Presse-toi à gauche !
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Depuis l’Amérique de Trump, une vague masculiniste est en train de s’abattre sur le monde.
Il faut en prendre pleinement la mesure : l'internationale réactionnaire et autoritaire a fait le choix d'une confrontation sur la question du genre. La campagne de Donald Trump en 2024 avait de ce point de vue marqué un tournant avec un mot d'ordre clair : redonner aux hommes blancs chrétiens une suprématie mondiale — jusqu'à la conquête de Mars.
28 octobre 2025 | Le grand continent | Illustration : Vue d'artiste d'une casquette qui n'existe pas. © Tundra Studio
https://legrandcontinent.eu/fr/2025/10/28/male-america-great-again/
L'alliage accélérationniste et réactionnaire trumpien intègre de plus en plus explicitement une nouvelle dimension : le masculinisme.
C'est là qu'est la véritable bascule : ce n'est plus « Make America Great Again » mais « Male America Great Again ».
Les masculinistes qui forment cette alliance — composite, dans les Amériques et en Europe — défendent haut et fort le retour à « l'ordre éternel » des sexes et des sexualités ; pour hâter un tel retour, ils ne reculent pas non plus devant la violence.
Les symboles agités disent leurs obsessions virilistes et leur imaginaire sexiste.
Lors du débat télévisé du second tour de la présidentielle brésilienne en 2022, Jair Bolsonaro a demandé à Lula da Silva s'il prenait du Viagra.
Parmi ses cinq priorités de programme, Donald Trump a mis en avant une mesure contre les personnes transgenres.
Giorgia Meloni a trouvé son slogan : « sono una madre, sono una donna, sono Cristiana » 1, mêlant un programme politique aux parfums des tradwives et de la guerre des civilisations.
On pourrait multiplier les exemples à l'envi. L'un d'entre eux résume mieux que d'autres leur programme : à Davos, Javier Milei, a résumé le parti pris masculiniste. Pour le président argentin, le « féminisme radical » serait une « distorsion du concept d'égalité », une « recherche de privilèges » qui opposerait « une moitié de la population à l'autre ». Cette inversion des rôles entre dominants et dominés est au fondement du masculinisme.
Une internationale réactionnaire contemporaine marquée par une esthétique viriliste s'adosse au mouvement masculiniste qui se développe fortement, en réaction — au sens fort de ce mot — à la popularisation des idéaux féministes et à la déferlante #MeToo.
Cette progression est manifeste : le féminisme avance et convainc, notamment chez les jeunes générations. Mais en abaissant les privilèges des hommes et en troublant les repères traditionnels, ces victoires génèrent des crispations et une contre-offensive. C'est le fameux backlash 2 analysé par Susan Faludi 3.
Le masculinisme d'aujourd'hui dépasse pourtant ce seul phénomène par son imbrication avec la réaction : les deux se nourrissent et s'imbriquent.
De Trump à Poutine, de la Hongrie à la Corée du Sud, des discours d'Erdogan à ceux de Modi, toutes les nuances de l'internationale autoritaire et réactionnaire s'appuient sur la valorisation de la différence et de la hiérarchie entre les sexes.
S'appuyant sur des collectifs militants, la « manosphère » 4 et des figures de l'oligarchie finançant de grands médias, ce masculinisme postule que les problèmes et la souffrance des hommes seraient causés par l'influence indue des femmes en général, et des féministes en particulier. En portant des revendications proprement masculines et conservatrices, il légitime et assoit une organisation sociale reposant sur les hiérarchies, les dominations et les prédations.
Penser qu'on pourrait gagner contre le trumpisme en faisant l'impasse sur la question du genre relève de la faute morale et stratégique. Clémentine Autain
Une internationale réactionnaire
Partout dans le monde, l'extrême droite a pour projet fondamental de valoriser la tradition, la religion, les distributions inégalitaires, la jouissance capitaliste et consumériste.
Elle a aussi pour cible la science et les arts.
La percée de l'extrême droite aux États-Unis et en Europe s'agrippe au « déclin de l'Occident », qui aurait été considérablement ébranlé par le recul du religieux et le progrès des Lumières, le mélange des cultures, la décolonisation, le mouvement des femmes, les conquêtes sociales, l'écologie politique, l'essor des pays du Sud. Le retour aux « valeurs occidentales » passe par un combat en faveur de la supériorité des Blancs, de la culture chrétienne, du masculin et de l'hétérosexualité ; il orchestre la chasse aux migrants, l'obscurantisme et la destruction de l'État social.
C'est à cette échelle que la confrontation se situe.
Ce que veulent les trumpistes et leurs avatars, c'est anéantir le mouvement d'émancipation et d'individuation ouvert au XVIIIe siècle, dont l'égalité femmes/hommes est l'une des principales dimensions.
Javier Milei proclame en toute occasion : « Vive la liberté, bordel ! », détournant ce principe de son sens pour le mettre au service des dominants. Pour lui, pour eux, la liberté, c'est la liberté des hommes d'opprimer les femmes, la liberté des marchés financiers, la liberté de détruire la planète, la liberté d'être raciste, la liberté d'expression de la haine — en somme, tout ce qui fait reculer les capacités des individus à devenir libres.
La nature de la réponse progressiste doit donc être à la hauteur de l'offensive.
Aujourd'hui, chez celles et ceux qui défendent l'émancipation, beaucoup s'interrogent.
Face au procès en « wokisme », faudrait-il parler d'autre chose ?
En ferait-on trop sur le terrain du genre ?
Le féminisme serait-il devenu trop consensuel, rebattu, achevé ?
Faudrait-il en finir, à gauche, avec le sociétal pour en revenir au pur social ?
Ces questions sont souvent l'occasion de proposer la mise au placard de la défense des femmes et des minorités ; pas toujours cependant. À l'heure où l'extrême droite a le vent en poupe, nous aurions tort de les balayer d'un revers de la main : il y a de la gravité et de la complexité dans ces questionnements.
Mais penser qu'on peut gagner contre le trumpisme en faisant l'impasse sur la question du genre relève de la faute morale et stratégique. L'égalité femmes/hommes — aujourd'hui très loin d'être achevée — est non seulement une cause juste, elle est incontournable. Et le combat contre l'extrême droite suppose de déminer le masculinisme qui façonne son programme.
Pour gagner, il faut entraîner cette énergie féministe.
Le féminisme contre l'extrême droite
Contre la vague brune, le féminisme est une clef.
Aucun autre mouvement mondial n'est davantage à la mesure de la progression fasciste.
La mobilisation féministe a embrassé les États-Unis et Hollywood, mais aussi les femmes chiliennes, les Espagnoles, les Iraniennes ; elle se répand tout autour du monde.
Cette mobilisation invente ses formes et ses chants ; elle renouvelle ses mots d'ordre. Elle affirme sa force grâce à son caractère intergénérationnel et supra-occidental. Elle a ses icônes — de Gisèle Pélicot à Mahsa Amini. Faisant sien le slogan des combattantes kurdes, « Femmes, Vie, Liberté », elle sait relier trois mots qui opposent un non radical aux idées brunes, mutilantes et mortifères.
La vitalité féministe contre la restauration d'un ordre injuste est pour la gauche un puissant point d'appui. Pour autant, les théories féministes sont plurielles 5 — comme sont diverses les possibilités de les articuler à un projet de transformation sociale et écologiste.
Le féminisme, c'est la défense de toutes les femmes, et pas seulement des privilégiées. Une femme victime de viol est une femme victime de viol, qu'elle soit au RSA ou cadre supérieure, qu'elle habite Versailles ou Tarbes, qu'elle soit blanche ou noire.
Le féminisme que je défends est celui qui parle, qui interpelle, qui défend la majorité des femmes 6 : les caissières et les infirmières, les employées à temps partiel — qui signifie salaire partiel, chômage partiel, retraite partielle — et celles, parfois les mêmes, qui se démènent seules pour élever leurs enfants ; les femmes qui, par millions, souffrent dans l'indifférence de l'endométriose et celles qui n'ont même plus les moyens de s'acheter des protections périodiques ; les jeunes filles qui subissent le harcèlement sexiste sur les réseaux sociaux et les femmes ménopausées que l'on dit périmées sur le « marché de la séduction ».
Détourner les hommes du vote brun
La polarisation dans les votes l'indique clairement : le repli masculiniste actuel conduit de plus en plus d'hommes à se tourner vers l'extrême droite — quand les suffrages féminins se portent de plus en plus à gauche 7.
Cette captation du vote des femmes montre que le féminisme est un élément de dynamique pour la gauche et les écologistes ; il montre aussi que, pour atteindre la majorité, et sans en rabattre sur l'exigence d'égalité, il faut faire mieux pour parler à l'électorat masculin.
Les hommes ont vu leurs privilèges remis en cause — et ce n'est que justice. Mais dans une société où les régressions s'accumulent, où l'air du temps est au « c'était mieux avant », le ressentiment est un dangereux carburant. Les mutations dans l'emploi, le déclin des territoires ruraux et industriels, l'atomisation du salariat et des espaces de sociabilité sont le terreau d'un mal-être dans les classes populaires.
Alors que tout rime avec déclassement aujourd'hui, que l'injonction à être du côté des winners fait partie du décor dans notre régime capitaliste de concurrence et de compétition, comment ne pas regretter, quand on est un homme, ces temps anciens où le patriarcat sans entraves garantissait au moins un domaine où l'on était toujours gagnant ?
Par ce biais, l'extrême droite détourne l'attention des solutions reposant sur le partage des richesses, au profit de celles restaurant des hiérarchies.
Or si les hommes ont des privilèges à perdre dans une société égalitaire, ils ont aussi de la liberté à gagner.
Les injonctions à se conformer aux stéréotypes masculins ne sont pas que joie et bonheur. Se montrer toujours fort, ne pas pleurer, ne pas partager l'intime, se voir attribuer a priori le rôle de l'actif dans la séduction et la sexualité, sont autant de moules dans lesquels le virilisme enferme. La hiérarchie entre les sexes a un corollaire qui touche aussi les hommes : l'assignation à des rôles imposés. Face aux difficultés sociales qui s'accumulent, les hommes se réfugiant dans la mythologie viriliste n'ont-ils pas besoin que l'on prenne le mal à la racine ?
Notre réponse doit être un projet global fort, cohérent, offrant à toutes et tous une projection valorisante, une vie meilleure. Un projet qui protège et apaise, qui vise des services publics accessibles partout et de qualité, un environnement vivable, des salaires permettant de vivre dignement, de la démocratie dans l'entreprise, une sécurité alimentaire, des logements dignes, la réindustrialisation, un soutien à l'économie de proximité et le développement de lieux de soins, de liens, de convivialité. C'est un projet qui place en son cœur l'éducation et la culture.
Le repli masculiniste actuel conduit de plus en plus d'hommes à se tourner vers l'extrême droite — quand les suffrages féminins se portent de plus en plus à gauche. Clémentine Autain
Répondre à l'intersectionnalité des haines
En un mot : ce projet est celui de la société des communs, contre la marchandisation et la déshumanisation ; il propose de s'arracher au déclassement et de se projeter positivement dans l'avenir.
Le jeu de balancier qui a d'abord consisté à ignorer les questions féministes puis à s'en préoccuper pour porter les combats des femmes et des minorités — tout en laissant de côté la défense des classes populaires — doit cesser. Choisir entre le social et le sociétal est une impasse — parce que le prétendu sociétal est en réalité profondément social.
Les individus ne se découpent pas en morceaux, et les femmes sont majoritaires dans les catégories sociales les plus exploitées et les plus précaires. Les conditions de l'émancipation des ouvrières et des employées dépendent de nos victoires contre le capitalisme et le consumérisme.
Quand on est ouvrière dans une conserverie ou employée dans un hôtel, on est à la fois opprimée par le rapport de classe et en tant que femme. Et si l'on est noire ou musulmane — réelle ou supposée —, on subit aussi le racisme. Les oppressions ne s'additionnent pas, elles s'articulent entre elles. L'internationale réactionnaire et autoritaire l'a d'ailleurs très bien compris, elle qui prône l'intersectionnalité des haines. 8
Il faut donc éviter ce double écueil : ni l'économico-social pour solde de tout compte, ni les thèses autrefois promues par le think tank Terra Nova qui proposait de cibler, pour gagner à gauche, les femmes et les immigrés ; c'était là un consternant adieu au prolétariat.
Défendre à la fois le monde du travail et la liberté des femmes, une politique industrielle et les droits des minorités, ce n'est pas associer des choses qui s'opposent : en vérité, celles-ci se complètent. Cet assemblage n'est pas simple, ni exempt de tensions voire de contradictions, mais tous les raccourcis qui ne voient les mécanismes d'oppression que dans un seul rouage ratent la cible.
Pour un nouvel imaginaire du genre
Il n'est pas sérieux de croire que l'on pourrait affronter l'extrême droite sans avoir quelque chose à dire de clairement différent sur les thèmes qui sont au centre de sa propagande.
Il n'est pas sérieux non plus de croire que l'on peut gagner face à l'internationale réactionnaire avec pour seuls messages audibles les droits des femmes ou la lutte contre l'islamophobie.
Le salut viendra de l'articulation des combats émancipateurs.
C'est pourquoi l'égalité doit être portée comme une valeur contre l'essentialisme et l'enfermement identitaire. La conflictualité avec l'extrême droite se situe en grande partie sur ce terrain. L'identité fige et enferme ; l'égalité permet la dynamique émancipatrice.
La confusion s'installe souvent quand on oppose la différence à l'égalité : les hommes et les femmes sont en effet différents par leur corps, leur histoire, leur quotidien — et il y a d'ailleurs une historicité de cette différence 9, dont les concepts suivent l'évolution des rapports sociaux. Je refuse pourtant de valoriser et d'essentialiser cette différence : si le féminisme assigne lui aussi le féminin et le masculin, et/ou inverse la hiérarchie pour faire primer le féminin sur le masculin, nous voici à nouveau dans l'impasse.
La revendication d'égalité postule, elle, que chacune et chacun ne doit pas être voué à un destin préétabli en raison de son appartenance de genre. Quand on parle le langage de l'ennemi, la partie est déjà perdue. Face à ceux que l'identité obsède, soyons clairs sur notre mantra de l'égalité.
Nous avons à créer un autre imaginaire que celui d'une binarité figée, masculin/féminin. Nous touchons ici à l'intime et à des représentations profondément ancrées : nous n'aurons pas de nouveau mythe prêt à l'usage pour les remplacer. Le mouvement de la société dira ce qu'il restera de cette différence, ce que nous décidons d'en faire ; en attendant, l'égalité est le moteur de la libération.
Enfin, le féminisme est aussi fécond pour repenser notre rapport au pouvoir et à la politique.
Revendiquer le droit à l'avortement, l'égalité des salaires et des moyens pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, est essentiel.
Comprendre également que le féminisme vient contester le virilisme tel qu'il s'observe dans la façon de gouverner, de choisir les thèmes politiques ou de faire des discours — le mot tribun n'a d'ailleurs pas d'équivalent féminin —, c'est encore mieux.
Le vocabulaire « militant » en dit long : nous parlons de « camp », de « combat », de « lutte » et de « rapports de force », donnant à voir combien la forme guerrière, masculine, est constitutive de la politique elle-même. Pendant que les Trump et les Poutine radicalisent cet exercice masculin du pouvoir, nous devrions travailler à sa refondation et la donner à voir, pour promouvoir la coopération et approfondir la démocratie — qui reste la condition première de notre victoire.
Sources
1. « Je suis une mère, je suis une femme, je suis chrétienne ».
2. Terme anglais pour « retour de bâton ».
3. Susan Faludi, Backlash, Paris, trad. Lise-Éliane Pommier, Évelyne Châtelain et Thérèse Réveillé, Éditions des femmes, 1991.
4. Le terme « manosphère » (construit de la même manière que « fachosphère ») désigne l'ensemble des communautés en ligne — forums et réseaux sociaux — entretenant une forme de culture viriliste et misogyne.
5. Comme le montre l'ouvrage collectif qui vient de paraître sous la direction de Camille Froidevaux-Metterie, Théories féministes, Paris, Seuil, 2025.
6. Cinzia Arruzza, Tithi Bhattacharya, Nancy Fraser, Féminisme pour les 99 %, trad. Valentine Dervaux, Paris, La Découverte, 2019.
7. La sociologie des votes de la dernière présidentielle aux États-Unis ou des élections législatives en Allemagne est de ce point de vue édifiante.
8. Expression empruntée à l'historienne Christine Bard. Voir Christine Bard, Mélissa Blais et Francis Dupuis-Déri (dir.), Antiféminismes et masculinismes d'hier à aujourd'hui, Paris, PUF, 2019.
9. Je renvoie notamment ici aux travaux de Geneviève Fraisse, notamment Les Femmes et leur histoire, Paris, Gallimard, 1998.
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Venezuela : la menace impérialiste et les issues possibles du conflit
Comme s'il s'agissait de scénarios écrits par Warren Ellis —The Authority, Transmetropolitan, Planetary—, dans lesquels abondent les arguments exagérés, nous avons assisté au cours des quatre derniers mois à une offensive médiatique et militaire disproportionnée contre la souveraineté vénézuélienne. La double morale de l'administration américaine est passée de l'achat de pétrole vénézuélien — dans des conditions commerciales néocoloniales, résultat des sanctions qu'elle a elle-même imposées et de l'attitude servile du gouvernement Maduro — à la présentation des dirigeants de l'État vénézuélien comme un cartel criminel se livrant au trafic de drogue, dans le but de justifier un déploiement et une éventuelle attaque militaire.
https://vientosur.info/venezuela-la-amenaza-imperialista-y-los-posibles-cursos-del-conflicto/
2 décembre 2025
Elle le fait en toute connaissance de cause, sachant que le gouvernement Maduro est discrédité tant au niveau national qu'international, marqué par un déficit démocratique évident — en particulier depuis les élections présidentielles de 2024 —, un virage autoritaire et néolibéral qui conserve la rhétorique de gauche, et la détérioration de la qualité de vie du peuple et de la classe ouvrière, qui survit avec un salaire minimum mensuel inférieur à un dollar, dans un contexte d'inflation à trois chiffres et de prix des produits de consommation de base deux fois plus élevés que la moyenne régionale. La migration forcée, pour des raisons économiques et politiques, de millions de Vénézuéliens a fracturé les familles et érodé la popularité du gouvernement, au point que le gouvernement Maduro n'a pas réussi à articuler un front national anti-impérialiste face à l'offensive américaine qui inclurait tous les secteurs du pays. La droite cipaya s'est constituée en une sorte de phalange locale qui justifie l'invasion par des arguments aussi farfelus que celui de placer la souveraineté populaire électorale au-dessus de la souveraineté territoriale, alléguant que le manque de transparence des élections du 28 juillet 2024 justifie l'intervention américaine.
Mais rien de tout cela ne suffirait à lui seul à convaincre l'opinion publique américaine, latino-américaine et mondiale d'accepter une attaque militaire disproportionnée contre la patrie de Bolívar. C'est pourquoi on construit une image criminelle du gouvernement lui-même qui, de manière soumise, a livré du pétrole aux États-Unis depuis le début de la guerre en Ukraine ; une opération de propagande qui semble inspirée des monstres créés par le regretté John Cassaday.
Cependant, il y a quelque chose qui n'est pas tout à fait clair dans cette offensive militaire et médiatique américaine, qui un jour attaque de petits bateaux, le lendemain durcit le ton des agressions verbales, puis publie des communiqués grandiloquents contre le gouvernement vénézuélien et donne l'impression d'actions imminentes, pour ensuite laisser le silence et l'inaction alimenter une clinique de rumeurs et de spéculations. Pour couronner le tout, un week-end, il qualifie le gouvernement vénézuélien de « criminel » et le week-end suivant, il annonce l'ouverture de pourparlers directs entre Miraflores et la Maison Blanche.
La question initiale
Le gouvernement de Nicolás Maduro n'est pas une continuation du chavisme, il a ses propres caractéristiques qui produisent un étrange mélange entre une rhétorique socialiste dépassée - à la manière de Staline ou de Mao - pour maintenir un champ international de solidarité, tout en attaquant toute la gauche créole - en s'en prenant judiciairement à ses représentants naturels -, il mène une offensive antipopulaire contre les syndicats et les associations de travailleurs qui tentent d'organiser des luttes pour des salaires équitables et des conditions de vie dignes, il concrétise la suppression des libertés démocratiques minimales, tout en appliquant un programme néolibéral avec un discours sui generis de gauche, sans que cela l'empêche d'attaquer verbalement l'impérialisme américain - pour satisfaire sa base sociale - tout en livrant le pétrole aux gringos dans des conditions terriblement néocoloniales.
Une partie importante de la gauche vénézuélienne dénonçait lors des élections de 2024 que le candidat idéal pour les États-Unis était Nicolás Maduro, car il avait mis en place un gouvernement à l'efficacité autoritaire - non pas économique, politique et sociale - qui livrait sans vergogne les richesses du pays en échange de son maintien au pouvoir, ce que même le duo María Corina Machado (MCM) et Edmundo González Urrutia (EGU) ne pourrait pas faire en toute impunité, car sa propre base sociale le lui reprocherait.
En fait, ceux qui considèrent que Nicolás Maduro est un dirigeant timoré se trompent. Au contraire, il est extrêmement habile pour se maintenir au pouvoir malgré un mécontentement populaire croissant, sans précédent dans l'histoire nationale. Le dictateur Juan Vicente Gómez a gouverné au début du XXe siècle sans causer autant de dommages collatéraux, et la dictature de Pérez Jiménez, dépourvue de libertés démocratiques, a stabilisé l'économie grâce à un programme de développement capitaliste, mais dans lequel la classe ouvrière n'a pas connu la misère actuelle. Le fait que Maduro se maintienne au pouvoir dans ces conditions implique une capacité singulière à gérer et à contrôler les rapports de force, ce qu'il faut prendre en compte dans l'équation de l'analyse.
Mais si Maduro était déjà en négociations ouvertes avec les États-Unis depuis la guerre en Ukraine, faisant à nouveau du Venezuela un fournisseur sûr de pétrole pour le nord, alors pourquoi ce déploiement militaire inhabituel contre le Venezuela ? Les explications simplistes, qui indiquent qu'il s'agit uniquement de garantir le contrôle absolu des réserves pétrolières vénézuéliennes, ne sont pas suffisamment satisfaisantes. Si la richesse du Venezuela en fait la cible de la voracité capitaliste mondiale, et en particulier de l'impérialisme américain, ce déploiement disproportionné semble indiquer d'autres éléments supplémentaires. Nous sommes invités à nous poser cette question afin d'évaluer ce qui n'apparaît pas de manière aussi évidente.
Les faits
À la mi-août 2025, un déploiement naval, amphibie et de troupes a commencé dans les Caraïbes, en particulier autour du périmètre des côtes vénézuéliennes, sans précédent depuis 1902-1903, lorsque le président Cipriano Castro avait refusé de reconnaître la dette extérieure du Venezuela. Dans un premier temps, les États-Unis ont annoncé la mobilisation de 4 000 militaires, dont des éléments de l'Iwo Jima Amphibious Ready Group (ARG) ainsi que la 22e Marine Expeditionary Unit (MEU), des destroyers de classe Arleigh-Burke, un croiseur lance-missiles guidés - comme l'USS Gettysburg , le sous-marin nucléaire USS Newport News (SSN-750), des avions de patrouille maritime P-8 Poseidon et des hélicoptères du Corps des Marines. Le groupe armé a quitté Norfolk, en Virginie, le 15 août 2025, après une longue période sans déploiement dans la région. La presse internationale a rapporté que, par la suite, le 27 août, l'USS Newport News, ainsi que d'autres destroyers et unités de soutien, se sont joints à l'opération de surveillance et de dissuasion dans le sud des Caraïbes, près de la frontière maritime du Venezuela.
Le gouvernement vénézuélien a lancé une offensive médiatique - accusant initialement Marcos Rubio et présentant Trump comme ayant été trompé par ce dernier -, politique, en mobilisant ses bases sociales affaiblies, les miliciens, et en appelant à l'unité nationale. Il refuse toutefois de libérer tous les prisonniers politiques, de restituer la personnalité juridique des partis de gauche à leurs militants légitimes et ne renonce pas à son modèle d'accumulation néo-bourgeoise. Il a également lancé une offensive militaire, en concevant une stratégie de résistance prolongée qui nécessiterait un front social plus large, et une offensive diplomatique dans les différentes instances multilatérales, de l'ONU à la CELAC. Après avoir tenté de manière presque enfantine de créer une division au sein de l'administration Trump, il a attaqué l'offensive en la qualifiant d'impérialiste, tout en prenant soin de ne pas fermer la porte au dialogue avec le locataire de la Maison Blanche.
Les gouvernements progressistes ont réagi de différentes manières : tandis que Boric (Chili) insiste sur le caractère autoritaire et non socialiste du gouvernement Maduro, Petro met l'accent sur le déficit démocratique au Venezuela, qui ne justifierait pas une invasion militaire du pays, Lula souligne qu'il s'agit d'une préoccupation pour la souveraineté de tout le continent et la présidente du Mexique se montre plus proche du discours anti-impérialiste comme priorité.
Le 2 septembre, l'opération Southern Spear a été annoncée, visant à éradiquer ce qu'ils appellent les narcoterroristes liés au Venezuela. Le 2 septembre, une première attaque a détruit un petit bateau - présumé dédié au trafic de drogue - faisant 11 morts dans les eaux internationales des Caraïbes. À la mi-septembre, ces attaques se sont poursuivies, faisant 3 morts supplémentaires.
Le 1er septembre, le gouvernement Maduro avait déclaré que le Venezuela était en état d'alerte maximale, avertissant qu'il riposterait si les forces américaines tentaient de violer la souveraineté nationale. De plus, Nicolás Maduro a menacé de déclarer la République en état d'alerte si l'agression étrangère se concrétisait.
Le 10 octobre, le secrétaire à la Défense Pete Hegseth a annoncé la création de la Joint Task Force (JTF) anti-Narcotics (Force opérationnelle interarmées anti-stupéfiants) dans le but de coordonner les opérations maritimes, aériennes et de renseignement contre les réseaux de trafic de drogue. Cette JTF est dirigée par la II Marine Expeditionary Force (II MEF). À partir du 11 octobre, les patrouilles maritimes s'intensifient, avec des avions de soutien logistique et des hélicoptères des Marines, auxquels s'ajoute la coordination avec des pays tels que la République dominicaine et Trinité-et-Tobago. Plus de 10 attaques supplémentaires contre de petits bateaux sont perpétrées, portant le nombre de morts à 43.
En octobre, le gouvernement vénézuélien a organisé des exercices militaires, mobilisant ses forces aériennes et ses défenses antiaériennes pour répondre à d'éventuelles provocations. Entre-temps, un sentiment anti-impérialiste précaire se développe parmi la population, résultat d'un épuisement social terrible après onze années de crise économique sans précédent qui a fait chuter le salaire minimum mensuel à moins d'un dollar américain, avec une inflation soutenue et des produits de consommation de base dont les prix ont doublé par rapport à la moyenne régionale. Il ne s'agit pas qu'une partie importante de la population - de droite, sans affiliation politique et même de gauche - soit d'accord avec une agression contre le pays, mais plutôt qu'il existe un terrible ras-le-bol à l'égard du gouvernement national. Face à cela, une partie de la population semble préférer « le mal inconnu » comme illusion qu'il est possible de sortir de la situation actuelle, caractérisée par des revenus moyens inférieurs au seuil de pauvreté, comme si l'histoire ne démontrait pas que là où les gringos envahissent, ce qui suit, c'est la misère, le chaos et la destruction.
Le 16 novembre, bien que cela ait été annoncé auparavant, la mission a été élargie avec l'incorporation du porte-avions USS Gerald R. Ford (CVN 78) et de son groupe d'attaque, ainsi que de bombardiers à longue portée et de patrouilles aériennes et maritimes supplémentaires, portant la présence à environ 15 000 soldats. À ce jour, le nombre de morts liées aux opérations militaires s'élève à 83 personnes. Il s'agit de morts extrajudiciaires, d'êtres humains qui auraient pu être neutralisés, capturés et jugés dans le cadre d'une procédure régulière, ce qui a été dénoncé par des organisations de défense des droits humains.
À l'annonce de l'arrivée de l'USS Ford, le Venezuela a mobilisé près de 200 000 soldats dans le cadre d'une opération de préparation à l'éventualité d'une escalade des hostilités. Cela s'accompagne d'une intensification de la propagande sur la nécessité de l'unité nationale et de la défense de la souveraineté, qui a certainement réussi à souder la base sociale du madurisme, mais qui s'avère insuffisante pour une résistance anti-impérialiste efficace.
Le 21 novembre 2025, le Cartel des Soleils est déclaré organisation criminelle, dont l'existence n'a pas été prouvée, mais qui serait composée d'éléments de la haute hiérarchie militaire et politique du gouvernement vénézuélien, y compris le président Nicolás Maduro lui-même. Fin novembre, les spéculations s'intensifient et des annonces sont faites sur la possibilité que les États-Unis lancent des opérations terrestres contre le trafic de drogue - euphémisme pour désigner une éventuelle attaque militaire sur le territoire vénézuélien - tandis que le président Trump lui-même évoque la possibilité d'une rencontre avec le président Maduro. Au moment où nous écrivons ces lignes, le New York Times signale qu'un premier entretien téléphonique a eu lieu, sans qu'aucun accord de non-agression n'ait été conclu.
Ce n'est pas une aberration de Trump, c'est la politique néocoloniale de l'impérialisme américain
Trump n'est pas un « fou furieux » à la tête de l'administration de la plus importante nation impérialiste, au contraire, il exprime des politiques structurelles, bien qu'appliquées à sa manière excentrique et tapageuse, propre aux illibéraux. Ce qui se passe dans le sud des Caraïbes s'inscrit en réalité dans un contexte plus général lié à la restructuration du système de gouvernance capitaliste mondial issu de la Seconde Guerre mondiale. L'émergence de la Chine en tant que puissance économique, de la Russie en tant que géant militaire nucléaire, la relocalisation d'un puissant pôle d'innovation entre la Chine et l'Inde, et la perte croissante d'influence géostratégique et militaire de l'Europe ne sont que les signes d'une transformation radicale de l'ordre capitaliste.
Comme toujours, le nouvel ordre émergera par la négociation ou par la guerre – dans ce dernier cas, ce serait apocalyptique pour l'humanité et le capitalisme lui-même – mais les pièces commencent à bouger. Les États-Unis agissent comme une nation impérialiste, et une grande partie de ce qui est aujourd'hui en jeu a commencé avec Biden, c'est-à-dire que pour les démocrates et les républicains, le véritable intérêt réside dans la géopolitique américaine. Les États-Unis doivent montrer au monde qu'ils restent la nation la plus puissante en matière d'armement, avec une capacité de destruction à grande échelle et une présence militaire extraterritoriale dans de nombreux pays.
La « politique économique intérieure », officiellement connue sous le nom d'approche « Trade and Economic Security » (TES), promue par le département de la Sécurité intérieure (DHS) sous l'administration Biden, a été annoncée en 2021 dans le cadre d'une stratégie globale visant à intégrer la sécurité économique dans l'agenda de la sécurité nationale. Sa principale publication, le rapport TES, s'appuie sur des évaluations annuelles telles que l'Economic Security Annual Assessment de 2020, publiée le 11 janvier 2021, et le DHS Strategic Action Plan to Counter the Threat Posed by the People's Republic of China (12 janvier 2021).
L'objectif principal était de reconnaître que la prospérité économique des États-Unis dépend du flux ininterrompu de biens, de services, de personnes, de capitaux, d'informations et de technologies à travers les frontières. Il s'agit donc d'atténuer les risques pour la sécurité économique intérieure par des actions coordonnées à l'échelle du gouvernement, sur les plans politique, financier et militaire, qui actualisent de manière bilatérale les liens historiques des pays avec l'empire. Cela comprenait le renforcement de la présence militaire dans d'autres pays et le lancement d'opérations de coopération dans ce domaine dans d'autres nations.
Les principaux objectifs visaient à renforcer la position économique mondiale des États-Unis. Promouvoir des politiques visant à protéger les chaînes d'approvisionnement critiques, en réduisant les vulnérabilités face à des menaces telles que les perturbations commerciales, les cyberattaques ou la concurrence déloyale (par exemple, de la part de la Chine) ; Intégrer la sécurité économique à la sécurité nationale et utiliser le « Homeland Security Enterprise » pour répondre aux risques qui affectent la stabilité économique, tels que les fluctuations du commerce international ou la dépendance vis-à-vis des importations essentielles.
Les actions pratiques du TES visaient à réaliser des évaluations annuelles pour éclairer les politiques, promouvoir le commerce sécurisé et collaborer avec les alliés afin de diversifier les chaînes d'approvisionnement. Elles mettaient l'accent sur des secteurs tels que l'industrie manufacturière, la technologie et les ressources naturelles, en se concentrant sur la réduction des risques économiques « d'origine étrangère ». Le revirement de la politique de sécurité, présenté sous le couvert d'une carotte et d'un bâton dissimulé, est naturalisé. Cette politique représentait un tournant vers une vision « pangouvernementale » (whole-of-government), combinant diplomatie économique, réglementations commerciales et coopération internationale, contrairement aux approches plus isolationnistes précédentes.
La politique TES reste en vigueur en tant que cadre étatique sous l'administration Trump (qui a débuté en janvier 2025). Bien que certaines directives spécifiques de Biden aient été abrogées, notamment dans les domaines de l'immigration et de l'application de la loi dans les zones sensibles (par exemple, la directive du 24 janvier 2025, formulée par le secrétaire par intérim du DHS, Benjamine Huffman), le rapport TES reste une référence active dans les publications du DHS jusqu'au 24 novembre 2025.
D'autres documents connexes, tels que le plan de développement de la main-d'œuvre ICE Pact et les déclarations d'intention conjointes, s'étendent jusqu'en 2026, indiquant une continuité. Elle n'a pas été officiellement remplacée, mais intégrée dans des initiatives plus larges de l'ère Trump.
La politique Homeland Economic/TES fournit le cadre conceptuel du déploiement militaire actuel dans les Caraïbes, mais marque une évolution des approches : de la diplomatie économique avec un éventuel soutien militaire sous Biden, à la centralité de l'action militaire offensive sous Trump. L'argument de l'administration Trump est que le trafic transnational de drogue, qui est au centre de l'opération Southern Spear - lancée en septembre 2025, avec des antécédents en août -, menace directement les objectifs du TES en créant les conditions d'une interruption potentielle des chaînes d'approvisionnement et du commerce, car les cartels - en l'occurrence le Cartel des Soleils - contrôlent les routes maritimes dans les Caraïbes, affectant le flux de marchandises légales - par exemple, le pétrole, l'agriculture - ce qui augmente les coûts logistiques et sape la « prospérité économique dépendante des flux transfrontaliers », éléments mis en avant dans la TES.
D'autre part, le trafic de drogue génère une instabilité régionale, notamment en raison de ses « liens » avec les migrations massives, comme c'est le cas lors des crises économiques dans des pays tels que le Venezuela. En outre, le trafic de drogue favorise la dépendance vis-à-vis des importations illicites et réduit la coopération commerciale avec les alliés des Caraïbes, ce qui va à l'encontre de l'accent mis par la TES sur les alliances visant à diversifier les approvisionnements. Pour l'administration Trump, tout cela a un impact sur la sécurité économique intérieure, car le fentanyl et d'autres drogues inondent les États-Unis, coûtant des milliards de dollars en santé publique et en productivité, ce que la TES identifie comme un risque « intérieur » nécessitant une réponse intégrée.
Sous Biden, la TES donnait la priorité à des mesures non létales telles que les sanctions économiques, le partage de renseignements et l'aide aux partenaires régionaux pour démanteler les réseaux financiers des cartels. Dans le cas du Venezuela, Biden a privilégié la mise en place de conditions néocoloniales dans l'approvisionnement en pétrole vénézuélien de l'Amérique du Nord. En 2025, sous l'administration Trump, cela a dégénéré en un déploiement massif - depuis août - qui semble être une adaptation de la TES, dans ce cas pour « protéger la stabilité économique » par la contention militaire.
Marché pétrolier
Les estimations de l'OPEP et de l'AIE évaluent les réserves pétrolières vénézuéliennes à 303 milliards de barils, ce qui fait du pays celui qui possède les plus grandes réserves prouvées de pétrole brut au monde, devant l'Arabie saoudite et l'Iran. Dans la stratégie du TES, cela constitue un domaine stratégique pour l'avenir économique des États-Unis, raison pour laquelle une stratégie non dévoilée ouvertement, consistant à installer des bases militaires américaines sur le sol vénézuélien, semble cohérente. Les États-Unis, dans la concurrence acharnée avec la Chine et la Russie pour les marchés pétroliers, veulent s'assurer la plus importante réserve mondiale, située dans leur zone d'influence la plus proche, ce qu'ils ne peuvent faire que par un contrôle militaire direct. Les annonces du début des opérations d'exploitation et de commerce du pétrole vénézuélien par des entreprises chinoises et russes ont inquiété Washington, qui semble rechercher des mécanismes coercitifs pour éviter la perte potentielle d'influence directe sur cette importante réserve énergétique. En d'autres termes, le déploiement militaire dans le sud des Caraïbes ne vise pas seulement à changer le gouvernement pour s'assurer l'approvisionnement en pétrole, mais aussi à créer les conditions politico-militaires d'un contrôle militaire direct, ce qui constituerait une violation de la souveraineté nationale plus grave encore que celle commise pendant la guerre froide et la quatrième République.
Contrairement à ce qui s'est produit sur les marchés pétroliers lors des offensives américaines contre un pays producteur, dans le cas présent, la nervosité n'a pas affecté les indicateurs de prix. Au cours de l'année 2025, les fluctuations des prix du pétrole ont été à la baisse (78 dollars en janvier 2025 - 64 dollars en novembre de la même année), ce qui montre que, plutôt qu'une opération militaire directe, le marché s'attend à un accord entre les gouvernements Maduro-Trump, qui dans ce cas serait la négociation d'une présence militaire américaine permanente sur le sol vénézuélien. Depuis le début du déploiement militaire américain dans le sud des Caraïbes, en août, les prix du pétrole, bien qu'ils aient connu de légères variations lorsque les tensions entre la Maison Blanche et Miraflores se sont intensifiées, n'ont pas cessé de baisser. Ce comportement du marché est un élément à prendre en compte lorsqu'on examine le calendrier et les scénarios de ces tensions. En résumé, alors que le marché pétrolier ne semble pas anticiper d'offensive militaire contre le Venezuela à court terme et ne réagit donc pas de manière nerveuse en augmentant les prix du baril, une hausse du coût de l'or noir favoriserait les affaires des négociants en pétrole brut, parmi lesquels figure le président Trump lui-même.
Trump et le renforcement de la présence militaire en Amérique latine et dans les Caraïbes
Depuis son arrivée au pouvoir, Trump a concentré une grande partie de ses efforts, au cours de son deuxième mandat en 2025, sur la présence militaire américaine en Amérique latine et dans les Caraïbes. En d'autres termes, il s'agit d'une continuité du TES, avec une importance accrue accordée à l'expansion des forces militaires dans les pays dépendants. Certaines des initiatives les plus importantes à cet égard sont énoncées dans le protocole d'accord accepté par le président Mulino (Panama) et annoncé par le secrétaire américain à la Défense Pete Hegseth pour l'« utilisation rotationnelle » des anciennes bases, aérodromes et stations navales que les États-Unis possédaient au Panama avant la cession du canal ; dans le cas de Porto Rico, la base de Roselvet Roads a été rouverte et renforcée sur le plan opérationnel, et des exercices ont été lancés à Vieques ; en Équateur, le parlement a approuvé une réforme constitutionnelle ouvrant la possibilité d'étendre la présence militaire américaine sur son territoire, mais cette mesure a été rejetée par référendum populaire ; plus récemment, en novembre 2025, la République dominicaine a autorisé l'utilisation de bases locales (la base aérienne d'Isidro et l'aéroport international des Amériques) pour des opérations logistiques de lutte contre le trafic de drogue. L'administration Trump a encouragé l'utilisation intensifiée des CSL (Cooperative Security Locations) au Salvador, à Curaçao, à Palenque/Apiay/Malambo et dans d'autres aérodromes (Colombie), c'est-à-dire qu'en quelques mois seulement, elle a travaillé à un repositionnement militaire américain dans la région.
Le Venezuela est l'un des pays où les États-Unis ont toujours souhaité installer des bases militaires. Dans les années 1960, ils ont tenté de le faire, mais ils se sont heurtés à l'opposition du gouvernement social-démocrate de Rómulo Betancourt, qui a accepté une coopération militaire sans troupes stationnées en permanence. Les États-Unis semblent vouloir renverser cette situation, paradoxalement alors que le gouvernement est dirigé par Maduro, considéré comme l'antithèse de Betancourt. En ce sens, la pression militaire sur le Venezuela semble viser, outre le contrôle du pétrole, à vaincre la résistance betancouriste au déploiement militaire sur le territoire, que ce soit par un accord avec le madurisme ou dans le cadre d'une éventuelle succession dirigée par María Corina Machado, qui a laissé entrevoir cette possibilité dans un passé récent. Cela expliquerait en partie pourquoi, malgré la livraison du pétrole vénézuélien aux États-Unis dans des conditions néocoloniales ces dernières années, une offensive militaire disproportionnée est menée contre le pays et l'administration vénézuélienne.
Régime prédictif et contrôle impérial
La lutte des classes est le moteur de l'histoire, disait le vieux Marx. C'est pourquoi la formation impériale - l'impérialisme aujourd'hui - fait partie intégrante de la lutte des classes, en l'occurrence en faveur de la bourgeoisie en tant que classe sociale à l'échelle mondiale. L'oppression de classe s'exerce par le biais de l'État bourgeois et de ses institutions, sous diverses formes, notamment la biopolitique (Foucault) et la psychopolitique (Chul-Han) pendant les périodes libérale et néolibérale.
Le développement des technologies constitutives de la quatrième révolution industrielle, en particulier l'internet, la collecte de données, l'analyse de métadonnées, l'intelligence artificielle et les systèmes de gestion à grande échelle d'informations multiniveaux, ont donné naissance au régime prédictif de contrôle impérial. À cet égard, la collecte massive de données suscite un intérêt particulier afin de connaître les comportements, de les segmenter, de les localiser et de pouvoir construire des scénarios futurs, qui permettent précisément de faire entrer le futur dans le présent. Cela revêt une importance particulière dans les nouvelles formes d'oppression et de contrôle impérial sur les territoires.
C'est ce que nous avons observé au cours de ces quatre derniers mois, pendant lesquels nous avons semblé être en permanence au bord d'une action militaire à grande échelle contre le Venezuela, ce qui a suscité des réactions de sympathie ou de rejet, d'incrédulité ou d'optimisme, de soutien ou d'opposition de la part de la population, non seulement du pays, mais aussi de la région et du monde entier. Cela a généré un volume gigantesque d'informations, d'un intérêt prédictif particulier, qui, en raison de l'impunité avec laquelle elles ont été exécutées, constituent une victoire très importante pour les objectifs de l'impérialisme américain. Les États-Unis disposent désormais de davantage d'éléments pour évaluer les comportements éventuels de la population et des représentants politiques face à de futures interventions potentielles dans la région, les probabilités réelles d'obtenir des soutiens, mais aussi les résistances auxquelles il faut s'attendre. Tout cela est traité à l'aide de méthodes de renseignement ouvert automatisé.
OSINT
Les opérations militaires ont commencé dès l'annonce du déploiement de la flotte américaine dans le sud des Caraïbes. Il ne s'agit pas de tirs de missiles comme dans les guerres conventionnelles, mais du lancement d'une phase des nouvelles guerres hybrides, qui ne semblent pas si évidentes pour l'observateur ordinaire. C'est le résultat de l'utilisation militaire de multiples technologies, parmi lesquelles nous analyserons l'OSINT.
Le renseignement ouvert automatisé (OSINT) est né dans le renseignement militaire dans les années 40-50 (radio, presse) du XXe siècle. Avec l'émergence d'Internet (années 1990), il devient massif. De 2015 à 2025, avec l'intelligence artificielle (IA) et le big data, l'OSINT entre dans son ère automatisée, avec des analyses en temps quasi réel.
L'OSINT automatisé est une méthode de collecte et d'analyse d'informations publiques (actualités, réseaux sociaux, images satellites, documents officiels, trafic maritime/aérien, forums, bases de données ouvertes, etc.), où un logiciel spécialisé effectue automatiquement des tâches qui nécessitaient auparavant des heures de travail humain.
L'automatisation permet de parcourir (scraping) des milliers de pages et de sources ouvertes, de générer un classement automatique à l'aide de modèles d'IA (par thème, géographie, sentiment, pertinence), de détecter des tendances en temps réel (mouvements militaires, campagnes médiatiques, changements économiques), de produire des alertes basées sur des événements clés (déploiements navals, discours, annonces de sanctions) et de générer des rapports intégrés à partir de multiples sources.
Par exemple, grâce à des systèmes qui surveillent les routes maritimes et détectent les mouvements inhabituels des navires, des plateformes qui analysent les images satellites pour identifier l'activité militaire, des outils qui capturent et corrèlent les discours officiels, les sanctions et les mouvements logistiques, des moteurs qui traquent les actualités dans des dizaines de langues et produisent des résumés automatiques, des robots qui suivent les hashtags ou les récits politiques sur les réseaux sociaux.
L'OSINT est utilisé pour évaluer les risques de conflit ou d'escalade militaire, surveiller le trafic de drogue, la contrebande ou le crime organisé, anticiper les crises politiques ou économiques, analyser les campagnes de désinformation, mesurer l'impact des sanctions ou des tensions diplomatiques.
Dans le contexte de l'escalade des tensions dans le sud des Caraïbes, l'OSINT semble être utilisé à quatre niveaux principaux. Le premier consiste à suivre le trafic maritime (AIS + OSINT satellite), en surveillant les navires militaires, commerciaux et de pêche à l'aide du système d'identification automatique (AIS), en précisant les itinéraires anormaux près de Porto Rico - où la présence militaire a été réactivée à Vieques et dans d'autres endroits -, Curaçao, Trinité, La Guaira et le golfe du Venezuela, en détectant les schémas logistiques de ravitaillement, les approches des zones d'exclusion, les comportements face aux restrictions, les patrouilles répétitives, entre autres ; en outre, des travaux sont menés sur d'éventuelles coupures de l'AIS pour des opérations secrètes, en optimisant l'utilisation de la technologie militaire disponible dans la région.
Le second consiste à utiliser des images satellites automatisées. Grâce à des systèmes de détection automatique (vision artificielle), on obtient des informations sur le déploiement de destroyers ou de porte-avions, les activités dans les bases américaines (en particulier Rooselvet, Roads, Mayport, Key West), les mouvements inhabituels dans les bases vénézuéliennes (La Orchila, Punto Fijo, Sucre, Puerto Cabello, Guárico, Maracay et les zones frontalières) qui, ensemble, permettent d'augmenter le nombre de vols de surveillance P-8 Poseidon ou d'hélicoptères MH-60. Ces images satellites permettent de détecter en temps réel les changements de « pixels » et d'alerter lorsque de nouveaux navires, des ombres thermiques, des colonnes logistiques, des stocks de carburant ou des équipements radar actifs apparaissent, informations particulièrement utiles au moment d'intensifier les opérations militaires.
Le troisième consiste en la surveillance automatique des discours, des mesures coercitives et des déclarations officielles. Dans ce cas, des robots formés au traitement du langage naturel analysent les communiqués, les directives du DHS, du commandement sud et du département d'État, ainsi que les réactions des pouvoirs publics et des forces armées vénézuéliennes, en détectant des mots clés tels que « menace inhabituelle », « réponse stratégique », « violation des eaux territoriales », « activation des milices ». Ils calculent ensuite le risque implicite et explicite à partir du ton du discours, de la fréquence, des précédents historiques d'escalade et de la véracité des affirmations lors d'occasions précédentes, ainsi que des acteurs impliqués et de leur présence dans différents scénarios.
Le quatrième volet concerne la surveillance automatique des réseaux sociaux et des signaux faibles. Les algorithmes traquent les vidéos de mouvements militaires mises en ligne par des civils, les rapports de pêcheurs, les publications de communautés de pêcheurs, les critiques ou les sympathies postées ou envoyées par SMS, les vols non identifiés (OSINT aéronautique), ainsi que les fuites du personnel militaire, ce qui permet de détecter les mouvements avant qu'ils ne se produisent ou ne soient annoncés.
La combinaison de l'OSINT et des modèles prédictifs pour les risques géopolitiques permet de mesurer les probabilités d'escalade - bien qu'ils ne prédisent pas d'événements concrets - à l'aide de trois techniques principales : les modèles de corrélation et les séries chronologiques (ARIMA, VAR, Granger), les modèles de risque de type « odds ratios » et probabilités logistiques, et les modèles de simulation (Monte Carlo + analyse des jeux géopolitiques).
Les modèles de corrélation et de séries chronologiques intègrent la fréquence des mouvements navals, la fréquence des annonces officielles, les prix du pétrole, les tensions internes dans le pays, les activités sur les routes (dans ce cas, le trafic de drogue) et l'intensité potentielle et réelle des sanctions, en pondérant chacun d'entre eux et en évaluant leurs interactions. Ces modèles cherchent à déterminer si un facteur en anticipe un autre selon les principes de causalité de Granger.
Dans les modèles de risque et de probabilité logistique, la régression estime le risque d'incursions, de confrontation et d'escalade militaire par erreur de calcul. Ils ne disent pas quel événement se produira, mais quelle est la probabilité qu'il se produise.
Les modèles de simulation élaborent des scénarios basés sur la distance entre les équipements militaires, l'intensité de l'hostilité dans les discours, le chevauchement avec des périodes électorales qui rendent prévisibles les exagérations, la production pétrolière et les actions d'acteurs non étatiques, en particulier les cartels. Chaque scénario montre les probabilités que les incidents débouchent sur des affrontements directs, des attaques chirurgicales, des escalades ou des sanctions.
L'OSINT a besoin de beaucoup d'informations pour être plus efficace, c'est pourquoi le déplacement dans le sud des Caraïbes, depuis plus de trois mois, n'a pas donné lieu à des attaques concrètes sur le territoire, avec une surcharge de stimuli pour susciter des réactions de la population et des gouvernements. L'offensive communicationnelle de l'opération militaire se caractérise par des jours où les attaques contre les navires sont plus fréquentes (le lundi) et par des déclarations musclées (le mercredi) afin de mesurer les jours suivants les comportements qui se produisent, de recueillir des informations massives et d'alimenter les scénarios.
La guerre a déjà commencé, même si aucun missile n'a été tiré sur le territoire vénézuélien. Un élément essentiel dans la collecte d'informations est la position de la population locale à l'égard de l'offensive en cours, de la présence militaire américaine et de son évolution. Les sympathies et les résistances sont détectées et traitées.
NOTAM
Les NOTAM (Notice to Air Missions), anciennement Notice to Airmen, sont des avis officiels et obligatoires émis par l'autorité aéronautique d'un pays. Dans le cas des États-Unis, ils sont générés par la Federal Aviation Administration (FAA) dans le but d'informer les pilotes, les contrôleurs aériens, les compagnies aériennes et les services de navigation aérienne des conditions ou restrictions susceptibles d'affecter la sécurité d'un vol.
Dans le cas du Venezuela, la FAA a publié le 21 novembre 2025 un NOTAM (A0012/25) signalant l'augmentation de l'activité militaire et recommandant la plus grande prudence face aux risques potentiels liés au survol du Venezuela. Cela inclut les phases de vol, de survol, de décollage, d'atterrissage et de mouvement au sol des aéronefs.
Le 29 novembre, le président Trump lui-même a annoncé la fermeture totale de l'espace aérien vénézuélien, bien qu'il ne soit pas l'autorité compétente pour le faire, ce qui a eu un impact particulier sur l'opinion publique. Des compagnies aériennes telles qu'Iberia, Tap et d'autres ont temporairement suspendu leurs vols, bien qu'à la date de clôture de cet article (30-11-2025), des compagnies aériennes telles que COPA, Laser et Wingo volaient normalement à destination de Caracas.
Dans le contexte des tensions croissantes entre Caracas et Washington, le NOTAM et l'annonce ultérieure de Trump doivent être considérés dans leurs trois dimensions réelles. La première consiste à renforcer le blocus et l'encerclement du Venezuela afin d'avoir un impact encore plus important sur l'économie locale, dans le but d'accélérer un changement de régime. La deuxième consiste à continuer à faire pression sur la table des négociations qui est ouverte. La troisième consiste à produire des volumes supplémentaires d'informations pour l'OSINT, les systèmes Odds et d'autres mécanismes du régime de contrôle prédictif.
ODDS
Les Odds[2] sont des systèmes ou des méthodologies probabilistes pour la construction de scénarios, très utilisés par le secteur des entreprises et les agences de presse. Même si le contexte présente un risque élevé d'intervention militaire, avec des discours belliqueux et des alertes de part et d'autre, aucune action directe ne semble se profiler, si l'on se base sur l'ensemble des informations disponibles.
Bien qu'il n'existe pas d'Odss officiels, en utilisant leur technique de construction, on peut déduire que les probabilités d'une intervention militaire américaine au Venezuela à court terme (24 à 160 heures) ne sont que de 5 à 12 %. En d'autres termes, il faut s'attendre à ce que plusieurs jours ou semaines s'écoulent avant que les probabilités d'une intervention militaire ne s'accroissent ou ne se dissipent.
Le madurisme dans son labyrinthe
Nous insistons. Ceux qui sous-estiment les capacités politiques de Maduro se trompent. Maduro n'est certes pas un homme cultivé, mais c'est un homme politique doté d'une capacité exceptionnelle à se maintenir au pouvoir, notamment parce qu'il est pragmatique plutôt qu'idéologisé.
Maduro n'est pas Chávez, et le madurisme n'est pas similaire au chavisme. Chávez était un hyper-leader, qui ne partageait pas son leadership - il n'a jamais fonctionné avec une direction collective, pas même avec le MVR ou le PSUV -, doté d'un immense sens de l'empathie envers le peuple, conscient que son maintien au pouvoir dépendait de son accord avec la majorité du peuple, qui a utilisé la polarisation comme stratégie pour construire un pôle autour du projet qu'il incarnait ; Chávez a commis de nombreuses erreurs – qu'il n'appartient pas d'analyser dans ce texte –, mais il s'est engagé pleinement dans la création d'un nouveau pluralisme – qui dépasserait celui de la Quatrième République – en orientant son action selon sa conception de la justice sociale.
Contrairement au chavisme, le madurisme est le résultat d'un passage abrupt du pouvoir, de Chávez - à partir de sa maladie et de sa mort - à Maduro, qui ne jouissait ni du charisme ni du contrôle des rapports de force qui caractérisaient le chavisme. Le madurisme est une alliance de dirigeants et de groupes mineurs (Diosdado Cabello, les frères Rodríguez et d'autres), qui s'élargit pour pallier le manque d'expérience militaire de Maduro (Padrino López et la nouvelle direction militaire et policière post-chaviste) qui acceptent le leadership de Maduro, mais qui ont leurs propres intérêts économiques et politiques.
Alors que le chavisme prônait une alliance civico-militaire, le madurisme, dans son virage autoritaire, l'élargit à une alliance civico-militaire-policière.
Dans sa construction d'identité et de rapports de force pour se maintenir au pouvoir, le madurisme s'est démarqué des alliés de la période chaviste, ce qui a créé une opposition chaviste au madurisme - encore faible - ainsi qu'un affrontement avec l'ensemble de la gauche authentique (PCV, PPT et autres) dont les représentations juridiques ont été attaquées par des décisions judiciaires, ce qui a suscité une opposition de la gauche. La coordination entre le chavisme dissident et la gauche critique en termes organiques est encore très faible.
Par conséquent, toute négociation pour la transition ne se fait pas seulement avec Maduro, mais avec le madurisme, et ne peut ignorer l'opposition chaviste et de gauche qui est anti-maduriste. C'est l'erreur stratégique de la droite la plus radicale et des dirigeants du MCM-EGU, qui proposent un changement radical avec le passé et unifient le chavisme avec le madurisme.
Comme je l'explique dans le livre « Venezuela y el Chavismo » (2025), le madurisme est une rupture avec le projet polyclassiste incarné par Chávez et un pari sur la consolidation d'une nouvelle bourgeoisie, née dans le sillage des affaires et de la corruption des vingt-cinq dernières années, opposée de manière conjoncturelle aux intérêts de l'ancienne bourgeoisie, mais avec laquelle elle partage un horizon stratégique.
Ce qui reste au madurisme de son tronc d'origine, le chavisme, c'est la rhétorique socialiste et populaire-communautaire, qu'il maintient pour conserver la cohésion de sa base sociale qui, bien que réduite – et incapable de remporter des élections libres, justes et transparentes à court terme –, peut encore compter environ quatre millions d'électeurs, ce qui n'est pas négligeable lorsqu'on parle de transition démocratique.
Le madurisme a connu jusqu'à présent quatre étapes. La première, entre 2014 et 2017, a été marquée par l'écrasement et l'intervention des représentations politiques de la droite et de la bourgeoisie classique, ainsi que par la récupération d'une partie importante des dirigeants qui continuent d'apparaître comme des opposants et que l'on qualifie en vénézuélien d'« alacranes » (capables d'agir contre les leurs). La deuxième, entre 2018 et 2024, a été marquée par l'intervention et la réduction à sa plus simple expression de la gauche politique qui avait accompagné Chávez, la destruction des libertés syndicales d'organisation, de grève et de mobilisation, et le début de négociations avec les États-Unis pour rétablir les relations bilatérales, ce qui a été particulièrement favorisé par la guerre en Ukraine, qui a fait du Venezuela un fournisseur fiable pour les Américains, même dans des conditions de dépendance néocoloniale supérieures à celles connues avant Chávez, ouvertement dépouillées de toute velléité nationaliste. J'insiste sur le fait que le Venezuela et les États-Unis, indépendamment des déclarations grandiloquentes propres au spectre politique interne de chaque pays, avaient sensiblement amélioré leurs relations entre 2020 et 2025 (avant le début du déploiement militaire américain dans les Caraïbes). La troisième, entre 2024 et 2025, consiste à passer d'un régime démocratique formel à l'annulation de facto de la voie démocratique - même si les élections, le Conseil national électoral (CNE) et la rhétorique participative sont maintenus - avec une escalade de la répression sélective qui s'est traduite par l'arrestation de centaines de membres du mouvement social, ce qui l'a placé dans une position défensive, tant au niveau national qu'international. La quatrième, qui commence par le siège militaire (2025 - ), période durant laquelle tout est permis et où la survie au pouvoir est le leitmotiv.
L'impossibilité de rendre crédible le résultat des élections du 28 juillet 2024 a plongé le madurisme dans une crise internationale sans précédent, dont l'escalade la plus importante est l'offensive militaire américaine dans le sud des Caraïbes. Les États-Unis utilisent cette situation, sous le prétexte de la lutte contre le trafic de drogue, pour faire avancer leur stratégie TES dans la région, avec l'intention claire de positionner des sites militaires sur le territoire vénézuélien, dans le cadre de la reconfiguration politique mondiale.
Cela crée un défi inhabituel pour le madurisme. Négocier maintenant avec les États-Unis implique non seulement de parler de transition - qui pourrait attendre quelques années s'il cède à leurs intentions stratégiques : installer des bases militaires - mais aussi d'accepter une épée de Damoclès au-dessus de leur tête, tout en réapprenant à maintenir un équilibre minimal avec les Américains. Il serait plus facile pour les États-Unis d'intervenir dans les affaires politiques locales s'ils disposaient d'une force militaire sur le territoire, ce qui est la face cachée de la lune trumpiste.
En d'autres termes, l'assurance-vie politique pour le madurisme serait une sorte de « roulette russe ». Le prolongement de son séjour au pouvoir, dans un scénario comme celui-ci, impliquerait l'abandon définitif de son discours idéologique et la mutation vers de nouveaux récits plus proches des gringos. En d'autres termes, une édition créole d'Ahmed al Sharaa, ancien terroriste recherché, aujourd'hui allié des Américains, reçu par Trump après avoir rompu avec son passé djihadiste.
L'autre alternative consiste à radicaliser sa rhétorique pseudo-idéologique, dans l'espoir de reproduire l'expérience de Cuba, qui est resté au pouvoir pendant des décennies. Mais ce n'est pas le cas du madurisme, ni dans la structure de classes du gouvernement vénézuélien, étant donné son désir de consolider une nouvelle bourgeoisie, qu'il ne représente pas seulement, mais dont il fait partie intégrante. Cet intérêt de la classe néo-bourgeoise exige la construction d'un avenir où elle pourra utiliser et profiter de la richesse accumulée (par le madurisme), continuer à accumuler et faire partie du modèle d'accumulation rentière de l'économie vénézuélienne.
Le madurisme n'a pas de vocation suicidaire, mais un attachement au pouvoir pour continuer à accumuler des richesses. Ce qui semble ne pas avoir encore été réalisé, c'est la mise en place d'une formule de transition qui inspire confiance et rassure les Américains. Si le processus de construction de cette mutation n'est pas suffisamment rapide, cela pourrait précipiter une agression militaire américaine sous toutes ses formes et dans toutes ses possibilités réelles.
Pour couronner le tout, ces dernières semaines ont été marquées par des changements dans la géopolitique maduriste. Le Nouveau Parti démocratique (NDP) de Saint-Vincent-et-les-Grenadines vient de battre le Parti travailliste uni (ULP) de Ralph Gonsalves, allié du madurisme. Au Honduras, tout indique que la candidate du zeyalisme, Rixi Ramona Moncada Godoy, perdra les élections qui se tiendront le dimanche 30 novembre : c'est un revers pour le madurisme. Le MAS bolivien, autre allié du madurisme, a été pratiquement pulvérisé lors des dernières élections. D'autre part, le spectre des identités gouvernementales avec le madurisme se reconfigure. Lula et Petro restent distants, réclamant plus de démocratie pour le Venezuela, tandis que la candidate progressiste au Chili, Jannette Jara (du Parti communiste), qualifie le madurisme de dictature.
Pour couronner le tout, le maire nouvellement élu de New York, Mamdani, a déclaré que Maduro était un dictateur et que sa vision du socialisme était radicalement différente d'expériences telles que celle-ci.
Mais le labyrinthe du madurisme n'est pas idéologique, mais pragmatique. La question est de savoir s'il parviendra à trouver la formule qui lui permettra de se maintenir au pouvoir, avec l'accord tacite des États-Unis.
MCM-EGU : le leadership n'est pas synonyme de capacité à gouverner
Le leadership de María Corina Machado (MCM) est indéniable, tout comme celui dont bénéficie Edmundo González Urrutia (EGU), un personnage absolument opaque et secondaire. Il est incontestable que MCM a réussi, lors des élections présidentielles de 2024, à rassembler des voix qui dépassent l'influence classique de l'opposition de droite au chavisme et au madurisme. Même une partie importante de ceux qui continuent à revendiquer le chavisme, ainsi que des secteurs de gauche lassés de la dérive autoritaire de Maduro, ont fini par voter pour EGU, non pas parce qu'ils étaient devenus des électeurs de droite, mais comme un moyen de permettre le changement face au désastre maduriste. La gauche qui a conservé son indépendance vis-à-vis du madurisme et du maricorinisme était minoritaire, et je le souligne non pas parce que cela rend ce secteur moralement supérieur, mais pour mettre en évidence la tragédie politique du moment.
Le problème est que MCM-EGU envisage une transition à la manière de Tomas de Torquemada, en lançant une inquisition politique contre ceux qui ont participé dans un passé récent au chavisme - qu'il ne distingue pas du madurisme -, le mouvement social qui revendique la Constitution de 1999 et toute la hiérarchie militaire. Cela est impossible à réaliser sans une guerre civile interne. D'autre part, son programme illibéral – tel qu'il l'a exprimé dans son programme gouvernemental de 2023[3] – prévoit la poursuite des politiques anti-ouvrières initiées par Maduro, en y ajoutant des processus d'intégration du capital local dans la dynamique de financiarisation, sans qu'aucun signe ne laisse présager une période de reprise des conditions de vie matérielles de la population. Sa recette du libre marché part du principe que cela rendra tout le monde prospère. Dans une éventuelle situation post-maduriste, cela générerait une terrible frustration sociale, qui se traduirait par une instabilité et une gouvernance précaire de sa part.
Cela est tellement évident que cela semble s'inscrire dans la ligne des intérêts américains de consolidation de leur influence politico-militaire dans le pays, avec la formation de dirigeants et de représentants parfaitement alignés sur leurs objectifs stratégiques. Le chaos post-maduriste que générerait MCM-EGu est tout à fait fonctionnel à la logique néocoloniale américaine au Venezuela.
Combien de temps durera la transition qui permettra d'atteindre une stabilité minimale dans le pays, en rétablissant les conditions matérielles de vie de la classe ouvrière et les libertés politiques pour son organisation ? Telle est la question qui nous intéresse. Mais cela ne se fera pas de manière passive, mais avec organisation, en abandonnant les illusions sur la bourgeoisie post-maduriste et les troupes américaines, en nous préparant à la lutte.
Scénarios simplifiés
Tout ce qui précède configure plusieurs scénarios que nous aborderons de manière simplifiée.
Scénario 1 : les États-Unis lancent une invasion classique à court terme (moins de trois mois). Le nombre de militaires disponibles à l'heure actuelle est insuffisant pour mener une opération de ce type dans un pays au relief si accidenté, aux frontières si étendues et où la résistance organisée est possible. Une opération de ce type serait longue, épuiserait l'administration Trump et susciterait le rejet en Amérique latine et aux États-Unis mêmes. Les risques de défaite américaine seraient très élevés. Hautement improbable.
Scénario 2 : Les États-Unis attaquent par voie aérienne les infrastructures de pouvoir au Venezuela, qu'ils accusent de servir de soutien au trafic de drogue. Cela inclurait certaines installations militaires. Objectif : semer la terreur parmi la population, diviser les forces armées et provoquer un changement interne à la tête du régime politique, ce qui faciliterait le début d'une transition négociée, supervisée politiquement et militairement par les États-Unis. Le leadership de María Corina Machado (MCM) et Edmundo González Urrutia (EGU) n'aurait qu'une utilité transitoire. Objectif final : installer des bases militaires au Venezuela, garantir militairement le contrôle du pétrole vénézuélien, de la production d'or et de terres rares, et mettre en place une façade militaire américaine dans cette région du sud des Caraïbes. Ce scénario serait hautement improbable car le madurisme est un système de relations hiérarchiques fortement soudé par des intérêts communs, et tous savent qu'une division finirait par les anéantir tous.
Scénario 3 : les États-Unis combinent opérations psychologiques, manipulation médiatique et opérations militaires ciblées pour provoquer une révolte populaire anti-Maduro qui justifierait une opération militaire américaine à grande échelle en « soutien à la démocratie ». Il pourrait par exemple signaler que Maduro a transféré son centre de commandement dans un quartier populaire (Petare, La Vega, El Valle, ou autre) et mener des actions militaires ciblées dans ce secteur, causant des pertes civiles. l'objectif serait que la population, lassée de la situation économique, de la précarité du système de santé, du problème salarial et de l'impact de la forte migration sur le noyau familial, descende dans la rue pour demander la démission de Maduro, avec pour slogan « nous avons assez souffert et maintenant vous nous tuez : démissionnez ! ». Le chaos prolongé servirait ses objectifs (modèle Haïti), la transition démocratique sous la direction du MCM-EGU n'étant qu'un prétexte et sa durée serait brève en raison des problèmes de gouvernance. L'objectif final resterait le même : installer des bases militaires sur le sol vénézuélien, contrôler directement la production pétrolière et disposer d'une présence militaire stratégique dans le sud des Caraïbes. Probabilité moyenne.
Scénario 4 : Les États-Unis lancent des attaques ciblées contre des objectifs militaires et politiques au Venezuela, à l'instar des récentes attaques en Iran. L'objectif est d'éliminer une partie des dirigeants maduristes afin de provoquer la capitulation de l'alliance civico-militaire-policière du madurisme ou le début certain d'une transition à court terme. Cela risquerait d'être rejeté par l'opinion publique américaine et mondiale en raison des dommages collatéraux en vies humaines et de la possibilité que le régime ne se rende pas. La transition serait précédée du déploiement de forces militaires américaines sur le territoire (ce qui ouvrirait le chapitre des bases militaires) sous prétexte de garantir le retour à la démocratie, mais dans le but de contrôler l'accès et l'utilisation des richesses naturelles vénézuéliennes (pétrole, or, terres rares) et de consolider leur présence géostratégique dans le sud des Caraïbes. La probabilité à court terme (avant 3 mois) est moyenne, mais possible dans plus de trois mois car elle devrait s'accompagner d'une décision politique unifiée au Congrès américain, ce qui ne semble pas envisageable à court terme.
Scénario 5 : Déstabilisation interne par l'activation des services de renseignement américains sur le territoire vénézuélien ; générer des mobilisations et le chaos pour favoriser une version latino-américaine du printemps arabe. Cela justifierait une intervention militaire directe – ultérieure – pour soutenir le rétablissement de la démocratie. L'objectif final est le même : déployer des forces militaires permanentes sur le territoire vénézuélien. Le problème pour ce scénario est que l'alliance civico-militaire-policière du madurisme a mis en place un appareil et un réseau de contrôle et de répression sociale efficaces, qui ont instauré la peur dans la population afin qu'elle ne soit pas emprisonnée, ce qui limite la disposition de la population à descendre dans la rue : en outre, le secteur le plus rebelle de l'opposition et la jeunesse qui protesterait dans les rues se trouvent actuellement en situation de migrants, hors du pays. Efficacité impossible à prévoir. Probabilité faible.
Scénario 6 : Négociation réussie entre l'administration Trump et le gouvernement Maduro qui évite les actions militaires sur le territoire vénézuélien. Dans ce cas, le madurisme décide d'autoriser l'installation de bases militaires américaines au Venezuela, sous la forme d'un mémorandum de collaboration pour la lutte commune contre le trafic de drogue, tout en s'engageant à une transition démocratique ordonnée dans les deux à trois prochaines années. Le point d'honneur pour les États-Unis est l'autorisation du déploiement militaire américain au Venezuela. L'effet secondaire serait le dépassement du duo MCM-EGU à la tête de la transition, avec la construction d'un nouvel axe d'ouverture démocratique dans l'opposition (un leadership construit à partir de l'opposition qui dialogue avec le gouvernement, appelée « alacranes »), garantissant au madurisme qu'il n'y aura pas de persécutions. Le problème dans ce cas serait pour le madurisme, qui devrait accepter que son éviction du pouvoir soit désormais sérieuse, ce qui impliquerait une réorganisation des rapports de force (au sein du madurisme et avec les oppositions) pour rendre l'accord possible. Probabilité élevée.
Scénario 7 : La combinaison des scénarios précédents, pour produire un changement de régime politique en 2026. Ce scénario nécessiterait au moins trois mois pour être viable, son lancement serait donc prévu à partir de février-mars 2026. Pour ce scénario, le moment idéal serait après les élections en Colombie, où l'on aspire à évincer le progressisme, créant ainsi les conditions pour la création d'une force multinationale qui interviendrait depuis la frontière néogranadine avec le soutien aérien et balistique des États-Unis. L'objectif final serait de déployer des forces militaires américaines permanentes sur le sol vénézuélien. La probabilité à court terme est faible à moyenne. Scénario 8 : une attaque sous faux pavillon contre des cibles militaires ou civiles américaines, qui unifierait le bloc politique américain, pour le lancement d'opérations ciblées à court terme. Dans ce cas, l'objectif serait de favoriser la chute rapide du madurisme, afin de gagner du temps pour préparer les conditions d'une intervention avec une force multinationale à moyen terme. Probabilité moyenne.
Scénario 9 : maintenir le siège pendant les trois prochains mois, avec une escalade de la guerre psychologique et technologique, afin d'épuiser le madurisme et d'amorcer une transition négociée, incluant le déploiement de forces militaires sur le territoire vénézuélien. Probabilité moyenne.
Scénario 10 : maintien de la situation actuelle pendant quelques mois supplémentaires, dans le but de créer les conditions politiques (consensus au Congrès américain), militaires (constitution d'une force multinationale) et économiques (asphyxie totale de l'économie vénézuélienne) permettant le développement d'opérations à plusieurs niveaux pour le déplacement du madurisme. MCM et son prix Nobel joueraient un rôle central de transition dans cette stratégie, bien que remplaçables à moyen terme. Scénario très probable.
Scénario 11 : Trump se retire sans gloire. Dans ce scénario, les États-Unis démobilisent l'infrastructure militaire déployée depuis août, sous n'importe quel prétexte. Cela serait interprété comme une victoire du madurisme qui lui permettrait de consolider son pouvoir. Probabilité très faible.
Scénario 12 : Les États-Unis interviennent au Venezuela et se heurtent à une résistance armée, consciente de la nécessité d'une lutte populaire prolongée. Ce scénario serait irréalisable car la majorité de la population attribue la responsabilité de sa situation matérielle aux erreurs du gouvernement maduriste. Cette possibilité est très faible.
Ces douze scénarios sont hypothétiques et ont été élaborés à partir d'informations multi-référencées existantes. Un facteur peut évoluer dans une autre direction, modifiant ainsi les possibilités de chaque scénario. C'est pourquoi le suivi des scénarios doit être quotidien.
Anti-impérialisme et culture de la paix
On peut avoir de multiples divergences de différentes natures avec le gouvernement de Nicolas Maduro et le madurisme, mais ces divergences ne peuvent servir à justifier une intervention américaine sur le sol vénézuélien. En ce sens, les forces progressistes, démocratiques, nationalistes, populaires et socialistes du continent et du monde doivent dénoncer les tentatives de l'administration Trump de violer la souveraineté. Une attaque militaire contre le Venezuela est une attaque contre la souveraineté de toute l'Amérique latine.
Nous devons combiner cela avec la dénonciation du caractère antidémocratique, anti-ouvrier et néolibéral du gouvernement Maduro, qui tient un discours de gauche. Le madurisme et Maduro ne sont ni socialistes ni révolutionnaires, ils so

Pour soutenir le docteur Amir Khadir
Pourquoi donc le docteur Amir Khadir vient-il d'être radié par le conseil de discipline du collège de médecins du Québec, en écopant d'une interdiction de pratiquer la médecine de 6 mois ? Officiellement, c'est parce qu'il n'a pas respecté son engagement de ne pas prescrire d'antibiotiques pour plus de 28 jours à des patients atteints de la maladie de Lyme sauf si c'est dans le cadre d'un projet de recherche. Mais n'y a t-il pas autre chose ?
En fait, plutôt que de juger cette sanction comme sévère, ne devrait-on pas la considérer comme tout à la fois déplacée et injuste ? Et cela, en raison du soutien décidé et quasi inconditionnel de ses patients et de l'Association qui les défend, mais aussi au regard du nécessaire appui que les patients atteints de la forme chronique de la maladie de Lyme devraient recevoir des institutions de santé et du gouvernement du Québec.
Il est vrai qu'il y a quelque chose de difficile à comprendre dans cette histoire, à moins d'oser aller sur le fond.
Aller sur le fond
Aussi faut-il d'abord partir du contexte dans lequel toute cette histoire se déroule, et tenir compte du personnage même du docteur Khadir. On le sait : au nom des valeurs d'égalité sociale qui lui sont chères, l'homme va de l'avant et n'a jamais hésité dans le passé à prendre des risques pour courageusement les défendre, suscitant bien souvent des réactions frileuses ou conservatrices à son égard. À preuve, son rôle particulièrement remarqué comme porte-parole à QS entre 2010 et 2018, puis à partir de 2018, son engagement corps et âme, à la demande de l'Association québécoise des patients de la maladie de Lyme, auprès des malades atteints de cette maladie peu connue.
Et puis pour vraiment comprendre, il faut aussi tenir compte des avancées des sciences médicales. Comme toute entreprise rationnelle digne de ce nom, ces sciences ne sont au bout du compte qu'une série d'erreurs rigoureusement rectifiées, ce qui veut dire qu'elles évoluent, elles aussi, et que leurs vérités d'hier peuvent se muer en faussetés pour l'aujourd'hui.
L'existence d'un syndrome de la maladie persistant
Ce n'est que depuis une quinzaine d'années —et notamment suite à des pressions d'associations de malades— que des institutions médicales états-uniennes reconnues ont admis qu'il pouvait exister « un syndrome de la maladie de Lyme persistant », tout comme des traitements longs par antibiotiques pour la soigner ou pour le moins en atténuer certains symptômes ; informations confirmées depuis par le guide de l'institut national d'excellence en santé et en services sociaux (INESSS) de 2021 [1] . Il est vrai que cela allait à l'encontre d'études et d'un guide de référence états-unien célèbre élaboré il y a 20 ans (celui de la Infectious Desease society of America), qui néanmoins rappelait déjà à l'époque –la nuance est importante— que les données dont la science disposait ne permettaient pas de « statuer » dans le sens ou non de la chronicité de cette maladie. Ce qui, dans les faits, permettait à un médecin, et avec l'accord acquis du patient traité, certaines ouvertures. Ce dont s'est servi le docteur Khadir, en ne manquant pas d'en décider avec ses patients et de s'appuyer sur les dernières avancées en la matière, avec à la clé, et depuis 2020, des résultats vérifiés extrêmement encourageants selon tous les barèmes médicaux en vigueur.
Le sensationalisme médiatique
Il n'en fallut pas plus cependant pour que certains —mal informés— aient opté pour le sensationnalisme médiatique et tenté de lui faire un mauvais procès. En surfant un peu trop rapidement sur ces données à la fois complexes et en évolution constante, ils ont voulu insinuer qu'il y avait là un soi-disant manquement flagrant à l'éthique médicale, en écornant au passage la figure publique progressiste qu'il représentait.
C'est tout au moins ainsi qu'on pourrait interpréter l'utilisation médiatique du balado d'Olivier Bernard (reposant sur des données scientifiques dépassées), ou encore les articles dans la Presse d'Isabelle Hachey qui en reprend la substance, sans même parler de la prestation si étonnamment hargneuse de Marie-Louise Arsenault sur Radio-Canada quand elle l'a interviewé.
Cela évidemment n'invalide en rien le fait qu'Amir Khadir n'ait pas respecté un accord qu'il avait signé avec le Collège des médecins et qu'il concevait comme conjoncturel, justement –oh ironie— dans le but de se protéger de telles incompréhensions. Pourrait-on néanmoins dans cette affaire aller sur le fond, et mettre plutôt de l'avant le formidable travail d'avant-garde médical qu'il a accompli pour aider les personnes atteintes de la maladie de Lyme à affronter, non sans succès, les affres de cette maladie ? N'est-ce pas cela qui devrait avant tout compter ?
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L’indépendance sans le PQ : mission impossible ?
Les propos de Michel David reflètent bien l'ambiguïté (sciemment entretenue par certains souverainistes) qui règne concernant la question nationale chez QS et, de façon plus large, à l'intérieur des rangs d'une gauche assumée comme telle, en particulier quant aux conditions de possibilité et sa vision d'un Québec Indépendant.
Le chroniqueur lance un ultimatum aux indépendantistes de toute allégeance : la souveraineté se fera avec le PQ ou ne se fera pas ! Conséquemment, peu importe la teneur socio-politique, économique et culturelle derrière ce projet, il faut y adhérer sous peine d'être accusé de jouer le jeu des fédéralistes qui, comme on le sait, prennent un malin plaisir à mettre les batons dans les roues à tout projet émancipateur du Peuple québécois, qu'il soit interne ou externe aux structures actuelles du fédéralisme !
De fait, cette attitude rigide, voire « sectaire » réduit d'emblée les alternatives possibles au programme du PQ pour les prochaines élections et la tenue d'un éventuel référendum. David (comme bien d'autres souverainistes plus ou moins à droite) opère un strict clivage entre la question nationale et la question sociale, ce que refuse de faire la gauche (tout comme plusieurs Solidaires) pour des raisons à la fois politiques et éthiques. L'indépendance, comme tout projet d'envergure de cet ordre, peut être instrumentalisée à des fins moins vertueuses, en l'occurrence « identitaires », « chauvines » et parfaitement « réactionnaires ». Les propos de PSPP sur les immigrants et un futur Québec soi-disant « prospère » ont eu l'effet d'une douche froide sur bien des citoyens qui seraient favorables à la souveraineté mais pas à n'importe quelle condition. Et il ne s'agit aucunement d'une phobie, d'un sabotage ou d'une quelconque hostilité nourrie délibérément envers le PQ comme l'affirme gratuitement Michel David ; tout simplement, la manifestation d'un esprit « critique » qui s'avère tout à fait nécessaire en ces temps de xénophobie péquiste et caquiste parfaitement revendiquée.
Les indépendantistes non-péquistes ont raison de se méfier d'un projet de souveraineté mené de l'avant par un politicien comme PSPP (qui rappelle un peu Marissal par son côté un tantinet « opportuniste »), non pas par aversion innée pour l'aspiration du Québec à sa pleine autonomie (politique, sociale et économique) mais compte-tenu du fait que le chef actuel du PQ s'inscrit d'emblée dans la mouvance « nationaliste identitaire » qui a pris son envol à la faveur de la crise des accommodements raisonnables en 2006. Déjà en 1995, Parizeau (un « bonze » du souverainisme rationnel, économique, libéral) s'est évertué à s'aliéner (lui et les leaders péquistes à lui succéder) pour de bon les Québécois issus de l'immigration avec son constat pour le moins « maladroit » sur les causes de la défaite référendaire. Marois en a rajouté une couche avec sa Charte des valeurs et J.-F. Lysée a couronné le tout en mettant en garde les Québécois (les « vrais », les Québécois « de souche ») contre la menace que représenterait un environnement constitué de femmes voilées autour de nos écoles publiques !
Il faut faire preuve d'un aveuglement volontaire pour continuer à sous-estimer, comme le fait Michel David, cette dimension identitaire devenue centrale au PQ et qui explique les réticences « justifiées » de la base militante de QS quant à une éventuelle collaboration avec le parti de PSPP aux prochaines élections ou pour lutter à ses côtés dans le camp du « Oui », advenant la tenue d'un troisième référendum (ce qui n'est pas encore fait). Tout comme il est parfaitement démagogique d'affirmer que : « Si le PQ et la CAQ persistent à miser sur l'insécurité des Québécois en présentant les immigrants comme une menace pour le français et comme un poids insupportable sur les services publics, c'est que cela trouve un écho dans l'électorat. »1
Il s'agit là de l'argument préféré des populistes d'extrême-droite : « Ce n'est pas nous qui sommes xénophobes ou inquiets des retombées de l'immigration, c'est le Peuple. En bons démocrates que nous sommes, on ne fait que répondre à la demande de sécurité des citoyens ! » Comme si l'« offre » politique ne jouait aucun rôle dans l'opinion publique, comme si les manœuvres politiciennes qui consistent à détourner le regard de l'électorat des vrais enjeux (sous-financement des programmes sociaux, allégements fiscaux des plus riches, gaspillage d'argent public dans des projets « broche-à-foin », déni de diverses crises dont les gouvernements sont en bonne partie responsables : crise du logement, crise de l'environnement, perte de confiance populaire dans les Institutions parlementaires et la démocratie libérale, survalorisation du privé au détriment du public, relations incestueuses entre le Québec inc et les élus) vers de faux enjeux (immigration soi-disant « massive », « capacité » d'accueil jamais exactement chiffrée, incompatibilité naturelle, voire « génétique », entre les différentes cultures, prosélytisme volontaire et malveillant des immigrés arabo-musulmans) ne contribuaient pas à maintenir au pouvoir une caste de dirigeants dont l'incompétence et la partisanerie ne s'étaient jamais observées de façon aussi éclatante depuis les plus belles heures de l'Union Nationale à l'époque de Maurice Duplessis.
« L'Indépendance à tous prix » semble scander les chroniqueurs du Devoir, en phase avec les souverainistes qui tournent autour du PQ comme la lune autour de la terre, ne pouvant résister à sa force gravitationnelle : « Faire du Québec un pays est sans doute le meilleur moyen — et même le seul — d'[e] parvenir [à dissiper cette insécurité]. »2 Est-ce si sûr ?
N'y a-t-il pas une part de pensée magique dans cette affirmation tellement de fois répétée qu'elle en devient redondante ? Avons-nous la capacité, en tant que Québécois « de souche », de nous mettre, ne serait-ce qu'un instant, dans la peau d'un Québécois issu de l'immigration (récente ou moins récente) qui observe la scène politique et voit les Legault, Boulet, Roberge, PSPP faire des amalgames (plutôt obscènes) entre problèmes sociaux « chroniques » et immigration qu'on dit « incontrôlée » (ce qui est évidemment faux — ce sont des choix politiques qui ont été faits, entre autre, pour accommoder les patrons d'entreprises en manque de main d'œuvre, ce qui n'est pas, en soi, une mauvaise raison) ?
Qu'adviendrait-il de ce Québec « inclusif » qu'aurait déjà défendu PSPP s'il s'avérait qu'un polémiste xénophobe et réactionnaire comme Mathieu Bock-Côté (MBC) devenait un jour Ministre de l'Immigration (des Communautés culturelles et de l'« Inclusion ») dans un éventuel gouvernement péquiste ? MBC qui appuie ouvertement la candidature d'Éric Zemmour à la présidentielle française, dont un des projets les plus délirants consiste à renvoyer dans leur bled respectif les « citoyens » de la République issus de l'immigration (non seulement les nouveaux arrivants mais aussi ceux des deuxième et troisième générations — donc des « citoyens » français à part entière puisque nés sur le sol français).
Ce n'est pas de la science-fiction mais simplement l'éventail des possibles advenant une souveraineté administrée par des nationalistes qui se croiraient autorisés à passer outre tout ce qu'ils associeraient, de près ou de loin, à tort ou à raison, à du multiculturalisme dont le Québec se serait débarrassé en quittant le Canada et sa Charte des droits et libertés qui aurait entravé l'aspiration des Québécois à leur pleine émancipation. N'en déplaise aux journalistes qui attendent avec impatience un nouveau référendum, le PQ n'a pas le monopole de l'idée, de la mouvance et du processus politiques qui mèneraient à l'Indépendance, d'autant plus qu'il n'a jamais été un parti « indépendantiste » (au sens fort) mais un parti « souverainiste » qui tient à garder un lien économique fort et étroit avec le reste du Canada (ROC) afin de rassurer les marchés, le milieu des affaires et la classe capitaliste en général. Reste à savoir si le ROC acceptera de jouer le jeu dans lequel il pourrait avoir l'impression d'être le dindon de la farce.
Mario Charland
Shawinigan
Notes
1. Le Devoir, jeudi 11 novembre, 20205. C'est moi qui souligne.
2. Ibid.C'est moi qui souligne.
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Une autre victime évitable ?
MONTRÉAL - 11 décembre 2025 - Le 10 décembre 2025, nous avons appris qu'une femme a été tuée dans le cadre d'une intervention policière à fort déploiement à Saint-Hyacinthe. Selon les informations disponibles, la femme était connue des services policiers et vivait d'importants enjeux de santé mentale et de toxicomanie.
Une autre victime évitable ?
Le Collectif de défense des droits de la Montérégie (CDDM) et l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale (AGIDD-SMQ) soulèvent des enjeux relativement au décès d'une femme, tuée dans le cadre d'une intervention de crise, à Saint-Hyacinthe.
Bien que les détails complets de l'intervention demeurent pour le moment limités, tout indique qu'elle se trouvait en situation de crise au moment de l'arrivée des policiers et qu'elle brandissait un couteau. Dans un tel contexte, le CDDM reconnaît qu'une intervention rapide des agents de la paix, responsables de la sécurité de toutes les personnes présentes, était légitime.
Néanmoins, David-Alexandre Grisé, coordonnateur du CDDM, questionne les dispositifs et les pratiques accomplies dans le cadre de ce type d'intervention : « Quelles sont les pratiques et les modalités d'interventions policières devant un cas de figure manifestement profilé « santé mentale » ? Est-ce que le profilage de la dame a teinté ou biaisé l'intervention des agents impliqués ? Est-ce que des intervenants de crise ont été mobilisés dans ce cadre et ce contexte d'urgence ? Est-ce que des organisations en intervention de crise existent ou sont suffisamment financées pour y participer dans la région maskoutaine ? Est-ce que des équipes mixtes ou des pratiques de collaborations sont établies entre des services d'aide en situation de crise (SASC) et les forces de la Sûreté du Québec à Saint-Hyacinthe et dans les environs ? »
« Si la mort de la sergente Maureen Breau et d'Isaac Lessard-Brouillard a suscité le désarroi en 2023, ce énième décès doit nous servir de catalyseur et nous sensibiliser sur le besoin de bonifier des pratiques d'interventions alternatives à la présence des forces de l'ordre, ou du moins, minimalement différenciées et complémentaires entre les forces policières et les services d'intervention de crise au Québec » clame Nancy Melanson de l'AGIDD-SMQ.
Comme en témoigne la récente étude de l'Institut québécois de réforme du droit et de la justice (IQRDJ), « la collaboration des policiers et des intervenants SASC est centrale dans l'application de la P-38. Bien que leurs fonctions diffèrent, les deux groupes se retrouvent
à l'avant-plan des interventions en situation de crise, souvent en collaboration. Les policiers insistent sur leur mandat de sécurisation et expriment, pour plusieurs, un malaise face à des interventions qu'ils considèrent en marge de leur rôle traditionnel. À l'inverse, les intervenants SASC affirment leur compétence spécifique en matière de désescalade et d'évaluation psychosociale, tout en reconnaissant l'importance du soutien policier en contexte de dangerosité ».[1]
« Étant donné les multiples témoignages des personnes premières concernées, il est donc pressant de tenir compte des malaises et doléances qu'elles ont émis maintes fois en rapport avec les interventions de crise. Si cette loi et ces interventions sont appelées à se réformer, souhaitons que cette transformation soit aussi muée par l'écoute de la parole concertée et le vécu traumatique commun de ceux et celles qu'elle doit servir et protéger » réclament d'un commun accord M. Grisé et Mme Melanson.
[1] Source :
https://iqrdj.ca/wp-content/uploads/2025/10/Rapport-4.-P-38-Enquete-qualitative.pdf
[1]
[2] www.cddm.qc.ca [2]
[3] www.agidd.org [3]
Les opinions exprimées dans ce communiqué de presse sont uniquement celles de l'expéditeur et ne reflètent pas nécessairement celles d'Cision.
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Hausse record de 25 % du loyer moyen dans Limoilou
Québec, le 12 décembre 2025 : Un rapport de la SCHL nous apprend cette semaine que le taux d'inoccupation des logements augmente au Québec, indiquant pour plusieurs un indice de « sortie de crise ».
À Québec, le taux d'inoccupation tous logements confondus a atteint 2,4%, nouvelle qui a été hautement saluée par l'administration Marchand, se félicitant d'avoir construit un nombre « record » d'unités de logements cette année. Or, on constate sur le terrain des hausses fulgurantes du prix des loyers, malgré cette augmentation du taux d'inoccupation. La Table citoyenne Littoral Est et le FRAPRU mettent en garde la population et les élu.es : la crise vécue par les locataires n'est pas terminée et celle de l'inabordabilité empire.
Portrait de la situation
Dans le secteur de Limoilou, toutes typologies confondues, le loyer moyen a augmenté de
24,6% en 1 an seulement. C'est plus du double de la hausse du loyer moyen à l'échelle de
la ville déjà énorme. Le loyer moyen pour un 4 et demi a atteint 1124$ par mois cette année, ce qui représente une hausse record de 28,3% depuis l'an dernier, malgré que le taux
d'inoccupation ait atteint 3% pour le secteur. Ce taux élevé ne doit pas invisibiliser la crise de l'inabordabilité des logements avertissent les groupes. En effet, à l'échelle de la région
métropolitaine de Québec, on constate que le taux d'inoccupation des logements les moins chers (premier quartile) est autour du 1% alors qu'il s'élève à 4,9% pour les logements les
plus coûteux (quatrième quartile). La Table citoyenne Littoral Est est catégorique : « le
problème c'est que les constructions neuves et inabordables influent à la hausse sur les prix du marché, ce qui accélère la cherté des logements et la gentrification de nos quartiers » dénonce Azélie Rocray, coordonnatrice du groupe.
À l'heure actuelle, l'augmentation du prix des loyers dépasse largement l'augmentation des revenus de la majorité des locataires, qui doivent se rabattre sur des logements toujours
plus inabordables pour se loger, déplorent les groupes de défense du droit au logement. «
Lors du dernier recensement, un ménage locataire sur 5 dans Limoilou payait plus de 30% de ses revenus pour se loger. Avec le phénomène de gentrification et de raréfaction
incessante des logements correspondant à leur capacité de paiement, on craint que la situation se soit considérablement empirée depuis » déplore Azélie Rocray.
Une Crise de l'inabordabilité
La construction massive de logements privés inabordables ne garantit pas une éventuelle
sortie de la crise du logement, dans le contexte actuel de marchandisation accrue de
l'immobilier. Pour assurer une sortie de crise, les gouvernements doivent mettre en place un mécanisme rigoureux de contrôle du prix des loyers et investir massivement dans le
logement social. « Aucune autre formule que le logement social ne permet de répondre à la fois à l'inabordabilité des loyers et aux besoins réels des locataires comme des
communautés. Ce n'est pas une dépense, mais bien un investissement collectif », rappelle
Véronique Laflamme.
Concrètement, la Tables citoyenne et le FRAPRU demandent au gouvernement québécois :
● De nouveaux investissements substantiels et récurrents, permettant le financement
pluriannuel d'au moins 10 000 logements sociaux et communautaires par année.
● La mise en place de véritables programmes de logement social capables de
répondre à la crise de l'inabordabilité.
La Table citoyenne, comme les autres membres du FRAPRU à Québec, demandent à la
Ville de Québec de doubler son objectif annuel et de réaliser au moins 1 000 logements
sociaux et communautaires par année. Que les terrains et les fonds publics municipaux
destinés à la réalisation de logements sociaux « et abordables » ne servent qu'à des projets sans but lucratif et que l'octroi de tous fonds publics municipaux destinés à la réalisation de logements qualifiés d' « abordables » soient conditionnels à ce que le prix des logements ne dépassent pas les seuils établis dans le Programme d'habitation abordable Québec (PHAQ), avec des loyers moins chers que le loyer médian du marché. Dans le contexte où le gouvernement Legault impose de plus en plus aux projets sans but lucratif d'inclure des logements plus chers, les groupes demandent à l'administration Marchand de refuser les pressions de Québec en ce sens et de défendre plutôt le droit des locataires de Québec d'avoir accès à un logement décent.
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CISO a 50 ans – Quel avenir pour la solidarité internationale ?
Dans un contexte mondial marqué par le repli sur soi, il est légitime de s'interroger sur la place et l'avenir de la solidarité ouvrière internationale. Comment préserver, mais surtout renforcer ces liens à une époque où les dynamiques de fragmentation se multiplient ? C'est dans cette perspective qu'a été organisée une journée de réflexion par le CISO — retour sur un événement riche en idées et en échanges.
9 décembre 2025 | https://alter.quebec/quel-avenir-pour-la-solidarite-internationale/
Depuis près d'un demi-siècle, le Centre international de solidarité ouvrière (CISO) œuvre à sensibiliser et à éduquer les travailleuses et travailleurs sur les réalités internationales qui façonnent leurs luttes.
Cette journée a rassemblé une centaine de personnes issues de divers milieux. Parmi celles-ci figuraient notamment Louise Harel, une figure politique marquante du Québec, et Haroun Bouazzi, député à l'Assemblée nationale. Plusieurs invité.es et panélistes étaient également présents, dont Geneviève Dorais, professeure au Département d'histoire de l'UQAM ; Benedicto Martínez Orozco, représentant du Frente Auténtico del Trabajo (FAT) au Mexique ; Chris Dols du Federal Unionists Network (FUN) aux États-Unis ; ainsi que Yvel Admettre, secrétaire général de la Confédération des travailleuses et travailleurs des secteurs publics et privés (CTSP) en Haïti.
Un laboratoire de solidarités ouvrières
Fort de ses cinq décennies d'expérience, le CISO est devenu un véritable « laboratoire » de solidarités ouvrières. Ses pratiques et ses démarches permettent aujourd'hui de mieux comprendre les mécanismes favorisant l'émergence et la consolidation de solidarités internationales.
Selon Geneviève Dorais, les pratiques du CISO éclairent une vision fondée sur des responsabilités partagées et sur l'interdépendance entre solidarité internationale et avancement des droits. De son analyse émergent trois axes fondamentaux pour soutenir une solidarité ouvrière internationale durable :
L'éducation à la citoyenneté mondiale ;
La création de coopérations par le dialogue
Le développement durable d'actions concrètes par et pour les travailleurs/travailleuses.
Axe 1 – Éduquer pour comprendre, la base d'une solidarité
L'éducation constitue la première étape incontournable. Pour qu'une personne s'intéresse à l'internationalisme ou s'y investisse, elle doit d'abord comprendre les raisons qui rendent cet engagement nécessaire.
Faire connaître les enjeux internationaux liés à chaque secteur d'activité permet aux travailleuses et travailleurs de saisir les liens qui les unissent à leurs homologues ailleurs dans le monde. Dans un contexte de mondialisation des entreprises, cette compréhension globale devient essentielle : elle permet d'échanger des connaissances, de reconnaître des problèmes communs et de comprendre pourquoi la création de liens internationaux renforce les luttes, mais aussi permettent le maintien ou l'avancement des conditions et des droits, ici comme ailleurs.
Axe 2 – Le dialogue l'ingrédient créateur de coopération
Comment créer ces liens et faire naître cette solidarité ? Par le dialogue. La coopération ne peut exister sans échanges, sans écoute, sans compréhension mutuelle.
Les occasions sont multiples : conférences, ateliers, observatoires, webinaires, assemblées générales, rencontres militantes, etc. Ces espaces ne sont pas que syndicaux ou communautaires : ce sont de véritables lieux d'éveil politique où l'on vit des émotions fortes. Ils sont essentiels pour tisser des liens, susciter l'ouverture et éveiller la conscience sociale.
En nourrissant ce dialogue, on fait naître l'engouement pour la solidarité internationale. Chaque échange devient une pierre ajoutée à la construction d'une coopération durable.
Axe 3 – Développer du concrets, le présage d'un engagement durable
Vient ensuite le troisième axe : la mise en œuvre d'actions concrètes par et pour les personnes qui font vivre cette solidarité. Ces initiatives permettent non seulement de cultiver l'ouverture, mais aussi de renforcer le rapport de force des travailleuses et travailleurs à l'échelle internationale.
Ce succès repose sur deux éléments :
- La multiplication du sens de la solidarité par l'éducation et la politisation, un milieu de travail à la fois ;
- La possibilité d'effectuer des stages internationaux, où l'expérience vécue — l'émotion — devient un puissant moteur d'engagement.
La convergence des luttes : l'illustration de cette journée
Au cours de la journée, les panélistes ont présenté des luttes internationales au seindesquelles des solidarités se sont créées, transformées ou renforcées. Ces témoignages ont illustré concrètement la portée de la solidarité ouvrière : ses défis, ses victoires, ses apprentissages, et surtout les avenues de possibles qu'elle ouvre dans les milieux de travail et dans les communautés.
Les incontournables
Peu importe le panel, l'atelier ou la discussion, un constat s'est imposé : l'éducation demeure le premier axe permettant la création d'une solidarité durable. Mais ce n'est pas le seul enseignement de la journée. Les échanges ont permis d'approfondir la réflexion et d'alimenter un engagement renouvelé envers le développement de la solidarité locale et internationale.
Réfléchir ensemble, confronter les idées, laisser émerger de nouvelles observations : c'est toute la richesse de ces espaces de dialogue. Les émotions y jouent un rôle central. On ne peut s'engager si l'on ne comprend pas pourquoi — et l'émotion, l'indignation, la compassion ou l'espoir sont souvent les moteurs de cet engagement.
La solidarité trop souvent définie selon une vision judéo-chrétienne — celle d'une aide unilatérale — doit être repensée comme une solidarité de classe, fondée non pas sur la vulnérabilité, mais sur la recherche du bien-être collectif. La convergence des luttes renforce les mouvements sociaux, syndicaux, environnementaux, politiques et humains, car nos enjeux et nos intérêts sont profondément liés.
La solidarité comme vecteur de changement
Dans un contexte de polarisation croissante, l'isolement favorise la division, au bénéfice des classes dominantes. L'appel à la solidarité, au contraire, nous invite à nous concentrer sur ce qui nous unit. De faire collectivement un choix lucide vers un monde plus juste et plus consciencieux des autres. Et il s'agit là d'un véritable vecteur de changement.
Se doter d'une culture internationale forte, c'est se donner les moyens d'atteindre des objectifs communs, de travailler en coopération et d'innover dans une perspective de bien commun.
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Stratégie de QS pour 2026
Une stratégie politique de construction de la gauche, c'est établir une orientation générale cohérente tenant compte du rapport de force actuel qui permet de construire la gauche politique et les mouvements sociaux afin de transformer les rapports sociaux en faveur du peuple. Nous proposons ici une stratégie à court terme pour QS, d'ici aux élections de l'automne 2026
Analyse de la période
– Crise écologique existentielle qui s'accélère, notamment par l'effondrement de la vie sauvage et la biodiversité, l'épuisement des ressources et les dérèglements climatiques.
– Hausse du coût de la vie des classes populaires, dans un contexte de polarisation de la richesse, expliqué notamment par un ralentissement structurel de la croissance économique qui favorise ceux qui ont déjà du capital au détriment de ceux qui travaillent (Voir Piketty, Capital du XXIe s.).
– Polarisation politique avec montée de la droite radicale, déclin du centre et de la gauche malgré quelques exceptions.
Analyse de la conjoncture
– La droite radicale est en croissance partout et au pouvoir dans plusieurs des principaux pays dominant la planète (États-Unis, Inde, Russie, Argentine, dictatures du Golfe, Italie) et en croissance dans de nombreux pays.
– Trump organise des attaques historiques contre les droits à l'interne et, à l'externe, se lance dans une guerre commerciale mondiale avec des tarifs qui touchent notamment le Canada et le Québec et augmente le cout de la vie.
– La gauche modérée est au pouvoir dans certains pays importants (Mexique, Brésil, Colombie, Chili, Espagne). La gauche assumée est minoritaire dans certains pays tout en représentant une force notable, notamment aux États-Unis (DSA, Mairie de New York et Seattle) et en France.
– Les tarifs de Trump, la bulle techno et la crise écologique nous poussent vers une crise économique à court ou moyen terme.
– Le gouvernement Carney applique le programme conservateur : abolition des taxes sur le capital, sur le carbone, priorité au pétrolières, au militaire, aplaventrisme devant Trump…
– Les gouvernements canadiens et québécois ont un déficit notable qui s'accentuera avec la prochaine crise économique. On doit s'attendre à l'augmentation des luttes sociales contre les coupures dans les prochaines années.
– Les mobilisations sont modérées du syndical (rattrapage salarial), étudiant (stages rémunérés), des groupes populaires (financement autonome), féministe (avortement), écologiste (mines, rivières, démantèlement du ministère de l'environnement) et indépendantiste (notamment chez les jeunes)
– Les attaques de la CAQ sur les droits en général et contre les syndicats en particulier ont provoqué une grande manifestation unitaire le 29 novembre, mais sans lendemain conséquent. Il y a ici un potentiel d'unification et de radicalisation des luttes qui demandera une remise en question des orientations de l'attentisme.
– Les appuis de QS ont 5 caractéristiques sociales : jeunes, urbains, pauvres, éduqués et femmes.
– QS est en période de crise et de déclin. Le débat porte notamment sur le virage à droite, la centralisation et le rôle des femmes. Les fondements politique et organisationnel du parti restent en place, mais sont fragilisés.
Stratégies possibles dans ce contexte
Mettre en place des politiques progressistes de transformation sociale et d'indépendance du Québec est possible seulement avec une mobilisation populaire massive et organisée. La stratégie de Québec solidaire doit contribuer à cette mobilisation. Dans ce sens, nous proposons une stratégie en deux axes : construire la mobilisation contre la CAQ et établir la priorité de QS d'ici les élections.
Axe 1) Construire la mobilisation contre la CAQ
Depuis un an, la CAQ mène une offensive brutale et radicale contre les droits, en particulier ceux des travailleuses et des travailleurs. Comme l'a souligné le Barreau du Québec, ces attaques fragilisent l'État de droit, les contre-pouvoirs, l'indépendance judiciaire et les droits fondamentaux, notamment par des tentatives visant à empêcher certains organismes de contester des lois devant les tribunaux. Le mouvement syndical est lui aussi ciblé : ses capacités d'intervention sur les enjeux sociopolitiques sont restreintes, ce qui freine ses alliances avec les autres mouvements sociaux [1]
Ce virage autoritaire cherche également à neutraliser toute contestation des lois racistes qui excluent les femmes voilées des emplois en éducation, dans un contexte où l'abolition du PEQ plonge de nombreuses personnes immigrantes dans une grande précarité. De son côté, le PQ, actuellement en tête des sondages, surenchérit sur ces politiques racistes tout en se limitant à une défense de la « liberté d'expression », allant jusqu'à condamner les propos de la présidente de la FTQ sur les projets de loi. Aucun de ces deux partis n'ose par ailleurs s'opposer frontalement ni à Trump ni à Carney, et tous deux appuient un virage économique militariste, extractiviste et profondément anti-environnemental.
Dans ce contexte, la grande manifestation unitaire du 29 novembre 2025 a marqué une étape importante, mais la question de la suite demeure entière. Faut-il aller vers des actions de perturbation économique — blocages de ports, de ponts ou de routes — ou vers une grève sociale intersectorielle ? L'exemple récent des médecins démontre qu'un véritable rapport de force est le seul moyen de faire reculer ce gouvernement. Quelle que soit la forme qu'elles prendront, seule une escalade des moyens de pression permettra d'obtenir le retrait des projets de loi. Le Printemps érable (transcroissance d'une grève étudiante illimitée en une désobéissance civile citoyenne contre la loi spéciale) constitue à cet égard un modèle inspirant. Ce débat doit être ouvert sans tarder, et Québec solidaire doit appuyer toute initiative allant dans ce sens.
Axe 2) Établir la priorité de QS d'ici les élections
Voici 4 stratégies possibles pour QS d'ici les prochaines élections. Toutes comportent une articulation entre les 3 fondements de QS : justice sociale, écologie et indépendance.
Centre notre discours, nos alliances et notre travail terrain sur :
1- Cout de la vie
2- Réinvestissement dans les services publics
3- Indépendance du Québec
4- Transition écologiste
Nous ne proposerons pas une stratégie centrée sur l'indépendance ou sur l'écologie, mais plutôt sur la justice sociale. Nous détaillerons donc 2 propositions : une première centrée sur le cout de la vie et une 2e sur le réinvestissement.
Notre orientation sur la justice sociale sera présentée comme la meilleure pour mobiliser le peuple et les mouvements sociaux vers l'indépendance (les politiques antisociales empêchant l'indépendance).
Les grandes propositions de transition écologiste, notamment en transport (principal émetteur de GES au Québec), seront couplées au cout de la vie (gratuité) ou au réinvestissement.
Plan A : Une stratégie centrée sur le cout de la vie
Dans un contexte de croissance des inégalités sociales, si l'on veut améliorer la qualité de vie, il faut s'attaquer au cout de la vie par la baisse des couts des loyers et des médicaments, la gratuité de l'éducation et du transport collectif et la hausse des bas salaires, le tout financé par la taxation de la richesse et Pharma-Québec.
Secteurs de la société ciblés :
● Personnes à plus faible revenu : Sans-emploi, étudiantE, retraitéEs, travailleurs pauvres, femmes, jeunes, immigrantEs, et leurs associations et syndicats
● Locataires et les groupes en logements
● Notons que ces secteurs sont ceux qui vont le moins voter
● Vise en partie la classe moyenne
● Les locataires et le transport collectif sont des enjeux plus urbains
Revendications phares
● Gel des loyers et construction de logements sociaux (et abordables ?)
● Instauration de la gratuité : de l'éducation supérieure, du transport collectif, les cantine dans le réseau scolaire, financé par une taxation du capital
● Baisse des couts des médicaments (et des assurances) avec Pharma-Québec
● Augmentation du salaire minimum et soutien aux luttes syndicales pour l'augmentation des salaires
● Indépendance pour reprendre le contrôle de notre budget, notre État, nos priorités. Sortir du pétro-État canadien militariste, conservateur et à genou devant Trump.
Voici ce qui le site web de QS propose pour l'instant :
Pour aider les familles à arrondir les fins de mois, Québec solidaire va :
● Instaurer un Programme universel d'alimentation scolaire ;
● Abolir la TVQ sur les produits usagés et sur les services de réparation ;
● Augmenter le salaire minimum à 20$ de l'heure.
Pour aider les locataires et les premiers acheteurs, Québec solidaire va :
● Instaurer un registre des loyers et interdire les hausses abusives ;
● Mettre fin aux enchères à l'aveugle pour les offres d'achat ;
● Lancer une nouvelle Corvée d'habitation : un grand chantier pour que l'État construise rapidement des logements abordables, collectifs et sociaux ;
● Rembourser la TVQ sur les constructions neuves pour favoriser la construction de nouvelles maisons abordables.
Pour réussir la transition écologique, Québec solidaire va :
● Investir massivement en transport en commun en priorisant les régions les moins bien desservies ;
● Financer un fonds d'adaptation climatique pour mieux se préparer aux évènements météorologiques extrêmes en rapatriant les subventions fédérales aux pétrolières ;
● Mettre en place un fonds d'urgence pour aider nos producteurs et productrices agricoles partout au Québec.
Pour la majorité de la société, la question du cout de la vie est un enjeu important
● Notamment la hausse des couts du logement et de l'alimentation
-
- o Mais aussi les soins et l'éducation privée ou tarifée
● Les tarifs de Trump n'aident pas
● Mais les mesures en mettre en place ne sont pas évidentes
● Pour la droite, c'est par les baisses d'impôt et la libéralisation qu'on fera baisser les prix. Elle favorisera aussi l'accès à la propriété.
- o Mais aussi les soins et l'éducation privée ou tarifée
QS est le seul parti à soutenir que :
– Les écarts entre riches et pauvre augmentent depuis 50 ans
– La hausse des salaires et une solution à la hausse du cout de la vie
– La taxation des riches, des grandes entreprises et de la pollution est nécessaire pour instaurer la gratuité
– Pharma-Québec permet de réduire les couts des médicaments (et de se protéger de Trump)
– La crise écologique augmentera le cout de la vie et menace nos emplois
– La crise économique à venir va réduire les emplois et faire baisser les salaires
– Pour faire l'indépendance (35 à 55% dans les appuis), il faut améliorer de leurs conditions de vie. Le PQ, comme d'habitude, va se lancer dans une campagne de déficit 0 et entrer en confrontation avec les mouvements sociaux et plusieurs secteurs de la population. QS au contraire souhaite réinvestir et travailler avec les mouvements sociaux, qui sont nécessaires à la mobilisation pour l'indépendance.
Plan B : Une stratégie centrée sur le réinvestissement dans les services publics
Dans un contexte de déficit qui sera aggravé par une crise économique, si l'on veut améliorer les conditions de vie de la majorité et faire l'indépendance, on doit participer à la mobilisation des mouvements sociaux afin de taxer les riches pour réinvestir dans les services publics.
Secteurs de la société ciblés :
● Travailleur-se-s du secteur public, majoritairement des femmes, et leur syndicat
● Usagé-ère-s des services publics : étudiants, malades, parents, vieux, pauvres, femmes et leurs associations
● Bénéficiaires du financement public : villes, écolo, milieu culturel,
● toutes les régions (pas de priorisation)
Revendications phares
● Réinvestissement de 10 milliards dans les services publics et la transition écologique (avec multiple déclinaison dans tous les secteurs)
● La taxation des riches, des grandes entreprises et de la pollution (et mise en place de Pharma-Québec qui réduira les couts des médicaments)
● Indépendance pour reprendre le contrôle de notre budget, notre État, nos priorités. Sortir du pétro-État canadien militariste, conservateur et à genou devant Trump.
Voici ce que dit le site web de QS propose pour l'instant :
Pour donner aux Québécois⋅es des services qui marchent, Québec solidaire va :
● Assurer l'égalité des chances des enfants dans nos écoles en rendant les projets particuliers accessibles à toutes et tous ;
● Garantir un accès équitable aux services publics au Québec : que vous habitiez en ville, en région ou en banlieue, vous devriez avoir droit à des services publics qui marchent ;
● Mettre fin à l'expansion du privé en santé et renforcer la qualité des soins offerts gratuitement dans le réseau de santé publique.
Pour la majorité de la société, la question des services publics est prioritaire
● La santé est l'enjeu le plus important pour les élections, l'éducation n'est pas loin derrière
● Une partie de la population adhère à la vision de la droite :
-
- o Le déficit, de la dette, des cotes de crédits d'un côté, la baisse des impôts de l'autre est une priorité
- o Réduire dans l'État, la bureaucratie est la solution
- o Privatiser est une autre solution
QS est le seul parti à soutenir que :
● Les écarts entre riches et pauvre augmentent depuis 50 ans
● Le déficit sera aggravé par une crise économique (et écologique) et les dépenses militaires
● Il est possible de réinvestir si on taxe la richesse
● Il est possible de taxer la richesse sans faire fuir les capitaux
● La crise écologique augmentera les déficits et menace nos services publics
● Pour faire l'indépendance (35 à 55% dans les appuis), il faut améliorer les conditions de vie. Le PQ, comme d'habitude, va se lancer dans une campagne de déficit 0 et entrer en confrontation avec les mouvements sociaux et plusieurs secteurs de la population. QS au contraire souhaite réinvestir et travailler avec les mouvements sociaux, qui sont nécessaires à la mobilisation pour l'indépendance.
● La nation québécoise veut survivre, nous avons le choix entre un nationalisme conservateur basé sur la peur des immigrantEs ou l'indépendantisme de gauche inclusif. Ne pas construire un c'est laisser l'autre prendre la place.
Autres éléments à prendre en considération dans les tactiques à développer
● Importance de garder le cap sur nos valeurs, qu'il soit clair pour la population qu'on ne pliera pas sur nos principes : justice sociale, écologie, indépendance et la dénonciation des riches qui contrôle l'économie, de la droite qui s'attaque aux droits sociaux et aux droits des minorités.
● Construire un « nous » solidaire basé sur le peuple québécois dans sa diversité, fier de son modèle social et des luttes qui l'ont permis, qui oppose le 1% vs 99% nommer les réalités vécues à partir du point de vue des gens qui le subissent : hausse du cout de la vie, logement inaccessible, services publics fragilisés. Démontrer le rôle parasitaire et destructeur des milliardaires qui nous dirigent. Mettre en relief l'apport des femmes et des personnes issues de l'immigration dans la construction du Québec et des luttes qui nous unissent et soutenir activement leurs luttes spécifiques.
● Associer les propositions de notre plateforme aux pays qui les appliquent et où il y a les meilleures conditions de vie. Rappeler que ces pays reposent sur 3 choses : l'état social très développé, forte taxation de la richesse, taux de syndicalisation très élevé et qu'il n'y a que QS qui va dans ce sens.
● Positionner QS comme le meilleur rempart et le projet le plus cohérent contre Trump et ses valeurs. Critiquer l'aplaventrisme de la CAQ, du PQ, et du gouvernement fédéral face à Washington et positionner QS comme le seul projet politique souverain, écologique et solidaire qui réduit notre dépendance aux États-Unis. Établir des liens visibles avec la gauche américaine, notamment les DSA.
● Positionner QS comme l'opposition la plus cohérente au programme conservateur, pétrolier et fédéraliste mis en place par Carney
● Positionner QS comme le parti qui s'engage, auprès des mouvements sociaux, à mettre fin aux politiques de la CAQ, notamment ses derniers projets de loi (voir axe 1).
● Clarifier que le PQ n'est pas un parti de gauche, mais une coalition droite-gauche qui a mis en place une grande partie des politiques de droite Québec, notamment avec Bouchard, Landry, Legault et autres.
● Il faut ouvrir des espaces de politisation, de rassemblement pour accueillir les nouveaux-elles militantEs
● La nation québécoise veut survivre, nous avons le choix entre un nationalisme conservateur basé sur la peur des immigrantEs ou l'indépendantisme de gauche inclusif. Ne pas construire un c'est laisser l'autre prendre la place.
ANNEXE 1
Résumé des 5 priorités stratégiques de la gauche selon Piketty & Cagé dans leur livre "Une histoire du conflit politique, Élections et inégalités sociales en France, 1789-2022"
1. Reconquérir les classes populaires en mettant la réduction des inégalités au cœur du projet.
2. Proposer une vision économique forte : fiscalité progressive, services publics, redistribution du capital.
3. Réconcilier diplômés urbains et non-diplômés ruraux avec un programme commun.
4. Investir massivement dans les territoires périphériques pour contrer le vote extrême droite.
5. Combattre l'abstention populaire, qui est devenue l'expression politique dominante des précaires.
Pour poursuivre vos réflexions, quelques textes sur la politique au Québec
Manifester contre le virage à droite de la CAQ : Ok, mais les autres ?
Yves Bergeron - 2 décembre 2025
Propositions de points saillants pour la plateforme électorale 2026 de Québec solidaire-
Marc Bonhomme - 2 décembre 2025
Déclaration de solidarité et appel à la mobilisation - L'hiver sera chaud : la CAQ a déclaré la guerre à la société civile
Collectif d'organisations et de militant·es - 25 novembre 2025
La partie n'est pas jouée
Benoit Renaud - 18 novembre 2025
La conjoncture qui se dessine et les conditions d'un rebond pour Québec solidaire
Bernard Rioux - 18 novembre 2025
Construire la majorité pour un Québec indépendant, égalitaire, féministe et décolonial
Bernard Rioux et André Frappier - 4 novembre 2025
L'instrumentalisation politique de l'immigration par le gouvernement Legault
Bernard Rioux - 22 octobre 2025
Leur laïcité et la nôtre
Benoît Renaud - 9 septembre 2025
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Le débat sur la stratégie pour l’indépendance ne saurait attendre
Dans sa chronique du Devoir « Les saboteurs », Michel David rend compte que tant Québec solidaire, aujourd'hui, et hier sauf sa direction, que le PQ dont son chef d'aujourd'hui, hier, admet-admettait noir sur blanc que le PQ est un parti « noninclusif » c'est-à-dire « identitaire ». Ce sont là des mots codés signifiant antiimmigrant autrement dit des mots référant à la xénophobie pour ne pas dire au racisme étant donné la composition majoritairement non-blanche de l'actuelle immigration et même islamophobe étant donné son importante composante dite musulmane.
Côté PQ, le chroniqueur pro-PQ admet carrément la crue vérité de son identitarisme électoraliste : « Si le PQ et la CAQ persistent à miser sur l'insécurité des Québécois en présentant les immigrants comme une menace pour le français et comme un poids insupportable sur les services publics, c'est que cela trouve un écho dans l'électorat. »
Un clash sociétal irréconciliable qui ouvre la porte à un clash socio-économique
La base militante Solidaire est depuis toujours allergique à l'identitarisme tout comme aujourd'hui l'est devenue sa direction, avec une porte-parole principale d'origine palestinienne dont une grand-mère victime de la Naqba de 1948 et un porte-parole aux racines italiennes. C'est un tournant clarificateur et bienvenu depuis la pénible affaire des chinois qui se seraient accaparés des terres agricoles au Téminscamingue, de l'appui au rapport Bouchard-Taylor à propos du voile et du refus de soutenir les Anishinabeg de la Réserve faunique La Vérendrye à propos de la chasse à l'orignal à l'encontre du « consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause » de la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des peuples autochtones.
Ce clash entre le PQ et Québec solidaire est crucial et irréconciliable. Il est au cœur de la contradiction majeure du monde contemporain. Aucune alliance formelle ou tacite ne saurait en naître. D'un côté les forces fascisantes et fascistes en progression rapide « nous montent […] les un·es contre les autres. Elles pointent du doigt les personnes immigrantes. Les personnes qui ne sont pas blanches. Les socialistes. Les personnes à faible revenu. Les femmes. Les personnes LGBTQ+. Tout groupe fait l'affaire, tant que cela nous empêche de regarder vers le haut, là où la richesse continue de s'accumuler » (Greenpeace-Canada, lettre du 12/12/25). De l'autre, la majorité des forces de gauche s'adapte à cette dérive sous prétexte qu'on ne peut pas accueillir toute la misère du monde alors que l'imposition des riches et ultra-riches n'a jamais été aussi basse depuis la Deuxième guerre mondiale sans compter que l'épargne nationale et les quelques deux cent transnationales majeures sont devenues, depuis lors, totalement sous le contrôle de la grande bourgeoisie oligarchique.
Les exceptions à la règle, sans être des modèles stratégiques, montre la voie
Mais il y a des exceptions à la règle telles Die Linke allemand et le chapitre de la cité de New-York du Democratic Socialist of America (DSA), aile gauche du parti Démocrate, qui avec succès ont lutté à contre-courant d'un torrent fascisant qui s'est par ailleurs imposé à leurs nations respectives. On a noté avec raison que Die Linke et Mamdani ont assis leur campagne électorale sur d'incisives, concrètes, irrécupérables revendications-clefs vérifiables en fin de mandat. Celles-ci, reflétant les majeures préoccupations de l'heure du peuple-travailleur, notamment liés au coût de la vie, ont eu la capacité de mobiliser en masse particulièrement la jeunesse angoissée par ce capitalisme « austoritaire » gros d'anti-woke guerres sociales et internationales afin de nier par la diversion cette fin du monde qui pend au bout du nez de l'humanité.
On a moins noté, cependant, leur parti-pris woke les démarquant clairement tant des forces fascisantes que de celles de centre-gauche glissant vers un point de vue anti-immigrant tels les partis social-démocrate et vert allemands, et encore plus de la scission rouge-brune — les programmes sociaux et les services publics pour les natifs seulement — issue de Die Linke, que les Démocrates centristes. C'est cette caractéristique qui les a rendu attrayants aux progressistes, en particulier la jeunesse. Ensuite, a fait le reste leur plateforme répondant concrètement aux besoins impérieux sociaux-économiques du peuple-travailleur.
Certes ces succès électoraux ne sont nullement gages d'une modification durable des rapports de forces, notamment aux ÉU. Le vainqueur, au lieu de remobiliser ses 100 000 militantes électorales pour le combat acharné afin de réaliser son programme, cherche plutôt, en vain, à se reconnecter aux Démocrates centristes et même à Trump, l'incarnation de la fascisation du monde. Mais cette indépendance de classe qui manque à Mamdani ne devrait pas normalement être un problème pour les Solidaires. Au Québec, l'équivalent de la tentation de se lier au parti Démocrate est celle de l'alliance avec le PQ, à laquelle la base Solidaire a toujours résisté, afin de réaliser l'indépendance nationale dont se réclament Solidaires et PQ.
Le défi de l'indépendance de classe se pose non pas un de ces jours en vue des Calendes grecques mais aujourd'hui en vue des élections de 2026 étant donné que les deux partis se sont engagés pour un référendum dans le premier mandat, post processus constitutionnel pour le premier mais non pour le second. Les sondages du jour laissent voir, en plus d'un Québec solidaire au soutien électoral effondré, un gouvernement péquiste minoritaire mais peut-être majoritaire étant donné les bizarres déformations du scrutin nominal à un tour en présence des cinq partis en lice. Les dilemmes ne manquent pas au parti de gauche afin de se situer envers le PQ par rapport tant à l'élection qu'au référendum et ceci sans plus tarder.
Puissant est le dilemme PQ fort / Solidaires faibles alors qu'il y a une porte de sortie
Que PQ et Solidaires appartiennent, comme on l'a vu, aux deux camps s'opposant mondialement et ne pouvant s'allier stratégiquement. Le premier représente une indépendance nationale de droite masquée en « ni droite ni gauche mais en avant » et le deuxième une indépendance woke de gauche. Ils ne sauraient s'allier électoralement mais pour le référendum ils pourraient tactiquement « marcher séparément mais frapper ensemble ». C'est ce qu'avait fait le petit Parti de la démocratie socialiste (PDS), ancêtre de Québec solidaire, en 1995. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres.
Qu'en serait-il si un PQ vainqueur majoritaire continuait son tournant de droite vers l'extrême droite ? Le rapport de forces Solidaire — rallier sa base non indépendantiste pour combler l'écart au 50% — en serait drôlement amoindri pour faire valoir son point de vue dans la campagne référendaire, s'il y a campagne. Il le serait d'autant plus pour imposer un préalable démocratique processus constitutionnel qui presque automatiquement tendrait à gauche comme l'a démontré durant l'hiver 1995 la consultation populaire des « Commissions régionales sur l'avenir du Québec. »
Évidemment, un PQ au gouvernement mais minoritaire et une députation Solidaire plus nombreuse ouvrirait une plus grande possibilité d'imposer au PQ des compromis et surtout une consultation populaire de type constitutionnel en dehors de son contrôle. En filigrane de ce rapport de forces politique se profile un rapport de forces social qu'annonçait peut-être le Grand rassemblement intersyndical des 50 000 contre le gouvernement de la CAQ en autant qu'il n'est pas été qu'un coup d'épée dans l'eau à la mode bureaucratique des grandes centrales syndicales.
On ne voit pas comment le ‘oui' référendaire puisse vaincre sans une remobilisation sociale qu'invite le mitraillage des lois réactionnaires de la CAQ tant antisyndicales qu'antiécologiques si ce n'est antidémocratiques dont une fédéraliste Constitution affaiblissant jusqu'aux droits individuels fondamentaux au nom de la nation, ce qui n'est pas sans obscurcir son droit fondamental à l'autodétermination. (Quant aux Libéraux, ils sont en train encore une fois de prouver qu'ils ne sont que le parti de l'Argent corrupteur mais sans pouvoir s'en remettre au prestige d'un dirigeant banquier pillant les platebandes plus modérées des Conservateurs fédéraux.)
La porte de sortie exige de liquider le recentrage par une plateforme à la Mamdani
C'est cette remobilisation qui permet d'envisager un retour en force de Québec solidaire y compris aux dépens du PQ comme c'était le cas encore électoralement en 2022. C'est dire l'ampleur des dégâts du recentrage à la GND — la démissiondénigrement de Marissal en est le dernier soubresaut — préparé par la direction précédente dont la tactique préférée parlementaire était de tendre la main à la CAQ. La nouvelle direction du parti en plus de son net souverainisme a opté pour un discours affirmé pour les travailleurs et travailleuses dans un manifeste accouchant de cependant piteuses revendications. Le nouveau programme Solidaire plus lissé et court conserve le « dépassement du capitalisme » du discours du dimanche mais il est sans stratégie pour stopper la débandade vers la terre-étuve. Reste l'étape cruciale de la plateforme électorale capable d'inspirer la possible remobilisation sociale et de recruter dans sa foulée cette militance électorale de 100 000 personnes afin de gagner.
Le Comité d'action politique (CAP) écologie du parti, pendant que le collectif « Parti de la rue » lambine, propose à ses membre les options style mini-programme de sa coordination, dans le sillage de la plate thématique proposée par la Commission politique du parti, et ma perfectible proposition à la Mamdanien mesure de soulever la militance et d'être comprise par le peuple-travailleur. À suivre.
Marc Bonhomme, 14 décembre 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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« Je viens de la base » : Rob Ashton veut reconstruire le NPD à partir de la classe ouvrière
Depuis des années, des critiques tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Nouveau Parti démocratique avertissent que le parti s'éloigne de sa base historique. Élection après élection, le NPD a du mal à établir le contact avec les électeurs et électrices qu'il a été créé pour représenter : les personnes qui travaillent dans les entrepôts, les écoles, les docks, les bureaux, les hôpitaux et les usines du Canada, et qui se sentent de plus en plus abandonnées par une classe politique qui ne tient pas compte de leur opinion.
Tiré de Canadian dimension
10 décembre 2025
C'est dans ce contexte que Rob Ashton, docker et dirigeant syndical, a lancé sa candidature à la direction du NPD. Nouveau venu en politique au sens traditionnel du terme, M. Ashton n'a jamais occupé de fonction élective. Mais il a passé plus de trois décennies sur les quais et dans les salles syndicales, gravissant les échelons jusqu'à devenir président national de l'International Longshore and Warehouse Union (ILWU). À une époque où le Parlement canadien est dominé par des avocat·es, des consultant·es et des gestionnaires professionnel·es, Ashton représente quelque chose de de plus en plus rare dans la politique fédérale : un leader issu directement de la base.
La candidature d'Ashton est un pari sur le fait que le parti ne pourra renouer avec les électeurs et électrices de la classe ouvrière que s'il est dirigé par quelqu'un qui parle leur langage, non pas comme une tactique rhétorique, mais comme une expérience vécue. Il soutient que le NPD doit à nouveau nommer le conflit de classe pour ce qu'il est et se battre sans complexe pour les personnes écrasées par le pouvoir des entreprises et la complaisance politique.
Lorsque nous nous sommes assis pour discuter, Ashton a été catégorique : le NPD a perdu la confiance des électeurs et des électrices, non pas parce que ses valeurs ont changé, mais parce qu'il n'a pas su les communiquer clairement et de manière cohérente. Il estime pouvoir regagner ces électeurices (celleux qui se sont tourné·es vers les libéraux par peur ou vers les conservateurs par frustration) en proposant une politique ancrée dans les luttes quotidiennes plutôt que dans les calculs d'initiés.
Voici notre conversation sur l'avenir du NPD, les échecs de la classe politique canadienne et la tentative d'Ashton de reconstruire le parti à partir de la base.
Christo Aivalis : Une question que se posent de nombreux partisan·es du NPD est de savoir comment chacun des candidats à la direction va convaincre les électeurices de voter pour le NPD. Pourquoi pensez-vous être le mieux placé pour regagner l'électorat ?
Rob Ashton : Je viens de la base, Christo. J'ai vécu cette vie pendant 32 ans en tant que docker, et j'ai représenté les dockers pendant les dix dernières années en tant que président national. Je sais ce dont ils ont besoin et ce qu'ils veulent. Cette fois-ci, certain·es électeurices du NPD ont voté pour les conservateurs, d'autres pour les libéraux, inquièt·es de voir ce roi autoproclamé au sud et Pierre Poilievre prendre le pouvoir. Sous la direction du NPD, je peux ramener ces électeurices qui ont voté bleu, car je parle leur langue. Je connais les difficultés auxquelles ils et elles sont confronté·es. Dans le même temps, les partisan·es du NPD qui ont voté libéral, ainsi que d'autres libéraux, verront que Carney n'est pas celui qu'il prétendait être pendant la campagne électorale. Il est en fait plus conservateur, oserais-je dire, que Brian Mulroney. Ces électeurs et électices verront que le NPD est le parti auquel ils et elles appartiennent, celui qui représente véritablement la classe ouvrière. Je suis le candidat qui peut ramener tout le monde au NPD.
Les Canadien·nes sont de plus en plus préoccupé·es par le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) et, bien que certain·es politicien·nes l'aient critiqué, peu ont appelé à son abolition comme vous l'avez fait. Pourquoi est-il temps de mettre fin au programme des TET ?
Le programme des TET est conçu pour la classe dirigeante. Il permet de faire venir des gens dans le pays uniquement pour les forcer à accepter des emplois moins bien rémunérés et plus précaires. Vous n'avez pas la possibilité de vous syndiquer, ni de refuser un travail dangereux. Car si un travailleur ou une travailleuses ose s'exprimer, les employeurs ont le droit de le ou larenvoyer dans son pays d'origine. Nous devons nous débarrasser de ce programme. Nous devons créer un système qui fonctionne pour tous les travailleurs et toutes les travailleuses, qu'ils et elles soient citoyen·nes canadien·nes ou résident·es temporaires, car c'est ainsi que ce pays devrait fonctionner. Et c'est ce que défend le NPD : améliorer la situation de toutes les travailleuses et tous les travailleurs et leur offrir un lieu de travail sûr.
Il y a eu récemment de nombreux exemples d'entreprises qui ont quitté le Canada et délocalisé des emplois à l'étranger, même après avoir reçu des subventions du gouvernement spécifiquement destinées à préserver ces emplois. En tant que chef, comment comptez-vous mettre fin à cette situation ?
Prenez l'exemple de l'industrie automobile et d'Aloma Steel, qui vient de recevoir 400 millions de dollars du gouvernement fédéral et 100 millions de dollars du gouvernement provincial, et qui prévoit de se séparer de plus de la moitié de ses employé·es. Ou encore, dans le cas du secteur automobile, ils partent tout simplement au sud de la frontière. Le problème sous-jacent est que l'on distribue l'argent public pour rien. Sous un gouvernement néo-démocrate dirigé par moi-même, il y aurait des conditions à respecter. Si nous vous donnons de l'argent, la première chose à faire est de vous assurer que les Canadien·nes continuent à travailler. Pas d'externalisation, pas de suppression d'emplois, pas de fermeture et pas de départ. Si vous prenez l'argent et que vous partez, vous devrez le rembourser avec des intérêts. C'est la promesse que nous faisons aux Canadien·nes : nous protégerons vos emplois et l'argent public que nous donnons pour soutenir ces entreprises.
Êtes-vous favorable à la propriété publique et des travailleuses et des travailleurs comme moyen de prévenir ce type de pratiques d'externalisation ?
Bien sûr. L'une de nos politiques consiste à faire siéger des travailleurs et travailleuses au conseil d'administration des entreprises de ce pays afin que nous ayons véritablement notre mot à dire sur leur gestion. Lorsque les travailleurs et travailleuses contribuent à orienter une entreprise, celle-ci se développe d'une manière qui profite réellement à ceux et celles qui la font fonctionner. Nous l'avons déjà constaté en Colombie-Britannique, où une usine qui était sur le point de fermer a été sauvée grâce à l'intervention conjointe des travailleurs et des travailleuses, de leur syndicat et du gouvernement. Cette usine est toujours en activité aujourd'hui. Donc oui, la propriété publique et des travailleuses et des travailleurs est une option tout à fait viable.
Une chose que j'ai remarquée dans votre campagne, c'est que vous n'hésitez pas à parler en termes de conflit de classes. Les politicien·nes libéraux et conservateurs sont clairement d'un côté de cette guerre des classes contre les travailleurs et travailleuses canadien·nes, mais même le NPD a parfois hésité à nommer cette réalité directement. Pourquoi est-il important pour vous de rompre avec cela et de le dire clairement ?
Le message de la guerre des classes correspond à la façon dont j'ai vécu toute ma vie, non seulement en tant que leader, mais aussi en tant que docker. C'est une guerre des classes, pure et simple. Tout ce qui s'est passé dans ce pays depuis la colonisation relève de la guerre des classes. Même les questions environnementales en font partie, car la classe dirigeante les utilise pour diviser les travailleurs et les travailleuses en opposant les militant·es écologistes à ceux et celles qui font le travail. Une fois que nous aurons commencé à communiquer clairement ce message et que les travailleurs et travailleuses auront compris qu'ils et elles font partie de cette guerre des classes, nous sommes convaincu·es qu'ils et elles reviendront vers le parti. Car le gouvernement Trump au sud, le gouvernement Carney ici et l'opposition Poilievre feront tout leur possible pour enrichir leurs ami·es tout en maintenant la classe ouvrière sous l'eau. Ce sont des messages que nous continuerons à diffuser, jusqu'à ce que nous en ayons assez de les répéter, et ensuite nous les diffuserons encore plus fort.
Dans le même ordre d'idées, vous avez mentionné dans des interviews précédentes que les Canadien·nes sont en colère contre le statu quo, et à juste titre. Mais nous avons également vu cette colère se manifester de manière déplaisante, souvent à l'encontre des éléments vulnérables de la société. Considérez-vous qu'une campagne axée sur les conflits de classe est un moyen utile de canaliser cette colère ?
Tout à fait. La colère que nous observons dans la société canadienne est en grande partie liée à la lutte des classes qui fait rage actuellement. Écoutez, lorsque les gouvernements ou les partis politiques sont dirigés par des gens comme Donald Trump – et d'autres comme lui, oserais-je dire, presque fascistes –, ils mènent leur campagne avec haine et vous disent de blâmer votre voisin·e pour vos problèmes. Mais ce n'est pas votre voisin·e qui vous empêche de payer votre loyer ou d'acheter vos provisions ; il ou elle n'a aucun contrôle là-dessus. Il faut plutôt se tourner vers les gouvernements et les entreprises qui ont mis en place ce système, un système créé par la classe dirigeante pour la classe dirigeante, afin que les riches s'enrichissent et que les travailleurs et travailleuses restent dans leur condition. Et quand je parle de travailleurs et travailleuses, je parle de toutes les personnes qui sont exploitées : les personnes handicapées, les bénéficiaires de la sécurité de la vieillesse et toutes celles qui essaient de joindre les deux bouts.
Comme la plupart des candidats à cette élection, vous ne siégez pas actuellement au Parlement. Si vous devenez chef du NPD, quel est votre plan pour entrer à la Chambre, où envisageriez-vous de vous présenter et envisageriez-vous une élection partielle pour y parvenir ?
Je n'ai pas de siège au Parlement, et ce n'est pas une mauvaise chose. À l'heure actuelle, nous avons sept député·es solides qui défendent les travailleurs et les travailleuses et s'opposent à la législation dépassée de la classe dirigeante, comme Leah Gazan qui œuvre à l'abrogation de l'article 107 et Alexandre Boulerice qui se bat pour un meilleur programme d'assurance-emploi. Le fait de ne pas avoir de siège me donne la liberté de voyager à travers le pays, de parler aux gens et de me rendre dans des endroits où le NPD n'a pas été vu depuis des années, qu'il s'agisse de communautés rurales ou de nations autochtones, afin d'écouter leurs préoccupations et d'expliquer comment notre parti compte y remédier. En ce qui concerne un siège à la Chambre, je vis dans la vallée du Bas-Fraser, en Colombie-Britannique, et je compte donc me présenter quelque part dans cette région. Mais si une élection partielle est organisée, je ne vais pas simplement me présenter et accepter le siège. Nous discuterons avec l'association locale de la circonscription pour voir si elle a déjà un·e candidat·e, si elle est d'accord pour que je me présente et si je peux vraiment représenter la communauté. Tout cela doit être pris en considération.
Enfin, de nombreux observateurs et observatrices ont soulevé la question du bilinguisme dans cette course à la direction, et votre nom a été mentionné aux côtés d'autres candidat·es. Quelles mesures concrètes prenez-vous pour vous assurer de pouvoir communiquer efficacement votre vision en français ?
Oh oui, j'ai fini par participer à l'émission This Hour Has 22 Minutes à cause de mon français épouvantable [rires]. Blague à part, le français est vraiment important pour moi. Je ne me suis engagé pleinement dans cette course qu'il y a environ deux mois et demi, et je n'aurais jamais imaginé me présenter à la direction du parti. Je vis en Colombie-Britannique et je n'ai pas beaucoup d'ami·es francophones ici, mais j'ai commencé à prendre des cours et à parler avec les francophones de mon équipe de campagne, qui m'aident à apprendre. Si je suis élu le 29 mars, j'ai l'intention de m'immerger dans la langue et la culture françaises au Québec.
Hier soir, j'étais à un événement à Saguenay, où j'ai discuté avec des gens qui m'ont expliqué l'importance de la langue française. Dans les années 1950, la classe dirigeante du Québec parlait anglais tandis que la classe ouvrière parlait français, puis vint la Révolution tranquille dans les années 1960, lorsque les Québécois·es commencèrent à revendiquer leur identité et leur pouvoir. C'est dire à quel point la langue française est importante, non seulement pour les Québécois·es, mais aussi pour les francophones de tout le Canada. Il ne s'agit donc pas seulement d'apprendre la langue, mais aussi de comprendre les identités des différentes communautés, qu'elles soient francophones ou autochtones. En tant que dirigeant du Canada, vous devriez toujours chercher à en savoir plus sur la société que vous servez.
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