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Des cohabitations contre la pénurie de logement pour ne pas compter que sur de la construction
– Jean Pellerin - Montréal
Le gouvernement veut-il générer 72 000 cohabitations contre la pénurie ?
1. Il faut demander aux politiciens de faire faire des publicités sociétales pour inciter (incitation gentille non contraignante) des citoyens à cohabiter plutôt qu'à habiter en mode solo un logement (logement entier, étage ou chambre).
2. Le gouvernement pourrait aussi se servir d'Hydro-Québec pour donner un rabais de tarif aux personnes passant d'une occupation solo vers une cohabitation d'au moins 2 adultes, avec ou sans enfant. Une personne locataire en solo "splitterait" sa facture en 2 si elle prenait un.e coloc, et EN PLUS, Hydro-Québec diminuerait d'au moins 50% la facture à partager pour le logement.
3. Le gouvernement pourrait subventionner un organisme communautaire oeuvrant à "matcher" des gens en solo qui voudraient habiter en cohabitation, soit pour le logement au complet ou soit pour une chambre.
4. L'Assemblée Nationale du Québec pourrait voter une modification au Code Civil, donnant un nouveau droit au locataire qui passe d'une occupation solo à une occupation avec au moins un autre adulte. La cession de bail ?
5. Le gouvernement pourrait taxer un proprio qui a un local vacant mais occupable comme logement, ou qui a un logement occupé partiellement ou en permanence en AirBnb ou même qui est occupé par une personne adulte sans enfant en mode de vie en solo.
6. Les gouvernements des 2 paliers pourraient transformer le crédit d'impôt existant pour personne seule, en le remplaçant par un crédit du type : Crédit d'impôt pour personne seule dans un logement occupé en COHABITATION comprenant plus d'un adulte.
7. Le gouvernement pourrait payer une partie des frais de déménagement pour la personne qui accepte de passer d'une occupation en mode solo vers une cohabitation d'au moins 2 adultes, avec ou sans enfant.
8. Le gouvernement pourrait, pendant un temps X, payer des mensualités de loyer à des colocs, dont au moins un était auparavant dans un mode de vie en solo en logement.
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Assange et la mauvaise conscience des médias

Entre autres étonnements qui doivent saisir toute personne normalement constituée quand elle découvre la situation où se trouve le fondateur de WikiLeaks : une fois digéré le paradoxe d'un journaliste emprisonné pour avoir rendu public des crimes dont les responsables sont, eux, toujours en liberté, ne nous reste plus qu'à constater l'indignité des médias dominants, notamment français.
29 janvier 2024 | Agone.org - [LettrInfo 24-IV]
Sans remonter aux trois années de rappel quotidien, par les journaux télévisés, au milieu de la décennie 1980, que les journalistes Jean-Paul Kauffmann et Michel Seurat étaient retenus en otage au Liban. On se souvient, vingt ans plus tard, des gigantesques affiches pour la libération de la journaliste Florence Aubenas enlevée à Bagdad. Ou encore des messages diffusés quotidiennement sur France Inter pour la libération des journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot, enlevés en Irak un an plus tôt. Et en 2023, l'État français a bien sûr “appris avec un immense soulagement” le retour d'Olivier Dubois, journaliste retenu en otage au Mali depuis 2021. Le corporatisme journalistique est-il lui aussi soumis chez nous à la préférence nationale ?
Pas seulement. Parce que le traitement venimeux d'un journaliste qui n'est “pas des nôtres” est tout aussi répandu dans les autres médias occidentaux. Variation sur le thème “Deux poids, deux mesures”. Qu'il suffit d'illustrer en comparant les statuts de Julian Assange et d'Alexeï Navalny. Certains lanceurs d'alerte méritent plus que d'autres l'attention bienveillante de nos médias : selon que vous serez du côté des puissants ou contre eux, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
Mercredi dernier à la Bourse du travail de Paris, aux abords de la place de la République, avait lieu un débat autour du livre de la journaliste italienne Stefania Maurizi : synthèse de sa collaboration avec WikiLeaks et de quinze ans d'enquête sur les médias indépendants, la censure et les crimes d'État. Organisée par le Comité de soutien Assange, cette rencontre rassemblait les plus actifs de cette cause, soit Acrimed, Le Monde diplomatique, Anticor, Blast, la Ligue des droits de l'homme, Les Mutins, Le Mouvement de la paix et Le Vent se lève. Une liste de l'ensemble des soutiens de WikiLeaks réunit royalement une cinquantaine de structures, listées dans l'“Appel de Paris [sic] pour Julian Assange”, où les médias sont pour le moins minoritaires — même avec L'Humanité, AuPoste, la Fédération internationale des journalistes, Là-bas si j'y suis, Siné Mensuel et le Syndicat national des journalistes, la corporation ne pèse pas bien lourd. Et en ajoutant quelques figures politiques (dont le mathématicien et ancien élu LREM Cédric Villani et Arnaud Le Gall au nom de LFI) plus quelques notables intellectuels ou artistes ayant demandé que la France accorde à Assange l'asile politique (dont Jacques Audiard, Éric Cantona, Costa-Gavras, Mathieu Kassovitz, Edgar Morin, Thomas Piketty et Ludivine Sagnier), on a convoqué le ban et l'arrière-ban des soutiens d'Assange.
Mais le plus remarquable reste l'absence éclatante des médias dominants. En cherchant bien, on trouve évidemment dans leurs colonnes et programmes quelques articles ou émissions, sinon des brèves, ici et là, consacrées aux mésaventures d'Assange – dont un projet d'enlèvement et d'assassinat par la CIA. Mais sans insister, comme en passant. Sinon en étant plus ou moins malveillants, avec des papiers truffés d'erreurs (comme dans L'Obs) ou ambigus — comme Pierre Haski sur France Inter, Edwy Plenel dans Mediapart, les éditoriaux du Monde, etc.
Il semble en outre que, plus on monte en classe et en importance sociales, plus on est informé, plus on s'aligne sur la propagande officielle, aussi grossière soit-elle. Intervenant mercredi dernier aux côtés de Stefania Maurizi, la journaliste au Monde diplomatique Anne-Cécile Robert racontait qu'invitée en 2022 avec François Hollande à l'université d'été de l'École du Centre-Ouest des avocats, elle avait demandé à l'ancien président les raisons pour lesquelles la France n'avait pas, à l'instar d'autres pays — dont la Bolivie, le Honduras, Cuba, l'Argentine, le Brésil, le Mexique, le Venezuela, le Nicaragua et la Colombie —, soutenu la libération d'Assange en lui offrant asile. Tressautant, l'ex-président invoqua un “vol de documents”… Cette défausse dérisoire ne vaut pas celle de Gérald Darmanin face aux “coups de sang légitimes de ceux qui souffrent et qui gagnent pas beaucoup d'argent” — élévation du culot politique au meilleur de l'art dramatique. Mais elle thahit l'habitude du mensonge et l'impunité des vilaines petites lâchetés.
Pour autant, la meilleure information ne manque pas sur L'Affaire WikiLeaks : en plus d'un autre livre important, L'Affaire Assange. Histoire d'une persécution politique, par Nils Melzer, ancien rapporteur sur la torture de la Commission des droits de l'homme des Nations unies (du même auteur, lire aussi “Cajoler Pinochet, briser Assange”), signalons deux documentaires : Hacking Justice et Ithaka.
Mais, on l'a compris, on ne peut pas compter sur grand-monde pour leur diffusion — qu'il s'agisse de médias, d'édition, de librairie ou de cinéma… Pourtant, cette affaire ne se réduit pas à ce que vit un individu, aussi remarquable soit-il, juste sa cause et injuste le traitement qu'il subit. Le message adressé par les maîtres du monde au travers de l'“affaire WikiLeaks” concerne toute personne soucieuse de sa liberté d'expression : voilà ce qui vous attend si vous bravez l'ordre dominant.
Hacking Justice
Ithaka
L'affaire Assange
L'affaire Wikileaks
Sur L'Affaire WikiLeaks, en attendant deux interviews de Stefania Maurizi (dans Blast et Elucid), lire en ligne :
— “Un jeu inégal. Préface à L'Affaire WikiLeaks”, Serge Halimi (Au jour le jour, janvier 2024)
— “‘À l'heure où j'écris ces lignes…' Avant-propos à L'Affaire WikiLeaks”, Ken Loach (Au jour le jour, janvier 2024)
Également :
— “‘Stefania Maurizi : ‘Si Julian Assange est extradé, ce sera sa mort morale et la mort éthique du journalisme'”, propos recueillis par Meriem Laribi, Marianne, 24 janvier 2024
— “L'Affaire Wikileaks, de Stefania Maurizi, leçons d'investigation”, France Culture, 20 janvier 2024
— “Là où Julian Assange a des amis”, Meriem Laribi (Le Monde diplomatique, février 2023)
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Le Canada face à Gaza et aux demandeurs d’asile palestiniens : deux poids, deux mesures

Confronté à la crise en Ukraine, le gouvernement Trudeau a agi de manière rapide et ouverte, mais son traitement du cas de Gaza a été marqué par le retenue et le manque de conviction.
24 janvier 2024 / KEN THEOBALD/traduction Johan Wallegren
Près de 50 000 Palestiniens vivent au Canada. La plupart d'entre eux sont arrivés ici en tant que réfugiés. Cette communauté ne représente qu'une petite partie de la diaspora palestinienne mondiale, qui se chiffre à 7 millions de personnes. Assister de loin à la guerre est source d'impuissance et d'angoisse pour ceux qui font partie de cette diaspora.
Les Palestiniens sont un peuple apatride : 80 % d'entre eux ont été déplacés et 50 % vivent en dehors des frontières de leur patrie historique. Le droit au retour leur semble de plus en plus hors de portée. De nombreuses personnes faisant partie de la diaspora ont des membres de leur famille élargie ou des amis actuellement piégés à Gaza.
Lima Al-Azzeh, une jeune Palestinienne vivant à Vancouver, a récemment rédigé une chronique pour l'émission First Person de la CBC. Elle y parle de son sentiment d'impuissance et de la souffrance qu'elle éprouve en silence alors qu'elle attend des nouvelles des membres de sa famille à Gaza :
Et puis il y a les autres silences à affronter. Ceux que l'on sent comme étant plus personnels. On voit qui a protesté et qui ne l'a pas fait. On voit qui s'est manifesté avec un mot de soutien ou de réconfort et qui ne l'a pas fait. On voit qui, au fil des ans, s'est soucié de nous poser des questions sincères sur ce que cela signifie que d'être Palestinien. Il y a ce qu'on ressent quand on a le mal du pays et qu'on est confronté jour après jour à l'impossibilité d'y retourner.
Il s'agit du sixième conflit sur la période des quinze dernières années où les Palestiniens de Gaza ont été victimes de massacres perpétrés par l'armée israélienne. La guerre actuelle est certainement la plus dévastatrice, les Israéliens ayant exprimé leur intention d'éradiquer la vie palestinienne. Les dirigeants israéliens d'extrême droite qualifient d'« animaux humains » les Palestiniens qui ne font qu'essayer de survivre face aux déplacements massifs, aux bombardements incessants, au nettoyage ethnique, à la destruction de leurs maisons, au manque de soins médicaux, à la quasi-inexistence d'installations sanitaires et à la faim.
Il est difficile de ne pas croire que ce dont le monde est témoin à Gaza constitue la définition même du génocide – une tentative délibérée de « détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux » en « infligeant délibérément au groupe des conditions d'existence calculées pour entraîner sa destruction physique totale ou partielle ».
Les Palestiniens peuvent trouver un certain réconfort dans le mouvement mondial de solidarité qui a émergé, y compris l'extraordinaire solidarité manifestée par l'Afrique du Sud. La diaspora palestinienne joue un rôle important en contribuant à la mobilisation, à la prise de parole et à l'appel à un cessez-le-feu permanent et en aidant des membres de familles élargies et d'autres palestiniens à demander l'asile.
En 2019, Jihan Qunoo, qui œuvrait alors comme travailleuse humanitaire à Gaza, a été la cible de menaces de la part des autorités locales. Elle s'est enfuie au Canada où elle a été accueillie comme réfugiée, contrainte de prendre la déchirante décision de laisser derrière elle son mari et ses trois filles en bas âge. Il lui a fallu deux ans et une campagne publique très médiatisée pendant la pandémie pour réussir à réunir sa famille autour d'elle. Madame Qunoo a bénéficié du soutien de Jenny Kwan, députée néo-démocrate de Vancouver-Est, et du Rural Refugee Rights Network (réseau rural pour les droits des demandeurs d'asile) de la région d'Ottawa, une organisation qui a aidé 14 autres familles palestiniennes.
En octobre 2023, Mme Qunoo a repris son rôle de militante et d'organisatrice, cette fois au nom des frères et des sœurs restés au pays, en vue de leur donner une chance d'échapper aux horreurs de la guerre à Gaza. Il y a aussi des gens comme Osama Ebid, qui est arrivé au Canada en 1994 et dont tous les frères et sœurs sont restés à Gaza. Il est aujourd'hui l'organisateur d'un groupe de mille Canadiens d'origine palestinienne qui cherchent à sauver des membres de leur famille élargie.
Au Canada, les gens comme Jihan et Osama se comptent par centaines et reçoivent le soutien de groupes ad hoc d'avocats, de travailleurs juridiques, de défenseurs des demandeurs d'asile et de responsables communautaires. Ces personnes plaident pour le regroupement familial et parallèlement, elles lancent des appels au cessez-le-feu et réclament plus d'aide humanitaire.
Les Canadiens d'origine palestinienne ont initialement été portés par l'espoir engendré par le soutien que le gouvernement Trudeau a offert aux Ukrainiens en 2022. Moins d'un mois après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, M. Trudeau avait annoncé toute une série de programmes destinés à aider les Ukrainiens déplacés et leurs familles. Ceux-ci se sont vu offrir un statut temporaire prolongé au Canada assorti du droit de travailler, d'étudier et de rester jusqu'à ce qu'ils puissent rentrer chez eux en toute sécurité, cela sans contingentement. Finalement, plus d'un million d'Ukrainiens se sont vu offrir des visas, sans qu'aucun lien familial avec le Canada ne soit exigé.
En décembre, le Gaza Family Reunification Project (projet de réunification familiale pour Gaza, un collectif ad hoc d'avocats spécialisés dans l'immigration et les demandes d'asile), la Canadian Association of Refugee Lawyers (association canadienne des avocats spécialisés dans les questions d'asile), le Conseil canadien pour les réfugiés et plus de 550 familles canado-palestiniennes ont demandé au gouvernement fédéral d'adopter un plan d'immigration similaire en réponse à la situation urgente à Gaza.
Le 21 décembre, après des mois de plaidoirie de la part de Canadiens d'origine palestinienne et de défenseurs des droits de l'homme, le ministre de l'immigration Marc Miller a finalement annoncé un dispositif d'immigration spécial pour les habitants de la bande de Gaza demandeurs d'asile. Ceux-ci se verront offrir des visas temporaires de trois ans s'ils remplissent certaines conditions d'admissibilité et de sécurité. Avoir des membres de sa famille au Canada est une condition sine qua non.
Une nouvelle choquante a suivi une semaine plus tard, le 28 décembre : Monsieur Miller a annoncé que les mesures spéciales d'immigration pour les Palestiniens ne pourraient s'appliquer qu'à un total de mille personnes. Les familles et les organisateurs avaient alors déjà bien plus que ce nombre de noms à soumettre. Cette décision a été rapidement dénoncée par les défenseurs des droits de l'homme et décriée comme étant raciste et relevant d'une politique de deux poids, deux mesures.
Ce plafond signifie que les candidats seront en concurrence les uns avec les autres, ce que la députée Kwan a comparé à des « Hunger Games » pour demandeurs d'asile.
La différence de traitement entre les demandeurs d'asile ukrainiens et palestiniens est une injustice flagrante. La réaction du gouvernement Trudeau à la situation en Ukraine a été rapide et ouverte. Aucun plafond n'a été fixé pour le nombre de demandes et les candidats n'étaient pas tenus d'avoir des proches au Canada. Ottawa a finalement reçu 1 189 320 demandes de la part d'Ukrainiens et en a approuvé 936 293, avec des arrivées au Canada se chiffrant à 210 178.
En octobre, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a décrit Gaza comme étant « l'un des pires endroits au monde où se trouver en ce moment ». M. Miller a qualifié l'état de la situation sur place d'« invivable ». Bien que le gouvernement Trudeau reconnaisse qu'il n'y a pas de lieu sûr à Gaza, il a réagi avec retenue et manque de conviction tant à l'appel au cessez-le-feu qu'à la crise des réfugiés, faisant primer les préoccupations de sécurité.
Lors d'une entrevue accordée à l'émission du matin de la CBC, Ottawa Morning, le 11 janvier, M. Miller a parlé du programme spécial en déclarant : « nous avons des préoccupations extrêmes en matière de sécurité », répétant les mots « sécurité » et « terrorisme » à plusieurs reprises.
La procédure de demande d'asile pour les ressortissants de Gaza exige de fournir des renseignements personnels d'un niveau de détail sans précédent. On demande aux candidats de dévoiler leurs comptes de médias sociaux, tous leurs anciens numéros de téléphone et adresses électroniques, de présenter tous les passeports qu'ils ont eus et de détailler « toutes blessures ayant nécessité des points de suture ou une attention médicale ».
Le formulaire de candidature doit être rempli avec « un historique complet et détaillé des emplois occupés depuis l'âge de 16 ans, y compris les dates exactes, une description détaillée des rôles et responsabilités, le(s) nom(s) des superviseur(s), la raison du départ et tout problème disciplinaire ».
Le Canada réserve un traitement similaire à tous les demandeurs d'asile du Moyen-Orient – y compris ceux de Syrie, d'Afghanistan, d'Irak et maintenant de Gaza – qui sont souvent considérés comme des menaces potentielles et un risque de sécurité.
Dans une récente tribune publiée dans le journal étudiant The Tribune de l'université McGill, Dima Kiwan a écrit : « La politique inéquitable du Canada à l'égard des demandeurs d'asile ne reflète pas seulement la paresse du gouvernement, mais aussi le poids d'une rhétorique raciste, malheureusement courante, qui circule dans les médias grand public, selon laquelle les réfugiés ukrainiens, dont la majorité sont des Européens blancs et chrétiens, s'intégreront mieux à la société canadienne ».
Pour ne pas risquer de penser qu'il s'agit d'une aberration, il faut savoir que le Canada n'a jamais adopté de mesures spéciales en matière d'immigration à l'égard d'un peuple ou d'un pays d'Afrique.
Ce type de traitement différentiel et ce genre de manifestations de racisme peu subtiles remontent loin dans le temps au Canada, où l'immigration et la politique étrangère ont souvent été alignées sur les intérêts des grandes entreprises et des États-Unis.
Le Conseil national des musulmans canadiens, ainsi que de nombreuses autres organisations, demandent au gouvernement fédéral de supprimer le plafond de mille personnes fixé pour le nombre de Palestiniens pouvant demander l'asile au Canada.
Il est impératif de soutenir ces appels à la levée du plafond et à l'élargissement des critères d'admissibilité pour les Palestiniens. On demande aussi au gouvernement de renoncer à tous frais de demande et de faciliter l'évacuation des demandeurs d'asile de Gaza. Par-dessus tout, les gens de conscience doivent continuer de réclamer un cessez-le-feu permanent, la fin de cette guerre génocidaire et un recentrage sur l'aide humanitaire pour Gaza.
Ken Theobald est un travailleur communautaire et un militant anti-pauvreté basé dans la banlieue nord-ouest de Toronto.
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Northvolt sans BAPE, c’est NON : Mobilisation marche funèbre

Évènement de Comité Action Citoyenne-Projet Northvolt
Gare de McMasterville, rue du Purvis-Club, McMasterville
À tous les citoyens de la Vallée du Richelieu et de de partout ailleurs, groupes environnementaux, communautaires et syndicaux !
Venez participer à ce GRAND RASSEMBLEMENT FAMILIAL ET PACIFIQUE afin d'exiger la tenue d'un BAPE au sujet de Northvolt.
Dimanche le 4 février 2024, de 13 h à 15 h30
Départ : Stationnement de la gare de McMasterville, 399 rue du Purvis Club, McMasterville.
Arrivée : 255 Boul. Constable, (les personnes à mobilité réduite pourront s'y stationner)
Arrivée prévue 13 h 45..
Pour cette marche funèbre, nous réclamons la tenue d'une enquête du BAPE (Bureau d'audiences publiques en environnement) AVANT la construction de l'usine de Northvolt. Les normes sociales, environnementales et économiques ainsi que les lois doivent être respectées, pas enterrées vivantes !
Les gouvernements fédéral et provincial autorisent Northvolt à construire une giga-usine de batterie en Montérégie et leur octroient 7,3 milliards $ de nos impôts, SANS
AUCUNE ÉTUDE ENVIRONNEMENTALE OU SOCIALE.
Northvolt sans BAPE, c'est non !
Privatisation de la vente d’électricité : une opération à haut risque pour les ménages québécois
Nous, associations de défense des droits des consommateurs présentes à travers le Québec, exprimons notre profonde préoccupation face au projet de privatisation et de fin du monopole d'Hydro-Québec sur la vente d'électricité.
Joanie Ouellette, analyste des enjeux économiques et énergétiques, Union des consommateurs
Émilie Laurin-Dansereau, Conseillère budgétaire, ACEF du Nord de Montréal
Alors que de nombreux ménages luttent déjà pour payer leur facture d'électricité, cette privatisation risque de se traduire par une hausse des tarifs pour les consommateurs, et ainsi, d'exacerber la crise actuelle de hausse du coût de la vie.
Impact sur les consommateurs résidentiels
La libéralisation du marché de l'électricité, loin d'être une solution anodine, présente des risques significatifs. Nous pouvons déjà prévoir que la compétition pour les ressources entre Hydro-Québec et les entreprises privées augmentera les coûts de production. En effet, les gisements disponibles pour l'éolien et les cours d'eau pouvant générer de l'hydroélectricité sont limités. Selon son Plan d'action 2035, Hydro-Québec a besoin de 8 000 à 9 000 MW supplémentaires. Si les entreprises privées s'accaparent les meilleurs gisements, Hydro-Québec devra développer cette nouvelle capacité sur des sites moins rentables, ce qui augmentera considérablement les tarifs.
Plusieurs pays ont déjà mis en place un processus de libéralisation de leur secteur de l'électricité. Bien que chaque modèle de marché d'électricité privé soit différent, une tendance ressort : la libéralisation mène à une augmentation drastique des tarifs, en plus de nécessiter des interventions étatiques coûteuses.
En Californie, la libéralisation du secteur de l'électricité a mené à une crise énergétique majeure, marquée par une hausse fulgurante des prix et de longues pénuries. En France, les tarifs d'électricité ont augmenté de 60 %, alors que l'inflation n'était que de 15 %. En Ontario, l'ouverture au privé du marché de l'électricité, dans les années 2000, a, là aussi, conduit à une hausse significative et rapide des prix. Le gouvernement de l'Ontario a été forcé de réagir en réintégrant progressivement des mesures de réglementation et de contrôle des prix de l'électricité.
La hausse des tarifs, un vrai problème
Certains défendent l'idée que les tarifs sont trop bas au Québec. Selon cette logique, il ne serait donc pas grave – voire souhaitable – que les tarifs augmentent afin d'envoyer des signaux-prix incitant les Québécois à réduire leur consommation d'énergie.
Or, cet argument néglige un aspect crucial : l'électricité est un bien à faible élasticité de la demande. En effet, les variations de prix entraînent peu de changements dans la consommation en raison de la dépendance des consommateurs à ce service essentiel. L'électricité répond à des besoins fondamentaux comme le chauffage, l'eau chaude, la cuisson et la conservation des aliments, l'éclairage, etc., limitant ainsi la capacité des individus à ajuster leur consommation. De plus, cette consommation dépend largement de facteurs indépendants de la volonté individuelle, comme les conditions météorologiques ou la performance énergétique des bâtiments et des appareils électroménagers, affectant particulièrement les ménages à faible revenu.
Un ménage sur sept éprouve déjà de la difficulté à payer sa facture d'électricité ou doit effectuer des sacrifices pour y parvenir. En 2023, environ 178 000 ménages ont dû conclure une entente de paiement avec Hydro-Québec pour éviter un débranchement.
Il est donc peu probable que la seule augmentation des tarifs puisse permettre de réduire la consommation d'électricité des Québécois. La conséquence la plus immédiate d'une hausse des tarifs sera d'alourdir une fois de plus le fardeau économique des ménages à faible revenu.
Le gouvernement devrait plutôt envisager l'octroi d'aides pour améliorer la performance énergétique des bâtiments, en ciblant d'abord les logements locatifs. Cette option gagnant-gagnant permettrait de réduire la pression exercée sur Hydro-Québec pour développer sa capacité électrique tout en améliorant la situation des ménages, notamment les plus défavorisés.
De quoi avons-nous réellement besoin ?
Bien qu'une privatisation directe d'Hydro-Québec, par la vente de ses actifs à des acteurs privés, semble peu probable, il y a toutefois un réel risque de libéralisation du secteur de l'électricité, transformant un service public essentiel en une industrie soumise aux fluctuations du marché. Cela met en péril la mission fondamentale d'Hydro-Québec, qui est de fournir aux Québécois l'accès à de l'électricité abordable.
Entreprendre une privatisation sans l'analyse approfondie des conséquences pour les ménages québécois est imprudent. Les associations de défense des droits des consommateurs du Québec se désolent de l'approche actuelle, caractérisée par un manque de transparence et par l'absence de planification intégrée. Nous appelons le gouvernement à ouvrir le dialogue afin de s'assurer de prendre la pleine mesure des risques encourus pour les ménages québécois et de planifier le développement énergétique du Québec avec la communauté civile, non pas pour les industries, mais bien en fonction de l'intérêt des Québécois avant toute autre considération.
Signataires :
ACEF des Bois-Francs
ACEF de l'Est de Montréal
ACEF Estrie
ACEF de Lanaudière
ACEF de Laval
ACEF de la Péninsule
ACEF de Québec
Centre de recherche et d'information en consommation
Coalition des associations de consommateurs
Service d'aide au consommateur de la Mauricie
Service budgétaire Lac-Saint-Jean-Est
Service budgétaire de St-Félicien
Solutions Budget Plus, Sherbrooke
Union des consommateurs
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Un œil critique sur le « documentaire » de Poilievre sur le logement

Le chef conservateur propose des mesures qui enrichiront encore davantage les promoteurs et les investisseurs qui ont déjà une mainmise sur l'immobilier au pays. « L'enfer du logement », le mini-documentaire de Pierre Poilievre sur la crise du logement, a été visionné des millions de fois sur X (anciennement Twitter) et YouTube.
Tiré de Canadian Dimension
28 décembre 2023 / DE : Alex Grant / Traduction Johan Wallengren
S'étalant sur une quinzaine de minutes, cette vidéo léchée énonce un certain nombre de données statistiques non sans intérêt. La vision de la crise sous un angle capitaliste, libertaire et axé sur l'économie de marché pourrait avoir un attrait pour les segments de la classe ouvrière qui cherchent à comprendre « comment nous en sommes arrivés là et ce que nous pouvons faire pour nous en sortir », selon la formule de Poilievre.
Cependant, même si la vidéo fait le constat du problème, la seule solution proposée est de donner plus de pouvoir aux sociétés du secteur privé et aux promoteurs qui ont profité de la crise du logement (c'est-à-dire du manque de logements) au Canada. Elle s'en prend aussi aux municipalités qui envisagent des solutions de rechange, comme le développement du logement social en particulier. Il importe de battre en brèche les mythes qui émaillent la narration de Poilievre afin de créer un élan en faveur de mécanismes qui peuvent réellement résoudre la crise du logement tout en venant en aide aux travailleurs canadiens ordinaires et aux communautés marginalisées.
Après tout, la question du logement vient seulement d'émerger sur la scène politique canadienne comme un dossier d'importance vitale. Selon un sondage réalisé par Nanos Research, 14 % des Canadiens mettent le logement en tête de leurs préoccupations (seule l'inflation va chercher plus, avec 18 %). En tant que parti au pouvoir aux prises avec cette crise, les libéraux de Trudeau n'ont la confiance que de 16 % des Canadiens qui les voient comme les mieux outillés pour trouver des solutions. Les conservateurs n'ont pas tardé à se saisir de ce dossier en prévision des prochaines élections, qui pourraient se tenir dès l'an prochain.
La thèse de Poilievre
Poilievre, qui est le narrateur de la vidéo « L'enfer du logement », commence par lancer un appel aux jeunes qui font mine d'avoir abandonné l'idée d'être propriétaires d'une maison. Cette rhétorique s'est avérée efficace pour le leader conservateur, qui a fait souffler un « vent de jeunesse » dans les rangs de ses sympathisants, grâce aux gains réalisés parmi les milléniaux et les Canadiens plus jeunes. Par exemple, aux élections de 2015, 45 % des personnes âgées de 18 à 25 ans ont voté pour les libéraux et seulement 20 % pour les conservateurs. Les proportions se sont depuis inversées, puisqu'un sondage réalisé auprès des moins de 30 ans crédite Poilievre de 39 % des intentions de vote, contre 16 % pour Trudeau.
Une donnée statistique s'affiche au début de la vidéo : « 66 % DU REVENU MENSUEL MOYEN POUR LES PAIEMENTS D'UN LOGEMENT MOYEN ». Elle est suivie de commentaires de Poilievre selon lesquels il faut environ 25 ans pour économiser la mise de fonds nécessaire pour l'achat d'une maison à Toronto, la plus grande ville du Canada, alors que le loyer moyen à l'échelle du pays a doublé depuis 2015.
Le fait que Poilievre prenne 2015 comme année de référence n'a rien d'anodin, puisque cette année marque le début du règne de Justin Trudeau en tant que premier ministre.
Il y a huit ans, le loyer moyen d'un appartement à une chambre à coucher était de 973 $, contre 1 871 $ en 2023. Durant la même période, les paiements hypothécaires moyens sont passés de 1 418 $ à 3 562 $ et les mises de fonds minimales, de 22 635 $ à 51 060 $.
Poilievre enfonce le clou avec ces statistiques choquantes, qu'il met en contraste avec les coûts du logement de 2015, qui ne représentaient que 40 % du revenu médian [rappelons cependant que cette proportion de 40 % est nettement supérieure aux 30 % recommandés par la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL)].
Déficits, planche à billets et inflation
Après avoir rapidement exposé les faits saillants concernant la crise de l'accessibilité aux logements (et le manque de disponibilité de ceux-ci) au Canada, la vidéo avance une explication quant à la façon dont nous en sommes arrivés là. Or, c'est là que le bât blesse. La première cible de Poilievre est la tendance du gouvernement Trudeau à creuser le déficit public et sa propension à recourir à l'« assouplissement quantitatif », un moyen de créer de la monnaie. Selon les conservateurs, ces techniques ont permis une augmentation de la masse monétaire huit fois plus rapide que la croissance du PIB au cours des trois dernières années, alimentant ainsi l'inflation. Poilievre affiche ensuite ses couleurs de populiste en montrant comment les rachats d'obligations aux fins d'assouplissement quantitatif par la Banque du Canada garantissent de gros bénéfices aux « riches investisseurs dont les relations bancaires leur permettent d'être les premiers servis ».
Le chef conservateur n'a pas tort sur le fond. La croissance de la masse monétaire sans augmentation des biens et services dans l'économie dilue la valeur de la monnaie, ce qui est générateur d'inflation. Mais il se garde bien d'évoquer les autres ressorts de l'inflation, comme le gonflement artificiel des prix. Selon une étude, les bénéfices des sociétés, exprimés en pourcentage du PIB, ont augmenté de 25 % en 2022 par rapport aux sommets atteints avant la pandémie. En termes monétaires, lit-on dans une analyse publiée par Canadiens pour une fiscalité équitable, les bénéfices de 2022 étaient supérieurs de 275 milliards de dollars à ceux de 2019.
D'autres études ont montré que la financiarisation (le processus par lequel les élites économiques acquièrent un plus grand contrôle sur la politique économique) est un moteur particulièrement important de l'augmentation des prix de l'immobilier. En 2020, en Ontario et en Colombie-Britannique, près de 40 % du parc immobilier était détenu par des sociétés ou des investisseurs et spéculateurs possédant plusieurs logements. Poilievre cite des données de la Banque du Canada montrant que les achats de logements par des investisseurs ont doublé en 2021. Toutefois, bien qu'il souligne le rôle des investisseurs dans l'augmentation artificielle du coût du logement, « L'enfer du logement » finit par proposer des mesures qui enrichiront davantage les promoteurs immobiliers et les investisseurs qui possèdent déjà une grande partie du parc immobilier au Canada. Nous y reviendrons.
Ensuite, Poilievre fustige la décision de la Banque du Canada d'augmenter les taux d'intérêt pour brider l'inflation, affirmant que cela ne serait pas nécessaire s'il n'y avait pas de « déficits inflationnistes ». Ce faisant, il simplifie les choses à l'extrême en prétendant que l'équilibre budgétaire ferait baisser l'inflation, ce qui, par ricochet, tempérerait les taux d'intérêt élevés qui font grimper les paiements hypothécaires. Or, un programme d'austérité qui passe par l'atteinte de l'équilibre budgétaire ne permettra en rien de lutter contre l'inflation induite par l'appât du gain. Ajoutons qu'il faudrait attendre longtemps pour voir des effets perceptibles d'une telle manœuvre et que cela reviendrait à ignorer la raison première des déficits.
L'explosion de la dette fédérale du Canada a en grande partie été générée par les programmes d'aide publique de la période de la pandémie, qui ont été largement soutenus par les conservateurs. Les conservateurs ont même réclamé des aides au paiement des loyers et des prêts aux entreprises plus généreux. L'Institut Fraser, avec ses idées très à droite, chiffre le coût des programmes COVID du Canada à 359,7 milliards de dollars. De ce montant, environ 110 milliards de dollars sont allés aux travailleurs au titre de la prestation canadienne d'intervention d'urgence (CERB) et de programmes connexes. Le reste, qui représente l'écrasante majorité de la dette dont Poilievre se plaint, a été distribué sous forme de subventions salariales, de prêts préférentiels et d'autres formes d'aide sociale aux entreprises pour lesquels les conservateurs ont également voté. Si Poilievre voulait être cohérent, il exigerait que les entreprises, en particulier celles qui étaient rentables et qui n'avaient pas besoin d'aide, remboursent les largesses du gouvernement dont elles ont bénéficié pendant la pandémie.
Distorsion des données sur le logement
Poilievre se met ensuite à scruter le retard pris par le Canada en matière de construction de logements. On voit qu'en 1972, alors que le Canada comptait 22 millions d'habitants, 230 000 logements étaient construits chaque année. En 2022, avec une population proche d'atteindre 40 millions d'habitants, nous n'avons construit que 220 000 logements.
La SCHL estime qu'à ce rythme, il manquera 3,5 millions de logements au Canada d'ici 2030. « L'enfer du logement » blâme les taux d'intérêt élevés et la « paperasserie », ces deux facteurs étant amalgamés sous la désignation de « gouvernement ».
Poilievre poursuit en citant une étude de l'Institut C.D. Howe selon laquelle, pour une maison moyenne de Vancouver, il faut ajouter 1,3 million de dollars de dépenses aux coûts de construction. Selon ses termes, ces surcoûts viennent des « barrières administratives », sous-entendu la paperasserie et la bureaucratie gouvernementale.
Or, à la lecture de cette étude, on se rend compte que Poilievre déforme les faits. Selon l'Institut C.D. Howe, « ce qui est mesuré, c'est intrinsèquement l'écart entre les coûts de construction des logements et le coût final pour les acheteurs. On mesure certes un écart, mais on n'analyse pas les dynamiques en jeu. La différence pourrait tout aussi bien s'expliquer par les profits amassés par les entreprises de construction ou les spéculateurs fonciers. Il ressort même de cette étude que certains droits municipaux prélevés pour la construction d'infrastructures locales peuvent en fait redonner de la valeur aux propriétés.
Accusations voilées et attaques contre les municipalités
Les médias de l'extrême droite se plaignent du fait que Poilievre n'a pas adopté l'argumentaire ouvertement raciste consistant à imputer la crise du logement aux immigrés et au « programme d'ouverture des frontières et d'immigration de masse de Trudeau ». Les stratèges conservateurs font sciemment l'impasse sur cette question, car ils se voient gagner du terrain auprès des communautés d'immigrés qui votaient auparavant pour les libéraux. Dans les passages de la vidéo où l'on s'en prend à la bureaucratie et aux barrières administratives, on voit apparaître à deux reprises la mairesse sino-canadienne de Toronto, Olivia Chow. Il est injuste, et pas rien qu'un peu, de s'en prendre à Madame Chow dans un contexte où l'on dénonce la crise du logement, sachant que celle-ci n'est en poste que depuis à peine six mois. On peut raisonnablement supposer qu'elle est ciblée à cause de ses origines ethniques et son appartenance au NPD, qui sont des caractéristiques susceptibles de réveiller l'hostilité de la droite. Si l'on voulait mettre un visage sur l'échec de la construction de logements abordables en Ontario, c'est plutôt Doug Ford qu'il faudrait mettre en exergue.
L'argumentaire de base des conservateurs est que la crise du logement peut être résolue en supprimant les subventions accordées aux « administrations municipales qui bloquent la construction de logements » - subventions qui va selon eux créer une nouvelle couche de bureaucratie.
Des réglementations municipales restrictives en matière de zonage ont certes joué un rôle dans le ralentissement du développement de projets immobiliers, mais les propositions de Poilievre aboutiraient à la suppression d'un grand nombre de programmes mis en place pour rénover et construire des logements sociaux.
Poilievre prévoit prendre en otage 4,5 milliards de dollars de subventions fédérales destinées aux municipalités et ne débloquer les fonds qu'à partir du moment où celles-ci construisent 15 % de logements de plus que l'année précédente. La question de savoir comment les villes et les régions sont censées atteindre cet objectif, alors même qu'elles sont privées des fonds censés les aider à construire des logements et des infrastructures connexes, n'est jamais abordée. Pour ne rien arranger, l'aide fédérale serait suspendue jusqu'à ce que les logements soient prêts à livrer, privant ainsi les municipalités de fonds essentiels pendant des années.
Or, à notre époque, les sociétés immobilières privées au Canada se portent mieux que jamais. Le secteur de la construction résidentielle au pays a en 2021 accru sa rentabilité, qui a progressé de 13,2 % sur l'année, comparativement à 12,5 % en 2020. Le volume du marché de l'immobilier résidentiel a augmenté d'environ 29 % au cours des cinq dernières années, pour atteindre 5,93 billions de dollars américains en 2023, et devrait selon les projections croître à un taux annuel supérieur à 4 % au cours des cinq prochaines années.
Les FPI, ou fiducies de placement immobilier, sont un autre ressort de la crise du logement qui n'est jamais mentionné par Poilievre. Ces fonds privés bénéficient d'un statut fiscal préférentiel et ont généré un rendement moyen de 9,7 % depuis qu'ils sont entrés à la Bourse de Toronto en 1997. Plus de 340 000 logements, soit entre 20 et 30 % de ceux construits spécifiquement aux fins de location, sont détenus par des FPI. L'univers des FPI comprend des logements dont les locataires à faibles revenus ont été évincés pour en reconstruire de nouveaux (« démoviction ») et on y dénote une tendance générale à pousser les loyers à la hausse pour maximiser les bénéfices des investisseurs. Aux côtés des grands fonds de pension et des sociétés de capital-investissement, les FPI se sont emparés de l'immobilier canadien à un rythme alarmant.
Le secteur du logement au Canada est largement dominé par des intérêts privés, ce dont on peut faire le constat sans passer pour un radical. Nonobstant la rhétorique de Poilievre, il importe de comprendre que la crise actuelle est un échec du capitalisme non réglementé. Il est démontrable que la recherche du profit ne s'accommode pas avec le besoin humain fondamental de se loger.
Public ou privé
Le programme des conservateurs en matière de logement, tel qu'il est présenté dans le documentaire vidéo de Poilievre, se concentre principalement sur la maximisation des profits des promoteurs, ignore la domination rampante des conglomérats immobiliers et néglige le besoin urgent d'ajouter davantage d'options abordables ou publiques à l'éventail de logements offerts. Il suffit de regarder ce que voulait faire le gouvernement Ford en Ontario. Celui-ci était prêt à céder une partie des terres protégées autour de Toronto à ses amis promoteurs. Une immense vague de mécontentement dans l'opinion publique a forcé l'abandon de ces plans, mais cela donne une idée de ce qui peut se passer lorsque les garde-corps sont abaissés et que les promoteurs sont autorisés à « construire, construire, construire ».
Une autre proposition de « l'enfer du logement » est la privatisation de 15 % des bâtiments du gouvernement fédéral et de milliers d'hectares de terres fédérales. Le passé nous enseigne que le fait de multiplier les possibilités de profit sans poser de conditions n'entraîne pas la construction de logements bon marché ni de qualité. Au lieu de cela, les spéculateurs vont soit construire des logements de luxe qui rapportent plus, soit garder des terrains en réserve dans l'attente d'un meilleur rendement.
La seule façon dont le régime d'austérité de Poilievre, qui prévoit un budget obligatoirement équilibré, pourrait faire baisser l'inflation et les taux d'intérêt serait un scénario où les réductions de services (qui s'accompagneraient de licenciements) déclencheraient une récession, comme cela s'est produit dans d'autres pays. Le remède serait alors sans nul doute pire que le mal et produirait une hausse du chômage et une baisse des recettes publiques qui feraient augmenter le ratio dette/PIB. Le fait de priver les villes d'un soutien financier essentiel, en particulier à un moment où l'immigration atteint des sommets, ne ferait qu'aggraver les choses.
Doper le capitalisme et les profits des entreprises qui ont présidé à la présente crise n'est pas la solution ; l'histoire nous montre par contre que l'intervention directe de l'État peut être porteuse de solutions clés. Avant les coupes opérées par les libéraux de Chrétien et Martin dans les années 1990, le Canada construisait chaque année environ 16 000 logements sans but lucratif ou coopératives d'habitation. En 1970, plus de 40 000 logements ont été construits par le gouvernement fédéral.
Le logement public et social constitue également un levier permettant d'exercer une pression à la baisse sur les prix du marché privé en agissant comme un concurrent qui tire les prix des logements vers le bas et réduit la pression sur la demande en incitant les gens à se tourner vers le secteur non lucratif. En s'attaquant à de tels programmes, les conservateurs montrent leur propension à permettre aux promoteurs privés d'augmenter les coûts des logements sans craindre une quelconque concurrence publique.
Lors des élections de 2004, Jack Layton, alors chef du NPD, s'est illustré en accusant Paul Martin d'être responsable de la mort de sans-abri à la suite des coupes dans les logements sociaux qu'il a supervisées dans les années 1990 (il a même écrit un livre à ce sujet). Au moment de cette sortie publique, Jack Layton a subi un retour de bâton médiatique, mais l'histoire lui a donné raison. Trente années de déréglementation de l'utilisation des sols, d'accès sans restriction et de subventions aux promoteurs et de marginalisation du secteur public nous ont conduits à la situation critique que nous connaissons aujourd'hui.
Toronto espère construire 65 000 logements à loyer contrôlé d'ici 2030 et la déclaration économique d'automne du gouvernement fédéral prévoit mettre de côté 1 milliard de dollars pour construire 7 000 nouveaux logements abordables. Or, c'est l'équivalent d'une goutte d'eau dans l'océan par rapport aux 3,5 millions de logements que la SCHL estime nécessaire de construire. Et sous un gouvernement Poilievre, même ces modestes mesures pourraient être déclarées « bureaucratiques » et être abolies sans crier gare.
Les conservateurs ont de bonnes chances de remporter les prochaines élections fédérales et à moins d'un revirement, ils pourront alors mettre en pratique leur politique du logement fondée sur le libre marché et le capitalisme libertaire. Mais les cadeaux et incitatifs offerts aux promoteurs privés, quelle que soit leur ampleur, ne sauraient les inciter à construire des logements de qualité décente et à bas prix dont le besoin est si criant. Si les sociétés immobilières peuvent gagner plus d'argent en spéculant, en reportant l'offre et en construisant des logements de luxe, c'est ce qu'elles vont faire. En l'état des choses actuel, on dénombre déjà au Canada 1,3 million de logements vacants utilisés comme des instruments d'investissement spéculatif plutôt que de servir à répondre aux besoins en matière de logement.
Nous ne pouvons pas permettre à Pierre Poilievre de s'approprier la question du logement. Il est essentiel d'accumuler des appuis en faveur de solutions réelles, loin des dogmes du libre marché, pour venir à bout de la crise. C'est la seule façon de mettre fin à l'enfer du logement qui afflige les familles canadiennes.
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“Punition collective” : la suspension des aides à l’UNRWA menace les Gazaouis de “famine”

L'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) est dans la tourmente. Neuf pays ont annoncé suspendre leurs aides à l'agence dont le rôle social et humanitaire est central dans la bande de Gaza. Au cœur de la polémique : des accusations concernant douze employés, soupçonnés d'avoir pris part aux attaques du Hamas le 7 octobre. Si certains journaux soutiennent la décision de suspension des ressources financières, d'autres, notamment dans la presse palestinienne, se montrent très critiques.
Tiré de Courrier international.
Le Japon a emboîté le pas à huit autres pays, dont les États-Unis et la France, en suspendant lui aussi son aide à l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), pilier de l'aide humanitaire à Gaza, prise dans la tourmente d'une polémique sur le possible rôle de certains de ses employés dans l'attaque du Hamas, le 7 octobre dernier, en Israël.
Vendredi 26 janvier, l'agence onusienne a déclaré, par la voix de son commissaire général, Philippe Lazzarini, avoir reçu des informations de l'État hébreu sur l'implication supposée de plusieurs de ses employés – douze, selon la presse – dans les attaques du groupe islamiste qui ont fait plus de 1 100 morts israéliens il y a près de quatre mois.
Dans la foulée, plusieurs pays ont annoncé la suspension de toute aide additionnelle à l'UNRWA. Les premiers à prendre cette décision ont été les États-Unis. Puis le Canada, l'Australie et l'Italie ont suivi, et, enfin, le Royaume-Uni, la Finlande, l'Allemagne, la France et le Japon.
“L'UNRWA est aux prises avec le Hamas”
Longtemps dans le viseur d'Israël, l'UNRWA – fondée en 1949 et au service aujourd'hui de 5,9 millions de personnes au Proche-Orient (Liban, Jordanie, Syrie…) – emploie 13 000 personnes à Gaza et constitue l'un des principaux acteurs sociaux et employeurs de l'enclave palestinienne (écoles, structures médicales, ramassage d'ordures, etc.), dont deux tiers des habitants sont des réfugiés.
Dans l'espoir de désamorcer la bombe, Philippe Lazzarini a affirmé le jour même avoir pris la décision “de mettre fin immédiatement aux contrats de ces membres du personnel et de lancer une enquête afin d'établir la vérité sans délai”.
Mais cela n'a pas empêché les suspensions des aides et, dans la presse israélienne et occidentale, même centriste, les soupçons de proximité avec le Hamas et les critiques à l'égard de l'agence se multiplient depuis.
“Le Hamas est le plus grand mouvement politico-socio-religieux et domine tous les aspects de la vie dans l'enclave côtière depuis près de dix-sept ans. L'UNRWA est aux prises avec le Hamas ; il ne pouvait en être autrement”, écrit ainsi Anshel Pleffer dans le quotidien israélien de centre gauche Ha'Aretz.
“Cette agence est la seule qui ne s'occupe que d'un peuple, et dans la bande de Gaza, elle n'a que très peu de personnel international […] Et l'on a souvent raconté que des enfants étaient éduqués à devenir des martyrs”, abonde de son côté le quotidien italien Corriere della Sera.
Selon des fuites des renseignements israéliens, relayées par The Financial Times, l'un des douze employés suspects aurait “kidnappé une femme, un autre saisi le corps d'un soldat tué, tandis qu'un troisième aurait participé aux combats près du kibboutz de Be'eri” entre le Hamas et les Israéliens.
“Neuf d'entre eux travaillaient comme enseignants dans des écoles gérées par l'UNRWA, selon une source proche des renseignements israéliens” citée par le quotidien britannique.
“La famine est désormais inévitable”
Mais au sein de l'ONU, parmi les pays arabes et dans la presse palestinienne, la décision de suspendre le financement est violemment critiquée. Certains médias y voient un complot israélo-américain pour démanteler une agence qui assure, selon eux, non seulement un rôle humanitaire capital mais préserve, de par son existence même, le droit rejeté par Israël au retour des réfugiés Palestiniens.
Il est “extrêmement irresponsable de sanctionner une agence et une communauté entière qu'elle sert en raison d'allégations d'actes criminels contre certains individus”, a réagi le directeur de l'UNRWA qui s'est dit choqué par la suspension des aides des neuf pays. “La plus haute autorité d'enquête du système des Nations unies a déjà été saisie de cette affaire très grave”, a assuré Philippe Lazzarini.
“La vie des habitants de Gaza dépend de ce soutien, tout comme la stabilité régionale”, a-t-il souligné, rapporte le site propalestinien situé aux États-Unis Electronic Intifada.

De son côté, Michael Fakhri, rapporteur spécial de l'ONU sur le droit à l'alimentation, a fustigé la décision, affirmant que “la famine était déjà imminente” à Gaza. Mais avec cette “punition collective” infligée aux Gazaouis pour “les actions présumées d'un petit nombre d'employés”, a-t-il ajouté, “la famine est désormais inévitable”.
Parmi les pays arabes, l'Arabie saoudite, poids lourd régional, a de son côté exhorté “tous les donateurs de l'UNRWA à assumer leurs responsabilités […] humanitaires envers les réfugiés palestiniens à l'intérieur de la bande de Gaza assiégée”, rapporte le journal Asharq Al-Awsat.
“Armes de guerre”
Pour le site Electronic Intifada, il ne fait aucun doute : “Israël utilise plus que jamais la nourriture et d'autres produits de première nécessité comme armes de guerre.”
Même son de cloche du côté du journal palestinien Al-Quds, qui déplore, lui, une stratégie israélienne visant à démanteler l'UNRWA pour des raisons surtout politiques et à visée stratégique. “Il est impossible de séparer la décision rendue [le 26 janvier] par la Cour internationale de justice [qui n'a pas réclamé à Israël l'arrêt immédiat de l'opération militaire à Gaza] et l'offensive orchestrée par Israël et les États-Unis contre l'UNRWA, dont le but est de tenter de […] liquider l'agence onusienne et avec elle la question des réfugiés” palestiniens et de leur droit au retour, écrit le quotidien.
En effet, pour les Palestiniens, l'existence même de l'UNRWA atteste officiellement que leur déplacement reste une question en attente d'être résolue. De son côté, Israël estime qu'autoriser les réfugiés à entrer sur son territoire reviendrait à détruire l'État hébreu et accuse l'UNRWA de laisser croire aux Palestiniens qu'il s'agit d'une possibilité.
En juin dernier devant le Conseil de sécurité des Nations unies, l'ambassadeur d'Israël auprès de l'ONU, Guilad Erdan, a qualifié l'UNRWA d'“agence destructrice”. Et avait martelé : “L'UNRWA entretient chez les Palestiniens le mensonge selon lequel le monde soutient leur droit au retour. Que ce soit clair, il n'y a pas de droit au retour.”
Courrier international
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La démocratie interne est nécessaire pour ancrer et structurer la gauche

Hendrik Davi, député de la France Insoumise et militant de la Gauche écosocialiste, a publié en septembre 2023 un livre intitulé Le capital c'est nous. Manifeste pour une justice sociale et écologique, aux éditions Hors d'atteinte. Contretemps en publie quelques bonnes feuilles issues de la dernière partie, « Que faire en France au XXIe siècle ? », dans lesquelles l'auteur soulève les principaux défis organisationnels pour la gauche, à commencer par la question de la démocratie interne à la France Insoumise.
24 janvier 2024 | tiré de contretemps.eu
https://www.contretemps.eu/gauche-france-insoumise-democratie-interne-hendrik-davi/
Ce débat a évidemment ressurgi après la campagne présidentielle de 2022. Clémentine Autain, mais aussi François Ruffin, puis Raquel Garido, Alexis Corbière ou Éric Coquerel ont pris position pour une démocratisation de la FI.
Résumons les grandes critiques qui ont été adressées au mode d'organisation de la France insoumise. D'abord, les groupes d'action (GA) locaux avaient certes toute latitude pour définir leurs modalités d'action, mais ils ne disposaient d'aucune autonomie de moyens. Il leur était impossible de produire leur propre matériel militant et de le faire financer par la FI. Il n'y avait pas de représentations officielles de la FI aux différents échelons municipaux, départementaux ou régionaux : par conséquent, la préparation des élections intermédiaires a toujours été chaotique et les instances qui ont décidé des investitures étaient créées de façon ad hoc par en haut. Le tirage au sort était la seule façon de représenter « la base » dans ces différentes instances.
Il n'y avait donc par conséquent pas de représentation légitime de la FI dans des instances unitaires avec des syndicats, des associations ou des partis politiques. Enfin, des décisions stratégiques nationales ont été prises, comme le changement de ligne pour les européennes ou l'expérience de la Nupes, sans qu'elles n'émanent d'aucune instance nationale. Une dernière critique est revenue régulièrement : il n'y avait pas de travail sur la formation des militants, ce qui aboutissait in fine à un manque de cadres.
Des avancées ont été obtenues d'abord en 2019. Une coordination des espaces a été mise en place, le fonctionnement des différents espaces s'est amélioré, notamment celui de l'espace « programme », et un début d'autonomie financière des GA a été gagné. Mais, globalement, le caractère administratif du fonctionnement de la FI n'a pas évolué, même après la nouvelle réforme de 2022. La coordination des espaces tire vaguement sa légitimité d'une assemblée représentative, mais sans aucune élection.
Dans la FI perdure l'illusion d'une administration tournée vers l'action au service du peuple[1], tandis que la question de la direction, donc de la manière dont on choisit entre différentes options stratégiques possibles, est éludée. Il semble choquant de se satisfaire de ce mode de fonctionnement alors que nous nous battons contre le rabougrissement de la démocratie sociale dans la fonction publique et au sein des entreprises à travers les lois « travail » et, pire, que nous revendiquons un approfondissement radical de la démocratie à travers une VIe République.
À l'origine, la nécessité d'une organisation de type administratif et non démocratique est en fait théorisée implicitement par Jean-Luc Mélenchon à travers l'exigence d'une guerre de mouvement pour prendre le pouvoir et organiser directement le peuple en limitant le recours aux médiations. Je pense qu'il y a dans ce raisonnement une erreur fondamentale : une sous-estimation de la nécessaire dialectique entre la guerre de position et la guerre de mouvement. Un gouvernement dirigé par la FI issu d'une victoire obtenue lors d'une élection générale, s'apparentant à une guerre de mouvement réussie, n'aura pas les mêmes opportunités s'il peut s'appuyer ou non sur un parti de masse organisé démocratiquement, indépendamment des élus et des positions institutionnelles dans différentes collectivités territoriales.
J'y reviendrai dans le chapitre suivant, mais le déroulement du « jour d'après » une victoire électorale nationale dépend du niveau d'auto-organisation et de conscience de la fraction la plus avancée de ceux qui partagent notre horizon anticapitaliste et écosocialiste. Cela dépend aussi de l'indépendance des associations et des syndicats qui pourront maintenir cette auto-activité des masses, nécessaire dans la lutte des classes et qui a souvent fait défaut quand la gauche était au pouvoir, notamment entre 1981 et 1995 et entre 1997 et 2002.
L'absence de démocratie et le refus de reconnaître le pluralisme au sein de la FI sont, selon moi, des freins pour que la France insoumise devienne un instrument durable permettant d'organiser les masses dans la lutte contre le capitalisme et pour l'écosocialisme. Nous avons besoin, dans la durée, de formations politiques qui fonctionnent démocratiquement. J'en énumère ici quelques raisons essentielles.
Premièrement, le fonctionnement démocratique est, in fine, le plus efficace pour élaborer dans la durée des orientations justes et gagnantes. C'est le pari démocratique que j'ai déjà largement décrit. Je ne vois aucune raison à faire ce pari pour la société tout en imaginant qu'il serait invalide pour le parti ou le mouvement politique qui devrait être le moyen de faire gagner la VIe République. Pire, nous pouvons craindre que le manque de démocratie interne préfigure un manque de démocratie une fois au pouvoir. L'histoire des révolutions passées en Russie, en Chine ou à Cuba démontre que la prise de pouvoir sans exercice permanent de la démocratie, y compris interne, conduit à des échecs. Ceci est d'autant plus vrai que tout processus révolutionnaire mène à une lutte sans merci, qui tend de toute façon à rabougrir les traditions démocratiques. La vitesse avec laquelle Staline a réussi à étouffer la sève démocratique au sein du Parti bolchévique puis de la Troisième Internationale doit nous interpeller.
Deuxièmement, le fonctionnement démocratique est celui qui permet la constitution d'un collectif vivant d'intellectuels et de former dans la lutte politique des générations de cadres aptes à jouer par la suite le rôle de dirigeants. C'est dans les débats internes à la LCR, au NPA ou à la CGT, autour d'orientations parfois contradictoires, que j'ai appris à affirmer mes propres convictions. C'est en participant à ce mouvement démocratique conflictuel qu'on devient un cadre militant. La formation intellectuelle est nécessaire, mais elle ne peut se substituer à la formation par l'action militante et le débat démocratique.
La direction révolutionnaire formée par ces cadres militants joue un rôle important dans le processus révolutionnaire, car il faut des hommes et des femmes à la pointe du combat pour proposer des orientations. Celles-ci sont évidemment le fruit d'une réflexion collective et d'un aller-retour dialectique permanent entre la théorie et la pratique d'une part et entre la base et la direction d'autre part. Et ces propositions deviennent des orientations effectives des organisations si elles sont validées démocratiquement par l'ensemble de leurs adhérents. Éluder la question du pouvoir de proposition des directions est dangereux car en l'absence de localisation du pouvoir, tout le pouvoir est, sans contre-pouvoir, au pouvoir existant. Dans le cadre de la FI, ce pouvoir constitué est Jean-Luc Mélenchon lui-même et les cadres avec qui il élabore les grandes orientations stratégiques de façon informelle.
Au moment où j'écris ces lignes, la FI est donc à l'heure des choix. Soit nous arrivons collectivement à faire le pari de la démocratie interne et la FI pourrait devenir cet outil du XXIe siècle au service d'une révolution écosocialiste, soit les voies de la refondation trouveront d'autres chemins. La seule chose qui transcende le temps dans un processus révolutionnaire, ce sont les organisations. Toutes les solutions populistes qui trouvent des raccourcis autour de dirigeants charismatiques sont vouées à l'échec.
Nous le voyons sur ce sujet, un des principaux verrous à la refondation politique, qui est aussi prégnant dans la rénovation syndicale, est l'obsession de contrôle des dirigeants. La lutte contre toutes les captations de pouvoir par une minorité doit devenir une marque de fabrique du camp écosocialiste. Ce point névralgique recouvre la lutte contre le patriarcat et la culture de la prédation : nos organisations doivent donc organiser méthodiquement la déprédation. Nous devons nous doter de statuts qui protègent les femmes de la domination masculine, les personnes racisées des réflexes racistes, les jeunes de l'omniprésence des plus vieux et les ouvriers de la domination des intellectuels. Pour cela, la rotation des mandats électifs et de direction au sein du parti et le strict non-cumul des mandats sont des principes cardinaux que nous devons absolument respecter.
Mais même si nous arrivons sur le long terme à refonder une force radicale écosocialiste qui fonctionne démocratiquement, elle ne pourra à elle seul permettre aujourd'hui une victoire électorale à des élections générales. C'est la conséquence de l'analyse de la situation politique française : il existe durablement une tripartition du champ politique français avec l'extrême droite, le centre droit et la gauche. Sans unité, la gauche peut difficilement gagner des élections générales ; mais la forme de l'unité et le périmètre du front sont des éléments importants. Nous devons penser les différents fronts électoraux, capables de mobiliser l'électorat populaire pour permettre des victoires ou, au moins, d'avoir des élus dans les différentes collectivités territoriales et au niveau de l'État central.
Nous devons évidemment viser une victoire à des élections générales pour entamer un affrontement avec les classes dominantes et une bifurcation de notre modèle économique. Mais il ne faut pas sous-estimer l'importance de l'ancrage local, donc de victoires plus locales. C'est un autre impensé de l'extrême gauche, partagé par la France insoumise de 2017 à 2022. L'absence de structuration locale pérenne de la FI avait comme autre corollaire une faible capacité à s'ancrer dans les collectivités territoriales. Or, une des grandes réussites du PS et du PCF a été précisément de s'ancrer durablement dans les territoires grâce au socialisme et au communisme municipal, puis à la gestion de départements et de régions. Ces étapes sont absolument indispensables dans la reconstitution d'un rapport de force global et ne peuvent pas être négligées. L'ancrage local charrie néanmoins aussi son lot de risques et de limites que nous ne devons pas non plus sous-estimer.
D'abord, la géographie du capital tend de plus en plus à affaiblir les collectivités territoriales : elles ont de nombreuses prérogatives, mais de moins en moins de moyens propres. De plus, le processus de métropolisation et la montée en puissance du rôle des régions ont progressivement dépouillé les acteurs historiques des territoires qu'étaient les départements et les communes. Cette dynamique de dessaisissement démocratique des collectivités territoriales a pour conséquence qu'elles disposent de moins en moins de moyens réels pour freiner la dynamique néolibérale. Pire, cette dernière passe par une mise en concurrence réglée des collectivités territoriales.
La participation de révolutionnaires à des exécutifs de ce type doit être bien réfléchie et dépend du rapport de force. En revanche, nous avons toujours intérêt à y avoir des élus au moins dans l'opposition pour exercer un contrôle démocratique et accumuler une connaissance des dossiers. La condition pour participer à des exécutifs est, selon moi, la même que pour un gouvernement : nous devons participer à des coalitions larges rassemblant toute la gauche et les écologistes, mais dont le centre de gravité reste la gauche radicale, incarnée en France par la FI ou le FDG dans la période récente.
C'est cette approche que j'ai tenté de mettre en œuvre avec d'autres au sein du Printemps marseillais. Nous avons partiellement échoué : il est donc intéressant de revenir sur cet épisode. Le Printemps marseillais est un mouvement initié en 2019, avant la campagne des municipales à Marseille, par des personnalités venant du PS (Benoît Payan), d'EELV (Michèle Rubirola), du PCF (Jean-Marc Coppola, ancien candidat du FDG à la mairie de Marseille), de la FI (Sophie Camard, la suppléante de Jean-Luc Mélenchon), de syndicalistes (Pierre-Marie Ganozzi) et de collectifs de citoyens situés au au centre gauche comme Mad Mars (autour d'Olivia Fortin). Ce mouvement a pris corps autour d'une tribune et s'est ensuite constitué avec notamment un exécutif, le parlement du Printemps marseillais, qui rassemblait les différentes composantes et auquel j'ai participé de juillet à décembre 2019.
Au cours de l'été 2019, nous avons réussi à rassembler la FI autour d'une participation au Printemps marseillais sous deux conditions : d'une part, le Printemps marseillais devait inclure les collectifs des quartiers populaires qui allaient durablement ancrer sa dynamique à gauche ; d'autre part, le ou la candidate à la mairie ne devait pas être issu du Parti socialiste, pour incarner une alternative. Hélas, nous avons échoué sur ces deux conditions, raison pour laquelle j'ai fait le choix de quitter le mouvement. Benoît Payan a finalement renoncé à être candidat et Michèle Rubirola a été élue. La victoire s'est faite avec les secteurs de droite du 6/8, mais sans les quartiers populaires des XIII et XIVe arrondissements où deux candidatures de gauche se sont maintenues au premier tour (dont une portée par la FI), division qui a été fatale dans ce secteur. Enfin, Michèle Rubirola a rapidement été contrainte de quitter sa fonction et Benoît Payan est devenu maire de Marseille.
Notons au passage que les maux dont souffrent la France insoumise en tant que mouvement gazeux se sont retrouvés dans le Printemps marseillais, dirigé d'en haut par un petit groupe de personnes qui ont ainsi préempté l'espace de l'union de la gauche. Par ailleurs, une partie d'EELV est restée en dehors du mouvement et a soutenu la candidature alternative de Sébastien Barles.
Cette histoire est emblématique des batailles, ici perdues, que nous devons mener pour que les victoires de la gauche soient ancrées du côté anti-libéral. Même si la mairie mène une politique globalement de gauche, une de ses premières mesures a consisté à restreindre le droit de grève des personnels assurant la pause du midi dans les écoles. Sur ce sujet, comme sur d'autres, la mairie de Marseille mène des politiques qui s'affrontent directement aux revendications du mouvement social et notamment des syndicats de transformation sociale que sont la CGT, FSU et Solidaires. Le risque est grand que la seconde ville de France voie s'opérer un divorce entre le mouvement social et une mairie de gauche, qui risque d'aggraver l'éloignement du peuple de gauche et de la gauche institutionnelle.
Ce divorce a souvent eu par le passé des conséquences durables. Le peuple de gauche est ainsi resté longtemps marqué par les renoncements de Mitterrand après le tournant de la rigueur de 1983, ceux de la gauche plurielle de 1997 à 2002 qui ont conduit à l'échec de Lionel Jospin en 2002 ou ceux de Hollande qui ont mené la gauche à ses scores les plus faibles. Ces échecs de la gauche au pouvoir ont aussi eu des conséquences dans les collectivités territoriales : c'est le cas de la région Paca, longtemps dirigée par la gauche avec Michel Vauzelle, gauche qui n'arrive même plus à se maintenir au second tour depuis 2014 ! Quand nous arrivons dans des exécutifs, il est donc absolument essentiel que le centre de gravité soit une gauche d'affrontement avec la logique de prédation du capital et du productivisme.
C'est pour cela que l'expérience de la Nupes est si importante. Elle nous a permis de construire une unité dans un temps record autour d'un programme de plus de six cents mesures qui vise à transformer radicalement la société. Nous avons là un cadre d'alliance électorale rêvé. Il est d'abord extrêmement large, puisqu'il rassemble la gauche modérée du PS, l'écologie politique réformiste d'EELV, le PCF, mais aussi la FI et qu'il inclut l'extrême gauche avec notamment le Parti ouvrier indépendant, un élargissement à une partie du Nouveau parti anticapitaliste semblant possible. D'autre part, le centre de gravité est bien à gauche puisque la FI est la force principale du regroupement et dispose du plus grand nombre de députés.
Cette initiative a réussi grâce à un rapport de force construit pendant l'élection présidentielle : il aura fallu la division à l'élection présidentielle, l'échec de candidatures plus modérés et le succès de la campagne de Jean-Luc Mélenchon. Se battre uniquement pour l'unité de la gauche conduit en général à la subordonner à sa fraction la moins radicale. La stratégie de la FI a été la bonne : il fallait d'abord remobiliser les classes populaires autour d'un programme de rupture et d'affrontement avec la logique du capital ; puis, la force venant à la force, les citoyens plus sensibles à la gauche modérée ont fini par voter Jean-Luc Mélenchon. Nous avons ainsi subordonné le comportement électoral des franges modérées de la gauche aux intérêts de classe des couches les plus populaires232. C'est la voie que nous devons continuer à suivre. En revanche, ne nous illusionnons pas : le score à la présidentielle de 2017 et de 2022 ne représente pas le vrai rapport de force au sein de la société entre les différentes composantes de la gauche et de l'écologie politique.
Quelles sont nos tâches pour que la Nupes gagne les prochaines élections générales, soit à la suite d'une dissolution de l'Assemblée nationale, soit lors de la prochaine élection[2] présidentielle en 2027 ? D'abord, la Nupes doit être renforcée sur tout le territoire avec des assemblées de militants, de circonscriptions ou de villes, partout où c'est possible. Ces assemblées doivent toujours impliquer au mieux toutes les composantes de la Nupes. Le patient travail unitaire doit se poursuivre localement en prenant appui sur les campagnes nationales initiées par les forces politiques ou l'inter-groupe parlementaire. Hélas, à l'heure où j'écris ces lignes, c'est plutôt la division que semblent choisir les différents appareils politiques qui composent la Nupes. Quand bien même cette division l'emporterait, dans des institutions favorisant le fait majoritaire, l'unité demeurera nécessaire à cause de la tripartition du champ politique français et du risque néofasciste.
Ensuite, en tant que parlementaires, il est de notre responsabilité de faire vivre la Nupes au parlement et de parler d'une seule voix à chaque fois que c'est possible. Mais, pour gagner aux prochaines élections, la Nupes doit encore convaincre différentes franges de la population que nous disposons de solutions pour surmonter les crises sociales, économiques et écologiques. Différentes catégories de populations doivent être visées par notre discours. D'abord, il nous faut continuer notre travail de mobilisation des classes populaires notamment à travers un programme social ambitieux attaché à l'universalisation des droits. Il nous faut traduire ce programme en une série de mesures de transition simples et compréhensibles par toutes et tous. Par exemple, nous devons défendre l'indexation des salaires et de tous les revenus sur l'inflation, en expliquant que ce n'est pas aux salariés de payer la spéculation actuelle sur les matières premières et sur l'énergie. De façon complémentaire, le blocage des prix alimentaires et de l'énergie ainsi que l'encadrement des loyers doivent être mis en avant : voilà une autre facette de la lutte des classes pour une plus juste répartition de la valeur ajoutée.
Sur le long terme, un service public du logement doit être fondé pour construire massivement des logements sociaux et organiser la rénovation globale de tous les logements afin de réduire nos émissions de gaz à effet de serre et de limiter notre dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie et des pays du Golfe. Un véritable service public unifié de l'énergie et des transports doit également permettre la bifurcation de notre modèle énergétique vers 100 % d'énergies renouvelables et des transports en commun plus fréquents, gratuits pour toutes et tous.
Bien sûr la mise en œuvre d'un tel programme d'urgence requiert une plus juste répartition des richesses, donc une décapitalisation des multinationales françaises. Nous devons assumer ce nécessaire affrontement. Bernard Arnault est devenu la première fortune mondiale avec 213 milliards d'€ : s'il redistribuait cette somme à chacun des 157 000 salariés de son groupe qui ont travaillé pour qu'il puisse amasser cette fortune, chacun d'eux recevrait 1,35 millions d'€. Il est possible de faire prendre conscience au plus grand nombre que la redistribution des richesses ouvre des possibilités gigantesques pour nos sociétés en matière de justice sociale et de bifurcation écologique.
Cependant, le risque de victoire du fascisme en France avec le Rassemblement national et Reconquête devient de plus en plus sérieux. Des puissances d'argent soutiennent désormais activement cette possibilité : c'est le cas notamment de Vincent Bolloré, devenu entre autres patron de CNews, d'Europe 1, du Journal du dimanche et de Paris Match. Le risque d'une union des droites est réel avec l'évolution actuelle des Républicains, écartelés entre le pouvoir macroniste qui se droitise et la menace RN.
Face à ces dynamiques de droitisation de la société française, la Nupes doit être capable elle aussi de reconquérir les classes moyennes supérieures qui votaient François Hollande et sont parties durablement chez Emmanuel Macron. Elle doit aussi pouvoir s'adresser à l'ancienne petite bourgeoisie commerçante et industrielle en partie polarisée par l'extrême droite, mais qui pourrait vouloir faire barrage au second tour à un président des riches qui ne représente pas ses intérêts.
Dans ce contexte, il est difficile de parler à tous les électorats. Mais je pense que, maintenant que nous sommes en position de reconquête globale à gauche avec la Nupes et que la FI y tient la position dominante, nous avons moins besoin du bruit et de la fureur, stratégie revendiquée par Jean- Luc Mélenchon pour nous faire entendre. Comme l'avance François Ruffin, il faut se « soc-démiser » sur la forme et rassurer les électorats qui pourraient se détourner de nous du fait du bruit et de la fureur. Pour parler aux couches populaires, nous avons surtout besoin d'un discours simple et efficace, radical sur le fond mais sobre sur la forme. Enfin, il n'existe pas de raccourcis médiatiques qui nous permettraient de convaincre les masses par des interventions radicales dans les médias car, nous l'avons vu, les espaces médiatiques nous sont défavorables. Nous devons surtout retrouver massivement le contact du terrain, ce qui passe par un déploiement le plus large possible sur tous les territoires.
Or ce déploiement n'est pas possible sans une structuration démocratique de la FI d'une part et sans une unité sans faille au sein de la Nupes d'autre part. La FI et la Nupes doivent donc réinventer des moyens de faire de la politique ensemble en faisant participer activement le plus grand nombre. Si nous y parvenons, je reste persuadé qu'une victoire électorale de la gauche sur une base de transformation radicale de la société est possible.
Notes
[1] Manuel Cervera-Marzal, Le Populisme de gauche, La Découverte, 2021.
[2] Avec une double limite tout de même : d'abord, la gauche n'a pas été présente au second tour de l'élection présidentielle ; ensuite, cette unité a avant tout été électorale.
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Plus d’immigration, moins de problèmes… si on les accueille et intègre

La CAQ casse du sucre sur le dos de l'immigration depuis qu'elle existe. C'est dans ses gênes venant de l'ADQ. Elle vient de gagner le parti Libéral du Canada à son idéologie identitaire pour les besoins de la cause soit l'incapacité du gouvernement fédéral (et du Québec) de faire face à l'aigue crise du logement en tête du palmarès inflationniste.
Le gouvernement canadien et québécois, pour résoudre la pénurie de main-d'œuvre à la satisfaction du patronat malgré un relativementhaut taux d'emploi tel que jaugé depuis l'an 2000, ont ouvert comme jamais les vannes de l'immigration, cette armée de réserve jadis surtout interne, particulièrement l'immigration temporaire :

Notons l'hypocrisie discoureuse de l'un et l'autre gouvernement. Pendant qu'ils accéléraient l'immigration temporaire, ils débattaient publiquement de seuils d'immigration permanente, Ottawa à la hausse et Québec à la baisse. Si la servilité d'Ottawa vis-à-vis le patronat était totale, la CAQ trébuchait sur son nativisme tout en donnant satisfaction au patronat par la porte arrière. La CAQ s'est finalement rajusté. Ottawa, tout en confirmant son haut seuil d'un demimillion d'immigration permanente l'an sous prétexte de le stabiliser pour cause de crise du logement, a corrigé certaines passoires hors Québec pour de faux étudiants alors qu'il bloquait de vrais étudiants francophones pour le Québec et qu'il donne raison au Québec sur le dos des demandeurs d'asile surtout mexicains.
La réponse de gauche serait-elle celle du PQ, seul contre tous, qui prône une baisse drastique de l'immigration permanente, et sans doute temporaire, afin de soulager la pression sur le logement et surtout pour protéger le français en particulier à Montréal ? La Banque Nationale, représentative des PME québécoises, par un rapport très médiatisé ajoute au prix du logement comme prétexte de restriction l'écart du niveau de vie canadien par rapport aux ÉU et rien de moins qu'un début de tiersmondisation au visage d'une baisse de stock de capital réel par personne.
Effectivement, depuis au moins une dizaine d'années, la croissance de la productivité canadienne est parmi les plus basses des pays de l'OCDE mais sur cette période elle est quand même plus élevée que la moyenne des 28 pays de l'Union européenne. Quant à celle québécoise, mesurée en PIB par habitant, elle rattrape celle de l'Ontario à petit pas depuis une quarantaine d'années.
Il n'en est pas moins exact que le tsunami de personnes résidentes non permanentes (RNP) qui commande de bas salaires et de mauvaises conditions de travail est un substitut aux investissements productifs élevant la productivité du travail par la hausse du ratio capital / travail… mais non son élévation par la hausse de l'intensité du travail ou même par l'allongement des heures de travail si on mesure la productivité par travailleur et non par heure de travail… en autant que ces heures soient statistiquement comptabilisées. Côté logement, les RNP sont beaucoup plus locataires que le reste de la population et leur arrivée massive en peu de temps n'a pas pu faire autrement que de contribuer à la hausse des loyers. Mais comme le dit justement le Conseil du patronat(CPQ), « les chiffres révèlent que les villes du Québec ayant le plus faible taux d'inoccupation se trouvent en région, là où le pourcentage de population immigrante est le plus bas. » Si l'immigration peut mettre en évidence la crise du logement à Montréal, et peut-être le recul du français, elle n'en est en rien la cause fondamentale.
Pour le CPQ, cette cause est le retard de la productivité de l'industrie de la construction au Québec par rapport à celle de l'Ontario. La CAQ est pleinement d'accord et compte y remédier dès la présente session par une loi exigeant plus de « flexibilité » et de « mobilité » à distinguer d'une politique gouvernementale de formation, de féminisation et de pluralisation qui, il est vrai, peut être un défi pour les syndicats de la construction. On se dit que la meilleure parade contre l'antisyndicalisme de la CAQ serait une contre-offensive des travailleurs contre le corporatisme moyenâgeux de cette industrie sans remettre en question niveau salarial et conditions de travail. Autrement, on pourrait voir la CAQ jouer la carte de travailleurs temporaires à rabais tant pour la rémunération que pour la formation. À noter que la cause des travailleurs de la construction s'en trouverait renforcé par un rebondissement de la lutte du secteur public justement à l'encontre de la « flexibilité » et de la « mobilité ».
La solution Solidaire, faute de l'encadrer dans l'alternative pro-climat, rate la cible
On compte sur Québec solidaire pour incarner une politique d'immigration de gauche. Son député-expert y est allé d'une longue prise de position écrite (et deux entrevues-choc) les 22 et 23 janvier. Après avoir renvoyé dos-à-dos les positions « radicales » tant du PQ que des Libéraux fédéraux mais en ne critiquant fort pertinemment que celle du PQ des « petites phrases », il affirme que « l'immigration temporaire […] dépasse sa capacité d'accueil en ce moment… » tout en ajoutant qu'elle a « une importance considérable pour la vitalité économique du Québec et de ses régions » et qu'en même temps elle fait « plaisir aux entreprises » ce qui explique que la CAQ n'a pas exercé la totalité des pouvoirs du gouvernement du Québec pour la restreindre. Après cette tape amicale dans le dos du PQ, le député-expert en donne une dans le dos de la CAQ en précisant qu'« [i]l faut toutefois que le Québec respecte sa capacité d'accueil en prenant en charge une part juste des demandeurs d'asile qui arrivent au Canada ». On comprendra que la tergiversation Solidaire alimente la critique de la presse Libéral.
Quelle est la solution Solidaire ? Pour la capacité d'accueil, faut-il s'en étonner, le député-expert botte en touche en demandant « un comité d'experts pour répondre à la question. » Pourtant la réponse a peu à voir avec la science, comme il le prétend, mais beaucoup avec la politique d'accueil… ou de fermeture. Une telle politique d'accueil a, elle, beaucoup à voir avec la science, celle à la base des rapports du GIEC-ONU, qui commande une politique de plein emploi écologique basée sur le « prendre soin » des terre-mères et des gens. On en trouvera les lignes directrices en annexe.
Côté logement, il y faudra certes une corvée-habitation comme le réclame Québec solidaire. Mais pourquoi, diable, passer sous silence la revendication-phare, pourtant minimaliste, de la dernière campagne électorale de la construction de 5 000 logements sociaux écologiques par année. (Pour faire baisser les loyers privés il en faudrait 25 000 l'an soit 50% de la construction annuelle comme jadis en Suède.) La construction de logements sociaux, dont le loyer est basé sur la capacité de payer, est au cœur de la solution à la crise du logement due non pas seulement à la spéculation mais structurellement à la financiarisation du droit au logement. Il serait alors possible non pas de restreindre l'immigration temporaire mais plutôt de lui substituer celle permanente ce qui lui permettrait, en toute égalité citoyenne indispensable à la démocratie, de se syndiquer pour lutter contre le patronat et son gouvernement tous et toutes ensemble.
Marc Bonhomme, 27 janvier 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
Annexe : Lignes directrices d'un plan climat pour le Québec
La contradiction fondamentale écologique à résoudre n'est pas celle entre extractivisme ancien et bien connu des hydrocarbures versus celui en émergence rapide du tout-électrique. Dans un contexte de croissance, inhérente au capitalisme, le nouvel extractivisme se superpose à l'ancien. La contradiction fondamentale à résoudre est celle entre l'extractivisme croissanciste et la sobriété décroissanciste. En termes pratiques,
• Non pas un Canada financier, pétrolier et rejetant le Québec même « autonome » mais un Québec indépendant socialisant finance, énergie, transport et ressources naturelles ;
• Non pas une énergie fossile ou celle dite propre mais une réduction drastique d'énergie par personne à bien-être égal avec une transition d'efficacité énergétique et d'énergie propre ;
• Non pas entre véhicules à essence et ceux électriques mais entre véhicules privés et transport actif et en commun avec une transition de véhicules communautaires ;
• Non pas entre maisons passoires et celles écoénergétiques mais entre maisons et habitation collective écoénergétique et une transition de bâtiments existants rendus écoénergétiques ;
• Non pas entre ville tentaculaire hydrocarbonée et une tout-électrique mais entre ville tentaculaire et ville de quartiers 15 minutes avec agriculture urbaine et parcs nature ;
• Non pas une agro-industrie-foresterie ou une « nouvelle agriculture » carnée mais une souveraineté alimentaire biologique, végétarienne captant du carbone et à circuit court ;
• Non pas une consommation de masse, même circulaire, mais une durable sans mode ni publicité et avec garantie de réparation ou de remplacement accessible et bon marché ;
• Non pas un transport lourd de marchandises par camions, à essence ou électrique, mais par trains électriques, par navires à énergie renouvelable et un transport léger électrique ;
• Non pas une politique financière internationale néolibérale mais une de remboursement de la dette écologique telle qu'établie par une commission pluraliste ;
• Non pas une politique d'immigration restreinte mais une de frontières ouvertes combinée à une politique d'accueil, de francisation et de plein emploi priorisant le « prendre soin ».
Un plan climat guidé par ces lignes directrices permet de passer d'une société assise sur la marchandise (ou la valeur d'échange) à une assise sur l'utilité sociale et durable (ou valeur d'usage) des produits et services. Guidée non pas par le profit mais par la planification démocratique combinée à l'autogestion, cette société peut muer en 10 ans comme le Québec capitaliste de la « révolution tranquille » a mué d'une société traditionnelle à une moderne.
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Entre l’immigration et la crise du logement

Beaucoup d'encre a coulé récemment sur le lien entre l'immigration et la crise du logement. Certains leaders politiques ont tourné les coins ronds alors que d'autres détournent carrément les faits.
À les entendre, la cause principale de la crise du logement ne serait pas la spéculation immobilière, les évictions, ou encore les reculs dans les mises en chantier. Non ! Pour eux, la cause principale de la crise du logement, soudainement, ce sont les immigrants.
La réalité, c'est que la CAQ a échoué à régler les enjeux en matière d'immigration : le Québec n'a rien à gagner à ce que la discussion autour de l'immigration prenne une tournure polarisante. En fait, les seuls qui ont quoi que ce soit à y gagner sont ceux qui pensent pouvoir faire bouger l'aiguille des sondages avec ça.
François Legault a préféré l'immigration temporaire à l'immigration permanente, mais les travailleurs temporaires sont non seulement essentiels dans le monde agricole ; elles et ils travaillent également dans des résidences pour aîné·es et dans presque tous les secteurs de l'économie. Cette approche d'immigration « privatisée » crée une main−d'œuvre précaire, fragilisée par son statut, alors qu'il faudrait plutôt se tourner vers l'immigration permanente régionalisée, francisée et mieux intégrée.
Quant à Paul St-Pierre-Plamondon, qui vient de découvrir l'existence de la crise du logement, il défend une position incomplète et approximative en pointant du doigt des gens qui contribuent déjà activement à notre société. Chercher de faux coupables à la crise du logement ne fera rien pour la mitiger. Le 1er juillet dernier, il n'y avait littéralement aucun logement disponible à Roberval ou à Gaspé. En 2023, les mises en chantier à Montréal ont diminué de près de moitié. Refusons de détourner le débat : pour régler la crise du logement, il faudra… construire des logements.
Les choix de nos adversaires quant au modèle en immigration et au ton du débat sont perdants pour le Québec et pour toutes les immigrantes et immigrants. Notre position n'a pas changé : Québec solidaire réclame depuis longtemps un changement de modèle basé sur des études, et élaboré avec l'appui des expert·es et des groupes. Surtout, il faut mener cette réflexion en restant calme et en n'oubliant pas, d'une part, l'humanité de ceux et celles dont il est question ici, mais aussi l'apport extraordinaire des personnes qui ont fait le choix du Québec sur notre vie économique, culturelle et sociale.
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Tirer leçon du décès d’Amélie Champagne pour améliorer le système de santé publique

Montréal, le 24 janvier 2024 – Aujourd'hui, l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec (AGIDD-SMQ <https://www.agidd.org/> ) témoigne devant la coroner Julie-Kim Godin dans le cadre de l'enquête publique sur le décès d'Amélie Champagne. François Winter, porte-parole de l'AGIDD-SMQ, et Julie Rivard, présidente de l'AGIDD-SMQ, expriment les positions de l'organisme et présentent ses recommandations pour éviter que des tragédies comme celle du décès d'Amélie Champagne ne se reproduisent.
L'AGIDD-SMQ adopte une position critique à l'égard de la sectorisation des services, une pratique encore courante en psychiatrie qui consiste à imposer à un·e patient·e de s'adresser exclusivement à l'hôpital de son secteur. Selon l'organisme de défense des droits en santé mentale, transférer un·e patient·e d'établissement à un autre après une tentative de suicide revient à prioriser l'administration des soins au détriment des soins nécessaires à son rétablissement. « Comment pouvons-nous accepter que, encore aujourd'hui, notre système de santé maintienne de telles pratiques alors que la sectorisation des services est interdite par le ministère de la Santé et des Services sociaux depuis près de 20 ans ? », questionne monsieur Winter.
La position de l'AGIDD-SMQ met en lumière la problématique de la sectorisation des services, mais également de l'accès des soins de santé physique pour les personnes vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale. « Les personnes suivies en psychiatrie sont plus susceptibles de subir un masquage diagnostique, c'est-à-dire quand un diagnostic psychiatrique fait de l'ombre aux symptômes physiques déclarés », explique le porte-parole. Le cas d'Amélie Champagne soulève des interrogations profondes sur la prise en charge médicale, alors qu'elle était atteinte de la maladie de Lyme. « Sa situation a-t-elle été prise au sérieux ou y a-t-il eu un laxisme déguisé sous l'ombre d'un masquage diagnostique ? », s'interroge-t-il.
L'AGIDD-SMQ implore le ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que la future agence Santé Québec de prendre les mesures nécessaires pour interdire la sectorisation. Parmi ses recommandations, l'AGIDD-SMQ invite chaque établissement de soins de santé à se doter d'un gestionnaire chargé d'assurer l'absence de sectorisation des services, à actualiser ses actions en matière de primauté de la personne du plan d'action en santé mentale 2015-2020, à établir un plan d'action pour lutter contre le masquage diagnostique, à revoir ses procédures d'accueil des personnes ayant des problèmes de santé mentale aux urgences, et à garantir la fluidité des services dans le respect des droits des personnes en mettant à profit les ressources de suivi dans la communauté. « Nous espérons que nos recommandations seront entendues et appliquées, afin que des drames comme celui d'Amélie Champagne ne se reproduisent plus », conclut monsieur Winter.
l'AGGID-SMQ
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Les solidaires à la croisée des chemins

Nous publions ci-dessous un texte qui dessine une orientation stratégique visant à permettre à Québec solidaire de dépasser sa situation actuelle de stagnation. Il donne des réponses à une série de questions incontournables. Nous ne partegeons nullement l'orientation proposée mais nous pensons que ce texte pourrait ouvrir des débats essentiels. Nous allons donner nos réponses et nous invitons nos lectrices et nos lecteurs à s'engager dans les discussions que ce texte ne manquera pas de soulever. Écrivez-nous à redaction@pressegauche.org . (La rédaction de Presse-toi à gauche !)
Les résultats décevants de l'élection de 2022 ont ouvert à Québec solidaire (QS) une période de remise en question. En effet, tant sa stagnation électorale que l'ascension du Parti québécois (PQ) indiquent que le parti de gauche est à la croisée des chemins. Une nouvelle période s'ouvre, qui verra probablement la politique québécoise se réaligner sur le clivage opposant souverainistes et fédéralistes. Pour ne pas être renvoyés au statut de « bonne conscience du parlement » et faire croître leur poids politique, les solidaires devront sauter de plain-pied dans cette configuration, ce qui implique de revoir leurs rapports avec leurs frères ennemis péquistes.
Conjoncture
Pour cela, il faut prendre la pleine mesure du cycle politique en train de s'ouvrir et faire un bilan lucide de la place qu'y occupent QS et le PQ. En effet, outre la domination électorale de la Coalition avenir Québec (CAQ), la politique partisane des cinq dernières années a été caractérisée par une incertitude quant à la force politique susceptible de constituer une alternative au gouvernement. Suite à son succès électoral en 2018, il a semblé que QS pouvait jouer ce rôle. Or, depuis l'élection de 2022, il apparaît de plus en plus clairement que le parti de gauche s'est fait damer le pion par le PQ, dont les présents niveaux sondagiers n'ont jamais été atteints par les solidaires.
Outre les désillusions de la population par rapport à la CAQ et le leadership de Paul Saint-Pierre Plamondon (PSPP), trois raisons expliquent le succès du PQ :
1) Comme indiqué dans une précédente analyse, [1] durant la période 2019-2022, alors que le PQ était affaibli, QS n'a pas profité de cette conjoncture pour adopter un positionnement politique apte à absorber son électorat et à devenir le principal parti souverainiste. Il s'est plutôt focalisé sur l'électorat jeune et urbain et des circonscriptions traditionnellement libérales, occultant son indépendantisme. L'adhésion aux idées de la gauche libérale américaine l'a en outre éloigné du sens commun de la majorité des Québécoises et des Québécois sur les enjeux symboliques-institutionnels (ce que d'aucuns désignent comme les questions « identitaires » : laïcité, lutte contre le racisme, politiques linguistiques, immigration, etc.). Cela a considérablement nui à ses chances de rallier des nationalistes de gauche et des sociaux-démocrates déçus par le PQ (ou par la CAQ…), ou encore des franges de l'électorat plus indécises, qui auraient autrement pu être tentés par le vote solidaire.
2) En parallèle, le PQ est revenu avec éclat à ses fondamentaux, ce que Jacques Parizeau désignait comme « ses deux jambes » : l'indépendantisme et la social-démocratie. Ce double positionnement lui permet de s'adresser aux électeurs déçus de la CAQ, mais aussi de QS. À l'inverse, dans quel autre parti politique se trouve le bassin d'électeurs dans lequel les solidaires sont susceptibles de puiser, compte tenu de leur trajectoire depuis 2019 ? Un bassin d'électeurs qui seraient à la fois indépendantistes au conditionnel, libéraux du point de vue des questions symboliques-institutionnelles, et de gauche et écologistes d'un point de vue socio-économique ? Poser la question c'est y répondre : il n'y en a pas.
3) Le PQ se positionne aussi de manière adroite sur des enjeux à la fois actuels et hétéroclites : environnement [2] , démondialisation [3] , immigration massive, laïcité, inquiétudes suscitées par le numérique [4] , etc. En alliant des propositions tranchantes à une rhétorique modérée, il se pare d'un profil antisystème tempéré par un ton de sincérité ancré dans le sens commun. Cela l'aide à se démarquer, y compris à l'extérieur de son électorat traditionnel, ce qui n'a pas nui à sa victoire dans l'élection partielle de Jean-Talon. Ces positionnements contribuent en outre à construire un discours à vocation hégémonique, proposant une vision d'ensemble de la société québécoise et de son avenir, qui donne un sens plus large au projet péquiste et l'ancre dans le temps long de l'histoire nationale.
Avec ces atouts, il est probable que les troupes de PSPP parviennent à constituer l'opposition officielle en 2026, voire qu'ils mettent la CAQ en situation de gouvernement minoritaire. Une prise du pouvoir péquiste apparaît plus incertaine, mais ne doit non plus pas être exclue. Dans un cas comme dans l'autre, et à condition que le PQ maintienne son cap indépendantiste, cela signifierait la repolarisation du débat politique autour de la question nationale, qui obligerait les forces politiques ayant actuellement une attitude timorée face à celle-ci (c'est-à-dire QS et la CAQ) à se positionner nettement ou à s'effondrer politiquement. C'est le principal défi auquel les solidaires feront face dans les prochaines années.
Deux boussoles
Comment continuer à exister et à croître électoralement dans une polarisation entre le camp fédéraliste et un PQ de fait à la tête du camp souverainiste et occupant en grande partie un espace politique commun avec les solidaires (indépendantisme, social-démocratie, écologie) ? Le statu quo n'est pas une option : s'il continue à se focaliser uniquement sur les points sociaux et écologiques de son programme (en particulier dans leur version édulcorée et technocratique de 2022) en accordant une place minimale à l'indépendance et en adoptant une posture proche du Parti libéral du Québec (PLQ) sur les questions symboliques-institutionnelles, le parti de gauche sera pris en étau dans un contexte politique au sein duquel il apparaîtra au mieux indécis, au pire déconnecté [5].
En fait, deux « boussoles » stratégiques s'offrent maintenant à QS. D'une part, radicaliser la voie suivie depuis 2019 en se convertissant au fédéralisme, pour devenir une sorte de NPD-Québec, et d'autre part, adopter un souverainisme de gauche décomplexé, en continuité avec ce qui avait été esquissé durant la campagne électorale de 2018.
La première option implique de partager un espace politique commun avec le PLQ, en constituant l'aile gauche du futur camp du « Non ». Les solidaires pourraient alors potentiellement rallier les franges progressistes des électeurs fédéralistes. Rien ne garantit toutefois que cet électorat et les comtés qui y sont associés soient en nombre suffisant pour croître électoralement ni que le PLQ soit si aisé à écarter. La stagnation électorale de 2022, suite à une campagne électorale tendant vers cette boussole, est un signe avant-coureur des limites bien réelles de cette stratégie, qui, à terme, pourrait entraîner la perte de comtés à l'extérieur de Montréal, mais aussi dans l'est de la métropole, au profit du PQ.
L'expérience historique confirme en outre le cul-de-sac que constitue cette option : jamais, au Québec, excepté la tentative avortée d'Adélard Godbout, un processus de transformation sociale n'a été mené sans une volonté parallèle d'émancipation nationale, et vice-versa. Même les libéraux de Jean Lesage ont dû s'y résigner pour lancer la Révolution tranquille sous les auspices du « Maître chez nous ». Ajoutons à cela que pour Québec solidaire, se détourner de l'indépendance équivaut aussi à renoncer à des pans entiers de son projet politique.
Par conséquent, la seconde boussole, celle du souverainisme de gauche, est la seule à être viable et cohérente pour les solidaires. Elle va en outre dans le sens des orientations défendues en 2023 par deux des trois candidates au poste de porte-parole du parti, auxquelles les délégués solidaires ont accordé, au premier tour du scrutin, plus de 70% de leurs votes.
Certes, cette avenue pourrait mettre en péril la réélection de députés solidaires dans des comtés acquis depuis 2022 au profit du PLQ, mais ce genre de considération tactique ne devrait jamais primer sur les choix stratégiques. En ce sens, sans rien enlever aux mérites individuels de ces nouveaux députés, la perte, lors de la précédente élection, d'une circonscription en région éloignée a porté un coup très dur à QS sur le plan symbolique, que les gains montréalais ne sauraient compenser. À l'inverse, la trajectoire du PQ depuis que PSPP a pris sa tête montre bien que l'adoption d'une stratégie cohérente, axée sur des objectifs de long terme et la volonté de mener une véritable bataille culturelle, est la clé d'une progression politique véritablement transformatrice, même si elle n'est pas immédiatement porteuse électoralement. La même chose peut d'ailleurs être dite du PQ de René Lévesque, qui n'avait que six députés à la veille de remporter les élections de 1976.
Faire le choix du souverainisme de gauche implique toutefois pour les solidaires de développer un espace politique commun avec le PQ, puisque QS n'est malheureusement plus en mesure d'être le parti souverainiste dominant. Il s'agit donc de construire activement, aux côtés des péquistes, le prochain camp du « Oui », en cherchant à y accroître leur poids politique.
Un espace politique commun
Il faut ici préciser ce que l'on entend par un « espace politique commun [6] ». Celui-ci n'implique pas nécessairement une alliance électorale ou gouvernementale, même s'il la rend possible à terme [7]. Il signifie plutôt un front commun, coordonné ou pas en fonction des circonstances, et dirigé vers un objectif partagé : construire une nouvelle majorité politique, sociale et culturelle autour d'un projet de souveraineté, que les solidaires viseraient à rendre le plus démocratique et égalitaire possible.
Un évènement politique récent fournit un bon exemple de ce qui aurait pu être un embryon de cet espace politique commun, n'eût été une erreur stratégique déplorable de QS : l'abolition du serment à la monarchie britannique. Après l'élection de 2018, les solidaires menés par Sol Zanetti étaient parvenus à remettre cette question au premier plan. Puis, suite à l'élection de 2022, PSPP a fait monter la pression davantage en refusant de prêter serment au roi, les députés solidaires lui emboîtant le pas, avant de se rétracter. Advenant que les solidaires aient maintenu leur engagement, la suite aurait probablement pris la forme d'un front commun où le PQ et QS auraient défendu leur démarche avec des arguments et des tactiques communicationnelles parfois communes, d'autres fois séparées. Certes, ils auraient, chacun à leur manière, tenté de tirer politiquement parti de cette démarche pour leur propre compte, et n'auraient pas manqué de s'opposer sur d'autres enjeux en cours de route. Mais leurs actions n'en auraient pas moins été subordonnées à un objectif partagé, impliquant un degré de solidarité et de cohésion minimale, afin de rendre leur message intelligible.
C'est le type de configuration que les solidaires doivent chercher à reproduire, à grande échelle. Évidemment, il n'agit pas d'oublier que le PQ reste un adversaire politique, et de refuser de marquer des points politiques et électoraux à ses dépens. Toutefois, cela implique d'assumer que les solidaires poursuivent avec les péquistes des objectifs communs (indépendance, État social, transition énergétique) auxquels il faut rallier la population, et s'opposent aux mêmes « ennemis » (la vaste majorité du grand patronat, les fédéralistes et le régime de la pétromonarchie constitutionnelle canadienne), qui cherchent à limiter les progrès du Québec depuis toujours.
Des inflexions nécessaires
Cette avenue met cependant QS face à une difficulté. Les dernières années ont été marquées par un antagonisme féroce entre solidaires et péquistes, qui s'est cristallisé, au moins depuis 2019, autour des enjeux symboliques-institutionnels (dits « identitaires »). Pourtant, au départ, QS s'était constitué en réaction au virage néolibéral du PQ effectué sous l'ère Bouchard, et poursuivi sous le gouvernement de Pauline Marois. Le maintien durable du parti dans l'opposition, ainsi que son repositionnement social-démocrate et écologiste, entamé sous Jean-François Lisée, puis confirmé et clarifié sous PSPP, en parallèle aux grands débats sur les enjeux symboliques-institutionnels (laïcité, racisme, défense du français, immigration) ont progressivement amené les solidaires à porter sur ce dernier plan leur opposition au PQ, d'autant plus que cela leur permet, dans un même temps, de s'opposer au nationalisme conservateur de la CAQ, et de mettre ces deux adversaires dans la même case, celle de la « fermeture » et de l' « exclusion ».
Cette stratégie a atteint ses limites, au moins pour deux raisons. D'une part, elle handicape considérablement la croissance électorale de QS. En effet, si le clivage ouverture/fermeture conforte la base électorale urbaine du parti, l'on peut penser qu'il a l'effet inverse chez celles et ceux associés de fait à son côté obscur, c'est-à-dire la majorité de la population qui soutient la Loi sur la laïcité de l'État, craint le recul du français, rejette l'immigration massive et est globalement réfractaire aux thèses de la gauche libérale américaine. Cela est encore plus vrai pour les nationalistes de gauche ou sociaux-démocrates, nombreux au Québec, et qui devraient être une cible électorale prioritaire des solidaires. L'on peut douter que cet électorat goûte à cette rhétorique manichéenne, lui qui ne fait qu'adhérer à des positions bien ancrées dans l'histoire politique nationale.
D'autre part, le clivage ouverture/fermeture rend impossible la constitution d'un espace politique commun avec le PQ, celui-ci étant de fait associé par QS à une part sombre du souverainisme québécois et aux nationaux-fédéralistes de la CAQ. Pire encore, il nuit à la progression du projet indépendantiste lui-même, une part non négligeable de celui-ci étant associée à la « fermeture » et à l'« exclusion ». Il est en effet pour le moins présomptueux de penser (ou d'espérer) qu'une citoyenne ou un citoyen fédéraliste convaincu par l'indépendantisme « inclusif » des solidaires (dont ils font par ailleurs rarement la promotion) accepte de voter « oui » en faisant abstraction de tout un pan (majoritaire) du souverainisme québécois, qui lui serait du côté du rejet et de la peur de l'Autre.
En ce sens, si QS veut retrouver le chemin de la croissance électorale tout en participant à la construction d'un espace politique souverainiste avec le PQ, il devra renoncer au clivage ouverture/fermeture-inclusion/exclusion et revoir ou mettre en veilleuse une partie de ses positionnements sur les questions symboliques-institutionnelles. Trois inflexions sont essentielles pour marquer cette évolution : sur le français, sur la laïcité et sur l'immigration.
D'abord, concernant la protection du français, QS devrait rapidement se positionner en faveur de l'extension de la loi 101 au niveau collégial, une mesure qui figurait déjà au programme d'Option nationale et qui est défendue par la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec. Ensuite, concernant la laïcité, les solidaires pourraient mettre en veilleuse leur opposition à la Loi sur la laïcité de l'État jusqu'à un référendum gagnant. Ce serait d'autant plus prudent que dans l'optique d'une invalidation de la loi en question par les tribunaux canadiens, QS éviterait de se retrouver dans la position inconfortable et ambiguë où il devrait défendre la légitimité démocratique d'une loi que par ailleurs il aspire à voir invalider en en retirant la clause dérogatoire. Finalement, le parti de gauche gagnerait à revoir son discours sur les seuils d'immigration, qui semble surtout motivé par le souci de s'inscrire dans le camp de l'« ouverture » et de l'« inclusion » [8] . L'ampleur prise par le débat sur l'immigration massive et incontrôlée orchestrée par la CAQ et le gouvernement fédéral – un débat qui n'est pas près de se terminer – devrait encourager les solidaires à se détourner de la question des seuils comme marqueurs « d'ouverture », pour mettre l'emphase sur leurs propositions visant concrètement à améliorer les conditions de vie et l'intégration des immigrantes et des immigrants (francisation en entreprise, régionalisation, reconnaissance des diplômes, etc.). Cela permettrait de s'attaquer de front aux conséquences humaines bien réelles pour ces personnes des politiques caquistes et libérales, qui sont loin d'être motivées par la solidarité internationale, mais bien par la constitution d'une armée de réserve du capital. Dans un même ordre d'idée, la captation massive, aux dépens des pays du sud, d'une main-d'œuvre instruite et qualifiée, devrait être dénoncée par un parti se disant altermondialiste. Au passage, QS ne perdrait rien de son vernis « inclusif », tout en favorisant la constitution d'un espace politique souverainiste.
Vers un républicanisme radical
De telles inflexions sur les questions symboliques-institutionnelles sont d'autant plus nécessaires que l'un des enjeux importants de la période à venir consistera à définir les contours du nationalisme québécois tel qu'il sera porté par le futur camp du « Oui ». Le nationalisme conservateur, qui occupe une position de force depuis plusieurs années, se nourrit de ses affrontements avec les idées de la gauche libérale américaine, que le clivage ouverture/fermeture pratiqué par QS ne fait qu'alimenter.
Les solidaires, s'ils veulent qu'une conception politique de la nation québécoise ait prédominance, y compris dans le cadre d'un éventuel débat référendaire, ont tout intérêt à s'inscrire dans un discours républicain susceptible de prendre de revers la rhétorique conservatrice et de rejoindre le sens commun de la majorité. D'ailleurs, ce discours est déjà contenu dans le programme du parti (par exemple, les points 7, 11. 1. 2, 11. 2 et 11. 3), mais a jusqu'ici été sous-mobilisé au profit de l'approche libérale mise de l'avant depuis 2019.
Dans cette optique, les solidaires trouveraient au PQ un allié inattendu en la personne de PSPP. En effet, conclure, comme c'est souvent le cas à gauche, que ce dernier creuse le sillon du nationalisme conservateur serait commettre une erreur d'analyse. Un examen attentif des écrits et des interventions du chef du PQ indique clairement que si celui-ci se positionne sur les enjeux privilégiés du nationalisme conservateur (parmi d'autres), il le fait avec une logique, une rhétorique et des raisonnements différents, qui relèvent du républicanisme. Par exemple, il critique le multiculturalisme non pas au nom de la prédominance de la « majorité historique francophone » (formule fétiche du principal intellectuel organique du camp conservateur), mais bien parce que celui-ci empêche la constitution d'une communauté politique de citoyennes et de citoyens construisant ensemble un avenir commun. Cela lui permet à la fois de récolter des appuis dans les franges plus conservatrices de l'électorat et dans certains médias, mais aussi de manière beaucoup plus large, dans les rangs des nationalistes de gauche que les positions libérales de QS sur ces sujets rebutent [9].
Toutefois, là où le républicanisme de PSPP se limite aux enjeux symboliques-institutionnels et à la contestation des symboles monarchistes, les solidaires peuvent aller beaucoup plus loin. Dans ce même mouvement, ils peuvent aussi éviter le principal écueil qui les guettera dans la construction d'un espace politique souverainiste. En effet, à trop se rapprocher d'un PQ en pleine ascension, QS court le risque d'y être confondu, perdant de sa pertinence politique et électorale, à l'image de ce qui était arrivé aux communistes de Georges Marchais s'alliant aux socialistes de François Mitterrand. Par conséquent, pour les solidaires, la mise de l'avant d'un républicanisme radical viserait à amener le projet de pays dans le sens du projet solidaire, tout en se différenciant des péquistes.
En effet, un républicanisme radical aurait l'avantage de prendre à rebrousse poile ce qui constitue le talon d'Achille du PQ. Malgré sa mue actuelle, il ne faudrait pas oublier que ce dernier a autrefois fortement contribué à introduire le néolibéralisme au Québec, que son « préjugé favorable aux travailleurs » a souvent pris la forme d'une trahison des intérêts du monde du travail, qu'il a été (et reste ?) un adepte du libre-échange, etc. Surtout, la question de la souveraineté populaire, centrale au républicanisme tel que mis de l'avant dans le programme solidaire, constitue un angle mort du PQ depuis sa création, lui qui, suivant une tradition héritée du parlementarisme britannique, s'est focalisé sur la souveraineté de l'État, ou, au mieux, du parlement [10] .
Alors qu'elle est à l'heure actuelle un point parmi d'autres dans le programme de QS, la souveraineté populaire est susceptible de constituer le principe unificateur articulant l'ensemble du projet solidaire : indépendance, partage des richesses, souveraineté alimentaire, décentralisation, transition énergétique, émancipation des peuples autochtones, féminisme, etc. Cela, pour une raison simple : parce qu'il prône que la souveraineté nationale doit être exercée par le peuple, le principe de souveraineté populaire présuppose l'égalité de toutes les composantes de celui-ci, donc de l'ensemble des citoyennes et des citoyens. Pour être co-souveraines et co-souverains, ceux-ci doivent être en capacité d'agir comme tel. La souveraineté populaire implique ainsi, à l'échelle collective et individuelle, de pouvoir décider par soi-même et pour soi-même.
En ce sens, ce qui est trop souvent limité à l'expression de la volonté nationale peut être étendu à toutes les sphères de l'existence : la souveraineté du peuple, c'est le pouvoir des travailleuses et des travailleurs dans leur entreprise, c'est maîtriser sa vie par l'accès à une éducation gratuite, laïque et de qualité et à des soins de santé universels, c'est contrôler ce qui se retrouve dans son assiette, c'est la déconcentration de compétences vers les municipalités, au plus proche des citoyennes et des citoyens, c'est vivre en harmonie avec la nature, c'est reconnaître aux premiers peuples ce que l'on se reconnaît à soi-même. C'est aussi, pour les femmes, le droit de disposer librement de sa vie et de son corps. Au niveau institutionnel, la souveraineté populaire justifie l'introduction des réformes démocratiques mises de l'avant par QS depuis des années : mode de scrutin proportionnel, référendums d'initiative citoyenne, tirage au sort, assemblée constituante. Cette approche rejoint en outre celle défendue par la nouvelle porte-parole du parti. C'est, au fond, la gauche dans ce qu'elle a de meilleur depuis la Révolution française. Et c'est ce que les solidaires devraient incarner.
Si ce républicanisme radical est compatible avec la ligne actuellement suivie par le PQ du point de vue de la construction d'un espace politique commun, il s'en distingue assez nettement pour que QS soit en mesure de marquer une différence. Il permettra également de critiquer le parti de PSPP si celui-ci cédait aux sirènes patronales et néolibérales, et ce au nom d'une logique démocratique que patrons et néolibéraux chercheront toujours à museler. Dans un même temps, le républicanisme radical constitue en lui-même un rejet de la pétromonarchie constitutionnelle canadienne, dont les institutions, du Sénat au gouvernement des juges, sont la négation même de la souveraineté populaire. Finalement, et c'est le point le plus important, dans une ère de crises continuelles où nombre de nos compatriotes sentent leur vie leur filer entre les doigts et vivent avec l'impression maintes fois confirmer que l'avenir leur échappe, la souveraineté, la leur comme celle qu'ils partagent avec les autres, peut constituer la promesse de remettre un peu d'ordre et de sens dans leur existence. Cela constitue la question politique fondamentale des années à venir.
Cependant, s'ils persistent dans la voie suivie jusqu'ici, les solidaires risquent d'être perçus comme incapables d'y apporter des réponses pertinentes, car empêtrés dans des plis tactiques et idéologiques qui les éloignent des défis de l'époque. Un espace politique souverainiste se développera tout de même, mais sans eux, et lorsque, à la veille d'un prochain référendum, ils le rejoindront – si encore ils le rejoignent –, ce sera comme spectateurs. À l'inverse, ils peuvent faire le choix, pour reprendre les mots de Gordon Lefebvre, de remiser leur harnais d'origine au profit du harnais de l'utile, et d'apporter dès maintenant une contribution nécessaire à l'avenir du pays. Le Québec leur en saurait gré.
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[2] Avec une plateforme électorale sérieuse en matière de transition énergétique.
[3] PSPP a fait des déclarations à ce sujet durant sa course à la chefferie, et cette question structure des sections
entières de son livre Reconstruire le camp du Oui (2020). Elle est également présente dans le programme du PQ.
[4] Au printemps 2023, le PQ a été à la pointe dans la lutte pour convaincre le ministre de l'Éducation Bernard
Drainville d'interdire les cellulaires dans les classes.
[5] Il faut en ce sens se remémorer le sort des partis de l'extrême gauche marxiste-léniniste des années 1970 : refusant de se positionner sur la question nationale, ils s'enfoncèrent dans un sectarisme politique contre-productif, avant de s'effondrer, suite au référendum de 1980, en même temps que le rêve indépendantiste qu'ils avaient pourtant conspué. Dans l'intervalle, les arguments qu'ils invoquaient contre l'adoption de la loi 101 ressemblaient étrangement à ceux mobilisés par les solidaires 40 ans plus tard pour s'opposer à la loi 21.
[6] La notion d'espace politique commun peut être approchée comme un embryon ou une composante d'un éventuel « bloc historique » au sens gramscien du terme. Celui-ci est un concept beaucoup plus large, tant du point des transformations impulsées que de leur portée sur tous les plans : politique, économique, sociale, culturelle, géopolitique, etc. Par exemple, au Québec, l'espace politique souverainiste et social-démocrate, partagé au fil des années par le PLQ de Jean Lesage, le RIN, l'Union nationale de Daniel Johnson et finalement par le PQ, qui en est venu à l'incarner à lui seul, ne devrait pas être confondu avec le bloc historique nationaliste et modernisateur de la Révolution tranquille. De même, un espace politique commun ne préfigure pas nécessairement la forme prise ultérieurement par un bloc historique. Dans la France des années 1970, socialistes et communistes ont formé un espace politique de gauche très avancé (avec la rédaction d'un programme commun et des alliances électorales), mais le bloc historique qui en a émergé, prenant la forme d'un européisme (néo)libéral-libertaire hégémonique pendant près de 40 ans, n'a que peu à voir avec ses ambitions de départ.
[7] L'absence d'un espace politique commun, et de son aboutissement logique, c'est-à-dire un programme partagé de gouvernement, est d'ailleurs ce qui manquait au projet d'alliance PQ-QS de 2017.
[8] Contrairement à ce qui a été le cas pour la laïcité, les seuils d'immigration n'ont pas été, sauf erreur, l'objet d'un débat en bonne et due forme à QS, expliquant peut-être les prises de position brouillonnes du parti à ce sujet au fil des années. Par exemple, durant un débat organisé par Le Devoir dans le cadre de la course au porte-parolat, Ruba Ghazal, pourtant en pointe sur ces questions, louait le nationalisme d'« inclusion » qui aurait eu cours au Québec dans les années 1980, tout en condamnant fermement une partie du nationalisme québécois actuel qui présenterait l'immigration comme une menace contre la prédominance du français. Elle oubliait au passage de mentionner que le Québec des années 1980 avait des seuils d'immigration beaucoup plus proches de ceux défendus aujourd'hui par le PQ. De même, elle faisait abstraction du fait que le message implicite de la loi 101, qu'elle défend par ailleurs avec fierté, est justement que l'immigration peut constituer une menace pour le français, justifiant d'imposer celui-ci aux enfants issus de l'immigration à l'école primaire et secondaire. Cet exemple montre bien que le positionnement actuel de QS sur l'immigration, outre que de nourrir un humanitarisme en manque de repères, est surtout utilisé comme un marqueur accentuant le clivage avec le PQ.
[9] Dans cet entretien réalisé en France, PSPP confie son souci de porter un discours critique du « wokisme » sans aliéner à son projet les franges de l'électorat à la sensibilité « intersectionnelle » : https://www.youtube.com/watch?v=Mc4Ikh4ogJ4&t=2026s&pp=ygUicGF1bCBzYWludCBwaWVycmUgcGxhbW9uZG9uIGZyYW5jZQ%3D%3D.
[10] Pour s'en convaincre, voir l'ouvrage de Marc Chevrier, La République québécoise : histoire d'une idée suspecte (2012).

Les tracteurs a brides abattues sur Paris

Bloquer Rungis, le plus important marché d'Europe, cordon ombilical des Français (es) et les axes névralgiques de l'Hexagone, telles étaient et demeurent les cibles des agriculteurs en colère pour faire plier le gouvernement. Gabriel Attal a promis de nouvelles mesures.
De Paris, Omar HADDADOU <
Direction la capitale pour taper du poing !
La réunion d'hier lundi à Matignon des Syndicats avec le Premier ministre Gabriel Attal va-t-elle porter ses fruits ou accoucher d'une souris acculant les agriculteurs des 30 départements à passer à la vitesse supérieure.
Ces derniers ne cachent pas leur détermination à investir, à bord de leurs 800 tracteurs, le fastueux Paris et ses 1000 marchés, avec comme point d'orgue la fermeture de plusieurs autoroutes et le siège de Rungis, le plus grand marché de frais en Europe. Plus de 3 millions de marchandises y transitent par an.
D'où le ton apaisé du ministre de l'Intérieur Gérard Darmanin pour éviter la confrontation des 15 000 policiers et gendarmes et dans la foulée motiver la levée des 8 points de blocage. Plus de trois heures de tractations entre le chef du gouvernement Gabriel Attal, le représentant de la FNSEA et des « Jeunes Agriculteurs », en vue de désamorcer la crise.
Ce rendez-vous se voulait discret, couvant un suspens qui laissait transparaitre l'acuité du malaise et la difficulté à trouver un consensus. Ni le Premier ministre, ni ses homologues ne se prêtaient à la transparence au sortir de cette rencontre. C'est la porte-parole du gouvernement Presca Thevenot qui mettra un peu d'eau à la bouche des médias : « La mobilisation du gouvernement en faveur des agriculteurs s'inscrit dans la durée. De nouvelles mesures seront prises dès demain », assure-t-elle autour de 22 heures.
Sous pression, le locataire de Matignon est attendu à l'Assemblée nationale pour son discours de politique générale. Il avait juré « d'avancer vite » dans le dossier. Son ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, a du pain sur la planche.
La démonstration de force des agriculteurs, silo de la population, contrairement au combat des immigrés, a trouvé « réponse », du moins un dialogue. Le calendrier politique plaide en leur faveur. Elections européennes, Jeux Olympiques et Paralympiques. Leurs revendications méritent attention. Elles portent sur la réévaluation des prix des produits, la mise en place de mesures contre la concurrence déloyale, l'accord (décrié) de la réforme de la politique agricole commune (PAC), le green deal et sa neutralité carbone en 2050, perçu comme le cauchemar des agriculteurs.
La cause des besogneux du monde rural se veut présentement une perspective et un défi européen.
Mesurant l'impact du tollé parisien, Macron - concentré sur son agenda international - a consigné un tête à tête, jeudi prochain, avec Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne.
L'exécutif est plus que jamais au creux de la vague. Il se lance à corps perdu dans des concessions qui pourraient se révéler inassouvies. Vendredi, Attal, tout enthousiaste, dévoilait des mesures d'urgence, à savoir l'abandon de la taxe sur le gazole non routier, des indemnités gonflées pour les éleveurs sinistrés, des sanctions lourdes contres trois industriels de l'agro-alimentaire outrepassant les lois Egalim sur les prix.
Cela dissipera-t-il l'épaisse chape de normes qui étouffe l'activité agricole ?
Le politique sait ciseler le propos quand l'engrenage institutionnel grince : « Je ne vous lâcherai pas, on va se battre. Mettre l'agriculture au-dessus de tout. La France sans l'agriculture, ce n'est pas la France ! » martèle le Premier ministre.
Si le monde de la paysannerie trime, pleure de toute son âme ses pertes et ses souffrances, le spéculateur, le détaillant du coin et le véreux de la grande distribution quant à eux suffoquent en découvrant le bond de leurs profits. Pour l'heure le convoi ne décolère pas.
Sans Rungis, Paris ne tiendrait pas 72 heures.
O.H
8 heures
> 15.000 policiers et gendarmes mobilisés
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La CIJ s’est prononcée : Dites au Canada de respecter les exigences de la CIJ à l’égard d’Israël

La CIJ a rendu sa décision sur la plainte de l'Afrique du Sud pour génocide contre Israël, et il s'agit d'un acte d'accusation accablant pour les violences commises par Israël à Gaza
La CIJ a notamment exigé qu'Israël
1) prenne des mesures pour mettre fin à toute violence génocidaire à Gaza,
2) empêche et punisse l'incitation au génocide par ses dirigeants, et
3) permette l'acheminement de l'aide humanitaire à Gaza. Bien que la CIJ n'ait pas exigé de cessez-le-feu, le ministre sud-africain des affaires étrangères a affirmé que "par implication, un cessez-le-feu doit avoir lieu". Chaque mesure a été approuvée par une large majorité des juges de la CIJ, jamais moins de 15-2. Lire la déclaration de CJPME ici.
Joignez-vous à CJPMO et insistez pour que le Canada soutienne la décision juridiquement contraignante de la Cour ! Entre autres choses, le Canada devrait
1) condamner fermement la violence génocidaire d'Israël à Gaza ;
2) faire pression sur Israël pour qu'il se conforme pleinement aux dispositions d'urgence de la CIJ ;
3) mettre fin à tout commerce d'armes entre le Canada et Israël, et
4) réévaluer la position diplomatique du Canada à l'égard d'Israël.
Cliquez ici pour dire au Canadade respecter la décision monumentale de la CIJ ! Votre courriel sera envoyé au Premier ministre Trudeau, à la ministre des Affaires étrangères Joly, à d'autres dirigeants fédéraux et à votre député local. Le Canada doit soutenir l'importante décision de la CIJ de mettre fin à la violence génocidaire contre les Palestiniens de Gaza !
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Le vendredi 26 janvier 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) a rendu un arrêt préliminaireselon lequel les actions d'Israël à Gaza pourraient plausiblement relever de la Convention sur le génocide, et a ordonné à Israël de se conformer à des mesures provisoires qui limiteraient ses actions génocidaires. La CIJ exige qu'Israël : prenne toutes les mesures nécessaires pour empêcher la commission d'actes de génocide (y compris le meurtre de membres du groupe et l'imposition de conditions de vie visant à détruire le groupe), qu'il veille à ce que ses forces militaires ne commettent pas d'actes de génocide, qu'il empêche et punisse l'incitation directe et publique à commettre un génocide et qu'il permette l'acheminement de l'aide humanitaire, parmi d'autres mesures.
Il s'agit de la première étape d'une procédure engagée par l'Afrique du Sud, qui a invoqué la convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide ("convention sur le génocide") pour engager une procédure contre Israël, un autre État partie, sur la base de ses obligations en matière de prévention et de répression du génocide. Larequête de 84 pages déposée par l'Afrique du Sud auprès de la CIJ repose sur deux graves allégations : premièrement, Israël « n'a pas empêché le génocide et n'a pas poursuivi l'incitation directe et publique au génocide » ; deuxièmement, « Israël s'est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes génocidaires contre le peuple palestinien à Gaza ». Ces actes consistent notamment à tuer des Palestiniens de Gaza, à leur causer de graves dommages corporels et mentaux et à leur infliger des conditions de vie calculées pour entraîner leur destruction physique. Ces actes seraient « de nature génocidaire parce qu'ils visent à provoquer la destruction d'une partie substantielle du groupe national, racial et ethnique palestinien, à savoir la partie du groupe palestinien de la bande de Gaza ».
Bien qu'il faille attendre des années avant qu'un jugement définitif soit rendu sur le bien-fondé de l'accusation de génocide, l'Afrique du Sud demande, « de toute urgence », une série de mesures provisoires qui s'appliqueraient immédiatement et s'étendraient sur toute la durée du procès. Ces mesures comprennent la suspension immédiate des opérations militaires d'Israël contre Gaza, la fin des déplacements massifs de la population de Gaza par Israël et la fin de la privation par Israël de nourriture, d'eau et d'autres fournitures essentielles à cette population. Bien que la CIJ n'ait pas appelé à un cessez-le-feu total, elle a ordonné d'importantes restrictions à la campagne génocidaire d'Israël contre la population de Gaza, que CJPME estime ne pas pouvoir raisonnablement respecter sans un cessez-le-feu total et la fin de l'effusion de sang.
En tant qu'État partie à la Convention sur le génocide, le Canada peut intervenir dans la procédure en tant qu'État partie pour soutenir l'Afrique du Sud, que ce soit maintenant ou au cours d'une éventuelle procédure sur le fond. La semaine dernière, CJPMO a envoyé une lettre à la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, pour demander au Canada de peser de tout son poids sur la requête de l'Afrique du Sud contre Israël et d'adresser à la CIJ une demande officielle exprimant son soutien.
CJPMO insiste sur le fait que le Canada doit maintenant prendre position en faveur de la décision de la Cour, après des semaines de déclarations confuses et contradictoires. Le soutien à la décision peut et doit prendre la forme
1) d'une condamnation publique ferme de la violence brutale d'Israël contre les Palestiniens de Gaza ;
2) de pressions sur Israël pour qu'il se conforme pleinement aux dispositions d'urgence de la CIJ ;
3) d'un arrêt de tout commerce d'armes entre le Canada et Israël et d'un examen formel de la coopération du Canada avec Israël en matière de sécurité, et
4) d'une réévaluation stricte de la position diplomatique du Canada vis-à-vis d'Israël pour s'assurer que le Canada n'est pas complice d'un génocide ou n'en permet pas l'exécution.
Canadians for Justice and Peace in the Middle East
CJPME / CJPMO · 580 Sainte-Croix Ave, Suite 060, Montreal, QC, H4L 3X5
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Le verdict de la Cour internationale de justice contre l’Israël et le doute trudeausien

Le vendredi 26 janvier 2024, la Cour Internationale de Justice (CIJ), l'organe judiciaire principal de l'ONU, a rendu sa décision face à l'appel de l'Afrique du Sud concernant la question suivante : « Oui ou non, l'État d'Israël a-t-il violé la Convention des Nations unies sur le génocide ? » Israël est signataire de cette convention depuis 1948, à la suite de l'Holocauste. Il se voit ainsi obligé de respecter cette convention.
Kaveh Boveiri
La Cour Internationale de Justice, constituée de 17 juges, a été presque unanime dans la prescription de mesures conservatoires mentionnées à la fin de sa décision, à l'exclusion d'un ou deux juges.
Une des phrases clés est la suivante : Israël « doit offrir des assurances et des garanties de non-répétition des violations de la convention sur le génocide ».
La réaction d'Israël était prévisible. Le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, répète que les accusations de génocide sont scandaleuses. Ainsi reste-t-il en harmonie avec la position du précédent premier ministre, Nafthali Bennett, exprimée le 23 décembre dans un entretien réalisé lors du programme de HardTalk de BBC.
Sans revendiquer explicitement le cessez-le-feu immédiat, ce verdict est une étape importante visant l'instauration de mesures devant indirectement mener au cessez-le-feu. Il doit être considéré sérieusement par les pays qui demeurent des complices affirmés, malgré leur isolement grandissant, avec les États-Unis et Israël. Mais cette complicité peut se présenter également sous la forme d'hésitations et de doutes, ces dernières manifestations étant une des marques caractéristiques de Justin Trudeau.
Tandis que, pour une grande proportion de la population canadienne, le verdict de la Cour correspond simplement à leur compréhension de ce qui se passe à Gaza depuis le début, cela n'est pas le cas pour les autorités canadiennes et plus précisément pour le premier ministre Justin Trudeau. Dans son entretien du 12 janvier, il dit qu'il n'accepte pas lesprémisses suggérées par l'Afrique du Sud. Pour cette accusation, il nous dit « il faut des preuves irréfutables ».
À la suite de l'ordonnance de la Cour, la population canadienne voulait connaître la position du gouvernement sur ce verdict très puissant. Mais après l'annonce de la cour, le 26 janvier, ni Trudeau ni la ministre des Affaires Étrangères Mélanie Joly n'a attendu pour répondre aux questions.
C'est de cette façon que Trudeau a exprimé encore une fois son doute typique. Ainsi, partage-t-il davantage la complicité conjointe étasunienne-israélienne et… leur échec. La complicité de l'état canadien avec ce génocide a déjà mené à des manifestations de colère de la part du peuple canadien. Ce genre de complicité aura sans doute des conséquences dans la prise de position des gens, immigrants et non-immigrants qui reconnaissent, d'une manière ou de l'autre, cette complicité. Les élections à venir seront l'une des occasions où la population exprimera cette prise de position.
L'effort de s'harmoniser avec les États-Unis s'observe parfois dans des cas où le gouvernement canadien en vient même à dépasser, par certains aspects, le positionnement politique américain. En voici un exemple. À cause de la rupture des relations diplomatiques décrétées avec l'Iran par le gouvernement canadien sous le ministre Harper, les citoyens irano-canadiens ne peuvent pas renouveler leurs passeports au Canada. Je vous invite à prendre un moment pour vérifier ce qui leur reste comme alternatives avant de poursuivre la lecture de ces lignes. Bizarrement, ces citoyens du Canada et de l'Iran doivent envoyer leurs passeports aux États-Unis, à Washington, où se trouve une « section d'intérêts » (Interests Section) de l'Iran à l'ambassade du Pakistan ! Une telle section n'existe pas au Canada.
Une blague connue au Canada anglophone exprime ce doute et cette obéissance du gouvernement canadien : U.S. says : « Canada jump ! » Canada says : « How high ? » (Les États-Unis disent : « Canada, saute ! » Canada répond : « À quelle hauteur ? »)
À l'heure actuelle, la population canadienne en général et le mouvement ouvrier en particulier se mobilisent davantage contre cette hésitation constante et cette complicité manifestée par le gouvernement. Trudeau, même en étant un peu machiavélique et en pensant à son avenir, doit s'approcher de la population et mettre fin à son attitude de doute et sa complicité.
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CJPMO condamne la suspension du financement de l’UNRWA par le Canada comme une punition collective

Montréal, le 27 janvier 2024 - Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO) est scandalisé par la décision du Canada de suspendre le financement de l'UNRWA, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, sur la base d'allégations israéliennes non prouvées à l'encontre de quelques-uns de ses employés. L'UNRWA est la principale agence humanitaire fournissant des services à la population de Gaza. Hier, la Cour internationale de justice (CIJ) a conclu qu'il était plausible que les conditions de vie imposées par Israël à Gaza, y compris la privation de nourriture et d'eau, puissent constituer des actes de génocide. CJPMO demande instamment au Canada de revenir immédiatement sur sa décision politique contre l'UNRWA, d'augmenter son soutien financier à l'agence et d'exercer une pression concrète sur Israël pour qu'il mette fin à sa guerre génocidaire et à son siège.
« La suspension par le Canada de l'aide à l'UNRWA est un acte hypocrite de punition collective à l'encontre d'une population de réfugiés menacée de génocide », a déclaré Michael Bueckert, vice-président de CJPMO. « Le moment choisi pour l'annonce semble avoir été conçu pour détourner l'attention de l'ordre de la CIJ selon lequel Israël doit empêcher le génocide à Gaza. Au lieu d'exhorter Israël à se conformer à ces ordonnances, le Canada s'est joint à une attaque politique contre les victimes du génocide » a ajouté M. Bueckert.
CJPMO note que l'allégation d'Israël - selon laquelle 12 des 30 000 employés de l'UNRWA auraient participé à l'attaque du Hamas du 7 octobre - n'a pas été prouvée et doit être abordée avec beaucoup de prudence. Il est rapporté que les allégations d'Israël ont été obtenues par des interrogatoires, dans un contexte où Israël utilise régulièrement la torture pour obtenir des aveux forcés de la part des détenus, y compris des enfants. De plus, CJPMO note que l'UNRWA a déjà pris des mesures de précaution immédiates pour licencier les employés accusés et lancer une enquête sur les allégations, ce qui rend la suspension du financement par le Canada injustifiée et gratuite. « Il est impossible de ne pas remarquer que le Canada a agi immédiatement pour punir l'UNRWA sur la base d'allégations israéliennes, alors qu'il n'a pris aucune mesure pour censurer Israël pour des actes que la CIJ considère comme plausiblement génocidaires » a déclaré M. Bueckert. CJPMO note que sur plus de 26 000 Palestiniens tués par Israël, au moins 152 d'entre eux étaient des employés de l'UNRWA, alors qu'il y a 253 incidents documentés d'attaques israéliennes sur les écoles et les installations de l'UNRWA depuis le 7 octobre.
CJPMO estime que ce n'est pas une coïncidence si la décision du Canada de réduire son aide humanitaire à Gaza a coïncidé avec la décision initiale de la CIJ sur la requête de l'Afrique du Sud contre Israël. Dans sa décision, la CIJ a noté la situation humanitaire catastrophique à Gaza et a déterminé que les actions d'Israël pouvaient plausiblement s'apparenter à un génocide. La CIJ a ordonné à Israël de « prendre toutes les mesures en son pouvoir » pour prévenir tous les actes susceptibles de tomber sous le coup de la Convention sur le génocide, notamment « le fait d'imposer délibérément au groupe des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ». La Cour a également ordonné qu'Israël « prenne des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture des services de base et de l'aide humanitaire dont les Palestiniens de la bande de Gaza ont un besoin urgent, afin de remédier aux conditions de vie difficiles auxquelles ils sont confrontés ». CJPMO a noté que la réponse du Canada à la décision de la CIJ n'a pas exprimé son soutien à cette décision, ni appelé Israël à se conformer à ses dispositions juridiquement contraignantes.

Cliquez sur ce lien pour afficher le formulaire qui vous permettre d'envoyer votre courriel :
https://fr-cjpme.nationbuilder.com/reverse_unrwa_cuts
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Plus de 250 organisations féministes demandent d’interdire les accusations d’aliénation parentale

Aux côtés de l'Association nationale Femmes et Droit, nous avons signé une lettre ouverte demandant au gouvernement canadien d'interdire les accusations d'aliénation parentale dans les affaires de droit familial. Ce concept pseudo-scientifique mène les tribunaux à forcer des enfants à vivre avec un père violent. C'est pourquoi Reem Alsalem, la Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la violence contre les femmes et les filles, a demandé à tous les États de « légiférer pour interdire l'utilisation de l'aliénation parentale ou de pseudo-concepts apparentés dans les affaires relevant du droit de la famille ».
Aidez à protéger les femmes, les enfants et les victimes de violence familiale en partageant cette lettre avec le mot-clic #StopAccusationsAliénation. Et pour en savoir plus sur l'aliénation parentale.
La lettre
Le très honorable Justin Trudeau,
L'honorable Arif Virani,
L'honorable Pierre Poilievre,
L'honorable Jagmeet Singh,
L'honorable Yves-François Blanchet,
Nous vous écrivons en tant qu'organisations féministes et de défense de l'égalité pour vous demander d'agir pour résoudre une crise aux proportions dramatiques dans notre système de justice familiale : l'utilisation d'accusations d'aliénation parentale contre les victimes de violence conjugale.
L'« aliénation parentale » est un concept controversé qui est utilisé pour réduire au silence les parents et les enfants qui dénoncent les violences familiales commises par le père. Trop souvent, les tribunaux et les témoins qui évaluent l'enfant considèrent que le fait de dénoncer la violence familiale ou de demander une réduction des contacts entre le père et l'enfant sont des signes d'« aliénation », c'est-à-dire de lavage de cerveau de la part de la mère pour que l'enfant rejette le père. Ce concept conduit les tribunaux à travers le pays à séparer des enfants de leur mère et à les forcer à vivre avec leur père, même lorsqu'il existe des antécédents documentés de violence familiale. Parfois, lorsque le père est jugé inapte à prendre soin de l'enfant, les tribunaux et la protection de la jeunesse vont jusqu'à placer l'enfant dans un centre jeunesse ou en famille d'accueil pour éviter la supposée « aliénation parentale » par la mère, alors que l'enfant aurait pu rester auprès de sa mère ou être confié·e à ses grands-parents maternels. Ces problèmes affectent également les membres de la communauté 2SLGBTQIA+ qui vivent des violences conjugales.
La recherche canadienne a révélé que :
– Les accusations d'« aliénation parentale » visent principalement les femmes ; les victimes de violence conjugale sont particulièrement à risque.
– En 2015, plus de la moitié des travailleuses interrogées dans des centres de femmes au Québec décrivaient les accusations d'« aliénation parentale » comme une priorité ou l'une de leurs principales préoccupations.
– La situation n'a fait que s'empirer dans les dernières années ; les accusations d'« aliénation parentale » sont en augmentation.
– Les allégations de violence familiale sont rarement prises au sérieux dans les cas où l'« aliénation parentale » est alléguée ; la violence conjugale est présentée comme pertinente à l'analyse du meilleur intérêt de l'enfant dans seulement 10% des cas où tant la violence conjugale par le père que l'« aliénation parentale » par la mère sont alléguées.
– Les accusations d'« aliénation parentale » sont fortement corrélées avec des situations de violence conjugale, même si ce n'est pas toujours apparent parce que les enjeux de violence conjugale sont souvent occultés dans les cas où l'« aliénation parentale » est alléguée.
– L'« aliénation parentale » n'a pas de définition stable en termes juridiques : c'est un concept vague qui peut être utilisé dans un large éventail de circonstances, incluant des cas où l'enfant ne rejette pas un parent et des cas où la mère n'a ni dénigré le père ni tenté de faire obstruction aux contacts père-enfant.
– La prévalence des accusations d'« aliénation parentale » mène des avocat·es à recommander aux victimes de ne pas mentionner la violence conjugale commise par le père.
– Considérer la question de l'« aliénation parentale » mène les tribunaux à perdre de vue le meilleur intérêt de l'enfant, et à se centrer plutôt sur les droits parentaux.
En outre, bien que les données canadiennes fassent défaut, les recherches menées dans d'autres pays suggèrent que les accusations d'« aliénation parentale » ont un impact disproportionné sur les femmes appartenant à des groupes minoritaires, notamment les femmes racisées, migrantes et handicapées.
En 2019, la Loi sur le divorce a été modifiée pour accorder plus d'importance à la violence familiale et ordonner aux tribunaux de prioriser la sécurité et le bien-être des enfants. En tant qu'organisations de défense des droits des femmes, prestataires de services, organisations juridiques et centres de recherche, nous constatons que le problème des accusations d'« aliénation parentale » persiste. Une nouvelle réforme est nécessaire pour interdire explicitement le recours aux accusations d'aliénation parentale dans les litiges familiaux, par le biais d'un amendement à la Loi sur le divorce. Le changement est particulièrement urgent étant donné l'augmentation des violences genrées depuis la pandémie de COVID-19, qui a conduit la Commission des pertes massives à déclarer que la violence fondée sur le sexe était une épidémie.
L'été dernier, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences, Reem Alsalem, a présenté un rapport sur la garde des enfants, la violence contre les femmes et la violence contre les enfants. Elle a sonné l'alarme sur « la manière dont les tribunaux des affaires familiales des différentes régions invoquent la notion d'“aliénation parentale” ou des pseudo-concepts similaires dans les affaires de garde d'enfants, sans tenir compte des antécédents de violence domestique, ce qui peut se traduire par une double victimisation des personnes ayant subi ce type de violence ». Sa première recommandation est « [q]ue les États légifèrent pour interdire l'invocation de l'aliénation parentale ou de pseudo-concepts du même type dans des affaires relevant du droit de la famille ».
Nous vous demandons de vous engager à suivre cette recommandation et d'adopter le plus rapidement possible un projet de loi modifiant la Loi sur le divorce. Nous vous demandons également de vous engager à consulter des organisations expertes en matière de droits des femmes, telles que l'Association nationale Femmes et Droit, lors de la rédaction du projet de loi.
Plus de 250 d'organisations ont signé cette lettre ouverte et appuient la campagne de l'Association nationale Femmes et Droit visant à interdire les accusations d'« aliénation parentale ».
Si vous voulez soutenir les femmes, les enfants et les victimes de violence familiale, nous espérons que vous verrez que cette question est une priorité.
Notre système de justice familiale est en crise. Il faut agir dès maintenant.
Tiffany Butler, Directrice exécutive
Suzanne Zaccour, Directrice des affaires juridiques
Association nationale Femmes et Droit (ANFD)
Télécharger la lettre au format PDF
Signataires
Organisations nationales
Women's Shelters Canada | Hébergement femmes Canada
Canadian Women's Foundation
Ending Violence Association of Canada | L'Association canadienne pour mettre fin à la violence
DisAbled Women's Network of Canada | Réseau d'action des femmes handicapées du Canada (DAWN-RAFH)
The Canadian Association of Elizabeth Fry Societies l L'Association canadienne des Sociétés Elizabeth Fry
Grupo de Apoio a Mulheres Brasileiras no Exterior (GAMBE)
Centre for the Study of Social and Legal Responses to Violence
The Alliance of Canadian Research Centres on Gender-Based Violence
Feminist Alliance for International Action
Canadian Resource Centre for Victims of Crime (CRCVC) | Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes
In Their Best Interest Canada | Dans Leur Intérêt Supérieur Canada
Les Femmes Michif Otipemisiwak | Women of the Métis Nation
Women's Centre for Social Justice (WomenatthecentrE)
YWCA Canada
Canadian Research Institute for the Advancement of Women (CRIAW) | L'Institut canadien de recherches sur les femmes (ICREF)
Wisdom2Action
Informed Opinions | Femmes Expertes
Aura Freedom
Canadian Center for Women's Empowerment (CCFWE)
Women's Economic Council | Le Conseil économique des femmes
Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine (CDÉACF) | Prochainement Co-Savoir
Abortion Rights Coalition of Canada | Coalition pour le droit à l'avortement au Canada
Alliance against Violence and Adversity (AVA)
Québec
Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale
Fédération des maisons d'hébergement pour femmes (FMHF)
Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie (TCMFM)
Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec (RTRGFQ)
Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les violences à caractère sexuel (RQCALACS)
Groupe des Treize
Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec
L'R des centres de femmes du Québec
Association féministe d'éducation et d'action sociale (Afeas)
Fédération du Québec pour le planning des naissances
Service d'Entraide Passerelle (SEP)
Maison d'Hébergement Pour Elles Des Deux Vallées
Regroupement des femmes de la région de Matane
Femmes en Mouvement
Pavillon Marguerite de Champlain
Regroupement des femmes La Sentin'Elle
Le Gîte Ami
Maison La Virevolte
Alliance des communautés culturelles pour l'égalité dans la santé et les services sociaux (ACCÉSSS)
Centre de femmes l'Étincelle
Réseau québécois d'action pour la santé des femmes (RQASF)
Centre des Femmes de Montréal-Est/Pointe-aux-Trembles
Centre de prévention des agressions de Montréal CPAM
Observatoire Famille Immigration
Action Travail des Femmes (ATF)
ESPACE Mauricie
Halte-Femmes Montréal-Nord
Quartier des Femmes
Face a Face Listening and Intervention Center | Le centre d'écoute et d'intervention Face à Face
Jeunesse au Soleil | Sun Youth Organization
Centre social d'aide aux immigrants (CSAI)
Réseau d'action des femmes en santé et services sociaux (RAFSSS)
Centre d'éducation et d'action des femmes de Montréal (CEAF)
CALACS Trêve pour Elles
Multi-Femmes Inc.
Alternative pour Elles maison d'aide et d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale et leurs enfants
Horizon pour elle
Maison le Prélude
La Clé sur la Porte
Maison de Lina
La Maison La Nacelle
Maison d'Hébergement l'Équinoxe
La Bouée Régionale
Centre de solidarité lesbienne (CSL)
La Gîtée
Regroupement des organismes ESPACE du Québec (ROEQ)
La Méridienne 1990
Havre l'Éclaircie
Maison Halte-Secours
Viol-Secours, CALACS de Québec
South Asian Women's Community Centre (SAWCC), Montreal I Centre communautaire des femmes sud-asiatiques (CCFSA)
Centre des femmes Le point d'ancrage
Fédération des femmes du Québec
ESPACE Suroît
Table des groupes de femmes de Montréal (TGFM)
Conseil des Montréalaises
L'Autre-Toit du KRTB
Auberge de l'Amitié Roberval inc.
L'Escale de l'Estrie
Juripop
CALACS L'Ancrage
Carrefour d'éducation populaire de Pointe-Saint-Charles
Maison des femmes des Bois-Francs
L'Écho des femmes de la Petite Patrie
Association des familles monoparentales et recomposées La Source
Centre des Femmes du Témiscouata (CFT)
Regroupement des auberges du cœur du Québec (RACQ )
Bureau de consultation jeunesse (BCJ)
La Débrouille Inc.
Femmes du monde à Côte-des-Neiges
Centre des femmes RDP
Centre Actu-Elle
Centre-Femmes La Passerelle
La Collective des femmes de Nicolet et Régions
CALACS de l'Ouest-de-l'Île
Le Centre Louise-Amélie
La Maison des Femmes Sourdes de Montréal (MFSM)
Le Centre féminin du Saguenay
Centre Femmes aux 4 Vents
Centre Femmes Entre-Elles
Transit 24
Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail (CIAFT)
Éditions du remue-ménage
Le Centre de femmes l'Érige
Centre des femmes de Longueuil
La Marie Debout, centre d'éducation des femmes
Centre ressources pour femmes de Beauport
Centre de femmes La Moisson
Regroupement Naissances Respectées (RNR)
Le Regroupement des Femmes de la Côte-de-Gaspé
Y des femmes de Montréal | YWCA Montreal
Centre de femmes Uni-Vers-Elles
Centre de femmes l'Éclaircie
Afrique au Féminin
Centre de femmes Arc-en-ci-Elle
Centre des femmes de Longueuil
Centre de femmes l'Autonomie en soiE
Centre femmes de La Mitis
Centre femmes d'aujourd'hui
Centre-femmes Catherine-Leblond
Centre de femmes Mieux-Être de Jonquière
Centre de Femmes l'Essentielle
Centre des femmes de Forestville
L'Alliance des femmes
Centre-femmes du Grand-Portage
Le Centre des femmes de Laval (CFL)
Mouvement pour l'autonomie dans l'enfantement
Centre-Femmes La Jardilec
Centre de femmes les Unes et les Autres
Centre Entre-Femmes
Centre Au Cœur des Femmes
Fédération régionale des OSBL d'habitation de la Mauricie-Centre-du-Québec (FROHMCQ)
Centre des femmes l'Héritage
Centre des Femmes du Ô Pays
Centre des femmes d'ici et d'ailleurs
Conseil Central Cœur du Québec CSN
Centre-Femmes de Bellechasse
Ontario
Action ontarienne contre la violence faite aux femmes
Barbra Schlifer Commemorative Clinic
Ontario Association of Interval & Transition Houses (OAITH)
Hope 24/7
Centre Victoria pour femmes
YWCA Hamilton
Interval House of Ottawa | Maison Interval d'Ottawa
Northwestern Ontario Women's Centre
Elizabeth Fry Society of Northeastern Ontario
YW Kitchener-Waterloo
YWCA St. Thomas-Elgin
Hiatus House
YWCA Durham
Rexdale Women's Centre
Gillian's Place
Welcome Centre Shelter for Women and Families
YWCA Muskoka
North York Women's Centre
Nellie's
YWCA Hamilton
YWCA Toronto
Muskoka Parry Sound Sexual Assault Services
Huronia Transition Homes
Ontario Council of Agencies Serving Immigrants (OCASI)
Elliot Lake Women's Group Inc.
Armagh House
Lennox and Addington Interval House
Manitoulin Family Resources
Birchway Niagara
Parkdale Queen West Community Health Centre
YWCA Cambridge
YWCA Ontario Coalition
Alternatives for Women
Herizon House
Sexual Assault Support Centre of Waterloo Region
Women's Habitat of Etobicoke
YWCA Sudbury
Counselling and Family Service Ottawa | Service familial et counseling Ottawa
YWCA Niagara Region
Kenora Sexual Assault Centre
YWCA Peterborough Haliburton
Red Door Family Shelter
The 482 Collective
York Region Centre for Community Safety
North Bay Indigenous Hub
Conseil Scolaire Public du Nord-Est de l'Ontario (CSPNE)
Embrave : Agency to End Violence
Amelia Rising Sexual Violence Support Centre
Elspeth Heyworth Centre for Women
Planned Parenthood Toronto (PPT)
The Niagara Chapter of Native Women Inc.
Community Counselling Centre of Nipissing
Alberta
Calgary Legal Guidance Society
WINGS of Providence
Rowan House Society
RESOLVE Alberta
Fairview & District Women's Centre Association OAS Crossroads Resource Centre & Women's Shelter
Mountain Rose Women's Shelter Association
Alberta Abortion Access Network
Neepinise Family Healing Centre
Women's Centre of Calgary
Peace River Regional Women's Shelter
YWCA Edmonton
Sagesse Domestic Violence Prevention Society
Colombie-Britannique
Justice for Girls
West Coast LEAF Association
FREDA Centre on Gender-based Violence against Women and Children
Sooke Transition House Society
Omineca Safe Home Society
BC Poverty Reduction Coalition
BC Society of Transition Houses (BCSTH)
Cowichan Women Against Violence
The Cridge Centre for the Family
North Island Community Services Society
Inform'Elles
Saskatchewan
Provincial Association of Transition Houses and Services of Saskatchewan (PATHS)
Yorkton Women In Need Inc.
Regina Transition House
Choose to Change – SIGN (Society for the Involvement of Good Neighbours)
Saskatoon Interval House
Amakon Women Empowerment Inc (AWE)
Sexual Assault Services of Saskatchewan
YWCA Saskatoon
YWCA Regina Inc
YWCA Prince Albert
Regina and Area Sexual Assault Centre
Nouvelle-Écosse
The Court Said Canada
Women Centres Connect
Be the Peace Institute
Naomi Society
Tri-County Women's Centre
The Marguerite Centre Society of Nova Scotia
YWCA Halifax
Avalon Sexual Assault Centre
The Women's Place Resource Centre (WPRC)
Manitoba
Manitoba Association of Women's Shelters (MAWS)
RESOLVE Manitoba
Willow Place
S.H.A.D.E. (Safe Housing And Directed Empowerment) Inc. (SHADE Inc.)
Swan Valley Crisis Centre
Nouveau-Brunswick
Elizabeth Fry New Brunswick (EFryNB)
Muriel McQueen Fergusson Centre for Family Violence Research | Centre Muriel McQueen Fergusson pour la recherche sur la violence familiale
Valley Outreach
YWCA Moncton
Yukon
Yukon Status of Women Council
Dawson Women's Shelter / Dawson Shelter Society
Yukon Women's Coalition
The Victoria Faulkner Women's Centre
Terre-Neuve-et-Labrador
Newfoundland Aboriginal Women's Network (NAWN)
Nain Transition House Inc.
YWCA St. John's
Île-du-Prince-Édouard
Women's Network PEI
PEI Family Violence Prevention Services Inc.
Blooming House Women's Shelter Inc.
Territoires du Nord-Ouest
YWCA NWT
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Courtepointe…

Personne ne peut affirmer, comme l'a fait Sylvain Malette, que la grève est « un moyen de pression « brûlé » pour les 30 prochaines années ». Je ne partage pas non plus le point de vue de Jacques Létourneau selon lequel les membres de la FAE doivent effectuer un « examen de conscience » en lien avec le déclenchement de la GGI et son caractère « utopiste » ou « idéaliste ».
Pendant que des assemblées générales syndicales se tiennent dans les secteurs de la santé et de l'éducation au sujet des ententes de principe qui ont été conclues en décembre dernier ;
Pendant que les négociations se poursuivent entre d'une part le Conseil du trésor et d'autre part la FIQ, le SPGQ et le SFPQ ;
Pendant que la section Ouvriers du SFPQ demande au ministère du Travail de procéder à la nomination d'une médiatrice ou d'un médiateur ;
Pendant que plusieurs personnes attendent avec impatience ou dans la plus complète indifférence le résultat du vote à la FAE ;
il y a en parallèle à ces événements d'autres choses sur lesquelles j'aimerais attirer votre attention.
La conférence de presse de François Legault
Nous avons appris, lors de la conférence de presse du premier ministre François Legault tenue à la fin de la réunion du caucus de la CAQ, que le cadre monétaire prévu par le ministre des Finances Éric Girard en vue de régler les conventions collectives dans les secteurs public et parapublic a été revu à la hausse. Il y a donc eu, en décembre dernier, un débat au sein du Conseil des ministres ou d'un Comité interministériel portant sur l'enveloppe monétaire à accorder aux salarié.es syndiqué.es des secteurs public et parapublic. De combien au juste cette enveloppe a-t-elle été accrue ? Ce sera lors de la présentation du prochain budget provincial que nous aurons une idée un peu plus précise là-dessus.
Les entrevues de Jacques Létourneau et de Sylvain Malette
Les ex-présidents de la CSN et de la FAE sont libres d'intervenir comme ils l'entendent durant de la présente ronde de négociation. De mon côté, je suis également libre de souscrire ou non à leurs propos. Loin de moi donc l'idée de les brimer ou de les censurer dans leur liberté d'expression, mais il me semble qu'ils rendraient service aux militantes et militants syndicaux en nous disant ce qui se passe vraiment derrière les portes closes quand arrive le moment de laisser tomber les revendications initiales et de procéder au ficelage avec le gouvernement des propositions ou des hypothèses de règlement final.
Plus spécifiquement, l'auteur des présentes lignes aimerait savoir comment Sylvain Malette a été amené à accepter le cadre salarial du gouvernement caquiste en 2022 en y ajoutant une clause remorque ? J'aimerais également qu'il nous dise si en agissant ainsi il a contribué ou non à nuire aux autres organisations syndicales et, par conséquent, à l'ensemble des salarié.es syndiqués.es qui adhèrent à une autre organisation syndicale que la FAE ?
Du côté de Jacques Létourneau maintenant j'aimerais savoir comment il a fini par accepter, en décembre 2015, avec les autres présidents d'organisations syndicales, le cadre étroit de la politique de rémunération austère du gouvernement Couillard. Comment a-t-il fait pour accepter de soumettre à ses membres une proposition de règlement qui prévoyait, pour la première année de la convention collective, une augmentation salariale de 0% ?
Conclusion
Je conclue cette courtepointe en mentionnant qu'il ne vaut pas la peine de faire dans la futurologie. Personne ne peut affirmer, comme l'a fait Sylvain Malette, que la grève est « un moyen de pression « brûlé » pour les 30 prochaines années ». Je ne partage pas non plus le point de vue de Jacques Létourneau selon lequel les membres de la FAE doivent effectuer un « examen de conscience » en lien avec le déclenchement de la GGI et son caractère « utopiste » ou « idéaliste ». Il appartient aux membres de la FAE (comme il appartient aux membres des autres organisations syndicales) de procéder, le moment venu, à l'examen critique de leur démarche collective et des moyens d'action qu'elles et qu'ils ont déployés. Pour paraphraser Marx et Engels ici, il appartient aux travailleuses et aux travailleurs d'effectuer leur propre bilan critique sans l'aide d'éclaireurs externes à leur organisation.
Comme dirait l'Autre, c'est mon opinion et - point d'ironie…- je la respecte !
Yvan Perrier
29 janvier 2024
15h35
yvan_perrier@hotmail.com
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Les courageuses profs de la FAE sont à appuyer cent milles à l’heure

La FAE est à deux doigts de rejeter l'entente de principe non pas à cause de la partie salariale, si l'on en juge par les votes scindés de leurs consœurs de la CSQ dont quelques syndicats ont rejeté ou appuyé de peu la partie sectorielle. Tout pourrait se jouer mercredi soir à Granby. Quatre des neuf syndicats de la FAE ont rejeté l'entente à un plus fort taux que les quatre qui l'ont accepté.
On attend dans l'urgence le cri du cœur Solidaire en appui à la direction de ce syndicat qui a recommandé le rejet à cause du « "mépris apparent [du] gouvernement pour [la] profession" […et parce que] l'entente de principe "n'améliore pas de manière significative [les] conditions de travail, dont la composition de la classe" »
Ce rejet est dans l'intérêt des travailleuses syndiquées, eu égard à leurs conditions de travail. Il est dans l'intérêt de l'école publique afin de l'empêcher de sombrer, phagocytée par l'école à trois vitesses. Il est dans l'intérêt du peuple québécois dont l'éducation de la jeunesse prolétarienne est bousillée en faveur de celle élitiste. Bien sûr, le seul rejet n'y suffira pas mais il est vital pour la suite des choses. On peut se fier sur les commentaires médiatiques et les bienpensants pour frigorifier les ardeurs en affirmant péremptoirement que le retour à la grève étant exclu, la FAE n'y gagnera que des améliorations à la marge comme lors du rejet de l'entente de principe par la FSSS-CSN en 2015. Nul doute que ce serait le chemin proposé par la bureaucratie syndicale pour se dédouaner du refus de sa base d'entériner l'entente de principe d'autant plus que cette base est brûlée par un mois de grève en vain et sans indemnités.
Faut-il rappeler l'ardeur de cette grève jusqu'à et y compris un blocage du Port de Montréal ? Faut-il rappeler le soutien financier, mais non pro-actif il est vrai et sans doute insuffisant, de plusieurs syndicats du privé ? L'alternative consiste à s'appuyer sur ces acquis pour faire un saut qualitatif. À commencer par les syndicats du Front commun qui entérineront l'entente de principe, il est tout à fait à la portée du mouvement syndical québécois d'établir un vrai et authentique fonds de solidarité suffisant pour accorder aux syndiquées de la FAE, et de la FSECSQ le cas échéant, de solides indemnités. Car cette fois-ci, la question salariale étant écartée, il s'agirait d'une lutte dont l'enjeu de fond, derrière l'amélioration des conditions de travail, serait l'école publique québécoise. Une victoire significative sur ce front, impliquant un soutien non seulement monétaire mais aussi pro-actif, ouvrirait la porte d'une remise en question de l'école à trois vitesses.
Marc Bonhomme,
28 janvier 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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Les syndicats du Canada marquent le 29 janvier avec un appel à l’action

Les syndicats du Canada exigent des mesures immédiates de la part du gouvernement fédéral afin de mettre fin à l'alarmante augmentation de la haine et de l'islamophobie au Canada. Le gouvernement doit publier sans plus tarder son Plan d'action national de lutte contre la haine et présenter sa loi sur les contenus préjudiciables en ligne, promise et attendue depuis si longtemps, afin de lutter contre la propagation du fascisme et de l'extrémisme de droite qui contribue à la croissance rapide des groupes de haine antimusulmane et à la diffusion de propos islamophobes en ligne.
Le 29 janvier est la Journée nationale de commémoration de l'attentat à la mosquée de Québec en 2017. Cet événement tragique a coûté la vie à des fidèles innocents et a frappé la nation.
« L'attaque à la mosquée de Québec en 2017 nous a tous profondément marqués. En tant que société, nous ne pouvons pas continuer à nous dire que ces attaques ne se produiront pas ici, chez nous, car elles se sont passées ici », déclare Bea Bruske, présidente du CTC. « En effet, et ce depuis plusieurs années, nous avons constaté une forte augmentation des incidents motivés par la haine au Canada. Nous devons traiter les causes profondes de cette vague croissante de haine, qu'il s'agisse de xénophobie, de racisme ou d'intolérance religieuse. Il nous appartient de nous opposer à la haine et au sectarisme, et de les dénoncer chaque fois que nous en sommes témoins, que ce soit en personne ou en ligne. »
La montée de la haine au Canada est une tendance alarmante qui exige une attention urgente et une action collective. Une augmentation inquiétante des crimes haineux a été constatée ces dernières années, y compris ceux visant des minorités religieuses, raciales et ethniques. Le Conseil national des musulmans canadiens signale* également une forte augmentation des incidents islamophobes depuis le 7 octobre 2023 en raison de l'escalade de la violence en Palestine et en Israël. Cette recrudescence des incidents haineux met en évidence la nécessité d'un engagement global et inébranlable pour contrer toutes les formes de haine et de discrimination.
« Nous rendons hommage à ceux qui ont perdu la vie le 29 janvier 2017, et depuis lors, en nous unissant contre la discrimination et le sectarisme parmi nos membres. Pour ce faire, nous cherchons activement à régler les incidents d'islamophobie, qu'ils soient subtils ou manifestes, de même que les structures qui permettent à l'islamophobie de persister, et nous œuvrons à la création d'espaces syndicaux permettant à chaque membre d'être et de se sentir valorisé et protégé », déclare Larry Rousseau, vice-président exécutif du CTC. « En favorisant une culture de respect et de solidarité, les syndicats peuvent contribuer de manière significative à l'élimination des attitudes et des pratiques fondées sur des préjugés. »
Il est primordial de cultiver un environnement qui valorise et fait place aux différences dans les lieux de travail. Cela consiste notamment à proposer de la formation et de la sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes et les idées reçues sur l'islam et les musulmans. Cela signifie aussi promouvoir l'inclusivité et éliminer les obstacles dans les pratiques d'embauche, et veiller à ce que chaque personne, peu importe son origine, dispose des mêmes chances en matière d'avancement et de réussite au travail.
Afin que les inégalités cumulées dont font l'objet certaines communautés soient dûment prises en compte, le gouvernement fédéral doit mettre à jour la Loi sur l'équité en matière d'emploi. La collecte et l'analyse de données ventilées sont essentielles à l'application d'une approche intersectionnelle à la Loi actualisée.
Le gouvernement doit également prendre des mesures pour mettre en œuvre les trente recommandations présentées par le Comité permanent du patrimoine canadien dans le rapport intitulé Agir contre le racisme systémique et la discrimination religieuse, y compris l'islamophobie.
« Il est plus facile de lutter ensemble contre la haine que seul. Nous demandons à tous les Canadiens et Canadiennes de participer activement à l'élimination de la haine et de promouvoir la compréhension, l'empathie et la solidarité. En travaillant ensemble, nous pouvons créer un pays où chaque individu, peu importe son origine, peut vivre sans craindre la discrimination et la violence », déclare Mme Bruske.
Agissez
– Lisez et partagez le rapport du CTC sur la lutte contre l'islamophobie dans nos milieux de travail et nos collectivités : L'islamophobie au travail : défis et occasions. Le rapport contient des recommandations pour les employeurs, les syndicats et le gouvernement quant à la façon de combattre ce problème ;
– Montrez votre solidarité en portant un carré vert et en vous joignant à la Campagne du carré vert du Conseil national des musulmans canadiens ;
– Apprenez-en davantage sur l'islamophobie au Canada et ses répercussions.
*Certains des liens ne sont disponibles qu'en anglais.
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Jean-Baptiste Fressoz : « La transition énergétique n’a pas commencé »

Les discours sur la transition sont des leurres : celle-ci n'a pas été amorcée, explique l'historien Jean-Baptiste Fressoz. Au lieu de « fantasmer sur un monde zéro carbone en 2050 », il faudrait une décroissance matérielle.
Tiré de Reporterre.
Jean-Baptiste Fressoz est historien des sciences, des techniques et de l'environnement. Il vient de publier Sans transition — Une nouvelle histoire de l'énergie (Seuil).
Pour écouter l'entretien.
Reporterre — La transition énergétique n'a pas lieu, selon vous. Quel est le problème ?
Jean-Baptiste Fressoz — La transition est l'idée que l'on va changer de système énergétique en 30 ou 40 ans pour faire face à la crise climatique. Mais si on l'analyse historiquement, on voit à quel point cette notion a introduit des biais scientifiques. Nous n'avons pas fait de transition du bois au charbon pendant la révolution industrielle, par exemple. La révolution industrielle, ce n'est pas du tout une transition, c'est une énorme expansion matérielle.
En 1900, l'Angleterre, un très grand pays minier, engloutissait chaque année 4,5 millions de m3 de bois pour servir d'étais dans les galeries de mines. Or, les Anglais en brûlaient 3,6 millions de m3 dans les années 1750. Donc uniquement pour extraire du charbon, les Anglais utilisaient plus de bois en 1900 qu'ils n'en brûlaient en 1750.
Le pétrole n'a pas succédé au charbon, alors ?
Non, c'est une vision erronée. Par exemple, le pétrole sert à faire rouler des voitures. Or, dans les années 1930, pour fabriquer une voiture, il fallait environ 7 tonnes de charbon, c'est-à-dire autant en poids que le pétrole qu'elle brûlait durant son existence.
Pour réduire le minerai de fer, il faut du coke, dont la production consomme énormément d'énergie, qui a longtemps été entièrement du charbon. Aujourd'hui encore, on produit 1,7 milliard de tonnes d'acier par an. Si on voulait le faire « vert », il faudrait 1,2 million d'éoliennes. Et si l'on voulait le faire par l'hydrogène, il faudrait la quantité d'électricité produite actuellement par les États-Unis.
- « Mon argument n'est pas technophobe. [...] La sobriété est la clé »
Plus qu'une addition d'énergies, il s'agit d'une expansion symbiotique. Jusque dans les années 1960, il était impossible d'extraire du charbon sans bois. Il faut retenir une chose de l'industrialisation : on a consommé une plus grande variété de matières et chacune a été consommée en quantité supérieure. Et si des matières diminuent, c'est en raison des interdictions : par exemple, l'amiante a dû diminuer entre 40 et 50 % depuis les années 1990.
Vous plaidez pour une histoire matérielle, au sens que le monde est fait par les matières...
Si l'on veut réfléchir sérieusement à la crise environnementale, il est indispensable de centrer le discours non pas sur les techniques, mais sur les quantités de matière. Le point important, c'est que toutes les matières croissent en dépit de plein d'innovations.
Tous vos prédécesseurs en matière d'histoire de l'énergie se sont-ils trompés ?
Les experts n'ont pas parlé de transition jusque dans les années 70, ils voyaient bien qu'il n'y avait pas d'éviction du charbon. Ce sont les futurologues qui ont commencé à en parler, et les historiens ont repris le vocabulaire technocratique à partir des années 80. Ils ont été influencés : vous êtes historien de la machine à vapeur, et d'un seul coup, vous vous transformez en historien de la transition. C'est beaucoup plus chic !
À l'heure actuelle, la transition n'a toujours pas lieu et malgré l'essor des énergies renouvelables, les fossiles représentent toujours 80 % de la consommation énergétique mondiale...
Oui, c'est à peu près stable depuis les années 1980. On n'a toujours pas passé le pic du charbon ni celui du pétrole. Il y a encore énormément de ressources fossiles. Pour l'instant, nous n'avons pas commencé la transition énergétique. Ce qu'on a fait grâce aux progrès technologiques, c'est réduire l'intensité carbone de l'économie : il faut deux fois moins de CO2 pour produire 1 dollar de PNB [produit national brut] que dans les années 1980. Mais en volume, les fossiles sont plus importants maintenant qu'alors.
Pourquoi l'idée de transition énergétique est-elle si populaire ?
Le discours de la transition est d'abord un discours de « l'âge » : l'âge du charbon, l'âge de la vapeur, l'âge de l'électricité, l'âge du pétrole. C'est un discours classique de promotion industrielle. Cela permet de situer une nouvelle technologie dans la grande fresque de l'humanité. Le problème est que les intellectuels ont pris ces propos au sérieux.
On s'est mis à parler de « l'âge de la vapeur » dans les années 1860, cela permettait de marginaliser la force humaine. Les ouvriers étaient présentés comme des résistants au progrès, la modernité comme la rencontre du génie avec la matière. Ensuite, à la fin du XIXᵉ siècle, au moment où l'électricité a commencé à faire parler d'elle, parler d'un âge électrique permettait de faire un geste assez classique dans le monde intellectuel, celui de la tabula rasa, de la table rase d'où l'on repart.
Comment est-on passé au concept de transition ?
Après 1945, un groupe de savants s'est mis à parler de transition : les atomistes américains du projet Manhattan [de création de la bombe atomique]. Un calcul avait été fait, montrant le rendement extraordinaire de la surgénération nucléaire. Ces savants voulaient montrer que ce qu'ils avaient inventé n'était pas simplement un outil de mort catastrophique, mais aussi la clé de la survie de l'humanité. Cela permettrait d'avoir une énergie abondante, illimitée. Ensuite, durant la décennie 1970 et les chocs pétroliers, la notion de crise énergétique s'est diffusée, ainsi que celle de transition énergétique.
Le président étasunien Jimmy Carter a joué un rôle clé dans cette diffusion, par un grand discours le 18 avril 1977. Il a dit : « Par le passé, nous avons déjà fait deux transitions énergétiques du bois au charbon, puis du charbon au pétrole. Maintenant il faut faire une troisième transition. » Ce qu'il prévoyait, c'est le doublement de l'extraction de charbon aux États-Unis. Il y aura moins de pétrole, eh bien, on va sortir plus de charbon et on va le liquéfier.

Puis, quand Ronald Reagan a succédé, son équipe sur l'énergie était dirigée par un pétrolier texan dont le grand programme était de libéraliser et de forer davantage, en affirmant que le prix du pétrole allait baisser grâce au marché et à l'innovation. C'est ce qui s'est passé, en l'occurrence, avec le gaz de schiste. La transition ne voulait plus dire grand-chose, sinon ce qui permet d'augmenter l'indépendance énergétique américaine.
Mais les écologistes ont commencé à reprendre ce vocabulaire qui naturalise les décisions énergétiques, qui est une invention du lobby atomiste, et qui est une antiphrase de la crise environnementale.
Le groupe 3 du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) explique dans son dernier rapport que la transition, c'est bien, et qu'on va y arriver.
Le Giec est un groupe intergouvernemental, pas international. C'est très important : cela signifie que les gouvernements désignent qui participe à cette instance. Lors de sa création, en 1988, les États-Unis — qui étaient de très loin les premiers émetteurs de CO2 — ont désigné pour le groupe 3 des représentants des ministères de l'Industrie, de l'Énergie, de l'Agriculture. Il fallait qu'ils internalisent la contrainte économique et c'est le rôle de ce groupe. Les États-Unis vont y faire miroiter la carte technologique comme moyen de la transition.
- « On pourrait arrêter pas mal d'avions sans qu'il ne se passe grand-chose »
Résultat, il a fallu attendre le sixième rapport en 2023 pour qu'il y ait un chapitre sur la sobriété. L'autre problème est qu'ils ont enfourché des options technologiques rocambolesques comme le stockage du carbone. Et là, je pense qu'il y a une influence du lobby pétrolier.
S'il n'y a pas de transition énergétique, que faire face à la catastrophe écologique ?
La première chose à faire, c'est avoir un regard réaliste sur ce qu'on peut faire technologiquement. Mon argument n'est pas technophobe. Il y a des progrès technologiques importants dans certains domaines, comme le solaire. Mais on ne saura pas décarboner certaines choses avant 2050, comme le ciment, l'acier ou le plastique. La sobriété est la clé. Il est indispensable de reconnaître qu'une des questions centrales est le niveau de production.
Le solaire va coûter très peu cher. Mais si c'est pour faire rouler des voitures électriques en masse qui, elles, ne sont pas du tout décarbonées, ça ne change pas le problème. Il faut toujours fabriquer la voiture, qui est de l'acier, et l'acier reste du carbone. Il faut juger l'énergie solaire dans un système en général, qui pose problème. Mon livre n'est pas une critique des renouvelables, mais de l'idée de transition énergétique : il faut replacer les renouvelables dans l'ensemble du système qu'elles vont alimenter.
Alors, comment aller vers la sobriété ?
Il faut arrêter de raconter des bêtises. Quand nos gouvernements martèlent l'idée que la décroissance est une idiotie, qu'il y a du découplage, qu'on va faire des avions à hydrogène zéro carbone, forcément, la population a envie de le croire. C'est très attirant comme perspective. Mais si l'on n'a pas un discours sérieux sur cette question, on ne fera jamais de sobriété.
La question va monter, c'est inévitable au fur et à mesure que le mur climatique va s'affirmer, que les chocs climatiques vont se répéter et que les objectifs de décarbonation deviendront parfaitement utopiques. La sobriété va devenir de plus en plus importante.
Une nouvelle histoire commencerait, celle de la décroissance ?
Quand je dis sobriété, je pense à la décroissance matérielle. On pourrait arrêter de construire des routes en France sans que cela soit une catastrophe. On pourrait arrêter pas mal d'avions sans qu'il ne se passe grand-chose, on l'a vu pendant le Covid, nous ne sommes pas morts de faim.
Pourquoi subsiste-t-il un tel espoir dans la technologie ?
En raison d'une focalisation inouïe du discours sur l'innovation. On a confondu l'innovation avec le phénomène technique en général, qui est beaucoup plus massif et large. De quoi a-t-on vraiment besoin ? Comment se répartit-on les bienfaits du carbone et les impacts ?
On peut dédommager massivement des populations qui ne pourront plus habiter là où elles habitent et imaginer les accueillir. C'est de cela dont il faudrait discuter et non pas fantasmer sur un monde zéro carbone en 2050.

Sans transition — Une nouvelle histoire de l'énergie, de Jean-Baptiste Fressoz aux éditions du Seuil, janvier 2024, 416 p., 24 euros.
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Dénationalisation de l’électricité – Des organisations dénoncent un recul historique et exigent un véritable débat public

Des organisations de la société civile réagissent à l'intention du ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, de déposer un projet de loi qui légaliserait la vente directe d'électricité entre entreprises privées, ce qui est actuellement interdit, et mettrait ainsi fin au monopole d'Hydro-Québec. Les organisations affirment que la proposition de dénationaliser l'électricité est un recul historique qui nous ramène 60 ans en arrière, alors que le gouvernement Legault n'a pas reçu le mandat de fragiliser ce service public essentiel qui est d'importance stratégique pour l'économie et la sécurité énergétique du Québec. L'importance des enjeux énergétiques exige qu'un véritable débat public ait lieu de manière à ce que les décisions soient prises dans l'intérêt collectif.
60 ans d'histoire et la décarbonation du Québec sont en jeu
À qui appartient la légitimité de décider de l'usage du territoire et des ressources limitées ? Selon l'approche du gouvernement, les projets industriels accapareront de façon non planifiée et non coordonnée les équipements, la main-d'œuvre, les territoires les plus économiquement avantageux et propices à la construction de nouvelles infrastructures électriques, ainsi que les retombées économiques qui y sont associées, le tout sans consultation de la population. En plus, ce manque de planification se répercuterait sur l'effort demandé et sur la facture d'électricité de l'ensemble de la population. « La population n'a jamais donné à la CAQ le mandat de renverser la décision collective prise il y a 60 ans de nationaliser l'électricité. Avant toute modification législative, il faut un plan d'ensemble et un vrai débat de société pour définir les orientations de ce plan. C'est la décarbonation du Québec, dans une perspective de transition juste, qui est en péril », soutiennent les organisations.
L'ensemble de cette situation – tout comme les pratiques douteuses employées pour soustraire d'autres dossiers comme celui de Northvolt au débat public et aux obligations environnementales – illustre dramatiquement la nécessité de tenir rapidement un exercice légitime de dialogue social sur l'avenir énergétique du Québec. Cette demande, exprimée publiquement et directement au gouvernement depuis maintenant plus d'un an par une centaine d'organisations de la société civile québécoise, reste lettre morte à ce jour. Face à ce silence, les groupes ont renouvelé leur demande, le 30 novembre dernier, en présentant à l'Assemblée nationale le Manifeste pour un avenir énergétique juste et viable, appuyé par le Parti Québécois et Québec solidaire. Plusieurs organisations ont également demandé un moratoire sur l'octroi d'électricité pour le développement industriel, le temps de se doter d'une politique énergétique et d'un plan intégré des ressources basés sur une consultation large et un débat démocratique. Cette politique et ce plan devraient être fondés sur une approche systémique incluant notamment les impacts environnementaux et sociaux.
« Une consultation en ligne, en plein été, sur un sujet restreint au développement et à l'encadrement des énergies renouvelables, ne dispense pas d'un vrai débat démocratique sur la question beaucoup plus large de l'avenir énergétique du Québec », insistent les groupes. Comme la nationalisation d'Hydro-Québec a fait l'objet d'une élection référendaire en 1962, les signataires appellent tous les groupes de la société civile à se mobiliser pour exiger que ce choix de société ne soit pas renversé arbitrairement par le gouvernement. Comme l'a synthétisé Boucar Diouf, « on n'a jamais voté pour ce qu'essaie de faire Pierre Fitzgibbon ».
*Listes des organisations signataires
Greenpeace Canada
Regroupement des organismes environnementaux en énergie
Fondation Rivières
Nature Québec
ACEF du Nord de Montréal
Mouvement écocitoyen UNEplanète
Eau Secours
Mobilisation environnement Ahuntsic-Cartierville
Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec (MÉPACQ)
Collectif Femmes pour le climat (CFC)
Solidarité Environnement Sutton
Fondation David Suzuki
Conseil central du Montréal métropolitain-CSN
Carrefour de participation, ressourcement et formation (CPRF)
Les AmiEs de la Terre de Québec
Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA)
Collectif scientifique sur les enjeux énergétiques au Québec
Coalition Alerte à l'Enfouissement Rivière-du-Nord (CAER )
Association québécoise des médecins pour l‘environnement (AQME)
Attac Québec
Union des consommateurs
Mères au front
Regroupement vigilance hydrocarbures Québec
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À quand un plan de réduction des minéraux ? - Réaction au nouveau plan d’action 2023-2025 sur les « MCS »

Avec son deuxième Plan d'action en quatre ans publié aujourd'hui, le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) du Québec vient de faire passer de 22 à 28 le nombre de minéraux qu'il considère comme « critiques et stratégiques ». Tout en soulignant les mesures liées au recyclage des résidus miniers, la Coalition Québec meilleure mine (QMM) est d'avis que seul un encadrement plus rigoureux de ce secteur pourra limiter les impacts des activités minières sur l'environnement.
La Coalition QMM déplore et dénonce l'écoblanchiment entourant les minéraux « critiques et stratégiques » en rappelant que toutes les mines entraînent des impacts nocifs et permanents sur l'environnement. Le plan annoncé devrait être financé non pas par l'argent des contribuables mais en appliquant plus sévèrement le principe pollueur-payeur dans le secteur minier. La Coalition QMM invite le gouvernement à réfléchir à un plan de réduction de l'importance accordée aux minéraux qui ne sont pas considérés critiques ou stratégiques comme l'or.
Compétition entre MCS et l'or
En alimentant depuis 2020 une rhétorique d'écoblanchiment, le gouvernement du Québec souhaite voir émerger plus de mines produisant des « MCS », mais la province a une capacité réelle limitée pour opérer plusieurs mines en même temps. Tôt ou tard, le développement des MCS risque de se buter aux autres mines.
La Coalition observe une concurrence en matière de financement et d'attractivité des travailleur-euse-s au sein de l'industrie entre les minéraux dits « d'avenir » et le secteur de l'or et des autres métaux précieux qui ne sont pas listés comme des minéraux critiques et stratégiques.
À titre d'exemple, 92% de l'or est extrait à des fins de joaillerie ou financières et n'a donc que très peu d'utilité dans la réduction des GES selon l'Accord de Paris. Les plus récentes données de l'Institut de la statistique du Québec publiées en octobre 2023 révèlent que les métaux précieux représentaient 64,1% des sommes en travaux d'exploration et de mise en valeur en 2022, pour un total de 585 M$, soit plus de cinq fois les sommes investies par le privé pour le lithium, le graphite et les terres rares. Peu importe les substances recherchées, la Coalition Québec meilleure mine insiste sur le fait que les mesures les plus efficaces pour l'environnement reposent sur la réduction à la source de la production et de la consommation des minéraux.
Avant de chercher à pousser le développement des « MCS », le gouvernement devrait amorcer une réflexion sur l'avenir des minéraux qui nuisent non seulement directement aux efforts climatiques, énergétiques et environnementaux de la province, mais à la viabilité des projets qui pourraient avoir une contribution positive. Pour soutenir et planifier la suite de leurs économies, il est urgent d'établir un dialogue avec les communautés de l'Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec au sein desquelles les mines d'or et de diamants s'imposent.
Meilleure utilisation des fonds publics
Avec ses multiples mesures de soutien et ses 18 millions de dollars additionnels, le gouvernement multiplie les avantages fiscaux et administratifs offerts aux minières avec l'argent des contribuables du Québec. La Coalition QMM encourage plutôt l'État à financer le plan d'action par une application plus rigoureuse du principe pollueur-payeur dans le secteur minier.
Le soutien aux minières qui prétendent faire partie de la solution environnementale devrait être financé à partir d'une tarification environnementale plus exigeante pour ce secteur industriel. La pollution de l'air et de l'eau, l'extraction de métaux précieux non classés comme « critiques ou stratégiques », la contamination des sols, le prélèvement de l'eau et l'application de sanctions plus sévères sont autant d'avenues de taxation à considérer.
Dans l'attente du plan pour encadrer l'industrie minière
La Coalition QMM demeure dans l'attente du dépôt d'un projet de loi modifiant la Loi sur les mines en rappelant que le Rapport des consultations du printemps 2023 réalisées par le MRNF est sans équivoque à l'effet que la population demande une réforme ambitieuse au bénéfice de l'environnement et des gens. Cette réforme devrait amener les parlementaires à revoir la place accordée aux secteurs de l'industrie minière qui ne font pas partie de la solution face à l'urgence climatique et environnementale.
Citation
« La solution à la crise climatique ne passe pas par plus de mines, mais par le choix d'extraire seulement les minéraux utiles dans les quantités suffisantes pour répondre aux vrais besoins dans un meilleure encadrement environnemental et social », Rodrigue Turgeon, avocat, co-porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine et coresponsable du programme national pour MiningWatch Canada
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Bilan, analyse de la conjoncture en environnement et plan d’action

Bonjour,
Ceci est un rappel que le Réseau Militant Écologiste est de retour avec l'édition 2024 de son Assemblée Générale Annuelle ! Ce sera l'occasion de parler du plan d'action pour l'année 2024 et d'élire un nouveau comité de coordination.
Déroulement :
Accueil, tour de table
Retour sur l'année 2023
Présentation de la conjoncture
Plan d'action
Avenir énergétique (privatisation d'Hydro-Quebec)
Extractivisme (campagne sur les claims miniers)
Filière batterie (Northvolt)
Élection du COCO
Voici un lien vers la proposition sur l'avenir énergétique=AT1sCow_BjGDiwhIPp7P8Sgipybg8deYEqS9uz0aZPVBQIMNEbwT2blwrVDdaRPVkH3g7PT7_xGmO0IQnMaNgoWHh17afSS2JGMH7Gfhl6sm6t7k1CZMtx0f7pBz5_WXzLleUy2suY2GvIkSKa5YJu0NHmMU] qui a été élaborée par le RMÉ en 2023 et le manifeste du front commun pour la transition énergétique.
Un texte sur la conjoncture en matière d'environnement sera aussi présenté, accompagné du plan d'action élaboré par le COCO pour l'année 2024.
Vous pouvez lire ces documents avant la réunion, ils faciliteront notre discussion sur le plan d'action.
Lien Zoom de la réunion — mercredi 31 janvier à 19h
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Françoise Vergès : l’impossible décolonisation des musées occidentaux

Retour en vidéo sur la rencontre avec Françoise Vergès, autrice décoloniale, féministe et antiraciste pour une soirée d'échange autour de son ouvrage « Programme de désordre absolu. Décoloniser le musée », au centre culturel d'Uccle (Belgique), le 15 janvier 2024. Cette soirée a réuni environ 200 personnes.
23 janvier 2023 | tiré du site du CADTM
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Black Art Exposition à Quebec

Traore Ben Sayd, en collaboration avec la Fédération des Jeunes Afro-Québécois (FJAQ) et le gouvernement du Canada, est fier d'annoncer la tenue de la deuxième édition de la Black Art Exposition Quebec. Sous le signe de la reconnaissance et de la célébration, cet événement artistique unique se tiendra le 24 février 2024, de 18h à 23h, à la Nef Saint Roch, située au 160, rue St-Joseph Est, Quebec QC G1K 3A7.
Québec, QC — 26 janvier 2024
Cette année, dans le cadre du Mois de l'Histoire des Noirs, la Black Art Exposition mettra en lumière la femme noire et son influence déterminante dans le domaine artistique. Cette soirée exceptionnelle sera une vitrine pour le talent et la créativité des artistes noirs du Québec, offrant une plateforme d'expression et de reconnaissance de leur art.
Les visiteurs auront le privilège de découvrir une gamme diversifiée d'œuvres d'art visuel, de participer à un atelier de collage dynamique et de se laisser transporter par une performance live captivante. Cet événement gratuit est une opportunité pour les amateurs d'art et le grand public de s'engager avec la culture noire et d'en apprécier la richesse et la diversité. La réservation en ligne est obligatoire pour participer à cet événement. Les billets peuvent être réservés dès maintenant, assurant à chacun une place dans cette célébration de l'art et de la culture.
Informations supplémentaires :
• Date et Heure : 24 février 2024, de 18h à 23h
• Lieu : La Nef Saint Roch, 160, rue St-Joseph Est, Québec QC G1K 3A7
• Réservations :
https://lepointdevente.com/billets/blackartexposition2?fbclid=IwAR2778tixLRw2CWN s56207mKTsJq-vuY34z8T021QaDekZXWhX3YEd-P7m8
Nous invitons à participer à la mise en valeur de l'art noir et de la femme noire au sein de notre société. Rejoignez-nous pour une soirée où l'art est célébration, la créativité est dialogue et la femme noire est muse.
À propos de Traore Ben Sayd : Initiateur de la Black Art Exposition Quebec, Traore Ben Sayd est un acteur clé dans la promotion de l'art noir au Québec, œuvrant à mettre en avant les artistes noirs et leur contribution essentielle à la diversité culturelle de la province.
À propos de la FJAQ : La Fédération des Jeunes Afro-Québécois est une organisation dédiée à la valorisation de la jeunesse noire au Québec, soutenant l'épanouissement et la représentativité de ses membres dans tous les domaines de la société.
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Art ouvrier et embourgeoisement à Chicago

“Le syndicat Union Electric (UE) de Chicago appelle à signer unepétition afin de protéger une murale réalisée dans ses locaux, en 1974, par les artistes, John Pitman Weber et José Guerrero.”
« Avec l'embourgeoisement du quartier, [Union Electric] est en train de vendre le bâtiment vieillissant, mais travaille dur pour préserver la peinture murale pour la communauté de Chicago et les générations futures. Veuillez signer cette déclaration avant le 31 janvier afin de démontrer aux bailleurs de fonds potentiels qu'il existe un large soutien en faveur de la préservation de cette partie vitale de l'histoire ! ».
Des photos d'un article du Chicago Suntime permettent d'apprécier cette fresque, réalisée gratuitement par les deux artistes autodidactes et restaurée au milieu des années 2000 à l'occasion d'une convention de l'UE à Chicago. Cette imposante œuvre d'art qui borde les escaliers intérieurs de l'immeuble du syndicat, retrace les luttes ouvrières aux États-Unis, une distribution de tracts devant une usine, un patron contraint de signer un contrat, la répression des travailleurs par un sheriff, un général, le Klu Klu Klan etc.
En août 2019, le président du Syndicat prophétisait que le plus grand danger pour la préservation de la fresque n'était pas l'usure et le temps mais la « gentrification » du quartier et avec elle la nécessité pour le syndicat de vendre l'immeuble. Il précisait cependant « nous ne sommes pas en train de solliciter des offres » d'achat.
À peine quatre ans plus tard, l'immeuble est en vente. En l'absence de mobilisation, la préservation de l'œuvre d'art semble donc désormais dépendre du bon vouloir de promoteurs immobiliers et de leurs goûts pour l'art ouvrier.
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Juifs et Israéliens : deux réalités de plus en plus distinctes
L'offensive israélienne se déchaîne à Gaza et le nombre de victimes gazaouies se multiplie.
C'est le résultat de la riposte israélienne démesurée à l'offensive du Hamas réalisée le 7 octobre 2023. Il y aurait environ 24,000 victimes gazaouies selon les chiffres fournis par le Hamas contre 1,200 israéliens le 7 octobre.
Les Israéliens peuvent mener une guerre aussi meurtrière que prolongée parce qu'ils disposent d'un État appuyé par la plupart des gouvernements occidentaux et doté d'une armée puissante, équipée dans une bonne mesure par les États-Unis, indéfectible soutien de l'État hébreu.
Mais précisément, qu'observe-t-on concernant l'évolution de la société israélienne ? Plus le temps passe, et plus les différences s'accentuent entre elle et les minorités juives dispersées en Occident, particulièrement aux États-Unis. Quand une société possède un État indépendant (surtout s'il s'est édifié aux dépens d'un autre peuple) et qu'elle est entourée de gouvernements qui ne lui veulent pas de bien, elle se transforme. Ce processus relève à la fois d'une évolution interne et des relations avec les pays avoisinants. On est alors en présence d'une majorité qui doit assumer la responsabilité de la gestion d'un État souverain.
Une distance se creuse peu à peu avec les minorités occidentales dont elle est issue. D'où le contraste entre la société indépendante qu'est Israël et les minorités juives. Contrastes et ressemblances s'y côtoient. Ajoutons y la présence d'une importante minorité arabe (les Arabo-Israéliens) appelée à croître avec le temps et à gagner de l'influence politique et culturelle, ce qui va contribuer à renforcer l'évolution de la différenciation déjà évoquée.
Lorsqu'elle possède une armée puissante comme celle d'Israël et qu'elle se sent menacée, ses dirigeants et toute une large partie de son opinion publique peuvent appuyer des initiatives militaires d'envergure sans tenir compte du nombre de civils que cela provoque chez l'ennemi, peu importe le bon droit de ce dernier, dont celui à la résistance. Un virulent désir de vengeance se remarque alors.
Quand on parle de Juifs, la paranoia rôde souvent. Mais il existe une différence fondamentale entre les persécutions dont ils ont été l'objet en Europe et les manifestations de la résistance d'un peuple (les Palestiniens) dépossédé par les sionistes.
Il faut souligner ici que tous les Juifs ne sont pas sionistes et que tous les sionistes ne sont pas Juifs. Une partie de ces derniers s'oppose au sionisme pour des motifs religieux, philosophiques et moraux.
On voit souvent à priori les Juifs comme d'éternelles victimes (les pogroms l'Holocauste, les ghettos). Mais des nuances et des bémols s'imposent. En effet, il a toujours existé une violence juive. Les Juifs ont leurs propres salauds : des financiers véreux et des criminels professionnels. Il faut y joindre un fanatisme religieux chez certains (transposé sur le plan politique par plusieurs sionistes), pas plus respectable qu'aucun autre fanatisme. Il en découle chez certains Juifs un racisme anti-arabe et antimusulman, qu'on dénonce peu. Il est plus que temps de le faire.
Jean-François Delisle
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J’espère

J'espère
J'espère que vous serez là, encore,
Vous qui n'acceptez pas de vous taire,
Vous qui n'avez pas renoncé,
Vous qui vous êtes battues,
Vous qui savez pourquoi,
Vous qui ne vous laissez pas berner,
Vous qui ne vous laissez pas acheter.
Vous qui pleurez de rage,
Vous qui rêvez.
J'espère
J'espère que nous trouverons,
Le chemin du changement,
Le chemin du respect,
Que de notre colère,
Ne nous grugera pas,
Mais qu'elle sera fertile,
Que les chansons semées
Sur les trottoirs gelés
Seront un jour charpente
Du monde
Qui reste à bâtir.
J'espère
Que vous serez là,
Encore,
Quand viendront d'autres temps.
Manon Ann Blanchard

Déni de réalité : pourquoi le climatoscepticisme progresse

Les discours niant le dérèglement climatique foisonnent. À force d'outils efficaces, les
climatosceptiques prospèrent et sont loin de vouloir s'arrêter, explique le chercheur Albin Wagener.
Tiré de Reporterre.net
15 janvier 2024
Par Albin Wagener
Albin Wagener est chercheur associé à l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco, Plidam) et au laboratoire Prefics de l'université Rennes 2.
C'est un paradoxe de notre époque : alors que les effets du changement climatique sont de plus en plus couverts par les médias et n'ont jamais été aussi saillants pour les populations, le climatoscepticisme reprend lui des forces au gré de l'actualité climatique. D'après un sondage mené par Ipsos et le Cevipof en 2023, ce sont 43 % de Français qui refusent de « croire » au réchauffement du climat.
Plusieurs fois annoncé comme dépassé ou cantonné à des sphères complotistes, le climatoscepticisme n'en finit pas de se régénérer. Si les origines de ce courant remontent aux États-Unis, il prospère chez nous aujourd'hui via des incarnations bien françaises, comme l'a montré le récent documentaire La Fabrique du mensonge sur le sujet. Tâchons donc de revenir un peu en arrière pour comprendre le succès actuel de ces discours niant le dérèglement climatique.
Une narration efficace
Dans les années 1980, aux États-Unis, l'émergence et la propagation d'une « contre-science » du climat ont résulté de la mobilisation de think tanks liés au parti républicain et au lobbying de grandes entreprises, principalement dans le secteur de la production pétrolière, en s'inspirant par ailleurs des pratiques de l'industrie du tabac.
Le terme de « climatoscepticisme » est, à cet égard, lui-même aussi trompeur que révélateur : en liant « climat » et « scepticisme », le terme donne l'impression d'une posture philosophique vertueuse (notamment la remise en question critique et informée), et induit en erreur. Car il s'agit ici bien moins de scepticisme que de déni, voire de cécité absolue vis-à-vis de faits scientifiques et de leurs conséquences, comme le rappelle le philosophe Gilles Barroux.
Mais qu'importe : au moment de l'Accord de Paris et du consensus de plus en plus large sur le climat, le climatoscepticisme semblait réduit à portion congrue : en France, en 2019, la Convention citoyenne pour le climat montrait que le sujet pouvait être pris au sérieux tout en donnant lieu à des expérimentations démocratiques. Puis en août 2021, la loi Climat et Résilience semblait ancrer un acte politique symbolique important, bien qu'insuffisant.
« Je ne crois pas au changement climatique », a écrit l'artiste Banksy sur une façade d'un immeuble de Londres, près d'une eau stagnante rappelant une inondation. Flickr/CC BY-NC 2.0 Deed/Dunk
Pourtant, malgré ces évolutions politiques, le climatoscepticisme prospère aujourd'hui en s'éloignant de son incarnation et champ originel, puisqu'il constitue désormais une forme de discours, avec ses codes, ses représentations et ses récits. C'est précisément en cela qu'il est si dangereux : du point de vue linguistique, narratif et sémantique, il utilise des ressorts hélas efficaces, qui ont pour objectif d'instiller le doute (a minima) ou l'inaction (a maxima).
« Préserver la domination de l'Homme sur ce que l'on appelle abusivement la « Nature » »
Plus clairement, les sphères climatosceptiques vont par exemple utiliser des termes aux charges sémantiques équivoques (climatorassurisme, climatoréalisme, etc.), remettre en question la véracité des travaux du Giec [1], mettre en exergue les variations du climat à l'échelle du temps géologique (la Terre ayant toujours connu des périodes plus ou moins chaudes ou froides), ou bien encore expliquer que toute action mise en œuvre pour lutter contre le changement climatique relèverait en fait de l'autoritarisme liberticide. En d'autres termes, le doute est jeté sur tous les domaines, sans distinction.
De ce point de vue, il est important de noter que le climatoscepticisme peut prendre plusieurs formes : déni de l'origine anthropique du réchauffement, mise en exergue de prétendus cycles climatiques, remise en cause du rôle du CO2 ou technosolutionnisme chevronné sont autant de variables qui donnent sa redoutable vitalité au climatoscepticisme.
Lire aussi : Christophe Cassou : « Le climatoscepticisme a la couleur de l'extrême droite »
Mais que cachent les discours climatosceptiques ? Outre les intérêts économiques, on retrouve également la préservation d'un ordre social et de systèmes de domination spécifiques : domination de l'Homme sur ce que l'on appelle abusivement la « Nature » (incluant les autres espèces, l'intégralité de la biodiversité et les ressources), exploitation des ressources nécessaires à l'activité industrielle et économique, mais aussi domination de certaines communautés sur d'autres — notamment parce que les femmes ou les populations indigènes sont plus vulnérables au changement climatique, tout en représentant également les populations les plus promptes à proposer des innovations pour contrer ses impacts.
Des cibles et intérêts marqués
Au-delà de sa pérennité, les recherches ont montré à quel point le climatoscepticisme restait efficace pour retarder l'action politique. Il ne s'agit pas ici de dire que la classe politique est climatosceptique, mais qu'un certain nombre d'acteurs climatosceptiques finissent par diffuser des discours qui font hésiter les décideurs, retardent leurs actions ou font douter quant aux solutions ou alternatives à mettre en place.
La France n'échappe pas à cette tendance : entre les coups médiatiques de Claude Allègre, l'accueil de Greta Thunberg à l'Assemblée nationale ou encore les incursions de divers acteurs climatosceptiques (se désignant eux-mêmes comme climatoréalistes ou climatorassuristes), le paysage médiatique, politique et citoyen se retrouve régulièrement pollué par ce type de discours.
Doté de solides ressources financières, ce mouvement a pu contester les résultats scientifiques dans la sphère publique, afin de maintenir ses objectifs économiques et financiers.
Le Giec en a, par ailleurs, fait les frais de manière assez importante — et encore aujourd'hui ; régulièrement en effet, des scientifiques du Giec comme Jean Jouzel ou Valérie Masson-Delmotte, qui se sont engagés pour porter de manière pédagogique les travaux collectifs dans l'espace médiatique, se sont retrouvés la cible de critiques, notamment sur la véracité des données traitées, ou la raison d'être financière du groupement scientifique mondial. Cela est notamment régulièrement le cas sur les réseaux sociaux, comme le montrent les travaux de David Chavalarias.
Prôner les certitudes d'un « vieux monde inadapté »
Au-delà de ces constats informatifs, une question émerge : pourquoi sommes-nous si prompts à embrasser, de près ou de loin, certaines thèses climatosceptiques ? Pourquoi cette forme de déni, souvent mâtinée de relents complotistes, parvient-elle à se frayer un chemin dans les sphères médiatiques et politiques ?
Pour mieux comprendre cet impact, il faut prendre en considération les enjeux sociaux liés au réchauffement climatique. En effet, cette dimension sociale, voire anthropologique est capitale pour comprendre les freins de résistance au changement ; si la réaction au changement climatique n'était qu'affaire de chiffres et de solutions techniques, il y a longtemps que certaines décisions auraient été prises.
En réalité, nous avons ici affaire à une difficulté d'ordre culturel, puisque c'est toute notre vie qui doit être réorganisée : habitudes de consommation ou pratiques quotidiennes sont concernées dans leur grande diversité, qu'il s'agisse de l'utilisation du plastique, de la production de gaz à effet de serre, du transport, du logement ou de l'alimentation, pour ne citer que ces exemples.
« Il est le symptôme d'autodéfense d'un vieux monde qui refuse de mourir »
Le changement est immense, et nous n'avons pas toujours les ressources collectives pour pouvoir y répondre. De plus, comme le rappelle le philosophe Paul B. Preciado, nous sommes dans une situation d'addiction vis-à-vis du système économique et industriel qui alimente le changement climatique ; et pour faire une analogie avec l'addiction au tabac, ce ne sont jamais la conscience des chiffres qui mettent fin à une addiction, mais des expériences ou des récits qui font prendre conscience de la nécessité d'arrêter, pour aller vite. Cela étant, le problème est ici beaucoup plus structurel : s'il est aisé de se passer du tabac à titre individuel, il est beaucoup plus compliqué de faire une croix sur le pétrole, à tous les niveaux.
Paradoxalement, c'est au moment où les effets du changement climatique sont de plus en plus couverts par les médias que le climatoscepticisme reprend des forces, avec une population de plus en plus dubitative. Ce qui paraît paradoxal pourrait en réalité être assez compréhensible : c'est peut-être précisément parce que les effets sont de plus en plus visibles, et que l'ensemble paraît de plus en plus insurmontable, que le déni devient une valeur refuge de plus en plus commode. Il s'agirait alors d'une forme d'instinct de protection, qui permettrait d'éviter de regarder les choses en face et de préserver un mode de vie que l'on refuse de perdre.
Si le climatoscepticisme nous informe sur nos propres peurs et fragilités, il est aussi symptomatique du manque de récits alternatifs qui permettraient d'envisager l'avenir d'une tout autre manière. En effet, pour le moment, nous semblons penser la question du changement climatique avec le logiciel politique et économique du XXe siècle. Résultat : des récits comme le climatoscepticisme, le greenwashing, le technosolutionnisme (le fait de croire que le progrès technique règlera le problème climatique), la collapsologie ou encore le colibrisme (le fait de tout faire reposer sur l'individu) nous piègent dans un archipel narratif confus, qui repose plus sur nos croyances et notre besoin d'être rassurés, que sur un avenir à bâtir.
De fait, le climatoscepticisme prospère encore, car il est le symptôme d'autodéfense d'un vieux monde qui refuse de mourir. Sans alternative désirable ou réaliste, alors que nos sociétés et nos économies sont pieds et poings liés par la dépendance aux énergies fossiles, nos récits sont condamnés à tourner en rond entre déni, faux espoirs et évidences trompeuses.
C'est bien là tout le problème : si les chiffres sont importants pour se rendre compte de l'importance du changement et de ses conséquences (y compris pour mesurer les fameux franchissements des limites planétaires), ce n'est pas avec des chiffres seuls que l'on met en mouvement les sociétés et les politiques. Les tenants du climatoscepticisme ont parfaitement compris cette limite, en nous proposant les certitudes confortables d'un vieux monde inadapté, face aux incertitudes paralysantes d'un avenir qui sera radicalement différent du monde que nous connaissons, mais que nous avons le choix de pouvoir écrire.
Cette tribune a été initialement publiée sur le site The Conversation.
1. Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat
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