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De nouveaux comités de travailleurs syriens lancent des protestations coordonnées contre les licenciements massifs d’employés du gouvernement

Le Réseau syndical international de solidarité et de luttes soutient les comités indépendants formés en Syrie
Des comités indépendants de travailleurs nouvellement formés en Syrie ont organisé des manifestations et des veillées dans tout le pays pour protester contre la décision du gouvernement intérimaire de licencier des milliers d'employés du secteur public, et en réponse à la flambée du coût de la vie qui plonge des millions de Syriens dans la pauvreté.
Des rassemblements ont eu lieu le 15 février à Damas, Alep, Soueïda, Lattaquié et Homs. Les manifestations font suite à une initiative lancée par l'Association des travailleurs pour le changement démocratique (WADC) appelant à la formation de comités démocratiques pacifiques de coordination du travail en réponse à l'aggravation de la crise économique, à l'érosion des droits des travailleurs et à l'impact dévastateur des politiques néolibérales sur la classe ouvrière. Le WADC appelle à la mobilisation massive des travailleurs, à l'auto-organisation démocratique et à une action unifiée pour résister aux licenciements, à la privatisation et à l'injustice économique.
Déclaration de l'Association des travailleurs pour le changement démocratique
L'Association des travailleurs pour le changement démocratique annonce la formation de comités de coordination syndicale indépendants, pacifiques et démocratiques dans toutes les provinces. Ces comités visent à unifier le mouvement syndical en cours et à venir, chaque province établissant son propre organe de coordination pour organiser des activités localement. Chaque comité comprendra des représentants de différents secteurs syndicaux du secteur public afin de s'assurer que les manifestations et les sit-in se déroulent collectivement à un moment et à un endroit unifiés dans toutes les provinces. Cet effort vise à consolider nos revendications légitimes, qui découlent des graves dommages infligés à nos emplois, à nos moyens de subsistance et à l'avenir de nos enfants en raison de décisions hâtives et injustes qui ne tiennent pas compte des intérêts du secteur public, de ses institutions, de son économie et de ses ressources humaines.
Nous sommes fiers du fait que, en tant que classe ouvrière, nous avons toujours été et continuons d'être la représentation la plus fidèle de l'unité nationale et de la souveraineté pour atteindre les objectifs suivants :
* Annuler toutes les décisions rendues par le gouvernement intérimaire concernant les licenciements, les licenciements, les suspensions, les résiliations de contrats, les congés forcés sans solde ou toute autre mesure injuste sous quelque prétexte que ce soit.
* Nous exigeons la formation de comités gouvernementaux spécialisés comprenant des représentants syndicaux pour examiner tous les dossiers d'emploi, identifier les cas de corruption et d'emplois fantômes, et renvoyer les violations devant la justice pour qu'elle rende des comptes équitablement.
* Accorder des contrats à durée indéterminée aux travailleurs annuels et saisonniers que l'ancien régime refusait de régulariser dans le cadre de son évasion de responsabilité.
* Restructurer le personnel et les ressources humaines pour s'assurer que les travailleurs ne sont pas licenciés arbitrairement tout en investissant dans les compétences et la formation continue pour améliorer l'efficacité.
* Augmenter les salaires de manière équitable pour s'aligner sur la norme minimale d'un moyen de subsistance digne.
* Veiller à ce que les retraités soient inclus dans toute augmentation de salaire et ne soient en aucun cas exclus.
* Inverser les politiques de privatisation et s'appuyer sur les capacités nationales pour relancer et réformer le secteur public en tant que pilier de l'économie nationale et de la sécurité sociale.
* Rouvrir toutes les entreprises du secteur public, en particulier les entreprises productives, et créer de nouvelles opportunités d'emploi dans divers secteurs tout en réintégrant les chômeurs.
* Les syndicats ouvriers appartiennent aux travailleurs, et eux seuls ont le droit de déterminer leur sort. Nous exigeons de nouvelles élections libres de toute ingérence ou contrôle extérieur.
Qui sommes-nous ?
Nous sommes un groupe de travailleurs des secteurs public et privé, ainsi que des militants syndicaux de diverses provinces syriennes. Depuis 2012, nous avons mis de l'avant notre programme de changement démocratique et nous nous sommes battus pour celui-ci malgré les sévères restrictions politiques et sécuritaires imposées par l'ancien régime. Nous avons défendu avec détermination les droits et les intérêts des travailleurs malgré toutes les tentatives de nous mettre à l'écart et de nous intimider.
Nos efforts ont gagné la confiance d'une grande partie des travailleurs des deux secteurs.
Structure organisationnelle des comités de coordination
Le comité général de coordination est basé à Damas et comprend les chefs des comités provinciaux de coordination. Chaque comité provincial comprend des représentants de la coordination des groupes syndicaux.
Par exemple :
Coordination Damas et Damas rurale : Formée à partir de l'ensemble des délégués des groupes syndicaux (électricité – santé – médias – banques – industries textiles, etc.) Coordination Homs – Coordination Daraa – Coordination Sweida – Coordination Hama – Coordination Quneitra – Coordination Alep -Coordination Tartous – Coordination Lattaquié, etc.
La structure finale de ces comités syndicaux sera annoncée une fois que tous les groupes syndicaux auront été constitués. Nous appelons tous les travailleurs à organiser leurs groupes, à choisir leurs représentants collectivement et à veiller à ce que les délégués soient qualifiés, dignes de confiance et connus pour leur intégrité, leur altruisme et leur forte conscience nationale et de classe.
Pour l'instant, la communication avec nous se limitera à Facebook Messenger via notre page (Democratic Workers' Change).
À partir du samedi 15 février 2025, nous lancerons des sit-in hebdomadaires organisés tous les samedis de 10h à 14h devant les bâtiments syndicaux de toutes les provinces. Cette mobilisation continue sera notre principale voie vers l'atteinte du plus haut niveau d'organisation et du plus grand mouvement de masse pacifique capable d'exercer son poids et de garantir ses droits légitimes. Notre objectif ultime est de devenir un partenaire actif dans la construction de la nouvelle Syrie à laquelle nous aspirons tous.
Slogans :
Le slogan principal : « Persistance, persévérance, jusqu'à ce que la décision soit renversée »
« Un, un, le peuple syrien est un »
« Un, un, les travailleurs syriens sont un »
« Les travailleurs syriens sont unis »
« Nous sommes des travailleurs de l'État, pas des travailleurs du régime »
« Un gouvernement intérimaire, pas des licenciements de travailleurs »
« Non aux licenciements arbitraires »
« Nous sommes avec la loi et contre la corruption »
« Les moyens de subsistance sont une ligne rouge »
« Nous ne sommes pas des fantômes »
« Nous sommes tous Syriens, et nous reconstruirons notre pays avec amour »
« Les retraités ont donné leur vie à ce pays – nous devons préserver leur dignité »
« Oui à la responsabilisation des fonctionnaires corrompus »
« Notre détermination est forte, nous voulons travailler »
« Oui à l'amélioration de l'efficacité au travail »
« Nous avons besoin d'une augmentation de salaire qui nous soutienne »
« Vous voulez une économie forte ? Vous pouvez compter sur nous »
« Désolé messieurs… Nos usines ne sont pas à vendre »
« Non à la privatisation, nous pouvons faire fonctionner et améliorer nos industries »
« Nos emplois sont notre dignité et le gagne-pain de nos enfants »
« Nous sommes fatigués de l'injustice et de la privation »
« Notre mouvement est national… Notre mouvement est pacifique… Nous changerons tout injuste »
« Nous exigeons la justice sociale »
« Nous ne voulons pas de mots, nous voulons des actions »
« Nous ne resterons pas à la maison, nous construirons une nouvelle nation »
Comité général de coordination pour le changement démocratique des travailleurs
MENA Solidarity Network
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Trump : Réagissons avant qu’il ne soit trop tard

*Unis mais désespérément seuls ! Unis dans leurs hécatombes, leurs bains de sang et leur solitude. Et unis aussi dans la même résistance acharnée pour la vie, la liberté et leur autodétermination nationale. Peuples palestinien et ukrainien martyrisés et unis…contre les mêmes bourreaux unis.
D'ailleurs, n'était-il pas l'un d'eux, qui nous avertissait, déjà le 28 décembre 2023, que « Les objectifs déclarés d'Israël dans son opération en cours contre les militants du Hamas à Gaza semblent presque identiques à ceux de Moscou dans sa campagne contre le gouvernement ukrainien” ? (1)*
Cette phrase d'il y a un an, aurait dû nous préparer pour affronter les malheurs actuels. D'autant plus que celui qui l'avait prononcé n'est pas n'importe qui. C'est *Serguei Lavrov*, bras droit et éternel ministre des Affaires étrangères de M. Poutine. Un M. Lavrov qui s'était même empressé de préciser que les objectifs de Netanyahou à Gaza « *semblent similaires à la "démilitarisation" et à la "dénazification", que Moscou poursuit en Ukraine depuis le lancement de son offensive en février 2022 » ! *En somme, mêmes génocides et mêmes génocidaires…
Malheureusement, personne n'a prêté la moindre attention à ces affirmations de M. Lavrov, bien qu'il les a faites au cours d'un grand interview accordé aux très officielles agences Tass et Novosty et bien que cet interviewfigurait longtemps en toute première page du site du ministère russe des Affaires Étrangères ! Comme on pouvait s'en attendre, le silence assourdissant qui les a toujours entourées était dû au fait que ceux qui soutiennent les crimes de M. Netanyahou à Gaza n'aiment pas être associés aux crimes de M. Poutine en Ukraine, et ceux qui soutiennent les crimes de M. Poutine en Ukraine n'aiment pas être associés aux crimes de M. Netanyahou à Gaza. En d'autres termes, une alliance pas tellement contre nature entre tous ceux qui avaient intérêt à passer sous silence des vérités qui ne pouvaient que mettre à nu leur hypocrisie…
Mais, force est d'admettre que quand nous écrivions qu'en affirmant *« que la Russie ne fait rien de plus en Ukraine qu'Israël à Gaza* », M. Lavrov *« s'adressait d'abord a l'establishment américain… essayant de lui faire comprendre que la Russie n'est pas un adversaire mais plutôt un ami, les deux ayant des intérêts communs »,* nous ne pouvions pas imaginer qu'un président des Etats-Unis traduirait en actes ces paroles de M. Lavrov seulement un an plus tard ! Et pourtant c'est exactement ce qu'est en train de faire actuellement M. Trump quand il soutient -avec un zèle qui fait froid dans le dos les guerres génocidaires contre les peuples ukrainien et palestinien des criminels qui s'appellent Netanyahou et Poutine…
Toutefois, l'actualité brûlante n'éclaire pas rétroactivement seulement ces déclarations tonitruantes de M. Lavrov. Elle éclaire aussi plusieurs autres dues à M.Poutine lui-même. Comme par exemple celle, ahurissante et « incompréhensible » quand il l'a faite en février 2024, que c'était la Pologne qui avait… contraint l'Allemagne de Hitler à l'attaquer, déclenchant ainsi la Seconde Guerre mondiale ! A première vue bizarre et « incompréhensible », cette affirmation de M. Poutine devient compréhensible quand on la lit dans son entièreté à la lumière de la plus brulante actualité des derniers jours : « *les Polonais n'avaient pas cédé le corridor de Dantzig à l'Allemagne, et ils sont allés trop loin, poussant Hitler à déclencher la Deuxième Guerre mondiale en les attaquant. Pourquoi est-ce contre la Pologne que la guerre a commencé, le 1er septembre 1939 ? La Pologne s'est révélée intransigeante, et Hitler n'a eu d'autre choix que de commencer à mettre en œuvre ses plans avec la Pologne » ! (2)*
En réalité, ce que M. Poutine voulait nous dire en réécrivant ainsi l'histoire de la Seconde guerre mondiale, c'est que l'Ukraine actuelle envahie par l'armée de M. Poutine ressemble comme deux gouttes d'eau à la Pologne de 1938 envahie par la Wehrmacht de M. Hitler. Et que ces deux pays sont responsables des agressions militaires qu'ils ont subies, car ils les ont provoquées en refusant de céder devant les prétentions territoriales et autres de leurs envahisseurs ! Alors, ce n'est pas un hasard que le maître du Kremlin a prononcé ces monstrueuses énormités au cours du grand interview qu'il a accordé à Tucker Carlson, étoile de la chaîne Fox news, très proche de M. Trump et donc, tout indiqué pour faire connaître ces affirmations de M. Poutine aux milieux d'extrême droite américains lesquels d'ailleurs… les partagent.
De nouveau, force est de constater que ce positionnement cynique de M. Poutine en faveur du droit du plus fort, a fait mouche auprès de l'extrême droite américaine. La preuve en est qu'une fois réinstallé à la Maison Blanche, M. Trump s'est empressé non seulement de reprendre tous les « arguments » du président russe en faveur de son invasion de l'Ukraine, mais aussi de profiter de la situation pour… participer activement au pillage et à la destruction de l'Ukraine aux côtés de son complice russe !
Alors, quelle est la nature de cette association de Trump avec Poutine ? S'agit-il d'une alliance occasionnelle ou bien d'affinités électives beaucoup plus solides ? De nouveau, c'est Poutine qui a donné le premier un début de réponse quand il s'est adressé longuement à ses compatriotes le jour de l'invasion de l'Ukraine par son armée. Et bien que systématiquement « oubliés » par ses amis et ennemis de droite comme de gauche, ses diatribes anticommunistes de ce jour fatidique ainsi que ses violentes attaques contre la Révolution d'Octobre 1917, les Bolcheviks et surtout, contre Lénine en personne,(3) éclairent au-delà de tout doute, tant ses références politiques et idéologiques que la nature de son alliance avec Trump.
En somme, *ce qui unit actuellement Poutine à Trump c'est la communauté de leurs références idéologiques, tout ce qui les rend réactionnaires, obscurantistes, ennemis jurés des faibles, des pauvres, des minorités, des socialistes, des féministes, des écologistes, des travailleurs, des syndicats ouvriers. C'est leur adoration de la violence brute, du virilisme et de l'autoritarisme le plus exacerbé, des milliardaires, des oligarques et des dictateurs, c'est leur haine viscérale de la démocratie.*
Alors, pas de doute, Trump, Poutine, Netanyahou, Musk, Milei et leurs amis de par le monde, ne représentent pas une version simplement plus dure du néolibéralisme, comme continuent de le prétendre certains irresponsables. Ils représentent un danger mortel pour nous tous, pour l'humanité, pour la démocratie et la planète. Un danger analogue à celui que représentait le fascisme et le nazisme il y a 80 ans. Ils représentent l'Internationale Brune de notre temps. Réagissons donc tous ensemble avant qu'il ne soit trop tard. Car cette fois il n'y aura pas de seconde chance…
*Notes*
*1. **Sergueï Lavrov : "Israël poursuit des objectifs similaires à
ceux de la Russie » ! :*
https://www.pressegauche.org/Serguei-Lavrov-ministre-russe-des-affaires-etrangeres-Israel-poursuit-des
*2. **Pourquoi les partisans de Poutine le censurent
systématiquement ? :* https://inprecor.fr/node/3896
*3. **Poutine : « Lénine est l'auteur de l'Ukraine d'aujourd'hui » ou
comment tout ça est la faute à … Lénine et aux bolcheviks : *tps ://
lanticapitaliste.org/opinions/international/poutine-lenine-est-lauteur-de-lukraine-daujourdhui-ou-comment-tout-ca-est-la
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La mauvaise protection des travailleurs et des travailleuses fait obstacle à l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne

Si l'Ukraine veut espérer adhérer à l'Union européenne, les droits du travail doivent être une priorité beaucoup plus importante. C'est également nécessaire pour renforcer la résilience de la société.
Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/02/15/la-mauvaise-protection-des-travailleurs-et-des-travailleuses-fait-obstacle-a-ladhesion-de-lukraine-a-lunion-europeenne-communique-de-sotsialnyi-rukh/
Le rapport d'étape 2024 de la Commission européenne sur l'adhésion de l'Ukraine à l'UE a fait l'effet d'une douche froide pour le gouvernement ukrainien. Parmi les nombreuses exigences auxquelles l'Ukraine doit répondre, le domaine du marché social et du travail ressort comme critique par rapport aux conditions d'adhésion à l'UE.
L'Ukraine obtient même la plus mauvaise note dans ce domaine parmi les dix pays candidats, juste derrière le Kosovo. Ce mauvais classement révèle également les années de négligence systématique dans le pays, antérieures à l'invasion russe et liées au démantèlement de la réglementation. Mais aussi à la marginalisation des syndicats par les gouvernements successifs.
En conséquence, la détérioration des conditions de vie des travailleurs et des travailleuses ukrainiennes est aujourd'hui devenue un obstacle direct aux perspectives d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne.
Le dialogue social : un idéal oublié
Au sein de l'Union européenne, le « dialogue social » – ou les négociations entre les partenaires sociaux – est désormais une institution bien établie et une image de la façon dont les désaccords peuvent être résolus par la démocratie, la négociation et la reconnaissance mutuelle entre les employeurs, les syndicats et les gouvernements.
En Ukraine, le principe du dialogue social a été marginalisé. Le Conseil social et économique tripartite national officiel (NTSEC) – qui était censé être le moteur des réformes coopératives du marché du travail – est inactif depuis 2021. Sans plateforme de dialogue social fonctionnelle, les syndicats sont amenés à réagir de manière défensive aux initiatives gouvernementales au lieu de façonner de manière proactive l'élaboration des politiques.
Au niveau local, l'ébranlement de la pratique des négociations antérieures est encore plus évident. Invoquant l'état d'urgence militaire qui a suivi l'invasion, les employeurs ont été autorisés à suspendre unilatéralement les conventions collectives. De grandes entreprises comme les chemins de fer nationaux ou le plus grand producteur d'acier du pays, ArcelorMittal, n'ont pas tardé à tirer parti de cette situation.
La nouvelle législation viole des normes européennes essentielles contenues dans la Charte sociale européenne, qui garantit le droit à la négociation collective et à des salaires équitables.
L'affaiblissement du mouvement syndical est important dans la conjoncture. Le nombre de membres a chuté, avec une perte estimée à 700 000 membres depuis 2022. Ce déclin reflète la destruction des emplois, les effets de la guerre et l'affaiblissement de la capacité des syndicats à défendre les droits des travailleurs et des travailleuses.
Sécurité au travail : qui protège les travailleurs et les travailleuses ?
La guerre elle-même a porté un coup majeur à la sécurité des travailleurs et des travailleuses, mais cela ne change rien au fait que la protection du travail dans le pays était déjà insuffisante. Le système en vigueur se concentre étroitement sur les mesures réactives, alors que dans l'Union européenne, par exemple, la prévention joue un rôle beaucoup plus important.
Le projet de nouvelle loi sur la sécurité au travail du gouvernement ukrainien (projet de loi n°10147) a été vivement critiqué pour son approche néolibérale. Il accorde aux employeurs beaucoup plus d'autonomie et de liberté, tout en supprimant des garanties pour les travailleurs, et les travailleuses, notamment en réduisant le financement des mesures de sécurité et de protection lors des travaux dangereux.
Malgré une certaine inspiration des directives européennes, le projet de loi ne respecte pas les normes minimales – notamment en ce qui concerne le travail intérimaire et l'accès aux données de sécurité à des fins de prévention.
Avec plus de 200 décès liés au travail dans l'industrie en 2023 – dont la moitié directement liée à la guerre – la nécessité d'une réforme globale est urgente. Pourtant, les propositions actuelles risquent d'affaiblir encore davantage la protection. Par rapport à la législation actuelle, elles laissent encore plus de questions à la discrétion de l'employeur. Il s'agit notamment de la contribution minimale à la santé et à la sécurité au travail, ainsi que de la fréquence à laquelle les employé·es doivent être informé·es sur les questions de santé et de sécurité sur le lieu de travail.
Une inspection du travail en crise
La Commission européenne a identifié l'inefficacité de l'inspection du travail ukrainienne comme une lacune majeure. L'absence d'un cadre juridique clair empêche les inspecteurs et les inspectrices d'appliquer efficacement la législation du travail. La situation s'est aggravée sous l'état d'urgence, les inspections ayant été suspendues et le contrôle encore affaibli.
Suite aux pressions exercées par l'UE, certaines propositions ont été faites pour renforcer l'inspection du travail, mais encore de façon limitée. Tant que l'Ukraine ne suivra pas l'exemple d'autres pays candidats qui ont adopté des lois dédiées à l'inspection du travail, son système restera inadapté.
L'absence de mesures dissuasives contre les violations liées au travail signifie que les employeurs qui exploitent la loi continueront à le faire sans entrave. Cela compromet à la fois les droits du travail et les ambitions européennes de l'Ukraine.
Des réformes au profit des travailleurs, et des travailleurs, pas seulement de Bruxelles.
Remédier à ce type de faiblesses systémiques est loin d'être une simple formalité pour l'adhésion à l'UE. C'est une nécessité pour la stabilité et la résilience de l'Ukraine. Garantir une application rigoureuse du droit du travail, renforcer le dialogue social et améliorer l'environnement de travail sont des réformes qui profitent à l'ensemble de la société.
Les syndicats ukrainiens doivent profiter de cette occasion pour travailler avec des partenaires internationaux et affirmer leur rôle dans l'élaboration de l'avenir du marché du travail du pays. La guerre a montré que la solidarité et la justice ne sont pas seulement des idéaux à atteindre mais des outils concrets et essentiels à la survie nationale.
Le respect des droits du travail et des réformes solides renforceront non seulement les perspectives d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne mais aussi sa cohésion sociale face à la poursuite de l'agression russe.
En donnant la priorité au bien-être de l'ensemble de la main-d'œuvre, l'Ukraine peut jeter les bases d'une véritable intégration européenne et montrer que les valeurs démocratiques, les droits des travailleurs et des travailleuses sont au cœur de sa future trajectoire .
Vitaly Dudin
Tribune de Vitaly Dudin, cofondateur de Sotsialnyi Rukh, pour Solidaritet, journal socialiste danois à l'occasion d'une rencontre avec l'Alliance Rouge-Vert danoise. Le syndicat ukrainien des infirmières « Sois comme Nina », invité par son homologue danois participe à cette rencontre.
https://solidaritet.dk/ringe-arbejderbeskyttelse-staar-i-vejen-for-ukrainsk-eu-medlemskab/
Traduction Deepl Pro relue ML
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Au travail dès deux ans, les capitalistes à la fête !

De Black Friday en Black Novembre, d'Halloween à Noël, les offres exceptionnelles de discount,à durée très limitée, explosent les yeux et les oreilles pour que nous concédions au culte des cadeaux.
Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/02/24/au-travail-des-deux-ans-les-capitalistes-a-la-fete/
Avec l'aimable autorisation des Editions Syllepse
Pour faire ses courses, le temps est incommensurable ! Trouver des idées de cadeaux neufs ou dorénavant recyclés, en fonction de l'état des porte-monnaies et des valeurs écologiques (345 euros en moyenne e 2023, selon Le Sofinscope-baromètre OpinionWay pour Sofinco), aspire une énergie démesurée jusqu'à la trêve des confiseurs, entre Noël et jour de l'An1 ! L'illusion peut ainsi exister qu'en suspendant l'activité de travail, pour une majorité de la population, cette trêve prolongerait laïquement les « trewa dei », trêve de Dieu par laquelle, au Moyen-Âge, « l'Église limitait les guerres privées en interdisant toute hostilité entre seigneurs du mercredi soir au lundi matin et à certaines époques de l'année (Avent, Noël, Carême, Pâques)2 ». Elle serait le symbole d'un temps arraché aux capitalistes, un temps libre pour échapper à l'emprise permanente du travail subordonné !
Trêve d'illusions, ce temps des fêtes est surtout un temps contraint où s'offrent les cadeaux, où l'on va aussi les échanger, dans un continuum commercial frénétique. L'idéologie capitaliste l'entretient par un flot publicitaire hypnotisant qui dépasse de près d'un tiers son volume du reste de l'année. Les enfants perçoivent précocement tout le paradoxe de l'expression « trêve des confiseurs », car c'est précisément le moment où ils ont plus de chance qu'à d'autres d'accéder aux produits marchands qu'ils soient cadeaux ou sucreries. Moment pour leur offrir les joies de l'insouciance ou moment pour les intégrer brutalement dans le monde impitoyable du travail à perpétuité ?
En relation directe avec cette interrogation, on ne peut qu'être admiratif ou horrifié par un des jeux mis sur le marché de Noël en novembre 2023. Dès deux ans, la marque Infini Fun invite les parents à offrir à leurs enfants, pour moins de 40 euros et payable en trois fois, un kit de télétravail3. La publicité le présente en des termes qui invalident toute ambiguïté :
Comme papa et maman : je passe des appels avec mon téléphone, je participe à des vidéoconférences avec mon ordi et mon casque […], cinq modes de jeu sur l'ordinateur : télétravail (imitation), découverte et trois modes quiz sur les lettres, les chiffres et les couleurs. […] Le téléphone offre dix-huit zones tactiles qui déclenchent de nombreux effets sonores et musiques. Il me rappelle automatiquement […]. Le casque (factice) me donne l'air encore plus professionnel4.
Vive le travail et dès les fêtes ! Les parents sont dans l'ensemble ravis, leurs commentaires peuvent mêmes être élogieux. Reviennent le plus des formules comme « Super imitation », « Super ludique » qui disent l'essentiel d'une adhésion à socialiser les enfants aux idéaux de la logique compétence dès leur sortie du berceau5. Quelle progression car, après recherche, ce genre de dressage aux bons comportements, qui ont notamment pris leur essor durant le confinement imposé lors de la pandémie du Covid 19, s'adressaient plutôt aux enfants sachant déjà lire et écrire. À l'époque le site MoneyVox proposait plusieurs supports ludiques et pédagogiques afin « d'apprendre aux enfants à gérer leur argent de poche et initier vos adolescents à l'économie et la finance ». Il recommandait par exemple pour les petits de 6 à 10 ans une application sur mobile et tablette, de l'association Crésus qui vient en aide aux personnes en difficulté, dont l'objectif principal est de « montrer à l'enfant que l'argent n'est pas illimité, qu'il se gagne et se dépense ». Le but du jeu est d'organiser avec un budget limité la plus belle fête d'anniversaire « du choix du lieu en passant par la préparation du gâteau ». Pour y parvenir, l'enfant doit mobiliser « des compétences de lecture, de calcul mental simple, de stratégie et de planification ». En prime, le jeu sensibilise « à l'alimentation saine, à l'entraide, à la solidarité ». Quel beau programme !
C'est une société qui se croit civilisée car elle peut afficher des lois qui, littéralement, laissent à penser qu'à travers un long processus, et sans plus de conflictualité, elle a établi un monde permettant la coexistence harmonieuse et humaniste d'un temps pour travailler et d'un temps libre pour le bien-être de toute sa population, des plus jeunes aux plus âgé·es. Pour s'en assurer, il suffit d'aller voir sur le site du gouvernement de la République et de lire, y compris entre les lignes pour les non-dits, ce qu'il présente, à partir de la loi du 22 mars 1841, sur l'interdiction du travail des enfants. Car au commencement, cette présentation le reconnaît, il y a eu un capitalisme, sans morale ni limites, exploitant dans le cadre d'un « nouvel esclavage6 » toutes les forces vives tout en les épuisant prématurément :
En France comme en Angleterre, vers 1840-1850, les enfants de moins de 14 ans représentent 15 à 20 % de la main-d'œuvre des manufactures et des usines. Le travail des enfants n'est pourtant pas en soi une nouveauté, il est usuel dans l'agriculture comme dans l'artisanat. Mais avec les nouvelles conditions de travail engendrées par l'industrie textile mécanisée, il s'apparente à un nouvel esclavage7.
Le travail détruit à petit feu et détruit tout court, à tel point que :
Médecins, hygiénistes, philanthropes, réformateurs sociaux et industriels progressistes soulignent les effets mortifères pour les enfants de journées de 14 heures passées sous les métiers textiles : déformations physiques, rachitisme, tuberculose… La mortalité est également élevée : à Mulhouse, entre 1812 et 1827, parallèlement à la croissance de l'industrie, la durée de vie moyenne diminue de quatre ans et la moitié des enfants n'atteignent pas l'âge de 10 ans8.
L'humanité a pourtant bien du mal à imposer un droit de vivre puisqu'il faudra, accessoirement, ce que le site gouvernemental oublie de mentionner, une révolution en 1840, et les Communes des années 1870, pour voir promulguer les lois de 1841 et de 1874 qui interdisent respectivement l'embauche avant 8 ans, puis avant 12 ans. Malgré cet effacement de la mobilisation des esclaves concerné·es, histoire de ne pas dire que l'action ouvrière et syndicale n'a servi à rien, la note expose a contrario crûment le peu d'impact de la législation concernant la mise au travail car : « Rareté des inspections, amendes insuffisantes, puissance des intérêts économiques en jeu, accord tacite des parents les plus pauvres9. »
Au final, à l'horizon de la Première Guerre mondiale, la réduction de ce fléau du travail des enfants sera peu résorbé dans l'industrie, et donc loin d'être effective ailleurs, que par « les progrès techniques et la nécessité de former les ouvriers, couplés aux nouvelles lois scolaires10 ».
On retrouve ici le recours à une logique déterministe du progrès technique, comme seule autorité acceptable pour juguler un esprit du capitalisme totalement insensible à l'irrationalité protectrice de droits humains universels.
En conséquence, si la mise au travail des enfants a reculé, si le temps de scolarisation s'est allongé, si l'idée d'un temps libre légal s'est glissée dans les représentations liées à la vie de l'enfance à la retraite, c'est fondamentalement parce que les configurations productives dans lesquelles sont incorporées en permanence des innovations technologiques modèlent des formes de division sociale du travail qui s'en accommodent.
Dès lors, si certains ont cru à un cheminement de l'histoire permettant d'établir, plus ou moins avec des luttes, une réduction régulière du temps de travail et une augmentation tout autant régulière du temps libre et choisi, peut-être ont-ils omis cette capacité de l'univers capitalistique et des penseurs à son service, à transformer des représentations mythiques et à bouleverser les croyances sur le sens des progrès acquis ?
Si l'on observe ce qui se passe aux États-Unis, quelques signes corroborent le bien-fondé d'une telle interrogation. Dans un article paru en juillet 2023, Steve Fraser analyse le retour en force du travail des enfants soutenu par la révision de législations protectrices :
Au cours des deux dernières années, quatorze États ont présenté ou adopté des lois annulant les réglementations qui régissaient le temps de travail des enfants, réduisant les restrictions sur les travaux dangereux et légalisant les salaires minimums pour les jeunes à partir de 14 ans. Prenez une grande respiration et réfléchissez à ce point : le nombre d'enfants au travail aux États-Unis a augmenté de 37% entre 2015 et 202211.
Sommes-nous très loin de suivre la même voie ? Le site officiel de l'administration française invite plutôt à le penser, ne serait-ce que lorsqu'il énonce les possibilités offertes légalement pour qu'un enfant ou un adolescent puisse travailler avant 14 ans « dans les entreprises de spectacle, de cinéma, de radiophonie, de télévision ou d'enregistrements sonores, du mannequinat ou encore dans une entreprise ou une association ayant pour objet la participation à des compétitions de jeux vidéo12 ». La dernière catégorie d'activités ajoutée en 2020 devrait mettre particulièrement « la puce à l'oreille », elle a d'ailleurs depuis été étendue aux enfants « youtubeurs » ! Elle signale que depuis l'incorporation des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) dans les process de production, depuis les années 1990 et surtout depuis la diffusion massive des smartphones et des tablettes dans les années 2010, les vieilles catégories de représentations de l'exploitation du travail des enfants, notamment celles du travail industriel mutent vers d'autres lieux.
Nos catégories de penser et d'agir pour leur protection sont-elles encore pertinentes et que nous disent-elles aussi plus généralement sur les mutations profondes de l'exploitation du travail ? Ne voit-on pas les capacités enfantines, dès le plus jeune âge à se saisir des objets connectés et à converser avec les logiciels ? Pourquoi, dès lors, ne pas repenser la totalité des temps de la vie, raccourcir l'enfance comme le temps de retraite, et puisqu'ils passent par l'usage des mêmes objets connectés et que leurs pratiques s'entremêlent, arrêter de distinguer, pour toutes et tous, temps de travail et temps libre ? L'intransigeance du gouvernement sur l'augmentation de l'âge légal du départ à la retraite n'est-elle pas directement liée à cette représentation ?
Indéniablement, cet air du temps souffle au quotidien une petite musique qui porte des messages ayant vocation à orienter et à contraindre nos pensées et nos actes. Il s'insinue, via de multiples supports construits pour encadrer notre conscience du monde. Certains d'entre eux passent par des supports que nous choisissons comme la radio, la télévision, les journaux ou encore les réseaux numériques. D'autres sont plutôt imposés au travail, dans les transports jusque dans la rue où la publicité s'invite pour nous influencer. L'imbrication des deux se fait désormais via les mises en scènes et l'hypervalorisation de la parole des expert·es et des influenceur·euses qui vendent des « one best way » pour penser le monde, y vivre, voire y mourir. Faiseurs d'opinions, ils tentent d'imposer de bons comportements, n'induisent nulle mise en débat collectif mais appellent tout au contraire au mieux à commenter, au pire à déclarer qu'on les aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie !
Le phénomène n'est pas vraiment récent, Paul Lazarsfeld, sociologue américain, montrait dès 1940 comment les « leaders d'opinion » influencent les représentations politiques. Injonctions à croire, prêts à penser, produits à acheter, comportements à adopter, tenues à afficher, loisirs à ne pas manquer, lieux touristiques à voir absolument, cette liste non exhaustive se renouvelle quotidiennement faite d'imprécations culpabilisantes qui nous interpellent et segmentent nos réponses de la tête aux pieds. Le niveau de pollution atteint et l'emprise avilissante produite sur la capacité humaine à produire une pensée d'ensemble sont aussi insidieux que la diffusion des particules fines dans l'air respiré. Se rendre compte de cette aliénation béate et mortifère dans laquelle une culture mosaïque13 fait glisser l'humanité, se mettre en état de résister à toutes les pauvres féeries marchandes, se mettre en situation a contrario de produire, modestement mais avec ambition, une pensée démocratique, écologique et sociale, cela demande que chacun·e dispose, pour résister, d'un important temps libre de non-travail, arme incontournable mais qui fait cruellement défaut quand on examine avec précision ce qu'il en est au-delà des images d'Épinal.
Loin des discours idéologiques sur la fin du travail ou sur la société du temps libre et choisi, la thèse de ce livre et son ambition sont donc de rendre compte du processus en cours d'asservissement de la vie quotidienne et du temps libre aux rapports de production, de distribution et de consommation que cherche à imposer, au 21e siècle, la logique de mise en valeur du capital. Ce processus progresse, en France, sous l'étendard de la « Refondation sociale » soulevé par le CNPF-Medef dès le tournant du siècle. Depuis, il ne cesse de se légitimer, avec l'appui inconditionnel des forces et institutions d'État toutes mobilisées pour en asseoir l'hégémonie.
L'envahissement de nos vies par la logique d'une mise au travail forcé, aux seules conditions du Capital, s'est peu à peu instillé à travers la production de mythes et la propagation de croyances qui ont été patiemment inventées, puis médiatisées, afin de contraindre nos consciences et nos imaginations. Malgré luttes et résistances, elles se sont progressivement imposées comme autant d'avatars visant à édulcorer, afin de la faire accepter, la violence des rapports sociaux subordonnés.
Des mythes pour contraindre imaginations et consciences et faire consentir à l'esclavage moderne
Mythe de la compétence productrice d'une valorisation rationnelle du travail et de l'obtention d'un salaire décent ; mythe de la négociation, dite « entre partenaires sociaux », comme support à l'écriture des bases d'une société policée ; mythe d'un temps libre permettant d'en jouir ; mythe d'un habitat à soi assurant de vivre en toute intimité une vie sentimentale à l'abri des intrusions ; mythe d'un monde-village facile d'accès pour y passer des vacances.
Chacun de ces mythes, qui selon les moments, occupe plus ou moins le devant de la scène sociale et politique, participe à resserrer l'étau, en masquant l'exploitation et l'assujettissement de la force de travail dans les rapports sociaux de production, de distribution et de consommation. L'objectif commun de la propagation de ces mythes consiste à vendre le mirage d'un capitalisme émancipateur et pourvoyeur de bien-être. Le seul régime de production capable, comme l'ont écrit en 2000 les idéologues patronaux de la « Refondation sociale », d'être le gouvernement, non démocratique, d'une société moderne. La seule à leur convenance !
Ces mythes, dont certains trouvent leurs origines dans les trente dernières années du 20e siècle, contribuent à entretenir, en masquant les rugosités désastreuses de la réalité quotidienne de millions de travailleur·euses pauvres et de pauvres tout court, la réussite miraculeuse du capitalisme comme seul régime heureux de production, de distribution et de consommation.
En combinant prodigieusement les progrès de la science et de la technique, les beautés d'une éducation comportementale épanouie et les plaisirs de l'engagement humain dans le travail en mission, devenu le quasi seul vecteur admis, comme dans une religion, de la construction d'une identité socialement acceptable et légitime, ses laudateurs, grassement payés pour ce faire, ressassent comme des prédicateurs que l'ensemble de la population, si elle accepte de se discipliner, pourra en récolter les offrandes et en propager le ruissellement.
Côté scène, l'étalement de chiffres et une propagande médiatique à flux continu ne cessent d'en affirmer les bienfaits souriants, alors que côté cour, les exploiteurs du travail, sous toutes les formes possibles d'atomisation, font exploser sans vergogne, l'une après l'autre, les quelques représentations et droits restants : protection de la mise au travail (précarité contractuelle, ubérisation et travail gratuit, pauvreté), surveillance du temps de travail et du temps de repos (horaires flexibles, repos atomisés, retraite repoussée), séparation entre vie professionnelle et vie privée (télétravail, travail chez soi, travail anywhere).
Dans cette longue marche mortifère, la grande force du capitalisme et de ses servants, avec la complicité des institutions d'État, est de conserver un cadre de justification et d'échanges en apparence policé. Les concepts d'emploi, de rémunération, de temps de travail et de temps libre, de retraite, d'équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle, voire de concertation et de négociation, continuent à s'entendre alors qu'ils sont de plus en plus obsolètes et creux au regard des mutations déjà pleinement accomplies des formes d'exploitation du travail. Ils parviennent ainsi à circonvenir une pensée politique d'opposition et les revendications syndicales dans une seule logique de riposte corrective dans laquelle les logiques d'émancipation se dissolvent, voire tendent à s'éteindre, comme celle d'un droit fondamental, indispensable et inaliénable à l'oisiveté. Comme l'écrivait Bertrand Russel en conclusion de son remarquable essai :
Dans un monde où personne n'est contraint de travailler plus de quatre heures par jour […], les hommes et les femmes ordinaires, deviendront plus enclins à la bienveillance qu'à la persécution et à la suspicion. Le goût pour la guerre disparaîtra, en partie pour la raison susdite, mais aussi parce que celle-ci exigera de tous un travail long et acharné. La bonté est, de toutes les qualités morales, celle dont le monde a le plus besoin, or la bonté est le produit de l'aisance et de la sécurité, non d'une vie de galériens. Les méthodes de production modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l'aisance et la sécurité. Nous avons choisi, à la place, le surmenage pour les uns et la misère pour les autres : en cela, nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n'y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment
14.
Faute de déconstruire les concepts de l'esclavage moderne, il devient impossible de concevoir et de proposer, à ceux et celles qui ne vivent que de leur travail, une vision unifiante et alternative en imaginant des représentations et revendications pour sortir de ces cadres et formes d'exploitation idéologiques et matérielles.
À l'ère de l'automation, de l'informatisation, de la numérisation généralisée et mondialisée, alors même que la mise au travail forcé et le plus souvent gratuite, tend à s'étendre à l'ensemble de la vie quotidienne15, est-il encore sensé de batailler, dans les formes d'un dialogue social bien limité, en ne critiquant que la partie visible de l'exploitation capitalistique du travail humain ?
En effet, comme dans une liste à la Pérec ou à la Prévert, on peut schématiquement pointer quelques cruelles réalités de cette implacable « refondation ».
* Un emploi sous des formes mitées qui ne couvre et ne couvrira bientôt qu'une partie marginale du travail productif et social, tout autant que la menace du travail forcé ira en s'accroissant, voire la mutation engagée du RSA (Revenu de solidarité active).
* Une rémunération qui s'éloigne de l'illusion contractuelle, liant salaire direct et indirect (cotisations) à des objectifs constants et durables, qui encourage avant tout la productivité jusqu'à l'usure du salarié·e et/ou du faux indépendant, et encense la démultiplication des primes individualisées, tel un retour au plaisir bourgeois, et religieux, de donner selon son bon vouloir un « pourboire ».
* Un temps de travail qui ne borne plus à l'antique pointeuse, ni même aux badgeuses individualisées, mais qui se propage du matin au soir, bien au-delà des seul·es télétravailleur·euses dans leur domicile « googlisé ». Il s'immisce, pour toutes et tous, dans les transports et en tous lieux où la connexion est possible selon le slogan managérial miraculeux « Anytime, Anywhere, Any device16 ». Un temps de travail amplifié démesurément sans que personne ne le mesure encore quantitativement comme un temps assujetti à l'organisation du travail que maîtrisent seuls les employeurs,
* Une mise au travail gratuite, via les outils de numérisation (NTIC), qui s'est imposée et s'enracine de manière ludique avec l'apprentissage précoce des enfants puis des étudiant·es, bien avant toute forme d'emploi salarial. Elle s'étend, notamment au domicile mais plus généralement dans nos déplacements nomades, à toutes les catégories de populations, contredisant d'une part l'approche distinguant les concepts de travail productif et reproductif (femmes, enfants et retraités) et en rendant absurde la distinction réifiante d'équilibre entre vie personnelle et professionnelle.
On a donc une tendance générale à l'augmentation de l'activité sous des formes salariales, reconnues ou travesties, dont seule une partie est considérée et prise en compte sous l'aspect monétaire. Elle se double d'une imprécation à un engagement accru et d'une mobilisation quotidienne épuisante à répondre aux attentes des donneurs d'ordre que l'on soit en emploi, en chômage ou catégorisé encore comme inactif. Ce beau programme s'accompagne d'une petite musique dansante qui vous enjoint de travailler agilement toujours plus, au quotidien et le plus tard possible, puisqu'il est gravé dans le marbre des chiffres, comme une tendance lourde et irréfutable, affirmant que nous devrions vivre plus vieux ! En attendant, l'imperium n'a de cesse d'exceptionnaliser le quotidien du droit du travail. Un projet de décret prévoit, par exemple, de permettre à titre temporaire, et sans compensations, de recourir à la dérogation au repos hebdomadaire pendant le déroulement des Jeux olympiques de Paris-2024 où « le marathon ce ne sera pas uniquement pour les athlètes17 ».
L'ensemble de ces éléments factuels matérialise une représentation de la société où vous devez être conforme (look et relook) et où le temps et l'espace à soi se rétrécit, comme dans L'écume des jours de Boris Vian. C'est très justement ce que le capital ne cesse d'organiser afin de vous contraindre à ne pouvoir vous refuser à ses avances douteuses, qu'elles touchent aux modes de produire, de distribuer ou de consommer. Il vous faut donner, donner et donner encore plus et comme l'affirme, en juillet 2020, Élisabeth Borne, alors première ministre, le patronat ne doit surtout pas, en retour, être assujetti à vous le rendre ni par de nouveaux droits ni par l'impôt. Il est seulement invité à vous aider, à vous donner ou à vous redistribuer, selon son bon vouloir, tel jour une prime, le lendemain une ristourne sur le prix de tel ou tel bien et le surlendemain peut-être une augmentation de salaire. Et n'oubliez surtout pas d'apprendre à lui dire merci !
En quelques mots, tout est dit pour ceux qui gardaient quelques illusions : notre démocratie capitaliste bourgeoise ne tolère et ne concède qu'une égalité formelle dans les urnes et la refuse totalement dans les rapports de travail, ou devrions-nous dire plus précisément dans la mise en œuvre des formes d'exploitation du travail. Fin totale des illusions racornies sur « la citoyenneté dans l'entreprise » promulguée dans le préambule des lois Auroux (1983), mais révérence et enthousiasme devant « l 'entreprise citoyenne », dont la jouissance est destinée aux seuls propriétaires du capital.
Le retour aux rapports fondamentaux de l'exploitation comme aux beaux temps du 19e siècle est ainsi pleinement acté : le travail appartient à celui qui le conçoit et le paie, et celui qui l'accomplit lui doit tout et se doit de lui concéder toute l'énergie et le temps qu'on lui réclame dans le quotidien, comme tout au long de sa vie. Le retour à ces fondamentaux renvoie à l'expression de l'enjeu essentiel, si ce n'est unique pour celui qui ne vit pas du capital : être humain à part entière ou être chose manipulable selon les besoins, c'est-à-dire être un esclave moderne. Pierre Naville dans le dernier chapitre de De l'aliénation à la jouissance (1954) exposait précisément le processus à l'œuvre :
L'esclave moderne ne l'est pas juridiquement, la loi l'a fait libre, mais sans propriété : donc contraint de travailler pour autrui, esclave du système. D'où ce conflit : il ne doit pas seulement subir sa condition mais l'accepter. Le système veut son « aveu » et pour l'obtenir, il brise en l'homme ce quelque chose qui se rebelle, et qui tient à sa personne. Seul le temps de travail y parvient, pourvu qu'il soit assez long et bien contrôlé. Le travail est une contrainte ; si cette contrainte est assez persévérante, si l'homme ne peut y échapper assez longtemps, il finit par s'y identifier dans la narcose (sommeil artificiel) et la détresse18.
Un affrontement essentiel et permanent sur le sens de la vie
On est ici au cœur de l'affrontement essentiel qui traverse tant les regards et controverses théoriques que les interrogations contradictoires que tout un chacun rencontre quand il lui reste un peu de temps pour s'interroger sur ce qu'il vit dans son quotidien. Dans cette quête de sens, Jean-Marie Vincent explicite théoriquement que « le rapport de travail est un rapport de rapports sociaux multiples qui marquent fortement de leur empreinte ceux qui travaillent19 ». De plus, il souligne, en s'appuyant sur l'apport de Gerhart Brandt, que le travail n'est pas seulement soumission au commandement du Capital mais plus fondamentalement soumission à des processus abstraits de socialisation (soumission au travail abstrait, à la technologie, aux formes de l'échange marchand)20. L'ensemble de cette combinatoire enferme « les salarié·es assujetti·es à la production de valeurs et de profits par toute une machinerie sociale qui n'est pas faite seulement de dispositifs d'oppression et de contrôle mais aussi de dispositifs d'exploitation et d'appropriation de l'agir ».
Il est ainsi subordonné même dans le temps du non-travail, ce temps défini comme celui devant nous permettre d'inventer et de vivre des rapports s'émancipant, peu à peu, de la domination des logiques capitalistiques de marchandisation de la vie, matérielle et sentimentale, pour nous préparer à nous en évader pleinement dans un processus permanent où le travail perdrait sa place hégémonique dans la vie quotidienne. C'est pourquoi nous partageons toujours son invitation à partir d'une critique du « mouvement ouvrier qui a poussé le plus loin la sacralisation du travail sous la forme paradoxale d'une mythologie laïque ».
Cette approche critique prolonge celle de Pierre Naville quand il propose que le processus de réduction du temps d'assujettissement au travail s'attaque à la transformation des contenus et des relations qui existent entre travail et non-travail pour produire dialectiquement leur conjointe métamorphose. Les rapports de travail peuvent alors se transformer en faisant reculer le plus rapidement possible les processus de domination, d'exploitation et de précarisation généralisée qui empêchent de penser ensemble les finalités de la production des biens et des services et leurs sens dans et pour la société. De même que les rapports de non-travail, dans toutes les relations de société et de proximité où ils se nouent, peuvent permettre de cultiver des rapports égalitaires de genre et rendre plus écologique nos vies quotidiennes.
Cette approche totalement contradictoire à celle de la « Refondation sociale » conçue par le Capital et ses servants permet de dépasser de fausses oppositions et de situer la totalité des implications de ce moment actuel de la lutte de classes qui couvre la période de 1968 à nos jours. Elle s'inaugure dans la lutte des Lip, conflit autogestionnaire et analyseur de l'héritage de Mai 68 pour les luttes d'émancipation, et notamment celle pour le contrôle de la production et celle pour la réduction massive du temps de travail qui s'affiche alors autour d'un radical « Travailler moins pour vivre mieux ». Cette lutte des Lip, bientôt rejointe par plusieurs dizaines d'autres, ébauche des pratiques et donne à voir d'autres formes possibles de rapports productifs et sociaux qui déchaînera et mobilisera contre elles, dans une totale unité, les forces archaïques et modernistes du capital et de l'État.
Elle effraie alors d'autant plus qu'elle démontre en pratique que les damné·es de la terre ont l'imagination et les capacités d'élaborer et de mettre en œuvre une société qui s'émanciperait de leur joug. Elle effraie car elle s'acoquine avec l'orientation tracée par Paul Lafargue dès sa Réfutation du droit au travail de 1848, plus connue sous la dénomination provocatrice du Droit à la paresse21. Dans ce texte il s'interroge sur ce que peut valoir une vie dominée par l'emprise d'un travail dont le temps dicte le moindre moment de votre monde quotidien ? Sa réponse est sans appel : cette vie aliénée ne vaut rien et la pauvreté des familles enchaînées au salariat témoigne alors en France de ce constat. D'où son plaidoyer pour les inciter à ne pas accepter l'accaparement de leur temps de vie par le temps de travail en expliquant pourquoi et comment il est possible de réduire massivement le temps soumis à travailler pour un patron.
Le « Lip c'est fini, fini » vociféré à la radio et à la télévision, le 1er août 1973, par le premier ministre Pierre Mesmer, inaugure la mobilisation massive des forces patronales pour briser, concrètement et idéologiquement, l'acuité des idéaux de Mai 68 dans les rapports sociaux de production et dans la vie quotidienne. Il faudra au patronat et à l'État plus d'une bonne vingtaine d'années pour y parvenir dans une longue marche affirmée théoriquement avant l'aube de ce siècle. Et depuis, ils ne cessent de vouloir maintenir à toutes forces idéologiques et répressives, auxquelles participent les successions de mises en état d'urgence, l'emprise qu'ils ont tissée. Sur le temps formel de travail, ils seront pourtant obligés d'accepter des concessions jusqu'aux trente-cinq heures, mais ils en produiront le contournement en atomisant l'ensemble du salariat pour mieux contrôler son temps individuel et collectif de mise au travail et mieux accaparer le temps libre de non-travail à des fins productives. Par la saisie des compétences acquises hors-emploi dans le temps quotidien, par une mise au travail hors-emploi pour de multiples activités de service, par l'encadrement des loisirs et des modes de plaisir dans un temps urgent de consommation marchande, par le démantèlement dans l'habitat des temporalités intimes métamorphosées en temps de travail assujetti, s'est constitué et consolidé un vaste processus de résistance du capital visant à annihiler l'accès au temps libre de non-travail.
Si même les gains de temps formels ouvrent sur une vie quotidienne où les rapports au travail vous enserrent de plus en plus dans des formes d'esclavage moderne et où s'entretiennent des rapports sociaux androcentrés, comment peut-on entrevoir les voies d'une émancipation ? En campant sur le seul objectif indispensable d'une réduction quotidienne pour toutes et tous du temps de travail sans l'inclure dans une vision plus vaste des processus d'assujettissement au travail capitalistique, est-il encore possible de penser et lutter pour une transformation émancipatrice ?
Un livre pour contribuer à penser, à lutter et à débattre pour concevoir un temps de la vie quotidienne émancipée du temps de travail
Pour contribuer à la compréhension du tissage des configurations temporelles dans lesquelles nous sommes contraints de vivre et de penser, l'objet théorique de la qualification du temps quotidien et de sa légitimation doit être mis en discussion au plus près des pratiques que nous exerçons ou côtoyons d'ordinaire. Trois logiques temporelles s'entremêlent si l'on cherche à analyser les significations de ce temps journalier. Ces logiques que nous ayons conscience ou non de leur impact sur nos façons d'agir sont liées à des symboliques, parfois très anciennes, permettant de faire société. Elles pèsent dans leur combinatoire sur nos capacités à comprendre la société de travail dans lequel nous vivons ou survivons, et ce faisant, sur nos capacités à penser et à produire de possibles alternatives menant vers une société de liberté et de bien-être.
Ces trois logiques temporelles sont celles du sacré, du synchrone et de l'asynchrone.
La logique du sacré
Elle en réfère aux dogmes religieux et profanes. Elle encadre et rythme les moments marquants de la vie (naissance, baptême, mariage, enterrement, anniversaire, etc.) mais aussi des temps plus ou moins liés au retour des saisons ou à la commémoration de références sociales communes (par des processions, des fêtes, des célébrations politiques, associatives ou militaires, des manifestations, etc.). Elle se matérialise aussi dans le calendrier qui encadre le déroulement du temps et décline, au long de l'année, des mois et de la semaine, les jours chômés censés permettre de nous reposer mais aussi de nous rassembler afin d'être a minimaensemble.
Elle mène encore au quotidien, via le son des horloges puis le silence des montres individuelles, les délimitations du temps à consacrer aux activités contradictoires ou complémentaires de la prière, de la méditation, de l'étude, du travail, de la rêverie ou encore de la déambulation et du repos. Dans les religions monothéistes, le temps de la prière quotidienne dicte ainsi la segmentation du temps quotidien. Par exemple, en France, au 19e mais encore au 20e siècle il n'est pas rare d'observer des arrêts de la production consacrés à dire obligatoirement des prières, à genoux, particulièrement dans les ateliers de femmes. La logique du sacré participe à imposer des normes communes et à poser des interdits censés contraindre les diktats matérialistes du fonctionnement des marchés. Par exemple, dans les conflits autour du temps de travail entendre dire que « le dimanche c'est sacré », n'implique pas une adhésion à une religion mais exprime le refus de la disparition d'un temps commun pour vivre ensemble autour d'autres activités que le travail rémunéré dans un temps contraint.
La logique du synchrone
Elle affiche les coordinations incontournables requises dans l'organisation commune d'une société. Elle permet d'articuler dans l'organisation de la vie quotidienne ce qui relève de temps sacrés tout en introduisant les injonctions spécifiques venant d'organisations singulières dans la société de travail. Autrement dit, la logique du synchrone se propose de coordonner l'ensemble des temps spécifiques de l'activité quotidienne et de les mettre en rythme. Elle organise, initialement, la vie quotidienne à partir des temps transcendants construits sur le sacré puis y intègre toutes les représentations d'organisations immanentes des liens. Cela inclut diverses formes comme les us et habitudes ou les rituels autour par exemple de la mise au travail, de la sortie du travail, les temps de pauses et de repas, etc. Cela touche également par exemple aux horaires d'ouverture des institutions publiques tout autant qu'à la possibilité de concrétiser des liens sociaux d'intimité permettant de se retrouver dans un temps à soi qui peut être partagé. C'est sur la base d'une telle logique que le mouvement ouvrier s'est rallié profondément au projet revendicatif des huit heures de travail, huit heures de repos, huit heures de loisir comme la représentation idéale d'une vie quotidienne émancipée.
La logique de l'asynchrone
Elle a pour vocation à légitimer, en les délimitant et en les encadrant, les logiques temporelles qui perturbent les mises en commun issues originellement de la combinaison des temps sacré et synchrone. Par exemple, elle justifie au nom d'un intérêt général que lors du jour de repos commun plusieurs activités professionnelles soient autorisées, sans possible refus de s'y soustraire. Le travail s'invite alors pour certains dans un « temps familial sacré ». Le travail posté, le travail d'astreinte sont des figures marquantes, avec l'organisation permanente des services de la sécurité publique (police, gendarmerie et sapeurs-pompiers) de la légitimité d'une telle logique au nom du bien public ou de l'intérêt général. C'est ensuite au nom d'une urgence, banalisée par différents modèles d'organisation de la production et de la distribution, que cette logique initialement supplétive va tendre à asseoir son emprise dans l'espace de la consommation des biens et des services jusqu'à se promouvoir comme logique hégémonique dans l'expansion de la mondialisation des affaires. La logique de l'asynchrone devient alors motrice dans toute une série d'adaptations et de réorganisations des activités et des temporalités. Elle ridiculise les rythmes « ancestraux » du travail et du repos, altère les représentations cristallisées du temps et embrouille la qualification qui peut être donnée au temps de travail comme au temps de repos, de loisir ou d'oisiveté. De logique dominée, elle devient logique dominante généralisant l'urgence dans l'organisation de la vie quotidienne afin de nous faire consentir à la prorogation de l'esclavage moderne.
Ces trois logiques accompagneront notre réflexion, tout au long des cinq chapitres de ce livre, pour analyser les tensions, les conflits et la dialectique de leurs résolutions au regard des combats menés pour s'émanciper des rapports d'exploitation.
Le premier situe le conflit structurel sur le temps d'assujettissement à la logique d'exploitation et interroge le sens des réponses tronquées du mouvement ouvrier et syndical au regard de la transformation des rapports sociaux, notamment de genre.
Le second explore, face aux luttes pour « Vivre et travailler autrement », les angoisses et les premières ripostes patronales qui débouchent sur l'invention de l'aménagement flexible du temps de travail.
Le troisième analyse l'aggiornamento de l'esclavage moderne que fonde la théorisation de la « Refondation sociale » conceptualisée et propagée par le Medef.
Le quatrième examine la concrétisation de ses effets sur l'aliénation de la vie quotidienne ces vingt dernières années jusque dans ses ajustements post-Covid.
Le cinquième présente trois modèles actuels aux sources de la perpétuation de l'oppression par le travail et les met en discussion proposant d'orienter, réflexions, débats et luttes vers une critique radicale de la vie quotidienne.
Patrick Rozenblatt : Le travail totalitaire
Editions Syllepse, Paris 2025, 184 pages, 20 euros
https://www.syllepse.net/le-travail-totalitaire-_r_22_i_1101.html
1. Cette expression trouve son origine dans la décision prise en 1874 par les députés français de suspendre, durant ce laps de temps, leurs affrontements parlementaires sur l'élaboration de la constitution afin de laisser place libre au commerce.
2. Site de la BNF.
3. « Après la dînette, le “Kit du télétravail” pour enfants à partir de 2 ans ! », Contre Attaque, 13 novembre 2023.
4. Présentation sur le site de la FNAC.
5. Seul un papa s'inquiète de l'aspect addictif et une maman émet une critique sur les couleurs associant encore le rose aux femmes et le bleu aux hommes !
6. Première loi en France limitant le travail des enfants, gouvernement.fr.
7. Ibid.
8. Ibid. On peut ajouter que ce processus amenait à rejeter plus tard hors de la conscription obligatoire une partie importante des jeunes hommes, ce qui affaiblissait l'armée française.
9. Ibid.
10. Ibid.
11. Steve Fraser, « Le retour du travail des enfants », source TomDispach, traduit par les lecteurs du site Les-Crises.
12. Il existe un contrôle théorique de l'inspection du travail et une autorisation préalable. « À partir de quel âge peut-on travailler ? », Service-Public.fr.
13. Abraham M. Moles, Sociodynamique de la culture, Paris/La Haye, Mouton, 1967.
14. Bertrand Russel, Éloge de l'oisiveté, 1932, http://www.esprit68.org/.
15. Patrick Rozenblatt, Razzia sur le travail : critique de l'invalorisation du travail au 21e siècle, Paris, Syllepse, 2017.
16. Tout le temps, partout, avec n'importe quel support.
17. Le Canard enchaîné.
18. Pierre Naville, Le nouveau Léviathan, t.1, De l'aliénation à la jouissance, Paris, Anthropos, 1970.
19. Jean-Marie Vincent, « La légende du travail », dans Pierre Cours-Salies (coord.), La liberté du travail, Paris, Syllepse, 1995.
20. Gerhart Brandt, Arbeit, Technick und gesellschaftliche Entwicklung, Francfort, Suhrkamp, 1990.
21. Paul Lafargue, Réfutation du droit au travail de 1848, texte publié en 1880 et plus connu sous la dénomination provocatrice du Droit à la paresse.
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L’Amazonie accueillera la COP30 en 2025

Dix ans après l'accord de Paris et deux escales dans des pays pétroliers, la trentième Conférence des parties sur le climat (COP30), qui se déroule cette année aux portes de la forêt amazonienne brésilienne, sera sûrement marquée du sceau des peuples autochtones.
15 février 2025 | tiré d'Alter-Québec
https://alter.quebec/lamazonie-accueillera-la-cop30-en-2025/?utm_source=Cyberimpact&utm_medium=email&utm_campaign=20-fevrier-2025--numero-commemoratif-du-30e-anniversaire-dAlternatives
Dès sa dernière élection en 2022, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva avait lancé un appel pour recevoir la COP30 en Amazonie. C'est donc à Belém, capitale de l'État du Pará, dans le nord du Brésil, que se tiendra la conférence organisée par l'Organisation des Nations unies, du 10 au 21 novembre prochain.
Alors que la ministre de l'Environnement, Marina Silva, l'appelle la « COP des COP », le Brésil accueillera la prochaine Conférence des Parties (COP) sur le climat avec des contradictions certaines. Aujourd'hui, le pays reste un grand producteur de pétrole, même si Lula a réaffirmé l'importance de protéger l'Amazonie pour la sécurité climatique dans le monde. Malgré l'engagement de son gouvernement à éradiquer la déforestation du pays, il a aussi fait avancer son projet d'adhésion à l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP).
Avec le retour à la Maison-Blanche d'un climatosceptique, la COP30 aura lieu dans un contexte géopolitique hostile, car sans l'engagement des États-Unis, il sera difficile de conclure des accords fermes pour le climat.
Une COP tournée vers l'Amazonie
Le règne du dernier président Bolsonaro a été marqué par l'explosion de la déforestation en Amazonie. Lula, quant à lui, a promis de renverser la vapeur et de tenir son engagement de zéro déforestation. Il y a deux ans, après l'annonce d'une COP aux portes de la forêt amazonienne, les populations autochtones de la région ont commencé à se mobiliser. Il faut donc s'attendre à ce que les luttes portées par ces peuples occupent le cœur de la conférence de l'ONU.
Une mobilisation internationale se prépare. Des réseaux d'Europe, d'Afrique et des Amériques se sont donné rendez-vous, en novembre prochain, pour un sommet des peuples, en parallèle de la COP30, auquel participeront sûrement plusieurs délégations du Québec. À suivre.
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Témoignage – Qu’en est il de la deuxième phase de l’accord à Gaza ?

Dans un développement récent, Israël a conditionné le passage à la deuxième phase de l'accord à des exigences que le Hamas considère comme inacceptables, notamment le désarmement de la résistance et l'éloignement du Hamas de la bande de Gaza. Le mouvement a affirmé que ces demandes relèvent de la « guerre psychologique absurde », insistant sur le fait que la résistance ne quittera pas Gaza et que son désarmement est hors de question. Il a également souligné que toute disposition concernant l'avenir de la bande de Gaza doit être décidée uniquement par un consensus palestinien, sans ingérence extérieure.
Tiré d'Union juive française pour la paix.
Par ailleurs, des responsables du gouvernement de Benjamín Netanyahou ont déclaré qu'il existe de profondes divergences entre les deux parties et que parvenir à la deuxième phase de l'accord semble quasiment impossible. Ces responsables ont précisé qu'Israël ne fera aucune concession sur ses demandes et que la seule option envisageable est la prolongation de la première phase (A) de l'accord, en intégrant davantage d'otages israéliens dans la liste humanitaire.
Dans le même contexte, une délégation israélienne de négociation est partie aujourd'hui pour Le Caire afin de discuter des détails de la première phase du cessez-le-feu. Un responsable israélien a révélé que les négociations porteront sur l'introduction de maisons mobiles dans la bande de Gaza, précisant que l'occupation est prête à faire entrer 300 unités résidentielles à ce stade. Toutefois, ce nombre reste largement insuffisant pour répondre aux besoins d'un seul camp de réfugiés, parmi les nombreux camps dispersés à travers le territoire, où des centaines de milliers de déplacés ont trouvé refuge après la destruction de leurs maisons.
Situation humanitaire catastrophique : Gaza sous le poids de la guerre, du froid et de la faim
La souffrance des habitants de Gaza se poursuit dans un contexte de crise humanitaire catastrophique. Avec les destructions massives des infrastructures et l'effondrement des services essentiels, la vie devient de plus en plus difficile pour des centaines de milliers de citoyens.
Dans ce cadre, de grandes quantités de carburant ont été acheminées vers la centrale électrique située au centre de la bande de Gaza, permettant à la compagnie d'électricité de commencer la réparation de certaines lignes qui n'ont pas été complètement détruites. Cependant, l'ampleur des dégâts sur le réseau électrique est immense, rendant le rétablissement de l'électricité dans les foyers un travail de longue haleine qui pourrait prendre des années.
Simultanément, une puissante dépression météorologique a frappé Gaza dans la nuit d'hier, aggravant davantage les souffrances des habitants, en particulier ceux qui vivent dans des camps de déplacés et des tentes de fortune. Les fortes pluies et vents violents ont inondé ces abris précaires, transformant le sol en marécage de boue, rendant la vie insupportable, aggravée par le froid glacial et l'absence totale de moyens de chauffage.

Face à cette catastrophe, la colère des citoyens est montée d'un cran, notamment parmi ceux qui sont retournés dans leurs quartiers dévastés du nord et du sud de la bande de Gaza. Ils n'ont trouvé que des ruines, confrontés à une réalité encore plus cruelle : aucun abri, pas d'eau potable, et des rues toujours bloquées par les décombres qui rendent les déplacements extrêmement pénibles.
Avec l'accumulation des crises, la détresse des habitants ne cesse de croître. Les fortes pluies et le froid mordant ont contribué à une dégradation rapide des conditions sanitaires, provoquant la propagation de maladies dans un environnement privé des besoins les plus élémentaires pour la survie.
Extraction des corps sous les décombres après des mois de bombardements
La tragédie humanitaire ne cesse de s'aggraver avec la découverte continuelle de corps sous les ruines depuis plusieurs mois, conséquence des bombardements israéliens qui ont détruit les équipements de la défense civile dédiés au déblaiement des gravats.
Les familles endeuillées vivent toujours sous le choc, plongées dans une souffrance incommensurable, entourées de scènes de désolation et de destruction. Beaucoup subissent de graves traumatismes psychologiques, incapables de retrouver et d'inhumer dignement leurs proches laissés sous les décombres de leurs maisons détruites.

Après d'intenses efforts diplomatiques, l'entrée de deux bulldozers égyptiens spécialisés dans l'évacuation des débris et l'aménagement des routes a finalement été autorisée. Ces engins entameront leurs opérations dans le nord de la bande de Gaza, visant à dégager les ruines et récupérer les corps encore ensevelis sous les bâtiments détruits.
Cette avancée, bien que tardive, constitue un soulagement partiel pour les habitants qui espèrent enfin offrir à leurs proches un enterrement digne. Cependant, les besoins en équipements restent énormes, alors que les souffrances des familles continuent de croître jour après jour.
Poursuite des violations israéliennes et obstruction à l'entrée de l'aide humanitaire
Malgré l'accord de cessez-le-feu, l'armée israélienne a continué de violer ses propres engagements à plusieurs reprises cette semaine, entraînant la mort de plusieurs civils et les blessures d'autres dans différentes zones de la bande de Gaza. Ces violations répétées suscitent des inquiétudes croissantes quant à un possible effondrement de l'accord, d'autant plus qu'Israël maintient une position rigide, poursuivant ses attaques ciblées sur certaines zones.
Par ailleurs, Israël continue d'entraver l'évacuation des patients et des blessés nécessitant des soins médicaux à l'étranger. Les autorités israéliennes ont reporté le départ de dizaines de malades et de leurs accompagnateurs, ce qui a aggravé leur état de santé et mis leur vie en danger.

Cette obstruction ne se limite pas aux patients : le passage de Kerem Shalom a également été soumis à des restrictions strictes sur l'acheminement de l'aide humanitaire. Israël n'a permis l'entrée que de 180 camions sur les 600 convenus, soit à peine 30 % du volume attendu au cours des deux derniers jours, selon le bureau des médias gouvernemental de Gaza. Cette réduction drastique des approvisionnements a exacerbé la crise alimentaire et la pénurie des biens essentiels, rendant la situation encore plus insoutenable pour les habitants de la bande de Gaza.
Le bilan de l'agression israélienne s'alourdit alors que le blocus et les crimes se poursuivent : depuis le 7 octobre 2023, 48 271 morts et 111 693 blessés, faisant de cette attaque l'une des plus meurtrières contre des civils dans l'histoire contemporaine. Ces chiffres accablants illustrent l'ampleur de la tragédie que vivent les Palestiniens de Gaza, confrontés à une guerre d'extermination systématique dont le but est d'anéantir toute forme de vie dans le territoire assiégé.
Israël a transformé la bande de Gaza en la plus grande prison à ciel ouvert au monde, soumettant ses habitants à un blocus implacable depuis 18 ans. Cette situation a engendré une détérioration sans précédent des conditions humanitaires, plongeant près de deux millions de déplacés – sur une population totale de 2,4 millions d'habitants – dans des conditions catastrophiques, avec un manque délibéré de nourriture, d'eau et de médicaments. Malgré les appels internationaux incessants, Israël continue de pratiquer une politique de famine et de privation à l'égard des civils, perpétuant ainsi des crimes d'une ampleur inouïe contre une population sans défense.
Alors que les efforts diplomatiques se poursuivent pour tenter d'aboutir à un accord global qui soulagerait les souffrances des habitants de Gaza, l'intransigeance d'Israël bloque toute avancée significative. Entre bombardements, siège et déplacements forcés, Gaza demeure une plaie ouverte au cœur du monde, où ses habitants endurent une guerre impitoyable sous le regard passif de la communauté internationale.
Abu Amir, le 20 février 2025
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Mondialement, le 1% s’appuyant sur le 10% et soudoyant le 40% est responsable de la crise climatique. Reste à renverser le sablier.

Comme le montre le tableau suivant, les ultra-riches et les riches sont quasi exclusivement responsables des émanations de GES au-delà de la viabilité pour ne pas dépasser le 1.5°C de réchauffement de la terre. Pour le dire comme le Secrétaire général des Nations unies en 2020 : « Au cours des 25 dernières années, les 10 % les plus riches de la population mondiale ont été responsables de plus de la moitié des émissions de carbone. L'injustice et l'inégalité de rang à cette échelle sont un cancer. Si nous n'agissons pas maintenant, ce siècle pourrait être le dernier.

Dans les derniers trente ans (voir la dernière colonne du tableau ci-bas), les 50% les plus pauvres n'ont été responsables que de 16% des nouvelles émanations de GES alors que les 10% les plus riches l'ont été pour 45% :

Fait crucial à noter, le surgissement des pays émergents depuis 1990, en particulier de la Chine, combiné à la généralisation de l'austérité dans les pays du vieil impérialisme, fait qu'alors qu'en 1990 près des deux tiers des inégalités carbone étaient dus aux inégalités entre pays, ce sont celles à l'intérieur des pays qui expliquent la même proportion en 2019 :

Ces données reposent sur l'empreinte carbone, donc sur la consommation y compris la part de chaque individu pour les émanations de GES non seulement à partir directement du ménage privé mais aussi des dépenses par les gouvernements et des investissements privés en fonction du revenu du ménage et non de leur contrôle de la production. Si on se basait sur ce contrôle, la concentration de la responsabilité des émanations de GES est quasi invraisemblable : « Plus de 70 % de ces émissions historiques [1854 à 2022] de CO2 peuvent être attribuées à seulement 78 entreprises et États producteurs. »
Derrière les froides statistiques se cachent les banques de la « dirty dozen »
Si on prend seulement en compte le passé récent depuis 2016 soit depuis les Accords de Paris, « [l]e Top 10 est principalement dominé par les entités étatiques chinoises et russes. La production chinoise de charbon arrive ainsi largement en tête, représentant un quart des émissions mondiales sur la période. Viennent ensuite la société pétrolière publique Saudi Aramco (5% des émissions mondiales), le géant russe de l'énergie Gazprom (3,3%) et le producteur public indien de charbon Coal India (3%). Les majors occidentales sont quant à elles présentes dans le Top 20 : Exxon arrive 11e avec 1,4% des émissions, suivi de Shell, BP, Chevron ou encore TotalEnergies, qui se place 18e avec 1% des émissions mondiales. »

Ce serait cependant une grave erreur que de tout mettre sur le dos de la Chine et de la Russie. Derrière les grands émetteurs de GES sont embusquées les grandes institutions financières dont deux canadiennes qui font partie de la « dirty dozen ».

Quant à leur engagement climatique, prétextant la peur du trumpisme, elles fuient la pourtant futile Net-Zero Banking Alliance(NZBA) des Nations unies faisant partie de la Glasgow Financial Alliance for Net Zero (GFANZ)… initié par le banquier (et futur Premier ministre du Canada ?) Mark Carney.
Ensuite, il faut creuser pour établir la responsabilité finale. Par exemple, on sait qu'une bonne part de la production manufacturière chinoise est destinée aux pays du vieil impérialisme. Ce n'est pas pour rien, n'en déplaise à Trump, que la balance commerciale des ÉU est fortement déficitaire. Quand on y pense, l'important déficit commercial des ÉU, qui dure depuis 1975, soit depuis 50 ans, n'est pas autre chose qu'une ponction sans rémunération sur les ressources du monde et, à revers, une exportation de GES non compensée. Derrière les rideaux, le sorcier d'Oz transforme ses dollars hégémoniques en pouvoir d'achat miraculeux bien appuyé sur une puissance économique et militaire… de plus en plus toussoteuse. Le comportement aberrant trumpien cache la conscience claire de l'irrémédiable déclin de (l'ex-)gendarme du monde prétendant équilibrer ses comptes et se repliant sur la forteresse nord-américaine.
L'énergivore American Way of Life de l'endettement, de l'isolement et de l'anxiété
Plus généralement, l'American Way of Life de la consommation de masse repose sur les piliers du complexe auto-bungalow imposé aux travailleurs-consommateurs et travailleuses-consommatrices par les choix productifs du grand capital et allègrement financé par les banques. D'où la contradiction entre fin du mois et fin du monde que confrontent les ménages populaires. L'American Way of Life, à la source de l'orgie de GES, soutenu par la Finance et la propagande capitaliste, appelée publicité, justifié par la « demande solvable » keynésienne, entretient des besoins insatiables jamais comblés huilant la machine à profits.
L'American Way of Life plonge la masse populaire dans l'insatisfaction permanente et l'anxiété de l'endettement restreignant sa liberté de riposter collectivement. Isolé dans son bungalow et dans son auto, l'humain de la modernité est condamné au malheur du stress permanent et de son corolaire de maladies chroniques et mentales. C'aurait été si simple, au début du XXe siècle, pour une société démocratique de choisir le logement collectif au lieu du bungalow et le transport collectif au lieu de l'auto solo, le tout dans une ville donnant la priorité aux piétons et à la verdure au sein d'une campagne assurant l'essentiel de l'approvisionnement végétarien sans ruiner les sols, sans dévaster les forêts et sans polluer les eaux. Il n'est pas trop tard pour bien faire.
Une esquisse de stratégie écosocialiste qui se heurte à la division entre le Nord et le Sud
De cette analyse sommaire on peut voir en filigrane l'esquisse de la stratégie pro-climat : mobiliser le 50% tout en ralliant le 40% pour écraser le 1% tout en neutralisant le 9%. Globalement, il y a une double difficulté. Le 50% le plus pauvre constitue la grande majorité de la population des pays du Sud lesquels pays sont cependant peu émetteurs de GES mais aussi peu influents au niveau mondial. Le 40% du milieu, mondialement parlant, qui s'accroche désespérément à l'American Way of Life forme la majorité de la population des pays du vieil impérialisme lesquels pays sont d'importants émetteurs de GES et influencent fortement la direction de la politique mondiale. En plus, les émissions de GES ont beau être sourcées nationalement et sectoriellement, leurs conséquences sont immédiatement mondiales.
Se pose, dès le départ, la nécessité d'une lutte mondiale mais qui ne peut que s'amorcer dans la nation qui reste le lieu central de la politique malgré l'éclatement économique des États à l'ère impérialisme. Pendant que dans le Sud se multiplient les luttes dont l'origine ou le fondement est souvent écologique mais sans aboutir, au Nord elles ne décollent pas sauf parfois en grande mobilisation sans lendemain ou en coups d'éclat médiatiques mais très minoritaires. Toutefois, les pays émergents, surtout la Chine mais aussi certains autres pays des BRICS + se caractérisent par une majoritaire masse appauvrie et une influence mondiale ou tout au moins régionale significative. Là sont peut-être les maillons faibles où jaillira l'étincelle qui mettra le feu à toute la plaine.
L'intensification de la crise climatique unifie le monde et s'articule avec la crise sociale
Est certesdémobilisante la désinformation climatique qui prétend à l'atteinte proche d'un sommet mondial d'émanations de GES laissant voir une descente rapide grâce à un renouvellement de la consommation de masse électrifié à coups d'autos solo électriques et d'une orgie d'énergie renouvelable ouvrant une nouvelle ère extractiviste tout aussi énergivore. Mais cette fake news est contredite par la réalité crue de la croissance à taux croissant de GES, mesurés directement dans l'atmosphère, qui fait de l'adaptation, mal pourtant nécessaire, un ridicule chien qui court après sa queue. L'incontournable réalité des catastrophes et des super-canicules climatiques allant croissant exponentiellement et qui n'épargne plus le Nord ramène implacablement sur le terrain des vaches. Elle y ramène d'autant plus que ces événements sur fond de tendance lourde s'articulent de plus en plus avec la crise sociale de la vie chère, du logement, des infrastructures détruites et des austérisés services publics débordés.
Il ne saurait être long que ces soulèvements massifs et prolongés qui ont en vain galvanisé le monde méditerranéen dans les années 2010 resurgissent dans l'un ou l'autre pays émergent. Elle pourrait même surgir dans les pays du vieil impérialisme où ces « classes moyennes » du 40%, s'appauvrissant et se précarisant davantage, en viennent à devenir une majorité acculée au pied du mur. La bourgeoisie mondiale a parfaitement compris le danger existentiel qui la confronte en répondant par la montée de l'extrême-droite déviant la colère populaire sur ces « classes moyennes » du Sud, instruites et sans emploi, qui montent en masse vers le Nord. À la gauche de sortir de ses confortables gonds centristes et électoralistes mobilisant pour une société solidaire de soins et de liens coupant radicalement avec la croissance matérielle des extractivismes ancien et nouveau.
Marc Bonhomme, 23 février 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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Allemagne : Un sociologue commente le score de l’AfD - « Le succès de Die Linke montre ce qui peut être fait »

Selon le sociologue Axel Salheiser, l'AfD pourrait encore gagner du terrain à l'avenir dans les Länder de l'Est. Pour s'y opposer, il faudrait que les partis affirment leur identité propre. Interview réalisé par Anne Fromm.
24 février 2025, Anne Fromm Axel Salheiser
https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article73739
Axel Salheiser : Je m'y attendais. Mais ce qui me choque, c'est qu'elle a fortement progressé par rapport aux dernières élections régionales. D'une part, elle profite du climat qui règne dans toute l'Allemagne. D'autre part, les sondages post-électoraux montrent que les thèmes qui ont fait pencher la balance en Allemagne de l'Est étaient différents de ceux de l'Allemagne de l'Ouest. Des sujets tels que l'environnement et le climat n'ont pratiquement pas joué de rôle à l'Est. Ici, le thème principal était l'immigration, utilisée comme bouc émissaire. L'idée que les migrant.e.s sont systématiquement favorisé.e.s est bien reçue ici, car de nombreux Allemands de l'Est se considèrent comme des citoyens de seconde zone.
Pourquoi ? La situation des gens à l'Est n'est pas si mauvaise.
Salheiser : C'est vrai, mais les responsables politiques des partis démocratiques hésitent à aborder le sujet, car personne ne veut offenser ses électeurs. Et il est également difficile de dire aux gens : « La situation n'est peut-être pas aussi bonne que vous l'espériez. Mais elle pourrait être bien pire. »
Ce qui est vrai, c'est que les succès de la politique des 35 dernières années sont beaucoup trop peu évoqués. Au lieu de cela, les Allemands de l'Est dépeignent leur avenir de manière sombre : restructurations, les jeunes qui partent, les régions qui se vident. Nous savons que là où l'attitude face à l'avenir est particulièrement négative, le mécontentement à l'égard de la démocratie est particulièrement grand.
Mais d'autres régions d'Allemagne sont également confrontées à de grandes incertitudes quant à leur avenir. Pourquoi l'Est est-il si réceptif aux discours de l'extrême droite ?
Salheiser : Nous étudions depuis de nombreuses années les opinions des personnes qui vivent en Thuringe. Le facteur le plus important qui explique pourquoi les gens votent pour l'AfD, ce sont les opinions nationalistes et xénophobes. Autrement dit, les personnes qui ont des opinions racistes sont les plus susceptibles de voter pour l'AfD. Cela peut sembler banal, mais c'est tout de même pertinent. Toutes les personnes qui ne sont pas satisfaites de la démocratie ne votent pas pour l'AfD. Mais toutes celles qui votent AfD se disent insatisfaites de la démocratie. L'AfD absorbe le mécontentement politique comme une éponge.
L'AfD a obtenu près de 40 % des voix en Thuringe et en Saxe. Qu'est-ce que cela signifie ?
Salheiser : Cette situation entraîne un grand déficit de représentation. Si près d'un Thuringien sur deux a voté pour l'AfD, on est en droit de se demander pourquoi cette force politique est tenue à l'écart du pouvoir. Les partis démocratiques ne peuvent pas suffisamment expliquer cela. Au contraire : la CDU défend une politique migratoire très proche de celle que souhaite l'AfD. Comment peut-elle alors expliquer de manière convaincante pourquoi elle ne travaille pas avec l'AfD ?
Les partis démocratiques ont essayé beaucoup de choses : ils pointent du doigt l'extrême droite, ils essaient de la contrer sur le fond. Mais cela ne semble pas porter ses fruits. Comment faire mieux ?
Salheiser : Le succès du parti Die Linke montre, à petite échelle, comment il est possible de faire autrement : ne pas s'acharner sur l'AfD, mais au contraire affiner son propre profil. C'est une erreur de corréler la question sociale à l'origine des gens. Il faut arrêter de mettre en avant l'immigration en tant que problème pour nos systèmes sociaux. Cela conduit à ce que la migration soit considérée dans son ensemble comme un phénomène à bannir. Les partis démocratiques doivent parvenir à faire taire ce discours. Il ne profite qu'à l'AfD.
La force de l'AfD n'est pas un phénomène purement allemand, et encore moins un phénomène purement est-allemand. Les populistes de droite triomphent dans le monde entier. L'Allemagne est-elle en train de se rallier à l'esprit général du temps ?
Salheiser : Oui, mais la comparaison avec les populistes de droite en Italie, aux Pays-Bas et en France est boiteuse. Je ne veux pas banaliser les partis de droite là-bas. Mais l'AfD est beaucoup plus virulente. Elle n'est pas seulement d'extrême droite. Elle est une extrême droite qui veut changer radicalemen le système.
Peut-on s'attendre à ce que l'AfD cesse de croître ?
Salheiser : Non, il n'en est pas question, surtout dans l'Est. Nous observons une évolution linéaire depuis les dernières élections. Si nous prolongeons cette ligne, l'AfD obtiendra la majorité absolue lors des prochaines élections régionales en Allemagne de l'Est. C'est une perspective catastrophique. Nous pouvons déjà voir les dommages causés à la culture démocratique au niveau régional.
L'AfD étend ses structures et renforce ses organisations extraparlementaires grâce à sa présence dans les différentes assemblées. Cela conduit à davantage de violence et de polarisation. Dans les zones rurales, cela affecte en premier lieu les réfugié.e.s, les homosexuel.le.s, les personnes de gauche et non-blanches dans les zones rurales.
P.-S.
• Traduit pour ESSF par Pierre Vandevorde avec l'aide de DeepLpro.
Source - TAZ, 24 février 2024 :
https://taz.de/Soziologe-ueber-AfD-Erfolg/!6068511/
• Axel Salheiser. est sociologue et directeur scientifique de l'Institut pour la démocratie et la société civile (IDZ) d'Iéna. Il effectue des recherches sur l'extrémisme de droite et l'hostilité envers certains groupes de personnes.
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Lettre de soutien mondial à la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences, Reem Alsalem

Cette lettre a été envoyée le 2025-02-21 et contient les signatures de plus de 500 organisations et 5 000 individu·es.
Cette lettre a été initiée par la Plate-forme d'action internationale des femmes (WoPAI) et le Lobby suédois des femmes, en collaboration avec le Réseau européen des femmes migrantes.
Les signataires de cette lettre souhaitent exprimer leur profonde gratitude pour le travail excellent et novateur réalisé par Mme Reem Alsalem, dans le cadre de son mandat actuel de rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes et des filles.
Il est extrêmement important que le poste de rapporteur spécial sur une question aussi cruciale que la violence masculine à l'encontre des femmes et des filles soit occupé par quelqu'une de méritante et de courageuse, jouissant de la plus haute autorité et des normes d'intégrité les plus élevées.
Les organisations de femmes du monde entier suivent le travail de Mme Alsalem, et nous sommes profondément préoccupées par les campagnes de diffamation et les attaques infondées contre elle et son travail, qui se sont récemment intensifiées en raison de l'engagement inébranlable de Mme Alsalem en faveur des droits humains des femmes et de ses présentations indépendantes et objectives sur toutes les formes de violence à l'encontre des femmes et des filles. Ces campagnes et ces attaques ne sont que la preuve que Mme Alsalem a exposé la dure vérité des systèmes qui normalisent et justifient la violence à l'égard des femmes.
Par cette lettre, nous souhaitons exprimer notre soutien au travail extrêmement important de Reem Alsalem. Nous appelons à une action globale de soutien à Mme Reem Alsalem en joignant nos forces aux siennes et en soutenant son mandat et son travail indépendant, en partageant ses rapports et sa couverture des questions critiques et ses recommandations pour mettre fin à l'endémie croissante de la violence à l'égard des femmes.
Lire la lettre
Signez la pétition ICI
https://www.womensplatformforaction.org/global-support-letter/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)
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Lettre ouverte des femmes internationales pour une Syrie démocratique fondée sur la liberté des femmes

Lettre ouverte de femmes internationales pour une Syrie démocratique basée sur la liberté des femmes
à l'attention de
António Guterres, Secrétaire général des Nations Unies,
Sima Sami Bahous, directrice exécutive d'ONU Femmes,
Roberta Metsola, présidente du Parlement européen,
António Luís Santos da Costa, président du Conseil européen,
Ahmed Aboul Gheit, secrétaire général de la Ligue arabe,
Tiré de Entre les lignes et les mots
Depuis la chute du régime Assad en Syrie le décembre 2024, des discussions sont en cours sur l'avenir de la Syrie, et avec cela, les nouvelles opportunités pour une reconstruction démocratique de la société syrienne.
Il est essentiel que la société elle-même façonne et fasse avancer cette reconstruction. Il est également essentiel que les femmes syriennes participent à l'élaboration de ce processus en co-construisant la politique et toutes les sphères de la vie d'une manière autodéterminée.
La Syrie est en état de guerre civile depuis plus de dix ans, un processus qui a débuté par un soulèvement contre le régime oppressif baasiste. Au cours des 13 années qui ont suivi, la société a été confrontée à plusieurs reprises aux crimes les plus atroces contre l'humanité perpétrés par divers groupes terroristes tels que le soi-disant État islamique ou aux attaques d'invasion menées par l'État turc en violation du droit international.
Dans le nord et l'est de la Syrie, la population kurde construit depuis 2012 une société autonome fondée sur la libération des femmes, l'écologie et la démocratie de proximité. Les femmes ont joué un rôle très important dans ce processus. Dans ce modèle social, les femmes prennent des responsabilités et sont représentées dans tous les domaines de la vie sociale et politique. Elles se sont organisées pour se défendre et défendre la vie de tous. Les unités de défense des femmes du YPJ, aux côtés des YPG et des FDS, ont combattu l'État islamique et libéré de nombreuses villes de son règne. Le modèle social du confédéralisme démocratique dans le nord et l'est de la Syrie a créé une coexistence multiethnique et multireligieuse qui peut servir de modèle pour la réorganisation dans toute la Syrie.
Les femmes syriennes se sont unies et organisées pour lutter contre les attaques dont elles font l'objet et contre la société dans son ensemble. Elles sont déterminées à œuvrer en faveur du processus de paix, d'une société démocratique, de la vérité et de la justice. C'est pourquoi, le 22 décembre 2024, le Conseil des femmes syriennes a présenté une déclaration visant à remodeler la Syrie. Dans cette déclaration, l'association, composée de femmes de différentes origines ethniques, religieuses et culturelles, appelle à la participation décisive des femmes et de toutes les composantes de la société syrienne aux processus politiques.
Nous soutenons les 13 objectifs et demandes développés par le Conseil des femmes syriennes pour construire une nouvelle Syrie démocratique basée sur la participation des femmes (lien). En outre, la reconnaissance et la participation de l'Administration autonome démocratique dans le nord et l'est de la Syrie (DAANES) au processus actuel sont également essentielles pour un avenir démocratique en Syrie.
Nous appelons la communauté internationale et tous les acteurs politiques à reconnaître officiellement la DAANES, à soutenir directement les organisations civiles sur place et à établir une coopération à long terme. Nous appelons à un soutien et à des alliances politiques avec les organisations de femmes démocratiques et la société civile dans toute la Syrie, plutôt qu'à une coopération avec les groupes djihadistes dont l'idéologie et la pratique sont basées sur l'humiliation et l'oppression violente des femmes.
Nous demandons également l'arrêt immédiat des livraisons d'armes et des concessions politiques à la Turquie. Les relations diplomatiques avec les forces démocratiques en Syrie doivent être renforcées afin d'arrêter les attaques violentes de la Turquie, de mettre fin à la guerre et de permettre la construction d'une Syrie démocratique.
Il est temps de renforcer les forces démocratiques du Moyen-Orient, comme DAANES, et de soutenir les femmes qui luttent pour la liberté, la paix et la démocratie en Syrie !
Voir les signatures sur le site Women Defend Rojava
https://womendefendrojava.net/en/2025/01/28/international-womens-open-letter-for-a-democratic-syria-based-on-womens-freedom/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)
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