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1er mai 2025 – Journée internationale des travailleuses et travailleurs

Les mesures d'austérité fragilisent notre société, affectant en premier lieu les populations les plus vulnérables. Sous prétexte de rationalisation budgétaire, nos gouvernements procèdent à des coupes systématiques dans les services publics essentiels, affaiblissant ainsi le filet social et accentuant les inégalités.
Depuis plusieurs mois, le gouvernement du Québec a fait le choix politique de l'austérité. La mise à jour économique de novembre dernier a confirmé que la province allait bel et bien être plongée dans un cycle de compressions budgétaires affectant ainsi directement la grande majorité de la population.
Pourtant, il n'y a pas si longtemps, ce même gouvernement caquiste avait préféré appliquer des baisses d'impôts et distribuer des chèques de centaines de dollars plutôt qu'investir dans les services publics et des programmes sociaux qui profitent à toutes et à tous.
Si le gouvernement a fait le choix de l'austérité, ce n'est certainement pas celui des travailleur-se-s. C'est un film dans lequel le Québec a déjà joué et dont les grands gagnants sont les mêmes qui votent ces mêmes mesures d'austérité : les riches.
À ce contexte provincial s'ajoute évidemment l'élection fédérale qui pointe à l'horizon. Quel sera le parti qui prendra le pouvoir et quelles seront ses grandes orientations ? Impossible également de passer sous silence la grande incertitude dans laquelle Donald Trump plonge le monde entier, y compris nous.
Pour cette édition de la Journée internationale des travailleuses et travailleurs, le message est sans équivoque : Toujours debout contre l'austérité.
– L'austérité et l'atteinte aux droits
– L'austérité et la fragilité des travailleur-se-s à statut précaire
– L'austérité et l'effritement des filets de protection sociale
– L'austérité et la dégradation des services publics
Activités
De nombreuses activités se tiendront aux quatre coins du Québec. Consulter la liste ci-dessous pour connaître les activités dans votre région. Des mises à jour sont apportées fréquemment.
Abitibi-Témiscamingue - Nord-du-Québec
Saguenay - Lac-St-Jean - Chibougamau-Chapais
Matériel à télécharger
Affiches pour la région de Montréal
Affiches nationales (avec espace blanc en bas)

Le Canada vote... pour plus de pétrole

Candidats au poste de Premier ministre du Canada lors des élections fédérales du 28 avril, le libéral Mark Carney et le conservateur Pierre Poilievre rivalisent d'arguments en faveur des énergies fossiles.
Tiré de Reporterre.
Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète, mais visiblement, les deux principaux candidats au poste de Premier ministre n'ont pas reçu le mémo. Dans leurs programmes, le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, et celui du Pari libéral, Mark Carney — chef du gouvernement depuis la démission de Justin Trudeau le 14 mars — misent davantage sur l'extraction d'énergies fossiles que sur l'environnement pour le futur du pays. Les électeurs trancheront entre ces deux projets lors des élections fédérales, lundi 28 avril.
Le Canada est le quatrième producteur de pétrole brut au monde et sa production était en hausse de plus de 4 % en 2024, avec près de 300 millions de mètres cubes produits.
Pierre Poilievre, le « Trump du Nord »
Le second candidat dans les intentions de vote, Pierre Poilievre, a fait du pétrole un socle de son programme électoral. Les conservateurs veulent accélérer l'autorisation des nouveaux projets pétroliers pour qu'ils soient validés en moins de six mois, comptent supprimer le plafond d'émissions de gaz à effet de serre (jugé « destructeur d'emplois »), ainsi que le volet industriel de la taxe carbone, qui impose le principe du pollueur-payeur aux grandes industries du pays. Le message conservateur, nimbé de patriotisme économique, se résume ainsi, sur leur site internet : exploiter les ressources « afin que nous puissions être forts et autonomes, voler de nos propres ailes et tenir tête aux Américains ».
Ce programme n'est pas une surprise. Pierre Poilievre, que beaucoup qualifient de « Trump du Nord », est né à Calgary (Alberta), berceau de l'industrie pétrolière dans le pays, et les provinces qui vivent de l'or noir lui sont acquises. Les effets de ses politiques s'annoncent dévastateurs.
D'après le site spécialisé Carbon Brief, une victoire des conservateurs pourrait causer l'émission de près de 800 millions de tonnes de CO2 supplémentaires au cours de la prochaine décennie, soit l'ensemble des émissions annuelles du Royaume-Uni et de la France réunis. La facture est estimée à 150 milliards d'euros de dommages climatiques.
Mark Carney, l'ex-champion du climat converti au pétrole
Ne comptez pas sur son principal concurrent, Mark Carney, qui le devance d'une courte tête dans les sondages, pour sortir le Canada de sa dépendance à l'or noir. Dans son programme, qui insiste pourtant sur « le potentiel illimité » du pays en matière d'énergie propre et abordable, il prône « une extraction des minéraux et des métaux » accélérée et « le renforcement de la production de pétrole et de gaz », considérés comme « l'épine dorsale » de la richesse canadienne. Objectif : « construire l'économie la plus forte du G7 » sans perdre de vue « l'impact [...] sur nos enfants et nos petits-enfants ». Un grand écart climatique réservé aux professionnels, à ne pas tenter à la maison.

Mark Carney justifie, lui aussi, ce penchant pour le tout-fossile en raison de la relation, désormais conflictuelle, avec les États-Unis. Ceux-ci dépendent du pétrole canadien, bien que Donald Trump n'ait de cesse de répéter qu'ils n'ont besoin de rien en provenance de leur voisin du nord. Face à cette situation, Carney assure que les oléoducs sont devenus des « enjeux de sécurité nationale », car si le Canada finit par ne plus pouvoir exporter de pétrole aux États-Unis, il en faudra d'autres pour amener les énergies fossiles de l'ouest du pays, où elles sont principalement produites, vers l'est, pour exporter ces combustibles outre-Atlantique.
Avant de remplacer Justin Trudeau à la tête du pays, l'ex-gouverneur de la Banque d'Angleterre (2013-2020) véhiculait pourtant une image de champion du climat. Il a notamment été l'envoyé spécial sur le financement de l'action climatique aux Nations Unies et était considéré comme un apôtre de la « finance verte », qui favorise l'investissement des banques dans la transition énergétique.
- « Tout politicien qui veut gérer le Canada doit devenir propétrole s'il veut gagner »
Mais dès son élection au titre de chef du Parti libéral, le 9 mars, sa première décision, pour se dissocier de son prédécesseur Justin Trudeau, a été de supprimer la taxe carbone pour les consommateurs. Celle-ci, qui représentait 0,17 dollar canadien (0,11 euro) par litre d'essence acheté à la pompe (mais n'était pas payée dans toutes les provinces), était vivement critiquée par Pierre Poilievre. Elle était aussi perçue par certains comme un symbole de la déconnexion du Parti libéral sur la question du coût de la vie et contribuait à l'impopularité des libéraux dans l'Ouest.
Lors des élections de 2021, l'environnement faisait partie des principales priorités des électeurs et les partis s'étaient entendus, cette même année, pour voter une loi visant à rendre le pays neutre en carbone en 2050. La guerre commerciale en cours entre le Canada et les États-Unis et les envies de Donald Trump d'absorber le Canada ont-elles empêché que l'environnement ne s'impose comme un thème majeur de la campagne cette fois-ci ?
Le contexte a en effet changé, estime Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la chaire de gestion de l'énergie de HEC Montréal, mais l'apathie climatique était déjà bien perceptible auparavant. « Il y a des gens qui ne sont pas repoussés par le concept d'action climatique, mais qui ne veulent pas réellement agir, dans les faits, constate-t-il. On l'observe dans l'opposition à la taxe carbone lancée par Justin Trudeau, particulièrement dans l'ouest du pays. »

Et comment faut-il comprendre la mue de Mark Carney en amoureux du pétrole ? Est-ce simplement pour s'assurer de ne pas perdre trop de voix dans l'ouest du pays, avant un retour à la raison climatique une fois élu ? « Tout politicien qui veut gérer le Canada doit devenir propétrole s'il veut gagner. Mais s'il est honnête sur son ambition de faire du Canada un pays neutre en carbone, Mark Carney ne peut compter uniquement sur la captation de carbone, sur laquelle il insiste beaucoup : il faut réduire drastiquement les émissions de CO2 », dit Pierre-Olivier Pineau.
Le Canada a promis de faire baisser ses émissions de gaz à effet de serre de 40 à 45 % sous le niveau de 2005 d'ici 2030. Pour l'instant, il est loin du compte : elles n'ont baissé que de 8,5 %. Et quel que soit le vainqueur, lundi 28 avril au soir, il ne faut pas s'attendre à voir la courbe plonger.

Jour de la Terre 2025 : prise de parole

Si vous êtes toustes réunis ici aujourd'hui, c'est que le sort de notre terre vous préoccupe. Une préoccupation qui habite certaines personnes plus que d'autres, MAIS pas assez les pensées de notre premier ministre semble-t-il !
Mais nous, on la porte cette responsabilité, cette charge mentale qui nous pousse à agir. Agir au quotidien et dénoncer ici aujourd'hui l'inaction d'une élite politique et capitaliste qui ne la vit pas, cette charge mentale, l'écoanxiété des jeunes, l'inquiétude des mères, la charge mentale verte.
Cette charge mentale verte est fortement liée à la subsistance et à la gestion du foyer : manger sainement sans se ruiner, limiter ses déchets, limiter les contaminants et produits toxiques, acheter en vrac, préparer des repas bio, faire soi-même les produits ménagers, magasiner dans les friperies…vous me voyez venir : cette charge est principalement portée par les femmes.
Les rôles sociaux leur attribuent déjà la planification et l'organisation, et là on ajoute la charge morale d'être garantes de la conduite écoresponsable des ménages.
Il faut bien comprendre que le problème ce n'est pas la charge mentale verte, c'est sa non-reconnaissance, sa non-valorisation, le non-choix de la porter et le non-partage équitable qui représente une surcharge pour les femmes.
Il faut en finir avec des solutions qui font porter le fardeau aux femmes de transformer leurs comportements et leurs habitudes, ou qui impliquent le travail d'autres femmes dans des positions vulnérabilisées.
Notre avenir est collectif, donc cette charge doit l'être et ce sont nos gouvernements qui doivent agir ! On en a marre de se faire présenter la destruction des écosystèmes, la pollution et les impacts sur notre santé comme des dommages collatéraux obligés. On veut une société basée sur les valeurs féministes qui place l'économie au service du vivant !
On a le droit de vivre dans un environnement sain et respectueux des humains, des communautés et de la biodiversité ; et il est temps que nos ambitions soient entendues et répondues collectivement.
Aujourd'hui, nous sommes des centaines à montrer notre rapport de force, mais le 18 octobre, en solidarité avec les femmes du monde entier qui subissent les effets de la crise climatique de façon disproportionnée, sous serons des milliers dans la rue, devant ce même parlement, pour la Marche mondiale des femmes. Des milliers pour dénoncer le capitalisme responsable de la crise climatique et de l'effondrement de la biodiversité au détriment de la santé et de la vie des populations et celles des prochaines générations.
Merci d'être nombreux et nombreuses aujourd'hui et je vous invite à venir en grand nombre le 18 octobre, pour la Marche mondiale des femmes, car nous marcherons pour le droit de vivre dans un environnement sain et respectueux des humains, des communautés et de la biodiversité.
Nous marcherons pour affirmer que notre solidarité est plus forte que jamais.
Nous sommes en lutte pour transformer le monde, il en a urgemment besoin.
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24 avril, journée de solidarité féministe contre les entreprises transnationales

Le 24 avril, les féministes du Québec se mobilisent pour la journée de solidarité féministe contre les entreprises transnationales, en réponse à l'appel de la Marche mondiale des femmes. Cette journée commémore l'effondrement du Rana Plaza au Bangladesh en 2013, qui a tué plus de 1 100 personnes, principalement des femmes. Elle vise à dénoncer l'exploitation du travail des femmes et la destruction de l'environnement. Cette année, des actions décentralisées ont lieu partout sur le territoire. Pour soutenir ces actions, la CQMMF a publié divers outils, dont des vignettes sur l'industrie du textile, un tract de sensibilisation et une déclaration.
Déclaration
Le 24 avril 2013, l'effondrement du Rana Plaza au Bangladesh a tué plus de 1 100 personnes, majoritairement des femmes, en a blessé des milliers d'autres et mis en lumière les conditions de travail inhumaines imposées par les grandes entreprises transnationales. Cette tragédie nous rappelle que les femmes subissent de plein fouet les effets d'un modèle économique archaïque qui place le profit au-dessus de toute considération humaine et de l'environnement. Ce système engendre des violences systémiques : exploitation de la main-d'œuvre, destruction des écosystèmes, violation des droits fondamentaux.
Chaque 24 avril, la Journée de solidarité féministe contre les entreprises transnationales est l'occasion de dénoncer ces injustices, en mémoire des personnes décédées au Rana Plaza.
Au Québec, les militantes de la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes (CQMMF) rappellent que ces violences perdurent, sous diverses formes : conditions de travail précaires, accaparement des ressources, pollution des territoires — particulièrement ceux des communautés autochtones — et absence de reddition de comptes des grandes entreprises.
Les femmes sont en première ligne des crises environnementales en subissant les conséquences de manière disproportionnée. C'est pourquoi notre féminisme est résolument écologique. Nous exigeons un environnement sain, une justice climatique et sociale, ainsi qu'une transition juste qui respecte les droits de toutes et de tous, sans laisser personne derrière.
Dans le contexte actuel de campagne électorale fédérale, nous lançons un appel urgent à toutes et tous : où sont les engagements en matière de justice environnementale et sociale ? Alors que la planète vit une crise climatique sans précédent, les enjeux environnementaux sont relégués aux marges du débat, noyés dans les discours sur les baisses de taxes, l'inflation, les tarifs et surtout d'une relance économique qui oblitère les mises en garde scientifiques sur l'exploitation de nos ressources et qui, à terme, exacerbera les crises sociales et environnementales.
Une relance économique où la tarification du carbone recule, avec son abolition envisagée pour les consommateurs, et même la possibilité d'éliminer le prix du carbone pour l'industrie, favorisant ainsi les grands pollueurs. Une relance économique où les projets pétroliers et gaziers refont surface. Une relance économique où les cibles climatiques sont floues ou carrément absentes, et où l'on semble refuser de reconnaître, consciemment ou inconsciemment, la responsabilité humaine dans les changements climatiques, et ce, allant jusqu'à proposer le retrait du Canada de l'Accord de Paris.
Nous exigeons que nos choix d'une société respectueuse et nos valeurs féministes soient pris au sérieux et que l'on cesse la promotion d'un développement économique qui exploite le travail des femmes et l'environnement. Cela implique de dire non à l'exploration et l'exploitation pétrolière et gazière sur le territoire québécois. Cela implique aussi de mettre fin aux subventions des énergies fossiles, encore défendu directement ou indirectement par l'inaction. Cela implique de penser à l'avenir avec un projet et une vision de société digne pour les prochaines générations.
Et cette lutte prendra la rue. Le 18 octobre prochain, lors de la 6e action de la Marche mondiale des femmes 2025, des milliers de féministes marcheront dans les rues de Québec -et partout dans le monde- pour dénoncer tous les enjeux qui touchent les femmes : le droit des femmes de vivre en paix et en sécurité, l'accès aux services publics gratuits et de qualité, le droit de décider pour nous-mêmes, un revenu décent et des conditions de travail sécuritaires, un environnement sain.
À toutes les électrices et tous les électeurs : interrogez les partis, lisez leurs plateformes, posez des questions. Refusez le silence. Notre avenir, et celui de nos enfants en dépend.
Et à toutes les femmes du monde qui luttent encore pour leur dignité et leurs droits : vous n'êtes pas seules.
En solidarité,
Julie Antoine, Coalition féministe contre la violence envers les femmes et porte-parole de la Marche mondiale des femmes 2025 au Québec
Emilia Castro du Regroupement des groupes de femmes de la Capitale-Nationale et porte-parole de la Marche mondiale des femmes 2025 au Québec
Pénélope Guay, Maison communautaire Missinak et porte-parole de la Marche mondiale des femmes 2025 au Québec
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Les États généraux du syndicalisme : Entrevue avec Éric Gringras, président de la CSQ

Après avoir connu deux décennies de vaches maigres, le mouvement syndical québécois semble reprendre de la vigueur, depuis la pandémie. La victoire du Front commun de 2023, qui a réussi à obtenir une convention collective décente, est probablement le meilleur exemple de ce retour en force.
Dans la foulée de ce grand mouvement, plusieurs mobilisations à plus petite échelle ont aussi portées fruit, avec des ententes de principe avantageuses adoptées au municipal, au provincial, ainsi que dans le secteur privé, surtout dans les domaines de la construction et de l'hôtellerie.
Mais des nuages s'accumulent à l'horizon. Plusieurs membres de la fonction publique et parapublique demeurent sans contrat de travail.
Et si la CAQ est légèrement moins pingre que Parti libéral de Philippe Couillard, qui n'aurait jamais accepté la hausse salariale de 17,4% obtenue par le Front commun, son antisyndicalisme primaire s'exprime avec encore plus d'agressivité.
Alors que son prédécesseur, connu pour sa froideur comptable, agissait avec plus de retenue, François Legault affiche ouvertement son arrogance de gros boss d'entreprise et tente de supprimer toutes les instances démocratiques au sein de l'État. C'est ainsi qu'il a aboli les commissions scolaires (loi 40), saboté la CNESST (loi 59) et accéléré la centralisation en santé, ainsi qu'en éducation (lois 15/23). Son ministre du Travail cherche maintenant à limiter le droit de grève avec le projet de loi 89.
Face à cette attitude altière du gouvernement, les syndicats proposent un exercice axé sur le dialogue et la coopération, pour continuer d'alimenter l'élan positif amorcé depuis quelques années dans le monde du travail. C'est ainsi qu'ont débuté les états généraux sur le syndicalisme, auxquels toutes les grandes organisations sont conviées. Je m'entretiens avec Éric Gingras, président de la CSQ, sur sa participation à cet évènement historique.
Côté politique, la montée de l'extrême droite était beaucoup moins prononcée, il y a à peine dix ans, il faut le prendre en compte. On a senti un vent de positivisme par rapport à nos actions pendant le Front commun, mais il risque d'y avoir une réaction politique hostile.
23 avril 2025 | tiré de la lettre de l'Aut'journal
Pour retrouver les documents des États généraux du syndicalisme : https://syndicalisme.com
Orian Dorais : En commençant, Éric, est-ce que c'est la CSQ qui a convoqué ces états généraux ?
Éric Gingras : L'organisation d'états généraux est une tradition bien ancrée dans l'histoire des quatre grandes centrales, depuis maints congrès. Cette fois-ci, il faut donner à César ce qui est à César et souligner que la FTQ a amorcé l'exercice.
Mais dans le passé, nous avons parfois pris cette initiative, la CSN aussi, tout dépendant des éditions. Maintenant que le processus est entamé, toutes les organisations sont très actives pour favoriser le bon déroulement des activités, qui vont s'étaler sur un an et demi.
O. D. : Et quels sont les objectifs de la CSQ durant tous ces mois de délibérations ?
É. G. : Les neuf associations syndicales (CSQ, FTQ, CSN, CSD, APTS, FIQ, FAE, SPGQ, SFPQ) qui participent ont les mêmes objectifs et nous nous sommes entendus sur un protocole. On veut arriver avec des propositions tangibles pour renforcer le syndicalisme, pas juste avec des grandes déclarations de principes.
Tout va être sur la table : notre rapport aux membres, aux gouvernements, à la société civile, notre approche des communications, notre culture organisationnelle, les relations de travail et notre vision de la démocratie syndicale. J'ai pas besoin de vous dire que le monde du travail change à grande vitesse, avec les nouvelles technologies et le numérique, qui prend toujours plus de place.
O. D. : À ce propos, est-ce que vous allez aborder le projet de loi 89 pendant les états généraux ?
É. G. : C'est certain. La CSQ, la FTQ et la CSN se sont coordonnées pour déposer des mémoires sur le PL89, en commission parlementaire. Tous arrivaient à la même conclusion : le texte proposé n'est pas nécessaire et risque fortement d'être déclaré inconstitutionnel, car il est contraire à l'arrêt Saskatchewan de la Cour suprême du Canada, qui protège le droit de grève au pays.
Le ministre Boulet veut se donner les pouvoirs d'encadrer ce droit, en s'arrogeant l'autorité de mettre fin aux conflits de travail qui menaceraient les « services minimums » à la population.
Nous avons consulté des spécialistes ressources humaines, des experts en relations industrielles qui enseignent à l'université, et ils s'accordent pour dire que le projet de loi ratisse beaucoup trop large. Sa définition des services nécessaires est à ce point vague que le gouvernement peut, au final, intervenir dans une majorité des négos.
On reconnait qu'il faut protéger les services essentiels, mais ces derniers sont définis par l'Organisation mondiale du Travail. Est-ce que Jean Boulet en connait plus que l'ONU ? Il semble le croire, car il veut redéfinir et élargir les critères de ce qui compte comme un service essentiel.
Le gouvernement prétend que sa loi va passer le test des tribunaux, parce qu'il se base sur l'article 107 du code du travail fédéral, celui qui a permis de forcer un retour au travail à Postes Canada. Sauf que cet article de loi est aussi attaqué en justice et les experts pensent qu'il va tomber ! La loi 89 va le suivre de près et la CAQ ne peut pas l'ignorer.
La CSQ ne proposera pas d'amendements à une législation que nous jugeons illégitime, nous demandons au ministre de la retirer. Nous craignons qu'elle soit adoptée unilatéralement par le gouvernement, sans dialogue social. Le cas échéant, nous allons l'attaquer immédiatement, mais, pendant des années de procédures judiciaires, les syndicats ne pourront plus lutter à armes égales. On y voit un peu la vengeance de la CAQ sur le secteur public, après les succès du Front commun.
O. D. : Malgré ces vents contraires, est-ce que vous abordez les états généraux avec confiance ?
É. G. : Oui, quand même. On ne sait pas ce que l'avenir nous réserve, avec la CAQ au provincial, ni ce qui nous attendrait avec un Pierre Poilièvre au fédéral, ou même avec Mark Carney, dont on ne connaissait que le nom au déclenchement des élections.
Plus que jamais, il faut se reposer sur la solidarité intersyndicale, qui est très forte. Ça fait 25 ans que je m'implique dans différentes instances, dont quatre ans comme président de la CSQ, et je peux dire que le lien fort qui unit nos différentes associations fait chaud au cœur. On continue la lutte.
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L’aggiornamento raté du pape François

Jorge Mario Bergoglio, connu durant ses dernières années sous le nom de Pape François, est décédé. Il fait partie du rituel social, dans le contexte d'un décès, de rendre un hommage débridé à la personne, sincèrement ou hypocritement, ou de la dénigrer par rancœur. Dans le cas d'une personnalité devenue rien moins que le pape à l'ère de la polarisation, le clivage qui organisera son hommage sera le binôme fascisme ∕progressisme.
Tiré de Viento Sur
23 avril 2025
Brais Fernandez
Cependant, au-delà de l'étouffement provoqué par l'hyperpolitique, une brève réflexion est possible sous un autre angle. Le pape François a été nommé pontife dans un contexte de crise historique pour l'Église catholique. Bien qu'elle ait conservé de grandes propriétés et des concordats avec de multiples États, la crise de l'Église a des racines sociales et politiques profondes. Convertie en Occident en un front de sectes réactionnaires de riches, fondée davantage sur l'« ascription par distinction » que sur l'adhésion à une foi militante ou à une éthique chrétienne, l'influence hégémonique de l'Église n'a cessé de décliner.
Le pouvoir idéologique de l'Église en tant qu'institution provenait de sa capacité à se structurer comme institution particulière. Si les partis ouvriers et les syndicats fonctionnaient, avec toutes leurs limites, comme un embryon prométhéen d'un nouvel État à venir, l'Église fonctionnait comme un para-État complémentaire, capable de contenir toutes les classes, bien que dirigé par une caste réactionnaire. Mais sans comprendre ce caractère de contenant multi-classes, on ne peut comprendre ni sa fonction de domination, ni les fissures émancipatrices qui l'ont traversée au cours du XXe siècle. Sa capacité à générer du consensus reposait sur une combinaison de coercition dans la sphère morale et d'habitudes de vie dans les classes populaires, capables d'établir un lien politique.
Ces contradictions de classe qui traversent l'Église au cours du XXe siècle se sont exprimées très tôt - le bolchevisme blanc en Italie dans les années 1920, l'opposition de certains secteurs catholiques populaires au fascisme malgré la complicité et la passivité des dirigeants, l'expérience des prêtres ouvriers - et ont enfin explosé dans le feu de la vague révolutionnaire des années 1960, autour de la bataille soulevée par la théologie de la libération, qui cherchait à renouveler le christianisme et à se lier à la volonté de liberté des classes ouvrières et populaires.
Ce mouvement exceptionnellement chaleureux, riche et créatif a été écrasé par une alliance entre la hiérarchie de l'Église, dirigée par un anticommuniste militant nommé Karol Wojtyła, et les oligarchies réactionnaires locales. La restauration de l'ordre ancien dans l'Église a été célébrée comme une grande victoire pour les secteurs conservateurs, mais elle a eu des effets inattendus. Loin de restaurer l'ancien pouvoir de l'Église, elle a accéléré la dissolution des liens entre l'Église et les classes subalternes ; le rôle de l'Église a été progressivement réduit, remplacé par d'autres appareils idéologiques plus adaptés à la logique culturelle du capitalisme tardif. Le paradoxe est que, malgré les illusions du libéralisme progressiste, le déclin du catholicisme ne s'est pas accompagné de la disparition de la religion en tant que facteur politique : limitée à l'Occident, la montée de l'évangélisme a été le contrepoint inattendu de ce processus.
Dans une certaine mesure, l'élection d'un pape jésuite, argentin, philopéroniste, au discours nettement progressiste, a constitué une tentative de réponse à ce déclin. Cependant, cette tentative a été tardive et à contre-courant, discordante avec l'époque. Non pas tant parce que ses critiques du capitalisme, du bellicisme, ses appels à l'environnementalisme ou sa défense des migrants sont déplacés - au contraire, ils n'ont peut-être jamais été aussi pertinents - mais parce que le facteur décisif de tout processus de transformation réside dans la capacité à transformer les idées en force sociale. En ce sens, comme nous l'avons expliqué plus haut, la montée d'un pape comme François est intervenue après la liquidation du grand courant révolutionnaire qui a traversé le christianisme au cours du XXe siècle : la théologie de la libération.
La meilleure réflexion que j'ai entendue au sujet du pape a peut-être été formulée par un théologien de la libération dans un hommage à Gustavo Gutiérrez : « Le pape n'est pas l'un d'entre nous, mais il ne serait pas possible sans nous ». Cette phrase contient une revendication de l'héritage des vaincus, une reconnaissance tardive de l'exemple militant et révolutionnaire des milliers de chrétiens qui ont lutté pour fusionner avec les travailleurs et convertir le « peuple de Dieu » en un sujet actif de transformation sociale et politique, en l'insérant dans un vaste processus de changement en direction du socialisme. Mais elle exprime également la réalité selon laquelle, malgré la générosité avec laquelle il a été accueilli par des secteurs encore liés à la théologie de la libération, le pape François n'est pas apparu comme le point culminant d'un processus vivant, comme une victoire des secteurs chrétiens de base qui luttent pour l'émancipation.
Il est plutôt apparu comme l'aboutissement tardif d'un processus tragique d'aggiornamento, écouté avec sympathie par de nombreux secteurs de la société lassés du néo-fascisme, mais sans réelle possibilité d'impulser un processus de transformation. Il est difficile de savoir si le Pape a vécu ce processus consciemment, s'il s'est contenté d'apparaître comme une voix particulière dans un écosystème stérile, ou s'il s'est senti frustré par l'absence de corrélation entre ses discours et un mouvement réel.
Il s'agit sans doute d'une leçon politique classique : il n'est pas possible de réformer quoi que ce soit en profondeur sans faire de révolutions ; et il est évident que les papes n'en font pas et n'en feront pas. Il est toujours bon pour les marxistes de relire de temps en temps Le rôle de l'individu dans l'histoire, de ce bourru russe qui fut d'abord le professeur de Lénine, puis son ennemi politique intime : Gueorgui Plekhanov.
Cela dit, le pape n'a pas non plus réussi à rétablir les liens entre l'Église et les classes populaires. Comme le raconte Peter Brown dans son incroyable Through the Eye of a Needle - peut-être le livre le plus gramscien jamais écrit sans citer Gramsci - le pouvoir social et politique du christianisme dans la Rome antique s'est établi sur une double opération. D'une part, l'incorporation des pauvres exclus de la citoyenneté dans le peuple par le biais de sa structuration morale et matérielle autour de l'Église. D'autre part, une partie des riches voyait dans l'Église un moyen de construire un lien spirituel qui les projetait au-delà de ce monde, y déposant une partie de leur fortune comme un investissement pour accéder à l'autre rive.
Si c'est sur cette opération que l'Église a construit son pouvoir hégémonique, le pape François a échoué là où saint Ambroise a triomphé. Les classes populaires exclues se lancent dans d'autres aventures religieuses comme l'évangélisation ; les vrais riches ont depuis longtemps décidé que l'on peut accéder à Dieu sans intermédiaire en accumulant des sommes d'argent obscènes qu'ils n'ont pas l'intention de partager avec qui que ce soit.
Nous ne savons pas aujourd'hui qui sera élu pape. L'intérêt que cet événement suscitera ces jours-ci ne correspondra pas à l'importance décisive qu'il aura sur le déroulement effectif de l'histoire. L'héritage du pape François, qu'il soit loué ou vilipendé, sera avant tout discursif : ce qu'il a dit ou n'a pas dit sera évalué plus que ce qu'il a fait. Si le pape François a pu souligner, de manière très large et diffuse, que le mal sur terre est un produit systémique du capitalisme, la pratique émancipatrice du christianisme de libération ne s'est pas encore rétablie.
Le mot aggiornamento est un terme italien qui signifie littéralement "mise à jour" ou "adaptation au jour présent".
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Shoah. « À quoi penserai-je quand retentira la sirène »

Chaque année, le 27e jour du mois de Nissan, Israël commémore le Jour de la Shoah. Pendant une minute une sirène retentit et tout s'arrête dans le pays. À l'occasion de cette journée, Gideon Levy, membre de la direction du journal israélien Haaretz, a écrit sur sa colère concernant la guerre contre Gaza dans une chronique parue le 23 avril 2025, veille de la commémoration. Nous la publions ici.
Tiré d'Orient XXI.
Israël ne commet pas une Shoah contre le peuple palestinien. Pourtant, ces 19 derniers mois, il s'en est rapproché à une vitesse effrayante. Cela doit être dit, et avec encore plus d'insistance aujourd'hui.
Comme chaque année, je me tiendrai au garde-à-vous lorsque la sirène retentira, et mes pensées erreront. Elles passeront du souvenir de mes grands-parents, Sophie et Hugo, dont j'ai vu les noms gravés sur le mur commémoratif du vieux cimetière juif de Prague, aux images de Gaza, qui ne me quitteront plus.
Depuis mon enfance, j'ai toujours imaginé un grand incendie consumant tout pendant la sirène. Avant la guerre à Gaza, j'imaginais des juifs y brûler. Cette année, je reverrai aussi les bébés brûlés vifs la semaine dernière dans leur tente servant d'abri à Khan Younès, et avec eux les milliers d'enfants, de femmes et d'hommes qu'Israël a tués sans pitié.
L'exécution de quinze secouristes palestiniens
Comment peut-on rester au garde-à-vous aujourd'hui sans penser à l'horrible enquête de Yaniv Kubovich sur l'exécution de 15 secouristes palestiniens par des soldats israéliens, qui les ont abattus de sang-froid avant de détruire leurs ambulances et d'enterrer leurs corps dans le sable (1) ? Sans penser à l'habitant de Sinjil, en Cisjordanie, dont les maisons ont été incendiées par des colons, après quoi des soldats sont venus lui lancer des gaz lacrymogènes jusqu'à ce qu'il succombe à une crise cardiaque, comme l'a rapporté Hagar Shezaf mercredi [22 avril] (2). Sans penser à la communauté pastorale d'Umm al-Khair, dans les collines au sud d'Hébron, et aux pogroms incessants que ces paisibles habitants subissent de la part de l'armée et des colons, qui ont uni leurs forces pour les expulser de leurs terres ?
Comment ne pas penser à l'article courageux et choquant de la chercheuse Orit Kamir [Haaretz, version hébraïque, 22 avril] sur les Israéliens qui restent indifférents face à cette guerre, ce qui, selon elle, invalide leur droit de se plaindre des Allemands qui ont agi de la même manière, et être d'accord avec chaque mot qu'elle a écrit ? Ou à l'article non moins choquant de l'historien de la Shoah Daniel Blatman sur les enfants de Gaza et les enfants de l'Holocauste [Haaretz, version hébraïque, 23 avril] ? Il écrit que le jour où les combats ont repris à Gaza restera gravé comme une infamie dans l'histoire des juifs. On ne peut qu'espérer que ce sera bien le cas. Blatman écrit :
- J'étudie l'Holocauste depuis 40 ans. J'ai lu d'innombrables témoignages sur le pire de tous les génocides, perpétrés contre le peuple juif et d'autres victimes. Cependant, la réalité, celle des récits de massacres commis par l'État juif, par leur ressemblance effrayante, me rappelle les témoignages des archives de Yad Vashem ; cette réalité était impensable, même dans mes pires cauchemars.
Il ne s'agit pas là d'une comparaison avec l'Holocauste, mais d'un terrible avertissement quant à la direction que prennent les événements. Ne pas y penser aujourd'hui revient à trahir la mémoire de la Shoah et de ses victimes. Ne pas penser à Gaza aujourd'hui revient à renoncer à sa propre humanité et à profaner la mémoire de l'Holocauste. C'est un signal d'alarme quant à ce qui est à venir.
En Israël, on a tendance à prétendre que le 7 octobre est la pire catastrophe qui ait frappé le peuple juif depuis la Shoah. Il s'agit, bien sûr, d'une comparaison perverse qui dévalorise la mémoire de la Shoah. Il n'y a aucune similitude entre l'attentat meurtrier et unique du 7 octobre et la Shoah. Mais ce qui a suivi évoque bel et bien son souvenir. Il n'y a pas d'Auschwitz ni de Treblinka à Gaza, mais il y a des camps de concentration. Il y a aussi la famine, la soif, le déplacement des personnes d'un endroit à l'autre comme du bétail et un blocus sur les médicaments.
« C'est un bain de sang, pas un combat »
Ce n'est pas encore la Shoah, mais l'un de ses éléments fondateurs est en place depuis longtemps : la déshumanisation des victimes, qui s'était installée chez les nazis, frappe désormais de plein fouet en Israël. Depuis la reprise de la guerre [le 23 mars 2025], 1 600 Palestiniens ont été tués à Gaza. C'est un bain de sang, pas un combat. Il se déroule non loin de chez nous, perpétré par les meilleurs de nos fils. Il advient dans le silence et l'indifférence nauséabonde de la plupart des Israéliens.
Ariel Rubinstein, économiste et lauréat du Prix Israël (3), a publié un article profond et inspirant [dans Haaretz en version hébraïque, le 22 avril], dans lequel il explique pourquoi il ne se tiendra pas au garde-à-vous cette année pour la minute de commémoration. Moi, je me tiendrai debout et je penserai à mes grands-parents, mais surtout à Gaza.
Notes
1- Yaniv Kubovich, « Killing of Gaza Aid Workers : IDF Troops Fired Indiscriminately for Over Three Minutes, Some at Point-blank Range » Haaretz, 23 avril 2025.
2- Hagar Shezaf, « Palestinian Dies of Heart Attack After Settlers Burn Home, Soldiers Fire Tear Gaz at Him », Haaretz, 22 avril 2025.
3- NDLR. Prix décerné chaque année par l'État d'Israël à des personnalités israéliennes ou à des organisations ayant marqué l'année d'un point de vue artistique, culturel ou scientifique. Ariel Rubinstein l'a reçu en 2002.
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Le pays des non-libres ? Les attaques contre les étrangers au cœur de l’offensive trumpiste

Comme le montre le sort de Mahmoud Khalil, emprisonné aux États-Unis pour son activisme en faveur des droits des Palestinien·nes, la démocratie dans la première puissance mondiale risque de mourir dans l'obscurité des centres de détention.
Le philosophe Alberto Toscanomontre que, prolongeant une longue tradition de répression politique et de restriction des droits, les attaques actuelles contre les étrangers constituent la pointe la plus acérée de l'offensive contre les libertés publiques mise en œuvre par l'administration Trump.
A noter que l'expression « pays des non-libres » fait référence à l'hymne national des États-Unis dans lequel est évoqué « the land of the free » (« le pays des libres »).
23 avril 2025 | tiré de contretemps.eu
« Qui a le droit d'avoir des droits ? »
Telle est la question urgente posée par Mahmoud Khalil, le jeune diplômé de l'université de Columbia saisi chez lui le 8 mars, dans la lettre ouverte émouvante qu'il a dictée dix jours plus tard depuis un centre de détention des services de l'immigration et des douanes en Louisiane. Dans cette lettre, Khalil affirme son identité de « prisonnier politique » palestinien ainsi que sa solidarité avec tous ceux qui ont été jetés dans les limbes punitifs de la machine de détention et d'expulsion de l'administration Trump.
Depuis le début des campements universitaires, il était clair que des personnes comme Khalil – des étudiants internationaux engagés dans l'activisme universitaire pour la Palestine – n'auraient aucun droit à la liberté d'expression, de réunion ou de mouvement que le gouvernement américain doit respecter, et qu'ils deviendraient la cible d'une répression étatique accrue. Le programme de Trump, adopté par le Comité national républicain l'année dernière, comprenait l'un des 20 points suivants : « Expulser les radicaux pro-Hamas et rendre nos campus universitaires à nouveau sûrs et patriotiques ».
Le cas de Khalil – où son rôle de négociateur pour le mouvement de solidarité avec la Palestine de Columbia a été présenté comme un risque pour la sécurité nationale qui justifie la révocation de sa carte verte – aux côtés d'autres cas de déportation politique, comme ceux de Badar Khan Suri, Rasha Alawieh, Momodou Taal, Yunseo Chung et maintenant Rumeysa Ozturk, emmenés par des agents masqués dans une rue de Somerville, Massachusetts, le 26 mars 2025, est choquant, mais il ne devrait pas être surprenant. C'est un symptôme clair de l'usage de plus en plus autoritaire du droit migratoire par le pouvoir exécutif.
Il s'agit notamment de l'enlèvement et de l'expulsion, le mois dernier, de plus de 200 membres présumés de gangs vers les camps de prisonniers dystopiques du Salvador, en dépit du fait que nombre de ces expulsés n'ont pas de casier judiciaire et que certains se sont déjà avérés être des cas d'erreur d'identité. Les renvois profondément irréguliers, dans lesquels les personnes n'ont pas été informées de l'endroit où elles étaient envoyées, ni de la possibilité de déposer des recours en habeas corpus, ont conduit la juge Patricia Millett de la Cour d'appel fédérale des États-Unis pour le district de Columbia, à observer le 24 mars que « les nazis étaient mieux traités en vertu de l'Alien Enemies Act » – la loi de 1798 que l'administration de Trump a utilisée comme modèle juridique.
Nous pouvons également considérer ce que la journaliste Masha Gessen a judicieusement appelé la « dénationalisation » des citoyens transgenres – le refus de délivrer des passeports avec le marqueur de genre « X » ou de reconnaître l'identité de genre post-transition des individus, même si elle a été légalement modifiée – envoyant le message que « les personnes transgenres sont une menace pour la nation ».
L'administration Trump tire parti de dispositions légales qui facilitent depuis longtemps la persécution des ressortissants étrangers, y compris des résidents permanents, en raison de leur discours politique. Mais elle signale également son intention d'ignorer les contestations juridiques de ces actions, en s'appuyant sur la « doctrine de la toute-puissance exécutive » – la croyance contestée mais répandue selon laquelle la politique d'immigration de l'exécutif est largement à l'abri du contrôle judiciaire – pour revendiquer une suprématie incontrôlée.
Les dimensions profondément autoritaires de cette vision ont été mises en évidence par Sebastian Gorka, directeur principal de la lutte contre le terrorisme de Trump, qui a déclaré la semaine dernière : « Il n'y a qu'une personne […] qui a le droit de décider qui peut être en Amérique, qui sont les étrangers, qui sont les étrangers qui sont autorisés à entrer dans la nation, et qui nous pouvons empêcher d'entrer […] et cet homme, c'est Donald Trump ».
La lutte contre la solidarité palestinienne a une longue histoire aux États-Unis. Comme le Center for Constitutional Rights et Palestine Legal l'ont détaillé dans un rapport fondamental, le terme « terrorisme » a fait son entrée dans la législation fédérale en 1969, dans le but de restreindre l'aide fournie par l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA). La première loi américaine sur l'immigration à citer le « terrorisme » comme motif d'exclusion et d'expulsion visait également la défense de la cause politique palestinienne, en stipulant qu'« un étranger qui est un officier, un fonctionnaire, un représentant ou un porte-parole de l'Organisation de Libération de la Palestine est considéré […] comme étant engagé dans une activité terroriste ».
Mais il ne faut pas non plus sous-estimer les héritages du maccarthysme et de la chasse aux sorcières anticommuniste. L'ordonnance du ministère de la sécurité intérieure exposant les raisons pour lesquelles Khalil est « sujet à l'expulsion » invoque comme fondement juridique une section de la loi sur l'immigration et la nationalité qui permet au ministre des Affaires étrangères d'expulser tout ressortissant étranger dont il estime que la présence continue a « des conséquences négatives potentiellement graves pour la politique étrangère des États-Unis ».
Cette disposition remonte à la loi McCarran-Walter de 1952, qui prévoyait l'« exclusion idéologique » des étrangers jugés politiquement subversifs – ce qui signifiait principalement les communistes. Mais, comme l'a récemment noté l'historien Joshua Zeitz, cette loi était également motivée par l'antisémitisme du sénateur démocrate du Nevada Pat McCarran (1876-1954), comme en témoigne l'enracinement, dans cette législation, des systèmes de quotas préexistants qui désavantageaient les migrants juifs d'Europe de l'Est, souvent soupçonnés de sympathies marxistes.
La loi McCarran-Walter a également servi de précédent clair au cas de Khalil : celui de l'affaire d'expulsion de 1987 contre les « Huit de L.A. » – huit immigrés (dont la majorité étaient des étudiants palestiniens), parmi lesquels deux résidents permanents, accusés de soutenir le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP), identifié comme une organisation prônant le « communisme mondial ». Les procureurs du gouvernement américain ont finalement abandonné l'affaire en 2007.
L'imbrication du racisme anti-palestinien, de l'islamophobie et des héritages de l'anticommunisme est profonde. Lorsque la Cour suprême a validé le « Muslim Ban » de Trump en 2017, elle a soutenu que l'exclusion de ressortissants étrangers relevait d'un “attribut souverain fondamental exercé par les branches politiques du gouvernement, en grande partie à l'abri d'un contrôle judiciaire”. Elle s'est explicitement appuyée sur un précédent : l'arrêt de 1972 Kleindienst v. Mandel de la Cour suprême des États-Unis, qui avait confirmé la décision de l'administration Nixon de refuser l'entrée sur le territoire à l'intellectuel trotskyste belge Ernest Mandel.
Il convient également de rappeler que, bien qu'il n'ait pas encore pris de décret à ce sujet, Donald Trump a promis pendant sa campagne d'invoquer une autre disposition de la loi sur l'immigration et la nationalité pour « ordonner à mon gouvernement de refuser l'entrée à tous les communistes et à tous les marxistes », en accord avec sa devise chauvine selon laquelle « ceux qui viennent profiter de notre pays doivent aimer notre pays ».
Dans son ouvrage important sur l'histoire des exclusions et expulsions idéologiques, Threat of Dissent, la chercheuse Julia Rose Kraut observe que les lois étatsuniennes sur l'immigration trahissent « une peur sous-jacente et perpétuelle de la subversion interne et externe… ainsi que la perception des étrangers comme source de subversion, responsables de l'instigation de la dissidence et de l'importation d'idéologies radicales ». Cette politique de la peur est alimentée par deux courants profondément liés du nativisme américain : l'anti-radicalisme et le racisme.
Pour voir comment cela fonctionne aujourd'hui, il suffit de considérer la rhétorique utilisée dans une fiche d'information officielle publiée en janvier par la Maison-Blanche, exposant son intention de « combattre l'antisémitisme » en « annulant les visas d'étudiants de tous les sympathisants du Hamas sur les campus universitaires, qui ont été infestés par le radicalisme comme jamais auparavant ».
Après l'enlèvement administratif de Khalil et la menace de son expulsion, l'analyste américano-palestinien Yousef Munayyer a averti que « la Palestine est le canari dans la mine de charbon » de « l'autoritarisme et de la répression » aux États-Unis. Et en effet, la question de la Palestine joue un rôle essentiel dans le projet de l'extrême droite de mettre au pas l'enseignement supérieur – un projet qui rencontre, jusqu'ici, un inquiétant succès, comme le montre clairement l'abdication de la liberté académique par l'Université Columbia.
Mais l'animosité anti-palestinienne est également un ingrédient politique important dans un régime d'expulsion dans lequel la désignation de « terrorisme » peut être étendue indéfiniment. C'est la leçon brutale des déportations du mois dernier vers le Salvador, alors que l'administration Trump a d'abord mis dans le même sac les gangs vénézuéliens et le gouvernement de Nicolás Maduro afin de déclarer les premiers comme entité terroriste, puis a utilisé cette désignation pour justifier son contrat sans précédent avec le président salvadorien d'extrême droite Nayib Bukele pour emprisonner les personnes expulsées par les États-Unis dans l'énorme « Centre de confinement du terrorisme » (Cecot) du Salvador, sans procédure légale ni procès.
Ce sinistre « accord » a déjà été contesté en justice – un recours que l'administration Trump aurait illégalement ignoré, et qui a presque immédiatement conduit à des signalements selon lesquels certaines personnes expulsées avaient disparu dans ces camps salvadoriens, sur la base de simples « preuves » comme des tatouages mal identifiés.
Les lois sur l'immigration et la nationalité ont toujours été un pilier central des politiques fascistes. En 1941, le théoricien du droit Ernst Fraenkel (1898-1975) identifiait le fascisme allemand comme générant un « double État » avec deux systèmes de justice et de droits : un « État normatif » pour les citoyens « aryens » et un « État de prérogative » pour tous les autres, considérés comme inférieurs ou étrangers. En 1926, le régime de Mussolini adopta une loi retirant la citoyenneté aux critiques antifascistes en exil, estimant que l'on pouvait être dénationalisé simplement pour avoir porté atteinte aux intérêts ou au prestige de l'Italie, « même si l'acte en question ne constitue pas un crime ».
On retrouve un écho sinistre de cette logique dans l'affaire Khalil, dont la détention n'est liée à une quelconque infraction légale (bien que son stage passé non rémunéré à l'UNRWA soit maintenant utilisé pour l'accuser d'avoir fraudé pour obtenir sa carte verte). Si le pouvoir de prérogative plénière de Trump est interprété aussi largement que le propose Sebastian Gorka, les droits des étrangers aux États-Unis, en particulier la liberté d'expression, deviendront lettre morte. Un tel développement reviendrait également à annuler de fait l'arrêt de la Cour suprême dans l'affaire de l'expulsion en 1945 du militant syndical australien Harry Bridges, selon lequel « la liberté d'expression et de la presse est accordée aux étrangers résidant dans ce pays ».
Le fait que certains agents des frontières interprètent déjà l'autorité exécutive de Trump comme absolue et les droits des ressortissants étrangers comme inexistants, ressort clairement de l'affaire très médiatisée du scientifique français du CNRS, spécialiste de l'espace, expulsé de l'aéroport de Houston le lendemain de l'arrestation de Khalil, au motif extrêmement mince que ses messages téléphoniques privés « reflétaient la haine envers Trump et pouvaient être qualifiés de terrorisme ».
La participation zélée des agents de l'État et de particuliers dans l'anticipation et l'exécution des volontés de l'exécutif a toujours été essentielle au succès des politiques autoritaires. Alors que nous tentons de répondre à la question de Khalil — et de lutter contre les visions nationalistes, racistes et excluantes de “qui a le droit d'avoir des droits” — nous ne devons jamais perdre de vue ceux qui rendent possible l'exercice liberticide du pouvoir de prérogative, qu'il s'agisse des petits fonctionnaires appliquant les décrets autoritaires ou des élites capitalistes soutenant la répression de la contestation.
La persécution de Khalil, comme l'explique l'universitaire Nadia Abu El-Haj, a été rendue possible par un large éventail de personnages comprenant les professeurs et les étudiants de Columbia qui ont explicitement poussé à son expulsion, les activistes et les donateurs sionistes qui ont répandu des mensonges sur le mouvement du campement, les membres de la faculté d'un groupe de travail du campus qui ont confondu l'antisionisme avec l'antisémitisme ; et, peut-être surtout, les dirigeants de l'université qui ont ignoré les appels au soutien de Khalil et qui ont depuis rapidement cédé, avec zèle, à la liste des exigences de l'administration Trump.
Sans cette complicité généralisée dans la persécution de la dissidence, par des individus et des institutions, la capacité de l'administration Trump à rejeter sa liste d'ennemis, qui ne cesse de s'allonger, dans un espace de non-droit serait bien plus faible.
La semaine dernière, certaines organisations savantes ont pris cette leçon à cœur, puisque l'Association des études du Moyen-Orient et l'Association américaine des professeurs d'université ont intenté une action en justice contre l'administration Trump, arguant , selon les termes de Vincent Brown, professeur à Harvard, que « l'enlèvement, la mise en cage et la déportation d'étudiants non citoyens pour des motifs idéologiques menacent l'objectif et la fonction de l'université, car la poursuite du savoir ne peut pas prospérer dans un climat de peur et de répression. »
Ou, comme nous le rappelle la lettre de Khalil, « les étudiants, les militants et les élus doivent s'unir pour défendre le droit de manifester pour la Palestine. Ce ne sont pas seulement nos voix qui sont en jeu, mais les libertés civiles fondamentales de tous ».
*
Alberto Toscano enseigne à la School of Communications de l'Université Simon Fraser et codirige le Centre for Philosophy and Critical Theory de Goldsmiths, Université de Londres. Il a récemment publié Late Fascism : Race, Capitalism and the Politics of Crisis(Verso), Terms of Disorder : Keywords for an Interregnum (Seagull) et Fanaticism : On the Uses of an Idea (Verso, 2010 ; 2017, 2e éd.). Il a également traduit les travaux d'Antonio Negri, d'Alain Badiou, de Franco Fortini et de Furio Jesi.
Publié sur le site In These Times. Traduit de l'anglais pour Contretemps par Christian Dubucq.
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Québec solidaire fait une campagne politique à la mode du Réseau militant intersyndical

Un responsable du Réseau militant intersyndical (RMI) de Québec solidaire est resté complètement éberlué par le « coup de théâtre », selon lui, qui s'est produit au dernier Conseil national de Québec solidaire du début avril, précisément le dimanche à 14h, quand « la direction du parti [a laissé] passer une résolution proposée par le Réseau militant intersyndical et appuyé par les associations de Viau et NDG qui prône le lancement d'une campagne publique contre le vent de droite. »
Voici le libellé essentiel de cette proposition :
Nous proposons
• que Québec solidaire appuie résolument par une campagne publique, tant au parlement que dans la rue, les mobilisations sociales en cours et favorise leur convergence dans un front uni des luttes contre l'antisyndicalisme, notamment du projet de loi 89, l'austérité et l'extrême droite.
• que le lancement d'une telle campagne publique contre le vent de droite est la meilleure façon de mobiliser nos membres, d'activer nos structures régionales et locales et d'accroitre notre appui populaire.
Cette proposition était complétée de trois résolutions d'urgence appuyant les campagnes syndicales contre Amazon et le projet de loi 89, provenant du RMI, et la grève en cours des CPE. La résolution pour la campagne fut « fortement soutenue par la très grande majorité des intervenants au micro [et] adoptée avec une substantielle majorité. » Le scénario se répéta pour les trois résolutions d'urgence « alors que la direction nationale approuv[ait] tacitement ces résolutions ».
D'analyser le militant du RMI : « [c]'est toute une volte-face pour une direction nationale qui affirmait jusqu'à tout récemment, contre vent et marée, que la seule issue aux multiples crises internes et à la dégringolade du parti dans les sondages se trouvait dans le pragmatisme politique et le recentrage programmatique. » De s'interroger l'analyste : « Mais est-ce un virage stratégique qui s'amorce ou simplement un changement de rhétorique » ? Puis de remarquer : « Depuis une quinzaine d'années, les porte-parole du parti tenaient toujours une conférence de presse à l'issue des instances nationales. Ce n'est point le cas cette fois-ci, alors qu'il n'y a même pas eu un simple communiqué de presse. De plus, rien n'a été annoncé à l'interne… » Il ne lui restait plus à conclure que le RMI s'était auto-piégé par une proposition de campagne politique qui n'engageait à rien sauf à corroborer ce que la direction du parti accomplissait déjà.
L'art de défoncer des portes ouvertes pour dérouler le tapis rouge à la direction
Le parti avait mobilisé un cortège tant pour la manifestation du 8 mars contre le trumpisme organisée par les Mères au front face au consulat des ÉU à Montréal puis il mobilisa de la même façon pour la manifestation citoyenne « Résistons aux menaces de Donald Trump » du début mai sans compter la conférence avec JeanLuc Mélanchon dénonçant l'extrême-droite. Quant à Amazon, bien avant l'annonce de la fermeture antisyndicale de ses centres de distribution au [Québec, « Québec solidaire a en juin 2023] déposé une pétition comportant plus de 7100 signatures qui réclame une enquête sur les conditions de travail dans les entrepôts Amazon. »
Puis il a mobilisé un cortège à l'occasion de la manifestation de février amorçant la campagne syndicale tout en déposant « une motion pour demander au gouvernement de ne plus octroyer de fonds publics supplémentaires à Amazon, une motion refusée par le gouvernement. » Immédiatement dénoncé par la députation Solidaire comme « une vengeance contre la grève du secteur public l'année passée », pendant que le mouvement syndical organisait une semaine de mobilisation contre le projet de loi 89, Québec solidaire arrachait au ministre Boulet l'engagement « de ne pas utiliser son dangereux projet de loi 89 pour briser la grève des travailleuses et travailleurs des CPE […] un premier recul de ce gouvernement… ».
Ajoutons la mobilisation d'uncortège contre Stablex et pour les CPE et pour le Jour de la terre. C'est à peine si on arrive à suivre. Par ses lettres aux membres, la direction du parti les invite à une série de zooms pour « actualiser son programme » et à joindre les nouveaux comités d'action politique (CAP). La résolution du RMI de campagne politique apparaît bien mièvre vis-à-vis ce concret flux d'activités mobilisatrices des membres tant externes qu'internes. Évidemment qu'au CN du début avril, la direction du parti a accueilli à bras ouverts ce défonçage de portes ouvertes afin de lui dérouler un tapis rouge ! Ce genre de résolutions que le CN a adopté à forte majorité sans opposition de la direction et de la députation leur rend service et dessert la cause de la gauche du parti tout en semant la confusion chez ses sympathisant-e-s. Cette résolution n'engage à rien de concret parce qu'elle ne comporte aucun élément de plan d'action. Ainsi elle dore la pilule à la direction qui peut s'en réclamer car le parti non seulement appuie déjà ces luttes mais a aussi appelé des mobilisations pour elles.
Par exemple, on aurait pu, minimalement, requérir de toutes les organisations du parti qui délèguent au CN de tenir une assemblée générale de leurs membres à propos de cette campagne pour proposer des plans d'action locaux en plus de contribuer à un plan d'action national à synthétiser lors du CN de juin prochain. On aurait pu réclamer que cette campagne occupe une place importante à l'école du parti en mai. On aurait pu demander que l'intervention de la porte-parole à l'assemblée publique avec Mélanchon porte sur cette campagne… ce qu'elle a faite et aurait fait de toute façon puisque que le front uni contre la droite et contre ses manifestations concrètes par la CAQ devient une évidence surtout pour un parti se réclamant « des travailleuses et des travailleurs ». Au niveau des revendications, à part Amazon et le PL89, il aurait fallu souligner la lutte féministe-syndical pour « le soin et le lien » et absolument l'incroyable charge islamophobe et antinoire de la CAQ, cautionnée par Carney, sous prétexte de fondamentalisme dans quelques écoles et de fuites éperdues d'Haïtien-ne-s se sauvant du trumpisme.
L'alternative disparaît derrière le train-train des réformes sociales-libérales
La gauche du parti, ou partie d'entre elle, ne semble pas avoir compris que Québec solidaire est un parti de centre-gauche qui fait relativement bien son travail. Ce n'est pas là que le bât blesse. Le problème crucial c'est que le parti des travailleurs et travailleuses ne leur présente aucun projet de société alternatif autre qu'une suite de réformes qu'on pourrait qualifier de sociales-libérales. Même celles-ci sont devenues nébuleuses avec la disparition réellement existante de son programme élaboré sur une dizaine d'années et de sa dernière plate-forme électorale, documents qu'on recherchera en vain sur le site web du parti… et même sur la « centrale » réservée aux membres. On leur a substitué une douzaine de revendications en quatre thèmes (onglet « Nos propositions »), toutes des réformes souhaitables en autant qu'elles soient précises — signalons la pauvreté du volet dit « vert » la disparition de l'indépendance — mais aucunement un projet de société.
Étant donné que la contradiction cruciale du XXIe siècle est celle écologique centrée sur les questions du climat et de la biodiversité, on reste sidéré de constater le silence Solidaire à propos de la filière batterie autour de Northvolt, de la promotion des autos solos électriques et du plan hydro-québécois de hausser de 50% la production d'électricité. Sauf à demander un BAPE et un peu plus de transport public hors seul et dispendieux, QS s'est enligné corps et âme derrière la CAQ. L'épine dorsale de la stratégie de développement socio-économique des partis néolibéraux et de celui social-libéral en devient la même à peu de choses près, soit le capitalisme vert avec son extractivisme minier mais aussi celui des hydrocarbures qui reste indispensable à l'orgie énergétique en découlant.
Où est l'horizon de la société du soin et du lien portée par la « grève sociale »
Comme l'urgence climatique, que l'on prétend oublier en ces temps de guerres tant militaires que tarifaires, nécessitera alors de réduite le carbone atmosphérique à coups de géo-ingénierie à subventionner massivement, les services publics et programmes sociaux sont condamnés à une austérité permanente qui sera imposée à coups de matraques et pire encore. Ne demandez pas à Québec solidaire de promouvoir un projet de société du soin et du lien à base de décroissance matérielle libéré du fardeau de la dette des ménages et de l'obsolescence programmée de la consommation de masse. Le culte de l'auto solo et du bungalow reste sacré bien que ces rêves fabriquées par la propagande capitaliste, appelée publicité, deviennent inaccessibles tout en créant moult frustrations.
C'est cette peur de l'alternative qui explique la démocratie tronquée de la direction Solidaire envers ses membres. On multiplie les forums mais on les encadre de présentations qui laissent peu de place à la libération de la parole des membres. Il suffit de prendre le temps d'examiner le déroulement de cette nouveauté qu'est « l'école solidaire 2025 » pour s'en apercevoir : la parole des membres y sera cadenassée par une longue liste de conférencier-ère-s et de présentateur-trices-s. On comprend qu'un parti qui a si peur de son ombre se contente de campagne politique bien délimitée se satisfaisant de queues de cortège dans les manifestations syndicales et de discours du dimanche quand on fait un « meeting » avec un maître en la matière. Alors qu'il faudrait proposer la construction d'un front anti-néofasciste ciblant CAQ et Conservateurs tout en critiquant les Libéraux qui leur mordent la queue et dont la « grève sociale » — cette grève politique à la québécoise — serait l'horizon.
Marc Bonhomme, 25 avril 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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Soyons clivants !

Devenir une voix de la classe ouvrière, dénoncer le capitalisme, c'est nécessairement être « clivant » et s'aliéner les riches. Tant que QS reste incapable de prendre cette posture, il se condamne à l'insignifiance.
Hélène Bissonnette
Tiré du web Révolution Communiste
jeu. 24 avr. 2025
Le 16 avril dernier, je suis allée à la conférence « Comment combattre les droites ? » avec Jean-Luc Mélenchon, le leader de la France Insoumise qui était de passage à Montréal, et Ruba Ghazal, la co-porte-parole de Québec solidaire.
Pour lutter contre la droite, la première chose que la gauche doit faire c'est de s'assumer en tant que gauche, a dit Mélenchon. Dans un contexte où la direction de QS modère son discours depuis des années, et plie sans cesse sous le poids de l'establishment capitaliste, j'ai trouvé cela rafraîchissant à entendre.
Ensuite, interrogé par Ghazal sur l'approche que QS et la gauche devraient prendre par rapport aux médias, Mélenchon a dit qu'il ne fallait pas pleurnicher que les médias ne soient pas nos alliés. « Ils sont dans l'autre camp », a-t-il dit. Il faut « renoncer à être bien vu », et « accepter d'être clivant ». Sans le savoir, Mélenchon a mis le doigt sur le problème de QS, qui cherche à garder une image « respectable » aux yeux de l'establishment politique.
Il a insisté sur la nécessité de « faire confiance à l'intelligence populaire » afin d'éventuellement déceler les mensonges de la droite contre la gauche. Mélenchon n'est certes pas un communiste, mais son message fait écho à une vérité profonde pour tout révolutionnaire : sachant que nous avons les bonnes idées et ayant pleinement confiance dans la classe ouvrière, jamais nous ne devrions avoir peur d'être clivants et de défendre nos idées haut et fort. C'est la seule façon de rallier des masses de gens à nos idées.
Cependant, le lendemain de cette conférence, Ruba Ghazal a donné une entrevue dans laquelle elle a expliqué ce qu'elle en a retiré. Ayant appris que la gauche doit « s'assumer », elle affirme cependant son désaccord avec Mélenchon sur une question : « En France, être clivant, ici au Québec, ce n'est pas la même chose. C'est-à-dire que la recherche du consensus social, ça fait partie des valeurs québécoises. »
Autrement dit, Ghazal n'a rien compris de ce que Mélenchon a expliqué. Surtout, elle n'a rien appris des déboires de QS. Le parti croupit dans les sondages précisément parce que la direction du parti s'imagine bêtement qu'il existe une telle chose qu'un « consensus social » et évite d'écorcher l'establishment détesté. Les efforts de QS pour plaire à tout le monde – alors que le capitalisme est de plus en plus discrédité – font en sorte qu'il ne plaît à personne.
En réalité, la société est clivée : en classes. Il y a les travailleurs et les pauvres d'un côté, et la minorité de riches banquiers et patrons de l'autre. Devenir une voix de la classe ouvrière, dénoncer le capitalisme, c'est nécessairement être « clivant » et s'aliéner les riches. Tant que QS reste incapable de prendre cette posture, il se condamne à l'insignifiance.
Cela dit, par-delà la grande éloquence de Mélenchon et son discours beaucoup plus acerbe que Ghazal contre la classe dirigeante, il n'a présenté aucun vrai plan pour lutter contre la droite, ni pour nous sortir de la crise du capitalisme. C'est malheureusement là où QS et La France insoumise se rejoignent. Si Mélenchon est très critique des vieux partis de gauche qui ont, a-t-il dit, « accepté le capitalisme », il n'a lui-même aucun plan pour sortir de ce système.
Ce qui manque pourtant à la gauche pour lutter contre la droite, c'est de proposer une véritable solution de rechange à la misère capitaliste. Cela passe par un programme socialiste, qui puisse couper court à la rhétorique de la droite « anti-establishment » et rallier des masses de jeunes et travailleurs. C'est ce discours pleinement « clivant » que nous, communistes, défendons fièrement !
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La CAQ nous handicap !

La CAQ nous handicape ! C'est le titre de notre campagne. Cette image illustre un visuel qui met de l'avant le titre et une France-Élaine Duranceau en parodie.
Tiré du site web Ex Aequo
En novembre dernier, le gouvernement du Québec annonçait la suspension temporaire du Programme d'adaptation de domicile (PAD), invoquant un manque de financement. Cette mesure, qui passe inaperçue pour une grande partie de la population, a pourtant des répercussions majeures sur la vie quotidienne de milliers de personnes en situation de handicap et de personnes âgées. En leur permettant d'adapter leur logement à leurs besoins spécifiques, le PAD garantit leur autonomie et leur sécurité, tout en contribuant à leur maintien à domicile.

La suspension de ce programme représente bien plus qu'un simple retard administratif : elle signifie des mois, voire des années d'attente supplémentaires pour des personnes qui ne peuvent plus utiliser leur salle de bain de façon sécuritaire, qui peinent à entrer et sortir de chez elles sans assistance, ou qui risquent des chutes aux conséquences irréversibles. Pire encore, cette interruption temporaire risque d'alourdir davantage un système déjà engorgé, créant un effet domino qui compliquera la reprise des services lorsque la suspension sera levée.
Dans cette lettre adressée aux décideurs politiques, nous soulignons les dangers de cette décision et l'urgence d'un réinvestissement immédiat. Non seulement la suspension du PAD compromet la qualité de vie et la dignité des personnes concernées, mais elle entraîne aussi des coûts sociaux et économiques bien plus élevés à long terme. Il est impératif que les responsables politiques prennent position pour assurer le rétablissement et le financement adéquat de ce programme essentiel.
Ex aequo vous invite à signer cette lettre. Vous pouvez aussi la transmettre à vos membres, partenaires et aux personnes de votre entourage afin de les encourager à la signer et à la diffuser. Plus nous sommes nombreux à signer cette lettre, plus nous revendiquons haut et fort la levée de la suspension du Programme d'adaptation de domicile et un financement suffisant de ce programme essentiel.
Rejoignez 4 ministres et 4 députées en participant ci-dessous ! (François Legault, Éric Girard, France-Élaine Duranceau, Andrés Fontecilla, Virginie Dufour, Joël Arseneau, Sonia Bélanger) + 1 députéEs selon votre adresse postale)
Veuillez notez que cette campagne est prolongée pour une durée indéterminée. (la date de fin initiale était le 3 avril)
Lettre
À l'attention de le nom complet du destinataire ira ici,
Je vous écris pour vous faire part de mon indignation concernant la suspension du programme d'adaptation de domicile (PAD) et son manque de financement.
En effet, le gouvernement du Québec a annoncé en novembre dernier la suspension temporaire du Programme d'adaptation de domicile, faute de financement. C'est à l'aide de cette subvention que les personnes en situation de handicap peuvent obtenir des adaptations de leur domicile pour que celui-ci demeure sécuritaire.
La suspension de ce programme est une catastrophe qui aura des conséquences désastreuses. Les délais d'attente pour obtenir les adaptations (déjà très longs) vont nécessairement exploser. En plus des mois où les nouvelles demandes ne seront pas traitées, la suspension va créer un goulot d'étranglement qui compliquera les démarches lorsque la suspension sera levée. En effet, il n'y a pas beaucoup d'entrepreneurs, en particulier dans certaines régions du Québec, qui sont en mesure de réaliser certaines adaptations. Ils ne seront pas en mesure de répondre à la demande et il est à prévoir que certains augmenteront leurs soumissions, ce qui fera en sorte que les travaux admissibles au PAD coûteront plus cher. De plus, une des raisons de la lenteur des démarches est que le temps d'attente pour qu'une ou un ergothérapeute du réseau de la santé puisse faire l'évaluation des besoins d'adaptations d'une personne est très long et celui-ci risque fort d'augmenter lorsque la suspension du programme sera levée.
Pour les personnes en attente d'adaptation, cette décision a des conséquences dramatiques. De nombreuses personnes attendent ces adaptations pour pouvoir se laver, et ce d'une manière sécuritaire, ou encore pour pouvoir sortir de leur logement sans devoir recourir à l'aide de proches, qui sont alors eux aussi à risque de se blesser. Une personne qui attend ces adaptations et doit continuer à habiter un logement qui ne répond pas à ses besoins est davantage à risque de blessures causées, par exemple, par des chutes.
Celles-ci peuvent entraîner une perte d'autonomie et une baisse de la qualité de vie globale. Elles sont également la principale cause d'hospitalisations liées à des blessures chez les personnes âgées au Canada. Pas moins de 69 % des chutes ayant entraîné une hospitalisation se sont produites à l'intérieur d'un bâtiment résidentiel. De plus, en 2019, les chutes ont représenté 61 % des décès par blessure, en moyenne 15 décès par jour au Canada. En 2019, le coût direct annuel des chutes a été estimé à 5,6 milliards au Canada. Au Québec, le ministère de la Santé et des Services sociaux évaluait à 300 000 par année le nombre de chutes chez les aînées.
Ce n'est peut-être pas le même ministère qui paiera la facture, mais la hausse des hospitalisations causées par les blessures et du nombre de personnes qui se retrouveront en CHSLD qu'engendrera nécessairement l'augmentation des délais pour obtenir la subvention du PAD coûtera beaucoup plus cher au gouvernement du Québec.
Le vieillissement de la population et le choix de favoriser le maintien à domicile rendent prévisible la hausse des demandes pour bénéficier de ce programme. Il est urgent que la suspension de ce programme soit levée et de s'assurer qu'il sera suffisamment financé à l'avenir pour répondre aux besoins de la population.
La pression sur ce programme est en plus exacerbée par l'abandon du programme Accès Logis, puisque les normes d'accessibilité et d'adaptabilité et les subventions qui y étaient associées dans ce programme n'existent plus dans le Programme d'habitations abordables Québec (PHAQ). Dorénavant, il n'est plus possible de prévoir l'installation d'adaptations dès le moment de la construction, ce qui coûtait beaucoup moins cher et permettait aux personnes d'emménager dans des logements qui répondent déjà à leurs besoins. Les personnes doivent maintenant attendre d'y déménager pour ensuite faire une demande au PAD.
L'augmentation du nombre de demandes reflète également une autre nécessité : l'adoption de normes de construction plus inclusives et plus rigoureuses en matière d'accessibilité et d'adaptabilité des logements. Il serait possible, par règlement, d'appliquer des exigences sans obstacle pour tous les nouveaux immeubles à logements.
La norme du logement minimalement accessible est désuète et insuffisante pour loger les personnes en situation de handicap ainsi qu'une population vieillissante. Il faut adopter des normes supérieures à celles prévues actuellement au Code de construction du Québec, par exemple en adoptant la norme CSA B 652 : 23 - logement accessible.
Je vous invite donc à prendre publiquement position en faveur des revendications suivantes :
Lever immédiatement la suspension du Programme d'adaptation de domicile (PAD) et qu'il soit suffisamment financé dès maintenant pour répondre aux besoins de la population dans des délais raisonnables.
Augmenter le montant destiné à la Ville de Montréal pour le PAD montréalais, dans le but de répondre aux besoins de la population dans des délais raisonnables.
Adopter des normes plus rigoureuses et inclusives en matière d'accessibilité et d'adaptabilité pour tous les nouveaux logements construits.
Appliquer les normes d'accessibilité et d'adaptabilité qui existaient dans le programme Accès Logis à tout projet d'habitation financé par des fonds publics.
Sincères salutations,
votre nom complet ira ici
votre email ira ici, votre résidence ira ici
* AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA,Rapport de surveillance sur les chutes chez les aînés au Canada, mars 2022, page 7.
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Le chantier inachevé du ministre (André) Lamontagne

Après une vaste consultation sur le territoire agricole, le ministre de l'Agriculture, André Lamontagne, a fait adopter la loi 86, la Loi visant à assurer la pérennité du territoire agricole et sa vitalité. Elle modifie une loi majeure de 1978 : la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA).
Voix citoyenne, Claire Binet
et 9 cosignataires :
Institut Jean-Garon, Simon Bégin, porte-parole
Protec-Terre, Hubert Lavallée, président
Comité citoyen, Action climatique et environnement Durham-Sud, Jean Falaise
SOS terres agricoles et milieu de vie Saint-Augustin-de-Desmaures, Denis Guénette
Groupe Forêt Charlesbourg, Martine Sanfaçon, co-porte-parole
Mouvement pour une ville Zéro Déchet, Michèle Dumas Paradis
Cercle citoyen au coeur de la cité, Renaud Blais, président
Les AmiEs de la Terre de Québec, Karen Busque, coordonnatrice
Villes et Régions Innovantes (VRIc) et Réseau de l'économie circulaire, Pierre Racicot, Ph. D., dg.
Le jeudi 24 avril 2025
Cette loi devait soutenir « Nourrir le Québec », le projet d'autosuffisance alimentaire de l'ex-ministre Jean Garon. Cet objectif est plus d'actualité que jamais avec la guerre économique planétaire déclenchée par le président américain. La gestion de l'offre, pilier de l'agriculture québécoise, est dans la mire des États-Unis et la Chine frappe une fois encore l'exportation de nos porcs. Parmi les actions du gouvernement québécois, la campagne publicitaire En achetant québécois, on ne se trumpe pas.
Un territoire agricole adéquatement protégé ?
Pour manger québécois, il faut d'abord avoir accès à un capital territorial protégé, accessible et pérenne. C'était le but de la loi 86, avec de nombreuses mesures, mais toutes ne répondent pas adéquatement aux enjeux.
Saluons les dispositions resserrant la surveillance du territoire agricole et sanctionnant plus sévèrement les contrevenants, une recommandation de la Commissaire au développement durable. Mais les ressources de la Commission de protection du territoire agricole devront augmenter substantiellement.
M. Lamontagne a timidement entrepris de remédier à la spéculation et à l'accaparement des terres agricoles, avec un moratoire transitoire limité à certaines parties du territoire agricole et visant seulement les non-agriculteurs. Cette situation permet aux grands domaines agricoles de continuer à s'accroître, en attendant les règlements complétant la loi, et pourrait contribuer à accentuer la hausse pharamineuse du prix des terres et les difficultés d'accès à la terre pour la relève agricole.
Le point d'achoppement majeur concerne l'élargissement des demandes à portée collective permettant la construction de résidences dans certaines parties de la zone agricole. Le ministre s'est montré intraitable devant la levée de boucliers de nombreuses organisations mais complaisant envers des revendications municipales. Pourtant, 40 000 maisons sont déjà autorisées dans 67 MRC ; moins de 15% auraient été construites. Le saupoudrage actuel de résidences sans lien avec l'agriculture pourra s'intensifier dans certaines MRC, affaiblissant davantage la zone agricole et menaçant sa pérennité.
Un territoire agricole méconnu, sous-utilisé et mal utilisé
Pour manger québécois, le territoire agricole doit être en production. Or, le MAPAQ a manqué à ses responsabilités depuis plusieurs décennies en ignorant l'enfrichement croissant des terres agricoles (estimation : plus de 60 000 hectares). Qu'attend le ministre pour agir, notamment afin de favoriser une relance agricole et du même coup faciliter l'établissement de la relève ?
Un développement optimal du territoire agricole requiert une fine connaissance de son état (propriété, utilisation, etc.). Des données existent : éparses, fragmentées, incomplètes. La création d'un Observatoire sur le territoire agricole a été vainement proposée, notamment dans la perspective de mieux composer avec les changements climatiques.
De plus, notre territoire agricole est en partie mal utilisé en raison de programmes qui n'ont pas évolué, comme le soutien de centaines de millions $ à la filière mais-soya-porc dont l'avenir est plutôt incertain. Nous sommes pourtant à un moment charnière : les changements climatiques déstabilisent la production agricole tandis que l'insécurité économique et politique mondiale inquiète grandement.
Un territoire agricole toujours sous pression
Malgré une loi protégeant le territoire agricole depuis 1978, les pressions persistent : urbanisation, infrastructures, projets économiques, spéculation. À plusieurs égards, les intérêts opposés en 1978 restent les mêmes : à défaut d'une réforme de la fiscalité municipale, le revenu principal des municipalités demeure la taxation foncière, moteur de l'étalement urbain.
D'autres interventions gouvernementales affectent aussi le territoire agricole, principalement la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme (LAU) de 1979. Le père de la LPTAA disait que ces lois de la même époque sont comme les deux rails d'une voie de chemin de fer : ils vont dans la même direction mais sans jamais se croiser. Cette image illustre la primauté de la LPTAA sur toute autre loi inconciliable en zone agricole, tel qu'inscrite dans la loi initiale. Si cette primauté a prévalu depuis, les actions récentes du gouvernement suscitent des doutes quant à ses intentions.
Ainsi, la LPTAA semble dorénavant plutôt considérée comme un chapitre en aval de la Politique nationale de l'architecture et de l'aménagement du territoire adoptée en 2023 et de la LAU alors modifiée. De plus, les nouvelles Orientations gouvernementales en aménagement du territoire découlant de la LAU accordent des pouvoirs aux MRC pour régir les activités agricoles, ce qui risque de susciter des tensions et d'altérer la primauté de la LPTAA ainsi que l'équité des conditions de production entre les entreprises agricoles d'une MRC à l'autre.
Malgré des avancées notables, la volonté politique semble manquer pour compléter le chantier afin d'assurer la pérennité et la vitalité du territoire agricole pour « Nourrir le Québec ».
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Tarification de services de soutien à domicile : on a déjà payé, Madame Bélanger !

MONTRÉAL, le 24 avril 2025 /CNW/ - Entre le fiasco SAAQclic, NorthVolt et les coupures dans le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS), le gouvernement annonce qu'ilsonge à tarifer certains services de soutien à domicile (SAD).
Depuis plus de 30 ans, la Coalition solidarité santé se positionne contre toute forme de tarification. Pourquoi ? Parce que la tarification n'a pas sa place dans un système public accessible. Nous souffrons déjà des systèmes à plusieurs vitesses pour voir le médecin, pour nous faire opérer et pour envoyer nos enfants à l'école. « Il ne faut pas répéter cette erreur avec le soutien à domicile : ouvrir la porte à la marchandisation des services à la population, c'est ouvrir la porte aux inégalités », soutien Sophie Verdon, coordonnatrice de la Coalition solidarité santé.
Le SAD : un investissement et non une dépense
Les services de soutien à domicile doivent être intégrés au système de santé et des services sociaux, tout simplement. Les services de SAD servent à désengorger notre système de santé. Ce sont des investissements ainsi qu'une façon concrète d'exaucer le vœu de plusieurs usagers : rester chez soi et jouir de leur pleine autonomie. « Les services à domicile sont importants pour les aînés, mais aussi pour une grande proportion de personnes vivant avec un handicap. Faire payer pour le soutien à domicile, c'est taxer le handicap et la vieillesse », soutient Hugo Vaillancourt, président de la Coalition solidarité santé.
Financer les besoins des personnes et non ceux des entreprises
Nous proposons un réel virage vers un système de soutien à domicile fort, accessible et équitable. Pour ce faire, des investissements majeurs sont nécessaires. Si Mme Bélanger veut que des gens plus fortunés paient plus, elle n'a qu'à demander à son collègue Éric Girard d'augmenter les impôts des plus riches et de revoir la contribution des entreprises au Fonds des services de santé. C'est d'ailleurs ce qu'a proposé cet automne l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS), pour financer un soutien à domicile à la hauteur des besoins à venir de la population.
Parlons le langage du gouvernement : d'un point de vue économique, le SAD est un investissement gagnant. Il réduit les coûts dans le reste du système de santé et des services sociaux. En effet, les travaux récents de l'IRIS démontrent que d'ici 2050, sans même améliorer les services, les dépenses en soins de longue durée au Québec, qui sont actuellement de 7,7 milliards de dollars, atteindront 25,6 milliards, si aucun changement n'est fait dans le modèle actuel de prise en charge de la perte d'autonomie. Ces mêmes estimations évaluent à plusieurs milliards de dollars les économies potentielles d'un virage réussi vers le SAD avec des services publics et accessibles.
« Le Québec est une société riche qui peut s'inspirer des meilleurs modèles dans le monde. Il suffit d'investir notre argent et nos ressources aux bons endroits, pour s'assurer d'un écosystème social qui peut subvenir aux besoins de tous et toutes. C'est non seulement possible ; c'est nécessaire », de conclure Sophie Verdon.
À propos
La Coalition solidarité santé est un regroupement québécois d'organisations syndicales, communautaires et de comités de citoyennes et citoyens. Elle comprend également des groupes féministes, de personnes âgées, de personnes en situation de handicap et de personnes proches aidantes. La défense des grands principes qui constituent les pierres angulaires du réseau de santé depuis sa mise sur pied, à savoir le caractère public, la gratuité, l'accessibilité, l'universalité et l'intégralité, sont à la base de toutes les interventions de la Coalition solidarité santé.
SOURCE Coalition Solidarité Santé
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Le Collectif pour un Québec sans pauvreté se joint à la grande manifestation pour exiger des solutions à la crise du logement

Québec, le 24 avril 2025 – Le Collectif pour un Québec sans pauvreté participe aujourd'hui à la manifestation nationale organisée à Drummondville par le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) à l'occasion de la 13e Journée des locataires. Le Collectif exige lui aussi des engagements fermes de la part du gouvernement pour répondre à la crise du logement et soutenir les personnes en situation de pauvreté.
Alors que le Québec traverse la pire crise du logement de son histoire, de plus en plus de ménages locataires doivent consacrer plus de 30 % de leurs revenus pour se loger. Une pression financière qui rime trop souvent avec insécurité alimentaire, privations et risques d'itinérance.
Selon le Rapport de la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) de l'automne 2024, ce sont les logements les plus abordables qui sont les plus rares. À Montréal, le taux de vacance pour les logements à 999 $ ou moins oscille entre 0,0 % et 0,8 %. Dans ces conditions, toute hausse de loyer ou tout départ forcé menace directement la capacité des ménages à faible revenu de se loger.
« Alors que le salaire minimum n'augmentera que de 2,2 % cette année, la hausse recommandée des loyers par le Tribunal administratif du logement (TAL) est de 5,9 % au 1er juillet, la plus forte hausse en 30 ans. Et la situation ne risque pas de s'améliorer de sitôt avec la nouvelle méthode de calcul du Tribunal. Quand les prestations d'aide sociale ne permettent même pas de couvrir les loyers les plus abordables, ça ne fonctionne plus », d'affirmer M. Serge Petitclerc, porte-parole du Collectif.
Le Collectif s'indigne de l'inaction gouvernementale et soutient les revendications du RCLALQ :
* Un gel des loyers immédiat pour freiner l'explosion des coûts ;
* La création d'un registre obligatoire des baux, pour assurer un véritable contrôle des loyers ;
* Un réinvestissement massif et durable dans le logement social, seul capable de répondre aux besoins criants des moins nanti∙es.
En collaboration avec le RCLALQ, le Collectif pour un Québec sans pauvreté invite tous les locataires et allié·es à se joindre à la grande manifestation nationale pour le droit au logement, aujourd'hui à 13 h à Drummondville.
Point de rassemblement : Pavillon du parc Woodyatt – 53, rue du Pont à Drummondville
Parce qu'un logement est un droit, pas un luxe.
À propos du Collectif
Actif depuis 1998, le Collectif pour un Québec sans pauvreté regroupe 40 organisations nationales québécoises, populaires, communautaires, syndicales, religieuses, féministes, étudiantes, coopératives ainsi que des collectifs régionaux dans la plupart des régions du Québec. Des centaines de milliers de citoyen·nes adhèrent à ces organisations qui ont dans leur mission la lutte à la pauvreté, la défense des droits et la promotion de la justice sociale. Depuis le début, le Collectif travaille en étroite association AVEC les personnes en situation de pauvreté.
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QS veut mettre à contribution les multimillionnaires pour financer les services publics

Alors que la décote du Québec coûtera cher en taux d'intérêts, la porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal, et la responsable solidaire en matière de Finances, Alejandra Zaga Mendez, demandent à la CAQ d'imposer une taxe sur la fortune nette des multimillionnaires détenant plus de 50 millions de $.
Cette mesure toucherait 4000 ménages, soit le 0,1% le plus riche de la population, et rapporterait annuellement 3 milliards $ supplémentaires par année afin d'éviter des coupures dans les services publics.
« Pourtant, malgré un déficit de plus de 13 milliards $, la CAQ n'a qu'une vision : couper dans les services à la population. Je demande à François Legault et Éric Girard de regarder du côté de la colonne des revenus et d'avoir le courage d'aller chercher l'argent là où il est, en taxant la fortune du 0,1% le plus riche. Ça aurait un impact immédiat sur les services. L'austérité et les coupures ne sont pas une fatalité. On peut faire d'autres choix comme société, accroître les revenus de l'État et mieux répartir la richesse. Même l'agence S&P l'a dit : la décote du Québec est causée par l'écart entre les dépenses et les revenus », a déclaré Mme Zaga Mendez.
Cette mesure serait mise en place en rendant obligatoire pour tout ménage possédant des actifs dépassant 25 M$ de les déclarer dans un formulaire à Revenu Québec. Les dettes et autres passifs seraient ensuite retranchés pour identifier les fortunes et ainsi appliquer une imposition annuelle de 1 % sur les actifs nets entre 50 M$ et 500 M$ et de 2 % sur les actifs nets de plus de 500 M$.
Dans la pratique, Revenu Québec devra essentiellement surveiller plus attentivement les 4000 ménages dont la fortune dépasse 50 M$.
Une mesure fiscale qui existe à l'international
« Les milliardaires s'enrichissent alors que nos services publics craquent de partout. En ce moment, le PDG de Couche-Tard a les moyens de s'acheter 18 000 maisons, alors que la majorité des Québécoises et des Québécois n'arrivent même pas à acheter leur première maison, c'est indécent. Ils ont les moyens, faisons-les contribuer. Je demande à M. Legault de suivre l'exemple de la Suisse, de l'Espagne, de la France, de la Norvège et de la Colombie, qui ont déjà ce genre de mécanisme pour que les plus fortunés paient leur juste part. C'est une mesure qui ne demande que du courage politique, et qui va permettre d'éviter de vivre de l'austérité en santé, en éducation, en transports », a complété Mme Ghazal.
Interventions de Ruba Ghazal et d'Alejandra Zaga Mendez à l'Assemblée nationale demandant que les multimillionnaires paient leur juste part d'impôt. Écoutez les réponses démagogiques du premier ministre Legault et de son ministre des Finances.
Interventions de députées de Québec solidaire, Ruba Ghazal et Alejandra Zaga Mendez le 24 avril dernier à l'Assemblée nationale demandant que les multimillionnaires paient leur juste part d'impôt. Les réponses du Premier ministre et du ministre des Finances démontrent que le gouvernement de la CAQ est au service de la classe dominante.(PTAG). Voici le fichier audio de ces échanges :
(Extrait de la vidéo du Secrétariat de l'Assemblée nationales)
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Décryptage. Il est grand temps que les Canadiens prennent la menace Trump au sérieux

Non seulement le président américain menace d'annexer le Canada, mais il est en train d'instaurer un régime autoritaire aux États-Unis. De quoi faire peser un risque sur la souveraineté et les valeurs démocratiques canadiennes, souligne, avant les élections fédérales du 28 avril, cette journaliste et productrice canadienne dans le magazine “The Walrus”.
24 avril 2025 | tiré du site du Courrier international | Dessin de Cameron Cardow paru dans The Ottawa Citizen, Canada. © Cagle Cartoons
Il y a environ un mois, j'ai participé à une réunion de famille, le genre d'événement où l'on discute de tout et de rien en engouffrant de grosses bouchées de lasagne. À un moment, ma voisine a commencé à parler des droits de douane imposés par Donald Trump et de ses menaces d'annexer le Canada. Après qu'on eut échangé quelques blagues cyniques avec les gens autour de nous, elle a dit à mi-voix :
“Ça commence à faire peur.”
Pendant longtemps, la plupart des gens avec qui je discutais considéraient comme une blague – ou ignoraient simplement – la menace de Trump de faire du Canada le 51e État des États-Unis. Deux amis américains m'ont assuré que ça n'arriverait jamais, l'un d'eux affirmant que, sur le plan électoral, ce ne serait pas avantageux pour les républicains, puisque les Canadiens voteraient démocrate.
Je lui ai fait remarquer que si les États-Unis annexaient illégalement le Canada, on peut supposer que les pratiques électorales normales ne s'appliqueraient pas. À l'époque, rares étaient les Canadiens qui semblaient vouloir aborder le sujet sérieusement. Aucun d'entre nous ne souhaitait envisager que notre pays puisse être l'objet des visées impérialistes de son voisin.
Une aversion pour la peur et l'anxiété
Certains diront que le simple fait de parler des menaces de Trump contribue à les banaliser. Cet argument fait écho à une conception plus large de la manière dont les médias devraient couvrir les autres menaces impérialistes formulées par Trump, notamment contre Gaza, le Panama et le Groenland.
Voir aussi : Vidéo. Cartes sur table : pourquoi Trump menace d'annexer le Groenland
Récemment, par exemple, Jelani Cobb, doyen de l'école de journalisme de l'université Columbia, a dit que les médias devraient aborder les menaces de Trump de s'emparer de Gaza “de la même manière qu'on traiterait un caprice d'enfant. Ce qui compte, c'est ce qui est fait concrètement. Alors à moins que [Trump] ne nous montre les plans des appartements qu'il a prévu de faire construire à Gaza, ça reste du verbiage.”
Je sais qu'il est difficile de couvrir Trump. Mais en traitant le président américain comme un gamin capricieux, les médias ne lui donnent-ils pas la permission tacite d'agir comme tel ? Par ailleurs, considérant le pouvoir immense qu'il exerce, je me demande si la réticence des Canadiens à réagir aux menaces concernant l'annexion de leur pays ne relève pas davantage d'une aversion pour la peur et l'anxiété que d'une approche stratégique.
À lire aussi : Analyse. Donald Trump ravive dangereusement le rêve de l'empire américain
Soyons francs : Trump n'a-t-il pas déjà banalisé la menace simplement du fait de sa position ? Comment devrait-on interpréter sinon le fait qu'il publie sur son réseau Truth Social deux cartes sur lesquelles le Canada n'apparaît nulle part, les États-Unis englobant l'ensemble des provinces et des territoires ?
Et les politiciens et les médias américains ne banalisent-ils pas la menace en refusant de la dénoncer publiquement, voire en lui donnant une certaine légitimité ? Cette approche n'est pas sans rappeler la façon dont les démocrates et leur candidate, Kamala Harris, ont réagi aux mensonges racistes de Trump, qui a affirmé pendant lla campagne électorale que les immigrés haïtiens de Springfield, en Ohio, mangeaient les animaux de compagnie : on en a fait des blagues et des mèmes. Aujourd'hui, Trump a mis fin au statut de protection temporaire dont bénéficiait un demi-million d'Haïtiens vivant sur le territoire américain.
Un projet colonial toujours d'actualité
Les menaces expansionnistes du président américain sont choquantes, certes, mais elles constituent l'aboutissement du projet fasciste qui vise à “rendre sa grandeur à l'Amérique”. Le slogan évoque un passé imaginaire glorieux, celui d'une Amérique forte où la vie était bonne pour les Américains (blancs).

La densité de population au Canada.La densité de population au Canada. SOURCES : STATISTIQUE CANADA, ATLAS DU CANADA.
J'admets avoir cru que le locataire de la Maison-Blanche concentrerait ses efforts sur les enjeux nationaux. J'aurais dû me douter que les choses ne se passeraient pas ainsi. Après tout, au fil de l'histoire, les États-Unis se sont approprié à maintes reprises des territoires souverains pour servir leurs intérêts. Les terres autochtones, en particulier, ont été l'objet de leur convoitise : elles ont été conquises par la violence ou parfois achetées à d'autres puissances étrangères comme la Russie ou la France.
Les États-Unis se sont aussi emparés de vastes pans de territoires situés à l'ouest et au sud-ouest pendant la guerre américano-mexicaine, entre 1846 et 1848. Le pays s'est ensuite intéressé à des territoires plus éloignés : il a appuyé le coup d'État à Hawaï en 1893, a envahi Porto Rico et a acheté les Philippines à l'Espagne. Encore aujourd'hui, l'empire américain possède un vaste réseau de bases militaires à l'étranger.
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Les ambitions expansionnistes qu'affiche Trump ces jours-ci marquent simplement un autre chapitre de cette tradition funeste. Après tout, les États-Unis sont nés d'un projet colonial qui est toujours d'actualité en 2025. Si nous sommes choqués, c'est que la croyance naïve que nous serons toujours épargnés par les visées impérialistes de notre voisin a été profondément ébranlée. Mais peut-être serons-nous finalement épargnés. Qui sait quels desseins le président américain décidera-t-il de poursuivre ?
Une sidération, voire un déni collectif
“Elbows up !” un cri de ralliement anti-Trump
“Elbows up” ou “Jouer des coudes”. C'est le nouveau slogan des Canadiens exaspérés par les attaques de Donald Trump contre leur pays. Inspirée du hockey, l'expression a gagné en ampleur sur les réseaux sociaux, dans la rue et jusqu'au pouvoir à Ottawa. C'est le comédien d'origine canadienne Mike Myers qui a ouvert le bal dans l'émission américaine culte “Saturday Night Live”. Le 1er mars, il est apparu vêtu d'un tee-shirt sur lequel était écrit “Le Canada n'est pas à vendre”. Il a ensuite levé le coude et dit : “Elbows up”.
L'expression, rappelle The Globe and Mail, a été inventée par le légendaire hockeyeur canadien Gordie Howe décrivant “un moyen efficace de se protéger d'un joueur adverse”. Face aux menaces que fait peser le président américain sur le Canada, elle s'est transformée en véritable slogan. Le 9 mars, des centaines de personnes munies de pancartes “Elbows Up” ont manifesté à Ottawa. Puis un site Internet “Elbows Up – Jouons du coude, Canada” a été créé, pour annoncer les manifestations prévues à travers le pays. Le premier ministre libéral, Mark Carney, en pleine campagne électorale, a même participé au mouvement, de concert avec Mike Myers.
Remarquant que le slogan est désormais repris “partout sur les réseaux sociaux”, un journaliste du Winnipeg Free Press y voit l'expression de l'agressivité canadienne. Dans ses rêves, il aimerait voir Mark Carney “s'emparer d'un des secrétaires du cabinet de Trump, renverser sa veste sur sa tête et lui asséner une série de crochets”. Avant de conclure : “Je sais que ce genre de comportement serait vraiment mal. Mais ça ferait du bien.”
Une retenue que n'ont pas manifestée les joueurs de l'équipe nationale de hockey sur glace le 15 février. Ce jour-là, les équipes des États-Unis et du Canada se rencontraient à Montréal dans le cadre de la Confrontation des quatre nations. Le match a viré à l'empoignade : trois bagarres en neuf secondes, l'hymne américain hué… Une violence qui a stupéfié le public et les téléspectateurs, pourtant habitués à une bonne dose d'adrénaline dans ce sport.
Courrier International
Et pourtant, face à cet élargissement de l'idéologie de “l'Amérique d'abord” et aux ambitions explicitement impérialistes de Trump, les Canadiens doivent infléchir le discours public qui, par moments, semble toujours réticent à prendre au sérieux ces menaces. Nous devons corriger notre “biais de normalité” ou notre “biais de statu quo”, que l'épidémiologiste Adam Kucharski définit comme “la tendance à préférer au changement le maintien de l'état actuel des choses”.
Sur la plateforme Substack, Kucharski compare la régression actuelle de la démocratie aux États-Unis aux premiers jours de la pandémie de Covid-19.
“Avant et après le début de la pandémie, les gens étaient généralement réticents à admettre que la crise était bien réelle […]. De la même manière, on a aujourd'hui l'impression que de nombreux journalistes et personnalités publiques ont du mal à voir qu'il se passe quelque chose d'inédit et de désastreux aux États-Unis. Je soupçonne que cela vient souvent d'une incapacité, voire d'une réticence à regarder la réalité en face. La pandémie de Covid-19 et la situation actuelle aux États-Unis illustrent toutes deux une variante cruciale de ce biais : alors que le statu quo s'est déjà effondré, les gens continuent d'agir comme s'il était intact.”
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Quand la réalité est inimaginable et effrayante, on comprend que les gens soient nombreux à s'accrocher à ce qui leur est familier. D'après Kucharski, l'humain a aussi tendance à croire qu'en admettant la réalité d'une crise, on court le risque de lui donner un caractère inévitable. Or, selon lui, cette tendance n'est pas sans risque : “Puisqu'ils n'ont pas encore pleinement intégré ce changement, les individus se résolvent par défaut à l'inaction. Au lieu d'admettre qu'un changement fondamental s'est déjà produit, ils s'accrochent à la croyance d'un retour à la normale.”
On sait déjà que le biais du statu quo favorise l'inaction face à l'urgence climatique. Je crains qu'il ait aussi pour effet de teinter la vision qu'ont certains Canadiens de la crise nationale qui se profile. S'il est vrai que l'on parle davantage des menaces de Trump ces jours-ci, on a souvent tendance à tenir pour acquise la continuité de la souveraineté canadienne. Nos politiciens nous assurent que le Canada ne fera jamais partie des États-Unis, mais ils n'expliquent pas concrètement comment ils comptent s'y prendre pour empêcher que cela se produise.
Les politiciens sous-estiment les dangers qui pèsent sur le pays
Il ne s'agit pas ici d'un plaidoyer en faveur d'un accroissement des dépenses militaires ou d'une démonstration de patriotisme. Il ne suffit pas d'acheter canadien et de boycotter les produits américains : il faut admettre la réalité du régime autoritaire que Trump est en train d'instaurer aux États-Unis et le risque inhérent que cela fait peser sur la souveraineté et les valeurs démocratiques canadiennes.
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Mark Carney, l'ambitieux
Les Canadiens sont appelés aux urnes le 28 avril pour désigner leurs 343 députés. Des élections sur fond de tensions avec le voisin américain : “Nous ne pouvons pas contrôler le président américain, mais nous pouvons contrôler notre destin. Nous sommes maîtres chez nous”, a déclaré le chef du Parti libéral Mark Carney le 23 mars, donnant le coup d'envoi à la campagne électorale neuf jours après avoir été assermenté pour remplacer le Premier ministre démissionnaire, Justin Trudeau. L'ancien grand argentier de la Banque du Canada et de la Banque d'Angleterre a vite annoncé ses couleurs. Celui qui est perçu comme le meilleur leader pour faire face à Trump a déclaré que la “vieille relation” canado-américaine “est terminée”. Il veut créer “un corridor national de commerce et d'énergie”, note Le Devoir. Il a milité pour la lutte contre le changement climatique et veut désormais faire du Canada une superpuissance énergétique en favorisant le développement des énergies renouvelables et conventionnelles, rapporte La Presse. Recul de ses valeurs ? Non, dit ce novice en politique de 60 ans. Son rêve de “dominer” le marché conventionnel passe par la diminution de la pollution générée par la production et les transports.Courrier International
C'est la situation dans laquelle se trouve actuellement le Canada avec ce qui était, jusque très récemment, son plus proche allié, un pays que l'on peut considérer comme le plus puissant au monde. La campagne pour l'élection fédérale canadienne qui se déroule actuellement est dominée par Trump et ses droits de douane, certes, mais elle ne donne pas toute la mesure des dangers qui guettent le Canada. Mark Carney [Parti libéral du Canada] et Pierre Poilievre [Parti conservateur du Canada], les deux principaux candidats [aux élections générales du 28 avril ], affirment qu'ils peuvent bâtir “un Canada fort” et mettre “le Canada d'abord”.
Pierre Poilievre, le combatif
Politicien de carrière, élu député conservateur en 2004 à l'âge de 25 ans, Pierre Poilievre a pris la tête de son parti il y a trois ans après avoir embrassé la cause des camionneurs antivaccins en pleine pandémie. En imposant ses thèmes, comme la hausse du coût de la vie ou encore la crise du logement, cet adversaire coriace de Justin Trudeau s'était forgé une formidable avance dans les sondages, avance qui a fondu comme neige au soleil avec l'arrivée de Mark Carney et les multiples menaces de Donald Trump, analyse La Presse. Celui que l'on a surnommé le “Trump canadien” promet désormais de tenir tête au chef de la Maison-Blanche, qui veut faire du Canada le 51e État américain. “C'est à notre avantage de rendre le Canada plus souverain et plus fort face aux Américains”, a-t-il déclaré. Mais, note Le Devoir lors d'un rassemblement le 7 avril en Alberta, “ce qu'il a peut-être moins aimé, c'est la façon dont les applaudissements se taisaient à chaque fois qu'il évoquait la menace américaine”.Courrier International
Mais jusqu'à présent, une grande partie des mesures qu'ils ont proposées concernent les réductions d'impôts et l'économie, même si le candidat libéral a récemment admis que la relation qu'entretenait traditionnellement le Canada avec les États-Unis “n'existait plus”.
Les politiciens aiment dire que les temps sont durs et promettre des jours meilleurs. Cependant, répondre à Trump par des mesures économiques ne changera rien au fait que les États-Unis ont pris un virage autoritaire et que leur président parle désormais ouvertement de son désir d'annexer le Canada.
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D'autres pays, comme la Suède, la Finlande, la Norvège et la France, qui ont déjà été envahis ou menacés d'invasion par de puissants voisins, ont commencé à préparer leurs citoyens à cette période d'instabilité géopolitique. Ils distribuent des manuels de préparation aux situations d'urgence qui traitent entre autres de conflits armés, de menaces à la sécurité et de catastrophes climatiques.
Pourtant, ici au Canada, l'idée que l'on puisse distribuer de tels manuels semble impensable. Ce serait sans doute vu comme un aveu de faiblesse plutôt que comme une précaution judicieuse. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que la possibilité que Trump tente d'annexer de force le Canada est bien réelle. Il est temps de commencer à envisager le pire au lieu d'espérer que tout se passe au mieux.
Melissa J. Gismondi

La solitude du coureur de fond

Les sondages n'ont pas cessé de confirmer la débandade électorale du Nouveau Parti démocratique (NPD).
LA SOLITUDE DU COUREUR DE FOND
De 18% des voix obtenues au scrutin fédéral de 2021, il a descendu à 7% aux dernières nouvelles. Il ne réussira peut-être même pas à faire élire assez de députés pour obtenir le statut de parti reconnu à la Chambre des Communes.
Pourtant, le bilan de son action en Chambre n'est pas négligeable. Il a profité du fait de détenir la balance du pouvoir afin d'arracher aux libéraux quelques gains pour la population, en particulier le Régime canadien de soins dentaires gratuits. Mais en fin de compte, c'est le gouvernement minoritaire de Justin Trudeau qui en a retiré le crédit.
Jagmeet Singh est bien sympathique, la sincérité avec laquelle il défend ses causes est évidente. Mais la formation qu'il dirige ressemble à certains égards au libéraux. Ils sont tous deux multiculturalistes et centralisateurs, partageant la même conception stricte du fédéralisme canadien. Tous deux se méfient du nationalisme québécois, que ce soit dans sa version indépendantiste ou autonomiste.
Mais en politique, la sympathie que peut inspirer un leader ne suffit pas à assurer le succès électoral de son parti. Il manque à monsieur Singh l'indispensable crédibilité nécessaire pour faire du NPD un parti à vocation de pouvoir. La plupart des gens le voient comme un défenseur dévoué de la cause des démunis, mais pas comme un premier ministre. L'incompréhension qu'il démontre à l'endroit du nationalisme québécois l'empêche de répéter l'exploit de Jack Layton en 2011, qui lui, avait bien saisi l'importance d'accepter le nationalisme québécois. Il parlait (en termes plutôt vagues, il est vrai) de respecter les champs de compétence des provinces et d'un droit de retrait avec compensation des programmes fédéraux. Il qualifiait sa proposition de "fédéralisme asymétrique". Il est parvenu, à la surprise générale, à faire élire cinquante-neuf députés dans la Belle Province. Du jamais vu !
Maintenant, quatorze ans plus tard, l'arrivée au pouvoir de Donald Trump à la Maison-Blanche a changé la donne. Ses menaces annexionnistes ont ébranlé la classe politique canadienne, même les conservateurs, pourtant assez proches des républicains américains sur le plan idéologique. Il en est résulté une remontée spectaculaire les libéraux qui semblaient en perdition sous Justin Trudeau au détriment des conservateurs de Pierre Polievre. Mark Carney a pris la direction du parti et du gouvernement. Une vague de patriotisme déferle présentement sur le Canada. Le nouveau premier ministre est vu comme le leader tout désigné pour tenir tête à Trump parce que plus rassembleur. On le considère comme le seul chef apte à refréner les velléités annexionnistes de Trump, et ce même au Québec. Le Parti libéral y devance le Bloc par environ vingt points d'avance.
Dans ce concert de nationalisme, le NPD paraît isolé. Il se livre aux dénonciations convenues de Trump bien sûr, mais il met l'accent sur des thèmes sociaux plutôt que nationaux, par exemple imposer comme il se doit les ultrariches. En effet, le problème des inégalités sociales se pose avec acuité d'un océan à l'autre.
En résumé, les difficultés internes du pays ne peuvent être ignorées au profit du "patriotisme". C'est le mérite de monsieur Singh que de le rappeler sans relâche. Après tout, le Canada n'est toujours pas annexé aux États-Unis et ne le sera sans doute jamais. Jagmeet Singh a donc raison de dénoncer des inégalités sociales qui ne font que se creuser toujours davantage.
Si on doit prendre la juste mesure de la menace que le trumpisme fait peser sur le Canada, cela ne doit pas pour autant détourner l'attention des problèmes internes qui l'affligent. Ce faisant, le Nouveau parti démocratique respecte sa vocation première : celle de répartir le plus équitablement possible la richesse produite ici. C'est le mérite de monsieur Singh que de faire entendre une voix discordante de gauche dans le concert du patriotisme pancanadien, et ce, peu importe le résultat final sur le plan électoral.
Jean-François Delisle
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Élections fédérales : protestation écarlate

En marge du débat des chefs en anglais, tenu le jeudi 17 avril dernier, des dizaines de manifestantes ont revêtu la célèbre tenue des Servantes écarlates. Par ce geste fort, elles ont voulu lancer un avertissement aux politiciens : il est urgent de protéger la société contre la dystopie qui semble prendre forme chez nos voisins du Sud.
Tiré de Ma CSQ.
Les droits des femmes, encore fragiles, sont attaqués de plein fouet depuis les dernières années, et encore plus ces derniers mois. Qu'il s'agisse du recul du droit à l'avortement ou de l'interdiction pour les chercheuses et chercheurs américains d'utiliser le mot « femmes » dans leurs travaux sous peine de perdre leur financement fédéral, les mises en garde de Simone de Beauvoir résonnent désormais comme une prophétie inquiétante.
Les militantes de différentes organisations se sont mobilisées pour dénoncer l'invisibilisation des enjeux féministes tout au long de la campagne électorale, en particulier la défense du droit à l'avortement.
Le mouvement féministe reste vigilant et engagé pour les droits des femmes. Comme l'ont affirmé les manifestantes, lors de l'événement : « Nous ne redeviendrons jamais des citoyennes de seconde zone » !

Meilleure reconnaissance de la violence conjugale dans le Code criminel : les chefs de partis appelés à s’engager

Cet hiver, le Canada était à deux doigts de devenir l'un des États pionniers dans la criminalisation du contrôle coercitif. À ce jour, seule une poignée de juridictions dans le monde ont franchi ce pas : l'Angleterre et le Pays de Galles, l‘Écosse, l'Irlande et quelques États américains et australiens.
À la veille de la prorogation du parlement, un projet de loi majeur en ce sens s'apprêtait à franchir les toutes dernières étapes avant la sanction royale, après avoir été adopté unanimement par la Chambre des communes. Concrètement, cette nouvelle infraction allait permettre de reconnaître l'ensemble des dimensions de la violence conjugale, au-delà des coups, du harcèlement ou des menaces. De reconnaître une série de comportements qui visent à isoler, terrifier, contrôler et priver une partenaire intime de sa liberté. De reconnaître les atteintes graves que portent ces comportements au droit à la sécurité et au droit à la liberté des femmes et des enfants qui en sont les principales victimes.
Le lien entre le contrôle coercitif et le danger est désormais bien établi : dans plus de 90% des cas de féminicides, il y avait du contrôle coercitif. Alors que pour près d'une victime sur trois, le meurtre ou la tentative de meurtre était le premier acte de violence physique.
Remettre la violence conjugale à l'agenda politique
Avec le projet C-332, des milliers de victimes de violence conjugale s'apprêtaient à pousser un soupir de soulagement : ce qu'elles endurent depuis des années, sans avoir aucun levier juridique, allait enfin être reconnu, et puni par la loi. Mais les circonstances politiques ont eu raison de ce projet de loi pourtant si attendu.
La criminalisation du contrôle coercitif faisait consensus auprès de tous les partis fédéraux, après des années d'efforts de la part de différents acteurs pour faire reconnaître la gravité et la dangerosité de ces comportements de contrôle qui se perpétuent souvent des années durant.
Aujourd'hui, dans le cadre de cette campagne électorale fédérale, plusieurs associations de maisons d'aide et d'hébergement implorent les chefs de partis à s'engager, sans l'ombre d'un doute, à déposer un nouveau projet de loi dans la prochaine législature pour créer une infraction criminelle de contrôle coercitif. Ce projet de loi devrait s'appuyer sur les nombreux travaux et consultations déjà réalisés, qui rencontraient l'appui général à la Chambre des communes.
C'est l'occasion de mettre de l'avant un Canada qui agit concrètement en faveur de l'égalité des genres et de s'afficher comme chef de file en matière de lutte contre les violences faites aux femmes. Monsieur Blanchet, Monsieur Carney, Monsieur Pedneault, Monsieur Poilièvre, Monsieur Singh : il est temps de l'affirmer haut et fort.
Organisations signataires
Louise Riendeau, coresponsable des dossiers politiques, Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale (Québec)
Jo-Anne Dusel, Directrice générale, Provincial Association of Transition Houses and Services of Saskatchewan (PATHS) (Saskatchewan)
Maïra Martin, Directrice générale, Action ontarienne contre la violence faite aux femmes (Ontario)
Maureen Levangie, Directrice exécutive, Association contre la violence familiale du Nouveau-Brunswick (Nouveau-Brunswick)
Manon Monastesse, Directrice générale, Fédération des maisons d'hébergement pour femmes (Québec)
Amy S. FitzGerald, Directrice générale, BC Society of Transition Houses (BCSTH) (Colombie-Britannique)
Nomazulu Khumalo, Directrice générale par intérim (pour Hawa Dumbuya-Sesay), YWCA NWT (Territoires du Nord-Ouest)
Catherine (Cat) Champagne – Directrice générale, Conseil des refuges pour femmes de l'Alberta (ACWS)
Hayfa Ben Miloud – Coordonnatrice du Volet Intervention – Recherche et Formation – Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Québec)

La politique canadienne favorable au gaz naturel liquéfié (GNL) soutient la nouvelle forme de fascisme de D. Trump alimenté par les énergies fossiles

Le Président Trump rend les contradictions de la politique climatique canadienne vraiment visibles. La production du soit disant gaz naturel américain (un mélange d'hydrocarbures où le méthane domine) a commencé à exploser sous l'administration Obama et n'a cessé de progresser depuis. Le processus de liquéfaction nécessaire pour que le gaz puisse être expédié a débuté en 2016 et a augmenté sans arrêt chaque année. Les régulations ne sont pas le plus grand problème de cette industrie, au contraire, ce sont les marchés.
Nick Gottlieb, Canadian Dimension, 4 avril 2025
Traduction, Alexandra Cyr
L'adoption des énergies renouvelables en Asie dépasse toute les attentes et on s'attend à ce que les marchés du GNL soient dramatiquement en surplus de production dans les prochaines années.
Pour gérer cette situation, l'industrie a deux approches possibles : limiter la production en mettant un arrêt sur la construction de nouvelles infrastructures ou élargir le marché pour absorber le surplus tout en maintenant les prix à un niveau durable.
Le Président Trump, dont le Secrétaire à l'énergie provient directement de l'administration de Liberty Energy, la deuxième plus grande compagnie de fracturation aux États-Unis, semble vouloir aider cette industrie à poursuivre une plus grande stratégie à savoir de déployer le pouvoir économique américain pour imposer et développer la demande de GNL partout dans le monde. Déjà, début février, Taîwan, l'Inde et le Japon ont indiqué qu'ils augmenteraient leurs importations de GNL américain pour apaiser l'administration Trump et éviter des droits de douanes punitifs. La Corée du sud, le Vietnam et l'Union européenne semblent aller dans le même sens ce que Bill McKibben décrit justement dans sa chronique de « faire se coucher ».
Ici au Canada, les politiciens.nes se sont vite distancés.es de D. Trump à cause de sa menace d'annexion du pays pour en faire le 51ième État américain. Mais en même temps, en criant bien fort leur opposition à D. Trump et à ses plans pour le monde entier, le partenariat s'est poursuivi pour élargir le marché du GNL par tous les moyens possibles dont le déploiement du pouvoir politique pour soutenir les compagnies gazières et de gazoduc qui ont des liens étroits avec l'administration Trump.
Bien sûr ce n'est rien de nouveau c'est une des caractéristiques de l'État capitaliste. L'étendue de l'adhésion à l'automobile par exemple ne s'est pas produite à cause de la demande (pour ce type de transport) ou sa supériorité naturelle sur les transports en commun (détestés de tous) mais à cause de décisions sur les infrastructures et de la propagande poursuivie par l'État dans des campagnes introduites dans le système d'éducation qui incitaient les gens à acheter des voitures. Même à ça, l'adoption de la voiture individuelle et le mode de vie américain reposant fortement sur le pétrole, s'est répandu lentement en dehors des États-Unis. Après la deuxième guerre mondiale, Washington s'est servi du Plan Marshall pour lui donner un coup de pouce magistral. Il a reconstruit l'Europe de l'ouest de telle sorte que la dépendance au pétrole y était installée au grand bénéfice des compagnies américaines qui contrôlent la majorité du flot de pétrole dans le monde. Les exemples en sont incalculables mais le plus important est que de manières remarquables, l'allure de ces marchés n'est pas déterminée par la nature humaine qui définit la « demande » mais par les réserves et l'habileté des entreprises avec leurs alliés étatiques à créer la demande voulue. Cette distinction a de profondes conséquences dans notre compréhension de l'avenue des changements, comment notre économie s'est retrouvée en surproduction et, probablement plus important encore en ce moment, pour comprendre comment nous pouvons amoindrir les changements climatiques.
Tout cela pour dire que l'utilisation du pouvoir étatique pour créer des marchés pour des productions intérieures a été la norme depuis des siècles. Qui y a-t-il de différent aujourd'hui dans notre situation politique ? D. Trump a effrontément poussé la menace à un niveau qui lui assure un marché à long terme pour la production la plus rapide d'un produit d'énergie fossile dans le monde : le gaz de schiste. Les politiques climatiques sont pleines de rumeurs et de mystifications mais, dans le cas présent, D. Trump révèle le non-dit. Ce faisant, il rend les contradictions de la politique climatique canadienne clairement visibles.
Notre gouvernement déclare « croire » dans le changement climatique et même d'être un leader dans ce domaine. Mais depuis des années il déploie des moyens en arrière scène pour aider des compagnies comme TC Energy, la compagnie impliquée dans le Coastal GasLink, pour enfermer d'autres pays dans les infrastructures des énergies fossiles repoussant ainsi les énergies renouvelables et affaiblissant la lutte contre le réchauffement climatique. Une grande partie de ce projet est fait en collaboration très proche, mais occultée, avec les États-Unis et d'autres alliés dont les pays membres du réseau de renseignement connus sous le nom de Five Eyes. Ce sont les États-Unis, l'Australie, le Royaume uni, la Nouvelle Zélande (et le Canada).
Cette collaboration n'est pas dirigée que par des intérêts communs mais aussi par des personnels communs. La direction de TC Energy déborde de « douzaines de liens entre le géant du gaz naturel et l'administration Trump », selon la Fondation pour le journalisme d'investigation. Elle a toujours été le principal moteur du projet Prince Rupert Gas Transmission, le gazoduc contre lequel les Premières nations et des groupes communautaires se battentdevant les tribunaux. L'été dernier, elle a vendu le projet à un groupe de partenaires, (joint venture) Western LNG et une petite entreprise basée à Houston (Texas) alliée de D. Trump, avec aussi le gouvernement de Nisga'a Lisims (Première nation). Plusieurs anciens employés de TC poussent le projet vers l'avant sous cette nouvelle propriété. Les détails des enjeux auxquels fait face TC avec cette vente restent nébuleux. PRGT et ses installations d'exportation proposées par Ksi Lisims, sont tous les deux soutenus par des compagnies de financement américaines comme par le PDG de Blackstone, Steve Schwarzman qui était aussi un financier majeur de la campagne présidentielle américaine en 2024.
L'industrie canadienne du gaz de schiste n'est pas qu'alignée sur l'administration Trump, elle y est imbriquée. Malheureusement c'est aussi le cas de l'État canadien.
Les effronteries de D.Trump obligent les politiciens.nes de notre pays, à répondre à cette question : en ce moment, êtes-vous opposés.es au projet fasciste lié aux énergies fossiles des Américains ? Sinon vous ne faites que bavarder pour gagner sans peine des points de politique nationaliste pendant qu'en arrière scène vous continuez à travailler avec l'administration Trump et ses alliés à la promotion de l'expansion mondiale du gaz de schiste minimisant ainsi les pauvres petits progrès qui ont été faits dans la lutte pour le climat.
Une sérieuse opposition à D. Trump voudrait dire de mettre fin au soutien de l'extension de l'énergie du GNL, de faire cesser la mainmise des dirigeants.es des entreprises liées à l'administration Trump et d'annuler toutes les opérations militaires et diplomatiques qui cherchent à incruster la dépendance au gaz dans le monde.
Au moins la position de Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur, est claire. Son appel à la création de zones prêtes à l'emploi est une reprise canadienne transparente du capitalisme anarchique américain lié aux monopoles de l'industrie des énergies fossiles qui offre aux géants canadiens de ce secteur tout ce qu'ils ont toujours demandé. Malheureusement, de l'autre côté du spectre, les politiciens à l'idéologie étroite que nous avons dans ce pays, soit le Premier ministre Mark Carney et le Premier ministre de la Colombie britannique, David Eby, ont fait la preuve de la faiblesse de leur opposition à D. Trump. D. Eby donne une poussée à des projets qui augmentent la production et l'exportation du gaz de schiste du bassin gazier de Montney Shale. Un des premiers gestes du Premier ministre Carney a été de verser 200 millions de dollars à Cedar LNG un nouveau projet d'exportation sur la côte nord-ouest de la Colombie britannique. Plutôt que de travailler avec d'autres pays à renforcer et augmenter la production de l'industrie des renouvelables et affaiblir le pouvoir des États-Unis dans ce secteur en ne soutenant pas l'industrie du GNL, le Canada continue à s'aligner sur les belligérants États-Unis, les leaders de l'obstruction à la lutte pour le climat.
Que les États-Unis sombrent dans le fascisme représente une crise mondiale. Mais c'est aussi une chance pour que des pays comme le Canada se séparent de la main de fer américaine sur les politiques globales, particulièrement sa propension à faire de l'obstruction à propos des changements climatiques. Est-ce qu'un Parti canadien nous présentera une vision pour un futur durable, ou somme nous condamnés.es à suivre nos voisins vers un avenir de plus en plus autoritaire défini par la domination militaire occidentale sur quiconque tente de s'éloigner du pétrole et du gaz ?
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Le démantèlement de l’USAID a aussi des impacts sur les organismes d’aide canadiens et les communautés. Voici comment

Le démantèlement de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) par l'administration de Donald Trump n'affecte pas que les États-Unis et les pays qui reçoivent cette aide. Ses impacts se font aussi sentir sur les organismes d'aide canadiens, leur personnel et les populations qu'elles desservent.
17 avril 2025 | tiré du site thenconversation.com | AP Photo : Des personnes déplacées par les combats entre les rebelles du M23 et les soldats gouvernementaux quittent leur camp sur instruction des rebelles à Goma, en République démocratique du Congo, en février 2025. Ces personnes déplacées internes subissent les conséquences du demantèlement de l'USAID. Moses Sawasawa/
https://theconversation.com/le-demantelement-de-lusaid-a-aussi-des-impacts-sur-les-organismes-daide-canadiens-et-les-communautes-voici-comment-253886
Rappelons que le 20 janvier, le président Trump annonçait une suspension de l'aide étrangère américaine. Fin mars, l'administration informait que le personnel de l'USAID serait réduit de 10 000 à environ 15 postes. On peut anticiper une perte par cascade d'innombrables emplois au sein des organisations sous-traitantes de l'USAID, ainsi qu'un préjudice incalculable pour les millions d'individus qui n'ont désormais plus accès à des biens et services vitaux.
Le démantèlement rapide de l'agence américaine laisse peu d'espoir quant à une reprise de ses activités.
Une enquête menée le 14 février par l'Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI) s'est penchée sur les multiples impacts du démantèlement de USAID. Elle a mobilisé une quarantaine d'individus représentant 26 organismes québécois de coopération internationale, six de leurs partenaires de mise en œuvre dans les pays du Sud global, et des chercheurs et chercheuses du milieu académique spécialisées en aide internationale, dont nous faisons partie. Les résultats ne sont pas publics, mais nous vous en donnons ici les grandes lignes.
Je me spécialise en gestion de projets d'aide internationale et je dirige l'Observatoire canadien sur les crises et l'action humanitaires. Ma co-autrice, Katherine Robitaille, est doctorante et chercheuse en gestion de la coopération climatique internationale à l'Université Laval. Nous tenons à souligner l'apport dans cette recherche de Denis Côté, analyste des politiques à l'AQOCI. Il a piloté l'enquête sur l'impact des coupes de l'USAID auprès des membres.

Une femme porte un tshirt bleu
Une employée de l'USAID exhibe son t-shirt après avoir récupéré ses effets personnels au siège de l'agence à Washington, en février 2025. Jose Luis Magana/AP photo
Fin de l'âge d'or des États-Unis en matière d'aide
Né des cendres de la Seconde Guerre mondiale et des rivalités idéologiques de la Guerre froide, l'USAID a été créé en 1961 en réponse à l'insécurité mondiale qui menaçait le bien-être américain.
Grâce à l'USAID, les États-Unis ont ouvert la voie à la création d'autres agences bilatérales en Occident. Le pays a ensuite été essentiel dans la création du Comité d'aide au développement (CAD) de l'Organisation de coopération et de développement économiques(OCDE). Celui-ci établit les normes en matière d'aide publique au développement (APD).
Le démantèlement de l'USAID sonne le glas de l'âge d'or des États-Unis en APD. Les coupes s'élèvent à 60 milliards de dollars. Le pays, qui occupait depuis longtemps le premier rang parmi les donateurs du CAD, chutera à la huitième place, selon les données compilées par l'OCDE.
Certes, les États-Unis conservent leur influence idéologique et politique. En réaction aux reconfigurations des dynamiques géopolitiques provoquées par Trump, certains donateurs (l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France) ont réduit leur enveloppe d'APD. Ces pays ont opté de consacrer une plus grande part de leur budget à la sécurité nationale.
Le Canada pourrait emboîter le pas : le chef conservateur Pierre Poilièvre a proposé une réduction de l'APD pour financer la défense de l'Arctique.
Des impacts sur les organisations d'aides canadiennes et québécoises
Pour les organismes québécois et canadiens et leurs partenaires locaux, les conséquences sont multiples et profondes.
L'enquête de l'AQOCI révèle que pour les organisations dont la programmation inclut un financement de l'USAID, ou dont les partenaires de mise en œuvre en bénéficient, les pertes d'emplois sont massives.
Une organisation québécoise a rapporté qu'en République démocratique du Congo (RDC), elle a dû mettre fin aux contrats de 77 individus, coupant ainsi les services d'eau et d'assainissement pour plus de 400 000 personnes déplacées. Au Ghana, l'un des 28 pays où cette organisation mène des projets, un partenaire de mise en œuvre a dû licencier 40 travailleurs et travailleuses du jour en lendemain en réponse au gel des financements de l'USAID.
L'organisme Humanité & Inclusion indique que sur 29 projets employant plus de 700 personnes, 400 ont perdu leur travail. Selon le Carrefour de solidarité internationale, un organisme de coopération internationale situé en Estrie, ces mises à pied créent un effet domino ; ceux et celles qui conservent leur emploi subissent une pression accrue pour soutenir leurs familles dans des contextes déjà précaires.
L'incertitude règne parmi les organisations. Un autre organisme, Mission inclusion a évoqué des craintes chez certains partenaires de devoir fermer définitivement leurs portes. SUCO rapporte que plusieurs organisations qui étaient sur le point de signer des ententes se retrouvent face à des contrats gelés ou annulés. D'autres organisations doivent fermer temporairement leurs bureaux sans savoir si elles reprendront leurs activités.
Des effets importants sur les populations déjà vulnérabilisées
Les coupes de l'USAID affectent même les projets que l'agence ne finançait que partiellement. Terre sans Frontières souligne qu'au Mali, la moitié des fonds du Programme alimentaire mondial provenaient de l'USAID. La sécurité alimentaire de centaines de milliers d'individus est désormais en péril. Au Congo-Brazzaville, Humanité & Inclusion estime que 225 000 personnes ne reçoivent plus de services essentiels.
La réduction des financements depuis le gel de l'USAID en janvier entraîne la fermeture de centres de santé et limite l'accès aux médicaments essentiels. Toujours selon l'enquête de l'AQOCI, les hôpitaux soutenus par l'USAID en Haïti, qui prennent en charge des individus atteints de la tuberculose et du VIH/Sida, sont désormais menacés. Faute de soins, les transmissions et les décès évitables augmenteront.

Deux hommes passent devant un hôpital
Des gens passent devant le centre hospitalier Fontaine, temporairement fermé le lendemain de son attaque par un gang armé à Port-au-Prince, en Haïti. Les hôpitaux haïtiens sont aussi touchés par le démantèlement de l'USAID. Odelyn Joseph/AP Photo
Voici d'autres exemples :
- En RDC, les personnes déplacées internes subissent les conséquences de l'arrêt des financements, ce qui aggrave la situation d'urgence déjà marquée par des violences physiques et sexuelles, notamment sur les filles et les femmes.
- Au Nigéria et au Mali, les programmes agricoles et alimentaires sont suspendus, mettant en péril l'approvisionnement en nourriture pour des milliers de familles.
- Au Guatemala, un refuge pour enfants et femmes victimes de violence a dû fermer complètement.
- En Colombie, la réduction des financements compromet les programmes de reconstruction de la paix, et menace la stabilisation et la lutte contre l'impunité. Un projet de déminage en Colombie employant plus de 100 personnes y est à l'arrêt.
- En Haïti, au Honduras et en Colombie, les programmes de soutien aux communautés LGBTQIA2S+ et de lutte contre les violences de genre sont en arrêt.
Le constat est clair parmi les membres de l'AQOCI et leurs partenaires : la perte de l'USAID entraîne des répercussions catastrophiques.
Vers une nouvelle solidarité internationale
Face aux coupes, rappelons l'importance de la solidarité internationale informelle et citoyenne qui demeure une force essentielle de résistance et d'adaptation aux crises.
L'ALNAP, un réseau de recherche qui pilote une méta-étude sur le système humanitaire tous les quatre ans, estime qu'en 2022, les transferts de fonds provenant de la diaspora étaient dix fois plus élevés que le volume annuel d'aide humanitaire publique. Il s'agit d'une solidarité à l'échelle humaine.
Le désinvestissement des pays donateurs de l'Occident signifie-t-il un réinvestissement des pays du sud ?
Citons par exemple la coopération médicale de Cuba, qui a déployé depuis 1960 plus de 400 000 médecins dans des pays du Sud global, selon La Havane, et qui forme gratuitement des étudiants et des étudiantes issues de pays du sud. Au Vanuatu, la réponse au cyclone Harold, qui s'est abattu sur l'archipel en pleine pandémie de Covid-19, a pu compter sur la solidarité interîles au lieu de l'aide étrangère.
Grâce à la Déclaration de Biketawa, un cadre de coopération régionale qui affirme la volonté des États insulaires du Pacifique de collaborer en matière économique, politique et sociale, les pays frappés par les crises et catastrophes ont de plus en plus recours à la solidarité de proximité.
Des centaines de tels exemples pourraient être fournis. Ils rappellent que la solidarité internationale ne se résume pas à l'aide des habituels pays donateurs.
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Résistance féministe contre le pouvoir des grandes entreprises : La vie plutôt que le profit, la paix plutôt que la guerre

Il y a douze ans, plus de 1.100 travailleurs.euses – dont une majorité de femmes – ont été tués dans l'effondrement de l'usine Rana Plaza au Bangladesh. Il ne s'agissait pas d'un accident, mais d'une conséquence brutale du système capitaliste qui priorise le profit avant la vie. Aujourd'hui, cette même logique alimente l'exploitation mondiale, la guerre et la destruction de l'environnement – menée par ces corporations transnationales qui agissent en toute impunité.
24 avril 2025 Journée de solidarité internationale contre les sociétés transnationales
Ces entreprises internationales prospèrent grâce à l'exploitation de la main-d'œuvre, au pillage des territoires et à la destruction des biens communs. Nos biens communs sont attaqués par les sociétés transnationales qui imposent des mégaprojets d'extraction, privatisent l'eau, la santé et l'éducation, et transforment la nature et le travail de soin en profit. Que ce soit par l'exploitation minière, l'agriculture industrielle, les mégaprojets énergétiques ou le capitalisme numérique, elles cherchent à tout transformer – même nos données, nos corps, notre air – en source d'accumulation.
Ils sont validés et protégés par les accords de libre-échange, les institutions financières internationales comme le FMI et la Banque mondiale, et même les organisations multilatérales comme les Nations unies, qui ont permis aux entreprises d'influencer les politiques publiques. Sous le couvert de « partenariats public-privé », elles légitiment un modèle de développement fondé sur l'exploitation, l'exclusion et l'effondrement écologique.
Les multinationales ne profitent pas seulement de l'exploitation du travail et de la nature – elles sont également complices de la guerre, de l'occupation et de la militarisation. L'industrie mondiale de la guerre est dominée par des géants qui produisent des armes, des systèmes de surveillance et des infrastructures militaires utilisés pour renforcer la domination géopolitique et protéger les intérêts extractifs et économiques.
Ces entreprises fournissent les armes utilisées dans les invasions militaires, les régimes répressifs et les occupations illégales. Leurs actionnaires profitent des souffrances et des destructions infligées à des populations entières – en particulier aux femmes et aux enfants.
De la Palestine au Sahel, du Congo à l'Amazonie, les intérêts des sociétés transnationales sont ancrés dans la militarisation des frontières, la persécution des défenseurs.euses de l'environnement et la répression des mouvements de résistance à l'extraction.
En outre, les grandes entreprises technologiques collaborent avec les armées et les gouvernements pour fournir des technologies de surveillance, de reconnaissance faciale, d'intelligence artificielle et de drones utilisées pour contrôler, surveiller et tuer.
Le militarisme ne se manifeste pas seulement dans les zones de conflit. Il est reproduit dans nos vies quotidiennes, à travers la répression policière, les frontières sécurisées, la violence patriarcale et la propagande corporatiste qui présente la résistance comme du terrorisme. La militarisation est un outil qui permet de garantir les profits des sociétés transnationales.
Les femmes résistent – en défendant la paix, les semences, l'eau, les soins et le savoir. Elles construisent des économies alternatives, créent des souverainetés féministes et s'organisent pour protéger la vie et les biens communs. Dans chaque crise – climat, soins, alimentation, migrations, guerres – les femmes sont en marche.
Nous marchons pour la vie plutôt que pour le profit, pour la paix plutôt que pour la guerre. Nous rejetons la marchandisation de la vie et exigeons une transformation radicale. Ce 24 avril, à l'occasion de la Semaine internationale de solidarité féministe contre les sociétés transnationales, nous lançons un appel à toutes et à tous :
– Agissez dans vos territoires.
– Dénoncez la violence des entreprises.
– Amplifiez les alternatives féministes.
Nos corps, nos territoires, nos biens communs ne sont pas à vendre.
Mondialiser la résistance, mondialiser la solidarité féministe, démanteler le pouvoir des grandes entreprises !
Nous marchons contre les guerres et le capitalisme,
nous défendons la souveraineté des peuples et le Buen Vivir !
Marche mondiale des femmes
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Portrait des Québécoises édition 2024 – Violence

Le CSF a rendu publique la plus récente édition du Portrait des Québécoises. Grâce à différents indicateurs statistiques, l'édition 2024 brosse un portrait de l'ampleur et de l'évolution de la violence faite aux femmes au Québec.
Tiré de l'Infolettre de L'R des Centres de femmes Nouvel'R du 23 avril 2025
Il aborde plus spécifiquement :
• la violence dans les relations intimes
• la violence sexuelle
• la violence dans différents contextes, soit en milieu sportif, en milieu de travail et en ligne
• les féminicides.
Violence conjugale
Selon la définition retenue par le gouvernement du Québec en 1995, la violence conjugale « se caractérise par une série d'actes répétitifs, qui se produisent généralement selon une courbe ascendante […]. Elle ne résulte pas d'une perte de contrôle, mais constitue [plutôt] un moyen choisi pour dominer l'autre personne et affirmer son pouvoir sur elle ». La violence conjugale peut prendre plusieurs formes (psychologique, économique, physique, sexuelle, etc.) et survenir au cours d'une relation intime ou à son terme.
L'Enquête québécoise sur la violence commise par des partenaires intimes 2021-2022 montre que 40 % des femmes et 26 % des hommes de 18 ans et plus déclarent avoir subi au moins un acte de violence entre partenaires intimes au cours de leur vie. Elle ne permet toutefois pas de distinguer les actes de violence conjugale de l'ensemble des actes violents pouvant être commis entre partenaires intimes.
D'après les données du Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC), le nombre d'infractions commises en contexte conjugal qui font l'objet d'un signalement et qui sont déclarées par la police est en hausse.
Le taux de femmes victimes d'infractions commises en contexte conjugal passe globalement de 451 à 520 femmes sur 100 000 de 2005 à 2022.
Les femmes constituent 75 % des victimes d'infractions commises en contexte conjugal.
La proportion de femmes victimes d'infractions commises en contexte conjugal est supérieure dans les catégories d'infractions plus graves.
En 2022, les femmes représentent :
– 100 % des victimes d'homicides ;
– 96 % des victimes d'agressions sexuelles ;
– 93 % des victimes d'enlèvement, de traite ou de séquestration.
Violence sexuelle
« […] le concept de violence sexuelle […] fait notamment référence aux problématiques d'agression sexuelle, d'exploitation sexuelle et de harcèlement sexuel » et dont les manifestations sont « ancrées dans une dynamique de rapport de force » (Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle). Différentes enquêtes récentes permettent d'en prendre la mesure.
L'Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire révèle que :
– 15 % des filles et 3 % des garçons de 14 ans et plus déclarent, en 2020-2023, avoir déjà été forcés à avoir une relation sexuelle ;
– la proportion de filles qui disent avoir déjà vécu cette situation est passée de 10 % à 15 % entre 2010-2011 et 2022-2023.
Selon l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés de 2018, réalisée par Statistique Canada :
25 % des femmes et 6 % des hommes déclarent avoir subi au moins une agression sexuelle depuis l'âge de 15 ans ;
– les femmes qui sont plus susceptibles d'avoir subi cette forme de violence sont : celles appartenant à un groupe minoritaire en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (41 % c. 25 % pour les femmes hétérosexuelles et cisgenres) ;
– celles ayant une incapacité (32 % c. 21 % n'ayant pas d'incapacité).
Les données du Programme DUC relatives aux infractions qui font l'objet d'un signalement et qui sont déclarées par la police montrent que :
– les femmes représentent 87 % des victimes d'infractions sexuelles en 2022 et d'infractions liées à l'exploitation sexuelles en 2019 ;
– le nombre d'infractions sexuelles signalées par des femmes et déclarées par la police est en hausse, notamment dans la foulée des dénonciations en ligne (2016-2018) et de la pandémie de COVID-19 (2020-2022). Il passe de 4 751 en 2015 à 7 470 en 2018 et à 10 334 en 2022 ;
– l'auteur présumé est un homme dans 95 % des infractions sexuelles en 2022 et 86 % des infractions liées à l'exploitation sexuelle en 2019 ;
– l'auteur présumé fait partie de l'entourage de la victime dans 90 % des infractions sexuelles en 2022 et 71 % des infractions liées à l'exploitation sexuelle en 2019.
Violence dans différents contextes
En milieu sportif
Chez les jeunes du secondaire de 14 ans et plus pratiquant un sport organisé en 2022-2023, les adolescentes sont proportionnellement plus nombreuses que les adolescents à affirmer avoir subi de la violence psychologique, instrumentale ou sexuelle (d'après l'Étude sur le vécu des adolescents et adolescentes dans les milieux sportifs au Québec).
En milieu de travail
– 15 % des femmes ont déclaré, en 2020-2021, avoir vécu du harcèlement psychologique ou sexuel au travail dans la dernière année, comparativement à 11 % des hommes (selon les données de l'Enquête québécoise sur la santé de la population).
– 25 % des femmes et 13 % des hommes ont affirmé avoir subi, en 2018, au moins un comportement sexuel non désiré au travail au cours des 12 derniers mois (selon les données de l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés).
En ligne
– 15 % des femmes et 12 % des hommes ont déclaré, en 2018, avoir subi au moins un comportement non désiré en ligne au cours des 12 derniers mois.
Certaines femmes sont proportionnellement plus nombreuses à rapporter avoir subi au moins un comportement non désiré en ligne :
– celles issues de minorités en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (31 % c. 14 % pour les femmes hétérosexuelles et cisgenres) ;
– celles ayant une incapacité (22 % c. 11 % pour celles n'ayant pas d'incapacité) ;
– celles appartenant à une minorité visible (20 % c. 14 % pour celles n'appartenant pas à une minorité visible).
Source : Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés.
Les féminicides
On définit le féminicide comme le meurtre d'une femme ou d'une fille en raison de son sexe. Les féminicides ne sont pas reconnus comme des crimes distincts dans le Code criminel du Canada, de sorte qu'aucune donnée ne permet d'en comptabiliser officiellement les occurrences. Des données sont toutefois disponibles sur les femmes victimes d'un meurtre.
En 2022 au Québec :
– 19 femmes ou filles ont été tuées par un accusé de sexe masculin (données de l'Observatoire canadien du fémicide pour la justice et la responsabilisation).
– 13 femmes ont été tuées en contexte conjugal (données du Programme DUC).
Pour en savoir plus sur la violence faite aux femmes, consultez ces productions du CSF :
– 50 ans d'évolution en matière d'égalité entre les femmes et les hommes – Section 2.3 (« Violence »)
– L'étude sur les femmes et le sport – Section 2.2. (« La sécurité des filles et des femmes dans le milieu sportif »)
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Le projet de loi 94 ou comment priver des femmes de leurs droits

Nous, groupes féministes de tous horizons, dénonçons avec force l'interdiction du port de signes religieux dans le réseau de l'éducation proposée par le projet de loi 94 du ministre de l'Éducation, Bernard Drainville. Cette nouvelle loi élargirait la portée de mesures discriminatoires introduites par la loi 21, qui proscrit déjà aux figures d'autorité et aux personnes enseignant dans le réseau public de porter des signes religieux visibles. Désormais, cette interdiction s'étendrait aux étudiant·es, aux parents, à l'ensemble du personnel scolaire et aux personnes travaillant dans le cadre d'ententes avec les établissements scolaires. Cela, alors même que la constitutionnalité de telles mesures est actuellement contestée devant la Cour suprême du Canada.
Une lettre ouverte du Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec, de la Fédération des femmes du Québec et de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, appuyée par 17 autres groupes signataires, dont L'R des centres de femmes du Québec.
Lettre ouverte ― Le projet de loi 94 ou comment priver des femmes de leurs droits
Lettre ouverte au ministre de l'Éducation, Bernard Drainville
Nous, groupes féministes de tous horizons, dénonçons avec force l'interdiction du port de signes religieux dans le réseau de l'éducation proposée par le projet de loi 94 du ministre de l'Éducation, Bernard Drainville. Cette nouvelle loi élargirait la portée de mesures discriminatoires introduites par la loi 21, qui proscrit déjà aux figures d'autorité et aux personnes enseignant dans le réseau public de porter des signes religieux visibles. Désormais, cette interdiction s'étendrait aux étudiants, aux parents, à l'ensemble du personnel scolaire et aux personnes travaillant dans le cadre d'ententes avec les établissements scolaires. Cela, alors même que la constitutionnalité de telles mesures est actuellement contestée devant la Cour suprême du Canada.
Le gouvernement prétend agir au nom de l'égalité entre les femmes et les hommes pour justifier son projet de loi. Nous nous y opposons fermement justement parce que nous défendons les droits de toutes les femmes à l'égalité, à la sécurité, à l'autonomie et au travail. Pour les femmes pratiquant diverses religions, c'est l'ensemble de ces droits qui seront à nouveau fragilisés, tout comme ils le furent avec l'adoption de la loi 21. La Cour supérieure du Québec a d'ailleurs reconnu l'effet disproportionné de cette loi sur les femmes musulmanes.
La loi 21 adoptée en 2019 a eu de multiples conséquences négatives directes et indirectes, frappant principalement les femmes québécoises musulmanes portant le voile, surtout dans le milieu de l'éducation, mais affectant même celles ne le portant pas. Comme le témoignent plusieurs femmes, l'interdiction du port de signes religieux a des impacts désastreux sur leur parcours professionnel, les limite dans leurs choix de carrière et porte atteinte à leur sécurité économique. À cela s'ajoute une augmentation des violences psychologiques et physiques à leur endroit. Ces femmes, bien souvent racisées, relatent vivre plus de harcèlement au travail et être davantage les cibles d'intimidation et d'insultes dans l'espace public ou sur les réseaux sociaux. Elles doivent constamment faire preuve de stratégies et d'hypervigilance pour faire face à l'exclusion, la discrimination et la haine légitimées par cette loi.
Tous ces contrecoups ont amené les femmes musulmanes à se sentir écartées de la vie publique et exclues de la société québécoise. Selon une étude de Metropolis, 64 % d'entre elles ont vu leur volonté de participer à la vie sociale et politique diminuer depuis l'adoption de la loi 21. Au lieu de favoriser l'inclusion et l'harmonie sociale, qui sont les objectifs déclarés de nos dirigeants politiques, cette loi a eu précisément l'effet inverse.
Sachant toutes ces répercussions, comment le ministre Drainville ose-t-il déposer le projet de loi 94 ? Plutôt que de remettre en question la loi 21, il redouble d'ardeur. Il propose d'étendre l'insécurité aux femmes portant le voile et travaillant notamment au service de garde, à la cafétéria, comme conseillères pédagogiques, comme psychologues ou s'impliquant comme parents bénévoles ; des rôles essentiels à notre réseau d'éducation publique. Jusqu'où ce gouvernement ira-t-il ? Où ces femmes ont-elles encore le droit d'exister, de travailler et de s'épanouir ?
De surcroît, la Ligue des droits et libertés nous alerte que le projet de loi 94 fera fi de 38 articles de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, dont précisément le droit à l'égalité ! En tant que groupes féministes, nous refusons une telle vision sélective de l'égalité qui nie ce droit à certaines catégories de femmes. Le féminisme que nous défendons est un féminisme de l'autonomie, du respect et de la dignité. Il est intersectionnel, antiraciste et solidaire.
Notre constat est clair : le projet de loi 94 du ministre Drainville étend la portée de mesures discriminatoires ayant un impact disproportionné sur les femmes et, pour ce faire, contourne la Charte, un levier juridique qui a historiquement permis aux femmes d'améliorer leurs conditions de vie et le respect de leurs droits. C'est pourquoi il est hautement contradictoire d'affirmer que ce projet est motivé par l'égalité entre les femmes et les hommes. À cet égard, nous déplorons que les groupes féministes critiques de la loi 21 et du projet de loi 94 n'aient pas été invités en commissions parlementaires.
Les femmes musulmanes décident de porter le voile pour de multiples raisons et adhèrent fortement aux valeurs touchant l'égalité des genres. Nous, groupes féministes, soutenons leur autonomie et rejetons toute imposition de porter ou de retirer le voile. Au nom de l'égalité, nous demandons au ministre Drainville de retirer le projet de loi 94 et d'abroger la loi 21, d'engager un véritable dialogue avec les organisations musulmanes et féministes et de garantir l'accès à l'école sans condition religieuse.
Signé par :
Audrey Gosselin Pellerin, organisatrice féministe politique
Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec
Sara Arsenault, responsable des dossiers politiques
Fédération des femmes du Québec
Stephan Reichhold, directeur général
Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes
Et 17 autres groupes signataires :
Fédération des maisons d'hébergement pour femmes
L'R des centres de femmes du Québec
Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail (CIAFT)
L'Observatoire pour la justice migrante
DTMF – Association pour les droits des travailleur•ses de maison et de ferme
Réseau québécois d'action pour la santé des femmes (RQASF)
Regroupement Naissances Respectées
Le conseil canadien des femmes musulmanes
YWCA
Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN)
L'Association canadienne contre la violence sexuelle
DAWN Canada
Co-Savoir
Regroupement québécois des CALACS
Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes (FAEJ)
Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI)
Relais-femmes
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Jorge Bergoglio, contre l’idolâtrie du capital

Avec la mort de Jorge Bergoglio, le pape François, disparaît une figure peu commune, qui se distinguait, dans une Italie gouvernée par les néofascistes, et une Europe de plus en plus réactionnaire, par un engagement éthique, social et écologique surprenant.
Billet de blog 22 avril 2025
https://blogs.mediapart.fr/michael-lowy/blog/220425/jorge-bergoglio-contre-lidolatrie-du-capital
Avec la mort de Jorge Bergoglio, le pape François, disparaît une figure peu commune, qui se distinguait, dans une Italie gouvernée par les néofascistes, et une Europe de plus en plus réactionnaire, par un engagement éthique, social et écologique surprenant.
Depuis que Pie XII a excommunié les communistes, la gauche ne pouvait s'attendre qu'à des anathèmes du Vatican. Jean-Paul II et Ratzinger n'ont-ils pas persécuté les théologiens de la libération, accusés d'utiliser des concepts marxistes ? N'ont-ils pas tenté d'imposer à Leonardo Boff un « silence obéissant » ? Certes, depuis le XIXe siècle, il y a toujours eu des courants de gauche dans le catholicisme, mais ils n'ont rencontré que l'hostilité des autorités romaines. D'autre part, les courants cléricaux critiques à l'égard du capitalisme étaient généralement assez réactionnaires. Critiquant le socialisme féodal ou clérical dans Le Manifeste communiste, Marx et Engels constataient « son incapacité absolue à comprendre le cours de l'histoire » ; mais ils reconnaissaient dans ce mélange « d'échos du passé et de grondements du futur » une « critique mordante et spirituelle » qui pouvait parfois « frapper la bourgeoisie en plein cœur ».
Max Weber propose une analyse plus générale de la relation entre l'Église et le capital : dans ses travaux sur la sociologie des religions, il constate la « profonde aversion » (tiefe Abneigung) de l'éthique catholique envers l'esprit du capitalisme, malgré les adaptations et les compromis. C'est une hypothèse à prendre en compte pour comprendre ce qui s'est passé à Rome avec l'élection du pape argentin.
1. Jorge Bergoglio, le pape François
Que pouvions-nous attendre du cardinal Jorge Bergoglio, élu Pontifex Maximum en mars 2013 ? Certes, il était latino-américain, ce qui restait un signe de changement. Mais il avait été élu par le même conclave qui avait intronisé le conservateur Ratzinger, et il venait d'Argentine, un pays où l'Église n'est pas réputée pour son progressisme, plusieurs de ses dignitaires ayant activement collaboré avec la dictature militaire sanglante. Ce n'était pas le cas de Bergoglio : selon certains témoignages, il aurait même aidé des personnes persécutées par la junte à se cacher ou à quitter le pays. Mais il ne s'est pas non plus opposé au régime : un « péché d'omission », pourrait-on dire. Alors que certains chrétiens de gauche, comme Adolfo Pérez Esquivel (prix Nobel de la paix), l'ont toujours soutenu, d'autres le considéraient comme un opposant de droite au gouvernement des « péronistes de gauche » Néstor et Cristina Kirchner.
Quoi qu'il en soit, une fois élu, François – nom qu'il a choisi en référence à saint François, l'ami des pauvres et des oiseaux – s'est immédiatement distingué par sa position courageuse et engagée. D'une certaine manière, il rappelle le pape Roncalli, Jean XXIII : élu « pape de transition » pour garantir la continuité et la tradition, il a initié le changement le plus profond de l'Église depuis des siècles : le concile Vatican II (1962-65). Bergoglio avait d'ailleurs initialement pensé prendre le nom de « Jean XXIV » pour honorer son prédécesseur des années 1960.
Le premier voyage du nouveau pontife hors de Rome a eu lieu en juillet 2013 dans le port italien de Lampedusa, où des centaines de migrants clandestins arrivaient, tandis que beaucoup d'autres se noyaient en Méditerranée. Dans son homélie, il n'a pas hésité à s'opposer au gouvernement italien - et à une grande partie de l'opinion publique - en dénonçant la « mondialisation de l'indifférence » qui nous rend « insensibles aux cris des autres », c'est-à-dire au sort des « immigrants morts en mer, dans ces embarcations qui, au lieu d'être un chemin d'espoir, étaient un chemin de mort ». Il reviendra à plusieurs reprises sur cette critique de l'inhumanité de la politique européenne envers les migrants.
En ce qui concerne l'Amérique latine, un changement notable s'est également produit. En septembre 2013, François a rencontré Gustavo Gutiérrez, fondateur de la théologie de la libération, et le quotidien du Vatican Osservatore Romano a publié pour la première fois un article favorable à ce penseur. Un autre geste symbolique a été la béatification, puis la canonisation, de l'archevêque Romero du Salvador, assassiné en 1980 par les militaires pour avoir dénoncé la répression anti-populaire, un héros célébré par la gauche catholique latino-américaine mais ignoré par les pontifes précédents. Lors de sa visite en Bolivie en juillet 2015, Bergoglio a rendu un hommage intense et vibrant à la mémoire de son compagnon jésuite Luis Espinal Camps, prêtre missionnaire, poète et cinéaste espagnol assassiné sous la dictature de Luis García Meza le 21 mars 1980 pour son engagement dans les luttes sociales. Lors de sa rencontre avec Evo Morales, le président socialiste bolivien lui a offert une sculpture réalisée par le martyr jésuite : une croix appuyée sur une faucille et un marteau en bois...
Lors de sa visite en Bolivie, François s'est rendu à une rencontre mondiale des mouvements sociaux dans la ville de Santa Cruz. Son discours à cette occasion illustre la « profonde aversion » pour le capitalisme dont parlait Max Weber, mais à un degré jamais atteint par aucun de ses prédécesseurs. Voici un passage désormais célèbre de son discours :
« Nous punissons la terre, les peuples et les individus d'une manière presque sauvage. Et derrière tant de douleur, tant de mort et de destruction, il y a l'odeur de ce que Basile de Césarée appelait « le fumier du diable » ; l'ambition effrénée de l'argent qui gouverne. Le service du bien commun passe au second plan. Lorsque le capital s'érige en idole et domine toutes les options humaines, lorsque la cupidité de l'argent guide tout le système socio-économique, il ruine la société, condamne l'homme, le transforme en esclave, détruit la fraternité entre les hommes, oppose les peuples entre eux et, comme nous le voyons, met même en danger notre maison commune ».
Comme on pouvait s'y attendre, l'approche de François a rencontré une résistance considérable dans les secteurs les plus conservateurs de l'Église. L'un des opposants les plus actifs est le cardinal américain Raymond Burke, fervent partisan de Donald Trump, qui a également pris contact, lors d'un voyage en Italie, avec Matteo Salvini, le leader de la Ligue du Nord... Certains de ces opposants accusent le nouveau pontife d'être un hérétique, voire un... marxiste déguisé.
Lorsque Rush Linebaugh, un journaliste catholique réactionnaire (américain), l'a qualifié de « pape marxiste », François a répondu en réfutant poliment cet adjectif, tout en ajoutant qu'il ne se sentait pas offensé car « il connaissait beaucoup de marxistes qui étaient de bonnes personnes ». En effet, en 2014, le pape a reçu en audience deux éminents représentants de la gauche européenne : Alexis Tsipras, alors chef de l'opposition au gouvernement de droite d'Athènes, et Walter Baier, coordinateur du réseau Transform, formé par des fondations culturelles liées au Parti de la gauche européenne (comme la Fondation Rosa Luxemburg en Allemagne). À cette occasion, il a été décidé d'entamer un processus de dialogue entre marxistes et chrétiens, qui s'est concrétisé par plusieurs rencontres, dont une université d'été commune en 2018 sur l'île de Syros, en Grèce. En 2014, le pape a reçu une délégation des participants (chrétiens et marxistes) à ce dialogue (dont l'auteur de la présente note).
Il est vrai que lorsqu'il s'agit du droit des femmes à disposer de leur propre corps et de la morale sexuelle en général – contraception, avortement, divorce, homosexualité – François s'en tient aux positions conservatrices de la doctrine de l'Église. Mais il y a quelques signes d'ouverture, dont le violent conflit de 2017 avec la direction de l'Ordre de Malte, une institution riche et aristocratique de l'Église catholique, est un symptôme frappant. Le Grand Maître ultra-conservateur de l'Ordre, le prince (?!) Matthew Festing, a exigé la démission du chancelier de l'Ordre, le baron de Boeselager, pour le terrible péché d'avoir distribué des préservatifs aux populations pauvres menacées par l'épidémie de sida en Afrique. Le chancelier a fait appel au Vatican, qui a statué en sa faveur contre Festing ; ce dernier, soutenu par le cardinal Burke, a refusé d'obéir et a été démis de ses fonctions par le Vatican. Ce n'est pas encore l'adoption de la contraception par la doctrine morale de l'Église, mais c'est un changement...
Bien sûr, il n'y a rien de marxiste chez le pape François, et sa théologie est très éloignée de la forme marxiste de la théologie de la libération. Sa formation intellectuelle, spirituelle et politique doit beaucoup à la théologie du peuple, une variante argentine non marxiste de la théologie de la libération, dont les principaux inspirateurs sont Lucio Gera et le théologien jésuite Juan Carlos Scannone. La théologie du peuple ne prétend pas se fonder sur la lutte des classes, mais elle reconnaît le conflit entre le peuple et l'« anti-peuple » et soutient l'option préférentielle pour les pauvres. Elle s'intéresse moins aux questions socio-économiques que d'autres formes de théologie de la libération et accorde une plus grande attention à la culture, en particulier à la religion populaire.
Dans un article de 2014, « Le pape François et la théologie du peuple », Juan Carlos Scannone souligne à juste titre combien les premières encycliques du pape, comme Evangelium Gaudí (2014), décriées par ses détracteurs de gauche comme « populistes » (au sens argentin, péroniste, et non européen, du terme), doivent à cette théologie populaire. Cependant, il me semble que Bergoglio, dans sa critique de « l'idole du capital » et de tout le « système socio-économique » actuel, va plus loin que ses inspirateurs argentins. Surtout dans sa dernière encyclique, Laudato si' (2015), qui mérite une réflexion marxiste.
Laudato si'L'« encyclique écologique » du pape François est un événement d'importance planétaire, d'un point de vue religieux, éthique, social et politique. Compte tenu de l'énorme influence de l'Église catholique, il s'agit d'une contribution cruciale au développement d'une conscience écologique critique. Si elle a été accueillie avec enthousiasme par les véritables écologistes, elle a suscité l'inquiétude et le rejet des conservateurs religieux, des représentants du capital et des idéologues de l'« écologie de marché ». Il s'agit d'un document d'une grande richesse et d'une grande complexité, qui propose une nouvelle interprétation de la tradition judéo-chrétienne - rompant avec le « rêve prométhéen de domination du monde » - et une réflexion critique sur les causes de la crise écologique. Sur certains aspects, comme l'association indissociable entre le « cri de la terre » et le « cri des pauvres », il est évident que la théologie de la libération – en particulier celle de l'éco-théologien Leonardo Boff – a été l'une de ses sources d'inspiration.
Dans les brèves notes qui suivent, je voudrais souligner un aspect de l'encyclique qui explique la résistance qu'elle a rencontrée dans les milieux économiques et médiatiques : son caractère antisystémique.
Pour le pape François, les catastrophes écologiques et le changement climatique ne sont pas uniquement le résultat de comportements individuels – même s'ils jouent un rôle –, mais des « modèles actuels de production et de consommation ». Bergoglio n'est pas marxiste, et le mot « capitalisme » n'apparaît pas dans l'encyclique... Mais il est très clair que pour lui, les problèmes écologiques dramatiques de notre époque sont le résultat des rouages de l'économie mondialisée actuelle - rouages constitués par un système global, « un système structurellement pervers de relations commerciales et de propriété » (section 52 du document. Souligné par l'auteur).
Quelles sont, pour François, ces caractéristiques « structurellement perverses » ? Tout d'abord, un système dans lequel prédominent « les intérêts limités des entreprises » et « une rationalité économique discutable », une rationalité instrumentale dont le seul objectif est de maximiser les profits. En conséquence, « le principe de maximisation du profit, qui tend à s'isoler de toute autre considération, est une distorsion conceptuelle de l'économie : si la production augmente, peu importe de produire au détriment des ressources futures ou du bien-être de l'environnement ». (195) Cette distorsion, cette perversité éthique et sociale, n'est pas propre à un pays plutôt qu'à un autre, mais à un « système global, où prédominent la spéculation et la recherche de rendements financiers, qui tendent à ignorer tout contexte et tout effet sur la dignité humaine et l'environnement ». Il semble donc que la dégradation de l'environnement et la dégradation humaine et éthique soient intimement liées ». (56)
L'obsession de la croissance illimitée, le consumérisme, la technocratie, la domination absolue de la finance et la déification du marché sont des caractéristiques perverses du système. Dans une logique destructrice, tout se réduit au marché et au « calcul financier des coûts et des bénéfices ». Cependant, il faut comprendre que « l'environnement est l'un de ces biens que les mécanismes du marché sont incapables de défendre ou de promouvoir de manière adéquate ». (190) Le marché est incapable de prendre en compte les valeurs qualitatives, éthiques, sociales, humaines ou naturelles, c'est-à-dire « des valeurs qui dépassent tout calcul » (36).
Le pouvoir « absolu » du capital financier spéculatif est un aspect essentiel du système, comme l'a mis en évidence la récente crise bancaire. Le commentaire de l'encyclique est démystificateur : « Sauver à tout prix les banques, en faisant payer le prix aux citoyens, sans une décision ferme de revoir et de réformer l'ensemble du système, réaffirme une domination absolue de la finance qui n'a pas d'avenir et qui ne peut que générer de nouvelles crises après une longue et coûteuse reprise apparente. La crise financière de 2007-2008 était une occasion de développer une nouvelle économie plus attentive aux principes éthiques et favorable à une nouvelle réglementation de l'activité financière spéculative et de la richesse fictive. Mais il n'y a eu aucune réaction conduisant à une remise en question des critères obsolètes qui continuent de régir le monde » (189).
Cette dynamique perverse du système mondial qui « continue de régir le monde » est la raison de l'échec des sommets mondiaux sur l'environnement : « les intérêts personnels sont trop nombreux et il est trop facile pour les intérêts économiques de prévaloir sur le bien commun et de manipuler l'information pour éviter que leurs projets ne soient affectés ». Tant que les impératifs des puissants groupes économiques prédominent, « on ne peut s'attendre qu'à quelques déclarations superficielles, à des actions philanthropiques isolées et même à quelques efforts pour montrer une certaine sensibilité à l'environnement, alors qu'en réalité, toute tentative des organisations sociales pour changer les choses sera considérée comme une nuisance causée par des utopistes romantiques ou comme un obstacle à contourner » (54).
Dans ce contexte, l'encyclique dénonce l'irresponsabilité des « responsables », c'est-à-dire des élites dominantes, des oligarchies intéressées à préserver le système, face à la crise écologique : « Beaucoup de ceux qui détiennent la majeure partie des ressources et du pouvoir économique ou politique semblent surtout faire tout leur possible pour masquer les problèmes ou dissimuler les symptômes, en essayant seulement de réduire certains impacts négatifs du changement climatique. Mais de nombreux symptômes indiquent que ces effets continueront à s'aggraver si nous maintenons nos modèles actuels de production et de consommation ». (26)
Face à la destruction dramatique de l'équilibre écologique de la planète et à la menace sans précédent que représente le changement climatique, que proposent les gouvernements ou les représentants internationaux du système (Banque mondiale, FMI, etc.) ? Leur réponse est ce qu'on appelle le « développement durable », un concept dont le contenu est de plus en plus vide, un véritable flatus vocis comme le disaient les scolastiques du Moyen Âge. François ne se fait aucune illusion sur cette mystification technocratique : « Le discours de la croissance durable a l'habitude de devenir un moyen de distraction et de réduction de la culpabilité qui absorbe les valeurs du discours écologique au sein de la finance et de la technocratie, et la responsabilité sociale et environnementale des entreprises a l'habitude de se réduire à une série d'actions de marketing et d'image » (194).
Les mesures concrètes proposées par l'oligarchie techno-financière dominante sont totalement inefficaces, comme les « marchés du carbone ». La critique du pape à l'égard de cette fausse solution est l'un des arguments les plus importants de l'encyclique. Se référant à une résolution de la Conférence épiscopale bolivienne, Bergoglio écrit : « La stratégie d'achat et de vente de « crédits carbone » peut donner lieu à une nouvelle forme de spéculation et nuire au processus de réduction des émissions mondiales de gaz polluants. Ce système semble être une solution rapide et facile, qui donne l'apparence d'un certain engagement en faveur de l'environnement, mais qui, en tout état de cause, ne constituerait pas un changement radical à la hauteur des circonstances. Pire encore, il pourrait devenir un remède qui encourage la consommation excessive dans certains pays et certains secteurs » (171).
Des passages comme celui-ci expliquent le manque d'enthousiasme des milieux « officiels » et des partisans de l'« écologie de marché » (ou du « capitalisme vert ») pour Laudato si'...
En liant la question écologique à la question sociale, François insiste sur la nécessité de mesures drastiques, c'est-à-dire de changements profonds pour relever ce double défi. Le principal obstacle à cela est la nature « perverse » du système : « la même logique qui nous empêche de prendre des décisions drastiques pour inverser la tendance au réchauffement climatique est celle qui nous empêche d'atteindre l'objectif d'éradication de la pauvreté » (175).
Si le diagnostic de Laudato si' sur la crise écologique est d'une clarté et d'une cohérence impressionnantes, les actions qu'elle propose sont plus limitées. Certes, nombre de ses suggestions sont utiles et nécessaires, par exemple : « proposer des formes de coopération ou d'organisation communautaire qui défendent les intérêts des petits producteurs et préservent les écosystèmes locaux de la prédation ». (180) Il est également très significatif que l'encyclique reconnaisse la nécessité, pour les sociétés les plus développées, de « se contenir un peu, de fixer certaines limites raisonnables et même de faire marche arrière avant qu'il ne soit trop tard », c'est-à-dire « le moment est venu d'accepter une certaine décroissance dans certaines parties du monde, tout en mettant en œuvre les remèdes pour que d'autres puissent croître sainement ». (193)
Mais ce sont précisément des « mesures drastiques » qui font défaut, comme celles proposées par Naomi Klein dans son livre This changes everything : rompre avec les combustibles fossiles (charbon, pétrole) avant qu'il ne soit trop tard, en les laissant sous terre. Nous ne pouvons pas changer les structures perverses du mode de production et de consommation actuel sans un ensemble d'initiatives antisystémiques qui remettent en cause la propriété privée, par exemple celle des grandes multinationales des combustibles fossiles (BP, Shell, Total, etc.). Certes, le pape évoque l'utilité de « grandes stratégies qui freinent efficacement la dégradation de l'environnement et inculquent une culture du respect qui imprègne toute la société », mais cet aspect stratégique est peu développé dans l'encyclique.
Reconnaissant que « le système mondial actuel est insoutenable », Bergoglio recherche une alternative globale, qu'il appelle « culture écologique », un changement qui « ne peut se limiter à une série de réponses urgentes et partielles aux problèmes croissants de dégradation de l'environnement, d'épuisement des ressources naturelles et de pollution. Il doit s'agir d'une perspective différente, d'une façon de penser, d'une politique, d'un programme éducatif, d'un style de vie et d'une spiritualité qui acceptent la résistance à l'avancée du paradigme technocratique ». (111) Mais il y a peu d'indices d'une nouvelle économie et d'une nouvelle société correspondant à cette culture écologique. Il ne s'agit pas de demander au pape d'adopter l'écosocialisme, mais l'alternative pour l'avenir reste quelque peu abstraite.
Le pape François fait sienne « l'option préférentielle pour les pauvres » des Églises latino-américaines. L'encyclique l'expose clairement comme un impératif planétaire : « Dans les conditions actuelles de la société mondiale, où il existe tant d'inégalités et où les personnes sont de plus en plus marginalisées et privées des droits humains les plus élémentaires, le principe du bien commun se transforme immédiatement, comme une conséquence logique et inéluctable, en un appel à la solidarité et en une option prioritaire pour les plus pauvres ».
Mais dans l'encyclique, les pauvres n'apparaissent pas comme les acteurs de leur propre émancipation, le projet le plus important de la théologie de la libération. Les luttes des pauvres, des paysans et des peuples autochtones pour défendre les forêts, l'eau et la terre contre les multinationales et le commerce agricole, ainsi que le rôle des mouvements sociaux, qui sont précisément les principaux acteurs de la lutte contre le changement climatique - Via Campesina, Justice climatique, Forum social mondial - sont une réalité sociale qui n'apparaît pas beaucoup dans Laudato si'.
Ce sera toutefois un thème central des rencontres du pape avec les mouvements populaires, les premières de l'histoire de l'Église. Lors de la rencontre de Santa Cruz (Bolivie, juillet 2015), François a déclaré :
« Vous, les plus humbles, les exploités, les pauvres et les exclus, vous pouvez et vous faites beaucoup. J'ose vous dire que l'avenir de l'humanité est, en grande partie, entre vos mains, dans votre capacité à vous organiser et à promouvoir des alternatives créatives, dans la recherche quotidienne des 3 T (travail, logement, terre) et aussi dans votre participation en tant que protagonistes aux grands processus de changement, nationaux, régionaux et mondiaux. Ne vous sous-estimez pas ! Vous êtes les semeurs du changement. »
Bien sûr, comme le souligne Bergoglio dans l'encyclique, la tâche de l'Église n'est pas de se substituer aux partis politiques en proposant un programme de changement social. Avec son diagnostic antisystémique de la crise, qui lie indissociablement la question sociale et la protection de l'environnement, « le cri des pauvres » et « le cri de la terre », Laudato si' est une contribution précieuse et inestimable à la réflexion et à l'action pour sauver la nature et l'humanité de la catastrophe.
Il appartient aux marxistes, communistes et écosocialistes de compléter ce diagnostic par des propositions radicales visant à changer non seulement le système économique dominant, mais aussi le modèle pervers de civilisation imposé à l'échelle mondiale par le capitalisme. Des propositions qui incluent non seulement un programme concret de transition écologique, mais aussi une vision d'une autre forme de société, au-delà du règne de l'argent et des marchandises, fondée sur les valeurs de liberté, de solidarité, de justice sociale et de respect de la nature.
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Il est difficile de prévoir quel sera l'avenir de l'Église après la mort du pape François : qui sera élu par le prochain conclave ? Suivra-t-il l'orientation critique et humaniste de Bergoglio, ou reviendra-t-il à la tradition conservatrice des pontifes précédents ? De nombreux nouveaux cardinaux ont été nommés par François, mais quelle est leur conviction intime ?
Les prochaines semaines décideront si Bergoglio n'était qu'une parenthèse ou s'il a ouvert un nouveau chapitre dans la longue histoire du catholicisme.
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Une vaste coalition dénonce l’échec annoncé de la réforme du régime forestier

"Le projet de loi de la ministre Blanchette Vézina laisse malheureusement 100 % de la planification dans les mains de l'industrie forestière. Dès le rapport Coulombe, qui a suivi le film L'erreur boréale, on savait déjà que c'était une erreur", Dominic Tourigny, vice-président de la FIM–CSN.
Une vaste coalition rassemblant un large éventail d'acteurs de la forêt – groupes environnementaux, organisations syndicales représentant les travailleuses et les travailleurs de la filière forestière québécoise, dont la FIM–CSN, gestionnaires de zecs et de pourvoiries – condamne le projet de loi no 97 déposé par la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina. Les organisations parlent d'une même voix pour dénoncer l'échec annoncé de la réforme du régime forestier si ce projet de loi, longuement attendu, n'est pas revu en profondeur, puisqu'il ne répond ni aux enjeux actuels ni aux défis à venir.
Des reculs environnementaux et sociaux
Les organisations dénoncent d'importants reculs environnementaux et sociaux, notamment la concentration du pouvoir décisionnel vers le forestier en chef et les aménagistes forestiers régionaux, un zonage qui cède minimalement 30 % du territoire forestier public à l'industrie, l'abolition des Tables de gestion intégrée des ressources et du territoire, l'affaiblissement de la définition de l'aménagement écosystémique et un flou dans le mécanisme de consultation du public et des acteurs du milieu.La coalition demande à la ministre une réelle modernisation du régime forestier qui assure une foresterie véritablement durable et inclusive au Québec. Cette réforme doit être impérativement couplée à une nouvelle stratégie de développement industriel et de transition juste, qui permettront ensemble de diminuer les pressions sur les écosystèmes et les espèces, d'apaiser les conflits avec les autres usagères et usagers de la forêt, de répondre aux menaces tarifaires, d'assurer la pérennité des emplois et d'adapter les forêts à la crise climatique.
Absence de véritable dialogue social
Les organisations dénoncent aussi un processus opaque ayant mené à la rédaction de ce projet de loi et l'absence d'un véritable dialogue social sur cette importante réforme. Les propositions qui s'y retrouvent n'ont pas fait l'objet d'une consultation de la société civile en bonne et due forme, outre durant des rencontres à huis-clos, liées à des ententes de confidentialité.
Sommet sur la forêt le 20 mai prochain : mobilisation pour une vision commune du régime forestier
Les organisations estiment que le secteur de la forêt n'a pas besoin d'une réforme polarisante, mais d'un dialogue inclusif pour trouver des solutions durables. C'est pourquoi les organisations syndicales représentant les travailleuses et les travailleurs de la filière forestière québécoise organisent le Sommet sur la forêt, qui se tiendra le 20 mai prochain à Saguenay. Cet événement rassemblera une diversité d'acteurs du milieu forestier désireux de contribuer à l'avancement d'une foresterie durable et équitable, en explorant des alternatives aux enjeux actuels et en abordant de manière concrète la question de la transition juste du secteur forestier. Les organisations demandent à la ministre de modifier son projet de loi à la suite des discussions et des propositions qui émaneront de ce sommet.
Citations
« La réforme proposée ne permettra pas de résoudre la crise économique, sociale et environnementale en forêt. Si le projet de loi 97 n'est pas modifié, cette réforme va attiser la contestation et les tensions sociales, fragiliser davantage les écosystèmes forestiers, rendre nos forêts plus vulnérables aux changements climatiques, nuire à la prévisibilité et précariser les travailleurs, les travailleuses et les communautés qui dépendent d'une forêt en bonne santé », Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec.
« Dans sa forme actuelle, le projet de loi visant à moderniser le régime forestier est un rendez-vous raté avec la protection du territoire, des écosystèmes et des espèces. C'est le fruit d'un ministère état dans l'état qui impose sa vision industrielle étroite sans véritable égard aux autres missions gouvernementales et autres usagers. Ce nouveau régime contient tous les ingrédients pour nuire à l'acceptabilité sociale, à la pérennité des emplois et à la protection d'une ressource collective chère aux Québécoises et aux Québécois, notre forêt publique », Alain Branchaud, directeur général à la SNAP Québec.
« Face à la crise économique que traverse l'industrie forestière et à la nécessité de préserver les écosystèmes, les travailleurs et travailleuses sont à la recherche de solutions pérennes. Malgré les prétentions de la ministre, ce projet de loi échouera à protéger les emplois tout en attisant les tensions déjà palpables avec de nombreux partenaires du milieu forestier. Les conflits créeront une plus grande imprévisibilité et un environnement d'affaires qui éloignera les investisseurs dont nous avons cruellement besoin. Pour rendre nos emplois durables, nous avons besoin d'un approvisionnement en bois fiable et d'une nouvelle stratégie industrielle pour la filière. Sur ces deux fronts, le projet de loi rate sa cible », Daniel Cloutier, directeur québécois d'Unifor.
« Nous avons participé activement tout au long du processus qui nous laisse profondément déçus du projet de loi visant la réforme du régime forestier. Il doit impérativement faire l'objet de travaux supplémentaires, car il ne répond ni aux attentes ni aux besoins de protection du territoire, de la biodiversité et du développement des activités à plus faible impact environnemental, comme les activités fauniques, récréotouristiques et de villégiature. De surcroît, la vision proposée accentuera les iniquités dans le dialogue social au bénéfice de la productivité ligneuse, tout en mettant en péril la protection de la forêt publique et le développement économique régional durable et moderne », Myriam Bergeron, directrice générale de la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs et de la Fédération québécoise pour le saumon atlantique.
« Ça fait des années que le secteur forestier passe d'une insécurité à l'autre, dans l'attente d'une véritable évolution. Les personnes et les communautés qui en vivent ont attendu longtemps, et ce qui est sur la table aujourd'hui reste flou et grandement incomplet. Certaines pistes sont intéressantes, mais leur mise en œuvre soulève encore trop d'inconnus. Ce qu'on a devant nous, ce sont des bases de travaux qui laissent en suspens une foule de questions et d'incertitudes. Ce qu'on souhaite, c'est un régime forestier inclusif, capable d'assurer la pérennité des emplois et la vitalité des communautés. Pour y arriver, il faudra sécuriser et impliquer l'ensemble des intervenantes et intervenants, et espérer une écoute réelle lors des études du projet de loi », Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD).
« Qu'on assure un approvisionnement stable aux entreprises, c'est légitime. Mais le faire sans dialogue réel, sans diversification, sans créer davantage de transformation ici même au Québec, c'est rater une occasion historique. La ministre prétend parler en notre nom, il faudrait qu'elle commence par nous écouter. On ne bâtira pas une foresterie durable en sacrifiant la voix de ceux et celles qui en vivent », Nicolas Lapierre, directeur adjoint, Syndicat des Métallos.
« Le gouvernement parle d'aménagement durable, mais oublie des acteurs de première ligne qui aménagent, entretiennent et protègent activement nos forêts publiques depuis des décennies. Nous sommes des passionnés de la forêt, engagés dans nos communautés et avons une vision de développement durable pour nos territoires visités par plus d'un demi-million de Québécoises et de Québécois chaque année. Ce projet de loi nous inquiète par son absence de vision intégrée et de cohérence économique », Dominic Dugré, président – directeur général de la Fédération des pourvoiries du Québec.
« Pour les travailleuses et les travailleurs, on déplore que le projet de loi ne contienne pas de conditions claires pour que les compagnies puissent avoir droit aux volumes de bois de notre forêt publique. Ce bois devrait soutenir le développement des régions, ça devrait être clair, dans la loi, et ne pas dépendre du bon vouloir du ou de la ministre qui sera en place quand un industriel voudra déménager nos jobs. Le projet de loi de la ministre Blanchette Vézina laisse malheureusement 100 % de la planification dans les mains de l'industrie forestière. Dès le rapport Coulombe, qui a suivi le film L'erreur boréale, on savait déjà que c'était une erreur. Ça l'est encore. On s'inquiète aussi de l'aménagement intensif qui est prévu dans le tiers de nos forêts. Ça risque de nous faire perdre la certification environnementale FSC qui est importante pour vendre notre bois, notamment en Europe. Cet aménagement intensif devrait être discuté et planifié, notamment avec celles et ceux qui effectuent le travail et avec les Premières Nations », Dominic Tourigny, vice-président de la FIM–CSN.
À propos
Les organisations signataires de ce communiqué comprennent : Nature Québec, Unifor Québec, la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), le Syndicat des Métallos, la Fédération de l'industrie manufacturière (FIM–CSN), la Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec), la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs, la Fédération des pourvoiries du Québec et la Fédération québécoise pour le saumon atlantique. Ces organisations se rassemblent pour défendre un avenir durable et équitable pour les forêts du Québec, dans le respect des communautés et des écosystèmes.
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Pape François (1936-2025) : un pape progressiste dans une Église conservatrice

Le Pape François est décédé le 21 avril 2025, lundi de Pâques. Avec lui, une partie du mouvement social, écologiste, pro-palestinien et du soutien aux réfugiés, perd un allié inattendu et de poids, qui a tenu des positions très éloignées de celles de la bourgeoisie catholique d'extrême droite française. Un pape restant un pape et l'Eglise catholique restant l'Eglise catholique – cela n'a bien sûr pas empêché des positions aussi conservatrices sur d'autres sujets.
21 avril 2025 | tiré du site de Frustrations
ttps ://frustrationmagazine.fr/pape-francois-eglise
Un pape argentin et jésuite
Le Pape François, dont le nom vient de Saint François d'Assise, aura marqué la période la plus progressiste de l'Eglise depuis Vatican II (1962-1965), un concile qui s'était ouvert sous Jean XXIII et qui s'était terminé sous Paul VI et qui avait réformé l'Eglise catholique afin de l'ouvrir au monde moderne, aux questions sociales et à favoriser le dialogue avec les autres religions et les non-croyants.
Le Pape François a incarné un changement majeur dans la géographie catholique : le passage du pôle de gravité du christianisme de la vieille Europe vers le Sud global.
Le Pape François a incarné un changement majeur dans la géographie catholique : le passage du pôle de gravité du christianisme de la vieille Europe vers le Sud global. Pape François fut le premier pape non-européen de l'époque moderne et le premier pape originaire d'Amérique latine. Ce n'est pas un hasard : le catholicisme s'est beaucoup développé en Amérique latine et en Afrique tandis qu'il décline en Europe. C'est une des explications de ce retour vers l'intérêt envers les pauvres.
L'Amérique latine a notablement été marquée par la théologie de la libération, courant des années 1960 qui lisait l'Evangile à partir des luttes des pauvres et des opprimés et appelant à leur émancipation sur Terre.
Sans être de ce courant, Pape François fut toutefois le premier pape jésuite de l'Histoire, c'est-à-dire issu de la Compagnie de Jésus, un ordre religieux fondé par Ignace de Loyola au XVIe siècle qui se distingue par une approche pastorale tournée vers les démunis (justice sociale, accompagnement des marginalisés, engagement auprès des pauvres). Les jésuites sont également formés à vivre avec sobriété : le Pape François aura ainsi refusé les signes extérieurs de pouvoir comme les chaussures rouges ou l'appartement papal luxueux.
Le refus des kermesses des dominants
Ce retour aux pauvres, Pape François aura essayé de l'incarner en refusant les grandes kermesses des dominants.
Le dernier exemple le plus remarquable aura été son refus de venir à la réouverture de Notre Dame de Paris aux côtés de Trump, Macron, et Bernard Arnault pour préférer aller à Ajaccio pour une messe populaire.
“Entre Paris et la Corse, il n'y a pas photo. La Corse coche toutes les cases. (…) C'est une périphérie. Il
met le centre aux périphéries et les périphéries au centre. »
Constance Colonna-Cesari, journaliste spécialiste du Vatican, pour France Inter
Constance Colonna-Cesari, journaliste spécialiste du Vatican précisait à ce moment-là : “Entre Paris et la Corse, il n'y a pas photo. La Corse coche toutes les cases. (…) C'est une périphérie. Il met le centre aux périphéries et les périphéries au centre. C'est une île et il les a quasiment toutes faites, Lesbos, Lampedusa, etc. Ce ne sont pas des îles touristiques. Il ne va pas aux Baléares. Il va là où l'église peut se déployer, comme un hôpital de campagne, dans les périphéries géographiques existentielles, là où les gens souffrent”
L'écologie : un problème de modèle économique et social
Le Pape François avait montré une compréhension assez fine de la catastrophe environnementale et placé l'écologie au cœur de son pontificat. Dans son encyclique (une lettre officielle écrite par le pape, adressée aux évêques et souvent à tous les fidèles, pour donner un enseignement sur une question importante de foi, de morale ou de société) Laudato si' publiée en 2015, il appelait à une “écologie intégrale”, refusant d'isoler ce sujet des autres et rappelant que “tout est lié” : crise environnementale, sociale, économique. Il y dénonçait “la logique de l'exploitation et l'égoïsme” et invitait à une “conversion écologique” des systèmes économiques et du rapport à la nature.
Critique du capitalisme
Sans être, évidemment, anticapitaliste, le Pape François aura toutefois formulé des critiques très vives du capitalisme.
« Personne n'est scandalisé si je bénis un entrepreneur qui exploite potentiellement des gens, et cela est un péché très grave. Alors que si je bénis un homosexuel, des gens sont choqués… C'est de l'hypocrisie ! »
Pape François en février 2024
Il avait ainsi dénoncé une finance qui “piétine les gens”, et encourage la guerre, un système économique profondément inégalitaire qui traite les pauvres comme des “déchets”. Il défendait un accès plus équitable aux richesses, s'en était pris aux multinationales pratiquant les délocalisations pour exploiter des travailleurs moins chers. Pape François appellait également à l'annulation des dettes qui enrichissent les pays riches au détriment des pays pauvres.
En février 2024, il dénonçait l'hypocrisie de ceux qui acceptent qu'il bénisse des “entrepreneurs véreux” mais pas des homosexuels : « Personne n'est scandalisé si je bénis un entrepreneur qui exploite potentiellement des gens, et cela est un péché très grave. Alors que si je bénis un homosexuel, des gens sont choqués… C'est de l'hypocrisie ! »
Favorable à l'accueil des réfugiés
Alors que les catholiques français se sont massivement tournés vers l'extrême droite (RN et Zemmour), extrêmement hostile à l'immigration et aux réfugiés, le Pape François n'aura eu de cesse de défendre leur accueil, leur protection et leur intégration.
« La Méditerranée et la mer Égée sont devenues un cimetière insatiable, une image de notre conscience insensible et endormie”
Pape François en 2016
En juillet 2013, pour son premier voyage hors du Vatican, il s'était rendu à Lampedusa, refusant de voir la Méditerranée devenir un “cimetière” (« La Méditerranée et la mer Égée sont devenues un cimetière insatiable, une image de notre conscience insensible et endormie” déclarait-il en 2016), critiquant “la mondialisation de l'indifférence”. Dans les années qui avaient suivies, il avait fait de l'accueil des migrants un “devoir chrétien” et des politiques de rejet “un péché grave”. Pour lui il ne s'agissait pas que de déclarations de vertu abstraites : en 2015 il avait demandé « que chaque paroisse, chaque communauté religieuse, chaque monastère, chaque sanctuaire d'Europe accueille une famille » de réfugiés.
“Un ami fidèle du peuple palestinien”
Pendant que le camp occidental s'est largement vautré dans le soutien à Israël et au massacre des Palestiniens, Pape François n'a eu de cesse de dénoncer les horreurs à Gaza.
Il avait condamné la “cruauté” des frappes israéliennes, puisparlé de “terrorisme” les concernant, refusant les condamnations à géométrie variable que l'on a vu fleurir depuis presque deux ans.

Le Pape François au Vatican, le 7 décembre 2024 (photo par Reuters/Remo Casilli)
Dans son livre L'espérance ne déçoit jamais. Pèlerins vers un monde meilleur, publié en novembre 2024, il écrivait que « selon certains experts, ce qui se passe à Gaza présente les caractéristiques d'un génocide », déclenchant des réactions extrêmement hostiles du gouvernement israélien. Il avait enfoncé le clou un mois plus tard, en décembre 2024, en inaugurant une crèche au Vatican avec l'enfant Jésus sur un keffieh, le foulard traditionnel des Palestiniens. Cette crèche était l'œuvre du Comité présidentiel supérieur pour les affaires de l'Église en Palestine, organe de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), et de l'ambassade palestinienne au Vatican. L'OLP en avait profité pour redire sa « profonde gratitude au pape pour son soutien indéfectible à la cause palestinienne et ses efforts inlassables pour mettre fin à la guerre contre Gaza”.
Presque déjà mourant, en février, alors qu'il était hospitalisé,c'est pour Gaza qu'il adressait ses rares paroles et ses prières. À peine sorti de son hospitalisation, il appelait à la fin “immédiate” des frappes israéliennes.
« Selon certains experts, ce qui se passe à Gaza présente les caractéristiques d'un génocide »
Pape François dans L'espérance ne déçoit jamais. Pèlerins vers un monde meilleur (novembre 2024)
En réaction à son décès, Mahmoud Abbas a salué “un ami fidèle du peuple palestinien”.
Le scandale des crimes sexuels dans l'Eglise
Depuis vingt ans, des révélations de crimes sexuels massifs, souvent pédocriminels, parfois organisés et souvent couverts par la hiérarchie ecclésiale, se sont succédées.
En 2019, le Pape François avait levé le secret pontifical dans les cas de violences sexuelles et d'abus sur mineurs commis par des membres du clergé.
Après avoir demandé pardon au nom de l'Eglise, ce qui marquait une reconnaissance importante, Pape François a mené sur ce sujet un certain nombre d'actions. En 2019, le Pape François avait levé le secret pontifical dans les cas de violences sexuelles et d'abus sur mineurs commis par des membres du clergé. Il avait changé le droit canonique afin de rendre obligatoire le signalement de tout soupçon d'agression sexuelle. Les diocèses sont désormais obligés de mettre en place des lieux spécifiques pour recevoir les plaintes.
Enfin, il avait créé des instances de réparation comme la Commission Reconnaissance et Réparation.
Toutefois de nombreuses victimes ont également dénoncé un manque de transparence, une absence de compréhension des causes systémiques, des méthodes inadaptées et des formes de mise en scène non suivies des faits. Sur ce thème, Pape François n'aura pas été aussi radical que sur d'autres combats et sûrement pas à la hauteur du mal commis.
Des avancées sur les LGBTQ+ mais peu de progrès sur la place des femmes et la laïcité
Alors que le catholicisme est un des vecteurs majeurs de l'homophobie dans le monde, que ce soit en Europe – La Manif pour Tous, mouvement de masse homophobe était largement catholique, encouragé, organisé et subventionné par l'Eglise – en Afrique ou en Amérique latine, Pape François aura tenté de mettre à distance cette obsession homophobe d'une grande part de la population catholique en appelant à un meilleur accueil des “fidèles LGBT”.
Pape François aura tenté de mettre à distance cette obsession homophobe d'une grande part de la population catholique
En 2024,il avait autorisé la bénédiction des couples homosexuels, créant une large fronde au sein même de l'Eglise catholique.
Par ailleurs, le pape aura accueilli régulièrement des groupes de personnes transgenresdans des audiences générales au Vatican, pour notammententendre leurs témoignages et discuter de leur accueil dans l'Eglise et déclarant que “dans l'Église, il y a de la place pour tous”. En novembre 2023, il avait fait préciser par le Vatican qu'elles pouvaient recevoir le baptême et être parrains ou marraines.
Le pape aura accueilli régulièrement des groupes de personnes transgenres dans des audiences générales au Vatican
Malgré ces avancées, le chemin reste long puisque l'homosexualité est toujours considéré comme un “péché” par l'Eglise et Pape François sera resté opposé au mariage homosexuel. Il avait lui-même proféré des insultes homophobes.
Sur d'autres sujets, le Pape François sera resté conservateur ou réactionnaire. Il n'y aura pas eu, pendant son pontificat, de changements majeurs sur la conception patriarcale de l'Eglise, sur l'avortement ou la contraception. Lors des attentats contre Charlie Hebdo, celui-ci avait tenu des propos très ambigües semblant en faveur de l'interdiction du blasphème, déclarant que celui qui insultait sa mère pouvait “s'attendre à un coup de poing”.
Il n'y aura pas eu, pendant son pontificat, de changements majeurs sur la conception patriarcale de l'Eglise, sur l'avortement ou la contraception
La mort du Pape François marque la fin d'un pontificat à bien des égards exceptionnel. Pris dans les contradictions inhérentes à l'institution qu'il dirigeait, il aura pourtant ouvert des brèches inattendues dans l'édifice rigide de l'Église catholique. En assumant une parole critique sur le capitalisme, en défendant les réfugiés, les opprimés et les exclus, en tendant la main aux personnes LGBTQ+ et en dénonçant les massacres commis par Israël à Gaza, il s'est placé là où peu l'attendaient, surtout en France où la bourgeoisie catholique se range massivement dans le camp de la fascisation. Sans être une révolution, le Pape François aura pris des positions rares et courageuses, assez pour que sa disparition laisse un vide. Esperons que ce souffle venu du Sud survivra à celui qui l'incarnait.
Photo de couverture : Pape François en juillet 2015 aux côtés d'Evo Morales (Reuters)
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Marche funèbre silencieuse contre Stablex

Loin d'être résignée, la mobilisation contre l'expansion toxique de Stablex ne fait que grandir.
Blainville, dimanche 27 avril à 13 h
Blainville, vendredi le 25 avril 2025 – Martine Ouellet, cheffe de Climat Québec, et Marie-Claude Archambault, de la Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex, annoncent une Marche funèbre silencieuse ce dimanche 27 avril à 13 h. Le départ se fera devant les installations de Stablex, au 760 boulevard Industriel à Blainville, pour se diriger vers la Montée St-Isidore, face à la Grande tourbière. Arrivé à destination, les participants seront invités à accrocher un message, un dessin, une fleur ou un symbole personnel sur la clôture longeant ce milieu naturel menacé – un geste de mémoire, de résistance et d'espoir.
Complicité du PM Legault et de la mairesse Poulin
Climat Québec et la Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex dénoncent non seulement les agissements de Stablex, mais aussi la complicité des autorités politiques. D'un côté, le gouvernement Legault impose un projet d'agrandissement par expropriation, à coups de bâillon. De l'autre, la mairesse Liza Poulin propose que l'agrandissement se fasse sur un terrain « alternatif »... encore plus près des résidences. Dans les deux cas, c'est le même scandale environnemental et humain qui se poursuit.
«
L'acharnement du gouvernement Legault à défendre Stablex coûte que coûte, malgré tous les drapeaux rouges, dépasse l'entendement. On parle d'expropriation forcée, de procédés défaillants, de dépassements de normes, de protections environnementales contournées. Il flotte une odeur de complaisance... et elle pue.
», déclare Martine Ouellet cheffe de Climat Québec.
« La mairesse Poulin doit cesser de faire semblant de défendre les citoyens tout en proposant un site alternatif d'enfouissement des déchets toxiques encore plus près des maisons. Elle a le pouvoir politique de financer une campagne d'échantillonnage exhaustive indépendante avec les fonds de la Ville et de s'opposer clairement à tout agrandissement. Mais elle refuse systématiquement depuis plus d'un an, préférant s'en remettre à un ministère qu'elle sait trop proche de Stablex. Pourtant, avec une nouvelle preuve de toxicité émanant d'une autorité municipale, le gouvernement ne pourrait plus, politiquement, continuer à se fermer les yeux sur un problème aussi grave de contamination. »
, dénonce Marie-Claude Archambault pour Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de Stablex .
Un appel à l'unité, à la paix et à la vie
Les organisateurs lancent un appel à toute la population de Blainville et des environs : venez marcher avec nous, en blanc(ou une couleur pâle). Cette couleur de paix, de lumière et de pureté symbolise ce que nous voulons protéger : la santé de nos proches, de nos enfants, de nos écosystèmes, et notre avenir collectif.
Dimanche, marchons ensemble pour faire entendre le silence de notre colère.
AIDE-MÉMOIRE
MARCHE FUNÈBRE SILENCIEUSE CONTRE STABLEX
DATE : DIMANCHE 27 AVRIL
HEURE : 13 H
PRISES DE PAROLE DÈS 13 H
DÉPART : DEVANT STABLEX
760 boulevard industriel, Blainville
DESTINATION : MONTÉE ST-ISIDORE
Devant la Grande tourbière
SOURCE :
https://climat.quebec/2025/04/25/communique-marche-funebre-silencieuse-contre-stablex/
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Projet de loi 69 : Une parodie de consultation sur l’énergie

Nous sommes des citoyens et citoyennes qui avons récemment participé aux consultations sur le Plan de gestion intégrée des ressources énergétiques du Québec (PGIRE). Ces consultations doivent avoir lieu dans 13 villes, pour se terminer à Québec le 13 juin.
Rappelons que le PGIRE est au cœur du projet de loi 69, la Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives,de l'ex-ministre Fitzgibbon. Ce projet de loi, qui ouvre grande la porte à la privatisation des services énergétiques au Québec, est présentement à l'étude à l'Assemblée nationale.
L'enjeu du PGIRE est important puisque la manière d'utiliser nos ressources énergétiques a une incidence directe sur notre capacité à décarboner notre économie et à mener la lutte au changement climatique. Pourtant, l'annonce de la consultation n'a pas été rendue publique. Nous avons appris l'existence de cette consultation via les réseaux de communications entre les groupes citoyens actifs sur les questions environnementales. Une d'entre-nous a reçu l'invitation à participer moins de 24 heures à l'avance.
Dans leur discours d'ouverture la Ministre Fréchette (à Montréal ) et le député Yves Montigny (à St-Jean-sur-Richelieu) ont précisé le contexte de la consultation : le monde entier est en transition ; nos ressources énergétiques doivent servir à cette transition, mais aussi au développement économique. Un peu comme si on disait à un médecin urgentologue que les gestes qu'il pose doivent servir à sauver des vies et enrichir l'industrie pharmaceutique.
Les participant.es à la consultation étaient réparti.es autour de 9 tables, selon leurs différentes affiliations : une table pour les municipalités, une pour l'industrie, une autre pour les groupes environnementaux, etc. Nous avons disposé d'environ 30 minutes pour discuter entre nous de chacun des deux enjeux proposés (Comment envisager la demande énergétique ? Quelles orientations pour l'offre d'énergie ?), et avons été invité.es à inscrire le plus lisiblement possible le fruit de nos échanges sur les feuilles généreusement mises à disposition sur chacune des tables. Les élus présents dans la salle circulaient entre les tables pour prêter une oreille bienveillante aux discussions.
À la fin de l'exercice, une personne par équipe devait résumer en 8 à 10 minutes les propositions. Après les résumés, madame la ministre ou monsieur le député commentaient les idées émises : « J'entends que vous proposez d'éliminer le gaz des bâtiments,…etc. » Mais de toute évidence, le temps alloué était trop court pour discuter sérieusement ne serait-ce que sur le quart des propositions. Heureusement, les organisateurs se sont faits rassurants en nous invitant à remettre nos feuilles de notes aux responsables de la consultation à la fin de la rencontre. Disons qu'il est plutôt cocasse d'imaginer le personnel du MEIE penché sur des notes manuscrites jetées pêle-mêle sur des feuilles de papier pour en retranscrire le contenu et en faire un rapport. Si rapport il y a, et pour qui...
Il ne fait donc pas de doute qu'avec sa tournée de consultations sur le PGIRE, le gouvernement Legault veut montrer qu'il est fidèle à sa promesse, lancée lors de son élection de 2022, de tenir un grand débat de société sur les enjeux énergétiques. Mais la démonstration s'avère bien peu convaincante.
Le Québec possède pourtant une longue expérience de consultations publiques. En s'inspirant des procédures du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), la ministre Fréchette aurait pu annoncer publiquement ces consultations plusieurs semaines avant le début des audiences, de manière à permettre aux participant.es de se préparer. Le cadre et les enjeux de la consultation auraient été soumis à l'examen pour être bonifiés selon les expertises disponibles. Les documents de la consultation auraient été bien étayés et accessibles à tous. Les participant.es auraient été bien identifié.es et invité.es à transmettre leurs questions et recommandations par écrit, sous forme de mémoire, ou oralement, en s'adressant à une commission indépendante. Celle-ci aurait été chargée de faire rapport au gouvernement. Et toutes les présentations orales, tous les mémoires ainsi que le rapport de la commission auraient ainsi été publics et faciles d'accès.
Avec cette parodie de consultation sur le PGIRE qui se déroule présentement, le gouvernement Legault s'assure de demeurer en contrôle du message qui sera livré à la fin de l'exercice. Même si la ministre Fréchette a annoncé que les citoyen.nes pourront faire part de leurs recommandations en ligne et que le scénario du fameux PGIRE sera soumis à la discussion avant d'être adopté, tout est déjà en place pour éviter qu'ait lieu un véritable débat de fond sur la manière de nous affranchir des énergies fossiles et de limiter les impacts des différentes filières énergétiques sur le climat, l'environnement, la biodiversité, l'économie et les communautés.
Les groupes de la société civile et les experts ont été, et sont encore, nombreux à réclamer l'abandon ou le report du projet de loi 69 tant et aussi longtemps qu'une véritable discussion ouverte sur l'énergie du Québec ne sera pas menée dans le cadre d'une commission indépendante. Ce simulacre de consultation sur le PGIRE n'a rien pour nous satisfaire. Force est de constater que nous sommes encore loin de la ligne de départ.
Louise Morand, L'Assomption en Transition
Katherine Massam, Mouvement d'Action Régional en Environnement
Émilie Laurin-Dansereau, ACEF du Nord de Montréal
Jacques Tétreault, Secrétaire de Solidarité populaire Richelieu-Yamaska
Gilles Cazade, Président du syndicat des spécialistes et professionnels d'Hydro-Québec
Jean-Philippe Waaub, Collectif scientifique sur les enjeux énergétiques au Québec
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Avenir de l’éolien au Québec : après 25 ans d’audiences du BAPE, un nouveau rapport de recherche propose des solutions concrètes d’apaisement

Montréal, le 24 avril 2025 - Le Front commun pour la transition énergétique rend public un rapport indépendant portant sur les conditions d'un dialogue apaisé sur l'éolien au Québec.
Cette publication offre une analyse détaillée des préoccupations émises vis-à-vis des parcs éoliens développés au Québec depuis 25 ans, souligne les faiblesses des mécanismes de participation existants et pointe les occasions à saisir afin d'améliorer l'acceptabilité sociale des projets éoliens sur le territoire.
La recherche, menée en résidence au Front commun pour la transition énergétique, est basée sur cinq axes de travail : une revue de littérature sur l'acceptabilité sociale et la consultation des peuples autochtones, vingt entretiens de cadrage avec des représentant·es d'intérêts et de structures varié·es, une enquête terrain dans deux MRC et une analyse de l'ensemble des vingt-huit dossiers éoliens des archives du BAPE.
En croisant les données issues de ces cinq axes, le rapport propose huit grands constats :
– Des demandes récurrentes du BAPE n'ont pas trouvé de réponses depuis 25 ans.
– Certains effets de l'éolien restent mal connus et doivent être étudiés et documentés (santé, écosystèmes, impacts cumulés).
– Les municipalités sont au cœur de la transmission de l'information : elles ont besoin d'être outillées (informations exploitables, ressources humaines).
– Il existe une grande quantité de données disponibles mais dispersées concernant les projets éoliens au Québec ; les archives du BAPE sont une mine d'informations sous-exploitée.
– Une consultation générique sur l'éolien et des consultations sur la transition énergétique des MRC (que certaines ont déjà initiées) permettraient d'anticiper les enjeux sur le terrain et de gagner du temps dans la mise en œuvre des projets.
– La clarification du processus de prise de décision par le gouvernement concernant la politique énergétique et la délivrance des autorisations contribuerait à améliorer l'acceptabilité sociale des projets.
– La perspective d'ouvrir les consultations à des contributions créatives et des recherches participatives permettrait à la fois de bonifier les projets et d'élargir la participation du public.
– Il est possible (et souhaitable) d'inclure un « indicateur d'acceptabilité sociale » dans la grille d'analyse des projets éoliens.
Ce rapport a été produit par Amandine Volard, ingénieure en congé sabbatique de l'ADEME (Agence de la transition écologique en France).
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gauche.media
Gauche.media est un fil en continu des publications paraissant sur les sites des médias membres du Regroupement des médias critiques de gauche (RMCG). Le Regroupement rassemble des publications écrites, imprimées ou numériques, qui partagent une même sensibilité politique progressiste. Il vise à encourager les contacts entre les médias de gauche en offrant un lieu de discussion, de partage et de mise en commun de nos pratiques.