusions mortelles mais égoïstes. Ayant adhéré à diverses fantasmes d'apartheid de sécurité bunkerisée, ils choisissent de laisser la Terre brûler. Notre tâche est de construire un mouvement large et profond, aussi spirituel que politique, suffisamment fort pour arrêter ces traîtres dérangés. Un mouvement enraciné dans un engagement indéfectible les uns envers les autres, par-delà nos nombreuses différences et divisions, et envers cette planète miraculeuse et singulière.

Il n'y a pas si longtemps, c'étaient principalement les fondamentalistes religieux qui accueillaient les signes d'apocalypse avec une excitation joyeuse concernant l'Enlèvement tant attendu. Trump a confié des postes cruciaux à des personnes qui souscrivent à cette orthodoxie ardente, y compris plusieurs sionistes chrétiens qui voient l'utilisation par Israël de la violence anéantissante pour étendre son empreinte territoriale non pas comme des atrocités illégales, mais comme des preuves heureuses que la Terre Sainte se rapproche des conditions dans lesquelles le Messie reviendra, et les fidèles obtiendront leur royaume céleste.

Mike Huckabee, le nouvel ambassadeur confirmé de Trump en Israël, a des liens étroits avec le sionisme chrétien, tout comme Pete Hegseth, son secrétaire à la Défense. Noem et Russell Vought, l'architecte du Projet 2025 qui dirige maintenant le Bureau du budget et de la gestion, sont tous deux de fervents défenseurs du nationalisme chrétien. Même Thiel, qui est gay et notoirement connu pour son style de vie festif, a récemment été entendu méditant sur l'arrivée de l'Antéchrist (spoiler : il pense que c'est Greta Thunberg, nous y reviendrons bientôt).

Mais vous n'avez pas besoin d'être un littéraliste biblique, ni même religieux, pour être un fasciste de fin des temps. Aujourd'hui, de nombreuses personnes puissantes et laïques ont adopté une vision de l'avenir qui suit un scénario presque identique, dans lequel le monde tel que nous le connaissons s'effondre sous son propre poids et quelques élus survivent et prospèrent dans divers types d'arches, de bunkers et de « villes de liberté » fermées. Dans un article de 2019 intitulé « Left Behind : Future Fetishists, Prepping and the Abandonment of Earth » (Laissés pour compte : Les fétichistes du futur, la préparation et l'abandon de la Terre), les chercheurs en communication Sarah T. Roberts et Mél Hogan ont décrit le désir d'un Enlèvement séculier : « Dans l'imaginaire accélérationniste, l'avenir ne concerne pas la réduction des préjudices, les limites ou la restauration ; il s'agit plutôt d'une politique qui mène vers une finalité. »

Elon Musk, qui a considérablement accru sa fortune aux côtés de Thiel chez PayPal, incarne cette éthique implosive. C'est une personne qui regarde les merveilles du ciel nocturne et ne voit apparemment que des opportunités de remplir cet inconnu d'encre avec ses propres déchets spatiaux. Bien qu'il ait bâti sa réputation en alertant sur les dangers de la crise climatique et de l'IA, lui et ses acolytes du soi-disant « département d'efficacité gouvernementale » (Doge) passent maintenant leurs journées à intensifier ces mêmes risques (et bien d'autres) en supprimant non seulement les réglementations environnementales, mais des agences réglementaires entières, avec l'objectif apparent de remplacer les fonctionnaires fédéraux par des chatbots.

Qui a besoin d'un État-nation fonctionnel quand l'espace extra-atmosphérique – désormais présenté comme l'obsession singulière de Musk – fait signe ? Pour Musk, Mars est devenue une arche séculière, qu'il considère comme essentielle à la survie de la civilisation humaine, peut-être via des consciences téléchargées dans une intelligence artificielle générale. Kim Stanley Robinson, l'auteur de la trilogie de science-fiction sur Mars qui semble avoir partiellement inspiré Musk, est direct quant aux dangers des fantasmes du milliardaire sur la colonisation de Mars. C'est, dit-il, « juste un risque moral qui crée l'illusion que nous pouvons détruire la Terre et nous en sortir quand même. C'est totalement faux. »

Tout comme les adeptes religieux de la fin des temps qui aspirent à échapper au royaume corporel, la volonté de Musk de faire de l'humanité une espèce « multiplanétaire » est rendue possible par son incapacité à apprécier la splendeur multi-espèces de notre seule maison. Manifestement désintéressé par l'abondance qui l'entoure, ou par la nécessité de s'assurer que la Terre puisse continuer à bourdonner de diversité, il déploie plutôt son immense fortune pour faire advenir un avenir qui verrait une poignée de personnes et de robots survivre péniblement sur deux orbes stériles (une Terre radicalement appauvrie et une Mars terraformée). En effet, dans une étrange variante du récit de l'Ancien Testament, Musk et ses collègues milliardaires de la tech, s'étant arrogé des pouvoirs divins, ne se contentent pas de construire les arches. Ils semblent faire de leur mieux pour provoquer le déluge. Les dirigeants d'extrême droite d'aujourd'hui et leurs riches alliés ne se contentent pas de profiter des catastrophes, dans le style du capitalisme du désastre, mais les provoquent et les planifient simultanément.

Qu'en est-il de la base MAGA, cependant ? Tous ne sont pas suffisamment croyants pour croire sincèrement à l'Enlèvement, et la plupart n'ont certainement pas l'argent pour acheter une place dans une « ville de liberté », et encore moins dans une fusée. N'ayez crainte. Le fascisme de fin des temps offre la promesse de nombreuses arches et bunkers plus abordables, ceux-là bien à la portée des soldats de base de moindre niveau.

Écoutez le podcast quotidien de Steve Bannon – qui se présente comme le principal média de MAGA – et vous serez bombardé d'un message singulier : le monde va à l'enfer, les infidèles franchissent les barricades, et une bataille finale approche. Soyez prêts. Le message des « preppers » devient particulièrement prononcé lorsque Bannon passe à la promotion des produits de ses annonceurs. Achetez Birch Gold, dit Bannon à son public, car l'économie américaine surendettée va s'effondrer et vous ne pouvez pas faire confiance aux banques. Faites des provisions de repas prêts à manger de My Patriot Supply. Affinez votre entraînement au tir en utilisant un système domestique guidé par laser. La dernière chose que vous voudriez faire est de dépendre du gouvernement pendant une catastrophe, rappelle-t-il aux auditeurs (ce qui n'est pas dit : surtout maintenant que les garçons de Doge démantèlent le gouvernement).

Le fascisme de fin des temps est un fatalisme sombrement festif – un dernier refuge pour ceux qui trouvent plus facile de célébrer la destruction que d'imaginer vivre sans suprématie
Bannon n'exhorte pas seulement son public à créer leurs propres bunkers, bien sûr. Il fait également avancer une vision des États-Unis comme un bunker à part entière, dans lequel les agents de l'ICE (Immigration and Customs Enforcement) traquent dans les rues, les lieux de travail et les campus, faisant disparaître ceux considérés comme des ennemis de la politique et des intérêts américains. La nation-bunker est au cœur de l'agenda MAGA, et du fascisme de fin des temps. Dans sa logique, la première tâche consiste à durcir les frontières nationales et à éliminer tous les ennemis, étrangers et nationaux. Ce travail ignoble est maintenant bien engagé, l'administration Trump, avec l'aval de la Cour suprême, ayant invoqué l'Alien Enemies Act pour déporter des centaines d'immigrants vénézuéliens vers Cecot, la désormais tristement célèbre méga-prison au Salvador. L'établissement, qui rase la tête des prisonniers et entasse jusqu'à 100 personnes dans une seule cellule, empilées sur des lits superposés sans matelas, fonctionne sous « l'état d'exception » liberticide déclaré pour la première fois il y a plus de trois ans par le premier ministre du pays, Nayib Bukele, amateur de crypto-monnaies et sioniste chrétien.

Bukele a proposé de fournir le même système de services payants pour les citoyens américains que l'administration aimerait faire tomber dans un trou noir judiciaire. « J'adore ça, » a récemment déclaré Trump, lorsqu'on l'a interrogé sur cette proposition. Pas étonnant : Cecot est le corollaire malsain mais logique du fantasme de la « ville de liberté » – une zone où tout est à vendre et où la procédure régulière ne s'applique pas. Nous devrions nous attendre à beaucoup plus de ce sadisme. Dans une déclaration terriblement franche, le directeur par intérim de l'ICE, Todd Lyons, a déclaré lors du Border Security Expo 2025 qu'il souhaitait voir une approche plus « commerciale » de ces déportations, « comme [Amazon] Prime, mais avec des êtres humains ».

Si la surveillance des frontières de la nation-bunker est la tâche numéro un du fascisme de fin des temps, la tâche numéro deux est tout aussi importante : que le gouvernement américain revendique toutes les ressources dont ses citoyens protégés pourraient avoir besoin pour traverser les temps difficiles à venir. Peut-être s'agit-il du canal de Panama. Ou des routes maritimes du Groenland en rapide dégel. Ou des minéraux critiques de l'Ukraine. Ou de l'eau douce du Canada. Nous devrions considérer cela moins comme un impérialisme à l'ancienne que comme une préparation à l'échelle nationale. Les anciennes feuilles de vigne coloniales de la diffusion de la démocratie ou de la parole de Dieu ont disparu – lorsque Trump scrute le globe avec convoitise, il fait des provisions pour l'effondrement de la civilisation.

Cette mentalité de bunker aide également à expliquer les incursions controversées de JD Vance dans la théologie catholique. Le vice-président, qui doit sa carrière politique en grande partie à la générosité du principal « prepper » Thiel, a expliqué à Fox News que, selon le concept chrétien médiéval d'ordo amoris (traduit à la fois par « ordre d'amour » et « ordre de charité »), l'amour n'est pas dû à ceux qui sont en dehors du bunker : « Vous aimez votre famille, puis vous aimez votre voisin, puis vous aimez votre communauté, puis vous aimez vos concitoyens dans votre propre pays. Et ensuite seulement, vous pouvez vous concentrer et donner la priorité au reste du monde. » (Ou pas, comme l'indiquerait la politique étrangère de l'administration Trump.) En d'autres termes, nous ne devons rien à quiconque en dehors de notre bunker.

Bien qu'elle s'appuie sur des tendances persistantes de droite – justifier des exclusions haineuses n'est guère nouveau sous le soleil ethno-nationaliste – nous n'avons simplement jamais été confrontés à une telle puissante souche apocalyptique au gouvernement auparavant. La fanfaronnade de « la fin de l'histoire » de l'ère post-guerre froide est rapidement supplantée par la conviction que nous sommes réellement dans les derniers temps. Doge peut s'envelopper dans la bannière de « l'efficacité » économique, et les subalternes de Musk peuvent évoquer des souvenirs des jeunes « Chicago Boys » formés aux États-Unis qui ont conçu la thérapie de choc économique pour le régime dictatorial d'Augusto Pinochet, mais il ne s'agit pas simplement de l'ancien mariage entre néolibéralisme et néoconservatisme. C'est un nouveau mélange millénariste adorateur d'argent qui dit que nous devons démanteler la bureaucratie et remplacer les humains par des chatbots afin de réduire « le gaspillage, la fraude et les abus » – et, aussi, parce que la bureaucratie est là où se cachent les démons résistants à Trump. C'est là que les bros de la tech fusionnent avec les TheoBros, un véritable groupe de suprémacistes chrétiens hyperpatriarcaux liés à Hegseth et à d'autres dans l'administration Trump.

Comme le fascisme le fait toujours, le complexe d'Armageddon d'aujourd'hui traverse les classes sociales, liant les milliardaires à la base MAGA. En raison de décennies de stress économiques croissants, ainsi que de messages incessants et habiles opposant les travailleurs les uns aux autres, beaucoup de gens se sentent compréhensiblement incapables de se protéger de la désintégration qui les entoure (peu importe le nombre de mois de repas prêts à manger qu'ils achètent). Mais il y a des compensations émotionnelles à offrir : vous pouvez applaudir la fin de la discrimination positive et de la DEI (diversité, équité et inclusion), glorifier les expulsions massives, savourer le refus des soins d'affirmation de genre aux personnes trans, diaboliser les éducateurs et les travailleurs de la santé qui pensent savoir mieux que vous, et applaudir la disparition des réglementations économiques et environnementales comme moyen de posséder les libéraux. Le fascisme de fin des temps est un fatalisme sombrement festif – un dernier refuge pour ceux qui trouvent plus facile de célébrer la destruction que d'imaginer vivre sans suprématie.

C'est aussi une spirale descendante auto-renforçante : les attaques furieuses de Trump contre toutes les structures conçues pour protéger le public des maladies, des aliments dangereux et des catastrophes – même pour informer le public lorsque des catastrophes se dirigent vers lui – renforcent l'argument en faveur du « prepperisme » aux deux extrémités de l'échelle, tout en créant une myriade de nouvelles opportunités de privatisation et de profit pour les oligarques qui alimentent ce démantèlement rapide de l'État social et réglementaire.

À l'aube du premier mandat de Trump, le New Yorker a enquêté sur un phénomène qu'il a décrit comme « la préparation à l'apocalypse pour les super-riches ». À l'époque, il était déjà clair qu'à Silicon Valley et à Wall Street, les survivalistes haut de gamme les plus sérieux se prémunissaient contre les perturbations climatiques et l'effondrement social en achetant des espaces dans des bunkers souterrains sur mesure et en construisant des maisons d'évacuation sur des terrains élevés dans des endroits comme Hawaï (où Mark Zuckerberg a minimisé l'importance de son sous-sol de 5 000 pieds carrés en le qualifiant de « petit abri ») et la Nouvelle-Zélande (où Thiel a acheté près de 500 acres mais a vu son plan de construction d'un complexe survivaliste de luxe rejeté par les autorités locales en 2022 pour être une horreur visuelle).

Ce millénarisme est lié à une série d'autres modes intellectuelles de la Silicon Valley, toutes fondées sur la croyance imprégnée de fin des temps que notre planète se dirige vers un cataclysme et qu'il est temps de faire des choix difficiles sur quelles parties de l'humanité peuvent être sauvées. Le transhumanisme est l'une de ces idéologies, englobant tout, des « améliorations » mineures homme-machine à la quête de télécharger l'intelligence humaine dans une intelligence artificielle générale encore illusoire. Il y a aussi l'altruisme efficace et le long-termisme, qui tous deux ignorent les approches redistributives pour aider ceux qui sont dans le besoin ici et maintenant en faveur d'une approche coûts-bénéfices pour faire le plus de bien à long terme.

Bien qu'ils puissent paraître bénins au premier abord, ces idées sont traversées par de dangereux biais raciaux, capacitistes et de genre sur quelles parties de l'humanité valent la peine d'être améliorées et sauvées – et lesquelles pourraient être sacrifiées pour le prétendu bien de l'ensemble. Ils partagent également un manque d'intérêt marqué pour aborder d'urgence les facteurs sous-jacents de l'effondrement – un objectif responsable et rationnel qu'une cohorte croissante de personnalités rejette désormais activement. Au lieu de l'altruisme efficace, le régulier de Mar-a-Lago Andreessen et d'autres ont embrassé « l'accélérationnisme efficace », ou la « propulsion délibérée du développement technologique » sans garde-fous.

Pendant ce temps, des philosophies encore plus sombres trouvent un public plus large, comme les diatribes néoréactionnaires pro-monarchie du codeur Curtis Yarvin (une autre des pierres de touche intellectuelles de Thiel), ou l'obsession du mouvement « pro-nataliste » pour augmenter dramatiquement le nombre de bébés « occidentaux » (une fixation de Musk), ainsi que la vision du gourou de la sortie Srinivasan d'un « sionisme technologique » à San Francisco où les loyalistes des entreprises et la police unissent leurs forces pour nettoyer politiquement la ville des libéraux afin de faire place à leur état d'apartheid en réseau.

Comme l'ont écrit les spécialistes de l'IA Timnit Gebru et Émile P. Torres, bien que les méthodes puissent être nouvelles, cet « ensemble » de lubies idéologiques « sont les descendants directs de la première vague d'eugénisme », qui voyait également un petit sous-ensemble de l'humanité prendre des décisions sur quelles parties du tout valaient la peine d'être continuées et lesquelles devaient être progressivement éliminées, nettoyées ou supprimées. Jusqu'à récemment, peu y prêtaient attention. Tout comme Próspera, où les membres peuvent déjà expérimenter des fusions homme-machine telles que l'implantation des clés de leur Tesla dans leurs mains, ces lubies intellectuelles semblaient être les dadas marginaux de quelques dilettantes de la Bay Area avec de l'argent et de la prudence à brûler. Ce n'est plus le cas.

Trois développements matériels récents ont accéléré l'attrait apocalyptique du fascisme de fin des temps. Le premier est la crise climatique. Bien que certaines personnalités de premier plan puissent encore publiquement nier ou minimiser la menace, les élites mondiales, dont les propriétés en bord de mer et les centres de données sont intensément vulnérables aux températures croissantes et à l'élévation du niveau des mers, connaissent bien les dangers ramifiés d'un monde qui se réchauffe sans cesse. Le deuxième est la COVID-19 : les modèles épidémiologiques avaient longtemps prédit la possibilité qu'une pandémie dévaste notre monde globalement interconnecté ; l'arrivée réelle de celle-ci a été interprétée par de nombreuses personnes puissantes comme un signe que nous sommes officiellement entrés dans ce que les analystes militaires américains avaient prévu comme « l'Ère des Conséquences ». Fini les prédictions, c'est en train de se produire. Le troisième facteur est l'avancement rapide et l'adoption de l'IA, un ensemble de technologies qui ont longtemps été associées à des terreurs de science-fiction concernant des machines se retournant contre leurs créateurs avec une efficacité impitoyable – des craintes exprimées avec le plus de force par les mêmes personnes qui développent ces technologies. Toutes ces crises existentielles se superposent aux tensions croissantes entre puissances dotées d'armes nucléaires.

Rien de tout cela ne devrait être considéré comme de la paranoïa. Beaucoup d'entre nous ressentent l'imminence de l'effondrement si intensément que nous faisons face en nous divertissant avec diverses versions de la vie dans un bunker post-apocalyptique, en regardant Silo d'Apple ou Paradise de Hulu. Comme nous le rappelle l'analyste et éditeur britannique Richard Seymour dans son récent livre, Disaster Nationalism : « L'apocalypse n'est pas une simple fantaisie. Nous y vivons, après tout, des virus mortels à l'érosion des sols, de la crise économique au chaos géopolitique. »

Le projet économique du Trump 2.0 est un monstre de Frankenstein des industries qui alimentent toutes ces menaces – combustibles fossiles, armes et cryptomonnaies et IA voraces en ressources. Tous les acteurs de ces secteurs savent qu'il n'y a aucun moyen de construire le monde miroir artificiel que l'IA promet sans sacrifier ce monde – ces technologies consomment trop d'énergie, trop de minéraux critiques et trop d'eau pour que les deux puissent coexister dans une sorte d'équilibre. Ce mois-ci, l'ancien dirigeant de Google Eric Schmidt l'a admis, déclarant au Congrès que les besoins énergétiques « profonds » de l'IA devraient tripler dans les prochaines années, en grande partie à partir de combustibles fossiles, car le nucléaire ne peut pas être mis en service assez rapidement. Ce niveau de consommation qui incinère la planète est nécessaire, a-t-il expliqué, pour permettre une intelligence « supérieure » à l'humanité, un dieu numérique s'élevant des cendres de notre monde abandonné.

Et ils sont inquiets – mais pas des menaces réelles qu'ils déchaînent. Ce qui empêche les dirigeants de ces industries enchevêtrées de dormir la nuit, c'est la perspective d'un réveil civilisationnel – d'efforts gouvernementaux sérieux et coordonnés au niveau international pour contrôler leurs secteurs voyous avant qu'il ne soit trop tard. Du point de vue de leurs résultats en constante expansion, l'apocalypse n'est pas l'effondrement ; c'est la réglementation.

Le fait que leurs profits soient basés sur la dévastation planétaire aide à expliquer pourquoi le discours bienfaisant parmi les puissants cède la place à des expressions ouvertes de mépris pour l'idée que nous nous devons quelque chose les uns aux autres en vertu de notre humanité partagée. La Silicon Valley en a fini avec l'altruisme, efficace ou non. Mark Zuckerberg de Meta aspire à une culture qui célèbre « l'agression ». Alex Karp, partenaire commercial de Thiel chez Palantir Technologies, réprimande « l'auto-flagellation » des « perdants » qui remettent en question la supériorité américaine et les avantages des systèmes d'armes autonomes (et, par association, les contrats militaires lucratifs qui ont fait l'immense fortune de Karp). Musk informe Joe Rogan que l'empathie est « la faiblesse fondamentale de la civilisation occidentale » et il s'emporte, après avoir échoué à acheter une élection à la Cour suprême dans le Wisconsin : « Il semble de plus en plus que l'humanité est un chargeur d'amorçage biologique pour la superintelligence numérique. » Ce qui signifie que nous, humains, ne sommes que du grain à moudre pour Grok, le service d'IA qu'il possède. (Il nous a bien dit qu'il était « MAGA sombre » – et il n'est pas le seul.)

Dans l'Espagne aride et climatiquement stressée, l'un des groupes appelant à un moratoire sur les nouveaux centres de données s'appelle Tu Nube Seca Mi Río – en espagnol pour « ton nuage assèche ma rivière ». Le nom est approprié, et pas seulement pour l'Espagne.

Un choix indiciblement sinistre est en train d'être fait sous nos yeux et sans notre consentement : les machines plutôt que les humains, l'inanimé plutôt que l'animé, les profits avant tout le reste. Avec une rapidité stupéfiante, les mégalomanes de la big tech ont discrètement révisé à la baisse leurs engagements de neutralité carbone et se sont alignés aux côtés de Trump, déterminés à sacrifier les ressources réelles et précieuses de ce monde et sa créativité sur l'autel d'un domaine virtuel vampirique. C'est le dernier grand braquage, et ils se préparent à traverser les tempêtes qu'ils sont eux-mêmes en train d'invoquer – et ils tenteront de diffamer et de détruire quiconque se mettra en travers de leur chemin.

Considérez le récent séjour européen de Vance, où le vice-président a harcelé les dirigeants mondiaux pour leurs « tergiversations sur la sécurité » concernant l'IA destructrice d'emplois tout en exigeant que les discours nazis et fascistes restent non restreints en ligne. À un moment donné, il a fait une remarque révélatrice, s'attendant à un rire qui n'est jamais venu : « Si la démocratie américaine peut survivre à 10 ans de sermons de Greta Thunberg, vous pouvez survivre à quelques mois d'Elon Musk. »

Son commentaire faisait écho à ceux faits par son patron tout aussi dépourvu d'humour, Thiel. Dans de récentes interviews centrées sur les fondements théologiques de sa politique d'extrême droite, le milliardaire chrétien a comparé à plusieurs reprises la jeune et infatigable militante climatique à l'Antéchrist – une figure qui, prévient-il, était prophétisée pour venir portant un message trompeur de « paix et sécurité ». « Si Greta amène tout le monde sur la planète à faire du vélo, c'est peut-être une façon de résoudre le changement climatique, mais cela a en quelque sorte cette qualité de tomber de Charybde en Scylla, » a déclaré Thiel.

Pourquoi Thunberg, pourquoi maintenant ? En partie, c'est clairement la peur apocalyptique que la réglementation ronge leurs super-profits : selon Thiel, l'action climatique basée sur la science que Thunberg et d'autres exigent ne pourrait être appliquée que par un « État totalitaire », qu'il prétend être une menace plus grave que le bouleversement climatique (plus inquiétant encore, les impôts dans de telles conditions seraient « assez élevés »). Il y a peut-être aussi autre chose chez Thunberg qui les effraie : son engagement indéfectible envers cette planète et les nombreuses formes de vie qui l'appellent leur foyer – pas envers des simulations de ce monde générées par l'IA, ni envers une hiérarchie de ceux qui méritent de vivre et ceux qui ne le méritent pas, ni envers aucun des divers fantasmes d'évasion extra-planétaires que les fascistes de fin des temps vendent.

Elle s'engage à rester, tandis que les fascistes de fin des temps ont, du moins dans leur imagination, déjà quitté ce domaine, installés dans leurs opulents abris ou transcendés vers l'éther numérique, ou vers Mars.

Peu après la réélection de Trump, l'une d'entre nous a eu l'occasion d'interviewer Anohni, l'une des rares musiciennes qui ont tenté de créer un art qui embrasse la pulsion de mort qui a saisi notre monde. Interrogée sur ce qui relie la volonté des personnes puissantes de laisser la planète brûler et la volonté de nier l'autonomie corporelle aux femmes et aux personnes trans comme elle, elle a répondu en s'appuyant sur son éducation catholique irlandaise : c'est « un mythe très ancien que nous sommes en train de mettre en scène et d'incarner. C'est le point culminant de leur Enlèvement. C'est leur évasion du cycle voluptueux de la création. C'est leur évasion de la Mère. »

Comment briser cette fièvre apocalyptique ? D'abord, nous nous aidons mutuellement à faire face à la profondeur de la dépravation qui a saisi la droite dure dans tous nos pays. Pour avancer avec concentration, nous devons d'abord comprendre ce simple fait : nous sommes confrontés à une idéologie qui a renoncé non seulement aux prémisses et à la promesse de la démocratie libérale, mais à l'habitabilité de notre monde partagé – à sa beauté, à ses habitants, à nos enfants, aux autres espèces. Les forces auxquelles nous sommes confrontés ont fait la paix avec la mort de masse. Elles sont traîtres à ce monde et à ses habitants humains et non humains.

Deuxièmement, nous opposons à leurs récits apocalyptiques une bien meilleure histoire sur la façon de survivre aux temps difficiles à venir sans laisser personne de côté. Une histoire capable de vider le fascisme de fin des temps de son pouvoir gothique et de galvaniser un mouvement prêt à tout mettre en jeu pour notre survie collective. Une histoire non pas de fin des temps, mais de temps meilleurs ; non pas de séparation et de suprématie, mais d'interdépendance et d'appartenance ; non pas de fuite, mais de rester sur place et de rester fidèle à la réalité terrestre troublée dans laquelle nous sommes enchevêtrés et liés.

Ce sentiment fondamental, bien sûr, n'est pas nouveau. Il est au cœur des cosmologies autochtones, et il est au cœur de l'animisme. Remontez assez loin et chaque culture et foi a sa propre tradition de respect pour le caractère sacré de l'ici, et ne cherche pas Sion dans une terre promise toujours éloignée. En Europe de l'Est, avant les annihilations fascistes et staliniennes, le Bund socialiste juif s'organisait autour du concept yiddish de Doikayt, ou « ici-té ». Molly Crabapple, qui a écrit un livre à paraître sur cette histoire négligée, définit Doikayt comme le droit de « lutter pour la liberté et la sécurité dans les lieux où ils vivaient, au mépris de tous ceux qui les voulaient morts » – et plutôt que d'être forcés de fuir vers la sécurité en Palestine ou aux États-Unis. Peut-être que ce qui est nécessaire est une universalisation moderne de ce concept : un engagement envers le droit à « l'ici-té » de cette planète malade particulière, à ces corps fragiles, au droit de vivre dans la dignité partout sur la planète où nous sommes, même lorsque les chocs inévitables nous forcent à bouger. « L'ici-té » peut être portable, libre de nationalisme, enracinée dans la solidarité, respectueuse des droits autochtones et sans frontières.

Cet avenir nécessiterait sa propre apocalypse, sa propre fin du monde et révélation, bien que d'une nature très différente. Car comme l'a observé la chercheuse en matière de police Robyn Maynard : « Pour rendre possible la survie planétaire terrestre, certaines versions de ce monde doivent prendre fin. »

Nous avons atteint un point de choix, non pas sur la question de savoir si nous sommes confrontés à l'apocalypse, mais sur la forme qu'elle prendra. Les sœurs militantes Adrienne Maree et Autumn Brown ont récemment abordé ce sujet dans leur podcast justement nommé, Comment survivre à la fin du monde. En ce moment, alors que le fascisme de fin des temps fait la guerre sur tous les fronts, de nouvelles alliances sont essentielles. Mais au lieu de demander : « Partageons-nous tous la même vision du monde ? » Adrienne nous exhorte à demander : « Est-ce que votre cœur bat et avez-vous l'intention de vivre ? Alors venez par ici et nous comprendrons le reste de l'autre côté. »

Pour avoir l'espoir de combattre les fascistes de la fin des temps, avec leurs cercles concentriques toujours plus restrictifs et asphyxiants d'« amour ordonné », nous aurons besoin de construire un mouvement indiscipliné et au cœur ouvert des fidèles aimant la Terre : fidèles à cette planète, à ses habitants, à ses créatures et à la possibilité d'un avenir vivable pour nous tous. Fidèles à ici. Ou, pour citer à nouveau Anohni, cette fois en référence à la déesse en laquelle elle place maintenant sa foi : « Avez-vous cessé de considérer que cela aurait pu être sa meilleure idée ? »

Naomi Klein est chroniqueuse et rédactrice pour The Guardian. Elle est professeure de justice climatique et codirectrice du Centre pour la justice climatique à l'Université de Colombie-Britannique. Son dernier livre Doppelganger : A Trip into the Mirror World sera publié en septembre.

• Articles de Naomi Klein dans The Guardian :
https://www.theguardian.com/profile/naomiklein

• Astra Taylor est écrivaine, organisatrice et documentariste. Ses livres incluent The People's Platform : Taking Back Power and Culture in the Digital Age, récompensé par l'American Book Award, et Democracy May Not Exist, but We'll Miss It When It's Gone. Son film le plus récent est What Is Democracy ?

• Articles d'Astra Taylor dans The Guardian :
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• The Guardian.
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Traduit pour ESSF par Adam Novak

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Débat. « Le désordre programmé qui submerge Trump »

22 avril, par Claudio Katz — , , ,
Fidèle à son style de parieur téméraire, Trump a semé le chaos sur les marchés mondiaux. Il a introduit, retiré puis reformulé une liste de droits de douane qui a déclenché un (…)

Fidèle à son style de parieur téméraire, Trump a semé le chaos sur les marchés mondiaux. Il a introduit, retiré puis reformulé une liste de droits de douane qui a déclenché un désordre majeur. Sa provocation a fait revivre les pires cauchemars financiers de ces dernières décennies.

Le magnat a mis en place un scénario inédit de crise mondiale provoquée délibérément. Certains analystes estiment qu'il a tendance à reculer face aux résultats défavorables de ses mesures, mais d'autres considèrent qu'il continue d'effrayer ses interlocuteurs pour les forcer à capituler.

Il règne également une impression superficielle que Trump est devenu fou et que, dans leur déclin, les Etats-Unis sont tombés sous le règne d'un personnage extravagant. Le magnat ment, insulte, agresse et semble diriger la première puissance mondiale comme s'il s'agissait d'un fonds d'investissement. Mais en réalité, il suit une stratégie approuvée par d'importants groupes de pouvoir et il ne faut pas le sous-estimer (Torres López, 2025).

21 avril 2025 | tiré du site alencontre.org
https://alencontre.org/ameriques/americnord/usa/debat-le-desordre-programme-qui-submerge-trump.html

Il a trois objectifs sur le plan économique : restaurer l'hégémonie du dollar, réduire le déficit commercial et, finalement, encourager le rapatriement des grandes entreprises. La hiérarchie et l'articulation de ces objectifs constituent la grande interrogation du moment.

Centralité monétaire

Certaines approches soulignent, à juste titre, la primauté des objectifs financiers et monétaires sur les objectifs commerciaux ou productifs. Elles soulignent que Trump entend instaurer un dollar bon marché pour l'exportation et un dollar fort comme monnaie de réserve. Il entend favoriser les exportations états-uniennes tout en assurant le statut privilégié de la devise américaine en tant que monnaie mondiale (Varoufakis, 2025).

Les deux principaux conseillers du président, Stephen Miran et Scott Bessent, ont confirmé cette intention, avouant que les pressions commerciales sont un instrument au service des exigences monétaires [voir l'essai de Stephen Miran, novembre 2024, dans Hudson Bay Capital : « A User's Guide to restructuring the Global Trading system, november 2024 » – réd.].

Pour parvenir à la dévaluation du dollar et à son maintien comme monnaie de réserve, Trump doit renforcer la soumission des banques centrales d'Europe et du Japon. Cette subordination est indispensable pour préserver le rôle des titres de la dette états-unienne (bons du Trésor) comme principal refuge du capital.

Cette garantie détermine l'afflux vers Wall Street de l'argent liquide excédentaire dans le monde. Tokyo et Bruxelles doivent continuer à acheter ces bons du Trésor afin de valider le cours du dollar fixé par Washington, évitant ainsi les tensions monétaires qui feraient s'effondrer tout le projet.

Trump exige le maintien du règne continu du dollar et la capacité des Etats-Unis à se financer aux dépens du monde entier. L'impérialisme du dollar permet à la première puissance mondiale de s'endetter sans limite et de mettre toutes les économies du globe sous sa coupe.

Pour faire face aux sérieuses remises en question dont cet atout fait actuellement l'objet, Trump entend recréer les accords de Plaza que les Etats-Unis ont imposés à l'Allemagne et au Japon en septembre 1985. A l'époque, les deux pays subordonnés avaient accepté de soutenir la dépréciation du dollar et de maintenir une parité qui garantissait la primauté mondiale du dollar.

Trump adapte cette exigence aux temps actuels et encourage la création de nouvelles monnaies numériques liées au pouvoir politique du dollar. Le potentat a créé un fonds de cryptomonnaies adossé à sa propre personne et promeut ce marché (les stablecoins) comme un pilier supplémentaire du dollar. Il a déjà positionné ces instruments parmi les 10 plus grands détenteurs de bons du Trésor (Litvinoff, 2025).

Le président des Etats-Unis rêve de replacer le dollar sur son trône initial de Bretton Woods [1944]. Son plan B consiste à réutiliser cette influence pour atteindre le niveau de prépondérance obtenu par Nixon et Reagan. Dans le premier cas, le dollar a été libéré de la convertibilité en or [15 août 1971] et a entamé un long cycle de prédominance sans contrepartie métallique objective. Dans le second cas [1985], le dollar a été renforcé par la hausse des taux d'intérêt, l'émergence du néolibéralisme et la financiarisation sous la houlette de la Réserve fédérale. Ces deux présidents partageaient avec Trump le même profil de personnalités médiocres, mais ils ont introduit des changements significatifs dans le statut mondial du dollar.

Pour réitérer cet exploit, Trump doit freiner la tendance à la dédollarisation qui menace la suprématie du billet vert. Cette érosion est alimentée par les BRICS, qui ont commencé à concevoir des instruments de substitution à la devise américaine, par le biais d'opérations de paiement, de transactions commerciales et de mécanismes de compensation financière (Sapir, 2024).

Il existe même déjà un projet de création d'une monnaie des BRICS qui, suivant une trajectoire différente de celle de l'euro, aboutirait à un effet similaire. Ce plan prévoit la mise en place progressive d'une banque d'émission, dotée de fonds de réserve et d'agendas détaillés concernant les rythmes, les taux et les législations (Gang 2025).

Trump est conscient de ces menaces et a précipité le chaos pour déclencher la bataille contre les contestataires de la devise américaine. Il encourage cette panique afin de discipliner tous ses alliés sous son contrôle. A partir de cette centralisation, il espère redresser le dollar et réinitialiser le système économique mondial en faveur des Etats-Unis.

Mais Trupm doit limiter la portée de la crise qu'il génère, car si cette convulsion recrée le scénario de la pandémie ou le contexte de l'effondrement bancaire de 2008, le séisme finira par affecter son propre architecte (Marco del Pont, 2025a).

Le thermomètre immédiat de cette épreuve de force est le comportement des bons du Trésor. Le Japon est le principal détenteur de ces titres depuis que la Chine a commencé à les délaisser [en 2013, elle détenait pour 1277,7 milliards de dollars de bons de Trésor, en 2024, 772,5 milliards – réd.]. Les banques européennes et d'autres pays asiatiques détiennent également un stock important de ces titres. Le plan de Trump échouera rapidement si, comme l'ont laissé entrevoir les récentes turbulences, les détenteurs de la dette américaine vendent cet actif.

Mais au-delà de ce calcul immédiat, la grande question est la capacité générale des Etats-Unis à redresser leur monnaie. Il existe plusieurs différences substantielles avec l'ère Nixon et Reagan. Le déclin de la première puissance est bien plus important, le réseau de domination impériale s'est érodé, l'effondrement de l'URSS et les débuts de la mondialisation sont derrière nous et l'essor économique de la Chine est fulgurant.

La stratégie monétaire de Trump est également soumise à une forte tension avec les banques, tandis que Wall Street observe avec méfiance une orientation qui menace de réduire les énormes profits réalisés ces derniers temps.

Le boomerang des droits de douane

Le deuxième objectif de Trump est commercial et vise à réduire l'énorme déficit extérieur des Etats-Unis. Il s'agit d'un objectif à moyen terme, qui n'a pas l'acuité du tournant monétaire et dépend dans une large mesure de la recomposition du dollar. Trump introduit et modifie quotidiennement les droits de douane en fonction du rôle complémentaire de ces instruments dans les négociations avec chaque pays.

Le locataire de la Maison Blanche radicalise, dans les faits, la tendance protectionniste qui a commencé lors de la crise financière de 2008 et le déclin de la mondialisation commerciale. Depuis cette date, 59 000 mesures restrictives ont été introduites dans les échanges internationaux et les droits de douane ont atteint leur plus haut niveau depuis 130 ans (Roberts, 2025a). La guerre commerciale déclenchée par Trump avec son paquet de droits de douane spectaculaire s'inscrit dans cette lignée.

Trump a recouru à une formule absurde pour pénaliser les différents pays. Il a inventé un critère arbitraire de réciprocité pour définir le pourcentage de chaque sanction, avec des estimations farfelues du déficit commercial états-unien qui omettaient de comptabiliser l'excédent des Etats-Unis dans les services. Il a également omis que les déséquilibres commerciaux n'ont pas été causés par les pays sanctionnés, mais par les firmes américaines elles-mêmes, qui ont implanté leurs investissements à l'étranger afin d'améliorer leurs profits.

Les chances de succès du plan trumpiste sont très faibles, car les importations et les exportations états-uniennes ne constituent plus une force prépondérante dans le commerce mondial. Elles sont passées de 14% en 1990 à 10,35% aujourd'hui, tandis que dans la même période, les BRICS sont passés de 1,8% à 17,5%. La guerre tarifaire n'a pas de pouvoir dissuasif en soi et les ventes affichées par la première puissance mondiale dans le secteur des services sont insuffisantes pour faire basculer la balance (Roberts, 2025b).

Certaines estimations soulignent même que si les Etats-Unis suspendaient toutes leurs importations, 100 de leurs partenaires parviendraient à replacer leurs ventes sur d'autres marchés en seulement cinq ans (Nuñez, 2025).

Le plus grand problème de la guerre commerciale est la possibilité d'une escalade incontrôlable. En 1929-1934, la spirale descendante du commerce international qui a suivi le paquet protectionniste [loi Smoot-Hawley du 17 juin 1930) a provoqué une chute de 66% des échanges, et cet effondrement a touché tous les concurrents concernés. Trump pense qu'il évitera cette séquence grâce à des négociations bilatérales imposées depuis son bureau.

Mais l'histoire suggère une autre issue lorsque les conflits s'intensifient sans être maîtrisés. L'effet récessif du protectionnisme sur l'économie mondiale est aussi bien connu que le lien entre la Grande Dépression et le recul du commerce. Bien que les interprétations les plus courantes relient superficiellement ces deux processus – en omettant les racines capitalistes de ce qui s'est passé dans les années 1930 –, il ne fait aucun doute que le protectionnisme a déclenché, renforcé ou précipité l'effondrement au cours de cette période.

Le plus important dans une éventuelle répétition de ce précédent serait son effet sur l'économie états-unienne, qui est aujourd'hui beaucoup plus vulnérable aux turbulences mondiales. Cette incidence est d'autant plus grande que le poids du commerce extérieur est passé de 6% (1929) à 15% (2024) du PIB des Etats-Unis.

Trump réintroduit le protectionnisme à un moment historiquement inopportun. Les droits de douane ont été un instrument efficace pour les Etats-Unis dans le passé, mais ils ne remplissent plus la même fonction aujourd'hui. Ils ont facilité l'essor des puissances montantes face à des concurrents favorables au libre-échange, afin de maintenir leur domination sur le marché mondial. Le protectionnisme a été utilisé avec beaucoup d'avantages par l'Allemagne au XIXe siècle et par le Japon ou la Corée du Sud au siècle dernier. Mais ce même outil n'a pas permis à la Grande-Bretagne de contenir son déclin et cette inefficacité affecte aujourd'hui les Etats-Unis. Trump prône un protectionnisme inadapté, car au lieu d'encourager l'industrie naissante, il cherche à sauver une structure obsolète. Il ignore tout simplement que les Etats-Unis ne sont plus ce qu'ils étaient.

Le rêve du retour de l'industrie

Le troisième objectif de Trump est d'ordre productif. Il encourage le retour des entreprises sur leur territoire d'origine et considère cette relocalisation comme le seul moyen de rendre effective la reprise de l'hégémonie états-unienne. C'est pourquoi il a associé le début de son offensive (le « Jour de la libération » le 2 avril) à la réindustrialisation du pays.

Trump est le premier dirigeant à reconnaître ouvertement les difficultés engendrées par la délocalisation des usines. Il recourt à des mesures drastiques pour inverser cette tendance, car il comprend que la mondialisation a fini par affecter la puissance qui a promu cette internationalisation. Il constate que la primauté des Etats-Unis dans les services, la finance ou l'univers numérique ne compense pas le recul de l'industrie et l'érosion consécutive du pilier de toute économie.

Mais son plan de rapatriement industriel est plus irréalisable que son projet monétaire ou tarifaire. Aucune alchimie monétaire ou tarifaire n'offre un attrait suffisant pour inciter les entreprises, qui ont réalisé des profits élevés à l'étranger, à revenir. Aussi persuasives que soient les incitations de Trump, produire aux Etats-Unis a un coût plus élevé. La restauration industrielle nécessiterait un investissement massif que les entreprises ne sont pas disposées à réaliser compte tenu de la faible rentabilité actuelle sur le marché intérieur.

Le virage protectionniste vise à réduire cet écart, mais il se heurte à la difficulté de fermer l'économie dans un contexte de chaînes logistiques mondialisées. Le produit final de nombreuses marchandises intègre des intrants provenant d'usines implantées dans de nombreux pays.

Il est difficile d'imaginer comment les Etats-Unis pourraient retrouver leur compétitivité en recréant les anciens modèles de fabrication nationale. De combien faudrait-il augmenter les droits de douane pour qu'il soit moins coûteux de recommencer à fabriquer dans le pays d'origine ?

Il suffit de regarder le cas de Nike, qui possède 155 usines au Vietnam et emploie un nombre considérable de personnes dans ce pays pour approvisionner un tiers des importations de chaussures des Etats-Unis. La différence de coûts de production est tellement énorme qu'un retour aux Etats-Unis semble impensable (Tooze, 2025). Le découplage du processus de fabrication en Chine aurait un impact similaire pour des entreprises comme Apple.

Les économistes de Trump affirment également que son projet sera réalisable si la primauté du dollar est rétablie et si le déficit commercial est réduit. Ils estiment que ce processus corrigera les déséquilibres mondiaux en matière de consommation, d'épargne et d'investissement qui affectent la première puissance mondiale. A l'opposé, les critiques néoclassiques et keynésiens rappellent que Trump n'a pas réussi à amorcer cette transformation au cours de son premier mandat.

Le débat entre les deux positions porte sur l'impact positif ou négatif du protectionnisme sur les dépenses, les revenus, l'épargne et la consommation. Mais il oublie que le recul des Etats-Unis ne se situe pas dans ces domaines. Il découle de la faible productivité de la principale économie occidentale face à son concurrent oriental (la Chine) en pleine ascension. Les indicateurs de ce fossé sont aussi nombreux que les preuves de son élargissement continu.

Il suffit d'observer la tendance généralisée des entreprises américaines à privilégier les investissements financiers ou à fonctionner comme un distributeur automatique de billets pour Wall Street pour que l'on constate leur compétitivité décroissante. Elles ont tendance à dépenser plus en rachats d'actions et en versements de dividendes qu'en investissements à long terme.

Une grande partie de ces entreprises ont mondialisé leurs processus de fabrication afin de contrebalancer les coûts de production élevés au niveau intérieur. Mais ce revirement les a rendues très dépendantes des importations de biens de consommation bon marché en provenance du continent asiatique afin de maintenir les salaires locaux à un niveau bas.

Le degré de dépendance à l'égard de l'approvisionnement chinois a été confirmé par la décision même de Trump d'exempter tous les puces et composants électroniques des droits de douane imposés à son rival asiatique. Le même problème s'étend aux biens d'équipement et aux biens intermédiaires, qui représentent environ 43% des importations totales de la Chine (Mercatante, 2025).

Le recul américain n'est pas dû à des erreurs commerciales et son inversion ne passe pas par un ultimatum protectionniste. Il y a certes un changement de modèle en cours qui érode la division mondiale du travail forgée au cours de décennies d'internationalisation de la production. Mais ce déclin n'inaugure pas le processus inverse de nationalisation industrielle imaginé par Trump, car la capacité des Etats-Unis à mener ce changement s'est considérablement réduite.

Le recul face à la Chine

Il est évident que la Chine est l'épicentre de la guerre économique déclenchée par Trump. Elle a été la principale cible des droits de douane qui ont déclenché l'escalade vertigineuse entre les deux pays. Les 34% initiaux imposés par Washington ont été suivis par Pékin avec le même pourcentage et la confrontation est rapidement passée à 84%-104 %, puis à 145%-125%. A ces niveaux, le commerce entre les deux pays tend à être anéanti.

La place centrale de la Chine dans l'offensive de Trump a été confirmée par sa décision de maintenir les sanctions contre ce pays, après les avoir suspendues pour le reste du monde [pour 90 jours]. Les droits de douane très élevés imposés au Vietnam, au Cambodge et au Laos s'inscrivent dans le même contexte, car la Chine contrôle les chaînes d'approvisionnement de ces pays voisins et réexporte ses marchandises à partir de là [cette situation explique le récent voyage de Xi Jinping dans ces pays, y compris la Malaisie – réd.].

Pékin a réagi fermement en imposant immédiatement des droits de douane réciproques et en indiquant clairement qu'il n'accepterait pas le chantage des Etats-Unis. Il a préparé cette riposte depuis longtemps cette réaction et entend mener la bataille sur le terrain de la productivité, en cherchant à ne dévaluer que marginalement le yuan. Il s'efforce déjà de trouver des clients compensateurs et conçoit des arguments spécifiques pour l'Europe et l'Asie.

L'establishment occidental craint largement l'issue finale de cette épreuve de force. De nombreuses estimations prévoient le succès final de la Chine si Trump continue à se tirer une balle dans le pied.

Chaque jour, de nouvelles données confirment la supériorité asiatique dans d'innombrables domaines. Le géant oriental forme, à l'échelle mondiale, déjà 65% des diplômés en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques. Il maintient un taux de croissance deux fois supérieur à celui de son homologue. Il représente 35% de l'industrie manufacturière mondiale et devrait atteindre 45% en 2030. Jusqu'en 2001, 80% des pays commerçaient davantage avec les Etats-Unis qu'avec la Chine, et aujourd'hui, les deux tiers de ce total ont inversé cette relation (Ríos, 2025).

Au cours du premier mois de la présidence de Trump, la Chine a lancé 30 nouveaux projets d'énergie « propre » en Afrique, a commencé la construction du plus grand barrage du monde au Tibet et a présenté une nouvelle génération de trains à grande vitesse. Son réacteur nucléaire a atteint un record de production de plasma à une vitesse qui le place près de la production d'énergie « propre » illimitée. Ses chantiers navals ont mis à l'eau le plus grand navire d'assaut amphibie au monde et les tests de la 6G sur les réseaux de téléphonie mobile laissent présager sa victoire dans cette course (MIU, 2025).

Toute la politique de Trump est une tentative désespérée de freiner l'avancée chinoise. Cette expansion ne faisait que commencer au début du millénaire, lorsque la première puissance a cessé de recevoir des transferts de revenus en sa faveur de la part de son partenaire asiatique. C'est là qu'a commencé un échange défavorable qui a aujourd'hui atteint un pic difficile à inverser.

Trump entend modifier ce scénario défavorable par des mesures drastiques. Mais l'écart entre les deux puissances ne tient pas seulement à des différences de politique monétaire, commerciale ou productive. Il réside dans la structure sociale et la gestion de l'Etat. En Chine, d'importantes classes capitalistes spéculent sur leurs fortunes et exploitent les travailleurs. Mais ces groupes ne contrôlent pas le pouvoir étatique, ce qui explique la capacité et l'autonomie de la direction politique à orienter l'économie selon des modèles efficaces.

Trump n'a pas de formule pour faire face à ce désavantage, qui dépasse toutes ses intentions et tous ses projets. Pour comble, il met en œuvre des mesures qui aggravent les deux grands maux du capitalisme contemporain : les inégalités sociales et le changement climatique. Il s'est lancé dans une bataille différée pour maintenir le leadership américain d'un système en crise, mais il accentue le déclin américain par les mesures qu'il adopte, modifie et réinstaure.

Le lexique impérial nostalgique

Trump tente de rétablir la centralité impériale des Etats-Unis. C'est le seul moyen de glorifier les capitalistes de son pays aux dépens du reste du monde. Le train de sanctions, de droits de douane et de chantages qu'il a mis en place exige de revitaliser l'empire.

Trump tente de rétablir cette primauté par des attitudes belliqueuses. Il se vante d'avoir réussi à faire négocier les droits de douane par 75 pays, après la frayeur provoquée par son tableau tarifaire. Mais il maquille la réalité avec des fanfaronnades qui occultent le déroulement réel des négociations.

Avec l'Union européenne, il aggrave un conflit qui a débuté avec l'introduction puis la suspension de droits de douane de 25%. Trump aspire à imposer un vassalisme européen qui lui permettrait de réindustrialiser son pays en désindustrialisant son partenaire transatlantique.

La première étape de cette opération consiste à réarmer le Vieux Continent, avec des dépenses en énergie, en technologie numérique et en équipements fournis par les Etats-Unis. Le potentat a semé la panique parmi les élites européennes qui, dans un élan de russophobie, se sont lancées dans un bellicisme aveugle. Elles réduisent les dépenses sociales et remplacent déjà la transition verte tant vantée par une transition grise, purement militaire.

Mais ce revirement n'est pas sans conflits et l'accord rapide que Trump espérait conclure avec Poutine (pour s'approprier les richesses de l'Ukraine) n'est pas seulement enlisé avec la Russie. Il a également déclenché un conflit sans précédent entre Washington et Londres pour déterminer qui empochera le butin des terres rares (Marco del Pont, 2025b).

Plus déterminantes encore sont es négociations avec les partenaires subordonnés en Asie. Le Japon, la Corée du Sud, Taïwan et les Philippines ont toujours répondu avec une discipline sans faille à leur parrain américain. Mais la grande nouveauté de ces dernières années est le renforcement des relations économiques de ces pays avec Pékin. L'ampleur de ces échanges commerciaux a suscité de sérieux doutes au sein du bloc anti-chinois promu par la Maison Blanche.

Trump déploie des messages impériaux explicites pour faire valoir ses exigences. Il utilise un lexique si direct que le début de son second mandat a suscité de nombreuses remarques journalistiques à ce sujet. La réticence traditionnelle des grands médias à utiliser le terme irritant d'impérialisme a été dissipée par la franchise du magnat (voir The New York Times du 21 janvier 2025, The Washington Post du 24 janvier 2025).

La même démonstration de puissance impériale a entouré l'annonce de la liste des droits de douane. Trump a pompeusement inclus dans cette liste tous les pays du monde pour souligner qu'aucun n'échappera au joug de Washington. Il n'a pas hésité à y inscrire des nations qui ne commercent pas avec les Etats-Unis ou à y ajouter des îles uniquement habitées par des pingouins. Mais les proclamations impériales du riche New-Yorkais contiennent plus d'ingrédients nostalgiques qu'efficaces. Trump regrette les actes de dirigeants lointains, qui ont combiné protectionnisme et expansion impériale pendant la gloire du capitalisme américain.

Il exalte avec une emphase particulière le président McKinley (1897-1901), qui s'est profilé comme un « Napoléon du protectionnisme ». Il a introduit une augmentation drastique de 38 à 50% des droits de douane (1890), tout en commandant l'expansion vers le Pacifique (Hawaï, Philippines, Guam) et la conquête des Caraïbes (Porto Rico et aspiration à Cuba). Trump idolâtre autant sa défense virulente de l'industrie que son extension du rayon territorial américain par les armes (Borón, 2025).

Mais cette évocation se heurte à la réalité du XXIe siècle. Trump ne peut pas mettre en œuvre le protectionnisme agressif de son idole et a choisi de combiner la pression tarifaire et la prudence militaire. Loin de reprendre les interventions du Pentagone partout dans le monde, il modère l'élan expansionniste afin de contenir la détérioration de la compétitivité économique états-unienne.

Dans un élan de réalisme, Trump a pris note de l'échec militaire de Bush et du revers économique de Biden. C'est pourquoi il tente une troisième voie, celle de la modération militaire et d'une refonte monétaire et commerciale. Il sait que la capacité offensive des Etats-Unis a été considérablement limitée par une économie qui représente 25% du PIB mondial (et non plus 50% en 1945), face à la Chine qui en représente 18%.

Trump accentue le discours interventionniste face à ses adversaires extérieurs. Comme ses prédécesseurs contemporains, il doit contrer le déclin économique en faisant largement étalage de la puissance géopolitique et militaire qui préserve son pays. Mais il sait que la compensation militaire des faiblesses économiques aggrave les tensions entre les secteurs militaristes et productivistes de l'establishment. Les bellicistes ont tendance à favoriser des campagnes destructrices à tout prix qui affectent le budget de l'Etat et détériorent la compétitivité des entreprises.

Trump navigue entre ces deux secteurs, soutenant la reprise économique par des mesures protectionnistes. Il encourage les dépenses militaires, mais limite les guerres et cherche à limiter l'effet négatif du gigantisme militaire sur la productivité. L'hypertrophie militaire imposée par le Pentagone est une maladie incurable dont souffre l'économie américaine depuis longtemps et que Trump ne peut tempérer.

Tensions locales

Les contradictions internes qui affectent le projet protectionniste ont la même portée que les tensions externes. Elles comportent un effet inflationniste comme menace la plus immédiate. Les droits de douane rendront les marchandises plus chères par la simple introduction d'un coût supplémentaire sur les produits importés.

Cet effet sera important, tant pour les denrées alimentaires de base que pour les produits manufacturés. Le Mexique fournit par exemple plus de 60% des biens alimentaires frais et on estime qu'un droit de douane de 25% sur les voitures fabriquées dans ce pays (ou au Canada) augmenterait le prix final de chaque unité de 3000 dollars. Récemment, Trump s'est félicité de la délocalisation décidée par Honda, qui va fabriquer sa nouvelle voiture Civic dans l'Indiana plutôt qu'à Guanajuato (Mexique). Mais ce transfert augmenterait le coût moyen de chaque voiture de 3000 à 10 000 dollars (Cason ; Brooks, 2025).

Il est vrai que l'inflation pourrait également contribuer à réduire la valeur réelle de la dette, mais son impact négatif sur l'ensemble de l'économie serait bien supérieur à cette réduction du passif.

Tous les analystes s'accordent à souligner l'effet récessif du virage protectionniste, qui pourrait entraîner une contraction de 1,5 à 2 points de pourcentage du PIB. Le ralentissement de l'activité, qui n'était pas prévu dans les prévisions économiques, est désormais une forte probabilité dans un avenir proche.

Cette perspective tend les relations de Trump avec la Réserve fédérale (FED), qui s'oppose à la baisse des taux d'intérêt. Trump encourage cette baisse afin de contrer la chute probable de la production, de la consommation et de l'emploi. L'effondrement des marchés déclenché par l'annonce de son programme protectionniste a aggravé ce sombre scénario et les disputes qui ont suivi entre le président et la direction de la FED (Jerome Powell).

Trump poursuit également sa bataille contre les secteurs mondialistes, qui défendent les intérêts des entreprises et des banques les plus internationalisées. L'élite de Davos est discréditée par ses échecs, mais elle attend l'occasion de reprendre l'offensive. Si les résultats du virage protectionniste sont négatifs, ce revers frappera fort et placera les démocrates en pole position dans la course aux élections de mi-mandat de 2026.

Le chef de la Maison Blanche s'est entouré d'hommes d'affaires en pleine ascension, qui se disputent avec leurs homologues du spectre traditionnel. L'establishment a donné son feu vert à son projet, mais s'attendait à des droits de douane modérés et à un comportement plus proche de la prudence du premier mandat de Trump [janvier 2017-janvier 2021]. Les bouleversements actuels les incitent à exiger un frein à la déferlante présidentielle. Les multimilliardaires sont exaspérés par la forte réduction de leur patrimoine causée par l'effondrement des marchés.

Les tensions s'étendent à l'entourage même du président, qui doit arbitrer entre les protectionnistes extrêmes (Peter Navarro, conseiller du président, entre autres sur le commerce) et les fonctionnaires ayant des investissements à l'étranger (Elon Musk). Le plan de contrôle des droits de douane conduit en outre à l'introduction d'un enchevêtrement de réglementations, qui s'oppose à la réduction de la bureaucratie promise par la nouvelle administration (Malacalza, 2025). Les innombrables conflits auxquels Trump est confronté dépassent largement le nombre de ceux qu'il peut résoudre.

Bonapartisme impérial

Les conflits extérieurs, l'absence de résultats immédiats, la forte opposition des mondialistes et la fragile cohésion interne poussent Trump à renforcer l'autoritarisme de son administration. C'est pourquoi il tentera à nouveau la voie bonapartiste qu'il a explorée sans succès lors de son premier mandat. Il doit également renforcer le pouvoir de la Maison Blanche pour faire face au repli des investissements des capitalistes états-uniens.

Trump vient du monde impitoyable des affaires et a l'habitude de négocier en tapant du poing sur la table pour obtenir des concessions de ses adversaires. Ce comportement le distingue de ses homologues du système politique, forgés par les négociations, les conciliabules et l'hypocrisie verbale.

Pour consolider son rôle central, il s'est lancé dans une hyperactivité et se distingue par la signature quotidienne d'innombrables décrets. Il cherche à centraliser le pouvoir pour déstabiliser ses opposants et privilégie la loyauté à toute autre qualité chez ses collaborateurs.

Il expérimente son côté bonapartiste dans la tradition américaine du leader charismatique. Il tente d'assumer un rôle messianique d'interprète de la nation, en stigmatisant les migrants et en dénigrant le progressisme. Avec ce personnalisme extrême, il cherche à renforcer l'image d'un homme prédestiné à réaliser le rêve américain. Mais cette orientation renforce les tensions avec l'establishment mondialiste, qui contrôle les médias les plus influents (Wisniewski, 2025).

Trump comble le vide laissé par le discrédit des politiciens traditionnels. Il profite du climat créé par le rejet des magouilles parlementaires douteuses et utilise les attributions du présidentialisme pour renforcer son image (Riley, 2018).

Il tient un discours proche de la tendance conservatrice, qui exacerbe l'opposition culturelle entre les Etats-Unis et le reste du monde. En opposition à la tradition assimilationniste, il rejette l'immigration latino-américaine et exalte la langue anglaise. Il glorifie les idéaux anglo-protestants de l'individualisme et de l'éthique du travail, méprisant la tradition hispanique, qu'il associe à la paresse et à l'absence d'ambition.

Le discours trumpiste reprend l'héritage protectionniste (Alexander Hamilton, « père du dollar ») et patriotique (Thomas Jefferson, président de 1801 à 1809) qui privilégie la prospérité intérieure (Andres Jackson, président de 1829 à 1837). Il conteste le libéralisme cosmopolite (Thomas Wilson, président de 1913 à 1921) qui associe ce bien-être à l'ouverture vers l'extérieur (Anzelini, 2025).

Avec cette vision, Trump régénère les postulats des souverainistes, qui ont traditionnellement privilégié le racisme et l'anticommunisme dans la détermination des alliances extérieures. La sympathie de cette tendance américaniste pour le nazisme a inclus dans le passé une affinité avec le Ku Klux Klan et l'apartheid sud-africain. Cet héritage est actuellement repris par Elon Musk et, dans cette veine, le trumpisme redouble ses campagnes contre le profil multiethnique, multiracial et multiculturel du Parti démocrate.

Le courant dirigé par le magnat exprime une variante ethnocentrique de l'impérialisme yankee, aussi éloignée du néoconservatisme républicain que du cosmopolitisme démocrate. Il met en avant les aspects identitaires de l'idéologie américaine et exalte le patriotisme réactionnaire comme élément essentiel de son credo. Mais avec cette adhésion idéologique, il participe au même conglomérat impérialiste que les deux autres courants.

Bush, Biden et Trump constituent trois modalités du même impérialisme qui maintient le capitalisme américain. Les différentes modalités de cette domination constituent des modalités internes d'un même bloc. L'impérialisme est une nécessité systémique du capitalisme qui fonctionne en confisquant les ressources de la périphérie, en évinçant les concurrents et en étouffant les rébellions populaires. Trump gouverne selon ces paramètres et sa brutalité révèle clairement cette affiliation.

Trajectoires, ambitions et résistances

Il est juste de qualifier Trump de capitaliste-lumpen, au sens où Marx désignait les spéculateurs financiers de la classe supérieure, impliqués dans de multiples fraudes. Le parcours du magnat réunit tous les ingrédients de ce modèle par le nombre d'escroqueries, d'évasions fiscales, de faillites frauduleuses, de transactions avec la mafia et de blanchiment d'argent qui ont marqué son passage dans les affaires. Il s'est entouré de personnages du même acabit, avec de lourds casiers judiciaires dans l'univers des cavernes financières (Farber, 2018).

Mais ce parcours personnel n'a pas caractérisé son premier mandat, ni ne définit son mandat actuel. Trump agit en tant que représentant de secteurs capitalistes très importants et dirige une administration fondée sur une coalition de groupes d'entreprises états-uniennes, comprenant des entreprises numériques qui ont pris leurs distances ave le mondialisme. Il s'appuie sur le secteur sidérurgique, le complexe militaro-industriel, la fraction conservatrice du pouvoir financier et les entreprises centrées sur le marché intérieur, qui ont été pénalisées par la concurrence chinoise (Merino ; Morgenfeld ; Aparicio, 2023 : 21-78).

Trump a obtenu son mandat actuel grâce au soutien d'une ploutocratie numérique, qui a mis de côté ses préférences pour les démocrates. Les cinq géants de l'informatique constituent actuellement le secteur dominant du capitalisme américain, qui a besoin de la belligérance trumpiste pour lutter contre ses rivaux asiatiques.

Plus controversée est la signification du nouveau pouvoir politique que les milliardaires du numérique obtiennent grâce à Trump. Ils ont déjà enchaîné le public à leurs réseaux et préservent leurs clients liés à un enchevêtrement d'algorithmes. Cette dépendance leur permet d'étendre leur lucrative intermédiation dans la publicité et les ventes. Ils tentent désormais de projeter ce pouvoir à une autre échelle, en prenant directement le contrôle de plusieurs domaines du gouvernement.

Ces groupes forment de puissants oligopoles que certains assimilent à de la prédation et à la captation de rente. C'est pourquoi ils utilisent le terme de « technoféodaux » pour conceptualiser leur activité (Cédric Durand, 2025).

D'autres approches contestent cette appellation, qui dilue le sens capitaliste d'entreprises clairement intégrées dans les circuits de l'accumulation. Leur leadership technologique leur permet de profiter de la plus-value extraordinaire qu'ils absorbent du reste du système. Ils n'évoluent pas dans le domaine des rentes naturelles et ne tirent pas de profits de la coercition extra-économique (Morozov, 2023).

Mais les deux visions s'accordent pour souligner la gestion inédite de la vie sociale qui a permis à un secteur de se lancer à la conquête de parts importantes du pouvoir politique. Sous la protection de Trump, elles cherchent avant tout à neutraliser toute tentative de régulation étatique des réseaux.

La ploutocratie numérique s'est lancée dans la gestion directe des leviers de l'Etat afin de modeler l'activité politique à son service. Certains auteurs utilisent la notion de « capitalisme politique » pour singulariser cette appropriation. Ils observent l'émergence d'un régime d'accumulation fondé sur la dépendance nouvelle des entreprises à l'égard d'un pouvoir politique qui définit les bénéficiaires avec une plus grande marge de manœuvre fiscale que par le passé. Le trumpisme pourrait être l'artisan de ces transformations intervenant au sommet du capitalisme (Riley ; Brenner, 2023).

Mais sa dérive autoritaire a déjà suscité la résistance dans les rues. Sous un slogan unificateur et mobilisateur [« Hands Off ! », le 5 avril, avec une suite le 20 avril], 150 organisations ont organisé une manifestation massive et réussie dans un millier de villes. Elles ont commencé à reprendre la réponse venue de la base à laquelle Trump s'est affronté lors de son premier mandat et qu'il a réussi à tempérer lors de son retour. Les grandes manifestations qui ont suivi ont montré le rejet du potentat et des oligarques qui l'entourent [voir le succès des meetings de Bernis Sanders placés sous le mot d'ordre « Fight Oligarchy » – réd.].

Les marches canalisent le mécontentement face à la réduction des droits démocratiques menée par l'occupant de la Maison Blanche. Si l'érosion de la légitimité interne de Trump se conjugue à la résistance qu'il suscite dans le monde, la voie sera ouverte à une grande bataille contre son gouvernement. De cette convergence pourrait émerger une alternative qui commencerait à remplacer l'oppression impériale par la fraternité des peuples. (Buenos Aires, 15 avril 2025 ; traduction rédaction A l'Encontre)

Claudio Katz, membre des Economistes de gauche (EDI), chercheur du CONICET, professeur à l'Université de Buenos Aires.


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En Israël, un début de prise de conscience dans l’armée alarme le pouvoir

Alors que le gouvernement de Benyamin Nétanyahou, au nom de la guerre menée contre le Hamas, annonce étendre son offensive meurtrière contre Gaza, l'armée israélienne donne des (…)

Alors que le gouvernement de Benyamin Nétanyahou, au nom de la guerre menée contre le Hamas, annonce étendre son offensive meurtrière contre Gaza, l'armée israélienne donne des signes de regimbement. Parti de pilotes réservistes, le mouvement se répand.

Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
12 avril 2025

Par Antoine Perraud

Déjà ce mois de mars n'était plus tout à fait celui de la guerre, au fond de bien des consciences civiles comme militaires, en raison de la rupture indéfendable de la trêve qui prévalait à Gaza depuis janvier. Des refus d'être enrôlés ont alors surgi çà et là, ce dont la presse israélienne s'est fait régulièrement l'écho.

Dans un tel contexte, près d'un millier de retraités ou réservistes de l'armée de l'air israélienne ont signé un appel à garantir la libération des otages aux mains du Hamas. Et ce, même si une telle priorité devait impliquer la fin de la guerre à Gaza.


Lettre ouverte des pilotes réservistes et à la retraite de l'armée de l'air israélienne, publiée le 10 avril 2025 par le quotidien « Israel Hayom » (capture d'écran du site du journal).

Rendu public dans différents journaux jeudi 10 avril sous forme de lettre ouverte, ce texte affirme : « Seul un accord peut ramener les otages en toute sécurité, tandis que la pression militaire conduit principalement à la mort des otages et à la mise en danger de nos soldats. »

Une phrase a retenu l'attention : « La guerre sert principalement des intérêts politiques et personnels, et non des intérêts sécuritaires. » La réaction du pouvoir n'a pas tardé, après cette mise en cause à peine voilée de la politique du premier ministre, Benyamin Nétanyahou, et de son gouvernement marqué à l'extrême droite.

Le jour même, l'armée, en service commandé, annonçait que les signataires seraient mis au ban : « Tout réserviste actif ayant signé la lettre ne pourrait pas continuer à servir. » Un communiqué diffusé par les services du premier ministre enfonçait le clou : « Refuser, c'est refuser, même lorsque cela est implicite, ou exprimé dans un langage euphémisant. » Et d'ajouter : « Les déclarations qui affaiblissent les forces de défense d'Israël et qui renforcent nos ennemis en temps de guerre sont impardonnables. »

L'armée israélienne a repris le 18 mars ses bombardements aériens puis son offensive terrestre dans la bande de Gaza, afin, aux dires du gouvernement, de contraindre le mouvement islamiste à libérer les otages israéliens qu'il retient encore. Alors même qu'une trêve, en vigueur du 19 janvier au 17 mars, avait permis le retour de trente-trois otages israéliens – dont huit dépouilles –, en échange de la libération par Israël d'environ mille huit cents prisonniers palestiniens.

Cette rupture de la trêve divise plus encore la société israélienne, dont l'émotion légitime, à la suite du 7 octobre 2023, n'aura cessé d'être instrumentalisée par un pouvoir altéré de rétorsions sanglantes qui, à leur tour, sèment le doute. En témoignent les réactions contrastées à la lettre ouverte des pilotes réservistes ou retraités de l'armée de l'air.

« Il ne s'agit pas d'un refus ou d'une défiance, et ce n'est pas dirigé contre l'armée », soutient l'un des signataires anonymes auprès du site anglophone du quotidien Yediot Aharonot. Selon ce journal, au sein de l'armée, l' appel « n'a pas été formellement classé comme un acte de refus ou d'insubordination, dans la mesure où aucun des signataires n'a reçu d'ordres directs auxquels il aurait refusé d'obéir ».

En revanche, pour le quotidien gratuit Israel Hayom – le plus important tirage de la presse israélienne, qui a tout de même publié le document –, cette lettre, écrite par des « incendiaires » et des « agents du chaos », ne vise qu'à « souiller les héros de l'armée de l'air » pour « exercer une pression politique injustifiable à l'encontre du gouvernement ».

Nous sommes préoccupés par l'érosion de la force de réserve et les taux croissants de non-présentation au service, et nous nous inquiétons des conséquences à long terme de cette tendance.

Lettre ouverte de réservistes de l'unité 8200 du renseignement militaire israélien.

En dépit de la propagande des moyens de communication et des pressions de l'armée, le mouvement de prise de conscience, prélude à une possible désobéissance, pourrait faire tache d'huile. Vendredi 11 avril, une autre lettre était publiée dans les médias israéliens : quelque deux cent cinquante réservistes de l'unité de renseignement militaire 8200 apportaient leur soutien aux pilotes qui s'étaient exprimés la veille.

« Nous nous identifions à l'affirmation grave et troublante selon laquelle, à l'heure actuelle, la guerre sert principalement des intérêts politiques et personnels, et non des intérêts de sécurité », assène à son tour ce texte, qui affirme du surcroît : « Nous sommes préoccupés par l'érosion de la force de réserve et les taux croissants de non-présentation au service, et nous nous inquiétons des conséquences à long terme de cette tendance. »

Combien de temps Benyamin Nétanyahou pourra-t-il se contenter de fustiger des « anarchistes » factieux souhaitant « renverser le gouvernement » ? D'autant que des vétérans de la marine y sont aussi allés de leur appel à la fin des opérations meurtrières contre Gaza, rejoints par des médecins réservistes.

« Désobéissance civile »

[Dans le quotidien Haaretz->https://www.haaretz.com/israel-news/2025-04-11/ty-article-opinion/.premium/refusing-to-serve-comes-at-a-price-but-i-cant-support-israels-regime-anymore/00000196-2040-d710-a1bf-b27fee6e0000], Guy Perl, soldat infirmer, sort de l'anonymat pour témoigner avec force de son refus, après avoir servi sans broncher, de rompre la trêve au mois de mars dernier : « Des enfants innocents et des familles entières de Gaza allaient être à nouveau anéantis, dans le seul but d'éviter à notre régime de rencontrer la remise en cause qui ne manquera pas pour lui dès la fin effective des combats. »

Et Guy Perl d'oser cette phrase lucide et courageuse, dans sa tribune publiée par Haaretz : « Un gouvernement de criminels a joué sur le désir de vengeance de la population et l'a exacerbé, afin d'échapper à ses responsabilités et de consolider son propre pouvoir. »

N'ayant écopé que d'une amende alors qu'il s'attendait à être jeté en prison, l'infirmier militaire conclut : « Personne ne devrait coopérer avec un tel régime. Notre moyen de résistance le plus puissant – peut-être le seul qui puisse avoir un effet – est le refus du service militaire, couplé à la désobéissance civile. »

Antoine Perraud

P.-S.

• MEDIAPART. 12 avril 2025 à 18h37 :
https://www.mediapart.fr/journal/international/120425/en-israel-un-debut-de-prise-de-conscience-dans-l-armee-alarme-le-pouvoir

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Une vague de jeunes hommes vers les Conservateurs trumpiens ?

La présente élection fédérale canadienne crée un dilemme pour la gauche. Rappelons que le système électoral en est un d'origine britannique de vote uninominal à un tour et (…)

La présente élection fédérale canadienne crée un dilemme pour la gauche. Rappelons que le système électoral en est un d'origine britannique de vote uninominal à un tour et qu'aucun parti de masse anticapitaliste, ou qui prétend l'être, n'y participe. Mais y prend part le parti de centre-gauche NPD qui habituellement rallie la gauche non sectaire comme étant le moins pire choix.

Peut lui disputer la faveur de la gauche certaines candidatures de petits partis anticapitalistes ce qui peut occasionner une tension pour la consigne de vote surtout quand le NPD a certaines chances de remporter la circonscription. Cette fois-ci, dans une conjoncture mondiale et surtout nord-américaine de montée drastique du néo-fascisme, se pose la nécessité d'empêcher le parti Conservateur, pâle copie trumpienne, de conquérir la majorité parlementaire. Faut-il voter NPD à tout coup, ou même pour un petit parti anticapitaliste, quand les Conservateurs pourraient gagner une circonscription ?

Le dilemme est d'autant plus crucial que se profile un retournement historique où la jeunesse masculine semble vouloir voter à droite, davantage que les générations plus âgées. Se basant sur un sondage de la firme Nanos de la mi-avril, Blomberg affirme que « [l]es jeunes hommes sont particulièrement attirés par le leader du Parti conservateur, Pierre Poilievre. Selon Nanos Research, les femmes sont deux fois plus nombreuses à soutenir le parti libéral de Mark Carney que celui de Poilievre. » Les jeunes hommes virent-ils à droite toute ? Un sondage Léger fait au même moment n'est pas si concluant bien qu'il affiche la même tendance tout en permettant de comparer le Canada (incluant le Québec) et le Québec.

Si on divise en deux groupes les partis en lice soit les partis néo-fascisant (partis Conservateur et Populaire) et ceux qui ne le sont pas (partis Libéral, néo-démocrate et Vert) en ignorant le cas litigieux du Bloc québécois (on y revient), on constate qu'au niveau canadien les hommes comme les femmes tout comme les personnes âgées (55+) et celles jeunes (18-34) votent toustes majoritairement pour les partis qui ne sont pas néo-fascisants. Cependant, les femmes le font dans une proportion sensiblement plus grande (un écart de plus de 25 points de pourcentage par rapport de près de 10 points pour les hommes). Et il est exact que les personnes âgées le font dans une proportion plus importante que les plus jeunes, plus de 20 points de pourcentage par rapport à plus de 10 points. C'est un renversement par rapport à une tendance historique. Si les données l'avaient permis, il aurait été intéressant de comparer jeunes femmes versus jeunes hommes. Le masculinisme fait-il des ravages ?

La comparaison avec le Québec introduit la difficulté du classement du Bloc québécois. C'est là un parti national-populiste qui mange à tous les rateliers. La campagne électorale a quand même souligné à double traits son caractère identitaire, pour le dire poliment, plus que celui dit progressiste. Souvenons-nous de la rencontre amicale de la Saint-Valentin entre le chef du Bloc et celui du parti Conservateur du Québec. Mais c'est aussi un moyen, en ces temps de bombance du torse canadian, d'affirmer la résistance nationale au chauvinisme canadien. Le Bloc a quelque chose d'un parti rouge-brun c'est-à-dire de tendance centre-gauche mais seulement pour les « de souche ». Constatons que selon Léger près du tiers des francophones québécois a l'intention de voter Bloc contre un peu plus de 5% pour les anglophones et les allophones. S'il n'y a pas de différence notable entre les hommes et les femmes, les personnes âgées sont deux fois plus bloquistes que les plus jeunes. Un parti près de la porte de sortie ?

Si on ignore les intentions de vote pour le Bloc, un gros ‘si' pour les francophones, on constate que les femmes du Québec se prononcent pour les partis qui ne sont pas néofascisants par plus de plus de 40 points de pourcentage de plus que pour ceux néo-fascisants alors que les hommes ne le font que pour une quinzaine de points de pourcentage. Pour les personnes âgées c'est plus de cinquante points de pourcentage par rapport à une trentaine pour les plus jeunes. Pour les anglophones c'est une quarantaine de points, un peu plus d'une trentaine pour les allophones tout comme pour les francophones. Difficile de conclure sauf à noter que chez les jeunes hommes francophones tout indique que la montée du masculinisme se mêle au nationalisme identitaire aux relents de « dog whistling » vis-à-vis les gens demandeurs d'asile.

Dans un article précédent, on a déjà constaté que ce racisme larvé véhiculé par le bloc nationaliste (CAQ, PQ, Bloc québécois) imprègne la société québécoise. On aurait crû que Libéraux et, à coup sûr, Québec solidaire combattent ce discours bec et ongles. Au contraire, ils y adhèrent par la porte arrère. « Le flux migratoire risque de faire une pression sur les services et cette pression des services va nous interpeller tous », dit Monsef Derraji [député Libéral]. Quelques minutes auparavant, le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard [et porte-parole intérimaire] s'était dit ‘'d'accord avec M. Legault sur le fond, pas sur la forme ‘'. La veille, le premier ministre avait rappelé sa demande aux chefs de partis fédéraux, en campagne électorale, pour réduire de moitié le nombre de demandeurs d'asile sur le territoire québécois. » Que vaut le discours à l'emporte-pièce en sens contraire de la porteparole du parti lors de la conférence avec Jean-Luc Mélanchon ? The answer is blowing in the wind.

Marc Bonhomme, 20 avril 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

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