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Gaza-Rafah. « Une horreur indescriptible ». Mais l’aide militaire à Israël continue

Nous publions ci-dessous une traduction française de la déclaration de Martin Griffiths, secrétaire général adjoint aux Affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence à l'ONU (OCHA), faite le 13 février à propos de l'opération militaire israélienne à Rafah.
Tiré de A l'Encontre
14 février 2024
Par la rédaction de A l'Encontre
Ibrahim Hasouna, seul survivant de sa famille, se tient au milieu des débris de sa maison bombardée à Rafah le 12 février. Il a perdu huit membres de sa famille, dont trois enfants.
En forme d'introduction, il nous semble utile – en fait indispensable – de citer un article de Baudouin Loos du grand quotidien belge Le Soir du 13 février. Ce dernier, à propos de la mise en garde, plus que justifiée, de Martin Griffiths, pose une question essentielle : « Et que fait le monde ? Il exprime son « inquiétude » ! Prévient qu'une telle offensive entraînerait « une catastrophe humanitaire indescriptible », comme l'a dit l'Européen Josep Borrell. Estime qu'il y a « beaucoup d'innocents qui meurent de faim, beaucoup d'innocents qui sont en difficulté, et il faut que cela cesse », selon les mots de Joe Biden himself [voir sur ce site l'article ayant trait au soutien militaire renouvelé, appuyé par les démocrates du Sénat, au gouvernement Netanyahou] Les leviers existent : cesser de livrer des munitions à l'Etat hébreu, comme le suggère le même Josep Borrell. Comme l'écrit dans une tribune publiée par le journal Haaretz l'intellectuel palestinien israélien Odeh Bisharat, “pendant qu'ils émettent des avertissements et versent des larmes de crocodile, ces mêmes dirigeants continuent de fournir à Israël des armes, de l'argent et un soutien diplomatique”. » (Réd. A l'Encontre )
***
Martin Griffiths, 13 février 2024
« Le scénario que nous redoutons depuis longtemps se déroule à une vitesse alarmante.
Plus de la moitié de la population de Gaza – bien plus d'un million de personnes – est entassée à Rafah, regardant la mort en face : ils n'ont pas grand-chose à manger, n'ont pratiquement pas accès aux soins médicaux, n'ont nulle part où dormir, nulle part où aller en toute sécurité [1].
Comme l'ensemble de la population de Gaza, ils sont victimes d'une offensive d'une intensité, d'une brutalité et d'une ampleur inégalées.
Selon le ministère de la Santé, plus de 28 000 personnes – principalement des femmes et des enfants – ont été tuées dans la bande de Gaza.
Pendant plus de quatre mois, les travailleurs humanitaires ont fait l'impossible pour aider les personnes dans le besoin, malgré les risques qu'ils encouraient et les traumatismes qu'ils subissaient.
Mais le dévouement et la bonne volonté ne suffisent pas à maintenir des millions de personnes en vie, à les nourrir et à les protéger, alors que les bombes tombent et que l'aide humanitaire est étouffée.
A cela s'ajoutent le désespoir généralisé, l'effondrement de l'ordre public et la suppression du financement de l'UNRWA [2].
Les conséquences sont que les travailleurs humanitaires sont la cible de tirs, de menaces, d'attaques et de meurtres [3]. Cela fait des semaines que je dis que notre réponse humanitaire est en lambeaux.
Aujourd'hui, je tire à nouveau la sonnette d'alarme : les opérations militaires à Rafah pourraient conduire à un massacre à Gaza [4]. Elles pourraient aussi laisser une opération humanitaire déjà fragile à l'article de la mort. Nous ne disposons pas des garanties de sécurité, de l'aide et du personnel nécessaires pour maintenir cette opération à flot.
La communauté internationale a mis en garde contre les conséquences dangereuses d'une invasion terrestre à Rafah. Le gouvernement israélien ne peut pas continuer à ignorer ces appels.
L'histoire ne sera pas tendre. Cette guerre doit cesser. »
[1] L'annonce du « massacre » en voie de « réalisation » à Rafah fait parfois oublier la trajectoire de centaines de milliers de Gazaouis depuis octobre 2023. Tareq S. Hajjaj, sur le site Mondoweiss, le 13 février, rapporte les paroles d'Ibrahim Barda', père de six enfants qui a fui la ville de Gaza avec sa famille, s'est réfugié à l'hôpital européen situé entre Khan Younès et Rafah : « J'ai passé toute la guerre à me déplacer d'un endroit à l'autre. J'ai monté ma tente pour la démonter peu de temps après, laissant mes enfants nus dans le froid jusqu'à ce que nous trouvions un nouvel endroit où nous abriter. J'ai écouté tous les ordres de l'armée israélienne, et nous nous dirigions toujours vers la dernière “zone de sécurité” désignée par l'armée. Et maintenant, nous sommes près de Rafah [à Khan Younès], et si l'armée nous ordonne d'aller au sud, à Rafah et qu'elle nous envahit, je ne sais pas où nous pourrons aller ensuite. Il n'y a plus d'endroit où aller à Gaza. La seule option que nous ayons est de continuer à être encerclé par la mort. » (Réd.)
[2] Nous reviendrons sur l'opération politique du gouvernement israélien, qui n'est pas nouvelle, de frapper l'UNRWA. Le 30 janvier 2024, Le Monde consacrait un premier article à cette question, soulignant : « L'extrême droite rêve de faire fermer l'UNRWA. Or ses arguments ont acquis un droit de cité inédit en Israël depuis le 7 octobre 2023. L'agence y est désormais assimilée au Qatar, accusé par Benyamin Nétanyahou d'avoir soutenu et financé le Hamas. Le premier ministre tâche ainsi d'éluder ses propres responsabilités, après avoir lui-même encouragé l'émirat à fournir à Gaza une aide financière directe, afin d'y maintenir un calme trompeur. Depuis trois mois, la patronne d'un lobby parlementaire pour une réforme de l'UNRWA, Sharren Haskel (droite), a voyagé à Bruxelles et dans des capitales européennes pour convaincre les donateurs de cesser de financer l'agence. »
Selon Luis Lema (Le Temps, 23 novembre 2023), un travail similaire de lobby a été effectué dans les sphères politiques helvétiques par la juriste Anne Herzberg, qui travaille pour NGO Monitor. Elle a aussi œuvré à ce que les « bailleurs occidentaux » coupent des fonds à des ONG palestiniennes. (Réd.)
[3] Outre les médecins, infirmiers et employés des structures humanitaires, les journalistes palestiniens sont ciblés par les militaires israéliens, pour tenter de faire taire les voix qui offrent une autre approche et image de la situation à Gaza que celle des journalistes « embedded » (embarqués) dans des chars israéliens. Reporters sans frontières indique qu'en « quatre mois de conflit, le journalisme palestinien a été décimé jour après jour, par les forces armées israéliennes, en toute impunité : plus de 84 journalistes ont été tués ». Reporters sans frontières a déposé un appel au Conseil de sécurité de l'ONU, « afin qu'il fasse appliquer, en urgence, sa résolution 2222 (2015) sur la protection des journalistes ». Selon le Committee to Protect Journalists, le 14 février, 85 journalistes et travailleurs des médias ont été tués, 16 blessés, 4 disparus et 25 arrêtés. (Réd.)
[4] Dans un entretien téléphonique avec le quotidien Libération, en date du 14 février, Pascal Hundt, responsable du CICR (Comité international de la Croix-Rouge) dans la bande de Gaza, s'alarme d'une « horreur indescriptible » dans la bande de Gaza. A la question « Quelles pourraient être les conséquences d'une offensive militaire israélienne à Rafah ? », il répond : « Ce serait un carnage. On a vu l'opération de sauvetage de deux otages dimanche, certains avancent un bilan de 70 morts. Il s'agissait d'une opération ciblée. Imaginez une offensive massive, dans une zone aussi densément peuplée, avec des gens qui ne peuvent pas fuir dans un endroit considéré comme sûr avec un accès aux services essentiels, que ce soit la nourriture ou des hôpitaux. Ce serait un désastre qui s'ajouterait à la crise actuelle. Tout le monde connaît l'horreur absolument indescriptible de la situation à Gaza. Je n'ai plus de superlatifs pour la décrire. » (Réd.)
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Porte-parole ou chef, loin d’un choix anodin, une conception de la souveraineté populaire dans le parti et dans le pays

L'existence de porte-parole est-elle vraiment dépassée ? Nous reprenons ici un article publié par Presse-toi à gauche ! en 2017 qui expliquait pourquoi Québec solidaire a remis en question l'élection d'un chef ou d'une cheffe.
21 mars 2017 / Presse-toi à gauche
L'élection de co-porte-parole à Québec solidaire n'est pas assujetti à la loi électorale. Un co-porte-parole ne n'est pas un chef opine Alexandra Reny au nom du Directeur général des élections du Québec (DGEQ). Pour la ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, Rita de Santi, Québec solidaire joue sur les mots et elle affirme qu'en jouant sur les mots Québec solidaire s'autorise à déroger à la loi électorale et elle envisage de modifier la Loi afin de clarifier cette situation. Il y a bien un enjeu juridique formel à cette affaire. Mais, au-delà de ce type d'enjeu, il y a des fondements politiques à ce rapport à nos porte-parole qui méritent d'être explicités, car ils sont importants.
Le statut de chef dans les partis politiques dominants
Dans les partis politiques de la classe dominante, le chef (ou beaucoup plus rarement la cheffe) règne en maître. Philippe Couillard a le contrôle absolu de son parti. Les oppositions et divergences doivent se murmurer dans le secret de rencontres à huis clos où il a le pouvoir de trancher et de conclure les débats. Jean Charest avait la main haute sur son parti. Comme chef du Parti libéral du Québec (PLQ), il a obtenu l'appui de 97,2 pour cent des délégué-e-s libéraux dans un vote de confiance. On se souviendra que Bernard Landry avait cru bon de démissionner en 2005 suite à un vote de confiance qui avait tout de même atteint les 76%.
Pauline Marois avait obtenu un vote de confiance de 93,08% au 16e congrès du PQ en 2011, ce qui n'avait pas empêché dans la même année le PQ de rentrer en crise. En fait, le chef d'un parti, une fois élu, dans le cadre d'institutions de type britannique est le futur chef de gouvernement, le premier ministre. Comme premier ministre, il concentre tous les pouvoirs. Il est le boss. Il représente le souverain. [1]
Le vote de confiance et souveraineté royale !
Le chef politique dans notre système politique dirige le parti. Il impose son pouvoir. Il peut s'associer ou se dissocier du programme adopté par les militant-e-s. Tel est le sens du vote de confiance. Ce vote de confiance est une cérémonie qui consacre la souveraineté du chef dans son parti. Et cette souveraineté est au-dessus de la démocratie dans le parti. Le pouvoir du chef, c'est le pouvoir de défaire ce que les membres du parti ont construit ! Ce vote est le renoncement en dernière instance du pouvoir des membres sur les orientations du parti.
C'est ainsi qu'André Boisclair s'est permis de mettre côté le programme adopté de juin 2005 et d'imposer sa feuille de route provinciale élaborée dans les officines du chef. Mieux encore, Pauline Marois faisait du rejet de pans entiers du programme adopté en 2005 par l'ensemble des membres, la condition de son acceptation du poste de cheffe du Parti québécois. Elle n'a d'ailleurs pas entendu un congrès du parti pour rejeter ce programme. Elle a conclu l'opération dans un Conseil national. Jean-François Lisée est arrivé à la chefferie avec son programme et le report du référendum à 2022 est maintenant devenu le point central du discours péquiste. Les décisions du prochain congrès sur les propositions de son chef seront perçues comme un vote pour le programme défendu par le chef du parti… Un rejet signifierait un vote de censure induisant une spirale de crise dans le parti. Ce rapport au parti est la traduction à ce niveau du rapport du Premier ministre à son gouvernement.
Au parlement ou au gouvernement, toujours au-dessus du parti !
Et quand, il devient un parti de gouvernement, le Premier ministre et les ministres s'autonomisent de leur parti jusqu'aux prochaines élections. C'est ce qui explique toutes ces résolutions adoptées par les congrès restent lettres mortes et qu'une politique néolibérale est menée une fois au pouvoir par un parti qui prétend haut et fort, surtout durant les périodes électorales, défendre l'État social. N'est-ce pas l'histoire du Parti québécois ?
La base militante du Parti se transforme alors en instrument docile des parlementaires et se dégrade jusqu'à l'état de base sans pouvoir qui trotte derrière le chef ou la cheffe comme simple faire-valoir. Cette base, victime de sa confiance aveugle, n'a pas la force de faire triompher sa volonté.
La position de Québec solidaire sur les porte-parole s'appuie sur une tout autre logique !
Comme parti de gauche, QS s'appuie sur les couches subalternes de la société. Ses couches constituent la vaste majorité de la population. Son action est de défendre becs et ongles les intérêts de la majorité populaire. Il cherche et prend les moyens pour lui redonner cette parole que les couches dominantes n'ont eu de cesse de lui enlever. Mais cela n'est possible pour un parti que dans la mesure, où un fonctionnement radicalement démocratique s'y est généralisé. C'est pourquoi une compréhension profonde des conditions de l'entrée dans l'action politique de ces couches subalternes est une condition indispensable de la remise en question de leur assujettissement et de l'efficacité du politique pour remettre en question les bases idéologiques et sociales du pouvoir dominant.
Pour QS, l'opposition entre les chefs et une majorité suiviste se doit d'être abolie. Le rapport entre la base du parti et la direction est renversé. Les porte-parole condensent et expriment les aspirations des membres. Leur influence dans le parti est directement proportionnelle à cette capacité d'assumer ce rôle. Autrement dit, le prestige et l'influence des porte-parole n'augmentent que dans la mesure où ils détruisent les fondements de tout suivisme. Leur prestige augmente dans la mesure où ils ne se prétendent plus des chef-fes au-dessus des membres, mais d'où ils cherchent à faire de l'ensemble des militantes et militants qui constitue le parti, la direction de ce parti. Cette transformation de la base militante en collectif agissant capable d'une pratique réflexive partagée est un processus dialectique et continu, car un parti de gauche recrute de façon ininterrompue des éléments nouveaux. C'est pourquoi la formation est si essentielle dans un parti qui fonde son fonctionnement sur une véritable démocratie participative. La direction d'un tel parti doit refléter la réalité de genre (le caractère essentiel de la parité hommes/femmes), générationnelle (place faite aux jeunes), sociale (la présence des différents secteurs sociaux) et politiques (la reconnaissance du pluralisme politique dans le parti) pour créer les conditions d'une direction coordonnant le travail de la base d'un tel parti. Le résultat des débats peut devenir des synthèses d'expériences diversifiées vécues par les différentes composantes du parti…
C'est pourquoi un gouvernement solidaire qui voudra travailler à l'expression réelle de la souveraineté populaire exigera une rupture avec le primo-ministérialisme et proposera dans le cadre d'une assemblée constituante, la mise en place d'institutions qui donneront au parlement des pouvoirs décisionnels sur une série de questions stratégiques et instaureront divers mécanismes de démocratie directe et participative qui viseront à éviter la consolidation d'une oligarchie politique pouvant encore une fois s'approprier la souveraineté politique à ses propres fins.
[1] André Larocque dresse la liste de ses pouvoirs : “Le premier ministre du Québec est le chef de son parti, chef du gouvernement, chef du parlement, chef de l'administration. Sa décision est finale au Conseil des ministres. Il convoque, proroge et dissout l'Assemblée nationale comme il l'entend. Dans un cadre limité de cinq ans, il fixe la date des élections générales à sa discrétion, il détermine la date des élections complémentaires. Il nomme et révoque les ministres et les sous-ministres, le secrétaire général du gouvernement, le leader, le whip et le secrétaire général de l'Assemblée nationale. Il nomme les juges des cours du Québec, le directeur de la Sûreté du Québec et chef de la police de Montréal, les dirigeants des sociétés d'État (Hydro-Québec) et les dirigeants d'un large horizon d'offices, de commissions, de comités de tous genres dont la Société des Alcools, la Régie de l'assurance maladie, la Société de l'assurance automobile, la Caisse de dépôt et placement, etc. Il “propose”, mais en vérité nomme puis qu'il contrôle la majorité de l'Assemblée, le Directeur général des élections, le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général, le président de la Commission d'accès aux documents des organismes publics. Il prépare et livre le discours inaugural (politique d ‘ensemble du gouvernement), approuve le discours du budget, détermine l'agenda gouvernemental, préside le Comité ministériel des priorités, approuve toute déclaration ministérielle majeure, répond en priorité aux questions à l'Assemblée nationale, approuve tout projet de loi, toute réglementation. Il procède par décret, contrôle l'octroi de tout contrat d'importance et détermine l'organisation de l'administration publique. » Et il conclut : “Bref, le système parlementaire est bien mal nommé. Nous vivons en réalité dans un système que l'on devrait qualifier de “premier-ministériel”. (André Larocque, Au pouvoir citoyen, mettre fin à l'usurpation des partis politiques, Éditions BLG, 2006, pp. 50-51)

Les élu.es de la gauche québécoise et le droit à l’autodétermination... des ukrainien.nes : un appel à la solidarité

Le 24 février 2024 marque le triste anniversaire de l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par l'armée Russe de Vladimir Poutine. Deux ans plus tard, le silence de la classe politique québécoise est toujours aussi assourdissant et affligeant. C'est tout particulièrement le cas du silence de ceux et celles qui se revendiquent de gauche, indépendantistes ou souverainistes et qui proclament haut et fort leur droit à l'autodétermination.
En deux ans, Québec solidaire a déposé deux motions à l'Assemblée nationale. Dans la première, adoptée en février 2022, les députés s'inquiètent « de la remontée du conflit armé en Ukraine », affirment leur « solidarité avec le peuple ukrainien » et expriment leur souhait « d'une résolution pacifique basée sur la négociation et le respect du droit international ». Dans la seconde, du 23 février 2023, l'Assemblée nationale réaffirme le droit inaliénable du peuple ukrainien à son intégrité territoriale », déclare « l'agression armée de l'Ukraine par la Russie comme défiant les lois internationales », « dénonce les actes à caractère génocidaire commis contre le peuple ukrainien qui ont été rapportés par les médias », « souhaite la bienvenue au Québec à toutes les Ukrainiennes et à tous les Ukrainiens temporairement déplacés, tout en demandant aux gouvernements du Québec et du Canada de [faire tout] en leur pouvoir pour faciliter leur arrivée au pays » et enfin, « salue la résistance héroïque du peuple ukrainien et le courage du mouvement d'opposition à la guerre en Russie ».
Ces deux motions ont été adoptées à l'unanimité à l'Assemblée nationale. De fait, elles n'engageaient les signataires à rien ou presque. Elles n'exigent ni le retrait inconditionnel de la Russie du territoire ni un soutien militaire ou humanitaire. Et le seul engagement concret, soit celui de tout faire pour faciliter l'arriver au pays des ukrainien.nes qui le souhaitent, a été remis en cause à peine un an plus tard par les auteur.es de la motion. En effet, Québec solidaire, à la suite de la Coalition avenir Québec, le parti au pouvoir, et des souverainistes du Parti Québécois, dénonce aujourd'hui l'afflux des migrants temporaires, des demandeuses et des demandeurs d'asile. Tant et si bien qu'aujourd'hui, les réfugié.es "bienvenu.es" il y a à peine deux ans, vivent quotidiennement avec la crainte d'être finalement expulsé.es.
À part ces deux motions, on cherchera en vain sur le site internet de Québec solidaire des communiqués ou des prises de positions en solidarité avec la défense de l'intégrité territoriale de l'Ukraine. Le site contient en revanche de nombreux communiqués sur la nouvelle campagne du parti pour un « projet indépendantiste » ou l'autonomie du Québec. À l'exception d'un communiqué de presse en date de février 2022, on est obligé de faire le même constat sur le site internet des souverainistes du Parti Québécois.
Au moment d'écrire ce texte, on ne sait pas encore si Québec solidaire déposera une nouvelle motion à l'Assemblée nationale, le 24 février 2024. Mais en attendant, si des élu.es Québécois.es de gauche et attaché.es au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes souhaitent appuyer un peu plus concrètement le droit à l'autodétermination des ukrainien.nes, ils et elles sont invité.es à signer cet appel d'élu.es qui réclame le retrait inconditionnel des troupes russes et le droit de l'Ukraine à recevoir les armes nécessaires pour imposer ce retrait.
Camille Popinot
Illustration : Oleksandr Shatokhin, Guilty, 2022, Poutine sera reconnu coupable de ses crimes. https://salledepresse.uqam.ca/communiques-de-presse/ukraine-lart-de-se-defendre-le-centre-de-design-de-luqam-presente-une-exposition-dillustrations-antiguerre-en-trois-volets/

Français, anglais, immigration

Le français au Québec est-il menacé par l'immigration ? Est-ce que le déclin de la langue française est relié à l'afflux d'immigrantꞏes, temporaires ou permanentꞏes, régulièrꞏes, réfugiéꞏes ou clandestinꞏes ? En tout cas, l'immigration est constamment reliée à cette question dans d'innombrables déclarations politiques, chroniques et commentaires.
Pour mieux comprendre ce qui se passe ici au Québec, on ferait bien d'ouvrir les yeux sur ce qui se passe dans notre « niche écologique culturelle ».
Élisabeth Germain, 2024-02-19
La réalité est que l'innovation, en Occident, se fait en anglais. Si elle naît dans une autre langue, elle est traduite en anglais pour circuler. L'anglais est la langue de l'enrichissement économique, des avancées technologiques, du tourisme, de la diffusion artistique, de la diplomatie internationale et plus encore. La puissance dominante en Occident, ce sont les États-Unis d'Amérique (dont le nom lui-même est une appropriation abusive). La France, foyer du français, se traduit elle-même en anglais, à l'intérieur comme à l'extérieur, et elle a fait de l'anglais sa langue de prestige. Les titres de livres, les marques de vêtements, le nom des écoles, les mots pour désigner les nouvelles technologies, tout cela et plus encore s'anglicise de plus en plus.
Il ne s'agit pas d'énumérer des exemples, mais de faire voir un courant : l'anglais a colonisé l'Occident, colonisé les affaires occidentales, colonisé les esprits occidentaux. C'est à cela que le Québec est confronté, et nos dynamiques particulières s'inscrivent dans ce courant suprarégional. Il ne sert à rien d'accuser nos immigrantꞏes : les courants migratoires mondiaux eux-mêmes s'effectuent en anglais. Lorsqu'un autre langue réussit à s'imposer devant l'anglais, c'est l'arabe ou le mandarin, tandis que le français arrive derrière l'hindi ou l'espagnol. Le français n'est plus porteur des dynamiques mondiales.
Si je suis unilingue francophone au Québec – ou en France - et que j'utilise un ordinateur en français, je dois apprendre un tas de choses en anglais, car c'est la langue d'accueil d'une majorité de sites, c'est la langue des transactions commerciales et des livraisons de produits achetés, c'est même la langue des réponses aux demandes de dépannage informatique. Les objets que nous achetons sont censés comporter des instructions en français, lesquelles sont souvent incompréhensibles si on ne va pas comparer avec l'anglais. Une grande proportion des publications sont traduites de l'anglais – en sciences, c'est évident, en littérature c'est flagrant. Les termes anglais, et plus encore le contexte culturel anglophone, s'imposent à travers ces traductions et nous amènent à notre insu à penser en anglais.
Alors oui, préservons le français, préservons notre capacité à nous épanouir collectivement et personnellement dans la culture qui nous porte. Mais sachons que ce faisant, nous résistons à une dynamique de colonisation qui dépasse largement la langue d'usage, car elle se déploie dans toutes les sphères de la vie collective. Sachons qu'elle n'est pas spécifique au Québec ni portée principalement par les personnes immigrantes. Elle est globale.
Nous ne pouvons pas simplement préserver notre langue : comme pour la crise écologique, ce sont les bases familières de notre habitation terrienne qui se modifient. Comme pour la crise écologique, cette dynamique est permise par notre consentement à une expansion économique féroce, fondée sur la marchandisation et l'exploitation. Fermer les yeux, réduire le phénomène, se contenter de le freiner ou s'imaginer que nous pouvons y échapper, sont des échappatoires nuisibles. Comme pour l'inévitable crise écologique, prenons conscience et assumons que nos façons de vivre et nos perspectives doivent changer en profondeur.
Conjuguer est un maître-mot : la réalité culturelle est d'ordre écologique, elle existe dans l'interdépendance avec les réalités qui coexistent dans le même environnement. Métissage, croisements, adaptation, mutations sont nécessaires à la persistance. Nous avons à inventer, comme et avec une multitude de peuples, des dynamiques de transition culturelle, sociale et économique pour assumer la diversité et favoriser un bien vivre pour l'humanité. Cela commence à l'échelle de notre communauté territoriale québécoise concrète, toute diversité incluse.
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Les travailleurs étrangers temporaires ou l’esclavage moderne

La question de l'immigration temporaire est sur toutes les lèvres depuis décembre 2023, alors que Statistique Canada nous apprenait qu'il y a plus d'un demi-million d'immigrants temporaires au Québec. Dans l'ensemble du Canada, le nombre s'établit à 2,5 millions de personnes en situation d'immigration temporaire, réparties selon trois catégories : travailleurs étrangers, étudiants internationaux et demandeurs d'asile.
14 février 2024 |tiré de l'Aut'journal
https://lautjournal.info/20240214/les-travailleurs-etrangers-temporaires-ou-lesclavage-moderne
Des établissements d'enseignement, surtout les collèges privés non subventionnés, de même que certaines compagnies, comme Amazon ou Dollarama, contribuent à cette situation ou, du moins, en profitent beaucoup. Ces organisations à but lucratif ont en commun d'exploiter sans vergogne les populations issues de l'immigration temporaire, qui comptent parmi les plus précaires de notre société.
En éducation, on se rappellera des écoles Matrix qui, par des stratagèmes méprisables, leurraient des jeunes gens d'origine indienne et leur faisaient payer jusqu'à 25 000 $ pour des Attestations d'études collégiales (AEC) de piètre qualité. Du côté des entreprises, un rapport du syndicat des Métallos révèle une explosion du recours au PTET (Programme des Travailleurs Étrangers Temporaires). Le nombre d'individus participant à ce programme est ainsi passé de 7 180, en 2017, à 59 000, en 2023. Pour Dominic Lemieux, directeur québécois des Métallos, cette situation est troublante. Je discute avec lui pour en apprendre davantage.
Orian Dorais : Vous avez signé une lettre ouverte dénonçant un « recours débridé » au PTET et un « détournement » du programme dans des termes assez durs. Pouvez-vous préciser quelles dérives vous dénoncez ?
Dominic Lemieux : Dans les dernières années, le recours au PTET s'est multiplié par huit, ce qui amène certains risques. Le système des contrats fermés du PTET est particulièrement problématique, parce qu'il attache les signataires à une seule entreprise. Autrement dit, quelqu'un qui est sous un contrat fermé pourrait voir un meilleur emploi dans une shop juste en face de son lieu de travail, mais n'aurait pas le droit d'y postuler.
C'est quand la dernière fois qu'au Canada des gens étaient liés de force à un lieu de travail, sans pouvoir légalement aller travailler ailleurs ? À l'époque de l'esclavage. En fait, un rapporteur spécial de l'ONU a dénoncé ce système-là, en parlant d'esclavagisme moderne. On abordait les dérives du PTET, en voici une assez grave.
Il faut aussi souligner que ce programme-là ne permet que très rarement l'accès à l'immigration permanente. À la limite, celles et ceux qui occupent des métiers plus spécialisés arrivent parfois à rester, mais pour des corps de métiers comme journalier, conducteur de chariot élévateur ou préposé au nettoyage, il n'y a pratiquement aucun moyen d'accéder à la citoyenneté canadienne.
Imaginez, on parle d'immigrants et d'immigrantes temporaires qui vont habiter dans nos régions, qui travaillent dans nos usines et qui forment des relations amicales ou amoureuses avec le monde d'ici… mais le programme ne leur permet pas de rester. Même après plusieurs mois. Aussi, l'incitatif d'apprendre le français est moins présent si la personne sait qu'elle ne va rester que trois ans, maximum.
À vrai dire, on observe qu'une immigration plus prospère ou plus spécialisée va systématiquement avoir un accès plus facile à la citoyenneté que les gens du PTET, ce qui est discriminatoire. Le programme fait maintenant en sorte que des gens viennent ici pour une longue période et finissent par s'attacher à leur milieu, mais sans pouvoir y rester… alors que, justement, le Québec a besoin d'attirer du monde dans ses régions. Quand on voit une multiplication des situations comme ce que je viens de vous décrire, on peut dire que le PTET a été détourné de ses objectifs initiaux, qui visaient à combler temporairement des besoins de personnel précis.
Des solutions permanentes à la pénurie de main-d'œuvre
O.D. : Les employeurs vont souvent plaider la pénurie de main-d'œuvre pour justifier leur recours massif et prolongé à ce programme…
D.L. : La pénurie de main-d'œuvre, c'est pas une légende ; là, on est bien conscients que ça existe. Mais si cette pénurie risque de devenir un problème permanent, faudrait peut-être lui trouver des solutions permanentes… comme permettre aux employés du PTET d'avoir accès à la résidence permanente ! Pour qu'ils puissent rester dans leurs communautés – en région – et y contribuer avec leur travail. Et si la pénurie de main-d'œuvre diminue dans les prochaines années, à cause d'un éventuel ralentissement économique, alors il faudra cesser d'abuser du PTET.
Encore un mot sur la fameuse pénurie, je vous donne l'exemple de la fonderie Laperle, à Saint-Ours. Il y a quelques temps, les patrons là-bas voulaient recruter à l'étranger, en prétextant qu'ils ne trouvaient personne pour travailler dans la région. Le syndicat a insisté pour que la fonderie offre des salaires bonifiés avant de se tourner vers l'international. C'était en milieu de convention collective, nous n'étions pas en mobilisation pour le renouvellement des ententes, mais nous avons réussi à négocier une amélioration majeure de la paie. Comme par hasard, les postes ont été comblés. Dans certains cas, ce n'est pas tant un problème de pénurie, mais un problème de conditions offertes.
Réinstaurer des seuils
O.D. : Quelles réformes votre syndicat propose-t-il au programme ?
D.L. : Aujourd'hui, si des entreprises veulent utiliser le PTET, ça passe comme une lettre à la poste. Il y a environ 300 catégories d'emploi qui peuvent se qualifier. Avant, il y avait des seuils à respecter, par exemple une usine ne pouvait pas compter plus que 10 à 20% de main-d'œuvre internationale. Les entreprises devaient effectuer des tentatives de recrutement local et démontrer la pénurie de personnel. Et le syndicat devait donner son accord. Toutes ces mesures sont maintenant suspendues et nous demandons leur rétablissement.
On demande aussi que l'employeur fournisse des efforts de francisation. D'abord, il existe des programmes gouvernementaux qui couvrent une partie des coûts de francisation, donc ce ne serait pas une grosse dépense pour les entreprises. Ensuite, quand quelqu'un manipule du matériel potentiellement dangereux et que les instructions sont en français, ce serait bien que la personne en question puisse les lire. Ça devient un enjeu de sécurité.
Des histoires d'horreur
O. D. : D'après ce que vous avez pu observer, dans quelles conditions vivent les immigrants temporaires sur un visa de travail ?
D.L. : On a déjà parlé des contrats fermés et de la quasi-impossibilité d'accéder à la citoyenneté, mais il faut aussi dénoncer la précarité que cause le PTET. Les gens qui sont ici avec ce programme ont droit à une valise de 22,5 kg pour deux, trois ans, ce que les Québécois amènent normalement pour une semaine de vacances. Les travailleurs et travailleuses vivent avec la peur constante de se faire dire de ramasser leur valise et de se faire mettre dans l'avion vers leur pays d'origine, quasiment avec un timbre sur le front.
J'ai entendu des histoires d'horreur. Par exemple, deux journaliers qui se parlent pendant leur quart devant un superviseur. Le superviseur s'étend les bras et se met à imiter un avion, pour leur signifier d'arrêter, sinon ils se font retourner. C'est humiliant et si c'est pas une menace, ça !
Une fois, j'ai enttendu parler d'un employé qui s'était fait escorter de son milieu de travail par deux agents de sécurité qui l'ont forcé à faire ses bagages. Ils allaient l'emmener à l'aéroport. Le syndicat a été informé et il a carrément fallu appeler la police pour dénoncer un enlèvement ! Heureusement, on a réussi à régler le problème avant que ça finisse en expulsion. Mais la peur reste.
C'est certain que le syndicat protège les employés du PTET et que la convention s'applique également à tout le monde. Mais si les gens ont peur, ils ont moins de chance de pouvoir refuser de faire des heures supplémentaires ou de dénoncer des situations dangereuses. On assiste à une augmentation massive des cas de blessures au travail chez les immigrantes et immigrants temporaires. Maintenant, il faut qu'on se pose la question : va-t-on accepter, comme société, de voir des gens dans des situations comme ça ?

S’imposent l’arrêt des exportations d’armes et financer l’UNRWA

On ne dénoncera jamais assez l'odiosité du gouvernement canadien qui a hésité et tardé à réclamer un cessez-le-feu au fascisant gouvernement sioniste concernant sa terriblement asymétrique guerre génocidaire contre le peuple palestinien, et pas seulement contre la Bande de Gaza. Il faut dire que le gouvernement québécois a fait pire en tardant davantage et en persistant à ouvrir un bureau du Québec en Israël.
N'empêche que le gouvernement Trudeau a maintenu son soutien stratégique à Israël, tête de pont de l'impérialisme occidental pour le contrôle du Moyen-Orient, puits intarissable de pétrole bon marché et plus important carrefour géostratégique mondial, en continuant à lui exporter de l'armement. C'est ce que dénonce une coalition de la société civile canadienne et quelque peu québécoise d'ONG et d'églises mais non celle catholique (https://oxfam.qc.ca/lettre-ouverte-transferts-armes-israel/).
Là où cependant le gouvernement canadien a dépassé les bornes de l'odiosité et de servilité vis-à-vis l'impérialisme étatsunien est sa suspension précipitée de son financement de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Pourtant l'ONU a congédié ces personnes et a mis en branle le mécanisme d'examen prévu pour de tels cas. L'Office est le premier organisme humanitaire pour les personnes réfugiées de Gaza et d'ailleurs dans cette région. Elle est irremplaçable pour ces millions de personnes et est devenue indispensable car « les conséquences sur place de ces coupes budgétaires vont à l'encontre des mesures provisoires émises le vendredi 26 janvier par la Cour internationale de justice. »
Le prétexte en est qu'Israël accuse une douzaine des 13 000 personnes, sur 30 000 au total, employées de l'UNRWA dans la Bande de Gaza d'avoir participé à l'audacieuse percée du mur faisant de cette Bande une prison à ciel ouvert régulièrement bombardée, et à la prise des postes militaire adjacents dont plusieurs militaires israéliens ont été faits prisonniers. Rappelons que la lutte armée des peuples opprimés est conforme au droit international. Malheureusement l'organisation politico-militaire Hamas, réactionnaire et fondamentaliste administrant la Bande de Gaza, a planifié ou a laissé faire un massacre vengeur de plusieurs centaines personnes civiles et peut-être de soldats désarmés sans compter la prise d'otages civils. C'est là une imitation à petite échelle des crimes à grand déploiement de l'armée sioniste depuis la Nakba (catastrophe) du nettoyage ethnique de 1948. Comme la guerre génocidaire israélienne, ce crime de guerre du Hamas mérite un examen de la Cour internationale de justice. On ne dira jamais assez comment cette bavure du Hamas a donné un prétexte en or au gouvernement israélien pour sa guerre vengeresse et sans quartiers.
Devant ce scandale de non financement par les grandes puissance occidentales dont le Canada, six grands syndicats canadiens (SCFP, STTP, AFPC, Unifor, Métallos, NUPGE) représentant plus de deux millions de personnes salariées ont exigé du gouvernement canadien qu'ils annulent cette décision inhumaine pour ne pas dire barbare (https://scfp.ca/des-syndicats-reclament-le-retablissement-du-financement-lunrwa). Certes, cet appel inclut de facto plusieurs syndicats de la FTQ mais aucun des autres centrales québécoises. La CSN a bien appuyé une déclaration du CISO pour un cessez-lefeu dès octobre 2023 mais est demeuré silencieuse depuis lors. Quant aux autres centrales, sauf erreur c'est motus et bouche cousue. Il est vrai que la lutte du secteur public a été accaparante. Mais n'est-ce pas là une excuse facile ?
Marc Bonhomme, 18 février 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

Une catastrophe annoncée

En représailles à l'attentat du Hamas du 7 octobre 2023, le gouvernement israélien s'est lancé dans une opération militaire de grande envergure dans la bande de Gaza, en plus de soumettre ce territoire à un blocus total qui fait suite à un blocus partiel qui prévaut depuis 2006.
photo Serge d'Ignazio
En décembre 2023, l'Afrique du Sud a ouvert une procédure devant la Cour internationale de justice (CIJ) contre Israël concernant un génocide en cours dans la bande de Gaza et demandant à la Cour de prendre des mesures conservatoires (l'équivalent d'une injonction provisoire) étant donné l'urgence, tout en lui demandant de se prononcer sur le fond de l'enjeu.
Le jugement de la CIJ
Le 26 janvier dernier, la Cour a rendu un jugement mi-figue mi-raisin concernant ces mesures conservatoires. Cependant, elle n'a pas reconnu valides les arguments de la partie israélienne et s'est déclarée compétente pour instruire cette cause.
Parmi les aspects positifs de ce jugement, mentionnons que la Cour a reconnu le très grand nombre de personnes mortes et blessées, la destruction d'habitations et le déplacement forcé de la population palestinienne de Gaza (ce qui est prohibé par la Convention sur les génocides). Elle a également rappelé et fait siennes les observations du secrétaire général adjoint de l'ONU, de l'OMS et du commissaire général de l'UNRWA. Elle note également les propos déshumanisants de hauts responsables israéliens. De plus, elle accorde une plausibilité prima facie aux allégations de l'Afrique du Sud, à savoir que nous sommes devant un génocide. Elle reconnaît également le risque de détérioration de la situation d'ici à ce qu'elle rende un jugement sur le fond et admet qu'il y a une situation d'urgence. La Cour demande également à Israël de rendre disponibles les services de base et l'aide humanitaire et lui demande de faire un rapport sur les mesures prises dans un délai d'un mois.
Ces faits ne sont pas nouveaux. L'intérêt du jugement de la CIJ est de les faire attester par le droit international. Cependant, et là nous passons à l'aspect plus négatif de ce jugement, la Cour n'a pas appelé Israël à cesser immédiatement ses activités militaires dans la bande de Gaza, ce qui lui donne un délai supplémentaire d'un mois pour poursuivre ses exactions, ce dont elle ne se prive pas si l'on se fie à ce qui est rapporté par les médias. Le juge ad hoc israélien a même voté contre les mesures, tirées directement de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, demandant à Israël de s'abstenir de tels actes. À quoi s'attendre fin février puisque, dans leur plaidoyer, les représentant.es de l'État d'Israël ont nié l'ampleur des dommages infligés à la population civile et se sont même targués de permettre l'aide humanitaire à Gaza. De plus, la Cour qui avait le pouvoir d'en appeler à la communauté internationale, a laissé Israël seul juge de ce qu'il convient de faire.
Les réactions d'Israël et de ses alliés
Quelle a été la réponse du gouvernement israélien depuis ce jugement ? D'abord, de dénoncer la participation de 12 employé.es de l'UNRWA aux attentats du 7 octobre (ce qui représente moins de 0,1% du personnel de l'UNRWA en Palestine). Ensuite de demander la démission du responsable de l'UNWRA. Enfin, de planifier une attaque contre Rafah où s'est réfugiée la majorité de la population palestinienne de Gaza. Sans parler du climat de terreur et des violences que font subir les colons aux populations palestiniennes de Cisjordanie et de Jérusalem-Est, le tout avec la complicité de l'armée israélienne. Sans parler, également, des manifestations récurrentes de l'extrême-droite israélienne pour empêcher l'aide humanitaire de transiter par le point de passage de Kerem Shalom.
Dans la foulée des « révélations » israéliennes concernant la participation de certains employé.es de l'UNRWA aux attentats du 7 octobre, plusieurs gouvernements occidentaux, dont le gouvernement canadien, n'ont rien trouvé de mieux à faire que d'annoncer la suspension de leur financement à l'UNRWA. Or, il s'avère que l'UNRWA gère, depuis 1948, les camps de réfugié.es (les personnes déplacées par la première Nakba et leur descendance), s'occupe de l'éducation et du système de santé et constitue la principale organisation humanitaire en territoire palestinien. Suspendre l'aide financière à l'UNRWA, c'est éventuellement se rendre complice du génocide israélien à Gaza et dans les autres territoires palestiniens occupés.
De plus, le Canada poursuit (et même intensifie) son commerce d'armement avec Israël. Dans le cas présent, cela signifie donner les moyens au gouvernement israélien de poursuivre son œuvre génocidaire. Or, selon la Convention internationale pour la prévention et la répression du crime de génocide, tous les États signataires (dont le Canada) doivent s'abstenir de contribuer directement ou indirectement à la commission d'un tel crime.
Que pouvons-nous faire ?
Évidemment, la première chose à faire, c'est de participer aux manifestations hebdomadaires organisées par la communauté palestinienne dans les principales villes canadiennes. Mais il y a actuellement plusieurs campagnes qui pourraient éventuellement changer la donne.
La première concerne l'annulation de l'implantation d'un bureau commercial à Tel Aviv. Le gouvernement québécois a suspendu l'ouverture de ce bureau du fait de la guerre actuelle, mais il ne l'a pas annulé. Nous devons faire savoir haut et fort au gouvernement québécois qu'il n'est pas question d'accroître nos liens commerciaux avec un État génocidaire. Au contraire, il faudrait les annuler et revoir l'entente Québec-Israël.
La deuxième concerne le rétablissement du financement à l'UNRWA. C'est actuellement la seule organisation humanitaire encore présente sur l'ensemble du territoire de Gaza et la seule en mesure de coordonner l'aide humanitaire si jamais celle-ci se rend. De plus, elle joue un rôle de premier plan en dans les autres territoires palestiniens occupés par Israël et dans les camps de réfugié.es palestinien.nes au Liban, en Syrie et en Jordanie. CJPMO a lancé une pétition à cet effet.
La troisième est la cessation de tout commerce d'armes avec l'État d'Israël. Il est insensé de soutenir militairement un gouvernement qui fait fi des règles à respecter lors d'affrontements armés. Plus encore, selon la Convention pour la prévention et la punition du crime de génocide, tous les États signataires sont tenus de faire tout en leur possible pour prévenir le crime de génocide. Contrairement à ses obligations ionternationales, le Canada alimente la machine génocidaire. Là encore CJPMO a lancé une pétition en ligne à cet effet.
En ces moments tragiques, nous devons manifester de toutes les façons notre soutien au peuple palestinien. Nous ne pouvons pas détourné le regard et dire que nous n'en savions rien : tous les jours des images atroces nous parviennent de Gaza occupée, ceux et celles qui nous les envoient risquant leur vie pour que le monde cesse de les ignorer.
Diane Lamoureux
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Ottawa fait fi du verdict de génocide de la Cour internationale de justice contre Israël et coupe les fonds d’aide aux réfugiés.es palestiniens.nes

On peut tenir pour plausible que bien des pouvoirs occidentaux soient complices du génocide des Palestiniens.nes
Owen Schalk, Canadian Dimension, 30 janvier 2024
Traduction et organisation du texte, Alexandra Cyr
Le 26 janvier courant, la Cour internationale de justice, (CIJ) a émis un jugement contre Israël dans la cause défendue par l'Afrique du sud. Ce jugement a été bien accueilli par l'Afrique du sud, les dirigeants.es palestiniens.nes, la diaspora et les militants.es solidaires. Le tribunal ordonne ainsi à Israël de « prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission d'actes génocidaires » de permettre à l'aide humanitaire de pénétrer dans l'enclave ou la famine a été installée. Il ordonne aussi à Israël d'empêcher ses troupes de violer la convention de Genève de 1948 sur les génocides « avec application immédiate ».
Dans l'ensemble la CIJ reconnait que les Palestiniens.nes sont un groupe national à protéger de maux irréparables, donc la Contention de Genève s'y applique. Elle établit aussi qu'il y a des risques plausibles que l'armée israélienne commette un génocide à Gaza.
Les représentants.es israéliens.nes ont demandé au tribunal de tout simplement rejeter la cause, arguant que l'Afrique du sud ne pouvait légitimement porter plainte contre Israël devant le plus haut tribunal du monde. Mais la CIJ a pris le parti de l'Afrique du sud en émettant des obligations provisoires contre le génocide à Israël et en poursuivant la démarche judiciaire il lui a infligé un choc magistral alors que sa crédibilité s'altère sur la scène mondiale.
(…)
Même s'il n'a pas imposé de cessez-le-feu, les mesures provisoires ordonnées en exigent un. Essentiellement, il en impose un dans les faits. Après le jugement, le Ministre des affaires étrangères sud-africain, M. Naledi Pandor a déclaré : « Je pense que l'exécution des obligations, imposera un cessez-le-feu. Sans cela, on ne se sera pas conformé au jugement ».
Il faut noter que dans des cas semblables de génocide, celui de la Bosnie en 1990 et du Myanmar en 2019, la CIJ, n'a pas directement demandé de cessez-le-feu.
Ce jugement fait mentir le discours dominant des médias des représentants.es des gouvernements occidentaux à l'effet qu'Israël a le droit de se défendre contre le terrorisme et que ses interventions à Gaza quoique excessives, sont malgré tout justifiées. Autrement dit, la majorité mondiale rejette l'analyse occidentale de la guerre israélienne à Gaza.
Qu'est-ce qui va suivre ? À moins que les États-Unis n'exercent une pression suffisante pour qu'Israël cesse sa campagne militaire génocidaire contre les Palestiniens.nes, il ne va rien se passer. Le jugement de la CIJ a force de loi, mais jamais Israël n'a permis à une loi internationale de modérer sa violence que ce soit en regard des massacres de civils.es ou de l'expansion des colonies illégales. Et les institutions internationales, dominées quelles sont par les pouvoirs occidentaux, spécialement par les États-Unis, ne se sont pas non plus montrées très intéressées à tenir Israël responsable.
Mais, le présent jugement marque une victoire historique pour les Palestiniens.nes comme un rejet de la propagande israélienne et occidentale sur la scène mondiale.
De son côté, Isarël a répondu au tribunal avec sa position belliqueuse typique. Son Ministre de la défense, M. Yoav Gallant, a traité le tribunal « d'antisémite » et « qu'Israël n'avait pas de leçon de morale à recevoir ». Ce ministre avait déjà qualifié les Palestiniens.nes « d'animaux humains ». Cela a été cité durant la défense de la cause devant le tribunal.
Par ailleurs, les pays occidentaux ont poursuivi leur soutien inconditionnel à Israël malgré qu'aux yeux de la CIJ plusieurs d'entre eux sont susceptibles d'être complices du génocide des Palestiniens.nes.
La réaction des États-Unis était prévisible. Le gouvernement américain rejette la cause sans discussion sur ses mérites. Le porte-parole du Département d'État déclare que le tribunal « n'a pas prouvé qu'il y avait génocide (….) dans son jugement », ce qui est faux. À cette étape des procédures, la CIJ doit décider si l'Afrique du sud a présenté une cause plausible à l'effet qu'Israël commettait un génocide. La vaste majorité des juges l'ont fait. La cause se poursuit même s'il faudra des années pour avoir un verdict final.
Lors d'une entrevue, l'analyste géopolitique Owen Jones a estimé que la réponse de Washington au jugement, équivalait « à dire qu'un accusé en procès pour meurtre n'a pas été trouvé coupable le premier jour du procès ».
La réponse canadienne est semblable, sans colonne vertébrale.
Avant le jugement, J. Trudeau avait parlé de la cause sud-africaine de génocide avec dédain. Devant les journalistes il a déclaré : « Nous soutenons de tout cœur la CIJ et ses procédures mais cela ne veut pas dire que nous soutenons la prémisse que l'Afrique du sud a fait valoir devant la Cour ».
Le 26 janvier, quand la CIJ a statué qu'il était plausible qu'Israël commette un génocide à Gaza, la Ministre des affaires étrangères canadienne, Mme Mélanie Joly, a réitéré que le Canada soutenait Israël. Sa déclaration reprend les mots du Premier ministre et proclame que le Canada « soutien le droit d'Israël d'exister et de se défendre ». Elle demande au Hamas de libérer les otages capturés.es le 7 octobre mais ne demande pas à Israël de cesser ses bombardements sur les civils.es, les écoles, les hôpitaux, les refuges des Nations Unies, ou ses assassinats ciblés de journalistes, d'artistes ni les incitations au génocide de ses leaders.
Au moment d'écrire ces lignes, on rapporte le décès de 26,000 Palestiniens.nes à Gaza et de presque 65,000 blessés.es. Les Gazaouis souffrent du manque crucial de nourriture, d'eau potable, de médicaments et 85% des habitants.es de l'enclave ont été déplacés.es sur le territoire. Selon l'ONU, 60% des infrastructures y sont endommagées ou détruites.
Tout en parlant simplement de « préoccupation » à propos de la « crise humanitaire », à Gaza, Mme Joly emploie un langage acide pour parler de l'attaque du Hamas : « Rien ne peut justifier les attaques brutales du 7 octobre dont les terribles pertes de vie, les actes haineux de violence perpétrés durant ces attaques, incluant les violences sexuelles. (…) Le Hamas doit libérer tous les otages, cesser d'utiliser les civils.es comme boucliers humains et déposer les armes ».
Pendant ce temps, la réponse israélienne ne s'est pas limitée aux paroles. Peu après le verdict, il a publié une déclaration qui accuse des membres de l'Organisation de secours aux réfugiés.es palestiniens.nes (UNRWA), d'avoir participé aux attaques du 7 octobre.
On peut raisonnablement penser que ces accusations, obtenues lors de « confessions » durant les interrogatoires, aient été extraites par la torture. Mais cela a suffi aux donateurs de l'agence, dont les États-Unis et le Canada, de cesser leur financement.
L'UNRWA a été fondée en 1949 pour aider les réfugiés.es palestiniens.nes dépossédés.es par la Nakba. Depuis ce temps, elle a servi à la survie de millions de ces réfugiés.es. En ce moment, l'agence aide presque 6 millions de réfugiés.es principalement à Gaza et en Jordanie dans 58 camps. Elle maintient aussi 706 écoles, 140 installations sanitaires, pourvoit à l'alimentation et distribue des fonds à 1million 800 mille personnes.
L'analyste Mouin Rabani souligne : « Ce que je comprends c'est qu'Israël a calculé le moment d'émission de cette accusation contre 12 membres du personnel de l'UNRWA d'avoir participé personnellement aux attaques palestiniennes contre Israël, le 7 octobre. (Il semble) que le calendrier de publication de ces accusations coïncide avec le verdict de la CIJ dans une tentative de faire distraction ».
Selon M. Rabbani l'UNRWA a « spectaculairement mal géré cet enjeu ». En agissant immédiatement, elle pouvait donner l'impression de valider ces accusations. Cela a donné aux occidentaux qui soutiennent Israël ce qu'il fallait de justifications pour suspendre leur financement à l'agence onusienne.
Israël tente de décrédibiliser l'UNRWA depuis longtemps. Une ancienne haut fonctionnaire du ministère des affaires étrangères israélien, Mme Noga Arbell avait ouvertement appelé à sa fermeture. Tôt en janvier dernier, Mme Arbell a déclaré devant la Knessett : « Il sera impossible de gagner la guerre si nous ne détruisons pas l'UNRWA. Cette destruction devrait commencer immédiatement ».
Par ailleurs, l'UNRWA a déclaré que si les fonds ne sont pas de retour, elle devra mettre fin à tous ses services fin février ; une perspective catastrophique pour les réfugiés.es palestiniens.nes. Mais il ne semble pas que cela émeuve le Canada plus qu'il ne le faut. La famine régnait déjà à Gaza avant les coupures de fonds. Des millions de Gazaouis vivent le couteau sur la gorge, incapables de subsister au milieu d'inimaginables conditions, sous les bombardements, avec la faim et des brutalités génocidaires.
Hier, Mme Heather McPherson, députée NPD a demandé à la Chambre des communes : « Pourquoi les libéraux canadiens abandonnent-ils les Palestiniens.nes au moment où leurs besoins n'ont jamais été aussi grands » ?
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De la parole aux gestes svp !

Une offensive militaire israélienne à Rafah où quelque 1,5 million de Palestiniens ont trouvé refuge serait « catastrophique », a affirmé tard le 14 février le premier ministre canadien.
Par Pierre Jasmin, secrétaire général des Artistes pour la Paix - 15 février 2024
Avertissements canadiens et internationaux bienvenus
Dans une déclaration commune avec les premiers ministres australien et néo-zélandais, Justin Trudeau déplore qu'une telle incursion à Rafah puisse générer des effets « dévastateurs », compte tenu de la situation humanitaire déjà désastreuse à Gaza.
« Nous exhortons le gouvernement d'Israël à ne pas s'engager dans cette voie. Les civils n'ont tout simplement nulle part où aller : 1,5 millions de Palestiniens sont bloqués à la frontière. On observe un consensus international croissant sur cette question. Israël doit écouter ses amis et la communauté internationale. On ne peut pas faire payer aux civils palestiniens le prix de la défaite du Hamas. »
Des avertissements similaires mais plus forts d'autres alliés occidentaux ont suivi ceux de l'Organisation des Nations unies. Le président américain Joe Biden a aussi déclaré que le gouvernement Nétanyahou ne devait pas lancer une éventuelle opération militaire à Rafah sans un plan « crédible » pour assurer la sécurité des civils.
Mardi matin, la ministre Mélanie Joly avait ainsi réagi : « Les civils de Rafah sont des personnes — ce sont des mères, des enfants. Ils ont des noms, des histoires — et ils existent. Leur demander de se déplacer à nouveau est inacceptable. Ils n'ont nulle part où aller. » Avant d'ajouter : « Nous avons besoin d'une entente sur la libération des otages, d'une augmentation de l'aide humanitaire à Gaza et d'un cessez-le-feu durable. »
Ces avertissements qualifiés d'hypocrites par les Palestiniens montrent plutôt un désarroi.
Nous déplorons l'absence de gestes significatifs
Pourquoi avoir attendu au 132e jour du conflit pour enregistrer de telles protestations qu'on pourrait aussi qualifier de remords de consciencei ? Et surtout pourquoi dès aujourd'hui ne pas sommer Israël d'obéir à la Cour Internationale de Justice (CIJ)ii, en menaçant, sinon, d'au moins rappeler notre ambassadrice Lisa Stadelbauer de Tel-Aviv ?
Dès le 1er novembre, l'Agora des Habitants de la Terre et nous avons donné mandat à maître Gilles Dévers de réclamer à la CIJ, parallèlement à la courageuse demande de l'Afrique du Sud, de se pencher sur les actes génocidaires perpétrés par Israël. Merci aux treize juges de la CIJ qui ont résisté aux immorales pressions politiques des puissants dont hélas le Canada, et aux critiques des extrémistes qui ont trouvé leur jugement timoré.
L'appel au cessez-le-feu de l'ONU a été endossé par le Canada le 12 décembre, alors que déjà 18 000 Palestiniens avaient été tués : nos éditorialistes furent déconcertés, après deux mois de nos propres déclarations censurées par les médias, vu notre usage du mot cessez-le-feu, toujours verboten pour l'Ukraine. Les Artistes pour la Paix avaient alors remercié la ministre Joly soutenue par le Bloc Québécois, le NPD et le Parti Vert, pour avoir voté avec 153 pays pour un cessez-le-feu entre le Hamas et Nétanyahou, réclamé par le Secrétaire général des Nations-Unies Antonio Guterres, bloqué au Conseil de Sécurité par le honteux veto des États-Unis isolés.
Nous avions alors dénoncé la CAQ et sa Ministre des Relations internationales Martine Biron, qui jugeait la demande de cessez-le-feu « prématurée ». Heureusement, le Parti Québécois et Québec Solidaire ont sauvé l'honneur du Québec, la députée d'origine palestinienne Ruba Ghazal déclarant : « Je suis tellement choquée. La CAQ brise la tradition pacifiste du Québec qui historiquement a toujours été du côté de la paix. La majorité des Québécois sont pour un cessez-le-feu. » Elle a déposé aujourd'hui à l'Assemblée nationale deux pétitions de 12 000 noms, dont ceux de plusieurs APLP, contre l'ouverture d'un Bureau du Québec en Israël, tant et aussi longtemps que ce pays endossera les actes criminels du régime Nétanyahou envers le peuple palestinien.
D'autre part, la décision canadienne de supprimer le financement pour l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA) est une mauvaise décision, selon les mots-mêmes du secrétaire parlementaire de la ministre des Affaires étrangères et député de la circonscription de Don Valley Ouest, à Toronto, Rob Oliphant - Mon cœur se brise, car le seul moyen d'obtenir une aide là-bas est l'UNRWA, a confié le député. Comme l'ensemble des grands syndicats canadiens, nous appelons donc le gouvernement - plutôt que de punir le député dissident - à rétablir le financement de l'UNRWA. Sa suspension était d'autant plus scandaleuse qu'elle avait été mise en vigueur le 26 janvier, tout de suite après les États-Unis, le jour où la CIJ a jugé recevable la plainte de l'Afrique de Sud contre Israël pour actes de génocide. On y voit cause à effet.
Les accusations israéliennes contre une dizaine des 28 000 employés de l'UNRWA (13 000 à Gaza) n'ont jamais été étayéesiii !
Les positions de paix noyées par les extrêmes, droites et gauches
La CIJ a ordonné que l'État d'Israël prenne des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture des services de base et de l'aide humanitaire nécessaires pour répondre aux conditions de vie défavorables des Palestiniens dans la bande de Gaza. Cette décision est contraignante pour tous les pays qui ont signé la convention sur le génocide, y compris le Canada.
Comme l'écrit Karim Kattan, écrivain palestinien, dans un essai émouvant pour Le Monde, il semble être devenu impossible pour certains soi-disant amis de la Palestine de « dire à la fois : les massacres comme ceux qui ont eu lieu le 7 octobre au festival de la Tribu de Nova sont une horreur scandaleuse, et Israël est une puissance coloniale féroce. » À une époque de défaite et de démobilisation, où les voix les plus extrémistes sont amplifiées par les médias sociaux, un culte de la force semble avoir envahi une partie de la gauche et court-circuité toute empathie envers les civils israéliens ».
La polarisation des voix a écarté la dénonciation de l'action terroriste du 7 octobre par l'extrême-gauche, ignorant la mort d'un millier de civils, dont plusieurs citoyens canadiens, causée par un extrémiste islamiste.
Le Hamas est l'ami de Nétanyahou qui l'a financé pour qu'il s'oppose au gouvernement palestinien (actuel premier ministre Mohammad Chtayyeh) : le fanatisme religieux, raciste et armé du Hamas dessert donc son propre peuple. Il est en outre devenu un prétexte pour que les Occidentaux de droite prétendent « que la guerre d'Israël n'est pas contre la Palestine mais uniquement contre le Hamas (voir le dessin approprié de notre APLP 2022, Jacques Goldstyn) et qu'on doit donc rejeter tout cessez-le-feu, tant que Tsahal n'aura pas exterminé les terroristes par la force brutale armée. Et on doit taire les interventions de l'ONU qui ne sont pas « objectives », ne reflétant pas la mentalité guerrière des « bons » pays alliés de l'OTAN qui réclament davantage d'armes ». À ce sujet, nous avons signé et tenté de faire connaître la pétition canadienne parlementaire du 3 janvieriv. Mais nous constatons aujourd'hui, au lendemain du fiasco de notre remise de prix pour la paix 2023, qu'il n'y a pas seulement les réseaux sociaux et les médias mainstream qui sont ennemis de la paix : nous promettons de vous revenir rapidement là-dessus.
Notre amie Elizabeth May m'a remercié aujourd'hui d'avoir appuyé « son appel à élargir notre cadre de référence - notre « carte mentale » politique - d'un système bipartite avec de mauvais choix et à reconnaître qu'au Canada, nous avons cinq partis au Parlement et qu'en 2025, nous élirons non pas un président comme aux États-Unis, mais un parlement que nous voulons diversifié avec PLUS de voix pour des politiques intelligentes et responsables. Donc moins de députés conservateurs et moins de libéraux et plus de tout le monde (évidemment, je veux plus de Verts), mais sur cette question, le Bloc a été formidable et nous devrions également avoir le soutien du NPD. » À bon entendeur, salut !
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NARRATIF A LA SAUCE … ! Journaliste en herbe,...

NARRATIF A LA SAUCE … !
– Journaliste en herbe, tu as pondu un sacré papier ?
– Un point sur la situation, M. le Directeur (trice).
– Avec une désinvolture stendhalienne.
– Mon arme n'a pas autant de cran pour « tirer au milieu d'un concert ! »
- Nous sommes en guerre et les plumes aussi !
- Je l'sais.
– Ce que tu tiens entre tes doigts est plus redoutable qu'un missile hypersonique.
– Je n'en doute pas, M. le Directeur.
– Et tu sais pourquoi ?
- Impacte sur les l'états d'esprit.
– Et … ?
- …, Je n'sais pas.
– Moi je l'sais. Le cours de l'Histoire, jeune homme !
- M. le Directeur, serait-ce-un crime de s'en tenir à la réalité ?
– Tu n'iras pas plus loin que le bout de ton nez, crois-moi !
- A ma place, vous choisiriez quel camp, entre Démocratie mensongère et Résistante effective ?
- Je choisirais de la fermer quand mon paradigme révolutionnaire ne porte pas aussi loin qu'un pipi d'un gnard.
– Le couteau sous la gorge ?
- Oui Monsieur ! Une brebis qui s'enhardit en s'écartant du cheptel, se fait sauvagement bouffer par les loups. Alors ne joue pas au factieux et suis le mouvement grégaire !
- J'ai compris, Monsieur le Directeur. Je vais écrire avec des tournures tranchantes que « Le tapis de bombes sur la population est un montage ».
- Par exemple
– Que ces images de bébés, de femmes et de vieillards sous les décombres, sont le fruit de l'IA* à des fins de propagande.
– Y a pas photo !
- Mais j'hésite à rectifier le tir, Monsieur le Directeur.
– Pourquoi ?
– Je trahirais la cause de l'Histoire qui condamne toute abjection humaine, comme les massacres des Indiens et les compagnes génocidaires actuelles.
– Ecoute-moi bien Journaliste frondeur (se) ! Dans la voie ferrée, Il y a deux sens : L'aller et le retour. Tu choisirais lequel ?
- J'apprécie votre sens allégorique M. le Directeur. Allons-y pour l'aller.
– Ben voilà ! T'es quelqu'un qui avance dans la vie. Si tu veux rester parmi nous, t'as qu'à respecter la cadence et le sens de la progression de notre « Big boy » *. C'est logique, non ?
- C'est plus logique, M. le Directeur, de tirer sur le signal d'alarme et de quitter le wagon !
Texte et dessin Omar HADDADOU
*Intelligence artificielle. * Locomotive mythique, la plus grande à son époque.
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