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Santé menstruelle : un tabou qui freine l’avenir des filles

10 juin, par Planning Familial, Planning Familial International — ,
Tiré de Entre les lignes et les mots https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/06/01/sante-menstruelle-un-tabou-qui-freine-lavenir-des-filles/?jetpack_skip_subscriptio

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Des millions de filles et de femmes dans le monde vivent leurs règles dans la précarité, le silence ou l'humiliation. Parce que les menstruations restent taboues, elles entraînent de fortes inégalités sociales et de genre et génèrent des risques pour la santé. Pour le Planning familial et Plan international, « faire du droit à la santé menstruelle une réalité pour tous·tes, c'est faire un pas décisif vers l'égalité. Il est temps de le franchir. »

Des millions de filles et de femmes dans le monde vivent leurs règles dans la précarité, le silence ou l'humiliation. Parce que les menstruations restent taboues, elles entraînent de fortes inégalités sociales et de genre et génèrent des risques pour la santé. À l'occasion de la Journée mondiale consacrée à la santé menstruelle, Plan International France et le Planning familial rappellent que la santé menstruelle est un droit fondamental qu'il faut respecter, partout dans le monde.

En 2025, avoir ses règles reste un facteur d'exclusion pour des millions de filles dans le monde. En France, environ 4 millions de femmes menstruées vivent dans la précarité menstruelle, c'est-à-dire qu'elles n'ont pas les ressources financières pour s'acheter des protections périodiques. Parmi elles, 1,7 millions sont des mères célibataires ou des étudiantes.

En France, plus d'un tiers des adolescent·es ressentent un sentiment de honte du simple fait d'avoir leurs règles, selon un sondage Opinion Way de 2022 commandé par Plan International France. 35% avouent qu'elles ou une de leurs proches ont déjà subi des moqueries et des humiliations en milieu scolaire. Une fille sur deux a déjà raté l'école pendant ses règles. Ces données montrent à quel point les tabous entourant les règles restent vivaces.

Un enjeu mondial de dignité, de santé et d'éducation

Dans le monde, au moins 500 millions de filles et de femmes n'ont pas accès à des protections périodiques en quantité suffisante. Des millions de filles manquent l'école chaque mois, faute d'infrastructures adaptées ou simplement d'un endroit sécurisé pour pouvoir se changer.

D'après l'Unicef, en 2022, 15% des filles au Burkina Faso, 20% en Côte d'Ivoire et 23% au Nigeria ont été contraintes de manquer l'école tout au long de l'année en raison de leurs règles.

Au Népal, la pratique traditionnelle du chhaupadi contraint les femmes à vivre isolées dans des huttes pendant toute la durée de leurs règles.

En situation de crise – conflits, catastrophes climatiques -, l'accès à la santé menstruelle est encore plus restreint.

Ce manque entraîne des conséquences directes sur la santé des femmes, comme des infections, des douleurs chroniques, un mal-être psychologique. La désinformation liée aux règles, les mythes, les préjugés sexistes empêchent les jeunes de comprendre leur propre corps, de poser des questions et prendre de soin de leur santé.

Un droit humain trop ignoré

La santé menstruelle ne peut plus être un sujet oublié ou relégué au second plan, surtout au moment où les droits sexuels et reproductifs sont remis en cause. Elle est une composante essentielle de la santé sexuelle et reproductive. Elle doit être pensée comme un droit humain à part entière, condition de la dignité, de l'autonomie et de la pleine participation des filles et des femmes à la société.

Accéder à une information fiable, des protections, à de l'eau, disposer d'un lieu sûr, comprendre son cycle, tout cela fait partie du droit fondamental à la santé. Et pourtant, ce droit reste trop souvent ignoré, nié.

Un levier en faveur de l'égalité de genre

Une personne qui peut gérer ses règles dans de bonnes conditions a plus de chances de poursuivre sa scolarité. Une personne qui vit ses règles sans honte ni obstacle peut participer pleinement à la vie sociale, économique et citoyenne.

À l'inverse, tant que les règles seront entourées de silence et de stigmatisation, elles resteront un facteur d'exclusion. C'est un enjeu d'égalité de genre et de justice sociale.

Nous agissons pour faire de la santé menstruelle un droit effectif

Au Planning familial comme à Plan International France, nous agissons pour faire du droit à la santé menstruelle une réalité. Chacun·e à notre échelle, nous distribuons des protections périodiques, sensibilisons les jeunes à la question des règles, aux préjugés qui les entourent. Nous luttons contre les mythes et la désinformation.

Mais ces actions doivent s'inscrire dans une dynamique plus large. Nous appelons les pouvoirs publics à garantir à chaque jeune un accès à une éducation complète à la sexualité, qui doit mieux inclure la question des règles. Il faut également assurer à tous·tes les adolescent·e un accès universel, continu à l'information, aux soins, aux protections, y compris en situation d'urgence. Nous exigeons également des produits menstruels sans risques pour la santé ainsi que la formation des professionnel·les de la santé ! Il est essentiel d'éviter l'errance médicale par une meilleure prise en compte de la douleur, une meilleure orientation des personnes et une sensibilisation aux diagnostics possibles.

En parler, c'est déjà agir

Chacun et chacune peut agir à son niveau. En parlant ouvertement des menstruations, en s'informant, en sensibilisant les plus jeunes. Ensemble, déconstruisons les stéréotypes, levons les tabous et exigeons des politiques publiques ambitieuses en faveur de la santé menstruelle. Faire du droit à la santé menstruelle une réalité pour tous·tes, c'est faire un pas décisif vers l'égalité. Il est temps de le franchir.

Le Planning familial et Plan International France
https://blogs.mediapart.fr/le-planning-familial-et-plan-international-france/blog/280525/sante-menstruelle-un-tabou-qui-freine-l-avenir-des-filles

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Le Président Trump rétablit l’interdiction d’entrée aux États-Unis aux citoyens.nes de 12 pays traités de « dévasteurs »

10 juin, par Amy Goodman, Baher Azmy, Nermeen Shaikh — ,
Nermeen Shaikh : Le Président Trump a signé un nouveau décret interdisant aux citoyens.nes de 12 pays d'entrer aux États-Unis. Il avait fait de même durant son premier mandat (…)

Nermeen Shaikh : Le Président Trump a signé un nouveau décret interdisant aux citoyens.nes de 12 pays d'entrer aux États-Unis. Il avait fait de même durant son premier mandat et avait soulevé une vague de protestations dans tous les aéroports du pays accompagnée de nombreuses poursuites judiciaires.

Democracy Now. 5 juin 2025

Traduction, Alexandra Cyr

Des pays comme l'Afghanistan, la Birmanie, le Tchad, la Guinée équatoriale, l'Érythrée, Haïti, l'Iran, la Lybie, la Somalie, le Soudan, le Yémen, la République du Congo dit Congo-Brazzaville, seront directement impactés. Ces restrictions s'appliquent aussi aux visiteurs.euses du Burundi, de Cuba, du Laos, de la Sierra Leone, du Togo, du Turkmènistan et du Venezuela.

Le Président a mis cette nouvelle interdiction d'entrée sur le territoire en lien avec l'attaque par un homme d'origine égyptienne à Boulder au Colorado. Il s'est servi d'une torche enflammée et d'autres objets incendiaires pour attaquer une foule qui prenait part à une marche hommage hebdomadaire aux otages israéliens.es à Gaza. Mais l'Égypte n'a quand même pas été ajoutée à la liste des pays sous interdiction. Mercredi soir, la Maison blanche a publié une vidéo où le Président Trump parlait de cette interdiction.

Président D. Trump : Très simplement, nous ne pouvons accepter d'immigration venant de pays où nous ne pouvons compter sur un examen approfondi, sûr et fiable de ceux et celles qui veulent entrer aux États-Unis. C'est pour cela que je signe un nouveau décret introduisant des restrictions d'entrée au pays, pour des pays dont le Yémen, la Somalie, Haïti, la Lybie et nombre d'autres.

Amy Goodman : Pour l'examiner un peu plus, nous sommes avec Baher Azmy le directeur légal du Center for Constitutional Rights qui s'est attaqué à un décret semblable par le Président Trump lors de son premier mandat.

Soyez le bienvenu sur Democracy Now, Baher. Expliquez-nous le sens de ce que le Président a fait hier soir.

Baher Azmy : C'est très significatif en soi mais aussi parce que cela se situe dans un continuum, dans une série de démonstration jour après jour ou semaine après semaine, de nouvelles politiques migratoires qui comblent les sortes de fantasmes des évangéliques et des suprémacistes blancs à propos de notre pays. Nous avons eu, vous le savez, l'expulsion de gens vers la prison de Guantanamo ancien lieu de sécurité, puis le Centre de confinement du terrorisme, ensuite la chasse aux étudiants.es palestiniens.nes, les descentes de la police des frontières (ICE) dans les écoles et dans les prétoires et maintenant, ceci : une répétition de l'interdiction faite aux musulmans.es d'entrer sur le territoire qui va être épouvantable pour les familles originaires de ces pays qui cherchent des visas d'immigration et dans certains cas de tourisme.

Malheureusement, la Cour suprême semble ouverte à ces demandes. Presque la totalité de cette Cour semble disposée à entendre ces demandes de l'exécutif basées sur l'idée qu'il a une très grande autorité en immigration pour : « sécuriser les frontières et déterminer ce qui est nuisible aux États-Unis » en interdisant l'entrée aux gens de couleur.

N.S. : Baher, pouvez-vous nous expliquer ? Vous mentionnez qu'en 2018, la Cour suprême, a conclu de telle manière que, selon des expets.es judiciaires, cela va rendre la lutte contre ce nouveau décret plus difficile que celle contre le décret de 2017.

B.A. : Oui, malheureusement, je pense que c'est exact. On se rappellera le chaos suscité dans les aéroports par la première interdiction. Elle était très particulière, elle visait directement une majorité de pays musulmans. Tous les tribunaux de première instance ont déterminé ce qui était une évidence crue : cette mesure était discriminatoire. Elle l'était sur la base de la religion et de l'origine nationale parce qu'elle excluait les seuls.es musulmans.es donc elle violait la Constitution.

Le juge en chef de la Cour suprême, John Roberts, prétends que contrairement à ce qui est évident à tout être humain qui a le cœur à la bonne place, cette fois ce n'est plus le cas. Ce décret ne serait plus vraiment basé sur la race ou les croyances religieuses. Pour cela, il invoque l'arrêt de son tribunal à propos de l'Immigration and Nationality Act. qui donne une autorité amplifiée au gouvernement fédéral pour exclure les « étrangers.ères » ceux et celles qui n'ont pas la citoyenneté même lorsque cela parait basé sur la race ou la religion.

N.S. : Ce décret comporte des exemptions pour les détenteurs.trices de visas et pour les résidents.es permanents.es. Pouvez-vous, Baher nous expliquer pourquoi ? Le savez-vous ?

B.A. : Oui. C'est un tout petit peu moins illégal, un tout petit peu moins inconstitutionnel à sa face même que le premier. Il touche plus de pays qui ne sont pas musulmans en majorité. Il permet la demande de l'asile et les résidents.es permanents.es n'y sont pas hors la loi. Je pense qu'ils ont fait un effort pour qu'il soit plus conforme légalement. Probablement qu'ils ont appris de leur expérience : ils ne peuvent pas effacer le choc des valeurs et le traumatisme des parents et des familles (touchées par la mesure). Donc, ils ont travaillé à une version plus raffinée, plus acceptable à la Cour suprême.

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Un capitalisme en crise, prédateur et autoritaire. Entretien avec Romaric Godin

10 juin, par Romaric Godin — ,
Le capitalisme est en crise profonde, avec des taux de croissance faibles (en particulier en Europe), et marqué par la remise en cause par la Chine de la domination des (…)

Le capitalisme est en crise profonde, avec des taux de croissance faibles (en particulier en Europe), et marqué par la remise en cause par la Chine de la domination des États-Unis. C'est le support de politiques résolument antisociales, de plus en plus autoritaires et prédatrices, un aspect particulièrement visible lors des premiers mois de la présidence Trump. Dans cet entretien publié par la revue Inprecor, le journaliste économique Romaric Godin revient sur la stagnation du capitalisme et ses effets politiques.

Tiré du site de la revue Contretemps.

Lorsque nous t'avions contacté, le point de départ de notre questionnement était la situation économique en Europe. Depuis, l'arrivée de Trump contraint à observer la situation plus globalement.

La situation européenne se comprend dans un contexte beaucoup plus global. C'est une particularité de l'époque : il y a encore des forces de dissociation assez fortes au sein du capitalisme même si on sort d'une période de mondialisation et d'interdépendance de tous les capitalismes. Il est assez difficile de comprendre de façon autonome les dynamiques dans chaque région.

Que peut-on dire sur la situation économique de l'Europe, la croissance, ou plutôt la quasi-récession qui la touche ?

Regardons les dynamiques à long terme de la croissance pour ensuite revenir sur ce qui se passe actuellement. Il y a un ralentissement de la croissance mondiale sur les cinq dernières décennies. Dans les années 1960, la croissance mondiale calculée par la Banque mondiale était de 6,2 % par an en moyenne. Aujourd'hui, elle est autour de 3 %. En un demi-siècle, la croissance mondiale a été divisée par deux, selon la Banque mondiale. Ça veut dire très concrètement que le rythme d'accumulation capitaliste a été divisé par deux. Il faut souligner cet élément peu discuté, parce qu'à gauche on se focalise souvent sur l'accroissement des richesses de la classe capitaliste, et à droite on se rassure en considérant que la croissance se poursuit.

Mais la dynamique de fond est celle d'un ralentissement de la croissance, dans les pays avancés et particulièrement en Europe occidentale. Dans cette dernière, elle se situe autour de 1 % (l'Espagne étant un cas particulier). Le rythme de la croissance a été divisé par 6, c'est un ralentissement extrêmement fort et continu : lors de la première crise des années 1970, on passe de 6 % à 3-4 %, il y a une petite réaccélération à la fin des années 90, et on descend autour de 2 % avant la crise de 2008. Depuis la crise de 2008 – avec des différences selon les pays – on est entre 0 et 1 %. En France, la dernière fois qu'on a dépassé les 2 % de croissance, c'était 2017 et c'était la seule année entre 2008 et 2024.

Il s'agit donc de niveaux de croissance historiquement faibles. 1 % de croissance pour une économie comme la France, c'est proche de la stagnation et c'est d'autant plus vrai qu'on ne voit pas de dynamique de reprise, même si on a pu y croire après la crise sanitaire. Mais dans la plupart des pays occidentaux et en Europe occidentale en particulier, le PIB réel est maintenant en dessous de la tendance d'avant la crise sanitaire et encore plus par rapport à la crise de 2008. Pour la France, on se retrouve à 14 % en dessous de la tendance d'avant 2008. Pour les pays de l'OCDE, le décalage est de 9,5 %.

C'est un tableau extrêmement important, parce que ça signifie que toutes les promesses qui reposent sur un redémarrage de la croissance, et toutes les politiques qui ont été menées pour faire redémarrer la croissance – les politiques de répression sociale et les politiques de soutien à l'activité, les subventions directes au secteur privé, les politiques monétaires – n'ont permis en réalité que de freiner la décélération, mais ne l'ont pas arrêtée.

La situation européenne est donc celle d'une croissance extrêmement faible, y compris en termes de PIB par habitant – et là c'est valable y compris pour l'Espagne, qui a actuellement une croissance de 3 %, mais une stagnation de son PIB par habitant depuis dix ans. Il n'y a pas de création intrinsèque de valeur.

Nous sommes donc dans une situation de quasi-stagnation et certains pays sont carrément en stagnation. C'est le cas de l'Allemagne – la première économie de la zone euro et la troisième économie mondiale – quasiment en stagnation depuis 2018, soit 7 ans. Son PIB réel a augmenté de 0,7 % sur cette période. C'est le fruit d'un mouvement de fond général propre au capitalisme mondial et le capitalisme européen se situe à l'avant-poste de ce ralentissement mondial.

Certaines économies s'en sortent un peu mieux parce qu'elles profitent de quelques avantages. Les technologies permettent aux États-Unis de capter un peu plus de valeur et leur puissance impérialiste leur donne accès à des marchés. La Chine utilise la puissance de son État pour investir sur des technologies nouvelles et des infrastructures, et le coût du travail y est encore très faible. Certains pays, comme l'Indonésie, combinent un faible coût du travail et la présence de matières premières. Il y a donc encore des zones en croissance, mais cette croissance est souvent insuffisante pour les pays en question, et d'autres zones en pâtissent : c'est comme si le gâteau ne grossissait plus suffisamment vite… cela conduit à des problèmes dans la répartition des parts.

On se retrouve dans cette situation de quasi-stagnation, avec des perspectives de croissance quasi inexistantes. Quels seraient les moteurs aujourd'hui de la croissance européenne et française ? En France, l'impact de l'industrie, contrairement à ce que raconte le gouvernement, reste extrêmement faible. C'est une niche, centrée sur quelques secteurs qui peuvent doper les chiffres comme les plomber. Il y a le transport ferroviaire – quelques TGV sont vendus mais le secteur devient extrêmement concurrentiel, avec la présence de la Chine, de l'Espagne et de l'Italie – ou la construction de paquebots, mais c'est très limité, la moindre livraison produit une embellie conjoncturelle qui donne la possibilité au gouvernement de prétendre que sa politique fonctionne. Dans l'aéronautique, il y a une vraie dynamique, mais avec les conséquences environnementales que l'on sait.

L'essentiel de l'économie française aujourd'hui, c'est 55 % de consommation et 80 % de services marchands qui dépendent la plupart du temps de la consommation des ménages. La très faible croissance est achetée par l'État via des subventions, des baisses d'impôts massives – entre 160 et 200 milliards par an – pour subventionner des embauches – donc un peu de redistribution de pouvoir d'achat – et de l'investissement qui souvent, parce qu'on est dans une économie tertiarisée, ne débouche pas sur des gains de productivité. C'est le point essentiel, qui est général au capitalisme contemporain mais très problématique pour l'Europe : ce ralentissement de la croissance a comme sous-jacent le ralentissement de la productivité.

Il y a deux façons de faire de la plus-value : la plus-value relative et la plus-value absolue. Si la plus-value relative est faible, c'est-à-dire si la productivité ne s'accroit pas – et en l'occurrence en France, en Allemagne, en Italie, il n'y a quasiment plus de gains de productivité –, la seule façon d'avoir, de produire de la plus-value est d'augmenter la plus-value absolue, c'est-à-dire augmenter le temps de travail, dégrader les conditions de travail, faire baisser le salaire horaire, etc. Le mantra de nos dirigeants, qui est de « travailler plus », vise ainsi à augmenter le temps de travail.

Mais même ça ne suffira pas, parce que les gains de productivité ainsi créés sont extrêmement faibles. Pour faire du profit, les solutions sont alors l'aide directe de l'État, la prédation des services publics, la prédation via des systèmes de rente (c'est ce qu'on voit par exemple avec les technologies où on vous fait payer l'utilisation de vos propres données) mais aussi tout ce qu'on appelle en anglais les utilities (les services aux collectivités, l'eau, l'électricité, l'énergie…). La rente, ce sont ces pratiques qui consistent à vendre des abonnements pour n'importe quoi. On vous fait payer pour des choses que vous ne voulez pas acheter parce qu'on essaye de contourner le recours au marché pour avoir un accès direct à l'argent. Le but est de contourner en quelque sorte le schéma de production de valeur traditionnel car il n'est plus capable de produire suffisamment de plus-value.

Ce développement du capitalisme de rente, cette prédation sur l'État dans des économies comme les économies européennes, qui dépendent beaucoup à la fois des transferts sociaux, des salaires, contribue à affaiblir la demande des ménages et à les insécuriser. Ceux-ci voient leurs dépenses contraintes augmenter, se tournent vers une épargne de précaution et réduisent leur consommation « arbitrable », ce qui a pour conséquence, en retour, de réduire encore plus la croissance, en un cercle vicieux.

Dans le même temps, les investissements sont faibles et surtout de très mauvaise qualité. Le supposé boom de l'investissement qu'on observe dans les statistiques françaises entre 2018 et 2022 concerne quasiment exclusivement des investissements de maintenance, sans effets durables. C'est un des cœurs du problème du capitalisme contemporain : la révolution technologique des années 1980 à 2000 n'a pas produit de gains de productivité. Lorsque les investissements ne produisent pas de productivité, vous vous retrouvez avec des dépenses qui ne produisent pas de valeur, vous vous êtes endetté et vous n'avez même pas les moyens de rembourser les dettes. C'est un peu la situation là dans laquelle on est maintenant, avec le développement de ce qu'on appelle les « entreprises zombies ».

Le deuxième élément très important, en particulier pour ce qui concerne l'Europe, c'est le cas de la dette, la dette publique comme la dette privée dont on vient de parler. Comme la dette privée finance des investissements non productifs au sens propre du terme – c'est-à-dire qu'ils n'améliorent pas ou pas assez les gains de productivité –, elle ne peut pas être remboursée et c'est donc la dette publique qui sert à soutenir une activité quasi factice. Cela existait depuis 2008 mais c'est devenu énorme avec la crise sanitaire : un soutien aux entreprises inconditionnel et général a été développé – un véritable soutien direct à leur taux de profit – et une partie du capital est devenue dépendante de ce soutien. Ce soutien se substitue à la production de valeur, il ne vient pas favoriser la production de valeur.

Par conséquent, il ne permet pas de nouvelles entrées fiscales. Les revenus fiscaux sont donc insuffisants pour faire face aux dépenses. C'est ainsi que la dette publique augmente et que la pression des marchés financiers se renforce sur les pays occidentaux, et singulièrement sur la France. On entre là aussi dans un cercle vicieux, avec une austérité qui freine encore la croissance.

Ce qu'on voit est un échec absolu des politiques néolibérales, de la promesse néolibérale selon laquelle en libéralisant le marché du travail on allait produire à la fois de l'emploi et de la croissance. En réalité on a produit de l'emploi mal payé, subventionné et très peu productif. Avec des emplois à faible productivité, vous ne pouvez pas augmenter les salaires. Et lorsque vous avez une pression sur les transferts de fonds de l'État vers le secteur privé, une pression de la conjoncture ou n'importe quelle autre pression des marchés financiers sur la dette privée ou publique, c'est l'effondrement.

Vous vous retrouvez avec des emplois qui sont précaires non seulement dans le sens où on l'entend généralement, mais plus fondamentalement parce qu'ils dépendent d'un contexte où ces emplois ont un problème d'existence propre, lié à leur manque de rentabilité. À l'inverse de la période précédente, pendant laquelle la création d'emplois industriels créait des emplois extrêmement productifs, qui démultipliaient la plus-value. Aujourd'hui la plus-value extraite sur chaque emploi est extrêmement faible, c'est pour cela que tous les emplois sont subventionnés, et c'est pour cela que ceux qui nous dirigent disent qu'il faut baisser ce qu'ils appellent les charges – les salaires socialisés, les impôts – et qu'ils exigent que l'État paie même une partie du salaire ! On a connu ça durant la crise sanitaire, où les États les payaient directement.

L'Europe est une version caricaturale de cette situation, mais c'est un problème qu'on peut retrouver aux États-Unis, au Japon – déjà avant la crise –, d'une certaine façon en Chine… C'est un élément commun au capitalisme mondial, un capitalisme de stagnation qui se met en place. Des économistes indiquent que les rythmes de croissance actuels sont supérieurs à ceux de la fin du 19e siècle. Mais depuis, l'accumulation s'est accélérée et revenir en arrière fragilise l'intégralité du système, qui est fait pour accélérer en permanence et non pour ralentir. Le rêve des économistes néo-classiques de « se poser en douceur » est impossible : dans le système capitaliste il n'y a pas d'équilibre possible, c'est un système de fuite en avant.

À la fin du 19e siècle il y avait la possibilité de la prédation coloniale, qui s'est développée à une grande vitesse, et cela n'existe plus de la même manière aujourd'hui.

Exactement. À la fin du 19e siècle, il y a eu une grande crise entre 1873 et 1896. La réponse qui a été apportée par le capitalisme d'alors a été la prédation impérialiste. Mais il y a eu, en parallèle, une vraie révolution technologique, à la fin des années 1890, le moteur à explosion et l'électrification. Cela a mis 60 à 70 ans à se développer, jusqu'au développement des marchés de masse.
Le capitalisme survit parce qu'il y a, à un moment, un coup de dynamisme donné à la productivité par un changement technique ou plusieurs qui se combinent. C'était le grand rêve des néolibéraux avec l'ordinateur et internet.

Mais là, ça ne fonctionne pas…

Si ça avait fonctionné, on aurait des gains de productivité qui seraient au moins équivalents à ceux du moment où on a eu l'électrification et le moteur à explosion. Peut-être pas les 6 ou 7 % des années 1970, mais au moins des gains de productivité de 4 ou 5 %. Actuellement, des gains de productivité existent, mais ils sont limités à l'industrie et sont plutôt faibles. Mais le problème est qu'en parallèle, ce sont les secteurs les moins productifs qui se développent le plus rapidement et, dès lors, les gains de productivité globaux sont en baisse.

De nombreuses explications sont possibles. Aaron Benanav (L'Automatisation et le futur du travail, éditions Divergences, Quimperlé 2022) estime que c'est précisément la tertiarisation qui entraîne ces baisses de gain de productivité. Jason E. Smith (Les capitalistes rêvent-ils de moutons électriques ? Éditions Grevis, Caen 2021) distingue les services productifs et les services non productifs et place cette baisse de productivité dans une logique de réduction globale du taux de profit.

Ce développement des services non productifs est une réponse directe à l'affaiblissement de la croissance globale. Quand vous avez de moins en moins de croissance, vous avez deux formes de réponse possibles : la surveillance des clients et des travailleurs d'une part, et ce qu'il appelle la sphère de la circulation (le marketing, la publicité…), d'autre part. Ce sont des services complètement non productifs qui se payent sur la productivité que vous allez dégager « grâce à eux ». Mais c'est un poids pour le capital et ils conduisent, dans les faits, à une baisse de la productivité, qui pousse à développer ces services encore davantage.

Sans entrer dans les détails et dans les débats théoriques, la question est de savoir si cette baisse est une tendance lourde et irréversible ou – je sais que vous aimez bien Mandel – si on est dans une onde longue descendante et qu'une innovation technologique (par exemple l'IA) ou un autre facteur non directement économique est susceptible de faire repartir les gains de productivité au niveau économique général.

C'est là où j'ai des doutes. Parce que même si vous remplacez des juristes d'entreprise ou des conseillers commerciaux et financiers par de l'IA, vous rompez avec une promesse du capitalisme selon laquelle les salarié·es monteraient en gamme, que l'ouvrier dont le travail est mécanisé allait entrer dans un bureau. Aujourd'hui, la seule chose que les capitalistes ont à proposer comme débouché, ce sont précisément des emplois tertiaires bas de gamme. Par ailleurs, au niveau purement économique, comme tous ces emplois ne sont pas intrinsèquement très productifs, il est peu probable qu'on gagne beaucoup en productivité. C'est un élément important parce que les libertariens, les trumpistes et ce qui reste de néolibéraux vont essayer de nous faire croire qu'il y a encore un avenir dans le capitalisme.

Comment analyses-tu la vague de licenciements de novembre-décembre dernier ?

C'est extrêmement simple : après le Covid, il y a eu une augmentation de l'emploi assez importante, mais sans croissance, dans le cadre d'une dégradation de la productivité. Ces emplois ne sont tenables que si, à un moment, vous avez une accélération de la croissance. Ils ont été créés grâce aux aides publiques, et la vague d'inflation qui, dans beaucoup de secteurs – notamment les secteurs de la distribution –, a permis de compenser la baisse des volumes par une augmentation des prix et donc une augmentation de leur marge.

Il y a eu donc eu une possibilité d'embaucher plus de gens que nécessaire, des salarié·es qui ne correspondaient pas du tout à la production. Certains employeurs ont dû vouloir profiter de l'aubaine des aides publiques pour améliorer l'outil au cas où il y aurait une accélération de la demande suite à la crise sanitaire. En 2021, une grande partie des gens y croyait : on avait 6 % de croissance, on s'imaginait un retour aux années folles d'il y a un siècle, Bruno Le Maire nous disait que ça allait être formidable. Il ne faut pas exclure la possibilité que les capitalistes croient dans leurs propres discours et donc qu'ils aient anticipé une croissance forte. Mais cette croissance forte n'est jamais arrivée, les aides publiques doivent être redéployées pour des raisons budgétaires, la demande est quasi atone et tous ces emplois constituent un poids sur la rentabilité.

C'était des centaines de milliers de licenciements en France…

C'est énorme mais c'est logique : cette surembauche était une anomalie. Le taux de chômage anormalement bas au regard de l'activité globale du pays s'est traduit par une baisse de la productivité du pays et cette baisse de la productivité n'est tenable que si vous avez en contrepartie dans les années qui suivent une hausse équivalente ou supérieure. Cette hausse n'arrivant pas, vous avez des licenciements et une forme de retour à la normale.

Avec une réorganisation de la main-d'œuvre au passage, parce qu'ils ont recruté des plus jeunes et là ils vont virer les vieux…

Oui, on lisse : on retire les gros salaires et on garde les plus bas. Leur obsession est la plus-value absolue. Donc il faut prendre des gens avec des salaires horaires plus faibles et avec des contrats plus précaires ou en tout cas plus souples. Quand vous embauchez aujourd'hui compte tenu des réformes du droit du travail qui ont eu lieu, c'est plus facile à gérer que des gens qui ont passé des contrats il y a 20 ans ou 30 ans.

Ces suppressions d'emplois ont lieu dans l'industrie, l'automobile, le commerce…

L'industrie est la plus touchée car elle a été beaucoup aidée. Le commerce est frappé de plein fouet aussi parce que la situation est désastreuse : les ventes dans le commerce de détail ont été catastrophiques en 2022-2023 et se sont très peu améliorées en 2024, il y a eu une série de faillites et ce n'est pas fini. Dans la grande distribution, ils avaient embauché grâce à l'augmentation des prix… mais cette « inflation par les profits » a des limites et ils ont été obligés d'arrêter de jouer là-dessus, leurs profits sont donc maintenant sous pression. Et puis les entreprises ont commencé à réduire les commandes à leurs fournisseurs, donc tous les services aux entreprises vont être touchés. Les ménages frappés par le chômage, ne vont plus avoir recours à des services aux personnes – les gardes d'enfants, etc. – et cela représente beaucoup de postes d'emploi en France…

La France, l'Allemagne, l'Italie sont les trois régions les plus touchées, non ?

L'Allemagne est très touchée alors qu'elle est encore au milieu de sa crise d'origine industrielle. La structure économique de l'Allemagne est complètement différente de la structure française : l'industrie c'est encore en Allemagne 20 à 25 % du PIB, et cela représente tout un tissu économique. Une vague de licenciements a commencé, même si finalement Volkswagen n'a pas fermé d'usine. Le pays a perdu 100 000 emplois industriels en un an. En Allemagne, les gens sont extrêmement inquiets parce que le modèle du pays repose sur l'industrie très haut de gamme qui fournit à la fois beaucoup de plus-value et des salaires élevés qui arrosent ensuite tout le reste du pays, notamment les services.

Le cas de l'Allemagne est particulier parce que c'est une crise liée à la montée en gamme de l'économie chinoise. L'Allemagne a évité la crise européenne pendant très longtemps parce qu'elle fournissait à la Chine les moyens de sa croissance, notamment les machines-outils (et évidemment les voitures de luxe). Quand la Chine organise son plan de relance après la crise de 2008 pour sauver le capitalisme mondial, les commandes à l'industrie allemande repartent très vite dès la mi-2009 parce qu'ils envoient des machines-outils en Chine.

Le problème est que la Chine est en train de changer de modèle économique en montant en gamme. Elle fabrique moins cher des marchandises que l'Allemagne produisait. Leur qualité commence à se rapprocher de plus en plus de la qualité allemande et donc un marché de la production allemande est en train de disparaître. De plus, des concurrents chinois prennent des parts dans le marché mondial, par exemple dans le solaire. L'Allemagne avait une industrie florissante dans ce domaine et puis la Chine a commencé à vendre moins cher la même chose et a raflé tout le marché. Elle pratique un peu de dumping : elle surproduit, baisse les prix très fortement, et les industriels allemands ne peuvent pas suivre, puisque, à qualité égale ou légèrement inférieure, les prix chinois sont 30 % en dessous. L'Allemagne a vraiment complètement raté le train et s'est contentée d'innovations à la marge pour justifier ses prix élevés.

De plus, entre 1997 et 2013, il y a eu un dumping salarial allemand – une stagnation des salaires – qui a complètement ravagé tous leurs concurrents européens et ils se sont retrouvés face à des industriels chinois qui n'avaient que l'industrie allemande comme fournisseurs possibles. C'est terminé. Le cas le plus évident est la voiture électrique : pendant que les constructeurs allemands essayaient de truquer les tests sur les moteurs diesel, l'État chinois a subventionné les voitures électriques – et quand la voiture électrique est devenue un produit de masse, les Allemands n'étaient pas du tout prêts.
Pour reparler de Mandel, il est vrai que nous considérons en général que le retour à une onde longue de croissance est lié à des facteurs exogènes, soit des grandes découvertes technologiques soit des facteurs exogènes politiques… Ça change la focale, mais comment analyses-tu les initiatives de Trump, les droits de douane, la volonté d'annexions et ses attaques contre l'appareil d'État ?

C'est vraiment la question. Pour être un peu sur cet espace théorique et faire le lien avec Trump : si vous avez effectivement un système d'onde longue, et si nous sommes dans le creux de la vague, pour aller vite, on va avoir une guerre et puis ça va remonter parce qu'il va falloir reconstruire. Mais le problème est que la tendance actuelle est celle d'un affaiblissement à très long terme, ce qui fait que même si on repart par des facteurs exogènes – ou endogènes –, la dynamique interne du capitalisme est tellement affaiblie que je ne suis pas sûr qu'on puisse repartir très haut. C'est finalement ce qu'on a pu constater avec la crise sanitaire, même si l'outil productif avait été préservé. Le rattrapage a été rapide et les tendances à l'affaiblissement sont redevenues importantes.

Ça pose encore plus le problème en termes politiques : même ceux qui ont des idées pour maintenir leur rythme d'accumulation vont se retrouver quoi qu'il arrive face à une tendance forte sous-jacente qui tire l'accumulation vers le bas. Par exemple en Ukraine, après la guerre, vous allez avoir une reconstruction et le PIB ukrainien va bondir, c'est logique. Mais en réalité si l'Ukraine devient un lieu de production bon marché en Europe occidentale, elle va prendre la place d'un autre pays. C'est la logique du gâteau qui ne grandit plus.

La Seconde Guerre mondiale a fait repartir le capitalisme, parce qu'il y avait aussiun changement technologique, un changement d'échelle de la production, la deuxième révolution industrielle qu'il s'agissait de diffuser. Et la guerre a accéléré cette diffusion. Et parce qu'il y avait, en parallèle, la possibilité d'un développement de la consommation de masse, qui a commencé à la fin du 19esiècle mais ne s'est développé réellement qu'après la Seconde Guerre mondiale, d'ailleurs en grande partie pour des raisons politiques.

Il y a là des dynamiques internes au capital et la dynamique externe a permis de faire repartir le tout. Aujourd'hui il n'y a même pas ça : il y a quelque chose qui est de l'ordre de la baisse tendancielle du taux de profit et qui est lié à la question de la productivité. À un moment vous avez une force qui tire cette productivité vers le bas, qui est ce qu'on appelle la composition organique du capital : vous avez atteint un certain niveau de productivité alors que votre capital coûte très cher et que les gains que vous réalisez ne vous permettent plus de gagner suffisamment de plus-value. L'intérêt de l'investissement productif décline et la seule façon d'avoir une croissance est d'augmenter la plus-value absolue.

Aux États-Unis, on entend dire que leur 2,5 % de croissance est formidable, mais ce n'est pas du tout les taux de croissance qu'ils faisaient dans les années 1950-1960 ou même 1980. De même l'Espagne fait 3 % mais elle faisait 4 % ou 5 % dans les années 2000. Et notre gouvernement nous dit qu'on est les champions quand on fait 0,8 %…

Je pense qu'une grande partie, voire la totalité du capital, est consciente de cette situation et c'est pour ça qu'à mon avis on est en train de sortir du néolibéralisme. Ils ont compris qu'un développement des marchés et leur libéralisation, ça ne fonctionne pas. Ça peut servir à développer certaines politiques publiques, justifiées avec les vieux arguments – la réforme des retraites, les libéralisations à venir du marché du travail, etc. – mais ce n'est plus le cœur du problème.

Le cœur du problème est en fait double. D'un côté, une partie du capital – notamment le capital productif, les services marchands et beaucoup d'industries – dépend aujourd'hui de l'aide directe des États – subventions, baisses d'impôts, etc. Si vous supprimez cette aide, ils n'ont plus rien, il n'y a plus de profits, il n'y a plus d'activité. Et ça c'est vrai aussi en Chine, parce qu'on est dans une quasi-crise de surproduction industrielle.

De l'autre côté, il y a une autre stratégie qui consiste à dire que, puisqu'on a beaucoup de mal à produire de la valeur de façon classique à partir du travail, on va contourner ce système et produire de la valeur au travers de la rente. Tout un secteur vise précisément ce système de rente, ce système de prédation à la fois des ressources et des marchés. À titre de capitaliste individuel c'est parfait : vous pouvez encaisser toutes les baisses du taux de profit global si, de votre côté, votre profit personnel dépend juste de l'obligation qu'ont les gens de vous payer pour pouvoir vivre normalement. C'est en fait un leurre car cet argent lui-même dépend du taux de profit global. Mais c'est une illusion forte dans ces secteurs.

Ce n'est pas une division stricte, des secteurs – comme par exemple la finance – ont un pied dedans et un pied dehors, parce que le crédit dépend évidemment de l'activité, mais une partie de la finance est complètement déconnectée du système productif. On a donc, grosso modo, ces deux stratégies.

Quelle est la théorisation politique de ces deux stratégies ? Pour les secteurs productifs, la traduction politique est un État qui détruit tant l'État social que les conditions de travail pour disposer d'un maximum de ressources afin de subventionner le secteur privé. Ça implique une politique d'austérité sociale et une politique de transfert – ce qu'on a connu avec le covid : une « politique de sécurité sociale des profits des entreprises ».

Pour les secteurs rentiers, ce qui les intéresse, ce n'est pas d'être aidé par l'État parce qu'aujourd'hui ils sont quasiment à des niveaux étatiques, donc en concurrence avec les États. Les Big Tech et les grandes entreprises extractivistes sont concurrentes de l'État, qui entrave leur développement : il faut obtenir des droits de forage quand vous êtes un pétrolier, il y a des problèmes de réglementation quand vous êtes dans la technologie… L'idée est donc de vider l'État de sa substance, de ne garder que ce dont on a besoin au minimum et de remplacer l'État par des entreprises. C'est le régime « minarchique » [« État minimal »] ou anarcho-capitaliste, qui remplace l'État par des entreprises qui font du profit et se substituent à ses grandes fonctions. C'est exactement ce qui est en train de se passer aux États-Unis : Elon Musk arrive avec ces jeunes blancs-becs de la Silicon Valley qui n'ont comme expérience que celle des entreprises de rente et qui prennent l'État américain, le désossent pour garder seulement ce qui intéresse le capital rentier.

Il y a cependant des points de jonction entre les deux grandes stratégies : les réductions des impôts, la destruction des protections pour les travailleurs et de l'État social… Autrement dit, la répression sociale.

Il y a donc une forme d'accélération du phénomène néolibéral, mais aussi une fuite en avant : pour compenser cet affaiblissement continuel de la croissance, il va y avoir une mise à sac de l'État. Pour les entreprises industrielles, c'est problématique parce que si vous n'avez plus les transferts de l'État vous avez un problème de survie. Et aussi un problème de dépendance vis-à-vis des secteurs rentiers parce que les entreprises industrielles dépendent des entreprises technologiques, des entreprises de fourniture d'électricité, d'eau etc. donc elles deviennent une forme de sous-secteur.

Cette concurrence à l'intérieur du capital peut être réglée dans certains cas par la répression sociale qui arrange un peu tout le monde – c'est un peu aujourd'hui la politique de Macron : on maintient les aides aux entreprises en faisant de la répression sociale, et grosso modo comme on n'augmente pas les impôts les entreprises rentières sont elles aussi satisfaites. C'est possible en France parce que ce sont principalement des services marchands qui font l'économie, qu'il n'y a pas de géant de la Tech. C'est un peu différent aux États-Unis : du fait de la place des géants de la Tech dans le modèle économique américain, il va y avoir un conflit beaucoup plus fort entre les deux parties. La politique protectionniste peut tenter de trouver un compromis interne au capital, mais certaines Big Tech ont des plumes à y perdre…

D'une main Trump les impose et de l'autre il les annule…

La première lecture est que ces droits de douane sont du protectionnisme classique visant à défendre l'intégralité du capital national contre les capitaux étrangers en vue de relocaliser la production aux États-Unis. Et grâce au revenu des droits de douane l'État baisse les impôts et tout le monde est content en interne. C'est ce qu'ont fait les États-Unis dans la première phase de leur développement après la guerre de Sécession : ils se sont développés à l'abri des droits de douane massifs et c'est la référence de Trump.

Le problème de cette hypothèse est qu'il y a une contradiction dans les termes. Les droits de douane doivent dissuader l'importation des produits aux États-Unis. Or Trump va baisser les impôts grâce au produit des droits de douane. Donc, si la relocalisation se réalise, le revenu des droits de douane diminue et la baisse des impôts ne peut être financée. Par ailleurs, pour relocaliser, il faut des droits de douane suffisamment élevés pour compenser les différentiels de coût du travail. Entre un travailleur mexicain et un travailleur étatsunien, la différence aujourd'hui est de l'ordre de 1 à 6 %, pas 25 %. Si vous relocalisez, vous allez donc avoir des augmentations de prix. Et comme le marché du travail étatsunien est déjà tendu, vous allez avoir des augmentations de salaires, donc une pression sur le taux de profit des entreprises industrielles qui n'est pas forcément tenable en l'état et va se traduire par une augmentation des prix qui sera beaucoup plus importante que les 25 % d'augmentation des droits de douane…

Cette première hypothèse ne doit pas être complètement évacuée. Il est possible que ce soit le projet de Trump. On serait alors sur un plan à la Macron : essayer de faire la paix au sein du capital en donnant en même temps aux industriels une protection et au capital rentier les baisses d'impôts qu'il veut. Mais c'est voué à l'échec.

La deuxième hypothèse est que ces choix sont en réalité politiques. Les États-Unis ont un problème : leur modèle économique est fondé sur une économie de services marchands à 80 %, avec un secteur technologique haut de gamme extrêmement rentable, extrêmement puissant et en avance sur tous les autres. C'est une toute petite partie de l'économie étatsunienne mais c'est une partie extrêmement importante parce qu'elle produit énormément de valeur. Le problème est qu'aujourd'hui la Chine est en train de les rattraper – on l'a vu avec l'IA.

Je fais une petite parenthèse que je trouve intéressante : depuis des années on nous vend l'idée (notamment les macronistes) que pour innover il faut des baisses d'impôts des entrepreneurs, il faut les caresser, leur apporter le café, il ne faut pas que les gens soient trop payés, il faut des aides publiques, il faut des commandes, etc. Mais en réalité, c'est complètement faux : c'est quand vous avez des contraintes que vous innovez, c'est quand il y a quelque chose qui vous bloque que vous devez trouver une solution. C'est exactement ce qui s'est passé en Chine : les chercheurs se sont dit « on n'a pas les microprocesseurs, on ne peut pas avoir cette stratégie (une stratégie par ailleurs délirante sur le plan écologique qui est d'augmenter les capacités de calcul) donc on va trouver une solution pour faire avec ce qu'on a ». Le cauchemar américain c'est que les Chinois soient capables aujourd'hui d'innover moins cher avec une qualité quasi équivalente et vont donc leur prendre des marchés partout, même sur l'IA.

Jusqu'ici la stratégie des États-Unis pour maintenir leur hégémonie était de se déporter un peu partout, avec la guerre en Irak, en Afghanistan, des troupes en Europe, etc. Maintenant c'est de construire un vrai empire, c'est-à-dire avec des réseaux de vassaux qui vont venir consommer leurs produits, notamment leurs produits tech, leur pétrole ou leur gaz liquéfié. Et qui n'auront pas le choix.
On retrouve ce que je disais sur la rente : l'enjeu aujourd'hui d'une partie du capitalisme étatsunien est d'éviter la concurrence, donc de construire non pas un grand marché transatlantique et transpacifique comme au temps du néolibéralisme, mais un empire : un centre et des périphéries où chacune a un rôle à jouer vis-à-vis du centre. Aujourd'hui évidemment ce n'est pas le cas : l'Europe passe des accords de libre-échange avec des d'autres pays. Mais si le but des États-Unis est que chaque pays soit au service de la métropole, du cœur de l'empire, les droits de douane sont un moyen de pression. C'est une explication du jeu actuel de Trump : il les met, il les retire.

Quand il les retire on dit que c'est un clown. C'est peut-être un clown mais il envoie le message aux Mexicains et aux Canadiens : je peux les retirer mais évidemment il va falloir accepter des conditions, sinon je vais les remettre. Ces conditions, cela va être l'accès au marché, par exemple en Europe. On sait bien ce qu'il vise : la suppression de toutes les réglementations sur la technologie, le monopole du gaz liquéfié, l'accès au marché des industries de la défense (et donc quand il dit qu'il faut consacrer 5 % du PIB à la défense, c'est pour acheter aux États-Unis)… On peut même imaginer qu'ils mettent d'accord tout le capital étatsunien en disant à sa périphérie : on a des produits industriels qu'on veut vendre et vous allez vous inscrire dans notre chaîne logistique, à nos conditions.

Les droits de douane auraient alors vocation à faire pression sur les pays périphériques de l'empire pour les vassaliser encore plus. C'est quelque chose qui peut paraître complètement contre-intuitif, mais en fait il vise ses alliés avant de viser ses ennemis parce qu'il est en train de constituer un bloc impérial et quand ce bloc impérial sera constitué, il pourra aller à l'affrontement avec la Chine (la Chine qui est en train de faire exactement la même chose, sous des formes moins violentes et moins clownesques, avec les « nouvelles routes de la soie » qui sont des formes d'influence et de dépendance à la dette). Mais là aussi, c'est très risqué : l'influence que vont avoir ces droits de douane sur la croissance mexicaine ou colombienne peut conduire le Mexique et la Colombie à aller chercher des appuis chinois par exemple… mais si la Chine met les deux pieds au Mexique ou en Colombie, cela devient extrêmement dangereux. Donc il ne faut pas évacuer non plus le caractère dangereux du personnage…

Comment expliques-tu que le Wall Street Journal ait publié un éditorial extrêmement agressif contre ce choix de Trump sur les taxes – c'est quand même le journal du capital financier – et la chute de l'indice Dow Jones face à ces annonces ?

On retrouve la discussion qu'on avait précédemment : on a affaire à des gens qui tentent par tous les moyens de sauvegarder leur taux de profit mais qui se confrontent à des contradictions permanentes. Musk est confronté au fait qu'il a délocalisé une partie de sa production en Chine, que le marché chinois est important pour lui et c'est ce qui provoque un recul de l'action Tesla. Sous l'impulsion de Trump à la fin des années 2010, le capitalisme américain s'est structuré précisément autour du Mexique et de la fourniture de produits mexicains – mais aujourd'hui, avec les droits de douane, la chaîne logistique du capitalisme industriel américain risque d'être complètement rompue. Ce n'est pas logique et d'ailleurs la réaction du Wall Street Journal montre que ces milieux sont confrontés à une contradiction de ce point de vue. Mais c'est aussi ce qui explique que c'est très politique. Si c'était un choix purement économique, la promesse de Trump que les pertes de Wall Street seront compensées par la garantie d'une accélération, la croissance serait crédible. En réalité, la véritable promesse est celle de la constitution d'un empire centralisé dont les gains économiques restent incertains.

L'État est la représentation des intérêts collectifs de la bourgeoisie parce que, n'étant qu'une somme de capitaux, elle n'arrive pas à exprimer ses intérêts collectifs…

Exactement. Et alors quand – comme c'est le cas aujourd'hui – il s'agit d'intérêts qui sont divergents entre les secteurs (et je n'ai mentionné que deux grands aspects contradictoires, mais en fait on peut trouver des dizaines d'intérêts divergents à l'intérieur des secteurs), ce qui est intéressant c'est que ces intérêts divergents traduisent aussi ces contradictions, c'est-à-dire les limites de la capacité qu'ils ont aujourd'hui à venir contrer la tendance de fond à l'affaiblissement de la rentabilité.

La présence d'un fou à la direction de l'État permet aussi de prendre des décisions radicales, même si une partie de la bourgeoisie ne les estime pas pertinentes à l'instant T. Il faut un peu d'audace…

Une grande partie du discours capitaliste dominant essaye de nous cacher la gravité de la situation et de nous faire croire qu'il n'y a pas d'alternative. Mais la situation est tellement critique qu'ils ne peuvent tenter de s'en sortir qu'en prenant des décisions radicales qui vont avoir des conséquences pour certains membres de leur classe. Il y a un aspect de désespoir, c'est aussi le symptôme de la crise du régime capitaliste…

Sans parler de la crise écologique…

Je pense qu'on est en crise de régime capitaliste parce que le néolibéralisme, qui était le mode de gestion du capitalisme jusqu'ici, est épuisé et il faut donc trouver un nouveau mode de gestion et un nouveau mode d'hégémonie. C'est là où l'empire remplace le marché, et peut-être que ça ne fonctionnera pas. Dans les périodes de crise, il y a toujours des tâtonnements : au cours de la crise de 1929, il y a une période de protectionnisme qui ne fonctionne pas vraiment, puis le New Deal est en réalité constitué de trois phases : après des avancées et des arrêts, une nouvelle crise conduit à l'idée que la seule solution c'est de produire des chars…

Dans les périodes de crise, il y a naturellement beaucoup de confusion parce qu'on tente des solutions et que ces solutions ne se révèlent pas toujours efficaces et parfois échouent carrément. Aujourd'hui, comme il n'y a que le capitalisme, seuls les capitalistes tentent des choses. Mais si par exemple, dans un monde idéal, les travailleurs se mettaient à tenter des choses, tout ne se ferait pas du jour au lendemain, il y aurait des échecs,1 on reviendrait en arrière, on avancerait…

La vraie singularité de la crise actuelle est à mon avis son caractère multiforme : il y a cette crise économique dont on a beaucoup parlé mais qui – comme tu l'as dit – vient en fait se rajouter à une crise écologique qui est le produit du mode de production. On voit clairement que Trump va mettre à la poubelle toutes les maigres concessions faites à l'écologie et à l'environnement. Pour tenter de sauver le capital.

Dans l'article « Stratégie écosocialiste en période de turbulences », Martin Lallana Santos dit que les sorties de crise du capitalisme nécessitent en général un décuplement de la production énergétique…2

Évidemment. Et encore une fois n'oublions pas que la référence de Trump, c'est la fin du 19e siècle : des puits de pétrole partout. Ce qui est certain, c'est qu'il va mettre à bas les normes écologiques, et pas seulement aux États-Unis. Il va faire pression pour qu'il y ait la même chose en Europe, en Amérique latine et dans tous les pays qui dépendent des États-Unis. D'ailleurs les dirigeants européens commencent déjà à dire qu'ils sont allés trop loin, qu'il y a trop de normes. En réalité, derrière, c'est la destruction écologique parce qu'il ne faut pas oublier que la crise écologique ce n'est pas seulement le réchauffement. C'est la destruction de la biodiversité et la viabilité de notre espèce qui est en cause. La crise écologique est niée parce que la priorité est donnée à l'accumulation.

Il y a aussi la crise sociale, sociétale et anthropologique. La vague réactionnaire ne vient pas de nulle part. Elle vient du fait que la société capitaliste est malade de ce qu'elle a produit, c'est-à-dire de la surconsommation, qui n'a pas que des effets délétères sur l'environnement, elle en a aussi sur les êtres humains qui sont en permanence appauvris par cette surconsommation : plus vous consommez, et plus vous manquez de quelque chose. Ce qu'on a connu avec la crise inflationniste est extrêmement intéressant de ce point de vue. Cette frustration de ne pas pouvoir être dans cette folie consommatrice permanente rend les gens malheureux et en panique. Aux États-Unis, la croissance se fait par l'augmentation des rentes, donc des dépenses contraintes, notamment dans la santé. La marchandisation de la santé est la preuve que croissance et bien-être deviennent des états divergents. C'est un élément qui a en partie déterminé le résultat de l'élection américaine : les démocrates ont fait campagne en s'appuyant sur une croissance à 3 %, dans le New York Times Paul Krugman nous expliquait toutes les semaines que les États-Unis étaient très prospères et qu'il n'y avait aucune raison de se plaindre… mais les gens devaient faire face à ces dépenses contraintes qui augmentent.

Plus globalement, l'injonction à la consommation est fondamentalement insatisfaisante. Trump est cette tentative de sauvegarder un mode de vie intenable avec la fausse promesse qu'elle est un gage de bonheur.
Pendant longtemps le capitalisme occidental a pu dire que le niveau de vie augmentait et que la qualité de vie s'améliorait parce que la production pouvait se concentrer sur la satisfaction de besoins évidents. Et puis à la fin des années 1960 ou au début des années 1970 où on avait à peu près rempli tous les besoins basiques des gens, et même un peu plus, il a fallu quand même continuer à vendre des marchandises. C'est le moment où les besoins des individus sont construits par le capital pour sa propre reproduction. Les besoins des individus sont donc en permanence identifiés aux besoins du capital. C'est ce qui provoque à la fois un désir permanent, de la frustration, et une profonde solitude. Les sociétés vont mal, y compris quand la croissance résiste, et peut-être même surtout quand la croissance résiste ! C'est quelque chose qui fait partie pour moi de la crise globale, un troisième pôle de la crise.

Il y a quelque chose qui est un peu désespérant : quand vous essayez de régler un des pôles de la crise, vous augmentez les deux autres. Si vous essayez de régler la crise économique, comme Trump et les autres dirigeants européens, vous décuplez la crise écologique et les besoins technologiques pour rendre les gens encore plus dépendants et encore plus neurasthéniques… Vous essayez de régler la crise écologique ? Alors là vous pouvez oublier votre croissance et votre accumulation du capital. Vous essayez de régler la crise sociale ? Vous mettez fin à la consommation de masse… En fait vous vous retrouvez dans une espèce d'impasse continuelle et tout ça est lié à un fait central : la société est dominée par le besoin d'accumulation du capital et donc est dépendante des clowns que nous fournit le capital : les Trump, les Macron…

Ça me conforte en tout cas dans le fait que nous sommes entrés – c'est Tom Thomas qui utilise ce terme – dans une phase de sénilité du capitalisme : on est dans un système qui fonctionne de plus en plus mal mais qui survit parce qu'il nous enferme dans des choix impossibles. Les gens envisagent plus la fin du monde que la fin du capitalisme…

On a connu dans le dans le passé de l'humanité la décadence de systèmes sociaux – Rome bien évidemment, mais aussi la République nobiliaire polonaise aux 16e-18e siècle – mais à chaque fois c'était centré sur une région. Mais là on a un système qui a été réellement mondialisé, c'est le capitalisme partout même si ses régimes politiques sont un peu différents. Il y a aussi une tendance du libéralisme à être de plus en plus oppresseur, de moins en moins démocratique, et le système chinois, qui n'est pas un système démocratique et ne l'a jamais été. Dans cette situation il y a des capitaux qui sont au-delà de l'État, il y a des guerres qui sont loin d'être uniquement locales – Ukraine, Palestine/Israël, Congo – mais pour l'instant ce n'est pas un affrontement généralisé. Est-ce que tu penses qu'on peut aller vers un affrontement généralisé pour sortir des contradictions ?

Il y a deux choses dans ce que tu dis sur lesquelles j'aimerais bien revenir. La première, qui est importante, c'est la fin du capitalisme démocratique. Pendant longtemps, on nous a dit que la démocratie a besoin du capitalisme et on n'envisageait pas l'un sans l'autre. Mais l'histoire nous a appris que capitalisme et démocratie, ce n'est pas du tout la même chose, et c'est même parfois contradictoire. Dans un système en crise généralisée, dans une impasse globale, la démocratie est un frein à l'accumulation et on voit partout aujourd'hui qu'on essaie de contourner la démocratie, on essaie d'en faire une coquille vide.

Pour des raisons historiques ça ne prend pas – pas encore – les formes traditionnelles de la dictature classique, mais on vide la démocratie de son sens. Ce que fait Musk est assez intéressant de ce point de vue : ils ne vont pas supprimer les élections, ils vont détruire l'État de droit, prendre le contrôle des médias, faire une démocratie formelle vidée de son sens. Le modèle le plus avancé, c'est la Russie avec un régime qui devient de plus en plus oppressif. On ne peut donc pas exclure que cela débouche sur une dictature classique. Il y a deux choses qui vont dans ce sens. La première est la logique de rente, qui est une logique quasi féodale : ce n'est pas une logique où les gens choisissent, où les individus sont des citoyens, c'est une logique où on doit payer pour des services rendus indispensables… La seconde, c'est la République populaire de Chine. C'est un capitalisme non démocratique et le seul succès capitaliste de notre époque. Je ne suis même pas sûr qu'il y ait quelque chose d'équivalent à la Chine dans l'histoire du capitalisme. Les gens disent donc : si notre problème c'est l'accumulation, on a un exemple sous nos yeux d'un pays qui a réalisé l'accumulation dans des conditions extraordinaires, c'est la Chine, un pays à parti unique.

Concernant la question des guerres : si, effectivement, dans ce régime de basse croissance, le gâteau grossit moins vite, que les parts sont plus difficiles à distribuer et que l'on entend avoir une logique prédatrice sur le peu de valeur créée, alors il faut pouvoir contrôler politiquement un plus grand nombre de parts. Quand en Chine il y avait une croissance de 10 %, la question du contrôle territorial n'était pas importante. Mais quand la croissance est tombée à 5 % officiellement, et peut-être en réalité à 2 ou 3 %, et que la promesse du Parti communiste chinois, c'est le plein-emploi et un niveau de vie équivalent à l'Occident à l'horizon 2050, vous ne pouvez plus vous contenter de votre croissance interne. Il faut donc assurer des ressources et des marchés qui ne soient pas soumis aux aléas de la concurrence. Il faut alors en prendre possession. Cette logique impérialiste c'est le chemin de la Chine, et c'est exactement la même chose pour les États-Unis.

C'est le retour d'un impérialisme brutal, celui de la fin du 19e siècle : le contrôle exclusif du territoire est la clé et l'obsession de Trump pour le Groenland et le canal du Panama, c'est la recherche du contrôle exclusif de ces richesses. On ne peut pas dire que le Danemark soit un danger pour les États-Unis ni un sérieux concurrent, mais Trump ne veut pas prendre de risque et veut un contrôle exclusif. Quand vous êtes dans cette logique de contrôle exclusif, l'affrontement est inévitable… Est-ce que ça débouchera sur un conflit généralisé ? Si on suit la logique globale selon laquelle la guerre est la seule chose qui fonctionne pour relancer l'accumulation, pourquoi pas. En tout cas, les conflits régionaux sont déjà là. Et l'Europe est au centre du problème. Si le vieux continent devient un simple gâteau à se partager entre Washington et Moscou, alors les conflits risquent d'être très violents. L'abandon de l'OTAN par les États-Unis et la soumission d'une garantie de sécurité étatsunienne à une vassalisation peut ouvrir la voie à une expansion russe et à de nouveaux conflits en Europe orientale. Aujourd'hui il n'y a plus de sécurité internationale.

Je ne dis pas que l'OTAN c'était formidable. C'était une autre forme d'impérialisme. Mais là, on est dans autre chose, la seule sécurité que vous avez, c'est d'être un vassal de la métropole et de remplir votre rôle pour la prospérité de cette métropole. C'est ce que Trump dit au Danemark et au Canada : il dit à deux pays alliés : « vous me donnez un morceau de votre territoire sinon j'envoie mes troupes », ou « si vous voulez être tranquilles, vous rentrez et vous ferez partie du centre ».

Et l'Europe dans tout ça ?

On ne voit pas comment l'Europe serait capable de construire quelque chose qui soit capable de contrebalancer la puissance américaine et le chantage américain, parce que l'Europe est en train de payer la facture de son néolibéralisme débridé : elle s'est mise à découvert, elle s'est désindustrialisée, elle s'est affaiblie. Elle a tout misé sur son alliance avec les États-Unis et se retrouve aujourd'hui face à Trump qui lui met le pistolet sur la tempe. Avec une autre puissance impérialiste à ses portes, la Russie, qui va profiter du moindre faux pas pour se jeter sur elle. Et la Chine impérialiste qui n'attend que de récupérer le marché européen.

On est dans une situation complexe, sans dynamique économique, des sociétés complètement fracturées, des partis d'extrême droite qui jouent pour les Américains ou pour les Russes, ou pour les deux. On est clairement dans une phase de déclin.

Le 4 février 2025. Propos recueillis par Antoine Larache et Jan Malewski.

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Les Guerrières de la Paix

10 juin, par Les Guerrières de la Paix — , ,
Les Guerrières de la Paix est un mouvement de femmes pour la Paix, la Justice et l'Egalité (association loi de 1901). Créé en France en 2022, ce mouvement réunit des femmes (…)

Les Guerrières de la Paix est un mouvement de femmes pour la Paix, la Justice et l'Egalité (association loi de 1901).

Créé en France en 2022, ce mouvement réunit des femmes de toutes sensibilités, cultures, croyances et origines. La reconnaissance de l'autre à la fois dans son identité et dans son altérité constitue la condition du dialogue véritable et de la sororité, ciments de nos combats.

Nous luttons contre toutes les formes de haine qui traversent la société française, et notamment le racisme, l'antisémitisme, l'islamophobie, la haine anti-LGBTQI+ …

Au-delà de nos frontières, nous sommes mobilisées partout où les droits des femmes sont menacés, et les droits humains bafoués. Ukrainiennes, Ouighours, Iraniennes, Palestiniennes, Israéliennes, Russes, Rwandaises, leurs combats sont aussi les nôtres.

À l'initiative du premier Forum Mondial des Femmes pour la Paix, nous, les Guerrières de la Paix, nous sommes données pour mission de promouvoir le rôle des femmes dans le processus de Paix pour faire émerger ces autres voix et d'autres futurs, basés sur la Paix, la Justice et l'Égalité.

*-*
Notre manifeste

Notre pays est traversé depuis des décennies par de graves crises à la fois sociales et sociétales qui ont bouleversé notre capacité à vivre ensemble mais aussi à débattre et donc à appréhender sereinement les défis qui se posent à nous. Différents « camps » s'affrontent de plus en plus violemment et il n'y a presque plus de place pour l'écoute, le doute et la contradiction. Pourtant, nous devons ensemble faire face à la montée des tensions identitaires et des extrémismes, autant qu'aux enjeux écologiques et aux inégalités sociales qui s'aggravent.

Face à ces dérives et à ces crispations, face à la montée des discriminations, du racisme, de l'antisémitisme, de la haine des musulmans, du sexisme et de l'homophobie, la réponse que nous souhaitons porter est celle de la voix des femmes. Nous sommes un groupe de femmes d'origines, de croyances, de milieux sociaux, d'âges et de sensibilités diverses. Grâce à ces différences mais aussi malgré elles nous avons décidé de nous unir.

Toutes engagées sur différents terrains, confrontées dans notre quotidien à ces réalités. Nous mesurons chaque jour l'ampleur des dégâts et nous avons décidé d'unir nos voix et nos forces pour offrir une nouvelle alternative. Chaque jour, nous nous battons, nous sommes sur le front, nous apportons des solutions, nous ouvrons des espaces de débats là où plus personne n'essaye d'ouvrir les champs du possible.

Nous voulons rendre visibles toutes ces guerrières du quotidien, ces héroïnes invisibles qui déplacent des montagnes chaque jour, anonymement, silencieusement. Elles sont celles qui partout retissent l'espoir et nos derniers remparts face aux haines qui nous menacent.

Nous sommes les Guerrières de la Paix, animées d'une volonté farouche d'essaimer notre désir de dialogues, de débats, d'écoute sur l'ensemble du territoire. Toutes engagées dans un combat d'égalité et de justice sociale, nous savons que nos engagements en tant que femmes ne peuvent faire l'impasse sur les questions fondamentales que sont le racisme et l'antisémitisme, mais aussi le sexisme, l'homophobie et toutes les formes d'exclusion.

Nous sommes les Guerrières de la Paix. Femmes engagées dans nos métiers, dans nos quartiers, dans nos associations, dans nos familles, nous voulons avec nos différences faire la démonstration qu'il est possible et urgent de créer partout en France, des espaces de dialogues sincères et apaisés.

Notre mouvement des Guerrières de la Paix veut rétablir et garantir à chaque persécuté.e sa légitimité. Il sera le lieu de la reconnaissance de toutes les souffrances, de toutes nos mémoires et le refus de leur opposition ou mise en concurrence.

Chaque fois qu'une personne sera agressée, stigmatisée, rejetée, humiliée, privée de son droit à la dignité, nous nous lèverons d'une seule voix, telle une armée au service de l'humanisme, de la fraternité, de la sororité, de la solidarité.

Chaque fois que nous sentirons l'instrumentalisation de nos peurs et de nos différences, nous parlerons au nom de l'avenir, celui de notre pays et de tous ses enfants.

Chaque fois que nous constaterons l'absence de résistance, de contestation, d'indignation quand quelqu'un.e sera ciblé.e en raison de ce qu'il est ou de ce en quoi il croit, nous réagirons, liguées contre ceux qui pensent que les limites peuvent toujours être repoussées.

Nous lançons cet appel, ce cri d'urgence, à toutes celles capables de prendre le risque de participer au changement, de remettre en jeu ses certitudes, de venir partager, dialoguer et se battre à nos côtés.

Il y a urgence à réunir nos forces face aux dangers qui nous guettent.

Ensemble nous sommes plus fortes !

https://www.lesguerrieresdelapaix.com

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Marche pour GAZA : GRANDE MANIFESTATION, 14 juin, 13 h 30, à Montréal

10 juin, par Coalition du Québec URGENCE Palestine — , ,
EN MARCHE, LE SAMEDI 14 JUIN ENSEMBLE, EN ROUGE, EN SOLIDARITÉ DÉPART À 13 h 30, Place Norman-Bethune (métro Guy-Concordia) Un regroupement large d'organisations de la (…)

EN MARCHE, LE SAMEDI 14 JUIN
ENSEMBLE, EN ROUGE, EN SOLIDARITÉ
DÉPART À 13 h 30, Place Norman-Bethune (métro Guy-Concordia)

Un regroupement large d'organisations de la société civile, syndicales et humanitaires, dont la Coalition du Québec URGENCE Palestine, lance un appel conjoint à une grande manifestation, samedi à Montréal, en solidarité avec le peuple palestinien. Le texte de la bannière de tête de la manifestation sera : « Gaza : Un peuple assassiné, nous refusons d'être complices ». Les participantes et participants sont invités à se vêtir de rouge pour symboliser les nombreuses lignes rouges franchies par Israël à Gaza, et appeler le Canada à passer de la parole aux actes maintenant.

Nous invitons les organisations membres et sympathisantes de la Coalition de la grande région de Montréal à se regrouper derrière la bannière de la Coalition et à se munir de pancartes dénonçant le génocide à Gaza et exigeant que le Canada impose des sanctions sévères contre Israël maintenant : embargo bilatéral sur tout matériel militaire, actions devant les cours internationales, résiliation des ententes économiques et militaires, imposition de sanctions, ruptures des relations diplomatiques, etc.

Pour ajouter le nom de votre organisation à la liste des organisations appuyant la manifestation, remplissez ce formulaire.

Solidairement !

Coalition du Québec URGENCE Palestine

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Sisters in Islam (SIS)

Sisters in Islam (SIS) est une organisation non gouvernementale qui œuvre à la promotion des droits des femmes musulmanes en Malaisie. Tiré de Entre les lignes et les mots (…)

Sisters in Islam (SIS) est une organisation non gouvernementale qui œuvre à la promotion des droits des femmes musulmanes en Malaisie.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/06/03/sisters-in-islam-sis/?jetpack_skip_subscription_popup

Notre histoire

SIS a été fondée en 1988 par un groupe de femmes musulmanes qui se sont réunies pour lutter contre l'injustice à laquelle les femmes sont confrontées dans le cadre du système de la charia (loi islamique). Notre lecture critique du Coran à travers une approche herméneutique a ouvert un monde islamique que nous pouvions reconnaître : un monde pour les femmes rempli d'amour et de miséricorde, d'égalité et de justice.

À la fin des années 1990, l'activisme du SIS s'est étendu au-delà des questions spécifiques des droits de la femme, à la question plus large de la défense des principes démocratiques et des libertés fondamentales garantis par la Constitution fédérale et les traités et conventions sur les droits de l'homme. C'est ainsi que le SIS a commencé à prendre des positions publiques sur la liberté de religion et la liberté d'expression.

Aujourd'hui, le SIS joue un rôle clé dans le mouvement local et international des femmes en apportant une contribution à la compréhension de l'islam dans une perspective fondée sur les droits, des stratégies de défense et de mise en réseau, et il est à la pointe d'un mouvement émergent de femmes musulmanes visant à pousser à la réforme à la fois dans la compréhension de l'islam et à influencer les lois et les politiques promulguées par les gouvernements musulmans ou les groupes au sein des communautés musulmanes minoritaires.

Notre mission est de promouvoir les principes d'égalité des sexes, de justice, de liberté et de dignité dans l'Islam et de donner aux femmes les moyens d'être les avocates du changement.

Nous envisageons une société progressiste et démocratique qui défend la liberté d'expression, l'égalité des sexes et la justice sociale pour tous et toutes. Nous voulons être reconnues comme le leader national et mondial de l'égalité des sexes et de la justice dans l'Islam.

Nos activités


Défense

La principale activité de SIS est la réforme des lois et des politiques. Nous nous sommes engagées auprès des décideurs politiques, des médias, des ONG et des groupes de femmes de la base. Nous avons formé des coalitions et mené des campagnes pour améliorer les lois et les politiques et sensibiliser le public à toute une série de questions telles que les questions relevant de la loi islamique sur la famille, c'est-à-dire la polygamie, l'égalité des droits à la tutelle des enfants et d'autres questions telles que la police morale, la loi hudud, la liberté de religion et la liberté d'expression.

Recherche

La recherche a constitué la base des arguments du SIS pour la réforme juridique, l'introduction de nouvelles politiques et la contestation des déclarations faites au nom de l'Islam qui discriminent les femmes et violent les enseignements éthiques de la religion. La recherche a également servi directement les activités de défense de SIS. En 2006, le SIS s'est engagé dans deux grands projets de recherche en cours dans les domaines de la réforme du droit musulman de la famille et de l'impact de la polygamie sur la vie familiale.

En outre, le SIS s'est lancé dans un projet mondial de recherche et de défense de la réforme du droit de la famille islamique. Baptisé MUSAWAH, ce mouvement mondial pour l'égalité et la justice dans la famille musulmane a été lancé en février 2009. En 2014, le SIS, en partenariat avec ARROW, s'est lancé dans un projet de recherche intitulé « Fondamentalismes religieux et santé et droits sexuels et reproductifs dans le Sud ». Le titre du document de recherche est « Rapport national sur la Malaisie. Le mariage des enfants : sa relation avec la religion, la culture et le patriarcat ». Le projet a été achevé en avril 2018.

Sensibilisation et autonomisation

La principale activité de SIS porte sur la réforme des lois et des politiques. Nous nous sommes engagées auprès des décideurs politiques, des médias, des ONG et des groupes de femmes de la base. Nous avons formé des coalitions et mené des campagnes pour améliorer les lois et les politiques et sensibiliser le public à toute une série de questions telles que les questions relevant de la loi islamique sur la famille, c'est-à-dire la polygamie, l'égalité des droits à la tutelle des enfants et d'autres questions telles que la police morale, la loi hudud, la liberté de religion et la liberté d'expression.

Conseil juridique

SIS fournit des services de conseil juridique gratuits aux femmes et aux hommes sur leurs droits légaux en vertu de la loi islamique sur la famille et de la loi sur les infractions pénales de la Syari'ah. Notre permanence juridique, appelée Telenisa, fonctionne tous les mardis, mercredis et jeudis de 10h00 à 17h00 (sauf les jours fériés).

En savoir plus sur nos travaux
Violence contre les femmes
Impact de l'extrémisme sur les femmes

Droit musulman de la famille

Cadre universel des droits des êtres humains
https://sistersinislam.org/who-we-are/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

[Malaysia, Sisters in Islam (SIS)->https://sistersinislam.org/who-we-are/]
https://andream94.wordpress.com/2025/06/03/malaysia-sisters-in-islam-sis/

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Les comités logement solidaires des grévistes de la construction résidentielle

10 juin, par Collectif — , ,
Cette après-midi, une coalition de comités logement ont tenu une conférence de presse le à Sherbrooke pour but d'exprimer sa solidarité avec les grévistes de la construction (…)

Cette après-midi, une coalition de comités logement ont tenu une conférence de presse le à Sherbrooke pour but d'exprimer sa solidarité avec les grévistes de la construction résidentielle et de dénoncer la campagne de dénigrement de la grève menée par le gouvernement.

« Nous sommes ici aujourd'hui en tant que coalition d'organisations qui sont en première ligne de la crise du logement, pour dire que la lutte des travailleurs de la construction résidentielle pour de meilleurs salaires et conditions de travail est intimement liée à notre lutte pour le droit au logement. En tant que comités pour le droit au logement, nous avons vu le gouvernement de la CAQ fournir toutes les excuses possibles pour masquer sa responsabilité dans la crise actuelle du logement. Il a d'abord blâmé les migrants, puis les communautés de la classe ouvrière en disant qu'elles n'étaient pas assez avisées dans leurs investissements, et maintenant, il blâme les travailleurs.” Nicholas Harvest, membre du Comité d'action des
Citoyennes et Citoyens de Verdun (CACV).

Les travailleurs de la construction résidentielle, en grève depuis deux semaines, réclament des augmentations de salaire de 22 % et de meilleures conditions de travail. L'Alliance syndicale, qui regroupe tous les syndicats de la construction au Québec et représente les travailleurs de la construction résidentielle en grève, a envoyé une délégation à Sherbrooke pour soutenir la
conférence de presse.

« L'événement d'aujourd'hui démontre une fois de plus que lorsque des liens transversaux se créent entre divers secteurs de lutte, la solidarité pousse nos causes plus loin. C'est pourquoi l'Alliance syndicale de la construction tient à remercier chaleureusement le Comité d'action des Citoyennes et Citoyens de Verdun (CACV), le Comité BAILS, le Comité d'action de
Parc-Extension (CAPE) et la Ligue 33 pour leur soutien envers les grévistes de la construction résidentielle. » affirme Alexandre Ricard, porte-parole de l'Alliance syndicale de la construction, qui malheureusement ne pouvait pas être présent pour la conférence. Il continue : « Sans des conditions salariales à la hauteur, il sera impossible pour les travailleurs
et travailleuses du secteur résidentiel de construire le Québec de demain et de répondre aux besoins criants en matière de logement de la population »

La coalition appuie pleinement les revendications de l'Alliance et des grévistes du secteur résidentiel, et dénonce les tactiques de négociation de mauvaise foi de l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec (APCHQ). Ils retardent les progrès à la table de négociation, ils diffusent des informations erronées sur la grève qui ont Samedi 7 Juin 2025
conduit à des agressions et à des tensions accrues sur les lignes de piquetage, et prétendent que l'Alliance prend en otage la population et le marché de logement.

« L'APCHQ attend que le gouvernement intervienne avec une loi spéciale. Le ministre du Travail, Jean Boulet, a déjà menacé de l'enforcer sur la grève. Au lieu de dénoncer la négociation de mauvaise foi de l'APCHQ, la CAQ se range de leur côté et blâme les travailleurs pour l'explosion du prix des logements, qui est en réalité causée par les grands promoteurs et
les spéculateurs », déclaré Lewis-King, qui est un charpentier-menuisier et porte-parole de la Ligue 33, une organization de cartier en Mercier-Hochelaga-Maisonneuve. Il poursuit : « Les patrons prétendent que l'augmentation de salaire demandée par les travailleurs de la construction résidentielle fera augmenter le prix d'une maison de 55 000 dollars. Cela ne tient pas la route. Depuis 2020, le prix d'une maison individuelle a augmenté de 73 %, mais les salaires dans la construction résidentielle n'ont augmenté que de 8,2 % depuis la dernière convention collective en 2021. La différence est allée dans les poches des patrons sous forme de profit. »

La CAQ a promis plus de logements et plus d'investissements dans le marché pour résoudre la crise du logement, mais nous considérons qu'il s'agit de promesses vides qui ne profiteront qu'aux investisseurs, aux spéculateurs et aux promoteurs immobiliers. Pour s'attaquer correctement à la crise du logement et à ses racines, la coalition revendique pour :
➢ Un gel total des loyers.
➢ La construction de 10 000 unités de logement social par an afin que 20 % du marché locatif devienne socialisé.
➢ L'élaboration d'un programme pérenne et autoportant dédié à la création du logement social qui perdure dans le temps et qui inclura un capital de démarrage au début des projets communautaires.

« Les locataires de notre communauté font face aux plus fortes augmentations de loyer depuis 30 ans, et la ministre du Logement, France-Élaine Duranceau, propose de nouveaux règlements qui entraîneront des augmentations de loyer encore plus abusives dans les années à venir. Ces nouveaux règlements sont un cadeau pour les propriétaires et un cauchemar
absolu pour les locataires, et ils entraîneront encore plus d'expulsions et de sans-abri » déclare Amy Darwish, du Comité d'Action de Parc Extension. Elle poursuit : « La crise du logement affecte de manière disproportionnée les travailleurs -
Québécois, immigrés, migrants - nous le voyons tous les jours à Parc Extension. Pour répondre aux besoins des gens en matière de logement, il est essentiel de s'assurer qu'ils ont des salaires suffisants pour pouvoir traverser cette tempête. C'est pour ces raisons que nous soutenons les travailleurs de la construction qui vivent dans nos communautés et qui sont
essentiels pour continuer de les construire. »


Organizations

Le Comité d'action des Citoyennes et Citoyens de Verdun (CACV) : Le Comité d'action des
Citoyennes et Citoyens de Verdun (CACV) est un comité logement qui intervient dans la
communauté verdunoise depuis 1975. Ils offrent des services d'informations aux locataires sur
leurs droits en matière de logement, et mobilisent pour accroître l'offre en logement social dans
notre quartier.

Comité BAILS : Créé en 1993, le Comité de base pour l'action et l'information sur le logement
social d'Hochelaga-Maisonneuve (Comité BAILS HM) contribue à la promotion du logement
social et la défense collective des droits des mal-logés. Leur mission est de promouvoir avec
leur membres le logement social et la défense collective des droits des mal-logés.

Comité d'action de Parc-Extension (CAPE) : Le Comité d'action de Parc-Extension (CAPE) est
le comité logement du quartier Parc Extension. Il informe les citoyen-ne-s sur les droits et
recours en matière de logement. Le CAPE mène également des campagnes de sensibilisation
sur la nécessité et l'importance du logement social.

Ligue 33 : La Ligue 33 est un regroupement dédié à l'amélioration de la qualité de vie dans l'est
de Montréal

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La SPCA de Montréal dénonce l’inaction du gouvernement face aux fermes à fourrure

10 juin, par SPCA Montréal — , ,
Montréal, le 3 juin 2025 – Selon des documents obtenus [1] par la SPCA de Montréal [2] via une demande d'accès à l'information, des membres du personnel du ministère de (…)

Montréal, le 3 juin 2025 – Selon des documents obtenus [1] par la SPCA de Montréal [2] via une demande d'accès à l'information, des membres du personnel du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec (MAPAQ) signalent, depuis 2022, que les conditions dans lesquelles sont élevés les renards et les visons pour la fourrure au Québec « ne répondent pas aux impératifs biologiques des animaux ».

Dans un courriel datant d'octobre 2023, une conseillère en règlementation du ministère affirme que « l'industrie est en déclin, présente une acceptabilité sociale très faible et n'assure pas le bien-être de ces animaux ». S'adressant à la directrice de la salubrité alimentaire et du bien-être des animaux, elle lui demande sa collaboration en vue de « trouver une solution la plus rapide et efficace possible » pour interdire cette industrie au Québec. En réponse à ces révélations, la SPCA somme le gouvernement d'agir rapidement pour mettre fin à la souffrance des animaux élevés pour leur fourrure.

Un rapport faisant état de la situation produit en 2022 par le MAPAQ se conclut avec la recommandation suivante : « Le moment serait tout à fait indiqué pour interdire cette pratique avec des conséquences économiques nulles pour l'industrie. » Les documents précisent qu'« [a]ucune mesure [d'atténuation] n'est possible en fonction des impératifs biologiques des animaux » et que « [c]es animaux ne peuvent pas être gardés dans un contexte d'élevage intensif en respectant leur bien-être. »

« Pourtant, rien n'a bougé dans ce dossier », déplore Me Sophie Gaillard, directrice de la défense des animaux et des affaires juridiques et gouvernementales à la SPCA de Montréal. « Considérant que le MAPAQ lui-même estime que l'élevage d'animaux pour leur fourrure est incompatible avec le bien-être animal et devrait être interdit, il est inadmissible que le gouvernement n'ait pas encore agi. »

Le Québec serait la deuxième province à interdire cette pratique

Plus d'une quinzaine de pays à travers le monde ont déjà interdit les fermes à fourrure. Au Canada, la Colombie-Britannique est devenue la première province à interdire l'élevage de visons pour leur fourrure en 2021. La majorité des Québécois.es souhaitent la fermeture de ces installations au Québec*. À l'occasion d'un débat électoral provincial [3] sur la protection des animaux organisé par la SPCA en 2022, les trois partis d'opposition, soit le Parti libéral du Québec, le Parti Québécois et Québec solidaire, s'étaient engagés à interdire l'élevage de renards et de visons pour leur fourrure.

*Sondage en ligne effectué par Léger pour le compte de TACT auprès de 1015 Québécois et Québécoises du 6 au 9 mai 2022.

Une industrie en déclin

L'industrie de la fourrure, et particulièrement de l'élevage des animaux pour leur fourrure, est en déclin, et ce, à l'échelle mondiale. Le Québec ne fait pas exception : alors qu'en 1982 on enregistrait 226 fermes d'élevage en sol québécois, en 2022, on n'en comptait plus que trois**. Mais à elles seules, ces trois fermes font encore souffrir des milliers d'animaux.

La SPCA de Montréal invite la population à signer une lettre [4]adressée au gouvernement provincial pour réclamer l'interdiction rapide des fermes à fourrure au Québec.

**Statistique Canada, Bilan des visons et renards dans les fermes d'élevage et nombre de fermes (Tableau 32-10-0116-01) (2021), en ligne : https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/tv.action?pid=3210011601 [5] ;

Statistique Canada, Certains types de bétail et volailles, données chronologiques du Recensement de l'agriculture [6] (Tableau
32-10-0155-01) (2022), en ligne : https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/cv.action?pid=3210015501&request_locale=fr
[7].

[4]

Extraits d'un rapport*** faisant état de la situation produit en 2022 par le MAPAQ

* « Les conditions de gardes ne répondent pas aux impératifs biologiques des animaux. »
* « Garde sur plancher entièrement grillagés dans des conditions d'hygiène pauvres. »
* « L'environnement est très appauvri et ne peut répondre aux besoins de stimulation de prédateurs intelligents. »
* « L'accumulation de fèces et autres odeurs présente un irritant olfactif constant. »
* « Impossibilité pour les animaux d'exprimer des comportements normaux. »
* « Les bâtiments ne sont pas chauffés ce qui peut rendre l'accès à l'eau difficile en hiver. »
* « L'abattage se fait par inhalation pour les visons et par électrocution rectale pour les renards. […] le stress et la douleur
subis par l'animal dans les minutes précédant cette perte de conscience apparaissent comme très élevés. »

Source : SPCA de Montréal, www.spca.com [2]

Fondée à Montréal en 1869, la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (mieux connue sous le nom de « SPCA de Montréal ») fut la première organisation vouée au bien-être animal au Canada. La SPCA de Montréal a parcouru un long chemin depuis sa fondation : elle est maintenant le plus grand organisme de protection des animaux au Québec, s'exprimant au nom des animaux partout où règnent l'ignorance, la cruauté, l'exploitation ou la négligence à leur
endroit.

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Le continuel chantage à l’antisémitisme

10 juin, par Jean-François Delisle — , ,
Dans l'édition de la fin de la fin de semaine des 31 mai et 1er juin dernier, le billettiste Joseph Facal reprend la rengaine de l'antisémitisme. Il utilise tous les clichés de (…)

Dans l'édition de la fin de la fin de semaine des 31 mai et 1er juin dernier, le billettiste Joseph Facal reprend la rengaine de l'antisémitisme. Il utilise tous les clichés de circonstance, en particulier le plus commode qui consiste à confondre l'antisionisme et l'antisémitisme.

Il utilise la caution intellectuelle de l'essayiste français Alain Finkielkraut pour établir une continuité douteuse entre l'antisionisme et l'antisémitisme, celui-ci défini comme "l'hostilité envers les Juifs, tous les Juifs, où qu'ils soient, moins pour ce qu'ils font que pour ce qu'ils sont, parce qu'ils existent tout simplement."

Ìl n'y a pas moyen de discuter du conflit israélo-palestinien pour ce qu'il est, c'est-à-dire la lutte d'un peuple dépossédé (les Palestiniens) par un autre, certains Juifs, au nom d'une prétendue antériorité qui remonterait à l'Antiquité. Les partisans de l'État hébreu ressortent toujours l'argument éculé de "l'antisémitisme" pour discréditer les partisans de la cause palestinienne.
Il faut le répéter encore et encore : les Juifs ne sont pas une ethnie (des "Sémites"), mais les adhérents à une religion et une philosophie spécifiques, l'un et l'autre ni plus ni moins respectables que les autres croyances. Une mauvaise foi (c'est le cas de le dire) ressort de cette accusation de racisme contre les Juifs et les Juives. Ces derniers forment pas davantage une ethnie que les chrétiens et les musulmans. Il vaudrait mieux parler d'antijudaïsme.

Evidemment, cela n'excuse nullement les persécutions dont Juifs et Juives ont longtemps été l'objet, mais cette situation ne légitime en rien l'établissement forcé de l'État hébreu au détriment de la population palestinienne vivant depuis toujours dans le pays qui allait devenir Israël.

Donc, n'en déplaise à Facal et Finkielkraut, il faut maintenir la distinction entre antijudaïsme et antisémitisme. Les antijudaïstes sont tous opposés par principe à l'État hébreu, mais les antisionistes ne sont pas hostiles aux Juifs, loin de là. Défendre le droit à l'autodétermination des Palestiniens et Palestiniennes, y compris s'il exerce par le recours aux armes, n'a aucun rapport avec la haine des Juifs. Certains de ceux-ci sont même antisionistes au nom de considérations religieuses, philosophiques (ils croient que le sionisme trahit l'authentique judaïsme) ou simplement démocratiques. Y aurait-il donc des Juifs antisémites ? Monsieur Facal a-t-il déjà entendu parler de PAJU (Palestiniens et Juifs unis) ?

Le sionisme est une idéologie nationaliste soutenant que les Juifs ont le droit de revenir s'établir sur la terre où auraient vécu leurs lointains ancêtres et dont ils auraient tous été chassés par les Romains. Les "Arabes", selon cette thèse, auraient alors comblé le "vide" ainsi créé. Outre qu'elle ne résiste pas à une analyse historique rigoureuse, elle néglige le fait que les "Arabes" avaient des droits acquis de longue date lorsque des Juifs d'origine européenne surtout, tenants du sionisme, ont débarqué en Palestine et commencé à la coloniser au début du vingtième siècle. Une entreprise qui a provoqué, comme on pouvait le prévoir, l'opposition et la résistance de la population locale, un phénomène bien compréhensible et qui dure encore. Comme on l'a déjà fait remarquer, il s'agit d'une nouvelle guerre de Cent ans, et qui ne paraît pas près de finir, vu l'expansionnisme israélien.

Facal et ses semblables reprennent toujours l'idée reçue du droit à l'autodéfense d'Israël devant la résistance palestinienne. Ils nient donc le droit à la lutte armée de la population palestinienne en Cisjordanie occupée et de celle en exil. Ils reprennent la vieille tactique qui consiste à délégitimer sa lutte de libération en la criminalisant. Ils passent sous silence que la notion de terrorisme est hautement partisane ; en effet, on est toujours le résistant ou le terroriste de quelqu'un, tout dépendant du point de vue. Au cours de l'Occupation en France, les nazis qualifiaient les maquisards de "terroristes".
Facal ne prend même pas la peine de se pencher sur tout le contexte qui a poussé le Hamas à lancer son offensive du 7 octobre 2023. Elle avait pourtant des motivations valables et considérées comme urgentes par les responsables du mouvement (élu en 2007). De toute manière, Nétanhayou (une "honte nationale" selon Facal) n'innove pas en ce qui concerne les tueries de Palestiniens, résistants comme civils. Il ne fait que reprendre une vieille tradition israélienne, qui remonte en réalité à l'époque où des organisations clandestines juives terrorisaient la population palestinienne pour la pousser à quitter sa terre natale, ce qui fut hélas, largement réussi. Cette violence israélienne antipalestinienne s'est poursuivie par la suite. L'actuel premier ministre israélien ne doit donc pas être vu comme le premier ni le seul responsable des massacres de Palestiniens.

Au cours de toutes ces décennies de guerres épisodiques, infiniment plus de Palestiniens ont perdu la vie ou ont été estropiés par les initiatives militaires israéliennes que l'inverse, ce qui n'a jamais empêché la plupart des classes politiques occidentales (et en particulier l'américaine) de continuer à appuyer cet État oppresseur.

On peut donc parler d'un racisme très réel celui-là, le racisme antipalestinien. Il se cachait (et se dissimule encore) derrière l'argument de la défense du "seul État démocratique du Proche-Orient". Il y en aurait long à dire sur ce jugement de politiciens et d'idéologues vis-à-vis de sociétés dont l'échelle de valeurs diffère de la nôtre. Ils présentent toujours Israël comme un bijou démocratique fiché dans une mer de boue arabe. Les dirigeants occidentaux soutiennent en fait le nationalisme sionisme et non la supposée démocratie israélienne.

On peut conclure de cet examen, plutôt sommaire j'en conviens, que ce qui alarme Finkielkraut, Facal et les autres sionistes occidentaux, est le retournement qu'on observe en Occident du côté des opinions publiques en faveur de la cause palestinienne ; même des classes politiques (comme au Canada, en France et en Grande-Bretagne) ne peuvent plus dissimuler leur embarras devant les excès commis par le cabinet Nétanyahou à Gaza. En Israël, une partie de l'opinion publique s'inquiète de la brutalité de la répression dont fait preuve son gouvernement, laquelle entraîne une baisse évidente de la sympathie des Occidentaux à l'endroit de leur pays. Cette montée de l'esprit critique à l'égard d'Israël pousse les sionistes comme Facal et Finkielkraut à dépoussiérer l'argument usé à la corde de "la haine des Juifs". En fait de malhonnêteté intellectuelle, on peut difficilement trouver pire.

Le retournement des opinions publiques occidentales en faveur des Palestiniens et Palestiniennes annonce peut-être un changement politique décisif.

Il faut plutôt attaquer la haine larvée qui a longtemps sévi chez beaucoup de gouvernements occidentaux à l'encontre de la nation palestinienne.

À quand un commentaire de Joseph Facal à ce sujet ?

Jean-François Delisle

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L’Ukraine, premier domino d’une guerre impérialiste ?

L'entrevue qu'a donnée, en début juin à LCI, le commandant suprême de l'OTAN pour la transformation militaire permet d'éclairer plusieurs zones d'ombres de ce conflit qui (…)

L'entrevue qu'a donnée, en début juin à LCI, le commandant suprême de l'OTAN pour la transformation militaire permet d'éclairer plusieurs zones d'ombres de ce conflit qui pourrait durer longtemps.
L'amiral Pierre Vandier fait partie de la contribution française à l'OTAN réunissant 32 pays, d'une population totale d'un milliard de personnes. Ce militaire a été sur plusieurs scènes de combat en Yougoslavie, au Mali, en Libye, en Afghanistan et dans la guerre du golf.

L'OTAN déclassée

En fait, l'OTAN se serait endormie sur ses lauriers quand le mur de Berlin est tombé. Bien qu'à la fin de la guerre froide, elle avait un outil militaire complet qui allait de la basse intensité jusqu'au nucléaire, les problèmes de sécurité, telle l'intervention en l'Afghanistan après le 11 septembre, ne nécessitaient pas d'avoir d'importantes quantités de soldats prêts au combat avec un gros stock de munitions.

Pendant ce temps, la Russie a gardé ses habitudes de l'URSS. « La Russie est restée une puissance militaire. Finalement, la chute du mur n'a pas été un grand désinvestissement », explique Pierre Vandier. La meilleure industrie d'armement du monde se demandait pourquoi elle devrait soudainement se mettre à fabriquer des casseroles. Elle a donc continué à entretenir un appareil militaire de bonne qualité, accumulant des stocks considérables. L'actuelle économie de guerre daterait de l'arrivée de Poutine au pouvoir. Les Russes se sont mis à développer des outils et à moderniser leurs vieux matériels permettant d'opérer sous le seuil nucléaire. Ils ont toujours des Tupolev de la guerre froide. Poutine peut aussi reprendre de vieux chars des années 70 et les envoyer au combat. « C'est un pays qui a une vraie profondeur stratégique militaire. » Aujourd'hui, les Russes ont en plus des bombes planantes et des drones.

L'OTAN a brutalement découvert en février 2022 que la Russie restait une force militaire de premier plan qui est prête à envoyer des centaines de milliers de soldats au combat et acceptait de perdre 1000 hommes par jour. Elle tenterait donc de développer sa dissuasion conventionnelle pour pouvoir à nouveau manœuvrer sous le seuil nucléaire. L'amiral explique aussi pourquoi l'économie russe qui est 25 fois moins importante que celle des pays de l'OTAN arrive pourtant à produire quatre fois plus de munitions. « Il (Poutine) paie ses ingénieurs comme des ouvriers, il ne paie pas ses ouvriers. C'est une nation en arme. Aujourd'hui, c'est une guerre existentielle pour la Russie. »

Innover pour gagner

L'amiral décrit ainsi ce qui se passe depuis 2022. « Ils (les Russes) ont réussi à imposer leur style de guerre à l'Ukraine. C'est une guerre qui a finalement une tête de guerre de 14 avec une technologie du 21e siècle. Ça reste du sang et de l'acier. » Les stratégies innovantes ont cependant été payantes. La récente opération Spiderweb aurait détruit plus d'une dizaine d'avions de détection lointaine et stratégique, selon un responsable de l'OTAN. Avec des drones de 500 euros, les Ukrainiens ont réussi à faire flamber des avions qui en coûtent des centaines de millions. « Ce n'est pas nouveau dans l'histoire militaire. Vous vous souvenez de la guerre de Troie, on a pris un cheval en bois, l'a mis à l'intérieur d'une citée et finalement on à réussi à faire avec 10 hommes ce qu'il fallait faire avec 10 000. C'est ça l'art de la guerre. » L'OTAN met aussi en pratique cette idée et opère actuellement en mer baltique 70 drones de surface sans pilotes, pour expérimenter le contrôle maritime avec des drones.

La Russie n'arrêtera pas

L'Ukraine ne serait que le premier domino. L'analyste militaire allemand Carlo Masala imagine dans son récent livre « La Guerre d'après », une attaque russe en 2028 sur Narva, en Estonie. Selon le spécialiste de l'analyse géopolitique, Bruno Tertrais, cette fiction est suffisamment convaincante pour sonner l'alarme. Pierre Vandier croit aussi que ce qui se passe en Ukraine tourne autour de l'impérialisme. « Aujourd'hui, la vision des Russes est une vision où on parle de sphère d'influence, de peuples dominés. La notion de frontière n'a pas de sens. » Il y aurait aussi une asymétrie totale entre la Russie et l'OTAN au niveau de la notion de sacrifice. Comme ils l'ont montré durant la Deuxième Guerre mondiale, les Russes savent souffrir en masse. « Tout le monde a compris qu'il faisait face à une menace à long terme avec la Russie et que ça n'allait pas s'arrêter demain », commente l'amiral.

À ce sujet, l'inspecteur général de la Bundeswehr, Carsten Breuer, a récemment déclaré que la Russie pourrait être en mesure de lancer une attaque à grande échelle contre le territoire de l'OTAN, à partir de 2029. L'Allemagne tenterait donc de recruter de 50 000 à 60 000 soldats supplémentaires au cours des prochaines années, selon le ministre de la Défense allemand Boris Pistorius. Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, vient aussi de proposer que les 32 pays de l'Alliance consacrent à leur défense 5 % de leur produit intérieur brut (PIB), dont 3,5 % à des dépenses exclusivement militaires. Les pays de l'OTAN devraient donc revenir aux dépenses militaires du temps de la guerre froide, espérant que ce sera suffisant pour dissuader les Russes de reconquérir les morceaux perdus de l'URSS.

Michel Gourd

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Pour une campagne contre le réarmement, les guerres et l’impérialisme

10 juin, par Gippò Mukendi Ngandu — , ,
Nous entrons dans une nouvelle ère. Le retour de Trump à la Maison-Blanche est si perturbateur qu'il provoque la crise historique des relations transatlantiques telles qu'elles (…)

Nous entrons dans une nouvelle ère. Le retour de Trump à la Maison-Blanche est si perturbateur qu'il provoque la crise historique des relations transatlantiques telles qu'elles s'étaient constituées après la Seconde Guerre mondiale. La nouvelle administration républicaine et réactionnaire entend profiter de la nouvelle situation de « chaos géopolitique » pour relancer le rôle des États-Unis d'Amérique par un tournant autoritaire, basé sur l'alliance avec les grands capitalistes high-tech comme Elon Musk, et par une nouvelle politique étrangère qui place l'intérêt national impérialiste au centre.

03 juin 2025 | tiré de Viento sur
https://vientosur.info/por-una-campana-contra-el-rearme-las-guerras-y-el-imperialismo/

Dans ce contexte inédit, les chefs d'État européens accélèrent leur course aux armements. Von der Leyen a promis 800 000 millions d'euros pour l'UE, l'Allemagne a annoncé un plan titanesque de 900 000 millions d'euros, en France une augmentation massive du budget de l'armée française est attendue, qui devrait atteindre au moins 90 000 millions d'euros par an, tandis que dans notre pays (il fait référence à l'Italie, ndlr) les dépenses prévues de 32 000 millions d'euros augmenteront de manière exponentielle.

Le militarisme croissant est justifié par la propagande de guerre contre la « menace russe » et la rhétorique sur les « valeurs européennes » et la « démocratie ». La réalité est très différente. En critiquant la brutalité de Trump, les puissances européennes, qui soutiennent le génocide à Gaza, agissent avec la même logique impérialiste que le dirigeant américain, c'est-à-dire qu'elles se préparent à défendre leurs intérêts et ceux de leurs entreprises avec des armes et des canons.

Militarisme, nationalisme et montée de l'extrême droite réactionnaire

Cette course inexorable aux armements ouvre la voie au désastre pour les classes populaires, les jeunes et l'environnement. Pour financer le réarmement et imposer leur programme militariste, les gouvernements de l'UE se préparent à des attaques de plus en plus brutales contre les conditions de vie des classes exploitées, à disqualifier les politiques de défense de l'environnement et à attaquer les droits démocratiques.

Et c'est précisément dans ce contexte que l'extrême droite réactionnaire avance et, lorsqu'elle ne gagne pas, conditionne de plus en plus les classes dirigeantes bourgeoises, aux États-Unis comme en Italie, en Israël comme en Argentine, en Russie comme en Turquie, en Hongrie comme en Inde, en France comme en Allemagne. C'est une extrême droite qui ne cache pas sa « volonté de puissance », qui méprise même les formes typiques des démocraties libérales « bourgeoises » et qui fait de l'autoritarisme et de la centralité du patron l'axe de sa politique. C'est une extrême droite qui est de plus en plus courtisée par de larges secteurs de la bourgeoisie, parce qu'ils la considèrent comme une solution politico-idéologique valable capable de contrôler les mouvements de masse d'une main de fer, d'imposer des mesures d'austérité et des expropriations brutales afin de récupérer les profits.

La rhétorique impérialiste agressive de Trump, qui pointe vers la conquête du Groenland, la récupération du canal de Panama et l'annexion du Canada, doit être interprétée dans le contexte de cette réorientation, même si elle fait référence à certaines caractéristiques historiques de l'impérialisme américain classique, comme la doctrine Monroe, ou à des présidences républicaines historiques comme celle de William McKinley, caractérisée par le protectionnisme et l'expansion territoriale des États-Unis (Porto Rico, Philippines, ...). La grande différence est que l'expansion impérialiste de McKinley a coïncidé avec l'apogée de la puissance américaine, tandis que les menaces de Trump sont une certaine reconnaissance des limites de la puissance américaine et s'inscrivent dans un contexte de déclin. L'ascension de Trump est, en fait, le symptôme d'une nouvelle situation internationale, dans laquelle nous assistons à l'émergence de la Chine en tant que puissance concurrente, de plus en plus orientée vers une alliance avec la Russie, ainsi que celle de puissances moyennes comme la Turquie et d'autres pays du Sud global qui cherchent à influencer les dynamiques régionales en fonction de leurs propres intérêts et qui ne constituent pas du tout une véritable alternative politique et sociale comme le prétendent imprudemment certains secteurs de la gauche radicale italienne et européenne. La lutte contre l'extrême droite ne peut qu'adopter un profil internationaliste, antimilitariste et solidaire.

Un bond historique dans le militarisme européen

La conséquence de cette crise est un bond en avant dans le militarisme des gouvernements impérialistes européens, un changement qui avait déjà commencé avant la guerre en Ukraine, mais qui va encore s'approfondir. Avec la justification de « l'autonomie souveraine », la « défense de l'Ukraine » et le fantasme d'une invasion par « l'impérialisme russe » et le « nazisme de Poutine », les puissances européennes se préparent à se lancer dans une nouvelle course au réarmement avec le soutien enthousiaste des conservateurs, des sociaux-démocrates, des Verts, des « atlantistes » et des extrémistes de droite.

Les gouvernements, les entreprises, les journalistes et les médias répètent à l'unisson des slogans bellicistes qui rappellent les débuts turbulents du XXe siècle. Il faut défendre l'Europe, ses valeurs, relancer l'industrie militaire, éduquer dans les écoles dans « l'amour de la patrie », former les nouvelles générations nécessaires à l'expansion des armées et peut-être réintroduire le service militaire obligatoire. Les Scurati, les Serra, qui ont été rejoints par la principale force d'opposition, le Parti démocrate, crient sur tous les toits que l'Europe est en danger, qu'elle est seule dans un monde hostile et qu'elle doit se réarmer. Tout est la faute de Trump et de Poutine, c'est pourquoi les États-Unis ont abandonné l'Europe et que la Russie a des ambitions expansionnistes.

Cependant, le militarisme de l'Union européenne précède la guerre en Ukraine

Dans les années 1970, Ernest Mandel a souligné la nécessité d'enquêter sur « l'économie du réarmement permanent » dans son livre fondateur, Le capitalisme tardif, qui n'a jamais été publié en italien. Il a écrit : « Depuis les années 1930, la production d'armes a joué un rôle de plus en plus important dans l'économie impérialiste. Il n'y a pas le moindre signe qui annonce la fin de cette tendance. C'est l'une des caractéristiques du capitalisme tardif qui doit être expliquée à partir du processus de développement socio-économique de cette même forme de production » [Ernest Mandel, Late Capitalism].

L'économie du réarmement permanent est loin d'être terminée, pas même en Europe. Le plan ReArm Europe n'est pas sorti de nulle part. Sans aucun doute, au début de son processus de construction, l'absence d'une politique de défense commune a d'abord favorisé l'image de l'UE comme étant un espace pacifique, libre de pulsions militaristes qui, au contraire, appartenait à des États-nations. Cependant, la militarisation des pays de l'UE a commencé bien avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022, mais à partir de 2010. En effet, dans les pays de l'OTAN, les dépenses militaires, majoritairement européennes, sont passées de 162 milliards d'euros en 2014 à 214 milliards d'euros en 2022, soit une augmentation vertigineuse de 32 % [source : Agence européenne de défense, AED, décembre 2022].

L'augmentation des dépenses militaires a été très rapide, en particulier dans les pays baltes et dans les pays d'Europe centrale et orientale (Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Pologne), tandis que certains pays représentent la part la plus importante des dépenses militaires de l'UE : l'Allemagne, la France, l'Italie, la Pologne et les Pays-Bas. Ensemble, ces pays représentent 70 % des dépenses militaires de l'ensemble de l'UE [Allemagne : 23,4 ; France : 20,9 ; Italie : 12,1 ; Pologne : 6,6 ; Pays-Bas : 6.2]. En termes d'armes sophistiquées, la France est le leader avec 71 % de la production européenne, suivie de l'Allemagne avec 22 %.

Le plan ReArm Europe

La Commission européenne (à l'exception du président hongrois, le « trumpiste » Viktor Orbán) a approuvé le plan ReArm Europe, d'un montant de 800 000 millions d'euros, exemptant les dépenses militaires des États de la limite de déficit de 3 % du PIB (l'engagement d'austérité établi dans le Pacte de stabilité et de croissance). Le plan prévoit également des prêts collectifs pouvant aller jusqu'à 150 milliards d'euros pour des investissements militaires par les États membres, ouvrant le financement militaire à des investissements privés, entre autres mesures.

En Allemagne, le futur gouvernement de coalition entre conservateurs (CDU) et sociaux-démocrates (SPD) de F. Merz a annoncé un plan de réarmement monumental approuvé par le Bundestag et le Bundesrat - « la défense à tout prix » - qui prévoit des amendements constitutionnels pour débloquer le plafond de la dette et allouer des milliards d'euros à la défense. Au Bundesrat, le plan a également été approuvé par la majorité des membres de la Chambre haute de Die Linke, ce qui a suscité de nombreuses controverses.

Le gouvernement de Meloni, tiraillé entre Trump et Von der Leyen, semble prudent. En réalité, l'extrême droite nationale met en œuvre sa propre proposition dans le débat sur le plan de réarmement européen, qui prévoit d'allouer des fonds publics européens pour garantir les investissements privés dans le secteur de la défense et de l'innovation technologique. Il s'agit d'une proposition complémentaire qui ajouterait un nouvel outil à ceux déjà prévus dans le plan ReArm Europe, défini par Ursula von der Leyen dans le but d'encourager davantage d'investissements des entreprises européennes dans le secteur militaire.

L'Italie, en revanche, est déjà en pleine course au réarmement. Souvenons-nous, en effet, qu'en 2025 les dépenses militaires seront de 32 000 millions d'euros, dont 13 millions uniquement pour l'armement !

Un nouveau cycle de politiques d'austérité et la relance de l'impérialisme européen

Le réarmement et l'augmentation de l'industrie et du commerce de l'armement dans l'UE visent à augmenter le PIB des États membres et à rétablir le taux de profit pour les entreprises et les investisseurs. Ce réarmement va de pair, et il ne peut en être autrement, avec le renforcement de nouvelles politiques de dette qui préludent à un nouveau cycle d'austérité à moyen terme, générant un imaginaire collectif d'une Europe menacée qui doit répondre selon les anciens paramètres de « l'unité patriotique ». L'UE – et avec elle notre gouvernement, qui s'aligne sur la droite représentée par Von der Leyen, Macron, Merz ou Mark Rutte – répond aux problèmes avec la même logique impérialiste que les États-Unis, la Chine ou la Russie. Comme l'écrit l'économiste Brancaccio, « à l'heure où la crise de la dette oblige l'empire américain à réduire sa zone d'influence et à imposer des droits de douane même à ses vassaux, le problème de la diplomatie européenne se réduit à un seul : concevoir un impérialisme autonome, capable d'accompagner la projection du capitalisme européen à l'étranger d'une puissance militaire autonome » [Il Manifesto, 13 mars 2025]

Les entreprises militaires sont et seront évidemment les principales bénéficiaires de l'augmentation des dépenses militaires. Ce sont les industries de l'armement, concentrées dans un petit nombre d'États membres, qui ont une influence croissante sur la définition des choix stratégiques de la Commission.

En effet, ils sont situés en France, en Allemagne et en Italie et leur chiffre d'affaires n'est en aucun cas négligeable. Selon des sources du SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute), les groupes américains représentent 50 % du chiffre d'affaires total des 100 premières entreprises mondiales, les groupes européens 14 % et les groupes britanniques 7 %. Parmi les entreprises européennes, celle qui fait le plus d'affaires est Leonardo, tandis que la seconde est Airbus, une entreprise franco-allemande. Cette poignée de grands groupes européens domine la production et la commande publique dans les États membres et influence la stratégie de la Commission. Claude Serfati souligne que « le soutien des principaux groupes européens par les gouvernements nationaux leur a permis de créer de puissants canaux d'influence au niveau communautaire (Commission, Parlement européen, etc.). Depuis les années 2000, les dirigeants des principaux groupes de défense européens sont présents dans les groupes de travail mis en place par la Commission. Ces dernières années, le lobbying auprès de la Commission et du Parlement s'est considérablement intensifié parallèlement à la militarisation de l'UE, bien que les groupes de défense européens n'aient pas été en mesure d'influencer la Commission. [Claude Serfati, Un monde en guerres, Textuel, p. 180].

Si, par conséquent, de forts contrastes et contradictions persistent entre les différents pays européens, les guerres et les crises poussent l'UE vers une plus grande intégration dans le domaine militaire sous l'impulsion d'entreprises militaires.

Avec le tournant actuel marqué par Donald Trump, la poussée vers l'armement est donc inévitable et devrait nous préoccuper, car tout au long de l'histoire, toutes les courses aux armements en Europe se sont terminées par des tragédies et des massacres. Cette course aux armements sera financée en s'attaquant aux acquis sociaux et en liquidant ce qui reste de l'État-providence. Il s'agira également de coupes dans les droits démocratiques et politiques qui sont importantes pour l'extrême droite, comme la réintroduction de la conscription dans certains pays, ce qui pourrait généralement raviver les luttes contre les coupes et les attaques contre les conditions de vie et les mouvements anti-guerre.

Forteresse et sécurité de l'Europe dans le cadre du processus de militarisation

Les mesures répressives prises à l'encontre des migrants font partie intégrante du processus de militarisation en cours. Ce n'est pas une coïncidence s'ils ont augmenté de façon exponentielle ces dernières années. En une vingtaine d'années, les financements de l'UE aux pays de l'autre côté de la Méditerranée pour externaliser le contrôle et la gestion des flux migratoires ont atteint plus de 130 milliards d'euros. En 2021, Frontex, l'agence chargée de contrôler les flux migratoires en Méditerranée, a reçu un financement sans précédent de 5,6 milliards d'euros, qui seront couverts sur la période 2021-2027 avec une augmentation de 194 % par rapport au cycle budgétaire précédent. Ce financement permet l'achat de nouvelles armes « létales et non létales ». Il sera difficile de faire la distinction entre les premiers et les seconds.

C'est ainsi que la politique migratoire jette un éclairage beaucoup plus réaliste sur le comportement des pays européens par rapport aux déclarations de leurs dirigeants sur les « valeurs démocratiques » sur lesquelles reposerait l'intégration européenne.

Le vrai visage de l'Union européenne : l'Europe du Capital, néocoloniale et raciste

Quelle est la crédibilité de l'Union européenne en tant que rempart de la démocratie alors qu'elle n'a pas été en mesure d'arrêter de faire des échanges d'armes avec Israël au moment où il commet le génocide du peuple palestinien ? Quelle crédibilité peut avoir la France qui a pillé et contrôlé l'économie d'une grande partie de ses anciennes colonies ? Quelle crédibilité peut avoir l'Italie, qui défend bec et ongles ces tortionnaires maléfiques qui empêchent les immigrants d'atteindre les côtes italiennes ?

Si l'impérialisme classique justifiait son intervention par la nécessité de civiliser d'autres peuples en exportant les valeurs de la culture occidentale. L'impérialisme contemporain, depuis la guerre d'Irak de 1990, a proclamé l'impératif humanitaire pour ses opérations militaires, les justifiant ainsi dans le but de renverser des gouvernements dictatoriaux.

Avec l'aggravation du chaos géopolitique et l'intensification de la confrontation inter-impérialiste, ces objectifs n'ont pas disparu. C'est pourquoi, aujourd'hui, l'Union européenne fonde sa rhétorique belliciste sur le nom de la paix et de la démocratie. Tout cela est non seulement répugnant, mais aussi profondément fonctionnel pour un projet qui veut renforcer l'Europe du capital, coloniale et raciste, et nourrit l'élan de l'extrême droite. Quelle que soit la manière dont ils seront financés, les plans de réarmement de l'UE ne profiteront qu'aux grands capitalistes, aux marchands de mort qui se frottent déjà les mains devant la hausse de la valeur de leurs actions. Quelle que soit la manière dont ils sont financés, les plans de réarmement s'accompagneront d'une limitation des droits politiques à l'intérieur des pays.

Dénoncer la fausse « pax trumpista »

Lutter contre la guerre, le militarisme et les impérialistes, c'est aussi dénoncer la fausse paix proposée par Trump. Le président américain réélu a radicalement changé la position de son pays sur la guerre en Ukraine. Les États-Unis sont passés de l'armement de l'Ukraine et de la direction des alliés de l'OTAN à l'ouverture de négociations bilatérales de cessez-le-feu directement avec Vladimir Poutine, excluant ainsi leurs anciens alliés (les puissances européennes et Zelensky lui-même) des pourparlers.

Le message de Trump est catégorique et s'agit il plutôt de chantage : soit Zelensky (et ses alliés européens) acceptent les conditions négociées par Poutine pour un cessez-le-feu, soit les États-Unis se retirent. Les négociations sont en cours, en fait elles ne font que commencer. Bien que les détails de la première rencontre entre la Russie et les États-Unis à Riyad soient inconnus, tout accord entre les deux suppose que l'Ukraine admet sa défaite, ce qui implique au moins l'acceptation de la perte de 20 % du territoire occupé par les Russes (les quatre régions autonomes du Donbass plus la Crimée) ; et de se déclarer neutre en renonçant à sa prétention d'adhérer à l'OTAN (et à l'UE). Poutine, quant à lui, a posé comme condition la tenue d'élections en Ukraine sans Zelensky, préconisant son remplacement par un gouvernement pro-Kremlin.

En outre, Trump exige que Zelensky signe un accord pour l'exploitation des minéraux et des terres rares, selon lequel les États-Unis conserveraient la moitié de ces ressources, en compensation de l'aide militaire reçue. Il faut rappeler que c'est Zelensky lui-même qui a le premier proposé cette transaction quasi coloniale à Trump, dans l'espoir d'obtenir en retour une garantie de sécurité de la part des États-Unis, ce qui n'arrivera évidemment pas.

Le temps semble jouer en faveur de Poutine, qui avant d'accepter un cessez-le-feu tentera sûrement de consolider et peut-être d'étendre ses avancées sur le champ de bataille, et de garantir quelques « lignes rouges » pour le Kremlin, dont la neutralité de l'Ukraine, qui comprend la démilitarisation de l'État ukrainien, une zone de sécurité et la garantie qu'il n'y aura pas de troupes de l'OTAN sur le territoire.

Le sort de l'Ukraine, martyrisée par trois ans de conflit, devient donc un butin disputé par les États-Unis et la Russie, les puissances européennes revendiquant, pour l'instant malheureusement, leur part. L'autodétermination du peuple ukrainien ne peut pas être affirmée par le faux plan de paix convenu entre Trump et Poutine, mais seulement par un véritable cessez-le-feu menant à la constitution de véritables dialogues auxquels participent tous les acteurs sur le terrain, à commencer par les Ukrainiens.

Pour une mobilisation européenne unie contre la militarisation en cours. Arrêtez, ReArm Europe !

Face à de nouveaux scénarios de plus en plus sombres, il est plus urgent que jamais de promouvoir une mobilisation européenne unie contre la militarisation. C'est pourquoi nous adhérons avec une ferme conviction à l'appel « Stop ReArm Europe – le bien-être, pas la guerre », lancé entre autres par Transform Europe, le Transnational Institute, Arci et Attac Italia.

Nous le ferons en tant qu'internationalistes et écosocialistes, en concentrant la lutte contre cette Europe du Capital, néocoloniale et impérialiste, pour une autre Europe, celle nécessaire et indispensable que nous voulons, une Europe des travailleurs, solidaire, pacifique et antiraciste, en mettant l'autodétermination des peuples au centre.

C'est précisément pour cette raison que nous le ferons, sans jamais oublier la solidarité anticoloniale avec des luttes telles que celle du peuple palestinien face au génocide sioniste, afin que l'autodétermination du peuple kurde et du Rojava soit reconnue. Il est clair que la classe dominante n'a pas d'autre plan que d'accélérer les crises ouvertes : un projet basé sur l'investissement dans des « moyens de destruction » de la vie et de la planète, pour défendre les intérêts des bourgeoisies. C'est pourquoi nous pensons qu'il est nécessaire d'organiser une confrontation dans le cadre d'un programme écosocialiste, qui confronte ses plans de réarmement et lutte à tous les niveaux contre l'Europe du capital dans une perspective des États-Unis d'Europe comme alternative à la barbarie du présent.

Nous le ferons parce que nous sommes contre tout impérialisme, contre l'OTAN des États-Unis, à la fois dans sa version Biden et Trump, contre les bourgeoisies européennes militaristes et bellicistes, ainsi que contre Poutine et son régime impérial et tsariste, tous unis pour utiliser leurs instruments oppressifs afin de maintenir leurs zones de domination. Nous le ferons aussi parce que nous n'avons aucune confiance dans les autres puissances capitalistes émergentes.

Gippò Mukendi Ngandu,
militant de Sinistra Anticapitalista

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Petit zoom sur la situation mondiale au 4 juin 2025

10 juin, par Vincent Présumey — ,
La situation mondiale, mouvante, est marquée en ce moment par les difficultés rencontrées par l'exécutif trumpiste à Washington. On pourrait dire de Donald Trump qu'il est en (…)

La situation mondiale, mouvante, est marquée en ce moment par les difficultés rencontrées par l'exécutif trumpiste à Washington. On pourrait dire de Donald Trump qu'il est en situation d'échec, en précisant que ceci ne le rend pas moins dangereux, bien au contraire.

4 juin 2025 | tiré du site Arguments pour la lutte sociale

L'on ne peut saisir toute l'importance de cette situation qu'à la condition de comprendre que cette « montée du fascisme » ou de l'extrême-droite, dont beaucoup parlent sans en caractériser les fondements, n'est pas une vague déferlante emportant les populations, bien au contraire de larges secteurs de celles-ci se battent et résistent, mais constitue une polarisation organisée, à partir d'un axe central qu'il faut désigner si l'on prétend réellement combattre le fascisme : l'axe Trump/Poutine.

Ainsi, l'élection très serrée en Pologne d'un nouveau président du PiS, mais du PiS lié désormais à Trump au pouvoir et ayant par là un fil le reliant à Poutine, Karol Nawrocki, ne participe pas d'une « déferlante », mais, comme deux semaines avant l'échec du candidat poutinien et trumpiste en Roumanie, de l'accentuation des tensions, qui demande que les forces sociales qui ont réellement besoin de démocratie s'organisent de manière indépendante.

C'est de ce point de vue, qui se fonde sur le contenu mondial de la lutte des classes, que nous pouvons poser cette analyse de première importance : le coup le plus dur subi récemment par Trump est celui qu'a reçu Poutine, dimanche 1° juin, avec l'opération ukrainienne détruisant, sur la profondeur du territoire russe, une partie considérable, et non renouvelable, de la flotte aérienne stratégique russe, suivi de frappes sur le pont de Kertch.

Pearl Harbour, cheval de Troie, Trafalgar … les comparaisons ne manquent pas pour ce qui marquera une date dans l'histoire militaire, celle de la capacité affirmée, par la combinaison entre petit matériel, ruse, et IA, à détruire en masse des engins de bien plus grande taille et coût.
Comme le disent les Ukrainiens, ils ont abattu une bonne carte alors que Trump avait crié à Zelenski, dans le bureau ovale, « Vous n'avez pas de cartes » : hé bien si, à condition de la manier sans Washington, malgré Washington, contre Washington.

D'autre part, l'offensive mondiale de Trump sur les tarifs commerciaux a fait chuter puis vaciller les bourses et induit la dislocation du marché mondial, mais sans renforcer les Etats-Unis bien au contraire.
Précisons que ce n'est pas la Chine en tant qu'Etat qui a neutralisé cette offensive ; le pouvoir chinois est affaibli par la crise globale lui aussi.

Les taux des bons du Trésor US et les récriminations de larges secteurs capitalistes et financiers aux Etats-Unis ont conduit un tribunal fédéral dévolu aux questions commerciales à annuler la plupart des décrets de Trump comme portant atteinte à la constitution et aux attributions du Congrès (ce qui est une évidence). La crise constitutionnelle américaine est ouverte pleinement.

L'arrière-plan des affrontements dans et pour l'Etat nord-américain, c'est la mobilisation de couches massives de la société aux Etats-Unis, qui a réalisé, par en bas mais en s'appuyant sur les structures syndicales, plusieurs journées nationales (un fait sans précédents dans ce pays-continent) anti-Trump, avec des millions de manifestants, processus qui va s'intensifier entre le 6 et le 14 juin.
Trump n'est pas arrivé à déporter des millions de migrants et à faire prendre d'assaut les quartiers noirs et latinos des grandes villes, mais des milliers de gens sont traqués, kidnappés, et les affrontements se multiplient, comme à San Diego récemment, où la population affronte les services de l'immigration (ICE) tentant d'embarquer les leurs.

Dans le triumvirat qui était apparu, Musk et Vance flanquant Trump, il y a un mort, ou en tout cas un œil au beurre noir, c'est Musk, qui a fait de gros dégâts mais a échoué à détruire totalement l'administration et les services publics fédéraux. L'importance de Vance s'en trouve renforcée.
Toutefois, la désignation, par le conclave au Vatican, d'un pape refusant l'orientation que J.D. Vance et consorts veulent imprimer au catholicisme, à savoir son intégration à un axe religieux millénariste ultra-réactionnaire avec les fondamentalistes protestants et les orthodoxes poutiniens, est, à cette étape, un échec sec pour l'axe néofasciste Trump/Poutine.

L'interaction entre la crise des Etats-Unis et les affrontements sociaux mondiaux se renforce.

Au Panama, nous avons une situation quasi insurrectionnelle produite par la répression, devenue sanglante avec l'assassinat policier de jeunes « indigènes », de la vague montante de manifestations provoquées par la décision du président Raoul Mulino (qui défend soi-disant la « souveraineté du Panama » !) d'autoriser le déploiement de militaires américains sur le canal, ainsi que contre l'implantation de mines de cuivre et d'un barrage pour les écluses du canal.

Le syndicat du bâtiment (SUNTRACS), colonne vertébrale de la mobilisation nationale, est la cible d'une tentative de destruction. Son dirigeant Saul Mendez s'est réfugié à l'ambassade de Bolivie après l'arrestation de des autres militants, Genaro Lopez et Jaime Caballero.

Trump vient, d'autre part, le 3 juin, de lancer le transfert de la supervision militaire du Groenland, dans le cadre de l'OTAN, du Commandement américain en Europe au Commandement Nord (créé seulement en 2022), Northcom. Cette mesure unilatérale envers les Etats européens membres de l'OTAN est menaçante pour le Groenland et donc pour le Danemark, et au-delà.

C'est dans ce cadre et en relation avec la résistance ukrainienne qu'il faut jauger la question de Gaza.

En effet, la démonstration ukrainienne, indépendamment de l'orientation du gouvernement Zelenski, parce qu'il a agi pour se défendre, montre ce que les pays européens devraient faire à Gaza : agir indépendamment, sans autorisation ni aval de Washington, pour briser le blocus en mobilisant des moyens militaires.

Bien sûr, le refus, l'incapacité ou la réticence des gouvernements européens soucieux des seuls intérêts capitalistes et impérialistes européens, à agir ainsi, soulève « la nécessité de lutter pour des gouvernements orientés sur la défense des droits humains, droits sociaux et écologiques en politique intérieure, avec une politique extérieure internationaliste et démocratique conséquente. »https://aplutsoc.org/2025/06/04/pro...

En France, contre Macron et la V° République, cela veut dire un gouvernement démocratique qui hausse les salaires, abroge la loi sur les retraites, sauve les services publics, engage la lutte écologique, arme l'Ukraine et force le blocus à Gaza.

Le combat antifasciste c'est le combat pour remettre en avant, maintenant, cette perspective en France, et ses équivalents dans toute l'Europe, car l'Europe est le point de bascule central de l'affrontement social mondial entre la majorité prolétarienne qui a besoin de démocratie, et tous les hégémons néofascistes et totalitaires.

VP, le 4/06/25.

Photo illustrant cet article : les ouvriers agricoles des bananeraies de Panama en grève de masse.

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Pour une gauche de rupture, vivante et enracinée : pourquoi je me présente à Québec solidaire

10 juin, par Geru Schneider — , ,
Lettre lue par Geru Schneider lors de l'annonce de sa présentation au poste de porte-parole masculin de Québec solidaire le 5 juin dernier. Je m'appelle Geru Schneider, (…)

Lettre lue par Geru Schneider lors de l'annonce de sa présentation au poste de porte-parole masculin de Québec solidaire le 5 juin dernier.

Je m'appelle Geru Schneider, j'ai 32 ans. Je suis fils d'immigrants chiliens dont des membres de ma famille ont fui la dictature. Je suis le fruit d'un peuple qui a résisté, aimé la liberté, payé cher pour la dignité. Ce parcours familial a façonné ma boussole politique : la solidarité, la justice, l'émancipation.

Aujourd'hui, j'annonce ma volonté de me présenter au poste de co-porte-parole masculin de Québec solidaire.

Je le fais avec une certaine gravité et un grand espoir. Gravité, car nous vivons une période de bascule sociale, écologique et politique. Espoir, parce que je suis convaincu que Québec solidaire peut redevenir un véritable mouvement de rupture : enraciné dans les luttes, vivant, démocratique, capable de porter un projet d'émancipation collective.

Je viens des mouvements sociaux. J'ai fait la grève étudiante de 2012. J'ai milité pour le droit au logement, l'éducation gratuite, aux côtés de syndicats, de groupes communautaires, de campagnes de solidarité internationale. J'ai côtoyé le milieu communautaire, les milieux syndicaux, la politique municipale comme attaché politique... et même l'usine.

Ce que j'apporte, ce n'est pas un CV politique de carrière. C'est un parcours de terrain. Une conviction : la politique ne peut pas être coupée des espoirs et des colères réelles de notre monde.

Une gauche de rupture, parce que le monde exige mieux

Nous sommes plusieurs à croire qu'il faut rompre avec une certaine idée de la politique. Rompre avec la personnalisation à outrance. Rompre avec le culte des marques, des figures, des visages solitaires. Je ne veux pas être un chef, une vedette ou un homme providentiel. Je veux être un porte-voix. Un vrai porte-parole. Non pas pour moi, mais pour celles et ceux qui luttent pour des communs, pour la liberté, pour la dignité.

Québec solidaire doit redevenir un parti qui ose. Une gauche assumée. Une gauche de la rue, des droits sociaux, des oubliés, des Premières Nations, des luttes féministes et antiracistes, antifascistes, internationaliste, de la solidarité et d'autodétermination.

Pourquoi une gauche de rupture ?

Parce que notre époque est marquée par l'effondrement climatique, la montée des inégalités, l'effritement de nos acquis sociaux, la montée des droites extrêmes et de l'extrême droite et des reculs démocratiques. Une gauche de rupture ne gère pas ces crises : elle nomme le système qui les produit — le capitalisme — et elle s'y oppose. C'est une gauche post-croissance, écoféministe et radicalement fraternelle. Un mouvement qui pense l'écologie comme un projet de société, ancré dans la justice, le soin, la vie collective.

Je crois à l'indépendance du Québec. Mais pas à celle des murs ni de l'exclusion. Je crois à une indépendance décoloniale, antiraciste, plurielle, populaire. Une indépendance qui reconnaît les Premières Nations d'égal à égal, et qui refuse de répéter les silences et les exclusions du passé — comme ces propos de 1995 sur les « votes ethniques », qui ternissent et hante encore notre histoire et notre beau projet politique émancipateur.

Rendre le parti aux membres

Ce qui me pousse à me lancer, c'est aussi le constat que notre démocratie interne a été fragilisée. Trop souvent, des décisions structurantes ont été prises sans débats réels, avec des délais trop courts, dans des formats encadrés et descendants.

C'est particulièrement vrai dans le processus actuel de réactualisation du programme. Ce moment, qui devrait être un grand exercice politique collectif, s'est enclenché sans véritable travail de formation à la base, avec des thèmes imposés, des questions orientées, et des prises de notes peu transparentes. Pendant que les membres participent de bonne foi à ce processus, des versions retravaillées du programme circulent déjà en parallèle dans certains cercles, loin de la base.

Il ne s'agit pas ici d'accuser, mais de proposer une autre manière de faire : plus ouverte, qui prends le temps ; bref, plus démocratique. Nous devons créer des espaces de formation, de confrontation d'idées, de réflexion réelle. Ce travail pourrait être non seulement politique, mais mobilisateur. Il pourrait ramener vers nous celles et ceux qui nous ont quittés, et convaincre celles et ceux qui cherchent une gauche crédible, vivante et cohérente.

Il faut une refondation démocratique. Une démarche horizontale, inclusive, joyeuse, enracinée. Revoir notre programme ; se pencher sur des sujets importants, oui — mais avec franchise, avec du temps, en impliquant les membres à toutes les étapes. Ces moments pourraient redevenir captivants, mobilisateurs, et ramener vers nous celles et ceux que nous avons perdus en chemin et ceux et celles qui cherchent une véritable alternative.

Je ne cherche pas à personnifier un mouvement. Être porte-parole, pour moi, c'est porter une voix collective, enracinée dans les luttes concrètes. Je veux que Québec solidaire redevienne un lieu d'organisation et de convergence : pour tous les Québécoise et québécois, pour les jeunes, les travailleuses et travailleurs, les chômeuses et chômeurs, les féministes, les militantes et militants communautaires et syndicaux, les groupes antiracistes — toute personne qui vit en marge du pouvoir et qui cherche une alternative réelle. Un lieu où l'on débat, où l'on agit, où l'on espère collectivement le Québec de demain.

Un parti fort parce qu'il est cohérent, accueillant et profondément démocratique.

Ce qui nous attend

Si nous voulons devenir un mouvement large, il faudra briser l'illusion qu'il faut tout lisser pour plaire. L'unité, ce n'est pas l'uniformité. C'est l'alignement volontaire autour d'un horizon commun : liberté, égalité, solidarité, démocratie, émancipation.

Je ne propose ni nostalgie révolutionnaire ni populisme creux. Je propose un projet politique crédible, ancré dans le réel, porteur d'espoir. Pour celles et ceux qui ne veulent plus de la gestion molle de l'inacceptable.

Je veux porter une autre voix. Celle de la base. Celle des membres. Celle d'un parti vivant, militant, transformateur. Québec solidaire ne doit pas être un petit parti de gauche poli à l'Assemblée nationale, mais un grand mouvement politique de rupture.

Si le vent se lève, je me lèverai avec vous.

On ne bâtira pas l'avenir avec de la prudence. L'heure est venue d'oser. Ensemble.

Geru Schneider
Militant de terrain, solidaire par instinct, par histoire et par espoir.

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La France a soutenu l’apartheid : l’assassinat de Dulcie September

10 juin, par Mike Strachinescu , Rosa Moussaoui, Martin Jamet — , ,
Tiré de l'Humanité https://www.humanite.fr/histoire/afrique-du-sud/enquete-la-france-a-soutenu-lapartheid-lassassinat-de-dulcie-september Martin Jamet Mike Strachinescu (…)

Tiré de l'Humanité
https://www.humanite.fr/histoire/afrique-du-sud/enquete-la-france-a-soutenu-lapartheid-lassassinat-de-dulcie-september
Martin Jamet
Mike Strachinescu
Rosa Moussaoui
Publié le 6 juin 2025

Le 29 mars 1988, Dulcie September, une militante sud-africaine, figure de la lutte anti-apartheid, était assassinée en plein Paris. Retour sur un meurtre qui jette une lumière crue sur les relations de la France avec le régime raciste alors en place en Afrique du Sud.

Paris, 10ᵉ arrondissement, rue des Petites écuries. Une petite voie, située à deux pas du métro Château d'Eau. C'est ici qu'a été assassinée, le 29 mars 1988, Dulcie September, une militante sud-africaine, figure de la lutte anti-apartheid. Cinq balles silencieuses tirées à bout portant, dans la tête et dans la nuque, devant la porte de son bureau au 4ᵉ étage de cet immeuble.

Dulcie September était alors en pleine investigation sur les relations troubles entretenues par la France et l'Afrique du Sud.

Elle enquêtait sur le trafic d'armes illégal et la collaboration nucléaire entre les deux pays et se savait menacée. Une enquête bâclée, un non-lieu quatre ans plus tard et un crime politique toujours non élucidé, 35 ans après. Une chose est certaine, cette combattante acharnée embarrassait la France et l'Afrique du Sud. Aujourd'hui, sa famille est toujours engagée dans un combat pour faire reconnaître une défaillance de la justice française dans le dossier. Et obtenir justice et vérité sur ce crime d'Etat, commandité par les services secrets sud-africains avec des complicités françaises.

Un âpre combat judiciaire
Plus de 35 ans après l'assassinat de Dulcie September, sa famille n'abdique pas et mène un âpre combat judiciaire pour obtenir la vérité. Suite au refus de la justice d'ouvrir de nouvelles investigations après une nouvelle plainte en 2019 – sous motif de prescription – la famille a engagé une nouvelle procédure en 2021 contre l'État français. Elle l'accuse de « faute lourde » et de « déni de justice » dans le traitement de l'affaire et le non-lieu prononcé en 1992.

Déboutés en première instance, les neveux et nièces de Dulcie September ont fait appel. Durant la dernière audience, qui s'est tenue en avril dernier, l'avocat a une nouvelle fois défendu l'idée selon laquelle l'assassinat de Dulcie September relevait du crime d'apartheid, défini dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale comme crime contre l'humanité, et donc imprescriptible. L'arrêt de la cour d'appel sera rendu le 10 juin prochain.

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Libye : Sous le joug des milices

10 juin, par Paul Martial — , ,
La responsabilité du premier ministre dans le déclenchement des conflits entre milices pour protéger son réseau de corruption, déclenche une réprobation populaire. Il y a un (…)

La responsabilité du premier ministre dans le déclenchement des conflits entre milices pour protéger son réseau de corruption, déclenche une réprobation populaire.
Il y a un mois résonnaient les détonations d'armes automatiques et d'artillerie lourde dans Tripoli, la capitale de la Libye, mettant fin à l'illusion d'une stabilisation du pays.

Abdel Ghani Al-Kikli dirigeant du Stability Support Apparatus (SSA – Structure de soutien à la stabilité) une des milices officiellement intégrée au Gouvernement d'Union Nationale (GUN) de Dbeibah était assassiné au siège de la Brigade 444, un autre groupe armé qui en profita aussitôt pour attaquer les positions du SSA provoquant la fuite de la plupart des combattants.

Conflit entre clans mafieux

Dbeibah affirmait que désormais le temps des milices était résolu et tenta dans la foulée de s'en prendre aux Forces spéciales de dissuasion souvent appelées RADA, un groupe salafiste qui jouait le bras armé de Njeem inculpé par la CPI pour crime contre l'humanité. Il sera arrêté en Italie puis libéré et exfiltré en Libye avec la bénédiction du gouvernement de Meloni.
Non seulement la brigade 444 n'est pas arrivée à bout du Rada, mais cette attaque a largement fragilisé le GUN puisque la moitié de ses membres a démissionné et surtout des milices de la ville de Zaouïa ont soutenu RADA.

Ces affrontement inter-milices témoignent de la volonté de Dbeibah d'obtenir un pouvoir absolu à l'image de son rival le général Haftar, qui avec ses fils contrôle d'une main de fer la partie est du pays. Dbeibah, cet homme d'affaire issu de Misrata a fait fortune grâce aux bonnes relations que son clan familial entretenait avec Mouammar Kadhafi. Son accession au pouvoir en 2021 était liée à l'organisation d'élections qui devaient se tenir dans les huit mois. Quatre ans plus tard il n'y a toujours pas d'élections, par contre Dbeibah n'a pas perdu son temps en consolidant son réseau de corruption fortement concurrencé par Al-Kikli se montrant bien plus efficace dans la spoliation des ressources de l'Etat alimentées par la manne pétrolière.

Une pauvreté en progression

Suite au cessez-le-feu signé entre les deux milices, un calme précaire règne de nouveau sur la capitale libyenne. Mais ces affrontements ont exacerbé le mécontentement des populations. Des manifestations ont été organisées dans plusieurs quartiers de Tripoli. Ces dernières ont convergé vers la place des martyrs rassemblant plus de 4000 personnes, ces mobilisations ont continué les jours suivants malgré la répression. Les mots d'ordre contre Dbeibah et pour l'unification du pays ont été scandés.

Si les élites politiques et militaires s'allient ou s'affrontent pour siphonner les richesses de l'Etat, la situation des populations se détériore grandement. Mohamed al-Huwaij, le ministre de l'Économie du GUN, indique que près de 40 % des Libyens se trouvent sous le seuil de pauvreté. Les affrontement inter milices ont eu au moins le mérite de révéler au grand jour le rejet des dirigeants par une grande partie de libyens.

Paul Martial

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Québec solidaire doit demander l’abrogation de la loi 69 assurant la gouvernance responsable des ressources énergétique et modifiant diverses dispositions législatives et exiger que soit lancé un large débat public sur l’avenir énergétique du Québec

10 juin, par Comité d'action politique écologiste de Québec solidaire — , ,
Proposition d'urgence du Comité d'action politique Écologiste présentée au Conseil national au Conseil national du 7 et 8 juin 2025. Cette proposition d'urgence a été adoptée (…)

Proposition d'urgence du Comité d'action politique Écologiste présentée au Conseil national au Conseil national du 7 et 8 juin 2025. Cette proposition d'urgence a été adoptée par le Conseil national de Québec solidaire tenu les 7 et 8 juin dernier.

1. CONSIDÉRANT que l'urgence climatique et la nécessité d'être carboneutre d'ici 2050 ne sont plus à démontrer ;

2. CONSIDÉRANT la déclaration du programme du parti sur la souveraineté des peuples autochtones et de son principe afférent des relations d'égal à égal et de nation à nation ;

3. CONSIDÉRANT que la Loi 69, qui vise à doubler la production énergétique du Québec d'ici 25 ans, comporte plusieurs risques importants pour le Québec, notamment :

a. Miser principalement sur la croissance énergétique pour attirer des multinationales en leur offrant des tarifs d'électricité concurrentiels ;

b. Négliger la décarbonation de notre économie et ignorer les entreprises locales concernées ;

c. Privatiser la production et la distribution de l'électricité ;

d. Augmenter significativement les tarifs d'électricité ;

e. Ignorer la sobriété énergétique et la protection de nos territoires agricoles et des écosystèmes ;

f. Soutenir et développer un extractivisme qui sert la filière batterie et l'électrification du parc automobile, tout en négligeant les transports collectifs publics ;

4. CONSIDÉRANT le consensus de plusieurs peuples autochtones et organisations de la société civile, notamment le syndicats et groupes écologistes qui exigent un débat public large sur l'avenir énergétique du Québec avant d'élaborer un Plan de gestion intégré des ressources énergétiques (PGIRE) ; 5. CONSIDÉRANT l'impact de la loi sur plusieurs régions du Québec par des projets comme le Projet TES Mauricie ;

6. CONSIDÉRANT, d'après ce qui précède, qu'il y a urgence d'agir, le Comité d'action politique écologiste propose :

1) Que Québec solidaire demande l'abrogation de la loi 69 ;

2) Que Québec solidaire, en collaboration avec les peuples autochtones et les organisations alliées, exige la tenue d'un large débat public de société sur l'avenir énergétique du Québec dans une perspective de transition socio- écologique juste et de repossession collective de nos ressources énergétiques ;

3) Que Québec solidaire appuie les revendications des opposant·es au projet de loi 69 et encourage la participation de ses membres aux mobilisations de 2025 et 2026 en faveur d'une transition énergétique juste, fondée sur la planification démocratique des besoins, la décentralisation régionale et la gestion collective de l'énergie sous contrôle public, de la production et la distribution.

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La position de l’Afrique dans le nouvel ordre mondial

10 juin, par Will Shoki — , ,
L'Afrique est aujourd'hui à la croisée des chemins, prise entre les crises internes, les dynamiques changeantes du pouvoir mondial et le lent déploiement de l'ordre politique (…)

L'Afrique est aujourd'hui à la croisée des chemins, prise entre les crises internes, les dynamiques changeantes du pouvoir mondial et le lent déploiement de l'ordre politique postcolonial. D'un côté à l'autre du continent, les partis au pouvoir, autrefois légitimés en tant que libérateurs nationaux, perdent du terrain, mais l'opposition reste divisée et n'a pas grand-chose à offrir en termes de gouvernance alternative.

25 juin 2025 | tiré de Viento sur

https://vientosur.info/la-posicion-de-africa-en-el-nuevo-orden-mundial/

Le Soudan reste pris au piège d'une guerre dévastatrice entre les forces armées soudanaises et les forces paramilitaires de soutien rapide. C'est un conflit qui a déplacé des millions de personnes et qui s'est en même temps internationalisé, l'Égypte et les Émirats arabes unis soutenant des camps opposés.

Les élections de 2024 au Mozambique ont été l'un des exemples les plus clairs de ce déclin, lorsque le parti au pouvoir, le Frelimo, a été proclamé vainqueur d'un processus condamné par de nombreuses personnes comme étant frauduleux. Le chef de l'opposition Venâncio Mondlane, candidat du parti Podemos nouvellement créé, a accusé le gouvernement d'avoir orchestré une manipulation électorale massive, avec des décomptes parallèles des votes indiquant qu'il avait effectivement remporté les élections. Le parti au pouvoir a réagi aux manifestations de masse en déclenchant une violente répression. Ce faisant, il a poursuivi sa tendance à réprimer la dissidence politique et à maintenir son contrôle par des moyens de plus en plus autoritaires.

La perte de légitimité de ces gouvernements de l'ère de la libération ne se limite pas au Mozambique. En Afrique du Sud, le Congrès national africain (ANC) a perdu sa nette majorité pour la première fois depuis 1994, ne remportant qu'environ 40 % des voix aux élections de 2024. Après des décennies de domination politique, le parti fait maintenant partie d'une coalition difficile et extrêmement fragile avec l'Alliance démocratique (DA), un parti avec lequel il a longtemps rivalisé. Cela a forcé l'ANC à gouverner à partir d'une position plus centriste, limitant sa capacité à développer des politiques auxquelles sa base traditionnelle pourrait s'attendre.

Alors que certains secteurs de l'ANC considèrent cette coalition comme une concession nécessaire pour maintenir la stabilité, d'autres la qualifient de trahison de la mission historique du parti, notamment en raison de l'orientation politique néolibérale de la DA. Les conséquences de ces événements restent à voir : elles dépendront de la persistance du gouvernement de coalition, de la poursuite de la fracture de l'ANC ou de la force des mouvements d'opposition en dehors du processus électoral officiel.

Le déclin de l'ANC fait partie d'une tendance plus large en Afrique australe, où le Zanu-PF du Zimbabwe s'enracine au pouvoir par des moyens répressifs plutôt que par le soutien populaire, en utilisant le pouvoir judiciaire et la commission électorale pour bloquer toute contestation de l'opposition. Pendant ce temps, la Swapo en Namibie et le BDP au Botswana ont été confrontés à des revers électoraux sans précédent (le BDP a perdu une élection pour la première fois depuis l'indépendance), ce qui indique que même les partis au pouvoir autrefois stables ne sont plus assurés d'une victoire électorale facile. L'émergence de ces changements indique que leurs références autrefois puissantes en tant que partis libérateurs ne sont plus suffisantes pour obtenir un mandat gouvernemental suffisant.

Conflit

L'affaiblissement de ces gouvernements s'inscrit dans un contexte d'aggravation des conflits et d'instabilité dans d'autres parties du continent.

Le Soudan reste empêtré dans une guerre dévastatrice entre les forces armées soudanaises et les paramilitaires des Forces de soutien rapide. Ce conflit a déplacé des millions de personnes et est progressivement devenu international, l'Égypte et les Émirats arabes unis soutenant des camps opposés. La guerre a non seulement aggravé l'effondrement économique du Soudan, mais elle constitue également une menace pour la stabilité régionale, avec des retombées au Tchad, au Soudan du Sud et en Éthiopie.

La République démocratique du Congo (RDC) continue de lutter contre les insurrections armées, en particulier le M23 soutenu par le Rwanda, qui exacerbe les tensions régionales. Les accusations d'ingérence transfrontalière contribuent à la détérioration des relations diplomatiques.

Ces crises ne sont pas isolées, mais reflètent un échec plus profond de la gouvernance à travers l'Afrique, où, dans de nombreux cas, l'État est incapable de résoudre les griefs sociaux et économiques sans recourir à la violence.

L'effet Trump

Au milieu de toutes ces crises, l'Afrique doit aussi faire face au changement de l'ordre international. Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche a déjà commencé à remodeler les relations de l'Afrique avec les États-Unis. Il y a eu un changement en faveur d'une relation plus transactionnelle et d'un accent renouvelé sur la sécurité plutôt que sur le développement. L'une des premières grandes mesures de politique étrangère de Trump a été l'élimination de l'aide au développement avec le démantèlement de l'USAID et le retrait du financement de programmes de santé cruciaux, y compris le Plan d'urgence du président américain pour la lutte contre le sida (PEPFAR). Des millions de personnes n'ont donc pas accès au traitement du VIH et à d'autres services essentiels.

Cela s'est fait sentir de manière plus aiguë dans les pays où les systèmes de santé sont déjà mis à extrêmement rude épreuve, ce qui exacerbe les crises de santé publique qui pourraient avoir des effets déstabilisateurs à long terme. Le gouvernement américain justifie ces coupes par des arguments typiques de son idéologie America First, qui considère l'aide étrangère comme une dépense inutile et non comme un investissement stratégique dans la stabilité.

Et cela a coïncidé avec un durcissement de la politique américaine en matière de migration. Le gouvernement envisage d'interdire l'octroi de visas d'entrée qui pourraient affecter des dizaines de pays africains en limitant l'accès des étudiants, des travailleurs et des touristes. Cette approche n'est pas sans rappeler la fermeture des frontières de la première présidence de Trump. Cela annonce un approfondissement de l'isolement des États-Unis par rapport à l'Afrique, traitant le continent davantage comme un risque pour la sécurité et une source non souhaitée d'immigrants que comme un partenaire diplomatique ou économique.

Trump et l'Afrique du Sud

L'hostilité manifestée par l'administration américaine à l'égard de l'Afrique du Sud a été particulièrement choquante. Trump a expulsé l'ambassadeur sud-africain et imposé des sanctions en réponse à la politique d'expropriation des terres et aux positions de politique étrangère de Pretoria, notamment sa volonté de tenir Israël responsable du génocide qu'il commet à Gaza. Le gouvernement américain maintient que cela implique de la sympathie pour le Hamas et l'Iran.

Ces mesures punitives reflètent le malaise général du trumpisme à l'égard des gouvernements qui remettent en question l'hégémonie américaine, en particulier ceux du groupe des BRICS. En qualifiant les positions politiques de l'Afrique du Sud d'« anti-américaines », Trump a effectivement rompu l'une des relations diplomatiques les plus importantes entre les États-Unis et une puissance africaine. Cela s'inscrit également dans la volonté générale de sa présidence de privilégier les États autoritaires de droite et d'isoler les gouvernements qu'il considère comme de gauche ou indépendants.

Les États-Unis, la Chine et les ressources africaines

En même temps, le gouvernement de Trump cherche à établir un type de relation différent avec certains pays africains, notamment en ce qui concerne les ressources. Il négocie actuellement un traité sur les minéraux stratégiques avec la République démocratique du Congo (RDC). Il propose une assistance militaire en échange d'un accès exclusif à des minéraux critiques, indispensables aux industries de pointe des États-Unis, en particulier le secteur technologique et l'industrie militaire. L'accord garantirait aux entreprises américaines un contrôle étendu sur l'extraction du cobalt et d'autres minéraux essentiels. Cela reflète un changement dans la stratégie des États-Unis, qui remplacent l'aide au développement par une extraction économique directe.

Le gouvernement américain affirme que cette collaboration contribuera à stabiliser la RDC en lui apportant une aide en matière de sécurité. Les critiques, quant à elles, estiment que cette démarche risque d'intensifier une dynamique néocoloniale en donnant la priorité à l'extraction des ressources plutôt qu'à un véritable développement économique.

La politique de la Chine à l'égard de l'Afrique est elle aussi en mutation. Pendant deux décennies, Pékin a été le principal partenaire économique du continent, finançant des infrastructures et commerçant à une échelle bien supérieure à celle de toute autre puissance étrangère. Cependant, avec le ralentissement de l'économie chinoise, sa disposition à accorder des prêts importants aux gouvernements africains s'est réduite. Des pays comme la Zambie et le Kenya, lourdement endettés envers la Chine, subissent déjà les pressions de cette nouvelle stratégie de crédit. Il semble que l'époque où la Chine offrait des facilités de financement pour de grands projets d'infrastructure touche à sa fin.

Cela place les pays africains dans une position précaire. De nombreux gouvernements, qui ont structuré leur économie autour d'investissements chinois continus, peinent désormais à s'adapter à cette nouvelle réalité. Ce changement réduit les options de financement extérieur pour l'Afrique, d'autant plus que les institutions financières occidentales imposent elles aussi des conditions de plus en plus strictes pour l'octroi de prêts, en particulier aux pays fortement endettés.

Une nouvelle politique est-elle possible ?

Pour les gouvernements africains, ces changements soulèvent des questions difficiles en matière de stratégie politique et économique. Le déclin des mouvements de libération nationale n'a pas encore conduit à l'émergence d'alternatives progressistes viables. Les partis d'opposition à travers la région défendent pour la plupart des modèles de gouvernance néolibéraux au lieu d'articuler de nouvelles approches de transformation économique. Plutôt qu'un tournant clair vers un renouveau démocratique, une grande partie du continent semble tiraillée entre la montée de la répression étatique et la fragmentation des oppositions. Beaucoup de partis d'opposition, bien qu'ils critiquent les gouvernements en place, n'ont pas été en mesure de proposer des programmes économiques rompant avec le paradigme néolibéral dominant. Cela signifie que, même dans les pays où les partis au pouvoir subissent un déclin électoral, il y a peu d'éléments laissant croire que leur remplacement transformerait réellement le paysage politique ou économique.

Bien que des mouvements impliqués dans des luttes syndicales ou communautaires continuent de revendiquer un changement, leur capacité à remettre en cause les structures de pouvoir établies demeure incertaine. La faiblesse actuelle des alternatives de gauche en Afrique reflète une tendance mondiale plus large, où les forces socialistes et social-démocrates peinent à se réaffirmer dans un monde dominé par le capital financier et le pouvoir des entreprises.

Cependant, il y a des signes que cela pourrait changer. D'un bout à l'autre du continent, les appels à la souveraineté économique se multiplient, à des programmes de renforcement de la protection sociale et aux résistances financières extérieures. Si ces luttes donnent naissance à des formations politiques cohérentes, elles pourraient jeter les bases d'un nouveau type de politique, une politique qui rompt avec les échecs des partis issus de la libération et les limites des forces d'opposition libérales.

L'ordre politique postcolonial en Afrique est en train de s'effondrer, mais on est loin d'être clair sur ce qui va suivre. L'érosion de la légitimité des partis au pouvoir ne s'est pas encore traduite par une transformation significative du système. Dans de nombreux cas, elle n'a fait qu'ouvrir la porte à de nouvelles formes de manœuvre des élites. En cette période de transition, la véritable bataille ne se limite pas au seul terrain électoral, mais concerne la nature même de l'État, la gouvernance économique et la place de l'Afrique dans un ordre mondial en mutation rapide. Jusqu'à ce que des alternatives émergent pour faire face aux dépendances du continent vis-à-vis de la finance mondiale, de l'extraction des ressources et de la croissance basée sur la dette, l'Afrique continuera d'être soumise à des cycles d'instabilité, avec ou sans les anciens mouvements de libération aux commandes.

02/04/2025

Will Shoki

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Québec solidaire doit s’opposer au projet de loi 97 visant principalement à moderniser le régime forestier et doit demander une large consultation publique sur la préservation et la gestion des forêts du Québec

10 juin, par Comité d'action politique écologiste de Québec solidaire — , ,
Proposition d'urgence du CAP Écologiste présentée au Conseil national des 7-8 juin 2025. Cette proposition d'urgence a été adoptée par le Conseil national de Québec solidaire (…)

Proposition d'urgence du CAP Écologiste présentée au Conseil national des 7-8 juin 2025. Cette proposition d'urgence a été adoptée par le Conseil national de Québec solidaire tenu les 7 et 8 juin dernier.

1. CONSIDÉRANT que l'urgence climatique et la nécessité de protéger et de restaurer la biodiversité ne sont plus à démontrer.

2. CONSIDÉRANT que le Québec adhère au Cadre mondial de la biodiversité de Kunming adopté à Montréal en 2022 par la 15e Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique.

3. CONSIDÉRANT que le projet de loi 97 néglige plusieurs mesures de protection de la biodiversité de l'accord Kunming, notamment, la protection des territoires, leur usage durable dans le respect des droits des communautés autochtones et locales ainsi que la protection de la biodiversité dans l'ensemble des politiques publiques.

4. CONSIDÉRANT que de nombreux acteurs s'opposent à l'adoption du projet de loi 97 [1] , notamment les peuples autochtones qui n'ont pas été parties prenantes de la consultation visant à réformer le régime forestier du Québec ainsi que la Fédération québécoise des municipalités (FQM) qui craignent de voir les ressources forestières de leurs territoires ne soient exploitées par l'industrie forestière à un rythme non viable et qui ne permet pas de préserver les emplois de ce secteur à plus long terme.

5. CONSIDÉRANT que les forêts jouent un rôle essentiel dans un contexte de crise climatique, puisqu'elles captent et séquestrent le carbone.

6. CONSIDÉRANT que les forêts sont déjà affectées par le réchauffement climatique et que Québec solidaire doit prévoir des mesures pour accompagner leur adaptation et favoriser leur résilience.

7. CONSIDÉRANT, d'après ce qui précède, qu'il y urgence d'agir, le Comité d'action politique écologiste propose :

1. Que Québec solidaire s'oppose à l'adoption du projet de loi 97 dans sa forme actuelle ;

2. Que Québec solidaire exige qu'une nouvelle mouture du projet de loi 97 protégeant adéquatement les milieu naturels soit déposée à l'automne ;

3. Que Québec solidaire exige la tenue d'une vaste consultation publique portant sur la modernisation du régime forestier ainsi que sur la préservation des forêts du Québec. Dans le cadre de ce processus démocratique, les divers acteurs seront invités à prendre part aux décisions, notamment les peuples autochtones, les municipalités et leurs regroupements, les syndicats, la société civile, l'industrie du tourisme et l'industrie forestière. Cette consultation devra prendre en compte les études les plus récentes qui concernent l'état de nos forêts au Québec et les meilleures pratiques pour les préserver.

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« Les massacres en Palestine sont similaires à ceux de la colonisation en Afrique »

Entretien · Malgré une solidarité ancienne avec la cause palestinienne forgée dans les luttes anticoloniales, les États africains peinent à faire face à l'influence (…)

Entretien · Malgré une solidarité ancienne avec la cause palestinienne forgée dans les luttes anticoloniales, les États africains peinent à faire face à l'influence israélienne. L'ambassadeur de Palestine en Côte d'Ivoire, Abdal Karim Ewaida, décrypte ces relations, et il se félicite de ce qu'il analyse comme le réveil de l'engagement africain en faveur de son pays.

Tiré d'Afrique XXI.

Alors que Gaza subit depuis plus de dix-huit mois une guerre génocidaire, un basculement discret s'opère en Afrique : celui d'un réveil diplomatique sur la cause palestinienne. En janvier 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) a reconnu la plausibilité d'un génocide à Gaza, à la suite de la plainte déposée par l'Afrique du Sud. Cet engagement est historique, même s'il n'a pas permis de mettre fin à la violence israélienne. Dans la foulée, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples a adopté une résolution (1) condamnant l'« apartheid » israélien qui responsabilise les États africains.

Mais la solidarité avec la Palestine reste fragmentée. Elle est portée par certains pays comme l'Afrique du Sud, l'Algérie, la Namibie, le Sénégal. Le Cameroun ou l'Érythrée refusent encore de reconnaître l'État de Palestine. Le Rwanda, pourtant marqué par le génocide des Tutsis en 1994, demeure un allié de Tel-Aviv. Le Maroc, malgré des manifestations imposantes contre la normalisation de ses relations avec Israël, poursuit sa coopération sécuritaire et technologique.

Comment expliquer ces dissonances ? Quel rôle jouent les calculs diplomatiques, les partenariats sécuritaires ou encore l'influence grandissante des Églises évangéliques pro-israéliennes ? Que peut faire le continent pour la Palestine ? Ancien ministre des Affaires étrangères, ex-ambassadeur au Niger et au Burkina Faso, l'ambassadeur de Palestine en Côte d'Ivoire, Abdal Karim Ewaida, répond à ces questions dans un entretien accordé à Afrique XXI où il décrypte les batailles politiques au sein de l'Union africaine (UA) et appelle le continent africain à transformer sa mémoire historique en force diplomatique.

« Israël a une diplomatie patiente, méthodique et opaque »

Raouf Farrah : En 2020, Israël a tenté d'obtenir le statut d'observateur auprès de l'UA. Cela a déclenché une intense bataille diplomatique qui a conduit à son exclusion, en 2023. Ce n'était pas une première : Israël courtise l'UA depuis deux décennies. Que révèle, selon vous, cette séquence ?

Abdal Karim Ewaida : Cette tentative n'était pas anodine. Israël cherchait à redéfinir les équilibres diplomatiques du continent à son avantage, en misant sur les divisions internes à l'UA. Depuis 2002, il multiplie les démarches pour obtenir un statut officiel qui lui permettrait d'influencer de l'intérieur les décisions collectives africaines. Cette offensive a mis au jour une ligne de fracture entre les États qui privilégient des partenariats stratégiques immédiats – sécuritaires, agricoles, technologiques – et ceux qui restent fidèles aux principes fondateurs de l'UA : l'autodétermination, les droits humains et la solidarité avec les peuples opprimés.

Accorder ce statut à Israël aurait représenté une rupture symbolique majeure : cela aurait affaibli l'engagement collectif de l'Afrique en faveur de la Palestine et miné sa crédibilité sur la scène internationale. Fort heureusement, des pays comme l'Afrique du Sud, l'Algérie et la Namibie se sont mobilisés pour faire barrage.

Mais ce refus n'a pas mis fin à la stratégie israélienne. Elle se poursuit sous d'autres formes, plus discrètes : des relations bilatérales renforcées, notamment avec des pays influents comme l'Éthiopie – siège de l'UA – ou le Kenya. C'est une diplomatie patiente, méthodique et parfois opaque. Si elle n'est pas contrebalancée par une présence palestinienne plus active, elle risque d'éroder progressivement le soutien panafricain à notre cause.

Raouf Farrah : Diriez-vous qu'Israël instrumentalise les vulnérabilités africaines pour asseoir son influence et affaiblir le soutien africain à la Palestine ?

Abdal Karim Ewaida : L'expansion de la présence israélienne en Afrique s'inscrit dans une stratégie assumée : renforcer son influence diplomatique, construire des alliances stratégiques et redéfinir les équilibres régionaux à son avantage. Israël investit dans des secteurs clés – sécurité, agriculture, innovation –, et cela répond aux besoins immédiats de nombreux États africains, confrontés au terrorisme, à l'insécurité alimentaire ou aux défis climatiques. Plusieurs gouvernements perçoivent cette coopération comme un levier de modernisation.

En 2017, Benjamin Netanyahou est devenu le premier chef d'État non africain à s'adresser à la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao). Depuis, les interactions entre dirigeants africains et responsables israéliens se sont intensifiées. Mais derrière cette coopération technique se cache une stratégie politique. En renforçant ses partenariats économiques et militaires, Israël cherche aussi à affaiblir le soutien africain à la Palestine dans les forums internationaux, notamment aux Nations unies. Des logiques de dépendance se créent, rendant certaines capitales frileuses à toute critique par crainte de perdre un appui ou un investissement.

« Des combattants de l'OLP ont été formés en Afrique »

Raouf Farrah : Il existe aussi des dynamiques idéologiques et religieuses derrière le soutien à Israël sur le continent. Comment la montée en puissance du sionisme chrétien (2) influence-t-elle la cause palestinienne en Afrique ?

Abdal Karim Ewaida : Le sionisme chrétien en Afrique puise ses racines dans l'héritage des missions chrétiennes occidentales, qui ont façonné de nombreuses communautés évangéliques à travers le continent. Aujourd'hui, bon nombre de ces Églises, influencées par des réseaux états-uniens, perçoivent le soutien à Israël comme un devoir religieux associé à l'accomplissement de prophéties bibliques. Cette vision contribue à une forte domination des récits pro-israéliens qui relèguent souvent la souffrance palestinienne à l'arrière-plan, voire la nient totalement.

Dans certains contextes, cette influence alimente même une rhétorique ouvertement hostile aux Palestiniens. Mais il est important de souligner que le sionisme chrétien ne représente pas l'ensemble des voix religieuses africaines. De nombreuses organisations, de nombreux intellectuels et chefs spirituels – notamment en Afrique de l'Ouest et en Afrique du Sud – continuent de manifester un soutien actif à la cause palestinienne. Cela dit, faire face à l'impact grandissant du sionisme chrétien nécessite bien plus que des déclarations de principes. La sensibilisation est cruciale : intégrer des discours sur les droits humains, l'histoire coloniale et la réalité du terrain dans les cercles de foi peut aider à déconstruire des récits biaisés et à favoriser une compréhension plus équilibrée et plus empathique du combat palestinien.

Raouf Farrah : La quasi-totalité des pays africains, à l'exception du Cameroun et de l'Érythrée, reconnaissent officiellement l'État de Palestine. Cette reconnaissance politique s'est-elle traduite par un véritable appui ?

Abdal Karim Ewaida : Pour beaucoup de pays africains, la cause palestinienne n'est pas perçue comme une affaire étrangère mais comme le prolongement naturel de leurs propres luttes pour la liberté, l'émancipation et la dignité. Il faut rappeler que l'État de Palestine a été proclamé en 1988 à Alger, sur le sol africain : un symbole fort. Et bien avant cela, dès 1974, l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) obtenait le statut d'observateur auprès de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), l'ancêtre de l'UA. Ce sont des gestes politiques lourds de sens, qui ont confirmé un ancrage profond et commun aux deux histoires. Mais ce lien ne s'est pas joué uniquement dans les discours. Il a pris une forme très concrète sur le terrain. Des combattants de l'OLP ont été formés dans plusieurs pays d'Afrique, notamment en Algérie, en Angola, au Mozambique ou encore en Tanzanie. Il existait une solidarité militaire et révolutionnaire entre mouvements de libération.

Les liens entre l'OLP et l'African National Congress (ANC) en Afrique du Sud en sont un exemple emblématique : ils partageaient des réseaux, des soutiens et des stratégies de résistance. Pendant longtemps, la base arrière de l'OLP à Tunis était également un point de coordination politique et diplomatique majeur, qui accueillait régulièrement des délégations africaines et internationales.

Cette solidarité s'est également manifestée sur la scène internationale. Dans les années 1970 et 1980, l'Afrique a joué un rôle clé dans les grandes tribunes multilatérales – que ce soit aux Nations unies, à l'intérieur du Mouvement des non-alignés ou au sein de la défunte OUA – pour défendre les droits des Palestiniens à la souveraineté et à l'autodétermination. C'est une alliance historique, forgée dans les luttes communes contre le colonialisme, l'apartheid et l'oppression systémique.

Des pays comme l'Afrique du Sud, la Namibie, le Nigeria ou l'Algérie maintiennent un engagement ferme aux côtés de la Palestine aujourd'hui. Mais pour préserver cette solidarité, la Palestine doit intensifier sa présence sur le continent : diplomatique, mais aussi culturelle, économique et populaire. Le soutien des sociétés civiles africaines est essentiel pour contrebalancer l'influence israélienne et raviver un lien qui, historiquement, reposait sur des luttes communes de libération.

La reconnaissance diplomatique a été bien plus qu'un simple symbole. Elle s'est appuyée sur des liens historiques, politiques et humains profonds. La vraie question aujourd'hui est de savoir comment raviver cette solidarité dans un monde qui a profondément changé.

« Un engagement sur les droits humains plus concret »

Raouf Farrah : Un autre signal fort est venu de l'UA. Après plus de deux décennies de relatif silence, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples a adopté en 2024 une résolution qui condamne l'« apartheid » israélien. Cette prise de position marque-t-elle une nouvelle étape ?

Abdal Karim Ewaida : Oui. L'adoption de la résolution 611 marque un tournant dans l'engagement de l'institution africaine envers la cause palestinienne, après une période de relative inaction, ponctuée seulement par des communiqués de solidarité.

Cette résolution relance l'implication africaine dans les débats sur les droits humains en Palestine, mais l'Afrique ne peut s'en contenter ; ce texte doit être le point de départ d'un engagement plus concret et mieux structuré. Par exemple, la mise en place d'un mécanisme permanent de suivi sur la situation en Palestine permettrait de documenter de manière systématique les violations, dont les expulsions forcées, les agressions militaires, les détentions arbitraires, les restrictions des libertés… Ces données seraient précieuses pour les actions diplomatiques et juridiques à venir.

La publication de rapports, intégrant témoignages et analyses juridiques, renforcerait la pression sur les États africains pour qu'ils adoptent des positions claires sur la Palestine et leurs liens avec Israël. La Commission peut également inciter les gouvernements africains à transformer les résolutions en actions dans le domaine de l'aide humanitaire ou de la coopération économique avec la Palestine.

En parallèle, une meilleure collaboration entre ONG africaines et palestiniennes impliquées dans les droits humains permettrait de consolider ces engagements. D'ailleurs, ces voix ont joué un rôle clé dans l'adoption de la résolution 611. Par conséquent, cette résolution est une avancée, mais elle doit déboucher sur un plaidoyer actif, des politiques concrètes et une mobilisation soutenue.

Raouf Farrah : L'action engagée par l'Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice contre Israël n'a pas permis d'arrêter la guerre génocidaire menée à Gaza et en Cisjordanie. Au-delà de l'action judiciaire, quelle est sa portée pour les Palestiniens ?

Abdal Karim Ewaida : Cette action marque un tournant juridique et politique majeur dans l'histoire du Sud global, puisque c'est un pays africain qui réaffirme la validité de la Convention pour la prévention du génocide (1948) et mobilise le droit international comme outil contre l'impunité israélienne. Le 26 janvier 2024, suite à l'action de l'Afrique du Sud, la CIJ a rendu une ordonnance reconnaissant la plausibilité des accusations de génocide et a ordonné à Israël de prendre des mesures immédiates pour empêcher tout acte génocidaire et faciliter l'accès à l'aide humanitaire pour les Palestiniens de Gaza. Aucune de ces mesures n'a été appliquée.

En saisissant la CIJ, l'Afrique du Sud affirme au monde que les violences systématiques et à grande échelle infligées aux Palestiniens de Gaza ne peuvent rester impunies. D'autres pays, notamment africains, ainsi que l'UA, ont depuis rejoint cette initiative, renforçant la légitimité de la démarche et attestant d'un consensus international croissant sur la nécessité de rendre justice.

Au-delà de sa dimension juridique, cette procédure pèse considérablement politiquement. En contraignant la communauté internationale à examiner juridiquement les actions d'Israël, l'Afrique du Sud et ses alliés contribuent à élargir la prise de conscience mondiale face à la crise en cours à Gaza. Cette initiative pourrait accentuer la pression sur Israël et nourrir des débats plus larges sur les droits humains et l'application du droit international humanitaire. Le ralliement d'autres pays à cette action juridique témoigne d'une solidarité diplomatique qui dépasse les discours et se traduit par des actes concrets, comme la création du Groupe de La Haye (3), un groupe d'États du Sud global soutenant la plainte sud-africaine.

Si la CIJ donnait raison à l'Afrique du Sud, cela établirait un précédent majeur, réutilisable dans d'autres affaires de violations graves des droits humains et de crimes internationaux. Un tel jugement ne concernerait pas uniquement Israël, mais enverrait aussi un signal fort à tous les États qui s'adonnent à des pratiques d'oppression systématique.

« Des atrocités au nom de la mission civilisatrice »

Raouf Farrah : Vous avez évoqué l'importance de mobiliser la mémoire collective et les expériences historiques communes entre l'Afrique et la Palestine. En quoi ce que vivent les Palestiniens fait-il écho aux crimes coloniaux subis par les Africains ?

Abdal Karim Ewaida : Les massacres commis par les anciennes puissances coloniales en Afrique présentent de fortes similitudes avec la situation actuelle en Palestine. À travers le continent, des atrocités ont été commises en Namibie, en Algérie, au Congo et au Cameroun – pour ne citer que ces cas – au nom de la mission civilisatrice, justifiées par une idéologie raciste de déshumanisation des peuples colonisés.

Cette logique raciste visant à effacer l'identité de l'autochtone se retrouve dans les discours qui légitiment l'occupation israélienne, niant aux Palestiniens leur humanité et leurs aspirations. Les pratiques coloniales – déplacements forcés, massacres, destruction des moyens de subsistance – trouvent aujourd'hui un écho dans les territoires palestiniens, notamment à Gaza et en Cisjordanie.

Un autre parallèle frappant est l'inaction internationale. Comme dans les génocides africains (4), la communauté internationale est bloquée par les intérêts géopolitiques de pays entretenant un climat d'impunité totale.

Raouf Farrah : Malgré ces parallèles historiques, certains pays africains restent silencieux sur le génocide en Palestine. On pense notamment au Rwanda ou au Cameroun, le premier marqué par un génocide et l'autre par une guerre de libération sanglante. Comment expliquer ces prises de distance ?

Abdal Karim Ewaida : C'est une question complexe. La réticence de certains pays africains à soutenir la Palestine ne vient pas nécessairement d'un désaccord de fond, mais plutôt de priorités politiques internes : stabilité, développement économique, sécurité nationale.

Dans certains cas, c'est aussi une question de diplomatie stratégique. Ces États évitent de prendre des positions internationales jugées sensibles, notamment pour ne pas compromettre leurs relations avec Israël ou avec des partenaires occidentaux influents. Il faut aussi comprendre que certaines personnes au pouvoir adoptent une posture de prudence qu'elles justifient au nom du « pragmatisme ». On préfère parfois le silence à une prise de position pouvant être perçue comme risquée.

Cela dit, cette prudence institutionnelle contraste fortement avec une opinion publique africaine souvent beaucoup plus favorable à la cause palestinienne, une opinion marquée par des récits de colonisation, de résistance et par une forte identification à la souffrance du peuple palestinien. Ce décalage entre les gouvernements et les populations met en lumière les tensions qui traversent aujourd'hui la politique étrangère de plusieurs pays africains : d'un côté, les intérêts d'État et les équilibres géopolitiques, de l'autre, une attente morale et historique de cohérence. Et c'est dans cet espace-là que se joue aussi la crédibilité du continent sur la scène internationale.

« Il faut enrichir la solidarité entre la Palestine et l'Afrique »

Raouf Farrah : Le champ médiatique africain, à l'instar du champ religieux, est aujourd'hui traversé par des récits concurrents sur la Palestine. D'après vous, les médias africains permettent-ils encore à la voix palestinienne de se faire entendre ?

Abdal Karim Ewaida : Honnêtement, la couverture est très inégale. Dans certains pays, la question palestinienne revient régulièrement dans les journaux ou les débats télévisés. Mais dans d'autres, elle est absente. Ce décalage s'explique par plusieurs facteurs : d'abord, le poids des alliances politiques et les pressions gouvernementales. Là où les gouvernements entretiennent des liens étroits avec Israël ou ses alliés occidentaux, les médias tendent à s'autocensurer. Le simple fait d'aborder la question palestinienne peut devenir politiquement sensible, voire risqué.

Beaucoup de pays africains traversent des crises majeures – conflits internes, instabilité économique, tensions sociales. Dans ce contexte, les rédactions privilégient naturellement les urgences locales. Ce n'est pas toujours un choix politique. Parfois, il s'agit juste de couvrir ce qui capte l'attention du public.

Mais il y a aussi un autre angle qu'on oublie souvent : la propriété des médias et les influences idéologiques. Certains évitent de prendre position pour ne pas heurter des groupes politiques ou religieux influents. D'autres, souvent financés de l'étranger, adoptent des récits pro-israéliens, parfois de manière implicite.

Les médias ont un rôle essentiel à jouer. Il ne suffit pas de relayer les nouvelles de Gaza ou de Cisjordanie lors des flambées de violence. Il faut aller plus loin : produire du journalisme d'enquête, diffuser des témoignages directs, analyser les racines du conflit et les relier aux expériences africaines de colonialisme, de résistance, de lutte pour la dignité. Il ne s'agit pas seulement de contrer l'influence d'Israël ; il s'agit d'enrichir une solidarité politique, culturelle et humaine qui a toujours existé entre la Palestine et l'Afrique.

Notes

1- CADHP, Résolution sur la situation en Palestine et dans les territoires occupés, 2024, disponible ici.

2- la nouvelle administration Trump », The Conversation, 18 janvier 2025, à lire ici.

3- Le Groupe de la Haye, Déclaration conjointe du 31 janvier 2025, voir ici.

4- Aujourd'hui, deux génocides africains ont été reconnus : celui des Hereros et des Namas en Namibie, à partir de 1904, et celui des Tutsis au Rwanda, en 1994.

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Que reste-t-il du projet progressiste du gouvernement Lula ?

Tant que le nouveau cadre budgétaire et la recherche d'un déficit zéro persisteront, le gouvernement s'enfoncera dans les contradictions et continuera à perdre en popularité (…)

Tant que le nouveau cadre budgétaire et la recherche d'un déficit zéro persisteront, le gouvernement s'enfoncera dans les contradictions et continuera à perdre en popularité

28 mai 2025 | tiré d'Europe solidaire sans frontières
https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article75216

Récemment, l'ancien président de la Banque centrale, Armínio Fraga, a réaffirmé la nécessité pour le gouvernement brésilien de geler le salaire minimum pendant six ans, afin qu'il n'y ait pas de réelles 'augmentations, mais seulement d'ajuster le montant en fonction de l'inflation de l'année précédente. Fraga a souligné que les dépenses liées à la masse salariale et à la sécurité sociale atteignent 80 % du budget, raison pour laquelle un ajustement drastique de cet ordre serait une nécessité absolue. L'ancien président a également affirmé que le pays avait besoin d'une réforme plus profonde de la sécurité sociale, sur le modèle de l'ajustement mis en œuvre par le président argentin, Javier Milei. Il est intéressant de noter qu'Armínio n'a pas mentionné le fait que la pauvreté en Argentine touche 57,4 % de la population, le niveau le plus élevé en 20 ans, et que l'indigence touche 15 % de la population argentine.

Au Brésil, le salaire minimum a une grande influence sur l'économie et la vie des travailleurs. Outre qu'il définit le salaire minimum légal pour les salariés, il sert de référence pour la rémunération des travailleurs indépendants et fixe le montant minimum des prestations de sécurité sociale, telles que les retraites, les allocations et les allocations de chômage. Son actualisation a donc un impact direct sur le pouvoir d'achat de la population, ce qui stimule la consommation et réduit les inégalités. Pour illustrer cela, sans les augmentations obtenues entre 2004 et 2019, le salaire minimum en 2019 serait de seulement 573,00 R$ au lieu de 998,00 R$, c'est-à-dire que les augmentations cumulées au cours de cette période ont représenté une hausse de 425,00 R$ au-dessus de l'inflation. Cette progression a non seulement augmenté la rémunération des travailleurs formels mais a également eu une incidence sur les salaires minimums de plusieurs catégories, tant dans les négociations entre les syndicats et les entreprises que dans des textes législatifs spécifiques, comme pour les salaires minimums dans l'éducation et la santé. Elle a en outre favorisé l'adoption de salaires minimums dans des régions telles que le Sud, São Paulo et Rio de Janeiro. Il en a résulté une concentration des travailleurs dans la tranche comprise entre un et deux salaires minimums, ce qui a réduit les inégalités dans la répartition des revenus du travail et augmenté la part des salaires dans l'économie.

Malgré ces progrès, le salaire minimum est encore loin de respecter les dispositions de la Constitution qui prévoit un montant susceptible de couvrir les besoins fondamentaux du travailleur et de sa famille, notamment le logement, l'alimentation, la santé et l'éducation. Ce défi devient encore plus urgent compte tenu des récentes modifications de la législation du travail, telles que les lois 13.429/2017 et 13.467/2017, qui ont affaibli les droits et accru les contrats précaires par exemple pour le travail en interim et la levée des restrictions à l'externalisation. Dans ce contexte, la revalorisation du salaire minimum apparaît comme un outil essentiel pour garantir un revenu décent, en particulier aux travailleurs les plus vulnérables.

Selon l'IBGE, en 2024, le revenu moyen des 40 % les plus pauvres atteignait 601 reais et les 1 % de la population brésilienne ayant les revenus les plus élevés percevaient l'équivalent de 36,2 fois le revenu des 40 % les plus pauvres. En outre, les données du rapport d'Oxfam montrent que 63 % de la richesse du Brésil est entre les mains de 1 % de la population. L'enquête souligne également que les 50 % les plus pauvres ne détiennent que 2 % du patrimoine du pays. L'étude fournit également des détails sur le groupe qui accumule le plus de richesse.
Selon ce document, 0,01 % de la population brésilienne possède 27 % des actifs financiers.

Mais sur cette question, le fondateur et associé de Gávea Investimentos, Armínio Fraga, n'a rien dit, et il a encore moins dit que lorsque la Banque centrale augmente les taux d'intérêt de 0,5 %, cela entraîne une augmentation de 2,9 milliards de reais par an des dépenses publiques, selon les estimations du Trésor national. Cette augmentation profite directement aux 0,01 % les plus riches de la population brésilienne. Il n'a pas non plus commenté les résultats de la perception de l'impôt foncier rural (ITR) entre 2019 et 2024, qui, malgré l'augmentation des recettes, atteignant 3 milliards de réaux, correspond au montant perçu uniquement grâce à l'impôt foncier (IPTU) du quartier de Pinheiros, dans la ville de São Paulo. Plus inquiétant encore, cependant, est le fait que, depuis 2008, le gouvernement a modifié les règles fiscales, transférant aux municipalités la responsabilité de l'enregistrement cadastral et du contrôle des propriétés rurales, ainsi que les recettes collectées, alors qu'à l'origine, conformément à la loi foncière, l'ITR était destiné à financer la réforme agraire. En conséquence, les grandes propriétés rurales contribuent à hauteur de montants dérisoires, recourant souvent à la fraude fiscale, tandis que les ressources collectées ne remplissent pas leur fonction sociale.
Manifester une préoccupation pour l'économie et la société brésiliennes et prescrire des remèdes qui ne font qu'accentuer les inégalités, qu'elles soient de revenus, de genre, de race ou d'éducation, est devenu une pratique courante parmi les grands noms de la politique brésilienne, comme c'est le cas d'Armínio Fraga, et même du gouvernement fédéral lui-même ; c'est le cas des coupes effectuées dans le Benefício de Prestação Continuada (BPC) et le Bolsa Família, des programmes de redistribution des revenus essentiels pour la population brésilienne.

Je ne peux pas non plus passer ici sous silence la récente restriction des dépenses dont la promulgation a fait l'objet du décret n° 12.448 qui établit le programme budgétaire de l'exécutif pour l'exercice 2025. Pour les universités fédérales, ce décret représente une réduction considérable de leurs ressources, qui ne sont déjà pas très importantes. La recherche incessante par le gouvernement de moyens pour réduire le déficit et satisfaire le marché produit ces prétendus remèdes au goût insupportable et nuisibles aux services publics comme à leurs utilisateurs.

Cette même semaine, le gouvernement a également signé le décret n° 12.456/2025, qui réglemente la nouvelle politique d'enseignement à distance (EaD), une mesure importante et nécessaire compte tenu du grand dispositif trompeur mis en place par les conglomérats éducatifs pour capter l'argent des enfants de la classe ouvrière qui souhaitent étudier, que sont devenus les cours EaD. Ce modèle d'enseignement (et d'affaires) a été présenté haut et fort par ses défenseurs comme un moyen de « démocratiser » l'éducation, ce qui est sans nul doute une affirmation fausse, puisque l'enseignement d'excellence, que ce soit dans l'éducation de base ou dans l'enseignement supérieur, trouve sa forme la plus efficace dans l'enseignement présentiel. Les institutions académiques les plus renommées, tant au niveau national qu'international, adoptent et valorisent ce modèle d'apprentissage.

Maintenant, réfléchissons à ceci : si, tout en limitant les cours à distance (ce qui est juste), le gouvernement fédéral réduit les dépenses des universités fédérales, qui voient leurs ressources diminuer d'année en année et leur capacité à offrir des bourses et des aides réduites en permanence, comment la population la plus pauvre va-t-elle pouvoir étudier ? N'est-il pas évident que cela a également un effet sur la façon dont les gens perçoivent les possibilités d'accès à l'éducation et la difficulté de faire des études ? Jusqu'à quand le président Lula va-t-il suivre les recettes d'Armínio Fraga et de ses acolytes, au détriment de la population qui l'a élu ? Le peuple veut pouvoir étudier, avoir un salaire décent, avoir accès à des soins et à une éducation de qualité, ce qui ne peut se concrétiser tant que le nouveau cadre budgétaire et la recherche du déficit zéro restent les objectifs du gouvernement. Et avec cela, la popularité de Lula ne fait que diminuer. Finalement, parmi toutes ses promesses de campagne, laquelle en fait tient-il réellement et intégralement ?

Bianca Valoski est doctorante au programme de troisième cycle en politiques publiques de l'Université fédérale du Paraná dans le domaine de la recherche en économie politique de l'État national et de la gouvernance mondiale. Elle est fonctionnaire à la mairie de São José dos Pinhais, où elle travaille dans les finances publiques.

P.-S.
Traduit pour ESSF par Pierre Vandevoorde avec l'aide de DeepLpro
https://movimentorevista.com.br/2025/05/o-que-restou-da-agenda-progressista-do-governo-lula/

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Panama est l’épicentre de la lutte en Amérique latine – Journée internationale de solidarité avec le peuple panaméen le 9 juin

10 juin, par José Cambra, Luis Bonilla Molina — , ,
Un petit pays de 4,2 millions d'habitant·es montre à l'Amérique latine et au monde qu'il est possible d'affronter les intérêts du capital financier et des fonds vautours dans (…)

Un petit pays de 4,2 millions d'habitant·es montre à l'Amérique latine et au monde qu'il est possible d'affronter les intérêts du capital financier et des fonds vautours dans la troisième décennie du 21e siècle.

3 juin 2025 | tiré d'Inprecor.org
https://inprecor.fr/node/4783

Il y a quelques jours, le sang d'un jeune indigène de douze ans, grièvement blessé par la répression gouvernementale, a montré que le conflit entrait dans une nouvelle phase. Peu avant, Saúl Méndez, le principal dirigeant du puissant syndicat de la construction, a dû demander l'asile à l'ambassade de Bolivie pour éviter d'être présenté comme un trophée et mis en prison, ce qui est déjà arrivé à deux autres de ses dirigeants, Genaro López et Jaime Caballero, qui ont été envoyés dans la pire prison pour criminels de droit commun de ce pays, un syndicat dont les cotisations avaient déjà été confisquées par le gouvernement précédent, une mesure que le nouveau président a continué à maintenir, malgré les récentes perquisitions au siège de son syndicat et la fermeture de sa coopérative. Des milliers d'enseignants en grève se sont vu retirer leur fiche de paie et beaucoup d'autres ont été illégalement placés en congé permanent sans solde.

Cela se produit au milieu d'un impressionnant siège médiatique mondial correspondant à celui du pays, qui crée un rideau d'information empêchant le mouvement social et la population du monde de savoir ce qui se passe dans le petit pays d'Amérique centrale.

L'origine

En 2023, après une période de montée des luttes du mouvement enseignant et des travailleurs dans leur ensemble au Panama, la rébellion écologique populaire la plus importante du monde à ce jour au XXIe siècle a eu lieu. Après des semaines de mobilisation et de paralysie du pays, menées par les enseignants, les ouvriers du bâtiment, les travailleurs de la banane, les communautés indigènes, les jeunes, les femmes, les écologistes, les communautés et une grande partie de la classe moyenne, une décision de la Cour suprême a été obtenue, ordonnant l'arrêt des opérations de la transnationale First Quantum et la fermeture de la mine qui avait déclenché la révolte populaire. Cette décision judiciaire a annulé l'accord fallacieux conclu au parlement panaméen, qui visait à prolonger la destruction de l'environnement.

Cette contre-marche des autorités publiques a été provoquée par la crainte de la bourgeoisie panaméenne face à la rébellion populaire écologique qui avait conduit à la fermeture des voies de transport les plus importantes du pays, affectant les profits des secteurs du capital. Il s'agit d'une victoire écologique sans précédent.

La réaction de la bourgeoisie panaméenne et du capital financier a été d'adopter en 2024 la candidature présidentielle de José Raúl Mulino, ancien ministre de l'Intérieur du gouvernement corrompu de Martinelli et choyé par M. Motta, le magnat de l'industrie aérienne panaméenne, des médias et d'autres opérations commerciales. Son programme, construire une nouvelle situation politique qui permettrait un retour à la domination de la rébellion pré-écologique, d'étendre les profits du capital financier dans ce pays et de réaliser l'agenda néocolonial d'une nouvelle administration Trump imminente à la Maison Blanche.

La nouveauté de l'élection du président Mulino fut l'arrivée au parlement d'un groupe important de députés indépendants, qui avaient profité de la vague de révolte populaire pour se faire une place. Ce renouvellement parlementaire, qui montrait l'intention de l'électorat de produire une nouvelle situation politique, a été rapidement trahi par la moitié de cette nouvelle faction parlementaire qui s'est rapidement mise d'accord avec le gouvernement réactionnaire de Mulino qui, élu avec seulement 34% des voix, n'avait pas de majorité parlementaire.

Cette nouvelle corrélation des forces lui permet d'aller de l'avant avec l'approbation de la loi 462, qui entraîne une nouvelle régression du système de retraite et de pension de la classe ouvrière panaméenne, qui passe d'une retraite représentant environ 60 % de son salaire à 30 % ou moins. Elle permet également aux familles riches du Panama de gérer les fonds de pension et de se lancer dans la spéculation sur les marchés financiers. En outre, le président Mulino annonce son intention de rouvrir l'exploitation minière et d'autoriser à nouveau First Quantum, en contournant la décision de la Cour suprême de justice. L'indignation s'est répandue dans tout le Panama.

Pour aggraver les choses, l'arrivée de Trump pour son deuxième mandat s'accompagne d'une intention claire de revenir à la situation de contrôle du canal de Panama, ce qui rencontre l'approbation du gouvernement Mulino, qui signe un accord pour permettre la réouverture de trois bases militaires américaines, malgré le fait que le Panama, par disposition constitutionnelle, n'a pas d'armée et qu'un traité en vigueur entre les deux pays avait établi la fin d'une telle présence militaire étrangère depuis la fin de l'année 1999. Une situation de vassalité du gouvernement américain a ainsi été créée, ce qui a conduit à un nouveau cycle de protestations.

Cinq semaines de grève nationale

Les premiers à se mettre en grève le 23 avril ont été les enseignants, qui ont annoncé qu'ils ne retourneraient pas en classe tant que la loi 462 (système de pensions et de retraites) ne serait pas abrogée, que la fermeture de l'industrie minière ne serait pas garantie et que le mémorandum d'entente militaire avec les États-Unis ne serait pas annulé. À cette occasion, des milliers de parents et de familles des écoles et des collèges décident en assemblée de soutenir la grève des enseignants de leurs enfants. Les associations scolaires ayant été supprimées par Noriega dans les années 1980, des mobilisations d'élèves du secondaire sont réapparues, tandis que l'université de Panama a été l'épicentre de réunions, de déclarations, de rassemblements et d'une méga-marche, malgré la tache inexplicable de l'expulsion par les autorités d'un étudiant pour des actions de lutte et les tentatives de transformer l'université en un "espace de négociation" et non d'action décisive en faveur de l'indignation patriotique.

Les mobilisations quotidiennes des enseignants et des professeurs, ainsi que l'entrée dans le conflit des travailleurs de la banane et du puissant syndicat de la construction, ont entraîné dans la lutte des populations entières dans les provinces de l'intérieur du pays. Cela a augmenté la qualité et le nombre des manifestants, ce qui a conduit le gouvernement de M. Mulino à déclencher une répression sans précédent au cours des dernières décennies à l'encontre du mouvement social. Les centaines de blessés et d'arrestations quotidiennes n'ont pas mis fin aux protestations, au contraire, elles les ont amplifiées.

Lorsque les comarcas indigènes sont entrées dans le conflit, la répression a été impitoyable, en particulier à l'encontre des femmes et des enfants des peuples d'origine. Le fait qu'un enfant de 12 ans et un étudiant universitaire aient été gravement blessés par les balles d'un gouvernement qui a déclaré publiquement qu'il ne se souciait pas de sa popularité (-50%), alors que les sondages publiés indiquaient que l'opinion publique approuvait son mandat à moins de 10%, montre que nous sommes face à un gouvernement à la poigne de fer qui cherche à infliger au mouvement social une défaite qui lui permettra de se débarrasser de ses principales organisations afin d'avancer dans ses plans néfastes.

Cette semaine, le conflit entre dans une phase décisive, tandis que le gouvernement joue la carte de la temporisation en espérant que les manifestations s'apaiseront dans les prochains jours. Cependant, tout indique que nous passerons des mobilisations à la paralysie du pays, ce qui nécessitera une multiplication des voix de la solidarité internationale.

La bonne méthode

L'Alianza Pueblo Unido por la Vida, la coalition de mouvements sociaux à l'origine des manifestations, a constitué un large front social pour faire face à l'offensive néo-conservatrice et néo-colonialiste de M. Mulino.

Les syndicats d'enseignants, les syndicats de travailleurs, les syndicats environnementaux et les syndicats communautaires montrent que la bonne voie consiste à aller au-delà des luttes sectorielles et à construire des alliances entre les forces nationalistes, patriotiques et de la classe ouvrière pour générer une large participation de la population afin de faire avancer les luttes et de vaincre le capital financier, les politiques extractivistes et le néo-colonialisme nord-américain.

La bourgeoisie panaméenne : entre la voracité de la financiarisation et la peur de l'explosion

Social. La contradiction à laquelle la bourgeoisie panaméenne est à nouveau confrontée, comme en 2023, est de choisir entre la voracité du capital financier qui s'en prend aux fonds de pension et aux investissements miniers et la stabilité du régime bourgeois lui-même. C'est pourquoi elle a parié sur l'écrasement de la révolte, via la manu policial, mais si elle n'y parvient pas, elle devra choisir entre reculer ou perdre le contrôle.

De plus en plus, l'association de ceux qui sont au sommet, les puissants et les riches, a de moins en moins de contacts avec le peuple et se concentre sur la propagande dans les médias qu'ils possèdent. La question est de savoir combien de temps cette situation va durer.

Révocation du mandat présidentiel

Une solution intermédiaire qui commence à résonner dans les rues est la possibilité de révoquer le mandat du président et de convoquer de nouvelles élections, mais elle se heurte à l'obstacle juridique que constitue le fait que cette action révocatoire n'a jamais été réglementée. Cependant, les initiatives légales pour y parvenir continuent d'avancer et de suivre leur cours, avec une sympathie croissante de la part des citoyens.

La destitution de Mulino a une autre voie légale, à savoir que l'Assemblée des députés devrait entendre l'accusation présentée par l'Alianza Pueblo Unido pour violation de la personnalité internationale de l'État, en raison du mémorandum de vente qui permet la réouverture des bases militaires américaines. Si les niveaux de participation communautaire en 2023 sont atteints, cela pourrait configurer une nouvelle corrélation des forces qui permettrait de juger le président actuel, sur la base des normes établies dans la Constitution panaméenne.

Cela permettrait de renverser la loi 462, de rouvrir l'exploitation minière et d'annuler le mémorandum qui a permis la réouverture des bases militaires américaines. Mais cela ne peut se faire que dans le cadre du maintien et de l'élargissement des mobilisations populaires. C'est pourquoi les prochaines heures seront déterminantes pour la suite des événements.

La nécessité de la solidarité internationale

Face à cette situation dramatique, une solidarité internationale large et plurielle des forces démocratiques et progressistes, du mouvement social et éducatif au niveau international est nécessaire. Nous ne pouvons pas laisser le peuple panaméen seul en cette heure.

C'est pourquoi le mouvement social a lancé, entre autres initiatives importantes, une campagne mondiale de protestation et de remise de déclarations de solidarité avec la lutte du peuple panaméen, devant les ambassades et consulats panaméens de chaque pays, le 9 juin 2025. Cela permettrait de commencer à briser le siège médiatique mis en place par les grandes agences de presse et d'établir un important réseau de communication alternative et de solidarité. La suite vous attend

L'événement aura lieu le 9 juin devant l'ambassade panaméenne de leurs pays.

Le 2 juin 2025

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La société civile, dernière frontière vers le totalitarisme au Salvador

10 juin, par OMAL (Observatorio de Multinacionales en América Latina) — , ,
La société civile organisée du Salvador constitue la dernière frontière du voyage que le gouvernement de Nayib Bukele a entamé vers l'État totalitaire en 2019. L'approbation (…)

La société civile organisée du Salvador constitue la dernière frontière du voyage que le gouvernement de Nayib Bukele a entamé vers l'État totalitaire en 2019. L'approbation récente de la loi sur les agents étrangers semble être l'outil utilisé pour surmonter cette dernière barrière. La communauté internationale, en particulier les institutions espagnoles présentes dans le pays, semble regarder ailleurs - quand elle n'est pas de connivence avec les intérêts corporatistes du gouvernement salvadorien - dans un contexte de stigmatisation, de criminalisation, de répression et de violence à l'encontre des organisations populaires et de ceux et celles qui défendent les droits humains.

https://www.elsaltodiario.com/revista-pueblos/sociedad-civil-ultima-frontera-totalitarismo-salvador

Omal
27 mai 2025

Comment nous en sommes arrivés là

Depuis que le président nouvellement élu Nayib Bukele a fait irruption à l'Assemblée nationale en 2020, accompagné de soldats armés, pour demander l'approbation d'un prêt destiné à lutter soi-disant contre les gangs, l'escalade du processus de concentration du pouvoir et de cooptation de toutes les institutions publiques ne s'est jamais démentie.

La première victime a été l'indépendance judiciaire. En un seul jour, en mai 2021, le procureur général - qui enquêtait sur des cas de corruption de l'exécutif - a été démis de ses fonctions et un nombre important de magistrats de la Cour suprême ont été révoqués, établissant ainsi un système judiciaire qui travaille dans l'intérêt du gouvernement. Depuis lors, le ministère public a persécuté les opposants et opposantes politiques et bloqué les enquêtes les concernant, tandis que la Cour suprême a entériné la réélection anticonstitutionnelle de Bukele pour un second mandat.

Avec un système judiciaire capturé, l'étape suivante consistait à coopter les autres organes du pouvoir politique du pays, le corps législatif et les municipalités, en changeant les règles du jeu quelques mois avant les élections de 2024. Le nombre de représentant-es à l'assemblée législative a été réduit de 84 à 60, et le nombre de municipalités a été réduit de 262 à 44. En conséquence, New Ideas - le parti de Bukele - avec d'autres groupes politiques, a réussi à gagner presque tous les sièges du pays, obtenant 57 député-es et 43 mairies, sans nier la popularité du président en raison du sentiment social d'amélioration en termes de sécurité.

Comme si cela ne suffisait pas, peu de temps après, le dernier instrument qui permettait de limiter, même temporairement, le pouvoir absolu du gouvernement est tombé : le processus de modification constitutionnelle en deux législatures. Deux jours avant la fin de son mandat, la législature précédente a approuvé un changement constitutionnel selon lequel toute modification de la Magna Carta pouvait être effectuée de manière expresse, sans devoir être ratifiée par une seconde législature. Suite à la ratification de ce changement par la nouvelle assemblée en janvier 2025, la constitution peut être réformée en deux jours sans aucun dialogue social ou débat parlementaire, à la demande d'une publication de Bukele sur les médias sociaux, comme c'est devenu la norme.

Ce processus de dégradation démocratique est sous-tendu par l'imposition d'un régime d'exception en vigueur depuis 38 mois, au cours duquel 400 personnes sont mortes sous la tutelle de l'État, tandis que 85 500 ont été capturées sans aucune garantie
Pour mesurer l'ampleur du pouvoir accumulé, le gouvernement pourrait aujourd'hui, en 48 heures seulement, s'il en avait la volonté, par exemple, introduire la peine de mort, révoquer les accords de paix ou rendre illégaux les partis politiques.

Enfin, nous ne pouvons pas oublier que ce processus de dégradation démocratique s'est accompagné de l'imposition d'un régime d'exception en vigueur depuis 38 mois, au cours duquel 400 personnes sont mortes sous la protection de l'État, tandis que 85 500 ont été capturées sans aucune garantie et sans qu'il ait été possible de prouver leur culpabilité.

C'est pourquoi la société civile salvadorienne, à travers ses diverses expressions (syndicats, mouvements populaires, ONG, médias, collectifs d'avocats, entre autres), constitue le seul et dernier contrepoids et rempart de dignité face au pouvoir absolu de Nayib Bukele.

Le récit officiel commence à se fissurer

La popularité de Bukele avait déjà commencé à baisser depuis le mois d'avril, en raison de la désapprobation par la majorité de la population salvadorienne de la réactivation des mines de métaux, ainsi que du rejet généralisé de la politique d'emprisonnement massif des migrants expulsés des Etats-Unis.

Cependant, les événements de ces dernières semaines ont été particulièrement éprouvants pour le dirigeant salvadorien. D'une part, l'incapacité des institutions publiques à gérer la crise de la mobilité provoquée par les glissements de terrain sur la route « Los Chorros » a entraîné l'arrestation de 16 transporteurs, dont l'un est décédé en garde à vue.

D'autre part, la récente révélation par le journal El Faro d'un prétendu pacte avec l'entourage de Bukele de la part de chefs de gangs pour favoriser sa victoire à la mairie de San Salvador, tremplin pour son arrivée à la présidence du pays, a généré une nouvelle réponse répressive qui a contraint plusieurs journalistes à quitter le pays face aux menaces officielles de mandats d'arrêt à leur encontre.

L'arrestation de leaders sociaux fait partie d'une stratégie : montrer au monde l'impunité avec laquelle Bukele exerce sa répression et rappeler au peuple salvadorien que personne n'est à l'abri

Cependant, les événements se sont précipités le 12 mai, lorsque des membres de la coopérative El Bosque ont été violemment réprimés, et certains d'entre eux capturés, par des membres de la police militaire alors qu'ils manifestaient pacifiquement contre l'expulsion imminente de 300 familles. Le lendemain, le conseiller juridique de la coopérative, Alejandro Henríquez, a été capturé ; aujourd'hui, avec le pasteur et président de la coopérative, José Ángel Pérez, ils sont tous deux en prison. Le même jour, face à l'indignation et au rejet de la société civile et du mouvement social, le président Bukele a publié sur le réseau social X son désormais célèbre message annonçant le projet de loi sur les agents étrangers.

Quoi qu'il en soit, la prise de conscience que le Salvador est entré dans une nouvelle dimension se fait avec l'arrestation de Ruth López le 18 mai. López est membre de l'organisation Cristosal et l'une des personnes les plus influentes du pays. Son arrestation fait partie d'une stratégie : montrer clairement au monde l'impunité avec laquelle Bukele exerce sa répression et rappeler au peuple salvadorien que personne n'est à l'abri. Les coutures du régime sont apparentes et il réagit en faisant la démonstration de sa force répressive.

Loi sur les agents étrangers

L'annonce sur les réseaux sociaux s'est rapidement concrétisée et la loi sur les agents étrangers a été formellement approuvée, de nuit et avec préméditation, le 20 mai. Alors que beaucoup d'entre nous avaient déjà fait une croix sur cette journée, le député des Nouvelles Idées Christian Guevara a présenté la loi en séance plénière à 16h40, et en moins de deux heures, elle était déjà approuvée. Sans discussion, sans étude, sans débat de fond et avec une renonciation aux formalités. Si, en 2021, la communauté internationale a réussi - comme elle s'en vante habituellement - à paralyser l'approbation d'un projet de loi similaire, cette fois-ci, les missions diplomatiques accréditées dans le pays n'ont même pas su, le jour même, qu'une loi encore plus néfaste était sur le point d'être approuvée. Elles l'ont appris en direct et, dans le meilleur des cas avec résignation, elles se sont rendu compte de leur propre inutilité.

Dans la logique de Bukele, c'est tout à fait logique : profiter de ce moment pour passer définitivement de l'autocratie au totalitarisme, avant que l'édifice ne s'écroule. La corrélation des forces au niveau international est différente aujourd'hui avec la montée de l'extrême droite et de l'administration Trump. Cependant, le récent précédent du FMI forçant un processus de non-officialisation du bitcoin démontre que, avec les bonnes incitations, la communauté internationale pourrait influencer le Petit Poucet d'Amérique centrale. Mais bien sûr, les incitations ont changé.

La loi sur les agents étrangers pourrait être le coup de grâce pour de nombreuses organisations qui, grâce à la solidarité internationale, effectuent un travail louable en tant que garants de la dignité et de l'accès aux droits

Comme cela a déjà été largement dénoncé, cette loi pourrait représenter le coup de grâce pour de nombreuses organisations qui, grâce à la solidarité internationale, effectuent un travail louable en tant que garants de la dignité et de l'accès à certains droits pour des groupes populaires historiquement abandonnés par l'État. En outre, elle aura également un impact sur d'autres groupes qui, ces dernières années, sont devenus des cibles directes des attaques et de la répression des institutions de l'État, sous la direction d'un gouvernement qui non seulement reconnaît ouvertement son mépris pour les droits humains, mais qui s'en vante également.

Désormais, toute action visant à promouvoir les droits humains peut être considérée comme une activité à motivation politique susceptible d'entraîner des amendes, la suppression du statut juridique ou l'engagement de la responsabilité pénale de ses membres. Tout cela dans un cadre de discrétion absolue et d'arbitraire de la part du gouvernement.

Les insinuations plus ou moins directes et le ton revanchard et provocateur du président de l'assemblée législative, Ernesto Castro, à l'égard d'une partie de la société civile salvadorienne lors de la séance de vote, suggèrent que la nouvelle réglementation sera utilisée de manière implacable contre toute voix critique à l'égard du gouvernement.

C'est pourquoi les mouvements qui regroupent les victimes du régime d'exception injustement emprisonnées, les organisations qui documentent et dénoncent les violations des droits humains, les avocats qui représentent les prisonniers et prisonnières politiques et accompagnent les familles des personnes disparues, les syndicalistes qui revendiquent les droits de la classe ouvrière face au démantèlement de l'État, les organisations féministes et de la diversité sexuelle, qui représentent aujourd'hui le seul soutien aux femmes victimes de violences et à la population LGTBQ+, sont particulièrement visés par cette mesure ; les journalistes, les communicateurs sociaux et les médias alternatifs qui dénoncent les cas de corruption, ou les organisations qui accompagnent les communautés menacées d'expulsion pour la construction de mégaprojets ou pour la défense de leurs terres, rivières ou forêts, courent actuellement un risque sérieux de disparition et/ou de criminalisation pour avoir représenté un échec dans l'équation du projet politique et économique du pays basé sur le culte de Bukele et l'enrichissement vorace de sa famille, de son entourage le plus proche et de l'oligarchie classique.

Il est inquiétant, parce que naïf ou mal intentionné, le discours officieux que certaines représentations diplomatiques ou agences de coopération ont tenu ces derniers jours, supposant - et par conséquent promouvant - l'inévitabilité de l'approbation de cette loi, relativisant ses impacts potentiels sous l'argument grossier que certaines agences de coopération opèrent encore au Nicaragua, en dépit de l'existence de réglementations similaires.

Cette position tente d'ignorer le fait qu'au Nicaragua, en vertu de sa propre loi sur les agents étrangers adoptée en 2020, qui est de facto moins répressive que celle de son homologue salvadorien - elle ne prévoit pas l'imposition d'une taxe sur les transactions reçues par les agents étrangers depuis l'étranger - a servi de cadre juridique à l'annulation de plus de 4 000 organisations à but non lucratif, ainsi qu'à la confiscation par l'État de leurs actifs et à la persécution de leurs dirigeants.

Réponse pusillanime ou collusion d'intérêts ?

Mais comme nous l'avons souligné au début, il ne s'agit peut-être pas seulement de réponses pusillanimes : peut-être cette nouvelle loi est-elle une réglementation qui sert les intérêts d'États tiers ? Y a-t-il une collusion d'intérêts ?

Il y a moins d'un an aujourd'hui, le roi d'Espagne Felipe VI se rendait au Salvador pour participer à l'inauguration du second mandat présidentiel de Bukele. Un jour avant la cérémonie officielle, des vétérans de guerre et des signataires des accords de paix ont été accusés de terrorisme et de subversion, sans que l'accusation ne fournisse de preuves, et aujourd'hui ils sont toujours en prison dans l'attente de leur procès. Au même moment, les organisations de défense des droits humains dénonçaient déjà la détention injuste et l'emprisonnement de milliers de Salvadoriens et Salvadoriennes dans des conditions inhumaines.

Cependant, malgré ce contexte, l'État espagnol n'a pas hésité à lancer une politique intensive pour encourager les entreprises espagnoles à investir au Salvador, en profitant de l'absence de normes environnementales et de la violation systématique des droits à la participation et à l'information des personnes et des communautés affectées par les mégaprojets. Selon le compte rendu officiel de l'ambassade d'Espagne au Salvador, il s'agirait de profiter de « la sécurité juridique qu'ils perçoivent dans le pays ».

Le Royaume d'Espagne a utilisé des fonds publics pour financer la construction d'un aéroport, laquelle a provoqué une catastrophe écologique, et a encouragé l'implantation de l'énergie nucléaire au Salvador

Sous cette prémisse, et au cours de la seule année dernière, le Royaume d'Espagne a eu le temps d'utiliser des fonds publics pour, premièrement, financer la construction d'un aéroport, ce qui a provoqué une catastrophe écologique dans l'est du pays, générant des pénuries d'eau et forçant le déplacement de douzaines de familles ; deuxièmement, promouvoir la mise en œuvre de l'énergie nucléaire au Salvador, malgré les avertissements du mouvement écologiste sur les risques qu'elle comporte dans un pays à forte activité sismique ; et troisièmement, ouvrir des glaciers dans le centre historique de San Salvador, un territoire qui fait l'objet d'innombrables plaintes de la part du voisinage concernant l'embourgeoisement par des entreprises prétendument liées à l'entourage du président.

Bien que l'exemple de l'Espagne soit le plus typique, un débarquement massif de mégaprojets d'infrastructure, de communication et d'énergie renouvelable, motivé par la stratégie de la porte d'entrée mondiale de l'UE, devrait également avoir lieu dans un avenir proche. De même, suite à la réactivation de l'exploitation des métaux dans le pays, on pourrait assister à moyen terme au retour des entreprises canadiennes, australiennes et américaines, profitant de la hausse du prix de l'or et n'excluant pas l'existence d'autres métaux directement liés à l'olivier et au capitalisme vert numérique.

En somme, la discrétion avec laquelle la solidarité internationale sera désormais canalisée, affectant directement ceux qui s'opposent au développement massif de mégaprojets touristiques, urbanistiques, agro-industriels, énergétiques et d'infrastructures en tout genre, met sérieusement en péril les minima démocratiques du pays. Tout cela, en outre, dans un contexte où le gouvernement encourage les investissements étrangers et la vente aux enchères des terres et des ressources naturelles du Salvador au plus offrant. La loi sur les agents étrangers promeut l'idée que « si nous ne les voyons pas et si nous ne les entendons pas, ils n'existent pas », un paradigme particulièrement favorable aux intérêts du pouvoir corporatif qui doit être combattu.

C'est pourquoi nous demandons à la communauté internationale de tout mettre en œuvre pour faire cesser ce scandale et de mettre toutes ses capacités politiques et diplomatiques au service de cette tâche. En même temps, nous voulons montrer notre soutien et notre engagement aux mouvements sociaux et populaires salvadoriens : quoi qu'il arrive, la solidarité internationaliste ne cessera pas, quels que soient les obstacles, et les liens déjà existants n'en seront que renforcés.

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La Chine sous pression : mobilisations populaires et fractures systémiques

10 juin, par Andrea Ferrario — , , ,
Les manifestations qui ont traversé la Chine entre mai et début juin 2025 mettent en lumière des tensions profondes et une dynamique d'instabilité croissante dans le tissu (…)

Les manifestations qui ont traversé la Chine entre mai et début juin 2025 mettent en lumière des tensions profondes et une dynamique d'instabilité croissante dans le tissu social du pays.

Tiré d'Europe solidaire sans frontière.

Une société sous pression : le tableau général des mobilisations

L'analyse des épisodes de mobilisation sociale enregistrés en Chine entre la fin du mois de mai et le début du mois de juin 2025 fait apparaître des tensions systémiques qui traversent l'ensemble du pays. Loin d'être des phénomènes isolés, ces événements mettent en évidence des fractures profondes dans la situation sociale actuelle du pays, où les difficultés économiques se mêlent à des problèmes structurels de nature politique et à des violations croissantes des droits fondamentaux.

La période considérée, qui culmine symboliquement avec le 36e anniversaire de la répression de Tiananmen le 4 juin 1989, présente une concentration extraordinaire de protestations qui, en un peu plus d'une semaine, ont investi avec intensité différents secteurs de la société : de l'industrie manufacturière à la construction, de l'éducation aux soins de santé, et même le système pénitentiaire. Cette succession rapide de mobilisations transversales montre que les causes des troubles ne peuvent être attribuées à des problèmes sectoriels spécifiques, mais plutôt à des dynamiques systémiques plus profondes évoluant simultanément.

Les huit journées « échantillons » analysées en détail - du 26 mai au 3 juin - révèlent également une répartition géographique couvrant l'ensemble du pays, de la province industrielle de Guangdong aux régions du nord-est, soulignant ainsi que le phénomène n'est pas limité à certaines zones économiques, mais représente une manifestation généralisée des fractures du tissu social chinois contemporain.

Le phénomène des arriérés de salaires : dimensions et caractéristiques

Les arriérés de salaires apparaissent comme le dénominateur commun de la grande majorité des protestations documentées. Selon les données du China Labour Bulletin, pas moins de 88 % des incidents de protestation collective en 2024 étaient liés au non-paiement, soulignant la façon dont ce problème est devenu endémique dans l'économie chinoise. L'organisation note que « les arriérés de salaires représentent 76 % des événements sur la carte des grèves depuis 2011 », ce qui indique une persistance du phénomène sur une décennie.

Le cas de la manifestation des travailleurs de Yunda Express à Chengdu illustre la complexité de ces dynamiques et la manière dont les conflits se développent et, parfois, sont résolus. Le conflit, qui a duré du 30 mai au 2 juin, est né non seulement de questions salariales, mais aussi de la décision unilatérale de l'entreprise de délocaliser le centre de distribution dans la ville de Ziyang, dans le comté de Lezhi, sans offrir de compensation ou d'alternatives de travail aux employés en échange de la délocalisation. Les travailleurs ont bloqué l'entrée du centre de distribution pour empêcher les véhicules d'entrer et de sortir, paralysant ainsi les activités de l'entreprise.

La chronique de la manifestation révèle l'escalade des tensions : dans la nuit du 31 mai, la police a tenté de disperser les manifestants par la force et, selon les témoignages des travailleurs, certains employés ont été battus au cours de l'intervention. Après des jours de résistance et de négociations serrées, l'entreprise a finalement accepté, le 2 juin, d'indemniser les employés selon une formule mathématique précise : salaire moyen plus 6 000 yuans multipliés par les années de service. Cette résolution montre qu'une pression collective soutenue peut encore obtenir, bien qu'en de rares occasions, des résultats concrets dans le contexte chinois, malgré l'environnement répressif.

Le secteur manufacturier a connu de nombreux troubles reflétant les difficultés économiques structurelles de l'économie chinoise. Par exemple, à Ningbo, dans le Zhejiang, les travailleurs de Rockmoway Clothing se sont mobilisés pendant deux jours consécutifs (les 2 et 3 juin) pour protester contre la décision de l'entreprise de retenir arbitrairement 40 % de leurs salaires. De même, plusieurs usines ont connu des grèves prolongées en raison d'arriérés de salaires, comme sur les chantiers de BASF à Donghai, dans le Guangdong, où les ouvriers du bâtiment se sont croisés les bras le 2 juin pour protester contre le non-paiement de leurs salaires.

La géographie des protestations dans l'industrie manufacturière montre une concentration particulière dans la province de Guangdong, le « moteur » de l'économie chinoise, qui avait enregistré 37 cas en avril 2025, de loin le nombre le plus élevé de toutes les régions. Cette concentration reflète la pression croissante exercée sur les industries orientées vers l'exportation dans une province qui représente le cœur manufacturier de la Chine.

L'impact de la guerre commerciale et les transformations du travail industriel

L'escalade des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine a eu des effets directs et mesurables sur la condition des travailleurs. L'expansion des droits de douane américains, qui visent également les biens produits par des entreprises chinoises dans des pays tiers, a amplifié les incertitudes et exacerbé la crise à laquelle sont confrontés les travailleurs. Les données montrent que le secteur manufacturier a connu une augmentation significative des troubles, passant de 25 cas en mars 2025 à 39 en avril suivant, ce qui reflète les pressions croissantes exercées sur les industries orientées vers l'exportation.

Les manifestations se sont étendues géographiquement « de la province de Guangdong, dans le sud-ouest de la Chine, où se trouvent de nombreuses entreprises manufacturières, à Tongliao, dans la province de Jilin, dans le nord-est », mettant en évidence une répartition nationale du phénomène. Comme le note Workers' Solidarity, « cela reflète également le fait que les problèmes du système économique chinois s'étendent aussi aux activités internationales », les travailleurs chinois employés dans des projets à l'étranger ayant fait grève en Arabie Saoudite et à Oman le 29 mai pour réclamer leurs salaires.

Les protestations dans les usines Foxconn, l'un des plus grands fabricants au monde qui fournit des iPhones à Apple, sont particulièrement significatives. À l'usine de Hengyang, les travailleurs se sont mis en grève pour protester contre la réduction des subventions et des heures supplémentaires, tandis qu'à l'usine de Taiyuan, ils ont protesté contre les projets de transfert des installations de production de Taiyuan à Jincheng, à trois heures de route. Lors des manifestations de rue, les travailleurs ont crié « Nous voulons que nos droits soient respectés ».

BYD, le principal constructeur chinois de voitures électriques, a également été confronté à d'importants troubles. Le 28 mars, plus de 1 000 travailleurs de l'usine de Wuxi se sont mis en grève pour protester contre les baisses de salaire, la fin des primes d'anniversaire et d'autres réductions d'avantages. Quelques jours plus tard, les travailleurs de l'usine de Chengdu ont également manifesté pour réclamer la sécurité de l'emploi, la transparence des délocalisations et des compensations équitables.

Parmi les différents secteurs, l'industrie de l'habillement et de la chaussure a été particulièrement touchée par la crise, ses travailleurs ayant souvent souffert du non-paiement des salaires. Ces industries sont souvent petites et concentrées dans la même région, de sorte que le non-paiement des salaires ou la suspension de l'activité en raison de la baisse de la rentabilité se produisent souvent dans des endroits proches au même moment. Parmi les grèves dans l'industrie manufacturière en 2024, le secteur de l'habillement arrive en deuxième position (90 cas) après le secteur de l'électricité et de l'électronique (109 cas).

L'affaire « Brother 800 » : symbole du désespoir systémique

Le 20 mai 2025, l'incendie de l'usine textile de la Sichuan Jinyu Textile Company dans le comté de Pingshan a acquis une résonance symbolique qui dépasse largement la dimension locale de l'événement. Wen, un ouvrier de 27 ans, a mis le feu à son lieu de travail après avoir été privé des salaires qui lui étaient dus pour un montant total de 5 370 yuans, contrairement aux 800 yuans initialement rapportés par les médias et plus tard démentis par la police.

La reconstitution des faits révèle la complexité de la dynamique qui a conduit à ce geste extrême. Wen avait présenté sa démission le 30 avril et, conformément à l'article 9 des dispositions provisoires sur le paiement des salaires, il était censé recevoir tous les arriérés de salaire immédiatement après la cessation d'emploi. Lorsqu'il a terminé les procédures de démission le 15 mai, l'usine lui devait 5 370 yuans (environ 760 dollars). Wen a demandé un paiement immédiat, mais le service financier a refusé, invoquant des procédures d'approbation internes. Après avoir à nouveau demandé le paiement à son supérieur, sans succès, Wen a développé ce que le rapport de police appelle des « pensées de vengeance ».

L'incendie a causé des dommages économiques estimés à des dizaines de millions de yuans et a conduit à l'arrestation de l'auteur, mais l'histoire est devenue virale sur les médias sociaux chinois avec le hashtag « Brother 800 ». L'écart entre les 800 yuans initialement déclarés et les 5 370 yuans réellement dus a alimenté les débats sur les médias sociaux, où de nombreux utilisateurs ont exprimé leur solidarité avec Wen, le considérant comme un « héros désespéré » plutôt que comme un criminel.

Ce cas met en évidence l'inefficacité structurelle des mécanismes de protection juridique. Comme l'observe ironiquement un témoin, « lorsque les personnes à qui l'on devait des salaires ont demandé une aide juridique, les juges ont disparu et le personnel du département du travail s'est également éclipsé. Mais lorsque Wen a mis le feu à l'usine, la police est immédiatement arrivée et les magistrats sont réapparus ». Cette critique souligne que le système réagit rapidement aux violations de l'ordre public, mais reste inerte face aux violations systématiques des droits des travailleurs.

La description de la situation familiale de Wen - pauvreté, mère malade, besoin urgent d'argent - illustre la façon dont les difficultés économiques individuelles sont liées à l'absence de filets de sécurité sociale adéquats. Le China Labour Bulletin souligne que l'incident représente « une rupture dans les systèmes juridiques et institutionnels conçus pour soutenir les travailleurs », mettant en évidence l'inadéquation des structures syndicales existantes qui sont « restées silencieuses » tout au long de l'affaire.

La réaction du public reflète une frustration généralisée à l'égard de ces failles systémiques. En ligne, un commentaire viral demandait : « Pourquoi un homme en serait-il réduit à incendier une usine pour 800 yuans ? Cela signifie qu'il était littéralement affamé ». D'autres ont dénoncé le double standard : les travailleurs qui protestent sont qualifiés de fauteurs de troubles, tandis que les employeurs qui retiennent les salaires sont tolérés par les autorités.

La crise de la construction et de l'immobilier : une spirale descendante

Le secteur de la construction représentait 54,48 % de toutes les protestations collectives en avril 2025, un chiffre qui reflète la crise persistante du marché immobilier chinois. Cette concentration dans le secteur de la construction montre que la crise immobilière, qui a commencé avec l'affaire Evergrande en 2021 et s'est propagée à l'ensemble du secteur ainsi qu'à l'économie en général, continue d'avoir des effets dévastateurs sur les conditions de travail.

Les projets inachevés sont une source particulière de tensions sociales, car ils concernent non seulement les travailleurs du secteur, mais aussi les citoyens qui ont investi leurs économies dans le logement. Par exemple, à Xianyang, Shaanxi, le 30 mai, des propriétaires de bâtiments inachevés du projet Sunac Shiguang Chenyue ont manifesté devant le centre de pétition local, accusant le gouvernement d'avoir détourné des fonds de construction, ce qui a entraîné plusieurs arrestations par la police. Toujours à Qingdao, Shandong, des centaines de propriétaires du projet immobilier inachevé Heda Xingfucheng ont organisé une manifestation collective dans le district de Chengyang le 31 mai, bloquant la circulation et forçant l'accès au site de construction, plusieurs propriétaires ayant subi des violences de la part de la police.

Ces épisodes montrent que la crise immobilière ne concerne pas seulement les opérateurs du secteur, mais s'étend aux citoyens de la classe dite moyenne qui ont investi leurs économies dans l'achat d'un logement, créant ainsi une base sociale plus large de mécontentement potentiel. La convergence de la crise économique et des attentes sociales déçues est un élément particulièrement déstabilisant pour la stabilité sociale.

L'extension des manifestations au secteur public : enseignants, médecins et travailleurs de la santé

Les autorités sont particulièrement préoccupées par l'extension des manifestations au secteur public, traditionnellement considéré comme plus stable et fidèle au système. Dans la province de Shandong, les enseignants contractuels n'ont pas reçu de salaire depuis six mois. Un enseignant d'école primaire a déclaré : « Notre salaire mensuel n'est que d'environ 3 000 yuans (un peu plus de 400 dollars) et, depuis six mois, nous vivons avec de l'argent emprunté ».

Un autre enseignant de Shanxi a signalé que son école exigeait la restitution des primes de fin d'année versées au personnel depuis 2021, ainsi qu'une partie de la rémunération perçue pour les activités extrascolaires. Ces mesures ont provoqué un mécontentement généralisé sur le site , comme en témoignent les messages publiés sur le réseau social Xiaohongshu (RedNote).

Les travailleurs de la santé sont confrontés à des problèmes similaires. Une infirmière d'un hôpital public de la province de Gansu, dans le nord-ouest du pays, a déclaré que son salaire mensuel n'était que de 1 300 yuans (moins de 200 USD) et que sa prime de rendement n'avait pas été versée depuis quatre mois. À Fuzhou, dans la province de Jiangxi, des médecins et des infirmières de l'hôpital Dongxin n° 6 se sont rassemblés devant le bâtiment du gouvernement municipal de Fuzhou le 7 avril, pour réclamer le paiement des salaires liés à la performance qui n'ont pas été versés depuis sept mois.

Comme l'observe Zhang, un enseignant retraité de l'université de Guizhou : « Dans le passé, ce sont les travailleurs migrants et les ouvriers qui réclamaient des salaires, mais aujourd'hui, les enseignants, les médecins et les éboueurs se joignent également à la lutte. Cela montre que la »structure stable« de la Chine commence à s'effilocher ». Cette observation rend compte d'un changement qualitatif fondamental : l'extension du mécontentement social à des catégories traditionnellement privilégiées du secteur public indique une crise de légitimité qui va au-delà des difficultés économiques conjoncturelles.

Violations des droits de l'homme dans le système pénitentiaire : témoignage de Liu Xijie

Le système judiciaire et pénitentiaire a fait l'objet de plaintes particulièrement sérieuses qui ont mis en lumière des abus systématiques. Liu Xijie, originaire de Bozhou dans l'Anhui et détenu de 2011 à 2024 à la prison n° 1 de Fushun dans le Liaoning, a trouvé le courage de dénoncer publiquement et nominalement les abus systématiques de la police pénitentiaire ces jours-ci, en donnant les noms précis des officiers accusés.

Selon son témoignage détaillé, aux alentours de février 2022, plus de 200 prisonniers ont été soumis à des sévices de degrés divers, notamment des tortures électriques à l'aide de matraques électriques, des insultes et des coups pour des infractions mineures telles que des réponses non conformes, des postures inappropriées ou un pliage incorrect des couvertures. Les témoignages décrivent de manière particulièrement effrayante comment certains agents pénitentiaires auraient trouvé du plaisir dans les mauvais traitements, piétinant des personnes âgées, introduisant des matraques dans la bouche des détenus, électrocutant des prisonniers au point de provoquer une incontinence fécale.

Le cas le plus grave concerne Fan Hongyu, un prisonnier décédé le 19 février 2022 à la suite de tortures répétées pour n'avoir pas mémorisé le règlement de la prison. Ce témoignage, rendu public à un moment de tension sociale particulière, met en lumière la façon dont le système répressif utilise des méthodes qui violent systématiquement les droits humains fondamentaux, contribuant au climat général d'oppression qui alimente le mécontentement social.

Episodes de protestation étudiante : le cas de Xuchang et la mémoire de Tiananmen

L'analyse des mouvements étudiants révèle des dynamiques particulièrement significatives. Le 3 juin à Changning, dans la province du Hunan, des centaines de lycéens de l'école Shangyu ont organisé une manifestation spontanée sur le campus pour évacuer le stress des examens d'entrée à l'université. L'événement, d'abord pacifique et caractérisé par des cris libérateurs, a rapidement pris une connotation politique lorsque l'école a alerté les autorités sur l'enthousiasme excessif manifesté par les jeunes.

Lorsque la police est intervenue et a arrêté trois organisateurs présumés, la situation a rapidement dégénéré : les étudiants ont formé un mur humain pour empêcher les voitures de police de partir, en criant des slogans tels que « retirons-nous de l'école, rendons l'argent » et en exigeant la libération des camarades arrêtés. Malgré la détermination affichée, les policiers ont réussi à briser le cordon d'étudiants par la force, emmenant les trois jeunes hommes sous le regard impuissant de leurs camarades.

Cet épisode est particulièrement sensible compte tenu de sa proximité temporelle avec l'anniversaire du 4 juin 1989, une date qui continue de représenter un moment extrêmement sensible pour les autorités chinoises. Dans le cas du collège n° 6 de Xuchang, dans le Henan, où une élève s'est suicidée prétendument à cause des brimades de son professeur, des milliers d'élèves et de citoyens ont manifesté devant l'école, pénétrant dans le campus et endommageant des bureaux avant que la police n'intervienne. Wu Jianzhong, secrétaire général de la Taiwan Strategy Association, note que l'incident s'étant produit à proximité d'une date sensible comme le 4 juin, les autorités ont réagi avec une extrême prudence, craignant qu'il ne déclenche des troubles sociaux et ne se propage rapidement, comme un incendie.

Contrôle social et répression : l'anniversaire de Tiananmen

Dans le cadre du 36e anniversaire de Tiananmen, les autorités ont mis en œuvre des mesures de contrôle sans précédent à l'encontre du groupe des « mères de Tiananmen ». Pour la première fois dans l'histoire du groupe, toute communication avec le monde extérieur a été coupée, les téléphones portables et les appareils photo étant interdits lors de la commémoration au cimetière de Wan'an à Haidian.

Le 31 mai, les Mères de Tiananmen ont publié une lettre ouverte signée par 108 parents de victimes, commémorant les membres décédés au cours de l'année écoulée et réitérant leurs demandes : enquête impartiale sur l'événement, publication des noms des morts, indemnisation des familles et punition des coupables. Zhang Xianling, 87 ans, s'est ému dans une vidéo il y a quelques jours : « Depuis 36 ans, nous n'avons cessé de chercher le dialogue avec les autorités, mais nous n'avons été que mis sous contrôle et réprimés ».

Cette escalade du contrôle met en évidence la sensibilité particulière des autorités à toute forme de mémoire collective liée aux événements de 1989, suggérant une vulnérabilité perçue du régime aux liens potentiels entre les protestations contemporaines et les précédents historiques de mobilisation sociale.

Censure numérique et contrôle de l'information

La gestion de l'information sur les incidents de protestation révèle des stratégies sophistiquées pour contrôler le discours public. Dans le cas de l'incident du collège Xuchang n° 6, les autorités ont rapidement supprimé tous les contenus publiés sur les médias sociaux, et le fil de discussion sur le collège Xuchang n° 6 sur le site Weibo a disparu. Lorsque les élèves ont réalisé que leurs messages n'étaient pas autorisés à circuler, ils n'ont eu d'autre choix que d'exprimer leur frustration contre l'école elle-même, ce qui a fini par dégénérer en une confrontation ouverte.

Dans le même temps, le cyberespace chinois a montré des réactions anormales. Début juin, dans le jeu de Tencent « Golden Spatula Wars », tous les avatars des utilisateurs de WeChat ont été uniformément remplacés par des pingouins verts et ne pouvaient être changés, ce qui a suscité une grande attention de la part des joueurs. Un internaute s'est plaint sur Platform X : « Les pingouins étaient à l'origine un symbole de divertissement, mais ils sont maintenant devenus un masque de censure. »

En outre, comme chaque année autour du 4 juin, les plateformes de médias sociaux chinoises bloquent des mots-clés tels que « square », « tank », « 8964 », et le contenu correspondant est immédiatement supprimé, tandis que les comptes qui les ont publiés risquent d'être interdits. Le 4 juin, l'avocat des droits de l'homme Pu Zhiqiang a été sommé par la police de supprimer son discours commémoratif sur la plateforme X.

Dynamique de la résistance effective : le cas de Dongguan

Malgré le contrôle autoritaire, plusieurs épisodes montrent que la mobilisation sociale conserve une capacité à influencer les décisions des autorités locales lorsqu'elle atteint des dimensions significatives et formule des demandes économiques concrètes. Le cas de Dongguan est un exemple emblématique de mobilisation spontanée et réussie des travailleurs.

Le 2 juin, des centaines de travailleurs migrants vivant dans le village de Yangyong, dans la ville de Dalang, se sont opposés à l'introduction d'un système de péage qu'ils considèrent comme économiquement insoutenable. Leur action collective, qui a débuté vers 18 heures par le blocage des barrières de péage, s'est étendue à plusieurs centaines de personnes criant des slogans tels que « enlevez les barrières ».

Sous la pression soutenue des manifestants, la police de stabilité sociale a dû céder vers 22 heures, envoyant des travailleurs pour retirer tous les équipements de péage. La politique fiscale, mise en œuvre la veille, a été déclarée nulle et non avenue, mettant en évidence le fait que les difficultés économiques poussent les classes populaires à des formes de résistance de plus en plus organisées et efficaces.

Évolution des stratégies de protestation et de l'organisation sociale

L'analyse révèle une évolution dans la manière dont les manifestations sont organisées, reflétant l'adaptation des mouvements sociaux à l'environnement technologique et répressif contemporain. Dans le cas des étudiants de Xuchang, l'utilisation des téléphones portables et de l'internet a permis une connexion et une agrégation rapides, soulignant comment les technologies numériques peuvent agir comme des multiplicateurs d'action collective en dépit des contrôles gouvernementaux.

Zeng Jianyuan, directeur exécutif de l'Association académique démocratique chinoise à Taïwan, note que « dans le climat actuel de gouvernance répressive et de purges politiques en Chine, seules les questions apolitiques peuvent légitimer des formes de rassemblement collectif à grande échelle ». Toutefois, il ajoute que « le Parti communiste chinois perçoit clairement que ce tumulte n'est pas seulement un geste de soutien à une école ou à un incident isolé, mais qu'il reflète également deux problèmes plus profonds ».

Le premier problème, selon Zeng, est que « sous l'administration de Xi Jinping, la société chinoise connaît une vague de détresse émotionnelle collective, et beaucoup cherchent un exutoire ». Le second, , est que « l'incident de Xuchang révèle un relâchement du contrôle social par les autorités locales : les étudiants ont pu se coordonner et se rassembler rapidement grâce aux téléphones portables et à l'internet, signe de l'échec des mécanismes locaux de maintien de la stabilité ».

Il est clair que les manifestations les plus récentes ne peuvent pas être interprétées comme de simples réactions spontanées à des injustices spécifiques, mais représentent plutôt des manifestations d'un « malaise émotionnel collectif » plus large qui cherche des canaux d'expression à travers des questions apparemment apolitiques.

Crise de légitimité des autorités locales

Les protestations documentées mettent en évidence une crise de légitimité croissante des autorités locales, incapables d'assurer une médiation efficace entre les pressions économiques centrales et les besoins sociaux locaux. L'imposition arbitraire de taxes au niveau local est un excellent exemple de cette dynamique.

Dans le cas du village de Pingtang, dans la ville de Gushan, province de Zhejiang, le comité du village a publié un avis annonçant qu'à partir du 10 mai, des « frais de gestion sanitaire » et des « frais de stationnement » seraient prélevés sur tous les résidents permanents et les travailleurs du village : 80 yuans par an pour les adultes, 40 yuans pour les enfants et 500 yuans pour les voitures et les tricycles. L'avis indiquait également que ceux qui ne paieraient pas à temps seraient « mis sous contrôle » à partir du 1er juin, et que chaque personne devrait payer un supplément de 200 à 100 yuans, que leurs véhicules seraient verrouillés et que ceux qui forceraient les serrures seraient « traités comme des auteurs d'actes de vandalisme contre des biens publics ».

Li, un locataire du village, a déclaré que « cette taxe n'a jamais été convenue avec les villageois et n'a jamais fait l'objet d'une réunion publique. Je suis un locataire extérieur et je n'ai jamais entendu parler d'une réunion du village approuvant cette taxe ». Certains villageois ont critiqué la décision du comité du village, la qualifiant d'« extorsion éhontée ». Un autre villageois, Zhang Shun (pseudonyme), a déclaré : « Ma famille compte cinq personnes et nous devons payer 400 yuans par an. Nous ne pouvons absolument pas nous le permettre. Est-ce encore un pays dirigé par le Parti communiste ? ». Jia Lingmin, une militante, a souligné que le comité du village est une organisation populaire autonome et que toutes les redevances doivent obtenir un « permis de redevance », faute de quoi elles sont illégales.

Cet épisode illustre la façon dont les gouvernements locaux, sous la pression des difficultés fiscales, ont recours à des mesures de plus en plus désespérées et illégales pour lever des fonds, ce qui érode encore plus leur légitimité aux yeux de la population. Comme l'observe Zhang, un enseignant retraité de l'université de Guizhou : « Le niveau élevé de la dette locale et le durcissement des politiques centrales ont fortement affecté la gestion fiscale locale. Les victimes les plus directes sont les travailleurs permanents et contractuels ».

Transformations du tissu social chinois

Tang Gang, un universitaire du Sichuan, propose une analyse particulièrement perspicace des transformations sociales en cours, notant que la société chinoise évolue « d'une société traditionnelle où il était possible de faire des compromis, de se tolérer mutuellement et de coexister, à une société marquée par de rudes conflits, où les positions sont irréconciliables et où la coexistence devient impossible ». Cette transformation, qu'il attribue aux changements survenus au cours des dix dernières années sous la direction de Xi Jinping, suggère une détérioration qualitative des relations sociales qui transcende les questions économiques spécifiques.

Xue, chercheur en relations du travail à Guizhou, identifie plusieurs facteurs qui contribuent à l'escalade des conflits entre travailleurs et patrons. « Tout d'abord, dans certaines entreprises, les dirigeants syndicaux sont directement nommés par les patrons, ce qui empêche le syndicat de représenter véritablement les intérêts des travailleurs. Cela entrave la défense des droits des salariés et alimente les tensions. Deuxièmement, la relation entre le capital et le travail est fortement orientée vers le marché, mais il n'y a pas de répartition équitable des revenus. De plus, dans de nombreuses usines, l'opacité prévaut dans la gestion des questions concernant les travailleurs, ce qui exacerbe encore les contradictions ».

L'analyse de M. Xue montre que les problèmes ne sont pas simplement économiques, mais qu'ils reflètent des déficiences structurelles dans le système de relations industrielles de la Chine. L'absence de syndicats indépendants et représentatifs prive les travailleurs de canaux efficaces de résolution des conflits, ce qui les oblige à recourir à des formes de protestation de plus en plus directes et parfois extrêmes.

Vers des scénarios d'instabilité croissante

L'accumulation des tensions documentées au cours de la période fin mai-début juin 2025 indique à elle seule que la Chine d'aujourd'hui est confrontée à des défis sociaux de nature systémique qui ne peuvent être résolus par les seuls mécanismes répressifs traditionnellement employés par le régime. La transversalité sectorielle des protestations, l'extension géographique nationale des phénomènes et l'implication de catégories traditionnellement stables telles que les enseignants et les travailleurs de la santé montrent que les difficultés actuelles ne sont pas des fluctuations conjoncturelles mais plutôt des manifestations de contradictions structurelles plus profondes.

La capacité limitée des autorités locales à répondre efficacement aux demandes populaires, combinée au désespoir économique croissant de larges pans de la population, crée des conditions potentiellement explosives. Comme l'a montré l'affaire « Brother 800 », lorsque les voies légales de résolution des conflits s'avèrent inefficaces, les citoyens peuvent recourir à des formes de protestation de plus en plus extrêmes et destructrices.

L'intensification des mesures répressives, visible dans l'isolement des Mères de Tiananmen et la censure rapide des épisodes de protestation, indique une perception de vulnérabilité de la part du régime qui pourrait paradoxalement alimenter de nouvelles tensions. La stratégie de contrôle de l'information, bien qu'efficace à court terme, risque d'alimenter la frustration et la radicalisation lorsque les citoyens découvriront l'impossibilité de communiquer leurs revendications par les canaux institutionnels.

Les autorités chinoises semblent se trouver dans une position de plus en plus difficile, obligées de trouver un équilibre entre les exigences du contrôle social et la nécessité de maintenir la stabilité économique. L'expérience de la courte période analysée suggère que cette tension atteint des seuils critiques, avec des implications qui pourraient s'étendre bien au-delà des frontières de l'épisode ou du secteur concerné.

Andrea Ferrario

Sources : Yesterday, Radio Free Asia, China Labour Bulletin, AsiaNews, Workers' Solidarity

• Traduction Pierre Vandevoorde et Pierre Rousset avec l'aide de DeepL.

Source - Andrea Ferrario 05 juin 2025

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L’Arabie saoudite, nouveau pôle d’influence aux États-Unis

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Sans parvenir à détrôner Israël, l'Arabie saoudite, mais aussi les Émirats arabes unis et le Qatar ont acquis un nouveau poids auprès de Donald Trump. Les motivations du président américain relèvent à la fois de la géo-économie et de ses intérêts personnels. Mais qui peut encore se fier à ses engagements ?

Tiré de orientxxi
3 juin 2025

Par Fatiha Dazi-Héni

Deux hommes souriants, l'un en costume, l'autre en tenue traditionnelle, posent ensemble.
Riyad, le 13 mai 2025. Le président états-uniens Donald Trump et le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman lors du forum d'investissement américano-saoudien au centre de conférences du Roi Abdel Aziz.
© Official White House Photo / Daniel Torok / Flickr

La première visite à l'étranger du président Donald Trump au cours de son deuxième mandat (hormis celle consacrée aux obsèques du pape François à Rome) s'est déroulée du 13 au 16 mai 2025 dans les trois pays les plus actifs diplomatiquement du monde arabe : l'Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis. Elle s'est accompagnée d'une moisson de contrats signés ou promis (acquisition d'armements et d'avions civils) et d'annonces d'investissements vertigineux liés à la technologie et notamment à l'intelligence artificielle (IA), qui sont évalués à plus de deux mille milliards de dollars via les fonds souverains du Golfe et les grandes compagnies publiques liées aux industries minières, d'hydrocarbures ou de défense.

Ces monarchies, et plus particulièrement l'Arabie saoudite, sont apparues comme un pôle d'influence capable d'infléchir en partie les orientations de la politique étatsunienne. Cependant, le caractère transactionnel de la diplomatie trumpienne et sa méthode erratique incitent à tempérer les premières déclarations enthousiastes sur le succès éclatant de cette visite pour les monarques du Golfe et notamment pour le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman (MBS).

Une chose est sûre, l'alchimie entre le président étatsunien et MBS fonctionne parfaitement. Le discours élogieux prononcé par Donald Trump sur le « miracle de la modernité selon une méthode arabe réalisé en huit ans en Arabie saoudite par MBS », avec les Émirats arabes unis comme modèle référent, se voulait un vibrant hommage à « l'avenir radieux qui s'offre aux pays du Golfe, car forgé sur le business et le commerce et non par le chaos », allusion transparente à l'Iran (1).

Les perspectives d'un accord avec Téhéran

Le slogan America First du MAGA (« Make America Great Again ») de Trump résonnait avec le Saudi First de la Vision 2030de MBS. Comme le souligne Yasmine Farouk, directrice Golfe Péninsule arabique à l'International Crisis Group (2), le président Trump a traité le royaume comme un partenaire stratégique en lui conférant le statut de leader régional du Proche-Orient et non plus seulement comme un État ami ou simplement client comme les États du Golfe avaient coutume d'être considérés.

Les annonces politiques du président Trump de poursuivre les négociations avec Téhéran pour parvenir à un nouvel accord nucléaire et celle, plus surprenante, de la levée des sanctions économiques contre la Syrie, ajoutée à sa rencontre avec le président syrien Ahmed Al-Charaa à Riyad, ont constitué un réel succès diplomatique pour Riyad, et un revers pour Israël. C'est le résultat d'un travail de lobbying de la diplomatie saoudienne en étroite concertation avec Ankara pour convaincre le président Trump d'œuvrer à la stabilisation de la région enfoncée dans le profond chaos engendré par la dévastation de Gaza depuis le 8 octobre 2023 (3). En coordination avec le président turc Recep Tayyip Erdoğan et l'émir du Qatar, le prince héritier saoudien engrange un succès diplomatique certain qui lui confère une légitimité de leader régional conduisant une diplomatie de détente au contraire du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.

Revirement saoudien

L'autre gain substantiel pour MBS est d'avoir convaincu Trump que ce contexte dramatique ne pouvait pas déboucher sur une normalisation avec Israël. Désormais, le président étatsunien ne conditionne plus, contrairement à son prédécesseur Joe Biden, le renforcement des relations bilatérales de défense et une coopération sur le nucléaire civil à la normalisation des relations entre Riyad et Tel-Aviv.

De même, en dépit des déclarations contradictoires, le président Trump a maintenu le cap des négociations avec Téhéran, prenant en compte les vives préoccupations de ses interlocuteurs du Golfe sur les risques de déflagration dans la région en cas de conflit ouvert entre Israël et l'Iran. Riyad a activement défendu l'idée de voir signé un nouvel accord sur le nucléaire, contrairement à sa position antérieure d'hostilité au Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA)signé en 2015. Cette position avait contribué à encourager la politique de sanctions maximales à l'encontre de Téhéran, décidée lors du premier mandat Trump et à la dénonciation de l'accord en mai 2018.

Preuve du revirement saoudien radical sur la question nucléaire iranienne, Khaled Ben Salman, ministre de la défense saoudien et frère cadet de MBS, a remis en mains propres au Guide iranien une lettre, le 17 avril 2025, témoignant du soutien de Riyad pour la réalisation d'un accord permanent sur ce dossier. Cet entrain est aussi largement motivé pour des raisons intérieures. Riyad souhaite en effet développer son propre programme nucléaire et enrichir l'uranium, dont il dispose à foison, à des fins civiles.

De son côté, Téhéran reste très attentif à la décision du président Trump de lever les sanctions contre la Syrie, et en particulier à leur matérialisation concrète. Les Iraniens n'hésitent plus à faire miroiter aux négociateurs étatsuniens, via la médiation d'Oman, les opportunités d'investissements qui s'offriraient aux sociétés étatsuniennes en cas d'accord sur le nucléaire.

Un échec sur la Palestine

En revanche, sur la question palestinienne, la visite du président Trump n'a rien changé et a même constitué, en particulier pour Doha, un échec dans ses efforts constants pour obtenir du gouvernement Nétanyahou un cessez-le-feu à Gaza. De fait, l'insistance de Donald Trump à maintenir son idée de déportation des Palestiniens de Gaza afin de prendre le contrôle de ce territoire pour en faire une « riviera », montre les limites de l'influence politique des États de la région.

Si la relation de Trump avec le premier ministre israélien s'est détériorée, rien n'indique une inflexion majeure de la politique des États-Unis quant au projet du gouvernement israélien en Palestine. Ainsi, le redéploiement de la présence militaire étatsunienne dans la région depuis les attaques du 7 octobre 2023, qui est passée d'environ 34 000 à près de 50 000 hommes à la fin de 2024, semble moins motivé par une planification à long terme que par un soutien indéfectible à Israël et aux menaces perçues en provenance de l'Iran et à l'instabilité en mer Rouge (4).

Toutefois, Riyad tentera de capitaliser sur le plan diplomatique lors de la réunion des Nations unies consacrée à la solution à deux États que le prince héritier coprésidera à New York, le 17 juin, avec le président français Emmanuel Macron. Ce dernier pourrait y annoncer, aux côtés du Royaume-Uni et du Canada (voire de nouveaux pays membres de l'UE), la reconnaissance de l'État palestinien, isolant un peu plus Israël.

La Tech, véritable moteur de la visite

Plutôt que d'inscrire le discours de Trump à Riyad dans la lignée du discours du Caire de Barack Obama (5) prononcé le 4 juin 2009, celui du président Trump s'inscrit dans le sillage des propos et de la visite d'État de trois jours du président chinois Xi Jinping à Riyad (du 8 au 10 décembre 2022). Tout comme celle de Xi, la visite de Trump a d'abord eu vocation à consolider la relation bilatérale, en traitant le royaume comme un partenaire incontournable de la compétition géoéconomique qui oppose les deux puissances globales.

Contrer la présence technologique et commerciale chinoise au sein des monarchies du Golfe a constitué un axe majeur de cette visite présidentielle étatsunienne comme en témoigne la présence de tous les géants étatsuniens de la Tech à Riyad, Doha ou Abou Dhabi. Les EAU ont ainsi conclu un accord pour héberger le deuxième plus grand centre de données du monde, avec l'achat des semi-conducteurs ultra performants de la compagnie Nvidia. C'est dans le cadre de ce projet colossal d'investissements sur dix ans, d'un montant de mille milliards et 400 millions de dollars que cheikh Tahnoun, à la tête de la compagnie G42 et conseiller à la sécurité nationale auprès de son frère, Mohammed Ben Zayed (MBZ), président des EAU, a fait le choix d'opter pour la Tech étatsunienne. Sa compagnie avait été contrainte par le président Biden de restreindre sa coopération avec la Chine dans le domaine de l'IA.

Cependant, une partie des congressistes étatsuniens demeure sceptique sur la fiabilité émiratie concernant sa prise de distance avec Pékin ou concernant sa diplomatie militarisée et agressive au Soudan (6) que Washington réprouve. Elle pourrait peser sur le débat et exiger des mesures concrètes pour s'assurer que l'accès émirati à 500 000 puces de pointe conçues par la multinationale étatsunienne Nvidia dès 2026 ne profite pas à la Chine - ce qui est d'ailleurs un engagement de Donald Trump.

L'ombre de la Chine

Pour sa part, MBS a réitéré son objectif d'investir 600 milliards dans des partenariats avec les États-Unis. Outre l'industrie d'armements, c'est l'IA qui est le centre de son attention que cela soit dans les secteurs d'infrastructure, de la santé, la sécurité ou les coopérations scientifiques. Comme le fait remarquer Jonathan Fulton (7) bon connaisseur des relations Chine-Golfe et États-Unis-Golfe, même en ramenant cette somme au chiffre vérifié de 283 milliards, ce montant éclipse largement les contrats d'une valeur de 50 milliards obtenus lors de la visite triomphale d'État du président Xi Jinping à Riyad en 2022. L'annonce de mégacontrats d'armements estimés à 142 milliards de dollars contre le montant record de 121 milliards atteint sous les deux mandats Obama donne un aperçu de la volonté saoudienne de prioriser le partenariat sécuritaire avec les États-Unis.

Pour les monarchies du Golfe, et notamment les EAU et l'Arabie saoudite, qui se livrent une âpre concurrence pour devenir les hubs de l'inter connectivité et de la Tech au croisement des continents africain, européen et asiatique ; l'industrie de l'IA est la clé de voûte de l'ère post-énergie fossile. De fait, ces pays sont jusqu'à présent parvenus à ménager leur coopération avec Pékin, en refusant de faire un choix entre les deux puissances globales. Mais cette visite a été l'occasion pour ces trois monarchies du Golfe d'exprimer leur préférence pour la Tech et la sécurité que leur procure le partenaire étatsunien.

Cependant, avec l'avance prise par l'implantation des entreprises chinoises dans le secteur de l'IA et leurs chaines d'approvisionnement dans la région, la Chine continuera à être un partenaire important sur le long terme. La diplomatie active de Pékin œuvre à renforcer les relations commerciales Sud-Sud dans le cadre de divers sommets multilatéraux (BRICS (8), Organisation de coopération de Shanghai— OCS (9), ou ASEAN (Association des nations du Sud-Est asiatique en français (10) )—CCG— Chine (11) et de visites bilatérales en Asie du Sud et dans le Golfe, parallèlement au chaos suscité par la guerre des droits de douane lancée par le président Trump.

Durant la visite de Trump, un forum des investissements saoudo-étatsuniens s'est également tenu où il a été question d'édifier l'autre pierre angulaire du renforcement de la coopération bilatérale autour de l'industrie minière stratégique et des terres rares que le royaume possède en quantité. Cette coopération relève d'un impératif de sécurité nationale pour Washington et le royaume offre l'occasion aux États-Unis de réduire sa dépendance vis-à-vis de la Chine dans ce domaine stratégique.

Ainsi, l'Arabie saoudite, qui ambitionne dans le cadre de son programme Vision 2030 de devenir un hub mondial de traitement des minerais, offre aux États-Unis la possibilité de diversifier ses chaines d'approvisionnements. Elle a ainsi rehaussé sa cote en tant que partenaire stratégique clé. Riyad est même parvenu à s'inscrire d'ores et déjà comme partenaire économique de premier plan dans l'ère post pétrolière, alors même que durant le premier mandat Trump, âge d'or du pétrole de schiste, Riyad et Washington étaient devenus des concurrents.

Le second mandat ouvre la voie à une coopération dense, mais la pression du président Trump à maintenir bas les cours du prix du pétrole (autour de 65 dollars) alors que Riyad a construit son budget autour d'un prix moyen de 80 dollars, pourrait contrarier le rythme ambitieux des réformes économiques prévues dans le cadre de la Vision 2030.

Des difficultés à se fier à Donald Trump

Pourtant, il paraît difficile de conclure au lendemain de cette visite que l'influence régionale de Riyad puisse opérer de manière pérenne en raison du caractère transactionnel et personnel des relations qui lient le président Trump à ce jeune monarque et à ses deux homologues qatari et émirati. De même, il n'est pas certain que cette visite, présentée comme destinée à réparer et à renforcer une relation dégradée avec l'Arabie saoudite et le Golfe sous l'administration Biden, ne connaisse de revers, tant le président Trump s'est illustré par de nombreux revirements notamment sur les tarifs douaniers même avec ses alliés les plus proches (pays de l'UE, Grande-Bretagne, Canada où même le Japon).

Cependant, comme les dirigeants du Golfe l'avaient pressenti, le président Trump du fait de son imprévisibilité risque de s'avérer un interlocuteur beaucoup plus difficile à manœuvrer que son prédécesseur par le premier ministre israélien (12). Ce qui pourrait le contraindre à revoir à la baisse sa stratégie de guerre sans fin au Proche-Orient.

L'épisode de la négociation menée avec le Hamas et avec l'aide de Doha pour libérer l'otage israélo-étatsunien ou encore l'accord conclu avec les Houthis, avec la médiation omanaise, pour mettre fin aux frappes en mer Rouge sans concertation avec Tel-Aviv, conforte cette intuition des dirigeants du Golfe. C'est l'une des raisons pour lesquelles, outre les relations personnelles et d'affaires qui les lient, les dirigeants du Golfe, MBS en tête, ont affiché leur préférence de voir Donald Trump accéder à la présidence en dépit de son parti pris pro-israélien.

La montée en puissance des monarchies du Golfe dans l'économie mondialisée se combine avec une nouvelle géopolitique de la finance et de l'aide extérieure, au moment où précisément le président Trump retire les programmes de l'US Aid ce qui ouvre de nouvelles possibilités aux États du Golfe. Ces derniers ont donc intérêt à maintenir le cap de la diversification de leurs partenariats commerciaux et industriels dans un monde plus multipolaire où la compétition fait rage sur la meilleure façon de réguler l'économie mondiale.

Notes

1. « Trump et le tournant de Riyad », texte intégral du discours traduit en français, Le Grand continent, 15 mai 2025.

2. « Regional response : How Gulf monarchies leveraged Trump's visit », European Council on Foreign Relations, 21 mai 2025.

3. Anthony Samarani, « MBS-Erdoğan : la tentation d'un grand rapprochement face à Israël », L'Orient-Le-Jour, 18 mai 2025.

4. Safia Karasick Southey, « Deterrence or creep ? US forces quietly surge back to Middle East », Responsible Statecraft, 24 avril 2025.

5. Intitulé « un nouveau départ », il visait à refonder les relations de Washington avec le monde musulman, notamment après le désastre de l'intervention étatsunienne en Irak.

6. Jean-Pierre Filiu, « La stratégie séparatiste des Émirats arabes unis », Le Monde, 11 mai 2025.

7. « Trump in the Gulf, commentary on HK's Chief Executive Lee's Gulf trip, PRC delegation to Morocco, more US sanctions on Iranian oil to China », The China-MENA Newsletter, 16 mai 2025.

8. Les BRICS se composent des dix États suivants : Afrique du Sud, Brésil, Chine, Égypte, Émirats arabes unis, Éthiopie, Inde, Indonésie, Iran, Russie. L'Arabie saoudite préfère, quant à elle, maintenir son adhésion sans l'officialiser.

9. Ses membres sont la Chine, la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, l'Inde, le Pakistan, l'Iran et Bélarus.

10. Ses membres sont les Philippines, l'Indonésie, la Malaisie, Singapour, la Thaïlande, le Brunei, le Viêtnam, le Laos, le Myanmar et le Cambodge.

11. « The Inaugural ASEAN-GCC-China Summit : Economic Aspirations Amid Strategic Ambiguity », China Global South Project, 23 mai 2025.

12. Fatiha Dazi-Héni, « Riyad et l'administration Trump 2 », Institut de recherche stratégique de l'école militaire (IRSEM), 18 mars 2025.

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Avec l’élection de Lee Jae-myung, la Corée du Sud espère tourner la page d’une crise majeure

10 juin, par Camille Ruiz — , ,
Après six mois de crise politique et économique déclenchée par la tentative de coup de force du président destitué, la quatrième économie d'Asie a élu à sa tête le démocrate de (…)

Après six mois de crise politique et économique déclenchée par la tentative de coup de force du président destitué, la quatrième économie d'Asie a élu à sa tête le démocrate de centre-gauche Lee Jae-myung, avec un fort taux de participation.

Tiré d'Europe solidaire sans frontière.

Séoul (Corée du Sud).– À chaque score affiché sur l'immense écran installé devant l'Assemblée nationale sud-coréenne, les cris de joie des manifestant·es, drapé·es de bleu, la couleur du Parti démocrate (PD, progressiste), se font entendre. Alors que les pancartes s'agitent, les pourcentages défilent à la télévision, province par province, et les premiers résultats de cette élection anticipée désignent Lee Jae-myung comme président de la République de Corée.

Mercredi 4 juin, la commission électorale a confirmé la victoire du démocrate, qui, au vu de la crise politique en cours, a pris ses fonctions sans période de transition. En 2022, lors du précédent scrutin présidentiel, Lee Jae-myung avait perdu de justesse face à Yoon Suk-yeol, le président finalement destitué le 4 avril.

Cette fois, Lee Jae-myung l'a emporté avec 49,42 % des suffrages et une avance confortable de près de 10 points sur son nouveau rival conservateur, dans un scrutin qui se joue à un tour. Et ce, malgré une affaire judiciaire, certes moins retentissante que celle de Yoon Suk-yeol mais tout de même très suivie dans le pays : devant la Cour suprême, le démocrate fait en effet l'objet d'accusations pour avoir violé la loi électorale lors de la présidentielle de 2022.

Il aurait en effet menti à la télévision en déclarant ne pas connaître, alors qu'il était maire de la ville de Seongnam, un haut fonctionnaire impliqué dans un projet d'aménagement du territoire. Or, ils ont posé tous les deux sur une photo lors d'un voyage de golf à l'étranger. Après de nombreux rebondissements, le démocrate semble aujourd'hui intouchable pour cinq ans : selon la Constitution, le chef de l'État ne peut être poursuivi, excepté pour trahison ou rébellion.

Lee Jae-myung a grandi dans une famille modeste d'un village de montagne, à Andong, dans le sud-est du pays. Encore adolescent, il arrête ses études pour travailler à l'usine, un épisode de sa vie dont il a fait un argument de campagne. Finalement, Lee Jae-myung reprend ses études et exerce comme avocat des droits humains, avant d'entrer en politique puis de devenir en 2018 gouverneur de la province de Gyeonggi, la plus peuplée de Corée du Sud.

La sanction du camp conservateur

Sa victoire dans cette élection présidentielle n'a rien d'une surprise, malgré tous les efforts de Kim Moon-soo, candidat du Parti populaire du peuple (PPP, conservateur), pour renverser une dynamique défavorable.

Ces soutiens du président déchu Yoon Suk-yeol, ultraconservateurs chrétiens, pro-Trump et biberonnés aux théories complotistes qui circulent sur le YouTube d'extrême droite, affirment que Lee Jae-myung est un espion de la Corée du Nord et de la Chine et reprennent à leur compte des slogans trumpistes tel que « Stop the Steal » (« arrêtez de voler »), en référence au soi-disant « vol » de l'élection par Joe Biden en 2020.

Peu après la victoire de Donald Trump, la Maison-Blanche avait exprimé son inquiétude quant à « l'influence de la Chine dans les démocraties du monde entier », tout en soulignant que l'alliance Séoul-Washington resterait inébranlable.

Le candidat conservateur a obtenu 41,15 % des voix, tandis que celui du New Reform Party, formation mineure d'extrême droite populiste, n'a récolté que 7,7 % des suffrages, malgré le soutien important des jeunes hommes de 20 à 30 ans, séduits entre autres par son antiféminisme. Le pourcentage restant des voix exprimées correspond aux votes blancs et invalides, tandis que la participation, record, a atteint 79,4 %, le taux le plus élevé depuis vingt-huit ans.

« La plus grande erreur du PPP a été de ne pas se distancer assez des prises de position de Yoon Suk-yeol », analyse Bong Young-shik, professeur associé en sciences politiques à l'université Yonsei. Même son départ forcé du PPP n'a pas suffi. Et pour cause : Yoon Suk-yeol a plongé la Corée du Sud dans la pire crise politique depuis la fin de la dictature, en 1987.

Tard dans la nuit du 3 décembre 2024, il avait déclaré la loi martiale puis envoyé l'armée, accompagnée d'hélicoptères militaires, bloquer le Parlement alors que les député·es tentaient de s'y réunir en urgence pour voter le retrait du décret. C'est dans ce contexte que Lee Jae-myung s'est filmé dans son taxi en route pour l'Assemblée nationale, puis en train d'escalader une barrière pour entrer en douce. Ces images diffusées en direct ont été vues par de nombreux Sud-coréen·nes.

Les parlementaires avaient finalement réussi à procéder au vote grâce à l'aide de citoyen·nes qui ont tenu tête aux soldats, alors que certains avaient reçu l'ordre de tirer, d'après un rapport du parquet.

Défis institutionnels et économiques

C'est pourquoi les enjeux de cette élection étaient de taille : au lendemain de l'entrée en vigueur de la loi martiale, la monnaie nationale, le won, a fait une chute spectaculaire, inédite depuis quinze années. À la baisse de confiance des investisseurs se sont ajoutés les droits de douane imposés par l'administration Trump : + 25 % pour la Corée du Sud. Ce sont les semiconducteurs, fierté nationale, qui en pâtissent le plus.

Aussi, l'économie était au cœur de la campagne. Tandis que Lee Jae-myung proposait d'établir une task force pour faire face à la crise, et de soutenir les petits commerces, son rival Kim Moon-soo promettait d'assouplir certaines réglementations encadrant les entreprises, et de réviser la loi sur la sécurité industrielle afin d'empêcher les dirigeant·es de faire l'objet de poursuites pénales en cas d'accidents mortels sur le lieu de travail.

En quelques années, la qualité du régime démocratique s'est nettement dégradée.

Lee Jae-myung a fait du rétablissement de la démocratie sa priorité absolue, selon son premier discours le 3 juin au soir. Il faut dire que la tentative de coup de force de Yoon Suk-yeol est révélatrice d'un constat inquiétant : en quelques années, avant même cet événement spectaculaire, la qualité du régime démocratique en Corée du Sud s'est nettement dégradée.

Dans son rapport annuel, le Varieties of Democracy Institute (V-Dem) de l'université de Göteborg (Suède) classe la Corée du Sud au 47e rang sur 179 pays selon son indice de démocratie libérale, qui prend en compte la liberté et l'équité des élections, l'état des libertés civiles, d'association et d'expression, ainsi que la justice sociale. En 2019, avant l'élection de Yoon Suk-yeol, la Corée du Sud était encore 13e sur cette liste.

Lee Jae-myung appelle ainsi de ses vœux une loi martiale réformée, ainsi que la séparation des pouvoirs des procureurs qui, en Corée du Sud, peuvent à la fois inculper et enquêter. Le démocrate voudrait également changer l'unique mandat de cinq ans en possibilité de se représenter pour deux mandats de quatre ans : il assure que le bilan du chef de l'État pourrait être jugé, et celui-ci réélu ou bien désavoué.

Par le passé, beaucoup de responsables politiques ont fait des promesses similaires, mais aucun n'a amorcé de tels changements. Aussi, certains des opposants à Lee Jae-myung s'interrogent et considèrent sa volonté de réformer le mandat présidentiel comme une opportunité de s'en autoriser un deuxième, et pourquoi pas davantage, la presse d'extrême droite allant jusqu'à citer l'exemple de Vladimir Poutine.

Un alignement entre la présidence et le Parlement

Avec sa majorité acquise à l'Assemblée nationale, le président n'aura a priori pas de difficultés à mener son agenda. En effet, au Parlement, unicaméral, les démocrates ont obtenu une large victoire, avec plus de 170 sièges sur 300, aux élections d'avril 2024.

« Selon les affirmations du PPP,rapporte le docteur en sciences politiques Bong Young-shik, il n'y aura pas de pouvoirs qui se contrebalancent, et donc élire Lee Jae-myung mènerait le pays à la dictature. L'argument opposé soutient que c'est un processus nécessaire pour éliminer les vices et la corruption de l'ensemble du système. Et c'est un désir très fort exprimé par tous les Coréens, de gauche ou de droite, jeunes ou vieux. »

Mais dans cette campagne éclair de trois semaines, bien des sujets ont été mis de côté : ainsi, les questions de genre ont été quasi absentes des débats. Pourtant, la Corée du Sud abrite, et de loin, le pire écart de salaires de l'OCDE avec 29,3 % de différence entre femmes et hommes, en 2023. Le poste laissé vacant de la ministre de l'égalité, des genres et de la famille, qui a démissionné en février 2024, témoignait des desseins de l'ancien président.

Ouvertement antiféministe, Yoon Suk-yeol avait fait de l'abolition de ce ministère une promesse de campagne. Wooyeal Paik, professeur en sciences politiques de l'université Yonsei, compare les positions sur la question : « Lee Jae-myung a déclaré qu'il améliorerait les droits des deux genres, quoi que cela signifie, et se concentrerait sur la défense des droits des femmes. Mais les autres candidats, comme Kim Moon-soo, n'en ont pas touché mot, sûrement pour des raisons liées à leurs bases électorales. »

La tâche principale de Lee Jae-myung et de son gouvernement reste de restaurer la confiance populaire dans les institutions. Une gageure, dans un contexte où les affaires judiciaires minent l'image des responsables politiques depuis de longues années.

Camille Ruiz

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« Massacre des affamés » : les forces israéliennes tuent 31 Palestiniens dans un centre de distribution d’aide humanitaire

10 juin, par Tareq S. Hajjaj — , ,
Un centre d'aide humanitaire géré par les États-Unis a été le théâtre d'un nouveau massacre dans le sud de Gaza après que les forces israéliennes ont ouvert le feu sur des (…)

Un centre d'aide humanitaire géré par les États-Unis a été le théâtre d'un nouveau massacre dans le sud de Gaza après que les forces israéliennes ont ouvert le feu sur des civils. « Les Américains et les Israéliens nous ont tendu un énorme piège pour nous attirer ici et nous tuer », a déclaré un témoin oculaire à Mondoweiss.

Tiré de Agence Médias Palestine
2 juin 2025

Par Tareq S. Hajjaj

Point de distribution d'aide humanitaire géré par la Fondation humanitaire de Gaza à al-Bureij, dans le centre de Gaza, le 29 mai 2025. (Photo : Moiz Salhi/APA Images)

Dimanche matin à l'aube, des Palestiniens du sud de Gaza se sont rendus au point de distribution d'aide humanitaire de Rafah géré par le Fonds humanitaire pour Gaza (GHF), l'organisme américain chargé de fournir l'aide aux Palestiniens à la place de l'ONU. Selon des témoins oculaires qui se sont entretenus avec Mondoweiss, lorsque des milliers de personnes en quête d'aide sont arrivées dans le quartier d'al-Alam, dans le quartier de Tal al-Sultan à Rafah, l'armée israélienne a ouvert le feu sur la foule.

Alors que de nombreuses personnes patientaient devant le site d'aide humanitaire tôt le matin, attendant les instructions des employés américains, des témoins oculaires rapportent qu'un drone israélien survolait la zone et leur ordonnait via haut-parleur d'entrer dans le périmètre clôturé à 6 heures du matin.

Après que des centaines de personnes aient pénétré dans l'enceinte, les soldats ont ouvert le feu sur la foule, tuant 31 personnes et en blessant 200 autres avec des balles réelles, a déclaré dimanche le ministère de la Santé de Gaza dans un communiqué.

« Tous les martyrs arrivés à l'hôpital n'avaient qu'une seule blessure par balle à la tête ou à la poitrine », indique le ministère de la Santé. « Cela confirme l'intention de l'occupant de tuer des civils. »

Le directeur des hôpitaux de Gaza, Muhammad Zaqout, a déclaré lors d'une conférence de presse devant l'hôpital Nasser de Khan Younis que les blessés étaient arrivés au centre médical dans des charrettes tirées par des animaux ou portés sur les épaules des gens, l'armée israélienne ayant empêché les ambulances d'atteindre le site d'aide.

L'armée israélienne nie que des soldats aient tiré sur des civils dans le centre, qualifiant ces allégations de « fausses informations ». Le GHF a également niéces informations, les qualifiant de « complètement fausses et fabriquées », et a publié des images de vidéosurveillance de la distribution d'aide à Rafah comme preuve apparente que la journée s'était déroulée « sans incident ».

La semaine dernière, trois personnes ont été tuéesau centre de distribution d'aide géré par le GHF à al-Bureij, au nord de l'axe Netzarim, et sept autres ont été portées disparues à la suite des troubles qui ont éclaté la semaine dernière dans le site sud du GHF à Rafah. Aujourd'hui, 2 juin, l'armée israélienne a tué trois autres personnes sur le site du GHF à al-Bureij.

« Les Américains et les Israéliens nous ont tendu un piège »

Ahmed Abu Libdeh, 28 ans, est arrivé au centre de distribution d'aide à Rafah à 5 heures du matin en provenance de l'est de Khan Younis. Au lieu de recevoir de la nourriture, il a été témoin de ce qu'il décrit comme « l'un des massacres les plus horribles perpétrés par l'armée [israélienne] » à Rafah.

« Nous étions debout à l'extérieur du centre de distribution », a déclaré Abu Libdeh à Mondoweiss. « Vers 6 heures du matin, un quadricoptère a survolé le site et a annoncé par haut-parleur que l'endroit était sûr et que nous pouvions entrer pour récupérer la nourriture. »

« Le haut-parleur du quadricoptère disait : « Marchez, vous êtes en sécurité. Nous vous distribuerons l'aide dans quelques instants » », a ajouté Abu Libdeh, précisant qu'après l'arrivée de l'aide, « ils ont commencé à nous bombarder et à nous tuer ».

« Dès que nous sommes entrés dans le centre de distribution et avons commencé à transporter les vivres, l'armée israélienne a ouvert le feu », a-t-il expliqué. « La scène était horrible. Nous ne voyions rien à cause de la poussière, des bombardements et des tirs nourris dirigés contre nous. Des dizaines de personnes ont été tuées. »

Abu Libdeh précise que la première frappe a eu lieu vers 6 h 15, lorsqu'un premier bombardement a visé une voiture remplie de personnes qui avaient reçu de la nourriture et quittaient la zone. « Après le bombardement de la voiture, les chars ont ouvert le feu sur nous », a-t-il décrit.

Ahmad décrit les premières minutes comme « un choc pour tout le monde », rappellant qu'ils étaient entrés sur le site de distribution conformément aux instructions de l'armée israélienne. « Nous ne savions pas d'où venaient les bombardements ni qui les lançait. La poussière envahissait la zone et les gens couraient sans savoir ce qui se passait. Des gens tombaient dans la bousculade et j'ai vu des dizaines de personnes gisant sur le sol, en sang. Ils sont tous morts parce que personne ne pouvait les sauver. »

« Les Américains et les Israéliens nous ont tendu un énorme piège en nous attirant ici pour nous tuer par dizaines », a conclu Abu Libdeh. « Nous ne voulons pas de l'aide des États-Unis. Nous voulons que la guerre cesse et la fin de la famine. »

Le massacre de dimanche a conduit de nombreux Palestiniens de Gaza à conclure que l'objectif du GHF n'est pas de distribuer de la nourriture à la population, mais d'aider et de soutenir l'armée israélienne dans son objectif d'« exterminer » les Palestiniens.

Arafat, 49 ans, qui a préféré ne pas donner son nom de famille, apparaît assis à l'hôpital Nasser avec un petit enfant sur les genoux dans un témoignage vidéo pour Mondoweiss. Tous deux pleurent, tandis qu'Arafat sanglote pour son frère, qui, selon lui, a été tué par l'armée israélienne à Rafah alors qu'il cherchait de la nourriture pour sa famille.

« Pourquoi nous disent-ils d'aller chercher de la nourriture pour nous tuer une fois sur place ? », demande Arafat. « Ce sont des menteurs. Ils nous mentent et mentent au monde entier. Les Américains conspirent avec les Israéliens pour nous tuer. Ils ont tué mon frère parce qu'il était parti chercher de la nourriture pour sa famille. » Arafat explique que l'enfant assis sur ses genoux est son neveu.

« Ils ont créé un endroit où nous pouvons être tués de sang froid », a poursuivi Arafat. « Ils ne devraient pas dire que c'est une zone humanitaire. C'est un piège et un massacre des affamés. »

Arafat note que certaines personnes faisaient la queue près du point de distribution depuis 23 heures la veille. « Le résultat, c'est que nous recevons la mort au lieu de nourriture », dit-il. « Nous ne voulons pas de l'aide de l'Amérique. Nous ne voulons pas de la nourriture de l'Amérique. Si l'Amérique veut nous aider, comme elle le prétend, qu'elle arrête la guerre. Nous ne voulons rien d'autre d'elle. »

Traduction : JB pour l'Agence Média Palestine
Source : Mondoweiss

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Gaza. Ceux qui ont épaulé le génocide

10 juin, par Jean Michel Morel — , ,
Dans son dernier ouvrage, Pascal Boniface, fondateur et directeur de l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), démontre combien l'impuissance du droit (…)

Dans son dernier ouvrage, Pascal Boniface, fondateur et directeur de l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), démontre combien l'impuissance du droit international à arrêter la guerre contre Gaza tient à la complicité des pays et des politiques occidentaux et à la complaisance des médias mainstream, notamment en France.

Tiré de orientxxi
5 juin 2025

Par Jean-Michel Morel

Droit international Gaza 2023-2025 Bande de Gaza France Génocide Israël Liberté d'expression Médias Palestine

Des corps enveloppés de bleu sont placés dans une fosse, entourés de personnes en deuil.
Khan Younès, le 22 novembre 2023. Des Palestiniens enterrent des corps dans une fosse commune du cimetière de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza. Les dépouilles, qui ne portaient que des numéros, provenaient de l'hôpital indonésien et de l'hôpital Al-Shifa, dans le nord de la bande de Gaza, selon les membres du comité présents sur le lieu de l'enterrement.
Mahmud HAMS / AFP

Couverture de livre avec fond coloré et titre en gras sur le conflit à Gaza.

Permis de tuer Gaza : Génocide, négationnisme et Hasbara
Pascal Boniface
Éditions Max Milo, 2025
283 pages
21,90 euros

Premier rappel salutaire dans le livre de Pascal Boniface, Permis de tuer, le fait que tout n'a pas commencé le 7 octobre 2023. Depuis 1967, « la colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est est illégale. L'annexion de Jérusalem-Est est illégale. Le blocus de Gaza est illégal ». La guerre à Gaza est le dernier exemple en date de cette violation par Israël du droit international au prétexte récurrent que son existence est en jeu.

Même si la décision de la chambre préliminaire de la Cour pénale internationale (CPI) de délivrer un mandat d'arrêt contre Benyamin Nétanyahou et Yoav Gallant, son ex-ministre de la Défense, a pu donner l'impression que la justice internationale s'emparait du dossier, depuis rien n'a changé. Les crimes de guerre comme les crimes contre l'humanité se sont poursuivis et intensifiés ; un génocide est en cours.

Cette incapacité à agir efficacement pour mettre un terme aux massacres se reflète à l'ONU où, avertit Boniface, « les choses sont simples. Dans la grande majorité des cas, les résolutions obligatoires qui exigent quelque chose d'Israël sont bloquées par un veto des États-Unis. »

« Amnesty International, Human Rights Watch… Quand l'humanitaire fait le jeu du Hamas »

Aux côtés des juridictions internationales, des ONG humanitaires se sont employées à dénoncer « un piège mortel » pour les Palestiniens (1). Un constat qui, très rapidement, après le déclenchement de la guerre par Israël, est devenu une évidence dès lors que les morts et blessés se sont accumulés et que, progressivement, la famine s'est installée. Une réalité que les médias ont mis des mois à accepter, et encore de manière timide et sans jamais remettre en cause le récit qu'ils avaient propagédepuis le 7 octobre 2023. Mais il y a encore Franc-Tireur qui, dans son édition du 24 janvier 2024, a débusqué les vrais coupables : « ONG au service du pire : Amnesty International, Human Rights Watch… Quand l'humanitaire fait le jeu du Hamas. »

Titre en haut, image d'une bougie sur fond noir, message sur ONG et humanitaire.

Cette partialité dans la prise en compte de la « destruction directe de la population palestinienne » (Amnesty International) s'examine au trébuchet de ce que pèse la guerre russo-ukrainienne dans les discours de la plupart des politiciens et des médias où l'agresseur est, à juste titre, vilipendé. A contrario, les massacres perpétrés par l'armée israélienne sont le plus souvent minorés ou justifiés en recourant à l'argument qui voudrait que dans chaque hôpital rasé, dans chaque école bombardée, dans chaque maison détruite, se sont réfugiés des « terroristes » du Hamas. Ce que, le 18 janvier 2024, s'est évertué à justifier Isaac Herzog, le président d'Israël, au Forum de Davos : « Sous chaque matelas de n'importe quelle maison à Gaza, il y a une roquette. »

Cette approche du conflit repose sur ce que Pascal Boniface appelle « un biais médiatique occidentaliste ». Il est illustré par le positionnement d'Israël, membre revendiqué de l'Occident depuis sa fondation en 1948, choix confirmé par les assertions sans ambiguïté de son actuel premier ministre : « Nous faisons partie de la culture européenne… L'Europe se termine en Israël (2) », ou bien encore, en décembre 2024, lors de ses vœux aux communautés chrétiennes en Israël : « Israël mène le monde dans le combat contre les forces du mal et de la tyrannie… ».

Un occidentalo-centrisme guerrier

Une phraséologie qui, en Occident, nourrit inévitablement l'islamophobie et le fameux « concept » d'islamo-gauchisme. Une façon, nous dit Pascal Boniface, d'assimiler l'islam à une menace terroriste, interdisant de critiquer Israël « comme un pays qui occupe une terre qui n'est pas la sienne et réprime dans le sang un peuple qui ne veut pas se soumettre, mais devient la pointe avancée de la guerre contre le terrorisme ».

Le 6 octobre 2024, Pascal Praud, le présentateur vedette de CNews, propriété du milliardaire catholique intégriste Vincent Bolloré, ce laboratoire de la désinformation, a relayé cette logique dans le JDD (propriété du même milliardaire) : « Le 7 octobre a changé ma vie. Je devinais depuis quelque temps : le monde arabo-musulman a déclaré la guerre à l'Occident. Israël est un rempart. » Un occidentalo-centrisme guerrier qui s'accompagne de l'inévitable rappel à l'Holocauste convoqué pour culpabiliser les opposants au conflit et clore toute discussion sur les agissements meurtriers d'Israël.

Pascal Boniface cite un expert de cette rhétorique en la personne d'Alain Finkielkraut, qui, le 24 octobre 2024, dans l'émission Le Club Idée du FigaroTV, lance :

Quoi qu'on pense de la riposte israélienne, le mot génocide est fou, ignoble. Il permet de nazifier les Juifs, de leur faire perdre leur crédit victimaire et ainsi de les faire basculer dans le camp des bourreaux.

Pas sûr que les 6 millions de juifs assassinés lors de la Seconde guerre mondiale envisageaient leur martyre sous forme de « crédit victimaire » dont pourrait se réclamer Israël.

Dans un chapitre bienvenu, l'essayiste s'attarde sur le rôle néfaste du lobby pro-israélien. Il dénonce son implication dans la politique intérieure française :

Le lobby pro-israélien s'est montré hyper efficace pour affaiblir le soutien diplomatique de la France à la cause palestinienne, influencer la classe politique française en faveur du gouvernement israélien, créer une solidarité entre des personnes ayant les mêmes appréciations du conflit, et limiter au maximum la capacité d'expression de ceux qui ne pensent pas comme eux.

Institution agissante du lobby, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) mène le combat de l'assimilation entre antisionisme et antisémitisme. Il trouve des alliés dans la droite, parfois à gauche et dans la macronie à l'exemple d'Aurore Bergé, actuelle ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, qui, le 13 février 2025, lors des Assises contre l'antisémitisme a déclaré : « L'antisionisme, la haine décomplexée d'Israël sont les nouveaux visages de l'antisémitisme. »

Un maccarthysme rampant

Boniface donne à comprendre ce combat comme étant d'abord celui de Nétanyahou qui « a réussi à imposer ce slogan creux dans le débat français, qui sert d'arme de dissuasion massive à toute critique de la politique israélienne à l'égard des Palestiniens et des territoires occupés ».

Chercheur, il fait aussi état de ce maccarthysme rampant qui sévit dans les médias refusant de l'inviter ou de ces campagnes de dénigrement dont il est l'objet ou bien encore de son éviction de la manifestation — qu'il a créée — « Les Géopolitiques de Nantes » par la maire socialiste, Johanna Rolland. « La ville de Nantes, écrit-il, est l'une des rares grandes métropoles à n'avoir toujours pas entamé en 2024 d'action de coopération décentralisée avec une collectivité palestinienne. » Ceci expliquant sans doute cela.

L'auteur veut espérer que « l'histoire sera sévère pour ceux qui sont restés muets face à l'indicible ». Lui ne fait pas partie des adeptes de la cécité volontaire, ni des repentis de la 25e heure, ceux qui s'aperçoivent avec retard que leur « soutien inconditionnel à Israël » les a précipités dans un abîme d'insalubrité morale.

Note

1. Le 1er juin 2025, le chef de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), Philippe Lazzarin, a indiqué sur X que la distribution d'aide humanitaire à Gaza était devenue un « piège mortel »

2. Pascal Boniface citant Sophie Bessis dans La civilisation judéo-chrétienne, anatomie d'une imposture, Les Liens qui libèrent, 2025.

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Gaza, jour 606 : 102 Palestiniens assassinés dans les « pièges mortels » des nouveaux centres humanitaires

10 juin, par Agence Média Palestine — , ,
Point sur la situation à Gaza, où Israël assassine les Palestinien-nes jusque dans les centres de distributions alimentaires, tout en poursuivant ses opérations de déplacement (…)

Point sur la situation à Gaza, où Israël assassine les Palestinien-nes jusque dans les centres de distributions alimentaires, tout en poursuivant ses opérations de déplacement forcé de la population.

Tiré de Agence Médias Palestine
3 juin 2025

Par l'Agence Média Palestine

Depuis une semaine, le Fonds Humanitaire pour Gaza (GHF), soutenu par les État-Unis, est mandaté par Israël pour contrôler les distributions d'aide alimentaire à la place des organisations locales et internationales (dont l'ONU) en place jusqu'ici, après plus de deux mois de blocage total des livraisons de ces dernières et la destruction systématique depuis 18 mois des infrastructures qui permettaient une forme d'autonomie alimentaire aux Gazaoui-es, assiégé-es depuis 17 ans par Israël.

Ces nouvelles« distributions alimentaires » sont le théâtre de scènes de chaos, de massacres et d'enlèvements. Selon un communiqué du bureau des médias de Gaza publié ce mardi 3 juin au matin, au moins 102 Palestinien-nes ont été assassiné-es dans ou à proximité de ces centres en une semaine, et plus de 500 autres ont été blessé-es. Le ministère dénonce ces centres qu'il décrit comme des « pièges » dans lesquels Israël attire les Gazaoui-es qu'il a précédemment affamé-espour les tuer.

« Ces soi-disant centres d'aide sont situés dans des zones exposées et à haut risque contrôlées par les forces d'occupation », a déclaré le bureau. « Ils sont devenus des pièges mortels. Les civils affamés sont attirés par la faim et le siège, puis froidement pris pour cible et abattus. » Qualifiant les tirs de calculés et s'inscrivant dans un plan plus large, le bureau a déclaré que ces scènes reflétaient « la cruauté derrière cette opération et révélaient ses véritables intentions ».

« Hunger Games dans la vie réelle »

« Un nouveau massacre commis par l'occupation israélienne, visant des points de distribution d'aide supervisés par les États-Unis à Gaza, faisant des martyrs et des dizaines de civils blessés #WitkoffMassacre », écrivait dimanche Ramy Abdul, responsable de l'organisation de surveillance des droits humains Euro-Med, dans un message publié sur X.

Des témoins oculaires interrogés par Euro-Med ont rapporté que des quadricoptères et des chars israéliens ont ouvert le feu sur les personnes qui attendaient de recevoir de la nourriture sur le site de Rafah vers 6 heures du matin dimanche. « Les forces d'occupation ont commencé à bombarder la zone sans discernement, transformant la scène en un horrible massacre. Au même moment, les forces de sécurité américaines ont tiré des gaz lacrymogènes sur les personnes à l'arrière pour les disperser et les tenir à distance », ont déclaré les survivant-es. Plus de 32 personnes ont été tuées dans ce massacre dimanche.

« Ces Hunger Games de la vie réelle doivent cesser, un nouveau cessez-le-feu doit être déclaré et Israël doit autoriser l'accès à tous les points de passage au système humanitaire mondial normal », a réagit Jan Egeland, directeur du Conseil norvégien pour les réfugiés, sur son compte X.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a exigé qu'une enquête soit ouverte. Jeremy Konyndyk, président de Refugees International, a qualifié le détournement par Israël du système d'aide à Gaza d'« effroyable, indéfendable et criminel ». « Le gouvernement israélien utilise l'aide comme une arme et toutes les personnes impliquées dans le GHF se rendent complices de crimes de guerre », a-t-il écrit sur X. « Mettons fin à cela. »

Nettoyage ethnique

L'ONU et les organisations humanitaires affirment que le GHF ne respecte pas les principes humanitaires, l'accusant d'utiliser l'aide à des fins militaires et avertissant que cela pourrait servir à dépeupler le nord de Gaza, comme le prévoit l'armée israélienne. Car outre les atrocités qui s'y déroulent, les centres de distribution du GHF sont aussi stratégiquement situées afin de participer au déplacement des milliers de Palestinien-nes du Nord de Gaza.

Trois des sites de distribution du GHF se trouvent à Rafah, dans des zones où l'armée israélienne a émis des avertissements d'évacuation. Le quatrième site est situé dans la ville de Gaza, près de la frontière avec Deir el-Balah, où des centaines de milliers de Palestiniens déplacés ont trouvé refuge. Aucun des points de distribution n'est situé au nord du corridor de Netzarim. Tous sont situés dans des zones qui ont été entièrement rasées par l'armée israélienne au cours des 18 derniers mois.

Les Palestinien-nes, affamé-es depuis plus de trois mois par le blocus israélien, doivent parcourir à pied ou sur des chariots tirés par des animaux les distances conséquentes pour se rendre dans les centres, alors qu'il n'y a plus de carburant. L'emplacement des centres vise donc à servir d'incitatif au déplacement vers le sud.

Depuis la rupture par Israël du cessez-le-feu le 18 mars dernier, l'armée israélienne a émis des ordres d'évacuation et/ou placé sous contrôle militaire 81% de l'enclave palestinienne, selon le dernier relevé de l'OCHA. 2,3 millions d'habitants de Gaza sont entassés sur une bande de terre de plus en plus réduite dans le sud de Gaza, près de la frontière égyptienne.

Israël cache peu son objectif de déplacer définitivement la population de Gaza, les responsables promouvant ouvertement des plans de « migration volontaire ». Une enquête du Financial Times rapporte que les zones vers lesquelles les Palestiniens sont poussés ressemblent à un « désert aride, sans eau courante, sans électricité et sans hôpitaux ».

Des images satellites montrent les forces israéliennes en train de déblayer des terrains et d'installer des infrastructures militaires dans les zones évacuées. Examinant des dizaines d'ordres d'évacuation forcée récents, l'analyste politique Xavier Abu Eid déclare : « Le gouvernement israélien a été très clair quant à son plan pour Gaza. Il s'agit d'un nettoyage ethnique. »

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Les 30 ans de la marche _Du pain et des roses _célébrés à Québec : un appel à continuer la lutte

10 juin, par Collectif — , ,
Québec, le 8 juin 2025 – Près de 2000 personnes se sont rassemblées hier dans les rues de Québec pour souligner les luttes féministes, 30 ans après la marche Du pain et des (…)

Québec, le 8 juin 2025 – Près de 2000 personnes se sont rassemblées hier dans les rues de Québec pour souligner les luttes féministes, 30 ans après la marche Du pain et des roses.

Du Musée des Beaux-Arts du Québec, jusqu'à l'Assemblée nationale, à l'image de la marche s'y étant conclue le 4 juin 1995, les marcheuses et les marcheurs se sont ensuite dirigés à la Place George V. Sous le thème Marchons pour _Du pain et des roses, _encore et plus que jamais, les chants, les slogans et les diverses prises de paroles ont rappelé les revendications de 1995 et leur actualisation dans le contexte de 2025, permettant de faire le point sur les luttes féministes pour combattre la pauvreté [1] dont les femmes sont les premières victimes.

L'événement du 7 juin [2] concluait une série de marches locales débutées le 26 mai, [3] réalisées dans 12 régions du Québec, par 25 organismes du mouvement féministe, communautaire et syndical, avec la collaboration d'une trentaine d'autres organisations de leurs réseaux. Environ 1200 personnes ont participé à ces marches parcourant 5550 km au total, en hommage au trajet de 1995.

« Les actions organisées autour du 30e anniversaire de la marche « Du pain et des roses », et surtout, la ferveur avec laquelle les revendications féministes ont été porté aujourd'hui, sont de bon augure pour la suite du mouvement » souligne Sylvie St-Amand, présidente de la Fédération des femmes du Québec et co-porte-parole des actions de Marchons pour _Du pain et des roses, _encore et plus que jamais.

« La marche de 95 nous a appris que même, et peut être surtout dans des moments difficiles, il ne faut pas baisser les bras. C'est justement le moment de se mobiliser quelle que soit la manière ! » lance Françoise David, porte-parole de l'événement et présidente de la Fédération des femmes du Québec en 1995.

Un rosier symbolique a été remis à la présidente de l'Assemblée nationale, madame Nathalie Roy, laquelle a indiqué souhaiter le mettre en terre à proximité du monument soulignant la lutte des suffragettes, sur le terrain de l'Assemblée nationale. Mesdames Ariane Émond, Michèle Rouleau, Marie-José Turcotte et Marjorie Villefranche, marraines [4] de la marche en 1995, étaient présentes, en compagnie de mesdames Arcelle Appolon, Florence-Agathe Dubé-Moreau, Melissa Mollen-Dupuis et Adina Ungureanu, co-marraines [4]pour les actions de 2025.

La marche s'est conclue par une invitation à un grand rassemblement organisé par la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes [5], à Québec le 18 octobre prochain, dans le cadre de la 6e édition de cette marche internationale, issue de celle de 1995.

À propos

À compter du 26 mai 2025, des marches locales et divers événements ont été réalisés par 25 organisations du mouvement féministe, communautaire et syndical ; environ 1200 personnes ont parcouru un total de 5550 km : Centrale des syndicats du Québec, [10] à Saint-Sauveur, le 28 mai ; Centre de femmes l'Essentielle [11] à Beloeil, le 3 juin ; Centre de femmes les Elles du Nord [12] à Chibougamau, le 5 juin ; Centre des femmes Centr'Elles [13] à Carleton, du 26 mai au 4 juin ; Centre des femmes de Longueuil [14], les 27 et 28 mai et les 3 et 4 juin ; Centre des femmes de Memphrémagog [15], le 29 mai ; Centre d'organisation mauricien de services et d'éducation populaire ( [16]COMSEP), le 26 mai ; Coalition montréalaise
de la Marche mondiale des femmes [17] (CMMMF) et ses groupes membres, le 29 mai ; Collective citoyenne Pas Une de Plus [18], le 4 juin ; Comité Action Féministe d'Unifor Québec [19], 7 juin – vers le rassemblement ; Comité régional Saguenay-Lac-Saint-Jean de la Marche mondiale des femmes [20] et ses groupes membres, le 5 juin ; Conseil central du Montréal métropolitain - CSN, [21] le 29 mai ; Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec [22] (FTQ), le 3 juin ; Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec [23] (FIQ), les 3 et 5 juin ; Groupes locataires de Maison pour la santé durable [24], du 26 mai au 4 juin ; L'R des centres de femmes du Québec [25] et ses groupes membres, du 26 mai au 4 juin ;
Regroupement des groupes de femmes de la Capitale nationale [26] (RGF-CN) et ses groupes membres, organisation du rassemblement du 7 juin. ; Réseau d'action pour l'égalité des femmes immigrées et racisées du Québec [27] (RAFIQ), le 5 juin ; Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec [28] (RTRGFQ) et ses groupes membres, du 26 mai au 4 juin ; ROSE du Nord, [29] le 4 juin ; Syndicat des cols bleus Montréal [30] (SCFP301), du 26 au 30 mai ; Table de concertation de Laval en condition féminine [31] (TCLCF) et ses groupes membres, le 4 juin ; Table de concertation des groupes de femmes de Lanaudière [32] (TCGFL) et ses groupes membres, le 4 juin ; Table de concertation du mouvement des femmes Centre-du-Québec (TCMFCQ) [33] et ses groupes membres, du 26 au 4 juin ; Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie [34] (TCMFM) et ses groupes membres, du 26 mai au 4 juin.

Personnes ayant pris la parole le 7 juin 2025 (ordre d'apparition)[1] : Françoise David, présidente de la FFQ en 1995 ; Chantal Locat, marcheuse en 1995 ; Michèle Rouleau, militante pour les droits des Premières Nations et marraine de 1995 ; Melissa Mollen-Dupuis, militante Innu et co-marraine des actions de 2025 ; Lise Fournier, marcheuse en 1995 et comité d'organisation de l'événement en 2025 ; Nathalie Roy, présidente de l'Assemblée nationales ; Diane Matte, coordonnatrice de la marche en
1995 ; Marjorie Villefranche, marraine de 1995, Maison d'Haïti ; Adina Ungureanu, Collectif des femmes immigrantes du Québec et co-marraine des actions de 2025 ; Marie Eve Brunet et Johanne Gagnon, Collectif pour un Québec sans pauvreté ; Sylvie St-Amand, présidente de la FFQ ; Mercédez Roberge, travailleuse pour la marche en 1995 et comité d'organisation de
l'événement en 2025 ; Émilia Castro, Pénélope Guay et Julie Antoine, porte-paroles de la Coordination du Québec pour la marche mondiale des femmes.

Des marraines et des co-marraines engagées : En prélude aux activités, une lettre ouverte est parue dans La Presse [35], sous la signature des marraines de la marche de 1995 et de courtes capsules vidéos [36], réunissant ces dernières et des co-marraines des événements de 2025, ont été diffusées par les médias sociaux [37].

Marraines de 1995, de nouveau présentes en 2025 : Aoura Bizzarri, fondatrice du Collectif des femmes immigrantes du Québec ; France Castel, chanteuse et comédienne ; Ariane Émond, journaliste indépendante et animatrice ; Ranee Lee, chanteuse, musicienne et professeure de jazz à l'Université McGill ; l'honorable Chantal Petitclerc, sénatrice,
médaillée paralympienne, Michèle Rouleau, militante pour les droits des Premières Nations ; Marie-Claire Séguin, autrice, compositrice, interprète, coach vocal et artiste peintre ; Marie-José Turcotte, communicatrice et guide de randonnée, ex journaliste-animatrice et cheffe d'antenne à Radio-Canada ; Marjorie Villefranche, ex directrice générale
de la Maison d'Haïti.

Leurs co-marraines pour les actions de 2025 : Arcelle Appolon, directrice de la Maison d'Haïti ; France Beaudoin, animatrice et productrice, Léa Clermont-Dion, autrice et réalisatrice, récipiendaire du prix Hélène Pedneault ; Marion Cousineau autrice, compositrice et interprète ; Florence-Agathe Dubé-Moreau, commissaire indépendante en art contemporain, autrice de « Hors jeu » et récipiendaire du prix littéraire de la Gouverneure-Générale ; Melissa Mollen-Dupuis, militante Innu ; Adina Ungureanu, directrice du Collectif des femmes immigrantes du Québec ; et Ariane Vaillancourt autrice compositrice et interprète.

« Marchons pour [38]_Du pain et des roses, encor [38]_e et plus que jamais » [38] est organisé par la Fédération des femmes du Québec [39], en collaboration avec la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes [5]. Les marches locales du 26 mai au 4 juin 2025 sont réalisées par des organisations autonomes et celle du 7 juin à Québec est organisée grâce à la contribution du Regroupement des groupes de femmes de la Capitale-Nationale [26].

La Marche des femmes contre la pauvreté « Du pain et des roses » [40] a eu lieu du 26 mai au 4 juin 1995, à l'initiative de la Fédération des Femmes du Québec, avec la collaboration d'un grand nombre d'organisations. Plus de 850 femmes ont marché pendant 10 jours en direction de l'Assemblée nationale. Plus de 18 000 personnes les y attendaient, pour entendre le gouvernement de l'époque répondre à leurs revendications contre la pauvreté.

Liens


[1] https://us.cisionone.cision.com/c/eJwszEuO6yAQheHVwAyLN1UDBpl4GxGmihhd5wW-WX8rrZ5-R-enbKF6HSVnkzw6jM55uWdM2mPbaqvGBEBoEBtY9mgZw0ZJ9hzBh7KFhuRQXw0lEzWYlFAHY4TXsxP_6291L_3gMVWErWIAIFT7OEJbvoM88n6eryncRdhV2LW19_KuSy3CroM__KBey9mfj6kMYlBW2yDsKu9MvajBB5fJqlP-hesfCHcx2ngT5ciDqdRvQXj9Gjwn38r_uvPyHDc5z8F8__4Doyebkiq1kPJQmwKyTelNg9HeO4tafrL9CQAA__9BwFvQ
[2] https://us.cisionone.cision.com/c/eJwsy02yqyAQQOHVwAyrgeZvwCATt5FCuo28p0lEzfpv5dadfqcOZRMrgpecdcBkk7cW5ZKDJQgGESs5U0zRibwGzck6X8GDbNlHdGVycyKb4K4paA9Rh5DAaS0Qjkb8v-1qK23lfigfp5pcjJTU0lc3D98g17yc5_sQ9ibMKMw4z_uw16EWYcat9LqwoksF9e9qT2XAOLVfPHEVZvzIjakV1XnlcrBqlH_h_gfC3jRo1F723JlKPdvrKRDenY-DH-WqCw-v_pDH2Zm37-84IZkQVKmFFMY6q0hmVjBB1IBoTQL5yeYnAAD__2DVXPk
[3] https://us.cisionone.cision.com/c/eJwszT2S3CAQxfHTQNZTfDQIAoJN5hpbPXSzwtasdkCawKd3yeX0_-rVj4tLFU3UUuyC2efoPeq1GB9zqxFDzJSic5Ux5wdFQWKkpeleYsJAj9Ay-2w-LS82mmSXJZtgrUIzO8vv_oIn9U3GhJgeNYeUOMM6ttBu16C3sh7Hz1T-Q7m7cvfWXrdXvVVS7s4y4UmjrjJh2yttMuFnyAQWqKv8gfd-TuATXLwUoBMQfp39G5xxQbm7fgp3giGb0BToXP6Fz_9B-Q9rLNqoRxnCVI--fys0lzHli866ym0fX3oeQ-R5_YNkZLcsQJUYMNUGiV0D8zDJGkTvstHv4v4GAAD__8vzaVY
[4] https://us.cisionone.cision.com/c/eJxMjTly3TAQBU8DZPML-xIgUPKvoRoCAxE2V4D0-V2UHSib6n5dU5IK2QjHKUlvoo5Oa8Pn5Jybqg82h5Ar6hC1MdpmL4uPshjNW3LBWJxsjUVH8SmLl04E6X0UVkpmxGiFfrcTVmwL9QEuTDnaEEqEuS-2vh7BlzRf1zGY_mDqzdS71vN15ldGpt4LDVixd2wbDSgEMkYLdMEj8v5TDcB8tX37nq3Y8_zcx353KDcc2Lane3Z9HzSAtrx3etix3APOm-AXrtgGU2--UmkInRbCQdBK-gaf_wHTH1JIIx3vqVP595cZcXQag77wzjO99v7Fx9WJ1qe3FE1R3gNmLGBCrhCKqiAmEaQwRqso-J-k_gYAAP__x-1-Rg
[5] https://us.cisionone.cision.com/c/eJwszDFywyAQheHTQIdnFxYEBYUbX8OD2JXFRIptUOLrZ5yk_d98j7ONlSBoyThRcik4R3rNxJ4wWOIgYZ6DCJRKbmEU8XOVqlsOkXyZ_ZLYJbgiTxgg4jQl8IiKYDSWj_Y0e2mb9GFCnGvyMXIya9_8cnoPesvrcTyGcmdlL8peXq_XqT73fTnd-03ZSxBT6tHun8aC9XoXbsV02aQMMY3zb7j-B-XOCEgYdM9d-A8qgkeXMeRWvuoq7189ji6yv72XRGynyZRa2FCsi4lsFwMzRAQiZxPo72x_AgAA__8_5Vpy
[6] https://us.cisionone.cision.com/c/eJwsy0tuwyAUheHVwAyL92PAIFLkBXQDEXCvYxQ7pOA0269cdfqd80OUvmhuKUbhdFDBKqXpGrOCggYl95glZo-2GC0l-MyFM0HSGq3XJmWzBFCB3wQ4YbkXzgVuhCCajwr4qN9sT3XDPpj1uQTjPQS29s0s0znQLa7H8RpEXYiciZw_n8-0pIK5tcdU2k7kfH2_Un3iATh6GzhECOY8q3lrJW1I1HXpt_mL7gg1sY4bpoGsQvyD2z8QdRFcaGFpjx0hlaO2J9H81XEMvKd3WXFq_U7H0RH3szcYNEjnWCoJmPZlYR7kwnjmXnCtlQyc_kT5GwAA__8EJWQo
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D’Haïfa à Tel-Aviv, reportage auprès de ces Israéliens qui veulent l’arrêt de la guerre à Gaza

Ces dernières semaines, les Israéliens ont défilé par milliers dans les rues du pays. Pas un jour ne passe sans manifestations contre la politique de Netanyahou, pour demander (…)

Ces dernières semaines, les Israéliens ont défilé par milliers dans les rues du pays. Pas un jour ne passe sans manifestations contre la politique de Netanyahou, pour demander le retour des otages, pour un arrêt de la guerre à Gaza et plus récemment pour s'indigner de la souffrance des Gazaouis.

Tiré de l'Humanité
https://www.humanite.fr/monde/guerre-israel-hamas/dhaifa-a-tel-aviv-reportage-aupres-de-ces-israeliens-qui-veulent-larret-de-la-guerre-a-gaza
Léonor Varda

On les a d'abord aperçus à l'université d'Haïfa, devant l'école des beaux-arts Bezalel de Jérusalem ou encore sur le campus Ben Gourion de Beer-Sheva, au sud d'Israël. Puis ces drapeaux noirs ont pris place, épars, parmi les symboles brandis par les manifestants, aux côtés du ruban jaune de la campagne pour les otages encore détenus à Gaza, intitulée « Ramenez-les à la maison », et de banderoles anti-Netanyahou.

Le mouvement du black flag (« drapeau noir » en anglais) est né il y a tout juste deux semaines àl'initiative de groupes d'universitaires de Tel-Avivdésireux de délivrer un message : la guerre à Gaza doit prendre fin, et avec elle la dévastation qui frappe les civils gazaouis et leurs enfants – dont 1 309 ont été tués par Israëlaprès sa rupture unilatérale du cessez-le-feu le 18 mars, selon l'Unicef.

« Nous pensons qu'un drapeau noir flotte aujourd'hui sur la conduite du gouvernement et que les soldats et les pilotes qui bombardent Gaza sont complices d'actes criminels », assène Dana Olmert, chercheuse en littérature à l'université de Tel-Aviv et membre du conseil d'administration de l'ONG israélienne anti-occupation Breaking the silence. L'enseignante, par ailleurs fille de l'ancien premier ministre Ehud Olmert issu de la droite et proche d'Ariel Sharon, est l'une des figures actuelles d'un monde universitaire de gauche refusant de rester muet plus longtemps face aux décisions de son gouvernement.

« L'Israélien moyen ne connaît pas les images de Gaza »

« Il existe en Israël une gauche radicale, petite mais engagée, qui résiste à l'occupation depuis des décennies, expose Dana Olmert. Ces derniers mois, de plus en plus de voix se sont jointes à cet appel, exigeant la fin de la guerre et des dommages causés aux civils innocents à Gaza. » L'apparition dans les cortèges de portraits de civils tués dans l'enclave palestinienne est cependant bien récente en Israël. Elle existe aujourd'hui grâce à une prise de conscience tardive par la société israélienne des crimes perpétrés par son armée à Gaza, estime Liran Razinsky, un autre professeur issu de l'université de Bar-Ilan, à Ramat-Gan, dans la banlieue est de Tel-Aviv.

Les médias israéliens sont majoritairement responsables, selon lui, de ce retard : « L'Israélien moyen ne connaît pas les images de Gaza, car les médias locaux, surtout la télévision, ne les ont pas diffusées. Je pense que beaucoup de citoyens ont eu très mal moralement en les découvrant, juge-t-il. Les politiciens savent, les internationaux savent, mais ici tout le monde ne lit pas Haaretz. » Il serait pourtant hypocrite de résumer le problème à un manque d'information, ces universitaires en conviennent.

Comme nombre de citoyens, Liran Razinsky a vu lasociété se fracturer sur la question israélo-palestinienne. Parfois jusqu'à la rupture. « Au lendemain du 7 octobre 2023, un ami que je fréquentais depuis plus de trente ans m'a dit : « Il faut faire une deuxième Nakba » (exode des Palestiniens avant et pendant la guerre israélo-arabe et la proclamation de l'État d'Israël en 1948 – NDLR) », se souvient-il. « J'ai répondu qu'il s'agissait d'un crime contre l'humanité, et il m'a accusé d'être du côté de Staline, de Pol Pot, parce que je ne condamnais pas assez le Hamas. Puis il a refusé tout contact avec moi. »

Le bloc uni des colons

Cette polarisation de la société israélienne s'exprime dans la rue, foulée ces dernières semaines par des manifestants aux aspirations adverses. Les altercations entre ces groupes ne sont pas rares, alors que l'extrême droite au pouvoir répète sur les plateaux télévisés et lors de marches nationalistes qu'« il n'y a pas de civils innocents à Gaza ».

Le 7 octobre aura eu pour conséquence l'élargissement du fossé entre deux blocs distincts, selon Dana Olmert : « D'un côté, une partie croissante de l'opinion publique recherche une solution politique globale avec les Palestiniens, soutient un cessez-le-feu immédiat, la fin de la famine à Gaza et le renversement du gouvernement actuel. Pour ce groupe, ramener les otages chez eux le plus rapidement possible est la priorité absolue. De l'autre côté, on trouve un public de plus en plus influencé par des idéologies racistes et juives suprémacistes, qui appelle à la vengeance et à l'expansion des colonies dans les territoires occupés. » Les figures de proue de ce combat messianique et anti-Arabes ne sont autres que les influents ministres d'extrême droite Itamar Ben Gvir (Sécurité nationale) et Bezalel Smotrich (Finances), alliés de Benyamin Netanyahou depuis 2022 au sein de la coalition gouvernementale.

Ceux-là contribuent au défoulement d'un discours sioniste extrémiste : Bezalel Smotrich annonçait encore ce jeudi 29 mai la création de 22 nouvelles implantations juives enCisjordanie occupée, au mépris du droit international. De son côté, Itamar Ben Gvir s'affichait lundi dernier à Jérusalem aux côtés des colons les plus nationalistes et racistes du pays lors de la Marche des drapeaux, qui célèbre chaque année l'occupation et l'annexion par Israël de la partie orientale de la ville. Une preuve supplémentaire de la prise en otage du pouvoir par une frange nationaliste radicale, qui a poussé des dizaines de milliers d'Israéliens à manifester contre une dérive autocratique et pour le maintien d'un contre-pouvoir institutionnel en avril et mars.

Contestation bâillonnée

« Ce n'est pas que les gens n'ont pas envie de manifester, mais vous allez voir comment la police encadre les manifestations ces temps-ci… Des policiers par centaines, chaque mouvement est scruté et ils peuvent être agressifs. » Ce dimanche 1er juin, Nisreen Mourkus est stressée. Du coffre de sa voiture, elle sort pêle-mêle des affiches en hébreu et en arabe, des portraits d'enfants tués à Gaza et des autocollants et flyers portant le logo du Mouvement démocratique des femmes en Israël, un groupe de femmes juives et arabes créé en 1949 afin de militer pour la solution à deux États.

« D'habitude, je vais faire imprimer tout ça à Acre. Mais mon imprimeur refuse depuis quelque temps, il a peur que la police ne ferme son commerce… Donc j'ai dû en trouver un autre à Nazareth. Lui a accepté ! » raconte-t-elle, en route vers la manifestation prévue ce jour-là sur les hauteurs d'Haïfa, au nord d'Israël, pour l'arrêt des violences à Gaza. Cette Arabe d'Israël, Palestinienne dont la famille est restée sur place lors de la création d'Israël en 1948, ne touche pas terre ces derniers jours.

Elle se trouve prise entre l'organisation de marches contestataires dans le nord du pays, la rédaction de lettres à l'adresse de diplomates internationaux pour les inciterà faire pression sur Israël, et plusieurs visites dans les camps de réfugiés palestiniens de Cisjordanie, où l'armée entreprend des destructions massives depuis le mois de février. « Je milite avec plusieurs collectifs pour les droits humains, les droits des femmes et des enfants, les droits sociaux… Tout est connecté, en particulier en ces temps de guerre », souligne cette militante communiste, avant d'ajouter : « J'espère qu'un jour, les Israéliens comprendront qu'il n'est pas tenable de vivre ici en se préparant constamment à la prochaine guerre contre un de ses voisins. »

Ce jour-là, la manifestation est déplacée sur le mont Carmel. En contrebas, on aperçoit le port d'Haïfa. « Nous sommes bien moins visibles des habitants du centre-ville que lors des défilés précédents », souffle Nisreen Mourkus, ployant sous le poids de ses pancartes. Habituellement, les manifestants empruntent Allenby Street, l'artère fréquentée du centre. Sans cette concession sur le parcours, la manifestation aurait été interdite par le ministère de la Sécurité d'Itamar Ben Gvir, disent ses organisateurs.

C'est donc encadré par un imposant dispositif policier que le cortège s'élance à 17 heures. Des pancartes sur lesquelles on peut lire « Arrêtez la guerre », des slogans écrits en hébreu, en arabe et en anglais, sont brandies. Autour de la bannière de l'Action antifasciste flottent plusieurs drapeaux noirs.

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