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Un grand recul pour les femmes américaines et du monde entier

12 novembre 2024, par Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes (CQMMF) — , ,
Le résultat des élections américaines ajoute une teinte de gris à la conjoncture internationale en ce mois de novembre. L'élection de Trump n'est pas anodine. Elle est la (…)

Le résultat des élections américaines ajoute une teinte de gris à la conjoncture internationale en ce mois de novembre. L'élection de Trump n'est pas anodine. Elle est la concrétisation d'une manifestation qui s'observe à l'échelle internationale : la montée de l'extrême droite.

Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes - CQMMF

Les discours entendus tout au long de la campagne présidentielle ne peuvent faire autrement que de nous faire craindre le maintien des acquis durement obtenus. Et ce, alors qu'il reste tant à faire pour la protection des droits des femmes et pour tout ce qui concerne leur accès à des soins de santé, à l'indépendance économique et à la sécurité dans son sens très large.

L'élection des républicains n'est, et ne sera, pas sans impact. Nous devrons rester alertes, mais surtout, unies et solidaires. Une convergence des luttes s'impose. La convergence est possible puisque les causes de la pauvreté, de la violence, de la crise climatique et de l'effondrement de la biodiversité sont similaires.

En effet, les acteurs qui détiennent le pouvoir tirent leurs profits sur le dos du travail des femmes, des migrant.e.s ou littéralement directement dans les communautés des pays du Sud. Ces acteurs, qu'ils soient des gouvernements, des banques ou des entreprises transnationales mettent en place des mécanismes pour exploiter et s'approprier sans remords les ressources naturelles. Ils leurs accordent la valeur de ‘'ressource'' que par l'opportunité de profit que ça peut leur procurer, au détriment de l'équilibre de la nature à maintenir pour la préservation du bien commun et du bien vivre. Bref, des droits collectifs.

La résistance féministe est nécessaire pour éviter la concentration du pouvoir aux mains de personnes ou d'institutions qui placent leurs intérêts privés au centre des priorités plutôt que le vivant.

Alors que le mouvement de la Marche mondiale des femmes s'organise à travers le monde pour la 6e édition de l'action mondiale de la MMF, c'est le moment d'élargir nos alliances, de nous solidariser, de se tenir coude à coude !
En marche vers 2025 !

C'est un appel à la résistance féministe internationaliste

WMW Asie-Océanie soutient les pêcheurs indonésiens dans leur lutte contre l’accaparement des océans et l’économie bleue

12 novembre 2024, par Marche mondiale des femmes – Asie de l'Est et du Sud-Est et Océanie. — , ,
Au cours des deux mandats du président Joko Widodo, l'accaparement des océans s'est répandu en Indonésie sous le couvert de l'économie bleue, un cadre visant ostensiblement à (…)

Au cours des deux mandats du président Joko Widodo, l'accaparement des océans s'est répandu en Indonésie sous le couvert de l'économie bleue, un cadre visant ostensiblement à favoriser la croissance économique, le développement et la conservation des ressources naturelles.

Tiré de infolettre CQMMF

En réalité, cet accaparement a souvent facilité la mise en œuvre de projets à grande échelle préjudiciables aux communautés côtières et insulaires, tels que des projets de poldérisation, l'exploitation extensive de sable et de minerais, le développement du tourisme, la création de zones de conservation et l'extension des zones de culture de la crevette. Ces activités ont rendu les communautés vulnérables à la perte de terres, à la dégradation de l'environnement et à l'intimidation.

De nombreuses communautés, notamment celles des îles Rempang, Wawonii, Sangiang et Pari, font état d'une escalade des menaces et de la criminalisation de la part des forces de l'ordre et des entités du secteur privé. Cet empiètement continu sur leurs terres et leurs ressources a alimenté une agitation et une résistance importantes au sein des communautés concernées.

En réponse à ces problèmes urgents, KIARA, en collaboration avec des réseaux de pêcheurs tels que le Indonesian Fisherwomen Sisterhood (PPNI) et l'Indonesian Fisherfolk Union (SNI), a organisé le Marine Fisherfolk Festival du 8 au 10 octobre 2024 à Jakarta. Sur le thème « Encourager la souveraineté marine de l'Indonésie pour le bien-être des pêcheurs », l'événement a rassemblé plus de 70 pêcheurs et pêcheuses de 19 provinces indonésiennes afin de les sensibiliser et de trouver des solutions.

Le festival a bénéficié de la collaboration de Trend Asia, de la Fondation indonésienne d'aide juridique (YLBHI), d'Indonesia for Global Justice, de Bina Desa, de PIKUL, du groupe de travail indonésien de l'ICCA (WGII), de Team 9 et du réseau de travail sur la cartographie participative (JKPP). Cet effort a été renforcé par le soutien du Forum mondial des pêcheurs (WFFP) et de la Marche mondiale des femmes (WMW).

Les pêcheurs participants ont partagé des témoignages de première main sur l'exploitation, y compris l'extraction de 17 milliards de mètres cubes de sédiments de sable, des projets de récupération couvrant 90 hectares à Manado et 1084 hectares à Surabaya, l'extraction de nickel sur l'île de Wawonii, et la pollution due à l'élevage de crevettes dans des zones côtières productives. Ces cas mettent en évidence les graves conséquences de l'extraction incontrôlée des ressources sur les moyens de subsistance des communautés, l'environnement et les économies locales.

Le festival a également donné lieu à des réunions avec des fonctionnaires du ministère de l'environnement et des forêts et du ministère des villages, ainsi qu'à une manifestation devant le ministère des affaires maritimes et de la pêche. Bien que 10 représentants des pêcheurs aient été reçus par le personnel du ministère, le résultat a été décourageant : les fonctionnaires ont enregistré les griefs mais n'ont pas pris d'engagements clairs pour y répondre.

Malgré ces échecs, les participants ont réaffirmé leur engagement à construire un mouvement populaire résilient, éduqué et organisé pour résister à l'accaparement des océans et protéger la souveraineté côtière de l'Indonésie.

La MMF Asie-Océanie est solidaire des pêcheurs indonésiens dans leur lutte pour la justice, les moyens de subsistance durables et la souveraineté sur leurs terres et leurs eaux.

Nous résistons pour vivre, nous marchons pour transformer !

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Règlement sur le plafonnement des émissions du secteur fossile canadien : la nécessité d’agir rapidement

12 novembre 2024, par Nature Québec — , ,
Après plus de deux ans d'attente, Nature Québec se réjouit de la publication aujourd'hui de la première version du règlement sur le système de plafonnement et d'échange des (…)

Après plus de deux ans d'attente, Nature Québec se réjouit de la publication aujourd'hui de la première version du règlement sur le système de plafonnement et d'échange des émissions de gaz à effet de serre du secteur des combustibles fossiles canadien. L'organisation enjoint du même souffle le gouvernement du Canada à procéder promptement pour une mise en œuvre de la réglementation au début de l'année 2025.

Pour Nature Québec, en publiant cette première version du règlement, le gouvernement du Canada répond à la volonté exprimée par 80 % de la population québécoise de voir une telle réglementation contraindre les pétrolières et gazières canadiennes à réduire leurs émissions de GES pour qu'elles fassent leur juste part de l'effort collectif national.

« Le temps presse ! Ottawa doit procéder le plus rapidement possible pour imposer le système de plafonnement et d'échange à l'industrie des énergies fossiles canadienne. Face aux catastrophes climatiques qui s'enchaînent, on a besoin que l'industrie soit rendue imputable maintenant, pas dans cinq ans », indique Anne-Céline Guyon, analyste Énergie et climat de Nature Québec.

L'organisation rappelle que d'ici la publication de la version finale de ce règlement, beaucoup de travail reste à faire pour tenir réellement imputable l'industrie de ses émissions et de son rôle dans la crise climatique. Dans un sondage publié en avril dernier, une majorité de Québécois-ses disait voir d'un mauvais œil les échappatoires que le gouvernement du Canada pourrait consentir aux entreprises gazières et pétrolières. Or, la première version du règlement reste inquiétante à bien des égards, notamment en ce qui concerne la possibilité pour les compagnies d'utiliser des crédits compensatoires ou encore de verser de l'argent dans un fonds de décarbonation, dont l'argent leur serait redistribué pour financer leurs projets de décarbonation.

« L'industrie canadienne des combustibles fossiles a fait 130 milliards de dollars de bénéfices dans les trois dernières années. Si elle veut se décarboner, elle en a les moyens. Elle a plutôt fait le choix de mettre des bâtons dans les roues des politiques climatiques. Et pourtant, le gouvernement canadien continue à lui en demander moins que pour les autres secteurs de l'économie. Cela doit cesser ! », explique Mme Guyon.

Nature Québec participera donc à la consultation publique dans les prochaines semaines afin de contribuer à renforcer le niveau d'ambition de cette réglementation, seul moyen pour que cette industrie fasse sa juste part dans l'atteinte des objectifs climatiques canadiens. À ce titre, Nature Québec invitera les citoyen-ne-s désireux-euses d'appuyer une réglementation ambitieuse et sans passe-droits pour l'industrie à envoyer leurs commentaires à l'adresse courriel de la consultation.

Nature Québec tient à rappeler que l'annonce d'aujourd'hui est une étape importante dans l'élaboration de cette réglementation, mais demande que sa version finale soit déposée dès le début de 2025 afin qu'elle soit mise en œuvre au plus vite. « Considérant l'urgence climatique dans laquelle nous nous trouvons, retarder encore l'application du plafonnement serait irresponsable », conclut Mme Guyon.

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Renouveau à la DPJ ? La question de la violence conjugale doit (aussi) être une priorité

12 novembre 2024, par Annick Brazeau, Manon Monastesse, Suzie Levasseur — , ,
« Si j'avais su, je n'aurais pas dénoncé la violence conjugale » ; « mes enfants auraient été mieux protégés si je n'avais rien dit ». Dans la dernière année, plusieurs voix de (…)

« Si j'avais su, je n'aurais pas dénoncé la violence conjugale » ; « mes enfants auraient été mieux protégés si je n'avais rien dit ». Dans la dernière année, plusieurs voix de femmes victimes de violence conjugale se sont fait entendre dans l'espace public pour dénoncer les difficultés qu'elles vivaient avec les services de la protection de la jeunesse : remise en question de la violence qu'elles et leurs enfants ont vécue, maintien des contacts avec le père violent au détriment de la sécurité de l'enfant, non-prise en compte de la parole des enfants, biais et stéréotypes envers les familles immigrantes, etc. En plus de craindre pour la sécurité physique et psychologique de ces enfants, nous redoutons que des victimes décident de ne plus dénoncer la violence vécue et de rester avec leur conjoint violent pour protéger autant que possible leurs enfants.

La nomination de Madame Lesley Hill à la tête de la DPJ et les déclarations du ministre Lionel Carmant en faveur d'un changement de culture au sein de ce système nous donnent espoir qu'une autre voie est possible pour les enfants et les mères victimes de violence conjugale. Face à l'urgence de protéger ces enfants et de garantir leurs droits à la sécurité et à une vie sans violence, nous exhortons la nouvelle directrice nationale de la DPJ à faire de la question de la violence conjugale une priorité d'action au cours de ce mandat qui s'amorce, aux côtés des trois autres priorités que le ministre Carmant lui a confiées hier.

Depuis l'entrée en vigueur, en avril 2023, de nouvelles dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse, le rôle des intervenant.e.s de la DPJ est devenu plus central que jamais en matière de violence conjugale. En 2023, les signalements pour exposition à la violence conjugale comptaient pour 12,5 % de tous les signalements reçus par la DPJ soit un signalement sur huit. 47 signalements par jour.

Pour remplir le devoir qui leur incombe d'évaluer une situation familiale où a lieu de la violence conjugale, les intervenant.e.s doivent être outillé.es et formé.e.s à la hauteur de l'urgence, afin de pouvoir identifier la problématique et ses impacts sur les enfants et d'être en mesure de les protéger. Une mauvaise compréhension de la violence conjugale, et de la composante coercitive qu'elle implique, entraîne des confusions dangereuses et dévastatrices pour les enfants, notamment lorsque la violence conjugale post-séparation est confondue avec des conflits de séparation ou de l'aliénation parentale.

Alors que le Québec se trouve à la croisée des chemins, nos trois associations – le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes et l'Alliance des maisons de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale – réitèrent leurs demandes de longue date, convaincues que Madame Lesley Hill saura entendre et reconnaître la nécessité impérieuse d'agir :

offrir aux intervenant.e.s de la formation obligatoire et substantielle sur le contrôle coercitif et la violence post-séparation. Cette formation devrait être centrée sur la sécurité de l'enfant.

favoriser la collaboration entre les services de protection de la jeunesse et les maisons d'hébergement.

mettre en place des mécanismes pour que les directives et les changements de pratiques percolent dans toutes les régions et se concrétisent dans les évaluations et les interventions.

Il existe déjà des pratiques prometteuses qui font, selon nos maisons membres, une différence concrète sur le terrain. Parmi elles : la formation PEVC qui a été offerte dans les DPJ de certaines régions avec des impacts significatifs, ou encore l'établissement d'un protocole d'entente entre les maisons d'hébergement et la DPJ d'une même région, qui facilite grandement la collaboration.

Comme l'a dit Madame Hill hier en conférence de presse : « Ne faisons aucun compromis sur le bien-être des jeunes et des enfants ». Au lendemain de sa nomination, il est permis de croire que de réels changements sont possibles. Nous veillerons.

Signataires

Annick Brazeau, présidente du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale

Manon Monastesse, directrice générale de la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes

Suzie Levasseur, présidente du CA de l'Alliance des maisons de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale

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Le Fonds de solidarité FTQ a investi plus de 130 millions de dollars dans les crimes de guerre et potentiellement le génocide

12 novembre 2024, par Mouvement Pour Une Paix Juste — , , ,
Nous vous demandons de prendre des mesures immédiates pour vous désinvestir des entreprises complices de crimes de guerre et de mettre en place des processus pour garantir (…)

Nous vous demandons de prendre des mesures immédiates pour vous désinvestir des entreprises complices de crimes de guerre et de mettre en place des processus pour garantir qu'aucun investissement futur ne soit réalisé auprès d'entreprises complices de crimes de guerre et de génocide.

Source

2 novembre 2024

Claude Séguin, président du conseil d'administration

Janie C. Béïque, présidente et chef de la direction

« Le Fonds de solidarité FTQ est le plus important réseau d'investissement en capital de développement au Québec. En soutenant les entreprises de toutes les régions et de tous les secteurs d'activité à partir de l'épargne des travailleurs et en encourageant l'épargne-retraite, le Fonds est devenu un acteur incontournable de la société québécoise. » La mission du Fonds de solidarité FTQ est de « contribuer à l'essor socio-économique du Québec, au bénéfice des travailleurs et des entreprises. »

Cela dit, le Fonds de solidarité FTQ a investi 4,5 millions de dollars dans Motorola, une entreprise que l'ONU a désignée comme soutenant les crimes de guerre, et près de 130 millions de dollars supplémentaires dans des entreprises que l'AFSC Investigate a jugées associées à l'occupation et donc complices de crimes de guerre. Il s'agit notamment d'entreprises d'armement/d'équipement militaire et de surveillance ainsi que d'autres qui soutiennent l'occupation militaire illégale de la Palestine par Israël. Des entreprises telles que Chevron, Cisco, Exxon, HP, Raytheon et d'autres, ainsi que la société d'ingénierie transnationale basée à Montréal, WSP Global, sont incluses dans le portefeuille d'investissement. WSP est le gestionnaire de longue date du projet de métro léger de Jérusalem. Al Haq et Just Peace Advocates ont déposé une demande en 2022 pour que WSP soit ajouté à

la liste de l'ONU, et celle-ci a été mise à jour en juin 2024 lorsque l'ONU a appelé les entreprises à s'ajouter à la liste de l'ONU.

Au total, le Fonds de solidarité FTQ a investi plus de 130 millions de dollars dans des crimes de guerre, dont certains sont complices de génocide.

Cette information a été portée à votre attention il y a plusieurs mois, mais aucune réponse n'a été reçue. Nous vous demandons de vous engager à désinvestir immédiatement dans les entreprises figurant sur les listes d'enquête de l'ONU et de l'AFSC en tant qu'entreprises complices de crimes de guerre.

Nous vous rappelons qu'au Canada, les parties complices de crimes de guerre sont passibles de poursuites criminelles en vertu de la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, y compris les sociétés.

Nous vous rappelons également que depuis la décision de la Cour supérieure du Québec dans l'affaire Bil'in (Village Council) c. Green Park International Inc., il est également possible qu'une société soit tenue responsable dans le cadre d'une poursuite civile devant les tribunaux canadiens pour complicité de crime de guerre. Bien que l'affaire Bil'in ait été rejetée pour des motifs de compétence, les tribunaux canadiens ont montré ces dernières années une volonté croissante d'exercer leur compétence sur les activités à l'étranger des sociétés canadiennes en cas de violation des droits de la personne et du droit international, et il est loin d'être certain que le même résultat serait obtenu aujourd'hui.

Fin 2023, l' International Centre of Justice for Palestinians – Canada (“ICJP – Canada”) a fait part au gouvernement du Canada de son intention de poursuivre les responsables canadiens qui seraient complices des crimes de guerre commis par Israël. ICJP Canada envisage également d'élargir la portée de son initiative pour demander la responsabilité des entreprises canadiennes qui seraient complices des crimes de guerre commis par Israël. Tout comme la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre du Canada, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale s'applique à la fois aux acteurs étatiques et aux particuliers. Ce dernier érige en infraction le fait de « fournir une aide, une incitation ou toute autre forme d'assistance » à la commission de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité.

Depuis lors, la Cour internationale de justice (CIJ) a jugé illégale l'occupation israélienne de longue date et a indiqué que des mesures devaient être prises pour y mettre fin complètement et « aussi rapidement que possible ». Elle a également indiqué que les États et les organisations internationales, y compris l'ONU, ont la responsabilité spécifique de s'abstenir de contribuer à l'occupation ou de reconnaître la présence d'Israël dans le territoire palestinien occupé comme tout sauf illégale.

Nous vous demandons de prendre des mesures immédiates pour vous désinvestir des entreprises complices de crimes de guerre et de mettre en place des processus pour garantir qu'aucun investissement futur ne soit réalisé auprès d'entreprises complices de crimes de guerre et de génocide.

Sincèrement,

Mouvement Pour Une Paix Juste

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C’est parce qu’on rit que c’est drôle

12 novembre 2024, par Germain Dallaire — , ,
Excédés par l'attitude de Rio Tinto sur la question de l'indexation de leur pension, des retraités syndiqués de Rio Tinto sont passés à l'action samedi le 9 novembre dernier. (…)

Excédés par l'attitude de Rio Tinto sur la question de l'indexation de leur pension, des retraités syndiqués de Rio Tinto sont passés à l'action samedi le 9 novembre dernier.

Germain Dallaire

Après avoir bien fait leur devoir en vérifiant auprès d'un urbaniste qu'ils se trouvaient bien sur un terrain de la municipalité, les retraités ont planté une pancarte en avant du terrain se lequel Rio Tinto agrandit actuellement son usine AP-60 à Arvida. Sur cette pancarte était inscrit : « Usine AP-60 payée par les retraité(es ». Quelle ne fût pas leur surprise de découvrir que la pancarte était disparue en repassant par là quelques heures plus tard.
Ne se laissant pas décourager, ils en confectionnèrent une nouvelle et allèrent l'installer dès le lendemain. Chat échaudé craint l'eau froide, ils restèrent sur place. Environ 20 minutes plus tard, des agents de sécurité de Rio Tinto arrivèrent dans un camion identifié à la multinationale. Non seulement les retraités les ont interpelé mais ils ont même récupéré leur pancarte de la veille qui se trouvait dans la benne du camion. Les retraités ne comptent pas en rester là puisque dès le début de la semaine, ils comptent se rendre au poste de police pour déposer une plainte de vandalisme contre Rio Tinto.

Rappelons que lors du colloque du 22 octobre dernier s'intitulant « 1926-2026, cent ans d'occupation par Alcan et Rio Tinto : le bilan s'impose", Alain Proulx de l'association des retraités syndiqués de Rio Tinto (4 fois plus de retraités que d'actifs) a démontré chiffres à l'appui que de 2002 à 2029, leur rente aura reculé de 33,2% par rapport à l'évolution du coût de la vie. Pendant la même période, Rio Tinto s'est permis des congés de cotisation s'élevant à 738 millions$ privant ainsi la caisse de revenus d'intérêt de 1,275 millard$ pour un grand total de 2,013 milliards$. Pour mémoire, l'agrandissement actuel de l'usine AP-60 est évalué à 1,4 milliard$ et ne portera sa capacité qu'à la moitié de ce à quoi Alcan s'était engagé il y a maintenant plusieurs décennies. Comme aurait dit mon défunt père, « la vérité choque ».

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Mobilisation à Saguenay contre le régime actuel d’assurance-emploi

12 novembre 2024, par Audrey Parenteau — , ,
Une cinquantaine de personnes se sont réunies le 6 novembre dernier dans les rues de l'arrondissement de Chicoutimi, à Saguenay, pour exiger une réforme en profondeur du régime (…)

Une cinquantaine de personnes se sont réunies le 6 novembre dernier dans les rues de l'arrondissement de Chicoutimi, à Saguenay, pour exiger une réforme en profondeur du régime d'assurance-emploi. Plusieurs membres de la CSQ, notamment du Syndicat de l'enseignement de la Jonquière (SEDLJ-CSQ), étaient présents à l'événement.

Tiré de Ma CSQ. Photos : Claude Bradet, SEDLJ-CSQ

La mobilisation, organisée par le Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi (MASSE) et ses partenaires, a eu lieu dans le cadre de la Semaine nationale des chômeuses et des chômeurs 2024, autour du thème L'assurance-emploi : un régime sexiste à réformer !

Le MASSE dénonce le régime actuel, qui pénalise particulièrement les femmes : « En raison des responsabilités familiales qu'elles assurent encore en plus grande partie, les femmes sont plus nombreuses à travailler à temps partiel ou à bénéficier de prestations spéciales, une situation qui n'est pas encore prise en compte par la Loi sur l'assurance-emploi et qui pénalise en termes d'admissibilité et du calcul des prestations. »

Pour une réforme du régime actuel

Les personnes ayant pris part à la mobilisation ont parcouru le centre-ville de Chicoutimi et ont fait un arrêt symbolique devant une succursale de Service Canada avant de se diriger vers le bureau du député conservateur Richard Martel.

Cette action visait à faire pression sur le gouvernement fédéral pour qu'il prenne des mesures concrètes en vue de moderniser un régime d'assurance-emploi jugé inadapté aux réalités actuelles du marché du travail.

Rappelons qu'une vaste coalition de groupes de défense des sans-emploi, soutenue par les principales organisations syndicales québécoises, dont la CSQ, a récemment lancé une campagne intitulée L'assurance-emploi doit nous protéger. Cette dernière vise à interpeller le gouvernement et à réclamer une réforme en profondeur du programme d'assurance-emploi.

La mobilisation en images

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La réforme Dubé

12 novembre 2024, par Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) — , , ,
La réforme du ministre de la Santé, Christian Dubé, transformera fondamentalement la gestion du réseau de la santé et des services sociaux au Québec en regroupant tous les (…)

La réforme du ministre de la Santé, Christian Dubé, transformera fondamentalement la gestion du réseau de la santé et des services sociaux au Québec en regroupant tous les établissements publics, excluant ceux du Grand-Nord, sous l'égide de l'agence Santé Québec. Cette nouvelle agence deviendra l'employeur unique des 350 000 employé-e-s du réseau public de la santé et des services sociaux.

La Loi sur la gouvernance du système de santé et de services sociaux (auparavant projet de loi n° 15) introduit la plus grande réforme législative depuis l'adoption du Code civil. Or, son adoption en décembre 2023 a été faite sous le bâillon, une procédure législative antidémocratique permettant au gouvernement de la CAQ d'imposer son adoption. Un processus particulièrement inquiétant considérant l'ampleur de ce projet.

Dès que le ministre Dubé a annoncé ses intentions de réformer le réseau de la santé, la Fédération a multiplié ses interventions afin d'influencer cette réforme pour les 80 000 professionnelles en soins qu'elle représente, mais également pour s'assurer de l'accès à des soins et des services de qualité et sécuritaires pour la population.

La FIQ suit depuis plusieurs mois ce dossier puisque cette réforme aura des impacts importants sur les professionnelles en soins. Pour vous aider à y voir plus clair, la Fédération met à votre disposition l'information disponible actuellement. Il est important de noter que de nombreuses incertitudes demeurent quant à la mise en place de cette réforme, notamment sur ses impacts concrets dans le quotidien des professionnelles en soins. Cette page Web sera mise à jour pour refléter les annonces du gouvernement.

Suite logique des réformes du passé
Le réseau de la santé et des services sociaux a subi maintes réformes au cours des dernières décennies. La réforme Couillard en 2003, la réforme Barrette en 2015, et maintenant la réforme Dubé en 2024. Chacune de ces réformes a contribué à fragiliser notre réseau de la santé en fusionnant des centres d'activités à vocations variées, en centralisant davantage la prise de décision entre les mains de décideurs haut placés, en diminuant l'accès aux services de prévention et en créant une dépendance toujours plus grande envers le privé.

Le ministre Christian Dubé n'est pas différent de ses prédécesseurs ; l'agence Santé Québec s'inscrit dans une suite logique des réformes du passé. Nous assistons à l'aboutissement des grandes réformes antérieures imposées dans le réseau de la santé. Pourtant, il ne fait aucun doute que ces dernières n'ont ni amélioré les conditions de travail des professionnelles en soins ni les conditions des soins au Québec.

La réforme Dubé en bref

La réforme Dubé a permis la création de l'agence Santé Québec, le 29 avril 2024. Cette société d'État sera l'employeur de 350 000 salarié-e-s du réseau de la santé au Québec, devenant ainsi l'un des plus gros employeurs au Canada, juste derrière le gouvernement fédéral. La création de cet employeur unique va engendrer la fusion des établissements, donc des employeurs, mais l'organisation du territoire devrait continuer d'exister, sous forme de sous-structure de Santé Québec. Les établissements privés conventionnés et les établissements du Grand-Nord ne sont pas touchés par cette fusion.

L'agence Santé Québec aura également le pouvoir de coordonner et de soutenir des établissements privés et autres prestataires, éliminant ainsi toute distinction entre le public et le privé. Ceci représente un virage important et dangereux. En effet, selon le ministre Christian Dubé, l'objectif d'ouvrir l'offre de services au privé est d'améliorer l'accès aux soins, mais il est bien connu que l'ouverture vers le privé a plutôt l'effet inverse en s'accaparant les ressources limitées du réseau public. C'est dans cette optique que la FIQ se joint en 2023 à la campagne « La réforme Dubé, tout sauf santé », campagne portée par plusieurs organisations syndicales et communautaires.

Cette agence est séparée du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et a pour mission de coordonner les activités sur le terrain, laissant le MSSS responsable uniquement des orientations politiques et des programmes, permettant ainsi une forme de déresponsabilisation du ministère envers les employé-e-s du réseau.

Des changements sont nécessaires dans le réseau de la santé du Québec, mais il est clair pour la FIQ que cette réforme de structure ne répond pas aux besoins les plus criants. Plusieurs recommandations avaient été émises par la société civile et par la Fédération pour recadrer cette réforme dans les besoins du réseau, les 30 recommandations de la FIQ n'ont pas été considérées par le ministre Dubé. Ainsi, la FIQ et ses syndicats affiliés continueront de dénoncer cette réforme qui s'inscrit dans la lancée antiféministe, antidémocratique et antisyndicale du gouvernement actuel.

Les impacts sur les droits des professionnelles en soins

La réforme Dubé a des impacts importants sur les droits des professionnelles en soins, notamment en lien avec la défense de leurs conditions de travail. En fusionnant les établissements de santé en un seul employeur, la loi prévoit la fusion des accréditations syndicales existantes et une accréditation unique pour chacune des 6 catégories d'emploi qui composent le réseau de la santé. Ainsi, à moyen terme, les syndicats locaux sont voués à disparaître, démantelant les structures actuelles et posant des défis importants pour la démocratie syndicale.

Voici une ligne du temps détaillant les grandes étapes de la mise en place de Santé Québec qui auront des impacts sur la défense des conditions de travail des professionnelles en soins. À noter que les dates projetées sont approximatives et pourraient être modifiées à tout moment par le gouvernement.

De 4 à 6 catégories d'emplois

Avec la réforme Dubé, les catégories d'emplois dans le réseau de la santé sont modifiées. La catégorie 1 regroupera exclusivement les infirmières et infirmières auxiliaires. Les inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques seront quant à elles regroupées avec les techniciennes et professionnelles de soutien spécialisé et en soins cardiorespiratoires dans la catégorie 6. Cela inclut, par exemple, l'imagerie médicale et la radio-oncologie.

Le gouvernement a décidé de scinder la catégorie 1, même si les infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques ont une expertise et une organisation du travail complémentaire dans les soins directs donnés aux patient-e-s. Cette scission nuira inévitablement à l'organisation du travail et à la stabilité des équipes.

La FIQ n'a ménagé aucun effort pour faire reculer le ministre Dubé pour maintenir la catégorie 1 dans sa forme actuelle et continuera à militer en ce sens. Une pétition a d'ailleurs été déposée à l'Assemblée nationale. Cependant, si le transfert vers la catégorie 6 se concrétise tel que prévu dans la loi, la FIQ fera partie des organisations syndicales qui pourront s'inscrire sur le bulletin de vote pour cette catégorie. Ultimement, ce sont les membres qui voteront pour l'organisation syndicale de leur choix.

Suite logique des réformes du passé

Le réseau de la santé et des services sociaux a subi maintes réformes au cours des dernières décennies. La réforme Couillard en 2003, la réforme Barrette en 2015, et maintenant la réforme Dubé en 2024. Chacune de ces réformes a contribué à fragiliser notre réseau de la santé en fusionnant des centres d'activités à vocations variées, en centralisant davantage la prise de décision entre les mains de décideurs haut placés, en diminuant l'accès aux services de prévention et en créant une dépendance toujours plus grande envers le privé.

Le ministre Christian Dubé n'est pas différent de ses prédécesseurs ; l'agence Santé Québec s'inscrit dans une suite logique des réformes du passé. Nous assistons à l'aboutissement des grandes réformes antérieures imposées dans le réseau de la santé. Pourtant, il ne fait aucun doute que ces dernières n'ont ni amélioré les conditions de travail des professionnelles en soins ni les conditions des soins au Québec.

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5ème session de l’université d’été en droits de l’homme

Les activités marquant la 5ème Session de l'Université d'Été des Droits de l'Homme ont été officiellement lancées ce lundi 2 Septembre 2024 lors d'une cérémonie d'ouverture à (…)

Les activités marquant la 5ème Session de l'Université d'Été des Droits de l'Homme ont été officiellement lancées ce lundi 2 Septembre 2024 lors d'une cérémonie d'ouverture à la salle de conférence Victor Benoît à l'Office de la Protection du Citoyen, à Bourdon.
L'évènement a été rehaussé par la présence de plusieurs personnalités issues des organisations internationales des droits de l'homme en Haïti et de la société civile haïtienne.

Lancée autour du thème : " LES FORCES DE MAINTIEN DE LA PAIX ET LES DROITS DE L'HOMME", cette formaion, organisée par l'Institut Haïtien des Droits de l'Homme (IHDH) se déroulera à l'OPC du 2 au 6 Septembre 2024.

Cette formation de courte durée avait pour objectif d'offrir aux participants-es des droits de l'homme un accès à un enseignement d'excellence dans le domaine de la Promotion et de la Défense des Droits de l'Homme avec des enseignants internationaux

Cette 5ème session a été meublée par des cours fondamentaux, des séances portes ouvertes permettant aux participants d'échanger avec des experts des droits de l'homme et être éclairées sur des notions spécifiques

L'instance organisatrice a profité de l'occasion pour rendre un vibrant hommage au professeur Michel Soukar pour ses nombreuses réfléxions autour des horreurs et barbaries notamment celles du 26 avril orchestrées par le régime de Duvalier en Haïti.

Historien, écrivain et journaliste, Michel Soukar vit à Port-au-Prince. Il est connu pour son engagement politique. Il a publié une vingtaine d'ouvrages, dans des genres différents : poésie, théâtre, histoire, roman. Il est l'une des voix des plus écoutées en Haïti

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Humanitaire ; l’urgence de nourrir les familles déplacées

Visant à soulager les familles déplacées à bout de souffle, l'Organisation des Cœurs pour le Changement des Enfants Démunis d'Haïti (OCCED'H) a apporté ce mardi 3 septembre (…)

Visant à soulager les familles déplacées à bout de souffle, l'Organisation des Cœurs pour le Changement des Enfants Démunis d'Haïti (OCCED'H) a apporté ce mardi 3 septembre 3024 une aide alimentaire au profit des enfants ayant fui les violences des gangs armés et actuellement réfugiés dans les sites de Jean-Marie Vincent à Carradeux et de l'école Joseph C. Bernard sur la Route de Frères.

Cette initiative visait à répondre à certains besoins urgents des personnes déplacées suite aux violences des gangs armés au niveau de certains quartiers.

Environ 600 enfants ont bénéficié de ces kits, comprenant du riz, des pois, des spaghettis, de l'huile, du savon, des serviettes hygiéniques, ainsi que d'autres produits essentiels. Ces bénéficiaires proviennent de divers quartiers, notamment Tabarre, Torcel, Pernier et les zones avoisinantes.

L'OCCED'H dit compter sur la solidarité d'autres secteurs pour continuer à assister, dans la mesure du possible, les familles déplacées notamment les enfants.
Pofondément préoccupée par cette crise humanitaire, cette structure oeuvrant dans le domaine des droits humains invite le gouvernement haïtien à adopter des mesures urgentes en vue d'améliorer les conditions de vie des catégories les plus vulnérables.
Il est important de préciser que cette distribution avait reçu le soutien de « Food for the Poor. »

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France : Magistral coup de mobilisation des supporters du PSG pour la détresse palestinienne.

12 novembre 2024, par Omar Haddadou — , , , ,
Le défi des supporters parisiens déployant un Tifo démesuré frappé de « FREE PALESTINE, ce mercredi au stade Parc des Princes dans le 16ème Arr, témoigne de l'abyssalité de la (…)

Le défi des supporters parisiens déployant un Tifo démesuré frappé de « FREE PALESTINE, ce mercredi au stade Parc des Princes dans le 16ème Arr, témoigne de l'abyssalité de la cruauté. Dimanche, les frappes israéliennes ont fait des dizaines de morts, principalement des femmes et des enfants, en plein sommeil !

De Paris, Omar HADDADOU

Que faire, quand le colonisé est condamné à périr, avec l'omerta comme acte de décès ?
Emmanuel Macron se rendra finalement au Stade de France pour assister au match France-Israël, jeudi 14 novembre 2024, sous haute surveillance. Objectif : « Envoyer un signal fort de fraternité et de solidarité avec Israël », rapportent les médias. Nicolas Sarkozy, ancien Président, ne résistant pas aux feux de la rampe, y sera.

Y a des moments où il faut savoir se mouiller !
Les réactions, ici à Paris, dans la rue, les cafés et les réseaux sociaux, à propos de l'attitude du chef de l'Etat, sont d'une virulence acérée : « Incroyable scène de soumission XXL ! » pointe un tweet, quand le second abonde : « Notre carpette soumise, assistera au match ».
L'allégeance du Président français a charrié dans son aspiration la position de son ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau : « Hors de question de délocaliser la rencontre ! Cela serait un aveu de faiblesse de déplacer ou de renoncer » déclare-t-il fermement, interdisant les drapeaux, autres que français et israéliens. Ce dernier est acculé à montrer ses muscles sous peine d'éviction.
La rencontre des deux équipes aura comme bouclier sécuritaire, 4 000 policiers et gendarmes mobilisés, 2 500 autour de l'enceinte du stade, 20 000 dans les transports. Dans ce climat de tensions bien ampoulées, l'attention reste vive sur le rassemblement d'un Mouvement Juif International, en présence du ministre israélien de l'Extrême Droite, prévu la veille du match dans la capitale française.

Les partis de Gauche et les personnalités françaises ont appelé à l'annulation du match. D'autres à sa délocalisation. « Mais vous vous rendez compte ? Le faire serait une victoire des antisémites ! » s'indigne la présentatrice du débat sur Europe 1, Pascale de la Tour Dupin, affirmant son parti pris, au moment où le Conseil de Sécurité israélien recommanderait à ses ressortissants de ne pas se rendre au match.
A l'apogée de la folie génocidaire au Moyen- Orient

Le ministre de l'Intérieur, Bruneau Retailleau, fait mine de ne pas « capté » qu'à cœur vaillant, rien d'impossible ! La prouesse des Ultras du PSG dans la tribune, tient de la magie de David Coperfield. L'homme a vu rouge en découvrant le militantisme s'afficher dans les gradins et s'empressa à dégainer son nerf de bœuf procédurier : « Je vais demander des explications au Paris Saint-Germain (club). C'est inacceptable ! Une bâche de dizaine et dizaine de mètres »
Vous l'aurez compris : La banderole FREE PALESTINE !, inacceptable ! Le génocide si ! Le locataire de la Place Beauvau multiplie les coups de boutoir contre le chantier de la Gauche depuis sa désignation dans le gouvernement Barnier le 21 septembre 2024. Sa fermeté marcherait crânement vers l'absolutisme et dédaigneusement sur les fondements de la Démocratie. L'homme de la Droite dure a pondu, ces dernières heures, des ukases à hérisser le Nouveau Front Populaire : « Mise au pas de la Jeunesse à reciviliser des quartiers défavorisés avec la suppression des Allocations Familiales et l'Internat forcé dès 10 ans ».

Les tragiques incidents d'Amsterdam, le 7 novembre, ont plongé la France de Macron dans le funambulisme claudicant. La classe politique vit une véritable guerre de tranchées avec comme cible, la Gauche. Ses députés (es) Marie Mesmer et Hadrien Clouet essuient des procédures judiciaires de la part de Retailleau pour la vaillance de leurs déclarations : « Le ministre de l'Intérieur et ses Journalistes de Préfecture sont des petites frappes fascistes ! », assénait Clouet.

QUAND LE PEUPLE DEVIENT REPORTER !

Que nous renseigne ce Tifo colossal des supporters du P.S.G acquis à la cause palestinienne ?

Que le silence est pire que l'extermination collective ! Que cette force de frappe médiatique spectaculaire, a rendu fous les partisans de l'épuration à huis-clos. L'introduction du slogan FREE PALESTINE, son déploiement savamment calculé pour un impact planétaire, a donné lieu à des ulcérations inimaginables.
Le choix du timing à quelques minutes du coup d'envoi du match, mercredi au Parc des Princes, pour capter longuement l'attention de l'arsenal médiatique, est incroyablement judicieux ! D'où la pertinence du message de détresse véhiculé. Les gardes- fous tombent ! Le politique et la plume partisane se rongent les sangs sur l'introduction du slogan mobilisateur. On crie à la complicité. On spécule...

L'instantanéité de mise en évidence s'opérait d'une manière silencieuse et pacifique évoquant un lever de rideau magistralement exécuté, dans un théâtre prestigieux parisien.

C'est dans la boite, FREE PALESTINE ! Le support audiovisuel est déjà envoyé à des proches aux Etats-Unis, au Canada, en Europe, Asie et en Afrique (le buzz). Les atrocités à Gaza et au Liban ne sont pas une simulation aboutie de l'IA, mais une réalité funeste dictée par Netanyahou et l'Alliance Atlantique.
A l'heure où Trump œuvre pour une désescalade en Ukraine en appelant Poutine, plus de 50 enfants ont été tués en 48 heures à Gaza. L'ONU fait état d'une situation catastrophique, empreinte de famine, de maladie et d'exode. Au Liban, le bilan de l'agression israélienne s'alourdit à 3 220 morts.
L'impunité a triomphé, la résistance triomphera !
O.H

Liban : Le bilan des victimes

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L’interdiction des licenciements, c’est urgent !

Michelin, Auchan, Airbus, Vencorex… les plans de licenciements s'intensifient. Depuis quelques semaines, le secteur automobile en Europe se mobilise contre ce que les patrons (…)

Michelin, Auchan, Airbus, Vencorex… les plans de licenciements s'intensifient. Depuis quelques semaines, le secteur automobile en Europe se mobilise contre ce que les patrons et les actionnaires veulent présenter comme inéluctable : les suppressions d'emplois pour rétablir les marges face à la concurrence internationale.

Crédit Photo Photothèque Rouge/MILO.

Communiqué du NPA-l'Anticapitaliste

Avec toujours la même logique destructrice : les travailleurEs servent de variables d'ajustement. En France, ce sont notamment les salariéEs de MA France, de Dumarey-Powerlidge à Strasbourg, ou encore de Valeo qui sont en première ligne.

D'autres secteurs sont également touchés : la chimie, la grande distribution,… Les salariéEs de la centrale de Cordemais, près de Nantes sont mobiliséEs ainsi que celles et ceux de Vencorex en Isère. Auchan vient d'annoncer la suppression de 2300 emplois et Michelin, de 1250 postes à Vannes et Cholet, où une grève puissante vient d'éclater.

A ces plans de licenciements s'ajoutent Airbus et ses 2500 postes menacés, et tant d'autres comme Walor, Milee, ExxonMobil… Au 18 octobre 2024, la CGT recensait 180 plans de licenciements en un an[1].

Ces entreprises ont pu bénéficier par le passé de cadeaux fiscaux et d'aides en tout genre. Pendant des années, elles se sont accaparées de l'argent public et licencient à tour de bras aujourd'hui. C'est inacceptable. Michel Barnier peut bien montrer du doigt les directions de Michelin et d'Auchan, personne n'est dupe. Son gouvernement va accompagner la casse sociale.

Le secteur public non plus n'est pas épargné, comme dans l'Education Nationale où 4000 postes seront supprimés. La Cour des Comptes préconise quant à elle la suppression de 100 000 postes dans la Fonction Publique Territoriale.

Pour que cesse la destruction capitaliste des emplois, des vies et du vivant, il est vital que ces luttes convergent. La propriété privée des moyens de production, qui ne sert que les intérêts particuliers d'une minorité, est la principale responsable de la catastrophe sociale et écologique en cours …

Il est temps d'y mettre fin. Ce serait faire œuvre de salubrité publique au bénéfice de la majorité, celles et ceux qui produisent les richesses.

Dans l'immédiat, il devient urgent d'imposer l'interdiction des licenciements et la reconversion des emplois pour produire ici sans polluer, pour que les salariéEs décident avec la population ce dont elle a besoin et comment le produire.

Il est tout aussi urgent que l'ensemble de la gauche sociale et politique, dans le Nouveau Front Populaire et en dehors, que toutes les équipes syndicales concernées se regroupent pour organiser une manifestation centrale à Paris contre les licenciements, contre les suppressions de postes, et contre le gouvernement Macron-Barnier.

[1] CGT. 180 plans de licenciements en un an.

https://npa-lanticapitaliste.org/

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Bernie Sanders, l’Amérique et nous

12 novembre 2024, par Roger Martelli — , , ,
Pour (re)construire une gauche qui gagne à Washington comme à Paris, encore faut-il comprendre pourquoi elle a perdu, pourquoi les autres ont gagné et surtout, comme être utile (…)

Pour (re)construire une gauche qui gagne à Washington comme à Paris, encore faut-il comprendre pourquoi elle a perdu, pourquoi les autres ont gagné et surtout, comme être utile au peuple.

Bernie Sanders, l'Amérique et nous
11 novembre 2024 | Roger Martelli
Sans-titre-1-2

Bernie Sanders le magnifique a une fois de plus parlé au nom des sans-voix, des plus humbles, méprisés et relégués, qu'ils soient blancs, noirs, latinos, colored, clandestins ou légalisés. Il poursuit ainsi la trace de cette gauche démocrate qui avait su, dans les années trente du 20e siècle, prendre langue avec le mouvement ouvrier.

En France, beaucoup dans la gauche de gauche ont saisi opportunément la balle au bond pour redire ce qui coule d'évidence depuis longtemps : en s'éloignant des aspirations populaires, une grande part de la gauche a lâché la proie pour l'ombre et perdu les catégories populaires qui lui avaient donné sa force et sa légitimité. Mais on ne peut se contenter des bonnes résolutions et promettre que l'on va enfin se préoccuper de ce peuple que l'on avait délaissé. Encore faut-il comprendre pourquoi c'est la pire des droites qui a profité de cette carence et il faut préciser ce qu'il convient de faire pour remonter le courant.

L'extrême droite n'ignore pas la question sociale

On dit parfois qu'il s'agit désormais de remettre la question sociale au premier plan. Aux États-Unis, tout le monde s'accorde ainsi pour dire que deux enjeux ont déterminé massivement les votes : au premier rang « l'économie » (inflation, chômage, dépenses de logement et de santé…) et « l'immigration » en second lieu. Mais il reste alors à éclairer le mystère d'un véritable paradoxe : comment se fait-il que les inquiétudes populaires nourries par « l'économie » et le ressentiment à l'égard des « élites » aient stimulé le vote pour le candidat le plus fortuné, le plus libéral et le plus porté à accélérer le démantèlement de cet État-providence qui avait tout de même atténué la souffrance sociale et la spirale des inégalités ?

Et au-delà du scrutin présidentiel, on ne peut pas éluder le fait que, quelle que soit la candidature démocrate, plus ou moins à gauche, plus radicale ou présumée modérée, elle n'a pas enrayé la sensible progression du camp républicain. Incriminer le poids des médias et des réseaux sociaux ? Bien sûr qu'ils ont joué. Mais on sait depuis longtemps que les moyens de la persuasion sont concentrés du côté de l'aliénation et pas de l'émancipation. Cela n'a pas empêché de belles victoires dans le passé ; pourquoi ce n'est-il pas possible aujourd'hui ?

Il ne suffit donc pas de proclamer que l'on est pour le « social », ni même d'énumérer les propositions redistributrices allant dans ce sens. Qu'est-ce qui fait la grande force de l'extrême droite, aux États-Unis comme en France ? La capacité à raccorder chaque problème à une vision globale qui, au nom du bien-être, disqualifie tout recours aux principes du commun et de la solidarité collective. Dans un monde de plus en plus inégalitaire, déchiré et dangereux, les extrêmes droites exaltent les seules vertus d'une protection nationale, fondée sur la puissance étatique et garantie par la clôture des frontières et des murs. Et dans ce monde dont on ne veut pas voir les logiques économiques et sociales profondes qui le parcellisent, on se contente de fustiger les « assistés », c'est-à-dire les populations les plus fragiles, et notamment celles des nouveaux venus.

Une vision cohérente du monde

Puissance pouvant aller jusqu'à l'arrogance, protection, clôture et refus du « grand remplacement » sont les pivots d'une vision cohérente du monde. Au début des années 1990, quand s'éteignait la guerre froide, un politiste américain – Samuel Huntington – avait suggéré que le monde était désormais régi par le « choc des civilisations »1, et notamment par le conflit entre l'Occident démographiquement en déclin et l'Islam expansif. Ce que l'on oublie, c'est que ce même Huntington avait été quelques années plus tôt l'un des promoteurs de l'idée selon laquelle la démocratie représentative devait laisser la place à une « gouvernance » conduite par ceux qui « savent »2. Et c'est encore Huntington qui, en 2004, publia un essai dans lequel il explique que les États-Unis perdent leur identité, parce que leur noyau fondateur (blanc, anglo-saxon, protestant) était menacé par la poussée démographique des minorités, notamment latino-américaines3.

Le mépris de la démocratie, la peur de l'autre et l'obsession de l'identité menacée… Au fond, Donald Trump s'est installé dans cette vision redoutable qui relie l'autoritarisme, l'exaltation de la violence, l'esprit de concurrence, le repli sur soi et le refus communautariste de ce qui vient de l'extérieur. C'est sur cette base qu'il a conforté son impact dans les milieux modestes du « rural ». C'est pour n'avoir pu ni même voulu lui opposer une autre vision que les démocrates ont perdu.

Pour regagner le terrain laissé à d'autres, une gauche bien à gauche laissera au vestiaire les explications plus ou moins rassurantes. Par exemple, il n'est pas vrai que les contingents du peuple ralliés à la droite extrême n'ont fait qu'exprimer conjoncturellement leur mécontentement. Ils n'ont pas seulement exprimé de la colère ou choisi par défaut et provisoirement de cocher la case des Républicains. Il y a désormais dans le vote populaire, aux États-Unis comme ailleurs, une part d'adhésion, plus ou moins consciente mais réelle, à un système cohérent de représentations et au projet qui en découle.

Il n'est pas plus sûr qu'il suffise de s'adresser spécifiquement aux abstentionnistes pour gagner leur vote, alors que l'on sait que, parmi les ressorts de l'abstention, se trouvent la méfiance à l'égard de la politique et au-delà la conviction fataliste que l'on ne peut pas changer vraiment l'ordre inégalitaire des sociétés. Or cette méfiance et ce fatalisme se trouvent être des ressorts affectifs majeurs pour que l'on se tourne vers une extrême droite qui, en France, peut arguer du fait qu'elle a été continûment écartée de tout pouvoir depuis 1944. Attiser la colère ne sert donc à rien, si ne se rompt pas le lien qui, en la rattachant à un projet rétrograde, la transforme en ressentiment, plus prompt à vitupérer les boucs émissaires qu'à récuser une logique sociale dominante. Il faut alors se convaincre de ce que le lien ne se rompra pas si un autre ne s'impose pas, autour d'un récit capable de concurrencer celui des extrêmes droites, comme celui des libéraux. Ce qui ne s'énonce pas ne saurait s'imposer, dans le grand choc des idées.

Savoir être utile au peuple

La gauche n'attirait pas une part conséquente des catégories populaires parce qu'elle affirmait être de leur côté mais parce qu'elle leur semblait utile. Or cette utilité était globale et se déclinait en trois grandes fonctions au moins. La gauche – en France notamment au travers du Parti communiste pendant quelques décennies – était capable de représenter dans les institutions les relégués, les damnés de la terre, ces « classes dangereuses » que l'on cantonnait soigneusement aux portes de la cité. Elle les représentait d'autant plus que les formations qui la composaient étaient plus ou moins à l'image de celles et ceux auxquels elles s'adressaient, immergées dans leurs sociabilités, partageant durablement leurs conditions de vie, leurs territoires, leurs angoisses et leurs aspirations.

Cette gauche ne se contentait pas toutefois de donner la parole aux sans-voix et d'exprimer leur colère. Elle offrait aux catégories populaires la possibilité de sortir de leur enclavement et de leur relégation, en s'appuyant sur l'image rêvée d'une société d'égalité, de responsabilité et de partage. C'est cette espérance qui donnait aux luttes un sens progressiste et propulsif et qui éloignait la colère des replis sur soi et des ressentiments. Cette espérance a buté sur les errements du soviétisme, l'enlisement du socialisme et les aléas du tiers-mondisme. Elle n'est pas seulement à retrouver mais à reconstruire.

Enfin, cette gauche offrait aux catégories populaires des perspectives politiques à vocation majoritaire, capables de donner des débouchés aux luttes et évitant ainsi qu'elles ne soient que des combats défensifs, capables de limiter le poids des aliénations, mais sans pour autant mettre en question les racines de leur emprise.

Qui veut regagner le peuple doit savoir que c'est en rebâtissant ces trois fonctions que l'on pourra faire, des catégories populaires aujourd'hui éclatées, un peuple rassemblé et donc un peuple politique. Hors de cette ambition, il n'y a au mieux que de possibles victoires partielles et, au pire, un terrain politique laissé aux forces rétrogrades dotées d'un projet.

Les bases d'un projet alternatif global, reliant des propositions, un récit mobilisateur et une stratégie rassembleuse existent d'ores et déjà. Mieux vaut toutefois avoir la lucidité de dire que leur mise en cohérence est encore devant nous. Tant qu'elle n'est pas opérationnelle, le peuple sera aux abonnés absents ou ira chercher ailleurs des solutions.

Notes

1. La Crise de la démocratie, rapport de la Commission Trilatérale, rédigé par Michel Crozier, Samuel Huntington et Joji Watanuki, 1975

2. Le Choc des civilisations, 1997

3. Qui sommes-nous ? Identité nationale et choc des cultures, 2004

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« Briser la chaîne » : Un essai vigoureux, révolté et argumenté

12 novembre 2024, par Nicolas Béniès — ,
« Briser la chaîne » – et non pas les chaînes, la différence est majeure ici -, au sous-titre volontiers provocateur malgré le point d'interrogation, « misogynes de mère en (…)

« Briser la chaîne » – et non pas les chaînes, la différence est majeure ici -, au sous-titre volontiers provocateur malgré le point d'interrogation, « misogynes de mère en fille ? » pose des questions centrales. Dans cet essai Camille Lextray, avec une rage, une colère dynamique au rire communicatif pour démontrer la nécessité du féminisme.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Combattant beaucoup d'idées reçues contenues dans ce qui s'appelle « le bon sens » autrement dit la perpétuation des règles en usage considérées comme éternelles, elle propose, comme c'est nécessaire à tous les niveaux, de former les formatrices en transformant les rôles dits traditionnels dans le couple. Les mères qui veulent protéger leur fille leur demande souvent, pour éviter les problèmes, de correspondre au modèle ambiant, le modèle du capitalisme patriarcal. Toutes les propositions qui passent par le « petit geste » qui ne sauve rien sont autant de justification du modèle global forgé par le pouvoir des hommes. Le féminisme doit déterminer une vision globale de la société qui passe par la destruction de ce mode de société.

Radicale ? Assurément. Sinon la place des femmes se mesure à l'aune des comportements des mâles dominateurs et elles doivent en faire plus pour être acceptées. Le système broie toute velléité de changement. En passant, l'autrice remet en cause toutes les propositions, à la mode sur les réseaux sociaux, de « développement personnel » qui n'est rien de moins que d'intégrer la concurrence de tous contre toutes pour éviter tout débordement, toute révolte.

Serait-il temps de changer de modèle en changeant toute la société ? Une révolte ? Non une révolution !

Camille Lextray : Briser la chaîne, Camille Lextray, Éditions LEDUC, collection Société.

Nicolas Béniès

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L’attentat antiféministe de Polytechnique Une mémoire collective en transformation

12 novembre 2024, par Mélissa Blais — , ,
Trente-cinq ans après l'attentat du 6 décembre 1989, où en sommes-nous ? Comment percevons-nous cet événement déterminant de l'histoire récente ? D'abord paru en 2009 sous (…)

Trente-cinq ans après l'attentat du 6 décembre 1989, où en sommes-nous ? Comment percevons-nous cet événement déterminant de l'histoire récente ?

D'abord paru en 2009 sous le titre « J'haïs les féministes ! », ce livre offre un panorama inédit des interprétations antagonistes de la tuerie, durant laquelle 14 jeunes femmes ont été assassinées parce qu'elles étaient des femmes. Il présente aussi les analyses féministes élaborées au fil du temps, et les controverses qu'elles ont suscitées. Dans cette édition revue, augmentée et coiffée d'un nouveau titre, Mélissa Blais prend acte du chemin parcouru.

À travers un examen minutieux des discours médiatiques, des commémorations et d'œuvres culturelles, dont le film Polytechnique et la pièce Projet Polytechnique, et grâce à des décennies de recherche et de militantisme, elle constate une lente transformation de la mémoire collective. Or, la menace d'un ressac antiféministe n'est jamais loin : la dimension politique du geste du tueur serait-elle, encore aujourd'hui, éludée ?

« Comment est-il possible de saisir ce que les féministes ont réellement dit après le massacre du 6 décembre ? Si une infime minorité de femmes ont dénoncé « les Marc Lépine qui sommeillent en tout homme que nous côtoyons », la majorité féministe ne s'est pas exprimée dans ces mots. Malgré cela, des journalistes ont vite fait de laisser croire que toutes les féministes entretenaient une pensée simpliste à l'endroit des hommes, caricaturant du même coup l'ensemble du mouvement. »

Mélissa Blais est professeure de sociologie au Département des sciences sociales de l'Université du Québec en Outaouais. Elle a notamment codirigé les ouvrages Le mouvement masculiniste au Québec. L'antiféminisme démasqué et Retour sur un attentat antiféministe. École Polytechnique 6 décembre 1989, parus aux Éditions du remue-ménage.

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Les réalités sont toujours les plus fortes

12 novembre 2024, par Jean-François Delisle — ,
On s'alarme de l'arrivée à la présidence de Donald Trump, pour la seconde mais dernière fois, puisque la constitution américaine limite à deux les mandats qu'un président peut (…)

On s'alarme de l'arrivée à la présidence de Donald Trump, pour la seconde mais dernière fois, puisque la constitution américaine limite à deux les mandats qu'un président peut exercer. Lui-même d'ailleurs, de son propre aveu, n'en briguerait pas un troisième, même si c'était possible. L'âge fait aussi partie des tendances lourdes en politique...
Demandons nous : de quelle marge de manoeuvre dispose-t-il donc en politique étrangère ? En dépit de son autoritarisme et de son tempérament colérique, il ne pourra imposer ses quatre volontés à la planète.

Tout d'abord, un repli marqué des États-Unis sur eux-mêmes (l'isolationnisme) est impensable. Trump et sa garde rapprochée ne peuvent pas ne pas en être conscients. Le gouvernement américain a trop d'intérêts majeurs économiques, commerciaux et militaires à défendre partout dans le monde pour retourner à l'ancien isolationnisme. Trump devra donc les administrer et s'impliquer dans les tensions et conflits qui déchirent des pays-clés. Un certain repli est toutefois possible, mais l'impérialisme américain va se maintenir, vaille que vaille. Mais Trump va sans doute devoir modifier sa ligne d'action, puisque l'impérialisme américain est affaibli et toujours plus contesté par des puissances montantes comme la Chine.

Prenons deux exemples d'une actualité frappante : l'Ukraine et la Palestine.

Dans le premier cas, Trump a laissé entendre qu'il pourrait cesser(ou diminuer beaucoup) la fourniture d'armes et de munitions à Kiev et dans la foulée, qu'il inciterait Volodymyr Zelenski, le président ukrainien à négocier avec Vladimir Poutine. De ses allusions à ce problème, il ressort que le gouvernement ukrainien devrait faire les concessions territoriales nécessaires pour satisfaire le Kremlin, c'est-à-dire lui céder l'essentiel des territoires qu'il a déjà conquis. Pour Zelensky, l'entrée à la Maison-Blanche d'un président républicain constitue une défaite. Arrivera-t-il à convaincre Trump de changer d'idée ? Cette hypothèse paraît peu probable. Le président américain tient à détendre les relations de son pays avec la Russie ; après tout, il considère Poutine comme un allié et un ami.
Passons au cas palestinien à présent. On sait que Donald Trump est un pro-israélien fini. Mais sur ce plan, il ne fait que suivre la politique américaine traditionnelle de soutien à l'État hébreu, que le gouvernement soit démocrate ou républicain. Biden, son prédécesseur, s'est beaucoup querellé avec Benyamin Netanyahou au sujet de la guerre avec Gaza , mais il a toujours refusé d'adopter envers Israël les mesures de rétorsion économiques et commerciales pour l'obliger à cesser le massacre des Gazaouis et Gazaouies. Au contraire, il a continué à approvisionner l'armée israélienne en armes et munitions.

Mais l'actuel conflit ne peut durer indéfiniment sous peine de saborder le peu de crédibilité que conserve Washington auprès des populations arabes. Même le gouvernement saoudien a du geler le processus de normalisation de ses relations avec l'État hébreu. Le Hamas (approvisionné en armes et munitions par Téhéran) a démontré une surprenant capacité de résilience devant la puissance militaire israélienne et il continue à la harceler. Le conflit s'est étendu au Sud-Liban où le Hezbollah, lui aussi soutenu par l'Iran), tient bon. Le risque d'un embrasement régional de la région par le conflit demeure, ce qui ne peut que déplaire à Trump, qui n'aime pas ;la guerre, perturbatrice de la bonne marche du commerce. Devant les pertes qui s'alourdissent, la population israélienne montre des signes de lassitude et de colère vis-à-vis du gouvernement Netanyahou, corrompu et incompétent. Notamment les familles des otages encore détenus par le Hamas manifestent avec ténacité contre l'extrême-droite au pouvoir à Tel-Aviv.

Même aux États-Unis, l'électorat en a marre de ces deux conflits qui s'éternisent. Les organisations arabo-américaines font de plus en plus sentir leur présence auprès de la classe politique. Le printemps dernier, d'importantes manifestations étudiantes propalestiniennes ont secoué plusieurs campus. Rien ne dit qu'elles ne reprendront pas éventuellement.

L'administration Trump devra donc trouver au moins une amorce de solution permanente à l'affrontement entre Israël et la Palestine. Pour y arriver, il lui faudra prendre une certaine distance à l'égard de son protégé du Proche-Orient. Jusqu'où est-elle prête à aller ? Impossible à dire pour l'instant, Trump n'étant sans doute pas encore fixé lui-même sur ce problème.

L'abandon de l'Ukraine par la Maison-Blanche serait sûrement mal considérée par l'Union européenne, ce qui l'éloignerait des États-Unis. Elle vient d'ailleurs de signer avec le Japon un pacte de sécurité et de défense qui vise le rapprochement entre la Russie et la Chine et dont Washington est exclu.

Tout ceci sans même aborder la question des relations des États-Unis avec l'Iran, ennemi juré d'Israël. Une guerre commerciale américano-chinoise se dessine aussi à l'horizon. Ces problèmes et bien d'autres requerront des mesures nuancées et mesurées pour éviter une détérioration accrue de la situation générale dans le monde.
De quoi contraindre même le plus chauvin des présidents américains à tenir compte des rapports de force complexes et souvent empoisonnés qui gouvernent le monde.

Affaire à suivre...

Jean-François Delisle

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Déclaration de l’UAW – Dresser une classe ouvrière unie contre le règne des milliardaires.

12 novembre 2024, par United Auto Workers — , ,
Quelle que soit votre position, syndiquée ou non, nous voulons que vous rejoigniez l'UAW dans la lutte contre l'attaque des milliardaires contre la classe ouvrière. 6 (…)

Quelle que soit votre position, syndiquée ou non, nous voulons que vous rejoigniez l'UAW dans la lutte contre l'attaque des milliardaires contre la classe ouvrière.

6 novembre 2024 | United auto workers
https://aplutsoc.org/2024/11/06/declaration-de-luaw-dresser-une-classe-ouvriere-unie-contre-le-regne-des-milliardaires/

« Le pouvoir, c'est la capacité d'un syndicat comme l'UAW à faire dire « oui » à la plus puissante entreprise du monde, General Motors, alors qu'elle veut dire « non ». C'est ça le pouvoir. »
Walter Reuther, président de l'UAW(1946-1970)

En tant que United Auto Workers (UAW), nous avons l'habitude de faire faire à des entreprises et à des gouvernements puissants des choses qu'ils ne veulent pas.

Quel que soit le vainqueur de cette élection, la classe des milliardaires passe à l'offensive. La classe ouvrière doit se lever et rester unie. Nous ne savons pas exactement ce que Donald Trump, Elon Musk et le reste de leurs amis milliardaires ont prévu pour nos communautés, nos familles et notre syndicat, mais nous savons ceci :

LES AMÉRICAINS VEULENT UNE POLITIQUE PRO-TRAVAILLEURS.

La grande majorité des démocrates, des républicains et des indépendants veulent voter pour des politiques et des candidats qui, selon eux, profiteront aux travailleurs américains ordinaires.

EN TANT QUE CLASSE OUVRIÈRE UNIE, NOUS AVONS LE POUVOIR DE GAGNER TOUT ET N'IMPORTE QUOI.

Nous construisons tout et achetons tout. Si la classe des milliardaires veut s'octroyer des réductions d'impôts, augmenter nos prix, détruire notre solidarité et nous priver de nos droits, nous avons le pouvoir de les en empêcher.

SI VOUS ÊTES PRÊTS À VOUS TENIR FACE AUX MILLIARDAIRES, NOUS SOMMES PRÊTS À VOUS SOUTENIR.

Ce n'est pas une question de savoir pour qui vous avez voté. Ce n'est pas une question de votre lieu de travail. Ce n'est pas une question d'où vous venez. Ce qui compte, c'est ce pour quoi vous êtes prêt à vous battre pour retrouver notre dignité en tant que classe ouvrière.

Rejoignez-nous.

Parlez-nous un peu de vous afin que nous puissions nous unir dans notre combat pour construire le pouvoir de la classe ouvrière contre les milliardaires.

Source : https://solidarity.uaw.org/

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Le plan Volkswagen : plusieurs usines fermées et des dizaines de milliers de suppressions d’emplois

12 novembre 2024, par NPA Auto critique — , ,
La présidente du comité d'entreprise de Volkswagen tire la sonnette d'alarme "Aucune usine n'est à l'abri". 7 novembre 2024 | publié par Tageszeitung (…)

La présidente du comité d'entreprise de Volkswagen tire la sonnette d'alarme "Aucune usine n'est à l'abri".

7 novembre 2024 | publié par Tageszeitung
https://inprecor.fr/node/4416

Selon le comité d'entreprise, Volkswagen veut fermer plusieurs usines en Allemagne et supprimer des dizaines de milliers d'emplois.

"Le conseil d'administration veut fermer au moins trois usines Volkswagen en Allemagne", a déclaré la présidente du comité central d'entreprise du groupe, Daniela Cavallo, lors d'une réunion d'information pour le personnel à Wolfsburg. Tous les sites restants devraient en outre réduire leur taille, a-t-elle ajouté. Le groupe a informé les salarié.e.s de ces plans.

Mme Cavallo a annoncé qu'elle s'opposerait à ces plans. "Je ne peux que mettre en garde tous les membres du conseil d'administration et tous ceux qui sont à la tête de l'entreprise : ne vous frottez pas à nous, au personnel de Volkswagen", a-t-elle déclaré sous les applaudissements des salarié.e.s. "Vous êtes au bord de l'escalade !" L'obligation de maintien de la paix sociale prend fin chez Volkswagen fin novembre, après quoi des grèves sont possibles.

Cavallo a de nouveau exigé du groupe qu'il présente une perspective globale pour Volkswagen et pas seulement des mesures d'économie isolées. "Avec nous, il n'y aura pas de tactique du salami, pas de solutions partielles et pas de compromis boiteux", a-t-elle déclaré. "Il nous faut un paquet global pour les trois thèmes. Tout le reste ne sera pas possible avec nous".

Le responsable régional d'IG Metall en Basse-Saxe, Thorsten Gröger, a déclaré dans une première prise de position : "Nous voulons la garantie à long terme des sites, de la charge de travail et de l'emploi. Si les dirigeants là-haut veulent sonner le glas de l'Allemagne, ils doivent s'attendre à une résistance telle qu'ils ne peuvent même pas l'imaginer" !
Licenciements secs possibles à partir de la mi-2025

Selon le comité cental d'entreprise, l'usine d'Osnabrück, qui a récemment perdu un renouvellement de commande espéré de la part de Porsche, est considérée comme particulièrement menacée. De plus, le conseil d'administration prévoit des licenciements secs, a déclaré Cavallo. Selon le conseil d'entreprise, des dizaines de milliers d'emplois risquent d'être perdus. Des départements entiers devraient être fermés ou délocalisés à l'étranger.

"Toutes les usines allemandes de Volkswagen sont concernées par ces plans. Aucune n'est à l'abri !", a déclaré Cavallo, qui ne donne pas plus de détails. Volkswagen emploie environ 120 000 personnes en Allemagne, dont la moitié environ à Wolfsburg. Au total, la marque Volkswagen compte dix usines en Allemagne, dont six en Basse-Saxe, trois en Saxe et une en Hesse. En septembre, Volkswagen avait dénoncé la garantie de l'emploi en vigueur depuis plus de 30 ans .

Des licenciements économiques seraient possibles à partir de la mi-2025.

Mercredi, le groupe et le syndicat IG Metall se rencontreront pour leur deuxième séance de négociations sur le tarif maison de Volkswagen. Lors du premier tour en septembre, Volkswagen avait déjà rejeté les revendications d'IG Metall concernant une augmentation de sept pour cent et avait au contraire mis l'accent sur des économies.

Volkswagen n'avait jusqu'à présent pas donné d'informations plus précises. Selon Cavallo, Volkswagen exige désormais une réduction de salaire de dix pour cent ainsi que zéro augmentation pour les deux années à venir. Le journal Handelsblatt en avait déjà parlé. Début septembre, Volkswagen avait annoncé ne plus exclure des fermetures d'usines et des licenciements économiques.

Publié le 29 octobre 2024 par NPA Auto Critique .Source Tageszeitung 29 octobre 2024. Traduction Pierre Vandervoorde

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Grève historique dans l’automobile en Italie

12 novembre 2024, par NPA Auto critique — , ,
Grève historique nationale et unitaire comme il n'y en a pas eu depuis plus de quarante ans dans les usines de Fiat.en Italie. 7 novembre 2024 tiré du site par NPA - (…)

Grève historique nationale et unitaire comme il n'y en a pas eu depuis plus de quarante ans dans les usines de Fiat.en Italie.

7 novembre 2024 tiré du site par NPA - L'Anticapitaliste | Photo : Sciopero auto, la piazza è piena : « Uniti si vince »
https://inprecor.fr/node/4417

Vingt mille travailleurs sont venus à Rome de toute l'Italie ; Les 40 000 employés du groupe Fiat Stellantis en Italieainsi que les salariés de ses fournisseurs étaient appelés par les syndicats à observer une grève nationale de 24 heures pour réclamer des garanties sur l'emploi et la production de nouveaux modèles.

Depuis février 1994, trente ans exactement, le nombre de véhicules produits en Italie ne cesse de diminuer. Cette année 2024 sera le pire chiffre depuis 1956 une production « inférieure à 500 000 véhicules » pour l'ensemble de l'année, contre plus de 751 000 en 2023. 13 000 travailleurs en moins en quelques années, en 2024 nous terminerons l'année avec moins de 500 mille véhicules produits, Mirafiori est à moins 70% sur 2023, Modena à 76%, Cassino à 44%, Melfi à 62% ».

Le déclin de la production et la lutte sont communs à toute l'Europe et même aux Etats-Unis. Le président de l'UAW Shawn Fain avait envoyé ce matin une vidéo où il portait le sweat de la Fiom. Il a appelé à la lutte globale contre l'« ennemi commun » au cri « quand tous les travailleurs de l'auto s'arrêtent, ils ont tout le pouvoir : sans produits il n'y a pas de profit, sans profit, l'entreprise ne peut pas fonctionner ».

Le secrétaire de la Fiom Michele De Palma a clôturé cette journée.. « Ils pensaient nous avoir divisé, brisé.. nous sommes vraiment en colère et voulons supprimer le mot licenciement de nos vies. Tavares ne parle que de réductions, mais la seule réduction dont Stellantis a besoin est celle de son salaire pour utiliser cet argent pour la recherche et le développement ».

Publié le 19 octobre 2024 par NPA Auto Critique. Source Presse

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708 millions de femmes ne peuvent pas participer au marché du travail en raison du travail de soins non rémunéré

12 novembre 2024, par Organisation internationale du Travail (OIT) — ,
Les responsabilités de soins excluent et freinent des millions de femmes dans le monde entier d'avoir un emploi rémunéré, et avec les changements climatiques et démographiques (…)

Les responsabilités de soins excluent et freinent des millions de femmes dans le monde entier d'avoir un emploi rémunéré, et avec les changements climatiques et démographiques qui vont augmenter la demande de soins, des mesures pour soutenir l'économie des soins sont urgemment nécessaires, selon un nouveau rapport de l'OIT.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/11/10/708-millions-de-femmes-ne-peuvent-pas-participer-au-marche-du-travail-en-raison-du-travail-de-soins-non-remunere/?jetpack_skip_subscription_popup

On estime que 708 millions de femmes dans le monde sont en dehors de la population active en raison de responsabilités de soins non rémunérées, selon de nouvelles estimations mondiales de l'OIT, publiées mardi, à l'occasion de la Journée internationale des soins et de l'assistance.

En 2023, 748 millions de personnes (âgées de 15 ans ou plus) ne participaient pas à la population active mondiale en raison de responsabilités de soins, représentant un tiers de toutes les personnes en âge de travailler en dehors de la population active. Parmi elles, 708 millions étaient des femmes et 40 millions étaient des hommes.

Les nouvelles estimations, présentées dans le rapport statistique de l'OIT « L'impact des responsabilités de soins sur la participation des femmes à la population active », sont dérivées de données provenant de 125 pays. Elles indiquent que les responsabilités de soins représentent le principal obstacle à l'entrée et au maintien des femmes dans la population active, tandis que les hommes sont plus susceptibles de citer d'autres raisons personnelles pour être en dehors de la population active, telles que l'éducation et les problèmes de santé.

Cette disparité marquée entre les sexes souligne le rôle disproportionné que les femmes assument dans l'éducation des enfants, les soins et le soutien aux personnes handicapées et à celles nécessitant des soins à long terme, les tâches ménagères et d'autres responsabilités de soins.

À l'échelle mondiale, environ 1,6 milliard de femmes et 800 millions d'hommes sont en dehors de la population active, avec 45% de ces femmes et 5% de ces hommes citant les responsabilités de soins comme raison de leur non-participation. Parmi les femmes âgées de 25 à 54 ans, la proportion citant les soins comme raison d'être en dehors de la population active s'élève à deux tiers (379 millions de femmes). Les femmes ayant un niveau d'éducation plus faible et celles vivant dans les zones rurales font également face à des obstacles plus importants à la participation au marché du travail en raison des responsabilités de soins.

« Les femmes assument une part disproportionnée des responsabilités de soins, ce qui empêche leur participation à la population active en raison de facteurs tels que de faibles niveaux d'éducation, des opportunités d'emploi limitées, une infrastructure déficiente, la résidence rurale et des systèmes de soins et de soutien inadéquats. De plus, les attentes sociétales et les normes entourant les soins restreignent davantage l'inclusion des femmes sur le marché du travail et approfondissent les inégalités entre les sexes », affirme Sukti Dasgupta, Directrice du Département des conditions de travail et de l'égalité.

Au niveau régional, le pourcentage le plus élevé de femmes en dehors de la population active citant les responsabilités de soins comme raison se trouve en Afrique du Nord (63% des femmes en dehors de la population active), suivi par les États arabes (59%). En Asie et dans le Pacifique, le chiffre est de 52% avec peu de variation dans les sous-régions. Dans les Amériques, la variation est marquée, avec 47% citant les soins comme principale raison d'être en dehors de la population active en Amérique latine et dans les Caraïbes, contre seulement 19% en Amérique du Nord. En Europe et en Asie centrale, 21% des femmes déclarent que les soins sont le principal obstacle, l'Europe de l'Est ayant le taux le plus bas au niveau mondial (11%).

« Ces nouvelles données de l'OIT exposent d'importantes inégalités dans le monde du travail dues à des responsabilités de soins inégales et soulignent le pouvoir des données pour améliorer notre compréhension de l'économie des soins. L'OIT a fait du travail décent dans l'économie des soins une priorité et travaille vers de nouvelles normes statistiques pour améliorer les données sur le travail de soins », a expliqué Rafael Diez de Medina, Statisticien en chef et Directeur du Département des statistiques.

À la lumière de telles inégalités systémiques basées sur le genre, les membres de l'OIT ont adopté la résolution historique concernant le travail décent et l'économie des soins lors de la Conférence internationale du Travail de l'OIT en juin 2024. La résolution est le premier accord tripartite mondial sur la question, ouvrant la voie aux pays pour relever les défis et saisir les opportunités présentées par l'économie des soins. Elle stipule qu'« une économie des soins qui fonctionne bien non seulement soutient les individus et les familles, mais contribue également à une main-d'œuvre plus saine, crée des emplois et améliore la productivité ». La résolution souligne également les « barrières structurelles » que le travail de soins non rémunéré crée pour la participation, la rétention et la progression des femmes dans la population active.

La résolution de l'OIT sur le travail décent et l'économie des soins appelle à des politiques et des systèmes qui contrent les inégalités en termes de qui reçoit et fournit des soins. – Directeur général de l'OIT, Gilbert F. Houngbo

« La façon dont les soins sont actuellement organisés tend à renforcer les inégalités de genre et sociales que nous nous efforçons de surmonter. La résolution de l'OIT sur le travail décent et l'économie des soins appelle à des politiques et des systèmes qui contrent les inégalités en termes de qui reçoit et fournit des soins, aborde les obstacles empêchant de nombreuses femmes d'entrer, de rester et de progresser dans le travail rémunéré, et améliore les conditions de tous les travailleurs des soins et, par extension, la qualité des soins », a expliqué le Directeur général de l'OIT, Gilbert F. Houngbo.

L'estimation précédente la plus récente, datant de 2018, a révélé que 606 millions de femmes et 41 millions d'hommes (un total de 647 millions de personnes dans le monde) ne participaient pas à la population active en raison de responsabilités de soins. Bien que les nouvelles estimations ne soient pas comparables en raison de changements méthodologiques, elles confirment que les responsabilités de soins continuent d'être la principale raison pour laquelle les femmes ne cherchent pas ou ne sont pas disponibles pour un emploi.

Les données de l'OIT montrent que depuis 2018, de nombreux pays ont progressé dans la promotion de la participation des femmes soignantes en augmentant les investissements dans les soins et l'éducation de la petite enfance. Cependant, dans un monde en pleine mutation en raison des changements démographiques, avec des populations vieillissantes, et du changement climatique, qui intensifie le travail de soins non rémunéré, il est probable que la demande de services de soins augmente. La récente résolution de l'OIT souligne l'importance d'un investissement adéquat dans les politiques de soins. Ce sera essentiel si nous voulons lutter contre l'inégalité croissante et progresser vers une plus grande justice sociale.

Télécharger le rapport (en anglais)

https://www.ilo.org/fr/resource/news/708-millions-de-femmes-ne-peuvent-pas-participer-au-marché-du-travail-en

COP16 : Le bilan de Survival

12 novembre 2024, par Survival — ,
La COP16 s'est terminée sur un accord, mais sans aucune obligation de respect des terres et des peuples autochtones, et laisse présager une monétisation accrue de la nature. (…)

La COP16 s'est terminée sur un accord, mais sans aucune obligation de respect des terres et des peuples autochtones, et laisse présager une monétisation accrue de la nature.

Alors que de nombreuses décisions importantes étaient reportées du fait de délégués devant quitter la conférence pour prendre un avion, un organe subsidiaire pour les peuples autochtones a été créé en vertu de l'article 8J de la Convention.

D'après les Nations Unies, cette entité constituera un espace permanent pour les peuples autochtones et communautés locales, qui leur permettra de participer aux prises de décisions relatives à la biodiversité. Malgré l'importance cruciale de renforcer l'implication des peuples autochtones dans les décisions ayant un impact sur leurs territoires (où se trouve la majeure partie de la biodiversité mondiale), il reste à déterminer si cette initiative améliorera réellement le respect de leurs droits humains. Aucun accord n'a été trouvé sur le mécanisme de financement et le suivi du Cadre mondial de la biodiversité, notamment en ce qui concerne la Cible 3, qui représente actuellement la plus grande menace pour les vies et les terres des Autochtones.

Dans l'ensemble, on n'observe aucune remise en question du statu quo, à savoir le vol de terres autochtones au nom de la conservation et l'appropriation des fonds pour la biodiversité par l'industrie de la conservation.


Quelques exemples d'échecs de la COP16

•⁠ Mise en œuvre : Les délégués n'ont même pas réussi à se mettre d'accord sur les modalités de financement de la mise en œuvre du Cadre mondial de la biodiversité.

•⁠ Financement : Des délégués du Sud global ont exprimé leur mécontentement, car les fonds annoncés pour le financement du Cadre sont tout à fait insuffisants.

•⁠ Répartition : Des délégués du Sud global ont exprimé un mécontentement justifié sur le fait que de grandes organisations du Nord (telles que le WWF) s'approprient le peu de fonds mis à disposition via le Fonds du cadre mondial de la biodiversité, mis en place sous l'égide du Fonds pour l'environnement mondial, en 2022 (voir le briefing presse de Survival à ce sujet).

•⁠ Négligence des besoins des pays les plus biodivers : La plupart des pays détenant la majeure partie de la biodiversité mondiale ont demandé la création d'un nouveau fonds dédié. En réponse, 160 millions de dollars supplémentaires ont été promis par plusieurs gouvernements occidentaux, mais ceux-ci insistent pour qu'ils soient alloués via le Fonds du cadre mondial de la biodiversité, et ce malgré une forte opposition à ce mécanisme.

•⁠ Non-protection des droits humains : Aucun accord n'a encore été trouvé en ce qui concerne le plan de suivi des projets financés par le Fonds du cadre mondial de la biodiversité. Les propositions actuellement sur le table n'incluent aucune mesure permettant de garantir le respect des droits des peuples autochtones. Or, la protection des droits humains des Autochtones est essentielle, car des initiatives sont prises pour quasiment doubler la surface des Aires protégées dans le monde. En effet, trop souvent, dans de nombreuses parties de monde, les zones de conservation sont militarisées et les peuples autochtones chassés de leurs terres, ce qui constitue une violation de leurs droits humains.

Fiore Longo, directrice de la campagne Décoloniser la conservation de la nature de Survival International, a déclaré : “La COP16 a montré une fois encore que le pouvoir de l'industrie de la conservation et des gouvernements prenait le pas sur les véritables besoins de notre planète. L'urgence à agir pour protéger la biodiversité est réelle, mais ces acteurs continuent de proposer de fausses solutions et entravent tout véritable changement. […] Si nous voulons sauver notre planète, nous devons en finir avec la stratégie consistant à maintenir le statu quo et à accroître la monétisation ou le pouvoir des grandes organisations… Nous avons besoin de tout le contraire ! […] Nous avons particulièrement besoin de respecter et reconnaître les droits territoriaux des peuples autochtones.”

Les crédits biodiversité

Sans surprise, la COP16 a répondu aux attentes des partisans de la privatisation et de la monétisation des programmes de conservation.

La puissante coalition composée du Groupe consultatif international sur les crédits biodiversité (IAPB), de la Biodiversity Credits Alliance et du Forum économique mondial ont présenté des « principes de haute intégrité » n'ayant d'intègre que le nom. En effet, ces principes comprennent de nombreux points problématiques, dans la mesure où ils permettent la compensation et la vente de crédits avant tout constat d'impact positif.

Des organisations de la société civile ont fait part de leurs vives préoccupations quant à cette initiative vouée à l'échec, mais n'ont pas pu l'empêcher.

Des efforts conséquents seront donc nécessaires pour sensibiliser aux dangereuses conséquences de ces mécanismes sur les vies et les terres des peuples autochtones (voir le rapport de Survival sur les défaillances du Fonds du cadre mondial de la biodiversité).

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COP29 : les plus riches vont-ils enfin payer leur dette climatique ?

12 novembre 2024, par Emmanuel Clévenot — , ,
La COP29 a démarré le 11 novembre en Azerbaïdjan. Le montant et le financement du fonds à destination des pays les plus vulnérables au changement climatique sera au cœur des (…)

La COP29 a démarré le 11 novembre en Azerbaïdjan. Le montant et le financement du fonds à destination des pays les plus vulnérables au changement climatique sera au cœur des négociations.

11 novembre 2024 | tiré de reporterre.net | Photo : L'entrée de la COP29, à Bakou, en Azerbaïdjan. - © Alexander NEMENOV / AFP
https://reporterre.net/COP29-les-plus-riches-vont-ils-enfin-payer-leur-dette-climatique

« Top » départ des négociations. Lundi 11 novembre s'est ouvert, dans le stade olympique de Bakou, en Azerbaïdjan, la 29ᵉ Conférence des Nations unies sur le climat. Un grand raout organisé dans un État pétrolier réprimant les droits humains… Reporterre décrypte les principaux enjeux de ce nouveau sommet, bousculé par l'élection de Donald Trump à la Maison Blanche.

Les chefs d'État et les diplomates discuteront principalement argent. Avec, en ligne de mire, le concept central de cette 29ᵉ édition de la COP [1] : la dette climatique. Dans une triste ironie du sort, les pays participant le moins au changement climatique sont aussi ceux en subissant les plus tragiques répercussions. À l'inverse, les États les plus riches, historiquement responsables, disposent des meilleurs outils pour s'en prémunir.

Dans le souci d'équilibrer quelque peu la balance, la COP29 doit déboucher sur un chiffre. Celui de l'aide financière apportée aux pays vulnérables, le Fonds pour pertes et dommages, afin que ceux-ci puissent entamer leurs politiques d'adaptation et d'atténuation.

Décupler l'enveloppe pour les pays vulnérables

D'après Rachel Cleetus, du groupe de scientifiques étasuniens Union of Concerned Scientists, citée par l'AFP, l'objectif des tractations devrait être de viser un montant de 1 000 milliards de dollars annuels. Mais la précédente enveloppe, décidée en 2009, s'élevait à seulement 100 milliards par an entre 2020 et 2025. Une somme dix fois inférieure, que les États contributeurs n'ont péniblement réglée qu'à partir de 2022. Autrement dit, deux ans après la date initialement prévue.

Un engagement déjà largement en deçà de ce que nécessitera l'évolution annoncée de la crise climatique. Par ailleurs, une grande partie de cet argent a été octroyé sous la forme de prêts, et non de dons, accentuant un peu plus encore les dettes de pays déjà en grande difficulté financière.

Pis encore, il y a quelques jours, la question de la finance Nord-Sud a précipité l'échec cuisant des négociations lors de la COP16 biodiversité, en Colombie. En dépit d'une nuit supplémentaire de bavardages diplomatiques, aucun accord n'a émergé. De mauvais augure, juste avant le coup d'envoi de la COP29.

Qui paiera l'addition ?

Si l'objectif des 1 000 milliards est atteint, restera à trancher une autre épineuse question : qui paiera l'addition ? La guerre commerciale entre États-Unis et Chine, ainsi que les politiques d'austérité budgétaires en vogue dans de nombreux pays riches, ne devraient pas faciliter les débats. Les pays figurant sur la liste des contributeurs — États-Unis, Union européenne, Japon, Grande-Bretagne, Canada, Suisse, Turquie, Norvège, Islande, Nouvelle-Zélande et Australie — réclament par ailleurs que la contribution soit élargie à la Chine et aux pays du Golfe.

L'argent existe, il suffit d'aller le chercher où il est, avance le Réseau Action Climat : « La mise en place d'un impôt mondial sur la fortune (2 % d'impôt sur la fortune de 3 000 milliardaires) pourrait rapporter 250 milliards de dollars par an. Une mesure d'autant plus juste que sur les trente dernières années, les 1 % les plus riches ont émis deux fois plus de carbone que la moitié la plus pauvre de l'humanité. »

« Faire payer [au secteur des énergies fossiles] sa responsabilité »

Autre levier possible : l'arrêt des subventions massives aux énergies fossiles, chiffrées en 2022 à 7 000 milliards de dollars dans le monde. La même année, l'industrie du pétrole et du gaz avait enregistré quelque 4 000 milliards de dollars de revenus. Face à ces profits records, « il apparaît de plus en plus évident de mettre à contribution le secteur pour lui faire payer sa responsabilité dans la crise actuelle », ajoute le collectif.

Les pays du Sud auront quinze jours pour tenter de faire entendre leur voix, face aux lobbies fossiles infiltrant de plus en plus les négociations. En 2023, 2 400 émissaires de l'industrie pétrogazière s'étaient déplacés à Dubaï. Autrement dit, plus d'individus que l'ensemble des délégations des dix pays les plus vulnérables. Devant cette bataille inégale, la Papouasie-Nouvelle-Guinée a ainsi refusé de participer à la COP29.

Échec des 1,5 °C, fin des fossiles annulée ?

La COP28 à Dubaï s'est soldée par un accord jugé historique par certains observateurs. Jamais jusqu'alors, « une transition vers l'abandon des combustibles fossiles » n'avait été mentionnée noir sur blanc dans le document final signé par les délégations. Seulement, faute de décision entérinée sur le financement de cette transition énergétique, également coûteuse car évaluée par Oxfam à au moins 1 900 milliards de dollars par an pour les pays en développement, certains pays pourraient être tentés de faire machine arrière s'ils y trouvent leur intérêt. La posture de l'Azerbaïdjan, hôte de la conférence et grand exportateur d'hydrocarbures, sera scrutée de près sur ce sujet.

De la même façon, les États membres faire s'étaient engagés à des efforts pour limiter l'augmentation de la température à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels, seuil fixé par l'accord de Paris en 2015. Neuf ans auront suffi pour que ces paroles atteignent leurs limites. Le 7 novembre, les prévisions de Copernicus, l'Observatoire européen du climat, sont tombées : l'année 2024 est bel et bien en passe de devenir la plus chaude jamais enregistrée sur Terre. Et le fameux seuil des 1,5 °C d'être franchi pour la toute première fois sur une année civile.

Pour les organisations écologistes, les engagements pris sur la fin progressive de l'extraction de fossiles et ceux contenus dans l'accord de Paris doivent absolument être réitérés lors de la COP29, à Bakou. D'autant que, d'ici la COP30 au Brésil, chaque pays aura pour tâche de livrer aux Nations unies son plan national de lutte contre la crise climatique.

Seulement, depuis la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle des États-Unis, l'équation s'annonce plus difficile que prévu. Le Républicain a d'ores et déjà promis de lever les restrictions sur la production de pétrole, de gaz et de charbon, d'intensifier les forages en Arctique et de quitter l'accord, comme lors de son précédent mandat. Pour Gaïa Febvre, du RAC, « nous devons continuer à nous mobiliser, à nous battre et à développer des solidarités avec toutes les populations vulnérables qui vont subir de plein fouet les politiques autoritaires et racistes de Donald Trump. »

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La voiture électrique, une alternative illusoire

12 novembre 2024, par Alain Bihr — ,
Depuis quelques années, dans le but déclaré de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), notamment de dioxyde de carbone (CO2), et de pallier les limites des (…)

Depuis quelques années, dans le but déclaré de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), notamment de dioxyde de carbone (CO2), et de pallier les limites des biocarburants, l'accent a été mis par « nos » gouvernants et les constructeurs automobiles sur la nécessité de développer la voiture électrique. Entendons la voiture personnelle mue par un moteur électrique, lui-même alimenté par une batterie d'accumulateurs. L'Union européenne (UE) a ainsi décrété en juin 2023 l'interdiction, à partir de 2035, de la vente des voitures pourvues d'une motorisation thermique ; et, d'ores et déjà, des primes substantielles y sont offertes à qui s'équipe d'une voiture électrique.

Tiré de A l'Encontre
11 novembre 2024

Par Alain Bihr

Commençons par remarquer que la voiture électrique est, elle aussi, une vieille idée neuve. Dans les premières années de l'industrie automobile, à la toute fin du XIXe siècle et dans les premières années du XXe, la voiture électrique a été une sérieuse concurrente de la voiture thermique. La première voiture à atteindre dès 1899 la vitesse de 100 km/h est une voiture électrique, la Jamais Contente, fabriquée par le Belge Camille Jénatzy, mais sur une distance très courte. Et, dans les années 1900, le moteur électrique équipe tramways, fiacres et taxis, des véhicules postaux dans de nombreuses villes européennes et nord-américaines, en commençant à se substituer à la traction hippomobile. Si la voiture à motorisation thermique l'a rapidement emporté cependant, c'est qu'elle s'est avérée plus autonome, plus légère et plus robuste, sans considération cependant de son bruit et de sa pollution. En grande partie, les termes de l'alternative restent aujourd'hui les mêmes.

Tenir compte de l'ensemble du cycle de vie

Outre que son usage direct (sa circulation) n'émet pas de CO2 et ne contribue pas à l'aggravation de l'effet de serre, on peut se féliciter du meilleur rendement énergétique du moteur électrique relativement au moteur thermique (0,85 contre 0,4) [1]. Signalons aussi la capacité d'utiliser une partie de l'énergie dépensée au freinage du véhicule pour recharger sa batterie (freinage dit régénératif).

Cette appréciation positive de la voiture électrique, à laquelle on s'en tient ordinairement, est cependant trompeuse en tant qu'elle se centre exclusivement sur la phase d'utilisation du véhicule. Une évaluation de son impact écologique global comparé à celui d'un véhicule thermique doit en fait procéder à une analyse du cycle de vie (ACV), en tenant compte l'ensemble des phases de vie du véhicule, depuis l'extraction des matières premières nécessaires à sa fabrication jusqu'à son recyclage (ou non) en fin de vie. Nous disposons de deux analyses de ce type, une première commanditée par l'Agence de la transition écologique-Ademe (Canaguier et alii, 2013), l'autre par l'European Environment Agency (EEA, 2018).

La première compare l'impact écologique, sous différents rapports, de trois types (essence, diesel, électrique) de véhicules capables de transporter jusqu'à quatre à cinq personnes, sur des trajets inférieurs à 80 km par jour, pendant dix ans, pour un total de 150 000 km. La comparaison se fait aux conditions suivantes : tous les véhicules (batteries comprises) sont produits (assemblés) et utilisés en France ou en Europe ; les véhicules électriques sont équipés uniquement de batteries Li-Ion (comprenant du lithium, de manganèse et du cobalt) ou Lithium-Fer-Phosphate ; la durée de vie de batterie est identique à celle du véhicule ; elles ne sont rechargées qu'en mode normal et non pas en mode accéléré. Sous condition de ces hypothèses, favorables au véhicule électrique, la comparaison aboutit aux résultats suivants :

. « (…) la consommation d'énergie primaire du véhicule électrique est inférieure à celle d'un véhicule thermique essence sur l'ensemble de son cycle de vie et légèrement supérieure à celle d'un véhicule thermique diesel » (Canaguier et alii, 2013 : 9).

. S'agissant des émissions de GES, le bilan est en principe plus favorable au véhicule électrique qu'au véhicule thermique. Mais l'écart varie sensiblement en fonction du mix électrique qui alimente le premier. Ainsi, un mix faiblement carboné comme l'est le mix français (110g CO2e/kWh en 2012) permet à un véhicule électrique de n'émettre que 9 tonnes de CO2e sur l'ensemble de son cycle de vie, tandis qu'un mix fortement carboné comme le mix allemand (623g CO2e/kWh en 2012) lui fera émettre 20 tonnes de CO2e, soit à peine moins qu'un véhicule diesel (22 tonnes) mais bien moins qu'un véhicule essence (27,5 tonnes) (Id. : 13). Encore faut-il être assuré que, au cours de son cycle de vie, le premier de ces véhicules électriques parcoure au moins 80 000 km pour que son avantage sur les véhicules thermiques puisse se manifester (Id. : 14).

. Par contre, quel que soit le mix électrique, les véhicules électriques ont un potentiel d'acidification de la basse atmosphère (par rejet de d'oxydes de soufre, d'oxydes d'azote, d'ammoniac, d'acide chlorhydrique et d'acide fluorhydrique), responsable des pluies acides, nettement plus élevé que les véhicules thermiques. En sont responsables la production d'électricité et surtout la fabrication des batteries, notamment lors de l'extraction des métaux entrant dans la composition de ces dernières (Id. : 18).

. Le véhicule électrique ne présente un faible avantage du point de vue du potentiel d'eutrophisation des eaux (principalement par émission d'oxydes d'azote) qu'à la condition d'être produit et alimenté par un mix énergétique peu carboné. Dans le cas contraire, il perd cet avantage au profit du véhicule essence (du fait de l'extraction des métaux nécessaires à la fabrication de la batterie) tout en continuant à être moins polluant sous ce rapport que les véhicules diesel (Id. : 20).

. Enfin, le véhicule électrique possède un moindre potentiel de création d'ozone troposphérique (du fait des émissions de composés organiques volatils) que les véhicules thermiques. Mais l'écart est faible relativement au véhicule essence, nettement plus accentué relativement au véhicule diesel (Id. : 22).

Ainsi, envisagé sur l'ensemble du cycle de vie, le bilan écologique de la voiture électrique comparé à celui de véhicules à motorisation thermique apparaît-il beaucoup moins favorable qu'il ne semble a priori. Une conclusion que vient confirmer et même renforcer l'étude publiée par l'Agence européenne de l'énergie [2]. La comparaison entre les deux types de véhicules repose sur les hypothèses d'un parcours total de 150 000 km, d'une durée de vie identique pour le véhicule électrique et sa batterie, celle-ci étant une batterie lithium – nickel – cobalt – manganèse (EEA, 2018 : 6). Sur cette base, elle aboutit aux résultats suivants :

. S'agissant de l'émission de GES, le bilan est nettement défavorable aux véhicules électriques relativement aux véhicules thermiques pendant les phases de production des matières premières et des véhicules eux-mêmes, du fait que ces phases consomment plus d'énergie dans le cas des premiers que des seconds, en particulier lors de l'extraction et de la transformation des matières premières et de la production des batteries, notamment lorsque cette dernière a lieu dans des Etats dont le mix énergétique est très carboné, typiquement la Chine, la Corée du Sud et le Japon (Id. : pages 24-25). Cependant, ce surcroît d'émission peut être plus que compensé durant la phase d'usage du véhicule. Mais la proportion dans laquelle cela se produit dépend essentiellement du mix électrique alimentant la batterie. Si l'électricité est produite par le mix électrique qui est en moyenne celui de l'UE, un véhicule électrique « émettra » respectivement 17 à 21 % et 26 à 30 % moins de GES que respectivement un véhicule diesel et un véhicule essence ; mais, si elle est produite par des centrales thermiques au charbon, c'est lui qui « émettra » le plus de GES ; alors que, si l'électricité n'était que d'origine éolienne, les « émissions » du véhicule électrique pourraient être inférieures de 90 % à celles des véhicules thermiques (Id. : 57-58).

. S'agissant de la pollution atmosphérique dans les centres urbains, la comparaison est évidemment favorable au véhicule électrique, dont la circulation n'est cependant pas exempte d'émissions d'oxydes d'azote et de particules (du fait des frottements entre les pneus et la chaussée, notamment lors des freinages). Mais il faut aussi compter avec l'incidence sous ce double rapport de la plus forte pollution engendrée par le surcroît de consommation d'électricité, tant lors des phases de production du véhicule que lors des recharges des batteries, si le mix électrique est carboné et que les centrales thermiques ne sont pas suffisamment distantes des agglomérations urbaines (Id. : 59).

. La comparaison est également favorable au véhicule électrique s'agissant de la pollution sonore du moins en milieu urbain, où la vitesse de circulation des véhicules est faible. Mais, dès qu'elle dépasse 25 à 30 km/h, comme c'est ordinairement le cas sur route et autoroute, c'est le frottement des pneus avec le revêtement qui devient la source majeure du bruit et l'avantage du véhicule électrique tend à disparaître.

. Par contre, sur tous les autres rapports, le véhicule électrique est nettement plus toxique pour l'être humain que le véhicule thermique. Cela est dû au fait que le premier est nettement plus gourmand en cuivre et en nickel que le second. Les émissions toxiques liées à ces métaux se concentrent dans leur phase d'extraction et de transformation. Là encore, elles peuvent d'autant plus s'aggraver de celles qui se produisent lors de l'extraction de charbon que le mix électrique est carboné (Id. : 58).

. Et ce sont les mêmes facteurs qui dégradent le bilan du véhicule électrique relativement au véhicule thermique sous l'angle de sa toxicité pour l'environnement en général, s'agissant en particulier de la pollution des sols (acidification) et des eaux (acidification et eutrophisation), du fait d'émissions de dioxyde de soufre, d'oxydes d'azote et de particules (Id. : 59-60). Et, à chaque fois, le principal facteur de pollution réside dans le cœur du véhicule électrique, la batterie, qui est encore aggravé par la concentration de la production des batteries en Chine (Id. : 26-27).

En somme :

« Tout se passe donc comme si le pacte implicite de la voiture électrique était le suivant : pour espérer une réduction des émissions de CO2 qui repose elle-même sur une série d'hypothèses fragiles — petites voitures, allongement de la durée de vie des batteries, généralisation des énergies renouvelables —, ainsi qu'une réduction de la pollution et du bruit dans les villes, il faut générer d'autres pollutions, ailleurs » (Izoard, 2020a).

Les deux études précédentes convergent de fait vers la même conclusion : le bilan écologique de la voiture électrique est obéré par sa forte dépendance à l'égard du mix électrique présidant à sa production et à son usage et, plus encore, par sa gourmandise à l'égard des métaux, notamment ceux entrant dans la composition de sa batterie, l'extraction de leurs minerais comptant parmi les activités les plus désastreuses d'un point de vue écologique tandis que leur transformation est très énergivore. Pour améliorer ce bilan, s'agissant du mix électrique, ses partisans comptent essentiellement sur l'essor des énergies « renouvelables » et de l'énergie nucléaire (c'est notamment le cas en France pour cette dernière). Or les limites des premières nous sont connues [3] tandis que les dangers de la seconde ne demandent plus à être présentés.

La face cachée de l'électrique : les métaux

Par contre, il n'existe pas d'alternative véritable s'agissant des métaux. La production des batteries requiert, outre de l'acier ou du plastique pour la coque et du cuivre pour les liaisons entre éléments, soit du plomb, soit du lithium, du nickel, du cobalt et du manganèse (à quoi vient s'ajouter du graphite), en quantités variables selon les types de batteries. Or ces métaux présentent tous plusieurs inconvénients graves. L'extraction de leurs minerais se fait très souvent au détriment des écosystèmes et de leurs populations de vivants, humains et non humains, notamment dans les formations périphériques ; elle nécessite de grandes quantités d'eaux [4], dans des régions qui en manquent souvent déjà, et elle est source de graves pollutions des eaux, des sols et de l'atmosphère ; des effets mal documentés d'ailleurs et de ce fait mal pris en compte par les ACV. S'y ajoutent les grandes quantités d'eaux que nécessite leur raffinage depuis les minerais, elles aussi polluées par les produits chimiques utilisés pour cette opération, et qui aggravent le stress hydrique auquel sont fréquemment soumises les régions où ces minerais sont extraits.

Par ailleurs, la batterie alourdit considérablement le véhicule : sa masse moyenne est de 177 kg pour une petite cylindrée, de 253 kg pour une cylindrée moyenne, de 393 kg pour une grosse cylindrée et de 553 kg pour une voiture de luxe (EEA, 2018 : 20). Pour compenser en partie cet alourdissement, les constructeurs automobiles sont obligés d'incorporer bien plus d'aluminium (mais aussi de composés de carbone et de plastiques) dans les autres éléments du véhicule (moteur, bâti, roues, carrosserie, etc.) :

« (…) alors qu'une voiture particulière, dans l'Union européenne, contient déjà aujourd'hui en moyenne 179 kg d'aluminium, l'Audi e-tron, un SUV électrique, en enferme 804 kg ! Or la production d'aluminium consomme trois fois plus d'énergie que celle de l'acier, et cette production est très émettrice de gaz à effet de serre (CO2 et perfluorocarbonés) » (Izoard, 2020b).

Elle est de surcroît source de pollutions des sols et des eaux par les résidus que le traitement de la bauxite engendre (les fameuses « boues rouges ») qui contiennent de fortes concentrations de soude.

Mais un véhicule électrique est également très gourmand en cuivre qui est le meilleur conducteur électrique : en moyenne, il y en a quatre fois plus dans un véhicule électrique que dans un véhicule thermique (EEA, 2018 : 14). Or l'extraction du cuivre est elle-même particulièrement polluante, parce que les minerais de cuivre contiennent ordinairement aussi des éléments toxiques comme l'arsenic, le plomb ou le cadmium. De plus, du fait de leur intense exploitation antérieure, la teneur en cuivre des minerais tend à baisser ; ce qui signifie qu'il faut sans cesse augmenter la masse de minerais à extraire pour en obtenir une quantité déterminée de cuivre, avec l'augmentation des pollutions et de la consommation d'énergie (souvent d'origine fossile) afférentes. Tout boom des véhicules électriques ne ferait qu'amplifier (aggraver) l'ensemble de ce processus. D'autant plus qu'il impliquerait l'installation d'un réseau de stations publiques de bornes de recharge le long des routes et autoroutes, impliquant notamment des milliers de kilomètres de fils de cuivre, à enfouir pour une large part, au bilan écologique sans doute très lourd lui aussi. Un facteur dont n'ont pas tenu compte les deux études précédentes.

En définitive, l'usage intensif de tous ces métaux par la motorisation électrique soulève deux autres problèmes que n'abordent pas davantage les études précédentes mais sur lesquels se sont penchées deux études commanditées l'une par la Banque mondiale (World Bank Group et EGPS, 2017) et l'autre par l'Agence internationale de l'énergie (IEA, 2021). En premier lieu, celui la disponibilité de ces métaux en quantité et qualité requises. L'une et l'autre étude ont élaboré des projections donnant une idée du défi que représenterait le développement à grande échelle des véhicules électrique au regard de ces dernières. Ainsi, en se plaçant dans la perspective d'une limitation du réchauffement climatique à 2°C, conforme aux engagements pris dans le cadre de l'Accord de Paris en 2015, l'étude commanditée par la Banque mondiale estime que le développement à l'horizon 2030 d'une flotte mondiale de quelque 140 millions de véhicules électriques ferait, selon un scénario médian, bondir de plus de 1 000 % la demande mondiale d'aluminium, de cobalt, de fer, de lithium, de manganèse, de nickel et de plomb (là encore, le cuivre n'est pas mentionné), requis pour la construction de tels véhicules, par rapport à la poursuite de la croissance actuelle de cette demande (World Bank Group et EGPS, 2017 : 16-18). Se plaçant dans la même perspective se conformant à l'Accord de Paris (scénario appelé SDS : Sustainable Development Scenario), l'étude menée par l'Agence internationale de l'énergie prévoit pour sa part que les minerais requis par les véhicules électriques et le stockage sur batterie en multiplieraient la demande au moins par trente d'ici à 2040 :

« Le lithium connaît la croissance la plus rapide, la demande augmentant de plus de 40 fois d'ici 2040 dans le SDS, suivie de celle du graphite, du cobalt et du nickel (environ 20 à 25 fois). L'expansion des réseaux électriques implique que la demande de cuivre pour le câblage électrique fait plus que doubler au cours de la même période » (IEA, 2021 : 8).

L'offre ne pourrait manifestement pas suivre une pareille explosion de la demande, comme le craint d'ailleurs cette étude : « La perspective d'une augmentation rapide de la demande de minéraux critiques – bien au-dessus de tout ce qui a été observé précédemment dans la plupart des cas – soulève d'énormes questions sur la disponibilité et la fiabilité de l'approvisionnement » (Id. : 11). Elle se heurterait, d'abord, aux limites des capacités de production actuellement installées (de l'extraction au raffinage), que seuls pourraient repousser des investissements colossaux [5], avant d'être rapidement confrontée aux limites des réserves de certains minerais (limites quantitatives [6] et qualitatives : la baisse du pourcentage de métal dans le minerai), que de semblables investissements (en prospection et en ouvertures de nouveaux sites d'extraction) ne suffiraient pas à lever, le tout entraînant nécessairement une augmentation continue du prix de ces métaux [7], qui plus est chaotique (faite de pics suivis d'effondrements, comme sur tous les marchés des matières premières), dissuadant les investissements continus, apposant ainsi une troisième limite à la réalisation du scénario idéal (en fait utopique) précédent.

Et le recyclage des véhicules en fin de vie n'offre que des perspectives modestes d'atténuation de ces contraintes. Il est certes envisagé de faire servir les batteries usagées (mais toujours fonctionnelles) pour lisser les apports intermittents des énergies « renouvelables » dans le cadre du déploiement des smart grids (réseaux « intelligents »), ce qui permettrait de réduire d'autant la demande en métaux nécessaires à cet emploi. Mais, une fois définitivement hors d'usage, le recyclage de leurs composants métalliques (impliquant des procédés eux-mêmes énergivores et polluants) ne pourrait guère couvrir que quelque 10 % de la demande à l'horizon 2040, sauf percée technologique d'ici là (IEA, 2021 : 15-16).

En second lieu, les minerais contenant tous ces précieux métaux se localisent surtout dans les formations périphériques ou semi-périphériques. Les principales réserves de minerais d'aluminium se trouvent ainsi, par ordre décroissant d'importance, en Guinée, en Australie, au Brésil, au Vietnam et en Jamaïque ; celles de cobalt en République démocratique du Congo (RDC) et en Australie ; celles de cuivre au Chili, en Australie et au Pérou ; celles de lithium au Chili, en Chine, en Argentine et en Australie ; celles de manganèse en Afrique du Sud, en Ukraine et en Australie ; et celles de nickel en Australie, en Nouvelle-Calédonie, à Cuba, en Indonésie et en Afrique du Sud (World Bank Group et EGPS, 2017 : 31, 35, 37, 43, 45, 48). De plus, leur localisation est bien plus concentrée que ne l'est celle des combustibles fossiles : la RDC, un Etat en proie à des troubles politiques constants depuis des décennies, concentre à elle seule les deux tiers des réserves de cobalt ; les trois premiers producteurs de minerais de cuivre en concentrent près de la moitié ; les trois premiers producteurs de minerais de lithium plus des quatre cinquièmes ; et les trois premiers producteurs de nickel plus de la moitié (IEA, 2021 : 13). Et la concentration est encore plus forte au niveau du raffinage de ces métaux, la Chine y occupant une position dominante, en en assurant à elle seule entre le tiers et les deux tiers (Ibid.).

Dans la novlangue qui est la sienne, la Banque mondiale y voit une opportunité de « développement durable » pour ces formations : « Il est important que les pays en développement soient mieux placés pour décider comment tirer parti du futur marché des produits de base répondant aux objectifs climatiques et aux objectifs de développement durable (ODD) connexes » (Id. : xiii). Mais, le plus probable est que, mal placés comme ils le sont pour la plupart d'entre eux dans l'actuelle division internationale du travail et dans le système mondial des Etats (l'Afrique du Sud, l'Australie, le Brésil et la Chine mis à part), ce soient au contraire les Etats centraux qui continuent à décider de leur sort : soucieux de sécuriser leurs approvisionnements en ces précieux métaux, les seconds ne manqueront pas de renforcer leur emprise impérialiste sur les premiers ou les transformeront en champ d'affrontements de leur rivalité interimpérialiste (que ne manquera pas d'attiser la concentration des réserves, de l'extraction et du raffinage), tout en y créant les conditions d'un nouveau round d'affrontement entre les partisans d'un extractivisme repeint en « vert » et les défenseurs d'une préservation des écosystèmes et des populations que celui-ci menacera directement.

Mettre fin à la folie de la circulation automobile

Pour lever les contraintes liées à la gourmandise en métaux des véhicules électriques, notamment ceux compris dans la batterie, certains comptent sur l'alternative que constitue à leurs yeux la motorisation électrique par pile à combustible, par exemple une pile à hydrogène [8]. Mais c'est une alternative en trompe-l'œil. D'une part, puisque le dihydrogène est très rare dans la nature, il faut le produire et ses procédés de production sont très polluants, que l'on opère par reformage d'hydrocarbures (producteur de CO2) ou par électrolyse de l'eau, dépendante quant à son bilan carbone du mix électrique auquel elle fait appel. D'autre part, la pile à hydrogène incorpore elle-même de précieux métaux, tel le platine, au coût très élevé. A quoi viendraient enfin s'ajouter le coût d'installation du réseau de distribution du dihydrogène à mettre en place et tous dangers qu'il présente puisqu'il s'enflamme facilement au contact de l'air : faut-il rappeler ce qu'il est advenu du zeppelin Hindenburg, en 1937 ?

Le tout, pour finalement permettre la poursuite de cette folie écologique et sociale qu'est la circulation de centaines de millions de véhicules automobiles qui obstruent et polluent les espaces urbains et qui défigurent les paysages ruraux. Car, qu'elle soit thermique ou électrique, une voiture engendre par sa circulation une pollution atmosphérique due aux particules fines et microplastiques engendrée par l'usure des pneus, des freins, de la chaussée, etc., accrue dans le cas de la voiture électrique du fait de sa masse plus importante. Elle défigure le paysage par les routes, autoroutes, parkings, etc., tous très gourmands en matériaux [8]. Elle est source de pollution lumineuse, etc. Alors que l'avenir devrait être à la réduction de la mobilité, bien plus souvent contrainte que volontaire, ce qui suppose des révisions drastiques en matière d'urbanisation et d'aménagement du territoire ; et au recours aux mobilités alternatives : marche, bicyclette, partage des véhicules, transports collectifs, etc., ce qui suppose des révisions non moins drastiques en termes d'emploi du temps. (Article reçu le 10 novembre 2024)

Notes

[1] Le rendement est le rapport entre l'énergie consommée par un moteur et l'énergie produite par lui.

[2] Cette étude élargit l'analyse du cycle de vie en se plaçant aussi du point de vue plus large de « l'économie circulaire », en envisageant en particulier la possibilité de recycler (ou non) les composant du véhicule ou de leur offrir une « seconde vie ». Mais, sous ce rapport, elle se concentre essentiellement sur les perspectives d'amélioration du bilan du véhicule électrique, en délaissant sa comparaison avec les véhicules thermiques.

[3] Cf. « Le mirage des énergies “renouvelables”« https://alencontre.org/ecologie/le-mirage-des-energies-renouvelables.html

[4] Il faut 2 200 m3 d'eau pour produire une tonne de lithium (Baldeschi, Cohen et Drut, 2023 : 56).

[5] « Pour répondre, à l'horizon 2035, à la seule demande de batteries pour les véhicules électriques, 400 nouvelles mines devront entrer en exploitation à travers le monde (dont 97 pour le graphite naturel, 74 pour le lithium et 72 pour le nickel » (Pitron, 2023 : 246). Etant donné qu'il faut en moyenne 16,5 années pour démarrer une nouvelle mine, le projet est d'ores et déjà compromis.

[6] « Au niveau mondial, l'Institut géologique des Etats-Unis (USGS) estime en 2024 les réserves de bauxite à 22 milliards de tonnes, à 11 millions pour le cobalt, 28 millions pour le lithium et 110 millions pour les terres rares. Si l'on considère le niveau de consommation actuel, le ratio réserves sur production se situe respectivement à 56 années, 48 années, 156 années et 314 années, des chiffres qui ont peu variés sur le long terme » (Hache et Roche, 2024 : 81). Mais c'est sans compter avec le fait que le propre du productivisme capitaliste est d'augmenter constamment le niveau de consommation.

[7] Une étude du FMI est parvenue à la conclusion que « (…) dans un scénario où tout est mis en œuvre pour parvenir à la neutralité carbone en 2050, les prix du lithium, du cobalt et du nickel seraient multipliés par 2 ou 3 par rapport aux niveaux moyens de 2020, et ils augmenteraient de 60 % pour le cuivre » (Baldeschi, Cohen et Drut, 2023 : 49-50).

[8] Dans une pile ordinaire, la tension électrique naît d'une réaction chimique d'oxydoréduction entre des métaux. Dans une pile dite à hydrogène, elle naît de l'oxydation de dihydrogène (qui sert de « combustible ») couplée à la réduction du dioxygène contenu dans l'air, l'ensemble générant outre un courant électrique, de la chaleur et de la vapeur d'eau.

[9] « en 2020, 100 m d'autoroute, c'est jusqu'à 20 000 m3 de terre déplacée et 3 000 tonnes de sables et graviers pour une plate-forme de 34 m de large en moyenne et une emprise totale de 100 m, soit une surface de 1 ha » (Magalhães, 2024).

Bibliographie

Baldeschi Laetitia, Cohen Juliette et Drut Bastien (2023), Turbulescences dans l'économie mondiale. Transition énergétique, bouleversements démographiques, raréfaction des ressources, Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur.

Canaguier Benjamin et alii (2013), Elaboration selon les principes des ACV des bilans énergétiques, des émissions de gaz à effet de serre et des autres impacts environnementaux induits par l'ensemble des filières de véhicules électriques et de véhicules thermiques, VP de segment B (citadine polyvalente) et VUL à l'horizon 2012 et 2020. Résumé du rapport final, Ademe, Angers.

EEA (European Environment Agency) (2018), Electric vehicles from life cycle and circular economy perspectives. TERM 2018 : Transport and Environment Reporting Mechanism (TERM) report, EEA Report n°13/218, Copenhague.

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Izoard Cecilia (2020a), « Non, la voiture électrique n'est pas écologique », Reporterre, 1er septembre 2020.

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Magalhães Nelo (2024), « L'autoroute et le marchand de sable », Le Monde diplomatique, avril 2024.

Pitron Guillaume (2023), La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique, 2eédition actualisée et augmentée, Paris, Les liens qui libèrent.

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Hongrie : Les doulas sont un symbole d’autonomisation des femmes – pas étonnant que les hôpitaux tentent de les exclure

12 novembre 2024, par Bagues Karina — , ,
Avec Viktória Keszler et Anna Iványi , l'Autre état en obstétrique ! nous avons discuté avec les militants du mouvement de l'évolution des soins de maternité. Tiré de Entre (…)

Avec Viktória Keszler et Anna Iványi , l'Autre état en obstétrique ! nous avons discuté avec les militants du mouvement de l'évolution des soins de maternité.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/11/05/hongrie-les-doulas-sont-un-symbole-dautonomisation-des-femmes-pas-etonnant-que-les-hopitaux-tentent-de-les-exclure/

Pourquoi essaient-ils d'expulser les doulas des maternités, alors que les faits scientifiques prouvent également les innombrables effets positifs de la présence d'une « aide féminine » ?

Une femme peut-elle aujourd'hui accoucher avec le soutien conjoint du père et de la doula dans un hôpital en Hongrie ?

Qui façonne les opinions et les règles qui déterminent le plus la qualité des soins ?

Dans quelle mesure la personnalité du médecin-chef influence-t-elle le fonctionnement d'un service d'obstétrique, son approche maternelle et son attitude envers les doulas ?

Pourquoi le Collège professionnel d'obstétrique et de gynécologie, considéré par le gouvernement comme un arbitre, ne s'exprime-t-il sur aucune question concernant les droits reproductifs des femmes ?

Avec Viktória Keszler et Anna Iványi , l'Autre état en obstétrique ! nous avons discuté avec les militants du mouvement de l'évolution des soins de maternité. Deuxième partie de notre entretien en deux parties. La première partie, dans laquelle nous décortiquions la transformation « favorable aux mères » de l'obstétrique lancée au printemps…

L'une des grandes questions de ces derniers mois est de savoir si une femme peut ou non accoucher avec deux accompagnants en même temps (généralement le père et la doula) ?

Dans plus de dix hôpitaux, les femmes concernées ont lancé une pétition pour obtenir cette autorisation, après que la demande des femmes qui se sont exprimées ait été accordée à l'hôpital d'Uzsoki l'automne dernier. Pourquoi de nombreuses maternités interdisent-elles la présence de deux accoucheuses ? Dans quelle mesure les gestionnaires d'hôpitaux sont-ils ouverts aux demandes des parties prenantes elles-mêmes ?

Viktória : Malheureusement, nous constatons que, dans l'ensemble, ils ne sont pas ouverts aux demandes des personnes concernées, même s'il ne fait aucun doute que la présence des deux accompagnateurs n'est interdite par aucune législation et qu'elle serait considérée comme une bonne chose humaine et pratique professionnelle pour accueillir la doula, puisqu'elle est la préposée à toute la famille (mère, père, bébé).

Il vient à la demande des parents, mais par sa présence en salle d'accouchement il soutient et facilite également le travail des agents de santé.

Lorsque cela a été autorisé à Uzsoki, ce n'est pas pour autant que des millions de femmes ont amené leurs doulas avec elles.

Toutes les femmes n'ont pas besoin de la présence d'une doula, ou toutes les femmes ne savent pas, ou n'y pensent même pas, qu'elles pourraient même amener une doula.

La crainte que cela surcharge le système de soins ne me semble donc pas si justifiée.

Il y a des endroits où cela est considéré comme une bonne pratique insulaire, on ne conteste pas la nécessité légitime de la présence d'une doula, mais malheureusement il y a des endroits où une réglementation excessive a commencé à la suite des pétitions.

Par exemple, il est inquiétant que, à notre connaissance, les femmes qui ont récemment adressé une requête à l'hôpital de Nyíregyháza n'aient pas reçu de réponse satisfaisante concernant l'admission conjointe de la doula et du père.

Quel genre de fardeau la présence d'une autre personne imposerait-elle aux soins ?

Anna : On voit bien que la situation des doulas était un peu meilleure avant l'épidémie de covid.

Le Covid a fait reculer beaucoup de choses.

À cette époque, non seulement la doula, mais aussi le père ont été expulsés, même si la médecin-chef Cecilia Müller a constamment et régulièrement attiré l'attention sur le fait que les pères ont toujours leur place dans la salle d'accouchement.

Par la suite, ces droits [concernant le personnel soignant] ont été restreints par les hôpitaux, et il semble très commode qu'ils n'aient pas l'intention de les rouvrir.

Il ne s'agit pas d'une particularité hongroise : d'après les retours d'organisations partenaires étrangères concernant la question des doulas, il est typique ailleurs que le covid ait représenté un recul dans les soins autour de l'accouchement sous plusieurs aspects.

Il est également courant dans de nombreux endroits de ne laisser entrer qu'un seul compagnon.

Viktória : Même avant le covid, de nombreux facteurs étaient connus, comme peur de l'amour, peur de l'argent, qui est également présente dans le cas des doulas.

Dans certaines situations, la mère de l'équipe accompagnant la naissance est plus attachée à l'un des personnages qu'à l'autre, elle l'écoute même davantage, notamment en état de conscience altéré, et évidemment l'argent qu'elle peut consacrer à cet événement de vie la limite également.

Cela a toujours été des facteurs aggravants, ainsi que le fait que la doula soit témoin.

De plus, la doula a toujours été un acteur indépendant, il est difficile d'intégrer dans la prise en charge quelqu'un qui n'est ni un membre de la famille, ni un professionnel de santé, ce qui soulève évidemment toutes sortes de questions de coopération.

Mais les organisations de doulas et les doulas ont essayé d'apporter des réponses à ces dilemmes existants avant même le covid, dans la plupart des cas elles ont pris soin de connaître l'hôpital à l'avance, de se présenter, de montrer leurs règles éthiques, de clarifier les conditions, etc.

L'argument derrière les restrictions est souvent qu'il y a de plus en plus de doulas qui ont leur mot à dire sur ce qui se passe.

Il est toujours suspect qu'il n'y ait que des histoires à ce sujet, et qu'il n'y ait aucun retour vers la doula ou l'organisation de la doula, et qu'il n'y ait pas de cas concrets, c'est pourquoi nous avions l'habitude d'appeler cela la doula fantôme, à laquelle on fait toujours référence lorsque le nuisible doula est mentionnée.

En 2021, le covid a également été abordé par la loi sur le nouveau statut juridique des médecins, qui a supprimé l'institution de la gratuité, a embauché un médecin et une sage-femme, et nous avons été confrontés au fait que, en parlant aux sages-femmes, c'était une situation très difficile pour eux.

Lorsque la nomination d'accompagnement a été supprimée, personne n'a préparé les sages-femmes elles-mêmes au fait qu'après trente ans, elles ne seraient plus admises comme sages-femmes …

Évidemment, le fait que la doula prenne cette place d'honneur a provoqué un conflit interne chez de nombreuses sages-femmes.

Désormais, la mère se tourne vers la doula comme elle le faisait auparavant vers la sage-femme. De plus, les doulas peuvent recevoir une allocation spéciale à cet effet. On entend souvent de la part des chefs de service : « Je ne peux pas le faire avec mes sages-femmes ».

Dans l'ancien système, la doula était souvent accessible à ceux qui disposaient d'un médecin agréé et d'une sage-femme agréée.

Celui accepté a été supprimé du système, alors n'amenez pas non plus votre doula.

« N'apportons pas cet argent supplémentaire quand les autres n'en ont pas. »

Nous avons également rencontré cette raison complètement absurde, décrite par plusieurs chefs de service, selon laquelle après la gratification, nous avons nettoyé les salles de maternité pour qu'il n'y ait pas de masquage. Ils ne savent pas qu'il n'est pas interdit à la famille d'avoir une relation contractuelle avec quelqu'un.

Aux yeux de l'hôpital, la doula est une personne fondamentalement incontrôlable qui représente en réalité l'acceptation inconditionnelle de la volonté, des besoins et des sentiments de la femme, et ils ne comprennent peut-être même pas pourquoi elle est présente.

C'est un symbole de l'autodétermination féminine, à laquelle il est aujourd'hui très difficile de trouver sa place.

Tout cela s'inscrit dans la tendance dont nous avons déjà parlé, à savoir que la profession est de plus en plus fermée. Au contraire, le discours sur la transformation actuelle est que nous, la profession, qui y sommes, déterminerons ce qui sera bon pour les femmes.

Sur vos pages Facebook, vous avez un jour déclaré que « certains groupes professionnels ont ouvertement déclaré qu'ils prenaient la défense des doulas ». Qui sont ces professionnels ? Qu'est-ce qui ne va pas avec les doulas ?

Anna : D'après les réponses du ministère, nous soupçonnons qu'il existe une certaine intention de réglementer le bruit.

Nous avons entendu dire que lors d'événements professionnels en obstétrique et gynécologie, plusieurs représentants éminents de la profession ont déclaré qu'ils ne soutenaient pas les doulas, qu'ils prendraient officiellement les gants contre elles et qu'ils les représenteraient également au niveau local. , dans leurs propres institutions.

Nous savons que lors de la conférence Ensemble pour la maternité hongroise 2024, vendredi dernier, les doulas ont été publiquement insultées au Parlement.

De nos jours, il n'est pas rare que des doulas soient publiquement certifiées lors d'événements professionnels en obstétrique.

Nous ne comprenons pas comment un représentant d'une profession associée peut se permettre cela. En plus, il y a des exemples positifs, il y a des gynécologues qui sont eux-mêmes des doulas, d'autres qui reconnaissent les mérites des doulas, et des hôpitaux où il y a une relation vivante entre professionnels, doulas et femmes, mais ces situations sont toutes fragiles.

La question des doulas a toujours été telle qu'au cours des dernières décennies, si un chef de département particulier la soutenait, elle pouvait être mise en œuvre, de sorte que ces lieux fonctionnent comme des îles.

Il serait inacceptable que les réglementations soient rédigées sans la participation des femmes et des doulas. Les dirigeants des cercles de doulas ont déjà tenté à plusieurs reprises de contacter les décideurs, mais sans grand succès.

Selon vous, quels changements surviendront en ce qui concerne l'ennui ?

Viktória : Je pense que le ministère peut être pris entre deux feux. La raison de ce progrès est qu'il a été dit que la loi n'interdit pas d'avoir deux compagnons.

Même le chef d'un service d'obstétrique ne peut plus contester cela.

Et dans la directive maternité, il y a aussi une référence à la possibilité d'avoir plus d'un compagnon. Mais ce n'est qu'une possibilité, et nous voyons dans les soins obstétricaux que cela ne se traduit pas dans la pratique, ce qui n'est permis que par certains matériels professionnels.

Ainsi, jusqu'à ce qu'il soit déclaré que vous êtes obligé de laisser entrer plus de compagnons, vous pouvez limiter cela de temps en temps, jusque-là, il sera arbitraire et arbitraire que cela soit interdit ou soutenu.

J'ai peu confiance dans la possibilité de modifier le texte de la loi sur la santé : beaucoup ont désormais peur qu'ils rendent les doulas impossibles, mais le fait qu'une femme ait droit à son compagnon est si fort que la loi sur la santé a été toujours approuvé par le Collège professionnel d'obstétrique et de gynécologie (SZNRZZ), ne peut pas non plus être réécrit.

Il est très important de souligner que si la femme amène avec elle un compagnon principal, cela peut être n'importe qui, y compris une doula.

Cela ne peut être limité nulle part et il est également illégal d'autoriser l'accoucheuse uniquement à un certain stade de l'accouchement.

Je pense qu'il serait compliqué et difficile de le limiter, mais cette démonstration de puissance, qui se produit actuellement autour du marasme, est d'autant plus triste.

Ni les soignants ni les bénéficiaires de soins ne connaissent les réglementations légales.

Même si je dis qu'il s'agit d'un droit incontestable, malheureusement non seulement les règles de la profession, mais aussi les réglementations légales ne sont pas bien connues de ceux qui travaillent dans le secteur des soins, mais nous entendons des absurdités de la part des gestionnaires d'établissements.

C'est aussi une erreur du système, les institutions ne reçoivent pas de soutien pour être à jour concernant les droits des patients, c'est un gâchis complet.

Ils disent des choses vraiment stupides en référence à la loi, font référence à des réglementations qui n'existent pas et les soignants pensent que beaucoup de choses sont interdites, même si elles ne le sont pas, ni même recommandées.

Le ministère de l'Intérieur a fait un grand aveu lorsqu'il vous a écrit que la loi n'interdit pas la maternité de substitution. Auparavant, EMMI affirmait le contraire.

C'est un peu banal, mais cela semble être un pas en avant que le gouvernement interprète au moins correctement sa propre loi. Mais que se passe-t-il en pratique ? Dans quelle mesure les femmes qui souhaitent accoucher avec deux accoucheuses sont-elles livrées à elles-mêmes et à leur propre défense ? Toute femme qui envisage d'accoucher avec deux accoucheuses doit-elle brandir la lettre du ministère de l'Intérieur ou la loi ?

Viktória : Malheureusement, les femmes sont presque entièrement livrées à elles-mêmes, même si ce n'est pas à elles qu'incombe la mise en œuvre de bonnes pratiques en matière de soins.

Ils ont dû le faire à plusieurs reprises pendant le covid, la plupart du temps avec un succès incertain.

Bien sûr, il y a des endroits où, heureusement, tout cela ne pose pas de problème, mais dans de nombreux endroits, la femme est pressée par l'épaule par sa capacité à faire valoir ses intérêts, par le fait qu'il y ait quelqu'un avec elle qui lui donne une force supplémentaire. , avec quelle assurance elle peut communiquer, etc.

Scénarios typiques, quand par ex. même dans le groupe hospitalier et dans la salle de préparation, on dit que « nous n'aimons pas beaucoup les doulas ici ».

Il est possible de rompre cela si quelqu'un peut demander en réponse ou lui demander de mettre cela par écrit, ou dire que j'écrirai alors au ministère… mais il est très triste que de telles stratégies doivent être utilisées.

Anna : En général, les femmes de la classe moyenne peuvent faire valoir leurs intérêts de cette manière, dotées d'une certaine conscience, compétences et informations.

Au sein de l'association EMMA, nous aidons les groupes vulnérables, notamment les Roms et les réfugiés, à accéder aux services de santé, et lorsque nous accompagnons des femmes et des filles réfugiées dans des établissements de santé, nous devons souvent présenter la législation imprimée selon laquelle la femme a droit à des soins gratuits.

Les femmes qui ont besoin de soins de santé immédiats sont gênées de ne pas être soignées parce que leur statut TAJ n'est pas réglé, même si l'instruction ministérielle précise qu'elles peuvent bénéficier de soins en tant que réfugiée d'Ukraine . Dans de telles situations, le refus de soins peut aussi être questionné en termes d'éthique médicale.

Toutes ces questions floues mises à part, il est incompréhensible qu'il n'y ait pas de place pour deux coups de main supplémentaires dans un système de santé sous-financé. Il est incompréhensible qu'ils veuillent exclure les aides qui sont réellement là pour rendre les soins un peu plus confortables.

Anna : Fondamentalement, nous ne sommes pas d'accord sur le fait qu'il serait bon de lier l'admission d'une doula à un quelconque type d'accréditation ou de formation.

Selon l'origine du terme doula, il s'agit d'une aide laïque pour les femmes. La femme qui accouche peut choisir toute personne qui, selon elle, sera en mesure de bien la soutenir pendant son accouchement, même si elle n'a pas ce type d'éducation.

Cette décision ne peut être empêchée au motif que l'escorte choisie n'est pas qualifiée pour le faire. Il existe aujourd'hui d'innombrables doulas possédant plusieurs qualifications pertinentes, de nombreux psychologues, sages-femmes, infirmières, consultantes en périnatalité, physiothérapeutes, etc. il y aura une doula.

Il serait difficile de définir les parties techniques et le contenu de la formation. La formation doit-elle durer 40 heures ou plutôt 80 heures ?

Et qu'est-ce qui est inclus dans la formation ? Qu'est-ce qui ne l'est pas ? Quelles sont les connaissances, compétences et aptitudes minimales ? Qui aurait le droit de décider quelles qualifications de doula sont acceptables ? À notre avis, globalement, il n'est pas possible de réglementer qui est doula et qui ne l'est pas.

Viktória : En autorisant les doulas, le niveau de soins pourrait être élevé de telle manière que cela ne coûterait rien à l'État hongrois, alors que l'effet doula est un phénomène scientifiquement étayé.

Et nous parlons aussi de ces femmes qui travaillent comme doulas, elles en vivent, disons que c'était leur métier depuis 10 ans, et maintenant du jour au lendemain, elles peuvent devenir invalides.

Et évidemment aussi du point de vue des mères : il n'y a aucun argument acceptable selon lequel quelqu'un ne devrait pas pouvoir y emmener sa doula, surtout après avoir dû renoncer à ses accompagnateurs (médecin, sage-femme) au cours des trois dernières années.

Évidemment, c'est exactement la raison pour laquelle la demande de doulas a augmenté.

D'ailleurs, l'expérience confirme également les nombreux effets positifs de la présence de doulas.

Au début de l'année, vous avez exprimé votre inquiétude face au fait qu'un nouveau médecin-chef ait pris en charge la direction de l'obstétrique à l'hôpital Szent Imre, réputé pour ses bonnes pratiques.

Le nouveau médecin-chef est originaire de Péterfy, où sous sa direction le taux de césariennes était d'environ 50 pour cent, ce qui est supérieur au taux national – également trop élevé. Dans quelle mesure la personnalité et l'attitude d'un médecin-chef influencent-elles le fonctionnement d'un service d'obstétrique ?

D'après vos lettres, il semble que ce soit peut-être plus que prévu.

Anna : Oui, malheureusement, cela ne devrait pas être le cas, car les changements, positifs ou négatifs, sont très étroitement liés aux gens.

Nous avons des exemples dans les deux sens.

Il y avait aussi une maternité qui fonctionnait bien et qui était populaire en raison de son approche et de son attitude.

Un médecin a d'abord quitté le service, puis deux médecins, et les gens sont très vite revenus à leurs anciennes habitudes.

Mais cela fonctionne aussi dans l'autre sens : quelqu'un rejoint une équipe, a de l'élan et de la motivation et peut réaliser des changements significatifs dans le fonctionnement du service.

Viktória : Malheureusement, les processus qui se déroulent à Szent Imre vont toujours au-delà d'eux-mêmes, car Szent Imre est toujours un symbole, le symbole de l'étiquette d'un accouchement sans perturbation.

Mais les soins obstétricaux d'un pays ne peuvent pas être mesurés par l'existence ou non de St. Imre. Le but n'est pas d'avoir une maternité exceptionnelle qui accueillerait l'intelligentsia aisée de Budapest, notamment celles qui possèdent un XI. a une adresse de district, mais que chaque point de service est exceptionnel.

Dans les services d'obstétrique, nous avons également vu des cas où le chef de service voulait quelque chose, mais pas l'équipe, et cela renvoie à la formation et à la formation continue. Si la formation n'a pas préparé les employés à réaliser les souhaits du chef de service, alors celui-ci le souhaite en vain.

On voit bien que si ceux d'un département sont envoyés en formation continue, ou si seulement ceux qui sont des personnages secondaires dans la vie du département, c'est-à-dire un employé proche de la retraite ou un résident, connaissent les nouvelles règles et procédures, alors ces les pratiques avancées ne seront réalisées que par le personnel. Elles peuvent être réalisées de nuit, éventuellement en secret. Il faut le oui, la détermination et le soutien du chef de service pour changer la manière de soigner dans un service d'obstétrique.

Bien que vous vous occupiez principalement de la défense des femmes qui accouchent, je suis intéressée par votre avis sur l'attitude du gouvernement concernant la mise en vente libre de la pilule après coup, puisque la contraception fait partie de la vie de toute femme qui a ou n'a pas eu d'accouchement. un enfant, et en fait, cela peut arriver à n'importe qui de devoir prescrire une telle pilule – j'ai aussi lu les histoires de mères avec des enfants sur la façon dont elles ont été humiliées lorsqu'elles ont demandé un après-événement. Au début de l'année, l'Association des brevets a lancé une pétition à ce sujet et depuis lors, des dizaines d'histoires d'humiliations subies par les femmes impliquées ont été rendues publiques. Que pensez-vous de la fermeture du gouvernement ?

Viktória : Il est inacceptable que la pilule post-événement ne soit pas disponible sans ordonnance en Hongrie.

Ce que beaucoup de gens rapportent maintenant, c'est que non seulement il est difficile d'y accéder, mais que le traitement que vous vivez est profondément traumatisant, et c'est malheureusement ce à quoi nous sommes malheureusement confrontés depuis des années.

Il est important que même si l'on a tendance à parler davantage de violence obstétricale, ce n'est pas par hasard que l'on parle aussi de violence gynécologique.

L'autodétermination, la possibilité de prendre des décisions concernant son propre corps, est pour nous un sujet important au-delà de l'accouchement.

Anna : Je voudrais également attirer l'attention sur la contradiction selon laquelle, en théorie, les mineurs devraient se présenter au rendez-vous avec un parent et qu'ils ne peuvent prescrire des contraceptifs indépendamment qu'à partir de 18 ans, alors que l'âge de consentement est de 14 ans, donc selon Selon la loi, un jeune de 14 ans peut avoir des relations sexuelles consensuelles mais ce même jeune de 14 ans ne peut se rendre qu'avec son représentant légal pour obtenir des pilules post-événement ou accéder à des contraceptifs. Il peut arriver que dans le cas d'un parent violent, la fille ait encore plus de problèmes si elle essayait d'impliquer son parent au sujet d'un préservatif déchiré. Sans information, sans soutien et sans contraception accessible, ces jeunes risquent de finir par avorter, ce qui les stigmatisera encore une fois.

Quand on considère la question dans son ensemble, on constate que les femmes sont punies pour presque tout.

Si vous avez des relations sexuelles, si vous n'avez pas de relations sexuelles, si vous accouchez, si vous n'accouchez pas, si vous souhaitez le conserver, si vous souhaitez avorter, si vous souhaitez prescrire un médicament contraceptif à l'avance , si vous souhaitez poursuivre l'événement par la suite.

Et personnellement, la responsabilité incombe uniquement à lui. Dans le discours social, la fille et la femme sont généralement blâmées, comme si elles pouvaient réellement prendre leurs décisions en matière de procréation de manière indépendante et libre, alors qu'elles ne peuvent pas payer 40 000 HUF pour un DIU.

Le gouvernement désigne comme arbitre la même école professionnelle d'obstétrique et de gynécologie, qui, selon vos déclarations, influence également très fortement l'approche des soins obstétricaux.

Selon la presse, les membres de cet ordre professionnel ont déjà voté en faveur de la suppression de l'obligation de prescription lors d'un vote interne au printemps, mais ils ne réagissent plus au fait que, selon le ministère de l'Intérieur, leurs Les arguments professionnels sont toujours en faveur des prescriptions et le gouvernement n'est pas disposé à modifier la loi sur cette base. Pourquoi l'ordre professionnel ne s'exprime-t-il pas ?

Viktória : Malheureusement, nous ne savons pas pourquoi ils ne parlent pas.

Nous ne pouvons que deviner s'ils ne le savent pas ou n'osent pas, peut-être qu'il n'y a pas de consensus entre eux, mais nous tenons plutôt à souligner qu'il semble que les questions et les demandes de l'autodétermination des femmes, des femmes et des mouvements sociaux ne soient pas suffisamment important pour qu'on y réponde.

Avec ce silence, non seulement ils ne défendent pas les femmes, mais ils ne défendent pas non plus le consensus professionnel et juridique international.

Bagues Karina
Source : Mérce.Hu
https://onvaulxmieuxqueca.ouvaton.org/spip.php?article7291

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Turquie. Montée en puissance de l’idéologie Incel « alimentée par les politiques gouvernementales misogynes »

12 novembre 2024, par /kurdistan-au-feminin.fr — , ,
TURQUIE – Alors que le nombre de féminicides ne cesse de croitre en Turquie, y compris dans les régions kurdes du pays, à cause d'une justice clémente envers les auteurs des (…)

TURQUIE – Alors que le nombre de féminicides ne cesse de croitre en Turquie, y compris dans les régions kurdes du pays, à cause d'une justice clémente envers les auteurs des féminicides et des violences faites aux femmes, une idéologie en particulier attire l'attention en raison de son lien avec ces crime : l'idéologie Incel (involuntary celibate, célibataire involontaire en français). Renforcée par un sentiment d'impunité, l'idéologie Incel alimente davantage les inégalités entre les sexes et légitime la violence contre les femmes.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Lors de la discussion sur l'histoire politique et sociale des questions de genre et des femmes en Turquie, la politologue et écrivaine Alev Özkazanç, le spécialiste en communication et journaliste Orhan Şener Deliormanlı et le sociologue Yaşar Suveren de l'Université de Sakarya, qui étudie la misogynie, ont partagé leurs points de vue sur le mouvement Incel et ses croyances misogynes.

« La misogynie au cœur du problème »

La politologue Alev Özkazanç, l'universitaire Orhan Şener Deliormanlı et le sociologue Yaşar Suveren expliquent que les incels* pourraient constituer une menace sociale en Turquie à travers la radicalisation en ligne « alimentée par les politiques gouvernementales misogynes ».

Le sociologue Yaşar Suveren explique que les Incels incarnent principalement un état d'esprit et un comportement enracinés dans la misogynie.

« Nous avons affaire à un groupe d'individus isolés de la société, incapables d'établir des relations saines ou de communiquer avec les femmes, et qui rationalisent cet isolement en accusant les femmes. (…) ce sont des hommes solitaires, peu attachés à la société, qui ont une vision hostile des femmes, qu'ils accusent d'être la cause de leurs problèmes personnels. »

Selon Suveren, la misogynie est au cœur du mouvement Incel. Croyant que les femmes les excluent consciemment, ces individus projettent leurs insuffisances et leurs frustrations vers l'extérieur, considérant les femmes comme une menace. Il note que les récents incidents violents en Turquie reflètent les tendances violentes des membres du mouvement Incel : « Dans certains pays, des individus s'identifiant comme Incels ont été impliqués dans des incidents violents. Bien qu'il soit difficile d'affirmer qu'ils agissent de manière organisée ou systématique, la radicalisation en ligne pourrait représenter une menace sociale. »

Une radicalisation croissante

Orhan Şener Deliormanlı, spécialiste des communications et journaliste, souligne l'effet radicalisant des espaces virtuels :

« Dans des espaces en ligne comme les salles Discord, des personnes ayant des mentalités similaires se rassemblent et se radicalisent encore plus. Dans des environnements physiques, la pression sociale peut les maintenir sous contrôle, mais dans un espace virtuel, ils peuvent devenir plus audacieux et agir en tant que collectif. »

Deliormanlı souligne également le changement générationnel au cours des 20 dernières années, avec moins d'enfants grandissant dans la rue et davantage élevés devant des écrans :

« Une génération a émergé qui socialise [entre les quatre murs de la maison], en satisfaisant ses besoins biologiques par le biais de jeux et de pornographie sans même mettre le pied dehors. Cet isolement limite les rencontres réelles avec les femmes et aggrave leur misogynie. »

Une forme distincte de misogynie

La politologue et écrivaine Alev Özkazanç décrit l'idéologie Incel comme une forme unique de misogynie. Elle explique ainsi le développement du caractère Incel :

« L'idéologie des Incel repose essentiellement sur la haine des femmes. Bien que nouvelle en Turquie, cette idéologie est née d'une communauté numérique en Amérique du Nord. Ce groupe croit que les femmes sont intrinsèquement insensibles à leur égard et le seront toujours. Cette conviction conduit à une perception qui place les hommes au bas de la hiérarchie masculine. »

La crise de la masculinité

Özkazanç explique que l'idéologie Incel ne concerne pas uniquement les femmes, mais également les hommes qui se considèrent comme étant au bas de la hiérarchie masculine. Les individus Incel ont le sentiment d'occuper le plus bas échelon de la société et leur incapacité à attirer les femmes les pousse encore plus bas dans cette hiérarchie perçue.

Elle souligne que l'idéologie Incel reflète l'un des symptômes les plus extrêmes d'une crise de masculinité, ajoutant :

« L'idéologie incel repose sur un sentiment de défaite et de désespoir, souvent associé à un nihilisme violent. En Turquie, l'éloignement de longue date du gouvernement en matière d'égalité des sexes, associé à des mesures telles que le retrait de la Convention d'Istanbul, a aggravé cette crise et constitue un encouragement tacite pour les hommes. » (Bianet)

* La sous-culture incel (néologisme et mot-valise de langue anglaise pour involuntary celibate, célibataire involontaire en français) désigne la culture des communautés en ligne dont les membres se définissent comme étant incapables de trouver une partenaire amoureuse ou sexuelle, état qu'ils décrivent comme célibat involontaire ou inceldom. Ceux qui se déclarent incels sont en majorité des hommes cisgenres et hétérosexuels. Généralement, les femmes incels sont appelées femcels (Wikipedia)

https://kurdistan-au-feminin.fr/2024/10/29/turquie-montee-en-puissance-de-lideologie-incel-alimentee-par-les-politiques-gouvernementales-misogynes/

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Coalition féministe pour une loi cadre intégrale contre les violences sexuelles

Alors que les faits enregistrés pour violences sexuelles ont explosé (+282% entre 2017 et 2023), le nombre de condamnations reste extrêmement faible. Pourquoi cette (…)

Alors que les faits enregistrés pour violences sexuelles ont explosé (+282% entre 2017 et 2023), le nombre de condamnations reste extrêmement faible.

Pourquoi cette coalition ?

Depuis 2017, le mouvement #MeToo a mis en lumière le fait que les violences sexuelles sont une réalité très largement partagée par les femmes et les enfants et sont perpétrées par des hommes de tous les milieux. Pourtant, la réponse judiciaire, politique et institutionnelle est très loin d'être au rendez-vous en France. Alors que les faits enregistrés pour violences sexuelles ont explosé (+282% entre 2017 et 2023), le nombre de condamnations reste extrêmement faible. 94% des affaires de viol ont été classées sans suite en 2021. Rappelons que la moitié de ces violences sexuelles sont perpétrées par un conjoint ou un ex-conjoint. Cette impunité s'ajoute au manque criant de moyens alloués à la lutte contre cette réalité et pour accompagner les victimes.

Dès lors, comment s'étonner que ces violences et la culture du viol qui les rend possible ne reculent pas ? Grâce au courage de Gisèle Pélicot, plus personne ne peut détourner les yeux face à l'horreur des violences sexuelles et à leur effroyable banalité.

Les solutions existent. Mettons-les en oeuvre !

Il est urgent d'agir

Associations féministes, syndicats (dont Solidaires), juristes, défenseur.es des droits humains et expert.e.s ont donc mis en commun leurs expertises et leur expérience de terrain et ont élaboré près de 130 propositions (législatives, réglementaires, budgétaires…) pour qu'enfin, les pouvoirs publics apportent une réponse globale et cohérente à ce problème massif.

La Coalition pour une Loi Intégrale réclame une réponse systémique et coordonnée qui aille bien au-delà de mesures fragmentées et ponctuelles. La coalition propose ainsi une politique publique ambitieuse, appuyée par un budget annuel dédié de 332 millions d'euros, pour répondre à l'urgence de la situation et mieux prendre en charge les victimes.

Les plus de 130 propositions de la coalition seront dévoilées courant novembre et couvriront tous les aspects de la lutte contre les violences sexuelles, de la prévention à la sanction en passant par l'éducation, la formation, le financement des associations spécialisées, le parcours judiciaire des victimes.

De quelles violences parle-t-on ?

La loi que nous demandons vise à faire reculer toutes les formes de violences sexuelles : viols, agressions sexuelles, harcèlement sexuel, système prostitutionnel, proxénétisme, traite des êtres humains, violences obstétricales et gynécologiques, mutilations sexuelles féminines, mariages forcés et violences sexuelles en ligne, que les auteurs et les victimes soient majeur.es ou mineur.es, que ces violences aient lieu au sein ou en dehors du couple.

Nos propositions en un coup d'oeil

01 Une véritable politique publique continue et coordonnée

Plutôt que des mesures parcellaires et éclatées, la lutte contre les violences sexuelles nécessite une politique publique globale et ambitieuse pilotée au plus haut niveau, impliquant de manière coordonnée l'ensemble des ministères concernés (égalité, justice, intérieur, solidarités, travail, éducation, santé,…) autour de protocoles d'intervention et d'indicateurs précis.

02 Un investissement annuel de 2,6 milliards d'euros contre les violences sexistes et sexuelles, dont 344 millions contre les violences sexuelles

L'État ne dépense que 12,7 millions d'euros par an pour lutter contre les violences sexuelles soit 0,003% du budget de l'État, laissant les associations travailler dans des conditions déplorables, sans la capacité d'accueillir les victimes qui le demandent. Ce sous-financement a pour conséquence de semer d'embûches le parcours des victimes vers la justice et la reconstruction. 344 millions d'Euros au minimum sont nécessaires pour une réelle prise en charge et l'accompagnement des victimes, améliorer les enquêtes et renforcer la chaîne judiciaire.

03 Éducation et prévention

Pour faire reculer la culture du viol, nous insistons sur l'importance de rendre effectives, à l'école, les 3 séances d'éducation à la vie affective et sexuelle, et la tenue de séances consacrées à l'égalité entre les hommes et les femmes, à la lutte contre les préjugés sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes par plus de financements et de moyens de contrôle. Il faut former tou.te.s les professionnel.les concerné.e.s (enseignant.e.s, policier.e.s, médecins, éducateur.ices, etc.) et mener des campagnes de sensibilisation à grande échelle pour prévenir les violences dès le plus jeune âge.

04 Lutter contre l'industrie pornocriminelle et pédocriminelle et la culture du viol en ligne

Les contenus pornographiques banalisent les violences sexuelles et la haine misogyne et raciste avec un impact grandissant sur les modèles de sexualité des jeunes, en plus de reposer sur l'exploitation sexuelle de filles et de femmes vulnérables. Nous réclamons que les violences en ligne soient réprimées, que l'interdiction d'accès des mineurs aux contenus pornographiques soit rendue effective, de faciliter la suppression des vidéos de viol, d'inceste et de pédocriminalité en ligne.

05 Une culture de la protection des enfants

Toutes les 3 minutes un enfant est victime d'inceste, de viol ou d'agression sexuelle en France avec des conséquences dévastatrices. En s'appuyant sur le travail de la CIVIISE notamment, nous demandons l'introduction d'une infraction d'inceste, l'imprescriptibilité de ces violences, l'instauration d'entretiens individuels annuels pour mieux repérer les situations, ou encore l'abandon de toute référence au prétendu « syndrome d'aliénation parentale ».

06 Responsabiliser les employeurs sur la prévention des violences et la protection des victimes

De nombreuses violences sexuelles sont commises au travail, lieu où les rapports de domination sont exacerbés, notamment par la dépendance financière. Or la prise en charge des victimes reste très insuffisante. Nous proposons de renforcer et de rendre effectives les obligations de détection, de protection et d'accompagnement des victimes de violences sexuelles au travail, notamment par des sanctions contre les entreprises qui n'ont pas mis en place de plan de prévention ni de procédure de signalement, et par la prise en charge par l'employeur des frais des victimes de violences sexuelles au travail.

Il est fondamental de protéger également l'emploi des victimes de violences.

07 Une prise en charge et des soins accessibles pour toutes les victimes

Les victimes sont trop souvent livrées à elles-mêmes, sans accompagnement suffisant pour sortir des violences et se soigner. Nous préconisons le remboursement à 100% par la Sécurité sociale des soins psychologiques et du traitement du psychotraumatisme et la création de centres de prise en charge d'urgence accessibles 24h/24, sur le modèle belge.

08 L'amélioration du dépôt de plainte

L'accueil des victimes dans les commissariats reste très inégal ce qui rend d'autant plus éprouvant le parcours des victimes. Nous proposons d'y remédier par le recrutement de centaines d'enquêteur.ices et la généralisation de brigades de police et gendarmerie volontaires, formées et spécialisées sur les violences sexuelles, l'accès à l'aide juridictionnelle pour les victimes de violences sexuelles dès le dépôt de plainte, une meilleure formation initiale et continue de toutes les forces de l'ordre des procédures et moyens adaptés pour répondre aux besoins spécifiques aux personnes allophones ou en situation de handicap.

09 L'amélioration de la protection et du traitement des victimes pendant la procédure judiciaire

Contrairement à aujourd'hui, nous demandons que pour chaque plainte déposée pour violence sexuelle certains actes d'enquêtes soient obligatoirement réalisés dans un délai raisonnable. La protection des victimes pendant l'enquête doit être renforcée par différents outils (TGD, ordonnance de protection ouverte à toutes les violences, places d'hébergement d'urgence) et les enquêtes sur le passé sexuel des victimes interdites. Nous demandons aussi que les victimes soient systématiquement informées des suites données à leur plainte, avec des décisions motivées et détaillées en cas de classement sans suite.

10 Se donner les moyens d'une justice réellement spécialisée

Face à une institution en manque cruel de moyens et marquée par les préjugés sexistes, nous avons besoin d'un changement profond de la manière dont les viols et violences sexuelles sont jugées en France. Les juges et tous les professionnel.les de la justice doivent être formés en initial et en continu. L'intervention des expert.e.s doit être strictement encadrée. Alors que les viols sont trop souvent déqualifiés via la correctionnalisation ou l'usage des cours criminelles, nous affirmons que les cours d'assises doivent rester le cadre de référence. Enfin, la France ne peut se passer d'une politique de suivi des agresseurs par des équipes pluridisciplinaires pendant et après leur sanction pénale effectuée afin d'éviter la récidive.

Retrouvez les plus de 130 propositions de la coalition
en novembre sur le site :
https://www.loi-integrale.fr/

Les membres de la coalition :
Action juridique féministe, Amicale du Nid, ANEF, l'Assemblée des Femmes, En parler pour que ça compte, femmes sourde citoyennes et solidaires, Association francophone de femmes autistes, mémoire traumatique et victimologie, Alumni au féminin, CACIS (Centre Accueil Consultation Information Sexualité), CDP Enfance, CGT, Chiennes de garde, le Cofrade, Collectif CIDE Outre-Mer, Collectif Enfantiste, Collectif féministe contre le viol, CNDF, Coordination Française pour le Lobby Européen des Femmes (CLEF), Derrière le rideau, En avant toutes, encore féministes !, Ensemble contre le sexisme, Fédération nationale contre les mutilations sexuelles féminines et mariage forcés (GAMS), FNCIDF, Solidarité Femmes, Femmes avec … , Femmes pour le dire, femmes pour agir (FDFA), Fondation des femmes, FiT (une femme, un toit), FSU, Humanity Diaspo, Iran Justice, Laboratoire de l'Egalité, Le Cercle Olympe de Gouges, LFID, LOBA Exprime toi, MeToo Media, Mouvement du Nid, Osez le Féminisme, OSTARA, Pépite Sexiste, Le Planning Familial, Réussir l'Egalité Femmes-Hommes, Résonantes, StopVog, Union syndicale Solidaires, Women Without Violence, Zéro Macho

https://solidaires.org/sinformer-et-agir/actualites-et-mobilisations/nationales/coalition-feministe-pour-une-loi-cadre-integrale-contre-les-violences-sexuelles/

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Une course aux armements plus déstabilisante que jamais

12 novembre 2024, par Michel Rogalski — ,
Le monde a connu des guerres meurtrières, maints conflits et surtout des vagues de dépenses militaires quantitatives et qualitatives qui ont atteint des sommets colossaux. Le (…)

Le monde a connu des guerres meurtrières, maints conflits et surtout des vagues de dépenses militaires quantitatives et qualitatives qui ont atteint des sommets colossaux. Le modèle de référence qui s'impose fut celui de la guerre froide entre les deux Grands de l'époque – Union soviétique et États-Unis – dont la rivalité/affrontement se constitua dès 1917 pour se poursuivre après la Seconde guerre mondiale sous la forme d'un conflit entre deux camps, l'URSS ayant étendu son influence. Cette guerre froide adossée sur deux grands pays s'est caractérisée par une course aux armements qui paraissait sans fin et atteint son apogée en 1988, date à laquelle elle s'arrêta pour décroître d'environ 30 % dans les dix années qui suivirent.

Tiré de Recherches Internationales n° 130, Automne 2024,
Michel Rogalski *

On appela cette période, les années des « dividendes de la paix ». Plusieurs remarques s'imposent. Tout d'abord ce n'est pas l'effondrement du bloc soviétique (1991) qui provoque l'arrêt de la course aux armements, celle-ci ayant cessée trois ans auparavant.
L'effondrement ne peut être rapportée à l'incapacité à suivre un rythme effréné de dépenses militaires. En réalité dès octobre 1986 Reagan et Gorbatchev se rencontrent à l'occasion du Sommet de Reykjavik et décident, sans l'acter dans un communiqué final, qu'ils arrêtent la course aux armements. La théorie du « linkage » qui prévalait à l'époque signifiait que tant que l'on n'était pas d'accord sur tout on n'était d'accord sur rien même si cela était faux. Compte-tenu de l'inertie des dépenses militaires le plafond fut atteint dès 1988. Chiffre élevé puisqu'il représentait un taux de militarisation d'environ 8 % (dépenses militaires rapportées au PIB mondial). C'est dans cette période de la guerre froide qu'apparaît et se développe l'armement nucléaire et toute la technologie qui la rend opérationnelle (missiles, sous-marins, bases de lancements…) et que le nombre d'acteurs nucléaires prolifère.

Il devient alors évident pour les deux Grands qu'ils s'épuisent mutuellement, alors que dans le même temps les « perdants » de la 2e guerre mondiale qui se sont vus imposer des limites à leurs efforts de réarmement connaissent des « miracles économiques » (Japon, Allemagne de l'Ouest). Les études économiques se multiplient pour indiquer les pertes de compétitivité que subissent les États Unis et l'URSS. À cela s'ajoute la certitude croissante que tout dollar ou tout rouble investi dans la course aux armements n'augmente plus la sécurité. Le moteur central de la course aux armements, la recherche de la parité, voire une marge d'avance qui se déclinera pour chaque type d'arme – en clair les conditions d'une agression réussie -, commence à questionner d'autant que certaines puissances se prévalent du concept de la dissuasion du faible au fort, de la puissance suffisante et mettent en avant le principe du pouvoir égalisateur de l'atome.

Mais ce qu'il faut retenir c'est que cette course aux armements de la guerre froide fut strictement codifiée et maîtrisée par ses acteurs. C'est par centaine que des traités et accords furent ratifiés permettant de construire une grammaire respectée par les protagonistes. Il s'agissait de brandir tout à la fois la menace mais aussi d'assurer
de sa bonne foi. Dans cette perspective plusieurs types d'accords furent conclus.

D'abord s'assurer que l'arme nucléaire ne proliférerait pas. Ce fut le Traité sur la non-prolifération nucléaire (TNP). L'objectif en établissant une distinction entre États dotés et non-dotés était de promettre à ceux qui ne l'étaient pas une aide apportée par l'AIEA pour mettre sur pieds une industrie nucléaire civile en échange d'une renonciation à tout programme militaire. Le fait de ne pas s'inscrire dans l'accord revenait en fait à dévoiler ses intentions.

Peu de pays refusèrent : Israël, le Pakistan, l'Inde, l'Afrique du Sud, qui peu à peu devinrent des puissances militaires nucléaires. Les pressions occidentales obligèrent ce dernier pays à démanteler son arsenal pour qu'il ne tombe pas entre les mains de l'ANC. La Corée du Nord d'est retirée de l'accord et l'Iran est soupçonné de vouloir le contourner. Mais globalement cet accord, largement ratifié, a permis de limiter la prolifération nucléaire même si les États dotés n'ont pas respecté leurs engagements à réduire leur arsenal.

Ensuite des accords sur des plafonds de types d'armes à ne pas dépasser voire à réduire ou à interdire. Enfin, proposer des accords qui instaurent la confiance et la
bonne foi. C'est la démarche des accords Salt signés en cascade à partir des années soixante-dix. Le dernier accord signé entre les États-Unis et la Russie remonte à 2010. Les traités portèrent tout à la fois sur les missiles à moyenne portée (de 500 à 5 500 km) ou sur les missiles intercontinentaux. Mais probablement l'engagement le plus
fort symboliquement fut celui sur les ABM – Anti-balistic-missiles – qui interdisait de protéger ses grandes villes ainsi offertes à toutes représailles de l'adversaire. C'était la preuve de sa bonne foi. Frapper l'ennemi c'était l'assurance de perdre ses grandes villes, pour autant que l'adversaire n'était pas détruit à l'aide d'une première salve.

C'est pourquoi lorsque Ronald Reagan lance en 1981 l'idée d'un bouclier spatial (plus connu sous le terme de « guerre des étoiles ») qui protégerait le territoire américain on comprend que se profile le concept déstabilisant d'une attaque qui n'aurait plus à craindre la riposte. L'espoir caressé portait également dans la certitude que les Soviétiques engagés en Afghanistan n'auraient pas la capacité de suivre. Fort heureusement sur les 17 premiers tests menés par les Américains, seuls deux aboutirent. Le projet fut donc discrètement abandonné.

Jusqu'alors, le cadre international qui s'était construit s'était polarisé autour de grandes puissances qui avaient su créer un enchevêtrement d'accords maillant la planète et qui pouvaient s'observer de plus en plus grâce au progrès des satellites. Puis depuis
une quinzaine d'années une obsession bi-partisanne (Démocrate et Républicaine) s'est répandue aux États-Unis faisant de la Chine le principal adversaire, économique et militaire. Le pivot asiatique était né ainsi que les préoccupations de l'Océan indien. La course aux armements reprenait, mais cette fois-ci entre trois protagonistes et dans des conditions qui n'étaient plus du tout codifiées. En effet la Chine n'avait souscrit qu'à très peu des accords qui liaient les États-Unis à l'Union soviétique puis à la Russie. Elle avait l'avantage d'avoir les mains libres face à ses concurrents.

Et elle ambitionna très vite de devenir non seulement une grande puissance économique et commerciale, mais également militaire et développa très vite ses dépenses dans cette direction sans négliger la dimension nucléaire. En face, les États-Unis avaient le sentiment d'affronter la Chine tout en étant contraints par les accords passés de longue date avec l'Union soviétique.

Deux solutions s'imposaient alors. Soit obliger la Chine à ratifier tous les traités existants pour établir des règles du jeu égales pour tous. Soit sortir de tous les traités pour avoir les mains libres. C'est ce second choix que firent les États-Unis en dénonçant ou en ne renouvelant pas certains accords. Aujourd'hui la course aux armements se déroule dans un cadre de plus en plus dérégulé et détricoté qui se traduit par l'écroulement progressif de l'architecture de maîtrise des armements héritée de la guerre froide, alors même que des foyers de tensions se développent, des armes tonnent, qu'un conflit majeur a commencé entre l'Otan et la Russie en territoire ukrainien et qu'Israël pouvant se prévaloir de l'aide occidentale met le Moyen-Orient à feu et à sang. S'ajoute à ce sinistre tableau l'apparition d'armes nouvelles comme les drones et les techniques d'observation de plus en plus fines qui permettent d'envisager des opérations plus osées.

Faut-il le rappeler, aucune guerre nucléaire n'est gagnable. La seule inconnue, c'est qui meurt en premier et qui meurt en second.

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Critique de la stratégie globale des échanges dette-nature en Afrique : Partie 1 : Analyse critique contextuelle introductive

12 novembre 2024, par Anne Theisen — , ,
Que proposent la Banque Africaine de Développement (BAD), avec le FMI, la Banque Mondiale et les gouvernements de l'Union Européenne pour répondre en même temps au (…)

Que proposent la Banque Africaine de Développement (BAD), avec le FMI, la Banque Mondiale et les gouvernements de l'Union Européenne pour répondre en même temps au surendettement de nombreux pays africains et aux urgences écologiques et climatiques ? Nous en avons un aperçu dans un rapport d'octobre 2022 intitulé « Échanges dette-nature, faisabilité et pertinence stratégique pour le secteur des ressources naturelles en Afrique » [1].

Tiré du site du CADTM.

Dans ce rapport, les auteurs de la Banque Africaine de Développement (BAD), du groupe POTOMAC (agence conseil des entreprises et investisseurs privés), du Fonds Mondial pour la Nature (WWF) et du Centre Africain de Gestion des Ressources naturelles et d'Investissements (CAGRSI), décrivent le contexte de surendettement des pays africains sans en expliquer les causes profondes. Ils se limitent aux circonstances externes d'aggravation récentes telles que la pandémie du COVID 19, les conséquences de la guerre en Ukraine ou choisissent de mettre l'accent sur des causes internes telles que « les problèmes de gouvernance des États africains » ou « l'excès des dépenses publiques ». Cette analyse expose les mécanismes d'échange dettes-nature comme des solutions relatives quoiqu'encore insuffisantes. Elle développe la stratégie globale dans laquelle ils s'insèrent et en définit les composantes « innovantes » « : l'Initiative de Suspension temporaire du Service de la Dette (ISSD), le Cadre Commun, les Droits des Tirages Spéciaux (DTS), le Mécanisme Africain de Stabilité Financière (MASF), la Facilité Africaine d'Assistance Juridique (ALSF), le Fonds Africain de Développement (FAD) et le plan d'action « Relance verte ». Elle distingue les échanges dette-nature bipartites, multipartites et propose une méthodologie de choix de dispositifs financiers adaptés en fonction de chaque situation, des objectifs, des besoins et du profil d'endettement des pays. Elle montre que le succès des échanges dette-nature est limité dans le temps et en termes de volume financier libéré pour l'environnement et le développement.

Elle indique également que leur impact économique reste trop faible et difficilement mesurable tout en espérant « qu'ils puissent stimuler des actions réelles en faveur de la conservation naturelle et accroître leurs effets dans une possible transposition à plus grande échelle », sur le continent africain. En outre, le document met en avant « des instruments financiers alternatifs plus récents suscitant un engouement particulier à l'heure actuelle tels que des obligations vertes à objectifs ciblés ou celles liées aux Objectifs de Développement Durables (ODD) liant des dettes souveraines africaines à des résultats obtenus sur le plan climatique et écologique ». Il en montre les avantages et inconvénients. Les auteurs espèrent que ces innovations mobiliseront le secteur privé qui détient une part croissante des dettes africaines ainsi que les nouveaux créanciers officiels, en particulier la Chine dont l'influence grandit considérablement en Afrique.

Il convient de relire cette présentation des différents instruments financiers pour la conservation environnementale en Afrique avec un regard plus critique, celui entre autres des membres africains du réseau CADTM international qui se sont exprimés à ces sujets lors d'une présentation au parlement européen en 2022 intitulée « Afrique : le piège de la dette et comment en sortir » [2]. ainsi qu'à travers de nombreux commentaires et témoignages qu'ils nous ont transmis pour enrichir ce travail. Nous intégrerons aussi les analyses pertinentes du réseau ATTAC sur la finance verte et la bifurcation écologique et sociale [3].

Dans cette étude 1, ces différentes voix critiques rappellent les causes profondes, historiques, structurelles, des dettes des pays d'Afrique et soulignent leur part illégitime. Elles dénoncent l'aspect néocolonial de leurs conditionnalités et de leur persistance. Elles remettent en cause les fausses solutions promues par la BAD et ces formes diversifiées de greenwashing. En réaction à l'appel du président sénégalais Macky Sall, à la fin mars 2020 pour une annulation de la dette publique et le rééchelonnement des dettes privées en Afrique, sans se faire d'illusion sur la volonté d'agir de ce président, le CADTM international revendique l'abolition pure et simple des dettes odieuses, identifiées sur base d'audits citoyens participatifs, d'autant plus en cette période ou des chocs extérieurs au continent sont venus menacer de manière alarmante les vies, les économies et l'environnement en Afrique.

Il estime que ces annulations de dettes des pays pauvres sont réalisables car finançables par la vente de seulement 6,7% de l'or détenu par le FMI dans ses réserves (8,2 milliards d'USD) ou bien par des recettes fiscales améliorées grâce à la lutte contre l'évasion fiscale et l'instauration d'un système d'imposition juste. Le CADTM préconise des réformes radicales mettant fin aux dépendances économiques impérialistes. Il défend des rapports internationaux débarrassés des déséquilibres renforcés à coups de conventions commerciales, d'accords de libre-échange défavorables et de réajustement structurels liés à une gestion abusive de la dette, de ses conditionnalités et du taux d'intérêt. Il montre que l'implication des créanciers privés, aujourd'hui majoritaires, dans les allègements de dettes et l'interdiction des pratiques usurières des fonds vautours au détriment des pays surendettés doivent être imposées et encadrées par des lois. Enfin, il réclame la fin des politiques néolibérales, néocoloniales et extractivistes, revendique des régulations des marchés et des réparations, en rappelant que les droits humains, sociaux et environnementaux doivent toujours primer sur ceux des créanciers.

Partie 1. Analyse contextuelle introductive

Selon le rapport de la BAD, les pays les plus surendettés après l'épidémie de la Covid- 19, la crise énergétique et alimentaire suivant la guerre en Ukraine, aurait besoin de 484, 6 milliards de USD pour relancer leur économie dans les trois ans. Il s'agit d'éviter que le surendettement des pays africains les conduise à un défaut de paiement. Comment ? En utilisant la conversion d'une partie de leur dette pour le financement d'actions de conservation de leur environnement en Afrique, en vue de freiner le réchauffement climatique. D'une pierre deux coups ! Ce document émet des recommandations politiques et guide le nouveau plan d'action de la BAD pour une politique d'endettement « soutenable » à savoir viable et « durable » avec toute l'ambigüité que ces termes peuvent porter en eux-mêmes selon que l'on se place dans le camp des créanciers ou des débiteurs, et suivant le contexte différent dans lesquels ces mots apparaissent.

N'est-ce pas paradoxal de s'inquiéter de la viabilité des dettes à l'heure où les dettes
des pays africains tuent ?

En effet, 300 millions d'Africains se trouvent dans une extrême pauvreté en 2020, 390 millions en 2021 ce qui représente 34% de la population. En Afrique, l'espérance de vie est de 14 ans inférieure à la moyenne mondiale et la mortalité à la naissance est 2 fois plus élevée que dans le reste du monde à cause du système de santé et des services publics défaillants. On compte à peine 0,7 médecin spécialiste pour 10 000 habitants au lieu des 20 à 40 recommandés par l'OMS en 2022. Oxfam lance régulièrement des cris d'alarme, bien avant la survenue de la pandémie, par rapport au demi-milliard de personnes dans le monde susceptible de basculer dans la misère en raison de l'exacerbation constante des inégalités sociales, économiques et de genre. En Afrique aujourd'hui, en 2023, 40,2% de la population vit avec moins de 1,90 USD par jour et le chômage endémique des jeunes de 15 à 19 ans atteint les 40,3% ! Au Nigéria le service de la dette s'élève à 60% du budget alors que celui de l'éducation ne représente que 5,68% et de la santé 4,6%. Ce mal développement n'est pas qu'accidentel.

D'après Adama Coulibaly d'Oxfam Afrique 4, « Les choses ne peuvent plus être comme avant... Aucun pays africain ne peut se permettre de rembourser sa dette à partir de 2020, qu'elle soit due à des créanciers bilatéraux, à des institutions multilatérales ou à des prêteurs privés, sans mettre en danger des millions de vies africaines. » En outre, des mesures doivent être prises pour garantir que l'endettement et les différentes formes d'allègement accordées et leurs conditionnalités et leurs tragiques conséquences ne se reproduisent pas à l'avenir.

1.1. Un endettement alarmant

Le rapport de la Banque Africaine de Développement analysé (p. 11) expose des
chiffres alarmants concernant l'endettement : 24 pays africains étaient menacés en
2022 de surendettement global ou exposés à un risque élevé selon l'analyse des
viabilités des dettes africaines de la BM et du FMI ; le total des dettes extérieures, après la pandémie COVID 19 et la guerre en Ukraine et les ruptures d'approvisionnement engendrées, est passé de 380,9 milliards en 2012 à 702,4 milliards en 2022 ; le PIB a chuté de 2% en 2020 et le revenu réel par habitant de l'Afrique sub-saharienne a baissé de 5,3% au lieu d'augmenter de 3,4% comme projeté pour 2021. Pendant la crise sanitaire, l'endettement a augmenté de 10 à 15% et dépassé en moyenne les 70% du PIB des pays africains ! Les recettes fiscales se sont effondrées, ainsi que celles liées aux exportations. En effet, le cours des matières premières a chuté or celles-ci constituent 70% des recettes d'exportation. Le déficit du budget a doublé en 2020 en Afrique et le paiement au titre de remboursement de la dette extérieure représente 14% des recettes publiques dans plus de 20 pays africains et est supérieur à 30% dans 5 pays. La Zambie, la Gambie, le Ghana, le Tchad se déclarent en incapacité de remboursement...

Le risque de contagion, de défaut de paiement généralisé est alarmant et dans ce
contexte demander des efforts financiers à ces pays pour lutter contre le
réchauffement climatique frise l'indécence.

Le cas de la Zambie : Un article du Monde Afrique affirme en 2020 que la Zambie est techniquement le premier pays en défaut de paiement pendant la pandémie 5. Christopher Myunga, le gouverneur de la banque centrale de la Zambie, dans une conférence de presse à Lusaka à la mi-octobre 2020 a annoncé un défaut de paiement de la Zambie. Ce pays a manqué une échéance de remboursement de 33,7 millions d'euros et déclare qu'il ne remboursera plus aucun créancier selon le Monde et l'AFP. « Ce n'est pas que nous ne pouvons plus rien payer (la Zambie peut encore rembourser 36 millions d'euros de dettes) mais par mesure d'équité, si nous payons un créancier, alors nous devons tous les payer », reconnaissant « une genèse de défaut de paiement ». Selon les spécialistes, la Zambie n'aura pas d'autres choix que de faire marcher la planche à billets pour acheter plus d'obligations. Le risque serait alors une hausse de l'inflation et une monnaie qui s'effondre.« La Zambie s'oriente vers un scénario similaire à ce qui s'est passé au Zimbabwe », a mis en garde Robert Besseling, directeur exécutif de l'agence conseil aux investisseurs EXX AFrica.

La Zambie est un des principaux débiteurs de la Chine.

« La meilleure option serait une annulation de la dette », a déclaré à l'AFP la directrice de l'ONG ActionAid, Nalucha Nganga, en Zambie. La Banque africaine de développement (BAD) a évalué la dette publique zambienne à 80 % de son PIB en 2019, contre 35 % fin 2014. La Zambie a pâti de la chute du taux du cuivre dont elle est le deuxième exportateur mondial. Son PIB en progression de 4% en 2018 a chuté de 4% en 2020. Le PIB/habitant a plongé de 6,7 %.

Le 22 juin 2023, lors du Sommet de Paris, un accord de restructuration de 6,3 milliards de dollars de la dette zambienne dont le montant total s'élève à 32,8 milliards de dollars dont 18,6 milliards auprès de créanciers étrangers, (selon les chiffres de son ministre des finances) semble avoir été conclu, principalement envers ses créanciers bilatéraux (détenant une partie importante de sa dette) dans le cadre commun du G20, incluant le Club de Paris, la Chine et l'Inde. Il consiste en une prolongation pour 20 ans de l'échéance de paiement avec une période de grâce de 3 ans. Ni l'annulation ni la réduction pure et simple de la dette n'ont donc été les solutions retenues et la Zambie doit encore négocier avec des créanciers privés ne faisant pas partie de l'accord... Le 26 juin 2023, The Africa Report se montre optimiste mais prudent quant à l'efficacité de cette mesure. Elle a entraîné une réappréciation de la monnaie de la Zambie de 12% en juin et une baisse du taux d'intérêt des bons du Trésor et des obligations de l'État. Cela peut rassurer les investisseurs et engendrer un boom économique, si les termes du prêt se stabilisent et si l'argent est bien investi dans des secteurs productifs (et non principalement spéculatifs). Selon l'article « La restructuration de la dette zambienne n'est qu'un demi succès », paru dans Jeune Afrique 6, Trevor Simumba, économiste spécialisé en commerce, insiste sur le fait que la dette extérieure n'était que de 1 à 2 milliards de dollars lorsque le Front patriotique est arrivé au pouvoir en 2011 et « qu'elle a grimpé lorsque ce régime s'est lancé dans une frénésie d'emprunts ». La pandémie n'est donc pas la seule cause de l'effondrement économique de ce pays et il faudra en tenir compte pour un processus redressement qui prendra du temps.

Un article de Joseph Cotterill, publié en anglais dans le Financial Times, le 21 novembre 2023, intitulé « La restructuration de la dette de la Zambie a déraillé après le rejet de l'accord par des créanciers conduits par la Chine » fait état des tensions entre les créanciers officiels d'une part ( la Chine représentant le principal créancier officiel en Zambie ) et d'autre part, entre le secteur officiel et les détenteurs de bonds du secteur privé mené par des banques chinoises, en ce qui concerne les accords d'allègement de dettes en Zambie. Le président zambien Hakainde Hichilema aurait accepté en octobre 2023 un nouveau deal avec le secteur privé et la Chine que les acteurs du G20 trouvent trop avantageux pour ceux-ci alors qu'eux ont de leur côté accepté « des allègements et de nouveaux prêts significatifs pour empêcher le défaut de paiement de la Zambie. » Mais le président zambien pris en étaux se défend en expliquant qu'il ne cherche qu'à retrouver la solvabilité de son pays et qu'il a respecté le principe de comparabilité. Selon cette règle, les différents créanciers doivent assumer des pertes « comparables », plus ou moins égales, en cas de restructuration d'une dette souveraine. Les détenteurs de bonds renchérissent : « ce n'est pas aux créanciers bilatéraux officiels de dicter les accords de restructuration à partir du moment où la comparabilité de traitement a été respectée ». Selon l'article, ils auraient perdu 39 % des flux financiers projetés en Zambie alors que le secteur officiel aurait assumé une perte de 41% durant les quelques années qui ont suivi leur accord.

Notons aussi que l'agence Ecofin dans un article du 19 janvier 2023 a révélé que le WWF a proposé à la Zambie d'intégrer un échange dette-nature dans les négociations avec ses créanciers 7. C'est ce qu'aurait déclaré le ministre zambien des Finances et de la Planification nationale. Selon l'ONG de défense de l'environnement (que nous savons très favorable à l'initiative privée et au néolibéralisme), la Zambie représente un candidat tout indiqué pour bénéficier de cette « technique d'allègement de dettes » vu l'importance de son surendettement et vu « ses nombreuses richesses naturelles à préserver : ses grands parcs naturels, ses espèces sauvages menacées, ses chutes Victoria reconnues comme patrimoine mondial de l'UNESCO ». Comme souvent dans les cas d'échange de dette contre nature, cette négociation n'a pas été prise en compte dans l'analyse de la viabilité de la dette de la Zambie par le FMI. Les conditions de cet arrangement sont encore particulièrement floues.

Un article sur le site de la BAD intitulé « Perspectives en Zambie en 2023 » 8 nous fournit quelques précisions sur cet échange dette contre nature et sur d'autres mesures apparemment en faveur du climat mais qui surtout ouvrent grand la porte aux spéculateurs privés lorgnant sur les richesses naturelles, « le capital vert » de la Zambie car dans l'état de misère dans laquelle le pays est acculé, quelle est sa marge de manœuvre réelle pour pouvoir encore négocier à son avantage ? « Un Green Outcomes Fund de 53 millions d'USD a été récemment créé par la Zambia National Commercial Bank, Kukula Capital et le World Wide Fund for Nature- Zambia. » « La Banque de développement de Zambie a également été accréditée par le Fonds vert pour le climat pour recevoir et soumettre des propositions au nom des développeurs de projets verts. » « Des instruments d'assurance indexés sur les conditions météorologiques sont déjà utilisés et des initiatives d'obligations vertes viennent d'être lancées ». Vous trouverez plus loin nos éléments critiques par rapport aux agissements des banques privées, envers certaines ONG environnementalistes comme le WWF qui gèrent les fonds de protection de la nature de manière peu démocratique ainsi qu'en ce qui concerne l'invasion des obligations soi-disant vertes. Le CADTM ne partage pas l'idée que ces actions puissent apporter une amélioration sociale et environnementale car elles ne résolvent en rien le problème fondamental du surendettement. En effet, selon les chiffres de ce même document en 2022, la dette de la Zambie est supérieure à 104 % du PIB même si la performance du secteur financier s'est améliorée en 2021 et 2022 grâce à la reprise de l'activité économique. Plus de la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté national, surtout dans les zones rurales où ce pourcentage atteint les 77 %. Il est de 23 % dans les zones urbaines. Pas de doute, cette situation d'endettement tue chaque jour et le pays est maintenu dans une situation de dépendance malsaine vis-à-vis de ses créanciers internationaux. Les facteurs d'évolution défavorables « incluent la poursuite de la sécheresse, la fluctuation des prix du cuivre et l'impact de l'invasion de l'Ukraine par la Russie sur les prix des céréales, des engrais et des carburants... » et l'article oublie d'ajouter cette politique néolibérale qui entretient le cercle vicieux et mortel de l'endettement, ce contre quoi le capitalisme vert n'apporte que de fausses solutions.

1.2. Chine et secteur privé

En plus des États européens et des USA, de nouveaux créanciers bilatéraux comme l'Inde et surtout la Chine ont « envahi » le marché africain. En effet, les prêts de la Chine ont été multipliés par 4 en Afrique dans les 10 dernières années. Ils sont passés de 40 milliards à 153 milliards d'USD de 2010 à 2019. Aujourd'hui la Chine détient 1/3 de la dette extérieure publique bilatérale des pays du Sud. Il est donc important qu'elle participe aux négociations sur la dette en faveur des Pays Africains.

La politique publique-privée chinoise vis-à-vis de l'Afrique, son intérêt pour les ressources naturelles africaines, sa propension à inonder les marchés de ses liquidités, et derrière un discours encensant la solidarité SUD-SUD, sa recherche de profits à travers la création de dépendances commerciales, financières et économiques commencent progressivement à entrer en compétition avec les rapports néocoloniaux européens et dominateurs américains sur le continent africain. La critique de ce nouvel impérialisme chinois en Afrique est fortement répandue en Europe et aux USA mais elle tend à faire oublier le fait que pour l'instant ce n'est pas la Chine le principal créancier des pays africains mais le secteur privé.

Pour en savoir plus :

La Chine en Afrique : histoire d'amour ou péril mortel ? Et si c'était plus compliqué que ça ? 9

RDC, Burundi, Angola, Sri Lanka : quatre exemples pour comprendre la présence chinoise en Afrique et en Asie 10

En effet, malgré l'arrivée de ces nouveaux États créanciers sur le marché, la part des créanciers bilatéraux dans l'encours de la dette extérieure africaine a fortement diminué. Elle est passée de 50% en 2000 à 27% en 2019. L'endettement des entreprises publiques à fortement augmenté aussi et les risques se sont accrus. 18 pays ont émis plus de 155 milliards en euro-obligations sur les marchés internationaux. Ce sont des instruments de dettes avec des échéances plus courtes et des taux d'intérêts plus élevés. La dépense d'intérêts par rapport aux revenus a doublé entre 2010 et 2019.

En fait, la proportion des créanciers privés commerciaux, des banquiers ou des détenteurs d'obligations, a fortement augmenté passant de 17% en 2000 à 40 % en 2019, la part des créances privées a grimpé de 56 milliards à 194 milliards dont 135 milliards sont dus aux porteurs d'obligations.

1.3. Politique monétaire internationale aggravante

Les pays africains s'endettent majoritairement en devises étrangères et leurs banques centrales ne peuvent pas créer la monnaie nécessaire pour payer leurs dettes extérieures. De plus la majorité de leurs créanciers sont étrangers et peuvent placer à tout moment leurs investissements et liquidités en devises à l'extérieur du pays. Cette menace est souvent brandie pour faire accepter des mesures fiscales, légales voire des choix politiques et électoraux plus avantageux pour les transnationales et les banques étrangères. Les pays africains essaient de rester attractifs pour les investisseurs quitte à faire d'importantes concessions et leur accorder une impunité certaine.

La dette commerciale en devises des pays à faible revenu a triplé durant les cinq années précédant la pandémie, atteignant 200 milliards de dollars en 2019. Le relèvement des taux d'intérêt aux Etats-Unis et en Europe met fortement sous pression les pays en développement endettés en dollars et qui dépendent des capitaux étrangers pour équilibrer leur balance des paiements. En effet, la Réserve Fédérale Américaine fixe son taux d'intérêt à du 5% et les Banques Centrales Européenne, du Canada, de l'Angleterre , à du 5,25%. Cette politique vise prétendument à freiner une inflation qui serait liée à l'augmentation des salaires mais il n'en est rien. Bien au contraire, l'inflation s'aggrave dans la plupart des régions concernées et les salaires stagnent. Les populations trinquent, leur pouvoir d'achat diminue et les grandes banques et les grands groupes financiers tirent des profits colossaux de cette situation. Remarquons aussi que plus les pays sont endettés, plus les prêts qui leurs sont concédés sont assortis de conditions et de taux d'intérêts défavorables, plus les titres des États qu'ils produisent sont moins bien cotés sur les marchés internationaux par les agences de notations et l'ensemble du système ne fait que les enfoncer davantage dans les difficultés économiques.

1.4. Des ressources naturelles menacées

Graphique - Les ressources naturelles : source d'espoir pour l'avenir de l'Afrique, Agence Anadolu,
https://www.aa.com.tr/fr/afrique/graphique-les-ressources-naturelles-source-despoir-pour-lavenir-de-lafrique/871406#

Le rapport de la BAD insiste sur la forêt tropicale du bassin du Congo, ressource naturelle extraordinaire ayant un effet sur le climat mondial mais menacée par la déforestation et une perte alarmante de biodiversité. 68% des poissons, mammifères, amphibiens et reptiles peuvent disparaître selon le « Planète vivante »11 de WWF, paru en septembre 2020. Pour ces experts, ce désastre est « lié à la poussée démographique, à une consommation mondiale non durable, au défrichement à des fins agricoles, au pâturage intensif du bétail, à l'industrialisation, au bois pour la cuisine et le chauffage... La pauvreté, les conflits armés et les énormes dépenses publiques que l'Afrique a dû réaliser en matière de santé et d'aide sociale pendant l'épidémie ont grevé le budget ».

Plus moyen de payer la dette publique. Comment financer alors la transition écologique ?

Nous ne partageons pas cette analyse qui passe sous silence de nombreux aspects essentiels pour comprendre et lutter contre le réchauffement climatique et la destruction de l'environnement en Afrique.

1.4.1. Le principe du pollueur- payeur impliquant des réparations

Dans l'étude de la BAD, les auteurs ne nient pas que la plupart des Gaz à Effets de Serre (GES) responsables du réchauffement climatique ne sont pas liés à la production ou la consommation des pays africains mais bien à celles des pays créanciers. Or l'Afrique et ces trésors naturels souffrent en premier lieu des conséquences de leurs activités écocides. Pourquoi les pays africains les plus affectés et les moins responsables ne pourraient-ils pas bénéficier de très importantes compensations, dont des annulations complètes de dettes ? Le CADTM l'envisage mais pas la BAD.

Selon François Gemenne, spécialiste en politique de l'environnement et des migrations, co-auteur du sixième rapport du GIEC, chercheur en sciences politiques à Sciences Po, à la Sorbonne et à l'Uliège, la décarbonisation de l'économie mondiale ne sera pas possible si elle ne concerne que les pays riches qui en ont les moyens. À ses yeux, « le pire ennemi du climat, c'est le nationalisme » parce que cette idéologie considère que les intérêts nationaux priment sur l'intérêt global. Or, l'action pour le climat doit nécessairement dépasser nos frontières et ne peut être centrée sur nous- mêmes. « Les politiques climatiques qui sont menées en Inde, au Nigeria, en Egypte, au Mexique ou en Indonésie, c'est-à-dire dans des pays qui pourraient être amenés à devenir de grands émetteurs d'ici à 2050, sont absolument cruciales ». C'est ce que souligne aussi Arnaud Zacharie, dans son article « Convertir les dettes insoutenables en investissements verts »12 paru le 10 janvier 2023 sur le site du CNCD. Il ajoute ceci : « Or selon l'AIE ( l'Agence Internationale de l'Énergie), si les pays industrialisés de l'OCDE ont planifié 373 milliards de dollars de dépenses publiques dans les énergies propres d'ici 2023, soit un montant proche des dépenses nécessaires à court terme pour respecter la trajectoire menant à la neutralité carbone en 2050, les pays en développement n'ont alloué que 52 milliards de dollars jusqu'en 2023, soit seulement le quart des dépenses nécessaires à court terme pour être en phase avec l'objectif de « zéro émission nette » au milieu du siècle ».

Il faudrait donc augmenter les contributions aux pays africains si l'on veut parvenir à cette finalité commune en 2050.

1.4.2. De l'impunité des multinationales écocides et meurtrières

En outre, selon Jean Nanga, journaliste et militant du CADTM Afrique, « la décarbonisation de l'économie, aussi bien dans le Nord que dans le Sud ne pourra pas être atteinte sans remettre en question la production actuelle acro à la croissance » . Il s'est développé une critique considérant la « neutralité carbone », le « zéro net », dans le système actuel comme relevant de la tromperie. « Les politiques de neutralité carbone actuelles ne contiendront pas le réchauffement sous la barre des 1,5 degrés celsius car il n'a jamais été question qu'elles le fassent. Elles étaient destinées à protéger la marche habituelle, le business as usual , et elles le sont toujours aujourd'hui » (James Dyke, Robert Watson, Wolfgang Knorr, 2022) 13. Il fait référence aussi à l'article de Daniel Tanuro publié sur le site de Contretemps, le 22 novembre 2021 intitulé « la COP 26 : Désastre pour les peuples, bénédiction pour le capital »14 qui abonde dans ce sens.

Remarquons aussi qu'il n'est pas question dans l'étude de la BAD de la responsabilité des multinationales des énergies fossiles (du gaz, du pétrole et du charbon), privées et publiques, émettant plus de 86 % d'émission des gaz à effets de serre, premier facteur de réchauffement climatique selon le dernier rapport du GIEC 15. Pourtant les géants extractivistes transnationaux sont, tout comme ceux de l'agro-industrie, coupables de pollution et de dévastations naturelles ainsi que de nombreuses violations des droits humains provoqués en Afrique. Le projet pétrolier East African Crude Oil Pipeline (EACOP) lancé par TOTAL entre l'Ouganda et la Tanzanie compromet, à lui tout seul, la limite de 1,5 degré celsius de réchauffement climatique d'ici 2030 recommandée par le GIEC. Il faut lire à ce sujet la résolution européenne du parlement européen 16 qui s'y oppose fermement.

Les compagnies d'énergies fossiles sont devenues plus puissantes que certains Etats et leurs bénéfices ne cessent d'augmenter atteignant des proportions honteuses eu égard aux dégâts engendrés. Elles pourraient contribuer beaucoup plus activement au financement de la transition verte, dans un cadre régulé aux échelles locales, nationales, mais aussi mondiales, et orienté vers les intérêts de l'ensemble des populations du monde en veillant à ce que leurs investissements verts ne soient ni juste de la poudre aux yeux, un greenwashing publicitaire, ni un moyen détourné de procéder à un écoblanchiment frauduleux.

De plus une des mesures internationales à promouvoir serait la limitation des investissements privés et publics accordés aux énergies fossiles en plus de l'encouragement de ceux orientés vers le développement des énergies durables et de la transition. Certes, globalement le monde n'a jamais autant investi dans la transition énergétique et environnementale 17 : « Les investissements mondiaux dans la transition énergétique, selon un rapport de BloombergNEF, ont bondi en 2022 de 31% par rapport 2021r, totalisant 1.100 milliards de dollars et frôlant désormais le montant des investissements dédiés aux énergies fossiles, lequel est aussi en hausse ». Cette dernière partie de phrase montre bien que les investissements des énergies fossiles sont encore proportionnellement bien trop élevés pour respecter les recommandations du GIEC. Il faudrait donc une action plus contraignante concernant la nécessaire réduction des investissements dans les activités des énergies fossiles. Pour Jean Nanga, pour l'instant, les énergies renouvelables ne remplacent pas les énergies fossiles mais s'ajoutent à celles-ci .

De plus même dans le cas des énergies renouvelables, leurs modes de production peuvent également impliquer un extractivisme violent et condamnable. C'est par exemple ce que dénoncent les autochtones de la région de Jujuy en Argentine qui montrent comment l'extraction du lithium, pourtant utile à une transition écologique, se réalise de manière brutale sur leurs terres sans respect ni pour leurs peuples qui y résident et ni pour la faune et la flore des zones d'exploitation du minerai. Dans un article18 paru sur le site de Reporterre le 10 mars 2015, Alan Loquet, journaliste correspondant en Amérique latine, dénonce la corruption, la pollution et les ravages de l'exploitation du lithium en Argentine.

En outre la nécessaire réduction de production et de consommation des énergies fossiles ne doit toutefois pas perdre de vue qu'il ne devra pas s'appliquer de la même façon à des pays actuellement complétement dépendants de l'exportation des énergies fossiles ou qui connaissent des carences graves en accès à l'énergie sans avoir pu produire suffisamment d'énergies renouvelables pour répondre à leurs besoins de base et ce d'autant plus si ces régions connaissent une plus grande croissance démographique. Un système international de compensation solidaire et adapté aux différentes situations devrait être pensé et négocié internationalement à ce sujet.

On se tait aussi sur la difficulté des États nationaux à défendre les droits environnementaux et humains contre ces transnationales lorsqu'ils sont liés par des accords de libre-échange qui priorisent les bénéfices économiques sur les enjeux sociaux et environnementaux par le mécanisme de l'ISDS. L'Investor-State Dispute Settlement (ISDS) est un mécanisme d'arbitrage des différends entre une investisseurs et un État. Concrètement le principe permet de déléguer à un tribunal supranational le règlement d'éventuels conflits entre une entreprise (généralement une multinationale) s'estimant spoliée du fait d'une législation et un État. Ce mécanisme est pourtant actuellement remis en cause en Europe et est une des raisons qui explique que de nombreux États européens (la Pologne, l'Allemagne, l'Espagne, la France, la Belgique...) sous l'impulsion des Pays Bas se retirent progressivement du Traité de la Charte de l'Énergie.

Ils estiment en effet que la possibilité des multinationales des énergies combustibles fossiles de pouvoir attaquer en justice devant des tribunaux d'arbitrage un État qui souhaiterait protéger son environnement ou sa population par des lois et règlementations contraignantes vis-à-vis de ces entreprises, représente un frein considérable à la transition écologique promue par les accords internationaux contre le réchauffement climatique, accords que ces États ont signé. En effet, certains États européens ont été contraints de payer des amendes colossales à des multinationales pétrolières ou du charbon pour avoir légiféré dans l'objectif de limiter leurs dégâts environnementaux. Ces sanctions sont fort dissuasives et contradictoires avec les intentions des accords de Paris et des différentes COP en faveur du climat. Renaud Vivien et Sophie Wintgens dans un article publié le 14 février 2023 sur le site du CNCD19 expliquent que « Plusieurs arrêts de la Cour de Justice de l'UE (CJUE), dont l'arrêt Achmea du 6 mars 2018, considèrent que les tribunaux d'arbitrage privés ne peuvent pas s'appliquer aux différends opposant un investisseur européen et un État membre de l'Union.

Dans le cadre des négociations pour moderniser le TCE, la Commission européenne n'a pourtant pas proposé de supprimer la clause d'arbitrage privé alors qu'elle est illégale au regard du droit de l'UE. En conservant cette clause ISDS, le traité modernisé continue dès lors d'être en contradiction avec le droit de l'Union, tel que confirmé récemment par l'arrêt Komstroy ». Cette remise en cause de l' ISDS au niveau européen qui prend de l'ampleur devrait aboutir, selon le CADTM, à la remise en cause radicale des accords de libre-échange concernant les pays du Sud et demeure un obstacle important à la protection de la nature et des droits des populations menacés par des transnationales climaticides, écocides et exploitatrices de main d'œuvre locale.

Aucune reconnaissance donc des affres de la politique néolibérale en matière d'environnement et des droits sociaux et humains. Les crimes contre l'environnement et l'humanité, les écocides, ou le non-respect du « devoir de vigilance » 20 des compagnies incriminées doivent donner lieu à des réparations. Plusieurs actions en justice menées par des groupements citoyens, des associations, des syndicats et des collectivités locales se basent sur cette notion actuellement. Le rapport de la BAD n'y fait nullement allusion.

1.4.3. Dérives de l'agro-industrie

La stratégie d'investissement de la BAD renforce également l'agro-industrie alors qu'elle est fortement responsable des crises alimentaires et climatiques en Afrique.

La BAD distribue actuellement 240 milliards de dollars qui s'ajoute aux 56,6 milliards déjà investis dont 13 ́% dans le secteur agricole. Or ces investissements, selon l'Atlas de la justice environnementale, ont provoqué au moins 14 conflits sociaux et environnementaux en Afrique, toujours en cours impliquant directement la BAD. La société civile se soulève contre cette politique et critique deux projets soutenus par la BAD :

Les pactes de fourniture de denrées alimentaires et de produits agricoles : depuis janvier 2023 au sommet de Dakar, ils représentent environ 65 milliards de dollars. Ils promeuvent la mécanisation, les semences certifiées, les engrais chimiques et les pesticides via un exonération fiscale sur les importations et d'autres types de subventions. La « Révolution verte » continue ses dégâts.

Les zones spéciales de transformation agro-industrielle ( SAPZ) , dans le but de créer des marchés et des chaînes de valeur alimentaire rentables selon les critères capitalistes. La BAD y aurait investi plus de 840 millions de dollars depuis 2017. Or ces projets causent une réorganisation territoriale importante, octroyant à l'agro-industrie les terres fertiles, les sources d'irrigation significatives et une main d'œuvre bon marché. L'objectif déclaré était de relier les zones rurales aux espaces péri-urbains des villes secondaires au taux de chômage élevé et fort pauvres. Paradoxalement, cette politique a contribué à l'expulsion des communautés paysannes et à leur migration vers les villes africaines.

Selon GRAIN, au lieu de protéger l'agriculture paysanne mise en œuvre par de petits agriculteur-trices, pêcheur.euses et éleveurs pastoralistes qui produisent 80% de la nourriture consommée en Afrique, la BAD agit systématiquement en faveur de l'agrobusiness, peu respectueuse de l'environnement, de la préservation de la biodiversité, dont la priorité n'est pas d'assurer la souveraineté alimentaire de l'Afrique mais de favoriser les grandes cultures et élevages d'exportation, qui rapportent des devises pour rembourser les dettes publiques en premier lieu.

Pour faire face aux crises alimentaire et climatique, la BAD doit opérer des changements structurels et profonds dans son approche et dans la gestion des fonds publics. Le CADTM critique largement l'agriculture industrielle extractiviste d'exportation qui détruit l'environnement et nuit à la souveraineté alimentaire des populations, entretient des conflits, ainsi qu'une dépendance malsaine au système dette et aux organisations internationales.

Voir les différents articles écrits par GRAIN et publiés sur le site du CADTM à ce sujet :

La stratégie de la BAD pour agro-industrialiser l'Afrique 21

L'Agro-impérialisme au temps du Covid 19 22

L'avenir des semences sous la Zone de Libre-Échange Africaine 23

Les barbares à la porte de la ferme : le capital-investissement à l'assaut de
l'agriculture 24

1.5. Retournement des causalités : des dépenses publiques indispensables

Une autre critique importante de l'analyse contextuelle dans ce rapport de la BAD est qu'il met l'accent sur le déficit public en le liant principalement à « une forte augmentation des dépenses publiques » et à « une mauvaise gouvernance des autorités publiques ».

Pourtant les financements de l'éducation, de la santé, des infrastructures, des transports, du logement, de la recherche, de la transition écologique et des réformes qui l'accompagnent font partie des missions prioritaires d'un État légitime aux yeux de ses citoyen·nes qu'il doit servir sans discrimination. Ces dépenses publiques sont indispensables et actuellement leur réduction creuse les inégalités et maintient les pays africains dans un mal développement déclencheur de crises sociales, économiques et politiques. Les mesures d'ajustements structurels dictées par le FMI et la BM attaquent toujours prioritairement les secteurs publics. Elles vont toujours vers plus d'austérité, plus de privatisation, de marchandisation, orientées en premier lieu vers le remboursement des prêts que les institutions internationales concèdent et conditionnent elles-mêmes.

En opposition avec ces politiques néolibérales, Jean Nanga, insiste sur l'importance d'augmenter les dépenses publiques afin de donner les moyens de développer une recherche indépendante des multinationales polluantes, aux activités lucratives non éthiques ou dangereuses pour la santé ou l'environnement. Ces dernières usent de leurs influences, de leur lobby puissant sur les institutions internationales et font pression sur les gouvernements pour conquérir et parfois essayer de monopoliser des marchés. Leur politique des brevets pour s'accaparer un droit de propriété et les bénéfices financiers des innovations scientifiques, empêche l'accès au plus grand nombre des inventions scientifiques et des produits qui en dérivent. Les multinationales privées orientent politiquement et financièrement les travaux scientifiques vers des voies (OGM, transformations génétiques, pesticides, médicaments placebos rentables, etc.) menaçant la santé, les biens communs, la nature et les équilibres sociétaux.

Nous l'avons vu dans le cas des vaccins où quelques grands groupes pharmaceutiques très puissants se sont réservés un oligopole du marché mondial et n'ont pas permis la création et diffusion de vaccins génériques, en Afrique, en pleine pandémie. En 2019, quatre entreprises détenaient à elles seules 90% du marché : GlaxoSmithKline, Merck, Pfizer et Sanofi dénonce dans une carte blanche dans l' Écho 25 le 18 mars 2021, Céline Boulenger, macroéconomiste à l' Université Degroof Petercam de Houston. Elle ajoute que se fournir des vaccins a été un véritable cauchemar pour les pays du Sud or dans une épidémie mondiale dans laquelle nous sommes tous interdépendants, le combat contre le virus doit être international. Des vaccins ont été vendus à des prix extrêmement élevés à des pays africains surendettés, appauvris par la crise, en pleine pandémie du Corona virus. Selon Éric Toussaint, sous l'influence du Big Pharma, les trois vaccins efficaces fabriqués par Cuba n'ont pas été reconnus par l'OMC et n'ont pu être diffusés vers d'autres contrées qui en avaient besoin.

Pour en savoir plus, voici quelques articles publiés sur le site du CADTM :

La pandémie du coronavirus a renforcé le fossé entre Nord global et Sud
global 26

Biens communs, dettes et brevets des firmes pharmaceutiques 27

Coronavirus : Biens communs mondiaux contre Big Pharma 28

L'appropriation des connaissances et les bénéfices du Big Pharma au temps
du coronavirus 29

La pandémie du coronavirus a mis à nu la logique néolibérale de l'UE 30

Liste des 360 premières signatures de personnes qui soutiennent le Manifeste
« Mettons fin au système de brevets privés ! #FREECOVIDPATENTS 31

Vidéo : Crise globale – Épisode 1 – Les vautours du Big Pharma 32

Une recherche financée par l'État dont la priorité ne serait pas principalement d'ordre financier est donc nécessaire pour la construction d'une société plus saine et équilibrée. L'État peut aussi subventionner les énergies renouvelables, des transports et constructions nécessitant des investissements à plus long terme, plus écologiques. Le privé est souvent plus intéressé par des profits à court terme.

En outre, les activités de soins aux personnes, l'éducation, des secteurs principalement féminisés sont souvent considérés comme peu rentables mais sont néanmoins essentiels à la société. Un financement public est indispensable pour mieux encadrer et accompagner la bifurcation sociale et écologique nécessaire. En favorisant l'hégémonie du secteur privé, les institutions internationales semblent oublier l'importance des investissements non conditionnés à la rentabilité à court terme, au profit des acteurs économiques prédominants qui ne répondent pas aux intérêts du plus grand nombre.

1.6. Des optimisations, fraudes et évasions fiscales occultées

Rien n'est dit non plus sur le fait que l'on pourrait augmenter aussi les recettes notamment en luttant contre la fraude, l'évasion ou l'optimisation fiscale des acteurs privés, contre la fuite des capitaux, pour une réforme du système d'imposition, en taxant plus le capital, les entreprises et les grosses fortunes plutôt que de maintenir une TVA élevée qui écrase le pouvoir d'achat des populations. Avec cet argent récupéré, des financements de projets pour la conservation de l'environnement seraient réalisables. Le CADTM cite le rapport de la CNUCED 33 sur le développement en Afrique de 2020 qui estime la fuite des capitaux à 88,6 milliards de USD de 2013 à 2015 ce qui correspond à 3,7% du PIB Africain et à 2 à 3 fois le service de la dette extérieure africaine pendant chacune de ses trois années ! C'est plus que le montant de l'aide publique au développement pour l'Afrique ! Ces évasions de capitaux sont à la fois d'origine privée et publique. Les intérêts étant entremêlés et les gouvernements souvent complices. Au Mali, selon la présentation du CADTM au parlement européen, les exonérations d'impôts de 203,4 milliards de francs CFA correspondent à 3,5 fois le budget de l'éducation.

Pourquoi aussi créer de nouveaux emplois si ceux-ci génèrent des gains qui seront ensuite placés dans des banques ou investis majoritairement à l'étranger ! Il faut mettre en place des systèmes de régulations et de contrôles qui empêchent ces fuites de capitaux dont les pays ont grand besoin pour garantir leur transformation écologique et sociale.

1.7. Accords de Libre-Échange et conventions défavorables

On pourrait aussi revenir sur les dépendances économiques sans cesse renforcées par les accords de libre-échange, les conventions ACP-UE ou APE-UE qui se succèdent dans des termes à long terme carrément désavantageux pour les États africains. En effet, ils poussent toujours à une déréglementation de leurs protections diverses, à une spécialisation des pays du Sud dans l'exportation de certaines matières premières à faible prix et à l'importation de produits finis plus coûteux. Ils obligent à se référer à une monnaie étrangère toujours supérieure à la leur. Ils les conduisent à surexploiter jusqu'à l'épuisement puis à brader leur main d'œuvre et leurs ressources naturelles pour obtenir ces devises nécessaires au remboursement de leur dette ...

Pour plus d'informations à ce sujet :

La Zone de Libre-Échange Africaine est une erreur de Ndongo Samba Sylla 34

Zone de libre-échange continentale africaine : Quel panafricanisme ? de Jean
Nanga (étude en 3 parties) 35

1.8. La fuite du capital humain et les transferts onéreux

Ces politiques poussent des milliers d'hommes et de femmes à quitter l'Afrique pour tenter leur chance vers des contrées avec plus de débouchés, des salaires payés en devises fortes, des systèmes d'éducation, de santé et de protection sociale plus sécurisants du moins lorsqu'ils ou elles ont accès à ces privilèges car les conditions d'exil et d'intégration ne sont pas aussi faciles qu'on ne leur laisse miroiter. Malheureusement, la Convention de Genève n'accorde pas de protection aux migrant.es qui doivent abandonner leurs pays pour des raisons économiques ou climatiques même si leur vie est directement menacée par ces dangers et que les États ne parviennent pas à les protéger contre ceux et celles qui confisquent ou détruisent leurs moyens de subsistances. Les octrois des visas et des séjours, les régularisations par le travail, sont très restrictifs, protectionnistes et favorisent l'exploitation des personnes en séjours précaires ou sans documents officiels. Les équivalences de diplômes, et les conditions financières d'accès aux études supérieures sont décourageantes pour les personnes déjà qualifiées ou qui veulent hautement se qualifier en provenant d'Afrique. Quant aux droits au regroupement familial, actuellement ils sont assortis de conditions de revenus et d'intégration de plus en plus sévères. L'esprit de suspicion de fraudes et la répression dominent les nouvelles lois.

On le constate dans la lutte contre les mariages blancs et des enfants de complaisance, la criminalisation des migrant-es et de leur soutien, la mise en place de dispositifs répressifs et très coûteux comme la construction de centres fermés, le contrôle militarisé des frontières, et des voies de migrations, des expulsions forcées par vols commerciaux ou par charters collectifs, des accords de réadmission, des chantages sur les accords commerciaux ou par rapport à l'aide au développement... Or la fuite des cerveaux, (étudiant-es, chercheurs-ses, artistes, sportifs-ves...), l'émigration de la jeunesse, (dont le taux de chômage atteint les 12,7% en Afrique en 2022 selon l'Organisation Internationale du Travail 36 constituent des pertes de potentialités importantes pour l'Afrique. Même si ces flux migratoires génèreraient des coûts et des tensions, si l'on en croit les leaders d'extrême droite qui ont le vent en poupe en Europe, cette main d'œuvre venue d'Afrique apporte incontestablement des bénéfices aux pays qui les accueillent. Elle représente en effet une force de travail dans des secteurs nécessaires souvent en pénurie, des cotisations et des impôts et contribue au renouvellement d'une population vieillissante. Ces déplacements officiels ou informels creusent encore les déséquilibres mondiaux.

Les transferts des migrants vers leurs pays d'origine constituent une source non négligeable de revenus et de développement pour l'Afrique, en dépit de tous les obstacles rencontrés par les émigrés africains. Mêmes dans ces circonstances, les organismes privés et les banques internationales prélèvent encore des commissions sur chaque envoi d'argent et les règlementations sont protectionnistes dans ce sens. Dans un communiqué de presse du 13 juin 2023 intitulé « Les envois de fonds des migrants résistent mais marquent le pas »37 sur le site de la Banque Mondiale, Rebecca Ong écrit « Le coût d'un transfert de 200 dollars vers la région était de 4,9 %, en moyenne, au quatrième trimestre de 2022, contre 4,3 % un an auparavant. Les envois des migrant-es à destination de l'Afrique subsaharienne ont augmenté de 6,1 % en 2022 pour atteindre 53 milliards de dollars ».

À l'échelle globale, « les banques sont les intermédiaires les plus coûteux (11,8 % en moyenne), suivis par les bureaux de poste (6,3 %), les opérateurs de transfert de fonds (5,4 %) et les opérateurs de services mobiles (4,5 %). Bien que ces derniers offrent les services les moins onéreux, ils ne traitent que moins de 1 % du volume total des transactions. »

Le rapport de la BAD ne remet pas en cause la politique néolibérale qu'il soutient. Il ne fait que citer des causes superficielles et des solutions qui arrangent leurs auteurs pour finalement constater que seulement une partie totalement insuffisante des budgets africains sont consacrés à la protection de la biodiversité et de l'environnement en Afrique ce qui est dérisoire par rapport aux enjeux environnementaux. Tout le monde s'accorde au moins là-dessus.

Notes

1- Groupe de la Banque Africaine de Développement, Échanges dette-nature : Faisabilité et pertinence stratégique pour le secteur des ressources naturelles en Afrique, Octobre 2022 https://www.afdb.org/sites/default/files/documents/publicaTons/echanges_deNe-nature_rapport.pdf

2- CADTM, Afrique : le piège de la dette et comment s'en sortir, publié le 9 décembre 2022,
https://www.cadtm.org/Afrique-le-piege-de-la-dette-et-comment-en-sortir

3- Attac France, La « finance verte » est-elle vraiment verte ?, publié le 7 décembre 2017,
https://france.attac.org/nos-publications/notes-et-rapports/article/nouveau-rapport-d-attac-la-finance-verte-est-elle-vraiment-verte

4- Ecofin Hebdo, Adama Coulibaly d'Oxfam : « Les choses ne peuvent plus être comme avant », publié le 25 mai
2020, https://www.agenceecofin.com/gestion-publique/2505-76887-adama-coulibaly-d-oxfam-les-choses-ne-peuvent-plus-etre-comme-avant

5- Le Monde avec AFP, DeNe : la Zambie techniquement en défaut de paiement, publié le 19 novembre 2020,
https://www.lemonde.fr/afrique/arTcle/2020/11/19/deNe-la-zambie-techniquement-en-defaut-de-paiement_6060327_3212.html

6- The Africa Report, Pourquoi l'accord sur la restructuration de la dette zambienne est un demi-succès, publié le 26 juin 2023, https://www.jeuneafrique.com/1457362/economie-entreprises/pourquoi-laccord-sur-la-restructuration-de-la-deNe-zambienne-est-un-demi-succes/

7- Agence Ecofin, Le WWF propose à la Zambie d'intégrer un échange dette-nature dans les négociations avec ses créanciers, publié le 19 janvier 2023, https://www.agenceecofin.com/actualites/1901-104629-le-wwf-propose-a-la-zambie-d-integrer-un-echange-dette-nature-dans-les-negociations-avec-ses-creanciers

8- Groupe de la Banque Africaine de Développement, Perspectives économiques en Zambie,
https://www.afdb.org/fr/pays-afrique-australe-zambie/perspectives-economiques-en-
zambie# : :text=Les%20cr%C3%A9dits%20au%20secteur%20priv%C3%A9,les%20zones%20urbaines%20(23%20
%25)

9- Pierre-François Grenson, La Chine en Afrique : histoire d'amour ou péril mortel ? Et si c'était plus compliqué que ça ?, publié le 14 juin 2023, https://www.cadtm.org/La-Chine-en-Afrique-histoire-d-amour-ou-peril-mortel-Et-si-c-etait-plus

10- Pierre-François Grenson, RDC, Burundi, Angola, Sri Lanka : quatre exemples pour comprendre la présence chinoise en Afrique et en Asie, publié le 21 juin 2023, https://www.cadtm.org/RDC-Burundi-Angola-Sri-Lanka-quatre-exemples-pour-comprendre-la-presence

11- WWF, Rapport Planète Vivante 2020 : infléchir la courbe de la perte de biodiversité,
https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-11/20200910_Rapport_Planete_Vivante_WWF.pdf

12- Arnaud Zacharie, Convertir les dettes insoutenables en investissements verts, publié le 10 janvier 2023, https://www.cncd.be/Convertir-les-dettes-insoutenables

13- James Dyke, Robert Watson, Wolfgang Knorr, Le concept de neutralité carbone est un piège, publié le 13 septembre 2022, https://www.terrestres.org/2022/09/13/le-concept-de-neutralite-carbone-est-un-piege/

14- Daniel Tanuro, COP26 : désastre pour les peuples, bénédiction pour le capital, publié le 22 novembre 2021,
https://www.contretemps.eu/cop26-tanuro-climat-capital-energie-fossile/

15- AR6 Synthesis Report, Climate Change 2023, https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-cycle/

16- Parlement européen, Proposition de résolution commune sur les violations des droits de l'homme en Ouganda et en Tanzanie en lien avec les investissements réalisés dans des projets fondés sur les énergies fossiles, publié le 14 septembre 2022, https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/RC-9-2022-0409_FR.html

17- La Tribune, Jamais le monde n'a autant investi dans la transition énergétique qu'en 2022, publié le 31 janvier 2023, https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/energie-environnement/jamais-le-monde-n-a-autant-investi-dans-la-transition-energe\que-qu-en-2022-949958.html

18- Alan Loquet, Corruption, pollution, consommation : les ravages du lithium en Argentine, publié le 22 juillet 2014, https://reporterre.net/Corruption-pollution-consommation-les-ravages-du-lithium-en-Argentine

19- Renaud Vivien, Sophie Wintgens, Traité sur la charte de l'énergie : la sortie est inévitable, publié le 14 février 2023, https://www.cncd.be/traite-sur-la-charte-de-l-energie-la-sortie-est-inevitable

20- Pour en savoir plus sur le concept juridique de « devoir de vigilance », découvrez la proposition d'une directive européenne sur ce sujet : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_22_1145

21- GRAIN, La stratégie de la BAD pour agro-industrialiser l'Afrique, publié le 31 juillet 2023,
https://www.cadtm.org/La-strategie-de-la-BAD-pour-agro-industrialiser-l-Afrique

22- GRAIN, l'Agro-impérialisme au temps du Covid 19, publié le 24 juillet 2020, https://www.cadtm.org/L-agro-imperialisme-au-temps-du-Covid-19

23- Mohamed Coulibaly, L'avenir des semences sous la Zone de Libre-Échange Africaine, publié le 23 juillet 2023,
https://www.cadtm.org/L-avenir-des-semences-sous-la-Zone-de-libre-echange-africaine

24- GRAIN, Les barbares à la porte de la ferme : le capital-investissement à l'assaut de l'agriculture, publié le 17 décembre 2020,

Afrique : Hausse des températures… et des conflits

12 novembre 2024, par Paul Martial — ,
Parmi les nombreuses conséquences du changement climatique, figurent l'aggravation des hostilités actuelles et de nouvelles dégradations environnementales liées à « l'industrie (…)

Parmi les nombreuses conséquences du changement climatique, figurent l'aggravation des hostilités actuelles et de nouvelles dégradations environnementales liées à « l'industrie verte » des pays industrialisés.

Tiré d'Afrique en lutte.

D'un côté des pluies torrentielles provoquant des inondations au Mali, Burkina Faso, Tchad ou Nigeria, de l'autre la sécheresse frappant les pays d'Afrique de l'Est et australe. Les conséquences du réchauffement climatique, si elles sont diverses, occasionnent de nombreuses victimes et contribuent à détériorer une situation sécuritaire déjà instable. C'est ce que souligne notamment le rapport « Évaluation des risques liés à la sécurité climatique en Afrique » ­commandé par l'Union Africaine.

Rivalités entre communautés

Il confirme ce que l'on savait intuitivement. Les changements climatiques exacerbent les dissensions existantes, notamment pour l'accès aux ressources qui se font de plus en plus rares — c'est le cas pour l'eau — ou dégradés par la désertification ou l'acidité des sols. Ainsi les affrontements entre agriculteurEs et pasteurEs autour des terres et des points d'eau augmentent en violence. Mais de nouveaux antagonismes apparaissent aussi avec les pêcheurs.

L'utilisation à outrance du potentiel hydrique pour les activités industrielles au détriment des populations prend une plus grande ampleur. Comme par exemple avec le pompage des nappes phréatiques par les mines d'uranium exploitées par la société française Orano (ex-Areva) au Niger. Les antagonismes apparaissent à l'intérieur même des communautés. Le vol de bétail traditionnel avait des conséquences économiques très marginales. Il s'agissait de quelques têtes de bétail. Aujourd'hui, les vols sont à grande échelle, pouvant entraîner une profonde modification de la façon de vivre dans les campagnes, comme à Madagascar.

Opportunité pour les groupes armés

Autre conséquence de la raréfaction des ressources, le déplacement des populations vers les villes. Ainsi l'Afrique connaît un mouvement d'urbanisation des plus importants. Les municipalités n'y sont pas préparées et n'ont pas les moyens d'accueillir ces nouveaux et nouvelles arrivantEs. Ils et elles se retrouvent dans des conditions d'habitat indignes et de grande pauvreté. Une situation qui engendre la formation de gangs souvent formés par des très jeunes qui n'ont pas d'autres perspectives que la violence.

Si ces catastrophes climatiques mettent en relief les incuries de l'État, elles sont exploitées par les politiciens locaux qui accentuent les divisions entre communautés. Un terrain propice pour les groupes armés qui dans certains cas pallient les carences des États. Ainsi en Somalie le groupe djihadiste Al-Shabaab a apporté une aide financière et humanitaire aux populations victimes de la sécheresse, renforçant ainsi leur base sociale. Dans le centre du Mali, la Katiba Macina, affiliée à Al-Qaïda, s'est substituée à l'État en instaurant une justice efficace permettant de régler notamment les conflits entre agriculteurEs et éleveurEs.

Compétition entre États

Le changement climatique a des répercussions négatives sur les relations entre les communautés et également entre les États. Ainsi, la gestion des réserves en eau est source de conflictualité. Le Grand Barrage de la Renaissance, construit en amont du Nil par l'Éthiopie pour la production hydroélectrique et l'irrigation des cultures, impacte négativement l'Égypte et le Soudan. Pour le bassin du fleuve Zambèze, des tensions existent entre les huit pays riverains d'Afrique australe.

Le dérèglement du climat pousse les principaux pays industriels du Nord global à favoriser des marchandises à émission de gaz à effet de serre faible ou nul comme les voitures électriques. Les conséquences sont importantes et néfastes pour les pays africains dont les sous-sols regorgent de minerais nécessaires à ces productions. Des effets indirects de la crise climatique mais bien concrets pour les populations expulsées de leur terre ou victimes d'une dégradation environnementale préjudiciable à leurs sources de revenus ou leur santé. Une problématique qui est malheureusement relativisée dans les mobilisations écologiques des pays occidentaux.

Paul Martial

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La crise de la mondialisation néolibérale, la place du Brésil et les défis pour la gauche

12 novembre 2024, par Insurgência, Organisation brésilienne, section de la Quatrième Internationale — , ,
J'ai traduit ce document à partir de sa version espagnole1 mais aussi, parfois, sa version originale portugaise. Il fut rédigé il y a un an, plus précisément quelques semaines (…)

J'ai traduit ce document à partir de sa version espagnole1 mais aussi, parfois, sa version originale portugaise. Il fut rédigé il y a un an, plus précisément quelques semaines après l'attaque d'Israël par le Hamas le 7 octobre 2023. Cependant, il demeure fort pertinent pour les forces progressistes à travers le monde. La guerre génocidaire qu'Israël mène à Gaza et en Cisjordanie depuis l'attaque du Hamas, et ce avec le plein appui de grandes puissances occidentales, principalement les États-Unis ; et, aussi et surtout, la récente victoire électorale écrasante de Donald Trump à la présidence le 5 novembre dernier, ne font qu'accentuer de façon substantielle cette pertinence.
Ovide Bastien

13/08/2024
Insurgência, Organisation brésilienne, section de la Quatrième Internationale
Traduction Ovide Bastien

Nous avons rédigé ce document en octobre 2023, dans le cadre du processus de préparation de la IVe Conférence nationale de notre organisation Insurgência. Plusieurs ont collaboré à sa rédaction. Il est le fruit de discussions que nous avons eues au cours des dernières années et cherche à systématiser les principaux vecteurs et tendances en cours dans la conjoncture mondiale actuelle. Son but : situer historiquement et politiquement les défis auxquels nous sommes confrontés.

Ce texte a été approuvée par la IVe Conférence nationale d'Insurgência en tant que document de travail, destiné à être développé et discuté par notre mouvement, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'organisation. C'est dans ce but que nous publions aujourd'hui ce document. Nous savons qu'il y a et qu'il y aura toujours des mises à jour à faire, mais nous espérons qu'il pourra contribuer au débat entre les organisations et militants avec lesquels nous interagissons.

Depuis un certain temps à Insurgência, nous partons du principe que le scénario national et international est grave et qu'il est traversé par une combinaison de crises. La crise climatique, toile de fond de plus en plus importante dans la vie quotidienne et qui traverse et conditionne objectivement toutes les autres crises ; la crise économique qui, depuis 2008, n'a toujours pas été résolue ; les crises énergétiques, géopolitiques et militaires, et la dispute pour l'hégémonie entre les impérialismes historiques et les impérialismes ascendants. Il y a également une crise et une lutte ouverte au sein des bourgeoisies centrales et de leurs associés, qui sont divisés sur la direction à prendre face à l'épuisement du modèle consolidé dans les années 1990 ; et une crise au sein de la gauche, marquée par sa fragmentation, son implantation sociale fragile et l'absence d'une orientation politique plus générale qui tienne compte des défis imposés par les transformations profondes que nous traversons dans le moment historique actuel.
Toutes ces crises sont interdépendantes, c'est-à-dire qu'elles interagissent et se conditionnent mutuellement, s'influençant les unes les autres au fur et à mesure qu'elles se développent. Ainsi, le défi que se fixe ce document est de systématiser les principaux vecteurs de cet ensemble de crises et la dynamique qui les sous-tend au cours des dernières années, toujours à la lumière du développement des luttes de classe au cours de la période. Enfin, nous cherchons également à soulever des hypothèses politico-programmatiques pour l'intervention de la gauche dans la situation historique que nous vivons.

1. La crise de 2008 et ses conséquences immédiates

C'est dans la crise de 2008 que nous pouvons identifier un premier jalon dans le développement de la situation mondiale que nous connaissons actuellement. Bien que le capitalisme, dans les années qui ont suivi, ait généralement retrouvé des taux de croissance acceptables, la profondeur et l'ampleur de la crise ont fait ressortir l'épuisement du pacte social et économique de la mondialisation néolibérale établi avec la chute du bloc soviétique au début des années 1990. C'est de cette crise que sont issus les événements politiques qui ont marqué la dernière décennie.

La réponse de la bourgeoisie centrale à la crise a été double et immédiate : d'une part, une injection record de fonds publics pour protéger le marché financier et ses institutions, dont certaines ont même été renationalisées ; d'autre part, des programmes d'austérité rigides, c'est-à-dire le retrait des droits sociaux à la classe ouvrière et aux secteurs populaires, ce qui permettait aux entreprises, grâce à l'intensification de l'exploitation, de retrouver leurs profit. Ainsi, l'impact de la crise sur les conditions de vie matérielles de la classe ouvrière dans plusieurs pays a été renforcé par les politiques menées par les États-Unis et l'Union européenne.

Après deux années d'aggravation des difficultés sociales et économiques pour les secteurs populaires, un cycle croissant de mobilisations a commencé à se développer au niveau international. Dès 2010, la lutte contre les plans d'austérité en Irlande et en Grèce a bénéficié d'un soutien massif. En janvier 2011, une vague de manifestations contre le chômage, la faim et le régime a renversé le gouvernement de Ben Ali en Tunisie. À partir de là, le mouvement s'est rapidement étendu à toute la région et, la même année, les gouvernements égyptien et libyen ont également été renversés. En Syrie, la mobilisation contre le gouvernement de Bachar Al Assad a eu recours aux armes. Des mobilisations ont également débuté en 2011 au Portugal, en Espagne, aux États-Unis et au Royaume-Uni, des processus qui ont eu des impacts différents mais progressifs sur la réorganisation de la gauche dans ces pays, avec la fondation de Podemos en Espagne, le nouvel élan du Bloco de Esquerda au Portugal ou de DSA (The Democratic Socialists of America) aux États-Unis, et le renforcement de l'aile gauche du Parti travailliste au Royaume-Uni. Le cycle des mobilisations se poursuit et atteint en 2013 la Turquie et le Brésil.

Enfin, en 2014, Syriza, à l'époque l'outil de parti le plus prometteur à émerger du cycle politique ouvert en 2008, a remporté les élections grecques et a formé un gouvernement en janvier 2015. Le pays représentait l'expérience de résistance la plus avancée dans ce cycle, avec des mobilisations de masse fréquentes, une participation significative de la gauche, des syndicats et des mouvements sociaux, et l'un des plus durement touchés par la crise en Europe. Il semblait y avoir un espoir de rupture avec l'Union européenne et son austérité économique. En juin, le nouveau gouvernement a organisé un référendum pour permettre à la population d'accepter ou non la proposition économique de l'UE et a fait campagne pour le « non ». Le « NON » (OXI en grec) l'a emporté avec 61 % des voix. Cependant, lors des négociations avec l'UE, le gouvernement Tsipras a capitulé et a décidé d'accepter un paquet encore plus mauvais que celui qui avait été rejeté lors du référendum.

Si la chute de Ben Ali en Tunisie peut être considérée comme le début d'un cycle de mobilisations progressistes, la capitulation de Syriza a mis fin à la possibilité - encore ouverte à l'époque - qu'une force à gauche du réformisme historique puisse se consolider comme une alternative viable et cohérente à la crise qui a débuté en 2008. Le rapport de forces au niveau international et l'insuffisante préparation préalable de la gauche à sa postulation en tant qu'alternative se sont exprimés dans cet épisode de manière tragique.
En fait, d'une manière générale, le cycle de mobilisations qui a suivi 2008 n'a pas eu un dénouement progressiste, bien au contraire. En Libye, où l'intervention militaire de l'OTAN a été décisive dans la capture de Kadhafi, le résultat a été un retour de bâton si profond que, dans les années qui ont suivi, il y a eu des marchés de travailleurs en situation de quasi esclavage dans le pays. En Égypte, après la chute de Moubarak, il y a eu une junte de transition, un bref gouvernement civil dirigé par les Frères musulmans et, à la suite d'un coup d'État militaire, le pays est dirigé depuis 2014 par le général El-Sisi. En Syrie, la montée en puissance de l'État islamique et d'autres groupes religieux armés a transformé la révolte en une longue guerre civile qui se poursuit encore aujourd'hui, bien qu'avec moins d'intensité. En Turquie, Erdogan est sorti victorieux et a consolidé son emprise sur le pouvoir. Tout compte fait, le printemps arabe a donc été remporté par la contre-révolution. En Europe, c'est l'austérité qui l'a emporté.

En ce sens, il est important de noter que s'il est vrai que la crise de 2008 a ouvert un cycle de mobilisations généralement progressif, la vérité est que ce cycle, en l'absence de victoires décisives de la gauche, a été épuisé et historiquement vaincu : la dynamique s'est inversée. Toute analyse de la situation mondiale qui prétendrait que la dynamique progressiste de ce cycle s'est poursuivie jusqu'à aujourd'hui appellerait la gauche à répéter de graves erreurs politiques commises dans le passé. La situation mondiale actuelle ne peut être définie comme une « polarisation » : ce qui prédomine, c'est carrément un déséquilibre des forces. Depuis au moins 2015, le constat général de la situation politique mondiale est celui d'une défaite de la gauche et de la classe ouvrière. Depuis lors, c'est la bourgeoisie dans son ensemble, et en particulier son secteur le plus réactionnaire, qui a pris l'initiative politique.

2. La division de la bourgeoisie et l'offensive de l'extrême droite

Face à une crise économique qui n'a pas été entièrement surmontée et malgré l'épuisement d'une importante résistance populaire aux mesures mises en œuvre pour préserver le modèle en vigueur jusqu'alors, une division se développe au sein des bourgeoisies des pays centraux. Par conséquent, les bourgeoisies qui leur sont associées dans les pays périphériques et semi-périphériques se disputent également sur la question de savoir ce qu'il convient de faire face à la situation. Cette division est basée sur le glissement d'une fraction de la bourgeoisie mondiale vers l'extrême droite - un concept parapluie que nous utilisons pour englober ses expressions néo-fascistes, bonapartistes, etc. Si la défaite du cycle des mobilisations populaires entre 2010 et 2015 a ouvert la voie, 2016 est un tournant important car elle consolide cette division avec deux victoires importantes de l'extrême droite : lors du référendum sur la rupture du Royaume-Uni avec l'Union européenne, brisant le bloc que le pays formait avec l'Allemagne et la France, et lors de l'élection de Trump et de son « America First » aux États-Unis.

2.1 L'extrême droite, son programme et son évolution

Les deux processus expriment le même mouvement et le même contenu : ils remettent en question les arrangements établis de la mondialisation néolibérale, ils cherchent à repositionner leurs États nationaux dans la division géopolitique et économique du monde, en négociant ou en imposant des positions basées sur leur propre poids individuel dans la lutte pour les chaînes de valeur du capital. À cette fin, ils promeuvent en interne une radicalisation du néolibéralisme en termes de lutte des classes : ils mobilisent les forces réactionnaires pour approfondir l'exploitation, en particulier des secteurs les plus opprimés de la classe ouvrière dans leurs territoires, ce qui donne à leur programme un saut qualitatif dans l'affirmation du racisme, du sexisme, de la haine des personnes LGBT et des peuples migrants. Dans les années qui ont suivi, nous avons assisté à la croissance accélérée et à la massification des courants d'extrême droite dans plusieurs pays : outre les États-Unis et le Royaume-Uni, la France, l'Espagne, l'Allemagne, l'Italie, la Hongrie, la Pologne, le Salvador, l'Inde, les Philippines et le Brésil. Ces dernières années, l'alternative d'extrême droite s'est montrée capable de définir l'agenda politique au niveau mondial, de remporter des gouvernements importants ou de devenir une force politique incontournable dans toutes les parties du monde, avec un niveau intense d'articulation internationale entre ses partis.

En ce qui concerne la politique étrangère de cette faction d'extrême droite, la mise en place d'une offensive impérialiste était également évidente, en particulier en Amérique latine. Il est vrai qu'il s'agissait d'un processus qui bénéficiait du soutien de secteurs ou de la majorité des classes dirigeantes au niveau local, mais le « Lava-Jato », préparé en collaboration avec le département d'État américain, le coup d'État au Brésil en 2016, ainsi que l'élection ultérieure de Bolsonaro en 2018, le coup d'État en Bolivie en 2019 et la tentative de coup d'État au Venezuela, y compris avec des opérations militaires américaines, sont les expressions les plus évidentes de cette offensive impérialiste dans notre région.

En effet, la fraction de la bourgeoisie qui évolue vers l'extrême droite est le facteur le plus décisif du point de vue du rapport de forces entre classes à travers le monde. Cette fraction n'a pas seulement réussi à changer la situation politique à son avantage : ses victoires ont mis la bourgeoisie dans son ensemble à l'offensive contre la classe ouvrière. Alors que la bourgeoisie était déjà renforcée dans la période post-2008 par les défaites imposées à la gauche, ce processus n'a fait que s'intensifier avec la consolidation de l'extrême droite sur la scène mondiale. Depuis lors, deux contre-réformes stratégiques pour la bourgeoisie dans son ensemble ont été adoptées dans plusieurs pays : la réforme de la sécurité sociale et la réforme du travail. Bien entendu, ces défaites accumulées ont eu des répercussions sur la conscience de la classe ouvrière et des secteurs populaires, qui ont été contraints de se tourner vers la lutte pour leur propre survie matérielle et politique, avec une perte de confiance significative dans leurs propres forces.

En ce sens, il est important d'affirmer notre rejet des idées liées à ce qui a été historiquement appelé la « théorie de l'offensive », une politique qui trouve son origine dans le stalinisme mais qui est très présente dans les organisations trotskistes. Selon cette ligne, l'extrême droite est renforcée par son « radicalisme » ou son « programme antisystème », et donc la tâche de la gauche serait de faire face à cette confrontation en radicalisant également son programme. Cette théorie est également associée, de manière moins explicite, à l'idée de « fascisme social » élaborée par le stalinisme, une ligne qui prétend que, puisque les limites stratégiques du réformisme sont le principal facteur de la crise politique, il doit être confronté de la même manière que le fascisme. Il existe de nombreux exemples historiques de l'échec de cette politique, à commencer par le fait qu'elle n'a pas empêché la montée du nazisme en Allemagne, au contraire, elle y a contribué. Plus récemment, FIT (El Frente de Izquierda y de Trabajadores-Unidad) en Argentine a suivi la même voie lors du second tour entre Milei et Massa, néofascisme contre péronisme.

En effet, tout programme doit toujours répondre à une situation politique concrète, il n'existe pas dans l'abstrait. En ce sens, l'extrême droite ou le néofascisme ne trouvent un écho dans le radicalisme de leur programme que parce que c'est la bourgeoisie dans son ensemble qui est à l'offensive, pas la classe ouvrière. Si la classe ouvrière était à l'offensive, c'est-à-dire organisée, remportant des victoires et progressant dans la lutte de classe contre la bourgeoisie, alors il serait logique que la gauche s'oriente vers un programme qui remette en cause le système.

En revanche, dans une situation défensive, notre tâche doit être de lutter pour la concentration des forces de la classe ouvrière dans des fronts communs entre la gauche révolutionnaire et la gauche réformiste ; dans ce processus, de lutter pour la conquête de l'hégémonie sur la classe ouvrière, dont la croyance dans le réformisme est amplifiée dans les situations défensives ; pour des conquêtes immédiates, même partielles, de la classe ouvrière, en cherchant à accroître sa conscience et sa confiance dans ses propres forces en la mobilisant le plus largement possible. C'est du moins l'accumulation historique faite par la Troisième Internationale avant sa stalinisation et dans l'importante élaboration faite par Trotsky dans la lutte contre le fascisme. Et s'il est vrai que cette élaboration doit être mise à jour à la lumière des expériences ultérieures de la gauche, nous ne devons pas oublier que nous avons en elle un point de départ.

2.2 La bourgeoisie libérale-démocrate : de la paralysie à la « transition verte »

Ensuite, il y a l'autre partie de la bourgeoisie dans cette scission, qui n'a pas évolué vers l'extrême droite. Cette partie de la bourgeoisie a passé des années à être paralysée face aux victoires en série de sa faction opposée : dans un premier temps, elle s'est limitée à défendre le fameux ‘Washington Consensus' et les institutions du régime libéral-démocratique. Son incapacité à répondre à la crise de son propre modèle a bien sûr été largement exploitée par l'extrême droite.

Plus récemment, cependant, sous la pression particulière d'un mouvement écologiste qui, en 2019, a pu mettre en branle, dans les pays capitalistes les plus puissants, d'immenses mobilisations populaires, la faction libérale-démocrate a gagné du terrain en mettant de l'avant une transition énergétique « verte », et en promettant des paquets d'investissements publics capables de réorganiser et d'adapter le capitalisme à de nouvelles matrices énergétiques ou à des matrices moins polluantes. Si ce projet se réalise, il aura un impact sur l'ensemble de la chaîne de production et de reproduction du capital au niveau mondial, bien qu'il n'y ait aucune raison de croire qu'il puisse surmonter structurellement la crise environnementale. En même temps, avec une certaine inspiration rooseveltienne, ce secteur promet encore de faire progresser la récupération de certains des droits perdus par la classe ouvrière au cours des dernières décennies au niveau national dans les pays capitalistes les plus puissants.

Avec ce programme, la faction libérale-démocrate a regagné du terrain dans des pays importants : elle a pu reprendre le contrôle du gouvernement américain et a gagné en Allemagne, ainsi qu'en Espagne et dans d'autres pays. Toutefois, cela ne signifie pas que la lutte inter-bourgeoise est terminée. Ces promesses sont encore loin de constituer des avancées significatives. Cela est dû à la fois au poids de l'extrême droite dans ces pays et à l'intense conflit géopolitique de ces dernières années, qui a imposé des obstacles à la réorganisation des chaînes de valeur dans le monde. Il reste donc à voir quel projet bourgeois s'imposera pour sortir de la crise de la mondialisation, l'extrême droite en tête.
En effet, les élections en Argentine en 2023 démontrent le caractère ouvert de ce conflit intra-bourgeois : si Milei gagne, il est clair que son impact sur l'équilibre des forces en Amérique latine sera significatif, renforçant l'extrême droite au Brésil, au Chili, en Bolivie, au Pérou et en Colombie. De même, nous devrions nous tourner vers les élections présidentielles américaines de 2024 - une victoire de Trump ou des Républicains placerait sans aucun doute l'extrême droite dans une position plus offensive dans le monde entier. En d'autres termes, tant au Brésil qu'à l'échelle internationale, l'extrême droite est toujours vivante, organisée, combattante et active dans la lutte de classes pour façonner le monde à son image. La situation politique reste donc instable, un facteur qui doit être pris en compte pour caractériser le gouvernement brésilien actuel et les risques auxquels il est confronté. La priorité politique de la gauche reste la lutte contre l'extrême droite.

3. La Chine et le conflit inter-impérialiste

Ce scénario est également lié à un autre facteur important de la situation mondiale : la montée en puissance de la Chine et le défi qu'elle lance à l'hégémonie américaine, consolidée après la fin du bloc soviétique. Devenue la deuxième économie mondiale, avec des exportations de capitaux croissantes et une présence militaire dans plusieurs pays, la Chine ne joue pas encore le rôle des États-Unis à l'échelle mondiale. Cette bataille unifie donc les factions bourgeoises des États-Unis et leurs subordonnés européens autour de l'objectif stratégique de préserver leurs positions des trente dernières années. L'ensemble de la politique internationale de la période à venir sera guidée par ce conflit.
La caractérisation de ce qu'est la Chine et de son projet politique exige que la gauche dans son ensemble approfondisse la question. S'il nous semble évident qu'il ne s'agit pas d'un modèle de socialisme à suivre, d'un autre côté, il ne semble pas suffisant de traiter la Chine comme une simple expression du capitalisme mondial. Nous parlons de l'État-nation le plus ancien de l'histoire, avec un niveau élevé de centralisation et de planification économique. Son projet économique, largement contrôlé par l'État, fait pression même sur des secteurs de la bourgeoisie centrale pour qu'elle révise le rôle assigné à la présence de l'État par le néolibéralisme - comme l'affirment expressément même des idéologues bourgeois. À titre d'hypothèse, nous considérons la Chine comme un impérialisme en pleine ascension, orienté au niveau central par un projet nationaliste et non socialiste, mais également marqué par la révolution qui a élevé le parti communiste à la tête de l'État. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un sujet qui mérite d'être approfondi.

La montée en puissance de la Chine et le défi qu'elle pose à l'hégémonie des États-Unis et de l'Union européenne sont déjà à l'origine de conflits géopolitiques et économiques de plus en plus intenses. Ces conflits sont centrés sur la lutte pour les chaînes de valeur, qu'il s'agisse de l'énergie, de la technologie - dans le cas des semi-conducteurs - ou des ressources naturelles et matières premières, toutes deux de plus en plus précieuses face à l'intensification de la crise environnementale. Leur développement se traduit par des conflits géopolitiques et militaires de plus en plus fréquents, et un potentiel accru de bouleversements sociaux, comme on peut le voir aujourd'hui dans la région du Sahel, en Afrique, où la lutte pour les matières premières technologiques et énergétiques est au cœur de l'impérialisme français et de la présence russe et chinoise dans la région.
C'est sur ce terrain que nous devons caractériser la guerre en Ukraine, qui représente un bond en avant dans ce conflit inter-impérialiste. Nous condamnons l'agression russe contre la souveraineté ukrainienne. Mais il est désormais très difficile de soutenir une quelconque caractérisation de cette guerre comme une simple lutte nationale entre les pays impliqués. Au contraire, les États-Unis ont réussi à ramener l'OTAN - qui souffrait de « mort cérébrale », selon les termes du président français Emmanuel Macron - dans ce conflit, le transformant en une étape préparatoire dans la lutte stratégique contre la montée en puissance de la Chine. Les livraisons d'armes quasi illimitées au gouvernement Zelensky, les sanctions unilatérales contre la Russie, l'insistance des puissances impérialistes de l'OTAN à faire de la Chine une partie prenante de la guerre, ainsi que la course aux armements qui s'en est suivie, témoignent du caractère inter-impérialiste du conflit. De ce point de vue, tout alignement de la gauche sur l'un ou l'autre des blocs impérialistes en conflit - qu'il s'agisse du bloc hégémonique ou du bloc concurrent - serait une grave erreur politique. Les forces populaires n'ont rien à gagner de l'escalade des guerres qui a déjà lieu et qui risque de se poursuivre dans la période à venir : notre position doit être de mettre fin à la guerre impérialiste et à l'armement impérialiste.

4. Impacts de la pandémie et de la crise écologique

Enfin, nous devons caractériser les impacts de l'expérience de la pandémie de COVID entre 2020-2022 et la façon dont elle influence également les transformations croissantes au niveau mondial. En raison de l'action destructrice du capital sur la nature, la pandémie a amplifié la remise en question de la mondialisation néolibérale et même du néolibéralisme lui-même : depuis lors, même certains économistes bourgeois des pays du centre en sont venus à préconiser la nécessité d'investir davantage dans le secteur public pour faire face à la crise. La pandémie a également mis en lumière l'impact de la privatisation des services de santé dans diverses parties du monde.

Produit de la crise environnementale, la pandémie a également accéléré la course mondiale aux chaînes de valeur énergétiques et aux matières premières stratégiques pour la course technologique. Les catastrophes climatiques de plus en plus fréquentes - inondations, sécheresses, conditions météorologiques extrêmes - ont un impact sur les conditions matérielles de production et de reproduction du capital. Ensemble, ces deux facteurs font pression sur les bourgeoisies libérales-démocrates pour qu'elles avancent avec un projet capitaliste vert, même si c'est difficile pour elles. Par conséquent, nous assistons aujourd'hui aux prémices d'une lutte à long terme pour les ressources naturelles, avec des tentatives croissantes d'impérialisme vert de la part des bourgeoisies centrales. La pression pour un plus grand contrôle des centres impérialistes sur les biomes ou les matières premières, comme l'Amazonie ou le Triangle du Lithium en Argentine, au Chili et en Bolivie, est susceptible de s'intensifier dans la période à venir. En ce sens, la lutte contre la crise climatique devra également acquérir une dimension anti-impérialiste dans un avenir proche.

5. Quelques conclusions sur la situation mondiale

Cet ensemble de crises indique que nous sommes confrontés à une période de transition dans l'histoire mondiale : un épuisement résultant de la mondialisation néolibérale ; une division parmi les bourgeoisies centrales quant à la voie à prendre pour sortir de cette crise ; une crise climatique qui exerce une pression matérielle et objective sur les accords économiques, sociaux et politiques conclus au cours des dernières décennies ; un impérialisme en formation et qui remet déjà en cause l'hégémonie des États-Unis ; une course aux armements et à la technologie motivée par la lutte pour les marchés mondiaux, qui est déjà en train de changer par rapport à la période précédente. Bref, le monde dans lequel nous vivons n'est plus celui de la mondialisation néolibérale et une vaste réorganisation mondiale du capitalisme est en cours.

Cependant, la question de savoir ce qui remplacera la mondialisation néolibérale est un débat ouvert. Elle sera le résultat du rapport de forces qui se cristallisera entre classes sociales à l'issue de cette transition. La capacité de l'extrême droite à se consolider en tant que secteur ayant un poids durable et la pression suffisante des mouvements sociaux pour surmonter la crise climatique dépendront fondamentalement de la capacité de la gauche et de la classe ouvrière à intervenir dans les conflits en cours. Comme nous l'avons vu, cette capacité a été jusqu'à présent limitée : c'est l'extrême droite qui a imposé son agenda. La deuxième partie de ce document se concentrera donc sur la caractérisation des forces de gauche et de la classe ouvrière.

6. Le Brésil dans ce scénario

Avant d'aborder la situation et les défis auxquels est confrontée la gauche, nous avons la tâche de systématiser la manière dont ces conflits en cours s'expriment dans la lutte de classes au Brésil, ainsi que la manière dont nos luttes influencent ou impactent ces conflits au niveau mondial. Tous les processus dont nous avons parlé jusqu'à présent ont trouvé leur expression dans notre pays, marquant une intégration importante du Brésil dans la dynamique mondiale de la lutte de classes.

Le cycle de mobilisations post-2008 est arrivé au Brésil en 2013 avec des caractéristiques similaires à celles qu'on trouve dans divers pays : absence de leadership politique consolidé ; une nouvelle génération sans expérience émergeant en politique ; un certain degré de dispersion programmatique dans les mobilisations, qui ont eu une portée massive.
Ici aussi, s'est manifestée la même dynamique d'épuisement qu'on retrouve sur le plan international. Une fois la question des tarifs de transport surmontée, la mobilisation de rue s'est consolidée comme un outil important dans la lutte politique, tant à gauche qu'à droite, un phénomène qui a également été observé lors du Printemps arabe. Sans orientation programmatique bien établie ni clarté dans les manifestations, la droite a commencé à contester très explicitement les mobilisations de juin, avant même que les augmentations tarifaires ne soient révoquées. À São Paulo, qui avait été l'épicentre des mobilisations, des gangs néofascistes sont descendus dans la rue pour intimider la gauche dès que la lutte contre la hausse a été gagnée.

Depuis, la droite se bat et occupe de plus en plus de place dans la rue et dans la société brésilienne. Ici aussi, la droite a lancé une offensive en renforçant son aile la plus réactionnaire. Lava Jato unit la bourgeoisie locale contre le gouvernement de collaboration de classe. Les conséquences sont très dures pour la gauche et les forces populaires : le coup d'État de 2016 ; le meurtre de Marielle Franco et l'arrestation de Lula en 2018 ; la grève des camionneurs et l'élection de Bolsonaro la même année ; le tout en articulation claire avec l'extrême droite au niveau international. Ils ont également réussi à approuver les deux contre-réformes stratégiques (travail et retraite) au cours de cette période. Ici comme au niveau international, le cycle de juin est terminé au moins depuis 2015, lorsque la droite a remporté la majorité dans la rue. Et toute analyse qui établit la continuité du caractère progressiste de juin jusqu'à aujourd'hui conduira également à de graves erreurs de lecture et d'intervention politique dans la réalité.

Au cours de cette période, la majeure partie de la gauche brésilienne a fourni d'importants et corrects efforts pour maintenir l'unité. Si ceux-ci ne se sont pas avérés suffisants pour empêcher le coup d'État, renverser Temer, empêcher l'élection de Bolsonaro ou faire tomber son gouvernement, on ne devrait pas les passer sous silence lorsqu'on fait le bilan de ces dernières années. Sans les luttes unitaires de la gauche, dans lesquelles le PSOL et le Frente Povo Sem Medo (Peuple sans peur) - ainsi que notre organisation Insurgência elle-même - ont joué un rôle décisif, il n'est pas difficile d'imaginer que la situation aurait pu se détériorer davantage. Il est clair également que l'unité de la gauche a joué un rôle déterminant dans l'étroite victoire électorale de Lula contre Bolsonaro l'année dernière, ce qui mettait fin à la barbarie qui était en cours au Brésil depuis les mobilisations de masse réactionnaires de 2015.

Des luttes inter bourgeoises ont également éclaté au Brésil. Bien que la totalité ou presque de la classe dirigeante se soit alignée sur le coup d'État et sur Bolsonaro contre le PT en 2018, ce bloc a commencé à souffrir de divisions avec le l'arrivée du gouvernement néofasciste et les conflits factionnels des bourgeoisies centrales. Avec la victoire de Biden, l'isolement croissant du Brésil dans ses relations internationales et la gestion catastrophique de la pandémie et de la question environnementale, semblable à celle de Trump aux États-Unis, ont fait en sorte qu'une partie de la bourgeoisie locale a cherché à se démarquer du bolsonarisme. En fait, certaines parties de la classe dirigeante soutenaient Lula. Et sans la reconnaissance rapide par Biden du résultat des élections brésiliennes de 2022, le 8 janvier aurait également pu avoir une issue bien plus grave.
Le bolsonarisme, tout comme l'extrême droite internationale, n'est cependant pas vaincu. Il est toujours vivant et organisé et influence les rapports de forces dans le pays. Son programme et sa politique jouissent du soutien massif de la bourgeoisie, de l'agro-industrie, du marché financier, des forces armées et de la police. Il est fortement implanté dans le néopentecôtisme réactionnaire. Il a le poids institutionnel pour attaquer le gouvernement et le programme électoral qu'il mettait de l'avant lors des élections de 2022. Et tout renforcement de l'extrême droite au niveau international pourrait aussi donner un nouvel élan à Bolsonaro pour reprendre son offensive au Brésil.

Enfin, le gouvernement de Lula tente également de positionner le Brésil dans le conflit entre factions centrales bourgeoises, cherchant une position privilégiée pour le pays au niveau de l'agenda environnemental. Ce serait une possibilité concrète en termes de capitalistes souverains, mais pas exactement dans le cas de notre pays. Dans ce projet, bien qu'il soit évidemment de loin supérieur à l'agenda de Bolsonaro, il y a encore peu de progrès concrets. De même, Lula tente d'exploiter les divisions au sein de l'impérialisme – que la diplomatie européenne appelle « concurrence d'enchères » pour le Brésil – au profit du pays, une tentative saine etcorrecte pour préserver l'indépendance relative du Brésil par rapport aux blocs impérialistes en conflit.

7. La gauche, de 2010 à 2023

Enfin, nous consacrerons la dernière partie de ce document à une évaluation de la capacité politique de la gauche à intervenir au niveau international dans ce processus. Nous partons du principe que, depuis la chute du bloc soviétique et la consolidation de la mondialisation néolibérale, qui a eu un impact énorme sur la classe ouvrière mondiale, tant objectivement - c'est-à-dire sous la forme d'une organisation du travail plus fragmentée, déconcentrée et aliénée - ainsi que subjectivement - dans la confiance en leurs propres forces, en leur conscience sociale et politique -, il y a eu un recul décisif et déterminant dans le rapport de forces par rapport à la majeure partie du XXe siècle. Depuis lors, tant le projet socialiste que l'organisation de la classe ouvrière elle-même ont été profondément discrédités par les masses populaires.

Il est nécessaire de réaffirmer cette caractérisation car, sans elle, nous n'aurons aucune idée de l'énormité du défi historique auquel se confronte la gauche présentement. Tout programme politique qui n'accorde pas une place centrale à la réorganisation sociale et politique de la classe ouvrière, c'est-à-dire à la reconstruction des outils d'organisation de classe et au nécessaire regroupement et réimplantation des forces socialistes, ne sera pas à la hauteur de la tâche de rétablir un horizon socialiste pour l'humanité.

7.1 La crise du prolétariat à la suite de l'éclatement de l'URSS

Bensaïd a fait un effort important à son époque pour récupérer les bases théoriques stratégiques susceptibles de réorienter la gauche dans l'ère post-URSS. Revenant à Marx dans Le 18 brumaire de Louis Bonaparte, il travaille sur la notion de classe sociale d'un point de vue à la fois objectif et subjectif : « Dans la mesure où de millions de familles (...) vivent dans des conditions économiques qui les séparant les unes des autres, et que leur mode de vie, leurs intérêts et leur culture s'opposent à celles des autres classes de la société, elles constituent une classe. Cependant, elles ne constituent pas une classe dans la mesure où (...) n'existe entre elles qu'une connexion locale, et dans la mesure où la similitude de leurs intérêts ne crée entre elles aucune communauté, aucun lien national et aucune organisation politique » (...) Ainsi, elles semblent constituer une classe objectivement (sociologiquement), mais pas subjectivement (politiquement).
De ce point de vue, nous croyons que la fin de l'URSS ainsi que la mondialisation néolibérale ont eu comme effet d'affaiblir considérablement l'identité comme telle de la classe ouvrière, plus précisément sous l'aspect subjectif. Il existe, à un certain niveau, « une communauté, (…) un lien national, (…) une organisation politique », mais tous ces liens, à la suite de 30 ans de néolibéralisme, se sont fragmentés de plus en plus. Au point que présentement, la classe ouvrière vit peut-être la pire crise subjective de fragmentation et de désorganisation sociale qu'elle n'ait jamais connue depuis le tout début de la lutte pour le socialisme. En d'autres termes, la crise de l'humanité ne se limite plus à la crise de direction du prolétariat, telle que caractérisée dans le Programme de transition approuvé lors du lancement de la Quatrième Internationale. Aujourd'hui, outre la crise de direction, nous assistons également à une crise d'organisation de la classe ouvrière, qui l'empêche de s'identifier comme sujet historique et social, et plus encore comme sujet de lutte pour le socialisme. Surmonter cette fragmentation est donc une tâche stratégique, une condition préalable à la transformation révolutionnaire du monde.

Cela ne signifie pas pour autant que la classe ouvrière n'a pas produit des luttes et des résistances importantes, qui ont même contribué à élargir la compréhension de ce qu'est le prolétariat. Même sans se comprendre socialement comme classe, comme totalité, la classe ouvrière trouve ses propres formes, programmes et outils de lutte. Dans ce bilan de ces dernières années, il nous appartient d'identifier ces phénomènes pour savoir sur quoi se baser pour que la classe ouvrière puisse avancer dans sa propre reconstitution politique.

7.2 Le cycle 2010-2015

Ce premier cycle a été marqué principalement par deux vecteurs : en Europe, notamment en Europe du Sud, par les luttes populaires contre l'ajustement structurel imposé par l'Union européenne à la suite de la crise ; en Afrique du Nord-Moyen-Orient, par la lutte pour les libertés démocratiques contre les gouvernements ou régimes établis depuis des décennies. Le développement du cycle dans ces deux domaines a eu des résultats différents, qui doivent être systématisés dans notre bilan.

En Europe, notamment dans le sud du continent – Grèce, Portugal, Espagne – les mobilisations avaient un agenda programmatique plus clair : vaincre l'austérité et lutter contre la suppression des droits de la classe ouvrière. Il y a également eu une plus grande participation de la classe ouvrière au niveau de ses outils autonomes d'organisations, par exemple syndicats, associations de quartier, mouvements sociaux et même partis anticapitalistes et à la gauche du réformisme historique. Ce n'est pas pour rien que, bien que vaincus, les secteurs de gauche en sont sortis plus forts, comme le montrent les cas de Podemos, Syriza et du Bloc de Gauche. La trahison par Syriza du résultat du référendum OXI a largement bloqué le développement de ces alternatives, avec la modération de ce parti et plus tard aussi de Podemos. Le cas du Bloc de Gauche est une exception : avec la tactique de la « geringonça » (formation d'un gouvernement avec le Parti Socialiste et le Parti Communiste), ils ont vaincu la droite en permettant la formation d'un gouvernement de collaboration de classes - sans en faire partie et sans se soumettre à sa discipline, et ils continuent d'être un parti d'une importance indéniable dans le conflit national.

En revanche, le Printemps arabe s'est caractérisé par l'ampleur et la radicalité des mobilisations, qui se sont néanmoins heurtées à une répression sévère de la part des gouvernements. Toutefois, sur le plan programmatique, la principale caractéristique était la dispersion : la seule unité résidait dans le renversement des gouvernements, sans une définition plus claire des tâches de reconstruction qui devraient suivre, et avec différents secteurs sociaux et politiques contestant sa direction. En fait, des secteurs organisés de gauche ont participé aux mobilisations, mais la plupart étaient ceux liés à l'Islam politique, dont l'implantation sociale dans les secteurs populaires était bien plus importante, comme le démontre le poids important des Frères musulmans dans plusieurs pays. Dans tous ces cas, les gouvernements renversés n'ont même pas été remplacés par des secteurs progressistes.

On peut donc faire deux constats principaux par rapport à ce cycle. Le premier est que l'importance stratégique de l'implantation de la gauche a profondément reculé depuis la chute du bloc soviétique. Là où la gauche a réussi à être davantage présente dans les mobilisations, ce recul a été moins dramatique. Là, cependant, où ce n'était pas le cas, ce sont généralement des forces religieuses de droite qui ont pris l'initiative des processus et qui étaient les plus impliqués dans l'organisation des forces populaires. Il s'agit également d'un bilan important pour la gauche brésilienne, étant donné qu'il existe dans notre pays des forces réactionnaires profondément enracinées dans les territoires populaires, la droite s'étant même trouvée victorieuse dans la crise commencée en 2013.

Le deuxième constat, peut-être encore pas suffisamment reconnu par divers secteurs de la gauche, c'est que toutes les mobilisations de masse ne sont pas forcément progressistes. La droite et l'extrême droite ont également mobilisé leurs bases pour lutter. Si, comme gauche, nous n'arrivons pas à bien analyser et reconnaître la lutte en cours pour conquérir la direction ces processus, nous pourrions répéter les erreurs commises dans le passé. Ainsi, toute caractérisation de la situation mondiale guidée exclusivement par l'objectivisme, par le nombre de mobilisations, laissera de côté le facteur principal de la lutte des classes de cette période : la massification de l'extrême droite au niveau international.

7.3 Résistance populaire dans les années 2015-2019

Alors que l'extrême droite se renforcit de plus en plus sur le plan international, un changement s'opère dans le répertoire politique de la gauche et des mouvements sociaux qui tentent de résister. En Amérique latine, cela se manifeste entre autres par la résistance aux coups d'État en cours dans la région. C'est le cas au Brésil depuis 2016, en Bolivie entre 2019-2020, et au Venezuela c'est une préoccupation plus ou moins permanente.
Dans des pays comme la Colombie ou le Chili, les luttes contre l'augmentation des prix du carburant ou des tarifs de transport ont également pris une importance nationale. Les résultats sont également contradictoires et expriment le caractère ouvert, encore controversé, de cette période de transition dans laquelle nous nous trouvons. En Colombie, le processus a fini par conduire à l'élection du gouvernement de Gustavo Petro, le phénomène le plus avancé aujourd'hui en Amérique latine en termes de programmation et d'engagement dans la mobilisation populaire pour affronter la droite. Au Chili, une Assemblée constituante a été ouverte. Mais en Colombie, la force considérable de la droite s'est exprimé lors des dernières élections municipales, au cours desquelles la gauche a été largement battue. Au Chili, nous sommes à la veille du vote du deuxième projet de Constitution, désormais porté principalement par la droite. Même dans les victoires, le conflit se poursuit.

Cependant, en tant que dynamique internationale, la principale caractéristique de cette période a été la montée du mouvement féministe dans un large éventail de pays : Espagne, Suisse, Pologne, États-Unis, Brésil, Argentine et même Iran, avec une série de particularités et de contradictions. Qu'elles résistent aux attaques contre leurs droits - dans le cas du Brésil ou de la Pologne - ou qu'elles cherchent à faire avancer un programme de reconnaissance des droits sociaux, économiques et politiques - dans le cas de l'Espagne ou de l'Argentine - ces mobilisations ont également réussi à se généraliser dans leurs propres pays. Et ils ont obtenu des gains pour le féminisme dans la société, même si ceux-ci n'étaient qu'idéologiques. Si importants furent la portée et l'impact du mouvement féministe, que même des secteurs de la bourgeoisie ont commencé à s'engager davantage dans le mouvement des femmes, sur la base, cependant, du programme du féminisme libéral. Présentement, ce féminisme libéral est souvent plus ou moins adopté par la bourgeoisie libérale-démocrate dans plusieurs domaines de ces pays.

La montée féministe a également favorisé une avancée stratégique importante pour la gauche. Dans la lutte contre l'agenda libéral et avec une importante articulation féministe internationale, les forces de gauche impliquées dans le processus sont passées à une discussion stratégique : comment lutter pour un féminisme avec un contenu de classe. L'actualisation de la théorie de la reproduction sociale apparue dans les années 1980 a permis de progresser contre la fragmentation alors en cours. Dès lors, tant l'affirmation d'un prétendu caractère « postmoderne » dans la lutte des femmes que l'idée d'un féminisme sans classes ont perdu de leur force relative. La question du travail domestique, du travail de soins et de la reproduction sociale en général est devenue partie intégrante d'un effort visant à lier, par exemple, le mouvement féministe au mouvement syndical dans diverses régions du monde.

S'il est vrai qu'il y a encore un long chemin à parcourir sur cette question de la reproduction sociale, notamment de la part des pays du Sud et d'une stratégie antiraciste qui développe cette élaboration, il est également vrai qu'il y a une leçon importante dans cet effort fait par le mouvement des femmes : chaque fois qu'ils ont un impact direct sur la réalité, la lutte idéologique et le développement programmatique contribuent à la réorganisation sociale de la classe ouvrière en brisant la fragmentation et en recréant des liens politiques entre les différents secteurs de la classe.

Enfin, on a vu qu'en 2019, la lutte environnementale s'est aussi considérablement renforcée dans les pays au centre du capitalisme. Comme nous l'avons déjà évoqué, cette mobilisation de masse pousse la faction libérale-démocrate de la bourgeoisie vers l'agenda du capitalisme vert. Mais parmi ses conséquences, il y a aussi, d'une part, un débat important sur les méthodes de mobilisation – qu'il s'agisse d'actions d'avant-garde exemplaires, comme l'ont fait et font des mouvements comme « Extinction Rebellion », ou d'actions de masse, comme le recherchent des secteurs cohérents de la gauche anticapitaliste - et, d'autre part, une discussion encore naissante mais qui s'est renforcée ces dernières années : comment lier la lutte environnementale à la lutte syndicale, autour d'un agenda de l'emploi, des revenus et des droits sociaux et environnementaux.

7.4 Le mouvement social depuis la pandémie

Enfin, dans le cycle ouvert par la pandémie, d'autres secteurs de la classe ouvrière et des forces populaires ont également pris le relais. L'importance du mouvement noir est indéniable en 2020, même dans le contexte d'isolement social dans de nombreuses régions du monde. S'appuyant sur les expériences de mobilisation et d'organisation des années précédentes, Black Lives Matter a pu promouvoir une réponse mondiale aux violences policières lors du meurtre de George Floyd. Initié aux États-Unis, le mouvement a également trouvé une portée massive en Europe et en Amérique latine : des statues honorant les propriétaires d'esclaves et les agents coloniaux ont été démolies dans diverses régions du monde. La lutte antiraciste de ce cycle a également trouvé son expression au Brésil, mais dans d'autres dimensions et face aux conditions défensives imposées par le génocide des noirs, la faim et la crise sociale. Enfin, ce cycle a également contraint des secteurs de la démocratie libérale-bourgeoise à remettre en question une partie de son agenda.

Un processus similaire s'est également produit avec les luttes indigènes, qui au Brésil ont été décisives dans la résistance au gouvernement Bolsonaro, mais qui ont également été le principal secteur mobilisé en Équateur et en Bolivie ces dernières années. En ce sens, il existe une différence entre le mouvement environnemental latino-américain et celui du Nord : là-bas, le centre social des mobilisations est fondamentalement urbain et jeune ; ici, le protagoniste est indigène

Il est encore relativement tôt pour évaluer la portée historique de ces deux processus. Mais tous deux marquent la situation des pays où ils ont eu lieu, suscitant une haine génocidaire de la part de l'extrême droite, une certaine médiation de la droite libérale et des lectures stratégiques différentes de la gauche. La continuité de ces luttes, même sur le terrain idéologique, déterminera l'ampleur de l'impact historique de ces mobilisations dans les années à venir.

Enfin, la solidarité internationale avec le peuple palestinien, lutte qui s'intensifie depuis un peu plus d'un mois, signale également une convergence avec ces expériences. Les mobilisations en faveur de la défense de la Palestine atteignent des proportions massives, principalement dans les pays où les communautés arabes ont émigré au cours des dernières décennies. Dans une large mesure, ils finissent par atteindre ces dimensions au Royaume-Uni, aux États-Unis, en France et en Allemagne, car - à titre de lecture hypothétique - ils expriment un contenu antiraciste : la Palestine finit par devenir, en partie et en totalité, une lutte de résistance contre l'islamophobie, la haine et la précarité constante à laquelle sont soumises quotidiennement les communautés arabes de ces pays. Il est difficile de savoir quel sera le résultat. Mais il s'agit déjà des plus grandes mobilisations de ce type depuis celles contre la guerre en Irak en 2003.

Ce que ces trois processus - du mouvement noir, du mouvement indigène et de la solidarité avec la Palestine - signalent, en termes de bilan, c'est la réaffirmation d'une clé stratégique qui s'est accumulée dans notre courant depuis un certain temps. Dans les luttes contre l'oppression structurelle, la classe ouvrière trouve des moyens de se battre, de se défendre et d'aller de l'avant : ce sont les luttes du prolétariat. Ce sont les secteurs de la classe ouvrière qui ont connu les dynamiques politiques les plus progressistes au cours de la dernière décennie et, dans de nombreux cas, ils représentent des portions significatives de la main-d'œuvre dans les pays où ils se sont massifiés. Et à partir de ces luttes, il est possible d'unifier la classe ouvrière, à condition de travailler avec les bons outils politiques et d'avoir cet objectif politique.

Voilà une clé dans la lutte contre la fragmentation sociale et politique de la classe ouvrière. La gauche socialiste, anticapitaliste et révolutionnaire peut et doit influencer, construire et soutenir ces luttes. Dans la lutte contre la fragmentation et pour la reconstitution de la classe ouvrière en tant que sujet historique, voilà ce que nous avons à faire dans la période à venir : consolider cette vision d'un prolétariat pluriel et diversifié et approfondir ces luttes afin qu'elles se transforment en luttes de l'ensemble de la classe ouvrière.

7.5 Quelques considérations à propos du mouvement syndical

Enfin, il est également important de prendre en compte ce qui se passe dans les luttes les plus directement liées au monde du travail. Alors qu'une dynamique plus conservatrice et bureaucratique continue de prévaloir dans diverses parties du monde, principalement autour des fonctionnaires, il y a aussi de nouveaux développements dans la lutte socio-économique de la classe ouvrière auxquels nous devons prêter attention, car ils affectent également les rapports de forces et font partie de ce conflit.

Même si nous qualifions ces organisations de plus conservatrices et bureaucratiques, les travailleurs du secteur public constituent un secteur important de mobilisation syndicale dans notre pays, en particulier dans les secteurs liés à l'éducation, mais sans s'y limiter, comme le montre la récente grève des travailleurs de métro à São Paulo. Malgré ces mobilisations, il est un fait que le taux de syndicalisation au Brésil diminue d'année en année et il est important de réfléchir aux causes de ce phénomène afin de fortifier la capacité de la classe ouvrière à répondre aux attaques, notamment à lutter contre la suppression des droits et au démantèlement des services publics.

Nous avons déjà évoqué l'extension du mouvement féministe au mouvement syndical dans plusieurs pays : en Espagne, en Allemagne et au Royaume-Uni, le syndicalisme dans le travail reproductif s'est renforcé. Les soignants, les agents de santé et les travailleurs de l'hôtellerie - des emplois normalement exercés par les communautés immigrées - ont progressé dans leur organisation syndicale dans ces pays.

Il y a aussi les luttes des travailleurs des apps. Phénomène « nouveau », peut-être dû exclusivement à la technologie utilisée pour organiser le travail, la vérité est qu'ils remontent à des types d'exploitation de la main-d'œuvre comparables à ceux des débuts du capitalisme industriel ou, dans le cas du Brésil, à une précarité qui remonte aux travailleurs esclaves au XIXe siècle qu'on appelait « de ganho » (ils devaient effectuer des tâches et apporter une somme d'argent fixe établie en fin de journée). Le travail aux pièces, les horaires abusifs et l'absence de sécurité sociale sont les caractéristiques de ce type d'exploitation. Dans plusieurs pays, des grèves ont eu lieu dans ces secteurs ces dernières années

L'expérience de la lutte est très différente dans chaque pays, puisque dans certains pays, comme l'Angleterre, il y a un plus grand dialogue avec le mouvement syndical traditionnel, et dans d'autres, comme le Brésil, la plupart des mobilisations sont menées par des travailleurs indépendants, qui recourent plus fréquemment à ce que l'on a qualifié de « mouvements en réseau » pour organiser leurs actions. Malgré l'augmentation des luttes dans le secteur, ces mobilisations continuent à être très ponctuelles et défensives et dans peu d'endroits il y a eu des progrès concrets dans la garantie des droits de ces travailleurs. C'est d'ailleurs pourquoi il serait inexact de caractériser ce secteur comme l'avant-garde du nouveau mouvement syndical. Quoi qu'il en soit, les méthodes d'auto-organisation se développent dans cette fraction, qui est la plus précaire de la classe ouvrière, et c'est un défi et une tâche pour les organisations de gauche de construire des ponts de dialogue avec ces travailleurs et travailleuses.

C'est aux États-Unis qu'il existe peut-être une dynamique plus progressiste du point de vue syndical. Avec une législation américaine qui rend difficile l'organisation du monde du travail, divers secteurs de la gauche - notamment ceux liés à la DSC (Democratic Socialists of America) - se sont concentrés sur la légalisation des syndicats dans les secteurs des services et de la logistique. En conséquence, il y a eu une augmentation combinée du nombre de grèves et de syndicats aux États-Unis ces dernières années. La récente victoire historique de la grève de l'automobile, soutenue dans une certaine mesure par Biden, le premier président américain à se rendre sur un piquet de grève, et par Trump, met en évidence un phénomène intéressant, dont les conséquences restent à mesurer. Et pourtant, le taux de syndicalisation aux États-Unis a connu une certaine croissance dans des secteurs spécifiques, mais continue de baisser si l'on considère tous les secteurs du monde du travail.

Cela démontre que nous sommes peut-être en présence d'une nouvelle dynamique dans les luttes syndicales. En général, cette dynamique est caractérisée par une nouvelle génération de travailleurs et par un lien direct ou indirect avec les luttes contre l'oppression qui se sont développées ces dernières années. Un effort organisé pour caractériser et influencer cette dynamique - qui s'exprime sous peu d'aspects au Brésil - sans illusions d'aucune sorte, sera la clé pour reconstruire un rapport de forces favorable aux secteurs populaires.

8. Une hypothèse de travail : le front unique comme tactique de long terme

Toute cette discussion sur la situation mondiale et ses relations avec le Brésil, le rapport de forces entre classes, la caractérisation des secteurs dynamiques de ces dernières années, ne doit pas se limiter à l'analyse : elle doit se traduire en hypothèses pour notre travail politique concret. Autrement, nous pourrions être réduits à un groupe de propagande commentant la lutte de classes. Ce n'est pas le but de notre organisation.

Nous souhaitons donc terminer cette longue analyse en précisant ce à quoi celle-ci nous mène, en termes politiques, dans un sens plus général et à long terme. Si nous systématisons les données centrales de la situation dans laquelle nous vivons, il est clair que nous assistons présentement à une transition historique de la mondialisation néolibérale à une réorganisation du capitalisme dont le résultat et les caractéristiques sont encore à déterminer. C'est aussi évident que, dans cette transition, une certaine barbarie s'accentue, à commencer par celle affectant l'environnement. Et que c'est la bourgeoisie mondiale dans son ensemble, et en particulier sa fraction d'extrême droite la plus réactionnaire, qui a présentement l'initiative dans tout cela. Alors que la gauche, elle, demeure fragmentée et peu implantée dans les secteurs populaires, et fait face à de nombreuses difficultés pour arriver à influer de façon significative dans cette transition, même s'il existe, bien sûr, une résistance importante sur laquelle nous pouvons nous appuyer.

En ce sens, dans la période défensive actuelle de l'histoire, le principal défi de la gauche aujourd'hui – sur la base de sa propre fragmentation et de la fragmentation de sa base sociale stratégique – est celui d'avoir la capacité d'influencer le rapport de forces en cours présentement, afin que celui finisse par favoriser la classe ouvrière. Les expériences du dernier cycle nous aident à définir des hypothèses politiques qui permettraient que cela se produise. L'accumulation historique de la Quatrième Internationale est également utile, même si certains de ses héritiers insistent pour répéter ses erreurs au lieu d'en tirer des leçons.

La fragmentation ne pourra être surmontée que grâce à l'expérience pratique. Ce n'est qu'à travers une expérience commune, autour d'un programme unifié et d'une coexistence élargie entre les différents secteurs de gauche dans leur intervention dans la réalité, que nous pourrons surmonter la fragmentation subjective et objective de la classe ouvrière. Et c'est aussi seulement dans ces conditions que l'on pourra contester l'hégémonie sur les bases sociales de la gauche. Une hégémonie qui, dans des conditions normales et notamment dans des situations défensives, appartient aux forces réformistes. De ce point de vue, la tactique du Front unique, comme nous l'avons déjà évoqué, constitue la principale hypothèse politique lorsque l'on considère la situation historique d'un point de vue plus général. Selon la définition de Trotsky, « pour ceux qui ne comprennent pas cela, le parti n'est qu'une association de propagande, pas une organisation d'action de masse ».
Selon les mots de Bensaïd, la tactique du front unique a également une dimension stratégique : « Le capitalisme ne crée pas spontanément une classe ouvrière unifiée. Au contraire, il génère des divisions et de la concurrence, surtout en temps de crise. « L'unification sociale et politique de la classe ouvrière est donc un objectif stratégique permanent. » Dans la situation défensive actuelle, marquée principalement par la fragmentation, le front unique est donc une manière de combiner les trois luttes décisives de notre temps : pour la réorganisation sociale des forces populaires, c'est-à-dire la large reconstitution de la classe ouvrière comme sujet ; pour la réorganisation politique de la gauche, c'est-à-dire la reconstitution d'organisations socialistes ayant un poids de masse ; et pour que la classe ouvrière puisse avoir un poids considérable dans le rapport de forces à l'échelle mondiale.

En fait, lorsque l'on compare l'expérience du PSOL au cours de cette décennie avec celle d'autres grands partis du même type, notre parti est l'outil qui s'est le plus renforcé politiquement – précisément parce qu'il a identifié le tournant défensif dans le rapport de forces au Brésil et dans le monde ; parce qu'il s'est consacré à une politique d'unité des forces populaires contre l'avancée de la droite et de l'extrême droite ; car, ce faisant, préservant son indépendance et se plaçant à l'avant-garde de ces affrontements, il a gagné en crédibilité face aux bases sociales du réformisme au Brésil. Même sans parvenir à construire un véritable front uni organique, l'unité de la gauche dans ses fronts de mobilisation a permis au PSOL d'étendre son influence sociale et politique sur la classe ouvrière. Ces victoires ont confronté le parti à de nouvelles contradictions, qui doivent être affrontées comme un nouveau moment dans cette lutte plus large. Mais abandonner cette orientation, qui nous a permis de progresser de manière significative, même par rapport à d'autres expériences de grands partis à travers le monde, constituerait un sérieux revers politique pour l'ensemble de la gauche. Ce serait, toujours selon les mots de Trotsky, comme « un nageur qui, tout en connaissant déjà la meilleure méthode pour nager, ne se risquerait pas de sauter à l'eau ».

Bien entendu, la tactique du front unique soulève d'autres questions pratiques selon les circonstances dans lesquelles elle est développée. C'est une tactique qui ne peut s'appliquer qu'avec des gants blancs, se situant entre l'affirmation de l'unité et la lutte pour l'hégémonie. La réalité exige une médiation. Mais c

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