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Révolution québécoise, une revue « pour l’établissement d’un véritable socialisme »
Dans les années 1960, de nombreux mouvements contestataires émergent en Occident que l’on réunit sous l’appellation de Nouvelle gauche. Cette dernière désire renouveler l’analyse marxiste, tout en introduisant des pratiques militantes originales. Au Québec, plusieurs groupes s’inscrivent dans cette mouvance et cherchent une voie d’émancipation sociale, culturelle et économique. C’est le cas de l’équipe de Révolution québécoise qui joue un rôle central dans la discussion radicale avant que ses dirigeants ne rejoignent le Front de libération du Québec à l’automne 1965[1].
En juin 1960, le Parti libéral du Québec de Jean Lesage remporte les élections provinciales mettant fin à plus de quinze ans de règne de l’Union nationale. Le nouveau gouvernement introduit plusieurs mesures progressistes, notamment la restructuration de l’éducation, de la santé et des affaires sociales que l’État prend dorénavant en charge plutôt que l’Église catholique. Au niveau économique, les libéraux appuient la consolidation de la bourgeoisie francophone au Québec, tout en procédant à certaines nationalisations, dont celle de l’électricité en 1962. Pourtant, dès cette époque, plusieurs militant·es trouvent ces actions insuffisantes. Les plus radicaux soulignent que le progrès du Québec ne dépend pas du développement d’une bourgeoisie nationale, mais doit plutôt viser l’émancipation des masses laborieuses. Leurs réflexions tentent d’arrimer l’indépendance du Québec et la libération de son peuple, dont on trouve une première formulation dans la Revue socialiste (1959). Son directeur, Raoul Roy, affirme : « Seul l’établissement, par l’outil socialiste, d’une république souveraine, parce que seul le socialisme affranchit des chaînes capitalistes et de l’oppression nationale, émancipera le Québec du joug des colonialistes et de l’expansionnisme impérialiste du capital étranger. »[2]
Dans ce contexte, diverses organisations émergent, dont le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN, 1960-1968) et le Front de libération du Québec (FLQ, 1963-1972), ainsi que des revues comme Parti pris (1963-1968) et Révolution québécoise (1964-1965)[3]. Cette dernière est issue de la rencontre entre Pierre Vallières et Charles Gagnon, deux jeunes intellectuels déçus des publications existantes. À la différence de l’étapisme promu par Parti pris (indépendance d’abord, socialisme ensuite), la revue Révolution québécoise adopte une position plus fondamentalement marxiste, affirmant dans sa présentation liminaire : « La sécession en elle-même est une mesure à combattre, si elle n’est pas nécessitée par l’établissement au Québec d’une économie de type socialiste. »[4] Ceci dit, la revue défend l’indépendance si elle est réalisée par les prolétaires québécois dans l’optique de leur libération et de l’instauration d’un régime socialiste. La question de la lutte des classes est au cœur des huit parutions que connaît la revue jusqu’en avril 1965, ainsi que la volonté de lier la théorie et la pratique révolutionnaire.

« Abolir l’exploitation de l’homme par l’homme »
À l’été 1964, lorsque Pierre Vallières décide de lancer Révolution québécoise, il est déjà connu en tant que secrétaire général du Syndicat des journalistes de Montréal (affilié à la CSN), leader de la grève en cours à La Presse et ancien collaborateur de la revue Cité libre. Charles Gagnon, quant à lui, est chargé de cours de l’Université de Montréal et a déjà publié quelques textes. Grâce à leur stature et à un climat social favorable, la revue exerce un certain attrait, dont témoigne la présence de Pierre Vadeboncœur dans ses pages. La revue se distingue par son intransigeance qui lui donne sa saveur et fait son intérêt. Dans une époque marquée par un nationalisme québécois censé rassembler tous les groupes de la société, il n’est pas bienvenu de souligner que la bourgeoisie québécoise travaille pour son propre intérêt et qu’elle est pratiquement aussi nuisible aux classes laborieuses que la bourgeoisie anglo-canadienne. Vallières précise : « Les travailleurs ne doivent avoir aucun scrupule à exploiter à leur profit et au maximum les compétitions très vives qui existent entre les capitalistes canadian et les capitalistes québécois. […] Le Québec demeurera l’appendice pauvre d’un système qui couvre la moitié du monde et qui favorise l’exploitation du plus grand nombre possible de pays au profit des actionnaires américains et de leurs amis, tant que la bourgeoisie québécoise conservera l’initiative de l’affirmation nationale. »[5]
Afin de participer au développement d’un mouvement révolutionnaire au Québec, la revue prône un travail d’éducation en vue de développer une conscience de classe antagonique et la formation d’un parti socialiste québécois axé sur la lutte contre le capital. « La propagande et l’organisation sont les deux jambes de la révolution en marche. »[6] Pour se faire, l’équipe déploie un effort visible de documentation des luttes ouvrières en cours, par exemple la grève de Bellerive Veneer and Plywood (Mont-Laurier), les luttes dans le secteur du textile ou le conflit à La Presse. Charles Gagnon, impliqué dans le mouvement étudiant, critique son manque de vision. En termes de modèles, la revue sollicite l’exemple de Cuba où une révolution populaire a renversé la dictature pro-américaine et instauré un régime socialiste très dynamique. L’idée générale qui habite la revue est la suivante : se lier avec les travailleur·euses en documentant leurs luttes, utiliser celles-ci comme exemples pour faire comprendre le système d’exploitation et la nécessité de son dépassement, puis encourager l’organisation révolutionnaire en s’inspirant de modèles internationaux. En somme, il faut passer d’une révolution tranquille à une révolution active.



Du Mouvement de libération populaire à la lutte armée
En plus de ses réflexions, l’équipe de Révolution québécoise participe à l’organisation politique concrète. En mars 1965, elle intègre un comité de coordination des mouvements de gauche comprenant Parti pris, le Parti socialiste du Québec, la Ligue socialiste ouvrière et plusieurs autres. Durant le printemps et l’été, le projet d’alliance se cristallise et plus de 150 personnes adhèrent au Mouvement de libération populaire (MLP). Alors que Révolution québécoise cesse de paraître en avril 1965 en raison de difficultés financières, ses dirigeants s’impliquent dynamiquement dans la nouvelle organisation. Pierre Vallières indique : « C’est dans cette perspective d’action directe que l’équipe de Révolution québécoise se joint à celle de Parti pris, moins pour écrire dans la revue que pour agir à partir du mouvement suscité par elle. »[7] Malheureusement, la formation éprouve des difficultés de deux ordres : d’abord, elle peine à recruter au-delà de ses adhérent·es initiaux·ales, ensuite, elle n’arrive pas à choisir entre le travail de masse et l’action avant-gardiste. De fait, la plupart des militant·es du MLP sont attiré·es soit par les grandes organisations existantes, soit par la lutte armée. En mars 1966, une majorité de membres du MLP rejoignent le Parti socialiste du Québec, alors que Vallières et Gagnon ont déjà intégré le FLQ.
Charles Gagnon explique dans le texte Violence, clandestinité et révolution (juin 1966)[8] que la lutte armée est nécessaire afin de provoquer un durcissement du pouvoir qui révélera aux travailleurs sa véritable nature. Le prolétariat sera ainsi poussé à la révolte, dont le FLQ pourra prendre la direction afin de mener à terme le processus révolutionnaire et d’instaurer le socialisme. Malgré les attentats et la répression, cette stratégie échoue, ce dont conviennent Vallières et Gagnon à l’hiver 1971-1972, le premier choisissant d’appuyer le Parti québécois, le second de lancer l’organisation marxiste-léniniste EN LUTTE !. Ainsi, c’est Charles Gagnon qui renoue avec le projet initial de Révolution québécoise, faisant écho aux desseins d’un syndicaliste qu’il interviewait en février 1965 : « Lorsqu’on va se battre systématiquement pour les travailleurs, ils vont retrouver leur dignité et le sens de leurs responsabilités et à partir de là, nous pourrons construire une société nouvelle à la mesure des travailleurs, faite pour eux et dirigée par eux. »[9]

Par Alexis Lafleur-Paiement, membre du collectif Archives Révolutionnaires
Notes
[1] Cet article est initialement paru dans le numéro 101 de la revue À Bâbord !
[2] « Propositions programmatiques de la Revue socialiste », Revue socialiste, no 1 (printemps 1959), page 21.
[3] Tous les numéros de Révolution québécoise sont disponibles en version numérisée : https://archivesrevolutionnaires.com/documents-numerises/
[4] « Présentation », Révolution québécoise, no 1 (septembre 1964), page 5.
[5] VALLIÈRES, Pierre. « Le nationalisme québécois et la classe ouvrière », Révolution québécoise, no 1 (septembre 1964), pages 18-19.
[6] ROCHEFORT, Jean. « Socialisme et sécession », Révolution québécoise, no 1 (septembre 1964), page 39.
[7] VALLIÈRES, Pierre. « Pour l’union de la gauche », Parti pris, vol. 2, nos 10-11 (juin-juillet 1965), page 103.
[8] Disponible dans GAGNON, Charles. Écrits politiques, vol. 1, Montréal, Lux, 2006, pages 11-30.
[9] « Vers une conscience de classe », Révolution québécoise, no 6 (février 1965), page 17.
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Appuyons les licencié-es et boycottons Amazon !

Soyons nombreux dans les rues de Montréal le samedi 15 février en appui aux 4500 travailleurs et travailleuses licenciés par Amazon et ses sous-contractants. Le 22 janvier dernier Amazon, annonçait son intention de fermer ses sept centres de distribution au Québec en guise de représailles à la syndicalisation de son entrepôt de Laval.
Cette décision brutale est contraire à nos lois du travail et démontre tout le mépris qu'à cette multinationale et son grand patron Jeff Bezos, allié de Donald Trump, envers les travailleurs et travailleuses du Québec. Nous devons riposter énergiquement en boycottant les produits d'Amazon et en exigeant que tous les paliers de gouvernement et toutes les institutions publiques cessent de s'approvisionner auprès de cette multinationale.
L'intersyndicale de Québec solidaire invite tous les membres du parti à se joindre à ce grand mouvement de boycottage et à le populariser dans leurs communautés. C'est une lutte ouvrière et une résistance populaire à l'impérialisme trumpiste !
Suivez le mouvement de boycottage ICI, ON BOYCOTTE AMAZON
https://www.facebook.com/boycottamazon.ca
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Le projet de loi du gouvernement de la CAQ sur l’intégration nationale reste aveugle sur l’essentiel

Le 30 juin dernier, le ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration, Jean-François Roberge, déposait un projet de loi sur l'Intégration nationale (PL84). « Ce projet de loi a pour objet d'établir le modèle québécois d'intégration nationale, lequel favorise la vitalité et la pérennité de la culture québécoise en tant que culture commune et vecteur de cohésion sociale ; une culture dont la langue française est le principal véhicule et qui permet l'intégration à la société québécoise des personnes immigrantes et des personnes s'identifiant à des minorités culturelles ». Le ministre s'est engagé à évaluer toutes les options pour renforcer le sentiment d'appartenance des personnes immigrantes à la culture commune du Québec : mise à jour du test des valeurs québécoises, bonification des activités d'intégration du ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration (MIFI), renforcement de la laïcité dans les écoles, opposition à l'entrisme religieux dans toutes les sphères de la société, définancement des activités culturelles qui ne respectent pas la culture commune … Le projet de loi, lui, en reste à de grands principes, mais il est important de discuter les fondements de ces derniers d'une part et d'expliciter les raisons de cette initiative gouvernementale d'autre part.
1. Les réactions des organisations syndicales, populaires et démocratiques au projet de loi 84 (PL84)
La CSN déplore que le projet de loi ait été déposé sans qu'aucun processus de consultation préalable n'ait été mis en place. La CSD résume bien le sens des critiques de ces organisations : « Le projet de loi propose des principes abstraits et des intentions, mais rien n'est mis au jeu pour voir comment réellement, concrètement, on améliorera l'accueil, la francisation et l'intégration des personnes immigrantes au Québec ». La FTQ dénonce les inconséquences du gouvernement qui prétend favoriser l'intégration des personnes migrantes alors qu'elles coupent les services en francisation. Les organisations syndicales n'ont pas de difficulté à multiplier les exemples des inconséquences à ce niveau. Mais des analyses de la part de ces organisations sur les fondements politiques et idéologiques de ce projet de loi restent à produire.
La Ligue des Droits et Libertés dans un communiqué intitulé Droits et libertés menacés pour la population québécoise, présente une analyse plus développée. Elle dénonce le fait que le PL84, fasse « porter aux personnes immigrantes le fardeau individuel de leur intégration à la société québécoise (…) et dénonce le fait que le PL84 vise à imposer les valeurs de la majorité plutôt qu'à ouvrir un dialogue respectueux des droits culturels de toutes et tous, souligne le fait que le projet de loi 84 fasse de la Loi 21 l'un des socles de sa politique » qui est « une loi discriminatoire, adoptée sous bâillon, sans l'unanimité de l'Assemblée nationale et en utilisant de manière préemptive et mur à mur les clauses dérogatoires de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et de la Charte canadienne des droits et libertés » et que le PL84 ne fasse « nulle part référence au droit des peuples autochtones à l'autodétermination, pourtant inscrit dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. »
2. Critiques des fondements du PL84
Malheureusement, jusqu'ici les critiques ne discutent pas les fondements politiques et idéologiques de ce projet de loi. C'est la notion d'intégration nationale qu'il faut d'abord discuter pour déconstruire le discours porté par le PL84.
Comme l'écrit Saïd Bouamama, le discours dominant sur « la question de l'intégration est de substituer l'alternative intégration / non-intégration à l'alternative intégration dominée / intégration égalitaire. Autrement dit, la place réelle de l'immigration et de ses enfants est un processus reflétant l'état d'une société, la place sociale qu'elle assigne à ses nouveaux membres, les réactions de luttes de ceux-ci pour obtenir une place plus égalitaire. Il s'agit bien de conflits entre une assignation dominée et le refus de celle-ci par les premiers concernés, et non d'adaptabilité, de « distance culturelle » ou de « volonté individuelle ». (…) Le paradigme culturaliste et intégrationniste réduit le réel social complexe en scission binaire, et permet ainsi une dépolitisation des questions analysées. (...). Le paradigme intégrationniste est le cadre idéologique, aujourd'hui quasi hégémonique, permettant cette évacuation des déterminants sociaux. ».
Le PL84 pose l'intégration nationale essentiellement sur le plan culturel et linguistique. De plus, il présente cette dernière avant tout comme un devoir des personnes migrantes, même si l'État est appelé à faciliter cette intégration. Le PL84 néglige ainsi les dimensions économiques, sociales, civiques et politiques de l'intégration.
Micheline Labelle rappelle les différentes dimensions de l'intégration. « Il y a intégration économique lorsqu'il y a participation active au marché du travail et que le travail accompli est en phase avec les compétences acquises et la reconnaissance des diplômes. Dans le cas contraire, la déqualification ou le chômage constituent un obstacle à l'intégration. (…) Oublier ce fait et mettre l'accent exclusivement sur la dimension culturelle revient à négliger les véritables obstacles à l'intégration qui constituent un terreau fertile pour l'adoption de postures antagonistes face à la société québécoise. » La non-reconnaissance des diplômes, les statuts spéciaux en matière de droit au travail et à la syndicalisation, les contrats fermés qui lient les travailleurs et travailleuses migrants temporaires à un employeur, les discriminations économiques de toutes sortes touchant les personnes migrantes et les communautés culturelles sont des exemples de ces obstacles à l'intégration, sans parler du racisme systémique dont le gouvernement de la CAQ, comme le PQ d'ailleurs, refuse de reconnaître la réalité.
L'intégration civique et politique est aussi exclue du projet du PL84. « L'intégration civique et politique signifie que les citoyens de toutes origines puissent participer dans les affaires publiques de la société d'accueil ; le vote, l'engagement dans les partis politiques nationaux, municipaux, les mouvements sociaux, la présence dans les instances municipales, etc. Cet engagement n'empêche en rien la participation dans les dossiers et débats concernant le pays d'origine, par le biais des réseaux transnationaux des immigrants. »(Micheline Labelle). Pourtant, les droits politiques, comme le droit de vote, sont déniés aux personnes migrantes, les constituant ainsi comme un secteur de la population séparé du reste de la société québécoise au niveau de droits politiques essentiels.
La conception culturaliste et individualiste de l'intégration mise de l'avant par le PL84 fait abstraction de l'égalité économique et se refuse à définir ce que serait une inclusion véritable à ce niveau. Elle refuse de prendre en compte le fait qu'une part de plus en plus importante de la population, constituée par les personnes migrantes, n'a pas les mêmes droits sociaux et politiques et en fait des citoyens et des citoyennes de deuxième classe. Le PL84 ne se donne nullement les moyens d'une véritable intégration. En ne tenant pas compte des conditions économiques, sociales et politiques de la population migrante, frappée par diverses discriminations, le PL84 évite d'identifier les réels fondements d'une véritable intégration qui ne peut passer par une égalité économique, sociale et politique. Plus encore, en refusant de reconnaître la réalité pluriculturelle et multinationale de la société québécoise, le PL84 risque de déboucher sur des ultimatums au vivre ensemble sans remettre en question l'assignation des personnes migrantes à vivre dans des positions subalternes dans la société québécoise.
3. Le gouvernement de la CAQ, moins préoccupé d'intégration nationale que de rente électorale
Pourquoi le gouvernement de la CAQ dépose-t-il un tel projet de loi en ce moment ? C'est qu'il juge qu'agiter le thème identitaire permettra de reconstruire sa base électorale. Il a connu un recul dans les intentions de vote au bénéfice du Parti québécois depuis des mois maintenant. Les sondages rappellent que la confiance de la population à son égard s'étiole. Et cela s'explique aisément. Des secteurs importants de la population souffrent de la crise du logement. Le gouvernement Legault s'est montré incapable de répondre aux attentes de la population en matière de santé et d'éducation. Plus, il multiplie les coupures dans les services publics. L'échec de Northvolt et son refus d'agir sérieusement sur le terrain de la lutte aux changements climatiques contribuent également à le discréditer. Sans ajouter que les coupures en matière de francisation démontrent une incohérence avec ses prétentions à vouloir défendre la langue française. La démagogie contre les immigrant-es, tenu-es responsables de tous les maux de la société québécoise, est une excuse facile pour cacher son désastreux bilan. La PL84 s'inscrit dans une politique de diversion.
4. Jeter les bases d'une véritable inclusion de toutes les composantes de la société québécoise
Une véritable politique d'inclusion des personnes migrantes et d'intégration à la société québécoise passera par une politique d'égalité sociale et d'extension des droits économiques, sociaux et politiques. Elle exigera : a) le rejet d'une vision ethniquement homogène de la société québécoise et le rejet du projet nationaliste d'homogénéisation culturelle ; b) une politique s'attaquant aux discriminations et le refus de l'existence de secteurs de la société privés de droits ; c) la liberté de circulation et d'installation de tous les migrant-es ; d) l'éradication du racisme systémique qui touche tant les nations autochtones que les autres secteurs racisés de la population ; e) le rejet des discours qui font des minorités les seules porteuses de l'inégalité des femmes dans la société ; f) par une politique linguistique qui refuse de faire des personnes immigrantes la cause du manque d'attractivité de la langue française ; et enfin, par g) le rejet d'une laïcité identitaire qui essentialise la réalité de la nation.
Il faut éviter de diviser le Québec entre un « nous » défini sur une base généalogique et culturelle et un « eux » qui en serait exclu. Partir sur cette base, c'est créer les conditions de l'approfondissement des divisions ethniques au sein de la société québécoise. La société québécoise doit se définir non pas comme un « nous » dont la substance se construit autour de certaines valeurs partagées. Elle se construit par l'apport de tous et de toutes dans un processus reflétant le nouveau contexte dans lequel toutes les personnes de la société sont appelées à vivre.
Toutes les personnes vivant au Québec, toutes celles qui y œuvrent et qui participent à la création de la richesse commune (et pas seulement économique) font partie de la société et contribuent à son destin national. Pour assurer une véritable inclusion des personnes migrantes, on ne peut accepter que des personnes se trouvant sur un même territoire et dans un même ordre juridique soient traitées différemment ou discriminées. Le principe d'égalité des droits implique donc la libre circulation, mais aussi une série d'autres droits, dont notamment : le droit de s'installer durablement, le droit au travail, le droit de recevoir un salaire égal, le droit d'acquérir la nationalité, le droit de vivre en famille, le droit de vote, le droit à la sécurité sociale, le droit d'avoir accès aux différents services publics, etc. La lutte pour l'égalité des droits doit être la tâche de tous les mouvements sociaux qui visent l'égalité sociale et la fin des discriminations (mouvement syndical, mouvement des femmes, des jeunes, mouvement populaire, mouvement antiraciste, …) Le combat contre les discriminations et l'égalité des conditions et des droits sont à la base de la convergence des différentes composantes de la majorité populaire.
Voilà quelques pistes, qu'il faudra approfondir. Mais elles marquent une rupture radicale avec le nationalisme étroit et d'exclusion que promeut le gouvernement de la CAQ et son projet de loi sur l'Intégration nationale.
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