Presse-toi à gauche !
Presse-toi à gauche ! propose à tous ceux et celles qui aspirent à voir grandir l’influence de la gauche au Québec un espace régulier d’échange et de débat, d’interprétation et de lecture de l’actualité de gauche au Québec...

Délivrons-nous d’Amazon : pas d’achat, pas de contrat

Le 22 janvier dernier, Amazon annonçait son intention de fermer ses sept entrepôts du Québec et de céder l'ensemble de ses opérations à la sous-traitance, entraînant la perte de plus de 4500 emplois. Une décision profondément antisyndicale, contraire aux lois du travail en vigueur au Québec et au Canada.
Nos gouvernements et nos institutions publiques doivent montrer l'exemple : si une entreprise ne veut pas respecter nos lois, qu'elle soit mise au ban et qu'on cesse d'enrichir cette multinationale américaine délinquante.
La CSN exige de Québec, d'Ottawa, des villes et des organismes publics de cesser de s'approvisionner auprès d'Amazon et de mettre fin à toute forme de contrat d'infonuagique ou autre, qui les lierait à la multinationale. Ces dépenses doivent être réorientées vers des entreprises de chez nous, respectueuses de nos lois – et de notre fiscalité.
La CSN invite aussi les membres de ses syndicats, l'ensemble des travailleuses et des travailleurs et la population à encourager les commerces locaux en cessant d'acheter sur Amazon.
Comment boycotter Amazon ?
– En consommant des produits québécois et en encourageant les commerces locaux ;
– En demandant à Québec, à Ottawa, aux villes et aux organismes publics de cesser de s'approvisionner auprès d'Amazon et de mettre fin à toute forme de contrat d'infonuagique ou autre avec la multinationale ;
– En cessant d'acheter sur Amazon et en annulant son abonnement Prime Video ;
– En demandant à son employeur d'arrêter d'acheter sur Amazon ;
– En affichant votre volonté de vous libérer ! Téléchargez l'ensemble des visuels.
Pourquoi s'affranchir d'Amazon ?
– Parce qu'en décidant de fermer ses sept entrepôts au Québec, Amazon a entraîné la perte de plus de 4500 emplois, jetant autant de familles à la rue.
– Parce qu'une telle décision est contraire à la loi : il s'agit d'un stratagème profondément antisyndical, destiné à empêcher la conclusion d'une première convention collective en Amérique du Nord et à freiner toute tentative de syndicalisation. Avec ces fermetures sauvages, Amazon vise à faire peur aux travailleuses et aux travailleurs et à les intimider, ici comme ailleurs.
– Parce qu'Amazon vampirise le secteur de la vente au détail, entraînant la fermeture de plusieurs commerces locaux et la perte de nombreux emplois.
Affichez vos couleurs
Téléchargez ces visuels de campagne et affichez vos couleurs (affiches, .gif animé et réseaux sociaux).
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Nous avons les moyens de notre État-providence

En réponse à un éditorial de Stéphanie Grammond, la présidente de la CSN estime que le Québec a les moyens de ses ambitions en matière de services publics et de programmes sociaux, à condition de faire les bons choix.
Dans un récent éditorial intitulé « Avons-nous encore les moyens de notre État-providence ? », Stéphanie Grammond remet en question notre capacité à nous offrir collectivement des services publics et des programmes sociaux adéquats et adaptés à nos besoins. Certes, les défis devant nous sont importants et il ne faut pas les nier. Le vieillissement de la population en est un. Cela dit, Mme Grammond exagère largement à nos yeux lorsqu'elle suggère que « Québec et Ottawa sont dans le rouge de façon chronique ».
Au sens comptable, le Québec a atteint l'équilibre budgétaire sur le cumul des 10 dernières années budgétaires (2015-2016 à 2024-2025). Le Québec est aussi l'un des rares États en Occident à consacrer une part des revenus de l'État au remboursement de la dette publique (par le Fonds des générations).
Ces sommes ne vont donc plus au financement des services publics, ce qui met sérieusement ces services sous pression et qui érode constamment leur capacité à remplir leur mission.
Dans ce contexte, pouvons-nous vraiment nous étonner de l'essoufflement de nos réseaux publics, qui vivent sur le respirateur artificiel depuis tout ce temps ? Surtout, est-il encore justifié de continuer sur la même voie ?
En 2023, le gouvernement a mis en œuvre son engagement électoral à réduire l'impôt des particuliers dans un contexte de ralentissement économique. Cette mesure a fait perdre au trésor public 1,7 milliard de dollars seulement pour l'année 2023-2024, une perte récurrente et surtout, croissante.
Le gouvernement s'est aussi lancé dans la mise en place de nouvelles structures coûteuses (maisons des aînés, maternelles 4 ans, troisième lien, agences de santé et de transport, etc.) plutôt que de consolider les services publics et les programmes sociaux existants.
N'en déplaise à Mme Grammond, nous avons bel et bien les moyens de notre État social. Encore faut-il faire les bons choix.
Derrière le miroir de la productivité
Mme Grammond souligne à juste titre que le Québec et le Canada ont un problème de productivité des entreprises, ce qui freine la croissance des revenus des contribuables (sociétés et particuliers) et donc de ceux de l'État.
Si le constat est clair, les solutions le sont moins. Depuis 40 ans, on met la faute de cette situation sur les politiques fiscales et l'environnement réglementaire.
Pourtant, le taux d'imposition des entreprises a été réduit de moitié depuis les années 1980, la taxe sur le capital abolie, le commerce international libéralisé et l'on ne compte plus le nombre de projets de loi visant à s'attaquer à la lourdeur réglementaire.
Si l'article de Mme Grammond semble indiquer que les syndicats suédois font bande à part en alliant défense des travailleurs et amélioration de la productivité, elle fait gravement erreur, car pour nous également, ces deux enjeux sont à la fois indissociables et névralgiques.
Cela faisait d'ailleurs partie des premiers sujets de discussion que j'ai abordés avec François Legault après son arrivée au pouvoir en 2018.
Que ce soit en mettant de l'avant des mesures pour réduire le roulement de la main-d'œuvre, en proposant des projets innovants de formation en emploi, en revendiquant des investissements au sein des entreprises, en proposant des démarches paritaires de redressement d'entreprises en difficulté, etc.
Autre exemple concret : réduire les accidents de travail se conjugue avec des gains en productivité.
Mme Grammond nous invite également à nous inspirer du modèle suédois pour renouveler la social-démocratie.
Alors que la profonde remise en question de nos relations commerciales avec les États-Unis et la nécessité d'entreprendre un grand chantier entourant notamment les enjeux de productivité et de transition environnementale pourraient être l'occasion de renouveler le modèle québécois de concertation, force est de constater que le gouvernement Legault mine son propre terrain en s'attaquant au droit de grève avec le projet de loi 89, créant plutôt un climat de confrontation sociale.
En terminant, soulignons que la question des inégalités sociales ne peut être passée sous silence lorsque l'on parle de productivité. Dans plusieurs pays, la croissance des salaires n'a pas suivi celle de la productivité, ce qui fait que les gains de productivité n'ont pas contribué à accroître le pouvoir d'achat des classes moyennes et populaires.
Le rôle des syndicats est justement de s'assurer que ces gains de productivité soient adéquatement partagés, de sorte qu'il y ait une véritable redistribution de la richesse. C'est aussi ça, avoir les moyens d'un État-providence.

« No other land » reçoit l’Oscar du meilleur documentaire

Le film palestino-israélien « No other land », qui relate la violence des colons et les démolitions par Israël de maisons palestiniennes en Cisjordanie occupée, a reçu hier la récompense du meilleur documentaire lors de la cérémonie des Oscars.
Tiré d'Agence médias Palestine.

« Il ya deux mois je suis devenu père, et j'espère que ma fille ne vivra pas la même vie que moi, à craindre la violence des colons, les démolitions et les déplacements forcés que ma communauté, Masafer Yatta, subit tous les jours sous l'occupation israélienne. No other land reflète la dure réalité que nous subissons depuis des décennies et face à laquelle nous résistons, tandis que nous appelons à la fin la guerre, à la fin des injustices, à la fin du nettoyage ethnique des Palestiniens. »
C'est avec ces mots que Basel Araj a reçu hier l'oscar du meilleur documentaire pour son film « No other land », qui fait le récit de la rencontre entre Basel lui-même, avocat et réalisateur qui documente l'occupation et la destruction de son propre village en Cisjordanie, et le journaliste israélien Yuval, qui tente de le soutenir dans son combat. Entre méfiance, colère et camaraderie naît une alliance impossible et un film déchirant, qui ouvre à la fois blessures et dialogue. Le film, sorti en salle en France en novembre dernier, avait été célébré dans de nombreux festivals et reçu le prix du meilleur documentaire à la Berlinale de 2024.
Après le discours de Basel Araj, son co-réalisateur Yuval Abraham prend la parole : « Quand je regarde Basel, je vois mon frère, mais nous ne sommes pas égaux. Nous vivons dans un régime où je suis libre, sous des lois civiles, et Basel est sous des lois militaires qui détruisent sa vie et qu'il ne peut pas contrôler. Il y a un autre chemin, une solution politique sans suprématie ethnique, avec des droits nationaux pour nos deux peuples. Et je dois dire, puisque je suis ici, que les politiques étrangères de ce pays participent au blocage de ce chemin. Ne voyez-vous pas que nous sommes mêlés ? Que mon peuple ne peut être en sécurité que si le peuple de Baser est libre et en sécurité ? Il y a un autre chemin. C'est le seul chemin. »
Cette nouvelle récompense intervient dans un contexte nouveau, alors que le village où se situe le film est sous le coup de violentes attaques israéliennes, et sous la menace d'un déplacements forcé de population sans précédent, dans le cadre de l'intensification des opérations militaires israéliennes en Cisjordanie. Amnesty International publiait la semaine dernière un communiqué appelant la communauté internationale à faire cesser l'impunité d'Israël :
« L'impunité bien ancrée pour les violences commises par des colons et l'inaction de longue date de la communauté internationale s'agissant de stopper l'expansion des colonies israéliennes illégales ou de mettre fin à l'occupation israélienne facilitent le transfert illégal de villageois·e·s palestiniens, ce qui constitue un crime de guerre. Au lieu de continuer de permettre l'accaparement des terres par Israël, ce qui a des conséquences dévastatrices pour les Palestinien·ne·s, les dirigeant·e·s du monde doivent faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à l'occupation illégale et démantèle le système d'apartheid à leur encontre », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice générale des recherches, du travail de plaidoyer, des politiques et des campagnes à Amnesty International.
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Alger et la gauche française contre le zèle haineux de Retailleau !

Humiliés par Trump, désillusionnés par la débâcle au Sahel, c'est du côté d'Alger que certains Politiques français vont chercher des représailles. Endossant son costume de « Ministre potentat » anti Immigration, Retailleau pousse vers une crise diplomatique !
De Paris, Omar HADDADOU
Trouver un angle d'attaque pour torpiller la Diplomatie algérienne, les accords de 1968 et dans la foulée, le coup de gueule de la Gauche française !
Sans crier gare, une information a fuité au plus haut niveau. Elle est d'airain ! Impitoyable, revancharde à souhait, Signée d'une main de fer « retaillenne ».
Le quotidien français la Tribune a tous les droits de se gargariser du scoop. Le 2 mars 2025, le journal publie une note secrète du ministère de l'Intérieur revendiquant l'obligation « d'engager un rapport de force avec les autorités algériennes ».
La porosité a permis de dévoiler une note de 3 pages des services de l'Intérieur, préparés en amont par le Comité interministériel de Contrôle de l'Immigration (26 février à Matignon), exposant « la stratégie », selon la même source, pour tordre le bras à Alger à travers des restrictions massives de visas, en priorité à l'égard de l'élite politique, économique et militaire du pays. Ainsi que les contrôles renforcés des liaisons maritimes et la convocation des consuls généraux algériens. Résolu à croiser le fer avec Alger, Bruno Retailleau, galvanisé par le chef du gouvernement Bayrou et sa fameuse saillie « sentiment de submersion migratoire », juge les accords franco-algériens « datés et déséquilibrés ».
Une surenchère sur fond d'une crise sans précédent permettant à Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste, de se rattraper sur ce terrain : « Il ne suffit pas de montrer ses bras musclés. Il faut faire aussi de la Diplomatie ! »
Hier, lundi, dans un entretien accordé à un journal à obédience droite, le Ministre français assume l'ordre d'expulsion de l'épouse de l'Ambassadeur d'Algérie au Mali, en guise de mesure de rétorsion.
En escale à Paris, munie d'un passeport diplomatique, elle devait rejoindre son mari à Bamako.
Ministre de l'Intérieur depuis le 21 septembre 2024 dans le gouvernement de Michel Barnier, puis François Bayrou, Bruno Retailleau se plait à siffler les prolongations de la colonisation par ses provocations et édits dignes de la traite négrière. Mais l'Algérie - soutenue par la Gauche française - reste une Nation de Révolutionnaires qui n'agrée point la vassalité, telle une République bananière ensommeillée par la musique et le bon pinard.
En quête de médiatisation, le locataire de la Place Beauvau verse avec une obsession démente dans la flagellation verbale, là où certains appellent à l'apaisement : « Ce que fait la France vis-à-vis de l'Algérie est une faute rare et historique ! » s'indigne Eric Coquerel de la France Insoumise.
Les injonctions de Paris renvoient à la l'époque coloniale de « Bouchkara* » où toute insubordination à l'ordre établi est passible d'une mesure punitive !
Macron était à deux doigts de mettre l'Afrique et ses ressources minières et humaines dans sa poche. L'ambition d'étendre sa zone d'influence impérialiste a, hélas ! tourné à la débâcle. Cette faillite expansionniste est imputée à l'Algérie et la Russie qui ont scellé un partenariat économique et stratégique à long terme. D'où les mesures de rétorsion du chef de l'Etat français et ses ministres contre l'Algérie, se cristallisant par moult provocations.
Suscitant un applaudissement à tout rompre devant le Parlement marocain, le 29 octobre 2024, Macron signe et persiste : « Le présent et l'avenir du Sahara occidental s'inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine ».
Le Président passe à la vitesse supérieure dans l'escalade. Sept mois après sa visite au Royaume, Il donne quitus à sa Ministre de la Culture Rachida Dati pour se rendre au Sahara occidental, territoire au statut non défini, revendiqué depuis 50 ans par les Indépendantistes sahraouis (es). Le 17 février 2025, Dati se fringue de la tenue traditionnelle féminine sahraouie et déclare in situ que son périple « est une visite historique ». La riposte du Ministère des affaires étrangères est cinglante : « Cette visite est d'une gravité à plus d'un titre ! ».
La fronde contre l'Algérie s'est cristallisée par conglomérat viscéralement xénophobe, nostalgique d'une Algérie française dont sont membres actifs les Retailleau, Gérard Larcher (Président du Sénat), Edouard Philippe et nombre d'expatriés à la plume ordurière !
Le Conseil d'Etat algérien a annoncé ce mercredi la suspension immédiate de ses relations avec le Sénat français, y compris le protocole de coopération parlementaire, signé entre les deux chambres le 8 septembre 2015.
L'acharnement de Retailleau suinte à cent lieues le racisme dans une République entraînée par la déroute européenne !
O.H
* BUCHKARA : Indicateur cagoulé utilisé par l'armée française pendant la guerre d'Algérie.
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Israël détruit de vastes zones de Jénine, les habitants craignant une épuration comme à Gaza

Israël détruit un grand nombre de maisons à Jénine, semblant répéter les tactiques de nettoyage ethnique qu'il a employées dans le nord de la bande de Gaza.
Tiré de France Palestine Solidarité. Publié à l'origine par The New Arab. Photo : Les tanks israéliens envahissent Jénine pour la première fois depuis 2000, le 23 février 2025 © Quds News Network
Les bulldozers israéliens ont démoli mardi de vastes zones du camp de réfugiés de Jénine, aujourd'hui pratiquement vide, et semblent creuser de larges routes à travers ses ruelles, reprenant les tactiques déjà employées à Gaza, alors que les troupes se préparent à un séjour de longue durée.
Au moins 40 000 Palestiniens ont quitté leurs maisons à Jénine et dans la ville voisine de Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie, depuis qu'Israël a commencé son opération, un jour seulement après avoir conclu un accord de cessez-le-feu à Gaza, au terme de 15 mois de guerre.
« Jénine est une répétition de ce qui s'est passé à Jabalia », a déclaré à Reuters Basheer Matahen, porte-parole de la municipalité de Jénine, en référence au camp de réfugiés du nord de la bande de Gaza qui a été évacué par l'armée israélienne après des semaines de combats acharnés. « Le camp est devenu inhabitable. »
Il a précisé qu'au moins 12 bulldozers étaient à l'œuvre pour démolir les maisons et les infrastructures du camp, qui était autrefois une commune surpeuplée abritant les descendants des Palestiniens qui ont subi un nettoyage ethnique lors de la guerre de 1948, la « Nakba » ou catastrophe qui a marqué la création de l'État d'Israël.
Un peloton de chars a également été déployé par Israël, qui est entré dimanche dans la ville par l'entrée ouest du camp de Jénine, selon l'agence de presse palestinienne WAFA. L'armée israélienne a annoncé que le peloton provenait de la 188e brigade blindée.
Selon Matahen, des équipes d'ingénieurs de l'armée ont pu être vues en train de préparer un séjour de longue durée, en apportant des réservoirs d'eau et des générateurs dans une zone spéciale de près d'un hectare.
Aucun commentaire n'était disponible dans l'immédiat de la part de l'armée israélienne, mais dimanche, le ministre de la défense Israël Katz a ordonné aux troupes de se préparer à un « séjour prolongé », déclarant que les camps avaient été nettoyés « pour l'année à venir » et que les résidents ne seraient pas autorisés à y retourner.
L'opération menée pendant un mois dans le nord de la Cisjordanie est l'une des plus importantes depuis le soulèvement de la deuxième Intifada par les Palestiniens il y a plus de 20 ans. Elle implique plusieurs brigades de soldats israéliens soutenus par des drones, des hélicoptères et, pour la première fois depuis des décennies, par des chars de combat lourds.
« On assiste à une évacuation massive et continue de la population, principalement dans les deux camps de réfugiés de Nur Shams, près de Tulkarm, et de Jénine », a déclaré à Reuters Michael Milshtein, un ancien responsable du renseignement militaire qui dirige le Forum d'études palestiniennes au Centre Moshe Dayan pour les études sur le Moyen-Orient et l'Afrique.
« Je ne sais pas quelle est la stratégie générale, mais il ne fait aucun doute qu'une telle démarche n'a jamais été entreprise dans le passé.
Israël a lancé l'opération en affirmant qu'il avait l'intention de s'attaquer aux « groupes militants soutenus par l'Iran ».
Mais au fil des semaines, il est apparu clairement que la véritable intention était de déplacer la population palestinienne de façon permanente et à grande échelle en détruisant les maisons et en rendant leur séjour impossible.
« Israël veut effacer les camps et la mémoire des camps, moralement et financièrement, il veut effacer le nom des réfugiés de la mémoire du peuple », a déclaré Hassan al-Katib, 85 ans, qui vivait dans le camp de Jénine avec 20 enfants et petits-enfants avant d'abandonner sa maison et tous ses biens au cours de l'opération israélienne.
Israël a déjà fait campagne pour saper l'UNWRA, la principale agence de secours palestinienne, en l'interdisant de quitter son ancien siège à Jérusalem-Est et en lui ordonnant de cesser ses activités à Jénine.
De nombreux Palestiniens y voient un écho de l'appel du président américain Donald Trump en faveur d'un nettoyage ethnique des Palestiniens de Gaza pour faire place à un projet immobilier américain, appel qui a été approuvé par le cabinet du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Nabil Abu Rudeineh, porte-parole du président palestinien Mahmoud Abbas, a déclaré que l'opération menée dans le nord de la Cisjordanie semblait répéter les tactiques utilisées à Gaza, où les troupes israéliennes déplaçaient systématiquement des milliers de Palestiniens lorsqu'ils se déplaçaient dans l'enclave.
« Nous demandons à l'administration américaine de contraindre l'État d'occupation à mettre immédiatement fin à l'agression qu'il mène contre les villes de Cisjordanie », a-t-il déclaré.
Traduction : AFPS
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Les empires qui contrôlent les médias américains se soumettent à Donald Trump

Le 10 mars dernier, George Stephanopoulos, chef d'antenne de la chaîne américaine ABC, mentionne en ondes, à plusieurs reprises, que l'ex-président Donald Trump avait été « trouvé coupable de viol » dans la cause civile que lui avait intenté la journaliste et auteure Jean Carroll. Techniquement, c'était faux : le jury avait conclu que Trump avait « abusé sexuellement » de la plaignante et qu'il l'avait ensuite diffamée, mais avait rejeté l'accusation de « viol ». Trump s'est donc empressé de poursuivre ABC et son animateur vedette, les accusant de comportement malicieux pour porter atteinte à sa réputation.
26 février 2025 | tiré de l'Aut'journal
Avait-il des chances de gagner sa poursuite ? Peut-être. Mais un juge avait déjà statué, en août 2023, dans le cadre d'une contre-poursuite intentée par Trump contre Mme Carroll, que le politicien l'avait bel et bien violée, au sens où ce mot est généralement compris, même si cela ne rencontrait pas la définition extrêmement étroite de la législation new-yorkaise. C'est sur ce second jugement que portait la défense d'ABC.
Et si les termes utilisés par Stephanopoulos étaient techniquement erronés, encore aurait-il fallu que Trump démontre qu'il avait subi des dommages. Pas évident, quand on considère que cela ne l'a pas empêché d'être élu ! L'animateur et le réseau auraient du reste bénéficié, devant le tribunal, d'une solide jurisprudence fondée sur le premier amendement de la Constitution américaine sur la liberté de la presse.
Mais alors qu'ABC avait annoncé son intention de se défendre bec et ongles dans cette affaire, on apprenait le 15 décembre dernier que le réseau avait accepté, dans une entente hors cours, de verser 15 millions de dollars à la future fondation présidentielle de Donald Trump et à son musée, en plus d'un million pour ses frais légaux, et de publier des excuses sur son site Web.
L'empire Disney
Que s'est-il passé entretemps pour que ABC change ainsi d'idée ? Poser la question, c'est y répondre. L'ex-président, reconnu abuseur sexuel un an plus tôt, puis trouvé coupable de crimes par une cour de New-York à l'automne… a été malgré tout réélu président en novembre. Or, Disney Corporation, qui possède le réseau ABC, c'est aussi un empire industriel dont le chiffre d'affaires atteignait 89 milliards $ en 2023.
Disney possède des réseaux de télé (ESPN et ABC), des parcs d'amusement partout sur la planète et vend pour les milliards de produits dérivés. Elle possède aussi des studios de création comme Pixar, Marvel et Lucasfilm, en plus d'offrir des services directs à des clients dans des secteurs comme l'intelligence artificielle et la réalité virtuelle.
Disons que pour cet empire, verser 16 millions de dollars aux bonnes œuvres du nouveau président, c'était des pinottes. Bien moins cher en tout cas que si elle l'avait eu comme ennemi direct pour les quatre prochaines années.
Un dangereux précédent
Cette entente a créé un dangereux précédent face à M. Trump dont les poursuites antérieures contre CNN, le New York Times et le Washington Post avaient été rejetées. Désormais, il peut brandir une preuve, politique sinon légale, quand il dénonce la malveillance de la presse à son égard.
Le précédent a déjà fait des petits. Meta, l'entreprise de Mark Zukerberg derrière Facebook, faisait aussi face à une poursuite, nettement plus frivole que l'affaire Stephanopoulos. Trump affirmait que Meta avait conspiré avec les Démocrates en suspendant son compte, après l'assaut contre le Capitole, le 6 janvier 2021, et que c'était une violation de son droit de parole.
Aucune chance d'avoir gain de cause dans ce cas : la Cour suprême a déjà tranché cette question en statuant que le droit pour les plateformes de sélectionner les contenus diffusés était protégé par le premier amendement.
Mais le 29 janvier, Meta a tout de même accepté de verser 25 millions de dollars à Donald Trump pour mettre fin à cette poursuite. Aucune raison officielle n'a été transmise. Était-ce nécessaire ? Zukerberg a aussi donné un million $ pour financer l'inauguration présidentielle du 20 janvier et il a dîné deux fois à Mar-a-Lago, la résidence privée de Trump, pour le convaincre de mettre au pas les pays européens et le Canada, qui veulent taxer les géants américains du Web.
Après ABC et Meta, autour de CBS
Or voici qu'on apprend, début février, que Paramount, un autre empire du divertissement qui possède le réseau CBS, est en train de négocier à son tour avec le président Trump dans une autre poursuite tout aussi ridicule. L'émission phare du réseau, Sixty Minutes a présenté en octobre une longue entrevue avec Kamala Harris. Un premier extrait avait été diffusé pour annoncer l'émission. Mais dans la version complète, le court extrait ne se retrouvait pas. Donald Trump y a vu la preuve qu'on a « édité » le contenu pour avantager la candidate démocrate à ses dépens, et réclame 10 millions de dollars en dommages. Peu importe que ce genre de travail d'édition ait toujours existé en télévision, sauf dans les (très rares) émissions en direct.
Rappelons, pour l'histoire, que CBS a acquis sa réputation d'excellence journalistique en bonne partie grâce à l'attitude de Edward R. Murrow, le journaliste qui a courageusement dénoncé les abus du sénateur Joseph McCarthy dans sa lutte contre des centaines de scientifiques, de fonctionnaires, d'artistes qu'on accusait de sympathies pour les communistes, après la dernière guerre. Que retiendra-t-on de la légende de CBS, si le réseau s'incline cette fois devant Trump ?
Mais ici encore, la logique économique est claire. Paramount vient d'annoncer sa fusion avec Skydance, le producteur derrière plusieurs gros succès d'Hollywood (Top Gun, Mission Impossible, Transformers, etc.) et qui œuvre aussi dans les jeux vidéo et les nouveaux médias. Il lui faut maintenant obtenir l'appui de la FCC, l'organisme qui régit le secteur des communications. Ça serait bien triste que le président y mette son véto !
Ce qu'illustre cette saga (qui ne fait que commencer, hélas), c'est le risque de confier la gestion des médias d'information à des entreprises qui ont d'autres intérêts financiers, et pour lesquels l'information n'est qu'un marché comme un autre. Déjà, avant les dernières élections américaines, Le Washington Post (une propriété de Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon) et le Los Angeles Times (propriété de Patrick Soon-Shiong, aussi actionnaire de contrôle des Lakers, un homme qui a fait fortune dans les biotechnologies, notamment en mettant en marché un traitement anticancer hors de prix qu'il a ensuite réussi imposer à bien des hôpitaux) ont tous deux interdit à leur équipe éditoriale de prendre position pour Kamala Harris.
Au moment où Pierre Poilièvre annonce qu'il va « fermer » Radio-Canada, et qu'il mettra fin aux programmes de soutien aux médias qui se sont donné une structure d'organisme sans but lucratif, cette aplaventrisme des grands empires médiatiques américains devant le pouvoir devrait nous servir de mise en garde !
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La capitalisation capte la rente mondiale pendant que les travailleurs… travaillent

À l'approche de l'ouverture des négociations voulues par le premier ministre entre les syndicats et le patronat au sujet du financement des retraites , on voit déjà quelles seront les pierres d'achoppement.
Tiré du blogue de l'auteur.
À l'approche de l'ouverture des négociations voulues par le premier ministre entre les syndicats et le patronat au sujet du financement des retraites[1], on voit déjà quelles seront les pierres d'achoppement. Le patronat a fait savoir qu'il s'opposerait à l'augmentation du taux de cotisations vieillesse et qu'il fallait introduire « une dose » ou un « pilier » de capitalisation pour compléter le système de retraites par répartition[2]. Cette proposition fut théorisée par la Banque mondiale dans les années 1990 à l'aube de la mondialisation néolibérale, reprise en chœur par tous les chantres du capitalisme financier, et ânonnée quotidiennement dans beaucoup de médias. Elle n'a d'autre sens que celui de favoriser une captation d'une part de la rente financière à l'échelle mondiale. Et elle montre la vacuité de la pensée économique libérale.
La retraite par capitalisation reste soumise aux mêmes contraintes démographiques que celle par répartition. Parce que ce sont toujours les actifs qui font vivre les inactifs. Au moment de la liquidation des contrats, la compagnie d'assurances ou le fonds de pension doivent trouver de nouveaux contractants pour pouvoir verser les pensions. En un mot, seul le travail ajoute de la valeur à partager, le capital est en soi stérile. Merci Marx d'avoir dégonflé la baudruche du capital fictif. Et merci Keynes d'avoir démontré que tout capital doit être « porté » et que sa liquidité pour tout le monde en même temps est impossible. L'épargne retraite et l'assurance-vie ne changent en rien cette règle : on ne finance jamais sa propre retraite car il n'y a pas de congélateur de revenus pour le futur[3].
La capitalisation est condamnée à subir les soubresauts de la finance ; des centaines de milliers d'Américains ont connu cela après la crise des subprimes de 2007. Il n'y a plus aujourd'hui aux États-Unis de système par capitalisation à prestations définies mais seulement des systèmes à cotisations définies. Ainsi, toute visibilité sur les pensions à venir est obscurcie.
Introduire la capitalisation pour « sauver » la répartition obligerait la génération des salariés actuels à payer deux fois pendant le temps de la transition entre les deux systèmes : pour assurer la retraite des anciens et pour abonder le fonds de capitalisation. Absurde et incohérent avec la volonté du patronat de diminuer les prélèvements obligatoires car les primes versées aux fonds de pension ou aux compagnies d'assurances s'ajouteraient aux cotisations.
Le rapport que vient de remettre la Cour des comptes à la demande du premier ministre ne dit pas grand-chose de la capitalisation, sauf ceci qui est loin d'être anodin : « Même s'ils sont limités, ces dispositifs [de capitalisation ou de plans d'épargne retraite] sont coûteux pour les finances publiques. En effet, les cotisations à ces régimes bénéficient de réductions de cotisations sociales et de déduction de revenu imposable, pour un coût estimé à 1,8 Md€ par an. »[4]
La capitalisation, en fin de compte, est une machine à accroître les inégalités puisque, pour capitaliser, il faut détenir du capital, et pour en détenir, il faut disposer de revenus élevés. Pire, à l'ère où le capital s'est mondialisé et où les placements financiers se font là où la main-d'œuvre est devenue très productive mais reste peu chère, la retraite par capitalisation vise à accaparer une part plus grande de la valeur ajoutée mondiale au profit de rentiers, petits et grands. Le vieux rêve du capital est de transformer les travailleurs en minuscules capitalistes. L'impérialisme a toujours consisté à s'approprier des produits primaires ou des matières premières à vil prix et aussi des revenus tirés de l'exploitation de la force de travail du monde entier. La généralisation de la retraite par capitalisation donnerait à cette dernière une nouvelle dimension. Avec une « dose », la capitalisation serait de l'impérialisme, certes en sourdine, mais tellement pernicieux.
Pour terminer, posons une question un peu iconoclaste : si le capital est aussi fécond de valeur ajoutée que le prétendent les pourfendeurs de la retraite par répartition, tout en jurant vouloir la sauver, pourquoi ne proposent-ils pas de faire tourner les machines, les robots et même l'argent plus vite, plutôt que d'allonger sans cesse la durée du travail ?
Notes
[1] Ce texte a été publié sur le site des Économistes atterrés ; et en partie par Politis, n° 1851, 26 février 2025, sous le titre « La capitalisation ou l'impérialisme en sourdine ».
[2] Voir notamment l'entretien de Patrick Martin, « Je suis pessimiste sur l'issue des discussions », Le Monde, 28 février 2025 ; Propos recueillis par Bertrand Bissuel et Aline Leclerc.
[3] Jean-Marie Harribey, « Répartition ou capitalisation : on ne finance jamais sa propre retraite, Le Monde, 3 novembre 1998, ; et « Retraites : l'éternel retour des erreurs passées, Note pour les Économistes atterrés, févier 2025.
[4] Cour des comptes, « Situation financière et perspectives du système de retraites », février 2025, p. 29, urlr.me/bwc2Mm.
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La nuit tombe sur la souveraineté alimentaire mexicaine

Chaque vendredi pendant plusieurs mois, nous publierons un article qui se trouve dans le nouvel AVP « Dette et souveraineté alimentaire ». Au programme ce vendredi, un article de Veronica Carrillo Ortega, membre de la Promotora Nacional por la Suspensión del Pago de la Deuda Pública (México).
21 février 2025 | Tiré du site du CADTM | Photo : Diego Delso, CC, Wikimedia Commons, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Gulf_of_Mexico_sunset.jpg
Pour commander l'AVP, c'estici.
Grâce au triomphe de la Révolution mexicaine de 1910-1917, le peuple mexicain s'est doté d'un État qui a nationalisé et fondé un secteur agricole puissant. Malheureusement, ces acquis ont été anéantis par les politiques néolibérales imposées dès 1982 , notamment au nom du remboursement de la dette. Aujourd'hui, la répartition des terres reste largement inégale. Pourtant, le droit à la terre est essentiel à la réalisation de plusieurs droits humains, tels que le droit à un niveau de vie décent ou le droit à l'alimentation.
Verónica Carrillo Ortega, Présidente de la centrale indépendante des ouvrier·es et des paysan·es de l'État de Veracruz et membre de l'Initiative nationale de suspension du remboursement de la dette publique du Mexique
Au Mexique, avec la Révolution verte, nous avons commencé à utiliser des engrais à base de résidus acides, entrainant l'acidification de 62 millions d'hectares et provoquant ainsi des maladies, la chute de la valeur nutritionnelle des aliments et une baisse de la production. Aujourd'hui, quatre entreprises, Bayer, BASF, Syngenta et Corteva, commercialisent 50 % des semences et contrôlent le marché des pesticides. 18 % des coûts de production sont consacrés aux semences, 22 % aux engrais et 21 % aux pesticides. Autrement dit, 61 % des coûts de production finissent dans les poches des transnationales. Alors à qui sert la production alimentaire ? L'économie mexicaine est totalement dépendante des économies étasunienne et canadienne et le nouvel accord commercial nord-américain profite à ces derniers et représente une nouvelle forme de pillage.
"61 % des coûts de production finissent dans les poches des transnationales"
Au niveau national, 70 % de nos sols sont actuellement appauvris en matière organique. Nous observons une augmentation des importations venant concurrencer directement les paysan·es mexicain·es. 60 % des céréales que nous consommons sont importés, érodant ainsi notre capacité de production et détruisant la base de notre tissu social. En parallèle, un nombre important et croissant d'agriculteur·ices sont évincé·es du marché en raison du faible prix des importations et du coût élevé des intrants, principalement des engrais.
Il est important de noter que le Mexique est le pays berceau du maïs, la céréale la plus produite dans le monde. Jusqu'en 1993, à la veille de la signature de l'ALENA (accord de libre-échange nord-américain), le pays était autosuffisant en production de maïs. Dès 1996, il importait des États-Unis 40 % de la demande intérieure.
Avec des milliers de variétés de maïs, chacune adaptée à un environnement spécifique et un usage précis, le Mexique constitue un véritable réservoir de biodiversité offrant des outils d'adaptation à nombre de défis écologiques. La disparition de la petite paysannerie, garante de la sauvegarde de cette richesse, met lourdement en péril un patrimoine utile pour la population mexicaine et mondiale.
Quelle réponse apporter à cela ? La souveraineté alimentaire !
Le défi consiste à récupérer les sols pour produire des aliments sains, à haute valeur biologique, des aliments de haute qualité, exempts d'agrotoxines et en suffisance pour lutter contre la pauvreté et la faim. Récupérer les sols, aussi, pour assainir les aquifères, créer des emplois décents dans les campagnes et réduire les inégalités entre l'agriculture paysanne et l'agriculture intensive. Car la pauvreté, et donc l'effort désespéré d'obtenir quelque chose d'un sol déjà fatigué, est aussi vecteur de destruction de l'environnement. Inversement, seul un sol sain permet de lutter contre la pauvreté.
" Le coût financier de la dette extérieure du Mexique (intérêts et commissions) équivaut à plus du double du budget de l'ensemble des programmes sociaux"
Nous devons prioriser une agriculture qui intègre les connaissances des paysan·nes, qui combine les savoirs modernes au profit de l'agroécologie, faisant de la durabilité notre nouveau mode de vie. Les systèmes de production basés sur les principes de l'agroécologie sont biodiversifiés, résilients, efficaces sur le plan énergétique, socialement justes et contribuent à la base d'une stratégie énergétique et de production fortement liée à la souveraineté alimentaire .
Notre méthodologie, intégrant une perspective de genre, pour faire face à la crise climatique et permettre la montée de la souveraineté alimentaire, s'articule autour de quatre axes :
- Écologique, nous devons accroître la biodiversité pour restaurer les sols, incorporer des minéraux ;
- Social, rétablir l'enseignement agricole ;
- Économique, les campagnes ont besoin d'investissements, de subventions et de crédits pour se redresser et ajouter de la valeur ;
- Technologique, l'intégration d'une équipe d'intellectuel·les, de scientifiques et d'universitaires pour concevoir le système agroalimentaire mexicain.
Ces quatre axes visent à restaurer l'autosuffisance alimentaire locale, à conserver et régénérer l'agrobiodiversité, à produire des aliments sains avec peu d'intrants et à renforcer les organisations paysannes.
Il est aujourd'hui impératif que le gouvernement alloue des ressources suffisantes à l'agriculture. Une façon d'obtenir des ressources est d'arrêter de payer la dette extérieure, dont une partie est illégitime , et d'allouer ces ressources à l'investissement productif et aux dépenses sociales. Le coût financier de la dette extérieure du Mexique (intérêts et commissions) représente plus du double du budget de l'ensemble des programmes sociaux. L'annulation d'une partie de la dette permettrait de s'attaquer de front à la pauvreté, d'améliorer le niveau de vie de la classe paysanne et, bien sûr, de parvenir à la souveraineté et à la sécurité alimentaire. Elle permettrait de reconquérir en partie la souveraineté économique nécessaire à la mise en place de politiques d'autosuffisance. Les niveaux de malnutrition seraient également réduits grâce à l'assistance technique du gouvernement, couplée à des formations mises en œuvre par les paysans et paysannes sur l'autogestion, sur les différents modes de production, ainsi que sur des modèles et régimes alimentaires permettant de répondre correctement aux besoins du corps.
"Une façon d'obtenir des ressources est de ne pas payer la dette extérieure et d'allouer ces ressources à l'investissement productif et aux dépenses sociales"
La réactivation et la transformation des systèmes de production ruraux ne seront pas possibles sans un plan national comprenant des principes agroécologiques et élaboré conjointement entre les trois niveaux de gouvernement et une représentation des centres agraires. Cette réactivation doit s'accompagner d'une justice sociale, c'est-à-dire que les bénéfices de la production ou de la croissance doivent être partagés équitablement entre le capital et le travail. Il est aujourd'hui urgent de se pencher sur le sort réservé aux campagnes, sans quoi davantage de personnes basculeront dans la pauvreté, et la souveraineté et la sécurité alimentaires des peuples seront lourdement compromises.
Une majorité de la population semble avoir oublié qu'aucune ville ne peut garantir la vie. La vie vient de la campagne, du sol qui produit la nourriture. Si notre terre nourricière sombre, l'humanité sombre.
Auteur.e
Veronica Carrillo Ortega
Promotora Nacional por la Suspensión del Pago de la Deuda Pública (México)
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Crise climatique - 23 décembre 2084

Bonjour. L'hiver commence et nous avons ici, au Groenland, une agréable température hivernale qui ne dépasse pas les 40°. Hélas, ce n'est pas le cas ailleurs sur la planète…
Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
23 décembre 2024
Par Michael Löwy
Les rédacteurs de la Gazette du Groenland m'ont demandé de faire un bref récit des dramatiques événements qui ont eu lieu au cours de ce siècle, un récit destiné aux nouvelles générations nées ici, qui n'ont pas connu cette histoire. Je peux le faire parce que, né en 2002, je suis un des plus anciens survivants de la GCC, la Grande Catastrophe Climatique.
Pendant ma jeunesse, au cours des années 2020 et 2030, il était encore possible d'éviter la GCC. Mais il aurait fallu pour cela prendre des mesures urgentes et radicales, comme l'arrêt immédiat de l'exploitation des énergies fossiles, un autre modèle d'agriculture, une décroissance substantielle de la production, l'abandon du consumérisme, etc. Il s'est avéré impossible de prendre de telles mesures sans expropriation des banques et grandes entreprises, une planification démocratique, bref, la rupture avec le système capitaliste. Mais on aurait pu commencer une transition écologique minimale, comme premier pas dans la direction d'un changement global. Une minorité substantielle de la population – au Nord, des jeunes, des écologistes, des syndicalistes ; au Sud, des indigènes et des paysans ; et un peu partout, des femmes – s'est mobilisée pour des causes socio-écologiques. Mais une bonne partie de la population restait prisonnière de l'aliénation fétichiste de la marchandise ou du chantage à l'emploi des capitalistes. Le pire fut que, dans beaucoup de pays, au fur et à mesure que la crise écologique s'aggravait, le racisme anti-migrants a favorisé l'élection de gouvernements ouvertement écocides, négationnistes, de type néo-fasciste. Dans d'autres pays, on avait des gouvernements « raisonnables » qui reconnaissaient la nécessité d'éviter une augmentation de la température de plus de 1,5°, mais ils n'ont pris aucune des mesures urgentes nécessaires. Ils proposaient des politiques totalement inefficaces, comme le « marché de droits d'émission » ou les « mécanismes de compensation », ou alors des fausses solutions techniques. L'oligarchie fossile, composée des grandes entreprises non seulement du pétrole, du charbon et du gaz, mais aussi de l'industrie automobile, chimique, plastique, ainsi que des banques partenaires, était immensément puissante et a réussi à bloquer toute avancée sérieuse. À partir de 2040, la fenêtre d'opportunité s'est fermée et le changement climatique est devenu incontrôlable.
On a assisté, progressivement, de 2050 à 2080, à la disparition des forêts, dévorées par des incendies de plus en plus monstrueux. Parallèlement, les rivières ont séché et l'eau potable s'est faite de plus en plus rare. La désertification a gagné les terres – malgré les précipitations violentes et les inondations meurtrières – tandis que les villes du littoral étaient submergées par l'élévation du niveau de la mer (résultat de la fusion des calottes polaires). Mais le pire fut l'élévation de la température, atteignant progressivement 50° et plus, rendant ainsi des pays entiers, et par la suite, des continents, inhabitables. Cela aurait pu être encore pire : si la production – et donc les émissions – ne s'était pas effondrée à partir de 2050, c'est la totalité de la planète qui aurait été impropre à la vie humaine.
Comme vous savez sans doute, les survivants se sont réfugiés dans les pôles : les habitants du Nord ici, au Groenland, et ceux du Sud dans l'Antarctique. Les scientifiques calculent que, dans quelques siècles, les gaz à effet de serre dans l'atmosphère seront considérablement réduits et la température de la planète reviendra peu à peu à son niveau de l'Holocène. Nous pouvons nous consoler avec cette prévision optimiste, mais personnellement, je ne peux accepter que tant d'êtres humains de ma génération soient disparus, victimes des terreurs de la GCC.
La catastrophe n'était pas inévitable. Mais nos avertissements n'ont pas été entendus. Nous, les scientifiques du GIEC et les partisans d'une écologie anti-systémique (écosocialisme, écologie sociale, communisme de la décroissance, etc.), avons joué les Cassandre. Or, comme l'on sait depuis la guerre de Troie, on n'aime pas les Cassandres : leurs discours alarmistes sont impopulaires. Cela dit, nous avons sans doute fait des erreurs : nous n'avons pas su trouver les arguments, le langage, les propositions capables de convaincre les majorités. Nous avons perdu la bataille. Espérons que dans quelques siècles, l'humanité pourra à nouveau habiter l'ensemble de la planète Terre, avec un mode de vie plus harmonieux, fondé sur la solidarité entre les humains et sur le respect de la Mère-Terre.
Michael Löwy
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