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Le SPGQ reporte à 2024 l’utilisation de moyens de pression
Dernière heure
Nous apprenons à l'instant que le SPGQ aurait décidé, lors de sa réunion du 29 novembre avec les représentants du Secrétariat du Conseil du trésor (SCT) et de madame Sonia Lebel, de réduire certaines demandes sectorielles du SPGQ pour son unité fonction publique. De plus, le comité de négociation aurait décidé de s'engager « à utiliser de manière judicieuse et mesurée » les moyens de pression et de reporter par conséquent à 2024 l'utilisation des moyens de pression.
Yvan Perrier
4 décembre 2023
11h23 AM
yvan_perrier@hotmail.com
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Dénonçons la guerre génocidaire menée par le gouvernement israélien - Solidarité avec le peuple palestinien

Face à la guerre génocidaire menée actuellement par Israël contre le peuple palestinien à Gaza, Révolution écosocialiste prend une position claire.
22 novembre 2023
Nous demandons :
• un cessez-le-feu immédiat ;
• la libération immédiate de tous les otages ;
• le retrait des troupes israéliennes des territoires palestiniens occupés ;
• le rétablissement total des convois humanitaires notamment de denrées, de matériel, de pétrole, etc. ;
• une rupture des relations du Canada avec Israël ;
• la dénonciation de la guerre d'Israël devant la Cour Pénale Internationale ;
• la poursuite du gouvernement israélien pour le génocide planifié contre le peuple palestinien ;
• la dénonciation des puissances occidentales, y compris le Canada, fournissant de l'armement à Israël ;
• l'abandon de l'ouverture d'un bureau du Québec à Tel-Aviv.
Pourquoi cette déclaration ?
Nous ne cautionnons aucun crime de guerre. Les enlèvements et les meurtres touchant les populations civiles, notamment les femmes et les enfants, doivent être dénoncés.
Nous déplorons la montée des sentiments et des actes islamophobes et antisémites résultant de cette guerre, tout en dénonçant l'équation mensongère qui associe toute critique des actions du gouvernement israélien ou du sionisme en général à l'antisémitisme.
Nous reconnaissons toutefois que le conflit israélo-palestinien est une guerre coloniale menée par l'État d'Israël et ne se joue pas à forces égales. Israël possède la plus importante armée, la plus moderne et la mieux équipée de cette région du monde. En plus d'être un état militarisé, Israël bénéficie de l'appui inconditionnel des principaux gouvernements européens et nord-américains dont le Canada.
Israël est aussi, depuis sa création en 1948, un État qui, pour s'installer, s'est accaparé les terres du peuple Palestinien. Provoquant alors la première grande déportation de population palestinienne dont une partie vit toujours dans des camps de personnes réfugiées.
Et enfin, cet État, en isolant depuis 15 ans la population palestinienne dans le territoire de Gaza et en morcelant les autres territoires palestiniens de la Cisjordanie, agit comme État d'apartheid. En fait les Gazaoui-e-s subissent des coupures de courant et d'eau, la privation de la liberté de circuler et connaissent des difficultés d'approvisionnement. Les colonies juives, avec la complicité de l'armée israélienne, accaparent des parties croissantes de la Cisjordanie.
Ce bafouement des droits du peuple palestinien a été plusieurs fois dénoncé par l'ONU. Mais Israël en fait fi avec la complicité des puissances occidentales. Toute cette situation de violence, de mépris des droits, dure depuis trop longtemps dans un silence complice de la communauté internationale.
Et c'est précisément cette situation qui est à l'origine du conflit actuel. La lutte du peuple palestinien, dans ce contexte est une lutte pour l'autodétermination, droit que nous soutenons en respectant le droit international et les conventions afférentes.
Pour que les Palestiniens et les Palestiniennes puissent continuer leurs luttes, il faut développer la solidarité internationale, dénoncer l'ingérence des puissances occidentales dont les États-Unis et continuer notre appui à toute lutte anticoloniale. Il nous faut aussi les appuyer à travers la campagne BDS (boycott, désinvestissements et sanctions) et faire connaître la résistance héroïque du peuple palestinien. Finalement, nous dénonçons toute forme de censure de la solidarité avec la Palestine, censure que beaucoup de militantes et militants vivent dans leur propre pays.
Solidarité avec le peuple palestinien !
Écrivez-nous à info@ecosocialisme.ca

Pour un collectif écosocialiste et écoféministe

L'écosocialisme et l'écoféminisme peuvent offrir à Québec solidaire des idées clés favorisant la cohésion sur le plan des orientations, une plus grande clarté stratégique et des balises pour notre fonctionnement interne. Cette perspective est à la fois enracinée dans l'histoire du parti, son programme et ses statuts et différente des discours et de certaines pratiques prédominantes dans le parti présentement. Lesquelles sont davantage inspirées par la social-démocratie et la manière traditionnelle de concevoir l'action politique.
Comme collectif, nous comptons mettre nos idées de l'avant par divers moyens, incluant des activités de formation et d'échange, des publications et la participation aux débats du parti à différents niveaux.
Orientations
Le capitalisme ne sera jamais vert, inclusif, post-colonial ou égalitaire. Ce système est indissociable de l'exploitation, de l'oppression et du pillage. Selon les lieux et les époques, ce sont les formes d'exploitation, d'oppression et de pillage qui varient, mais la logique du capital reste la même : toujours plus, toujours plus vite, sans égard pour la nature, les corps, les cultures et les sociétés.
L'idée du dépassement du capitalisme, présente dans le programme de Québec solidaire depuis 2011, n'est pas un simple souhait, c'est une nécessité vitale. Pour réaliser notre projet de société, il va falloir trouver le chemin vers une économie autogérée, démocratique, décentralisée, mise au service des humains et respectueuse des limites écologiques.
Le féminisme intersectionnel est aussi une idée clé au cœur du programme. Le projet de société solidaire sera réalisé par et pour les femmes, en solidarité avec toutes les personnes marginalisées, avec la valorisation du soin des personnes (le care) à la base de notre vision de l'économie.
Stratégie
Une telle transformation sociale ne peut pas se réaliser par la simple formation d'un gouvernement, aussi bien intentionné soit-il. En plus de gagner les élections, il va falloir gagner l'adhésion de la majorité de la population à un projet dont la réalisation ne sera possible que par leur engagement actif et autonome.
De plus, la formation d'un gouvernement solidaire n'est concevable que sur la base de mobilisations sans précédent de l'ensemble des mouvements sociaux, en conjonction avec la croissance du parti. Celui-ci étant l'expression concentrée de la volonté populaire de transformation sociale, économique et politique. Bref, avant de « prendre le pouvoir », il faut commencer à changer la société. Le parti de la rue doit être priorisé entre les élections pour rendre possible le succès du parti des urnes.
Pour que notre projet solidaire se réalise, il faudra aussi gagner l'indépendance du Québec. Ce qui demande, en pratique, la remise en question de l'État colonial et capitaliste canadien, en solidarité avec les peuples autochtones et les forces progressistes du reste du Canada. Ce projet politique est aussi forcément international face à un capitalisme extractiviste et patriarcal globalisé.
Organisation
De quel type de parti avons-nous besoin pour mener à bien ce projet politique pour le moins ambitieux ? D'abord, un parti enraciné dans les secteurs mobilisés de la population et les luttes sociales. Bien entendu, un parti qui incarne toute la diversité de la population et est actif partout au Québec. Ensuite, un parti qui fonctionne de la manière la plus démocratique possible, avec des structures horizontales, participatives, paritaires et décentralisées. Aussi, un parti dont les structures de base sont tournées vers l'extérieur afin de maximiser notre apport collectif au développement des mouvements et au succès des luttes.
Ce n'est que par cet enracinement et cette démocratie participative que nous pourrons collectivement résister aux pressions à la “normalisation” de ce parti pas comme les autres dès maintenant, de même qu'aux pressions encore plus féroces pour la “normalisation” d'un éventuel gouvernement solidaire.
Dans un tel parti, la formation sur les enjeux politiques et les débats sur la stratégie et le positionnement du parti dans la conjoncture sont essentiels. C'est d'abord à ces tâches que nous comptons consacrer les énergies de ce nouveau collectif.
(signatures)
Laura Avalos, Pontiac
Katharine Beeman, Mercier
Sébastien Bouchard, Jean-Lesage
Susan Caldwell, Rosemont
Louise Constantin, Verdun
André Doucet, Lafontaine
Jonathan Durand Folco, Hull
André Frappier, Maurice Richard
Daryl Hubert, Saint-Henri-Sainte-Anne
Hassoun Karam, Viau
Ginette Lewis, Jean-Lesage
David Mandel, Notre-Dame-de-Grace
Lucie Mayer, Prévost
Gérard Pollender, Sherbrooke
Roger Rashi, Laurier-Dorion
Benoit Renaud, Hull
Bernard Rioux, Jean-Lesage
Maïka Sondarjee, Hull
Jessica Squires, Hull

Rassemblement virtuel de mobilisation le 29 novembre de 13h à 14h

Travailleuses-eurs et militantes-ts du mouvement de l'action communautaire autonome sont invitées à un rassemblement virtuel le 29 novembre de 13h à 14h pour prendre connaissance et discuter des actions pour la justice sociale et climatique qui auront lieu dans le cadre de la semaine de fermetures, de grèves et d'actions rotatives du 20 au 24 février.
Bonjour !
Vous trouverez ci dessous une invitation pour un rassemblement virtuel de mobilisation le 29 novembre prochain. Nous discuterons de l'appel à l'action du 20 février au 24 février pour la justice sociale et climatique.
L'évènement facebook se trouve ici.
La rencontre aura lieu sur zoom (https://us06web.zoom.us/j/5227952607).
On invite les gens à s'inscrire : https://forms.gle/UHzQzLrYGMh59Wn76
Vous pouvez diffuser cette invitation dans vos réseaux et dans votre région ! :)
Joignez-vous à des organismes communautaires de partout au Québec !
Vous avez envie d'en savoir davantage sur la mobilisation sur la justice sociale et climatique ? C'est quoi la justice climatique ? En quoi ça concerne les organismes communautaires ? Pourquoi un mouvement de fermeture et de grève ? Comment participer ?
En l'espace d'une heure, nous discuterons de la conjoncture, de la campagne de mobilisation en cours et de l'appel à l'action du 20 février au 24 février !
Pour s'inscrire à la rencontre : https://forms.gle/UHzQzLrYGMh59Wn76
Pour consulter l'appel à l'action : https://mepacq.qc.ca/20-24fevrier/
Pour consulter la campagne de mobilisation 2022-2023 : https://mepacq.qc.ca/mob2022-2023/
Solidarité.
Gabrielle Renaud
Coordonnatrice à la vie associative et à l'éducation populaire autonome
Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec
6839 drolet, Bureau 305, Montréal, H2S 2T1
Téléphone : 514.843.3236 | Courriel : info@mepacq.qc.ca | Site Internet : www.mepacq.qc.ca
Voici l'appel à l'action : https://mepacq.qc.ca/20-24fevrier/
20 au 24 février 2023 – Appel à l'action
Inégalités et climat déréglé, c'est assez !
Communautaire dans la rue !
Semaine de grève, de fermetures et d'interruptions de service rotatives
À DIFFUSER LARGEMENT
Le milieu communautaire du Québec se prépare à une semaine de cinq jours de grèves et de fermetures rotatives du 20 au 24 février 2023. Cette mobilisation s'inscrit dans un contexte de crise autant social que climatique. Nous voulons du changement maintenant, pas dans 30 ans !
Communautaire dans la rue !
Le 23 septembre dernier, nous étions plus de 15 000 travailleuses et travailleurs, 130 000 étudiantes et étudiants en grève et 350 organismes communautaires en action aux quatre coins du Québec.
Fortes et forts de cette mobilisation, nous nous donnons un prochain rendez-vous d'une semaine qui débute le 20 février, journée internationale de la justice sociale.
La réélection d'un gouvernement majoritaire de la CAQ n'augure rien de bon pour nos droits sociaux et la lutte à la crise climatique. Nous devons augmenter les moyens de pression dans le but de bâtir un véritable rapport de force ! Une grève permet aux travailleurs et travailleuses, aux bénévoles ainsi qu'aux militantes et militants d'interrompre leurs activités habituelles afin de participer aux actions de mobilisation dans toutes les régions.
Les revendications
- Bannir les énergies fossiles d'ici 2030, autant en termes de production, de transformation, d'exportation que d'importation en s'assurant d'une transition juste et inclusive pour les communautés et les travailleuses et travailleurs
- Taxer massivement la richesse et réinvestir massivement dans le filet social, afin d'assurer des conditions de vie décentes pour toutes et tous.
Pour en savoir davantage sur les revendications, consultez le cahier de mobilisation 2022-2023
Monter la pression !
Les organismes sont appelés à fermer leurs portes et/ou mener des actions lors d'une journée régionale entre le 20 et le 24 février. L'idée est de monter le ton et se diriger vers des moyens d'action qui mettent davantage de pression.
Qu'est-ce qu'une semaine de grèves / fermeture rotatives
Les organismes dont leur journée d'action régionale est le lundi 20 février passeront le flambeau aux régions du mardi 21 février et ainsi de suite jusqu'au 24 février.
Pourquoi la grève / fermeture ?
La grève s'inscrit dans une escalade des moyens de pression dans le but de bâtir notre rapport de force face à l'État.
La grève c'est un moyen :
D'envoyer un message fort aux gouvernements
De se donner le temps de faire avancer nos luttes
De se solidariser entre nous et avec nos allié-e-s des autres mouvements sociaux
D'amorcer une réflexion collective sur la société que nous voulons construire
D'obtenir des gains
Comment participer à la mobilisation ?
Inscrire mon organisme à sa journée de grève et d'actions rotative régionale
Préparer la mobilisation dans vos groupes
En participant au rendez-vous virtuel le 29 novembre de 13h à 14h
En animant un moment d'échange avec vos membres, votre équipe ou votre C.A.
En allant chercher un mandat de grève / fermeture
Participer à votre journée d'action rotative
Voyez les détails dans le calendrier rotatif des actions
Exemple de résolution pour les conseils d'administration :
N'hésitez pas à l'adapter selon vos besoins et réalités.
Considérant
– Que nous sommes dans une crise des inégalités plus grande que jamais ;
– Que la crise climatique a des impacts grandissants sur nos droits sociaux, nos conditions de vie, notre santé, notre portefeuille, etc.
– Que les groupes communautaires sont en action pour la justice sociale et climatique depuis plusieurs années ;
– Que les gouvernements et les élites économiques ne se saisissent pas de l'urgence d'agir
– Qu'il revient aux mouvements sociaux et à la société civile de lutter pour nos droits sociaux et protéger le vivant
Que [NOM DE VOTRE ORGANISME]
⬜ Diffuse l'appel à l'action de la campagne Inégalités et climat déréglé, c'est assez ! du MÉPACQ dans son réseau et encourage ses membres à y participer ;
⬜ Participe à la semaine de grèves et de fermetures du 20 février
⬜ Soit en grève lors de la journée d'action régionale (voir le calendrier pour consulter la journée de votre région)
À noter : vous pouvez adapter votre mandat de grève selon vos réalités : fermer partiellement une partie de la journée, interrompre certains services ou activités (sans fermeture), offre alternative de services et activités (ex : dans l'espace public, atelier d'éducation populaire, distribution de tracts, etc.).

Hydrogène vert : Le retour des trusts de l’électricité

Lors de la présentation en Mauricie du projet de 4 milliards $ de TES Canada, le ministre fédéral de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, François-Philippe Champagne a déclaré, sourire aux lèvres, que le projet lui rappelait les « beaux jours » de la Shawinigan Water and Power, le trust de l'électricité, qui faisait la pluie et le beau temps dans sa région avant la nationalisation de l'électricité en 1962.
Il ne pouvait si bien dire.
15 novembre 2023 | tiré de l'Aut'journal
https://lautjournal.info/20231115/hydrogene-vert-le-retour-des-trusts-de-lelectricite
Le trust
Le projet TES Canada recrée en effet un fief dans la région de la Mauricie. L'entreprise veut produire de l'hydrogène à partir de l'électrolyse de l'eau, un procédé qui nécessite une grande quantité d'énergie.
Selon ses promoteurs, les deux tiers du courant nécessaire viendront de ses propres éoliennes et panneaux solaires. Hydro-Québec fournira l'autre tiers, soit 150 mégawatts. TES Canada envisage de construire de 140 éoliennes capables de produire 800 mégawatts (MW), combiné à un parc solaire de 200 MW. Le parc éolien sera implanté dans plusieurs municipalités et les éoliennes seront reliées à l'usine par un réseau de câblage souterrain privé. Le parc éolien couvrira une grande partie de la Mauricie, comme le trust de la Shawinigan Water and Power à l'époque.
Les deux tiers de l'hydrogène produit seront convertis en gaz naturel synthétique pour Énergir, qui alimentera par son réseau de gazoducs des entreprises réputées non « électrifiables » – c'est-à-dire impossible à décarboner avec l'énergie d'Hydro-Québec – comme les cimenteries et les aciéries.
Nous ne nous prononçons pas pour le moment sur la pertinence ou non du projet, mais bien sur son caractère privé, sur la résurgence d'un trust de l'électricité, comme l'est celui de l'Alcan au Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a échappé à l'époque à la nationalisation et qui détient toujours le privilège d'opérer des barrages hydroélectriques privés depuis longtemps amortis.
René Lévesque contre les trusts
L'annonce de TSE nous a amené à réécouter l'époustouflant plaidoyer de René Lévesque expliquant la nécessité et les bienfaits de la nationalisation de l'électricité en 1962. Son analyse est toujours aussi pertinente.
Reprenons quelques-uns de ses arguments contre les trusts de l'électricité et pour la nationalisation. Les tarifs de l'électricité diffèrent selon les régions ; les profits sont privés ; les dépenses des trusts sont privées ; le trust choisit ses clients parmi ses copains sans avoir à passer par des appels d'offres publics ; ils paient des impôts fédéraux, ce que ne fait pas Hydro-Québec ; la promotion des employés s'effectue dans le cadre restreint du trust plutôt que dans le grand ensemble d'une société d'État. Nous pouvons ajouter que rien ne garantit que ces emplois seront syndiqués. C'est tout le contraire de « Maîtres chez nous ».
Nous vous incitons fortement à visionner la vidéo de la présentation de René Lévesque, d'autant plus que nous constatons que le recours au privé annoncé par le tandem Legault-Fitzgibbon ne se limite pas à l'octroi de construction d'éoliennes reliées au réseau d'Hydro-Québec, mais à la constitution de trusts. Il pourrait en être ainsi pour la construction de barrages reliés à des entreprises industrielles ou minières. Pour visionner la vidéo, cliquez ici.
Power Corporation
TES Canada est une filiale de la firme belge Tree Energy Solutions, qui a des bureaux en Europe, aux États-Unis et aux Émirats arabes unis, et de FCD Inv. Inc. présidée par France Chrétien Desmarais, fille de l'ex-premier ministre Jean Chrétien et femme d'André Desmarais, président délégué du conseil de Power Corporation du Canada. Mme Chrétien Desmarais et l'entreprise européenne agiront à titre de bailleurs de fonds du projet.
D'après le Registre des entreprises, le plus haut dirigeant de TES Canada H2 est Éric Gauthier, un ex-dirigeant de la filière énergétique de Power Corporation, Power Sustainable Capital, un fonds d'infrastructure énergétique de 1,6 milliard de dollars.
Il est intéressant de signaler que l'implication de Power Corporation dans ce projet signifie un « retour aux sources » pour l'entreprise dans l'hydroélectricité. Power Corporation du Canada a été formé en 1925 en tant que holding pour gérer des investissements substantiels dans les entreprises d'utilité publique impliquées dans le secteur de l'énergie électrique dans les Cantons de l'Est ainsi qu'en Ontario, au Manitoba et en Colombie-Britannique.
Lors de la nationalisation de l'électricité en 1962, les dirigeants de Power Corporation ne se sont pas opposés au principe de la nationalisation. Le taux de profit du secteur de l'électricité était tombé entre 2% et 6% et le gouvernement offrait de payer 20% de plus que la valeur réelle des actions. L'entente fut conclue et l'argent encaissé a servi à édifier l'empire, dont s'est porté acquéreur Paul Desmarais en 1968.
La Presse
Paul Desmarais était déjà propriétaire de La Presse en 1967. L'histoire de Desmarais et de La Presse est riche en coups fourrés contre le mouvement indépendantiste québécois. Pour son rôle dans les années qui précédent le référendum de 1980, nous vous recommandons la lecture de ce chapitre de L'autre histoire de l'indépendance.
Il y a quelques années, la famille Desmarais a largué le journal La Presse. Mais son influence demeure. À preuve, l'article du chroniqueur Francis Vailles sur l'investissement de TES Canada dans le projet d'hydrogène vert intitulé « J'étais contre les projets d'hydrogène vert ».
Il était contre, il est maintenant pour. Il écrit : « J'étais contre, donc, mais je me suis prononcé pour à une condition : que les promoteurs de tels projets produisent eux-mêmes leur propre énergie verte. »
Autrement dit, j'étais contre, mais si c'est privé, je suis pour.
Voyons ses arguments. « D'abord, toute sa production sera destinée aux besoins locaux. Et l'entreprise alimentera son électrolyseur en produisant sa propre énergie renouvelable ». Besoins « locaux », vous dites ? Elle ne va pas vendre son hydrogène ?
Il ajoute : « Oui, d'accord, Hydro-Québec fournira 150 mégawatts, soit le tiers des besoins, mais les deux tiers du courant viendront des propres éoliennes et panneaux solaires de TES, ce qui apparaît comme un compromis acceptable. » Deux tiers privés, un tiers public, un compromis acceptable ?
Il poursuit : « Il l'est d'autant plus que l'entreprise utilisera son propre réseau de transport d'électricité, qu'elle veut enfouir sous terre. » Trois tiers privés, c'est encore mieux !
Que cela constitue une privatisation d'Hydro-Québec, le retour des trusts de l'électricité, la fin du « Maîtres chez nous », cela ne semble pas lui effleurer l'esprit.
Le Parti libéral du Canada
Le Parti libéral du Canada et la famille Desmarais sont liés par cent mille fibres depuis que le patriarche a organisé la campagne électorale de 1968 de Pierre Elliot Trudeau dans les bureaux de Power Corporation sur la rue Saint-Jacques à Montréal. Une alliance qui a atteint un sommet avec le mariage de la fille de Jean Chrétien avec le fils Desmarais.
Et le désengagement des Desmarais dans La Presse n'a pas empêché que l'histoire d'amour entre le Parti libéral et La Presse se poursuive.
Le gouvernement de Justin Trudeau a adopté une loi, qui octroie au journal le statut de donateur reconnu par l'Agence de revenu du Canada. Ce statut permet de délivrer des reçus à des fins fiscales à ses donateurs, quels qu'ils soient.
En fait, la possibilité de déduire dans la Déclaration de revenus annuelle les dons à La Presse équivaut à une subvention déguisée et, donc, à une certaine dépendance – voire une dépendance certaine – à l'endroit du gouvernement fédéral et, plus particulièrement à l'endroit du gouvernement Trudeau, d'autant plus que le chef du Parti conservateur, Pierre Poilièvre, a fait savoir qu'il abolirait cette loi.
Alors, bienvenue au retour des trusts et à leurs valets, comme les qualifiait René Lévesque dans son plaidoyer en faveur de la nationalisation de l'électricité et du « Maîtres chez nous ».
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Le plan Sabia : Le Dollarama de l’électricité
Chez Hydro-Québec, en 2-3 ans, on est passé de surplus confortables à un climat de panique. On nous dit depuis quelques mois qu'il faut augmenter de 50 % la production d'ici 2050.
Avec Michael Sabia, cependant, c'est le feu d'artifice. Dans le plan qu'il vient de déposer, il multiplie par deux la production, donc 200 TWh de plus. Attachez vos tuques ! On ne parle de rien de moins que d'ajouter l'équivalent de la production de 26 barrages de l'envergure de La Romaine, dont les travaux ont duré 14 ans.
Dilapider notre héritage pour justifier une surproduction
Pour arriver à ces chiffres, le gouvernement Legault a ouvert bien grande la porte aux industriels. Il a, par exemple, accordé 77 MW à 20 % de rabais à Nouveau Monde Graphite, comme à une centaine d'autres entreprises. À ce prix, il brade l'électricité. Les promoteurs peuvent bien se bousculer aux portes. C'est le Dollarama commencé par Sophie Brochu qui se poursuit de plus belle. Un peu gêné, François Legault a annoncé la fin de ce programme pour… 2032 et le début de cette suspension pour le 31 décembre… Ce qui donne presque deux mois à Fitzgibbon pour continuer à jouer au Père Noël avec ses p'tits copains industriels.
Après avoir dilapidé notre précieuse énergie à tout vent, la CAQ crie au manque d'électricité. Du même souffle, elle essaie du nous faire avaler une avalanche de projets de production. Encore ici, les p'tits copains gagnent au change. Fitzgibbon préfère le privé pour l'éolien. Même si Hydro-Québec peut produire de l'éolien à moindre coût, c'est le privé qui ramassera le gâteau. L'éolien va donc continuer à nous coûter beaucoup trop cher. Même si l'hydroélectricité est l'énergie la plus propre au Québec, construire de nouveaux barrages n'est pas sans impact sur les écosystèmes.
Nous avons déjà l'électricité pour une vraie transition énergétique
En étant ambitieux et exigeants sur les économies d'énergie, en annulant les deux contrats totalisant 20 TWh d'électricité vendue à perte aux États-Unis, en refusant des projets industriels trop polluants ou sans valeur ajoutée, en utilisant judicieusement la géothermie, nous avons toute l'énergie nécessaire pour assurer une vraie transition énergétique.
La première étape : se débarrasser du gaz naturel en le remplaçant par l'électricité pour la chauffe partout où la géothermie n'est pas une solution. Les technologies sont connues et très abordables.
La deuxième étape : réduire drastiquement notre consommation de pétrole. L'éléphant dans la pièce, c'est le transport en commun. On a bien compris que ce secteur n'est pas tout à fait la tasse de thé du gouvernement Legault. Son bras de fer avec les municipalités sur le dossier en dit long. Il devrait plutôt travailler avec elles pour améliorer l'offre de transport collectif, l'électrifier et rendre son utilisation gratuite. Et oui, gratuite. Nos routes sont bien gratuites pour les automobilistes.
Martine Ouellet
Cheffe Climat Québec
Ancienne ministre des Ressources naturelles
Ancienne gestionnaire chez Hydro-Québec
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Une nouvelle séquence de 7 jours de grève du côté du Front commun

Le Front commun CSN-CSQ-FTQ-APTS tiendra sept nouvelles journées de grève du 8 au 14 décembre. Les dirigeant.e.s syndicaux ont annoncé vouloir arriver à une entente de principe le plus rapidement possible avec le gouvernement. Il y a du mouvement aux tables sectorielles ainsi qu'à la table centrale en présence du conciliateur. En l'absence d'une entente de principe, d'ici la fin de l'année, la prochaine étape sera le déclenchement d'une grève générale illimitée en 2024.
La FIQ doit annoncer, le 29 novembre, une nouvelle séquence de grève.
Yvan Perrier
28 novembre 2023
11h20
Ajout
28 novembre 2023
16h30
Après le Front commun CSN-CSQ-FTQ-APTS, c'est au tour de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) d'annoncer que ses 80 000 membres infirmières, infirmières auxiliaires et autres professionnelles en soins seront en grève du 11 au 14 décembre.
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« Pour réfléchir aux solutions, il faut au moins ne pas se tromper sur les causes »

Historienne, ukrainienne et militante de gauche, Hanna Perekhoda est doctorante en sciences politiques à Lausanne depuis 2013. Entre l'Ukraine et la Suisse, elle observe pour nous le chassé-croisé des prises de positions des gauches européennes. Et le miroir tendu aux activistes d'Europe de l'Ouest n'est pas des plus flatteurs.
17 novembre 2023 | tiré du site Entre les lignes entre les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2023/11/17/hanna-perekhoda-sur-lukraine-pour-reflechir-aux-solutions-il-faut-au-moins-ne-pas-se-tromper-sur-les-causes
Pouvez-vous nous parler de la gauche ukrainienne ? Quelles sont ses principales composantes ?
Hanna Perekhoda : Avec tout le poids de l'héritage de l'époque soviétique, il n'est pas du tout évident de se déclarer de gauche ou pire encore, se dire socialiste, en Ukraine et en général dans l'espace post-soviétique. Le socialisme est une idéologie discréditée dans cette partie du monde, car associée à une politique génocidaire de l'époque stalinienne et, de manière générale, à l'oppression nationale et à la terreur politique.
L'héritage soviétique a aussi rendu très difficile toute forme d'auto-organisation des travailleurs ou de tout autre groupe social par le bas, parce que toutes les tentatives d'actions collectives ont été étouffées dans l'œuf pendant des dizaines d'années. Et puis sont arrivées les années 1990 et le capitalisme sauvage qui a achevé de définitivement transformer l'Ukraine en une espèce de terre brûlée en matière de défense collective des droits sociaux ou encore en termes de mobilisation collective, de capacité des classes populaires à s'auto-organiser pour défendre leurs droits, quelque chose qui a commencé à changer seulement en 2013, avec la révolution de Maïdan.
Les partis de gauche institutionnels sont actuellement inexistants en Ukraine, parce que le label du socialisme et du communisme a été utilisé par des ultras conservateurs nostalgiques de la grandeur impériale de l'URSS, par des forces pro-russes. Face à cette absence de la gauche dans la politique institutionnelle, il existe des initiatives intéressantes par le bas – féministes, écologistes – la « nouvelle gauche », comme on l'appelle, c'est-à-dire la gauche démocratique, antiautoritaire. Depuis le début de l'invasion russe en 2022, ces organisations-là ont un rôle important à jouer. Je dirais même qu'elles se sont renforcées. Toutes ces organisations participent à l'effort collectif de la résistance ukrainienne contre les forces de l'occupation : la résistance armée, mais aussi la résistance civile.
« Ce n'est pas parce qu'on lutte pour la victoire de l'Ukraine
qu'on s'aligne sur les politiques néolibérales du gouvernement »
Avec mon organisation, Sotsialnyi Rukh (Mouvement social), qui s'appuie sur les principes du socialisme démocratique, on s'oppose à des mesures néolibérales et antisociales du gouvernement. On fournit du soutien juridique sur la question du droit du travail aux salariés ukrainiens qui se battent pour leurs droits sociaux dans le contexte de la guerre, en lien avec les militants syndicaux. On essaie aussi de faire pression à l'international pour que l'Ukraine respecte ses engagements à l'égard des normes de droit de travail.
On incite nos allié·es dans le monde à faire pression, d'une part pour demander un soutien militaire, financier et diplomatique à l'Ukraine en tant que pays, pour qu'elle puisse se défendre, mais dans le même temps, nous refusons que ces aides soient soumises à des conditions à caractère néolibéral et antisocial. On mène aussi une campagne pour obtenir l'annulation de la dette extérieure de l'Ukraine. Bref, ce n'est pas parce qu'on lutte sans ambigüité pour la victoire de l'Ukraine dans cette guerre d'agression qu'on s'aligne sur les politiques néolibérales de notre propre gouvernement. Heureusement, en Ukraine, contrairement à la Russie, on a encore les moyens de mener ce type de campagne, même en temps de guerre.
Dans cette double position, constatez-vous des tensions à gauche ou plutôt une forme d'union sacrée ?
Hanna Perekhoda : Je pense que, dans les conditions de guerre, toute espèce de tension qui aurait pu exister avant s'est estompée. On a effectivement beaucoup plus de choses en commun dans cette situation avec les autres composantes de la gauche que de choses qui nous désunissent. Au sein de la gauche, les gens de différentes tendances – les anarchistes, les socialistes démocratiques, les militants antifascistes, tous sauf les stalinistes – se sont mis ensemble, même avant l'invasion, parce qu'un certain nombre de personnes étaient conscientes que la nouvelle agression militaire allait probablement avoir lieu.
Qui va aller à l'armée, qui va rester pour plutôt s'occuper de l'aide logistique, de l'aide humanitaire ? Les rôles étaient distribués à l'avance dans le cas où cet événement se produisait. On a bien sûr des désaccords entre nous, mais pour que le débat politique soit possible, il faut déjà faire en sorte que notre société soit vivante et qu'on ait des droits et des libertés de base, une chose impossible sous l'occupation de l'armée étrangère qui nie aux Ukrainiens non seulement le droit à une souveraineté politique, mais même le droit d'exister.
Le positionnement des pays de l'Union européenne ou des membres de l'OTAN est souvent débattu. Qu'en est-il en Suisse où vous résidez ? Êtes-vous confrontée à des réticences au sein de la gauche dans ce conflit ? Quelle part est attribuable à la tradition suisse de neutralité ?
Hanna Perekhoda : La place de la Suisse dans ce conflit est particulière. C'est tout d'abord la principale plateforme de négociation sur les matières premières, et surtout les combustibles fossiles, dont l'extraction et la vente non seulement détruisent la planète comme on le sait, mais renforcent aussi les régimes autoritaires et dans ce cas précis, le régime de Poutine. La Suisse, c'est également, grâce à son secret bancaire, le coffre-fort de tous ceux qui gagnent de l'argent grâce au pillage et à l'exploitation illégale des ressources, que ce soit dans leur propre pays ou ailleurs. Les proches de Poutine y mettent leurs richesses et leurs familles à l'abri du regard. Il y a entre 150 et 200 milliards de dépôts des oligarques russes proches de Poutine dans les banques suisses et la Suisse n'en a bloqué qu'une infime partie. En outre, de nombreuses entreprises suisses contournent les sanctions et continuent de vendre à la Russie des composants à double usage, comme des puces électroniques, qui peuvent servir à construire des armes.
La position du comité qu'on a fondé en Suisse est de faire en sorte que la Suisse cesse d'être un abri confortable pour le business, les richesses et les familles de ceux qui mènent des guerres, de ceux qui exploitent des populations, qui usent de politiques répressives et qui détruisent la planète. À droite de l'échiquier politique, on ne souhaite pas en parler, car cela demande de remettre en question le système tout entier qui permet à la Suisse de rester aussi riche et « neutre ». Neutre d'ailleurs n'est pas le bon mot pour moi. Je dirais plutôt qui permet à la Suisse de rester aussi économiquement cynique dans sa politique internationale.
La gauche est également réticente à parler sérieusement de ces questions-là. Les gens aiment parler de la géopolitique. Par contre, ce qu'ils aiment un peu moins, c'est se demander d'où provient la richesse de la Suisse, dont la gauche locale profite aussi. Et surtout, quel est le prix de cette richesse ? Pour nous, ces questions doivent apparaitre dans le débat public. On doit se les poser, même si elles sont inconfortables.
En termes de soutien et de solidarité, quelles demandes la gauche ukrainienne adresse-t-elle au reste de la gauche européenne ?
Hanna Perekhoda : Je pense que la demande numéro un est d'être solidaires avec tous les opprimé·es et contre tous les oppresseurs, et surtout de ne pas confondre les deux. Une fois qu'on est au clair par rapport à cela, il serait bien de faire en sorte que les voix des organisations, des initiatives, des personnalités progressistes, Ukrainiennes et Russes, soient entendues.
« Sotsialnyi Rukh et le Mouvement socialiste russe ont publié
un manifeste commun, mais leur avis compte moins que
les experts en géopolitique qui n'ont jamais mis le pied en Ukraine »
La revendication que nous partageons, tant la gauche ukrainienne que la gauche antiautoritaire en Russie, c'est la défaite du régime de Poutine. D'une part, ce régime massacre des Ukrainien·nes et d'autre part, il envoie des centaines de milliers de Russes, comme de la chair à canon, dans une guerre que ceux-ci n'ont aucune raison de mener. Si l'on est solidaire avec notre classe et non pas avec les grandes puissances revanchistes qui se présentent comme « humiliées », on a tout intérêt à soutenir les Ukrainiens qui se défendent contre l'agression impérialiste, ainsi que les Russes qui refusent d'aller dans un pays étranger pour tuer. Il y a plusieurs organisations en Russie qui le comprennent, mais ce qui nous étonne, c'est que de nombreuses organisations en Europe semblent ne pas le comprendre… Sotsialnyi Rukh et le Mouvement socialiste russe ont même publié un manifeste commun tout au début de l'invasion, mais visiblement les avis des socialistes ukrainiens et russes comptent moins que celui des experts en géopolitique qui n'ont jamais mis le pied en Ukraine ou en Russie.
Quels obstacles la gauche ukrainienne rencontre-t-elle dans la construction de ces liens de solidarité ?
Hanna Perekhoda : On a pu constater que plusieurs organisations ou figures de gauche, qui sont par ailleurs respectées pour leurs positions fortes contre l'impérialisme américain, ont manifesté une complicité étonnante avec leurs adversaires de droite sur le sujet de l'invasion de l'Ukraine. On retrouve souvent chez eux une ignorance, voire un déni complet de l'expérience historique de nombre de pays qui ont subi l'oppression du régime russe impérial et puis soviétique. Je pense qu'il y a une forte composante psychologique qui entre en jeu. Nous sommes face à un égocentrisme méthodologique. Il est plus facile de croire que l'Occident et plus particulièrement les États-Unis serait derrière toutes les guerres sur la planète que de supposer que les pays non-occidentaux peuvent agir par eux-mêmes. D'après cette logique, même l'État russe est dépourvu de sa capacité d'action propre et ne peut qu'agir qu'en réponse aux actions de l'Occident omnipotent. C'est lui le seul vrai acteur de l'histoire, qu'il soit méchant ou gentil. Ainsi, les critiques les plus virulents de l'impérialisme occidental n'échappent pas à l'occidentalocentrisme, mais en sont une expression paradoxale.
« Nous sommes face à un égocentrisme méthodologique :
il est plus facile de croire que l'Occident
serait derrière toutes les guerres,
que de supposer que les pays non-occidentaux
peuvent agir par eux-mêmes »
Certes, il faut s'opposer à l'impérialisme des États-Unis et à l'hégémonie occidentale, qui est de moins en moins une hégémonie d'ailleurs. Mais ne restons pas dans cette logique binaire d'opposition entre l'Occident et le reste du monde, qui ne serait composé que des opprimés. Dans cette logique, on se retrouve, parfois sans le comprendre, à soutenir les classes dirigeantes des pays qui se prétendent opprimés par les États-Unis, mais qui, en réalité, cherchent à redistribuer les sphères de domination exclusive.
Concrètement, la gauche occidentale se retrouve souvent à justifier les actions des classes dirigeantes chinoises, russes ou iraniennes sous prétexte qu'elles sont dirigées contre les États-Unis. Cette approche stratocentrée est intrinsèquement incompatible avec les valeurs politiques de gauche, car il rend invisibles les classes populaires de ces pays. Certains militants de gauche en Europe, trop occupés à contester l'hégémonie américaine, se sentent, visiblement, plus proches de Poutine, de Xi ou de Raïssi que de travailleurs et travailleuses qui résistent à ces dictateurs et se battent pour la liberté et la dignité, souvent au prix de leur vie. Si on réfléchit en termes de solidarité de classe et non pas en termes d'intérêts d'État, comment alors ne pas être solidaires avec celles et ceux qui luttent pour leur liberté, que ce soit contre l'impérialisme des États-Unis ou contre celui de la Chine ou de la Russie ?
Saluer la montée en puissance des impérialismes non-occidentaux, parce qu'ils présentent une soi-disant alternative « multipolaire » à l'hégémonie occidentale serait avant tout irresponsable vis-à-vis de ceux et celles qui vont réellement vivre les conséquences de ce monde « multipolaire », dont l'émergence passe par les guerres et le renforcement des dictatures. Je veux dire que ces personnes qui vivent tranquillement dans les pays riches et protégés par la coupole de l'OTAN ne subissent pas les conséquences de ce qu'elles défendent comme étant le « monde multipolaire ». Mais ce sont les Ukrainiens, les Syriens, les Kurdes, les Ouïgours qui paient déjà le prix de cette « multipolarité ».
« Ni les Ukrainiens ni les Palestiniens
ne sont perçus comme des sujets agissants,
mais seulement comme des objets de fantasmes et de projections »
J'ai l'impression que ce qui compte le plus pour les militants ici, ce n'est pas tant la solidarité avec les sociétés qui luttent contre l'oppression, mais l'envie d'être à contre-courant du « mainstream ». Et souvent, la seule raison pour laquelle ils soutiennent, par exemple, la lutte des Palestiniens et pas celle des Ukrainiens, c'est que la lutte palestinienne leur permet d'affirmer leur identité anti-mainstream aux yeux des membres de leur groupe d'appartenance. En réalité, ni les Ukrainiens ni les Palestiniens ne sont perçus comme des sujets agissants, comme des êtres humains en chair et en os, mais seulement comme des objets de fantasmes et de projections. Pour favoriser la solidarité réelle, tangible, avec les gens qui se battent contre l'oppression, la gauche va devoir sortir de cette bulle identitaire.
Il existe aussi des concepts comme l'internationalisme et le pacifisme, qui sont au cœur de l'héritage de la gauche, et qu'on entend beaucoup dans les débats sur l'invasion russe. Ils sont utilisés pour défendre aussi bien une position que l'inverse. Selon vous, pourquoi ces notions ne permettent-elles pas de se rassembler aujourd'hui ?
Hanna Perekhoda : L'internationalisme, la solidarité par-dessus les frontières, la solidarité de classe, sont effectivement au cœur de l'héritage de la gauche. Mais je ne suis pas du tout sûre que le pacifisme en fasse partie. Dans l'histoire, les gens se sont battus pour leurs droits et pour leurs libertés. Dans la plupart des cas, cela passait par le fait de prendre les armes. Cela ne s'est pas fait avec des fleurs. Je ne pense pas non plus que le pacifisme est pertinent pour les Ukrainiens. Par contre, pour les Russes il l'est, et nous menons d'ailleurs des campagnes en faveur des pacifistes russes pour faire entendre leur voix.
« Dans l'histoire, les gens se sont battus pour leurs droits et leurs libertés.
Dans la plupart des cas, cela ne s'est pas fait avec des fleurs »
En justifiant l'invasion, Poutine l'a dit explicitement : l'Ukraine indépendante est une erreur de l'histoire, elle n'a pas de droit d'exister en tant que société et en tant que pays. Dans ce contexte-là, si vous refusez à votre voisin qui se trouve face à un danger de mort le droit de se défendre sous le prétexte du pacifisme, soit cela vous plait de vivre dans un monde où le droit du plus fort l'emporte sur tout le reste, et c'est le cas de pacifistes très célèbres comme Viktor Orban, Donald Trump, ou Jaïr Bolsonaro (qui ont intérêt à ce que les moyens d'action de Poutine se normalisent), soit vous avez peur et vous espérez que l'agresseur va se contenter de tuer seulement votre voisin, et pas vous. Ce qui m'étonne le plus, c'est que nous avons déjà des précédents assez sombres dans l'histoire européenne qui auraient dû nous apprendre qu'on n'a jamais réussi à éloigner la guerre en espérant que l'agresseur qui a tué son voisin allait s'arrêter à notre porte.
Face à des forces obscurantistes, fascistes, ultra-conservatrices, autoritaires, il faut agir. On a l'impression que des concepts comme la paix ou la démocratie sont tombés du ciel. Non, ce sont les acquis d'une lutte sociale, c'est aussi un résultat de notre victoire dans une guerre contre le fascisme en 1945. Poutine est en train de compter sur notre paresse morale et sur notre mémoire courte en Europe occidentale. Il ne faut pas oublier les leçons des années 1930, où on retrouve d'ailleurs les mêmes divergences au sein de la gauche européenne. Il y avait aussi des organisations pour qui c'est l'impérialisme britannique qui était l'ennemi numéro un en 1939 et qui espéraient que la montée en puissance de l'Allemagne nazie va créer un système international plus équilibré.
Pour rebondir sur vos propos sur le pacifisme, l'un des arguments à gauche est justement lié au soutien armé à la résistance ukrainienne. Une partie de la gauche européenne s'inquiète de ce soutien, en particulier le soutien militaire et logistique, qui pourrait nourrir des composantes nationalistes de droite, voire d'extrême droite, violentes et revanchardes, dans le pire des cas. Dans le meilleur des cas, ce soutien pourrait aider un régime que vous avez vous-même décrit comme néolibéral, très peu soucieux des droits sociaux et civils. Que répondez-vous à ce type d'argument qui met en avant les conséquences indirectes d'un soutien à la résistance ukrainienne ?
Hanna Perekhoda : Il est peut-être utile de rappeler que Zelenski est un juif russophone, qui ne parlait même pas l'ukrainien avant d'être démocratiquement élu président. Contrairement aux anciens présidents, Zelenski a mis l'accent sur l'unité entre les différentes régions de l'Ukraine, entre les russophones et les locuteurs de l'ukrainien, allant à l'encontre du discours ethnonationaliste. Et pourtant, plus de 70% de la population ukrainienne a voté pour lui. Étrange pour un pays qu'on présente comme nationaliste de droite, n'est-ce pas ? L'extrême droite, malgré le fait d'une coalition électorale, n'a pas pu obtenir plus de 2% lors des dernières élections parlementaires. Ai-je besoin de rappeler le score des candidats d'extrême droite dans de nombreux pays européens ?
« L'extrême droite n'a pas pu obtenir plus de 2%
aux dernières élections parlementaires en Ukraine.
Ai-je besoin de rappeler son score dans de nombreux pays européens ? »
L'Ukraine est une société complexe, comme toutes les autres sociétés. Oui, l'extrême droite existe en Ukraine, comme dans tous les pays, mais malgré sa présence dans la société, dans la culture, dans les médias, elle n'a pas pu devenir un sujet politique légitime. L'extrême droite violente et revancharde, comme vous le dites, est effectivement au pouvoir, mais pas en Ukraine, elle est au pouvoir en Russie. On est passé d'une espèce de forme d'autoritarisme néolibéral à une forme de dictature fascisante. Et quand je parle du fascisme, ce n'est pas une injure. Le fascisme est une forme très concrète de régime politique. Pour résoudre sa propre crise et les défis qui surgissent à l'intérieur du pays, le régime autoritaire russe introduisait des mesures de plus en plus radicales, jusqu'à devenir prêt à envahir le pays indépendant et à menacer le monde avec une arme nucléaire.
Il est important pour moi que l'on ne se trompe pas de cible et qu'on n'exagère pas la présence des forces obscurantistes en Ukraine, tout en fermant les yeux sur le fait qu'en Russie, l'extrême droite est au pouvoir et mène une guerre d'agression en avançant un discours qu'on peut qualifier d'incitation au génocide.
« Il est important pour moi que l'on ne se trompe pas de cible
et qu'on n'exagère pas la présence des forces obscurantistes en Ukraine,
tout en fermant les yeux sur le fait qu'en Russie,
l'extrême droite est au pouvoir »
Dans le monde idéal, il n'y aurait pas de guerre, et pas de choix à faire. Nous sommes cependant face à ce choix aujourd'hui. Soit on soutient la victime, soit on s'abstient et on donne à l'agresseur la possibilité de continuer à tuer. Il est important de noter que cela dépasse la seule Ukraine : les régimes qui ressemblent à celui de Poutine vont devenir la normalité, si Poutine obtient ce qu'il veut. Cela serait un signal à tous les agresseurs dans le monde, qu'il est désormais légitime et acceptable de régler des questions de légitimité politique interne par des guerres d'agression. Si nous n'agissons pas, nous allons nous réveiller dans un monde où tous les pays qui se considèrent comme de grandes puissances vont essayer de redistribuer les zones d'influence, autrement dit, on se réveillera dans un monde de guerres généralisées et totales.
« Des militants vont dire « vous n'êtes pas assez de gauche, je ne veux pas vous soutenir » à des personnes qui luttent armes à la main pour défendre les droits fondamentaux et la souveraineté politique. C'est une posture très arrogante »
Hanna Perekhoda Pour ce qui est des inquiétudes autour du soutien à l'Ukraine, cela m'a fait penser aux propos de Lénine lors de la révolution irlandaise de 1916. Beaucoup de personnes à gauche ne la soutenaient pas, en disant qu'il s'agissait d'un putsch et que les socialistes n'ont rien à gagner de soutenir les nationalistes irlandais. Lénine a répondu que quiconque attend une révolution sociale pure ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. C'est un peu cela qui se passe aujourd'hui : des militants de gauche vont dire « Vous n'êtes pas assez de gauche pour moi, je ne veux pas vous soutenir » à des personnes qui luttent armes à la main pour défendre les droits fondamentaux et la souveraineté politique que nous prenons ici pour acquis. C'est une posture très arrogante.
Pour conclure, pourquoi ces deux lectures de la guerre en Ukraine à gauche, celle d'un affrontement entre deux blocs géopolitiques, dans lequel l'OTAN aurait une part de responsabilité, et celle d'un conflit déterminé par des facteurs internes au régime russe, sont-elles nécessairement contradictoires ? Ne pourraient-elles pas être toutes deux vraies en même temps ?
Hanna Perekhoda : En théorie, on pourrait ne pas vouloir privilégier une lecture au détriment de l'autre. En pratique, j'ai remarqué qu'une fois qu'on postule que l'OTAN a une grande part de responsabilité dans le déclenchement de la guerre, on pose un mauvais fondement à son raisonnement et donc à l'édifice de sa pensée dans son ensemble. Il y a cette idée que l'OTAN a empiété sur la zone d'influence russe et que la Russie ne fait que réagir à cette menace occidentale. Cette interprétation débouche sur une conclusion aux implications politiques importantes : si la Russie a déclenché la guerre parce que l'Occident aurait empiété sur sa zone d'influence légitime, cela signifie que la guerre aurait pu être évitée ou même qu'elle peut prendre fin si les revendications de la Russie étaient satisfaites.
Tout d'abord, ce raisonnement nous dit ouvertement que si votre pays n'est pas une « grande puissance » comme la Russie, les États-Unis ou la Chine, vous n'avez aucun droit à la souveraineté et vous êtes à jamais condamné à être une colonie. Mais même si l'on met de côté toutes les questions morales et éthiques et que nous admettons que la clé de la paix dans le monde est d'accepter qu'il soit divisé en plusieurs zones d'influence exclusives (oublions même que ce type d'architecture mondiale a déjà conduit à deux guerres mondiales), plusieurs questions se posent néanmoins.
Imaginons que, dans la poursuite de l'objectif noble de vouloir arrêter la guerre, nous partitionnons l'Ukraine et « garantissions » à la Russie que ce qui resterait de ce pays ne pourrait jamais rejoindre les alliances militaires, politiques et économiques occidentales. Qu'est-ce qui nous fait penser que cela va calmer Poutine ? Je vous rappelle que, dans son ultimatum à l'Occident fait en décembre 2021, il a réclamé toute l'Europe de l'Est. La zone d'influence russe imaginée par Poutine ne s'arrête pas en Ukraine et en vérité personne ne sait où elle s'arrête. La réponse la plus probable, c'est qu'elle ne s'arrête nulle part, car tout pays démocratique à ses frontières est une menace pour la Russie, non pas pour la sécurité de la population russe, mais pour la sécurité du régime autoritaire.
Quand on attribue les causes de la guerre à un affrontement entre deux blocs, notre hypothèse sous-jacente est que l'OTAN constitue une menace objective pour la sécurité de la Russie. Et c'est là qu'on se trompe, car on prend le discours de Poutine pour argent comptant.
Un petit rappel : la Finlande a rejoint l'OTAN cette année. En même temps, le ministre finlandais des Affaires étrangères affirme qu'aucune troupe russe supplémentaire n'a été déplacée à la frontière commune depuis que la Finlande a rejoint l'alliance. Si l'OTAN était la menace objective pour la Russie, pourquoi n'y a-t-il pas de troupes, ni même de propagande officielle présentant la Finlande comme une menace ? Visiblement, l'adhésion à l'OTAN de ce pays qui possède une frontière de 1 340 km avec la Russie n'est pas un problème pour Poutine. En revanche, l'Ukraine, qui n'a jamais été officiellement candidate à l'OTAN, est présentée comme une menace imminente pour l'existence même de la Russie. Alors peut-être que ce n'est pas l'OTAN qui menace Poutine, mais quelque chose d'autre ?
On a tendance à l'oublier, mais Poutine n'a pas toujours été anti-occidental. C'est seulement en 2011, qu'il a commencé à dire que la Russie était en danger et que ce danger émanait de l'Ouest. Que s'est-il passé en 2011 ? S'agit-il d'une année où un pays occidental s'est montré particulièrement agressif à l'égard de la Russie ? Pas du tout. La seule chose qui s'est produite cette année-là, c'est que les Russes ordinaires sont descendus dans la rue pour protester contre Poutine, qui violait la constitution pour se faire élire une troisième fois. La crainte des élites de perdre le pouvoir a généré un discours qui présentait la Russie comme une forteresse assiégée, entourée par des ennemis, et Poutine comme le seul leader capable de protéger la Russie de ce danger existentiel. « Sans Poutine, pas de Russie », disait Viatcheslav Volodine, un des leaders du parti poutinien.
À mon avis, cette guerre n'est pas une réponse à une menace objective pour la société russe, ni à la menace extérieure qui résulterait des tensions entre les blocs. Cette guerre est une réponse à une menace subjective à l'encontre de la mafia russe qui s'est emparée de l'appareil d'État et qui ne veut pas lâcher le moindre bout de son pouvoir. Ce n'est donc pas la Russie qui est en danger, mais son régime politique et cette menace résulte des tensions entre les intérêts de classes à l'intérieur de l'État russe lui-même. Il n'est pas facile de préserver le pouvoir à l'intérieur d'un pays où 1% de la population possède 75% de la richesse totale. C'est pourquoi le régime fait tout pour étouffer les tendances démocratiques dans le voisinage, et surtout en Ukraine. L'Ukraine est un pays avec lequel les Russes ordinaires ont la plus grande proximité culturelle. Si elle parvient à construire un État démocratique et prospère, elle risque d'éveiller des idées dangereuses chez les Russes. Ils pourraient en effet se poser la question : si les Ukrainiens n'ont pas besoin d'un État autoritaire et répressif pour vivre normalement, pourquoi nous, les Russes, en avons-nous besoin ?
Et finalement, il faut admettre que l'OTAN n'est pas à l'initiative en Europe de l'Est : ce sont les pays eux-mêmes qui veulent désespérément rejoindre l'alliance, et qui exercent une pression pour le faire. Pourquoi ? Parce que l'impérialisme russe, pour eux, est une menace bien réelle. Et surtout, ils le font parce qu'on est incapable de proposer à ces États d'autres garanties de sécurité que l'adhésion à l'OTAN. Pour rappel, l'Ukraine a le Mémorandum de Budapest en 1994, en vertu duquel elle donne tout son ancien arsenal d'armes nucléaires, le troisième plus grand au monde, contre une garantie que la Russie respecte sa souveraineté et ses frontières. Quand la Russie a violé cet accord et le monde s'est tu, tous les pays de l'espace post-soviétique ont pris conscience que tous ces papiers ne valent rien, et que l'article 5 du traité de l'OTAN, qui prévoit une assistance mutuelle des États membres en cas d'agression, est la seule manière valable de se protéger. Tant que l'ONU est en état de mort cérébrale et que la communauté internationale est incapable de proposer des mécanismes de sécurité alternatifs, c'est cynique d'appeler au démantèlement des alliances militaires.
Pour réfléchir aux solutions possibles à cette guerre, il faut au moins ne pas se tromper sur ses causes. Je ne crois pas que le raisonnement géopolitique est adéquat pour comprendre cette guerre, et encore moins pour proposer des voies de sortie.
Entretien avec Arthur Borriello le 9 mai 2023. Retranscription par Camille Wernaers.
https://www.revuepolitique.be/hanna-perekhoda-sur-lukraine-pour-reflechir-aux-solutions-il-faut-au-moins-ne-pas-se-tromper-sur-les-causes/
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article68578
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Après un an de guerre, quel soutien à la lutte du peuple ukrainien contre l’invasion ?

Voici un dossier qui veut présenter les débats qui traversent le mouvement de solidarité avec l'Ukraine. L'évolution de la situation a permis de clarifier une série de questions. Le cessez-le-feu, la fin des destructions, la demande du retrait des troupes du régime de Poutine et l'accueil des réfugié-e-s sont des exigences centrales du mouvement de solidarité avec le peuple ukrainien.
Les débats se concentrent maintenant sur ces différents points :
- les fondements du déclenchement de la guerre par le régime de Poutine ;
- le soutien effectif à la résistance ukrainienne contre l'envahisseur russe ;
- le soutien ou la défense d'une position pacifiste qui, tout en dénonçant l'invasion, avance le mot d'ordre : pas de paix en ajoutant la guerre à la guerre. Il faut mobiliser pour exiger la négociation de la paix ;
- l'importance ou non de la livraison des armes à l'Ukraine pour assurer sa défense ;
- l'importance de se mobiliser également contre le cours militariste de l'impérialisme et l'accent à mettre sur ce point ;
- les réactions différenciées des pays occidentaux de celles des pays du Sud global ;
- les désaccords entre la gauche des pays de l'Est, y compris de la Russie, et celle des pays occidentaux ;
- la guerre de l'information en temps de guerre et ses dangers
- ...
Presse-toi à gauche ! veut continuer à se faire l'écho de ces débats. Nous publierons dans les semaines qui viennent des textes faisant des bilans sur l'année de guerre écoulée.
Envoyez vos contributions à
redaction@pressegauche.org

Israël : Netanyahu le savait. Netanyahou l’a ignoré. Netanyahou est responsable

Benjamin Netanyahu a reçu des informations de l'armée israélienne concernant la possibilité d'une attaque du Hamas. Il est responsable et également coupable de ce qui s'est passé, Samedi 7 Octobre 2023. Il a failli à son devoir le plus important, assurer la sécurité des israéliens.
Tiré d'Europe solidaire sans frontière.
Le premier ministre Benjamin Netanyahu a reçu des informations de la direction du renseignement militaire de l'armée israélienne concernant la possibilité d'une attaque du Hamas. Il s'agit du même organisme de renseignement au sujet duquel Benjamin Netanyahu a écrit, Dimanche 29 Octobre 2023 à 1 heure 10 du matin, que « le premier ministre Benjamin Netanyahu n'a été averti en aucune circonstance et à aucun moment de l'intention du Hamas d'entrer en guerre ».
La prédilection de Benjamin Netanyahu à déformer la vérité ne surprend personne, mais Chaim Levinson de Haaretz a rapporté que le chef de la branche de recherche du renseignement militaire avait personnellement envoyé un avertissement à Benjamin Netanyahu selon lequel « une opportunité a été identifiée pour une tempête parfaite, une crise interne et une large escalade de la violence, un défi dans l'arène palestinienne et un défi venant d'autres arènes, qui conduirait à des pressions multidimensionnelles et continues. Le général Amit Saar a souligné que « cette analyse n'est pas une interprétation de la réalité, mais elle est basée sur une évaluation de la situation par les leaders et par le personnel des renseignements et des communications ».
Benjamin Netanyahu a choisi d'ignorer cette évaluation professionnelle désastreuse et, peu de temps après, il a choisi d'aggraver la situation. Quelques jours seulement après avoir reçu la lettre, le premier ministre a choisi de limoger le ministre de la défense Yoav Gallant après que ce dernier l'ait également mis en garde contre exactement le même danger. Ce n'est que parce que le public s'est massivement manifesté contre cet acte absurde, fondé sur des considérations fondamentalement erronées, que Benjamin Netanyahu a décidé de maintenir Yoav Gallant à son poste.
Le général Amit Saar ne s'est pas arrêté à la seule lettre qu'il a envoyée à Benjamin Netanyahu au mois de mars 2023, mais il a écrit une deuxième lettre au mois de juillet 2023. Cette deuxième lettre commence par un avertissement selon lequel « l'aggravation de la crise a aggravé l'érosion de l'image d'Israël, elle a encore fragilisé la dissuasion israélienne et elle augmente la probabilité d'une escalade. Du point de vue de l'ennemi, Israël se trouve dans l'un des points les plus faibles depuis sa création et des choses significatives sont dites dans des forums fermés et professionnels des forces de sécurité en Iran, au Liban et à Gaza ». Cette lettre n'a également fait aucune impression sur Benjamin Netanyahu, qui a continué à insister sur la poursuite de la refonte judiciaire.
La réponse du bureau du premier ministre à ces deux lettres reflète le type de manipulation et de mensonges qui caractérisent la direction de l'Etat par Benjamin Netanyahu, « contrairement à ce qui a été rapporté, le premier ministre Benjamin Netanyahu n'a jamais été averti d'une guerre ». Au contraire, le premier ministre a reçu des avertissements précis sur ce qui est tragiquement devenu réalité quelques mois plus tard.
Benjamin Netanyahu est responsable et il est également coupable de ce qui s'est passé, samedi 7 Octobre 2023. Il a failli à son devoir le plus important, qui est d'assurer la sécurité des israéliens. A la fin de la guerre, il devra faire face à une commission d'enquête étatique et il devra s'expliquer sur ses échecs. Cependant, ce que nous savons jusqu'à présent suffit déjà à justifier son éviction de ses fonctions et à l'empêcher de continuer à superviser une guerre qui est en grande partie la conséquence de son incompétence.
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