Derniers articles

Le « manuel IHRA » de Trudeau favorisera la persécution de l’activisme palestinien et doit être retiré : CJPMO

5 novembre 2024, par Canadiens pour la paix et la justice au Moyen-Orient (CJPMO) — , ,
Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO) prévient que le « manuel IHRA » pro-censure publié aujourd'hui par Patrimoine canadien aura un effet paralysant sur (…)

Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO) prévient que le « manuel IHRA » pro-censure publié aujourd'hui par Patrimoine canadien aura un effet paralysant sur le discours et l'activisme pro-palestinien et demande qu'il soit retiré immédiatement.

Source

La société civile, les groupes de défense des droits de l'homme et les associations de professeurs s'opposent largement à la définition de travail de l'antisémitisme de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (connue sous le nom de « IHRA ») parce qu'elle confond délibérément la critique de la politique israélienne avec l'antisémitisme et qu'elle est fréquemment utilisée par les partisans d'Israël pour empêcher injustement les Palestiniens d'exprimer leur point de vue. CJPMO prévient que ce manuel apparemment inoffensif aura pour conséquence que les institutions publiques persécuteront les personnes qui critiquent le racisme systémique au sein d'Israël, plutôt que de lutter contre la discrimination.

« Après plus d'un an de protestation des Canadiens contre le génocide israélien à Gaza, Trudeau a l'audace de publier un guide sur la façon de réprimer les discours pro-palestiniens », a déclaré Michael Bueckert, vice-président de CJPMO. « Ce manuel anti-palestinien et pro-censure constitue une menace directe pour les libertés civiles et vise les critiques des atrocités commises par Israël, en particulier les Palestiniens. Nous demandons instamment aux institutions canadiennes de rejeter l'utilisation de ce manuel », a ajouté M. Bueckert. Plus de 11 000 Canadiensont envoyé un courrier électronique au Premier ministre pour lui demander de suspendre l'utilisation de ce manuel.

Sur la base d'une analyse préliminaire du manuel IHRA de Trudeau, CJPMO a identifié plusieurs façons importantes de qualifier malicieusement et faussement d'antisémites les discours et les actions pro-palestiniens. Par exemple :

Le manuel affirme qu'il est antisémite de s'opposer à l'idéologie du sionisme, qui est définie uniquement comme un soutien à l'autodétermination des Juifs dans leur patrie ancestrale (en ignorant le rôle du sionisme dans la dépossession et l'oppression des Palestiniens) (29). Parmi les études de cas d'incidents antisémites, on peut citer un message sur les médias sociaux affirmant que « vous ne pouvez pas être antiraciste et sioniste » et que « le sionisme est un projet raciste et violent de colonisation » (29), ainsi qu'un message sur les médias sociaux affirmant qu' « Israël n'a pas le droit d'exister » (30). CJPMO prévient que cela sera utilisé pour réduire au silence les expériences palestiniennes du sionisme, y compris la Nakba.

Le manuel affirme qu'il y a antisémitisme lorsqu'Israël est « soumis à un double standard », présenté sous un « jour particulièrement négatif » ou lorsque son « droit à l'existence » est « remis en question » (30, 47). CJPMO note qu'il s'agitd'arguments entièrement subjectifs qui sont régulièrement déployés par les partisans d'Israël contre toutes les formes de critiques et de protestations qu'ils jugent excessives ou injustes.

D'autres exemples d'antisémitisme supposé dans le manuel incluent la désinvitation d'une conférencière d'un événement parce qu'elle avait servi dans l'armée israélienne (31) ; un post Instagram qui disait que « le génocide sioniste est le plus grand acte d'agression. C'est la cause première de la violence » et ne reconnaissait pas le « droit d'Israël à se défendre en temps de guerre » (31) ; la suggestion que les Israéliens sont des « colonisateurs » (31) ; l'accusation des Israéliens d'être des « assassins d'enfants » (31) ; l'utilisation du terme « sioniste », qui, selon le manuel, devrait être traité comme un substitut de « juif » (32) ; et la comparaison de la guerre génocidaire d'Israël à Gaza avec l'Holocauste (34).

Le manuel a été produit sous la direction de Deborah Lyons, l'envoyée spéciale du Canada pour la préservation de la mémoire de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme. Au début de l'année, CJPMO a publié un rapport intitulé « Defaming the Pro-Palestine Movement » (Diffamer le mouvement pro-palestinien)qui révélait comment Mme Lyons diffusait constamment des affirmations fausses et malveillantes sur les militants pro-palestiniens - en présentant les manifestations, les slogans et les positions pro-palestiniennes comme antisémites - et préconisait régulièrement la suppression de presque tous les types de manifestations pro-palestiniennes. Le rapport conclut que le comportement de l'envoyé spécial Lyons témoigne d'une tendance au racisme anti-palestinien et d'une collaboration inappropriée avec les responsables israéliens.

« Trudeau a choisi Lyons, l'ancien ambassadeur en Israël, pour produire un guide sur la façon de supprimer les Palestiniens qui s'expriment contre les pratiques racistes d'Israël. À la demande de M. Trudeau, M. Lyons a travaillé avec des responsables israéliens et des groupes pro-israéliens pour concevoir un document destiné à protéger Israël contre toute critique, même la plus légère, de ses politiques. Avec ce manuel, Trudeau choisit de protéger l'idéologie du sionisme plutôt que les droits des Canadiens garantis par la Charte », a déclaré Alex Paterson, directeur principal des affaires parlementaires de CJPMO.

CJPMO réaffirme que l'IHRA est conçue pour supprimer les perspectives palestiniennes, y compris les études critiques sur des concepts juridiques fondamentaux tels que l'apartheid et le génocide, et devrait donc être considérée comme une forme de racisme anti-palestinien parrainé par l'État. L'année dernière, CJPMO s'est jointe à plusde 100 organisations de la société civile, dont Human Rights Watch et Amnesty International, ainsi que des groupes de défense des droits de l'homme palestiniens et israéliens, pour mettre en garde les Nations unies contre l'adoption de l'IHRA. Au Canada, les groupes qui s'opposent à l'IHRAcomprennent Independent Jewish Voices Canada, la BC Civil Liberties Association, le Congrès du travail du Canada, l'Association canadienne des professeurs d'université, la Fédération canadienne des étudiants, l'Union of BC Indian Chiefs, la Confédération des syndicats nationaux et plus de 40 associations de professeurs et syndicats universitaires. Au lieu d'adopter l'IHRA, CJPMO préconise d'autres définitions de l'antisémitisme qui ne reproduisent pas ces préjudices, comme la Déclaration de Jérusalem sur l'antisémitisme.

À propos de CJPMO - Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient (CJPMO) est une organisation laïque à but non lucratif qui rassemble des hommes et des femmes de tous horizons désireux de voir la justice et la paix s'enraciner à nouveau au Moyen-Orient. Sa mission est de permettre aux décideurs de considérer toutes les parties avec équité et de promouvoir le développement équitable et durable de la région.

Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient www.cjpme.org

L'ensemble ou des parties de ce communiqué de presse peuvent être reproduits sans autorisation.

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Des groupes communautaires sud-asiatiques et leurs alliés demandent l’inscription du Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS) et de ses affiliés au Canada sur la liste des groupes haineux et des entités d’extrême droite.*

5 novembre 2024, par CERAS (Centre sur l'asie du sud), SADAC/CADSA (South Asian Diaspora Action Collective/Collectif d'action de la diaspora sud-asiatique) — , , ,
Montréal. 30 octobre 2024. Vingt-cinq (25) groupes communautaires sud-asiatiques et leurs alliés écrivent une lettre ouverte au premier ministre Trudeau pour demander (…)

Montréal. 30 octobre 2024. Vingt-cinq (25) groupes communautaires sud-asiatiques et leurs alliés écrivent une lettre ouverte au premier ministre Trudeau pour demander l'inscription du Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS) et de ses affiliés au Canada sur la liste des groupes haineux et des entités d'extrême droite.

La récente annonce de la GRC (Gendarmerie royale du Canada) a révélé « l'implication d'agents du gouvernement indien dans des activités criminelles graves au Canada » et, que la GRC et d'autres organismes d'application de la loi au Canada ont enquêté et inculpé un « nombre important d'individus pour leur implication directe dans des homicides, des
extorsions et d'autres actes criminels de violence.

L'assassinat l'année dernière d'un dirigeant sikh canadien, Hardeep Singh Nijjar, et sa prétendue implication avec le gouvernement nationaliste hindou de l'Inde, semblent n'être que la pointe de l'iceberg.

Le Guardian [1] rapporte que « les allégations d'une campagne indienne de violence et de harcèlement transnationaux ont émergé non seulement au Canada mais aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Pakistan, où d'éminents militants sikhs affirment avoir reçu des menaces de mort ».

Un rapport détaillé [2] publié en mars 2023, entre autres rapports, a lié la violence anti-sikhe au Canada à des groupes extrémistes comme le Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS) et leur famille d' organisations ‘Sangh Parivar'. « La présence du Sangh Parivar et des groupes liés au RSS pèse malheureusement, mais de manière prévisible, sur divers incidents de discours et d'actions suprémacistes hindous au Canada », indique le
rapport.

Rappelons que le BJP (Bharatiya Janata Party) au pouvoir en Inde est le bras politique du RSS – les nationalistes hindous ou Hindutva, qui est une organisation paramilitaire inspirée du fascisme européen. Les fondateurs du RSS ont explicitement épousé le fascisme européen. Les fondateurs du RSS ont explicitement épousé l'idéologie fasciste [3]. Au cours des dix années de règne du BJP en Inde, nous avons vu des exemples flagrants de cette idéologie, alors que le gouvernement mène l'Inde vers son objectif de faire
du pays un État ethno-nationaliste hindou, dans lequel les 200 millions de musulmans et d'autres populations minoritaires telles que les Sikhs, les Dalits, les Adivasi (peuples indigènes) et les Chrétiens sont considérés comme des citoyens de seconde zone.

Le gouvernement nationaliste hindou a permis des atrocités envers ces minorités en toute impunité en Inde. Les preuves contenues dans des rapports récents confirment qu'un réseau de ces groupes extrémistes cible les Sikhs et d'autres communautés minoritaires et leurs militants au Canada et aux États-Unis. Le vaste réseau de nationalistes hindous et leurs affiliés (a) au Canada et dans le monde entier [4] est bien connu et nous
savons maintenant que ce réseau au Canada est impliqué dans un modèle inquiétant de coercition, de crime organisé et de violence meurtrière (b).

Ils demandent au gouvernement canadien de :

1. Étendre la protection aux communautés sud-asiatiques et autres minorités à risque.
2. Enquêter sur les violations des droits de la personne et sur l'influence de RSS et de ses sociétés affiliées au Canada.
3. Inscrire le RSS et ses affiliés au Canada sur la liste des groupes haineux et des entités d'extrême droite. Ces mesures permettraient de mieux protéger les minorités canadiennes.

La lettre est également envoyée aux ministres concernés et à tous les dirigeants des partis fédéraux. (i)

(a) HSS-Canada [5], VHP-Canada [6], Coalition of Hindus of North America
(CoHNA)-Canada [7] et Canadian Organization for Hindu Heritage Education
(COHHE) [8], SEWA International [9].
(b) Ces groupes détournent souvent les critiques en invoquant l'«
hindouphobie »[10], qui a été largement démentie [11, 12].

Source :
South Asian Diaspora Action Collective (SADAC)
CERAS (South Asia Forum)

SIGNATAIRES :
Academics for Palestine - Concordia
Association des Femmes Musulmanes de Québec
Canadian Council of Indian Muslims (CCIM)
Canadian Council of Muslim Women, Montreal
Canadian Forum for Human Rights and Democracy in India
Canadians Against Oppression and Persecution (CAOP)
Canadians for Indian Democracy (CID)
Canadians for Peace and Justice in Kashmir (CPJK)
Centre sur l'asie du sud (CERAS)
Critical Diasporic South Asian Feminisms
External Affairs - Students' Society of McGill University
Femmes de diverses origines/Women of Diverse Origins
Hindus for Human Rights
International Council of Indian Muslims (ICIM)
Just Peace Advocates/Mouvement Pour Une Paix Juste
Justice For All Canada
Palestinian and Jewish Unity (PAJU)
Quebec Public Interest Research Group - Concordia (QPIRG)
Rang Collective : Arts for Solidarity
Solidarité sans frontières
South Asian Dalit Adivasi Network-Canada (SADAN)
South Asian Diaspora Action Collective (SADAC)
South Asian Women's Community Centre (SAWCC)
Tadamon !
Teesri Duniya Theatre

(i)
L'honorable Bill Blair – Député
Ministre de la Défense nationale

L'honorable Mélanie Joly – Députée
Ministre des Affaires étrangères

L'honorable Arif Virani – Député
Ministre de la Justice et Procureur général du Canada

L'honorable Kamal Khera – Députée
Ministre de la Diversité, de l'Inclusion et des Personnes en situation de
handicap

L'honorable Jagmeet Singh
Chef du Nouveau Parti démocratique

L'honorable Pierre Poilievre
Chef de l'opposition et Chef du Parti conservateur du Canada

L'honorable Yves-François Blanchet
Chef du Bloc Québécois

Notes :
[1] Allegations Suggest India is Now Part of The Assassination Club, 20 Oct
2024,
https://www.theguardian.com/world/2024/Oct/20/Allegations-Suggest-India-Is-Now-Part-Of-The-Assassination-Club

[2] Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS) Network in Canada, 2023,
https://www.nccm.ca/rss-in-canada/

[3] In The Shadow of The Swastika : The Relationships Between Indian Radical
Nationalism, Italian Fascism and Nazism, 2020,
https://www.routledge.com/In-the-Shadow-of-the-Swastika-The-Relationships-Between-Indian-Radical-Nationalism-Italian-Fascism-and-Nazism/Casolari/p/book/9780367508272

[4] How Far-Right Hindu Supremacy Went Global, October 26, 2022,
https://www.vice.com/en/article/how-far-right-hindu-supremacy-went-global/

[5] Factsheet : Hindu Swayamsewak Sangh (HSS), 04 Jan 2024,
https://bridge.georgetown.edu/research/factsheet-hindu-swayamsewak-sangh-hss/

[6] Factsheet : Vishwa Hindu Parishad of America (VHPA), 25 May 2023,
https://bridge.georgetown.edu/research/factsheet-vishwa-hindu-parishad-of-america-vhpa/

[7] Factsheet : Coalition Of Hindus of North America (COHNA), 27 Jul 2023,
https://bridge.georgetown.edu/research/factsheet-coalition-of-hindus-of-north-america-cohna/

[8] Weaponizing “Hinduphobia” To Suppress Dalit and Caste-Oppressed Voices,
April 26, 2024,
https://local-news.ca/2024/04/26/Weaponizing-Hinduphobia-To-Suppress-Dalit-And-Caste-Oppressed-Voices/

[9] Covid Relief Donations Are Supporting a Project To “Hinduize” India,
June 08, 2021,
https://slate.com/news-and-politics/2021/06/covid-india-charity-sewa-hindu-nationalism.html

[10] Petition : E-4507 (Civil and Human Rights), July 19, 2023,
https://www.ourcommons.ca/Petitions/En/Petition/Details?Petition=E-4507

[11] We Must Oppose Indian Hindu Nationalist Forces in Canada, October 5,
2023,
https://www.thestar.com/opinion/contributors/we-must-oppose-indian-hindu-nationalist-forces-in-canada/article_f3911d19-3d62-53bc-8380-0709907718c4.html

[12] Sadan : Opposition to Hinduphobia Petition In Canada, September 10,
2023, https://drive.google.com/file/d/1d41KjHGfrnJlbM0fLLMJlGADOku4sOu_/view

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Charte mondiale des femmes pour l’humanité

5 novembre 2024, par Marche mondiale des femmes — ,
Nous, les femmes, marchons depuis longtemps pour dénoncer et exiger la fin de l'oppression que nous vivons en tant que femmes, pour dire que la domination, l'exploitation, (…)

Nous, les femmes, marchons depuis longtemps pour dénoncer et exiger la fin de l'oppression que nous vivons en tant que femmes, pour dire que la domination, l'exploitation, l'égoïsme et la recherche effrénée du profit menant aux injustices, aux guerres, aux conquêtes et aux violences ont une fin.

Tiré dehttps://www.cqmmf.org/charte-des-femmes-pour-lhumanite.html

Préambule

De nos luttes féministes, de celles qu'ont menées nos aïeules sur tous les continents, sont nés de nouveaux espaces de liberté, pour nous-mêmes, pour nos filles, pour nos fils et pour toutes les petites filles et tous les petits garçons, qui, après nous, fouleront ce sol.

Nous bâtissons un monde où la diversité est un atout et où tant l'individualité que la collectivité sont sources de richesse, où les échanges fleurissent sans contraintes, où les paroles, les chants et les rêves bourgeonnent. Ce monde considère la personne humaine comme une des richesses les plus précieuses. Il y règne l'égalité, la liberté, la solidarité, la justice et la paix. Ce monde, nous avons la force de le créer.

Nous formons plus de la moitié de l'humanité. Nous donnons la vie, travaillons, aimons, créons, militons, nous distrayons. Nous assurons actuellement la majorité des tâches essentielles à la vie et à la continuité de cette humanité. Pourtant, notre place dans la société reste sous-évaluée.

La Marche mondiale des femmes, dont nous faisons partie, identifie le patriarcat comme le système d'oppression des femmes et le capitalisme comme le système d'exploitation d'une immense majorité de femmes et d'hommes par une minorité.

Ces systèmes se renforcent mutuellement. Ils s'enracinent et se conguguent avec le racisme, le sexisme, la misogynie, la xénophobie, l'homophobie, le colonialisme, l'impérialisme, l'esclavagisme, le travail forcé. Ils font le lit des fondamentalismes et intégrismes qui empêchent les femmes et les hommes d'être libres. Ils génèrent la pauvreté, l'exclusion, violent les droits des êtres humains, particulièrement ceux des femmes, et mettent l'humanité et la planète en péril.

Nous rejetons ce monde !

Nous proposons de construire un autre monde où l'exploitation, l'oppression, l'intolérance et les exclusions n'existent plus, où l'intégrité, la diversité, les droits et libertés de toutes et de tous sont respectés.
Cette Charte se fonde sur les valeurs d'égalité, de liberté, de solidarité, de justice et de paix.

ÉGALITÉ

Affirmation 1. Tous les êtres humains et tous les peuples sont égaux dans tous les domaines et dans toutes les sociétés. Ils ont un accès égal aux richesses, à la terre, à un emploi digne, aux moyens de production, à un logement salubre, à une éducation, de qualité à la formation professionnelle, à la justice, à une alimentation saine, nutritive et suffisante, aux services de santé physique et mentale, à la sécurité pendant la vieillesse, à un environnement sain, à la propriété, aux fonctions représentatives, politiques et décisionnelles, à l'énergie, à l'eau potable, à l'air pur, aux moyens de transport, aux techniques, à l'information, aux moyens de communication, aux loisirs, à la culture, au repos, à la technologie, aux retombées scientifiques.

Affirmation 2. Aucune condition humaine ou condition de vie ne peut justifier la discrimination.

Affirmation 3. Aucune coutume, tradition, religion, idéologie, aucun système économique, ni politique ne justifie l'infériorisation de quiconque et n'autorise des actes qui remettent en cause la dignité et l'intégrité physique et psychologique.

Affirmation 4. Les femmes sont des citoyennes à part entière avant d'être des conjointes, des compagnes, des épouses, des mères, des travailleuses.

Affirmation 5. L'ensemble des tâches non rémunérées, dites féminines, qui assurent la vie et la continuité de la société (travaux domestiques, éducation, soin aux enfants et aux proches) sont des activités économiques qui créent de la richesse et qui doivent être valorisées et partagées.

Affirmation 6. Les échanges commerciaux entre les pays sont équitables et ne portent pas préjudice au développement des peuples.

Affirmation 7. Chaque personne a accès à un travail justement rémunéré, effectué dans des conditions sécuritaires et salubres, permettant de vivre dignement.

LIBERTÉ

Affirmation 1. Tous les êtres humains vivent libres de toute violence. Aucun être humain n'appartient à un autre. Aucune personne ne peut être tenue en esclavage, forcée au mariage, subir le travail forcé, être objet de trafic, d'exploitation sexuelle.

Affirmation 2. Chaque personne jouit de libertés collectives et individuelles qui garantissent sa dignité notamment : liberté de pensée, de conscience, de croyance, de religion ; d'expression, d'opinion ; de vivre librement sa sexualité de façon responsable et de choisir la personne avec qui partager sa vie ; de voter, d'être élue, de participer à la vie politique ; de s'associer, se réunir, se syndiquer, manifester ; d'élire son lieu de vie, sa nationalité, de choisir son statut civil ; de suivre les études de son choix, de choisir sa profession et de l'exercer ; de se déplacer ; de disposer de sa personne et de ses biens ; d'utiliser la langue de communication de son choix dans le respect des langues minoritaires et des choix collectifs concernant la langue d'usage et de travail ; de s'informer, de se cultiver, d'échanger, d'accéder aux technologies de l'information.

Affirmation 3. Les libertés s'exercent dans la tolérance, le respect de l'opinion de chacune et de chacun et des cadres démocratiques et participatifs. Elles entraînent des responsabilités et des devoirs envers la communauté.

Affirmation 4. Les femmes prennent librement les décisions qui concernent leur corps, leur sexualité et leur fécondité. Elles choisissent d'avoir ou non des enfants.

Affirmation 5. La démocratie s'exerce s'il y a liberté et égalité.

SOLIDARITÉ

Affirmation 1. La solidarité internationale est promue entre les personnes et les peuples sans aucun type de manipulation ni influence.

Affirmation 2. Tous les êtres humains sont interdépendants. Ils partagent le devoir et la volonté de vivre ensemble, de construire une société généreuse, juste et égalitaire, basée sur les droits humains exempte d'oppression, d'exclusions, de discriminations, d'intolérance et de violences.

Affirmation 3. Les ressources naturelles, les biens et les services nécessaires à la vie de toutes et de tous sont des biens et des services publics de qualité auxquels chaque personne a accès de manière égalitaire et équitable.

Affirmation 4. Les ressources naturelles sont administrées par les peuples vivant dans les territoires où elles sont situées dans le respect de l'environnement et avec le souci de leur préservation et de leur durabilité.

Affirmation 5. L'économie d'une société est au service de celles et de ceux qui la composent. Elle est tournée vers la production et l'échange de richesses utiles socialement, qui sont réparties entre toutes et tous, qui assurent en priorité la satisfaction des besoins de la collectivité, qui éliminent la pauvreté et qui assurent un équilibre entre l'intérêt général et les intérêts individuels. Elle assure la souveraineté alimentaire. Elle s'oppose à la recherche exclusive du profit sans satisfaction sociale et à l'accumulation privée des moyens de production, des richesses, du capital, des terres, des prises de décision entre les mains de quelques groupes ou de quelques personnes.

Affirmation 6. La contribution de chacune et de chacun à la société est reconnue et entraîne l'ouverture de droits sociaux, quelle que soit la fonction qu'ils y occupent.

Affirmation 7. Les manipulations génétiques sont contrôlées. Il n'y a pas de brevet sur le vivant ni sur le génome humain. Le clonage humain est interdit.

JUSTICE

Affirmation 1. Tous les êtres humains, indépendamment de leur pays d'origine, de leur nationalité et de leur lieu de résidence, sont considérés comme des citoyennes et des citoyens à part entière jouissant de droits humains (droits sociaux, économiques, politiques, civils, culturels, sexuels, reproductifs, environnementaux) d'une manière égalitaire et équitable réellement démocratique.

Affirmation 2. La justice sociale est basée sur une redistribution équitable des richesses qui élimine la pauvreté, limite la richesse, et assure la satisfaction des besoins essentiels à la vie et qui vise l'amélioration du bien-être de toutes et de tous.

Affirmation 3. L'intégrité physique et morale de toutes et de tous est garantie. La torture, les traitements humiliants et dégradants sont interdits. Les agressions sexuelles, les viols, les mutilations génitales féminines, les violences spécifiques à l'égard des femmes et le trafic sexuel et la traite des êtres humains sont considérés comme des crimes contre la personne et contre l'humanité.

Affirmation 4. Un système judiciaire accessible, égalitaire, efficace et indépendant est instauré.

Affirmation 5. Chaque personne jouit d'une protection sociale qui lui garantit l'accès à l'alimentation, aux soins, au logement salubre, à l'éducation, à l'information, à la sécurité durant la vieillesse. Elle a accès à des revenus suffisants pour vivre dignement.

Affirmation 6. Les services de santé et sociaux sont publics, accessibles, de qualité, gratuits et ce, pour tous les traitement, toutes les pandémies, particulièrement pour le VIH.

PAIX

Affirmation 1. Tous les êtres humains vivent dans un monde de paix. La paix résulte notamment : de l'égalité entre les sexes, de l'égalité sociale, économique, politique, juridique et culturelle du respect des droits, de l'éradication de la pauvreté qui assurent à toutes et tous une vie digne, exempte de violence, où chacune et chacun disposent d'un travail et de ressources suffisantes pour se nourrir, se loger, se vêtir, s'instruire, être protégé pendant sa vieillesse, avoir accès aux soins

Affirmation 2. La tolérance, le dialogue, le respect de la diversité sont des garants de la paix.

Affirmation 3. Toutes les formes de domination, d'exploitation et d'exclusion de la part d'une personne sur une autre, d'un groupe sur un autre, d'une minorité sur une majorité, d'une majorité sur une minorité, d'une nation sur une autre sont exclues.

Affirmation 4. Tous les êtres humains ont le droit de vivre dans un monde sans guerre et sans conflit armé sans occupation étrangère ni base militaire. Nul n'a le droit de vie ou de mort sur les personnes et sur les peuples.

Affirmation 5. Aucune coutume, aucune tradition, aucune idéologie, aucune religion, aucun système économique ni politique, ne justifient les violences.

Affirmation 6. Les conflits armés ou non entre les pays, les communautés ou les peuples sont résolus par la négociation qui permet d'arriver à des solutions pacifiques, justes et équitables et ce, au niveau national, régional et international.

APPEL

Cette Charte mondiale des femmes pour l'humanité appelle les femmes et les hommes et tous les peuples et groupes opprimés du monde à proclamer individuellement et collectivement leur pouvoir à transformer le monde et à modifier radicalement les rapports qui les unissent pour développer des relations basées sur l'égalité, la paix, la liberté, la solidarité, la justice.

Elle appelle tous les mouvements sociaux et toutes les forces de la société à agir pour que les valeurs défendues dans cette Charte soient effectivement mises en œuvre et pour que les pouvoirs politiques prennent les mesures nécessaires à leur application.

Elle invite à l'action pour changer le monde. Il y a urgence !!!

Aucun élément de cette Charte ne peut être interprété ni utilisé pour énoncer des opinions ou pour mener des activités contraires à l'esprit de cette Charte. Les valeurs qui y sont défendues forment un tout. Elles sont égales en importance, interdépendantes, indivisibles ; la place qu'elles occupent dans la Charte est interchangeable.
Qu'est-ce que la Marche mondiale des femmes ?

La Marche mondiale des femmes est un mouvement composé de groupes de femmes de diverses origines ethniques, culturelles, religieuses, politiques, de classe, d'âge, d'orientation sexuelle. Au lieu de nous séparer, cette diversité nous unit dans une solidarité plus globale.

En 2000, nous avons, en tant que Marche mondiale des femmes, écrit une plate-forme politique contenant 17 revendications concrètes afin d'éliminer la pauvreté dans le monde, réaliser le partage des richesses, éradiquer la violence à l'égard des femmes et obtenir le respect de leur intégrité physique et morale. Nous avons transmis ces revendications aux responsables du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale, de l'ONU. Nous n'avons reçu aucune réponse concrète. Nous avons aussi transmis ces revendications aux élus et élues et, aux dirigeants et dirigeantes de nos pays.

Depuis lors, nous continuons à défendre nos revendications sans relâche. Nous proposons des alternatives pour construire un autre monde. Nous sommes actives au sein des mouvements sociaux du monde et de nos sociétés. Nous approfondissons la réflexion sur la place qu'occupent et que doivent occuper les femmes dans le monde.

Par cette charte mondiale des femmes pour l'humanité et par les actions à venir nous réaffirmons qu'un autre monde est possible, un monde rempli d'espoir, de vie, où il fait bon vivre et nous déclarons notre amour à ce monde, à sa diversité et à sa beauté.

Adopté à la 5ième Rencontre internationale de la
Marche mondiale des femmes au Rwanda
le 10 décembre 2004

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Projet de loi 71 : une réforme manquée pour l’équité et la dignité des personnes assistées sociales

5 novembre 2024, par Fédération des femmes du Québec — , ,
La FFQ s'est mobilisée pour demander une réforme en profondeur du régime d'assistance sociale qui tienne compte de la réalité des femmes assistées sociales et pour une (…)

La FFQ s'est mobilisée pour demander une réforme en profondeur du régime d'assistance sociale qui tienne compte de la réalité des femmes assistées sociales et pour une revalorisation de leurs droits fondamentaux, y compris leur autonomie financière et personnelle.

Tiré d'infolettre 2 nov 24

Le dépôt de notre mémoire le 8 octobre dernier s'est fait dans le cadre des consultations particulièresde la Commission de l'économie et du travail pour le projet de loi 71, loi visant à améliorer l'accompagnement des personnes et à simplifier le régime d'assistance sociale. Notre intervention s'inscrit dans un large mouvement porté par des organisations comme le Front commun des personnes assistées sociales du Québec (FCPASQ) et le Collectif pour un Québec sans pauvreté, qui œuvrent pour une transformation en profondeur de ce système. Ces groupes revendiquent activement un accès plus équitable aux prestations d'aide sociale, ainsi qu'une meilleure protection des droits et de la dignité des personnes assistées sociales. En cohérence avec notre position votée en 2024, nous nous sommes jointes à cette mobilisation pour appuyer les efforts collectifs et pour faire entendre les préoccupations spécifiques des femmes face aux impacts de cette réforme annoncée​.

Nous avons mis de l'avant dans notre mémoire que la réforme manque de soutien, par exemple, pour les femmes victimes de violence, aînées, en situation de handicap ou de proche-aidance et les cheffes de famille monoparentale ou ayant un enfant en bas âge. Nous avons porté une attention particulière aux nouvelles mesures relatives à la prestation pour contrainte à l'emploi (PCE). Également, nous avons dénoncé l'insuffisance des mesures concernant l'individualisation des prestations et de la révision de la notion de vie maritale. Nous avons soulevé certains enjeux relatifs à la pratique sage-femme et à l'accessibilité. Enfin, nous avons réitéré l'importance de l'obligation du gouvernement de réaliser une analyse différenciée selon les sexes du projet de loi 71 pour en évaluer les impacts spécifiques sur les genres, en tenant compte de divers facteurs identitaires. Cette approche intersectionnelle est essentielle pour prévenir les inégalités et garantir un processus législatif transparent et équitable, au bénéfice de toute la population.

La FFQ est fière d'avoir reçu le soutien de plusieurs organisations qui partagent notre vision d'un système d'aide sociale équitable. Parmi celles-ci figurent : la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes (FMHF) ; le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail (CIAFT), le Regroupement des femmes sans emploi du Nord de Québec (ROSE du Nord), L'R des centres de femmes du Québec, le Front Commun des Personnes Assistées Sociales du Québec (FCPASQ), le Regroupement québécois des Centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS), l'Alliance des maisons d'hébergement de 2ᵉ étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2), Action Femmes et handicap (AFH) et la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ).

Suite aux commentaires de la ministre Chantal Rouleau en commissions particulières lors du passage de nos collègues de la FMHM, nous nous inquiétons que certains acquis législatifs soient maintenant relayés à une adoption réglementaire. Une adoption réglementaire ne nécessite pas le même niveau de débat et de transparence que lors d'un processus législatif complet. Ainsi, en passant par des règlements plutôt que par des lois, le gouvernement peut modifier ou abolir des mesures de protection plus facilement, souvent sans consultation publique ou examen approfondi, ce qui risque de compromettre des protections acquises.

Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter le mémoire complet et à partager vos commentaires par courriel à representations@ffq.qc.ca.

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Contre le profit, exiger l’expropriation de Ray-Mont Logistiques

5 novembre 2024, par Marc Bonhomme — , ,
Pendant que l'entreprise Ray-Mont Logistiques s'est auto-délivrée un certificat de bonne conduite quant à la pollution par le bruit, tout en négligeant celle par la poussière (…)

Pendant que l'entreprise Ray-Mont Logistiques s'est auto-délivrée un certificat de bonne conduite quant à la pollution par le bruit, tout en négligeant celle par la poussière et comme îlot de chaleur, la Ville de Montréal s'auto-déclare impuissante suite à une décision judiciaire défavorable qui en plus lui a valu une poursuite couteuse pour cause de profits perdus par l'entreprise. Candidement, la Ville de Montréal avoue que « [c]e dossier ne contribue pas à l'atteinte des résultats de Montréal 2030, des engagements en changements climatiques et des engagements en inclusion, équité et accessibilité universelle ». (OCPM – Ville de Montréal, Site Ray-Mont Logistiques - Secteur Assomption Sud) Il ne vient pas à l'idée de la Ville que la catastrophe tant climatique que celle de la biodiversité exigent d'aller au-delà de cette défaite judiciaire.

4 novembre 2024

Qu'est-ce à dire pratiquement ? Quand il a fallu, il y a une cinquantaine d'années, construire ce réseau d'autoroutes urbaines si affligeant par son parti-pris pour l'envahissante auto solo qui pollue et structure la trame urbaine, les différents niveaux de gouvernement ne se sont pas gênés pour exproprier à la pelletée malgré une forte opposition citoyenne. Le quartier Hochelaga-Maisonneuve a connu l'expropriation massive du secteur de la rue Notre-Dame… pour rien, ce qu'il lui a valu le prix de consolation d'une piste cyclable arborée. Aujourd'hui, la préservation et la restauration de la nature ont besoin d'autre chose qu'un prix de consolation. Il faut leur accorder la priorité et exproprier pour ce faire la propriété privée tout en faisant justice aux personnes expropriées sans tomber dans le piège spéculatif.

Les catastrophes démontrent l'importance cruciale de la préservation de la nature

Il tombe sous le sens que la nature est devenue prioritaire alors qu'elle aurait toujours dû l'être. La nature terrestre et océanique absorbe normalement la moitié des émanations de gaz carbonique qui est le principal gaz à effet de serre (GES) causant le réchauffement climatique. Il est fort troublant qu'

« [e]n 2023, année la plus chaude jamais enregistrée, les résultats préliminaires d'une équipe internationale de chercheurs montrent que la quantité de carbone absorbée par les terres s'est temporairement effondrée. Au final, les forêts, les plantes et les sols n'ont pratiquement pas absorbé de carbone. Des signes d'alerte se manifestent également en mer. […] Seule une grande forêt tropicale humide - le bassin du Congo - reste un puits de carbone important qui absorbe plus de carbone qu'il n'en rejette dans l'atmosphère. […] Les forêts boréales, qui abritent environ un tiers du carbone terrestre et s'étendent sur la Russie, la Scandinavie, le Canada et l'Alaska, ont vu la quantité de carbone qu'elles absorbent chuter de plus d'un tiers en raison des épidémies de coléoptères liées à la crise climatique, des incendies et du défrichement pour l'exploitation du bois.

Patrick Greenfield, Trees and land absorbed almost no CO2 last year. Is nature's carbon sink failing ?, The Guardian, 14/10/24

Rappelons que « [l]es incendies qui ont ravagé les forêts boréales du Canada en 2023 ont produit plus d'émissions de carbone responsables du réchauffement de la planète que la combustion de combustibles fossiles dans tous les pays sauf trois. »
(Manuela Andreoni, Canada's Wildfires Were a Top Global Emitter Last Year, Study Says, New York Times, 24/08/24). Depuis 2001, les forêts canadiennes « sous gestion » émettent plus de carbone dans l'atmosphère qu'elles en absorbent et elles le font à un taux croissant (Bary Saxifrage, Our forests have reached a tipping point, Canada's National Observer, 21/08/23).

On en déduit l'importance cruciale de la préservation et de la restauration de la nature lesquelles sont les trois premières cibles sur vingt-trois du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal issu de la COP15 de Montréal en 2022. Ce cadre est considéré comme l'équivalent de l'accord de Paris de 2015 sur le climat qui définit ce que les pays doivent faire pour maintenir le réchauffement de la planète à 1,5 °C en dessous des niveaux préindustriels. Quelles sont ces trois premières cibles ?

La cible 1 vise à limiter l'artificialisation des milieux naturels, soit « réduire la perte de zones de grande importance pour la biodiversité, y compris d'écosystèmes de grande intégrité écologique, à un niveau proche de zéro d'ici à 2030 ».

La cible 2 requiert la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés,

La cible 3 demande aux états d'établir des zones protégées pour 30 % des terres et des mers. Ce dernier objectif est ambitieux : actuellement, seules 17 % des terres et 8 % des zones marines sont sous protection. Et bien souvent, il ne s'agit que d'une protection toute relative.

Sandrine Maljean-Dubois, La COP16 de Cali peut-elle enrayer l'effondrement de la biodiversité ?, The Conversation, 23/10/24

Ni Ottawa, ni Québec, ni Montréal ne sont sur le point d'atteindre le « 30 X 30 »

Soulignons aussi la cible 12 soit « Accroître significativement les espaces « bleus » et « verts » dans les milieux urbains » ce qui met au défi la Ville de Montréal (Alexis Riopel, Découvrez les 23 cibles de l'accord de Kunming-Montréal sur la biodiversité, Le Devoir, 21/12/22). Où en sont Ottawa et Québec vis-à-vis l'atteinte de la cible trois du Cadre de Kunming-Montréal pour laquelle la COP16 de Cali avait pour but de déterminer le plan d'action ? Pour être poli, disons qu'il y a un rattrapage à faire d'ici 2030. Le Canada, à la fin 2023, était rendu à « 13,7 % de ses terres et de ses eaux douces, dont 12,8 % dans des aires protégées [et]14,7 % de ses milieux marins, dont 9,1 % dans des aires protégées » (Valérie Boisclair, Après l'accord historique sur la biodiversité, que nous réserve la COP16 ?, Radio-Canada, 21/10/24). Côté Québec, « le gouvernement Legault n'entend pas revoir la priorité accordée aux permis d'exploration minière, toujours plus nombreux, plutôt qu'à la protection des milieux naturels sur les terres publiques » :

Milieux terrestres : la superficie totale de protection en milieu continental atteint 255 811 km2, soit 17,68 % du territoire québécois. « Cette superficie comprend les différentes annonces d'intention, dont l'engagement gouvernemental à protéger l'entièreté de l'île d'Anticosti », précise le ministère de l'Environnement du Québec

Milieux marins : la superficie totale de protection en milieu marin est de 16 140 km2, ce qui signifie que le réseau d'aires protégées couvre 10,39 % du milieu marin. « Depuis le 1er janvier 2023, aucune superficie n'a été ajoutée au Registre des aires protégées au Québec en milieu marin et côtier », précise le ministère. Québec travaille cependant avec Ottawa en vue d'agrandir le parc marin du Saguenay–SaintLaurent, et une annonce est prévue en 2025.
Alexandre Shields, L'exploration minière avant la protection du territoire, Le Devoir, 25/10/24

Pour le Grand Montréal, au printemps 2023 on en était à « 22,1 % de milieux naturels couverts par des mesures de protection ou de conservation, ce qui nous rapproche de notre cible de 30 % pour 2030 » avec cette réserve que « des territoires qui jouissent de mesures de conservation [ne sont pas] enregistrés comme aires protégées » alors que le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) « compte au total 32 % de milieux naturels (protégés ou non) sur son
territoire »
(Isabelle Delorme, Protéger la nature dans une région urbanisée, Le Devoir, 6/05/23).

Qu'en est-il de la Ville de Montréal ? « Ville hôte de la COP15 sur la biodiversité,
Montréal veut augmenter la superficie terrestre d'aires protégées sur son territoire à 10 %, en ajoutant l'équivalent de cinq fois le mont Royal. […] En 2021, la métropole avait pu réaliser un bond important grâce à la création d'un paysage humanisé sur une portion de l'île Bizard, faisant ainsi passer sa superficie d'aires terrestres protégées à 8 % » (Valérie Boisclair, Le défi de protéger la biodiversité à Montréal, Radio-Canada, 9/12/22) En 2019, pour étendre le « Grand Parc de l'Ouest » à partir de parcs existants, la Ville acquiert un terrain pour 73M $ dont une contribution du fédéral de 50M $ (Wikipédia, Grand Parc de l'Ouest).

Toujours à l'ouest de son territoire dans le technoparc lié à l'aéroport, la Ville, en octobre de cette année, « achète un terrain à 30 millions pour la protection des milieux naturels […] projet de conservation, selon la mairesse Plante, [qui] n'aurait pu se réaliser ‘‘sans le combat'' et ‘‘la ténacité'' d'un groupe de citoyens. » Notons que pour ce projet, « la Ville de Montréal recevra une aide financière [qui] ‘‘pouvant atteindre 4,4 millions de la part du gouvernement du Québec et de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM)…'' » (Stéphane Blais - La Presse canadienne, Montréal achète un terrain à 30 millions pour la protection des milieux naturels, La Presse, 16/10/24).

À l'est prolétaire et francophone, rien de nouveau, c'est le règne de la marchandise

À l'Est, c'est plus lent. La raison en est-elle une industrialisation plus ancienne et extensive laquelle est en corrélation avec une population plus ouvrière, plus pauvre, plus francophone ? Toujours est-il que quatre ans après la création du Grand parc de l'Ouest, la Ville y va de la création du Grand parc de l'Est sur le même principe de la liaison d'espaces verts déjà existants à améliorer ou à aménager auxquels on adjoindra des terrains limitrophes au gré d'achats privés (Isabelle Ducas, Le projet de grand parc dans l'Est se précise, La Presse, 12/11/23). Contrairement au Grand parc de l'Ouest, cependant, la Ville n'a pas encore agrandi le Grand parc de l'Est par un achat privé bien qu'un soit en vue (Emmanuel Delacour, Montréal lorgne un terrain pour son Grand parc de l'Est, Est Média Montréal). Il n'est pas question non plus d'apport pécuniaire d'autres niveaux de gouvernement contrairement à l'Ouest. Pour l'Est ajoutons la transformation de l'ancienne carrière Miron devenue dépotoir en parc de type vaste prairie (Andréanne Chevalier,Le parc Frédéric-Back, ou la reconquête écologique d'un dépotoir, Le Devoir, 18/02/23).

On constate que si la Ville veut prendre au sérieux l'atteinte de son humble cible de 10% d'ici 2030 — la nouvelle loi sur l'expropriation, entre autres pour favoriser la protection de la nature, l'avantage (Éric-Pierre Champagne, Une nouvelle loi qui ne fait pas que des heureux, La Presse, 18/12/23) — elle n'y est pas encore, ni en termes de quantité ni de qualité. De plus, son cœur — est-ce par facilité ? — penche plus à l'Ouest qu'à l'Est. Pendant que le régional Grand parc de l'Est à la pointe de l'Île fait pendant, en retard, à celui de l'Ouest, au niveau des grands parcs de quartier du centre-est l'ajout de la friche L'Assomption dans Hochelaga-Maisonneuve complèterait le parc Frédéric-Back dans St-Michel, (le parc
Maisonneuve dans Rosemont-Mercier ouest et le parc-nature de l'Île de la Visitation dans Montréal-Nord).

Pour exproprier et aménager le parc-nature il faut presser le citron marchand

Pour que ce parc nature soit autre chose qu'un semblant de parc, dit « Coulée verte » par la Ville, il faut y ajouter la propriété de Ray-Mont Logistiques qui ne comprend encore aucun bâtiment. En plus de créer un grand parc de quartier manquant, la création du parc-nature l'Assomption, comme déjà souligné, viendrait corriger l'importante nuisance environnementale qu'est une plateforme logistique train-camion où circuleraient cent wagons par jour. Question coût, un acompte de 17M $ déjà accordé à Ray-Mont qui ne l'aurait pas été si la nouvelle loi sur les expropriations, en vigueur seulement depuis décembre dernier, avait pu être appliquée. En plus, une expropriation épargnerait à la Ville les coûts des mesures de mitigation en faveur de Ray-Mont.

Plus globalement, on pourrait penser que la négligence de la Ville à modifier le zonage à temps afin de couper court à la plateforme de Ray-Mont témoignait d'une aspiration à un retour de la vocation industrielle de ce site étant donné son lucratif rendement fiscal. D'autant plus que la construction de la plateforme était certainement un souhait du conseil d'administration du Port de Montréal, en étroite connivence avec Ray-Mont, sous juridiction du gouvernement fédéral et dont le conseil est composé de gens émanant de l'élite affairiste du Grand Montréal nommés par le gouvernement fédéral. Ne manque plus dans le portrait que le gouvernement québécois qui souhaite industrialiser la Vallée du St-Laurent, en particulier le Premier ministre avec son Projet Saint-Laurent qui a relancé sa carrière politique avec la CAQ (Robert Dutrisac, Legault rêve d'une « vallée de l'innovation », Le Devoir, 25/03/13).

Il ne faut pas craindre de mettre à contribution cette panoplie d'opposants davantage branchés sur la libre circulation des marchandises que sur la sauvegarde de la nature et tous imbus de la quasi-religion du sacro-saint droit de propriété en vue du profit. Il faut d'autant plus les faire payer tant pour le coût de l'expropriation et pour les frais d'aménagement du Parc-nature L'Assomption que ni le ministre de l'Environnement du Canada ni celui du Québec n'ont jugé bon de se déplacer pour la COP16 de Cali sur la biodiversité (Alexandre Shields, Steven Guilbeault et Benoit Charette n'iront pas à la COP16 sur la biodiversité, Le Devoir, 30/10/24) dont le mandat était de donner suite au Cadre mondial de la biodiversité de KunmingMontréal issu de la COP15. Cette COP16 s'est finalement terminée en queue de poisson parce que les avaricieux pays riches ont refusé de soutenir les pays pauvres — allô impérialisme — autrement que par des aumônes alors que l'essentiel de la biodiversité à protéger et à restaurer s'y trouve (Benjamin Legendre - Agence France-Presse et Mariette Le Roux - Agence France-Presse,La COP16 se termine sans parvenir à un accord sur le financement, Le Devoir, 2/11/24).

Marc Bonhomme, 4 novembre 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Mères au front encourage la population à se montrer solidaire

5 novembre 2024, par Mères au front — , ,
Mères au front encourage la population à se montrer solidaire envers des personnes qui se sont courageusement impliquées en faveur de la fermeture d'un pipeline vétuste : (…)

Mères au front encourage la population à se montrer solidaire envers des personnes qui se sont courageusement impliquées en faveur de la fermeture d'un pipeline vétuste :

L'eau potable compromise pour des centaines de milliers de Québécoises et Québécois

La ligne 9B est un oléoduc vétuste, un tuyau rouillé construit en 1976 sans évaluation environnementale préalable. Il achemine du bitume lourd de l'Alberta vers le terminal portuaire de Valero, bordant le St-Laurent, dans l'est de Montréal, en passant par les régions de Vaudreuil-Soulanges, des Basses-Laurentides, de Lanaudière et de Laval. Il serait interdit aujourd'hui de construire un tel pipeline car il est considéré dangereux par les experts, y incluant par Steven Guilbeault, lorsqu'il était porte-parole d'Équiterre. Depuis plus de 15 ans, des citoyennes et des citoyennes font des pressions pour tenter de le fermer, sans succès.

Le 22 octobre dernier, des membres de Last génération Canada et du collectif Antigone ont escaladé le pont Jacques-Cartier pour appeler à la fermeture de la ligne 9b et à la signature du Traité de non-prolifération des énergies fossiles. Cette nouvelle action dénonçant l'exploitation pétrolière a eu lieu 5 ans après la première escalade du pontpar des activistes d'Extinction Rébellion (XR), mais aussi deux ans après l'occupation de 24h du terminal pétrolier de Valero par des activistes d'Antigone.
Les deux grimpeurs, Olivier Huard et Jacob Pirro, ainsi que Michèle Lavoie, ancienne coordinatrice en mobilisation de MAF, qui avait pour rôle le 22 octobre de faire la liaison avec la police afin d'assurer la sécurité, sont en prison depuis cette date jusqu'à leur audience prévue le 31 octobre. Comme vous le constaterez dans cette courte vidéo, c'est une tentative de criminalisation sans précédent au Québecet une atteinte aux droits de la personne à l'encontre d'activistes environnementalistes non-violent-e-s. Un événement de soutien sera organiséle 31 octobre à 9h AM devant le Palais de justice de Montréal pour leur prochain procès.

Comment démontrer notre solidarité envers ces personnes ?

Signez et partagez la pétition
Partager l'appel à la solidarité pour le 31 octobre
Partager la vidéo d'explication des activistes
Partager l'événement Facebook
Contribuez à la campagne de financement en faveur des activistes

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Une centaine de groupes demandent le report du PL-69 sur l’énergie

5 novembre 2024, par Front commun pour la transition énergétique — , ,
Montréal le 28 octobre 2024 - Plusieurs organisations ont analysé le projet de loi n° 69 (PL-69), Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et (…)

Montréal le 28 octobre 2024 - Plusieurs organisations ont analysé le projet de loi n° 69 (PL-69), Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives, qui a fait l'objet de consultations particulières devant la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles jusqu'au 19 septembre dernier.

Compte tenu de la nature des propositions du projet de loi, qui touchent 15 lois et 7 règlements, ainsi que de leurs profonds impacts sur la société et l'environnement, les organisations signataires sont d'avis que cette réforme législative, dans sa forme actuelle, serait mal avisée. Conséquemment, 'est pourquoi elles demandent au gouvernement de suspendre les procédures menant à l'adoption du PL-69 et de retourner à la planche à dessin à la suite d'un réel débat public sur l'avenir énergétique du Québec. En outre :

Le PL-69 ne mène pas à la décarbonation puisqu'il ne contient aucune disposition assurant l'abandon des énergies fossiles
Le PL-69 favorise un développement industriel énergivore effréné
Le PL-69 reporte injustement le coût de ce développement industriel sur les tarifs d'électricité
Ce qui est une injustice sociale
Et une injustice environnementale
Le PL-69 aide le secteur privé à s'approprier notre patrimoine énergétique en ouvrant de nouvelles portes vers la privatisation d'Hydro-Québec ou d'une grande partie de ses actifs
Le PL-69 aurait des impacts catastrophiques sur le territoire
Le PL-69 ignore les mesures pourtant incontournables à prendre pour favoriser la sobriété collective :
Nécessaire pour une transition énergétique moins coûteuse.
Nécessaire pour respecter les limites des territoires.
Nécessaire pour éviter le nucléaire.
Le PL-69 repose sur des orientations qui n'ont jamais été présentées à la population et n'ont jamais été débattues ;
Nous croyons que l'ensemble de ces considérations justifient de lancer rapidement le débat de société qui devrait servir de socle au plan de gestion intégrée des ressources énergétiques (PGIRE) que le gouvernement s'est engagé à élaborer, et de déposer un projet de loi sur l'énergie fondamentalement remanié, une fois cet exercice complété.

Pour lire la lettre

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Les syndicats et les livraisons d’armes à l’Ukraine (24 février 2022 - septembre 2024)

https://www.pressegauche.org/IMG/pdf/final.final.final_rapport_syndicat_armement_ukraine.pdf?48457/cf93401bc822972581acb05b1129fc807e8fa76c8ef33269acf2efc1128fe8c05 novembre 2024, par Martin Gallié — , ,
Dans un contexte où la gauche qui se réclame du mouvement ouvrier se fracture sur la question des livraisons d'armes à l'Ukraine, ce rapport souhaite documenter une question (…)

Dans un contexte où la gauche qui se réclame du mouvement ouvrier se fracture sur la question des livraisons d'armes à l'Ukraine, ce rapport souhaite documenter une question délaissée : les prises de positions et les actions des organisations syndicales sur le sujet. Il s'agit là d'un enjeu important, tant pour les travailleurs et les travailleuses directement concerné·es par les livraisons d'armes, que pour le mouvement ouvrier international. Le pacifisme et la solidarité armée sont par définition incompatibles. Ces prises de positions renvoient donc à des conceptions radicalement opposées de la solidarité ouvrière, de l'internationalisme.

En compilant et en présentant les principaux débats disponibles sur le sujet depuis l'invasion à grande échelle de l'Ukraine en février 2022 par l'armée Russe, ce sont notamment les contradictions et les pistes de réflexion qui ressortent au sein des organisations syndicales que ce rapport souhaite contribuer à identifier et documenter (pièce jointe).

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Appel international des auteurs en soutien aux Palestiniens

« La guerre actuelle est entrée dans nos maisons et a transpercé nos cœurs ». Des auteur·ices lancent un appel international au boycott massif des éditeurs israéliens complices (…)

« La guerre actuelle est entrée dans nos maisons et a transpercé nos cœurs ». Des auteur·ices lancent un appel international au boycott massif des éditeurs israéliens complices de la dépossession du peuple palestinien. Plus de 6000 auteurs, dont Naomi Klein, Jhumpa Lahiri, ou en France Annie Ernaux, Olivier Marboeuf, Karim Kattan, Faïza Guène, refusent de collaborer avec des éditeurs israéliens complices.

Tiré du blogue de l'auteur.

Nous, écrivains, éditeurs, animateurs de festivals littéraires et autres professionnels du livre, publions cette lettre alors que nous sommes confrontés à la crise morale, politique et culturelle la plus profonde du XXIe siècle. L'injustice écrasante à laquelle sont confrontés les Palestiniens ne peut être niée. La guerre actuelle est entrée dans nos maisons et a transpercé nos cœurs.

L'urgence est là : Israël a rendu Gaza invivable. Il est impossible de savoir exactement combien de Palestiniens Israël a tués depuis octobre, car Israël a détruit toutes les infrastructures, y compris la possibilité de compter et d'enterrer les morts. Nous savons cependant qu'Israël a tué, au minimum, 43 362 Palestiniens à Gaza depuis octobre et qu'il s'agit de la plus grande guerre contre les enfants de ce siècle.

Il s'agit d'un génocide, comme l'affirment depuis des mois des experts et des institutions de premier plan. Les responsables israéliens parlent clairement de leurs motivations : éliminer la population de Gaza, rendre impossible la création d'un État palestinien et s'emparer des terres palestiniennes. Cela fait suite à 75 ans de déplacement, de nettoyage ethnique et d'apartheid.

La culture a joué un rôle essentiel dans la normalisation de ces injustices. Les institutions culturelles israéliennes, qui travaillent souvent en collaboration directe avec l'État, ont joué un rôle crucial dans l'obscurcissement, le camouflage et la dissimulation artistique de la dépossession et de l'oppression de millions de Palestiniens pendant des décennies.

Nous avons un rôle à jouer. Nous ne pouvons pas, en toute conscience, nous engager auprès des institutions israéliennes sans nous interroger sur leur relation avec l'apartheid et les déplacements de population. C'est la position adoptée par d'innombrables auteurs contre l'Afrique du Sud ; c'est leur contribution à la lutte contre l'apartheid dans ce pays.

Par conséquent, nous ne travaillerons pas avec des institutions culturelles israéliennes qui sont complices ou qui sont restées des observateurs silencieux de l'oppression écrasante des Palestiniens. Nous ne coopérerons pas avec les institutions israéliennes, y compris les éditeurs, les festivals, les agences littéraires et les publications qui :

1- sont complices de la violation des droits des Palestiniens, notamment par le biais de politiques et de pratiques discriminatoires ou en blanchissant et en justifiant l'occupation, l'apartheid ou le génocide d'Israël, ou

2- n'ont jamais reconnu publiquement les droits inaliénables du peuple palestinien tels qu'ils sont inscrits dans le droit international.

Travailler avec ces institutions, c'est nuire aux Palestiniens, et nous appelons donc nos collègues écrivains, traducteurs, illustrateurs et travailleurs du livre à se joindre à nous dans cet engagement. Nous appelons nos éditeurs, rédacteurs en chef et agents à se joindre à nous pour prendre position, pour reconnaître notre propre implication, notre propre responsabilité morale et pour cesser de collaborer avec l'État israélien et avec les institutions israéliennes complices.

Premiers signataires

Fatin Abbas
Taiba Abbas
Nuzhat Abbas
Yassmin Abdel-Magied
Amy Abdelnoor
Sandy Abdelrahman
Idil Abdillahi
Mohamed Abdou
Hassan Abdulrazzak
Omar Abed
Jordan Abel
Aria Aber
Charlotte Abotsi
Alex Abraham
George Abraham
Susan Abulhawa
Maan Abutaleb
Samuel Ace
Tendayi Emily Achiume
Pip Adam
Brittany Adames
Juana Adcock
Amanda Addison
Nana Kwame Adjei-Brenyah
Nancy Agabian
Pragya Agarwal
Tolu Agbelusi
Zena Agha
Silvia Aguilera
Aamina Ahmad
Rukhsana Ahmad
Naylah Ahmed
Shahnaz Ahsan
Cina Aissa
Jim Aitken
Amna A. Akbar
Kaveh Akbar
Sascha Akhtar
Vasiliki Albedo
Ammiel Alcalay
Kathleen Alcott
Aleksander Aleksander
Michelle Alexander
Kristen Vida Alfaro
Farah Ali
Kazim Ali
Hassan Ali
Najwa Ali
Sabrina Ali
Salma Ali
Sarah Ghazal Ali
Yasmin Alibhai-Brown
Kip Alizadeh
San Alland
Ashleigh Allen
Esther Allen
Rachael Allen
Lulu Allison
Ekbal Alothaimeen
Yazan Al-Saadi
Yassin Alsalman
Hanan Al-Shaykh
Lilliam Eugenia Gómez Álvarez
Miguel Álvarez Sánchez
Raquel Alvarez Sanchez
Hatem Aly
Alia Alzougbi
Justice Ameer
Suad Amiry
Sarah Amsler
Tahmima Anam
Anthony Anaxagorou
Darran Anderson
Sophie Anserson
Abi Andrews
Chris Andrews
Noah Angell
Callum Angus
Aileen Angsutorn
Sinan Antoon
Raymond Antrobus
Marni Appleton
Gina Apostol
Laura Arau
Nilson Araujo de Souza
Farhaana Arefin
John Manuel Arias
Julia Armfield
Amy Arnold
Mirene Arsanios
Ayan Artan
Claire Askew
Marigold Atkey
Polly Atkin
Jennifer Atkins
Jacqueline Atta-Hayford
James Attlee
Matthew Austin
Makram Ayache
MiMi Aye
Sarah Aziza
Hajjar Baban
Indie Laras Bacas
Tareq Baconi
Danielle Badra
Valérie Bah
Bilal Baig
Priya Bains
Jennifer Baker
Jo Baker
Nikkitha Bakshani
Sita Balani
Emily Balistrieri
Ibtisam Barakat
Frank Barakat
J. Mae Barizo
Lana Barkaei
Tim Barker
Frankie Barnet
Cassandra Barnett
Damian Barr
Emily Barr
Ania Bas
Lana Bastasic
Liam Bates
Rim Battal
Alyssa Battistoni
Jumana Bayeh
Richard Beck
Sarona Bedwan
Hannah Beer
Henry Bell
Kobby Ben Ben
Ronan Bennett
Ariana Benson
Sophie Benson
Laura van den Berg
Franco Berardi Bifo
Bennet Bergman
David Bergen
Chase Berggrun
Jay Bernard
Susan Bernofsky
Sarah Bernstein
Omar Berrada
Marie-Helene Bertino
Rahul Bery
Deepa Bhasthi
Gargi Bhattacharyya
Fatima Bhutto
Rose Biggin
Joanna Biggs
Irene Bindi
Maya Binyam
Beverley Birch
Brandi Bird
Hera Lindsay Bird
Farid Bitar
Adelheid Bjornlie
Sin Blaché
Grace Blakeley
A K Blakemore
Nicholas Blincoe
Selina Boan
Lindsey Boldt
Yolanda Bonnell
Naomi Booth
Patricia Borlenghi
Houria Bouteldja
Felix Chau Bradley
Gracie Mae Bradley
Katie Bradshaw
Solomon Brager
Nathaniel Braia
Beth Brambling
Dionne Brand
James Bridle
Elizabeth Briggs
Octavia Bright
Victoria Brittain
Rula Jones Brock
Marianna Brooker
Jennifer Brough
Jericho Brown
Kerry Donovan Brown
Simone Browne
Natascha Bruce
Anca Bucur
Victoria Adukwei Bulley
Judith Butler
Alex Caan
Troy Cabida
Amina Cain
Danny Caine
Felicity Callard
Jen Calleja
Anje Monte Calvo
Marta Fernández Campa
Rosa Campbell
Olga Campofreda
Paul Cannon
Anthony V. Capildeo
Anna Carastathis
Peter Carey
Daragh Carville
Brad Casey
Maya Caspari
Joyoti Grech Cato
Fesal Chain
Jody Chan
Vajra Chandrasekera
Jade Chang
Hayan Charara
Jos Charles
Ruth Charnock
Amit Chaudhury
Cathy Linh Che
Alexander Chee
Melissa Chemam
Anelise Chen
Ching-In Chen
Lisa Hsiao Chen
Tim Tim Cheng
Heerahn Cheon
Selim-a Atallah Chettaoui
Eugene Yiu Nam Cheung
Anne Chisholm
Satinder Kaur Chohan
Mona Chollet
Cat Chong
Chrysanthemum
Bora Chung
Gina Chung
Tice Cin
Jo Blair Cipriano
Susannah Clapp
Eliza Clark
Caro Clarke
John Clifford
Dave Coates
Lucy Coats
Lindsey Collen
Bea Colley
Peter Collins
David Colmer
Joey Connolly
Rachel Connolly
Ingrid Rojas Contreras
Swithun Cooper
Hannah Copley
Jonah Corne
Jacqui Cornetta
Rio Cortez
Mary Costello
Glen Coulthard
Leah Cowan
Molly Crabapple
Raymond Craib
Mac Crane
Andy Croft
Paul Ian Cross
Tess Cullity
Harriet Cummings
Doreen Cunningham
Faye Cura
Grace Curtis
Lauren Aimee Curtis
Sarah Cypher
Selma Dabbagh
Sky Dair
Gabriel Dalpiaz
William Dalrymple
Alain Damasio
Jared Davidson
Danielle Davis
Jenny Fran Davis
Roisin Davis
Gloria Dawson
Aviah Sarah Day
Eccy de Jonge
Saraid de Silva
Ren Dean
Tricia Dearborn
Siddhartha Deb
Claire Dederer
Sharanya Deepak
Michael DeForge
Trynne Delaney
Lauren Delphe
Jemma Desai
Sharan Dhaliwal
Junot Díaz
Natalie Diaz
Susannah Dickey
Ellen Dillon
Brian Dillon
Nicola Dinan
Merima Dizdarević
Farzana Doctor
Kerri ní Dochartaigh
Ted Dodson
Anna Doherty
Michael Donkor
Sarah Dowling
Nicky Downes
Erin Doyle
Ian Dreiblatt
Sarah Driver
Sophie Drukman-Feldstein
OmiSoore H. Dryden
Sharon Duggal
Lisa Duggan
Cyrus Dunham
Natalie Dunn
Roisin Dunnett
Ben Durham
Carolina Ebeid
Caroline Eden
Martin Edmond
Chikè Frankie Edozien
Ben Ehrenreich
Deborah Eisenberg
Nidhi Zakaria Eipe
Eli Tareq El Bechelany-Lynch
Nadine El-Enany
Tala El-Fahmawi
Yara El-Ghadban
Walid El Hamamsy
Mirna El Helbawi
Mohammed El-Kurd
Mirna El Mahdy
Yasmin El-Rifae
Inua Ellams
Zetta Elliott
Maia Elsner
Lucie Elven
Soula Emmanuel
Jonathan Emmett
Shareefa Energy
Mercedes Eng
Annie Ernaux
Ninar Esber
Martín Espada
Nick Estes
Sarala Estruch
Diana Evans
Gareth Evans
Percival Everett
Eve L. Ewing
Keeyana Ezna (Kezna Dalz)
Allegra Le Fanu
David Farr
Shon Faye
Sonia Fayman
Melissa Febos
Silvia Federici
Elaine Feeney
Anita Felicelli
Camonghne Felix
Jordan Felkey
Megan Fernandes
Ferrao
Julie Finidori
Susan Finlay
Samuel Fisher
Emily Fitzell
Fernando A. Flores
Genessee Floressantos
Angela Flournoy
Omar Foda
Ashley Fortier
Sesshu Foster
Yara Rodrigues Fowler
Dan Fox
Lorna Scott Fox
Livia Franchini
Micha Frazer-Carroll
Indigo Freeman
Ru Freeman
Talia Freimanis
Sasha Frere-Jones
Connor Frew
Temim Fruchter
Diane Fujino
Oliver Fugler
Elizabeth Fullerton
Aja Gabel
Ellen Gabriel
Kay Gabriel
Mary Gaitskill
Harry Gallon
Shannon Galpin
Jay Gao
Angela Garbes
Marc Garcés
Suzanne Gardinier
Ed Garland
Camryn Garret
Florence Gauthier
Karl Geary
Joma Geneciran
Puloma Ghosh
Nadene Ghouri
Annie Gibson
Harry Josephine Giles
Cassia Gaden Gilmartin
Ruth Wilson Gilmore
Fausto Giudice
Nicholas Glastonbury
Carly Gledhill
Rory Gleeson
Sinéad Gleeson
Brannavan Gnanalingam
Katie Goh
Em Goldman
Martin Gollan
Noam Gonick
Gia Gonzales
Elisa Gonzalez
Avery Gordon
Sylvia Gorelick
Molly Gott
Rebecca Ruth Gould
Niven Govinden
Marlowe Granados
Greg Grandin
Charlotte Geater
Aoife Greenham
Madeleine Grive
Faïza Guène
Amba Guerguerian
Gioia Guerzoni
Guy Gunaratne
Anna Gunin
Abdulrazak Gurnah
Susila Gurusami
Kevin Guyan
Marilyn Hacker
Saleem Haddad
Swapna Haddow
Subhi Hadidi
Jessica Hagedorn
Simon Haines
Mashinka Firunts Hakopian
Robert Hamberger
Mohsin Hamid
Omar Robert Hamilton
Isabella Hammad
Mohammed Hanif
Kaoutar Harchi
Githa Hariharan
Matef Harmachis
Malcolm Harris
Will Harris
Alison B. Hart
Markus Harwood-Jones
Sabrin Hasbun
Mir Shamsedin Fallah Hashemi
Sarvat Hasin
Tobi Haslett
Janet Hatherley
Owen Hatherley
Alice Hattrick
Naomi Head
Sophia Hembeck
Nadia Henderson
Catherine Hernandez
Etzali Hernández
féi hernandez
Liz Heron
Trevor Herriot
Kit Heyam
layla-roxanne hill
Matt Rowland Hill
Afua Hirsch
Emma Hislop
Bára Hladík
Jean Chen Ho
Hermione Hoby
Jennifer Hodgson
Annie Hodson
Rachel Holmes
Cathy Park Hong
Claire Hong
Amelia Horgan
Tansy E. Hoskins
Andrew Hsiao
Jane Hu
Sally Huband
Mike Huett
Caoilinn Hughes
Femi Hughes
Kelly X. Hui
William Rayfet Hunter
Anton Hur
Amber Husain
Emteaz Hussain
Lizzie Huxley-Jones
Jungeun Hwang
Matilda Feyiṣayọ Ibini
Abubakar Adam Ibrahim
Mayada Ibrahim
Sabrina Imbler
Saba Imtiaz
Paul Ingram
Mie Inouye
Anne Irwin
Burhana Islam
Hanan Issa
Deepa Iyer
Mira Jacob
Harriet Jae
Sarah Jaffe
Nasim Marie Jafry
Wren James
Leslie Jamison
Randa Jarrar
Tom Jeffreys
Nozizwe Jele
Mike Jempson
Mike Jenkins
Claire Jimenez
Ha Jin
Jessica Gaitán Johannesson
Jessica Johns
Daisy Johnson
Evan Johnson
Galen Johnson
Jenny Johnson
Rebecca May Johnson
Caitlin Johnstone
El Jones
Ellen E Jones
Owen Jones
Kira Josefsson
Fady Joudah
Laura Ellen Joyce
Helen Jukes
Park min jung
Loll Jung
Jennifer Kabat
Dina Ahmed Kabil
Elaine Kahn
Taran Kahn
Patricia Ononiwu Kaishian
Megan Kamalei Kakimoto
Donia Kamal
Anjali Kamat
Meena Kandasamy
Malav Lanuga
Balsam Karam
Ghada Karmi
Raghu Karnad
Yumna Kassab
Karim Kattan
Arthur Kaufman
Sophie Monks Kaufman
Navjot Kaur
Rupi Kaur
Sharada Keats
noam keim
Robin D.G. Kelley
Kaie Kellough
Ruth Ahmedzai Kemp
Niyati Keni
Peter Kennard
Louise Kenward
Emily Kenway
Jennie Kermode
Amy Key
Porochista Khakpour
Muhammed Ali Khalidi
Hannah Khalil
Amyra El Khalili
Shamus Khan
Shubnum Khan
Tawseef Khan
Michelle Khazaryan
Lydia Kiesling
Crystal Hana Kim
SJ Kim
Shilo Kino
Ana Kinsella
Gary Kinsman
Blue Kirkhope
Alyson Kissner
Vanessa Kisuule
Naomi Klein
Cecilia Knapp
Rosalie Knecht
Lisa Ko
Claire Kohda
Jamil Jan Kochai
Talia Lakshmi Kolluri
Gowri Koneswaran
Amelia Kraigher
Kate Kremer
Michelle de Kretser
Nancy Kricorian
Charlot Kristensen
Mark Krotov
Zaffar Kunial
Hari Kunzru
Rachel Kushner
Grace Kwan
Abdellatif Laabi
Souad Labbize
Armelle Laborie-Sivan
Catherine Lacey
Daisy Lafarge
Marion Olharan Lagan
Sabinha Lagoun
Jhumpa Lahiri
Léopold Lambert
Asma Lamrabet
Charles Lang
Michael Langan
Patrick Langley
Sarah Lasoye
Davide Gallo Lassere
Andrea Lawlor
Tim Lawrence
Kiese Laymon
Jessica J. Lee
Matthew Lee
Soje Lee
Sara Lefsyk
Eugenia Leigh
Raven Leilani
Mica Lemiski
Ben Lerner
Céline Leroy
Jonathan Lethem
Anna Leventhal
Sophie Lewis
Daryl Li
Erika Olofsson Liljedahl
Sasha Lilley
Thea Lim
Ursula Lindsey
David Ross Linklater
Jazmine Linklater
Robert Liu-Trujillo
Mikaela Loach
Kirsty Logan
Amber Lone
Layli Long Soldier
Cherise Lopes-Baker
Alan Pelaez Lopez
Kyle Carrero Lopez
Nora Loreto
Roberto Lovato
Lia lovenitti
Rebecca Lowe
Melissa Lozada-Oliva
Emily Lee Luan
Canisia Lubrin
Melissa Lucashenko
Valeria Luiselli
Ed Luker
Len Lukowski
Tariq Luthun
lisa minerva luxx
Alexis Lykiard
Eadaoin Lynch
Rosa Lyster
Maatin
Helen Macdonald
Robert Macfarlane
Carmen Maria Machado
Kama La Mackerel
Weston MacLeod
Guy Maddin
Simon Maddrell
Michael Magee
Sabrina Mahfouz
Michael Malay
Ayisha Malik
Rachel Malik
Emanuela Maltese
Bo Mandeville
Preethi Manuel
Olivier Marboeuf
Spyros Marchetos
Miriam Margolyes
Lauren Markham
Francisco Márquez
Andrew Martin
Manjula Martin
Ariél M. Martinez
Vanessa Martina-Silva
Ahmed Masoud
Patricia Massay
Noreen Masud
Hisham Matar
Sarah Thankam Mathews
Ioanna Mavrou
So Mayer
Robyn Maynard
Kelli McAdams
Tim McCaskell
Sophie McCreesh
Breanna J. McDaniel
Jen McDerra
Martine McDonagh
MK McGrath
Fiona Kelly McGregor
Jon McGregor
Lisa McInerney
Kimberly McIntosh
Oisín McKenna
Rachel McKibbens
Matthew McNaught
Cassie McQuater
Don Mee Choi
Susana Medina
Shafik Meghji
Jamal Mehmood
Pauline Melville
Maaza Mengiste
Juliana Mensah
Lucy Mercer
Iman Mersal
Lina Meruane
Philip Metres
China Miéville
Jon Lindsay Miles
Iulia Militaru
James Miller
John Douglas Miller
Maggie Millner
Nina Millns
Bridget Minamore
Adrian Minckley
John Mingay
Frankie Miren
Fatima Farheen Mirza
Pankaj Mishra
Peter Mitchell
Hussein Mitha
Monique Mojica
Kagiso Lesego Molope
Nadine Monem
Adam Moody
Nathan Alexander Moore
Caroline Moorehead
Alan Morrison
Ghazal Mosadeq
Maria Motunrayo Adebisi
Hannah Moushabeck
Michel S. Moushabeck
Dwi Rahmad Muhtaman
Neel Mukherjee
Susan Muaddi Darraj
Alex Mullarky
Lorna Munro
Nora Lester Murad
Sahar Muradi
Rob Myatt
Sara Mychkine
Taiyo Na
Johanne Lykke Naderehvandi
Noor Naga
David Naimon
Ambika Nair
Ron Naiweld
Taghreed Aref Najjar
mélie boltz nasr
Susheila Nasta
Sham-e-Ali Nayeem
Jennifer Neal
Nawara Negm
Cecily Nicholson
Shanice Nicole
Nic Nicoludis
Kerem Nisancioglu
Rémy Ngamije
Joshua Nguyen
Viet Thanh Nguyen
Mark Nowak
Clara Nubile
Matteo Nucci
Jonathan Nunn
N S Nuseibeh
Alice Nuttall
Téa Obreht
Richard O'Brien
Anthony Christian Ocampo
Mark O'Connell
Meaghan O'Connell
Sinéad O'Hart
Suyi Davies Okungbowa
Nathalie Olah
Daniel José Older
Lola Olufemi
Hussein Omar
Ondjaki
Troy Onyango
Andrés N. Ordorica
Chibbi Orduna
Ian O'Reilly
Kenan Orhan
Amanda Orozco
Fiona O'Rourke
Lucia Osborne-Crowley
Jamaica Heolimeleikalani Osorio
Alice Oswald
Peter Oswald
Naomi Paik
Patty Paine
Allison Tamarkin Paller
Angela Palm
Gianfranco Pancino
Stan Papoulias
Ajay Parasram
George Parker
Jen Parker
Morgan Parker
Heather Parry
Shailja Patel
Vikki Patis
K Patrick
Lara Pawson
Martha Paynter
Jeda Pearl
Jonathan Pelham
Telka Pelova
Nicola Penfold
Lee Pepper
Rebecca Perry
Zoë Perry
Holly Pester
Gordon Peters
Torrey Peters
Andreas Petrossiants
Richard Phoenix
Laura Di Pietro
Alycia Pirmohamed
Hazel Jane Plante
Edward Plett
Casey Plett
Joanna Pocock
Justine Podur
Ethel Baraona Pohl
Clare Pollard
Gabriel Polley
Max Porter
Nina Mingya Powles
Pratyusha
Chanda Prescod-Weinstein
Cameron Price
Devon Price
Rosie Price
Joy Priest
Alexandra Pringle
Mira Ptacin
Jasbir Puar
E.R. Pulgar
Derecka Purnell
Marcia Lynx Qualey
Michael Quille
Linda Quiquivix
Zaynah Qutubuddin
Jamali Rad
Monika Radojevic
Nat Raha
Sue Rainsford
Monisha Rajesh
Shivanee Ramlochan
Ravinder Randhawa
Rahul Rao
Clarie Ratinon
Vidyan Ravinthiran
Kate Rawles
Cathy Reay
Jini Reddy
Francesca Reece
Martin Reed
Will Rees
Dave Rendle
Nausicaa Renner
Sarah Resnick
Emma Reynolds
John Reynolds
Jamie Richards
Geoffrey Rickly
Keith Ridgway
Charlotte Lydia Riley
Claude Rioux
Chrissie Roberts
Luke Roberts
Corey Robin
Tom Robinson
Sallyanne Rock
Monique Roffey
Fariha Róisín
Sally Rooney
Sophia K Rosa
Jacqueline Rose
Michael Rosen
Jordy Rosenberg
Gabriel Rosenstock
Tracy Rosenthal
Andrew Ross
Leone Ross
Margaret Ross
Noah Ross
Rhonda Roumani
Heather Rounds
Anita Roy
Arundhati Roy
Ryan Ruby
Chloe Ruthven
Hugh Ryan
Reda Sadiki
Eun Sae (검은새)
Kholod Saghir
Burcu Sahin
Ron Sakolsky
Trish Salah
Aida Salazar
Sara M Saleh
Edward Salem
Mohamed Salmawy
Seif Salmawy
John K Samson
Julia Sanches
Varli Pay Sandi
Nasia Sarwar-Skuse
Ayşegül Savaş
Julian Sayarer
Bobuq Sayed
Laura Scarmoncin
Robin Beth Schaer
James Schamus
Maya Schenwar
Sarah Schulman
Kit Schluter
Bhakti Shringarpure
Susan Schuppli
Claire Schwartz
Cam Scott
Grayson Scott
Walter Scott
Waithera Sebatindira
Kenza Sefrioui
Namwali Serpell
Richard Seymour
Sarah Shaffi
Hamid Darwish Shahkaly
Durre Shahwar
Elhum Shakerifar
Kamila Shamsie
Charif Shanahan
Solmaz Sharif
Azad Ashim Sharma
Kashif Sharma-Patel
Cason Sharpe
Christina Sharpe
Clare Shaw
Dan Sheehan
Farhana Sheikh
Shela Sheikh
Jack Shenker
Tyler Shipley
Parini Shroff
Nikesh Shukla
Terisa Siagatonu
Michèle Sibony
Ayesha Manazir Siddiqi
Leanne Betasamosake Simpson
Safiya Sinclair
Sunny Singh
Hamed Sinno
Leona Skene
Johanna Skibsrud
Ryan Skrabalak
Tara Skurtu
Paulo Slachevsky
Alice Slater
Zeina Sleiman
Gillian Slovo
Mike Small
Nichola Smalley
Deborah Smith
Courtney Smyth
Rhona Snelling
Jess X. Snow
Oki Sogumi
Addy Rivera Sonda
Natasha Soobramanien
Ahdaf Soueif
Rae Spoon
Nicola Spurr
Gina Srmabekian
Cath Staincliffe
Alina Stefanescu
Rebecca Stoehill
Degna Stone
Anna Della Subin
Olivia Sudjic
Jaz Sufi
Smokii Sumac
Marsha Swan
Brandon Sward
Kate Sweeney
Mattilda Bernstein Sycamore
Neferti Tadiar
Madiha Tahir
Rana Tahir
Tanaïs
Ginny Tapley Takemori
Preti Taneja
Rebecca Tamás
Ben Tarnoff
David J Tate
Sasha Tate-Howarth
Annie Taylor
Astra Taylor
Joelle Taylor
Nicholas Taylor
Brian Teare
Saeed Teebi
Janne Teller
Matthew Teller
Emily Temple
Jocelyn Tennant
Jacques Testard
Xuanlin Tham
Charles Theonia
Kai Cheng Thom
Jamilah Thompkins-Bigelow
Ashley Thorpe
Andrzej Tichý
Lena Tichy
Jenevieve Ting
Shze-Hui Tjoa
Tara Tobler
Miriam Toews
Owen Toews
Naima Tokunow
Jia Tolentino
Samuel Tongue
Mohamed Tonsy
James Tookey
Justin Torres
Joshua Gutterman Tranen
Jessica Traynor
Shash Trevett
Addie Tsai
Birukti Tsige
Tori Tsui
Lena Khalaf Tuffaha
Aviva Tuffield
Tony Tulathimutte
Lestyn Tyne
Oana Uiorean
Jack Underwood
Emily Unwin
Hanna Thomas Uose
Simran Uppal
Ryan Vance
Angelique Tran Van Sang
Alejandro Varela
Joe Vaughan
MG Vassanji
Françoise Vergès
Katherena Vermette
Margaux Vialleron
Cecilia Vicuna
Vanessa Angélica Villarreal
Ursula Villarreal-Moura
Hannah Vincent
James Vincent
Shola Von Reinhold
Clara Vulliamy
Ocean Vuong
Lindsay Wagner
Mirza Waheed
Isabel Waidner
Rinaldo Walcott
Emma Wallace
Nicole Wallace
Joanna Walsh
Zukiswa Wanner
Patricia Sarrafian Ward
Aea Varfis-van Warmelo
Noah Warren
Rosie Warren
Raffi Joe Wartanian
Bryan Washington
Nadia Wassef
Michael Waters
Max Weiss
Robert Welbourn
Joma West
Imogen West-Knights
Adam Weymouth
Jessica Widner
Rachel Wiley
Elvia Wilk
Frances Williams
Hattie Williams
Lara Williams
Luke Williams
Jenny Heijun Wills
Mia S. Willis
Kitty Wilson
Lorraine Wilson
Jiaquing wilson-yang
James Wilt
Gabriel Winant
Jan Winter
Milo Wipperman
James Womack
Marian Womack
Adam Woods
Jan Woolf
Jacob Wren
Kyle Lucia Wu
Karen Wyld
Frank Wynne
Jessica Widner
Robin Yassin-Kassab
Kieran Yates
Jane Yeh
Jade Young
Eris Young
Nariman Youssef
M.O. Yukael
Juliano Zaffino
Abi Zakarian
Kate Zambreno
Javier Zamora
Haifa Zangana
Nazanin Zarepour
Hannah Zeavin
Ghassan Zeineddine
Alia Trabucco Zeran
Aisha Zia
Rasha Zidan
Issam Zineh
Alex Zucker
Jeffrey Zuckerman

Il est toujours possible de signer en cliquant ici.

Voir aussi cette version originale.

******

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

L’art de Félix Rose

5 novembre 2024, par Pierre Jasmin — , ,
Avec l'exception éclatante de la politique menée par Camille Laurin et sa loi 101 (Charte de la langue française), parfois contre les réticences de René Lévesque, Félix Rose (…)

Avec l'exception éclatante de la politique menée par Camille Laurin et sa loi 101 (Charte de la langue française), parfois contre les réticences de René Lévesque, Félix Rose dans son nouveau film chez Picbois Productions encouragées par MAISON 4:3, nous ramène au cœur du problème de la francisation, à la rébellion menée par le courageux et méconnu Raymond Lemieux, au prix de sa vie familiale, perturbée par les accusations de « sédition » passibles d'emprisonnement à vie lancées contre lui.

Ayant vécu de près cette rébellion jusqu'à manifester à Québec en 1969 contre le bill 63 (le gouvernement de l'Union Nationale de Bertrand n'avait pas encore appris à traduire bill par projet de loi !), pourquoi ai-je dû attendre 55 ans pour revoir ces images où notre gauche sage manifestait pancartes à la main devant le Parlement, alors que mon frère Claude, devenu correspondant parlementaire du Montréal-Matin à 23 ans pour nourrir sa jeune famille, m'avait informé ultérieurement que le Parlement avait été bourré de policiers avec des fusils par le fasciste ministre de la Justice Rémi Paul prêt à « accueillir » un groupe radical soulevé par des agents-provocateurs, heureusement calmé et empêché d'entraîner la foule par nos dirigeants syndicaux plus réalistes (le film Z de Costa-Gravas de 1969 nous enseignait).

Pourquoi a-t-on tous attendu 55 ans pour voir résumée, sans dénigrement malsain par Drapeau et autres fédéralistes à tout crin, et illustrée par des images jamais montrées auparavant du voyage de Québec à Montréal du général De Gaulle, accompagné de marées de drapeaux tricolores et québécois ainsi que de pancartes artisanales du Rassemblement pour l'Indépendance Nationale ? Le fameux discours au balcon de l'Hôtel-de-Ville est réhabilité dans une bande sonore clarifiée et des images impeccablement synchronisées et ordonnées par l'équipe de Rose, avec une musique entraînante de Marc Gravel, sans flonflons cuivrés patriotiques. Rappelons que cette visite du général à l'Expo 67 allait déclencher son éviction du Canada vers la France et une sordide campagne anglophone mondiale (USA, Grande-Bretagne) contre la sénilité du général, mais aussi un chemin de Damas pour René Lévesque en route pour les élections du Parti Québécois en 1970. J'y participai comme organisateur en foxant mes cours de mars et d'avril à McGill (d'où ma surprise d'avoir reçu la médaille d'or, grâce à la ténacité des grandes pianistes-professeures juives Dorothy Morton et Rose Goldblatt et de compositeurs, jeunes professeurs américains venus fuir un service militaire asservi à guerroyer criminellement au Vietnam, sans compter Istvan Anhalt qui allait m'engager à l'Université Queen's en 1979).
Mais je radote et m'en voudrais de ne pas mentionner le courage, mis en valeur par le film, du chargé de cours marxiste de McGill, Stanley Grey, né dans un quartier pauvre de l'Est de Montréal, renvoyé par les administrateurs voulant juguler le mouvement démocratique appuyé par une grande part de leurs propres étudiants en faveur d'un McGill sinon français (mes draft dodgers américains auraient-ils pu ?), du moins plus accueillant pour les nouveaux Cégépiens francophones (le film aurait d'ailleurs dû féliciter Jean-Jacques Bertrand pour avoir agi pour le français en créant les Universités du Québec un an plus tôt).

« Courez voir le film » – Josée Legault

Il est étrange que Félix Rose ait choisi le titre « la bataille de Saint-Léonard » pour un film aussi lyrique mettant aux prises non pas un, mais deux héros ayant chacun foré le destin de leurs communautés. Le premier, qu'on voit à gauche sur l'affiche, est le grand bâtisseur de Saint-Léonard, l'immigrant italien Mario Barone dont on suit le prospère parcours de constructeur, depuis son exil d'Italie et son premier travail dans un dépotoir - parce qu'il ne parlait ni français ni anglais. Bravo à la solidarité de Rose envers ce pauvre père de famille qui après son travail, refusait de prendre l'autobus pour éviter les regards de passagers ou leurs échanges sur « le maudit macaroni puant » : il préférait marcher une heure dans la neige et le froid si pénible pour l'Italien élevé dans un meilleur climat. L'art de Félix Rose nous permet de comprendre la fierté de celui qui cherchait à élever ses enfants pour un meilleur avenir, en faisant de douteux choix réclamant la liberté de construire une école bilingue, ses orientations politiques étant dévoyées par Pierre-Elliott Trudeau qui le recevait volontiers, irrespectueux de la juridiction exclusive du Québec en éducation (nihil novi sub sole).

En s'y opposant, au prix d'une sanglante agression par une foule italienne de Saint-Léonard ameutée, « Raymond Lemieux pave la voie de la loi 1977 du PQ, faisant du français la langue de l'administration, du commerce, de l'affichage et du travail, mettant surtout fin au libre choix de la langue d'enseignement au primaire et au secondaire, un libre choix désastreux qui, avant 1977, avait permis à 85% des immigrants de faire éduquer leurs enfants en anglais », écrit l'admirable Josée Legault du Journal de Montréal.

Pourquoi ce journal permet-il, hélas, à Joseph Facal de déblatérer le 24 octobre sur nos « vies vides, futiles, sans but, faites de réseaux sociaux niaiseux et de divertissements stupides » [qui refusent d'admirer] Israël, un peuple debout, alors qu'eux sont couchés, avachis » ? Évidemment ce journal, comme Le Devoir a refusé les faits génocidaires relatés par nos articles tel
https://www.lautjournal.info/20241011/la-paix-vivra-par-un-appui-mondial-citoyen-lonu .

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Je ne haïrai point, un message censuré

La position des APLP aux côtés de la Cour Internationale de Justice de l'ONU est déclarée subversive dans notre Canada de fou. Que dire de toutes les images du docteur Izzeldin (…)

La position des APLP aux côtés de la Cour Internationale de Justice de l'ONU est déclarée subversive dans notre Canada de fou. Que dire de toutes les images du docteur Izzeldin Abuelaish et de sa nombreuse famille décimée d'abord en 2009 ?

Je ne haïrai point, un message censuré
Par Pierre Jasmin, Artistes pour la Paix


Le docteur Abuelaish contre Israël POUR la justice

Elles crient l'injustice que les Cours de Justice d'Israël, même la Suprême, ont refusé de reconnaître : « l'État ne peut être tenu responsable de la situation de guerre », et les témoignages des militaires fautifs ont usé des prétextes les plus absurdes pour nier leur responsabilité flagrante. Comme la notoriété du docteur et son amitié avec Shlomi Eldar lui permettaient de parler à la radio et à la télévision, il a exigé des excuses de l'État pour le meurtre de trois de ses filles et de son épouse dans son appartement bombardé par un tank israélien.

Des milliers d'Israéliens lui ont demandé PARDON et le Premier ministre Ehud Olmert brièvement au pouvoir, a refusé de s'excuser mais obtenu un fugace cessez-le-feu, aussitôt rompu par Nétanyahu revenu au pouvoir. À la suite du dernier procès perdu en 2021, les journalistes non censurés ont interrogé la fille du docteur : « Ressentez-vous de la haine ? » « Contre qui ? » a-t-elle doucement offert en non-réponse sur l'absurdité de décisions « de justice ! » refusant de reconnaître des coupables. Même Olmert s'exclame en dogme irréfutable « les Israéliens ne tuent pas d'enfants » : notre dernier article vous informe de leur nombre approximatif depuis plus d'un an (ii), appelé à augmenter avec la décision d'une cour israélienne de déclarer l'UNRWA illégale, alors qu'elle assure le ravitaillement des Gazaouis.

Son libre combat contre le Hamas

Ce qui est frappant de cet admirable pédiatre devenu intouchable à cause des souffrances endurées aux mains d'Israël, c'est qu'il tient tête au Hamas. Il l'avait déjà fait « à la régulière », s'étant présenté à Gaza en constatant la corruption du Fatah venant de perdre son leader Arrafat aux élections de 2006, comme indépendant, ayant recueilli 7000 votes, mais sans être élu : le Hamas majoritaire avait remporté les élections avec 74 élus sur 132 postes et 45,5% des votes. Le but politique très valable du docteur avait été d'empêcher la montée revancharde haineuse du Hamas, dont le chef Ismaël Haniyé (exécuté par Israël il a quelques mois à Gaza) allait imposer son pouvoir islamiste un an plus tard par un affrontement militaire violent et fratricide contre le Fatah, avec l'aide du financement de Nétanyahu voulant la division des Palestiniens.

Dr. Abuelaish : « on ne peut pas régler la violence par la violence. Ma maison était remplie d'amour et d'éducation. Reconnaissez que nous sommes des humains comme vous. La haine est une maladie contagieuse liée au colonialisme, au racisme, aux pouvoirs, à l'inégalité, à la pauvreté-cause du manque d'éducation » et à la confiance aveugle envers des leaders religieux irrationnels, sexistes et intolérants, nous permettra-t-on d'ajouter.

La réalisatrice Tal Barda s'exprime

« Je raconte une histoire complexe, axée sur les personnages, qui converge avec des récits plus larges : la bataille pour les droits du peuple palestinien, la culture de l'éducation à la guerre au Moyen-Orient qui alimente le cycle de la violence et de la vengeance, et les conflits identitaires internes auxquels les immigrants sont confrontés dans leur nouveau pays » dit la réalisatrice et productrice de documentaires franco-américaine, lauréate du programme Greenhouse et du SIMA (Global impact media awards), ainsi que du Tribeca film fund pour ses films projetés dans des festivals internationaux avec des prix remportés à Doc Edge Festival (Nouvelle-Zélande) et à Movies that Matter (Amsterdam).

Du camp de réfugiés de Jabaliya à Gaza, à l'université de Toronto et à la Cour suprême d'Israël, Je ne haïrai point – un médecin de Gaza sur le chemin de la paix (I Shall Not Hate) suit le parcours inédit du Dr Izzeldin Abuelaish, le premier médecin palestinien à avoir travaillé dans un hôpital israélien pour des accouchements et dont l'éthique du pardon et de la réconciliation est mise à l'épreuve lorsqu'un char israélien bombarde sa maison. Contre toute attente, il transforme sa tragédie en une campagne mondiale visant à éradiquer la haine, délivrant son message en anglais, en arabe et en hébreu, cité par l'ancien président américain Barack Obama et en nomination deux fois pour le prix Nobel de la paix. Hanté par le chagrin, le Dr Abuelaish reste convaincu que pour honorer la mort de sa femme Nadia et de ses trois filles, il doit demander des comptes au gouvernement israélien pour l'attaque non provoquée qui a décimé sa famille. Après l'attaque du Hamas le 7 octobre et la guerre contre Gaza depuis lors, le message d'un homme profondément inspirant est plus urgent et impératif que jamais, afin d'imaginer un avenir pour les Palestiniens et les Israéliens.

Le film est produit par Paul Cadieux, Maryse Rouillard, Isabelle Gripon et Tal Barda, grâce au soutien financier du Fonds des médias du Canada (FMC), du Fonds de financement Rogers pour le cinéma documentaire, du crédit d'impôt provincial et du crédit d'impôt fédéral, en association avec Documentary Channel et avec la collaboration du Groupe TVA. Il est distribué au Canada et à l'international par Filmoption.
Dernier mot à la Fondation du docteur Abuelaish pour l'éducation des femmes au Moyen-Orient

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Va chez Papi !

5 novembre 2024, par Omar Haddadou — , ,
– Va chez Papi ! - Papi a besoin de répit. - Alors Mamie. - Mamie n'a pas bien dormi. – Oh ! Vous, pas gentils ! - C'est la vie ma fille. – Tant pis… ! - Tant (…)

Va chez Papi !
- Papi a besoin de répit.
- Alors Mamie.
- Mamie n'a pas bien dormi.
– Oh ! Vous, pas gentils !
- C'est la vie ma fille.
– Tant pis… !
- Tant pis, tant pis, t'as pas subi c'qu'on a subi.
– Voyons ! C'est votre bout d‘choux, Camille.
( Mamie n'a pas sa langue dans sa poche. Elle sentencie : )
- A mon âge, je ne vais pas gâter le « dernier solde » qui m'est imparti.

– Allons Mamie, juste aujourd'hui.
- Chaque week-end, tu nous fais l'coup, toi et ton mari ! s'écrie Papi.

Regardez cette frimousse, ces yeux de biche qui réclament, « Mamie ! » « Papi ! » jour et nuit.

– Et toi, regarde ces vieilles épaves qui ont élevé 3 générations ! Alors, ça suffit !
- Ouh là, conflit générationnel bien nourri.
( Papi, s'interpose pour calmer le jeu )
- Admettons que l'on vous dise oui ! Vous allez faire quoi, cette après-midi ?

Voir un film avec des amis (es).
– C'est bien le cinoche, ça change les idées et chasse l'ennui. (Ironise, Mamie)

- Même les Psychologues le conseillent à tout prix !

A tout prix ? (fait Papi, brocardeur)
- Si, si !
- T'as entendu, Mamie ?
- J'ai entendu et bien compris.
– Alors, c'est bon pour cette après-midi ?
- Vas-y ! Tu embrasses Dany ! consent Papi.
– Aah, Papiii, Mamiiie ! Ici-bas, vous êtes notre Paradis !

( Le jeune couple se paie du bon temps, abuse de la gentillesse des retraités, et remet ça 3 week-ends d'affilée. Excédés, Papi et Mamie décident de mettre un terme définitif à cette outrance, quand leur fille décrétait : )
- Camille, tu restes sage, avec Papi et Mamie !
- Objection ! Il y a un mouvement de grève, aujourd'hui ! (dit Mamie).

– Où ça ? A Paris ?
- Non, non ! Ici !
- Tu plaisantes, Mamie ?
- C'est toi qui l'dis ! On est de sortie.
– C'est vrai, Papi ?
– Oui, ma fille.
- Ah, non ! On a réservé au Resto « Le Bon appétit ! ».

- Et nous, on a nos billets, tarif réduits.
- Et c'est quoi le titre du film qui vous a séduits ?
- « Profite de l'instant présent, demain tu ne seras plus là, l'Ami (e) ! »

Texte et dessin : O. HADDADOU (Paris, 2024)

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Guerre d’Israël contre le Liban : de l’importance des récits médiatiques

5 novembre 2024, par Clothilde Facon-Salelles — , , , ,
Depuis octobre 2023, les frappes israéliennes sur le Liban ont tué plus de 2.700 personnes – dont 1.600 au cours des cinq dernières semaines –, blessé 13.000 et déplacé 1.3 (…)

Depuis octobre 2023, les frappes israéliennes sur le Liban ont tué plus de 2.700 personnes – dont 1.600 au cours des cinq dernières semaines –, blessé 13.000 et déplacé 1.3 million, soit le cinquième d'une population dont 82% vit sous le seuil de pauvreté : pour décrire l'ampleur de cette violence et ces atrocités, les mots comptent.

Tiré du blogue de l'autrice.

Les mots servent à désigner, et ultimement, à délégitimer la violence, alors il est important de les dire : nous assistons à des crimes de guerre (et non à une escalade), des bombardements indiscriminés (et non ciblés), une guerre contre le Liban (et non uniquement contre le Hezbollah). Or, au sein des récits médiatiques, les mots ont été galvaudés, employés de façon trompeuse ou réductrice.

Le Liban bénéficie d'une importante couverture médiatique en France, à la faveur de liens politiques et culturels très forts entre les deux pays, et de nombreux journalistes et observateurs libanais, mais aussi syriens et palestiniens sont à même de témoigner dans les médias de l'Hexagone, de livrer des analyses pertinentes et variées.

Pourtant, le débat a été dominé par une grille de lecture : celle de la lutte opposant Israël au Hezbollah, du fleuve de la rhétorique de la défense d'Israël face à une organisation terroriste. Comme on l'a observé avec Gaza, le traitement médiatique a péché par un défaut de contextualisation, par l'emploi de poncifs qui tendent à invisibiliser et à déshumaniser les populations civiles.

Cette grille de lecture s'est imposée comme un narratif hégémonique dès l'explosion des bipeurs et des talkies-walkies les 17 et 18 septembre. Des journaux français ont adopté une rhétorique similaire à celle de leurs homologues anglo-saxons qui ont loué une « prouesse technologique » : « Liban, 15h30 : l'opération bipeurs est déclenchée » titre un quotidien national, tandis qu'un autre reprend les paroles d'un ancien cadre de la DGSE qui admire un « coup de maître ». Alors même que, ces engins étant utilisés par des employés des institutions et structures d'aide du Hezbollah, des civils ont perdu la vie et des milliers d'autres ont été mutilés, notamment des aides-soignants et les proches des personnes ciblées dont leurs enfants. Alors même que ces explosions sont venues semer la terreur au plus profond de l'intimité des foyers, ravivant le traumatisme de l'explosion du port et insinuant une paranoïa à l'égard de tout objet électronique (dont les équipements médicaux et humanitaires importés de l'étranger). Alors même que Leon Panetta, ancien directeur de la CIA, a lui-même concédé qu'il s'agissait d'une « forme de terrorisme ».

Depuis, l'armée israélienne a pilonné une grande partie du pays, avec des frappes dans le Sud, la Beqaa, Dahieh, le quartier mixte de Basta et Cola dans la capitale, Jounieh, Baalbeck, Tyre, le Chouf, des villages chrétiens du Nord… Elle a ciblé les services de la ville de Nabatiyé, les abords d'hôpitaux et la mission des Casques bleus. Malgré le caractère indiscriminé des attaques – assumé par les autorités, le ministre israélien de l'Éducation affirmant que « le Liban sera annihilé » –, le récit médiatique s'est focalisé sur le carcan du conflit opposant Israël au Hezbollah, et également sur l'allégeance ou le rejet par la population libanaise du « parti de Dieu ». Il est bien légitime d'informer le public sur la nature complexe de ce dernier, à la fois parti politique, organisation militaire, pourvoyeuse d'institutions sociales et caritatives, ainsi que sur son ancrage social. Mais prioriser cet angle au détriment d'autres tend à valider le narratif israélien : on parle d' « opérations ciblées contre le Hezbollah » alors qu'on assiste à une guerre menée contre le Liban et en premier lieu sa communauté chiite. Il est problématique de parler de « fiefs du Hezbollah » sans commencer par dire qu'il s'agit de quartiers densément peuplés. De se focaliser sur les assassinats de cadres du parti ou du Hamas sans mettre les victimes civiles au cœur du récit, considérées comme des « conséquences collatérales ». « ‘Guerre contre le Hezbollah' : une expression qui engloutit les civils », écrit la journaliste Soulayma Mardam Bey dans l'Orient-Le Jour.

Les réseaux sociaux se sont montrés redoutablement efficaces pour déconstruire les narratifs hégémoniques des médias traditionnels, et notamment ce qu'ils peuvent révéler de « deux poids, deux mesures ». Sur la toile, les images déferlent, la bataille des récits fait s'affronter des visions du monde : on dénonce une guerre coloniale, impérialiste. Dans la mesure où le caractère vertical de l'information est remis en cause, où les médias dominants ne sont plus la seule instance de légitimation du monde, il est d'autant plus crucial de recadrer le débat, de ne pas occulter les enjeux essentiels de ce qui se joue au Liban.

Le cœur du débat devrait porter sur la désignation des crimes de guerre d'Israël, sur le fait que Tsahal a franchi toutes les lignes rouges du droit international humanitaire : violation des principes de proportionnalité, de distinction et de précaution, usage avéré de phosphore blanc, déplacements forcés... Des crimes à resituer dans l'historicité des deux décennies d'occupation et des offensives israéliennes au pays du cèdre, en 1978, 1982 (avant la fondation du Hezbollah) et 2006.

Le débat devrait porter sur l'impunité incommensurable dont bénéficie l'État israélien, sur la faillite du droit pénal international. Ne pas faire de cette impunité le thème central, c'est délégitimer le droit international, c'est acter notre renoncement à un ordre mondial fondé sur la justice.

Le glissement ultranationaliste de l'État d'Israël devrait aussi être mis en exergue, évolution portée par l'extrême-droitisation d'une mouvance suprémaciste et messianique, qui essaime dans les plus hautes sphères du pouvoir. L'absence de mobilisation de la société israélienne, qui soutient en grande partie les bombardements au Liban comme à Gaza, doit nous interroger. Il s'agit de comprendre la nature même du projet colonial et expansionniste, auquel s'arrime une culture politique qui cautionne le meurtre de masse de populations arabes, et qui nous renvoie par bien des aspects à notre propre histoire.

Ce qui devrait surtout être documenté et débattu, c'est le soutien continu de nos gouvernements, leur inaction complice qui se contente de condamnations du bout des lèvres tout en donnant un blanc-seing à Israël, lui fournissant des armes – États-Unis et Allemagne en tête, tandis que la France vend des composants. Les dirigeants politiques et économiques disposent pourtant de leviers similaires à ceux mobilisés dans la lutte contre l'apartheid de l'Afrique du Sud : rappeler les ambassadeurs, mettre fin à la coopération militaire et aux relations économiques privilégiées (BNP Paribas continue d'investir des milliards d'euros dans les fournisseurs d'armes à Israël), sanctions... Mais ils choisissent de ne pas en faire usage.

Et c'est là l'écueil d'un narratif exclusivement centré sur le conflit entre Israël et le Hezbollah : il élude la question de notre responsabilité collective, celle des acteurs politiques, mais aussi de l'opinion publique. À l'heure où des images de quartiers dévastés circulent sur nos écrans, où la France comme la plupart des pays occidentaux se contente d'une réponse humanitaire, cette question de la mobilisation et de la pression morale que nous pourrions exercer sur nos dirigeants n'a jamais été aussi brûlante.

******

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Les plans états-uniens pour remodeler le Liban

5 novembre 2024, par Hicham Safieddine — , ,
Alors que l'invasion terrestre du Liban par Israël s'enlise, malgré la poursuite de bombardements meurtriers, une guerre par d'autres moyens se déroule derrière les lignes de (…)

Alors que l'invasion terrestre du Liban par Israël s'enlise, malgré la poursuite de bombardements meurtriers, une guerre par d'autres moyens se déroule derrière les lignes de front. Les acteurs diplomatiques, politiques et médiatiques se mobilisent pour remodeler les équilibres politiques du Liban dans le but d'affaiblir le soutien à la résistance palestinienne et ramener le pays dans l'orbite occidentale et israélienne.

Tiré de la revue Contretemps
31 octobre 2024

Hicham Safieddine

Selon des informations publiés par le quotidien beyrouthin Al Akhbar, l'ambassadrice américaine au Liban, Lisa Johnson, aurait tenu, le 11 octobre une série de réunions avec des hommes politiques libanais, y compris des membres « indépendants » du parlement. Elle leur aurait demandé de se préparer à une nouvelle « ère post-Hezbollah », dans laquelle le contrôle présumé du parti sur l'État et les postes-frontières ne tiendrait plus.

L'envoyé spécial de Washington, Amos Hochstein, ancien militaire et lobbyiste israélien, apparait publiquement sur les principales chaînes libanaises et diffuse la même version, mais dans un langage diplomatique. Le Premier ministre libanais Najib Mikati et le Conseil des ministres ont également affirmé leur attachement à la résolution 1701du Conseil de sécurité des Nations unies, qui vise officiellement à mettre fin aux hostilités entre le Hezbollah et Israël. De son côté, Israël n'a pas encore annoncé son approbation.

Les responsables américains, enhardis par les attentatsisraéliens sur les bipeurs et l'assassinat de hauts responsables du Hezbollah, dont son secrétaire général Hassan Nasrallah, misent sur deux chevaux de Troie pour renverser la situation du Hezbollah de l'intérieur.

Le premier est de précipiter l'élection d'un nouveau président dont le programme serait conforme aux politiques américaines et israéliennes. Le chef de l'armée libanaise, Joseph Aoun, est un candidat probable. Le choix d'Aoun est lié au deuxième cheval de Troie de la campagne américaine contre la résistance : une version remaniée de la résolution 1701.

L'intégrité territoriale du Liban

La version actuelle de la résolution a été publiée au lendemain de la guerre israélienne de 2006 contre le Liban. Elle a servi de point de référence pour le désengagement du conflit. Elle affirmait « l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance politique du Liban » comme moyen de saper la résistance armée menée par le Hezbollah en trois étapes.

La première consiste à interdire toute présence armée du Hezbollah au sud du fleuve Litani et soutient l'appel au désarmement du groupe conformément à la résolution 1559des Nations unies, adoptée deux ans plus tôt. En revanche, aucune restriction de ce type n'a été imposée à Israël. La deuxième consiste à déployer l'armée libanaise dans tout le sud et la troisième à augmenter la présence des troupes de l'ONU à 15 000 hommes, tout en cherchant à les utiliser comme les yeux et les oreilles des puissances occidentales plutôt que comme des protecteurs de la population du sud.

Le Hezbollah a réussi à contourner ces nouvelles restrictions en adoptant une double approche : éviter toute présence armée visible au sud du Litani et se coordonner avec les factions loyales de l'armée libanaise afin d'être rapidement alerté des tentatives des troupes de l'ONU de mettre au jour toute cachette ou activité.

À en juger par la guerre actuelle, la stratégie du Hezbollah a été relativement efficace. C'est pourquoi Washington mise actuellement sur une version remaniée de la loi 1701 et sur des mécanismes d'application plus stricts qui évitent les échecs du passé. Les plans états-uniens sont favorisés par plusieurs développements survenus depuis 2004.

Une armée faible et des Nations unies impuissantes

Sur le plan militaire, les États-Unis ont conclu un partenariat stratégique avec l'armée libanaise à la suite de la guerre de 2006. Ce partenariat comprend une aide financière d'un montant de 3 milliards de dollars. Les ambassadeurs américains rencontrent régulièrement le chef de l'armée, Joseph Aoun, et organisent des formations conjointes ou des cérémonies avec des officiers de haut rang.

Cette politique visait à créer une armée idéologiquement docile. Mais du fait de l'engagement inébranlable de Washington en faveur de la supériorité militaire d'Israël, aucune partie de cette aide n'a été consacrée à l'achat d'armes offensives ou à la formation à la défense contre les agressions étrangères plutôt que contre la répression interne.

La stratégie de Washington consistant à aider Israël en priorité signifie que l'armée libanaise est incapable de défendre le Sud-Liban contre des menaces israéliennes crédibles. Au cours de cette guerre, Israël a attaqué et tué des soldats de l'armée libanaise sans susciter de réaction. Le déploiement des forces armées libanaises dans le sud contribuera à sécuriser Israël, et non le Liban. Une conséquence inattendue est l'incapacité de l'armée à maîtriser le Hezbollah, contrairement aux attentes de Washington.

Les troupes de l'ONU au Liban, connues sous le nom de Finul, sont tout aussi impuissantes face à l'agression israélienne. Depuis leur déploiement après l‘invasion israélienne de 1978, ces troupes n'ont pas réussi à arrêter une seule attaque israélienne. En 1996, Israël a bombardé un complexe de l'ONUdans le sud du Liban abritant des Libanais déplacés, tuant plus de 100 personnes et en blessant des centaines d'autres.

Depuis 2006, la neutralité relative de la Finul semble avoir été remplacée par un parti pris manifeste en faveur d'Israël, malgré le comportement agressif de ce dernier. Au début du mois d'octobre, Israël a attaqué les troupes de l'ONU sous prétexte qu'elles n'appliquaient pas la résolution 1701 et a demandé leur redéploiement à quelques kilomètres au nord de la frontière.

Le 17 octobre, un navire de guerre allemand opérant sous le drapeau de la Finul a abattu un dronequi se dirigeait du Liban vers la Palestine occupée. Cela préfigure la demande de l'envoyé étatsunien Hochstein d'autoriser les troupes de l'ONU à agir en tant que mandataires d'Israël pour traquer et attaquer les forces de la résistance.

Siège économique et social

Sur le plan économique, Washington et ses alliés du Golfe ont renforcé les sanctions financières et économiques à l'encontre du Liban, lui ont refusé toute aide après l'effondrement financier de 2019et ont fait la chasse aux ressources des communautés chiites expatriées en Afrique de l'Ouest et en Amérique latine afin de tarir tout financement communautaire présumé du Hezbollah. Ces mesures avaient pour but d'alimenter les conflits sectaires et d'inciter la base sociale à s'opposer au Hezbollah.

Parallèlement, Washington a favorisé le renforcement des liens avec les ONG émergentes et les députés nouvellement élus afin de créer une élite politique apparemment indépendante, dissociée de la réputation endommagée des forces traditionnelles tout en soutenant des positions opposées à celles de la résistance. Les machinations états-uniennes ont eu un certain impact, notamment sur l'opinion publique. La domination des médias pro-occidentaux au Liban y a certainement contribué. Mais le Hezbollah et son principal allié, le mouvement Amal, ont renforcé leur base sociale lors des dernières élections législatives, qui se sont tenues en 2022.

Malgré la médiocrité des résultats obtenus par les États-Unis, Washington espère maintenant que le désastre social qui résulte du fait qu'Israël a tué, blessé et déplacé des centaines de milliers de personnes créera des conditions suffisantes pour paralyser le Hezbollah. Mais il est clair que sans une victoire militaire décisive – et jusqu'à présent hors de portée – contre le Hezbollah, tous ces efforts ont peu de chances de porter leurs fruits. Essayer d'éliminer brutalement la base sociale du Hezbollah en massacrant des civils ne fonctionnera pas non plus. La multiplication des attaques contre l'ensemble de la communauté ne fera que renforcer sa détermination à soutenir les forces de résistance qui la défendent.

*

Hicham Safieddine est professeur d'histoire à l'université de la Colombie Britannique (Canada). Il est l'auteur de Banking on the State : The Financial Foundations of Lebanon (2019) et l'éditeur d'une sélection d'écrits du marxiste libanais Mahdi Amel : Arab Marxism and National Liberation : Selected Writings of Mahdi Amel (2021).

Cet article a été publié le 23 octobre 2024 dans Middle East Eye. Traduction Contretemps.

Illustration : patrouille de la Finul le long de la ligne bleue au Liban, Foto EMAD.

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Prix Ivoire 2024

5 novembre 2024, par Smith Prinvil — , ,
Le romancier Gary Victor finaliste du Prix Ivoire 2024 pour la Littérature Africaine d'Expression Francophone L'écrivain haïtien Gary Victor avec son roman « Le violon (…)

Le romancier Gary Victor finaliste du Prix Ivoire 2024 pour la Littérature Africaine d'Expression Francophone

L'écrivain haïtien Gary Victor avec son roman « Le violon d'Adrien », est l'un des 5 finalistes en lice pour le Prix Ivoire pour la Littérature Africaine d'Expression Francophone.

L'association Akwaba Culture a l'honneur de porter à la connaissance des professionnels du livre et du public que le jury chargé de la sélection des ouvrages finalistes du Prix Ivoire pour la Littérature Africaine d'Expression Francophone 2024 a achevé ses travaux.

Après une sélection sur mesure par un jury d'experts, cinq romans se démarquent : Les Femmes de Bidibidi de Charline Effah ; Malentendues d'Azza Filali ; Zakoa de Hary Rabary ; Âmes tembée de Marie-George Thébia et Le Violon d'Adrien de Gary Victor.

Soixante-seize ouvrages provenant de seize pays ont été soumis. Le lauréat sera dévoilé le 18 octobre 2024, et la cérémonie de remise du Prix, doté de 3.000 euros, se déroulera à Abidjan le 23 novembre 2024.

Né à Port au Prince en 1958, Gary Victor est aujourd'hui l'un des romanciers les plus lus en Haïti. Il est scénariste pour la radio, le cinéma et la télévision. Il a reçu en 2001 la médaille de l'Ordre de chevalier du mérite de la République française pour la valeur de son oeuvre publiée en français en Haïti.

Créé en 2008 par Akwaba Culture, association de droit ivoirien, le Prix Ivoire pour la Littérature Africaine d'Expression Francophone est placé sous le parrainage du Ministère de la Culture et de la Francophonie de Côte d'Ivoire, de l'ambassade de France à Abidjan, de la Fondation Orange Côte d'Ivoire.

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Guerre au Liban : silence sur les violations israéliennes du droit international

« Le Moyen-Orient est le tombeau du droit international », écrivait le juriste Serge Sur. Ce billet identifie dans le récit médiatique français les omissions et les manoeuvres (…)

« Le Moyen-Orient est le tombeau du droit international », écrivait le juriste Serge Sur. Ce billet identifie dans le récit médiatique français les omissions et les manoeuvres de contournement permettant de parler de la guerre au Liban sans évoquer les violations israéliennes du droit international, à l'heure où la guerre a tué plus de 2900 personnes au Liban.

Tiré du blogue de l'autrice.

En France le Hezbollah est discrédité d'office, à juste titre, comme une organisation qui enfreint le droit international, commet des actes terroristes, tire des roquettes sur le territoire israélien qui ont tué 39 civils et 61 soldats et entraîné le déplacement de plus de 63 000 personnes depuis le 8 octobre 2023. Il faut ajouter que le Hezbollah a soutenu militairement un régime sanguinaire en Syrie à la suite du mouvement de protestation populaire en 2011. Au Liban, il paralyse le fonctionnement des institutions, contribuant de tout son pouvoir à empêcher l'instauration d'un Etat de droit et à ruiner l'économie libanaise. Il a assassiné des résistants communistes à l'occupation israélienne dans les années 1980 dans le but de diriger sans partage le mouvement de la résistance, puis il a organisé des attentats contre le premier ministre Rafic Hariri, assassiné en 2005, contre l'ancien ministre Mohammed Chattah, assassiné en 2013, contre l'intellectuel Lokman Slim - assassiné en 2021 pour avoir dénoncé l'emprise du parti de Dieu sur le pays.

Israël, qui enfreint le droit international depuis des décennies, et qui depuis le 8 octobre 2023 a tué plus de 43 000 Palestiniens - en majorité des civils -, qui affame les rescapés, empêche l'aide humanitaire de leur parvenir, tue le personnel médical, décime les élites culturelles gazaouies, assassine les journalistes, détruit le patrimoine historique palestinien, et soumet Gaza, selon l'expression de la Cour internationale de justice, à "un risque plausible de génocide", Israël qui refuse de reconnaître le droit au retour des réfugiés palestiniens, s'oppose à l'existence d'un Etat palestinien, conduit une politique coloniale et instaure un régime d'apartheid - toujours selon la CIJ -, Israël qui a occupé le sud du Liban pendant 22 ans, annexé Jérusalem-Est et le Golan syrien, mené plusieurs guerres meurtrières, et qui a tué au Liban au cours de l'année écoulée plus de 2900 personnes - en majorité des civils -, Israël est un partenaire économique, politique et militaire de la France.

Omissions

L'ONU publie en ligne le 4 octobre 2024 un texte au titre explicite : « Liban : des experts de l'ONU déplorent le mépris croissant d'Israël pour le droit international ». Israël a un long passé de violations du droit international au Liban analysées dans des études académiques (1). Mais depuis le début de la guerre menée par Israël au Liban en 2023, on cherche souvent en vain dans les médias français des références aux violations actuelles du droit international perpétrées par l'Etat hébreu.

Un tel évitement est manifeste dans le traitement des frappes israéliennes visant le secteur médical. Human Rights Watch parle de crimes de guerre pour le ciblage des professionnels de santé au Liban. Aucun média français ne relaie cette qualification gênante pour Israël ni n'apporte quelque éclairage juridique que ce soit. 163 secouristes ont été tués, 20% des hôpitaux du Liban ont été endommagés dans des frappes. Des centres médicaux ont été bombardés au motif qu'il appartiennent à des organisations affiliées au Hezbollah, et leur personnel tué, alors qu'ils sont protégés par le droit international au même titre que n'importe quels autres établissements de santé.

Même indifférence au droit dans le compte rendu de l'assassinat prétendument ciblé de Hassan Nasrallah, dans une frappe qui devait tuer, selon une estimation préalable israélienne, 300 personnes - estimation basse par conséquent. Israël largue dans une zone densément peuplée des bombes de 900 kg de fabrication américaine qui détruisent six immeubles ; personne ne s'interroge sur le sacrifice de centaines de civils qu'implique cette exécution extra-judiciaire. Il faut attendre le 19 octobre, soit deux semaines après l'événement, pour que le site d'information irlandais The Journal invite une juriste, Heidi Matthews, à livrer une analyse du massacre. H. Matthews note que depuis le début des années 2000 le nombre acceptable de victimes civiles dans des attaques contre un commandant ennemi a été multiplié par dix - évolution attribuable selon elle aux Etats-Unis et à leur allié israélien qui allèguent les nécessités de la "guerre contre le terrorisme".

Même black out concernant la qualification des bombardements indiscriminés d'infrastructures civiles, à l'heure où un quart des bâtiments dans le sud du Liban ont été détruits par Israël. Un expert de l'ONU, Ben Saul, de même que Amnesty international, Human Rights Watch, des médias anglophones (Washington Post, The Canary). rappellent que même les bâtiments d'une banque qui finance les activités militaires du Hezbollah, comme Qard al-Hassan, visés par des bombardements massifs le 21 octobre 2024, sont protégés au même titre que les autres bâtiments civils. Exception faite de France 24, les autres médias français se bornent à exposer les activités de Qard al-Hassan sans plus de commentaires.

Des quartiers entiers ont fait l'objet d'ordres d'évacuation avant d'être intégralement rasés par l'armée israélienne au sud du Liban. Les soldats israéliens ont posé des tonnes d'explosifs dans le village de Mhaibib et déclenché à distance, le 16 octobre 2024, leur explosion simultanée, transformant le village entier en champ de ruines. Seul Le Monde relaie dans une vidéo ces informations, sans un mot concernant la possible illégalité de ces destructions généralisées. Le New York Times apporte l'éclairage le 30 octobre 2024 d'un juriste selon lequel le droit international n'autorise pas à détruire des zones entières sans distinguer les structures civiles et militaires ; la question n'éveille pas l'intérêt des médias français.

Les experts de l'ONU écrivent : « Israël ne peut pas utiliser les crimes des groupes armés non étatiques pour justifier ses propres atrocités au Liban, notamment les actes de violence destinés à répandre la terreur parmi les civils et la guerre sans discrimination. Agir ainsi équivaudrait à une punition collective, une autre grave violation du droit international ». Propos demeuré sans écho dans la presse française.

Discours dominant

Voici quelques types de discours sur la guerre au Liban diffusés dans les journaux français réputés sérieux - si l'on évite ceux, à droite et à l'extrême droite, dont le parti pris pro-israélien est considéré comme notoire :

1.Les médias déroulent un récit compassionnel montrant des victimes libanaises plongées dans le malheur. Les médias savent bien, pourtant, que la compassion humanitaire fait partie du service après-vente des massacres occidentaux : on voit les Etats-Unis vendre à Israël les armes qui tuent les Gazaouis et former simultanément un pont humanitaire pour venir en aide aux survivants. La compassion n'a jamais fait vaciller un tant soit peu la suprématie occidentale. On pourrait dire que tout au contraire, elle la conforte : elle est intégrée dans le marketing militaire. Les guerres en Afghanistan, en Irak, en Syrie, en Palestine ont eu droit à des traitements médiatiques similaires qui ont fait leurs preuves : les journaux ont augmenté leurs ventes sans rien changer à l'ordre mondial établi.

2.Les médias adoptent une approche pragmatique calée sur les conséquences supposées des agressions israéliennes. Ils mettent en garde, par exemple, contre les risques d'une "escalade". Ce discours froid contredit frontalement le récit compassionnel : il suppose qu'une agression militaire est acceptable si elle ne provoque pas d'escalade. L'invasion israélienne du Liban, nous a-t-on répété, "risque de provoquer en embrasement régional". Mais si l'embrasement régional n'a pas lieu, l'ennemi étant trop affaibli pour riposter - ou pour le dire autrement, si Israël réussit son coup -, alors, il n'y a plus d'objection à la violation de l'intégrité territoriale d'un pays, quand même des victimes civiles au Liban ont perdu la vie et leurs habitations ont été rasées.

3.Les médias relaient sans commentaire les déclarations d'hommes politiques israéliens et libanais. Un ministre libanais accuse Israël de crimes de guerre, apprend-on en lisant le journal ; le ministre libanais étant juge et partie, ses propos n'éclairent en rien les violations israéliennes du droit, à la différence de sources indépendantes que les journaux français se gardent de relayer, tant que le scandale n'a pas pris une ampleur "suffisante", tant qu'il est possible de le laisser sous le boisseau. Les Israéliens affirment viser les infrastructures militaires du Hezbollah ; même chose ; on n'a jamais vu un pays en guerre déclarer qu'il vise délibérément les civils. Relayer de tels propos sans fournir le moindre travail d'analyse critique et de vérification relève du degré zéro du journalisme.

Le droit international est très imparfait, il a été conçu pour protéger les intérêts des Etats les plus puissants. Les sanctions de violations du droit international sont bloquées par les Etats les plus puissants siégeant au Conseil de sécurité des Nations unies. Mais les médias français évacuent même le droit international et même les Nations unies.

Ah oui, une exception : les attaques israéliennes contre les soldats de la FINUL, qui ont blessé 13 Casques bleus ; les médias ont bien parlé, alors, de droit international ; la France fournit à la FINUL un contingent de 700 soldats.

Non application du droit international au Moyen-Orient

"Le Moyen-Orient est le tombeau du droit international", écrivait le juriste Serge Sur, interrogé sur la guerre à Gaza, alors que l'ONU alertait depuis plusieurs semaines sur un risque de génocide.

La question se pose de savoir qui participe à l'enterrement du droit international.

Une autre question est de savoir à qui profite cet effacement du droit. Qui a le plus à y gagner ? Le Hezbollah est déjà déshonoré aux yeux de l'opinion publique française, dire qu'il commet des crimes de guerre est peut-être plus exact que de parler d'"organisation terroriste", mais n'aggrave pas les charges qui pèsent contre lui - ce serait plutôt le contraire, dans la mesure où l'on utilise pour lui la même terminologie juridique que pour des Etats reconnus. En l'absence de droit prévaut le triomphe de la force, et il n'est pas difficile de déterminer qui a intérêt à imposer une loi unique, celle du plus fort.

Note

(1) Voir par exemple Rafael Bustos (2007) "Les violations du droit international humanitaire dans le conflit de l'été 2006", dans Franck Mermier et Elisabeth Picard (dir.), Liban, une guerre de 33 jours. ( p. 219 -226 ). La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.picar.2007.01.0219.

******

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Guerre contre le Liban : Evacuations forcées, frappes aériennes et crise humanitaire sans précédent

Dans un contexte de chaos et de frappes brutales et intenses, l'armée d'occupation israélienne a lancé hier un nouvel appel à la population libanaise pour évacuer certaines (…)

Dans un contexte de chaos et de frappes brutales et intenses, l'armée d'occupation israélienne a lancé hier un nouvel appel à la population libanaise pour évacuer certaines zones de Baalbeck, région à l'est du Liban.

Tiré d'El Watan.

Ce territoire devient à nouveau le théâtre d'une violence accrue, rappelant les pires jours de la guerre de 2006, mais à une échelle bien plus sévère et avec des conséquences dramatiques pour les libanais.

Le porte-parole de l'armée d'occupation israélienne, Avichay Adraee, a fait mine d'avertir hier les résidants de la région de Douris, dans la vallée de la Bekaa, par des messages diffusés sur les réseaux sociaux. « Vous êtes situés près d'installations et d'intérêts du Hezbollah contre lesquels l'armée israélienne opérera prochainement », a déclaré Adraee, en ajoutant que les familles devaient évacuer d'urgence, s'éloignant de leurs habitations d'au moins 500 mètres dans les quatre heures. Des menaces lourdes pour des habitants déjà épuisés par les attaques israéliennes discontinues au cours des derniers jours.

Dans la ville de Baalbeck elle-même, la situation vire à la catastrophe. Des bâtiments résidentiels, des zones publiques et même des lieux proches des aires de jeux pour enfants ont été la cible d'attaques aériennes. Les monuments romains, inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO, risquent de subir des dommages irréversibles, menaçant l'héritage millénaire de la région. La cité antique est désormais en grande partie abandonnée, les habitants ayant fui dans des conditions précaires pour échapper aux bombes.

Les autorités libanaises ont appelé l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) à protéger Baalbeck, ville millénaire contre les menaces de l'entité sioniste de la bombarder. Le ministre libanais de la Culture, Mohammed Wissam El Murtada, a annoncé sa demande officielle à la mission permanente du Liban auprès de l'Unesco à Paris pour « accélérer les actions de suivi » avec le directeur général de l'Unesco et les organismes internationaux concernés. « Toute trace de conscience dans le monde doit empêcher Israël de mettre à exécution ses menaces de bombarder la citadelle de Baalbek », a déclaré El Murtada, considérant que « ce patrimoine n'appartient pas seulement au Liban, mais à toute l'humanité ».

Dans les dernières 48 heures, plus de deux douzaines de villages dans la région nord-est du Liban ont été frappés par des raids israéliens. Les pertes humaines sont déjà élevées, avec des dizaines de morts et de blessés, et le bilan continue de s'alourdir. Bien que l'armée d'occupation israélienne prétende cibler ce qu'elle nomme des « sites militaires du Hezbollah », les habitants contestent ces allégations, affirmant que leurs maisons ont été réduites en ruines sans qu'aucune présence d'armement ne soit visible.

Les ordres d'évacuation et les frappes intensives ont provoqué un exode massif, déplaçant plus de 1,2 million de Libanais, selon les autorités libanaises, tandis que l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) dénombre au moins 842 648 déplacés internes. Cette crise se double d'un enjeu humanitaire majeur : les civils déplacés se retrouvent sans abri, sans accès à des soins de santé suffisants et dans des conditions de vie précaires, tandis que les écoles et autres centres d'accueil sont saturés.

Dans la vallée de la Bekaa, les nuits sont désormais synonymes d'angoisse. Farah Saifan, de l'ONG Islamic Relief, décrit des situations « littéralement cauchemardesques ». Les habitants, relate-t-elle, « ne savent pas ce qui se passe la nuit, ne sachant pas qui est attaqué ni où ». L'aide humanitaire peine à atteindre les zones les plus affectées, les routes étant soit détruites, soit rendues impraticables par l'intensité des bombardements israéliens.

Plus de 900 000 libanais déplacés

La crise touche également les travailleurs étrangers présents au Liban, parmi lesquels une grande majorité de Bangladais employés comme ouvriers ou travailleurs domestiques. Un travailleur bengalais est d'ailleurs mort hier sous les frappes israéliennes.

Les tensions entre Israël et le Liban ont, par ailleurs, été exacerbées par l'enlèvement d'un civil libanais. Identifié comme Imad Amhaz, un officier de la marine libanaise, il a été capturé par les forces d'occupation israéliennes à Batroun, selon l'agence nationale de presse libanaise (NNA).

D'après l'armée d'occupation israélienne, Amhaz serait un « responsable du Hezbollah », mais le gouvernement libanais conteste cette version et dénonce un acte de violation de souveraineté. Le Premier ministre libanais par intérim, Najib Mikati, a exigé que cette affaire soit portée devant le Conseil de sécurité des Nations unies.

Les observateurs internationaux notent que la situation actuelle dépasse en gravité celle de la guerre de la guerre de 2006, qui avait coûté la vie à 1191 Libanais et déplacé plus de 900 000 personnes. Cette fois, l'ONU estime que « la situation humanitaire au Liban a atteint des niveaux dépassant la gravité » de 2006. Le bilan des attaques israéliennes s'élève désormais à 2867 morts et plus de 13 000 blessés, des chiffres qui continuent de grimper.

« Les structures humanitaires sont également touchées », a déclaré Filippo Grandi, chef de l'agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), dans un message publié sur les réseaux sociaux. « Même fuir (et prendre soin de ceux qui fuient) devient difficile et dangereux à mesure que la guerre continue de se propager », a-t-il déclaré.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) indique que les frappes israéliennes ont entraîné la destruction de plusieurs infrastructures vitales, à commencer par les établissements sanitaires.

Depuis septembre, 36 attaques ont visé des établissements de santé, faisant au moins 85 morts parmi les personnels médicaux et des dizaines de blessés. Dans le sud du Liban, six premiers secours ont été tués lors de frappes sur Khiam, soulignant les risques élevés auxquels les travailleurs humanitaires sont confrontés.

Les femmes enceintes ont été gravement touchées par l'escalade de la violence, selon l'agence des Nations unies pour la santé sexuelle et reproductive (UNFPA). « L'intensification du conflit dans tout le pays a eu un impact sur plus de 11 000 femmes enceintes, et 1 300 d'entre elles devraient accoucher sous peu malgré des pertes massives en infrastructures et un système de santé à la limite de la vulnérabilité », selon l'UNFPA.

Amel Blidi

La Turquie demande un embargo sur les armes contre Israël

Signée par 52 pays et deux organisations, demandant l'arrêt de la fourniture et de la livraison d'armes à Israël, a annoncé hier le ministre turc des Affaires étrangères. « Nous avons écrit une lettre conjointe appelant tous les pays à cesser la vente d'armes et de munitions à Israël. Nous avons remis cette lettre, qui compte 54 signataires, à l'ONU le 1er novembre », a affirmé Hakan Fidan lors d'une conférence de presse à Djibouti, où il s'est rendu pour une réunion du Partenariat Turquie-Afrique. « Nous devons répéter à chaque occasion que vendre des armes à Israël signifie participer à son génocide », a ajouté M. Fidan, qui a précisé que la lettre est « une initiative lancée par la Turquie ».

La lettre a été signée par 52 pays, dont l'Arabie Saoudite, le Brésil, l'Algérie, la Chine, l'Iran et la Russie, et deux organisations, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique. Mi-octobre, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, avait appelé les Nations unies à décréter un embargo sur les armes destinées à Israël, qui serait, selon lui, une « solution efficace » pour mettre fin au conflit dans la bande de Ghaza."

******

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Israël rêve d’un « nouveau Moyen-Orient », mais à quelle réalité se heurtera-t-il ?

5 novembre 2024, par Lina Kennouche — , , ,
En septembre dernier, l'engagement du premier ministre israélien dans un conflit militaire de haute intensité sur le terrain libanais prenait pour prétexte la volonté d'« (…)

En septembre dernier, l'engagement du premier ministre israélien dans un conflit militaire de haute intensité sur le terrain libanais prenait pour prétexte la volonté d'« isoler Gaza du Liban ». Or la poursuite de la guerre, de l'aveu même de Benyamin Nétanyahou, vise aujourd'hui à changer l'équilibre des forces régionales pour transformer la réalité stratégique du Moyen-Orient.

Tiré de The conversation. Légende de la photo : Benyamin Nétanyahou s'exprime devant une carte du Moyen-Orient lors d'une conférence de presse à Jérusalem le 4 septembre 2024. Abir Sultan/Pool/AFP

Depuis le 23 septembre, la confrontation entre le Hezbollah et l'armée israélienne s'exacerbe. Le conflit a pris un tournant avec l'intensification des frappes dans le sud du Liban et la banlieue sud de Beyrouth après que Nétanyahou ait fermement rejeté l'option d'un cessez-le-feu. Les récents développements et la rhétorique officielle israélienne accréditent l'idée que Tel-Aviv ne cherche plus uniquement à mettre en œuvre une politique d'élimination du Hezbollah, mais bien à changer le statu quo régional.

Reprenant à son compte la rhétorique des néoconservateurs américains, le premier ministre israélien a dévoilé son ambitieux projet de « nouveau Moyen-Orient ». Comme le constate avec lucidité l'ancien ministre libanais et ex-diplomate de l'ONU Ghassan Salamé :

  • « L'appétit vient en mangeant. […] L'objectif peut avoir été au départ uniquement de dégrader autant que possible le stock d'armes du Hezbollah – notamment les 600 à 700 missiles de longue portée que les Israéliens pensaient en sa possession – et de pouvoir ramener chez eux les habitants de Haute Galilée. [Mais forts de leurs succès tactiques et de l'inexistence d'une pression internationale ou arabe], les Israéliens s'enhardissent ».

Volonté de reconfiguration des alliances stratégiques

En effet, il ne s'agit plus pour Israël de réduire drastiquement les capacités du Hezbollah avant de l'expulser du Sud-Liban, mais de démanteler le réseau d'alliances tissé par l'Iran pour bâtir un nouveau Moyen-Orient débarrassé de l'influence de Téhéran.

Dans cette perspective, Israël cherche également à imposer des conditions politiques qui compromettent tout projet d'État palestinien. Plusieurs ministres ont appelé à une recolonisation de Gaza, certains réclamant même l'expulsion des Palestiniens en dehors des frontières israéliennes.

Cette nouvelle configuration régionale, où Israël apparaîtrait comme une puissance dominante, requiert également la construction d'alliances régionales avec les pays arabes, en particulier les États du Golfe, y compris l'Arabie saoudite, dans une sorte de prolongement des accords d'Abraham (traités de reconnaissance mutuelle et de normalisation des relations signés en 2020 entre Israël et plusieurs États arabes notamment les Émirats arabes unis et le Bahreïn).

Enfin, comme le soulignent certains commentateurs, pour renforcer significativement sa posture de dissuasion, Israël pourrait envisager « le redécoupage des frontières ou leur sécurisation de manière à empêcher les menaces directes, qu'elles proviennent de Gaza, du Liban ou de la Syrie ».

Une ambition qui remettrait en cause le soutien des États-Unis ?
Pour concrétiser ce projet de « Nouveau Moyen-Orient », Tel-Aviv compte sur le soutien des États-Unis, qui ont jusqu'à présent maintenu un engagement significatif à ses côtés. En effet, durant des années, Washington a limité les moyens de défense de l'armée libanaise, obérant la capacité du pays du Cèdre à dissuader les atteintes directes à son intégrité territoriale.

De surcroît, les États-Unis ont apporté un appui militaire sans faille à Israël depuis le début de la guerre à Gaza, puis au Liban. La récente décision américaine de livrer un système antimissile avancé qui endiguerait la menace balistique iranienne – et d'envoyer sur le terrain une centaine de militaires chargés de le faire fonctionner – est un nouvel exemple probant de cet engagement. Pour autant, si à l'heure actuelle il n'existe pas de découplage stratégique entre les intérêts de Washington au Moyen-Orient et ceux d'Israël, soutenir Benyamin Nétanyahou dans sa volonté de remodeler la région peut être un pari hasardeux. Pour plusieurs raisons.

Éradiquer le Hezbollah : un objectif voué à l'échec ?
Premièrement, si certains observateurs, comme Olivier Roy, soulignent « un effondrement des capacités militaires de la coalition anti-Israël », notamment celles du Hezbollah, en raison des succès tactiques israéliens qui auraient « brisé la chaîne de commandement du haut en bas, obérant la capacité de faire la guerre », l'âpreté des combats terrestres dans le sud indique qu'une telle analyse doit être largement nuancée.

Pour entamer les capacités militaires du Hezbollah, la campagne de frappes en profondeur s'est doublée d'actions terrestres. Or, à cet égard, il convient d'observer que, jusqu'à présent, l'armée israélienne n'a pas été en mesure de réaliser une véritable percée dans le sud du Liban. Les incursions visant à déloger des combattants préparés aux contraintes d'une guerre d'attrition prolongée restent limitées et sont souvent suivies d'un repli. Par ailleurs, le Hezbollah a récemment démontré que l'élimination d'une partie de sa direction n'a pas entamé sa capacité à tirer des missiles vers le nord d'Israël.

Pour Olivier Dujardin, chercheur associé au Centre français de Recherche sur le Renseignement et expert militaire :

« Si la direction unifiée du Hezbollah est affaiblie, la capacité tactique des cellules, elle, reste entière. »

Il souligne par ailleurs que les Israéliens sont confrontés à un problème majeur :

« Leurs troupes ne sont pas en nombre infini. Ils ont des forces mobilisées à Gaza et en Cisjordanie et avec les troupes restantes, ils mènent leur offensive au Liban : ils ont donc un problème de volume. Plus vous étendez le territoire conquis, plus vous diluez vos forces jusqu'au moment où la balance bascule. C'est-à-dire que la densité de forces devient insuffisante par rapport à l'adversaire. »

En outre, il rappelle que tout objectif d'éradication du Hezbollah est irréaliste.

« On ne détruit pas une organisation comme le Hezbollah. Même l'élimination de tous ses membres n'engendrerait pas sa disparition parce que la raison et les conditions qui président à son existence sont toujours d'actualité. Lorsque vous affrontez une organisation comme le Hezbollah, qui peut compter 50 000 ou 100 000 combattants selon les sources, et que vous décapitez des têtes, subitement vous avez affaire à une myriade de cellules qui vont mettre un certain temps à se réunifier, mais cela se produira en fin de compte […]. Les Israéliens achètent du temps pour quelques semaines ou quelques mois uniquement. »

Les risques d'un conflit ouvert avec l'Iran
Deuxièmement, l'hypothèse défendue par Olivier Roy selon laquelle le régime iranien est actuellement dans l'impasse car « il peut lancer une campagne terroriste à l'extérieur, mais cela ne fera que renforcer le soutien occidental à Israël [et que sa bombe nucléaire] heureusement, n'est pas opérationnelle » est remise en cause par d'autres, comme Arash Reisinezhad, qui estiment au contraire que les frappes de représailles lancées par l'Iran le 1ᵉʳ octobre inaugurent une nouvelle ère, dans la mesure où elles illustrent à la fois le développement et la modernisation des capacités balistiques iraniennes, et introduisent une équation de puissance aux conséquences stratégiques majeures.

Téhéran, en frappant directement le territoire israélien et en prenant pour cible un État doté de l'arme nucléaire, a affiché au grand jour sa politique de dissuasion. La riposte israélienne du 26 octobre a d'ailleurs été relativement modérée, sous la pression de Washington, ce qui pourrait indiquer que Tel-Aviv ne souhaite pas aller, au moins dans l'immédiat, jusqu'à une confrontation de grande envergure avec la République islamique.

En septembre dernier, l'engagement du premier ministre israélien dans un conflit militaire de haute intensité sur le terrain libanais prenait pour prétexte la volonté d'« isoler Gaza du Liban ». Or la poursuite de la guerre, de l'aveu même de Benyamin Nétanyahou, vise aujourd'hui à changer l'équilibre des forces régionales pour transformer la réalité stratégique du Moyen-Orient.

Reconfigurer le Moyen-Orient n'entre pas dans les intérêts directs de Washington
Ainsi en reprenant à son compte une rhétorique datant des années George W. Bush sur la reconfiguration du Moyen-Orient, Benyamin Nétanyahou s'inscrit dans l'approche des néoconservateurs américains qui avaient, un temps, caressé l'espoir de remodeler la région.

Le premier ministre israélien oublie que les États-Unis se trouvaient alors à l'apogée de leur puissance… et ont tout de même échoué dans cette entreprise. En outre, appuyer cette approche maximaliste ne ferait que détourner Washington de sa préoccupation stratégique majeure, à savoir la Chine.

Pour le colonel Olivier Passot, chercheur associé à l'Institut de Recherche stratégique de l'École militaire (IRSEM), les États-Unis seraient plutôt frileux à l'idée de s'engager dans un tel projet :

« Donald Trump est certes un grand soutien de Nétanyahou mais, par principe, il n'est pas favorable aux interventions américaines à l'extérieur. Même Kamala Harris ne me semble pas adhérer à l'idée d'une réhabilitation du rôle des États-Unis comme gendarme du monde. Aujourd'hui, il y a certes une majorité américaine sensible à la cause israélienne qui souhaite que les États-Unis participent à cette défense. Mais je ne crois pas que pour eux, l'idée de remodeler le Moyen-Orient soit un leitmotiv. Après leur expérience désastreuse dans la région, ils ont bien compris que c'est une mauvaise idée d'essayer de changer les régimes. »

Pour résumer, le débordement de la guerre contre Gaza sur le terrain libanais, qui a débuté par une longue campagne de frappes aériennes, prend désormais une dimension régionale. En dépit d'une asymétrie conventionnelle et nucléaire, l'Iran a démontré, lors de l'attaque du 1ᵉʳ octobre, sa capacité à saturer la défense antiaérienne en n'utilisant qu'une partie minime de ses missiles. Et une éventuelle riposte israélienne plus intense que celle du 26 octobre pourrait, par ailleurs, accélérer le projet iranien de se doter d'une force de dissuasion nucléaire.

Ainsi, le risque d'exacerbation de la confrontation est bien réel. Les États-Unis, s'ils appuient le projet de remodelage de la région voulu par Benyamin Nétanyahou, s'engageraient dans un engrenage irréversible.

Lina Kennouche, Docteur en géopolitique, Université de Lorraine

******

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

France Manifestation urgence Palestine-Liban article

5 novembre 2024, par Omar Haddadou — , ,
Le drame au Proche-Orient est entré dans sa phase apocalyptique. Le temps joue-t-il en faveur de l'extermination, menée tambour battant, par Netanyahou, l'assentiment de Biden (…)

Le drame au Proche-Orient est entré dans sa phase apocalyptique. Le temps joue-t-il en faveur de l'extermination, menée tambour battant, par Netanyahou, l'assentiment de Biden et des Occidentaux ? A Paris, ce dimanche 3 novembre, Palestiniens et Libanais (es) prenaient part au cortège de la mobilisation.

De Paris, Omar HADDADOU

Un slogan à marquer les esprits !

A Paris, retour en force des manifestants (es) ce dimanche pour la marche entre République et Place Clichy. Le premier fait marquant à retenir notre attention, est cette clameur de la foule :

« Et l'Algérie a vaincu, la Palestine vaincra ! » « Et le Vietnam a vaincu, le Liban vaincra ! » « Et l'Afrique du Sud a vaincu, l'Irak vaincra ! ». Sur les murs, des affichettes collées, dénoncent les génocides perpétrés dans les territoires occupés en Palestine, au Liban et autres pays du Proche-Orient. Mais aussi le mutisme et la complicité des Occidentaux, condamnés par un slogan frappant « Mort aux complices ! »

Puisant dans sa force vocale, la Représentante d'URGENCE Liban-Palestine, brosse un tableau funeste de la situation. Elle s'en prend virulemment à l'occupant : « L'entité ennemie ne se contente plus du génocide en cours à Gaza, au Liban en détruisant des maisons, des hôpitaux, incendiant des champs, tuant des enfants, déplaçant des familles, elle s'oriente désormais vers la destruction de la mémoire de nos peuples. Les peuples palestinien et libanais n'ont pas beaucoup d'options devant eux. C'est la reddition ou la Victoire ! Nous n'avons le choix que de résister ! Et nous allons certainement gagner ! »

Un activiste distribue des rapports chiffrés dont un fait état de « 120 000 tonnes d'armes européennes et américaines livrées ». De vive voix, il interpelle la foule : « Les études montrent que les Américains sont les architectes de ce génocide et tentent de nous mentir sur la volonté d'un cessez-le feu ».

Billal est palestinien. Lui parler en arabe, c'est le transposer dans son élément. Il répond aimablement à notre question : « Je suis de Gaza, mais vis en Belgique dans un foyer depuis quelques semaines, moi et mes deux frères dont le benjamin a 14 ans. Je suis écœuré par les Européens. On est entassés dans une pièce exiguë. On pensait obtenir une réponse favorable pour le statut de réfugiés ; il n'en est rien ! Ma famille est à Khan Younes et vit le cauchemar des bombardements. J'étais en contact avec elle par téléphone. C'est moi qui la prenais en charge financièrement. Mais je n'ai plus d'argent. J'ai peur des mauvaises nouvelles. Vous avez d'autres questions ? »

Le Gazaoui nous salue chaleureusement, arrange son keffieh et rejoint, d'un pas hardi, le cortège qui lutte pour la souveraineté de son pays la Palestine.

Karim et son épouse, un jeune couple libanais, vivent à Paris mais leur cœur est à Beyrouth où vit toute la famille. Le syndrome de la guerre a affecté des proches. Ils ne cachent pas leur hantise et leur souffrance. La femme décrit le calvaire en termes concis : « Nous vivons l'enfer. Pas de toit, pas de nourriture, pas d'eau. La mort ! La mort partout ! Incha Allah, nous vaincrons ! ».

Même éplorement chez Karim : « Une vie ténébreuse ! Des milliers de victimes, femmes, enfants, personnes âgées. La situation sanitaire catastrophique. Hôpitaux rasés…Le silence de la France est décevant ! »

Plus de 41 000 morts à Gaza depuis le 7 octobre 2023 et 3000 au Liban dont 127 enfants. L'élection américaine nous réserve-t-elle un monde désarticulé avec des belligérances dramatiques ?

Pour Macron, le ticket gagnant serait déjà acquis !

Pas pour les BRICS + qui le prennent en étau !

O.H

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Sur fond génocidaire, l’enjeu de la fascisation de l’hégémonie mondiale

5 novembre 2024, par Marc Bonhomme — , ,
Dans une semaine le jour des élections étatsuniennes sera passé… et nous ne serons vraisemblablement pas qui sera le prochain président des ÉU à moins d'une heureuse surprise à (…)

Dans une semaine le jour des élections étatsuniennes sera passé… et nous ne serons vraisemblablement pas qui sera le prochain président des ÉU à moins d'une heureuse surprise à la Nouveau Brunswick où l'unilingue Premier ministre réactionnaire a été inespérément battu à plate couture. Ce sera plutôt au centuple une situation à la Colombie britannique où il a fallu attendre plus d'une semaine, et ce n'est pas encore tout à fait clair, pour savoir que le réactionnaire parti Conservateur à la Poilièvre avait raté de peu la majorité. Et encore là, ce parti a respecté les règles du jeu de la démocratie parlementaire.

30 octobre 2024

Ce ne sera pas le cas des Républicains de Trump qui promet de balancer pardessus bord cette démocratie bourgeoise qu'il a déjà tenté de renverser le 6 janvier 2021 heureusement en amateur… ce qu'il n'est plus ou du moins beaucoup moins. Comme l'affirme le militant et analyste marxiste Dan La Botz au sujet du « Projet 2025 », programme préparé par ses acolytes :

L'Union américaine pour les libertés civiles [ACLU], qui défend depuis longtemps nos droits, l'a qualifié [Projet 2025] de « feuille de route pour le remplacement de l'État de droit par des idéaux de droite ». La démocratie américaine n'est pas parfaite, loin s'en faut, mais s'il y a des abus, nous disposons toujours, dans l'ensemble, de droits démocratiques fondamentaux et de libertés civiles. Comme l'explique l'ACLU, le Projet 2025 propose de réorganiser le pouvoir exécutif et de l'utiliser pour limiter davantage l'avortement ; de cibler « les communautés d'immigrants par des déportations massives et des raids, en mettant fin à la citoyenneté de naissance, en séparant les familles et en démantelant le système d'asile de notre nation » ; d'accroître le pouvoir de la police et de réprimer les manifestations sociales ; de limiter l'accès au vote ; de censurer les discussions sur la race, le genre et l'oppression systématique dans les écoles et les universités, et de faire reculer les droits des personnes transgenres, entre autres choses. Le Projet 2025 éliminerait également des dizaines de milliers de fonctionnaires fédéraux et les remplacerait par des personnes nommées pour des raisons politiques et fidèles au président. Il constitue la première étape du démantèlement de la démocratie américaine et de la création d'un gouvernement autoritaire. Il débutera avec l'élection de Trump ou sa prise de pouvoir par un coup d'État. (Dan La Botz, The Dangerous American Election, ESSF, 7/10/24)

Le journal « Liberal » étatsunien par excellence, le New York Times, va dans la même direction :

Donald Trump a fait preuve de plus d'hostilité envers la démocratie américaine que n'importe quel autre président dans l'histoire du pays. Il a tenté de renverser le résultat d'une élection. Il célèbre la violence politique. La liste est longue, et elle est désormais familière. Une question centrale concernant un second mandat de Trump est de savoir comment cette hostilité pourrait se manifester. Le système politique du pays a survécu à son premier mandat, après tout, et de nombreux Américains se demandent, à juste titre, dans quelle mesure un second mandat serait différent. Cela pourrait vraiment être différent. […] M. Trump est aujourd'hui bien mieux placé pour atteindre ses objectifs. Ses collaborateurs passent au crible la loyauté des candidats à un poste, en essayant d'exclure les républicains de l'establishment qui pourraient s'opposer à ses souhaits. Le Congrès et le pouvoir judiciaire lui seront probablement plus favorables qu'ils ne l'étaient il y a huit ans.

[Voici] les principaux moyens par lesquels Trump pourrait saper les traditions démocratiques : Il existe au moins six moyens majeurs par lesquels Trump pourrait affaiblir la démocratie américaine :

1. Poursuivre ses détracteurs. M. Trump a promis d'utiliser le ministère de la justice pour punir ses opposants politiques s'il redevient président, y compris avec des « peines de prison de longue durée », comme il l'a écrit en ligne. Traditionnellement, les présidents ne s'immiscent pas dans les affaires pénales. Mais c'est un choix ; un président a le pouvoir de donner des ordres au ministère de la justice. Au cours de son premier mandat, M. Trump a demandé l'ouverture d'enquêtes sur au moins dix personnes, parfois au détriment de leur vie, comme l'a montré mon collègue Michael Schmidt. M. Trump pourrait ordonner davantage d'enquêtes au cours de son second mandat, compte tenu de ses plans de recrutement. […]

2. Faire taire les critiques par d'autres moyens. Donald Trump pourrait également tenter d'utiliser ses pouvoirs réglementaires pour influencer le discours public. Il a suggéré que NBC, MSNBC et CBS méritent de perdre leur licence de diffusion en raison de leur couverture critique de sa personne. Il a parlé de punir Amazon parce que son fondateur, Jeff Bezos, est propriétaire du Washington Post. Ces commentaires font écho aux campagnes de réduction au silence menées par des dirigeants étrangers tels que Viktor Orban en Hongrie et Narendra Modi en Inde […].

3. Récompenser les alliés et les donateurs de la campagne. Trump, comme l'a rapporté le Times, « fait parfois des promesses explicites sur ce qu'il fera une fois qu'il sera au pouvoir, un niveau d'explicitation à l'égard des industries individuelles et d'une poignée de milliardaires qui a rarement été
vu dans la politique présidentielle moderne ». Les industries du pétrole et du vapotage - et peut-être Elon Musk - semblent susceptibles d'en bénéficier.

4. Remplacer les employés fédéraux par des loyalistes. À la fin de son premier mandat, M. Trump a publié un décret qui lui donnait le pouvoir de licencier et de remplacer des dizaines de milliers de fonctionnaires fédéraux, notamment des économistes, des scientifiques et des experts en sécurité nationale. Ce décret aurait considérablement augmenté le nombre de personnes nommées pour des raisons politiques, qui s'élève aujourd'hui à environ 4 000. Le président Biden a annulé ce décret. Il est vrai que l'on peut faire valoir qu'un tel décret favorise la démocratie en faisant en sorte que la main-d'œuvre fédérale soit le reflet du président élu. Mais ces mesures risquent également de priver le gouvernement de l'expertise non partisane qui permet de relier la politique à la réalité. Si l'on ajoute à cela les nombreuses promesses antidémocratiques de M. Trump, le licenciement en bloc d'employés fédéraux pourrait lui permettre d'utiliser le gouvernement pour satisfaire ses caprices personnels.

5. Saper les politiques précédemment adoptées. Plutôt que d'essayer d'abroger les lois auxquelles il s'oppose, Donald Trump et ses alliés ont suggéré qu'il pourrait simplement « saisir » des fonds, c'est-à-dire ignorer les lois que le Congrès a précédemment adoptées. Un exemple : Il pourrait essayer de bloquer les fonds destinés aux énergies propres.

6. Refuser de transférer le pouvoir pacifiquement. Trump et son colistier, JD Vance, ne reconnaissent toujours pas que Biden a battu Trump en 2020. Trump promet même de gracier certains des émeutiers qui ont attaqué le Congrès lorsqu'il s'est réuni pour certifier les résultats le 6 janvier 2021. Cette combinaison suggère qu'un transfert de pouvoir a eu lieu en 2021 uniquement parce que suffisamment de Républicains ont tenu tête à Trump. Et il est possible qu'ils ne le fassent plus à l'avenir. […]

Je sais aussi que certains démocrates diront que la liste est trop courte et qu'elle devrait inclure les politiques potentielles de M. Trump en matière d'avortement, d'immigration, de changement climatique, etc. Mais il convient de faire la distinction entre les différends politiques et la démocratie elle-même. Il n'y a rien d'intrinsèquement anti-démocratique à réduire les réglementations environnementales, à autoriser les États à restreindre l'accès à l'avortement ou à expulser les personnes entrées illégalement dans le pays. Les Démocrates peuvent faire valoir que ces politiques sont mauvaises, et les électeurs peuvent décider qui a raison. Les électeurs peuvent également changer d'avis si ces politiques échouent. Les attaques contre la démocratie sont différentes. Si la démocratie s'effondre, le système politique peut perdre sa capacité d'autocorrection.

En savoir plus sur Trump –
• Une deuxième administration Trump élargirait probablement le pouvoir présidentiel et réduirait l'indépendance des agences fédérales, y compris la Réserve fédérale.
• Trump affirme qu'il utilisera l'armée pour faire respecter la loi au niveau national, notamment pour lutter contre la criminalité dans les villes dirigées par les Démocrates.
• Ses liens avec des gouvernements étrangers et des entreprises réglementées feraient probablement de lui le président le plus conflictuel de l'histoire des États-Unis.
• Trump a tenté de prendre ses distances avec le projet 2025, mais il a de nombreux liens avec lui. Ce projet pourrait donner un aperçu de la manière dont il gouvernerait.
• Selon une analyse du Times, M. Trump a fait la promotion de fausses conspirations concernant des complots contre lui ou le peuple américain à plus de 300 reprises.
(David Leonhardt. The Morning, New York Times, 30/10/24)

On pourrait s'en rendre compte dès le moment du dépouillement des bulletins électoraux soit le 5 novembre ou peu après. Les occasions ne manqueront pas, comme l'explique une journaliste du Globe and Mail, pour créer le chaos nécessaire d'autant plus que la Cour suprême biaisée saura ramasser les morceaux en faveur de Trump à moins qu'auparavant il n'y est un coup :

Mardi soir [prochain], la possibilité de connaître le vainqueur est pratiquement nulle. En 2020, l'Associated Press a désigné 26 États dès la fermeture des bureaux de vote, et 19 autres dans les 24 heures. Dans plusieurs étapes clés, cependant, des marges très faibles et des règles de dépouillement compliquées ont retardé les résultats de plusieurs jours, voire de plusieurs semaines (souvenons-nous de la Géorgie). Joe Biden a été déclaré président le samedi suivant l'élection, ce qui a laissé le champ libre aux théories du complot, aux protestations et à la violence. […] La course à la présidence de 2024 s'annonçant tout aussi laborieuse, examinons quelques-uns de ces "swing states" pour voir ce qui pourrait retarder les appels.

Caroline du Nord (16 voix au collège électoral) Les habitants de la Caroline du Nord votent toujours tôt : Lors des élections de 2016 et de 2020, le vote par anticipation a été le moyen le plus populaire pour voter. L'intérêt est encore plus grand dans cette course - l'État a connu une participation record depuis l'ouverture des bureaux de vote il y a 12 jours. Jusqu'à présent, près de 2,7 millions de votes ont été exprimés en personne, soit plus d'un tiers des électeurs inscrits en Caroline du Nord, et les sites de vote anticipé resteront ouverts jusqu'à samedi prochain. Le hic, c'est que les bureaux de vote anticipé resteront ouverts jusqu'à samedi prochain : Les commissions électorales de Caroline du Nord pouvaient auparavant compter ces votes anticipés avant la fermeture des bureaux de vote le soir de l'élection, ce qui signifiait qu'elles pouvaient communiquer les résultats à 19 h 30. Mais une nouvelle loi oblige désormais les commissions électorales à attendre la fermeture des bureaux de vote pour commencer à dépouiller les bulletins. Dans le cadre d'une autre élection serrée - M. Trump a remporté la Caroline du Nord avec à peine 75 000 voix d'avance, soit sa plus petite marge de victoire dans un État - le résultat pourrait rester incertain pendant au moins une semaine.

Wisconsin (10 voix au collège électoral) Si les mots « vote dumps » vous évoquent quelque chose d'étrange, c'est parce que Trump a passé les quatre dernières années à s'insurger contre une vague de votes démocrates à Milwaukee - qui, selon lui, a permis à Biden de « voler » l'État. La vérité est moins ténébreuse : le Wisconsin est l'un des rares États à ne pas pouvoir traiter les bulletins de vote par correspondance avant le matin de l'élection. En 2020, la pandémie a provoqué une augmentation du nombre de ces bulletins, ce qui a retardé le dépouillement. Cette année, environ 450 000 bulletins ont déjà été renvoyés par la poste dans le Wisconsin. Un autre problème est que de nombreuses grandes villes de l'État, dont Milwaukee, bastion démocrate, doivent transporter leurs bulletins de vote par correspondance vers un lieu centralisé afin qu'ils soient dépouillés. Cela peut conduire à ce que des lots importants de votes soient rapportés d'un seul coup dans les premières heures qui suivent la fermeture des bureaux de vote, ce qui est précisément ce qui s'est passé en 2020. À la suite de ces théories du complot sur le « vote dump », l'assemblée législative du Wisconsin a envisagé un projet de loi autorisant les responsables locaux à traiter les bulletins de vote par correspondance la veille de l'élection, mais ce projet est mort au Sénat au début de l'année.

Pennsylvanie (19 voix au collège électoral) Comme le Wisconsin, la Pennsylvanie doit attendre le jour de l'élection pour commencer à compter ses bulletins de vote par correspondance. Ce n'était pas un problème majeur avant 2020, puisque seuls 4 % des votes de l'État avaient été envoyés par la poste. Mais en 2020, en raison des nouvelles règles et des craintes liées au COVID, ce chiffre est passé à 39 %. Il a fallu quatre jours entiers aux responsables pour passer au crible l'énorme arriéré de votes par correspondance avant de pouvoir déclarer M. Biden vainqueur de l'État (et, par conséquent, de l'élection). Cela n'a pas empêché les électeurs de Pennsylvanie de voter par correspondance : Jusqu'à présent, près de 1,3 million d'entre eux ont été envoyés pour la course de cette année. Mais combien d'entre eux compteront réellement le 5 novembre ? Cela dépend des décisions de 67 commissions électorales distinctes. Chaque conseil partisan établit ses propres règles concernant la notification aux électeurs des erreurs commises sur leurs bulletins de vote par correspondance - comme l'erreur de date ou le fait de ne pas l'avoir scellé dans une deuxième enveloppe - et la possibilité pour eux de bénéficier d'une seconde chance de voter. En 2020, les fonctionnaires électoraux de Pennsylvanie ont rejeté plus de 34 000 bulletins de vote par correspondance dans un État qui ne s'est démarqué que par 80 000 voix. La semaine prochaine, les experts prévoient encore plus de bulletins rejetés dans une course encore plus serrée, ce qui signifie que nous devrions tous nous préparer à une longue série de nuits d'angoisse.
Danielle Groen, Morning Update, Globe and Mail, 29/10/24

Cette semaine, la cavalcade Trump s'est payé un Madison Square Garden plein (20 000 personnes), en imitation d'une semblable assemblée nazie en 1939, où les vociférations anti-immigrants ont atteint un paroxysme jamais vu. Heureusement cette assemblée nauséabonde a été plus que neutralisée par un immense rassemblement (75 000 personnes) Démocrate à l'endroit même où Trump avait tenu son discours précédant l'assaut du Capitole. Ce succès est-il le reflet d'un retournement qu'annoncerait le sondage synthétique de ce jour, aux méthodes particulièrement sophistiquées, de The Economist. D'affirmer celui-ci : « La probabilité de victoire de Kamala Harris a augmenté de six points de pourcentage dans la mise à jour d'aujourd'hui, ce qui fait de la course une lutte acharnée » (The Economist, New polls reset the presidential race to a dead heat, 30/10/24).

Quelques anticapitaliste purs et durs auront quand même le réflexe orthodoxe de renvoyer dos à dos ces partis bourgeois, qui tous deux appuient la guerre génocidaire de l'État sioniste, au nom du rejet de la tactique du « moins pire » et en faveur du vote pour un parti de gauche afin de rester fidèle au principe de l'indépendance de classe. Dans le cas étatsunien, ces partis de gauche sont marginaux, sans compter qu'ils s'opposent au soutien armé de la lutte antiimpérialiste de libération nationale de l'Ukraine. Ce refus revient à faire le lit de l'impérialisme russe qui aussi se livre à une guerre génocidaire qui n'a pas l'ampleur de celle sioniste pour la simple raison que le peuple ukrainien et son gouvernement sont mieux en mesure de se défendre que le peuple palestinien. Paradoxalement, le parti Démocrate au moins demi-consent au soutien armé de l'Ukraine les deux pieds sur le frein. Alors, trêve de dogmatisme.

Marc Bonhomme, 30 octobre 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Élections américaines : qui finance les campagnes Trump et Harris ?

5 novembre 2024, par Chris Maisano — , ,
Alors que l'élection américaine s'annonce extrêmement serrée, les Américains sont plongés dans une attente angoissante. Les grandes entreprises ont quant à elles déjà voté à (…)

Alors que l'élection américaine s'annonce extrêmement serrée, les Américains sont plongés dans une attente angoissante. Les grandes entreprises ont quant à elles déjà voté à coup de dizaines de millions de dollars, en soutenant Donald Trump ou Kamala Harris, voire parfois les deux. Un coup d'œil aux principaux soutiens financiers des deux candidats donne un aperçu des secteurs qui seraient les plus favorisés par les Démocrates et les Républicains. Les travailleurs américains restent eux toujours aussi mal représentés… [1]

tiré de NPA 29

D'un certain point de vue, le dicton « on en a pour son argent » ne s'applique pas aux élections américaines. Si, dans ce pays, les sommes investies dans les élections sont énormes, leur montant exorbitant est rarement un gage de qualité. Le coût global des élections fédérales a certes augmenté entre chaque cycle électoral, mais les élections de 2020 ont marqué un bond particulièrement prodigieux dans les investissements politiques. Cette année-là, le total des sommes réunies pour les élections fédérales (à la fois les campagnes présidentielles et législatives) a atteint le montant stupéfiant de 14,4 milliards de dollars, soit plus du double des élections de 2016, qui étaient déjà les plus coûteuses.

Toutefois, si l'on se met à la place d'un milliardaire – et non pas d'un électeur moyen ou d'un petit donateur –, le vieil adage a encore un sens. Au début de l'été, certains médias ont rapporté que le milliardaire du secteur technologique Elon Musk, dont la fortune est estimée à plus de 250 milliards de dollars, prévoyait de verser 45 millions par mois à une nouvelle organisation pro-Trump nommée America PAC (Musk et Trump ont tous deux démenti cette information). À la mi-juillet, ce comité de soutien avait déjà récolté plus de 8 milliards de dollars, en grande partie auprès de titans de la Silicon Valley. Son principal bailleur de fonds est Joe Lonsdale, cofondateur avec Peter Thiel de la société d'analyse de données Palantir, qui produit des logiciels d'espionnage utilisés notamment par le Pentagone.

Thiel – qui finance une grande partie de l'appareil politique et intellectuel de la galaxie MAGA (Make America Great Again, ndlr) – doit quant à lui être assez satisfait de ses retours sur investissements politiques. En 2015, il a recruté J. D. Vance – fraîchement diplômé de la faculté de droit de Yale et bientôt auteur de best-sellers – dans sa société d'investissement de la Silicon Valley, Mithril Capital. Après le succès de son roman Hillbilly Elegy, Vance est retourné dans son Ohio natal pour commencer à préparer le terrain en vue de sa carrière politique. Il a alors pu compter sur pas moins de quinze millions de dollars mis à disposition par Thiel, ce qui lui a permis de remporter un siège au Sénat en 2022. Moins de deux ans plus tard, Donald Trump choisit Vance pour être son colistier en vue des élections de 2024, couronnant l'ascension fulgurante de ce prétendu populiste représentant une Amérique délaissée jusqu'aux sommets du Parti républicain. En cas de victoire de Trump aux élections de cet automne, il deviendrait le troisième plus jeune vice-président de l'histoire des États-Unis, à seulement quarante ans.
Opposée aux régulations, une part de Silicon Valley bascule en faveur de Trump

L'un des principaux enjeux de cette édition de la course aux soutiens financiers est le passage d'acteurs incontournables du secteur des technologies dans le camp républicain. Certes, Thiel en a toujours fait partie. Plusieurs personnalités de la Silicon Valley, qui avaient vigoureusement déploré l'élection de Trump en 2016 le soutiennent désormais. Dans leur rang figurent plusieurs investisseurs de premier plan, tels que Marc Andreessen et Ben Horowitz, mais aussi Chamath Palihapitiya et David Sacks, fidèles à leur poste d'animateur du podcast All-In tech et devenus d'importants chroniqueurs de droite.

Toutefois, le portefeuille de l'industrie technologique reste largement acquis au parti démocrate. Selon l'association pro-transparence Open Secrets, environ 80 % des dons provenant de cette filière depuis le début de la campagne électorale vont vers des candidats démocrates. Ce chiffre est néanmoins en baisse par rapport aux 90 % de 2020, et si le vote Trump-Vance prévaut en novembre, il est possible que le glissement – pour l'instant en pente douce – de la Silicon Valley vers la droite, s'accélère.

Cette dynamique s'explique à la fois par l'idéologie et l'intérêt individuel, bien que la frontière entre ces deux champs ne soit pas toujours facile à distinguer. La rhétorique haineuse envers le mouvement « woke » remplit la part idéologique : Musk a récemment annoncé la migration, de la Californie vers le Texas, des sièges de X et de SpaceX en signe de protestation contre les lois fédérées qui assurent une protection aux élèves transgenres. On soupçonne néanmoins que cette délocalisation ait autant à voir avec des intérêts fiscaux qu'avec une véritable conviction.

Un récent article du Financial Times a relaté les propos du cadre de Palentir Alex Karp, un gros bonnet de la Silicon Valley qui soutien encore le camp démocrate, mais dont la loyauté vacille : « Le politiquement correct est, au sein du parti, un énorme problème. Les démocrates ne peuvent pas encore en prendre la mesure ». De même, Karp regrette que « les gens qui innovent désertent » l'industrie à cause de la réglementation en vigueur, qui étoufferait selon lui les start-ups avant même qu'elles ne puissent décoller. Gary Gensler, président de la Securities and Exchange Commission (SEC), a en effet été une épine dans le pied pour les investisseurs en crypto-monnaies. D'après un fin connaisseur de la sphère des crypto-monnaies cité par le Financial Times, les grands investisseurs dans ces produits spéculatifs « ont pour priorité de le virer. Ils dépenseront tout ce qu'il faut pour y parvenir. »

Si le soutien d'une part de la Silicon Valley à Donald Trump fait les gros titres, ses principaux soutiens appartiennent surtout aux secteurs de la finance, des assurances et de l'immobilier. Selon Open Secrets, « le secteur financier est de loin le plus grand contributeur des campagnes des candidats et des partis à l'échelle fédérale », républicains et démocrates confondus, et il est de loin le plus grand contributeur de la campagne 2024 de Trump. Les dons à sa campagne en provenance du secteur des valeurs mobilières et de l'investissement dépassent ainsi les 200 millions de dollars. Un donateur, l'investisseur héritier de la fortune bancaire de sa famille, Timothy Mellon, représente à lui-seule la somme ahurissante de 125 millions de dollars (il a aussi offert 25 millions de dollars pour la campagne indépendante de Robert F. Kennedy Jr). Le secteur du pétrole et du gaz est le suivant sur la liste, avec 20,4 millions de dollars.

Si le soutien d'une part de la Silicon Valley à Donald Trump fait les gros titres, ses principaux soutiens appartiennent surtout aux secteurs de la finance, des assurances et de l'immobilier.

Les autres plus gros soutiens de Donald Trump, d'après les catégories d'Open Secrets sont le secteur de la santé privée (101 millions de dollars), le transport aérien (91,3 millions de dollars), le secteur manufacturier et de la distribution (14,1 millions de dollars). Trump attire également d'énormes dons de la part de particuliers qui se présentent sur le plan professionnel comme « retraités » (129,5 millions de dollars) ou appartenant à toutes sortes d'organisations d'obédience idéologique républicaine ou conservatrice (82 millions de dollars). Ces chiffres coïncident avec ce que nous savons du parti républicain d'aujourd'hui : ses principaux soutiens sont les tenants de l'idéologie conservatrice, les électeurs âgés, les industries extractives et manufacturières et la tranche la plus haute des 1 % les plus riches. Près de la moitié, en dollars, des dons destinés à Donald Trump proviennent seulement de quatre États : le Texas (15,6%), le Nevada (14,8%), le Wyoming (14,6 %) et la Floride (11,9%).

De Biden à Harris, une continuité chez les grands donateurs démocrates

Concernant la campagne de la vice-présidente Kamala Harris, celle-ci a d'abord hérité de la base de donateurs de Joe Biden, lorsque celui-ci s'est retiré de la course à la Maison Blanche. Comme pour les républicains, les dons aux démocrates reflètent les intérêts des filières économiques majeures – dont ceux du secteur des valeurs mobilières et de l'investissement, qui ont historiquement tendance à soutenir les deux camps pour s'assurer de conserver des soutiens dans tout le champ politique. En revanche, contrairement à Trump et à d'autres candidats du parti républicain, les candidats démocrates reçoivent d'importantes contributions de la part des syndicats. Sean O'Brien, le président du syndicat des camionneurs américains (les Teamsters), s'est certes vu accorder un temps de parole au pic d'audience lors de la Convention Nationale Républicaine, mais les syndicats restent fermement ancrés dans le camp démocrate.

Contrairement à Trump et à d'autres candidats républicains, les candidats démocrates reçoivent d'importantes contributions de la part des syndicats.

Les sempiternels débats au sujet du retrait de Biden cet été ont mis en lumière le réseau des grands donateurs démocrates. Bon nombre des méga-donateurs qui ont fait le plus de tapage pour pousser Biden vers la sortie étaient issus d'Hollywood, du monde du spectacle et des médias. George Clooney a été la personnalité la plus en vue de l'industrie cinématographique à exiger un changement de tête de liste, mais beaucoup de personnalités riches et puissantes dont le nom n'est pas connu de tous ont aussi participé au mouvement de protestation des donateurs. Selon un article du New York Times, un célèbre agent d'Hollywood a déclaré à Martin Heinrich, sénateur du Nouveau-Mexique : “Si vous n'appelez pas publiquement Biden à se retirer, je ne vous donnerai pas un centime”.

A ce jour, le secteur des communications et de l'électronique, qui rassemble les firmes de la télévision, du cinéma, de la musique et des télécommunications, représente 31,9 millions de dollars de dons à la campagne démocrate. Le secteur financier et assurantiel reste en tête avec 88,2 millions de dollars, devant le monde de l'éducation (40,5 millions de dollars), les avocats et cabinets juridiques (36,5 millions de dollars) et les professionnels de la santé (24,2 millions de dollars). Les deux plus importantes sources de dons à la campagne de Biden en juillet étaient les organisations d'idéologie démocrate ou libérale (217 millions de dollars), puis les retraités (102 millions de dollars). Les syndicats ont quant à eux donné environ 18,5 millions de dollars, ce qui représente plus que certains secteurs d'activité mais reste bien en-dessous les principaux soutiens sectoriels et idéologiques.

En dépit des gros titres, le capital de la Silicon Valley reste largement en faveur des démocrates. Deux des trois plus généreux donateurs de la campagne Biden-Harris, Greylock Partners et Sequoia Capital, sont des sociétés d'investissement de la Silicon Valley. Reid Hoffman, associé chez Greylock et important donateur démocrate, n'a jamais caché son mépris pour la présidente de la Commission Fédérale du Commerce (FTC), Lina Khan, qui a commis l'erreur d'appliquer la législation antitrust. Hoffman a récemment déclaré sur CNN : “L'antitrust, c'est bien. Déclarer la guerre ne l'est pas”. Le sort de Khan sous une potentielle administration Harris reste encore incertain, étant donné qu'elle bénéficie d'un fort soutien de la part des démocrates qui saluent sa ligne anti-monopole très stricte.

Les querelles intra-démocrates pour influencer Harris dans le choix de son entourage, ainsi que le large éventail de secteurs et d'intérêts qui compose sa base de donateurs, coïncident avec ce que nous savons du parti démocrate d'aujourd'hui et de ses principaux soutiens : les tenant de l'idéologie libérale, le secteur des médias et de la tech, les professionnels du droit, de l'éducation et de la santé, et les syndicats. À l'instar de Trump et des Républicains, la base des donateurs démocrates est fortement concentrée dans quelques États qui reflètent la répartition géographique de leur coalition. Près de la moitié (en dollars) des dons adressés à Joe Biden, puis à Harris proviennent de seulement quatre États des deux côtes : la Californie (21,6 %), le district de Columbia (12,8 %), New York (10,2 %) et le Massachussets (4,2%).

Le règne de l'argent

Bien sûr, il faut également étudier où va tout cet argent dans les faits et quelle est son influence sur l'issue des élections. Le lecteur ne sera pas surpris d'apprendre que la part du lion revient aux médias et à la publicité. La campagne Biden-Harris a beaucoup investi dans la guerre de la publicité. En juillet, 60 % de ses dépenses totales, soit près de 65 millions de dollars, étaient consacrées aux médias et à la publicité. Malgré un raz-de-marée publicitaire, la position du président Biden dans les sondages s'est détériorée au point qu'il a été écarté de la course. De plus, ces dépenses ont temporairement gâché l'avantage qu'avait la campagne de Biden en matière de collecte de fonds par rapport à celle de Trump. L'enthousiasme suscité par le retrait de Biden et la nomination de Harris dans le camp démocrate a cependant délié les portefeuilles : en juillet, la campagne d‘Harris a récolté la somme faramineuse de 310 millions de dollars dépassant amplement les 138,7 millions de dollars récoltés par Trump.

Le coût total des quatre derniers cycles d'élections fédérales a dépassé les 40 milliards de dollars.

Jusqu'à présent, le budget de la campagne de Trump a été plus équilibré. Si, pour lui aussi, les médias représentent le principal axe d'investissement, ils ne comptent que pour un quart du coût total de la campagne. Un montant presque équivalent a été dépensé en frais administratifs, ce qui inclut les coûts liés à l'organisation des grands rassemblements de Trump. Une agence événementielle, Event Strategies, a ainsi reçu soixante-quatre paiements de la part de la campagne du candidat républicain, pour un montant total de 8,1 millions de dollars.

Les dépenses de campagnes politiques constituent une économie à part entière. Les entreprises partisanes fournissent toute une série de services très lucratifs aux candidats, en amont et en aval des élections. Le coût total des quatre derniers cycles d'élections fédérales a dépassé les 40 milliards de dollars. Et encore, ce chiffre n'inclut pas les milliers de campagnes qui ont lieu à l'échelle des États fédérés et des municipalités, ni des référendums. Comme les résultats des élections sont connus d'avance dans la plupart des États, une grande partie de l'investissement est concentré dans un nombre restreint de territoires indécis, afin de les faire basculer, même de manière minime. La victoire de Trump en 2016 s'est ainsi jouée à 80.000 votes dans le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin, tandis que celle de Biden en 2020 reposait sur une marge de 44.000 votes en Géorgie, en Arizona et dans le Wisconsin…

40 % de l'ensemble des dons politiques émanent d'un groupe extrêmement restreint : le top 1 pour cent du top 1 pour cent.

Dans son ouvrage devenu incontournable, The Semisovereign People, paru en 1960, le politologue Elmer Eric Schattschneider a mis le doigt sur une réalité fondamentale de la politique américaine : « Le défaut du paradis pluraliste est que le chœur céleste y chante avec l'accent prononcé des classes supérieures ». Nous avons tous le droit de soutenir des candidats et des campagnes électorales, mais seuls quelques-uns sont en capacité de le faire à un degré qui garantisse la représentation de leurs intérêts dans le système politique.

40 % de l'ensemble des dons politiques émanent d'un groupe extrêmement restreint : le top 1 pour cent du top 1 pour cent. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il n'y a aucune différence significative entre les deux partis. Il y en a évidemment, notamment sur l'avortement et le respect des institutions. Pour les travailleurs américains cherchant à être représentés dans leurs intérêts de classe, les dons des syndicats en faveur des démocrates indiquent que cette option reste la moins pire. Mais à en juger par l'état de la société américaine, il est clair que le système politique des Etats-Unis met en œuvre sa propre version de la règle d'or : qui possède l'or dicte les règles.

[1] Article de notre partenaire Jacobin, traduit par Manuel Trimaille et mis à jour par William Bouchardon.

Chris Maisano 28 octobre 2024

https://lvsl.fr/

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Monique Chemillier-Gendreau : L’échec du droit international à devenir universel et ses raisons.

5 novembre 2024, par Monique Chemillier-Gendreau — ,
Union des fédéralistes européens. Colloque du 12 octobre 2024 Le monde d'aujourd'hui, devenu un village par la puissance des communications et du commerce, ne dispose (…)

Union des fédéralistes européens. Colloque du 12 octobre 2024

Le monde d'aujourd'hui, devenu un village par la puissance des communications et du commerce, ne dispose pourtant pas d'un droit commun à l'application effective. Le droit international élaboré au XXème siècle et les institutions alors mises en place, doivent aujourd'hui être considérées comme un échec.

28 octobre 2024 | tire du site Entre les lignes entre les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/10/28/monique-chemillier-gendreau-lechec-du-droit-international-a-devenir-universel-et-ses-raisons/

Ni le droit de la paix découlant de la Charte des Nations Unies, ni le droit humanitaire en cas de conflit armé résultant des Conventions de Genève de 1949 et de bien d'autres textes complémentaires réglementant les moyens de la guerre, ne sont respectés. De même la Déclaration universelle, les Pactes internationaux et les conventions contre le génocide, contre la torture ou contre l'apartheid, sont bafouées dans une contestation de plus en plus ouverte de l'universalisme.

Je vais ici analyser cette désaffection pour le droit international en distinguant les différentes formes qu'elle prend, puis je montrerai comment cette désaffection a son origine dans une contradiction interne au système international. Enfin, nous nous interrogerons sur les possibilités d'en sortir et je rejoindrai alors la pensée fédéraliste, objet de cette rencontre.

1- La désaffection pour le droit international est aujourd'hui générale.

Mais il y a la désaffection revendiquée et celle qui s'opère clandestinement.

La désaffection revendiquée vient de cette partie du monde qui n'a pas contribué à l'élaboration des normes aujourd'hui contestées. Je renvoie à ce propos aux travaux de Laurence Burgorgue-Larsen, notamment à sa conférence de 2023 à Aix-en-Provence où elle analyse comment l'universalisme des droits de l'homme est aujourd'hui rejeté dans un nombre grandissant de sociétés.

Il s'agit principalement des sociétés asiatiques qui développent des valeurs communautaires autour d'une profonde déférence à l'autorité, et cela au mépris de la liberté individuelle. Dans d'autres sociétés, notamment les sociétés musulmanes, les droits et libertés sont dictés par les préceptes de la religion. Enfin, l'Église orthodoxe a fait adopter en 2006, une Déclaration des droits et de la dignité de l'homme qui se pose en alternative à la Déclaration universelle.

Mais il y a aussi une contestation de l'universalisme du droit international de la part de groupes ou de mouvements situés en Occident. C'est le cas notamment des populations d'origine musulmane venues par les flux migratoires post coloniaux. Profondément religieuses, ces populations rejettent la sécularisation des sociétés où elles se trouvent. Il y a aussi des régimes européens, notamment d'Europe de l'Est qui contestent les systèmes démocratiques et les contrôles judiciaires constitutifs de l'État de droit. Ils agitent leur appartenance à la chrétienté pour justifier leurs dérives autoritaires et revendiquent une identité de chrétiens blancs.

Et puis il y a la désaffection clandestine, celle des gouvernements occidentaux eux-mêmes qui sont pourtant à l'origine de ce droit et se targuent de le promouvoir. Le discours officiel prétend à un strict respect de ce droit ce que les pratiques démentent. Donnons quelques exemples.

Les textes fondateurs du droit international, la Charte des Nations unies en 1945 et la Déclaration universelle des droits de l'homme en 1948 ont été créés par ls États occidentaux. L'Afrique sous domination coloniale n'avait alors pas de voix, ainsi qu'une grande partie de l'Asie et de l'Océanie. Les rédacteurs de ces textes avaient alors une volonté d'universalisme et de liberté au profit de tous, mais c'était à partir d'une certaine conception de la liberté, la leur.

Ils avaient proclamé le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, mais restèrent des colonisateurs s'opposant par des guerres sanglantes à la volonté des peuples de bénéficier de ce droit. La France mena ainsi la guerre d'Indochine, celle d'Algérie, la répression sanglante à Madagascar avec des violations massives des normes du droit humanitaire, comme l'usage du napalm ou de la torture. Les Pays-Bas, le Portugal ou le Royaume Uni pratiquèrent aussi des exactions contraires aux principes auxquels ils avaient solennellement souscrit par ailleurs. Les États-Unis se livrèrent de 1955 à 1975 contre le Vietnam à une guerre d'agression avec l'usage de l'agent orange, dont les effets meurtriers se font encore sentir cinq décennies plus tard. Les deux guerres menées contre l'Irak le furent en violation flagrante du droit international, y compris de l'interdiction de la torture, laquelle fut pratiquée notamment dans la tristement célèbre prison d'Abou Graïb.

Quant à Israël, ce pays, adossé étroitement au groupe des pays occidentaux, bafoue le droit international par son refus de reconnaître le droit du peuple palestinien à disposer de lui-même, par le mépris de l'interdiction du recours à la force, des traités sur les droits de l'homme et sur la non-discrimination, de l'interdiction de l'apartheid et de tout le droit humanitaire en cas de conflit armé. Ses alliés, notamment les États-Unis, sont complices par leur coopération militaire et financière. La paralysie du Conseil de sécurité est due à cette complicité. L'Union européenne pourrait activer l'article 2 de l'accord passé avec Israël et considérer que les violations des droits de l'homme commises par cet État justifient la suspension de l'accord de coopération, mais elle n'en fait rien. Les deux avis consultatifs rendus par la Cour internationale de justice en 2004 et récemment en février 2024, condamnent en termes clairs les politiques d'Israël, sont restés lettre morte.

Ajoutons encore que les États-Unis et la France ne reconnaissent pas la juridiction de la Cour internationale de justice et se dérobent ainsi à l'application du droit international et que la France n'a pas adhéré à la Convention des Nations unies sur le droit des traités. Son argument est qu'elle n'accepte pas la catégorie dite du jus cogens ou droit impératif général. Pourtant considérer qu'il y a des principes intangibles, ceux précisément de droit impératif général, auxquels on ne peut déroger même par traités, va dans le sens d'une consolidation du droit international.

Et les États-Unis n'ont adhéré ni à la Convention sur le droit de la mer (1982), ni à celle sur les droits de l'enfant (1989), ni au Traité d'interdiction des mines anti-personnels (1997), ni au Statut de Rome relatif à la Cour pénale internationale (1998) et ce ne sont là que quelques exemples. Les mêmes États-Unis ont refusé de s'incliner devant la décision de la Cour internationale de justice les condamnant contre le Nicaragua en 1986, ou devant celle par laquelle en 2004 la Cour Internationale de Justice (CIJ) leur imposait de ne plus exécuter les ressortissants étrangers n'ayant pas bénéficié de leurs droits consulaires. Malgré cette injonction, les exécutions ont continué au mépris du droit international.

Les États qui ont été des colonisateurs et ont été obligés par les peuples sous leur domination à leur rendre la liberté dans le grand mouvement déclenché dans les années 60, ont cependant tenté piteusement de maintenir une domination coloniale sur certains territoires. C'est ainsi que le Royaume Uni a, lors de la décolonisation de l'Ile Maurice en 1968, détaché de ce territoire certaines îles, les Chagos, qui en étaient la dépendance. Il a fallu un avis consultatif de la Cour internationale de justice en 2019 pour que cela soit dénoncé. Et aujourd'hui, cinq ans après que cet avis ait été rendu, le Royaume Uni accepte enfin d'en appliquer les dispositions, pas entièrement cependant, puisque l'un des îlots, Diego Garcia, reste soumis à un bail au profit des États Unis qui en ont fait leur principale base militaire dans l'Océan Indien. Et aujourd'hui, la France est engagée dans une répression très dure contre le peuple Kanak de Nouvelle-Calédonie et elle refuse à celui-ci des conditions de réalisation de son droit à disposer de lui-même conformes au droit international.

2 – Ces violations du droit international sont rendues possibles par une contradiction inhérente à ce droit lui-même.

La situation que je viens de décrire rapidement, est extrêmement inquiétante. En effet, une société dans laquelle le droit peut être manipulé ou contesté et où sa réalisation n'est pas contrôlée par un juge, est une société livrée au rapport de forces ce qui encourage la domination des plus forts. Mais il est vain de dénoncer cette situation, si on ne pousse pas plus loin l'analyse. En effet, elle n'a pu se développer que parce qu'il y avait un élément destructeur du droit international qui a permis aux États d'échapper aux normes qu'ils promouvaient en apparence. Aujourd'hui, cette situation se retourne contre eux, mais aux dépens de tout le système qui est ébranlé dans ses fondements.

De quoi s'agit-il ? Du fait que la Charte des Nations Unies affichait une volonté très inédite d'imposer aux États des règles de vie commune, notamment l'interdiction du recours à la force, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et tout le droit international dont la Charte encourage le développement. Mais parallèlement, la même Charte garantissait aux États le respect de leur souveraineté. Or, la souveraineté est un pouvoir originaire, au-dessus duquel il n'y a rien. Le souverain ne reconnaît de règles que celles auxquelles il accepte de souscrire et non pas celles qui lui seraient imposées malgré lui. Garantir les souverainetés, c'était admettre que les États souverains puissent se soustraire à l'application du droit international.

Le projet d'un droit international efficace, appliqué, et éventuellement sanctionné, n'est pas réalisable sans une mise en cause des souverainetés. Dès la création de la Société des Nations en 1918, Georges Scelle, professeur de droit international, a consacré tout son travail à mettre en lumière cette contradiction. Et aujourd'hui, je m'inscris dans cette tradition, mais dans le même isolement [1]. Suivre l'évolution de cette contradiction peut nous éclairer sur les raisons de cette situation.

Les États occidentaux, auteurs de la Charte, étaient soucieux qu'il n'y ait plus entre eux, parmi le cercle que formaient ces pays dits avancés, de possibilité de domination. Cette préoccupation était ancienne car elle avait déjà été l'objet des Traités de Westphalie qui avaient mis fin à la Guerre de Trente ans en 1648, puis du Congrès de Vienne après les guerres napoléoniennes en 1815. Les prétentions hégémoniques de l'Allemagne au XIXème et au XXème siècle avaient montré qu'un engagement politique n'était pas suffisant et qu'il fallait des mécanismes juridiques adaptés. Ce fut l'interdiction du recours à la force, principe cardinal de la Charte des Nations unies.

Mais les États qui eurent l'initiative de cette avancée dans l'édification d'un monde soumis au droit, n'ont pas été sincères. Ils ont utilisé leur souveraineté pour consolider des positions de domination. La preuve en est que le colonialisme ne fut pas banni par la Charte des Nations unies. Il ne le fut que plus tard sous l'effet des luttes de libération nationale des peuples dominés. Et durant la guerre d'Algérie, la France s'opposa à ce que les Nations Unies mettent cette guerre en débat en s'abritant derrière le fait, qu'à ses yeux, il s'agissait là d'une question relevant exclusivement de la compétence nationale.

Les peuples asservis s'emparèrent alors de la Charte comme d'une arme de libération et à partir du principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, ils en appelèrent au droit international pour se libérer. Mais la contradiction entre ce droit international et la souveraineté des États n'était pas dépassée pour autant. En effet, le seul débouché du droit des peuples à leurs yeux était de devenir des États souverains comme l'étaient les colonisateurs. Allant plus loin, ils revendiquèrent la plénitude de la souveraineté en exigeant une souveraineté économique, base à leurs yeux d'un nouvel ordre économique international. Mais celui-ci s'enlisa dans quelques discours à l'Assemblée générale des Nations unies.

À partir de là, les pays nouveaux venus dans la communauté des États, jouèrent le jeu du marché mondial et se retranchèrent derrière la souveraineté pour exercer une domination sur leurs propres peuples et s'engager dans une course à la domination dans l'espace international, comme la politique de la Chine en est l'exemple. Les peuples de ces pays ont été libérés du colonialisme, mais soumis à des régimes autoritaires, parfois sanglants.

Dans la phase actuelle, ces sociétés poussent leurs économies dans la voie d'un productivisme accéléré, particulièrement en Asie. Mais alors, le droit international est un obstacle. Il prétend imposer des règles en matière politique, sociale, environnementale, technique, qui sont autant de freins à la domination de ceux qui sont au pouvoir.

Il leur est facile de s'engouffrer dans la voie ouverte par ceux-là mêmes qui avaient fondé le droit international, mais s'était réservé de ne pas l'appliquer, pour en faire autant. Mais la différence essentielle, est que ce refus du droit international n'est plus clandestin, il est théorisé. Et le droit international est discrédité dans ses fondements mêmes. L'idée d'universalisme est contestée. L'Occident se trouve de ce fait dans une position très dégradée. Fortement concurrencé sur le plan technologique, industriel et commercial, il est déconsidéré dans ses valeurs pour les avoir lui-même trahies si souvent.

3 – Quelles sont les voies qui permettraient de revenir vers un droit commun à la société mondiale dans son universalité ?

Pour tenter de répondre à cette question difficile, Il faut d'abord se demander sur quelles valeurs communes, ce droit pourrait être édifié. Il est possible ensuite d'examiner à quelles conditions, institutionnelles et sociales, ce projet pourrait être mis en œuvre.

Sans entrer ici en détails sur la question des valeurs qui pourraient être communes à l'humanité dans son ensemble, je me bornerai à souligner que les valeurs véhiculées par l'Occident pour promouvoir un droit international universel ne sont pas à rejeter en elles-mêmes. En apparence, elles étaient porteuses de ce à quoi tous les humains aspirent, à savoir ne pas tomber sous la domination soit de puissances étrangères, soit de régimes internes qui asservissent leurs populations. Et les régimes qui les contestent, notamment la Chine, au nom d'un respect de l'autorité qui interdirait de critiquer les politiques d'État, ou les régimes théocratiques, comme le régime iranien ou celui d'Arabie Saoudite, qui veulent imposer à l'ensemble de la société des normes d'origine religieuse, connaissent des oppositions internes, plus ou moins muselées, mais qui témoignent des aspirations à la liberté de leurs peuples.

On peut en conclure que les aspirations au respect des personnes, de leur dignité et aux libertés de conscience, de pensée ou d'association sont partagées par tous les humains. Cela doit permettre de construire un socle commun de normes protégeant ces aspirations. Et tous les peuples, comme tous les individus, lorsqu'ils ont confrontés à un différend sur la réalisation de leurs droits, souhaitent disposer d'une instance judiciaire capable de trancher ce différend avec objectivité.

Mais pour retrouver une nouvelle force, et une nouvelle portée universelle, les valeurs contenues dans les grands textes du droit international doivent être remises en jeu, débattues et adoptées de nouveau dans des forums adaptés. Malheureusement, aujourd'hui, la chose semble bien lointaine. Il y faut en effet deux conditions absentes pour le moment : un groupe impulseur disposé à ne pas représenter des intérêts particuliers et venant nécessairement d'ailleurs que du sein des organisations internationales existantes et une opinion publique mondiale allant dans ce sens.

Ce renouveau d'un droit universel ne pourra pas venir de l'intérieur du système actuel par une simple réforme, car le système n'a plus de légitimité internationale. Le principe de domination validé par la Charte avec le régime exorbitant accordé à cinq États-membres est garanti perpétuellement. En effet, toute réforme du système ne peut se faire, selon les articles 108 et 109 de la Charte qu'avec l'accord des cinq membres permanents. Or ce sont eux les principaux responsables de la perte de crédibilité du droit international, par les incessantes violations auxquelles ils se sont livrés.

Aussi faut-il affronter la difficulté et pour tenter de construire autre chose, il faut nécessairement se situer en dehors du système actuel, lequel est inamendable. Il faut pour cela que des mouvements de la société civile du monde entier, organisent des groupes de travail pour réfléchir en commun à la manière de doter le monde d'un droit et d'institutions internationales permettant de contrer les dominations. Or pour contrer les dominations, il faut imaginer la société internationale fondée sur un principe non-hiérarchique.

Et la recherche d'une société non-hiérarchique est au cœur de la pensée fédéraliste. Il faut donc élargir la pensée fédéraliste afin que non seulement les sociétés nationales soient considérées comme des associations d'hommes libres, mais que la société mondiale soit organisée et garantie comme une association de peuples libres. Et les institutions dont cette société mondiale aura à se doter devront être imaginées de manière à entraver toute tentative par l'un de ces peuples ou un groupe d'entre eux, tendant à confisquer la place de l'universel au profit d'intérêts particuliers.

Cela suppose et c'est sans doute le plus difficile, une opinion publique mondiale convaincue de la nécessité d'un nouveau projet politique anti-hégémonique aussi bien comme nouvelle conception de la démocratie que comme base d'un nouvel universalisme. Parler de cela dans le contexte actuel apparaît comme très décalé par rapport aux réalités tant les opinions publiques sont fragmentées, préoccupées d'abord d'intérêts particuliers. Il est déjà difficile de construire des objectifs d'intérêt national, alors pourrons-nous élaborer des mouvements d'idées prenant en charge le principe même d'une société mondiale soumise au droit ? Cela semble aujourd'hui utopique. Mais l'utopie n'est pas ce dont on rêve comme étant inaccessible. L'utopie est la pensée de ce monde d'ailleurs qui n'est pas encore advenu. Il tient à nous de le rendre réalisable. Et cela suppose d'abord de l'évoquer.

Les évènements serviront d'accélérateur. Les guerres en cours sans perspective de paix et sans procédures pour y conduire, la multiplication des dérèglements humains, violences, trafics illicites, exploitation des plus faibles, les changements climatiques et leurs conséquences dramatiques par sécheresse, cyclones, canicules, inondations, sont devant nous. Allons-nous laisser tout cela se développer au sein d'un système mondial à bout de souffle ? Ou saurons nous convaincre qu'il faut se mettre à l'ouvrage pour préparer une alternative, véritablement universelle à ce qui a été essayé et a échoué ? Ne pas le faire, ce serait laisser advenir la catastrophe dans l'indifférence.

[1] Voir Monique Chemillier-Gendreau, « En finir avec la souveraineté », Dalloz, Tiré à part, Paris, 2024.

Monique Chemillier-Gendreau

De l'autrice :
Plaidoirie de Monique Chemillier-Gendreau à la CIJ
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/04/22/lelephant-dans-la-piece-publie-le-4-8-2023-plaidoirie-de-monique-chemillier-gendreau-a-la-cij/
Monique Chemillier-Gendreau : Contrer la domination et ouvrir la perspective d'un autre monde
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2022/03/27/monique-chemillier-gendreau-contrer-la-domination-et-ouvrir-la-perspective-dun-autre-monde/
Pour un Conseil mondial de la Résistance
https://entreleslignesentrelesmots.blog/2020/07/02/sarracher-au-cours-homogene-de-lhistoire/
Régression de la démocratie et déchainement de la violence. Conversation avec Regis Meyran,
https://entreleslignesentrelesmots.blog/2020/01/07/la-resistance-a-loppression-est-le-droit-a-avoir-des-droits/
Préface de Monique Chemillier-Gendreau au livre de Stéphanie Bossard : Accueillir les migrants. Rien n'est facile mais tout est possible
https://entreleslignesentrelesmots.blog/2019/12/09/preface-de-monique-chemillier-gendreau-au-livre-de-stephanie-bossard-accueillir-les-migrants-rien-nest-facile-mais-tout-est-possible/

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Les BRICS, l’Asie et l’enjeu du dollar

5 novembre 2024, par Hubert Testard — , , , , , ,
Le sommet des BRICS qui vient de se dérouler à Kazan marque un tournant. L'organisation est en phase rapide d'élargissement et prétend désormais traiter toutes les grandes (…)

Le sommet des BRICS qui vient de se dérouler à Kazan marque un tournant. L'organisation est en phase rapide d'élargissement et prétend désormais traiter toutes les grandes questions internationales. Les pays asiatiques jouent un rôle majeur pour l'avenir des BRICS. Aucun des projets structurants – notamment la dédollarisation – ne peut se faire autrement que sous la direction de la Chine, et progressivement de l'Inde.

Tiré d'Asialyst. Légende de la photo : Le président chinois Xi Jinping et son homologue russe Vladimir Poutine lors du sommet des BRICS à Kazan, en Russie, le 22 octobre 2024. (Source : HGT)

Le 16ème sommet des BRICS s'est déroulé à Kazan du 22 au 24 Octobre derniers. Il a réuni les cinq membres fondateurs de l'organisation (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), les cinq nouveaux membres qui les ont rejoints depuis le 1er janvier 2024 (Iran, Égypte, Arabie Saoudite, Éthiopie, Émirats Arabes Unis), et vingt-cinq autres pays ainsi que plusieurs représentants d'organisations internationales, avec la participation remarquée du secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres.

L'Asie au cœur de l'expansion des BRICS

Au-delà des dix membres actuels, treize pays, dont six États asiatiques, ont acquis le statut de « partenaires » : Algérie, Biélorussie, Bolivie, Cuba, Indonésie, Kazakhstan, Malaisie, Nigeria, Ouganda, Ouzbékistan, Thaïlande, Turquie et Vietnam. Dans ce groupe des pays partenaires, l'Asean pèse lourd avec quatre de ses principaux membres, et l'Asie centrale fait également son apparition.

Le statut de partenaire permet d'associer les pays concernés à certaines des activités de l'organisation et surtout constitue une étape préalable à une adhésion. Cette adhésion n'est pas garantie car elle suppose un consensus parmi les membres actuels, mais elle semble probable à plus ou moins brève échéance pour la quasi-totalité des pays partenaires. Les candidatures sont rejetées avant d'atteindre le statut de pays partenaire, comme cela a été le cas pour le Vénézuela, bloqué par le Brésil. Une dizaine de pays non-partenaires ont par ailleurs signalé leur intérêt pour rejoindre l'organisation.
À relativement brève échéance, les BRICS pourraient donc dépasser le G20 en nombre, avec une répartition par continent assez équilibrée : huit pays asiatiques, trois pays du Proche et Moyen-Orient, trois Européens (si l'on inclut la Turquie), six Africains et trois pays d'Amérique Latine ou Centrale.

L'Asie n'est pas majoritaire en nombre dans le groupe des 10 membres et 13 partenaires, mais elle représente à la fois les trois quarts de la population et les trois quarts du PIB du groupe BRICS + partenaires.

Les BRICS commencent à traiter toutes les grandes questions internationales

La déclaration de Kazan est un long document de 134 paragraphes couvrant tous les sujets d'actualité internationaux avec trois grands piliers : politique et sécurité internationale, questions économiques et financières, culture et coopération entre les peuples. Au-delà des prises de position purement diplomatiques – qui incluent des engagements dithyrambiques sur la résolution pacifique des conflits, la protection des droits de l'homme ou la lutte contre la dissémination des fake news – ce document énumère une série d'initiatives d'importance variable.

On y trouve entre autres la protection des félins dans le monde (initiative de l'Inde), la facilitation des transactions et des financements internationaux en monnaies locales, la création d'une plateforme d'échanges de matières premières agricoles (à l'initiative de la Russie), la création d'un partenariat pour une nouvelle révolution industrielle, la mise en place d'un groupe d'études conjoint sur l'intelligence artificielle, le développement d'une coopération sur l'identification des ressources géologiques en métaux critiques, la création d'un groupe de travail sur la médecine nucléaire, la coopération fiscale, le développement de programmes conjoints de recherche scientifique.

L'élargissement rapide des BRICS ne va pas faciliter la cohésion du Groupe, et la coexistence de l'Organisation avec une multitude d'autres instances multilatérales ou régionales couvrant les mêmes sujets ne garantit pas le succès des multiples initiatives citées dans la déclaration de Kazan.

Le Groupe a cependant, en plus de son poids économique, des points forts sur lesquels il va tenter de capitaliser. En matière d'énergie, les dix membres actuels de l'organisation représentent déjà 36 % des exportations de pétrole brut et 34 % des exportations de pétrole raffiné dans le monde. Ils occupent également une place majeure dans le commerce international du soja (51 %) ou du riz (44 %) ainsi que de différents métaux critiques (terres rares, magnésium, graphite).

Les treize pays partenaires comportent également de grands exportateurs de produits énergétiques (Algérie, Indonésie, Malaisie, Kazakhstan, Nigéria), de produits agricoles (Thaïlande), et de métaux critiques (Bolivie, Indonésie). Collectivement le groupe BRICS + partenaires a donc les moyens de peser sur l'évolution des échanges d'énergie, de matières premières et de métaux critiques dans le monde, avec sans doute un axe de travail majeur ne faisant pas double emploi avec ce qui existe déjà, qui est celui de la fin de l'hégémonie du dollar.

La question du dollar

La Russie est particulièrement motivée pour trouver des modes de financement alternatifs au dollar depuis qu'elle est soumise à une vaste gamme de sanctions occidentales couvrant notamment la participation des banques russes au système SWIFT ou les avoirs de sa Banque Centrale. La Chine l'est également pour imposer progressivement le yuan comme monnaie internationale concurrente du dollar. L'Inde a tiré parti des difficultés de la Russie pour utiliser la roupie indienne dans ses achats de produits pétroliers russes. Les autres membres du groupe BRICS+ ont des motivations moins fortes pour éviter les règlements en dollar, et Vladimir Poutine est resté prudent dans ses commentaires sur les perspectives de dédollarisation lors de la conférence de presse de clôture du sommet de Kazan.

L'idée d'une monnaie commune aux BRICS reste manifestement un outil de communication plus qu'un projet, et ses chances de concrétisation sont nulles. Restent cinq axes de travail complémentaires que sont la diversification des réserves de change, les transactions bilatérales en monnaies locales, les actifs internationaux en monnaies locales, la dédollarisation progressive des marchés d'énergie et de matières premières et l'internationalisation du yuan.

S'agissant des réserves de change, la Russie, la Chine, l'Inde et la Turquie sont les quatre pays dont les réserves en or ont le plus fortement progressé depuis dix ans, avec une sensible accélération depuis le début de la guerre en Ukraine. Cet attrait de l'or va de pair avec une érosion progressive de la part du dollar dans les réserves de change de l'ensemble des banques centrales du monde, qui est passée de 71 % en l'an 2000 à 58 % en 2024. Mais les autres grandes monnaies internationales – euro, yen et livre sterling – ont conservé une part stable autour de 30 %, et parmi les monnaies « alternatives », le yuan reste à la peine avec une part limitée à 2,1 % fin juin 2024, en recul sur l'année 2023.

Sur les transactions bilatérales les progrès sont inégaux. Les échanges commerciaux entre la Chine et la Russie libellés en yuans ou en roubles représenteraient de 90 à 95 % du total des échanges bilatéraux, selon les sources russes et chinoises. Les échanges en monnaies locales avec l'Inde sont beaucoup moins avancés.

La Russie a trois problèmes avec l'Inde : elle est exportatrice nette pour des montants importants, et elle accumule des roupies indiennes qui restent en Inde et sont investies en obligations à faible rendement, les transactions entre les deux monnaies passent par des monnaies tierces en raison de la non-convertibilité de la roupie indienne, ce qui coûte cher (un accord est en vue pour régler ce problème), et l'argent russe ne peut pas ressortir facilement d'Inde en raison d'un contrôle des changes sourcilleux de la Banque Centrale indienne. L'une des solutions trouvées par les opérateurs russes a été d'échanger les roupies indiennes contre des cryptomonnaies (les stable coins), qui peuvent être à nouveau échangées contre d'autres monnaies aux Émirats arabes unis.

Les échanges bilatéraux en monnaies locales sont relativement simples avec la Chine dont la monnaie est déjà internationale et qui a mis en place les solutions techniques pour les transactions en yuans à travers la création d'un système concurrent de SWIFT qui est le CPIS. Ce n'est pas le cas pour la plupart des autres monnaies des BRICS+.

Globalement, on constate tout de même une nette progression de la part de ces monnaies dans les transactions enregistrées dans SWIFT (6,4 % en 2024, dont une bonne moitié concerne le yuan) et sur les marchés des dérivés de change (6,8 %).

S'agissant des actifs internationaux en monnaies locales, une étude de la Banque ING portant sur les dix membres actuels des BRICS montre que les avoirs ou dettes des BRICS en monnaies alternatives progressent, sans pour autant détrôner le dollar.

La dédollarisation des marchés de l'énergie ou des matières premières agricoles est encore à un stade préliminaire. La Chine a passé des accords bilatéraux avec l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l'Iran pour développer les achats de pétrole dans les monnaies des pays partenaires et elle va probablement faire de même avec d'autres pays comme l'Algérie. Les difficultés des règlements en monnaie locale restent toutefois les mêmes. Renoncer au dollar comporte des risques de change accrus (le système de garanties de change en dollar est sans équivalent), les échanges bilatéraux sont rarement équilibrés et l'un des deux partenaires se retrouve avec des avoirs dans la monnaie du pays partenaire qui ne sont pas faciles à placer ou à recycler. Hormis les pays soumis à un régime de sanctions comme la Russie ou l'Iran, les autres ont une motivation plus diplomatique que pratique, et les BRICS en tant que groupe ne peuvent pas réellement mettre en place un système de compensation multilatérale en monnaies alternatives au dollar.

L'avenir de la dédollarisation repose donc sur l'essor international de monnaies alternatives comme le yuan. Or la période récente, marquée par une faiblesse de la monnaie chinoise face au dollar et par un durcissement du contrôle des changes chinois pour éviter d'éventuelles fuites de capitaux, n'est pas une période faste pour l'internationalisation du yuan. Les marqueurs classiques (poids dans les réserves de change, les échanges commerciaux, les transactions du système SWIFT, les actifs financiers) stagnent ou ne progressent que marginalement. On observe quand même un début de transactions commerciales en yuans entre pays tiers. La Russie par exemple réalise 5 % de ses échanges commerciaux en yuans avec d'autres pays que la Chine.

Du côté de l'Inde, les difficultés avec la Russie ont incité le gouvernement à lancer un plan d'internationalisation de la roupie qui en est encore à ses balbutiements. La dédollarisation des relations entre les BRICS reste globalement un objectif de long terme qui sera lié au succès de l'internationalisation du yuan aujourd'hui et de la roupie indienne d'ici quelques décennies.

Par Hubert Testard

******

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Un sommet des BRICS en Russie qui n’offre pas d’alternative

5 novembre 2024, par Éric Toussaint — , ,
Le 16e sommet des BRICS a abouti, le 23 octobre 2024, à une déclaration finale en 134 points, qui indique clairement que ce bloc ne constitue pas une alternative favorable aux (…)

Le 16e sommet des BRICS a abouti, le 23 octobre 2024, à une déclaration finale en 134 points, qui indique clairement que ce bloc ne constitue pas une alternative favorable aux intérêts des peuples.

29 octobre 2024 | tiré du site d'Inprecor | Photo : Kazan a accueilli la première session plénière du 16e sommet des BRICS en format « Outreach/BRICS+ ». © President.az, CC BY 4.0
https://inprecor.fr/node/4393

Il n'y a aucun doute qu'il faut combattre la politique des grandes puissances impérialistes traditionnelles : les États-Unis et ses partenaires européens ainsi que le Japon. Il n'y a pas de doute que les pays impérialistes les plus agressifs sont de loin les États-Unis et Israël, dans le sillage desquels se placent l'Union européenne, le Royaume-Uni, le Japon, l'Australie, le Canada… qui acceptent tout ce qu'accomplit le gouvernement fasciste israélien.

Il y a un tel dégoût pour la politique de ces puissances impérialistes traditionnelles qu'une partie de la gauche considère que la politique des BRICS constitue une alternative encourageante même si beaucoup sont contre l'invasion de l'Ukraine par la Russie, tout en considérant que l'OTAN et Washington ont leur part de responsabilité.

C'est important d'analyser le contenu de la déclaration finale des BRICS adoptée à Kazan le 23 octobre 2024 afin de vérifier si ce bloc met en avant une alternative au modèle et aux politiques qui sont imposées par les puissances impérialistes traditionnelles (regroupée dans le G7 : États-Unis, Allemagne, France, Royaume-Uni, Canada, Japon, Italie et Union européenne). De toute manière, on ne pouvait pas s'attendre à ce qu'émerge une alternative favorable aux peuples d'un conglomérat de pays tous dominés par une logique capitaliste (même si c'est à des degrés divers) et parmi lesquels les gouvernements qui répriment leur peuples sont majoritaires. Le résultat de la lecture de la déclaration finale dans son intégralité est sans appel : même au niveau des mots, on ne trouve pas de véritable différence avec les discours, les déclarations des principales puissances impérialistes traditionnelles et des institutions qu'elles dominent. Si, en plus, on prend la peine d'analyser la politique concrète des BRICS, on ne peut que conclure que pour promouvoir une alternative favorable à l'émancipation des peuples, pour renforcer la lutte contre les différentes formes d'oppression et pour affronter la crise écologique, il ne faut pas compter sur l'aide et l'action des BRICS.

Pour passer en revue les points les plus importants de la déclaration finale du sommet des BRICS, tenu en Russie, je suivrai, sauf à un endroit, l'ordre dans lequel les différents points se succèdent. Ceux et celles qui veulent lire l'ensemble de la déclaration, la trouverontsur le site du gouvernement russe et sur d'autres sites officiels.

Pas de remise en cause du FMI et de la Banque mondiale :

Dans le point 11, les BRICS réaffirment le rôle central que doit jouer le Fonds monétaire international (FMI) :

11. « Nous réaffirmons notre volonté de maintenir un filet de sécurité financier mondial solide et efficace, avec en son centre un FMI »

Les BRICS se félicitent des discussions en cours au FMI sur l'évolution des droits de vote en son sein :

« Nous nous félicitons des travaux en cours du Conseil d'administration du FMI visant à élaborer, d'ici juin 2025, des approches possibles pour guider la poursuite du réalignement des quotes-parts ». « Il s'agit également de féliciter le FMI pour son intention de permettre aux pays d'Afrique subsaharienne, scandaleusement sous-représentés dans la direction du FMI, d'obtenir en son sein un siège supplémentaire. »

Les BRICS n'émettent aucune critique à l'égard des politiques néolibérales imposées par le FMI aux pays qui font appel à ses crédits.

Les BRICS n'exigent aucun changement de la part de la Banque mondiale et se contentent de dire à son propos : « Nous attendons avec intérêt l'examen de la participation de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) à l'horizon 2025. »

On ne trouve dans la déclaration aucune demande et aucun engagement pour l'annulation des dettes.

Suit, au point 12, une déclaration purement abstraite et sans intérêt sur la nécessaire amélioration du système monétaire et financier international.

Satisfecit pour les COP qui pourtant n'apportent aucune solution probante et soutien au marché du carbone

Au point 16, concernant les initiatives pour faire face à la crise écologique et au changement climatique, la déclaration ne fait aucune allusion à la profonde crise écologique et se félicite des avancées que représentent les derniers sommets COP sur le climat :

« Nous félicitons l'Égypte d'avoir accueilli la COP27 à Sharm El-Sheikh en 2022, où le Fonds de réponse aux pertes et dommages a été créé, et les Émirats arabes unis d'avoir accueilli la COP28 à Dubaï en 2023, où le Fonds a été rendu opérationnel. Nous nous félicitons du consensus obtenu par les Émirats arabes unis lors de la COP28, notamment de la décision intitulée « Résultats du premier bilan mondial », et du Cadre des Émirats arabes unis pour la résilience climatique mondiale. Nous nous engageons à ce que la COP29 en Azerbaïdjan soit couronnée de succès… Nous soutenons le leadership du Brésil qui accueillera la COP30 en 2025 et saluons la candidature de l'Inde qui accueillera la COP33 en 2028. »

Alors que les COP n'aboutissent sur aucun résultat probant et que les derniers ont été des caricatures, les BRICS se retrouvent de fait très proches des grandes puissances industrielles impérialistes traditionnelles en refusant de reconnaître que jusqu'ici les politiques adoptées ne permettent pas de fournir des réponses à la hauteur des enjeux. Malgré leurs désaccords et les tensions qui marquent leurs relations, les deux blocs s'entendent en pratique lors des COP pour ne pas adopter de mesures contraignantes suffisamment fortes pour faire face à la crise écologique. Chaque bloc défend les intérêts des industries polluantes. C'est frappant de constater que les BRICS ne dénoncent pas la politique irresponsable des anciennes puissances impérialistes et des grandes entreprises qui vivent des énergies fossiles.

De plus au point 85, les BRICS déclarent leur soutien au marché des permis d'émission de carbone

« Nous reconnaissons le rôle important que jouent les marchés du carbone en tant que l'un des moteurs de l'action en faveur du climat, et nous encourageons le renforcement de la coopération et l'échange d'expériences dans ce domaine. » (pour plus loin).

Le marché du carbone est au cœur du capitalisme vert, du greenwashing et de la poursuite de politiques prédatrices à l'égard de la nature.

Pour en savoir plus sur le marché du carbone, lire : Adam Hanieh, « Blanchissement de carbone — La « nouvelle ruée vers l'Afrique » du Golfe », publié le 14 août 2024

Condamnation d'Israël sans employer le mot génocide

Le point 30 aborde la situation en Israël-Palestine sans utiliser une seule fois le mot génocide pour désigner l'action criminelle du gouvernement israélien.

Nous réitérons notre grave préoccupation face à la détérioration de la situation et à la crise humanitaire dans le territoire palestinien occupé, en particulier l'escalade sans précédent de la violence dans la bande de Gaza et en Cisjordanie à la suite de l'offensive militaire israélienne, qui a entraîné des massacres et des blessures de civils, des déplacements forcés et la destruction généralisée d'infrastructures civiles. Nous soulignons la nécessité urgente d'un cessez-le-feu immédiat, global et permanent dans la bande de Gaza, de la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages et détenus des deux camps qui sont illégalement retenus en captivité, de l'acheminement durable et sans entrave de l'aide humanitaire à grande échelle dans la bande de Gaza et de la cessation de toutes les actions agressives. Nous dénonçons les attaques israéliennes contre les opérations humanitaires, les installations, le personnel et les points de distribution. (…) nous saluons les efforts continus de la République arabe d'Égypte, de l'État du Qatar et d'autres efforts régionaux et internationaux en vue de parvenir à un cessez-le-feu immédiat, d'accélérer l'acheminement de l'aide humanitaire et le retrait d'Israël de la bande de Gaza.

Les BRICS ne décrètent pas une rupture ou une suspension des relations commerciales et des traités de coopération avec Israël. Pire, comme Patrick Bond et d'autres auteurs l'ont montré, les BRICS continuent à fournir à Israël du pétrole, du gaz, du charbon, indispensables à ce pays pour continuer son effort de guerre. Cela est également vrai de la part du gouvernement d'Afrique du Sud qui bien qu'ayant déposé à juste titre une plainte contre Israël devant la Cour de justice internationale, continue de lui fournir du charbon.

Pour en savoir plus sur la poursuite des relations commerciales entre les BRICS et Israël pendant le génocide, lire en anglais ou en espagnol : Patrick Bond, ‘The Blessing' for genocide publié le 1 octobre 2024, - En Espagnol : La “bendición” para el genocidio

Certes ils condamnent au point 31. , « la perte de vies civiles et les immenses dégâts causés aux infrastructures civiles par les attaques menées par Israël contre des zones résidentielles au Liban et nous demandons la cessation immédiate des actes militaires » mais ils s'en tiennent à cela.

Au point 32, ils condamnent, sans désigner comme responsable le gouvernement d'Israël, « l'acte terroriste prémédité consistant à faire exploser des appareils de communication portatifs à Beyrouth, le 17 septembre 2024, qui a fait des dizaines de morts et de blessés parmi les civils » .

Condamnation sans les mentionner explicitement des actions Houthis qui tentent d'entraver les relations commerciales avec Israël

Au point 33, ils condamnent, sans les nommer, les actions des Houthis qui s'attaquent aux bateaux qui commercent avec Israël. Les BRICS affirment

« qu'il importe de garantir l'exercice des droits et libertés de navigation des navires de tous les États en mer Rouge et dans le détroit de Bab Al-Mandab ».

Absence de condamnation de l'invasion de l'Ukraine par la Russie et absence de critique explicite à l'égard de l'OTAN

Au point 36, les BRICS ne condamnent pas l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Ils écrivent :

« Nous rappelons les positions nationales concernant la situation en Ukraine et dans les environs, telles qu'elles ont été exprimées dans les enceintes appropriées, y compris le Conseil de sécurité des Nations unies et l'Assemblée générale des Nations unies. (…). Nous prenons note avec satisfaction des propositions pertinentes de médiation et de bons offices, visant à un règlement pacifique du conflit par le dialogue et la diplomatie. ».

Le fait qu'on ne trouve pas de critique de l'OTAN est vraisemblablement dû au fait que la Turquie était invitée au sommet.

Soutien aux partenariatx public-privé qui en réalité favorisent les grandes entreprises privées aux détriments des biens publics

À partir du point 61, les BRICS reviennent sur les questions financières. Ils se prononcent pour les partenariats public-privé en déclarant :

« Nous reconnaissons que le recours au financement mixte est un moyen efficace de mobiliser des capitaux privés pour financer des projets d'infrastructure. »

Ils ajoutent : « nous saluons les travaux du groupe de travail des BRICS sur les partenariats public-privé et les infrastructures ».

Soutien aux activités de la Nouvelle banque de développement créée par les BRICS en 2015 en parlant des crédits en monnaie locale alors que l'essentiel du financement passe toujours par le dollar des États-Unis

Au point 62, ils soulignent « le rôle clé de la Nouvelle banque de développement (NDB) (voir encadré sur la NDB) dans la promotion des infrastructures et du développement durable de ses pays membres. » Ils promettent une amélioration de sa gestion : « Nous soutenons la poursuite du développement de la NDB et l'amélioration de la gouvernance d'entreprise et de l'efficacité opérationnelle en vue de la réalisation de la stratégie générale de la NDB pour 2022-2026 ». Pour comprendre la référence à l'amélioration de la gouvernance de la NDB, il faut certainement prendre en compte l'avis du brésilien, Paulo Nogueira Batista qui a représenté de 2007 à 2015 le Brésil au FMI sous la présidence de Lula, et qui a été ensuite vice-président de la Nouvelle banque de développement (créée par les BRICS) de 2015 à 2017. Bien qu'il exprime un soutien enthousiaste aux BRICS, il n'a pas manqué de critiquer la mauvaise gestion de la direction de la NDB :

« La Banque a accompli beaucoup de choses mais n'a pas encore fait la différence. L'une des raisons est, franchement, le type de personnes que nous avons envoyées à Shanghai depuis 2015 en tant que président·es et vice-président·es de l'institution. Le Brésil, par exemple, sous l'administration Bolsonaro, a envoyé une personne faible pour devenir président de la mi-2020 au début 2023 - techniquement faible, orientée vers l'Occident, sans leadership et sans la moindre idée de la manière de mener une initiative géopolitique. La Russie ne fait malheureusement pas exception à la règle : le vice-président russe de la NDB est remarquablement inapte à ce poste. La faiblesse de la gestion a souvent conduit à un mauvais recrutement du personnel. »1

Ceux-ci annoncent qu'ils soutiennent la NDB dans l'expansion continue des financements en monnaie locale, ce qui est positif mais ils omettent de dire que l'essentiel du financement de la NDB se fait en dollars par l'émission de titres sur les marchés financiers.

La Nouvelle banque de développement (NDB)

La NDB a été créée officiellement le 15 juillet 2014 à l'occasion du 6e sommet des BRICS qui s'est tenu à Fortaleza au Brésil. La NDB a octroyé ses premiers crédits à partir de fin 2016. Les cinq pays fondateurs ont chacun une part égale du capital de la Banque et aucun n'a le droit de veto. La NDB, outre les 5 pays fondateurs, compte comme membres le Bangladesh, les Émirats Arabes Unis et l'Égypte. L'Uruguay est en train de rendre effective sa participation. La NBD est dotée d'un capital de 50 milliards de dollars qui devrait être porté dans le futur à 100 milliards de dollars. Il y a rotation pour l'exercice du poste de président·e de la NDB. A tour de rôle pour un mandat de cinq ans, chaque pays a droit à exercer la présidence. Dilma Rousseff, la présidente actuelle, est brésilienne, le prochain ou la prochaine présidente sera russe et sera désignée en 2025 par Vladimir Poutine qui vient d'être réélu à la présidence de la Fédération de Russie jusque 2030. La Nouvelle Banque de Développement annonce qu'elle se concentre principalement sur le financement de projet d'infrastructures y compris des systèmes de distribution d'eau et des systèmes de production d'énergie renouvelables. Elle insiste sur le caractère « vert » des projets qu'elle finance, bien que cela soit très discutable.

Certains passages concernant la NDB donnent à entendre qu'il y a véritablement des tensions entre les pays membres des BRICS :

« Nous demandons instamment à la Banque de s'acquitter de sa mission et de ses fonctions, conformément aux statuts de la nouvelle banque de développement, de manière équitable et non discriminatoire. »

C'est probablement lié au fait que la NDB n'a octroyé aucun crédit en Russie depuis que les puissances occidentales ont pris des sanctions contre Moscou après l'invasion de l'Ukraine en février 2022. En effet la NDB qui se finance sur les marchés financiers a craint de subir une dégradation de sa note triple AAA au cas où elle aurait poursuivi les prêts à la Russie. Elle a donc refusé de financer des projets en Russie.

Ceci peut être vérifié sur le site de la NDB : où l'on constate que depuis début 2022, la NDB a approuvé le financement de plus de 50 projets différents dont aucun en Russie. Concernant les crédits vers la Russie, si on clique ici on peut constater que le dernier projet soutenu financièrement par la NBD en Russie remonte à septembre 2021.

Soulignons de nouveau le jugement négatif émis en mars 2024 par Paulo Nogueira, pourtant chaud partisan des BRICS, à propos de la NDB dont il a été vice-directeur en 2014-2015 :

"Pourquoi peut-on dire que la NDB a été une déception jusqu'à présent ? Voici quelques-unes des raisons. Les décaissements ont été étonnamment lents, les projets sont approuvés mais ne sont pas transformés en contrats. Lorsque les contrats sont signés, la mise en œuvre effective des projets est lente. Les résultats sur le terrain sont maigres. Les opérations - financements et prêts - se font principalement en dollars américains, monnaie qui sert également d'unité de compte à la Banque.

Comment pouvons-nous, en tant que BRICS, parler de manière crédible de dédollarisation si notre principale initiative financière reste majoritairement dollarisée ?

Ne me dites pas qu'il n'est pas possible d'effectuer des opérations en monnaie nationale dans nos pays. La Banque interaméricaine de développement, la BID, par exemple, possède depuis de nombreuses années une expérience considérable en matière d'opérations en monnaie brésilienne. Je ne comprends pas pourquoi la NDB n'a pas profité de cette expérience. »2

Les BRICS ne parlent plus du lancement d'une monnaie commune

En réalité en ce qui concerne les outils financiers dont se sont dotés les BRICS les résultats sont négligeables et aucune avancée sérieuse n'est annoncée dans la déclaration finale.

Rappelons que Lula, président du Brésil, lors du sommet précédent tenu en Afrique du Sud en août 2023 avait déclaré que les BRICS avaient

« approuvé la création d'un groupe de travail chargé d'étudier l'adoption d'une monnaie de référence pour les BRICS. Cela augmentera nos options de paiement et réduira nos vulnérabilités. »3

Peu après, Paulo Nogueira Batista, déjà cité, avait déclaré dans une rencontre en Russie :

« Nous avons la chance que la Russie préside les BRICS en 2024 et le Brésil en 2025 - précisément les deux pays qui semblent les plus intéressés par la création d'une monnaie commune ou de référence. Si tout se passe bien, les BRICS pourraient prendre la décision de créer une monnaie lors du sommet en Russie l'année prochaine »4 .

Rien de tel ne s'est produit. Dans la déclaration finale du 16e sommet des BRICS rendue publique le 23 octobre 2024, il n'y a aucune référence à la création d'une monnaie commune. Il s'agit donc d'un important pas en arrière. Or beaucoup de partisans des BRICS avaient annoncé en 2023 après que la rencontre des BRICS en Afrique du Sud qu'on était à la veille de la création de cette monnaie. La montagne a accouché d'une souri et le court point 67 en donne la mesure :

« 67. Nous chargeons nos ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales, selon le cas, de poursuivre l'examen de la question des monnaies locales, des instruments de paiement et des plateformes et de nous faire rapport d'ici la prochaine présidence. »

Pas un mot sur une monnaie commune.

Le Fonds monétaire des BRICS est au point mort

Sur un autre point, le bilan est carrément négatif, il s'agit du fonds de réserve en devises que les BRICS avaient décidé de créer en 2015, il y a près de 10 ans. L'acronyme de ce fonds est le CRA (Contingent Reserve Arrangement ). Il devait permettre à des pays membres des BRICS confrontés à un problème de manque de devises pour assurer leurs paiements internationaux de pouvoir puiser dans ce fonds (emprunter à ce fonds) les devises qui leur manquait. Cet instrument est important en particulier pour l'Afrique du Sud, le pays le plus faible des BRICS car celui-ci a fait face ces dernières années à un manque de devises. Ce problème concerne aussi une quantité importante de pays qui ont adhéré aux BRICS ou sont candidats pour en faire partie. On peut citer comme exemples l'Éthiopie, l'Égypte, l'Iran.

Or depuis que le Fonds a été créé sur papier en 2015 rien n'a avancé. Aucun crédit n'a été octroyé.

Ce Fonds devait remplir la fonction que joue le FMI quand un de ses membres fait face à un manque de réserves de change pour effectuer des paiements. Cela devait permettre aux pays membres des BRICS d'échapper aux conditionnalités imposées par le FMI.

Or, ce fonds bien que créé sur papier, n'est pas entré en activité et le sommet des BRICS qui vient de se conclure accouche d'une déclaration on ne peut plus timide :

68. Nous reconnaissons que l'accord sur les réserves contingentes (càd le fonds de réserve appelé CRA, note d'Éric Toussaint) des BRICS est un mécanisme important pour prévenir les pressions à court terme sur la balance des paiements et renforcer la stabilité financière. Nous exprimons notre soutien résolu à l'amélioration du mécanisme du CRA en envisageant d'autres monnaies éligibles et nous nous félicitons de la finalisation des modifications apportées aux documents relatifs au CRA. Nous saluons l'achèvement réussi du 7e test du CRA et la cinquième édition du Bulletin économique des BRICS sous le titre « BRICS Economies in a Higher-rate Environment » (Les économies des BRICS dans un environnement de taux plus élevés).

Se féliciter de l'édition d'un bulletin d'analyse et de la réalisation d'un 7e test, c'est reconnaître qu'après 9 ans le fonds de réserve (CRA) n'existe qu'à l'état de projet et n'a effectué aucune opération.

Paulo Nogueira déclarait à propos du CRA en octobre 2023 :

« Les deux mécanismes de financement existants des BRICS ont été créés à la mi-2015, il y a plus de huit ans. Permettez-moi de vous assurer que lorsque nous avons commencé avec le CRA et la Nouvelle banque de développement, il existait une inquiétude considérable quant à ce que les BRICS faisaient dans ce domaine à Washington, au FMI et à la Banque mondiale. Je peux en témoigner car j'y ai vécu à l'époque, en tant qu'administrateur pour le Brésil et d'autres pays au sein du conseil d'administration du FMI.

Au fil du temps, cependant, les gens à Washington se sont détendus, sentant peut-être que nous n'allions nulle part avec le CRA (= le Fonds monétaire commun des BRICS) et la Nouvelle Banque de Développement. » (même source que les citations précédentes)

Pour en savoir plus sur les BRICS : Éric Toussaint, Les BRICS et leur Nouvelle banque de développement offrent-ils des alternatives à la Banque mondiale, au FMI et aux politiques promues par les puissances impérialistes traditionnelles ?, publié le 18 avril 2024,

Selon les BRICS, le libre-échange est le leitmotiv de l'activité agricole. Pas un mot sur la souveraineté alimentaire, sur l'agriculture biologique

73. Nous convenons que la résilience des chaînes d'approvisionnement et le libre-échange dans l'agriculture, parallèlement à la production intérieure, sont essentiels pour garantir la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance, en particulier pour les agriculteurs à faible revenu ou disposant de ressources limitées, ainsi que pour les pays en développement importateurs nets de denrées alimentaires. »

L'expérience a montré que le libre échange est une arme des grandes puissances et des grandes entreprises privées de l'agro business contre les paysans.

Les BRICS font la promotion des Zones économiques spéciales, paradis des entreprises capitalistes et souvent un espace de non droit pour les travailleurs-ses

« 74. Nous reconnaissons l'efficacité des zones économiques spéciales (ZES) des pays du BRICS en tant que mécanisme bien établi pour la coopération commerciale et industrielle et la facilitation de la fabrication (…) Nous nous félicitons de la création d'un forum de coopération sur les zones économiques spéciales des pays du BRICS. »

Rejet des mesures protectionnistes pour protéger l'environnement

« 83. Nous rejetons les mesures protectionnistes unilatérales, punitives et discriminatoires, qui ne sont pas conformes au droit international, sous prétexte de préoccupations environnementales, telles que les mécanismes unilatéraux et discriminatoires d'ajustement carbone aux frontières, les exigences de diligence raisonnable, les taxes et autres mesures, et nous réaffirmons notre soutien total à l'appel lancé lors de la COP28 pour éviter les mesures commerciales unilatérales fondées sur le climat ou l'environnement. Nous nous opposons également aux mesures protectionnistes unilatérales qui perturbent délibérément les chaînes d'approvisionnement et de production mondiales et faussent la concurrence. »

Il est vrai que des grandes puissances traditionnelles en perte de vitesse comme l'UE et les USA prennent prétexte de motivations environnementales pour cacher leur volonté de protéger les intérêts des grands actionnaires des entreprises en perte de vitesse mais cela ne signifie pas que nous devons être contre toutes les mesures protectionnistes qui défendraient réellement l'environnement et permettrait la promotion des droits des travailleurs tant au Sud qu'au Nord de la planète.

Les BRICS ont un discours sur les femmes tout à fait compatible avec celui adopté par les puissances impérialistes traditionnelles, par la Banque mondiale, par la presse dominante et le monde des affaires

« 130. Nous reconnaissons le rôle essentiel des femmes dans le développement politique, social et économique. Nous soulignons l'importance de l'autonomisation des femmes et de leur pleine participation, sur la base de l'égalité, à toutes les sphères de la société, y compris leur participation active aux processus de prise de décision, y compris aux postes à responsabilité, qui sont fondamentales pour la réalisation de l'égalité, du développement et de la paix. Nous reconnaissons que l'entrepreneuriat inclusif et l'accès des femmes au financement faciliteraient leur participation aux entreprises, à l'innovation et à l'économie numérique. À cet égard, nous nous félicitons des résultats de la réunion ministérielle sur les affaires féminines et du forum des femmes des BRICS qui se sont tenus en septembre à Saint-Pétersbourg sur le thème « Les femmes, la gouvernance et le leadership » et nous reconnaissons la précieuse contribution de ces réunions annuelles au développement et à la consolidation de l'autonomisation des femmes dans les trois piliers de la coopération des BRICS.

131. Nous apprécions les efforts déployés par l'Alliance des femmes d'affaires des BRICS pour promouvoir l'entrepreneuriat féminin, notamment le lancement de la plateforme numérique commune de l'Alliance des femmes d'affaires des BRICS, la tenue du premier forum des femmes d'affaires des BRICS à Moscou les 3 et 4 juin 2024 et le premier concours de startups féminines des BRICS. Nous sommes favorables à la poursuite du renforcement de la coopération entre la BRICS Women's Business Alliance et les femmes entrepreneurs du Sud, y compris la mise en place de bureaux régionaux, le cas échéant.

Pour en savoir plus sur la question du genre : Camille Bruneau : La farce de la « prise en compte du genre » : une grille de lecture féministe des politiques de la Banque mondiale, publié le 25 septembre 2024,

Les BRICS ne sont pas une alternative pour les peuples face aux puissances impérialistes traditionnelles. Les positions des BRICS s'inscrivent à merveille dans le système capitaliste néolibéral global, ils ne font rien ou presque pour s'en détacher et souscrivent aux fausses solutions du capitalisme vert. Malgré leur dénonciation des crimes commis par Israël contre les peuples palestiniens et libanais, ils ne daignent pas rompre leurs liens commerciaux avec la puissance sioniste.

Publié par le CADTM le 26 octobre 2024

1. Paulo Nogueira Batista , “BRICS Financial and Monetary Initiatives – the New Development Bank, the Contingent Reserve Arrangement, and a Possible New Currency”, 3 October 2023, valdaiclub.com/a/highlights/brics-financial-and-monetary-initiatives/ consulté le 25 octobre 2024.

2. Paulo Nogueira Batista , “BRICS Financial and Monetary Initiatives – the New Development Bank, the Contingent Reserve Arrangement, and a Possible New Currency”, 3 October 2023, valdaiclub.com/a/highlights/brics-financial-and-monetary-initiatives/ consulté le 25 octobre 2024.

3. Lula “aprovado a criação de um grupo de trabalho para estudar a adoção de uma moeda de referência dos Brics. Isso aumentará nossas opções de pagamento e reduzirá nossas vulnerabilidades » Folha de Paulo, « Moeda do Brics ; tema ganha tratamento tímido em cúpula » - 25/08/2023 - www1.folha.uol.com.br/mercado/2023/08/india-resiste-a-moeda-do-brics-e-tema-ganha-tratamento-timido-em-cupula.shtml. CNN, « Brics criam grupo de trabalho para avaliar moeda comum » www.youtube.com/watch?v=keUdkW-s5M4

4. Paulo Nogueira Batista , “BRICS Financial and Monetary Initiatives – the New Development Bank, the Contingent Reserve Arrangement, and a Possible New Currency”, 3 October 2023, valdaiclub.com/a/highlights/brics-financial-and-monetary-initiatives/ consulté le 25 octobre 2024.

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

La crise des Etats-Unis, centre de la multipolarité impérialiste.

5 novembre 2024, par Vincent Présumey — ,
Commentant l'alignement géopolitique qui semble vouloir s'affirmer au moment présent, que le sommet des « BRICS+ » à Kazan (en Russie) a, depuis, confirmé, et le tableau de (…)

Commentant l'alignement géopolitique qui semble vouloir s'affirmer au moment présent, que le sommet des « BRICS+ » à Kazan (en Russie) a, depuis, confirmé, et le tableau de guerre mondiale dont il dessine le spectre, entre un bloc de tyrannies eurasiatiques et les vieilles démocraties capitalistes vermoulues, j'écrivais, le 18 octobre dernier :

« Le facteur conjoncturel, mais capital, qui attise les faits guerriers immédiats, ce sont les présidentielles nord-américaines. Cette relation est réciproque : les tensions en mer de Chine et en Corée, les reculs ukrainiens dans le Donbass, et la guerre engagée au Liban par le gouvernement et l'armée israéliens, sont autant de facteurs qui jouent en faveur de Trump. »

29 octobre 2024 | tiré du site d'aplutsoc | Photo illustrant cet article : image du film Civil War, de Alex Garland, avril 2024.

Géopolitique mondiale et géopolitique américaine.

Or, il y a aussi une « géopolitique » électorale étatsunienne. Beaucoup de médias parlent maintenant ouvertement du spectre de la guerre civile aux Etats-Unis. Le scrutin présidentiel s'y joue dans 7 Etats, les swing states – Wisconsin, Michigan, Pennsylvanie, Caroline du Nord, Géorgie, Nevada, Arizona. La constitution américaine veut que le résultat ne provienne pas du total national des bulletins, mais du nombre de grands électeurs par Etats. Les jeux sont faits un peu partout, sauf dans ces 7 Etats qui forment une sorte de ligne de front, lignes qui, parfois, les découpent eux-mêmes entre comtés.

Hors de ces 7 Etats qui totalisent 93 grands électeurs, Trump peut tabler sur 219 de ceux-ci et Harris sur 226. En simplifiant, on peut les grouper en 3 catégories.

Le Wisconsin, le Michigan et la Pennsylvanie, au Nord-Est, sont des contrées industrielles sinistrées, dans lesquelles le charcutage électoral (au Wisconsin notamment) favorise les Républicains, ce qui ne joue plus pour les présidentielles, sauf dans la mesure où les pouvoirs locaux font pression contre le vote des couches les plus pauvres et les moins blanches de la population. La mobilisation de la nouvelle direction syndicale de l'United Automobile Workers, contre Trump et pour Harris, peut peser dans ces régions, ainsi que la candidature à la vice-présidence du gouverneur du Minnesota Tim Walz, présenté comme « ami des syndicats ».

La Caroline du Nord et la Géorgie sont des Etats « sudistes » dans lesquels la polarisation est violente entre les campagnes évangélistes et racistes et les centres urbains.

Le Nevada et l'Arizona voient une confrontation politique entre « ruraux » blancs et groupes tournés vers la Californie démocrate et libérale, avec les latinos « intégrés » partagés, face aux immigrants illégaux et discriminés.

Trois lignes de front, donc : celle de la « vieille » classe ouvrière au Nord, de la frange Nord des confédérés de la guerre de Sécession au Sud, du far West capitaliste sauvage à la fois vivifié et perturbé par le flux migratoire latinos (hispanophone mais en même temps, il ne faut pas l'oublier, amérindien), à l'Ouest.

En dehors des Etats de la ligne de front – appelons-les ainsi, ce sera plus parlant que swing states – le reste du pays forme maintenant de vastes ensembles hostiles qui auront le sentiment de s'être fait voler l'élection dans ces zones disputées. Mais le sentiment va différer entre la base trumpiste et la base sociale qui, par adhésion mais surtout par réflexe de défense, va voter Harris.

Pour cette base sociale là ce sera un sentiment démocratique. En effet, il est fort probable que, comme déjà en 2016, Trump ne sera pas en tête en nombre de voix, mais en nombre de grands électeurs. En soi, ce fait ne choque pas, pour des raisons historiques, aux Etats-Unis, république fédérale. Mais là, il risque d'énerver, traduisant le fait que la constitution américaine, ce chef-d'œuvre de déséquilibre dynamique fait pour gouverner un Etat en expansion permanente, arrive aujourd'hui à bout de souffle. Une autre revendication démocratique vise la Cour suprême, dont les juges nommés à vie sont aujourd'hui une brochette de parfaits obscurantistes. Elire le président sur la base du vote populaire de base, et limiter à quelques années le mandat des juges de la Cour suprême : ces deux revendications démocratiques ont l'air de pas grand-chose, mais leur montée progressive dans les consciences ouvre la voie à la remise en cause de tout l'ordre établi.

Pour la base trumpiste, il est entendu que c'est par trucage que Trump a perdu en 2020 et que ce ne peut être que par trucage, falsification ou « vote des étrangers », qu'il pourrait ne pas gagner. Au demeurant, il est aussi entendu de plus en plus ouvertement qu'il devrait être président même s'il perdait, car peu importe : il est le Sauveur et le camp d'en face est celui du Mal, contre lequel tout est permis. Le sentiment protestataire de la base trumpiste n'est pas démocratique, même s'il peut véhiculer des frustrations provenant des limites de cette « démocratie » capitaliste, médiatique et oligarchique.

Guerres, révolutions, guerres-révolutions.

Réfléchir sur les pires potentialités ne veut pas dire les prédire. Oui, la dernière période a vu un alignement stratégique dessiner clairement des coalitions possibles en cas de guerre, et nul doute que les états-majors militaires planchent sur les scenarii qui en découlent. Notons que dans ces alignements, on a des éléments instables, comme l'Inde, BRICS alliés des Etats-Unis et de la Russie et hostile à la Chine.

Surtout, les révolutions, insurrections et luttes sociales sont le facteur clef, déterminant en dernière analyse, que les géopoliticiens sont fonctionnellement incapables d'incorporer à leurs analyses. Cela dit, attention : quand je dis que ce facteur, la lutte des classes et les aspirations des exploités et opprimés, est déterminant en dernière instance, cela ne veut pas dire qu'il peut forcément empêcher les guerres globales, auxquelles conduisent les contradictions du capitalisme. Il aurait pu l'empêcher en 1914 et ne l'a pas fait, ce qui fut une grande défaite. Dès fin 1936 il ne pouvait plus empêcher la seconde guerre mondiale.

Mais l'ouverture des guerres ne met pas fin à ce facteur, bien au contraire. Il se mêle à la guerre. Lénine parlait de transformation de la guerre impérialiste en guerre civile, Trotsky de politique militaire du prolétariat, et, à contretemps, un trotskyste en dérive, Pablo, de guerres-révolutions et de révolutions-guerres : même si, dans ce dernier cas, la perspective était dangereuse car campiste, l'idée correspondait à notre époque, car c'est toujours et plus encore notre époque, à condition de faire du prolétariat, l'immense majorité, le sujet social de la révolution, et donc de la guerre-révolution.

C'est ce que nous voyons en Ukraine, à échelle de masse depuis 2022 (mais cela y avait commencé avant). En Palestine, la confiscation de la résistance nationale palestinienne par des appareils ultra-réactionnaires bloque cette possibilité, pour l'instant : ce sont en fait les formes d'organisation populaire à Irbid en Jordanie, en 1971, il y a déjà longtemps, et lors de la participation de secteurs palestiniens à la révolution syrienne, plus récemment, qui ont marqué ce dont la nation palestinienne elle aussi est capable.

Expliciter l'impensé.

Tout cela précisé, nous pouvons tenter d'envisager la manière dont les deux spectres de la guerre, celui de la guerre mondiale et celui de la guerre civile américaine, se combinent aujourd'hui. C'est là penser ce qui est généralement impensé, sinon dans des fictions (le film Civil War), mais il est nécessaire de le faire, non pour des prédictions à la Cassandre, mais pour saisir les tendances profondes et agir sur elles, voire contre elles.

Le point déterminant à comprendre, c'est qu'on ne doit pas séparer, surtout s'agissant de la première puissance impérialiste, les contradictions nationales des contradictions internationales. Ceci aide aussi à ne pas entrer dans une vision de cauchemar répétant simplement les césures de la guerre de Sécession : oui, c'est bien elle qui n'a pas été digérée, mais notre rapide parcours des Etats de la ligne de front a aussi montré que la géographie de la menace américaine interne aujourd'hui n'est pas exactement la même que celle de 1861.

Donc, si nous combinons la réflexion hypothétique sur le danger mondial et la réflexion hypothétique sur le danger américain intérieur, il apparaît que les contradictions mondiales de la multipolarité impérialiste se concentrent aux Etats-Unis. La « suprématie » américaine se manifeste aujourd'hui de cette manière-là.

L'image du premier violon et ses limites.

Et non pas comme la simple domination unilatérale d'un unique impérialisme plus puissant que tous les autres : cette unilatéralité-là a tenté de dessiner le monde, d'abord dans les années 1990, puis surtout dans les années 2001-2008, les années de Bush junior, de la seconde guerre du golfe, et de la combustion effrénée des hydrocarbures – des années catastrophiques pour l'humanité, ouvertes par les attentats d'al-Qaïda. Et ce fut un échec pour l'impérialisme américain.

J'ai, plusieurs fois, usé d'une métaphore consistant à dire qu'il n'est plus chef d'orchestre, mais premier violon. Il est passé du rang de chef d'orchestre à celui de premier violon par les paliers de la crise des subprimes, de la renonciation d'Obama à intervenir en Syrie suivie de son désistement contre-révolutionnaire en faveur de l'Iran, du premier mandat de Trump, du retrait d'Afghanistan, et y compris du feu vert donné en fait par Biden à l'invasion généralisée de l'Ukraine de février 2022, combiné à un plan de containment et d'isolement de la Russie, qui est en train d'échouer du fait, non de la Russie, mais de la Chine.

Tout cela est vrai, mais la métaphore du premier violon a une faiblesse, c'est qu'elle n'exprime pas, ou mal, la place toujours centrale des Etats-Unis, quoique n'étant plus ni le chef d'orchestre, ni même le premier gendarme mondial, mais alors qu'en même temps ils sont toujours, voire plus que jamais, le premier budget militaire (la première puissance militaire ? C'est une autre question, qui demanderait à être mise à l'épreuve …), ainsi que le centre des flux financiers, bien que le volume principal de survaleur capitaliste produite le soit en Chine et en Asie.

Le campisme se nourrit de la répétition, mais 2024 justement n'est pas 2003.

Le caractère central des Etats-Unis demeure, non en ce qu'ils mèneraient la « guerre de l'OTAN » pour « encercler la Russie » en « faisant mourir jusqu'au dernier ukrainien », comme le fantasment les campistes réactionnaires qui, dans le meilleur des cas, ont arrêté les compteurs à l'année 2003, et pas non plus en ce que Genocide Joe serait la force motrice de la guerre menée par Israël contre la population palestinienne et aussi, depuis quelques semaines, au Liban : ce sont là les croyances campistes, que nous retrouvons, je le signale ici car il va falloir en tenir compte, à la toute première page du texte sur la situation internationale adopté par le Comité international de la IV° Internationale (le successeur du « Secrétariat Unifié »), où l'on peut lire ceci :

« Il ne s'agit pas d'une guerre entre Israël et le Hamas. Il ne s'agit pas non plus de la simple continuation de la guerre qui dure depuis 75 ans [ce second point est vrai] (…)

C'est la première fois depuis l'offensive contre l'Irak en 2003 que les Etats-Unis interviennent si directement. Leur soutien en armes et en millions de dollars à Israël est décisif pour produire un massacre historique de civils. »

Ce parallèle, qui nous susurre en somme que l'histoire se répète, est erroné. En Irak, les troupes américaines intervenaient directement en 2003 : ce fut la dernière intervention directe de ce type, et son échec historique de longue portée inaugure le changement de statut du premier impérialisme mondial. Les livraisons d'armes américaines à Israël sont décisives, oui, mais elles alimentent directement les pires contradictions politiques aux Etats-Unis, à tous les niveaux. Les Etats-Unis n'ont en rien été à l'initiative, ni, bien sûr, du 7 octobre lorsque se produit la provocation pogromiste du Hamas coaché par l'Iran avec l'aval russe, ni à partir du 8 octobre dans le processus de guerre à dynamique potentiellement génocidaire engagé par l'Etat israélien. Leur place est décisive en effet mais en tant que soutiens qui suivent, pas en tant que décideurs qui impulsent, ce qui est tout à fait différent. 2024 n'est pas 2003.

En abordant son analyse de la situation mondiale par cet amalgame entre 2024 et 2003, le Comité international de la IV° Internationale inaugure les débats de son prochain congrès mondial par une régression politique, qui est elle-même une conséquence de la grande provocation réactionnaire du 7 octobre. Cette régression tend à effacer les acquis politiques du rôle de cette organisation comme précieux support du RESU/ENSU, de l'internationalisme en solidarité avec l'Ukraine. Et elle bloque, au point de vue de l'analyse, avec toutes les conséquences politiques qui risquent d'en découler, la compréhension de la place exacte de l'impérialisme américain, non pas comme chef d'orchestre, mais à l'intérieur de la multipolarité impérialiste elle-même.

Pas chef d'orchestre, mais un peu plus que premier violon : en quoi ?

En ce que les contradictions globales de la multipolarité impérialiste se concentrent dans la situation intérieure des Etats-Unis à un degré qui jamais n'avait été atteint, lorsque déjà, bien sûr, les contradictions du rôle de première puissance économique et financière et de gendarme mondial opéraient aux Etats-Unis, par exemple dans le mouvement contre la guerre du Vietnam. Aujourd'hui, ce sont la classe capitaliste et les forces politiques capitalistes nord-américaines qui sont clivées, dissociées, à un degré jamais vu depuis la guerre de Sécession, en fonction de la situation mondiale et de la place des Etats-Unis dans le monde. Les Etats-Unis sont un peu plus qu'un premier violon en tant que réceptacle de toutes les contradictions.

La force de Trump, du point de vue de la classe dominante, se situe là. Ses forces propres – son argent, le soutien mafieux des organes russes, et même sa base sociale populaire – ne suffiraient pas par elles-mêmes à expliquer l'exploit qu'a été le fait qu'après sa défaite de 2020 il n'ait pas été collé en prison (où il a sa place, du propre point de vue « bourgeois »), et qu'il ait finalement pris le contrôle du Parti républicain d'une main de fer plus forte que jamais, les responsables républicains étant morts de trouille, physiquement, car ils craignent pour eux-mêmes et leurs familles, s'ils ne le suivent pas – les plus grands personnages de l'ancienne tradition républicaine impérialiste, réactionnaires, mais favorables à l'équilibre des pouvoirs appelé aux Etats-Unis cheks and balances, comme les Cheney, la fille et le père (ancien vice-président de Bush junior), ont migré en dehors des rangs républicains, et appellent à voter Harris.

Cet exploit s'explique par la crise fondamentale qui traverse la classe dominante de sa base à ses sommets. La politique étrangère prorusse, en principe antichinoise, et protectionniste, de Trump, n'exprime pas seulement les intérêts de la mafia immobilière de la côte Est sustentée aux capitaux russes (alliance dont Trump est l'homme depuis 1987), mais plus largement ceux de larges couches capitalistes et de secteurs politiques, qui, soit admettent un relatif déclassement des Etats-Unis, soit estiment que la seule et meilleure manière pour les Etats-Unis de réaffirmer leur puissance n'est plus, et ne peut plus être, la voie « classique » héritée de 1945 et réaffirmée par Bush père en 1991 et Bush fils en 2003, la voie de l'OTAN, et du « leadership du monde occidental ».

L'impérialisme américain peut, de leur point de vue, se préparer à la guerre non pas en étant le chef d'une coalition perdante, « occidentale », mais en rebattant tout le jeu de cartes instable, notamment par les alliances russe et indienne, et en écrasant éventuellement l'Iran, d'où la carte blanche laissée à Netanyahou, malgré la crise aigüe (pas chronique, aigüe) que cela produit dans l'administration démocrate en plein affrontement présidentiel sans précédent.

Quatre scenarii … et le nôtre.

Dans les scenarii de guerre mondiale, il s'ensuit que l'option Trump et celles des forces, diverses, qui se regroupent derrière lui, ne conduit pas à l'isolationnisme « neutre » ou non-intervenant (même si c'est une option, c'est la moins bonne de leur point de vue, car c'est la capitulation et la perte du rang mondial), mais à l'intervention, mais on ne sait pas avec qui ni contre qui !

Ces scenarii se recoupant avec celui de la violence politique montante aux Etats-Unis, ouvrent une quatrième possibilité. Les trois premières possibilités théoriques sont :

– n°1 : guerre mondiale des tyrannies eurasiatiques versus les « occidentaux » sous la direction américaine,

– n°2 : guerre mondiale avec « surprise du chef » de la part des Etats-Unis faisant alliance avec la Russie et l'Inde,

– n°3 (la moins conforme aux besoins du capitalisme US) : isolement pur et simple des Etats-Unis.

La possibilité n°4 est : guerre mondiale avec éclatement des Etats-Unis eux-mêmes, traversant les Etats-Unis, les « confédérés » trumpistes marchant avec l'impérialisme russe.

Remarquons que 3 sur 4 (les 2, 3 et 4) de ces possibilités théoriques passent aujourd'hui par Trump, qui, cela dit, n'est pas non plus le moins du monde une garantie contre la n°1 !

Encore une fois : ce ne sont pas là des pronostics, ni des prédictions. Il s'agit d'identifier des tendances pour agir sur elles et contre elles. Car bien entendu la possibilité autre, la notre, est celle qui passe par la défaite de Trump, dans la mesure où cette défaite ne sera pas le fait de Harris par elle-même, mais des forces sociales autonomes qui ont un besoin vital, elles, de démocratie et de liberté.

Fascisme.

Pour saisir les enjeux, il est conseillé de s'infliger de regarder, si l'on a le temps, le meeting historique – il restera dans l'histoire quelle que soit la suite – de Trump, au Madison Square Garden à New York ce dimanche 25 octobre.

Son impact et son contenu ont fait dire à la plupart des commentateurs ce qu'ils ne disaient pas ou pas si fort : le fascisme, contemporain certes, était là et bien là.

Contemporain, mais n'oubliant pas le passé : l'hymne sudiste, confédéré, Dixie, a marqué le rassemblement. Pour ce qui est du contemporain, on a eu Elon Musk, représentant du capital s'il en est, qui a lancé, à l'intérieur du trumpisme le mouvement Dark MAGA, aile futuriste-fasciste du trumpisme, nouvel avatar, si l'on veut, actualisé aux technologies de pointe, de QAnon. Et de dangereux pitres : le catcheur bodybuildé « Hulk » Hogan, Priape ridicule (Ithyphalliques et pioupiesques, aurait dit Rimbaud !), et, dans un style remarquablement proche de celui de Joseph Goebbels, l' « humoriste » Tony Hinchcliffe, crachant la haine contre les migrants et traitant les portoricains de tas d'ordures.

Depuis dimanche, Trump a précisé qu'il était « le contraire d'un nazi », n'est-ce pas, et s'est fait imposer les mains par des évangélistes de Caroline du Nord. L'arc ultra-réactionnaire est ainsi complet.

Un appel, salutaire, de Bernie Sanders, s'adressant à ceux qui ne voudraient pas voter Harris à cause de « Gaza », a suivi cette démonstration. Mais généralement, les militants de gauche, dans le meilleur des cas, sont terriblement routiniers : de même qu'ils confondent 2024 avec 2003, ils ne voient pas que le second Trump, car nous avons affaire au second Trump, menace réellement les droits démocratiques dans tous les Etats-Unis, se constitue une base milicienne, assez hétérogène mais bien réelle et qui vient de loin, et compte modifier, sinon la lettre, au moins l'esprit de la constitution, par un renforcement sans précédent des pouvoirs présidentiels (même si ses partisans, dans la tradition confédérée, s'imaginent défendre les droits des Etats).

Project 2025, plan de la Heritage Fondation, vieille structure néoconservatrice ralliée à Trump, prévoit, pour la première fois dans l'histoire des Etats-Unis, l'intégration des syndicats à des structures les associant institutionnellement au patronat dans le secteur privé, et leur interdiction ou quasi-interdiction dans la fonction publique.

Trump promet de déporter 10 millions de migrants. Promesse en l'air ? Regardons ailleurs ? Des mots ? Mais de tels mots, c'est déjà énorme.

Il ne suffit pas de dire que les droits des femmes et des minorités sont menacés, ce qui est déjà énorme : c'est bien une tentative de modification radicale des relations sociales aux Etats-Unis qui menace. Parler de fascisme n'est pas mettre un signe égal exact avec les années 1920-1930, c'est donner la mesure de ce qui se passe.

Si …

La suite immédiate de l'élection de Trump serait le désarmement de l'Ukraine et la percée du front dans le Donbass, par la Russie et les troupes nord-coréennes qui sont en train d'y être acheminées, d'une part, et la destruction totale de Gaza ainsi que l'achèvement de l'épuration ethnique en Cisjordanie, d'autre part.

Même si l'Ukraine acculée capitulait, ce qui est peu probable et nullement souhaitable, les campistes « partisans de la paix » ne pourraient pas faire croire longtemps que la paix aurait avancé, car les troupes ou les organes russes opéreraient en Géorgie et en Moldavie et les combats se prépareraient sur les frontières finlandaise, balte, polonaise, avec Orban donnant des coups de poignards dans le dos, sûr désormais du soutien non seulement de Moscou, mais de Washington.

Le rebattage des cartes du jeu des alliances produirait hésitations et incertitudes, mais nulle stabilité, bien au contraire.

En France, le gouvernement Barnier, nommé par Macron et soutenu par Le Pen, serait conforté dans ses attaques contre « les fonctionnaires » et contre « les immigrés », ainsi que le gouvernement Melloni en Italie. La préparation d'une alternance visant à rétablir une V° République de plein exercice, avec Le Pen à la présidence et une coalition la soutenant, serait accélérée. Bien entendu, le mouvement social garderait la force d'empêcher cela, mais dans des conditions internationales dégradées. Remarquons que le mépris manifesté par Macron pour les résultats électoraux, donc pour toute démocratie, aura rejoint celui des Trump et des Bolsonaro, leur préparant le terrain.

Et la victoire de Trump, ce serait la destruction de toute bataille pour limiter le réchauffement climatique et faire face de façon responsable et solidaire à ses effets.

L'entrée de plein pied des Etats-Unis dans l'ordre/désordre de la multipolarité impérialiste sera un pas vers la barbarie la plus moderne.

Le plébiscite brun mondial des gauchistes, campistes et sectaires.

Elément d'une importance fondamentale : une victoire de Trump, ou un affrontement portant sur les résultats électoraux et basculant en sa faveur, ne sont possibles que parce que des secteurs « de gauche » veulent avant tout « punir » Genocide Joe, poussant la stupidité criminelle jusqu'à jouer ainsi en faveur de Netanyahou et cela au nom du « peuple palestinien » !!!

Le fait que l'aveuglement politique majoritaire du mouvement propalestinien sur les campus puisse conduire à une telle conséquence, ainsi que les candidatures poutiniennes de « gauche radicale » ou écologiste de Jill Stein et Cornell West, a une très forte signification politique. La convergence entre la gauche poutinienne et certains discours trumpistes est ancienne. Tous, par exemple, détestent les « révolutions oranges » et les « révolutions arabes », calomnient le peuple syrien et le peuple ukrainien. Ces convergences ne sont pas fortuites, elles sont fondamentales. Disons-le : si Trump gagne, ce sera aussi à cause d'un « plébiscite brun » de portée mondiale.

Le « plébiscite brun » a vu, en 1931, les communistes allemands ajouter leurs voix, en disant qu'ainsi le plébiscite serait « rouge », à celles des nazis, pour dissoudre le parlement prussien à majorité social-démocrate (des social-démocrates bien droitiers qui avaient réprimé des grèves, bien sûr !). Cette convergence fut une étape importante de la montée d'Hitler vers le pouvoir.

Il y a diverses manières de faire « plébiscite brun » aux Etats-Unis, et mondialement en abordant la question des Etats-Unis. La plus efficace n'est pas l'appel direct à voter Trump. C'est la négation du danger, son euphémisation, et c'est le choix de vouloir avant tout battre les politiciens impérialistes américains « classiques » que sont les démocrates.

« La Palestine » et « Gaza » sont aujourd'hui les drapeaux du plébiscite brun des gauchistes, des campistes et des sectaires en faveur de Trump. Ils ne servent de rien aux Palestiniens, qui ne méritent vraiment pas, en plus de l'oppression et des crimes qu'ils subissent, cette utilisation.

Il faudra donc aussi tirer toutes les conséquences de ce fait terrible, mais fondamental : le plébiscite brun de l'extrême-gauche, au nom des Palestiniens, pour Trump.

* * *

La voie du combat prolétarien, révolutionnaire, démocratique, indépendant, passe tout de suite par le vote Harris. C'est seulement ainsi que se prépare l'affrontement de masse avec Trump, qu'il soit élu ou qu'il conteste les résultats pendant des semaines, ou que se prépare l'affrontement social avec Harris présidente. Le plus probable est une montée rapide des tensions autour des résultats contestés. Au mouvement ouvrier d'intervenir directement là-dedans, il le faudra !

Nous saluons nos camarades américains, engagés dans ce combat, qui, depuis les affrontements politiques français, comme depuis les tranchées ukrainiennes ou les camps palestiniens pilonnés et affamés, intéresse tous les combattants de l'émancipation, dans le monde entier.

Vincent Présumey, le 28 octobre 2024.

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Soudan : faim extrême et déplacements forcés en plus d’un an de guerre

5 novembre 2024, par Bianca Pessoa — , ,
Des militantes soudanaises analysent les impacts du conflit qui a déjà déplacé 10 millions de personnes Tiré de Entre les lignes et les mots (…)

Des militantes soudanaises analysent les impacts du conflit qui a déjà déplacé 10 millions de personnes

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/10/29/soudan-faim-extreme-et-deplacements-forces-en-plus-dun-an-de-guerre/

Depuis avril 2023, une violente guerre civile s'est emparée du Soudan dans un différend pour le pouvoir et les territoires entre les forces armées soudanaises et le groupe paramilitaire connu sous le nom de Forces de soutien rapide (RSF en anglais). Depuis le début de cette nouvelle phase du conflit, plus de 10 millions de personnes ont été déplacées et environ 70% de la population meurt de faim.

L'histoire des guerres civiles dans le pays n'est pas récente. Depuis les luttes pour l'indépendance, le Soudan a connu une série de conflits internes, alimentés par des différends et des ingérences extérieures. La première guerre civile, qui a duré entre 1955 et 1972, a marqué les différences entre le sud et le nord du pays, les sudistes réclamant plus d'autonomie régionale. Un autre conflit a éclaté en 2003 et s'étend jusqu'à nos jours dans la région du Darfour, à l'ouest du Soudan, une région riche en ressources naturelles telles que l'or. La guerre actuelle a éclaté en raison d'un désaccord sur la période d'intégration des RSF dans les Forces armées, dans le cadre des revendications non résolues de la Révolution populaire soudanaise de 2018.

Cet article rassemble des analyses présentées lors des activités « La guerre au Soudan : perspectives de la gauche », organisées par l'Assemblée Internationale des Peuples (AIP), Peoples Dispatch et le magazine Madaar en juillet 2024 et « Tracer la route des conflits africains oubliés », organisé par la Marche Mondiale des Femmes (MMF) Afrique du Sud en septembre.

Dispute sur les territoires et les richesses naturelles

Pour Niamat Kuku, membre du Comité central du Parti communiste du Soudan et militante des droits humains, le contexte avant la guerre et pendant la période de transition était celui d'une lutte de classe intense. « Ceux qui s'opposaient à la révolution étaient contre toutes les femmes, les paysans et les paysannes et tous les autres segments sociaux à l'exception des politiciens islamiques », a déclaré Niamat. Cette opposition antipopulaire bénéficiait d'un fort soutien de forces extérieures : « nous avons été confrontés aux menaces de forces étrangères, d'ingérence et d'intervention au Soudan, y compris l'intervention de l'Égypte et des Émirats arabes unis, des pays qui ont un grand intérêt pour nos ressources ».

L'ingérence internationale est devenue de plus en plus intense à mesure que la révolution soudanaise a eu lieu, dans le cadre de la lutte pour la souveraineté nationale sur les ressources du pays. « La situation géographique du Soudan permet de se diriger vers la Méditerranée ou l'océan Atlantique. Nous avons une grande réserve d'eau douce, des terres fertiles pour l'agriculture, des minéraux, de l'uranium, de l'or, de l'argent, même la qualité de notre sable est excellente. Nous avons une population diversifiée et un grand patrimoine humanitaire et civilisationnel. Ce sont des éléments qui font que le Soudan intéresse de nombreuses forces régionales et internationales », explique Randa Mohammed, membre de l'Union des femmes soudanaises [Sudanese Women's Union].

Les organisations et les forces révolutionnaires ont commencé à dénoncer le coup d'État en cours depuis fin 2021. Les caractéristiques de la guerre sont devenues plus évidentes à mesure que de plus en plus d'armes ont été apportées de l'extérieur. « Ce n'est pas seulement une guerre économique entre deux généraux, et ce n'est pas non plus un conflit entre un général national et des puissances extérieures, mais c'est un conflit mené par des agendas extérieurs qui manipulent l'environnement social. Nous sommes entourés de pays et de gouvernements qui sont totalement opposés à un nouveau gouvernement démocratique au Soudan », conclut Niamat.

Attaques contre des établissements de santé, impacts sur la vie des gens

La docteure Ihisan Fagiri, également de l'Union des femmes soudanaises, a déclaré que la guerre violente d'aujourd'hui visait essentiellement le peuple soudanais qui a combattu lors de la révolution de décembre 2018. Depuis lors, les deux camps ont commis des crimes contre l'humanité, ce qui a eu de nombreux impacts, en particulier sur le système de santé déjà fragile du pays. « Notre secteur de la santé a été affaibli par le Fonds monétaire international, ce qui a entraîné l'épuisement des ressources hospitalières et la fermeture et privatisation de tous les services de santé », explique Ihisan.

Après le déclenchement de la guerre le 15 avril 2023, l'impact sur les établissements de santé a été très grave, puisque la plupart des hôpitaux ont été occupés par les milices ou détruits par l'armée. Selon le rapport préliminaire du Comité du Syndicat des médecins, présenté par Ihisan lors de l'activité de la Marche Mondiale des Femmes, au cours des deux premières semaines de la guerre dans la capitale Khartoum, plus de 70% des hôpitaux étaient hors service ou détruits. « Le premier hôpital occupé par la milice était la maternité d'Omdurman. Cela nous donne un indice sur leur mentalité envers les femmes et leur santé, et sur la façon dont les femmes paient la facture de cette guerre », explique Ihisan Fagiri.

La détérioration de la santé au Soudan a été exacerbée par un certain nombre d'autres facteurs, notamment les pénuries d'eau potable, l'assainissement inadéquat et le manque d'hygiène de base. La situation s'est aggravée lors de catastrophes amplifiées par la crise climatique, telles que les pluies et les inondations, qui ont détruit des maisons et laissé de nombreuses personnes sans abri dans les rues, augmentant la propagation de maladies telles que la diarrhée, le paludisme, la dysenterie et la typhoïde. De plus, la population du pays souffre de coupures d'électricité et du manque de traitement approprié des corps des victimes du conflit.

Omayma Elmardi, de la MMF au Soudan, a parlé des impacts de la guerre sur différents groupes ethniques, les femmes et les filles soudanaises. « La guerre a provoqué des déplacements massifs, des meurtres parmi les civils réfugiés, la destruction d'institutions publiques, de marchés, d'hôpitaux et de biens. Les femmes et les filles craignent pour leur sécurité personnelle dans les zones de conflit et sont soumises à toutes sortes de violences, au manque de services de santé, de nourriture, de sûreté et de sécurité ».

Migrations forcées

Les femmes et leurs familles ont été forcées de quitter leurs maisons pour fuir la violence. Ils ont eu un certain soutien des Comités de Résistance, qui sont composés de différentes entités et organisent, par exemple, la distribution de nourriture. « Mais l'aide humanitaire est très rare et limitée. Les Nations Unies disent qu'elles fournissent une aide humanitaire à cinq millions de personnes, mais au moins 15 millions ont encore besoin d'une aide humanitaire et maintenant 25 millions de la population totale du Soudan de 47 millions risquent de souffrir de la faim et de la malnutrition. Dans le camp de Zamzam, toutes les heures, deux enfants meurent », a déclaré Randa Mohammed.

Le déplacement interne de millions de personnes en raison de la violence a entraîné un afflux de réfugiés qui surpeuplent les quelques établissements de santé qui fonctionnent encore dans certaines régions, épuisant les ressources et entravant la capacité de répondre à cette importante demande de la population.

Les camps de réfugiés s'étendent au-delà des frontières du pays alors que les Soudanais demandent l'asile dans les pays voisins. En Égypte, qui abrite déjà des centaines de personnes en exil, le gouvernement a empêché les avocats d'assister les nouvelles demandes d'asile. En Éthiopie, l'augmentation de la migration soudanaise a amplifié la crise migratoire déjà présente dans le pays, qui abrite également des migrant.e.s d'autres conflits de la région.

La vie des femmes qui, à travers le monde, font face à des situations de guerre ou de dictatures a été un point de réflexion lors des deux activités. Les camarades du Soudan y ont exprimé une solidarité sans restriction avec les femmes qui résistent aux conflits et aux guerres qui se déroulent actuellement en Palestine et en République démocratique du Congo. Comme l'a rappelé Ihisan, « en général, lors de tout conflit, les épées sont pointées sur les femmes qui paient le prix de la guerre sous la forme de meurtres, d'expulsions et de viols ». Compte tenu de cela, le féminisme doit être positionné avec force dans la lutte contre les guerres, les génocides et les conflits armés motivés par la cupidité impérialiste et détruisant des vies et des communautés. Ihisan poursuit : « Nous devons mettre fin à cette guerre et obtenir des passages et des chemins sûrs et sécurisés pour la livraison de médicaments et de nourriture. L'union des femmes soudanaises préconise la participation des femmes à tous les processus de rétablissement de la paix. C'est l'étape la plus importante pour mettre fin à la guerre ».

Écrit par Bianca Pessoa
Édition et révision par Helena Zelic et Tica Moreno
Traduit du portugais par Andréia Manfrin Alves

https://capiremov.org/fr/analyse/soudan-faim-extreme-et-deplacements-forces-en-plus-dun-an-de-guerre/

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

France - Cancer du sein - Assemblée nationale française :« {Remboursement intégral des soins liés au cancer du sein. »}

5 novembre 2024, par Parti Communiste de France (PCF) — , ,
Après l'Assemblée Nationale, notre proposition de loi pour le remboursement intégral des soins liés au cancer du sein vient d'être adoptée au Sénat ! Le résultat d'un (…)

Après l'Assemblée Nationale, notre proposition de loi pour le remboursement intégral des soins liés au cancer du sein vient d'être adoptée au Sénat !

Le résultat d'un travail législatif de grande qualité.

Depuis plus d'un an, le PCF mène campagne et porte cette proposition de loi relative à la prise en charge par l'Assurance maladie des soins liés au traitement du cancer du sein depuis la rencontre marquante avec Marie-Noëlle Martin dans une réunion publique sur les droits des femmes à Aurillac...

Touchée par la maladie, Marie-Noëlle avait listé et dénoncé les restes à charge importants auxquels elle devait faire face notamment en matière de soins dits supports - très mal nommés "de confort" - pourtant indispensables pour tolérer les traitements et se reconstruire physiquement et psychologiquement.

ON S'ÉTAIT ALORS PROMIS D'ALLER JUSQU'AU BOUT !

Cette victoire est la conséquence d'un travail commun et de longue haleine.

Avec Shirley Wirden, responsable de la commission Féministe et Droits des femmes du PCF ;
Avec Yannick Monnet et Fabien Roussel, les co-auteurs de la loi à l'Assemblée nationale et nos député·es GDR ;
Avec Marie-Noëlle Martin, et toutes ces femmes qui trouvent la force de se battre pour plus de justice ;
Avec Anthony Goncalves, oncologue et membre du Conseil national du PCF ;
Avec Cathy Apourceau-Poly, rapporteure de la proposition au Sénat, et tou·tes nos sénateurs et sénatrices du groupe CRCE-K
et avec vous, signataires de notre pétition, membres du parti, sympathisant·es.
SOYONS FIER·ÈRES D'AVOIR GAGNÉ CETTE BATAILLE !

La suite...

C'est maintenant la dernière ligne droite avec un retour à l'Assemblée pour mettre fin à une inégalité face à cette maladie qui touche une femme sur huit, qui cause le plus grand nombre de décès chez la femme et dont le nombre annuel de nouveaux cas a presque doublé en 30 ans.

Une fois la loi adoptée, ces soins seront enfin considérés comme de première nécessité et les dépassements d'honoraires seront encadrés.

Activité physique adaptée, consultations de diététique, prothèses capillaires et mammaires... Alors que plus de 60.000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année, le cancer du sein place de nombreuses femmes dans une situation financière fragile, entre un reste à charge souvent élevé et de nombreuses dépenses relatives à des soins annexes - et non-remboursés - ou à l'achat d'accessoires (sous-vêtements adaptés, crèmes, vernis contre la chute des ongles...).

Et encore après ?

Après ? On continue avec les autres cancers, on se bat pour un véritable service public de la santé, contre les déserts médicaux, pour une prise en charge à 100% par la sécurité sociale de toutes les maladies !

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Deux milliards de femmes n’ont pas accès à la protection sociale

5 novembre 2024, par news.un.org — ,
Tiré de Entre les lignes et les mots https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/10/28/deux-milliards-de-femmes-nont-pas-acces-a-la-protection-sociale/ Des (…)

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/10/28/deux-milliards-de-femmes-nont-pas-acces-a-la-protection-sociale/

Des prestations en espèces aux soins de santé et aux pensions, les politiques ne s'étendent pas à un nombre suffisant de femmes et de filles, ce qui les rend plus vulnérables à la pauvreté dans le monde entier, avertit un nouveau rapport d'ONU Femmes.

L'écart entre les hommes et les femmes en matière de protection sociale s'accroit, souligne le rapport publié à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, célébrée le 17 octobre.

Le rapport révèle qu'un nombre alarmant de deux milliards de femmes et de filles n'ont accès à aucune forme de protection sociale.

Malgré quelques progrès depuis 2015, les disparités entre les sexes en matière de couverture sociale se sont creusées dans la plupart des régions en développement, ce qui suggère que les progrès récents ont profité de manière disproportionnée aux hommes. Cette situation met en péril les progrès accomplis dans la réalisation de l'objectif de développement durable n°5 (ODD 5)

Le poids croissant de la pauvreté liée au genre

Le rapport peint un tableau sombre de la pauvreté sexospécifique, montrant que les femmes et les filles sont surreprésentées parmi les pauvres à tous les stades de la vie, les disparités les plus importantes étant observées pendant les années de procréation.

Les femmes âgées de 25 à 34 ans sont 25% plus susceptibles que les hommes de la même tranche d'âge de vivre dans l'extrême pauvreté.

Les conflits et le changement climatique continuent d'exacerber cette inégalité, les femmes vivant dans des environnements fragiles étant 7,7 fois plus susceptibles de vivre dans l'extrême pauvreté que celles vivant dans des régions stables.

En outre, les taux d'inflation élevés enregistrés depuis 2022 ont fait grimper les prix des denrées alimentaires et de l'énergie, ce qui touche les femmes de plein fouet.

Pourtant, sur près de 1 000 mesures de protection sociale adoptées par les gouvernements de 171 pays dans les mois qui ont suivi, seules 18% visaient la sécurité économique des femmes, signale le rapport.

Cela montre que les risques et les vulnérabilités propres à chaque sexe sont souvent négligés à la suite d'un choc.

L'état lamentable de la protection de la maternité

Plus de 63% des femmes accouchent encore sans avoir accès à des prestations de maternité, au niveau mondial. Ce chiffre atteint 94% en Afrique subsaharienne.

Le manque de soutien financier pendant le congé de maternité place non seulement les femmes dans une situation économique défavorable, mais compromet également leur santé et leur bien-être ainsi que ceux de leurs enfants, perpétuant ainsi la pauvreté d'une génération à l'autre.

Des exemples phares

Il existe néanmoins des exemples prometteurs de progrès.

En Mongolie, les prestations de congé de maternité ont été étendues aux travailleurs informels, tels que les éleveurs et les travailleurs indépendants. Le congé de paternité a également été renforcé pour soutenir l'égalité des sexes dans les responsabilités de soins.

Au Sénégal, le régime national d'assurance maladie a étendu ses services pour mieux répondre aux besoins des femmes rurales, avec le soutien d'ONU Femmes.

« Le potentiel de la protection sociale pour l'égalité des sexes, la résilience et la transformation est énorme. Pour l'exploiter, nous devons centrer la dignité, l'agence et l'autonomisation des femmes et des filles à chaque étape du processus – de la conception des politiques et des programmes à la fourniture et au financement », a souligné Sarah Hendriks, la Directrice de la Division des politiques, des programmes et des affaires intergouvernementales d'ONU Femmes.

https://news.un.org/fr/story/2024/10/1149776

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Ni les femmes, ni la terre ne sont des territoires de conquête – Déclaration commune des Articulations des femmes d’ARNA et d’ECVC

5 novembre 2024, par Coordination Européenne Via Campesina, — , ,
Nous, les femmes de la Région Arabe et Afrique du Nord de LVC et de la Coordination européenne Via Campesina, nous sommes rassemblées en Galice du 27 septembre au 1er octobre (…)

Nous, les femmes de la Région Arabe et Afrique du Nord de LVC et de la Coordination européenne Via Campesina, nous sommes rassemblées en Galice du 27 septembre au 1er octobre 2024, pour échanger sur nos conditions de vie et de travail en tant que femmes* paysannes* dans nos contextes respectifs, afin d'apprendre les unes les autres et d'identifier nos luttes communes.

Ensemble, nous nous opposons vigoureusement au système néolibéral et patriarcal, basé sur l'exploitation du travail des femmes : Les femmes effectuent une part importante du travail agricole mais ne possèdent souvent pas les moyens de production et les ressources. Elles produisent des denrées alimentaires destinées à l'exportation qu'elles ne peuvent s'offrir.

Les paysannes et les travailleuses rurales jouent un rôle majeur dans la société et ce rôle n'est pas reconnu. Les femmes assurent 70% de la production agricole ; elles s'occupent également de 80% des travaux domestiques, assumant ainsi une triple charge de travail.

Nous jouons un rôle fondamental dans l'accession de nos territoires à la souveraineté alimentaire ; nous prenons soin de nos champs et de nos familles, et protégeons la planète dans notre travail quotidien.

En temps de guerre et de crise, nous soutenons les luttes des femmes paysannes dans nos régions, défendons résolument la paix, et condamnons la militarisation croissante du monde. Ensemble, nous tenons à exprimer notre solidarité avec toutes les femmes qui souffrent de la violence et de la guerre dans le monde. Nous restons aussi unies avec les femmes palestiniennes, libanaises et soudanaises qui, en temps de guerre et d'occupation, poursuivent leur lutte pour l'autodétermination et la liberté. Nous condamnons et dénonçons la guerre continue qu'Israël mène à Gaza, de même que les attaques israéliennes contre le Liban. Nous appelons à un cessez-le-feu immédiat dans la région et à la fin du génocide qui, à ce jour, a tué des dizaines de milliers de personnes.

Nous réaffirmons la nécessité urgente de respecter le droit à la vie, à une vie digne, pour toutes les femmes du monde.

Ensemble, nous réitérons notre engagement à travailler main dans la main pour la souveraineté alimentaire, et pour mettre fin à toute forme de violence, d'exploitation sexuelle et de discrimination aux niveaux individuel et institutionnel à l'égard des femmes et des filles.

Dans le système existant, les femmes paysannes sont exclues à bien des égards en matière d'égalité d'accès aux ressources, aux services publics et professionnels, ainsi qu'en termes de participation égale à nos organisations locales et aux espaces publics et décisionnels.

Aujourd'hui, nous sommes unies et réaffirmons notre lutte commune :

pour l'égalité d'accès à la terre, à l'eau, aux semences et à toutes les autres ressources naturelles, qui garantira aux femmes l'égalité des droits à la propriété foncière et un statut juridique reconnu de paysannes ;

contre toutes les formes de discrimination et de violence qui frappent les femmes (intersectionnalité, race, identité de genre et orientation sexuelle) ;

pour le plein accès des paysannes et des travailleuses rurales aux services professionnels et à la sécurité sociale ;

pour un accès complet à l'information et aux formations ;

pour la participation pleine et entière des femmes paysannes dans leurs organisations, ainsi que dans les espaces de politique publique et de prise de décision ;

pour la pleine égalité des droits socio-économiques des travailleuses migrantes dans nos régions ;

pour des prix équitables pour les aliments produits par les paysans ;

pour un partage égal et coresponsable des soins basé sur un modèle de communauté publique ;

pour un accès sûr et égal à tous les services publics, y compris les transports, ainsi qu'une répartition équitable des subventions publiques.

Nous nous engageons à poursuivre activement le renforcement des alliances au sein de nos propres organisations et avec les organisations sociales et féministes.

Sans féminisme, il n'y a pas de souveraineté alimentaire ! Internationalisons la lutte, internationalisons l'espoir !

Cette publication est également disponible en English.

https://viacampesina.org/fr/ni-les-femmes-ni-la-terre-ne-sont-des-territoires-de-conquete-declaration-commune-des-articulations-des-femmes-darna-et-decvc/

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

Ahou Daryaei, l’étudiante iranienne qui lève le voile a été arrêtée

5 novembre 2024, par Pierre Chaillan — , ,
Ahou Daryaei, l'étudiante iranienne de l'université Azad de Téhéran s'était dévêtue en signe de protestation contre le harcèlement de miliciens des gardiens de la révolution. (…)

Ahou Daryaei, l'étudiante iranienne de l'université Azad de Téhéran s'était dévêtue en signe de protestation contre le harcèlement de miliciens des gardiens de la révolution. Elle a été arrêtée, ont rapporté des groupes militants sur les réseaux sociaux le 2 novembre.

Par Pierre Chaillan,
Tiré de L'Humanité, France, le dimanche 3 novembre 2024

https://www.humanite.fr/en-debat/iran/ahou-daryaei-letudiante-iranienne-qui-leve-le-voile-a-ete-arretee

L'étudiante iranienne de l'université Azad de Téhéran qui s'était dévêtue en signe de protestation contrele harcèlement de miliciens <https:/www.humanite.fr/monde/ali-k...>'>des gardiens de la révolutiona été arrêtée, ont rapporté des groupes militants sur les réseaux sociaux le 2 novembre. Une vidéo de son geste de protestation circule largement depuis.

On y voit Ahou Daryaei, âgée de 30 ans et étudiante en français, en petite tenue alors qu'un gardien est en train d'intervenir. De nombreuses Iraniennes se sont solidarisées./« Une étudiante harcelée par la police des mœurs à cause de son hidjab ”inapproprié” n'a pas reculé. Elle a transformé son corps en manifestation »,/a réagi la journaliste Masih Alinejad sur son compte X.//Cette affaire survient un peu plus de deux ans après la mort de https://www.humanite.fr/monde/droit...>
,">Jina Mahsa Amini qui avait déclenchéle mouvementhttps://www.humanite.fr/monde/iran/...>
.">Femme, vie, liberté

Une vidéo de son geste de protestation circule largement. Ahou Daryaei, âgée de 30 ans, enlève ses vêtements, contre le harcèlement des gardiens de la révolution.

*Une suggestion de lecture de André Cloutier, Montréal, 3 novembre 2024

*****

Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d'avoir accès aux articles publiés chaque semaine.

Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d'avoir accès à ces articles.

Remplir le formulaire ci-dessous et cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :

Abonnez-vous à la lettre

Le programme PAFI, vous connaissez ? PAFI pour programme d'aide financière à l'investissement.

6554 résultat(s).
Regroupement des médias critiques de gauche (RMCG)

gauche.media

Gauche.media est un fil en continu des publications paraissant sur les sites des médias membres du Regroupement des médias critiques de gauche (RMCG). Le Regroupement rassemble des publications écrites, imprimées ou numériques, qui partagent une même sensibilité politique progressiste. Il vise à encourager les contacts entre les médias de gauche en offrant un lieu de discussion, de partage et de mise en commun de nos pratiques.

En savoir plus

Membres