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Le Festival de la décroissance conviviale dans la forêt Steinberg

4 juin 2024, par Marc Bonhomme — ,
On connaît l'organisation citoyenne Mobilisation 6600 du quartier Hochelaga Maisonneuve à Montréal pour sa lutte acharnée pour la transformation en parc nature de l'immense (…)

On connaît l'organisation citoyenne Mobilisation 6600 du quartier Hochelaga Maisonneuve à Montréal pour sa lutte acharnée pour la transformation en parc nature de l'immense friche L'Assomption, assemblage contigu de plusieurs composantes (l'ancienne cour de triage du CN devenue une mini-forêt poussant à travers les rails, l'ancienne usine Canadian Steel Foundries achetée par Raymond Logistique qui a rasé la forêt naissante pour une plateforme de containers, la « forêt Steinberg » devenu emboisée depuis longtemps avec ses milieux humides vestiges du ruisseau Molson et le petit boisé Vimont devenu la forêt enchantée des enfants).

Depuis des années de lutte sans relâche, Mob6600 a créé des liens avec d'autres groupes menant des combats semblables et avec le mouvement écologique dans son ensemble. Son noyau militant s'est intéressé à la théorie écologique, à l'analyse des luttes écologiques et à leur stratégie. Telle était la raison d'être du Festival de la décroissance conviviale organisé dans la forêt Steinberg sur toute la journée du samedi 1er juin. La cinquantaine de gens y participant ont écouté et discuté avec des militants et militantes du groupe de recherche Polémos, de l'IRIS, de Rage climatique, de Travailleuses et travailleurs pour la justice climatique (TJC) et de Mob6600. Ont clos la journée des conférences de Yves-Marie Abraham de Polémos à propos de « l'esquisse géographique d'un monde post-croissance » et de Dalie Giroux sur les « figures de gratuité » que j'ai ratées pour cause d'un vieux corps qui demandait son dû.

Incompatible avec le capitalisme, la décroissance exige quel mode démocratique ?

Louis Marion de Polémos a théorisé la décroissance comme signifiant produire moins, partager plus et décider ensemble. La décroissance implique une sortie du capitalisme du simple fait du partage et de la décision collective. Plus fondamentalement, aurait-t-il pu préciser, la croissance est inhérente au capitalisme. La compétitivité entre capitaux, aujourd'hui titanesque, conduit inéluctablement à leur accumulation par leur nécessaire réalisation en argent sonnant afin de recommencer à une plus grande échelle un cycle sans fin faute de périr par la banqueroute. Tel est le fondement de la consommation de masse, de la course aux armements et de plus en plus de la gargantuesque ingénierie de la résorption des GES. Dans une société de décroissance, la relation entre les gens primera sur celle vis-à-vis les choses dont la propriété combinera des droits conjoints tout en éliminant le droit de nuire implicite à l'exclusive propriété capitaliste.

Les choix politiques du décider ensemble s'élargiront à l'économie et à la technique. C'est là la planification démocratique. Reste en suspens les formes de la démocratie. Le conférencier récuse l'anarchie car même l'organisation confédérative ne règle pas la question clef de l'arbitrage entre base et sommet. L'État demeurerait nécessaire car il faudra que les experts éclairent les assemblées délibératives. Il me semble qu'il y a ici un danger d'un platonicien « gouvernement des sages » manipulateur. Ne serait-ce pas la dynamique de l'affrontement des partis qui aurait la capacité de corriger les erreurs des décisions collectives en autant que la dictature de quelque sage ne vienne la contrer ? Faire l'hypothèse que les assemblées populaires ne puissent adéquatement prendre en compte les intérêts des générations futures et de la nature ne révèle-t-il pas un préjugé de « sage » ? On peut penser que la sagesse collective sans cesse réajustée résultera en davantage de services publics et d'agriculture biologique et beaucoup moins d'énergivore production matérielle assise sur la sobriété, la consommation collective, la durabilité et la réparabilité.

Les mythiques croissance verte et économie circulaire contournent la difficulté

Ambre Fourrier aussi de Polémos a tâché de déboulonner les mythes de la croissance verte et de l'économie circulaire. Toutes les études démontrent que le découplage absolu entre croissance du PIB et croissance des GES sur le long terme et pour une proportion significative de la population mondiale est inexistant, y compris pour le « modèle » norvégien, malgré la croissance du rapport services versus produits tangibles, la prétention à l'intégration des externalités dans les coûts de production et surtout la légende urbaine de l'innovation technologique substituant l'immatériel au matériel. En plus, il faudrait mesurer le découplage non seulement par rapport aux réducteurs GES mais à l'incommensurable biodiversité. Il n'y a là rien de surprenant puisque le capitalisme prédateur ne se distingue pas par la rareté des produits mais par un trop-plein consumériste accaparé par certains, le 1%, le 10% et même jusqu'à un certain point le 40% de la dite classe moyenne, aux dépens de la majorité d'où l'apparence de rareté.

Si l'économie circulaire demeure une solution en dernière instance, elle est une fausse solution de prime abord. La production de masse et celle d'armements, circulaire ou non, reste un problème à résoudre. La minimisation des coûts pour fabriquer un produit technologiquement complexe (plastique, batterie) n'en fait pas un produit inhéremment ni facilement recyclable ni sans production minimum de déchets au cours de son processus de production, et ni durable. Tant le recyclage du produit final que celui des déchets, en autant qu'ils sont possibles, en deviennent énergivores et polluants. Le conte de fées de l'économie circulaire tricote une liaison fantaisiste avec le mode de production autochtone tout en permettant de dépolitiser l'économie c'est-à-dire de justifier le statu quo du tout marché et la prééminence des entreprises maîtresses du processus. Le recyclage n'est-il pas une invention de l'industrie du plastique ? Il ignore le principe scientifique de l'entropie qui prouve l'inéluctabilité de la dégradation de la production matérielle. Il reste silencieux sur la rigidité des filières du recyclage face au continuel changement des produits finaux, conséquence réellement existante de l'innovation technologique compétitive du capitalisme.

La coalition décroissanciste a besoin de la lutte des classes pour vaincre

Colin Pratte de l'IRIS a été frappé par l'absence de la référence à la lutte des classes de la part des penseurs de la décroissance tout en constatant la grande méfiance du monde du travail vis-à-vis cette idée. Il y voit deux explications. Le point d'entrée de la compréhension de la réalité des penseurs de la lutte des classes est le monde du travail où traditionnellement a été confinée la lutte des classes. Les tenants de la décroissance appréhendent plutôt la réalité par le biais des conditions d'existence, de la reproduction sociale, de l'écosphère. En résultent deux imaginaires opposés conduisant les uns vers le monde prométhéen du productivisme et les autres vers l'idéalisation du bucolisme. L'écosocialisme a beau tenter une réconciliation des deux imaginaires, il n'en découle pas la disparition de la méfiance ouvrière vis-à-vis le décroissancisme.

Cette contradiction a engendré une alliance de classe particulière, celle des intellectuels organiques de l'écologie avec la catégorie sociale des personnes exclues du système, en particulier les autochtones et les paysans surtout dans les pays dépendants, mais aussi le peuple travailleur en tant que villageois et résident de quartiers. Toutefois, sans l'apport de la classe ouvrière organisée sur les lieux de travail, cette alliance ne saurait remporter de victoires stratégiques pour lesquelles il faut un mouvement gréviste touchant l'appareil productif d'où origine le profit. Après tout, les millionnaires du monde, soit le 1%, grèveront au rythme actuel 75% du budget carbone restant pour ne pas hausser de façon pérenne de 1.5°C la température terrestre par rapport à l'époque préindustrielle. La lutte climatique est donc une lutte de classe. Ce sont ces millionnaires et milliardaires qui imposent cette consommation de masse qui, même réduite au seuil de pauvreté, ferait que l'ensemble de la population québécoise consommerait quand même deux fois plus de ressources naturelles que le minimum requis.

Comment convaincre le prolétariat organisé d'entreprendre cette lutte pour la survie de l'humanité mais qui paraît dans l'immédiat menacer son niveau de vie et même son emploi ? C'est la question que le conférencier a posé aux petits ateliers de quinze minutes après sa conférence. On a proposé des nationalisations, en particulier de Northvolt, le recyclage des emplois, le revenu de base garanti, le revenu maximum, même le rationnement comme lors de la Deuxième guerre mondiale. A aussi été proposée la baisse du temps de travail tout en expliquant que baisse du niveau de vie n'équivaut pas à baisse du niveau de bien-être si, par exemple, le prolétariat habite des logements collectifs de qualité dans des « quartiers 15 minutes » desservis par une infrastructure adéquate de transport actif et de transport en commun gratuit et fréquents jusqu'au moindre village.

Mobiliser tous les niveaux politiques et entreprendre la conquête des syndiqué-e-s

Cette deuxième conférence s'est terminée par un panel de militantes et militants de Rage climatique, des TJC et de Mob6600. On a constaté des modes d'organisation fort différents allant du mode anarchiste sans adhésion formelle ni mécanisme de fonctionnement collectif, sans même de direction élue, de Mob6600 jusqu'à celui démocratique traditionnelles des TJC en passant par celui en comités de travail, particulièrement sur Northvolt, de Rage climatique avec décision consensuelle en assemblées générales. Mob6600 pratique la diversité des tactiques pour s'adapter aux divers niveaux politiques allant de pétitions à des blocages en passant par des manifestations et une abondance d'activités culturelles qui sont presque sa marque de commerce. Rage climatique, constatant l'insuffisance du BAPE pour arrêter Northvolt, participe et pousse au blocage.

TJC, pour gagner les syndicalistes de l'éducation, secteur plus favorable aux luttes climatiques, mise sur la discussion lors des assemblées syndicales pour soit inclure une clause climatique dans les conventions ou initier une campagne « Sortir du gaz » des lieux de travail. Dans les milieux syndicaux plus difficiles à pénétrer, il faut miser sur le respect mutuel entre collègues et sur la rigueur démocratique des assemblées. Une travailleuse de Bombardier, membre des TJC à cause de l'avenir de son enfant, sera plus écoutée par ses collègues comme elle impliqués dans la fabrication de jets privés, peut-être le pire produit anti-climat qui soit. Le projet TJC d'états généraux sur l'éducation vise à poser la question cruciale de la formation de la jeunesse pour s'adapter au monde tel qu'il est ou pour le transformer de fond en comble. Plus fondamentalement se pose la question de la possibilité de transformer une organisation syndicale fort bureaucratisée ou la contourner.

Il y a loin de la coupe aux lèvres surtout quand dérape le soutien politique

Comment Mob6600 peut-il vaincre la grande coalition étatique-patronale du Port de Montréal sous juridiction fédérale et avec un conseil d'administration à majorité patronale, de Raymond Logistique, du gouvernement québécois et de la Ville de Montréal sans l'appui proactif jusqu'à la grève du syndicat des débardeurs et de la gent étudiante du Cégep Maisonneuve ? Comment Rage climatique peut-il arrêter la transnationale Northvolt ou changer sa vocation, celle-ci étant appuyée par les transnationales de l'automobile avides de batteries et étant soutenue par de les subventions milliardaires d'Ottawa et de Québec ?

Un peu au bout du rouleau lors de ce panel final, je n'ai pas été assez prompt pour souligner le grand oublié de la discussion soit la promotion de la décroissance sur la scène proprement politique ce qui devrait être la responsabilité de Québec solidaire. Bien que le comité de coordination élargi de la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve de Québec solidaire, où se situe la forêt Steinberg, ait proposé l'amendement d'ajouter au nouveau simili-programme Solidaire, dite Déclaration de Saguenay, la promotion de « la décroissance de la surproduction », celui-ci fut battu. De même fut défait l'amendement que l'usine Northvolt donne la priorité à la production de batteries pour le transport en commun alors que l'on sait que selon l'IRIS « [l]'Agence internationale de l'énergie prévoit qu'en 2030, 90 % des batteries produites dans le monde alimenteront des automobiles individuelles et seulement 3,5 % propulseront des autobus. »

Jusqu'où ira le recentrage centregauche à la NPD du grand parti de la gauche québécoise ?

Marc Bonhomme, 3 juin 2024
https://www.marcbonhomme.com

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Transition énergétique ou militaire ? La subvention par l’armée américaine d’un projet de mine de graphite près de Montréal provoque la colère de la société civile

4 juin 2024, par Alliance Municipalités de Petite-Nation Nord, Artistes pour la paix, Coalition pour que le Québec ait meilleure mine !, Eau Secours, MiningWatch Canada, Regroupement de Protection des Lacs de la Petite-Nation — ,
Du jamais vu au Québec. Le financement de la minière Lomiko Metals par le Département de la Défense des États-Unis provoque la consternation au sein de la population locale (…)

Du jamais vu au Québec. Le financement de la minière Lomiko Metals par le Département de la Défense des États-Unis provoque la consternation au sein de la population locale opposée au projet La Loutre.

Le 16 mai dernier, le Département de la Défense des États-Unis (DoD) a annoncé qu'il finançait la minière Lomiko Metals Inc. (Lomiko) à la hauteur de 8,35 M $US pour développer son projet de mine à ciel ouvert de graphite au Québec dans la Petite-Nation, au cœur de la zone récréotouristique du triangle Montréal/Ottawa/Mont-Tremblant. Le ministère fédéral canadien de l'Énergie et des Ressources naturelles ajoute également une subvention de 4,9 M $CAD. Ce projet ne bénéficie d'aucun appui des populations et organisations locales. Celles-ci, soutenues par plusieurs groupes environnementaux nationaux, dénoncent vivement cette ingérence américaine dans l'appropriation du territoire québécois à des fins militaires. Le 6 août 2023, 450 personnes ont manifesté dans les rues de Lac-des-Plages contre ce projet minier. Des dizaines de pancartes contre l'activité minière sont affichées partout dans la région.

Depuis des années, sans en faire la démonstration, Lomiko Metals fait la promotion de ce projet minier comme étant essentiel à la transition énergétique et à l'électrification des transports. L'investissement massif d'intérêts militaires étrangers avant même la réalisation des évaluations environnementales constitue aujourd'hui un retournement majeur pour la vocation du projet et un choc pour la population.

Vers une militarisation généralisée du sous-sol du Sud du Québec ?

Le projet de mine à ciel ouvert La Loutre de Lomiko n'est pas le seul à provoquer des levées de boucliers dans le Sud du Québec où un boom minier fait rage depuis 2020. Que ce soit en Outaouais, dans les Laurentides, dans Lanaudière ou en Mauricie, des municipalités et des communautés locales considèrent l'industrie minière comme une menace environnementale et sociale et non comme une solution.

La subvention par ce même DoD des États-Unis d'un projet de mine de cobalt de la minière Fortune Minerals dans les Territoires du Nord-Ouest fait craindre que des projets équivalents en phase exploratoire reçoivent le même traitement de faveur au détriment du consentement des gens de la Mauricie et de Lanaudière, notamment.

Québec complice ?

Dans un monde de plus en plus en conflits, il est établi depuis longtemps qu'une part importante des minéraux supposément critiques et stratégiques du Québec est convoitée pour alimenter la course aux armements. Durant l'étude des crédits du Ministère québécois des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) le 25 avril dernier, la ministre Maïté Blanchette Vézina a clairement indiqué son objectif de « développer une filière et une chaîne d'approvisionnement en énergie pour la transition du gouvernement américain ».

Nous sommes étonnés de constater que l'entente de mentionne aucunement la participation du gouvernement du Québec. Il y a lieu de se demander si le gouvernement du Québec a été consulté et s'il a donné son accord. Dans tous les cas, il est clair que les gouvernements impliqués n'ont aucunement considéré la volonté de la population locale.

Citations

« Avec cette annonce combinée du gouvernement canadien et du Département de la Défense des États-Unis, comme élus, ce qu'on perçoit, c'est que ce qui était déjà un refus social de ce projet minier est en train de se transformer en colère sociale. Plus que jamais nos citoyens ressentent qu'on ne tient absolument pas compte d'eux », David Pharand, Maire de Duhamel, co-porte-parole de l'Alliance Municipalités de Petite-Nation Nord en matière de relations auprès du gouvernement et des médias

« Il importe peu à l'armée américaine que le territoire choisi pour approvisionner ses activités militaires soit un lieu habité et un joyau de nature en périphérie de Montréal et Ottawa. On assiste ici au sacrifice d'une région entière et de sa population. D'autres suivront », Louis St-Hilaire, président du Regroupement de Protection des Lacs de la Petite-Nation et porte-parole de la Coalition QLAIM

« Ottawa et Washington, avec la complicité de Québec, sont prêts à sacrifier la Petite-Nation pour faire la guerre. Sacrifice et guerre sont des mots qui vont bien ensemble. Mais ça ne change rien, les gens d'ici vont continuer de se défendre et de tout faire pour empêcher ce projet », Claude Bouffard, coordonnateur du Comité citoyen d'opposition au projet minier La Loutre

« Mentir aux amis écologiques des zones récréotouristiques que le sacrifice de leurs terres servira la transition vers les énergies renouvelables pour sauver la planète, est honteux, alors qu'on fait le contraire, en soutenant le militarisme qui en accélère la destruction », Pierre Jasmin, secrétaire général des Artistes pour la paix

« Militariser un projet minier nocif et rejeté par la population avant même de procéder à une évaluation environnementale est un acte de violence inouï du système envers les gens et la nature que nos gouvernements sont censés défendre et non attaquer », Rodrigue Turgeon, avocat, co-porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine

« L'ingérence frontale de l'armée américaine confirme ouvertement le détournement de la propagande de ‘‘transition énergétique'' de la politique canadienne de mise en valeur des minéraux au profit d'une vocation essentiellement militaire », Jamie Kneen, coresponsable du programme national, MiningWatch Canada

« Dans le sillon de tous ces projets miniers se trouvent systématiquement des lacs, des rivières et des sources d'eau souterraines sacrifiées. Cette réalité est déjà très préoccupante, mais de constater que ces sacrifices seront faits pour le compte de la militarisation américaine, c'est tout simplement inadmissible. Nos gouvernements doivent comprendre la gravité des enjeux et agir en conséquence », Rébecca Pétrin, directrice générale, Eau Secours.

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Une manif festive et militante pro-choix en riposte à la manif pro-vie organisée devant l’Assemblée nationale

4 juin 2024, par PTAG — ,
Le Comité riposte (coalition initiée par la Fédération du Québec pour le planning des naissances et ralliant des groupes communautaires, des organisations populaires et des (…)

Le Comité riposte (coalition initiée par la Fédération du Québec pour le planning des naissances et ralliant des groupes communautaires, des organisations populaires et des syndicats) a réussi son pari : organiser une importante manif nationale pro-choix en riposte à la manif pro-vie organisée devant l'Assemblée nationale le premier juin 2024.

Les médias se sont attardés sur l'action dérangeante tenue avant le départ de la manif et visant à perturber le rassemblement pro-vie sur le site du Parlement. Les policiers ont imposé leur ordre et distribué des contraventions.

Mais la manif a débuté à 13h30, après de nombreuses prises de parole, et a regroupé plus de 1000 femmes venues de partout au Québec.

Il y avait du soleil, de la chaleur, beaucoup de slogans et des batucadas pour marquer le tempo. C'était une belle manif militante et festive.

PTAG présente dans la vidéo ci-dessous les interventions des militantes féministes faites avant le départ de la manifestation. Elles expliquent l'importance et les enjeux de cette manifestation pour la défense du droit à l'avortement au Québec.

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Révélations du journal britannique "The Guardian" : La guerre secrète d’Israël contre la CPI

Israël a mené une véritable guerre de l'ombre pour éviter que ses dirigeants ne soient poursuivis par la CPI, incluant des écoutes téléphoniques et des menaces physiques. (…)

Israël a mené une véritable guerre de l'ombre pour éviter que ses dirigeants ne soient poursuivis par la CPI, incluant des écoutes téléphoniques et des menaces physiques.

Tiré de El Watan-dz
30 mai 2024

Par Amel Blidi

Photo : D. R.

Lorsque le procureur en chef de la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé qu'il visait à obtenir des mandats d'arrêt contre des dirigeants israéliens et du Hamas, il a émis un avertissement clair : « J'insiste pour que cessent immédiatement toutes les tentatives d'entraver, d'intimider ou d'influencer indûment les responsables de cette Cour. »

Dans une enquête conjointe publiée mardi 28 mai par le quotidien britannique The Guardian et le site d'information israélien +972, il est révélé qu'Israël a mené une véritable guerre de l'ombre pour éviter que ses dirigeants ne soient poursuivis par la CPI, incluant des écoutes téléphoniques et des menaces physiques. Le pays a mobilisé ses agences de renseignement pour surveiller, pirater, faire pression, diffamer et, selon certaines allégations, menacer des hauts responsables de la CPI, afin de freiner les enquêtes de la Cour.

Les services de renseignement israéliens ont intercepté les communications de nombreux responsables de la CPI, y compris celles de Karim Khan et de son prédécesseur, Fatou Bensouda. Ces interceptions incluaient des appels téléphoniques, des messages, des courriels et des documents.

Les renseignements obtenus permettaient au Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, de connaître à l'avance les intentions du procureur. Une communication interceptée récemment suggérait que Khan souhaitait émettre des mandats d'arrêt contre des Israéliens, mais subissait une « pression énorme des Etats-Unis », selon une source informée.

Netanyahu aurait, selon l'article du Guardian, suivi de près les opérations de renseignement contre la CPI, étant décrit par une source de renseignement comme « obsédé » par les interceptions liées à l'affaire. Ces efforts, supervisés par ses conseillers en sécurité nationale, impliquaient l'agence de renseignement intérieure Shin Bet, la direction du renseignement militaire Aman et la division de cyber-renseignement, l'unité 8200. Les renseignements collectés étaient ensuite partagés avec les ministères de la Justice, des Affaires étrangères et des Affaires stratégiques.

L'inquiétude des responsables politiques et militaires israéliens face à d'éventuelles poursuites remonte, selon l'enquête du Guardian, aux premières visites de l'Autorité palestinienne à la Cour en 2009. Lorsque la Palestine a adhéré à la CPI en avril 2015, Israël a immédiatement mis en place une stratégie nationale pour neutraliser toute menace de poursuites contre ses dirigeants et soldats.

Le site d'investigation israélien +972 explique notamment que « les échanges privés avec des responsables palestiniens étaient régulièrement surveillés et largement partagés entre les communautés du renseignement ». D'après The Guardian, Yossi Cohen, ancien chef du Mossad de 2016 à 2021 et proche de Benyamin Netanyahu, aurait personnellement dirigé cette opération. Il aurait, entre autres, montré à la procureure de la CPI une photo d'elle prise lors d'un voyage privé à Londres avec son mari. « Vous devriez nous aider et nous laisser prendre soin de vous. Vous ne voulez pas vous engager dans des choses qui pourraient compromettre votre sécurité ou celle de votre famille », lui aurait dit le maître espion israélien.

« Terrorisme diplomatique »

L'enquête conjointe s'appuie sur des entretiens avec plus de deux douzaines d'officiers de renseignement israéliens et de responsables gouvernementaux, de hauts responsables de la CPI, de diplomates et d'avocats familiers de l'affaire.

La perspective de poursuites à La Haye a conduit l'ensemble de l'establishment militaire et politique israélien à considérer la contre-offensive contre la CPI comme une guerre à mener, selon un ancien responsable du renseignement israélien. Cette « guerre » a commencé en janvier 2015, lorsque la Palestine a rejoint la cour, après avoir été reconnue comme Etat par l'Assemblée générale de l'ONU, un acte condamné par les responsables israéliens comme une forme de « terrorisme diplomatique ».

Le 16 janvier 2015, quelques semaines après l'adhésion de la Palestine, Fatou Bensouda, avocate gambienne respectée élue procureure en chef de la CPI en 2012, a ouvert un examen préliminaire sur ce que la Cour appelait en termes juridiques « la situation en Palestine ». Le mois suivant, deux hommes qui avaient réussi à obtenir l'adresse privée de la procureure se sont présentés à son domicile à La Haye.

Selon l'article du journal britannique, les hommes ont refusé de s'identifier à leur arrivée, affirmant qu'ils voulaient remettre une lettre à Bensouda de la part d'une femme allemande inconnue qui souhaitait la remercier. L'enveloppe contenait des centaines de dollars en espèces et un mot avec un numéro de téléphone israélien.

Cette tentative de livraison inhabituelle et suspecte a été perçue comme une tentative d'intimidation directe envers Bensouda, visant à la dissuader de poursuivre les enquêtes sur les crimes de guerre présumés dans les territoires palestiniens occupés. Cet incident s'inscrit dans une série de pressions et d'interférences que les responsables israéliens ont exercées pour empêcher la CPI de mener ses enquêtes impartiales.

Quelques années plus tard, lorsqu'il a pris les rênes du bureau du procureur de la CPI en juin 2021, Karim Khan a aussi hérité d'une enquête qu'il décrivait plus tard comme étant « sur la faille de San Andreas de la politique internationale et des intérêts stratégiques ». L'enquête de la CPI a néanmoins traîné en longueur. Selon The Guardian, l'entité sioniste a tenté d'empêcher la Cour d'ouvrir une enquête criminelle exhaustive. Après que celle-ci a été lancée en 2021, elle « a cherché à s'assurer qu'elle n'aboutirait à rien ».

Il a fallu attendre l'affreuse guerre menée contre Ghaza pour voir le procureur britannique élever le ton contre Israël. En février 2024, Khan a publié une déclaration très ferme que les conseillers juridiques de Netanyahu ont interprétée comme un signe inquiétant.

Dans un message sur X, il a, en effet, averti Israël de ne pas lancer d'assaut sur Rafah, la ville la plus au sud de Ghaza où plus d'un million de personnes déplacées étaient réfugiées à l'époque. « Ce tweet nous a beaucoup surpris », a déclaré un haut responsable israélien cité par The Guardian.

Les services de renseignement israéliens avaient intercepté des courriels, des pièces jointes et des messages texte de Khan et d'autres responsables de son bureau. « Le sujet de la CPI a grimpé dans la liste des priorités du renseignement israélien », a déclaré une source du renseignement.

A Washington, un groupe de sénateurs républicains américains avait déjà envoyé une lettre menaçante à Khan avec un avertissement clair : « Cibler Israël et nous vous ciblerons. » La CPI, quant à elle, a renforcé sa sécurité avec des contrôles réguliers des bureaux du procureur, des vérifications de sécurité sur les appareils, des zones sans téléphone, des évaluations hebdomadaires des menaces et l'introduction d'équipements spécialisés.

Un porte-parole de la CPI a déclaré que le bureau de Khan avait été soumis à « plusieurs formes de menaces et de communications pouvant être considérées comme des tentatives d'influencer indûment ses activités ».

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L’impérialisme et l’anti-impérialisme aujourd’hui

4 juin 2024, par Ashley Smith — ,
Les États-Unis restent l'État le plus puissant du monde, avec la plus forte économie, le dollar comme monnaie de réserve mondiale, l'armée la plus puissante, le plus grand (…)

Les États-Unis restent l'État le plus puissant du monde, avec la plus forte économie, le dollar comme monnaie de réserve mondiale, l'armée la plus puissante, le plus grand réseau d'alliances et, par conséquent, la plus grande puissance géopolitique. Mais il doit faire face à des concurrents de nature impériale, comme la Chine et la Russie, et à des rivaux de nature sub-impériale dans toutes les régions du globe.

Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
24 mai 2024

Par Ashley Smith

Le capitalisme engendre l'impérialisme, c'est-à-dire la concurrence entre les grandes puissances et leurs grands groupes pour le partage et le redécoupage du marché mondial. Cette concurrence génère une dynamique de hiérarchisation des États, avec les plus puissants au sommet, les puissances moyennes ou sous-impériales en dessous, et les nations opprimées en bas de l'échelle.

Aucune hiérarchie n'est permanente. La loi du développement inégal et combiné du capitalisme, ses périodes d'expansion et de ralentissement, la concurrence entre les grands groupes, les conflits entre États et les soulèvements des exploité.e.s et des opprimé.e.s déstabilisent et restructurent le système étatique.

En conséquence, l'histoire de l'impérialisme a connu une succession de phases. Un ordre multipolaire a caractérisé la période allant de la fin du XIXe siècle à 1945. Il a produit les grands empires coloniaux et deux guerres mondiales. Il a été supplanté par un ordre bipolaire entre 1945 et 1991, les États-Unis et l'Union soviétique luttant pour l'hégémonie sur les nouveaux États indépendants libérés de la domination coloniale.

Avec l'effondrement de l'empire soviétique, les États-Unis ont présidé à un ordre unipolaire de mondialisation néolibérale, sans aucune superpuissance rivale, et ont mené une série de guerres pour imposer leur soi-disant ordre fondé sur des règles du capitalisme mondial, de 1991 au début des années 2000. Cet ordre a trouvé sa fin avec le déclin relatif des États-Unis, la montée en puissance de la Chine et la renaissance de la Russie, ouvrant la voie à l'ordre multipolaire asymétrique tel que nous le connaissons aujourd'hui.

Les États-Unis restent la puissance dominante, mais ils sont désormais engagés dans une compétition avec la Chine et la Russie, surplombant des États sub-impériaux qui s'affirment de plus en plus, tels qu'Israël, l'Iran, l'Arabie Saoudite, l'Inde et le Brésil, ainsi que des nations assujetties qui souffrent d'une oppression à la fois politique et économique. Face à la menace d'une nouvelle époque de crises, de guerres et de révoltes, la gauche mondiale se doit de construire la solidarité internationale par en bas entre les travailleurs et les opprimés dans une lutte contre l'impérialisme et pour le socialisme dans le monde entier.

Les multiples crises du capitalisme mondial

Le capitalisme mondial a engendré de multiples crises qui se recoupent et qui intensifient les conflits entre les États et à l'intérieur de ceux-ci. Ces crises sont : l'effondrement de l'économie mondiale, l'exacerbation de la rivalité entre les États-Unis, la Chine et la Russie, le changement climatique, les migrations mondiales sans précédent et les pandémies, dont le COVID-19 n'est que l'exemple le plus récent. Ces crises ont ébranlé le système en place, provoqué une polarisation politique dans la plupart des pays du monde, ouvert la porte à la fois à la droite et à la gauche, et déclenché des vagues de luttes explosives, mais ponctuelles, depuis la base. Nous n'avons pas connu une telle période de crise, de conflit, de guerre, d'instabilité politique et de révolte depuis des décennies.

Tout cela constitue un défi et une chance pour une gauche internationale et un mouvement ouvrier qui souffrent encore des conséquences de plusieurs décennies de défaite et de recul. C'est aussi une ouverture pour une nouvelle extrême droite qui présente des solutions autoritaires autour de la promesse de restaurer l'ordre social en désignant des boucs émissaires parmi les opprimé.e.s à l'intérieur du pays et en attisant des formes réactionnaires de nationalisme contre les ennemis de l'étranger.

Une fois au pouvoir, cette nouvelle extrême droite a échoué à surmonter les crises et les inégalités du capitalisme mondial. Au contraire, elle les a exacerbées. En conséquence, ni les dirigeants en place ni leurs opposants d'extrême droite ne proposent d'issue pour sortir de cette époque de catastrophes.

Nous n'avons pas connu une telle période de crise, de conflits, de guerres, d'instabilité politique et de révoltes depuis des décennies. Tout cela constitue un défi et une chance pour une gauche internationale et un mouvement ouvrier qui souffrent encore des conséquences de plusieurs décennies de défaite et de recul.

L'ordre mondial multipolaire asymétrique

Dans ce contexte de crises qui se multiplient comme des métastases, les États-Unis ne sont plus au sommet d'un ordre mondial unipolaire. Ils ont subi un déclin relatif à la suite du long cycle de prospérité néolibéral, de l'échec de leurs guerres en Irak et en Afghanistan et de la grande récession. Ces évolutions ont permis la progression de la Chine en tant que nouvelle puissance impériale et la résurgence de la Russie en tant que pétro-puissance dotée de l'arme nucléaire. Dans le même temps, une multitude de puissances sub-impériales se sont affirmées plus que par le passé, mettant en concurrence les grandes puissances et cherchant à prendre l'avantage dans leur région.

Tout cela a donné naissance à l'ordre mondial multipolaire asymétrique d'aujourd'hui. Les États-Unis restent l'État le plus puissant du monde, avec la plus importante économie, le dollar comme monnaie de réserve mondiale, l'armée la plus puissante, le plus grand réseau d'alliances et, par conséquent, la plus grande puissance géopolitique. Mais il doit faire face à des concurrents impériaux en Chine et en Russie et à des rivaux sous-impérialistes dans toutes les régions du globe.

Ces antagonismes n'ont pas donné naissance à des blocs géopolitiques et économiques cohérents. La mondialisation a fortement imbriqué la plupart des économies du monde, empêchant le retour de blocs tels qu'ils existaient à l'époque de la guerre froide.

Ainsi, les deux plus grands rivaux, les États-Unis et la Chine, sont aussi deux des plus intégrés au monde. Pensez à l'iPhone d'Apple, conçu en Californie, fabriqué en Chine dans des usines sous propriété taïwanaise et exporté vers des vendeurs situés aux États-Unis et dans le reste du monde.

Les nouvelles puissances sous-impériales ne se montrent loyales ni envers la Chine ni envers les États-Unis, mais concluent de manière opportuniste des pactes avec l'une ou l'autre puissance pour servir leurs propres intérêts capitalistes. Par exemple, tout en concluant des accords avec la Chine dans le cadre de l'alliance BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) contre les États-Unis, l'Inde est partie prenante de l'alliance QUAD (États-Unis, Australie, Inde, Japon) de Washington contre la Chine.

Cela dit, le marasme économique mondial, l'intensification de la rivalité entre les États-Unis et la Chine, et surtout la guerre impérialiste que mène la Russie en Ukraine et les sanctions des États-Unis et de l'OTAN contre Moscou commencent à ébranler la mondialisation telle que nous l'avons connue. En effet, la mondialisation a atteint un plateau et a commencé à décliner.

Par exemple, dans le cadre de ce qu'on appelle la guerre des puces, les États-Unis et la Chine sont en train de mettre à part la partie supérieure de leurs économies de haute technologie. Par ailleurs, les sanctions occidentales imposées à la Russie en raison de la guerre impérialiste qu'elle mene contre l'Ukraine l'ont exclue des échanges commerciaux et des investissements des États-Unis et de l'Union européenne (UE), l'obligeant à se tourner vers les marchés chinois et iranien.

Il en résulte que nous sommes sur une trajectoire de division économique croissante, de rivalité géopolitique et même de conflit militaire entre les États-Unis, la Chine et la Russie, ainsi qu'entre eux et les puissances sub-impériales. Dans le même temps, la profonde intégration économique des États-Unis et de la Chine en particulier, ainsi que le fait que chacun possède des armes nucléaires, contrecarrent la tendance à la guerre ouverte, qui risquerait d'entraîner une destruction mutuelle certaine et l'effondrement de l'économie mondiale.

Washington réarme pour se préparer à la rivalité des grandes puissances

Depuis l'administration Obama, l'État américain tente de mettre en place une nouvelle stratégie afin de contrer la montée en puissance de la Chine et la résurgence de la Russie. Obama avait lancé son fameux « pivot vers l'Asie » et Trump avait ouvertement mis la compétition entre grandes puissances avec Pékin et Moscou au centre de sa stratégie de sécurité nationale, mais ni l'un ni l'autre n'a défini une approche globale de ces conflits ou d'autres dans le cadre du nouvel ordre mondial asymétrique et multipolaire.

Nous sommes sur la voie d'une division économique croissante, d'une rivalité géopolitique et même d'un conflit militaire entre les États-Unis, la Chine et la Russie, ainsi qu'entre eux et les puissances sub-impériales.

Le président Barack Obama était resté concentré sur le Moyen-Orient, où il a mis fin aux occupations de l'Irak et de l'Afghanistan, avant de consolider l'ordre existant dans la région après le printemps arabe et la montée en puissance de Daech. Trump a affiché haut et fort sa stratégie de confrontation entre grandes puissances, mais celle-ci s'est révélée incohérente dans la pratique. Elle consistait en un amalgame de nationalisme d'extrême droite, de protectionnisme, de menaces d'abandon d'alliances historiques telles que l'OTAN et d'accords bilatéraux négociés à la fois avec des adversaires déclarés et avec des alliés traditionnels. Ses années erratiques de mauvaise conduite des affaires ont entraîné la poursuite du déclin relatif des États-Unis.

Le président Joe Biden a adopté la stratégie la plus cohérente à ce jour. Son idée était de récupérer les luttes sociales et de classes par des réformes mineures, de mettre en œuvre une nouvelle politique industrielle pour garantir la compétitivité des États-Unis dans la fabrication de produits de haute technologie, de restaurer les alliances de Washington, comme l'OTAN, et de les élargir en lançant une « Ligue des démocraties » contre les rivaux autocratiques de Washington.

En fin de compte, les Démocrates du centre, les Républicains et les Cours de justice ont bloqué bon nombre de ses réformes destinées à atténuer l'inégalité sociale. Mais il a réussi à mettre en œuvre sa politique industrielle au moyen de plusieurs textes de loi. Biden a également commencé à remettre en état et à élargir les alliances des États-Unis par le biais de nouveaux pactes et d'initiatives économiques. L'objectif est de contenir la Chine, de contrer l'expansionnisme russe en Europe de l'Est et de ramener le plus grand nombre possible de puissances sous-impérialistes, d'États subordonnés et de nations opprimées sous l'hégémonie américaine et l'ordre international qui lui est attaché.

M. Biden a poursuivi sur la lancée de ses prédécesseurs dans leurs efforts pour sortir les États-Unis du bourbier des opérations d'occupation. Il a finalement mis fin à vingt années d'occupation de l'Afghanistan de façon chaotique, sur fond de crimes de guerre et en abandonnant le pays aux Talibans. Il a ensuite tenté de stabiliser le Moyen-Orient en maintenant les accords d'Abraham conclus sous Trump et en intensifiant les efforts de normalisation des relations avec Israël par l'établissement de relations officielles entre les régimes arabes et Tel-Aviv. Bien entendu, cela a donné le feu vert au Premier ministre Benjamin Netanyahou pour poursuivre le siège de Gaza, l'expansion des colons en Cisjordanie occupée et l'approfondissement de l'apartheid en Israël, qui trouve aujourd'hui son horrible expression dans la guerre génocidaire d'Israël contre Gaza. En Europe, Biden a réengagé les États-Unis dans l'OTAN, envoyant ainsi le signal à la Russie que Washington, et non Moscou, resterait la puissance hégémonique prédominante dans la région.

Mais la principale cible de la stratégie de Biden en matière de rivalité entre grandes puissances est la Chine. Sur le plan économique, sa politique industrielle est conçue pour restaurer, protéger et étendre la suprématie économique des États-Unis face à Pékin, en particulier dans le domaine de la haute technologie. Elle a pour objectif de relocaliser la fabrication de produits de haute technologie sur le territoire américain ou dans des pays amis, d'imposer une barrière protectionniste élevée autour de la conception et de l'ingénierie des puces informatiques produites aux États-Unis et de soutenir financièrement les entreprises et les universités américaines de haute technologie dans les domaines des STIM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques) afin d'asseoir leur domination dans le domaine de l'IA (intelligence artificielle) et d'autres technologies de pointe, en particulier en raison de leurs éventuelles applications militaires.

Sur le plan géopolitique, Biden a consolidé les accords existants avec le Japon et les a élargis pour inclure en particulier les pays que la Chine cherche à déstabiliser, notamment le Viêt Nam et les Philippines. Il a également réaffirmé la politique dite de la « Chine unique », qui ne reconnaît que Pékin, et l'ambiguïté stratégique à l'égard de Taïwan, qui conduit les États-Unis à armer la nation insulaire comme un « porc-épic » pour dissuader l'agression chinoise, tout en restant vagues sur la question de savoir s'ils s'engageraient dans la défense de l'île en cas d'agression ou d'invasion.

Sur le plan militaire, Biden a renforcé les alliances militaires américaines telles que le QUAD et le Five Eyes (Australie, Canada, Nouvelle-Zélande, Royaume-Uni et États-Unis), et en a créé de nouvelles, notamment celle entre l'Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis (AUKUS) pour le déploiement de sous-marins nucléaires en Australie. Washington est en plein processus de déclenchement d'une course à l'armement et à la construction de bases avec la Chine dans toute l'Asie-Pacifique.

Les rivaux impérialistes de Washington : La Chine et la Russie

La Chine et la Russie ont mis en œuvre leur propre stratégie pour faire valoir leurs ambitions impériales. Ces trois puissances forment ce que Gilbert Achcar a appelé la « triade stratégique » de l'impérialisme mondial.

Sous la direction de Xi Jinping, la Chine a cherché à restaurer son statut de grande puissance dans le cadre du capitalisme mondial. Elle a mis en œuvre une stratégie économique qui consiste à s'élever dans la chaîne de valeur pour être compétitive au plus haut niveau de la conception, de l'ingénierie et de la fabrication. Elle a investi des capitaux publics et privés dans le cadre de programmes tels que « Chine 2025 », qui vise à faire de certaines entreprises des champions nationaux dans le domaine des hautes technologies.

Ce programme a été couronné de succès, Huawei et BYD, entre autres, s'étant imposés comme des acteurs de premier plan au niveau mondial. La Chine est désormais un leader industriel dans des domaines tels que l'énergie solaire et les véhicules électriques, défiant ainsi le capital américain, européen et japonais.

Avec son expansion économique massive, la Chine a tenté d'exporter ses excédents de capitaux et de capacités à l'étranger par le biais de son programme « Les Nouvelles Routes de la Soie » (Belt and Road Initiative,BRI), d'une valeur de 1 000 milliards de dollars, un vaste plan de développement d'infrastructures dans le monde entier, en particulier dans les pays du Sud. Rien de tout cela n'est altruiste. La plupart de ces investissements sont destinés à construire des infrastructures, des voies ferrées, des routes et des ports pour exporter des matières premières vers la Chine. La Chine exporte ensuite ses produits finis vers ces pays, selon un schéma impérialiste classique. Mais le ralentissement de son économie, les problèmes bancaires et les crises de la dette dans les pays auxquels elle avait accordé des prêts, ont conduit la Chine à renoncer à ses plus grandes ambitions en matière d'investissement direct à l'étranger.

Néanmoins, la Chine tente de transformer ces efforts en influence géopolitique au travers de regroupements économiques tels que les BRICS, ainsi que de pactes politiques et de sécurité tels que l'Organisation de coopération de Shanghai (qui regroupe la Chine, la Russie, l'Inde, le Pakistan, l'Iran et une série d'États d'Asie centrale). Elle a également affirmé son influence au Moyen-Orient en soutenant la normalisation des relations diplomatiques entre son allié l'Iran et l'Arabie saoudite, dont elle dépend pour l'essentiel de son pétrole.

Pour étayer son importance économique nouvelle au moyen d'une puissance militaire, la Chine modernise ses forces armées, en particulier sa marine, dans le but bien précis de contester l'hégémonie navale des États-Unis dans le Pacifique. C'est dans cette optique qu'elle s'est emparée d'îles revendiquées par d'autres États, ce qui a engendré des conflits avec le Japon, le Viêt Nam, les Philippines et de nombreux autres pays. Elle a procédé à la militarisation de certaines d'entre elles, notamment en mer de Chine méridionale, afin de mettre en avant sa puissance, de protéger les routes maritimes et de revendiquer des droits sur les réserves sous-marines de pétrole et de gaz naturel.

Enfin, Pékin fait valoir ses revendications historiques sur ce qu'il considère comme son territoire national dans le cadre d'un projet de régénération de la nation. Elle a ainsi imposé sa domination sur Hong Kong par la force brutale, conduit une véritable guerre contre des menées terroristes ainsi qu'un génocide culturel à l'encontre des Ouïghours du Xinjiang, et a accentué ses menaces d'invasion de Taïwan, qu'elle considère comme une province dissidente.

Sous le règne de Vladimir Poutine, la classe dirigeante russe a cherché à restaurer son pouvoir impérial, si durement ébranlé par l'effondrement de l'empire soviétique en Europe de l'Est et par la mise en œuvre désastreuse de la thérapie de choc néolibérale. Elle a vu les États-Unis et l'impérialisme européen absorber son ancienne sphère d'influence par le biais de l'expansion de l'OTAN et de l'UE.

Poutine a reconstruit la Russie en tant que puissance pétrolière dotée d'armes nucléaires avec pour objectif de reconquérir son ancien empire en Europe de l'Est et en Asie centrale, tout en imposant l'ordre à l'intérieur du pays contre toute dissidence populaire et en particulier contre ses républiques parfois récalcitrantes. Elle a tenté de consolider son emprise sur son ancienne sphère d'influence en collaborant avec la Chine au sein de l'Organisation de coopération de Shanghai.

Ce projet impérialiste l'a conduite à engager une série de guerres en Tchétchénie (1996, 1999), en Géorgie (2008), en Ukraine (2014, 2022-) ainsi que des interventions en Syrie et dans plusieurs pays d'Afrique. L'affirmation impériale de la Russie a suscité la résistance des États et des peuples qu'elle a pris pour cible, ainsi que des contre-offensives impérialistes de la part des États-Unis, de l'OTAN et de l'UE.

La guerre impérialiste russe contre l'Ukraine

Trois nœuds stratégiques ont porté ces rivalités interimpériales à leur paroxysme : l'Ukraine, Gaza et Taïwan.

L'Ukraine est devenue le théâtre d'une guerre majeure en Europe pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale. La Russie a envahi le pays en 2014, puis à nouveau en 2022, dans un acte d'agression impérialiste évident, tentant de s'emparer de l'ensemble du pays et d'y imposer un régime semi-colonial. Poutine a justifié son geste par des mensonges sur la dénazification (à peine croyable de la part d'un des États les plus réactionnaires au monde et allié de l'extrême droite à l'échelle internationale).

Bien sûr, cette agression était en partie une réponse à l'expansion des États-Unis, de l'OTAN et de l'UE, mais cela n'enlève rien à la nature impérialiste de cette guerre. L'objectif était d'utiliser la conquête de l'Ukraine comme un tremplin pour récupérer son ancienne sphère d'influence dans le reste de l'Europe de l'Est.

L'État, l'armée et le peuple ukrainiens se sont soulevés contre l'invasion dans une lutte pour l'autodétermination nationale.

Biden a fourni à l'Ukraine une aide économique et militaire au nom des intérêts impériaux de Washington. Washington n'est pas un allié des luttes de libération nationale, comme l'atteste sa longue histoire de guerres impérialistes, des Philippines au Viêt Nam et à l'Irak. Washington a pour objectif d'affaiblir la Russie, de l'empêcher d'empiéter sur sa sphère d'influence élargie en Europe de l'Est et de dresser ses alliés de l'OTAN non seulement contre Moscou, mais aussi contre la Chine, que l'OTAN a désignée comme un point stratégique pour la première fois de son histoire.

Les États-Unis et leurs alliés de l'OTAN ont imposé à la Russie les sanctions les plus sévères de l'histoire et ont fait pression sur l'Europe occidentale pour qu'elle se désengage de l'approvisionnement énergétique russe et fasse plutôt appel aux exportations de gaz naturel en provenance des États-Unis. Par réaction, la Russie est devenue de plus en plus dépendante de la Chine pour le commerce et la technologie, ainsi que de la Corée du Nord et de l'Iran pour les missiles, les drones et d'autres matériels militaires.

Washington a également tenté d'utiliser l'agression de la Russie pour rallier les pays du Sud à sa position. Mais il n'a pas eu beaucoup de chance avec les gouvernements de ces États, malgré l'identification populaire de la plupart de ces pays anciennement colonisés avec la lutte de l'Ukraine pour l'autodétermination. Néanmoins, Biden a utilisé l'Ukraine pour consolider ses alliances mondiales et le pouvoir de séduction de Washington, qui s'est posé en défenseur de l'autodétermination et de son pseudo ordre fondé sur des règles de droit, face à l'impérialisme russe.

La guerre génocidaire d'Israël à Gaza, soutenue par les États-Unis

La guerre génocidaire d'Israël à Gaza a bouleversé les plans impériaux de Washington pour l'ensemble du Moyen-Orient et l'a précipité dans sa plus grande crise géopolitique depuis le Viêtnam. Confronté à un lent étranglement dû au siège total de Gaza, le Hamas a entrepris une tentative désespérée d'évasion le 7 octobre, capturant des otages et tuant un grand nombre de soldats et de civils.

Son attaque a mis en lumière les faiblesses des services de renseignement israéliens et du contrôle des frontières le long de son mur d'apartheid. En réaction, Israël a engagé la plus importante incursion militaire jamais réalisée dans la bande de Gaza, dans le but déclaré de récupérer les otages et de détruire le Hamas. Il n'a réussi ni l'un ni l'autre. Au lieu de cela, il a détruit Gaza dans une guerre en forme de punition collective, de nettoyage ethnique et de génocide. L'administration Biden l'a soutenue à chaque étape, en la finançant, en lui fournissant une couverture politique avec des vetos aux Nations unies et en l'armant jusqu'aux dents.

Mais il existe un fossé entre Israël et les États-Unis. Si Washington soutient l'objectif d'Israël de détruire la résistance palestinienne, il a tenté de le persuader de modifier sa stratégie en passant des bombardements de Gaza et des meurtres de civils à des opérations spéciales visant le Hamas. Le désaccord stratégique de l'administration Biden avec Israël a atteint son paroxysme lors de l'assaut de Rafah, les États-Unis interrompant les livraisons de certaines de leurs bombes les plus destructrices.

Le gouvernement des États-Unis n'approuve pas non plus les offensives de plus en plus nombreuses d'Israël dans la région, notamment les bombardements en Syrie, au Liban, en Irak et au Yémen. Washington ne s'est pas ouvertement opposé à ces frappes, mais a plutôt tenté de faire pression sur les régimes visés pour qu'ils ne réagissent pas.

Les États-Unis n'ont pas été en mesure de freiner Netanyahou, prisonnier des fascistes de son gouvernement de coalition qui appellent au génocide et à la guerre régionale, en particulier contre l'Iran. Netanyahou leur a emboîté le pas pour préserver son gouvernement de coalition, car s'il tombe, il sera probablement emprisonné sur la base d'accusations de corruption.

Ainsi, la guerre génocidaire et l'agression régionale d'Israël pourraient déclencher une guerre plus large. Déjà, elle a incité les Houthis au Yémen à mener des opérations contre des navires pétroliers et commerciaux, menaçant ainsi l'économie mondiale et conduisant les États-Unis à mettre sur pied une coalition pour protéger leurs navires et menacer les Houthis.

Mais le conflit le plus aigu et le plus dangereux de tous ceux qu'Israël a orchestrés est celui qui l'oppose à l'Iran. Il a bombardé l'ambassade de Téhéran à Damas, tuant l'un des dirigeants des Gardiens de la révolution islamique. Washington s'est empressé de faire pression sur l'Iran pour qu'il ne frappe pas Israël et ne déclenche pas une guerre à grande échelle.

Finalement, l'Iran a mené une attaque largement symbolique contre Israël. Il a télégraphié ses plans aux États-Unis et aux pays arabes, ce qui a permis à Israël et à ses alliés d'abattre la quasi-totalité des drones et des missiles. Les États-Unis ont ensuite fait pression sur Israël pour qu'il limite sa contre-attaque. Tel-Aviv a néanmoins envoyé un message inquiétant en frappant, certes de manière limitée, les installations nucléaires iraniennes. En retour, Téhéran poursuivra ses efforts de développement d'armes nucléaires et Israël répondra par des frappes militaires afin de protéger son monopole nucléaire régional, menaçant ainsi la région d'un Armageddon.

Au milieu de ce tourbillon, la barbarie d'Israël a déclenché des protestations de masse dans tout le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord et dans le monde entier, faisant apparaître et isolant à la fois Israël et les États-Unis comme les architectes et les auteurs d'un génocide. L'Afrique du Sud a porté plainte contre Israël devant la Cour internationale de justice, l'accusant de génocide, une affaire que la Cour a déclarée recevable.

La Chine et la Russie ont profité de la crise pour se poser en alliés de la Palestine, malgré leurs étroites relations économiques et diplomatiques avec Israël et leur soutien à la stabilisation du statu quo dans la région. Les oppresseurs du Xinjiang et de l'Ukraine n'ont aucune raison de se dire favorables à l'autodétermination nationale.

Néanmoins, les États-Unis ont subi un énorme revers. Leur capacité de s'imposer en douceur a été profondément ébranlée. Personne ne peut plus guère croire que les États-Unis soutiennent « un ordre fondé sur des règles de droit », « l'autodétermination » ou même « la démocratie ».

Les projets de normalisation des relations avec Israël par le biais des accords d'Abraham ont été pour le moment interrompus. Alors que leurs populations sont descendues dans la rue et expriment à tout le moins de la sympathie pour les Palestiniens, aucun régime arabe ne conclura publiquement un accord avec Israël, malgré leur intégration économique croissante avec l'État d'apartheid, bien qu'un certain nombre d'entre eux continuent de faire avancer ces projets à huis clos.

Aucun de ces régimes, ni l'Iran, ne peut être considéré comme un allié de la lutte palestinienne. À l'exception des Houthis, tous ont limité les ripostes militaires à Israël. Aucun n'a interrompu ses livraisons de pétrole aux grandes puissances.

Il n'y a pas véritablement d'« axe de la résistance ». Tous ces États prennent des postures pour empêcher la solidarité populaire avec la Palestine de basculer dans l'opposition à leur propre régime despotique. Et lorsqu'ils ont été confrontés à une quelconque résistance intérieure, tous, de l'Égypte à l'Iran, l'ont réprimée avec une force brutale. Ce sont tous des régimes capitalistes contre-révolutionnaires.

La guerre génocidaire d'Israël a toutefois fondamentalement sapé la tentative de Washington de courtiser les États et les impérialismes secondaires de la région et de l'ensemble du Sud. Les souvenirs que ces États et leurs peuples ont de leur propre lutte de libération les amènent à s'identifier à la Palestine et à s'opposer à la fois aux États-Unis et à Israël. Cela a suscité une vague mondiale sans précédent de protestations populaires en solidarité avec la Palestine. Parallèlement, le soutien sans faille de l'administration Biden à Israël a déclenché des protestations ininterrompues au cours des six derniers mois, qui ont culminé avec une rébellion étudiante sur les campus de tout le pays. Mettant encore plus à mal les prétentions de Washington à être un modèle de démocratie, les deux grands partis politiques, en collaboration avec les administrations libérales et conservatrices des universités, ont réprimé cette rébellion étudiante avec la plus grande brutalité.

Israël a ainsi réduit à néant toutes les avancées géopolitiques réalisées par les États-Unis grâce à ses prises de position autour de l'Ukraine, a plongé l'impérialisme américain dans une crise et a mis en péril la réélection de Biden. Il a également ouvert un large espace aux adversaires mondiaux et régionaux de Washington pour qu'ils affirment de plus en plus leurs propres intérêts, ce qui a entraîné une escalade des conflits dans le monde entier.

Taïwan : épicentre de la rivalité entre les États-Unis et la Chine

Taïwan est devenu l'épicentre de la rivalité entre les États-Unis et la Chine. La Chine a fait de la réunification, c'est-à-dire de la prise de Taïwan, l'un de ses principaux objectifs impérialistes. Si Joe Biden a promis de maintenir la politique d'une seule Chine et l'ambiguïté stratégique, il a promis à plusieurs reprises de prendre la défense de Taïwan en cas de guerre.

Pour se préparer à une telle conflagration, il tente de surmonter l'antagonisme historique entre les alliés régionaux que sont le Japon, les Philippines, la Corée du Sud, le Viêt Nam et d'autres, afin de les unir autour de divers pactes multilatéraux et bilatéraux dirigés contre la Chine. Tout cela ne fait qu'attiser le conflit sur Taïwan.

Dans le même temps, l'intégration économique des États-Unis, de la Chine et de Taïwan atténue la dérive vers la guerre. Foxconn, l'une des multinationales taïwanaises, fabrique l'iPhone d'Apple dans des usines géantes en Chine pour l'exporter dans le monde entier, y compris aux États-Unis. La société taïwanaise TSMC fabrique également 90 % des microprocesseurs les plus sophistiqués au monde, qui sont utilisés dans tous les domaines, des grille-pain aux armes de haute technologie, en passant par les chasseurs bombardiers tels que le F-35.

En dépit de cette intégration, le conflit entre les États-Unis et la Chine autour de Taïwan s'est intensifié tout au long du mandat de Biden, et les dirigeants américains l'ont encore aggravé par des visites provocatrices. Par exemple, Nancy Pelosi a organisé un voyage diplomatique au cours duquel elle a promis le soutien des États-Unis à Taïwan, ce qui a incité la Chine à répondre par des manœuvres militaires menaçantes. De son côté, la Chine s'est également livrée à des provocations pour influer sur la politique taïwanaise et envoyer un message à Washington.

En réalité, aucune des deux grandes puissances ne respecte le droit à l'autodétermination de Taïwan. La Chine veut l'annexer et Washington n'utilise Taipei que dans le cadre de son offensive impériale contre Pékin.

Bien que la guerre soit peu probable, parce qu'elle pourrait déclencher une conflagration nucléaire et anéantir l'économie mondiale en interrompant la production et le commerce des puces électroniques, de matières premières aussi essentielles que le pétrole au fonctionnement du capitalisme mondial contemporain, elle ne peut être exclue étant donné que les conflits impérialistes s'exacerbent.

Le marasme intensifie la rivalité interimpérialiste

Le marasme mondial du capitalisme intensifie la rivalité entre les États-Unis, la Chine et la Russie sur tous les terrains, du commerce à la géopolitique, en passant par ces points stratégiques névralgiques. Le marasme mondial exacerbe également les inégalités au sein des nations et entre elles à travers le monde.

En tant que puissance impérialiste dominante qui contrôle la monnaie de réserve mondiale (le dollar), les États-Unis se sont remis de la récession due à la pandémie avec plus de succès que leurs rivaux. C'est l'exception, et non la norme, dans le monde capitaliste avancé. Malgré cela, l'inflation a frappé de plein fouet la classe ouvrière et intensifié les divisions sociales et de classe.

L'Europe et le Japon oscillent entre récession et croissance lente, avec une aggravation des inégalités entre les classes. La Chine poursuit sa croissance, mais à un rythme très réduit. La Russie a mis en place une économie de guerre pour échapper aux pires conséquences des sanctions et maintenir ses taux de croissance, mais cette situation n'est pas viable. Dans ces deux pays, les inégalités se creusent.

Le marasme mondial a des effets du même ordre sur les puissances sub-impériales, dont beaucoup dépendent de la diminution des marchés d'exportation dans le monde capitaliste avancé. Par ailleurs, une grave crise de la dette souveraine a éclaté dans les pays opprimés et endettés du Sud. La combinaison d'une croissance lente, de marchés d'exportation affaiblis, de l'inflation et de taux d'intérêt élevés les a rendus incapables de rembourser leurs emprunts. Bien que les prêteurs capitalistes privés, le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et les banques d'État ou contrôlées par la Chine aient accepté de procéder à des accords de réajustement partiel avec les pays endettés, ils veulent toujours que leurs prêts soient remboursés et ont imposé diverses conditions pour le garantir. Tout cela exacerbe les divisions sociales et de classe, provoquant dans certains cas la hausse de l'extrême pauvreté, qui avait reculé au cours de la phase d'expansion néolibérale.

Polarisation, révolte et révolution

Le fait que les institutions du capitalisme, qu'il s'agisse de démocraties libérales ou d'autocraties, soient incapables de surmonter ce marasme, entraînera une polarisation politique de plus en plus forte, ouvrant la voie à la fois à la gauche et à la droite.

Compte tenu des faiblesses de l'extrême gauche et des organisations de classe et de lutte sociale, diverses formes de réformisme ont été la principale expression d'une alternative à gauche. Mais, comme on pouvait s'y attendre, les réformistes au gouvernement ont été entravés par la bureaucratie d'État capitaliste et par la faiblesse de leurs économies secouées par la crise, ce qui les a conduits soit à ne pas tenir leurs promesses, soit à les trahir et à opter pour des politiques capitalistes traditionnelles.

Les échecs de la classe dirigeante capitaliste et de ses opposants réformistes ouvrent partout la porte à l'extrême droite électorale et aux forces fascistes naissantes.

L'exemple type est celui de Syriza en Grèce. Il a trahi son engagement à s'opposer à l'UE et aux créanciers internationaux et a capitulé devant leur programme d'austérité, ce qui lui a valu d'être rejeté par les électeurs au profit d'un gouvernement néolibéral de droite.

Les échecs de la classe dirigeante capitaliste et de ses opposants réformistes ouvrent partout la porte à l'extrême droite électorale et aux forces fascistes naissantes. Même si elle est ethnonationaliste, autoritaire et réactionnaire, la majeure partie de cette nouvelle droite n'est pas fasciste. Elle ne construit pas de mouvements de masse pour renverser la démocratie bourgeoise, imposer la dictature et écraser les luttes des travailleurs et des opprimés. Ils tentent plutôt de gagner les élections dans le cadre de la démocratie bourgeoise et d'utiliser l'État pour réimposer un certain ordre social par le biais de politiques sécuritaires tournées vers divers boucs émissaires, en particulier les migrant.e.s fuyant la pauvreté, les crises politiques et le changement climatique.

Aux États-Unis, en Europe, en Inde, en Chine, en Russie et dans d'autres pays, l'extrême droite se montre particulièrement encline à s'en prendre aux musulmans. Presque sans exception, la droite promet de restaurer l'ordre social en imposant les « valeurs familiales » au détriment des féministes, des transgenres et des militants LGBTQ.

La droite a déjà réalisé des avancées historiques en Europe, en Asie et en Amérique latine. Et en 2024, avec des élections dans 50 pays impliquant 2 milliards de personnes, les partis de droite sont bien placés pour réaliser de nouvelles avancées.

C'est peut-être aux États-Unis que ces changements auront le plus d'impact sur la politique mondiale : Biden se présente en consolidant les alliances et les projets de l'impérialisme américain à l'étranger et en défendant prétendument la démocratie à l'intérieur du pays. Trump menace d'abandonner le grand projet de l'impérialisme américain, le contrôle du capitalisme mondial, de se retirer de ses alliances multilatérales, d'imposer davantage de mesures économiques nationalistes et de faire des opprimé.e.s des boucs émissaires à l'intérieur et à l'extérieur du pays pour y réussir. Ce faisant, il accélérerait le déclin relatif de Washington, accentuerait les inégalités intérieures et exacerberait les antagonismes inter-impériaux et inter-étatiques.

Ni Trump ni l'extrême droite où que ce soit dans le monde n'ont de solutions à proposer aux exploité.e.s et aux opprimé.e.s face aux crises qu'ils.elles subissent. De ce fait, leurs victoires ne déboucheront pas sur des régimes stables, mais ouvriront la porte à la réélection des partis traditionnellement établis.

Depuis la Grande Récession, la combinaison des crises et de l'incapacité des gouvernements, quels qu'ils soient, à les résoudre a régulièrement entraîné les travailleurs et les opprimés dans des vagues de lutte . En effet, les 15 dernières années ont été marquées par certaines des plus grandes révoltes depuis les années 1960.

Presque tous les pays du monde ont connu une forme ou une autre de lutte de masse par en bas, en particulier au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Toutes ces luttes ont été entravées par les défaites et les reculs des dernières décennies, qui ont affaibli l'organisation sociale et de classe et brisé la gauche révolutionnaire.

En conséquence, même les révoltes les plus puissantes n'ont pas été en mesure de mener à bien des révolutions politiques ou sociales. Cela a laissé une ouverture à la classe dirigeante et à ses représentants politiques qui ont pu maintenir leur hégémonie, souvent avec le soutien de telle ou telle puissance impérialiste ou sous-impérialiste.

Par exemple, la Russie, l'Iran et le Hezbollah ont sauvé le régime barbare de Bachar el-Assad en le protégeant de la révolution. De même, la stratégie américaine de préservation du régime a aidé la classe dirigeante égyptienne à réimposer une dictature féroce dirigée par Abdel Fattah el-Sisi. Mais ces régimes n'ont en aucun cas stabilisé leurs sociétés. Les crises persistantes et le niveau scandaleux d'inégalité et d'oppression continuent d'alimenter la résistance par en bas dans le monde entier.

Les trois pièges de l'anti-impérialisme

Le nouvel ordre mondial multipolaire asymétrique, avec ses rivalités interimpériales croissantes, ses conflits interétatiques et ses vagues de révolte à l'intérieur des sociétés, a posé à la gauche internationale des questions auxquelles elle est mal préparée à répondre. Dans le ventre de la bête, les États-Unis, la gauche a majoritairement adopté trois positions erronées, qui nuisent toutes à la construction d'une solidarité internationale par en bas contre l'impérialisme et le capitalisme mondial.

Premièrement, les partisans du parti démocrate sont tombés dans le piège du soutien social-patriote aux États-Unis contre leurs rivaux. Ils ont soutenu l'appel de Joe Biden à former une « ligue des démocraties » contre la Chine et la Russie. C'est particulièrement le cas des partisans de Bernie Sanders qui, même s'ils critiquent telle ou telle politique américaine « erronée », considèrent Washington comme une force du bien au plan mondial.

En réalité, comme le prouve le soutien de Biden à la guerre génocidaire d'Israël, les États-Unis sont l'un des principaux ennemis de la libération nationale et de la révolution sociale dans le monde. C'est la principale puissance hégémonique qui vise à imposer un misérable statu quo et qui est donc un adversaire, et non un allié, de la libération collective à l'échelle internationale.

Deuxièmement, d'autres secteurs de la gauche ont commis l'erreur inverse en traitant « l'ennemi de mon ennemi comme mon ami ». Qu'on la qualifie d'anti-impérialisme vulgaire, de faux anti-impérialisme ou de campisme, cette position soutient les rivaux impérialistes de Washington en qualité de prétendu axe de résistance. Certains de ses adeptes vont même jusqu'à prétendre que des États manifestement capitalistes comme la Chine représentent une sorte d'alternative socialiste (alors même que, par exemple, Xi Jinping fait l'éloge du premier ministre hongrois d'extrême droite Viktor Orbán et vante le « partenariat stratégique global pour la nouvelle ère » conclu entre la Chine et la Hongrie). Ainsi, ils soutiennent les grandes puissances émergentes, les États semi-impériaux et les diverses dictatures dans les pays dominés.

Ce faisant, ils ignorent la nature impérialiste d'États comme la Chine et la Russie et la nature contre-révolutionnaire de régimes comme ceux de l'Iran et de la Syrie, et peu importe la répression qu'ils exercent sur les travailleurs et les opprimés. Enfin, ils s'opposent à la solidarité avec les luttes populaires d'en bas au sein de ces pays, les qualifiant de pseudo « révolutions des couleurs » orchestrées par l'impérialisme américain.

Ils ont également trouvé des justifications à la guerre de la Russie contre l'Ukraine et à l'écrasement par la Chine du soulèvement démocratique à Hong Kong, et dans certains cas, ils les ont ouvertement soutenus. En fin de compte, ils se placent du côté d'autres États impérialistes et capitalistes, en recourant à des contorsions mentales pour nier leur caractère capitaliste, exploiteur et oppressif.

Enfin, certain.nes membres de la gauche ont adopté une position simpliste sur le plan géopolitique. Iles reconnaissent la nature prédatrice des différents États impérialistes et ne soutiennent aucun d'entre eux. Mais lorsque ces puissances entrent en conflit avec des nations opprimées, au lieu de défendre le droit de ces nations à l'autodétermination, y compris leur droit à se procurer des armes pour obtenir leur libération, ils ramènent ces situations sur l'axe unique de la rivalité interimpériale. Ce faisant, ils privent les nations opprimées de leur droit d'agir en fonction de leurs intérêts.

Des secteurs de la gauche ont commis l'erreur de traiter « l'ennemi de mon ennemi comme mon ami ». Cette position, qu'on la qualifie d'anti-impérialisme vulgaire, de faux anti-impérialisme ou de campisme, soutient les adversaires impériaux de Washington en tant que prétendu axe de la résistance.

Bien sûr, les puissances impérialistes peuvent manipuler les luttes de libération nationale à un point tel qu'elles ne deviennent rien de plus que des guerres par procuration. Mais les réductionnistes géopolitiques utilisent cette possibilité pour refuser de soutenir les luttes légitimes de libération aujourd'hui.

Telle a été la position de nombreuses et nombreux partisan.nes de la gauche concernant la guerre impérialiste que mène la Russie contre l'Ukraine, la réduisant à une simple guerre par procuration entre Moscou et Washington. Mais comme le démontrent les sondages en Ukraine et la résistance nationale, les Ukrainiens se battent pour leur propre libération, et non pas pour servir de marionnette à l'impérialisme américain.

Sur la base de leur analyse erronée de la guerre, les réductionnistes géopolitiques se sont opposés au droit de l'Ukraine à se procurer des armes pour se libérer de l'impérialisme russe et se sont opposés aux livraisons, certains allant même jusqu'à organiser des actions visant à les empêcher. Un éventuel blocage de ces livraisons conduirait à une victoire de l'impérialisme russe, ce qui serait un désastre pour le peuple ukrainien et le condamnerait au même sort que ceux qui ont été massacrés à Bucha et à Mariupol.

Aucune de ces trois positions ne fournit à la gauche internationale un guide pour aborder les questions posées par le nouvel ordre mondial multipolaire asymétrique.

L'anti-impérialisme internationaliste

L'anti-impérialisme internationaliste est une bien meilleure approche. Au lieu de prendre le parti de tel ou tel État impérialiste ou capitaliste, les partisans de cette position s'opposent à tous les impérialismes ainsi qu'aux régimes capitalistes moins puissants, et ce tout en nous opposant aux interventions impérialistes dirigées contre eux. Nous sommes solidaires de toutes les luttes populaires de libération, de réforme et de révolution, partout dans le monde et sans exception.

En ce qui concerne la libération nationale, nous nous rangeons inconditionnellement mais de manière critique aux côtés des opprimé.e.s dans leur lutte pour la liberté. Dans ces luttes, cependant, nous ne faisons pas l'amalgame entre libération nationale et socialisme, rejetant la tentation de peindre ces combats au pinceau rouge.

Au lieu de cela, nous adoptons une approche indépendante consistant à construire des liens de solidarité avec les travailleur.es et les opprimé.es dans ces luttes et à cultiver des relations politiques avec leurs forces progressistes et révolutionnaires afin de transformer les luttes pour la libération nationale en luttes pour le socialisme.

Cela nous amène à adopter des positions distinctes de celles d'une grande partie de la gauche sur les trois points stratégiques dans l'ordre impérialiste d'aujourd'hui.

Premièrement, dans le cas de l'Ukraine, nous soutenons sa lutte de libération et défendons son droit à obtenir des armes, même de la part des États-Unis et de l'OTAN, mais nous ne soutenons pas le gouvernement néolibéral de Volodymyr Zelensky. Nous nous opposons également à ce que l'impérialisme occidental utilise l'Ukraine pour promouvoir ses propres ambitions prédatrices et ouvrir le pays et la région à ses banques et à ses entreprises.

En revanche, nous entretenons des relations avec la gauche ukrainienne et le mouvement syndical du pays. Nous soutenons leurs revendications contre le néolibéralisme, contre la reconstruction par l'endettement et contre l'ouverture de l'économie ukrainienne au capital multinational. Nous soutenons leur appel en faveur d'une reconstruction populaire du pays basée sur des investissements du secteur public, avec un salaire décent pour tous les travailleurs, et réalisée par des travailleurs syndiqués.

Dans le cas de la Palestine, nous nous opposons au soutien de l'impérialisme américain à la guerre génocidaire d'Israël à Gaza et nous soutenons inconditionnellement la résistance palestinienne. Mais cela ne signifie pas que nous soutenons sa direction politique actuelle ou sa stratégie et ses tactiques. Nous adoptons une position critique à l'égard de ses partis bourgeois et petit-bourgeois, qu'il s'agisse de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) ou de son pendant fondamentaliste islamique, le Hamas.

La principale direction de l'OLP, le Fatah, a abandonné la lutte armée au profit de l'illusion d'une solution diplomatique à deux États. Trois décennies de diplomatie ont échoué, laissant la Cisjordanie occupée, Gaza assiégée et Israël soumettant les Palestiniens à un régime d'apartheid à l'intérieur des frontières de 1948.

Le Hamas a comblé le vide laissé dans la résistance par la capitulation du Fatah. Il n'a cependant pas développé de stratégie alternative, poursuivant au contraire l'ancienne stratégie du Fatah consistant à s'appuyer sur des alliés arabes et iraniens supposés amicaux pour l'aider dans sa lutte militaire contre Israël. Il n'y a aucune raison de penser que cette stratégie, qui a échoué quand elle était pratiquée par l'OLP, sera couronnée de succès aujourd'hui.

Soutenu par l'impérialisme américain et renforcé par des alliances avec la plupart des régimes arabes, Israël ne peut être vaincu uniquement sur le plan militaire. Seule une stratégie combinant la résistance palestinienne contre Israël, la lutte révolutionnaire contre tous les régimes de la région et les mouvements anti-impérialistes au sein de toutes les grandes puissances peut libérer les Palestiniens de l'apartheid israélien et établir un État laïque et démocratique du fleuve à la mer, avec des droits égaux pour tous et toutes, y compris le droit des Palestiniens à retourner dans les maisons et sur les terres qui leur ont été volées.

Enfin, dans le cas de Taïwan, nous nous opposons à la menace chinoise d'annexer l'île et défendons le droit de Taïwan à l'autodétermination, y compris par l'autodéfense armée, tout en nous opposant à la volonté de Washington d'armer le pays dans le cadre de sa rivalité impériale avec la Chine.

L'anti-impérialisme internationaliste constitue une stratégie pour construire la solidarité par en bas entre les travailleurs et les opprimés contre toutes les grandes puissances et tous les États capitalistes du monde. Nous avons une occasion et une responsabilité énormes de promouvoir cette démarche auprès d'une nouvelle génération d'activistes.

Nous ne soutenons aucun des partis bourgeois en lice pour la présidence de Taïwan, mais nous sommes solidaires de la gauche émergente, des organisations populaires et des syndicats du pays. Eux seuls ont un intérêt et les moyens de défier les puissances impérialistes et la classe capitaliste taïwanaise et de construire une solidarité avec les travailleurs et les opprimés en Chine, dans la région et aux Etats-Unis.

Ainsi, l'anti-impérialisme internationaliste constitue une stratégie pour construire la solidarité par en bas entre les travailleurs et les opprimés contre toutes les grandes puissances et tous les États capitalistes du monde. Nous avons une occasion et une responsabilité énormes de promouvoir cette démarche auprès d'une nouvelle génération de militant.e.s qui sont instinctivement opposés à l'impérialisme américain et méfiants à l'égard des autres grandes puissances et des États oppresseurs.

C'est seulement dans la pratique, dans les luttes vivantes, que nous pourrons prouver la supériorité de ces idées, qu'il s'agisse des luttes de classe et des luttes sociales nationales ou des luttes de solidarité avec la Palestine, l'Ukraine et d'autres nations opprimées. Ce faisant, nous pouvons contribuer à forger une nouvelle gauche internationale engagée dans la construction de la solidarité par en bas dans la lutte contre le capitalisme mondial et pour le socialisme international.

Ashley Smith

P.-S.

• Traduit pour ESSF par Pierre Vandevoorde avec l'aide de DeepLpro.

Source : TEMPEST. PUBLIÉ LE 24 MAI 2024 :
https://tempestmag.org/2024/05/imperialism-and-anti-imperialism-today/

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L’avenir de l’Inde si Modi est réélu – une entrevue avec Christophe Jaffrelot

4 juin 2024, par Christophe Jaffrelot, Corinne Deloy — ,
Alors que l'Inde s'apprête à réélire son parlement, Christophe Jaffrelot, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'Inde, répond aux questions de Corinne Deloydu (…)

Alors que l'Inde s'apprête à réélire son parlement, Christophe Jaffrelot, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'Inde, répond aux questions de Corinne Deloydu Centre d'étude et de recherches internationales sur l'avenir de l'Inde et sur les élections qui se déroulent depuis le 19 avril et qui se terminent le 1er juin prochain.

Tiré du Journal des alternatives.

CERI : Les élections générales se déroulent en Inde du 19 avril au 1er juin. Pouvez-vous nous dire comment se dérouleront ces élections inhabituelles ?

Christophe Jaffrelot (CJ) – Les élections se déroulent sur six semaines cette année, un record ! C'est évidemment pour permettre à Narendra Modi de sillonner le pays, puisqu'il reste l'atout du BJP, le parti au pouvoir étant bien moins populaire que son leader : c'est lui qui peut faire élire suffisamment de députés pour remporter les élections.

En outre, des machines électroniques seront à nouveau utilisées pour enregistrer les votes des citoyens, mais elles font l'objet de critiques croissantes car les ingénieurs informatiques ont prouvé qu'elles pouvaient être facilement falsifiées. L'opposition réclame depuis des années la mise en place d'un système de vérification des votes, au moins dans les circonscriptions où la différence de voix est faible.

La Commission électorale qui chargée d'organiser le scrutin et de veiller à son bon déroulement, refuse catégoriquement d'appliquer cette simple mesure, ce qui accroît les soupçons de fraude, d'autant plus que, cette année, le gouvernement a refusé d'inclure le président de la Cour suprême dans le collège chargé de nommer les membres de cette commission (ce qui permet au gouvernement d'avoir les mains libres pour procéder aux nominations), et que deux de ses trois membres viennent d'être nouvellement nommés à la suite d'une démission surprise et de vacances programmées…

Le fait que ces élections ne seront pas aussi libres et équitables que les précédentes a déjà été démontré par l'arrestation du ministre en chef de Delhi, Arvind Kejriwal, une figure de l'opposition assez populaire, et par le gel des comptes bancaires appartenant au Parti du Congrès, ce qui limite donc leurs moyens de campagne.

Les élections de 2024 sont également moins équitables que les précédentes en raison du déséquilibre en termes de couverture médiatique : depuis le rachat de New Delhi Tele Vision (NDTV) par Gautam Adani, l'étoile montante des oligarques qui dominent désormais le monde des affaires indien, il n'y a pas une seule chaîne de télévision qui soit un tant soit peu critique à l'égard du gouvernement.

Le BJP bénéficie également de ressources financières abondantes grâce au système des obligations électorales qui, depuis 2017, permet aux partis politiques de recevoir des dons anonymes, les donateurs pouvant bénéficier de faveurs en retour. La Cour suprême a déclaré ce dispositif inconstitutionnel le mois dernier, mais les caisses du parti au pouvoir sont déjà pleines ! En 2019, le BJP a dépensé 3,5 milliards de dollars…

CERI – Quels sont les principaux thèmes de campagne ?

CJ – En Inde, les élections ne reposent pas seulement sur des questions, mais aussi sur des émotions. Et Narendra Modi profite du sentiment ethnonationaliste d'au moins deux façons. Tout d'abord, il fait appel à la fibre religieuse de la communauté hindoue (qui représente environ 80% des Indiens). Le 22 janvier, il a joué le rôle de grand prêtre hindou en présidant la cérémonie d'inauguration du temple d'Ayodhya, construit sur les décombres d'une mosquée du XVIe siècle détruite par des militants nationalistes hindous en 1992. Cette cérémonie, diffusée en boucle sur toutes les chaînes, marque le lancement de la campagne électorale du BJP. En même temps, il polarise les électeurs sur des lignes religieuses en stigmatisant les musulmans, consolidant ainsi sa base électorale majoritairement hindoue. Il a récemment qualifié les musulmans d'« infiltrés » (terme faisant allusion aux migrants bangladais) et de ceux qui ont « plus d'enfants » (faisant appel aux craintes démographiques des hindous, qui représentent encore 80% de la population).

D'autre part, Modi joue sur la fierté que les Indiens tirent de la reconnaissance internationale suscitée par les rencontres de leur leader avec les grands de ce monde, qui sont d'ailleurs retransmises en boucle à la télévision. Le sommet du G20 qui s'est tenu à Delhi il y a quelques mois a été l'occasion d'exploiter ce sentiment, avec de nombreuses images de Narendra Modi aux côtés des logos du G20. Ce n'était pas le tour de l'Inde d'accueillir cette réunion, mais New Delhi a réussi à échanger sa place avec le Brésil pour montrer à quel point Modi avait « rendu l'Inde grande à nouveau » avant les élections.

L'opposition s'évertue à pointer du doigt la hausse du chômage, la crise environnementale (qui se traduit par des pénuries d'eau, une pollution atmosphérique record et de nouvelles formes de déforestation) et le capitalisme de connivence à l'origine de l'ascension fulgurante de personnalités telles que Gautam Adani. Mais Modi semble intouchable. L'opinion publique blâme plus volontiers les fonctionnaires et même les ministres, et surtout les anciens dirigeants, dont Nehru que Modi accuse de tous les maux.

CERI – Quel rôle jouent les médias dans la campagne actuelle ? Certaines parties des médias sont-elles indépendantes du contrôle du gouvernement ?

CJ – Pendant longtemps, la scène médiatique indienne a été l'une des plus riches au monde ! Aujourd'hui, elle n'est plus que l'ombre d'elle-même. Dans le domaine de la radiodiffusion, des chaînes de télévision indépendantes ont été rachetées par des amis du gouvernement (comme l'acquisition de NDTV par Gautam Adani) et de nouvelles chaînes ont été créées pour relayer la ligne du gouvernement, comme Republic TV, une sorte de Fox News à l'indienne.

Dans la presse écrite, la situation est un peu plus variée, mais en règle générale, les propriétaires de journaux, qui possèdent généralement plusieurs autres entreprises, préfèrent que leurs journaux n'apparaissent pas trop critiques à l'égard du gouvernement afin d'éviter des contrôles fiscaux ou d'autres enquêtes qui mettraient en péril leur activité.

Pour savoir ce qui se passe, il faut suivre les quelques journaux en ligne comme The Wire ou Scroll.in, ou des publications mensuelles comme The Caravan, qui sont animées par des journalistes d'un courage remarquable et qui font un travail exceptionnel.

CERI – Quel est le bilan économique de Narendra Modi, à la tête de l'Inde depuis maintenant dix ans ?

CJ – Le bilan économique et social est très mitigé : le taux de chômage n'a jamais été aussi élevé depuis les années 1970, surtout chez les jeunes citadins, où il s'élève à environ 25%. De nombreuses jeunes femmes ne cherchent même plus de travail, et le taux de participation des femmes au marché du travail s'élève à 16%. Dans le même temps, l'inflation reste élevée, en particulier pour les denrées alimentaires, ce qui pénalise les plus pauvres. La décision de doubler le nombre de personnes éligibles à l'aide alimentaire pendant la pandémie de Covid-19 a également été prolongée : 800 millions de personnes sont désormais éligibles à l'aide alimentaire, ce qui contraste fortement avec l'affirmation du gouvernement selon laquelle seulement 5% de la population indienne est pauvre. Alors que les Indiens ont dû puiser massivement dans leurs réserves, le taux d'épargne est en baisse depuis des années, ce qui explique en partie pourquoi le taux d'investissement privé est également très faible. Une autre raison est la faiblesse de la demande. Dans ce contexte, de nombreux économistes expriment des doutes sur la fiabilité du taux de croissance officiel d'environ 8%.

En effet, l'économie indienne ne s'est jamais vraiment remise de la « démonétisation » de 2016, année où Modi a fait retirer 85% de la masse monétaire de la circulation, sous prétexte de lutter contre l'argent sale, mais plus vraisemblablement dans le but de vider les caisses des partis d'opposition.

Cela dit, la classe moyenne supérieure et, plus encore, les super-riches, bénéficient du système économique mis en place par Modi : non seulement son gouvernement développe une politique de l'offre basée notamment sur des réductions d'impôts pour de nombreuses entreprises, mais la charge fiscale est déplacée de l'imposition directe des individus (dont l'impôt sur le revenu et l'impôt sur la fortune) vers les impôts indirects, qui frappent le plus durement les pauvres.

CERI – Existe-t-il encore une opposition en Inde après la mise à l'écart de Rahul Gandhi ? Quelles sont les principales forces d'opposition ? Sont-elles unies dans un front anti-Modi ? Y a-t-il un leader émergent ?

CJ – C'est la grande inconnue de cette élection. Pour la première fois, plus de vingt partis d'opposition ont formé une alliance appelée INDIA. Mais cette alliance a subi d'importantes défections : certains partis l'ont quittée et le BJP a débauché un certain nombre de députés sortants du Parti du Congrès ou d'autres partis d'opposition (environ un quart des candidats du BJP viennent d'un autre parti, une situation sans précédent). Toutefois, si, dans le cadre du système électoral uninominal à un tour, l'unité de l'opposition permet de limiter le nombre de « votes gaspillés », le BJP pourrait ne pas remporter autant de sièges qu'en 2019.

CERI – À quoi ressemblerait un troisième mandat pour Narendra Modi ?

CJ – Tout dépend de la taille de sa majorité. Si le BJP remporte 400 sièges, il sera en mesure de réviser la Constitution. Il supprimerait alors probablement les références à la laïcité (mot désignant ici la reconnaissance égale de toutes les religions) et les articles soutenant ce principe, comme ceux qui permettent aux minorités de demander des subventions publiques pour leurs écoles. Les révisions constitutionnelles affaibliraient également le fédéralisme en Inde. Non seulement le gouvernement central accumulerait plus de pouvoir, mais l'utilisation de l'hindi se développerait probablement au détriment des langues régionales. Si le BJP n'obtient pas la majorité des deux tiers nécessaire pour réformer la Constitution, Modi se contentera probablement de réformes telles que l'introduction d'un code civil uniforme qui, parmi les grands objectifs que le BJP s'est fixés dans les années 1990, est le dernier à rester inachevé. Cela permettrait de réduire le rôle des lois personnelles en vigueur pour certaines minorités, comme la charia, qui régissent des aspects de la vie religieuse, politique, sociale et individuelle.

CERI – Narendra Modi est souvent comparé à Vladimir Poutine ou à Xi Jinping. Diriez-vous que, dans son cas, il y a néanmoins quelque chose d'exclusivement indien ? Et si oui, comment le décririez-vous ?

CJ – Modi n'appartient pas à cette catégorie, mais plutôt à celle des Erdoğan, Orban, Netanyahu, Bolsonaro, Dutertre… des nationaux-populistes qui risquent de perdre une élection — ce qui ne concerne pas Poutine ou Xi. Contrairement aux dictateurs, les nationaux-populistes ont besoin d'un mandat populaire qui leur donne une légitimité suffisante pour imposer leur volonté aux institutions de leur État, à commencer par le pouvoir judiciaire, qui est toujours leur première cible. Ces points communs n'empêchent pas d'identifier une spécificité indienne, mais celle-ci ne peut être que relative.

Par exemple, Modi joue certainement plus sur l'élément religieux que la plupart des nationaux-populistes, au point d'être devenu le grand prêtre de la nation hindoue. Mais sa religiosité s'inscrit dans une veine ethnonationaliste comparable à celle de tous ceux que j'ai cités plus haut… Modi a peut-être aussi réussi à « rendre l'Inde grande à nouveau », aux yeux de nombreux Indiens, en faisant de la réunion du G20 à Delhi et de toutes ses visites à Washington, Paris, etc. des événements grandioses, retransmis en boucle à la télévision. Mais le nationalisme est monnaie courante chez les populistes, et j'ai d'ailleurs fait allusion au slogan de Trump pour décrire ce comportement.

L'exploit le plus singulier de Modi est sa capacité à être exactement ce que tout le monde veut voir en lui : il est à la fois le grand prêtre de l'hindouisme (et même le sage méditant dans sa grotte ou priant immergé jusqu'au cou dans le Gange), l'homme fort protégeant l'Inde contre le Pakistan et les islamistes, l'homme du développement qui promet de doubler le revenu des paysans (alors qu'il stagne en réalité…), le conseiller des pauvres qui s'exprime à la radio tous les mois depuis 2014, dans l'émission Mann ki Baat (Talking from the Heart), en prétendant être la voix des masses… Modi est un véritable caméléon, comme en témoigne sa capacité à adapter son langage corporel (et même ses vêtements) en fonction du public. Mais s'il y a quelque chose de typiquement indien en lui, c'est peut-être la tradition de la relation entre maître et disciples (le guru-shishya parampara), qui conduit ces derniers à suivre aveuglément le premier.

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Entretien mené par Corinne Deloy pour le Centre de recherches internationales (CERI) et traduit en anglais par Sam Ferguson. Article disponible en anglais sur le site d'Alternatives International. La présente version en français peut ne pas correspondre avec la version originale publiée sur le site du CERI.

En savoir plus

Une présentation du récent ouvrage de Christophe Jaffrelot, Gujarat Under Modi. Laboratoire de l'Inde d'aujourd'hui (Hurst, 2024) Lien :

Ressources du CERI sur l'Inde, disponibles en ligne (français et anglais)

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Victoire historique pour toute la communauté universitaire de l’UQAM !

4 juin 2024, par Université populaire Al-Aqsa — , ,
L'Université populaire Al-Aqsa de l'UQAM (UPA-UQAM) se félicite que le Conseil d'Administration (CA) de l'Université du Québec à Montréal (UQAM) adopte une résolution (…)

L'Université populaire Al-Aqsa de l'UQAM (UPA-UQAM) se félicite que le Conseil d'Administration (CA) de l'Université du Québec à Montréal (UQAM) adopte une résolution instituant un boycott académique à l'égard des universités israéliennes. Ainsi, l'UPA-UQAM considère que le contenu de la résolution et ses dispositions répondent favorablement aux conditions minimales de réalisation de ses demandes face à l'UQAM.

Le 30 mai 2024

À Tiohtia ;ke, Montréal,

*En l'honneur de tous les sacrifices du peuple palestinien *

Il s'agit d'une avancée hautement symbolique à l'UQAM et dans la lutte internationale de solidarité avec la Palestine. Nous rappelons que c'est la mobilisation étudiante, communautaire et populaire qui a permis cette victoire politique.

« *Par notre occupation et notre courage, on a prouvé que c'est possible d'établir un rapport de force et d'obtenir des gains significatifs. Par cette mobilisation historique, nous envoyons un message clair aux administrations des autres universités. Si vous souhaitez voir la fin des campements, vous devez poser des actes courageux pour cesser toute
complicité avec l'État sioniste et les actes génocidaires contre le peuple palestinien : désinvestir, boycotter les universités israéliennes ou couper tout lien avec l'État israélien
* », affirme Leila Khaled, étudiante à l'UQAM et porte-parole de l'UPA-UQAM.

Pour l'UPA-UQAM, bien que le rectorat refuse d'utiliser le terme « boycott académique », le résultat reste significatif pour nous. En effet, la résolution ne mentionne pas spécifiquement un boycott académique à l'égard d'Israël. Néanmoins, elle reconnait, d'une part, « la violation du droit à l'autodétermination du peuple palestinien », d'autre part les décisions de la Cour internationale de justice du 26 janvier, du 28 mars et du 24 mai
2024 qui font état de risques plausibles de génocide commis par Israël à
l'encontre des Palestinien-ne-s de Gaza.

D'autre part, la résolution adoptée au Conseil d'Administration demande à l'Université de veiller à ce qu'aucune de ses ententes académiques actuelles et futures, dont celles avec des universités israéliennes, n'entre en conflit avec le respect du droit international. L'UPA-UQAM rappelle que le droit international reconnait le droit au retour des réfugié-es palestinien-nes, la fin de la colonisation, l'illégalité de l'occupation et de l'apartheid, de même que le droit à la résistance du peuple palestinien. Affaires Mondiales Canada a par ailleurs reconnu par voie d'un communiqué le 16 mai 2024 que les colonies israéliennes dans les territoires occupés sont en violation des résolutions 446 (1979) et 465
(1980) du Conseil de sécurité des Nations Unies et de la Quatrième Convention de Genève. Les liens de l'UQAM avec des universités israéliennes devront également être évalués à partir de leurs liens avec la colonisation sur les territoires palestiniens.

Ainsi, en constatant les violations du droit international par Israël et en exigeant qu'il n'y ait aucun accord académique qui entre en conflit avec le droit international humanitaire, l'UQAM vient implicitement à boycotter les universités israéliennes et établit de bonnes conditions allant vers un réel boycott académique.

« *Nous aurions certes aimé avoir une résolution plus explicite sur le boycott académique à l'égard de l'entité sioniste, ainsi que sur la reconnaissance du génocide sans établir de rapport de symétrie entre "colonisateur" et "colonisé"* » explique Leila Khaled. Malgré tout, l'UPA-UQAM considère que cette résolution va en partie dans le sens de ses
demandes minimales politiques. « *Cette victoire politique doit servir de tremplin pour aller plus loin dans les revendications de l'UPA * », ajoute-t-elle.

*Ce n'est qu'un début, le combat continue*

L'UPA-UQAM est déterminée à continuer la lutte pour la libération du peuple palestinien et rappelle pourquoi elle se mobilise : « *Le génocide qui prend place à Gaza ne fait que s'accentuer et les États occidentaux, dont ceux des soi-disant Canada et Québec, sont complices. L'heure est grave, la situation est urgente. Il faut se soulever maintenant* », scande Kalida Jarrar, étudiante à l'UQAM.

Dans les derniers jours, la communauté internationale a été témoin du massacre de centaines de personnes et d'encore plus de blessé-es à Rafah et en Palestine. On recense désormais un minimum de 36 000 personnes martyrisées et 10 000 personnes encore coincées sous les décombres. À cela s'ajoute entre autres un nombre indéfini de blessé-es, de malades, d'orphelin-es, de personnes en situation de famine. Il est déjà présumé que le désastre est d'une ampleur considérable.

« *Notre position est simple, elle est du côté de la justice, des opprimé-es et de la résistance* » continue Khalida.

Le campement de l'UPA-UQAM prouve qu'avec le courage, la force collective et la détermination, les gains sont possibles.

« *Nous espérons que cette résolution établisse un précédent pour l'ensemble des universités canadiennes et nous les empressons d'emboîter le pas* », déclare Leila Khaled.

L'UPA-UQAM appelle maintenant la population qui regarde avec horreur depuis maintenant plus de 8 mois les exactions de l'entité sioniste en Palestine, à exiger du gouvernement du Québec qu'il prenne acte du génocide en cours et coupe ses liens avec l'État israélien, en commençant par abolir urgemment le bureau du Québec à Tel-Aviv.

L'UPA-UQAM exprime également sa reconnaissance envers les personnes ayant
initié le mouvement au campement de McGill, à Tiohtia:ke, Montréal. En solidarité avec nos camarades qui font toujours face au refus de l'administration de répondre à leurs demandes, nous resterons constamment à leurs côtés pour les soutenir.

*La lutte pour la libération de la Palestine continue !*

L'UPA continuera à offrir à la communauté universitaire et à la population ses activités culturelles et ses ateliers d'éducation populaire au cours de la prochaine semaine. Elle entend lever son campement au plus tard le 6 juin 2024, suite à l'adoption des balises concrètes de mise en œuvre du boycott académique par la Commission des études du 4 juin. Notre départ ne signifie pas la fin de notre mobilisation. Nous invitons la population à
poursuivre la lutte en participant à une grande manifestation réclamant l'abolition du bureau du Québec à Tel-Aviv, le 6 juin à 19h. Elle partira du Cœur des sciences de l'UQAM (175 avenue Président-Kennedy).

La lutte palestinienne a été et demeura toujours une source d'inspiration pour nos propres luttes, nous guidant ainsi vers notre libération collective »*

*النضال الفلسطيني كان وسيبقى النضال الذي نقتدي به، وسيحررنا جميعا*

Solidarité pour les droits Humains des Palestiniennes et Palestiniens
(SDHPP) basée à l'UQAM

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Projet de loi 57 : Une menace pour l’action politique des groupes communautaires

4 juin 2024, par Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec (MÉPACQ) — , ,
La ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, a déposé le 10 avril dernier, le projet de loi 57 « visant à protéger les élus et favoriser l'exercice sans entraves de (…)

La ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, a déposé le 10 avril dernier, le projet de loi 57 « visant à protéger les élus et favoriser l'exercice sans entraves de leurs fonctions. »

Tiré du site du Mepacq

Un objectif louable

Nous reconnaissons qu'il est fort important de préserver le droit à un environnement de travail sans harcèlement ou violence. Toutefois, le projet semble mélanger autant des individus violents à l'égard des personnes élues que des groupes communautaires qui font des actions collectives pour influencer des décisions politiques.

Des entraves aux actions démocratiques

Le projet de loi permettrait de donner des amendes à des individus qui « entravent indûment l'exercice [des] fonctions ou portent atteinte [au] droit à la vie privée » des élus⁠. Cette définition floue englobe autant une personne menaçant une personne élue, mais également un individu qui tente de faire entendre son opinion politique, bien qu'elle puisse déranger l'élu concerné. Ce sont deux choses complètement différentes !

Quel est l'objectif ?

Est-ce qu'on veut réellement lutter contre les violences vécues par les personnes élues ou limiter la parole de la population et des mouvements sociaux lorsqu'ils ne sont pas d'accord ? Nous sommes en droit de nous poser la question dans le climat actuel où les réactions à la contestation sociale sont plutôt négatives. Récemment, un groupe communautaire s'est même vu menacé de poursuite pour avoir fait une campagne de lettres à un élu.

L'action politique des groupes communautaires est essentielle

Les personnes élues sont en situation de pouvoir. Elles prennent part aux décisions et leur voix est largement entendue dans les médias. Ce n'est que très peu le cas des gens qui fréquentent les groupes communautaires : pensons aux personnes bénéficiaires de l'aide sociale, celles en situation d'itinérance ou aux personnes âgées évincées par centaines. C'est pourquoi l'action politique, notamment dirigée à l'endroit des personnes élues, est essentielle. L'action politique permet de s'exprimer, possiblement être entendu et respecté, de faire malgré les obstacles à la participation au système politique.

L'action politique moteur de notre démocratie

Le projet de loi 57 soulève de vives inquiétudes et des questionnements importants quant à la place de la population dans nos institutions démocratiques lorsqu'elle souhaite faire valoir une position politique. L'action politique constitue un contrepoids au pouvoir de l'État et permet de mettre en lumière les angles morts des décisions politiques. Les voix des personnes principalement concernées doivent être entendues pour que notre démocratie soit saine et représentative.

Des consultations bidons en mode express

À peine 2 semaines après le dépôt du projet, nous avons appris que les consultations sur le projet de loi auraient lieu du 30 avril au 2 mai 2024. Ce délai est trop court pour faire une analyse en profondeur du projet et pour laisser le temps aux organismes de manifester leur souhait de participer. Les enjeux qui se retrouvent dans le projet de loi mérite pourtant un réel débat public et non pas une consultation à la va vite.

Repenser le projet de loi 57 !

Le projet de loi de la ministre Andrée Laforest soulève des questions importantes quant à la place de la population dans nos institutions démocratiques. Il semble vouloir écarter la population des débats publics, surtout lorsqu'elle exprime son désaccord avec les décisions prise par la classe politique. Le projet de loi 57 doit être repensé pour cibler les individus qui menacent des personnes élues et de vraies consultations doivent être menées pour entendre la société civile.

Écrivez à la Ministre pour faire entendre votre voix !

Le projet de loi 57 aura des impacts pour nos organismes, faisons-le savoir à la Ministre !

Aux courriels suivant :
Andree.Laforest.CHIC@assnat.qc.ca, Andree.Laforest@assnat.qc.ca et ministre@mam.gouv.qc.ca

Ainsi que l'opposition :Etienne Grandmont (QS)
Etienne.Grandmont.TASC@assnat.qc.ca
Etienne.Grandmont@assnat.qc.ca

Michelle Setlakwe (PLQ)
Michelle.Setlakwe.MROU@assnat.qc.ca
Michelle.Setlakwe@assnat.qc.ca

Paul St-Pierre Plamondon (PQ)
chef.pspp@assnat.qc.ca

Joël Arseneau

Joel.Arseneau.IDLM@assnat.qc.ca

Avec le MÉPACQ en CC
communication@mepacq.qc.ca

On vous invite si vous le souhaitez à mettre en CC vos députés locaux.

Vous pouvez modifier ou adapter le message suivant :

Bonjour Madame Laforest,

Nous sommes grandement préoccupées par le dépôt et par la rapidité des consultations sur le projet de loi 57 « visant à protéger les élus et favoriser l'exercice sans entraves de leurs fonctions ». Nous reconnaissons qu'il est fort important de préserver le droit à un environnement de travail sans harcèlement ou violence. Toutefois le projet de loi créera des entraves potentielles à l'expression politique des citoyennes et citoyens ainsi qu'à l'action politique des groupes communautaires.

Les définitions présentes dans le projet de loi englobent autant une personne menaçant un élu, qu'un individu qui tente de faire entendre son opinion politique, bien qu'elle puisse déranger l'élu concerné. Ce sont deux choses complètement différentes. L'action politique n'est pas à confondre avec la violence, le harcèlement ou l'intimidation pouvant être perpétrés à l'égard d'une personne élue.

Le projet de loi 57 soulève de vives inquiétudes et des questionnements importants quant à la place de la population dans nos institutions démocratiques. Il semble vouloir écarter la population des débats publics, surtout lorsqu'elle exprime son désaccord avec les décisions prise par la classe politique.

En effet, les personnes élues sont en situation de pouvoir. Elles prennent part aux décisions et leur voix est largement entendue dans les médias. Ce n'est que très peu le cas des gens qui fréquentent les groupes communautaire ; pensons aux personnes bénéficiaires de l'aide sociale, celles en situation d'itinérance ou aux personnes âgées évincées par centaines. (VOUS POUVEZ ICI PARLER DES GENS QUI FRÉQUENTENT VOTRE GROUPE). L'action politique permet de s'exprimer, possiblement être entendu et respecté, malgré les obstacles à la participation au système politique. C'est pourquoi nos campagnes de cartes postales, nos envois de courriel, nos rassemblements à des bureaux de circonscriptions ou nos actions de perturbation sont essentielles.

Les consultations sur le projet de loi ont lieu du 30 avril au 2 mai 2024. Ce délai est trop court pour que les acteurs de la société civile puissent en faire une analyse en profondeur et manifester leur souhait d'y participer. Les enjeux qui se retrouvent dans le projet de loi mérite pourtant un réel débat public et non pas une consultation à la va-vite.

Ainsi, nous demandons que le projet de loi 57 soit repensé pour cibler les individus et les élus qui menacent d'autres élus et que de vraies consultations doivent être menées pour entendre la société civile.

Merci de l'attention que vous porterez à cette demande.

Bien à vous,


Nos vignettes s'inspirent librement d'une lettre ouverte de la chercheuse Joëlle Dussault que nous avons co-signée, pour la consulter c'est par ici

Consulter le projet de loi

La liste des intervenants invités lors des consultations

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Confiance brisée : le MSSS a caché qu’il ne rehausserait pas les subventions pour la mission globale en 2024

4 juin 2024, par Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles (TRPOCB) — , ,
Montréal, le 29 mai 2024._ La Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles [1] est outrée de découvrir que le MSSS a caché qu'il ne rehaussera (…)

Montréal, le 29 mai 2024._ La Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles [1] est outrée de découvrir que le MSSS a caché qu'il ne rehaussera pas les subventions pour la mission globale de 3000 organismes communautaires autonomes du domaine de la santé et des services sociaux (OCASSS). Globalement, tout ce que ces derniers recevront c'est l'indexation de la subvention de l'année précédente, de surcroît au taux insuffisant de 2,7 %. [2]

Rappelons que lors du dépôt du Budget 2024 du Québec, le 12 mars dernier, une somme de 10 M$ a été présentée comme étant destinée au rehaussement des subventions à la mission globale des 3000 OCASSS [3], par le Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC) [4]. Cette somme s'ajoutait à l'indexation automatique des subventions et nous n'avions aucune raison d'en douter. « Or, nous apprenons
aujourd'hui non seulement que le 10 M$ ne sera pas versé pour la mission
globale, mais que le gouvernement n'en aurait jamais eu l'intention. Cette nouvelle équivaut à dire que, dès le budget, le choix était fait de ne pas bonifier l'enveloppe pour le financement à la mission globale des OCASSS
», s'insurge Stéphanie Vallée, présidente de la Table.

Que ce soit par le communiqué de presse émis par la Table le 12 mars [5], ou par les nombreux échanges avec le personnel politique et administratif du MSSS, autour et depuis le budget, à aucun moment cette information n'a été divulguée. « Même le 26 avril dernier, alors que nous rencontrions le ministre Lionel Carmant, responsable des Services sociaux [6], celui-ci n'a pas rectifié l'information qui circulait depuis presque trois mois. Ne serait-ce que par nos notes prises durant la rencontre, le ministre a eu au moins six occasions de donner l'heure juste, mais il ne l'a pas fait. Nous ne nous expliquons pas ce
procédé
», poursuit Stéphanie Vallée.

Soulignons qu'aucune communication officielle n'a encore été transmise ni à la Table ni aux 3000 OCASSS ; la correspondance de la Table, adressée d'urgence au ministre Carmant, ayant été répondue par ses attachées politiques.

La Table a de plus appris que les modalités de distribution du 10 M$ n'étaient pas encore définies, et qu'il faudrait plusieurs semaines pour les déterminer, tant au niveau des destinataires visées que de la forme du financement. « Cela veut dire que le 10 M$ pourrait même être attribué par des ententes de services, alors que celles-ci sont beaucoup plus contraignantes qu'une subvention pour la mission globale et ne
favorisent pas l'autonomie des groupes. Il est quand même aberrant que le ministère affirme ne pas savoir comment les sommes seront attribuées, tout en affirmant que cela exclue le financement pour la mission globale. Combien de semaines ou de mois les OCASSS devront-ils attendre pour avoir l'heure juste ?
» questionne Mercédez Roberge, coordonnatrice de la
Table.

Rappelons que les 10 M$ annoncés laissaient déjà les OCASSS sur leur faim, puisque la revendication portée par la campagne _CA$$$H _(_Communautaire autonome en santé et services sociaux — Haussez le financement)_ [7] vise l'ajout de 1,7 G$ pour permettre à la population d'accéder aux organismes qu'elle s'est donnés [8]. « En mars,
nous disions que ce 10 M$ était vraiment insuffisant, considérant que l'enveloppe pour la mission globale était de 788 M$. La découverte d'aujourd'hui fait vivre une situation inédite et est très inquiétante pour la suite. Les OCASSS n'ont pas à faire les frais
d'un tel cafouillage. Le gouvernement doit destiner le 10 M$, comme il l'a laissé entendre, au fonctionnement des 3000 OCASSS. Sans attendre, il doit démontrer son appréciation de leurs missions en leur obtenant un financement à la hauteur des besoins
», de conclure Stéphanie Vallée, présidente de la Table.

SOURCE :

Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et
bénévoles (TRPOCB), [9]

* Stéphanie Vallée est présidente de la Table des regroupements
provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles. Elle est
également co-coordonnatrice de L'R des centres de femmes du Québec
[10].
* Mercédez Roberge est coordonnatrice de la Table des regroupements
provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles [11].

À propos

Fondée en 1995, la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles [12] (TRPOCB) est formée de 44 regroupements nationaux [13], rejoignant plus de 3 000 groupes communautaires autonomes à travers le Québec. Ce sont, par exemple, des maisons de jeunes, des centres de femmes, des cuisines collectives, des maisons d'hébergement, des groupes d'entraide, des centres communautaires, des groupes qui luttent contre des injustices ayant des répercussions sur la santé.
Ceux-ci représentent les ¾ des organismes communautaires autonomes du
Québec. Ceux-ci abordent la santé et les services sociaux sous différentes perspectives (femmes, jeunes, hébergement, famille, personnes handicapées, communautés ethnoculturelles, sécurité alimentaire, santé mentale, violence, périnatalité, toxicomanie, etc.).

La Table coordonne la campagne [14]_CA$$$H_ [15] (Communautaire autonome en
santé et services sociaux – Haussez le financement [16]). Lancée le 17 octobre 2017, cette campagne vise l'amélioration substantielle du Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC) du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), au bénéfice de plus de 3 000 organismes communautaires autonomes subventionnés par le MSSS. À compter de 2024, les revendications de la campagne CA$$$H sont : L'ajout de 1,7 G$ à l'enveloppe annuelle du PSOC [17] (mission globale), l'indexation
annuelle des subventions en fonction de l'Indice des coûts de fonctionnement du communautaire (ICFC [18]) et l'atteinte de l'équité de financement et de traitement partout au Québec [19].

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Le privé c’est tout sauf la santé

4 juin 2024, par Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), Regroupement citoyen pour la santé des Laurentides (RCSL), Regroupement des organismes communautaires des Laurentides (ROCL) — , ,
Saint-Jérôme, le 29 mai 2024 – En collaboration avec le Regroupement citoyens santé Laurentides (RCSL) et l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des (…)

Saint-Jérôme, le 29 mai 2024 – En collaboration avec le Regroupement citoyens santé Laurentides (RCSL) et l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux des Laurentides (APTS), le Regroupement des organismes communautaires des Laurentides (ROCL) a tenu une conférence de presse le 29 mai dernier à l'Hôtel Best Western de Saint-Jérôme dans le cadre de la semaine nationale d'actions régionales contre la réforme de santé organisées par la Coalition Solidarité Santé (CSS).

photo : De gauche à droite sur la photo : Benoit Larocque - ROCL, Marie-Ève Meilleur - APTS-L, Mario Leone - RCSL

L'adoption sous bâillon, en décembre dernier, du controversé projet de loi 15 nous oblige à constater que la CAQ continue l'œuvre des réformes précédentes en santé pour centraliser et privatiser toujours davantage le réseau public. Alors que le Ministre Dubé a promis aux Québécoises et aux Québécois de mettre fin au statu quo et d'appliquer un plan d'action pour améliorer l'accessibilité et l'efficacité du réseau de la santé et des services sociaux, force est de constater que la mise en place de l'Agence santé Québec, avec en tête Geneviève Biron, une top gun issue du privé, ne fait qu'ouvrir davantage la porte au privé et exacerbe le problème.

« Pour nos organisations, le gouvernement du Québec fait fausse route. Le ministre dit aux Québécois.e.s que l'ouverture au privé est la solution aux problèmes d'accessibilité au réseau public alors qu'on sait très bien que c'est plutôt l'origine des difficultés. Chaque clinique ou hôpital privé qui ouvre vient drainer les ressources du public et aggrave ainsi les problèmes d'accès. De plus, depuis le début avec le PL-15, la constante est la suivante : le gouvernement avance à toute vapeur, sans consulter les gens sur le terrain. On dénote une importante perte d'espace démocratique et on se demande comment les citoyens et citoyennes des Laurentides peuvent-ils encore se faire entendre ? » a déclaré Mario Leone, président du RCSL.

Le gouvernement choisit en effet d'orchestrer un système où l'État subventionne les compagnies privées pour qu'elles dispensent des soins de santé. On rassure la population en lui disant qu'elle n'aura rien à payer, car ce sera couvert par la carte d'assurance-maladie, mais au final, ce sont les Québécois.e.s qui, collectivement, par le biais de leurs impôts, assurent des coûts plus élevés en santé afin de couvrir la portion importante de profits inhérente à la médecine privée.

« Avec la création de Santé Québec qui deviendra le plus gros employeur au Canada, on dévalorise encore une fois le travail du personnel du réseau public sans améliorer les conditions de travail et on favorise le développement de l'entreprise privée à but lucratif. Pour nous, la santé de la population ne devrait jamais être liée à la recherche de profits de quelques privilégiés » a affirmé Marie-Ève Meilleur, représentante nationale à l'APTS des Laurentides.

« Ce n'est pas d'hier que le gouvernement voit le milieu communautaire comme une solution pour pallier sa responsabilité populationnelle inscrite dans la loi de la santé et des services sociaux (LSSSS). Le ROCL, comme plusieurs regroupements d'organismes communautaires, craignent que le vieux réflexe du gouvernement de transférer ses responsabilités vers les organismes s'accentue en force avec cette réforme » a quant à lui affirmé Benoit Larocque, coordonnateur du ROCL.

« Pour les organismes communautaires, l'enjeu principal des prochaines années ne sera pas exclusivement financier mais davantage lié à leur autonomie et à l'intégrité de leur identité. Avec le fractionnement des sources de financement, les projets non récurrents et les commandes ministérielles, on est de plus en plus amenés sur le terrain de la sous-traitance pour faire à la place de l'État, à moindre coût, et il sera de plus en plus exigeant pour les organismes de garder un esprit critique et de jouer leur rôle de transformation sociale » a-t-il poursuivi. « Dans ce contexte, le financement à la mission des organismes restera toujours le meilleur moyen de réellement nous soutenir ».

À l'instar de plusieurs régions du Québec qui sont mobilisées pour dénoncer la privatisation et la centralisation du réseau de la santé et des services sociaux qu'entraîne la réforme Dubé, le point de presse est l'occasion de rappeler que la population attend une amélioration concrète de l'accès aux soins et aux services de santé et non la vente de notre système de santé public au nom du profit. Le privé, c'est TOUT SAUF SANTÉ.

À propos du RCSL
Le Regroupement citoyen pour la santé des Laurentides (RCSL) est constitué de citoyens et citoyennes de plusieurs MRC de la région des Laurentides, en provenance de divers horizons, outré.e.s par l'état déplorable du système public de santé qui porte atteinte au plein droit de la population, voire à la dignité des personnes les plus vulnérables. Nous croyons qu'il est temps d'agir. Nous nous mobilisons autour de 3 objectifs : le financement juste et équitable pour les Laurentides en santé et services sociaux, une décentralisation du système de santé et un régime public équitable.

À propos de l'APTS
L'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) regroupe et représente quelque 65 000 membres qui jouent un rôle indispensable au bon fonctionnement des établissements du réseau, dont 4400 dans les Laurentides. Nos gens offrent une multitude de services en matière de diagnostic, de réadaptation, de nutrition, d'intervention psychosociale et de soutien clinique et de prévention, autant de services qui s'adressent à l'ensemble de la population.

À propos du ROCL
Le ROCL est un regroupement existant depuis maintenant 30 ans constitué de plus de 160 organismes communautaires autonomes qui œuvrent dans les Laurentides. Lieu de rassemblement pour les organismes de la région, il offre de la formation, de l'accompagnement et du soutien aux organismes du territoire afin de leur permettre de s'épanouir pleinement dans leurs racines communautaires. Il vise par son action, son approche et son rôle de représentation à faire rayonner l'identité des organismes communautaires autonomes et à opérer de profonds changements pour plus de démocratie, d'équité et de justice sociale et climatique.

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Il est temps d’avoir une conversation franche sur les personnes handicapées

4 juin 2024, par Confédération des personnes handicapées du Québec (COPHAN) — , ,
C'est aujourd'hui que débute la Semaine québécoise des personnes handicapées. C'est une occasion unique pour des organisations telles que la Confédération des personnes (…)

C'est aujourd'hui que débute la Semaine québécoise des personnes handicapées. C'est une occasion unique pour des organisations telles que la Confédération des personnes handicapées du Québec (COPHAN) et ses quelque 50 organismes membres, de prendre la parole concernant les enjeux auxquels font face les personnes en situation de handicap (PSH), mais aussi de souligner les gestes qui rendent nos communautés plus inclusives à leur égard.

Paul Lupien est président de la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec et membre des comités d'administration du Réseau québécois des personnes sourdes et malentendantes et de l'Institut national pour l'équité, l'égalité et l'inclusion des personnes en situation de handicap


De fait, la COPHAN, ses membres et ses partenaires remettront leurs Prix Papillon le 14 juin prochain lors d'une soirée gala. Ces prix visent à souligner les bons coups d'organisations ou d'individus qui œuvrent pour rendre notre société plus inclusive pour les PSH.

Cet événement tient sa deuxième édition cette année avec le soutien d'organisations importantes comme le Local 1999 du syndicat de Teamsters, la Ville de Québec, AMI-Télé, Cogeco Média, les COOPS de l'information, l'OPHQ et le gouvernement du Québec, notamment.

Les Prix Papillon viennent mettre en évidence les petites et grandes victoires d'un milieu associatif vivant, efficace et pugnace dont je suis très fier.

Par exemple, on se souviendra que Québec a mis fin aux clauses inéquitables de la loi de la RRQ lors du dernier budget Girard, sur demande d'organismes comme celui que je préside. Il y a aussi le Réseau de transport de la Capitale qui a finalement décidé de conserver le formulaire accessible en ligne pour les personnes sourdes, sur insistance du milieu associatif.

Un de nos membres, le Comité d'action des personnes vivant des situations de handicap (CAPVISH), continue une tournée pour assurer que les commerces de la ville de Québec soient accessibles. Et n'oublions pas les interventions publiques des leaders du milieu associatif, comme Finautonome, qui rappellent jour après jour sur la place publique qu'une proportion non négligeable des personnes handicapées vivent dans une pauvreté abjecte malgré la PCPH dont je parlais plus haut.

En fait, les gens en situation de handicap en âge de travailler au Canada sont deux fois plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que les personnes qui ne le sont pas. Pour en venir à bout, le Québec devra se donner des objectifs beaucoup plus ambitieux pour rehausser l'inclusion des personnes handicapées sur le marché du travail.


Plus de personnes handicapées, moins de financement des OBNL

Un sondage de Statistique Canada paru en 2023 indique que le nombre de personnes handicapées a augmenté au cours des dernières années. Les types de handicap aussi. Le vieillissement de la population, les troubles musculosquelettiques, les problèmes de santé liés à la crise environnementale, notamment, sont autant de sources de handicaps ou de limitations fonctionnelles importantes. Le nombre de dossiers que le milieu associatif traite chaque année est en progression marquée.

Parallèlement, les différents paliers de gouvernement réduisent le financement des organismes qui donnent des services directs aux personnes handicapées, ou celles qui, comme la Confédération, les défendent sur la scène politique.

Ce sont les raisons pour lesquelles la COPHAN a décidé de crever l'abcès une fois pour toutes.

Avec nos membres, partenaires et allié·es, nous avons décidé de mettre sur pied le premier Sommet national sur le handicap auquel participeront des sommités provenant de diverses sphères d'activité. Ce grand rassemblement aura lieu le 7 octobre prochain à l'Université Laval, à Québec.

Il est temps de tenir une conversation franche, mais difficile, sur les personnes en situation de handicap. Nous ne pouvons plus nous permettre de détourner le regard de la vulnérabilité et des difficultés auxquelles elles font face. La classe politique, les capitaines d'industrie, les personnes qui œuvrent dans le système de santé, les leaders d'opinion et l'ensemble de la population doivent aussi se mobiliser pour changer les choses avec nous.

Le slogan « IN/VISIBLE » qui a été choisi pour le Sommet est éloquent. Il caractérise bien ce que nos clientèles vivent chaque jour.

Bref, il est temps que des vérités inconfortables soient dites afin de poser les gestes réparateurs qui rendront nos communautés véritablement accueillantes pour les personnes en situation de handicap.

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Daniel Tanuro, « Ecologie, luttes sociales et révolution (entretiens) »

[En mars 2024, les éditions La Dispute publiaient cet ouvrage. Dans l'avant-propos, Alexis Cukier et Marina Garrisi indiquaient : « Dès le lancement de la collection « (…)

[En mars 2024, les éditions La Dispute publiaient cet ouvrage. Dans l'avant-propos, Alexis Cukier et Marina Garrisi indiquaient : « Dès le lancement de la collection « Entretiens » nous souhaitions publier un ouvrage pour déplier les enjeux et les problèmes que les catastrophes écologiques en cours posent à la théorie et à l'action politiques. » Dans ce but, ils se sont adressés à Daniel Tanuro, dont les compétences professionnelles, l'activité militante et les élaborations théoriques se sont déjà explicitées dans divers ouvrages tels que L'Impossible capitalisme vert (La Découverte, 2010), Trop tard pour être pessimiste (Textuel, 2020) et Luttes sociales et écologiques dans le monde, avec Michael Löwy (Textuel, 2021).

Tiré de A l'Encontre
31 mai 2024

Par Daniel Tanuro

Ces entretiens ont été préfacés par Timothée Parrique ; le titre de sa contribution désigne une question d'importance : « La décroissance comme transition, l'écosocialisme comme destination ». La lecture de cet ouvrage, dont la rigueur ne fait pas obstacle à l'accessibilité, constitue un instrument pour une activité écosocialiste informée. Les deux grands entretiens qui structurent l'ouvrage – « Ce que l'on sait », « Ce que l'on peut faire » – l'illustrent. Un ouvrage à lire (et pour cela à acquérir…). Le choix des extraits, publiés ci-dessous, a été proposé par Robert Mertzig. – Réd.]

Daniel Tanuro, Ecologie, luttes sociales et révolution, préface de Timothée Parrique, La Dispute, coll. « Entretiens », 2024.

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« Du point de vue de l'état des connaissances scientifiques, je le répète, il n'y a pas de doute ni sur la gravité de la crise, ni sur ses causes « anthropiques ». Comment qualifier cette crise ? En grec ancien, katastrophè signifie retournement, changement complet, révolution. Cette définition implique un moment brusque de basculement. À première vue, on n'est pas vraiment dans ce scénario. Plutôt dans celui d'une catastrophe qui dure. Elle a débuté assez lentement dans l'après-guerre, puis a grossi de plus en plus vite. Aujourd'hui, elle se manifeste dans des accidents spectaculaires : les mégafeux en Australie en 2020 et au Canada en 2023, les inondations au Pakistan en 2022, les sécheresses graves dans l'isthme centraméricain ou en Afrique de l'Est, les records de chaleur un peu partout, etc. Quand on regarde ces phénomènes avec quelques décennies de recul, aucun doute n'est permis : primo, leur nombre et leur intensité augmentent ; secundo, les politiques censées les enrayer sont inopérantes. On songe alors à la citation de Walter Benjamin : « La catastrophe, c'est que tout continue comme avant. » Nous sommes effectivement déjà dans la catastrophe, nous nous y enfonçons, elle monte autour de nous, des points de bascule partiels sont franchis. Mais sa temporalité longue ne doit pas faire perdre de vue la menace d'un « grand basculement ». Les processus ne sont pas linéaires. La quantité se transforme toujours, à un moment ou l'autre, en qualité. »

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« On parle d'un changement d'ère géologique (ou au moins d'un événement géologique), il faut donc appliquer les critères des géologues. Un changement d'ère se caractérise par la présence globale dans la croûte terrestre de marqueurs objectifs, stratigraphiques. Les principaux marqueurs possibles d'un Anthropocène pourraient être : la trace laissée par la hausse du niveau des océans au XXe siècle, les témoignages fossiles du déclin brutal de la biodiversité, la présence dans les roches de nouvelles entités chimiques telles que des microplastiques et des nucléides radioactifs. Ces critères fournissent une base solide pour situer le début de l'Anthropocène après la Seconde Guerre mondiale. Le phénomène est donc directement lié à cette période que les spécialistes du changement global appellent la grande accélération, les historiens les Trente Glorieuses et que les marxistes désignent comme l'onde longue de croissance du capitalisme dans l'après-guerre. … Selon moi, les écosocialistes ont doublement intérêt à s'en tenir aux marqueurs géologiques car ils sont les plus solides scientifiquement, et conduisent tout droit à la conclusion simple que le changement intervient dans les années 1950, comme résultat d'un siècle et demi d'accumulation capitaliste. Par rapport à cet enjeu, le débat sémantique me semble très secondaire. Pour moi, les propositions de Capitalocène, de Plantationocène, d'Androcène (pour ne pas parler du Chthulucène de Donna Haraway) sont à côté du sujet.

Les anticapitalistes préfèrent parler de Capitalocène plutôt que d'Anthropocène pour souligner que c'est le capitalisme qui est responsable, et pas l'espèce Homo sapiens. Dans le même ordre d'idées, je peux comprendre que des personnes investies dans les luttes d'émancipation anticoloniales préfèrent parler de Plantationocène, et que des féministes proposent le terme Androcène. Ces volontés de mettre en accusation le capitalisme, le colonialisme et la domination patriarcale sont mille fois justifiées. Il faut en effet s'opposer aux tentatives d'utiliser « l'Anthropocène contre l'histoire », comme dit fort bien Andreas Malm. Ces tentatives escamotent les déterminants sociaux, les dissolvent dans les lois de la nature. On efface ainsi l'histoire, en particulier le capitalisme, le colonialisme et le patriarcat. C'est du scientisme et le scientisme est une arme idéologique aux mains de la classe dominante. »

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« Un troisième problème surgit quand on se rappelle que la catastrophe écologique n'est pas due uniquement au capitalisme. L'URSS stalinienne, les pays du glacis soviétique et la Chine maoïste portent une responsabilité non négligeable. Une manière simple de parer l'objection consiste à prétendre que ces pays connaissaient un capitalisme d'État, mais ce simplisme ne s'accorde pas avec la définition scientifique du capitalisme proposée par Marx : une société de (sur)production généralisée de marchandises, basée sur la propriété privée des moyens de production, constamment bouleversée par la concurrence pour le profit. L'ex-URSS ne cochait aucune de ces cases. Il me semble beaucoup plus convaincant de dire qu'il s'agissait d'une société en transition vers un socialisme qui ne pouvait exister qu'au niveau mondial, que son évolution non capitaliste a été bloquée par une contre-révolution nationale-bureaucratique, et qu'il en est résulté une forme sociale sclérosée, non viable. J'admets que cette explication est plus complexe, mais elle a l'avantage de faire surgir les questions stratégiques que la théorie du capitalisme d'État laisse dans l'ombre : comment éviter qu'un productivisme spécifique, qui n'est pas exactement le même que le productivisme capitaliste, puisse se développer dans le cadre d'une économie collectivisée ? Comment éradiquer l'idéologie bourgeoise de domination de la nature dans le cadre d'un processus révolutionnaire ? Et les réponses à ces questions sont nécessaires à nos luttes. »

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« On a d'un côté les économistes mainstream, selon qui la croissance capitaliste est nécessaire pour produire les technologies nécessaires à la transition. Et de l'autre ces économistes critiques qui répondent que c'est impossible parce que cette production demande plus d'énergies fossiles, donc plus d'émissions, qu'il faut donc décroître en satisfaisant les besoins de base, dans la justice sociale. Les implications politiques de cette controverse sont évidentes. Le développement de ce courant de la décroissance juste me réjouit tout particulièrement, j'y retrouve des arguments que je développais il y a treize ans dans mon livre L'Impossible capitalisme vert : on ne peut pas à la fois passer aux renouvelables, augmenter radicalement l'efficience énergétique, poursuivre la croissance du PIB et sauver le climat en réduisant les émissions. Pour une raison évidente : les renouvelables et l'efficience demandent d'énormes investissements, donc beaucoup d'énergie… fossile à 80%, donc source d'émissions. Je pense que cette controverse va s'approfondir… »

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« Le savoir écologique traditionnel, avec sa part de croyances et de magie, serait-il plus efficace que le savoir scientifique moderne ? … Une réponse est suggérée par les chercheurs et chercheuses qui travaillent sur « l'ingénierie écologique ». Ils et elles soulignent que les techniques découlant des savoirs écologiques traditionnels sont d'une grande importance pour relever les défis de la catastrophe actuelle. Les écosystèmes ont été façonnés par l'activité humaine pendant des générations, on ne peut les restaurer technocratiquement, en faisant fi de ce qui a guidé cette activité. Appréhender les techniques implique la reconnaissance des modes de production de l'existence où les techniques se sont développées. Ici, l'intérêt se porte surtout sur les communautés où les savoirs traditionnels sont les mieux préservés – c'est-à-dire les communautés indigènes. Le paradoxe du savoir s'explique alors par les différences entre modes de production. Il n'exprime pas la supériorité des croyances et de la magie sur la raison scientifique, il exprime la supériorité, notamment face aux catastrophes, d'un mode de production sans classes, où les humains puisent directement dans l'environnement de quoi produire les valeurs d'usage nécessaires à l'existence sociale. »

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« Du point de vue des savoirs, le capitalisme présente… deux mouvements contradictoires. D'une part, les connaissances scientifiques basées sur la raison progressent spectaculairement et percolent plus ou moins dans toute la société par le biais du système éducatif. D'autre part, la dépossession du travail social, sa soumission croissante au capital et l'appropriation capitaliste de la science engendrent un abêtissement de masse qui favorise la déraison, sur laquelle surfent les climatosceptiques, les négationnistes du Covid-19, etc. Nous sommes des animaux sociaux qui produisent leur existence collective par le biais d'une activité consciente (le travail) que notre intelligence développe au fil des générations. En s'appropriant le travail, en l'émiettant et en le soumettant à sa logique absurde, le capitalisme déconnecte cette intelligence de son objet principal. Il fait de nous des créatures mutilées qui errent sans but dans un univers absurde. Je pense que cela contribue à expliquer le sentiment d'impuissance qui obscurcit considérablement la prise de conscience. »

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« D'un côté, on voit à quel point l'impasse du capitalisme est profonde : le « capitalisme vert » est vraiment impossible, il ne nous sortira pas de la catastrophe et est même incapable de la freiner. De l'autre côté, il faut être aveugle pour ne pas voir les difficultés immenses de l'alternative. Un bouleversement complet, révolutionnaire, est nécessaire. Comment le rendre désirable aux yeux d'une majorité sociale ? Comment répondre aux inquiétudes des exploité·es et des dominé·es sur l'emploi, les revenus, les droits démocratiques, l'avenir en général ? Tel est le défi que nous avons à relever. En tant que tel, le plaidoyer philosophique contre le dualisme entre nature et culture n'est d'aucune aide dans cette entreprise. Même quand il est prononcé au nom du marxisme et de la lutte contre le Capitalocène, à la manière de Jason Moore. C'est sur l'élaboration d'un programme à la fois social et environnemental, sur l'invention d'une stratégie et sur la mise au point de tactiques de lutte qu'il faut se concentrer et se rassembler. »

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« On observe partout une répression croissante de ce que nous avons appelé avec Michael Löwy les luttes écosociales. Ce phénomène est à appréhender dans le cadre de la crise très profonde du capitalisme. Confrontés à une baisse régulière des gains de productivité, les capitaux sont attirés par les investissements dans les richesses naturelles, parce qu'elles sont gratuites. Le secteur minier, les groupes énergétiques, l'agrobusiness rivalisent pour s'approprier toujours plus de ressources, au détriment des communautés locales. C'est ce que le géographe marxiste David Harvey nomme l'accumulation par dépossession. Dans les pays du Sud principalement, les multinationales lorgnent vers des territoires, y compris des réserves naturelles, abritant des gisements de pétrole ou de minéraux, des aquifères ou des ressources hydroélectriques inexploitées. Cette tendance est porteuse d'une brutalité croissante. En effet, la raréfaction des ressources exacerbe la concurrence et la violence. Un·e activiste investi·e dans la lutte écosociale a été tué·e tous les deux jours dans le monde en 2022. »

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« Pour ma part, je n'emploie l ‘expression « capitalisme vert » que pour désigner les secteurs du capital qui prétendent investir dans la transition écologique et leurs représentants politiques. Mais il faut bien comprendre que, d'une manière générale, c'est un oxymore. Il n'y a aucune compatibilité entre la dynamique intrinsèque d'accumulation du capital et la gestion rationnelle des échanges de matières, à la fois au sein de la société humaine et entre celle-ci et le reste de la nature. En tant que système, le capitalisme est par définition insoutenable, à la fois du point de vue écologique et du point de vue social. Ce qui se passe, c'est que les menaces que la catastrophe climatique fait peser sur la stabilité de ce système sont tellement inquiétantes que les plus lucides des responsables veulent croire à l'impossible : guérir par le capitalisme le mal congénital du capitalisme. L'Union européenne est en pointe de ces tentatives. Les États-Unis et la Chine sont pour le moment sur leurs talons. Mais la réalité est aux antipodes des belles promesses. »

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« L'ère de la domination absolue du monde par les États-Unis est en effet révolue. Nous sommes entrés dans une configuration nouvelle, où plusieurs impérialismes se disputent l'hégémonie. La Chine est devenue une superpuissance en reproduisant à très grande échelle la recette des « tigres asiatiques », soit le développement rapide d'un capitalisme sous contrôle étatique. Les « nouvelles routes de la soie » matérialisent le projet impérialiste de Pékin. Celui-ci s'accompagne logiquement de la constitution d'une force armée capable de se projeter sur les théâtres extérieurs. Moscou s'allie avec Pékin contre l'Occident tout en poursuivant son propre objectif de reconstitution de l'empire russe, notamment en Asie centrale, une zone également convoitée par la Chine. Des puissances intermédiaires profitent de cette situation complexe pour développer leur autonomie et offrir leur soutien à la plus offrande des puissances – tantôt l'une, tantôt l'autre. Dans les pays dominés, ces différents éléments se traduisent par une intensification de la destruction écologique et de ses conséquences sociales, notamment l'appropriation des terres (land grabbing). Nous n'assistons pas à un retour de la guerre froide entre blocs bien délimités, les rapports de force sont plus mouvants et les guerres se multiplient. C'est une banalité de dire qu'elles sont à l'opposé d'une politique écologiquement responsable. … Sous le capitalisme, le progrès technologique met constamment de nouveaux moyens à disposition des militaires. »

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« L'analyse aide au moins à prendre la mesure du problème. Il est gigantesque. Matt Huber a entièrement raison de dire que les dépossédé·es restent le sujet par excellence d'une révolution nécessaire, mais l'ampleur et la profondeur de leur dépossession – leur « dépendance absolue du capital » – entraînent une énorme difficulté à penser une autre société non pas seulement comme utopie abstraite, mais comme projet concret impliquant des luttes, des revendications, des formes d'organisation, une vision sur l'unification entre couches différentes au sein de la classe, une tactique vis-à-vis des bureaucraties cogestionnaires, des alliances avec d'autres mouvements sociaux, des étapes transitoires, bref, une stratégie. C'est vraiment compliqué. D'autant plus compliqué qu'il y a en toile de fond la faillite au XXe siècle du projet socialiste dont les deux versions dominantes – la social-démocratie et le stalinisme – sont des repoussoirs. »

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« La seconde remarque concerne « le parti ». Je ne suis pas spontanéiste : une organisation politique est nécessaire pour assimiler les leçons de l'histoire, tracer des perspectives et organiser des membres sur un programme, par-delà les hauts et les bas des luttes. Par ailleurs, faire converger ces luttes est une tâche complexe. Cela requiert la présence, dans le plus grand nombre de secteurs et de mouvements, de militant·es partageant une même vision stratégique, et qui échangent les informations, les analyses. Pour être utile à un projet émancipateur, cette organisation politique ne peut être ni un parti au sens institutionnel du terme, ni le genre de regroupement autour d'un leader charismatique que proposent les populistes de gauche. Ces deux types de formation ont en effet un point commun : le verticalisme qui écrase la spontanéité au profit de la priorité donnée à l'occupation du pouvoir par la voie électorale. Les partis d'avant-garde autoproclamés ne sont pas davantage appropriés à la tâche. Comment faire émerger une formation anticapitaliste composée de militantes et militants qui mettent en pratique une stratégie authentiquement révolutionnaire d'auto-organisation démocratique des mouvements, en solidarité internationaliste avec tou·tes les exploité·es et tou·tes les opprimé·es ? Après un demi-siècle engagement, j'avoue avoir plus d'interrogations que de réponses à ce sujet. »

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« Je participe à un travail collectif … [écologisation du programme de transition] au sein du mouvement dont je suis membre, la Quatrième Internationale. Il est clair que la méthode dite « transitoire » est d'une actualité brûlante. On peut moins que jamais se contenter d'agiter des revendications immédiates, d'une part, et de propager l'idée d'une société socialiste ou écosocialiste, d'autre part. Il faut jeter un pont entre les deux. Cette préoccupation était déjà présente chez Marx et Engels. Jaurès a tenté de la développer avant 1914. Trotsky, dans les années 1930, lui a donné sa formulation la plus achevée. Il proposait de présenter un ensemble de revendications fournissant une réponse globale, cohérente, aux contradictions de la société en crise. Prises isolément, expliquait-il, certaines de ces revendications sont compatibles avec le capitalisme, mais elles sont reliées entre elles, de sorte que le programme dans son ensemble est en contradiction avec le fonctionnement normal du système. C'est pourquoi il débouche sur une conclusion centrale : la nécessité de s'emparer du pouvoir politique, d'instaurer par la mobilisation un gouvernement aussi fidèle aux exploité·es et aux opprimé·es que tous les gouvernements actuels sont fidèles aux capitalistes. »

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« Il n'est pas encore minuit dans le siècle mais on risque de s'en approcher. De Buenos Aires à Mar-a-Lago, de Moscou à Tel Aviv, de Rome à Paris, le déni climatique et la « liberté » du renard dans le poulailler dessinent le nouveau visage du nihilisme fasciste au service du capitalisme fossile. Le péril est immense, mais le néofascisme est une carte dangereuse à jouer pour la classe dominante. Plus d'une fois il a amené des retours de flamme. Je ne céderai pas à la facilité de ressortir la citation fameuse de Gramsci, tout le monde la connaît. J'ajouterai seulement ceci : face à la menace d'une nouvelle plongée dans la barbarie, nous n'avons tout simplement pas d'autre choix que l'espérance. Nous n'avons pas d'autre choix que de lutter pour un programme rouge et vert, un programme qui réponde aux besoins fondamentaux des classes populaires en jetant un pont vers la transformation révolutionnaire de la société. La difficulté est énorme, mais il n'y a pas d'autre voie. Il n'y a pas de fatalité à voir la catastrophe devenir cataclysme. Homo sapiens produit sa propre existence sociale, j'ai rappelé cette vérité élémentaire plusieurs fois au cours de l'entretien. « Produire » signifie « faire apparaître », « faire naître ». Les exploité·es, les opprimé·es uni·es peuvent « produire », « faire apparaître », « faire naître » une alternative lumineuse aux ténèbres. À chaque étape de la catastrophe grandissante, leurs luttes pour l'émancipation du travail peuvent ouvrir la voie vers un autre possible, digne de la nature humaine. On ne peut prévoir que la lutte. On ne peut que s'accrocher à l'espérance pour y puiser l'énergie nécessaire à la lutte. »

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L’Écoblanchiment : comprendre, identifier et lutter contre un fléau

4 juin 2024, par Coalition Sortons le gaz ! — , ,
À mesure que l'urgence climatique se fait sentir, il devient essentiel de distinguer les véritables efforts environnementaux des tactiques de marketing trompeuses utilisées par (…)

À mesure que l'urgence climatique se fait sentir, il devient essentiel de distinguer les véritables efforts environnementaux des tactiques de marketing trompeuses utilisées par les entreprises pour se donner une image « verte ». Ce phénomène, connu sous le nom d'écoblanchiment, est particulièrement répandu dans l'industrie des combustibles fossiles, notamment chez les entreprises gazières.

Pour aider le public à identifier et à combattre ces pratiques, des organisations telles que l'Association canadienne des médecins pour l'environnement (ACME) (dont l'AQME, un des membres de la coalition Sortons le gaz ! est un comité régional), Greenpeace Canada et le Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE) fournissent des ressources inestimables.

Pourquoi l'écoblanchiment est-il dangereux ?

L'écoblanchiment permet aux entreprises de maintenir leur acceptabilité sociale tout en se soustrayant à leur responsabilité envers les préjudices environnementaux. En normalisant les combustibles fossiles, cette pratique retarde la transition nécessaire vers des sources d'énergie plus viables, mettant ainsi des vies en danger et exacerbant la crise climatique.

Le Manuel d'écoblanchiment des grandes industries pétrolières et gazières de l'ACME et Greenpeace

Ce manuel, élaboré par Greenpeace Canada et l'Association canadienne des médecins pour l'environnement (ACME), constitue une analyse approfondie des pratiques d'écoblanchiment utilisées par les entreprises de combustibles fossiles, notamment les entreprises productrices et distributrices de gaz. Déjà disponible dans le Canada anglophone, il est aussi offert en version en français et s'avère un complément intéressant au travail effectué par le CQDE.

Le rapport – intitulé « Le manuel d'écoblanchiment des grandes entreprises pétrolières et gazières » – expose des pratiques telles que la dissimulation stratégique, la supercherie des compensations carbone, la pseudoscience fossile et les déclarations aspirationnelles. Ces tactiques permettent aux entreprises d'induire le public en erreur en lui faisant croire qu'elles agissent de manière responsable, alors qu'elles poursuivent des activités nuisibles pour l'environnement et la santé.

Bien que n'étant pas un phénomène nouveau, l'écoblanchiment connaît aujourd'hui une ampleur sans précédent. Des études révèlent que les entreprises de combustibles fossiles investissent des milliards pour retarder et entraver les actions climatiques, en désinformant le public et les décideurs afin de maximiser leurs profits. Il est possible de combattre ces pratiques trompeuses. Le manuel de l'ACME et de Greenpeace fournit une trousse d'outils pratique pour signaler les publicités mensongères et déposer des plaintes. Ce guide vous montre précisément comment procéder, en vous aidant à détecter et agir contre l'écoblanchiment, réduisant ainsi l'impact de la désinformation et influençant positivement les politiques environnementales futures.

Le webinaire du CQDE : « Comment signaler des cas d'écoblanchiment ? »

L'ACME et Greenpeace ne sont pas les seuls à œuvrer pour lutter contre l'écoblanchiment. En effet, le Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE) a récemment organisé un webinaire essentiel intitulé « Comment signaler des cas d'écoblanchiment ? ».

Ce webinaire détaille les différentes formes d'écoblanchiment, qui peuvent porter sur les caractéristiques environnementales de produits, de services, de marques, de secteurs d'activité et de faits scientifiques liés à un produit ou à un service, ou des activités d'entreprise. Il permet aussi d'apprendre à identifier des déclarations trompeuses, qu'il s'agisse de lobbying trompeur, de fausses déclarations, de preuves insuffisantes, de déclarations sélectives ou d'exagérations.

N'hésitez pas également à consulter la synthèse proposée par la CQDE pour obtenir toutes les informations clés et vous aussi, signaler des cas d'écoblanchiment.

Exemple de plainte dans le cadre d'écoblanchiment : le cas d'Énergir

Le 1er juin 2023, les membres de la coalition Sortons le gaz ! ont déposé une plainte auprès de l'Office de la protection du consommateur (OPC) contre Énergir. Ils accusent l'entreprise de diffuser des informations trompeuses concernant son offre de gaz naturel renouvelable (GNR). Énergir prétend que ses clients peuvent choisir la proportion de GNR qu'ils consomment, pouvant aller jusqu'à 100 %, en payant un supplément. Cependant, la coalition soutient que cette offre est fallacieuse car le réseau d'Énergir ne peut pas acheminer le GNR séparément des autres types de gaz. Ainsi, qu'ils paient davantage ou non, tous les consommateurs reçoivent en réalité la même proportion de GNR.

La coalition a exprimé son indignation face à ces pratiques qu'elle qualifie de trompeuses. Elle a demandé à l'OPC de mener une enquête approfondie et de prendre des mesures pour corriger les informations diffusées par Énergir. Parmi ces mesures, la coalition suggère le retrait des publicités trompeuses, la diffusion d'un message rectificatif expliquant la véritable répartition du GNR dans le réseau, et l'imposition d'une amende pouvant atteindre 100 000 dollars. La plainte est à ce jour encore à l'étude par l'OPC.

Ce cas illustre parfaitement les dangers de l'écoblanchiment. En donnant une fausse impression de choix et d'impact environnemental, les entreprises comme Énergir exploitent la bonne foi des consommateurs, les incitant à payer davantage sans leur offrir le produit promis. La plainte de la coalition Sortons le gaz ! met en lumière l'importance d'une information transparente et honnête, surtout dans un contexte d'urgence climatique où la transition énergétique est cruciale.

Conclusion

L'écoblanchiment est une menace insidieuse à notre quête collective pour un avenir plus viable face aux changements climatiques. En déguisant des pratiques polluantes sous un vernis vert, certaines entreprises nuisent à la transition énergétique nécessaire pour faire face à la crise climatique. Heureusement, nous ne sommes pas impuissants face à cette supercherie. Grâce aux initiatives comme le Manuel d'écoblanchiment de l'ACME et Greenpeace et le webinaire du CQDE, nous avons les moyens d'identifier, de signaler et de combattre ces pratiques trompeuses.

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Les normes canadiennes de la publicité déclarent des publicités pro-GNL coupables d’écoblanchiment

4 juin 2024, par Association canadienne des médecins pour l'environnement (ACME) — , ,
Les publicités financées par Canada Action vantant les avantages environnementaux du gaz naturel liquéfié (GNL) d'origine fossile sont inexactes et trompeuses, en plus de (…)

Les publicités financées par Canada Action vantant les avantages environnementaux du gaz naturel liquéfié (GNL) d'origine fossile sont inexactes et trompeuses, en plus de déformer le véritable propos des scientifiques, selon une décision unanime des Normes de la publicité. La décision a été communiquée anonymement à l'Association canadienne des médecins pour l'environnement (CAPE) compte tenu de la campagne visant à interdire la publicité pour les combustibles fossiles.

Les publicités de Canada Action affirment que « le GNL de la Colombie-Britannique réduira les émissions mondiales ». Ce faisant, d'après l'organisme de réglementation chargé d'administrer le Code canadien des normes de la publicité pour garantir la véracité et l'exactitude de la publicité, elles « déforment le véritable propos des spécialistes et des autorités scientifiques », « promettent un résultat sans éléments probants valides et fiables » et donnent « une fausse impression générale que le GNL de la Colombie-Britannique est bon pour l'environnement, ce qui constitue de l'écoblanchiment ».

Pour sa campagne multicanal promouvant le pétrole et le gaz naturel, Canada Action a choisi un fond vert distinctif, ce que les Normes de la publicité dénoncent comme « un moyen de faire valoir un avantage environnemental que le gaz naturel ne possède pas réellement ». L'organisme à but non lucratif enregistré au fédéral affirme être une initiative populaire non partisane visant à encourager le soutien à l'industrie pétrolière et gazière canadienne. Canada Action a dépensé plus de 5 millions de dollars en publicité entre 2017 et 2022, selon des documents publics. Il ne divulgue pas publiquement ses sources de financement, qui comprennent plus de 7 millions de dollars en commandites par le secteur privé, mais un reportage d'investigation a révélé le versement de paiements par l'industrie pétrolière et gazière, dont 100 000 dollars provenant d'ARC Resources.

Même si le Conseil des Normes de la publicité est parvenu à une décision le 30 janvier 2024, les publicités n'ont pas été retirées. À ce jour, elles continuent d'être diffusées dans des emplacements bien en vue dans les grands centres urbains de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, sur les tableaux d'affichage, à la radio, dans les transports en commun et dans les grands quotidiens. L'une de ces publicités occupe d'ailleurs entièrement la première page du Times Colonist du 4 mai. (En Ontario, les publicités affichent le message « Le GNL canadien réduira les émissions mondiales ».) Contrairement à d'autres organismes d'autorégulation de la publicité, tels que l'Advertising Standards Authority au Royaume-Uni et la National Advertising Division aux États-Unis, les décisions des Normes canadiennes de la publicité sont confidentielles et ne sont pas rendues publiques.

Selon la Dre Melissa Lem, médecin de famille à Vancouver et présidente de l'Association canadienne des médecins pour l'environnement : « Ces publicités sont des exemples classiques d'écoblanchiment, sans parler de leur couleur verte. Nous nous sommes sentis obligés de rendre cette décision publique parce que la population canadienne a le droit de ne pas être trompée à propos de l'impact du GNL sur le climat, l'environnement et notre santé ».

L'ACME sonne l'alarme depuis plusieurs années au sujet des effets nocifs causés par l'extraction et la combustion du gaz naturel sur la santé humaine, la santé des écosystèmes et les changements climatiques, en particulier en Colombie-Britannique. Ceci inclut de nouvelles études qui établissent un lien entre les activités de fracturation et les issues défavorables des grossesses (naissances prématurées, anomalies congénitales, poids insuffisant à la naissance), la leucémie infantile, les maladies respiratoires et cardiovasculaires, ainsi que la mortalité prématurée.

Dans une initiative dirigée par l'ACME, les organisations pour la santé au Canada militent depuis 2022 pour l'interdiction de la publicité sur les combustibles fossiles, à l'instar de la promotion du tabac, afin de protéger la santé publique. Ces organisations craignent que les campagnes de désinformation de l'industrie pétrolière et gazière nuisent à l'action climatique et perpétuent les méfaits pour la santé et l'environnement, tout comme l'industrie du tabac a trompé le public pendant des années au sujet de la dangerosité de ses produits.

L'ACME a donc envoyé une lettre aux entreprises où les annonces ont été diffusées, dans laquelle elle demande le retrait des publicités de Canada Action prétendant que le GNL de la Colombie-Britannique ou du Canada réduira les émissions mondiales, de même que toute publicité similaire. La lettre réclame également l'affichage d'annonces pour corriger ces publicités et la mise en place d'un système complet permettant de détecter les pratiques d'écoblanchiment à l'avenir. Parmi les destinataires, on trouve TransLink, BC Transit et le Times Colonist, mais aussi les annonceurs extérieurs Branded Cities, Pattison et Lamar. Les publicités ont suscité la controverse et une pétition demandant à Translink et à BC Transit de se prononcer sur la campagne a recueilli des milliers de signatures.

Citations

Dre Melissa Lem, médecin de famille de Vancouver et présidente de l'Association canadienne des médecins pour l'environnement

« Ces publicités fallacieuses sont profondément offensantes pour les travailleurs et les travailleuses de la santé qui doivent traiter des patient(e)s souffrant des conséquences des changements climatiques : maladies liées à la chaleur, exacerbations de l'asthme causées par la fumée des feux de forêt, ou anxiété et dépression après une évacuation. Il faut y mettre un terme. Tout comme ce fut le cas pour la promotion du tabac au Canada, nous devons interdire la publicité sur les combustibles fossiles pour cesser d'alimenter la demande de produits qui nuisent à la santé et protéger la santé publique. »

Naxginkw (Tara Marsden), directrice de la durabilité Wilp pour les chefs héréditaires Gitanyow

« Les chefs héréditaires Gitanyow se réjouissent du nombre croissant de voix qui réclament la vérité et la reddition de comptes en matière de publicités fossiles au Canada. Déjà, cette année, des milliers de personnes ont été chassées de leur foyer par des feux de forêt extrêmes, ce qui montre bien l'urgence de combattre la désinformation de l'industrie pétrolière et gazière. Non seulement les campagnes trompeuses menacent l'action climatique, mais elles posent aussi de sérieux risques pour la santé publique et l'environnement. Nous félicitons l'ACME de faire preuve de leadership en tenant l'industrie responsable de ses actes et la remercions de travailler à la protection du bien-être de toutes les personnes. »

Leah Temper, directrice du Programme de politiques sanitaires et économiques, Association canadienne des médecins pour l'environnement

« L'industrie des combustibles fossiles exploite les lacunes de la réglementation canadienne pour semer la confusion et tromper le public sur la façon dont ses produits nuisent à l'environnement, à la santé publique et à l'économie. Il est inadmissible que des entreprises puissent dépenser des millions pour mentir à la population canadienne et que le public n'ait pas le droit d'apprendre la vérité, même lorsque ces entreprises sont prises en défaut. Le système est défaillant et nous avons besoin de l'intervention du gouvernement pour mettre fin à l'écoblanchiment et arrêter la machine à désinformer. »

Dre Margaret McGregor, médecin de famille, chercheuse en politiques publiques et coautrice de l'article « The human health effects of unconventional oil and gas development (UOGD) : A scoping review of epidemiologic studies » (Canadian Journal of Public Health, mars 2024)

« Espérons qu'il y aura une prise de conscience du côté du gouvernement de la Colombie-Britannique. Le GNL n'est pas une solution aux changements climatiques. De plus en plus de données probantes font état d'un taux élevé de retard de croissance fœtale, de naissances prématurées, de crises d'asthme, de leucémie infantile, d'insuffisance cardiaque et de mortalité dans les communautés exposées à l'industrie de la fracturation hydraulique. Il est temps que le gouvernement de la Colombie-Britannique tienne compte des nouvelles connaissances scientifiques sur la fracturation et la santé humaine lorsqu'il élabore ses politiques énergiques. »

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Mise en demeure citoyenne au ministre de l’Environnement du Québec

4 juin 2024, par Collectif — , ,
afin qu'il agisse et prenne ses responsabilités pour que cesse la contamination de l'usine-dépotoir STABLEX à Blainville et en aval. ENVOYÉE AU MINISTRE LE 22 MAI 2024 (…)

afin qu'il agisse et prenne ses responsabilités pour que cesse la contamination de l'usine-dépotoir STABLEX à Blainville et en aval.

ENVOYÉE AU MINISTRE LE 22 MAI 2024

Monsieur le Ministre,

Compte tenu que depuis le 8 septembre 2023, vous avez reçu la recommandation du BAPE à l'effet de rejeter le projet de réaménagement de la cellule 6 de Stablex et qu'en regard de la contamination, tout continue comme avant.

Compte tenu qu'un échantillonnage récent et certifié a révélé la présence de contaminantstels qu'arsenic, cadmium et cuivre et ce très largement au-dessus de normes pour un cours d'eau comme le ruisseau Lockhead.

Compte tenu, entre autres, du témoignage d'un lanceur d'alerte lors du BAPE Stablex 2023(Document # DM29- https://voute.bape.gouv.qc.ca/dl/?id=00000442298) révélant l'incapacité du « procédé Stablex » à stabiliser les déchets industriels toxiques contrairement aux prétentions de la multinationale. De plus, l'absence d'une évaluation, indépendante du promoteur, de la capacité de l'argile sous les cellules à contenir / supporter le poids de millions de tonnes de déchets accumulés depuis 1983 auxquels s'ajoute de plus que probable pressions climatiques et / ou sismiques.

Compte tenu de la confirmation par le fournisseur que les géomembranes ne sont garanties que pour 5 ans(Document DA10 - https://voute.bape.gouv.qc.ca/dl/?id=00000437448). Ce qui est en contradiction avec les prétentions de Stablex de la sécurisation à perpétuité de ses cellules.

À cela s'ajoute le rapport accablant de la Police verte de 1990 (Document DB14 - https://voute.bape.gouv.qc.ca/dl/?id=00000438699) sur la contamination STABLEX, celui de la commission Charbonneau sur les déchets toxiques du début des années 90 et l'abandon par la Grande Bretagne et d'autres pays du « procédé Stablex »

Compte tenu que la négligence du suivi ministériel mentionnée par le BAPE de 1981 a de nouveau été constatée par le BAPE Stablex 2023.

Compte tenu de l'absence d'une évaluation hydrogéologique, indépendante du promoteur, sur l'état actuel des nappes phréatiques sous le dépotoir et celle des eaux de surface en aval du ruisseau Lockhead et de la rivière au Chien jusqu'à la rivière des Mille Îles.

Compte tenu de l'ignorance inacceptable par les gouvernements de recommandations du premier BAPE (1981) à l'effet notamment d'irrégularités dans l'octroi d'autorisations ministérielles sans évaluation préalable des autorités responsables.

Compte tenu que Blainville s'est beaucoup développée depuis le début des années 80 et que le site d'enfouissement se retrouve maintenant entouré de résidences familiales sans compter la Grande Tourbière de Blainville qu'on se doit de préserver.

Aussi, nous sommes préoccupés du peu de considération que l'absence d'acceptabilité sociale de ce projet suscite chez les élu.e.s régionaux, notamment ceux et celles de la mairie de Blainville. Vous comme eux, monsieur le Ministre, n'avez pas été élus pour prioriser l'importation américano-canadienne de déchets industriels toxiques à Blainville afin de satisfaire l'avidité sans fin d'actionnaires de multinationales et ce au détriment de la santé publique, celle des citoyen.ne.s et de leurs enfants.

Compte tenu des circonstances actuelles, il serait sage de vous assurer du respect du droit du public à participer effectivement aux processus décisionnels, droit qui exige de la transparence et un accès équitable à l'information de la part des autorités. (https://www.environnement.gouv.qc.ca/developpement/loi.htm)+ (Convention d'Aarhus : https://unece.org/fileadmin/DAM/env/pp/documents/cep43f.pdf ).

Monsieur le ministre de l'Environnement,

la contamination STABLEX doit cesser !

En vertu de vos responsabilité à l'égard du droit citoyen à un environnement sain, à l'égard du contrôle des activités polluantes, à l'égard de la protection de l'eau et des milieux humides, nous sommes d'avis qu'il serait déraisonnable, excessif, irresponsable et contraire au principe de précaution (Principe # 10 de la Loi québécoise sur le Développement Durable : https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/D-8.1.1 )+ (Principe # 15 de la Déclaration de Rio :https://www.un.org/french/events/rio92/rio-fp.htm)de continuer à permettre ou de renouveler quelques formes d'autorisations en lien avec les activités d'enfouissement et d'importation de déchets industriels toxiques à l'usine-dépotoir Stablex de Blainville.

Cosignataires :

Anick Plouffe, citoyenne qui dénonce le projet de remblai massif dans la Grande Tourbière de Blainville

Florent Gravel, Chef du Parti d'opposition municipal de Blainville "Mouvement Blainville"

Marie-Claude Archambault, pour la Coalition des citoyens de Blainville contre la cellule #6 de STABLEX

Martine Ouellet, Climat Québec

Normand Léo Beaudet, Coalition Alerte à l'Enfouissement Rivière-du-Nord (CAER)

Serge Paquette, citoyen ayant participé au BAPE Stablex 2023

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L’Aéro-salon : pour un avenir à reculons !

4 juin 2024, par Coalition Halte-Air Saint-Hubert — , ,
Longueuil, 31 mai 2024. – Ce week-end, les 1er et 2 juin, aura lieu « l'Aéro-salon » à l'aéroport de Saint-Hubert, un événement qui célébrera et glorifiera un moyen de (…)

Longueuil, 31 mai 2024. – Ce week-end, les 1er et 2 juin, aura lieu « l'Aéro-salon » à l'aéroport de Saint-Hubert, un événement qui célébrera et glorifiera un moyen de transport délétère pour notre santé et pour notre environnement.

Pour la Coalition Halte-Air Saint-Hubert, il est effarant de lire les articles de presse sur cet événement : aucune réflexion sur les impacts de l'aviation et les nombreuses pollutions (sonores, atmosphériques, émissions de gaz à effet de serre) qu'elle engendre à la fois au niveau local pour les riverain.e.s et au niveau planétaire. Pire, à l'heure où nous vivons des crises climatiques, environnementales et de la biodiversité toujours plus nombreuses, certain.e.s préférent accélérer la catastrophe climatique en développant toujours plus le secteur aéronautique, invoquant une chimérique décarbonation de cette industrie qui repose à 99% sur le pétrole.

À Longueuil, cela se traduit concrètement par la construction de l'aérogare Porter Airlines, prévue pour 4 millions de passagers par année, plus de cent vols par jour, 6 à 8 par heure, 3000 places de stationnement. Des centaines de milliers de tonnes de kérosène seront acheminées à St-Hubert pour ensuite brûler dans l'atmosphère, amplifiant le réchauffement climatique, et pour une bonne partie, au-dessus de la tête des riverain.e,s avec de graves conséquences sur leur santé, ainsi qu'une dépréciation immobilière ruineuse.

Au moment où la Ville de Longueuil et son agglomération s'apprêtent à publier leur plan climat, dont l'un des objectifs est de “meilleures pratiques respectueuses de 'environnement”, la Coalition Halte-Air se questionne. Est-ce que ce type d'événements ultra-polluants sera intégré au plan climat puisque la Ville en est partenaire ? Comment la ville justifiera-t-Avec ce “projet des années 80”, comme l'a résumé la mairesse de Saint-Lambert, l'inconscience des décideur.e.s est criante.

Après une année 2023 la plus chaude des 100 000 dernières, où les mégafeux de forêt au Canada ont enfumé des zones urbaines à des centaines de kilomètres des brasiers, entraînant de graves problèmes de qualité de l'air, on annonce déjà un été 2024
similaire, mais aussi des sécheresses qui peuvent affecter négativement les récoltes et avoir un impact à la baisse sur le niveau des réservoirs et des cours d'eau. Nous nous dirigeons vers un réchauffement d'au moins 4,3°C à Montréal.

Quant à l'Aéro-salon, rappelons que les spectacles aériens ont été arrêtés pendant de longues années, en raison des risques élevés d'accidents à proximité des quartiers résidentiels densément peuplés, l'aéroport de St-Hubert étant enclavé dans la ville. Ce fut le cas lors d'une démonstration aérienne des Snowbirds en 2020 dans un quartier résidentiel de Kamloops, en Colombie-Britannique, coûtant la vie de la capitaine Casey,.

La Coalition se demande si la Ville de Longueuil, qui est partie prenante à l'événement, a avisé la population des risques auxquels elle sera exposée et si des mesures d'urgence ont été envisagées. On se souvient que la communication de la Ville de Longueuil avait été loin d'être optimale lors de la contamination à la bactérie E. coli début septembre 2023.

Au moment où la Ville de Longueuil et son agglomération s'apprêtent à publier leur plan climat, dont l'un des objectifs est de “meilleures pratiques respectueuses de l'environnement”, la Coalition Halte-Air se questionne. Est-ce que ce type d'événements ultra-polluants sera intégré au https:/www.longueuil.quebec/fr/services/transition-ecologique'>plan climatpuisque la Ville en est partenaire ? Comment la ville justifiera-t-] puisque la Ville en est partenaire ? Comment la ville justifiera-t-elle son appui au développement de l'aérogare Porter qui viendra augmenter les émissions de GES sur son territoire et annihiler une bonne partie, sinon l'entièreté des efforts demandés à ses citoyen.ne.s ? Des citoyen.ne.s à qui l'on imposera probablement de nouvelles mesures coercitives (à l'instar de la taxe mobilité durable introduite cette année à Longueuil, ou de l'augmentation de la taxe d'immatriculation votée par Longueuil) alors que l'entreprise Porter Airlines pourra émettre autant de gaz à effet de serre qu'elle le souhaite.

Pour la Coalition Halte-Air Saint-Hubert, qui continue avec des milliers de citoyen.e.s à réclamer un moratoire sur la construction du terminal Porter Airlines, les dirigeant.e.s de DASH-L, tout comme les élu.e.s de tous paliers, doivent arrêter d'ignorer les faits scientifiques, et cesser d'agir de manière irresponsable comme si rien n'était.

Pour information : coalition.halteair@gmail.com
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Écoblanchiment : les banquiers doivent répondre de leurs actes

Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes a officiellement convoqué les PDG des banques à témoigner devant ses membres le 13 (…)

Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes a officiellement convoqué les PDG des banques à témoigner devant ses membres le 13 juin prochain !

Tiré du site de Greenpeace Canada.

Les PDG des banques canadiennes ont initialement refusé la convocation à répondre aux questions relatives à l'enquête du Comité portant sur les impacts environnementaux et climatiques du système financier, mais ceux-ci ont décliné l'invitation, préférant envoyer un·e représentant·e de leur association corporative à leur place. Comme l'a admis un lobbyiste d'ExxonMobil dans une vidéo captée lors d'une opération d'infiltration de Greenpeace, les compagnies envoient des représentants d'associations industrielles aux auditions parlementaires pour qu'ils servent de « souffre-douleur » et que leurs PDGs n'aient pas à répondre à des questions difficiles.

C'est une très bonne nouvelle que la commission ait entendu notre appel et ait convoqué les PDG pour qu'ils témoignent. Nous avons maintenant besoin de votre aide pour convaincre les membres de la commission de poser des questions difficiles en notre nom.

Contactez le président du Comité, Francis Scarpaleggia, par téléphone au 613-995-8281 ou par courriel à et demandez-lui de convoquer les PDG des banques pour qu'ils rendent compte de leurs engagements en matière de climat.

Cette audition du Comité intervient à un moment critique :

Toutes les grandes banques canadiennes se sont engagées à atteindre l'objectif « zéro émission nette » en 2021 ; or, elles figurent toujours parmi les plus importants bailleurs de fonds des combustibles fossiles dans le monde et n'investissent pas suffisamment dans les énergies renouvelables.

Le Bureau de la concurrence du Canada enquête actuellement sur les pratiques d'écoblanchiment de RBC.

Les gros titres comme « RBC faces questions on climate, Indigenous rights at annual general meeting » (RBC fait face à des questions sur le climat et les droits des peuples autochtones lors de son assemblée générale annuelle) et « BMO dropped anti-coal policy, avoiding energy ‘boycotter' label in West Virginia » (BMO abandonne sa politique anti-charbon afin d'éviter d'être qualifiée de « boycotteur » de l'énergie en Virginie-Occidentale) illustre la façon dont les banques sont mises au défi de montrer que leurs engagements climatiques ne sont pas que des paroles en l'air.
Nous ne pourrons atteindre nos cibles en matière de climat que si les banques cessent de financer le chaos climatique.

Les PDG des banques sont parmi les personnes les mieux payées au pays et ils devraient se préparer à rendre compte de leurs décisions. Il est crucial que les PDG soient présents pour répondre aux questions de nos représentant·es élu·es ─ sous serment si nécessaire. Aussi, merci de contacter le Comité et d'enjoindre ses membres à utiliser leur pouvoir, en notre nom, pour convoquer les banquiers et les forcer à répondre de leurs actes.

Contactez le président du Comité, Francis Scarpaleggia, par téléphone au 613-995-8281 ou par courriel à et demandez-lui de convoquer les PDG des banques pour qu'ils rendent compte de leurs engagements en matière de climat.

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Projet de loi 56 : de conjoint·e·s de fait avec enfant au régime d’union parentale

4 juin 2024, par Fédération des femmes du Québec — , ,
Depuis l'annonce à la fin mars 2024 du gouvernement caquiste concernant le projet de loi 56 : Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d'union (…)

Depuis l'annonce à la fin mars 2024 du gouvernement caquiste concernant le projet de loi 56 : Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d'union parentale, la FFQ a été très active dans ce dossier fidèle aux positions que nous avons prises en 2016.

Tiré de Site web FFQ
https://ffq.qc.ca/portfolio-items/projet-de-loi-56-de-conjoint%c2%b7e%c2%b7s-de-fait-avec-enfant-au-regime-dunion-parentale/?portfolioCats=26
18 MAI 2024

Ce projet de loi est le troisième volet de la réforme globale en droit de la famille, suivant le projet de loi 2 en matière de filiation, de droit des personnes et d'état civil (sanctionné en juin 2022 mais dont la mise en vigueur est prévue en juin 2024) ainsi que le projet de loi 12 en matière de filiation, des enfants nés suite à une agression sexuelle et de gestation pour autrui (sanctionné en juin 2023). Cette réforme du droit de la famille est attendue depuis des décennies !

En effet, dans nospositions adoptées en 2016, nous souhaitions notamment militer pour une nouvelle législation du droit de la famille qui s'assure de prendre en compte la diversité de la composition des familles, qui évite que les femmes et les enfants portent le fardeau de l'appauvrissement inhérent à une séparation conjugale, qui s'assure d'un traitement égal des femmes peu importe leur statut et leurs identités et qui assure une cohérence entre le droit fiscal et civil. En plus, la FFQ demandait qu'une analyse différenciée selon les sexes soit produite avant toute législation à ce sujet.

Cette position de 2016 percole encore à ce jour dans le travail collaboratif qui a été entrepris avec le Groupe des 13 dans ce dossier. Nous avons proposé à nos membres de participer à une séance d'appropriation collective du projet de loi avec le Groupe des 13 le 5 avril dernier et nous avons partagé les éléments clés de ce projet de loi via notre infolettre d'avril 2024.

Après avoir collaboré étroitement avec divers groupes féministes et partenaires, nous avons rejoint les actions de mobilisation collective autour de ce projet de loi avec le Groupe des 13. Plus spécifiquement, le Groupe des 13 a eu des rencontres avec plusieurs partenaires et députés de différents partis politiques afin de présenter et défendre nos revendications. Nous avons participé activement au comité de rédaction du mémoire. En outre, dans le cadre des consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi 56, notre responsable des dossiers politiques Sara Arsenault estintervenue pour présenter lemémoire du Groupe des 13 le 1er mai dernier à l'Assemblée nationale aux côtés d'Annie-Pierre Bélanger, coordonnatrice du Groupe des 13, et Marianne Lapointe, responsable de dossiers au CIAFT.

Nos principales recommandations en un aperçu :

Respect des engagements en matière d'égalité : Que le gouvernement respecte ses engagements en matière d'égalité énoncés dans la Stratégie gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes, 2022-2027. Que le gouvernement réalise une analyse différenciée selon les sexes dans une perspective intersectionnelle (ADS+) du projet de loi 56 et qu'il effectue, au besoin, les correctifs nécessaires.
Simplification du droit de la famille (inclusion des régimes de retraite au patrimoine ; prestation compensatoire unifiée) : Que l'on modifie le Code civil afin d'accorder aux conjointes et conjoints de fait (tel que nous les définissons à la recommandation 3) les mêmes droits que les couples en union civile, c'est-à-dire que nous souhaitons leur rendre applicables les articles 521.6 à 521.19 et 585 à 596.1 du Code civil, avec les adaptations nécessaires, ainsi que les droits et obligations en matière de succession et aliments.
Définition des conjoint·e·s de fait : Que l'on définisse les conjointes et conjoints de fait comme étant deux personnes, quel que soit leur sexe ou leur identité de genre, qui : qui font vie commune et qui se présentent publiquement comme un couple et qui sont toutes les deux les parents d'un même enfant, sans égard à la durée de leur vie commune ; qui font vie commune et qui se présentent publiquement comme un couple, depuis au moins trois ans ; ou qui ont signé un contrat de vie commune notarié et qui l'ont enregistré auprès du Directeur de l'état civil.
Effet immédiat et droit de retrait : Que la loi s'applique aux conjointes et conjoints de fait répondant aux critères de notre recommandation 3, et cela, dès l'entrée en vigueur de la loi. Que les couples jouissent d'un délai d'un an après l'adoption de la loi pour se soustraire de son application par acte notarié et que le ou la notaire qui enregistre la décision ait l'obligation de s'assurer que chaque conjointe ou conjoint ait bénéficié d'un conseil juridique indépendant au préalable, comme condition à la validité de la convention.
Campagne d'information sur les droits : Que le gouvernement réalise une campagne d'envergure pour informer la population de ses droits en matière de droit de la famille à la lumière des modifications adoptées par le projet de loi 56.

En amont de ce travail, notre présidente Sylvie St-Amand avait émis des craintes concernant le choix d'exclure les REER et les fonds de pension du patrimoine commun dans un article paru dans Le Devoir. Notre passage à l'Assemblée nationale a de même été souligné dans un article de Radio-Canada le 7 mai dernier concernant la notion de violence judiciaire.

Nous suivrons de près les travaux de l'Assemblée nationale afin d'évaluer les retombées de ce projet de loi sur les femmes, lorsque sanctionné et mis en vigueur.

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Pour se retrouver dans la négociation en petite enfance

4 juin 2024, par Ma CSQ cette semaine — , ,
C'est bien connu, une négociation, ça peut être complexe. Particulièrement lorsque le Conseil du trésor est de la partie. Pour établir les demandes salariales, il faut faire (…)

C'est bien connu, une négociation, ça peut être complexe. Particulièrement lorsque le Conseil du trésor est de la partie. Pour établir les demandes salariales, il faut faire des calculs complexes, et il est parfois difficile pour les membres de s'y retrouver, et donc de s'approprier ces demandes.

Tiré de Ma CSQ cette semaine.

Pour aider les intervenantes en petite enfance des CPE et les responsables en services éducatifs en milieu familial (RSE) qui sont présentement en négociation, la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec (FIPEQ-CSQ) a développé un calculateur en ligne permettant de comprendre les impacts des demandes syndicales sur les différents échelons salariaux en CPE et sur le montant de la subvention des RSE.

Des demandes raisonnables et nécessaires

Les intervenantes en petite enfance, malgré de grandes responsabilités et un travail essentiel, ne comptent pas parmi les travailleuses les mieux rémunérées au Québec. En tenant compte de l'inflation des dernières années, leur pouvoir d'achat a d'autant plus diminué.

Pour les RSE, la FIPEQ-CSQ revendique une hausse les protégeant de l'inflation. Les RSE doivent fournir deux collations par jour en plus d'un repas à six ou neuf enfants à même le montant de leur subvention. Leur revenu est directement affecté par la hausse du coût de l'alimentation. Depuis 2020, le coût du panier d'épicerie a augmenté de 13,9 %, et rien n'indique que la situation se résorbera puisque les projections parlent d'une hausse de 9,9 % à 11,3 % en 2023. La demande syndicale consiste en une augmentation de 6,12 $ de la subvention totale par enfant au terme de l'entente collective, en 2026.

Quant aux travailleuses des CPE, elles demandent un ajustement salarial à l'indice des prix à la consommation afin de protéger leur pouvoir d'achat et empêcher leur appauvrissement. Elles demandent, en outre, une bonification salariale afin de poursuivre le rattrapage salarial avec les autres secteurs et les autres provinces. Pour 2023, la demande est de 2,86 $ l'heure (environ 100 $ par semaine). Pour les deux autres années de la convention, elles demandent 3 % et 4 %, respectivement.

Pas qu'une question d'argent

Les RSE veulent également pouvoir être remplacées lorsqu'elles s'absentent pour des raisons personnelles afin d'éviter des bris de service aux familles et aux tout-petits. Elles souhaitent aussi que tous les enfants ayant des besoins particuliers puissent bénéficier de la subvention nécessaire afin de pouvoir répondre à leurs besoins tout en respectant le rythme de leur développement. Par ailleurs, les RSE revendiquent un soutien lors des moments difficiles, comme un deuil, soutien qui consisterait en des congés sociaux payés pour s'occuper des nombreuses obligations entourant le décès d'un proche.

Ces demandes trouvent écho dans les demandes des intervenantes en petite enfance des CPE, qui voudraient avoir accès à plus de personnel spécialisé pour accompagner les enfants ayant des besoins particuliers. Elles veulent également que les CPE embauchent davantage de personnel afin de diminuer la surcharge et augmentent le nombre de journées pédagogiques permettant des moments dédiés à la planification en lien avec le programme éducatif.

On remarquera au passage que, dans les deux cas, les demandes portent sur la capacité des intervenantes en petite enfance à offrir des services de qualité et à accompagner au mieux les enfants dans leur développement.

Des solutions à la pénurie de main-d'œuvre

Les services de garde éducatifs à la petite enfance publics sont aux prises avec une pénurie de main-d'œuvre qui compromet l'ouverture de nouvelles places très attendues par les parents, qui, dans certains cas, se voient contraints de reporter leur retour au travail.

Pour attirer et retenir le personnel des CPE et les RSE, il faut réussir à démontrer qu'elles auront les moyens de réaliser leur travail dans de bonnes conditions, tant sur le plan salarial que par la réponse aux besoins exprimés, tant en termes de ressources matérielles que sur le plan de la surcharge de travail.

C'est dans cet esprit que, pour la première fois dans l'histoire de la FIPEQ-CSQ, les intervenantes en CPE et en milieu familial régi et subventionné vont unir leurs forces afin de mener une négociation commune. Il s'agit d'une opportunité unique d'allier l'ensemble des intervenantes afin de bonifier leurs conditions de travail et de poursuivre la valorisation de la profession.

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Réaction de la FTQ et du SCFP-Québec à l’annonce d’Hydro-Québec sur l’avenir de l’industrie éolienne

4 juin 2024, par Fédération des Travailleurs et des travailleuses du Québec (FTQ), Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP-Québec) — , ,
La FTQ et le SCFP-Québec saluent l'annonce d'Hydro-Québec de revoir sa stratégie de développement éolien, en se lançant dans la production d'énergie éolienne, confiée au privé (…)

La FTQ et le SCFP-Québec saluent l'annonce d'Hydro-Québec de revoir sa stratégie de développement éolien, en se lançant dans la production d'énergie éolienne, confiée au privé depuis 2006.

« 10 000 MW de production d'électricité publique, avec Hydro-Québec comme maître d'œuvre, c'est un pas dans la bonne direction ! Les personnes citoyennes québécoises méritent de capter la valeur de nos gisements éoliens. Une redistribution équitable de nos richesses québécoises est essentielle », déclare la présidente de la FTQ, Magali Picard.

La privatisation du secteur éolien a toujours été combattue par les syndicats d'Hydro-Québec affiliés au SCFP et la FTQ. Par ailleurs, rappelons que dès 2005, une campagne a été mise en œuvre pour la nationalisation et le développement de l'expertise d'Hydro-Québec. Le gouvernement de l'époque avait déployé un système qui a enrichi de milliards de dollars des entreprises privées. Aujourd'hui, le changement de cap d'Hydro-Québec, avec sa nouvelle stratégie, permet aux membres de la FTQ de voir de la lumière au bout du tunnel.

Par ailleurs, la FTQ et le SCFP-Québec restent sur leurs gardes, car un projet de loi du ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, qui est attendu depuis l'automne 2023, fait toujours craindre le pire aux syndicats d'Hydro-Québec.

« Notre campagne pour la nationalisation de la production éolienne ne s'arrêtera pas tant que nous n'aurons pas la garantie que les signaux envoyés aujourd'hui par Hydro-Québec ne se seront pas concrétisés par des actions. Mais disons que nous entrevoyons la suite positivement et que nous travaillerons sur toute proposition intelligente », précise le président du SCFP-Québec, Patrick Gloutney.

« La FTQ souhaite toujours qu'Hydro-Québec soit maître d'œuvre et actionnaire de ses projets, dans le respect des communautés autochtones et locales. L'héritage de René Lévesque doit être préservé : la nationalisation de la production et de la distribution d'électricité a été un levier de développement socioéconomique extraordinaire et il doit le rester », concluent les leaders syndicaux.

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Fierté 2024 : Personne ne doit être laissé pour compte : égalité, liberté et justice pour tous

4 juin 2024, par Congrès du travail du Canada (CTC) — , ,
Pour la Fierté 2024, les syndicats du Canada réitèrent le thème « Personne ne doit être laissé pour compte : égalité, liberté et justice pour tous ». En solidarité avec nos (…)

Pour la Fierté 2024, les syndicats du Canada réitèrent le thème « Personne ne doit être laissé pour compte : égalité, liberté et justice pour tous ». En solidarité avec nos camarades 2SLGBTQI+, nous réaffirmons notre engagement à protéger les droits des personnes 2SLGBTQI+ et à réfuter toute tentative de faire reculer les progrès pour lesquels nous nous sommes tant battus et obtenus.

Les travailleuses et travailleurs 2SLGBTQI+ sont des membres à part entière du mouvement syndical du Canada et sont fiers d'être des militantes et militants, des déléguées et délégués syndicaux et des membres de la haute direction.

« La Fierté est l'occasion de célébrer les progrès que nous avons réalisés, mais c'est aussi l'occasion de dire avec certitude que nous défendrons ces droits s'ils sont menacés. Nous avons assisté à une forte montée des actes de harcèlement et de violence motivés par la haine contre la communauté 2SLGBTQI+, alimentés par les conservateurs de droite », déclare Bea Bruske, présidente du Congrès du travail du Canada. « Nous reconnaissons depuis longtemps la responsabilité collective de combattre la discrimination et la haine envers les travailleuses et travailleurs 2SLGBTQI+ par la promotion de l'égalité au travail et dans nos communautés. Alors, bien que nous ayons beaucoup à célébrer en cette saison de la Fierté, il nous reste aussi beaucoup à faire. »

Au cours de la dernière année, les dirigeants conservateurs ont fomenté un climat de haine, de peur et de mépris en perpétuant des stéréotypes nuisibles sur les personnes queer et trans en attaquant les lois portant sur les enfants, les jeunes et les adultes trans et d'identités de genre diverses. Alors que les travailleuses et travailleurs et les familles font face à une crise de l'abordabilité, aux changements climatiques et aux compressions dans les services publics, les politiciens conservateurs utilisent les enfants trans et d'identités de genre diverses comme pions politiques pour détourner l'attention de la population canadienne, car ils n'ont aucune solution concrète à présenter.

Leurs efforts sont également soutenus par des individus et des groupes du mouvement anti-genre (en anglais), qui utilisent l'intimidation et le harcèlement pour miner les efforts des entreprises et des institutions visant à favoriser l'inclusion, l'équité et la sécurité des personnes 2SLGBTQI+.

« Soyons clairs : la haine anti-2SLGBTQI+ concerne les travailleurs et travailleuses. Les préjugés et la violence dont sont victimes nos camarades 2SLGBTQI+ mettent en péril leurs droits humains fondamentaux », déclare Larry Rousseau, vice-président exécutif du CTC. « Et la haine anti-2SLGBTQI+ se manifeste souvent sous forme de harcèlement et de violence sur les lieux de travail, présentant de graves risques pour la santé et la sécurité des travailleuses et travailleurs. Nous devons être unis dans notre réponse, en solidarité avec tous les travailleurs et travailleuses, quelles que soient leur identité de genre, leur expression de genre et leur orientation sexuelle. » Les syndicats du Canada restent fidèles à leur principe fondamental : ce qui fait du tort à une personne en fait à toutes. Nous prenons résolument position contre toute tentative des conservateurs de restreindre nos droits durement acquis. Nous continuerons d'amplifier les voix des travailleuses et travailleurs 2SLGBTQI+ et de défendre sans relâche un Canada sécuritaire, juste et inclusif pour tous.

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Claudia Sheinbaum Pardo, PRÉSIDENTE !

4 juin 2024, par Alma E. Muñoz, Carolina Gómez — , ,
"Pour la première fois en 200 ans, je deviendrai la première femme présidente du Mexique, et je m'engage à gouverner honnêtement, dans la paix et l'harmonie, sans distinction", (…)

"Pour la première fois en 200 ans, je deviendrai la première femme présidente du Mexique, et je m'engage à gouverner honnêtement, dans la paix et l'harmonie, sans distinction", a déclaré Claudia Sheinbaum Pardo, dans son message initial en tant que gagnante virtuelle de la course à la présidence. "Merci Mexique, c'est votre triomphe, nous avons encore écrit l'histoire", a-t-elle déclaré plus tard dans le Zócalo de la capitale, où après minuit elle a célébré avec des milliers de partisan-e-s.

3 juin 2024 | tiré de La Jornada
https://www.jornada.com.mx/noticia/2024/06/03/politica/presidenta-5769

Après des heures d'incertitude, on a rapporté que Xóchitl Gálvez et Jorge Álvarez Máynez, ses opposants dans la course, l'ont appelée pour reconnaître sa victoire. Le président Andrés Manuel López Obrador a également pris la parole pour la féliciter.

« Un homme exceptionnel et unique qui a transformé l'histoire de notre pays pour le mieux. Nous continuerons à faire du Mexique une nation plus juste, démocratique, libre et souveraine et ce, chaque jour, afin de continuer à construire la grandeur de notre pays. Soyez assuré, Monsieur le Président, que nous serons à la hauteur de notre histoire et du généreux peuple mexicain. »

Elle s'est engagée à conserver son héritage. « Il est clair pour moi que la responsabilité est énorme, mais quand on a de la conviction et de l'amour pour les gens, tout est possible. Elle a insisté sur le fait que López Obrador n'a jamais abandonné, ne s'est jamais fatigué et a consacré sa vie à la justice« . Et, reprenant le titre du dernier livre du président, elle a dit : « D'ici, nous disons merci ! »

La présidente virtuellement élue a remercié les millions de Mexicaines et de Mexicains qui ont voté pour elle ce jour-là afin d'aller de l'avant avec la Quatrième Transformation [1]

Dans une ambiance festive, d'abord à l'hôtel Hilton Alameda, où se trouvait son centre d'opérations, elle a déclaré que « bien que de nombreux Mexicain-e-s ne soient pas d'accord avec le projet, nous devrons marcher dans la paix et l'harmonie, pour continuer à construire un Mexique juste et plus prospère. »

Après que le décompte rapide de l'Institut national électoral lui ait donné plus de 30 points d'avantage, elle a souligné qu'en ce jour d'élection, la fourchette la plus basse des résultats préliminaires donne aux partis de la coalition, Morena, PT et PVEM, une majorité qualifiée à la Chambre des député-e-s et très probablement au Sénat.

Dans son premier message en tant que présidente virtuellement élue, Claudia Sheinbaum a assuré qu'elle serait à la hauteur de « notre histoire et du généreux peuple mexicain ». Crédit photo : Marco Pelaéz

Des cris de « Présidente, présidente ! » ont inondé la salle où elle a délivré son message, devant des dizaines de représentant-e-s de la presse, sa famille, des collaborateurs et collaboratrices, des membres de son équipe de campagne, des dirigeant-e-s des partis qui la défendent, Morena, PT et PVEM, ainsi que divers candidat-e-s.

Elle a réitéré qu'elle n'était pas venue seule à la présidence. « Nous sommes tous arrivés, avec nos héroïnes qui nous ont donné notre patrie, avec nos ancêtres, nos mères, nos filles et nos petites-filles. Je félicite tous les Mexicain-e-s qui, par leur participation, ont démontré que le Mexique est un pays démocratique, avec des élections pacifiques et très participatives. »

L'ancienne cheffe du gouvernement a insisté sur le fait qu'elle conçoit un Mexique pluriel, diversifié et démocratique.« Nous savons que la dissidence fait partie de la démocratie, et bien que la majorité du peuple ait soutenu notre projet, notre devoir est et sera toujours de veiller sur chacun des Mexicain-e-s, sans distinction. »

Enthousiaste, Sheinbaum a promis un gouvernement « honnête, pas sous influence, sans corruption, sans impunité. Ce sera un gouvernement de l'austérité républicaine, de la discipline financière et fiscale et de l'autonomie de la Banque du Mexique. Il n'y aura pas de réelles augmentations des prix du carburant ou de l'électricité. »

« Nous maintiendrons, a-t-elle ajouté, la division entre le pouvoir économique et le pouvoir politique et nous défendrons et travaillerons toujours pour l'intérêt suprême du peuple mexicain et de la nation. Nous agirons conformément aux lois et à la loi. Nous garantirons les libertés d'expression, de presse, de réunion et de mobilisation. »

« Nous sommes démocrates, a-t-elle souligné, et par conviction, nous ne formerons jamais un gouvernement autoritaire ou répressif. Nous respecterons également la liberté politique, sociale, culturelle et religieuse, la diversité sexuelle et de genre. »

« Nous continuerons toujours à lutter contre toute forme de discrimination, à respecter la liberté d'affaires et à promouvoir et faciliter honnêtement les investissements privés nationaux et étrangers, qui favorisent le bien-être social et le développement, en garantissant toujours le respect de l'environnement. »

Claudia Sheinbaum a déclaré qu'elle consacrerait le budget public par conviction « à garantir tous les programmes d'aide sociale initiés par le président López Obrador, ainsi que tous les programmes dans lesquels nous nous sommes engagés, ainsi qu'à poursuivre la construction d'un véritable État-providence. »

Elle a également déclaré qu'elle consoliderait, entre autres, les projets stratégiques du gouvernement actuel, développerait l'infrastructure des trains, des routes, des ports et des aéroports, et qu'elle ferait la promotion de la souveraineté énergétique, des énergies renouvelables et du développement scientifique et technologique.

Sheinbaum a indiqué qu'elle poursuivrait la politique étrangère basée sur les principes de non-intervention, de coopération internationale pour le développement, d'autodétermination des peuples et de consolidation de la paix.

Et avec les États-Unis, il y aura « une relation d'amitié, de respect mutuel et d'égalité comme ce fut le cas jusqu'à présent, et nous défendrons toujours les Mexicain-e-s qui sont de l'autre côté de la frontière. Avec le Sud et les Caraïbes, nous continuerons à développer nos relations amicales, ainsi qu'avec le monde entier. »

Attention aux causes

« Nous conduirons le Mexique, a-t-elle souligné, sur la voie de la paix et de la sécurité. Nous irons de l'avant en prêtant attention aux causes, à la consolidation de la Garde nationale, au renseignement et aux enquêtes pour la sécurité publique, et à la coordination des institutions des différentes branches et niveaux du gouvernement, c'est-à-dire que notre politique de sécurité et de justice portera attention aux causes et à l'impunité zéro. »

Sheinbaum a rapporté qu'hier encore, elle a reçu les félicitations de divers chefs d'État et s'est ensuite rendu au Zócalo pour célébrer son triomphe. « Oui, nous avons pu, oui nous avons pu !« a-t-elle scandé. Nous avons atteint près de 35 millions de voix et nous avons également remporté la mairie de Mexico avec Clara (Brugada) », à qui elle a donné une accolade chaleureuse.

Je suis enthousiaste et j'éprouve de la gratitude pour la reconnaissance de la Quatrième Transformation. Je ne vais pas vous laisser tomber. Nous allons gouverner pour tous et pour toutes.

Nous devons ce triomphe à tant d'hommes et de femmes qui se sont battus pour notre patrie, pour nos libertés et notre justice, à des hommes et des femmes qui ont donné leur vie pour notre pays, aux mouvements sociaux, aux travailleurs et travailleuses, aux étudiant-e-s, aux médecins, aux enseignant-e-s, aux paysan-ne-s, aux femmes.

Dès le matin, lorsqu'elle est allée voter, la moréniste a déclaré qu'elle se sentait très heureuse et qu'elle s'attendait à une journée très participative et démocratique. Elle a voté dans un bureau de vote voisin de Duraznos 5C à San Andrés Totoltepec, Tlalpan.

Elle a affirmé avoir voté pour Ifigenia Martinez, qu'elle admire. À la maison, elle a attendu avec sa famille jusqu'en après-midi, avant de se rendre au centre des opérations où elle a appris son triomphe. Après la fermeture des bureaux de vote, elle a rencontré, entre autres, les anciens présidents de la Bolivie, Evo Morales, et de l'Argentine, Alberto Fernández.

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[1] Andres Manuel Lopez Obrador, le président sortant avait promis un ambitieux programme réformateur qu'il avait nommé la « quatrième transformation du Mexique », après l'indépendance de 1810, la réforme (instaurant la laïcité) de 1857 à 1861 et la révolution de 1910. Cette quatrième transformation viserait à combattre les inégalités criantes provoquées par les politiques néolibérales, à lutter contre la corruption, à allouer des sommes importantes au développement du marché intérieur, à hausser le salaire minimum, à développer des programmes sociaux et à assurer la gratuité de la santé et de l'éducation.

L’invasion des terriens

4 juin 2024, par Jean-François Delisle — ,
L'expression "Terra nullius", vous connaissez ? Il s'agit d'une locution latine qui signifie : "territoire de personne" ou encore : "terre inhabitée". Elle apparaît pour la (…)

L'expression "Terra nullius", vous connaissez ? Il s'agit d'une locution latine qui signifie : "territoire de personne" ou encore : "terre inhabitée". Elle apparaît pour la première fois dans une bulle papale de 1095. Elle a par la suite légitimé l'injustifiable : la prise de possession de territoires par les puissances coloniales européennes.

En effet, cette définition, même inconstante dans le temps, a servi à justifier l'appropriation de territoires dont les habitants, jugés primitifs et négligeables parce qu'ils ne disposaient pas d'une organisation étatique, étaient vus comme quantité négligeable ; des inférieurs en quelque sorte. Ce fut le cas dans dans les Amériques, en Afrique et une partie de l'Asie et même en Europe (les territoires balkaniques, dont une partie était peuplée de chrétiens non catholiques). À cette époque, il revenait au pape de trancher sur la définition de ces "territoires sans maître".

De nos jours, on interprète cette notion de façon plus modérée. L'actuel droit internationale considère comme Terra nullius une région sur laquelle aucun État n'a exercé sa souveraineté ou qui a renoncé à celle-ci formellement. Inutile de préciser que ces zones sont rarissimes. L'acquisition d'un territoire ne peut désormais se réaliser ni sur simple déclaration de souveraineté ni par un acte symbolique.

On peut citer sommairement le continent Antarctique qui constitue par voie de traité une réserve naturelle consacrée à la paix et à la science, plus quelques minuscules territoires (comme le rocher de Rockall, à l'ouest de l'Écosse).

Si on transpose la notion de Terra nullius à l'espace interplanétaire, elle convient parfaitement à première vue puisque les astres voisins du nôtre ne semblent pas abriter des formes de vie, du moins évoluées. Dans un traité de l'espace signé le 27 janvier 1967, l'article 2 interdisait toute appropriation nationale d'une planète ou d'une partie d'un astre par proclamation de souveraineté. Lors de la conquête de la lune deux ans plus tard, les États-Unis déclaraient solennellement que notre satellite appartenait à toute l'humanité et qu'ils n'avaient pas l'intention de l'annexer.

Mais on peut maintenant se demander combien de temps encore se maintiendra cette bonne volonté. Au printemps 2020, le président en poste Donald Trump annonçait que les États-Unis devraient disposer du "droit de s'engager dans l'exploration commerciale, la récupération et l'utilisation des ressources dans l'espace extra-atmosphérique conformément au droit applicable. L'espace extra-atmosphérique est un domaine de l'activité humaine sur le plan juridique et physique, et les États-Unis ne le considèrent pas comme un bien commun mondial".

Voilà le grand danger qui guette l'espace et aussi, par ricochet, l'humanité, dans la mesure où nos sociétés productivistes risquent d'y transporter leurs conflits commerciaux, économiques et même militaires.

À mesure que les ressources naturelles terrestres se raréfient vu leur exploitation effrénée, que la pollution continuera d'augmenter, la tentation sera forte (et sans doute irrésistible) d'aller piller les ressources manières éventuellement présentes sur certaines planètes voisines. D'où l'urgence d'un autre traité dans la foulée de celui de 1967 visant à renforcer la protection des autres planètes des convoitises nationales terrestres, à la fois publiques et privées.

On s'interroge beaucoup sur les OVNIS que plusieurs témoins pensent avoir observés ; mais s'il y avait des habitants intelligents sur Mars, Ganymède, Encelade ou Europe, ils verraient nos vaisseaux spatiaux foncer chez eux. Contrairement aux élusifs OVNIS chez nous, les nouveaux venus, eux, ne se cacheraient pas et ils iraient droit au but : l'établissement sans vergogne d'un régime colonial.

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Jean-François Delisle

Lancement de la 4e Édition d’En juin, je lis autochtone : « Pas de panique, mange ta bannique et lis un livre autochtone »

4 juin 2024, par Je lis autochtone — , , ,
Wendake, le 30 mai 2024 - Afin de souligner le Mois national de l'histoire autochtone, la campagne En juin, je lis autochtone revient pour une 4e édition. Sous le thème « Pas (…)

Wendake, le 30 mai 2024 - Afin de souligner le Mois national de l'histoire autochtone, la campagne En juin, je lis autochtone revient pour une 4e édition. Sous le thème « Pas de panique, mange ta bannique et lis un livre autochtone », plus de 75 librairies et 165 bibliothèques du Québec participeront à l'initiative.

Pour l'occasion, l'organisme Je lis autochtone invite les lecteurs et les lectrices à se rendre dans l'une des succursales participantes afin de se procurer un livre écrit par un auteur ou une autrice autochtone et découvrir toute la diversité que la littérature autochtone a à offrir.

À ce sujet, la porte-parole de l'édition 2024, Natasha Kanapé Fontaine, décrit la littérature autochtone comme suit : « Elle est héritière des traditions orales, des cultures ancestrales, mais elle est aussi pleine des réalités d'aujourd'hui et aborde une foule de sujets. Il y a de la science-fiction, des bandes dessinées, de la littérature jeunesse. Il y a tout plein de livres pour ouvrir notre esprit. »

Pour rendre l'expérience plus immersive, un mélange de bannique, un pain traditionnel autochtone, ainsi que le nouveau cahier thématique annuel de Je lis autochtone seront remis gratuitement à l'achat d'un livre des Premiers Peuples. Le cahier thématique permet de découvrir toutes les nouveautés livresques autochtones, des entrevues exclusives, une nouvelle inédite et des recommandations littéraires et musicales.

La programmation de l'événement est disponible sur le site Web de l'organisme
(jelisautochtone.ca). Plusieurs activités avec des auteurs et des autrices auront lieu tout au long du mois dans plusieurs librairies et bibliothèques de la province.
Je lis autochtone met aussi en vente des sacs réutilisables au coût de 20 $. Pour chaque sac vendu, l'organisme remettra un livre à un.e jeune d'une communauté autochtone du Québec.

Rappelons que l'initiative a d'abord été lancée, en 2021, par la Librairie Hannenorak située à Wendake. Vu l'intérêt grandissant, le projet s'est développé pour devenir un organisme à but non lucratif qui a pour mission de faire découvrir la littérature autochtone, mais aussi de rendre les livres plus accessibles dans les communautés des Premières Nations et y augmenter la littératie.

Pour tout connaître sur la campagne, visiter le jelisautochtone.ca ainsi que les pages Facebook et Instagram de l'organisme.

À propos de Natasha Kanapé Fontaine :

Natasha Kanapé Fontaine est une autrice, poète et artiste interdisciplinaire innu, de la communauté de Pessamit, sur le Nitassinan (Côte-Nord, Québec). Ses œuvres poétiques, son roman, son recueil de nouvelles et ses essais sont reconnus et salués par la critique, voyagent dans le monde, traduits en plusieurs langues et sont à l'étude à plusieurs niveaux dans les écoles du Québec et d'ailleurs.

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« La question nationale, une question sociale » de Michel Roche Un livre majeur

4 juin 2024, par Germain Dallaire — , ,
« L'indépendance n'est ni à gauche ni à droite, elle est en avant ». Cette phrase de Bernard Landry, on l'entend fréquemment de la bouche de péquistes souvent bien intentionnés (…)

« L'indépendance n'est ni à gauche ni à droite, elle est en avant ». Cette phrase de Bernard Landry, on l'entend fréquemment de la bouche de péquistes souvent bien intentionnés mais un brin allergiques à toute critique de leur parti.

Germain Dallaire

Pourtant, l'histoire même du PQ démontre que cette phrase est fausse. Les deux référendums de 1980 et 1995 ont été menés par des gouvernements péquistes clairement de centre gauche. Dans les deux cas mais plus particulièrement en 1995, le ralliement des groupes populaires et syndicaux au camp du Oui ont joué un rôle majeur.

Gouvernements de centre gauche ? Démystifions un peu les choses. La révolution tranquille a été le point de départ de deux décennies de décisions gouvernementales volontaristes allant dans le sens d'une intervention accrue de l'État dans l'économie et le développement de programmes sociaux. Toutes ces réalisations s'inscrivaient dans une logique de développement du bien commun profitable à tou(te)s. C'était à proprement parler du « nation building" et c'est loin d'être un hasard si, parallèlement à ce processus, s'est développé un nationalisme toujours plus affirmé nourrissant une aspiration croissante à l'indépendance. En fait, ce à quoi les gens sont attachés c'est à un État qui a pour objectif le bien commun et favorise l'unité et la solidarité entre les membres de la société. C'est ce qu'on caractérise comme étant de centre gauche et qui est pour l'essentiel la réalisation au Québec d'un État providence plus affirmé qu'ailleurs compte tenu de notre fragilité. On peut dire qu'une des manifestations récentes de cet attachement des Québécois(es) à une telle orientation gouvernementale est son appui aux employé(e)s du secteur public lors des dernières négociations.

Dans un ouvrage au titre évocateur (la question nationale, une question sociale), le professeur Michel Roche établit un lien direct entre politiques sociales et nationalisme. Les politiques sociales créent de la solidarité entre les membres d'une nation, ce faisant elles favorisent le sentiment national. Dans un pays en devenir comme le Québec, cela signifie une montée de l'indépendantisme.

Pour étayer sa démonstration, Michel Roche a fait un patient travail d'archive puisqu'il fait l'analyse de l'action des gouvernements fédéraux et provinciaux depuis l'instauration de l'État providence dans la foulée du New deal de Roosevelt à la sortie de la deuxième guerre mondiale. Dans l'histoire des relations entre les gouvernements fédéraux et québécois de cette longue période, il est possible de distinguer trois épisodes :

1- De 1945 à 1960, les gouvernements fédéraux successifs sont les maîtres d'œuvre de l'État Providence. Le Québec sous Duplessis se caractérise par un conservatisme social important ce qui l'amène à dénoncer les ingérences du fédéral même pour des initiatives favorables à la population.

2- La révolution tranquille se caractérise par une inversion des rôles. C'est le Québec qui prend l'initiative de façon spectaculaire avec la nationalisation de la majorité des barrages hydroélectriques décidée à la suite de la seule élection référendaire de notre histoire. Cette nationalisation est un geste par excellence de solidarité sociale puisqu'elle a été explicitement réalisée pour favoriser les coûts d'électricité les plus bas possibles pour l'ensemble des Québécois(e)s. Elle a inaugurée une longue suite de réformes (création des ministères de l'éducation et de la santé, assurance-maladie, créations de sociétés d'État, etc, etc.. la liste est longue) allant toutes dans le même sens d'une prise en main collective au bénéfice de l'ensemble des Québécois(e)s. Résultat : un sentiment fort de destin commun, une solidarité croissante, un nationalisme atteignant des zéniths et la nécessité de l'indépendance qui s'impose.

3- Arrive les années 80 avec l'échec référendaire et, l'année suivante, un gouvernement Lévesque qui se retourne contre ses alliés du secteur public. La chape de plomb du néolibéralisme s'installe progressivement avec les premiers traités de libre-échange qui ouvrent à la marchandisation de toute chose. C'est le début des baisses d'impôt et du démantèlement de l'État. Le PQ se convertit au libre-échange et le gouvernement libéral de Robert Bourassa parle d'État Provigo. Même une partie de la gauche se rallie en parlant d'alter-mondialisation. Le gouvernement fédéral est à l'offensive avec le rapatriement unilatéral de la constitution et les premières privatisations sous Mulroney.

Son néolibéralisme affirmé ne lui permet cependant pas d'envahir le champ des politiques sociales. Les leaders indépendantistes se déchirent avant de reprendre la main. Les échecs de Meech et Charlottetown les galvanise et conduit au référendum volé de 1995.

La suite de l'histoire s'apparente à un effondrement. Lucien Bouchard devient premier ministre et, prenant exemple sur René Levesque, se retourne contre ses alliés en imposant des coupures drastiques. Ces coupures sont une conséquence directe des actions d'un gouvernement fédéral paniqué par les résultats référendaires. En plus d'inonder le Québec de publicité (programme des commandites), Ottawa coupe de 33% ses transferts en santé obligeant le Québec à diminuer les services. Plus catholique que le pape, le gouvernement Bouchard réduit de 6% le budget de l'État en 1996 et 1997. Au gouvernement québécois le rôle ingrat ; au fédéral, le rôle de Père Noël. Le déficit zéro, présenté aux indépendantistes par Lucien Bouchard comme la condition gagnante d'un référendum à venir, est la démonstration parfaite qu'indépendance et néolibéralisme sont tout simplement antagonistes. Appliqués avec d'autant plus de vigueur que Bouchard y avait rallié les alliés du camp du Oui, ces politiques ont conduit à une grogne populaire et à l'effondrement du leadership indépendantiste. La condition gagnante s'est avérée être une condition perdante.

En symbiose avec la politique fédérale d'envahissement des compétences provinciales, le gouvernement Charest (2003-2012) poursuit le travail de démantèlement de l'État québécois bien entamé sous Lucien Bouchard. Profitant d'un ministre des finances qui s'est époumoné à dénoncer le déséquilibre fiscal (Yves Séguin), Jean Charest se permet même de convertir en baisses d'impôt le 700 millions accordé en 2007 par Stephan Harper. Néolibéralisme, quand tu nous tiens ! En 2013, une étude de l'Institut de Recherches en Économie Contemporaine (IREC) révélait qu'en appliquant le régime fiscal de 1997, le gouvernement québécois aurait obtenu 8,4 milliards de plus en financement…

L'arrivée du gouvernement de Justin Trudeau au pouvoir en 2015 allait marquer une accélération dans l'intrusion du fédéral. On se souvient qu'à l'époque Trudeau, sur l'obsession du déficit, défendait une position plus progressiste que le NDP. C'est ce qu'il a mis en application en envahissant les champs de compétence du Québec. Récemment, il l'a fait sur la question du logement mais surtout en instituant une assurance-dentaire pour les personnes âgées, une assurance bien populaire au Québec…

Pendant ce temps au Québec, c'est « back to the future » avec un gouvernement caquiste qui fait de l'aide aux entreprises le pivot de son action. Élu sur un discours nationaliste qui a vite montré ses limites, ce gouvernement en est réduit à protester contre les empiètements du fédéral et cela, même concernant des initiatives profitables à la population. Son attitude ressemble à s'y méprendre à celle du gouvernement Duplessis. La boucle serait-elle bouclée ? Serions-nous en fin de cycle… mûrs pour une nouvelle révolution peut-être pas si tranquille qui donne toute sa place à un État québécois indépendant soucieux en priorité du bien commun. C'est tout le bien qu'on se souhaite.

Le livre de Michel Roche ne se contente pas d'analyser l'évolution du Québec des 80 dernières années ce qui serait déjà beaucoup. Il embrasse beaucoup plus large dès le début en retournant aux écrits de Karl Marx sur le nationalisme. Il montre que ce dernier était loin d'y être hostile et le voyait comme une étape non suffisante mais parfois essentielle dans la prise en mains par les peuples de leur destin. On est loin de la vision réductrice de la répétition un peu mécanique du fameux « prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ». Comme dirait l'autre : encore faut-il avoir un pays. Marx l'avait bien compris.

Je termine en signalant une autre contribution importante du livre de Michel Roche qui consiste à analyser les cas écossais et catalans en démontrant le lien entre nationalisme et politiques sociales. Dans ces deux derniers cas, la relation joue à l'inverse tout simplement parce que ce sont les instances « fédérales » qui exercent le pouvoir exclusif en matière de protection sociale. C'est ainsi que Michel Roche montre sur un temps long que les épisodes de montées d'aspiration à l'indépendance dans ces deux pays en devenir sont directement liées à des coupures dans la protection sociale par le gouvernement central.

En ces temps où le néolibéralisme montre de sérieux signes l'essoufflement, le livre de Michel Roche est une contribution majeure dans les débats sociaux et politiques québécois. Que tous les indépendantistes en prennent bonne note : la réalisation de l'indépendance implique le retour en force du « commun". C'est ce que les pionniers indépendantistes avaient compris.

« La question nationale, une question sociale » Essai sur la crise du mouvement indépendantiste québécois, Michel Roche, Éditions Liber

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« Nous avons besoin des Éditions sociales, les Éditions sociales ont besoin de nous ! »

4 juin 2024, par Collectif — , ,
TRIBUNE. Des universitaires et auteurs appellent à soutenir financièrement cette maison d'édition historique, associée à La Dispute, qui a su préserver son indépendance au (…)

TRIBUNE. Des universitaires et auteurs appellent à soutenir financièrement cette maison d'édition historique, associée à La Dispute, qui a su préserver son indépendance au milieu de grands groupes capitalistes.

Tiré du site du CADTM. Photo : Malediction_Wolf, Pixabay, CC

Comme d'autres espaces indépendants où se construit une pensée critique, les Éditions sociales (ES) traversent actuellement une période difficile. Longtemps liées au Parti communiste français, les ES ont été l'un des éditeurs politiques majeurs du XXe siècle. Elles ont aussi bien diffusé des outils de formation militante que l'œuvre de Marx et d'Engels, la première anthologie de textes de Gramsci en français, le travail de grands historiens marxistes, ou encore, avec une collection sans équivalent comme « les classiques du peuple », à faire connaître à un public large des œuvres marquantes du patrimoine littéraire et intellectuel.

Depuis 2018, les ES ont renouvelé et élargi leur équipe éditoriale et redéployé leur activité.

Une nouvelle vie a commencé pour les ES à la fin des années 1990, après de rudes batailles pour leur indépendance politique et leur autonomie économique. La pensée de Marx et d'Engels sert toujours de boussole mais elle est désormais travaillée sans exclusive théorique ou politique, et en réunissant différentes sensibilités intellectuelles. Depuis 2018, les ES ont renouvelé et élargi leur équipe éditoriale et redéployé leur activité. En lançant de nouvelles collections, comme la collection de petits livres de pédagogie « Découvrir » et en redynamisant d'ambitieux projets, tels que la GEME (Grande Édition Marx-Engels) qui vise à publier l'ensemble des textes de Marx et d'Engels dans de nouvelles traductions à partir de l'édition de référence allemande, les Éditions sociales visent à transmettre une histoire et des expériences issues du mouvement ouvrier et à ouvrir à la diversité des débats des marxismes contemporains.

Pour nous qui sommes intéressé⋅es ou impliqué⋅es dans ces débats, les ES sont un espace irremplaçable, un bien commun pour toutes celles et ceux qui veulent comprendre la marche du monde. Car il ne s'agit nullement de conserver un héritage comme des antiquités précieuses dans un musée, mais, au contraire, de forger des outils pour penser au présent le travail, les rapports de domination, l'écologie et les oppressions racistes ou sexistes, dans la perspective de leur dépassement, donc de l'émancipation.

C'est pourquoi nous appelons à soutenir les Éditions sociales, en participant à la campagne de dons et en faisant connaître le plus largement possible leur travail éditorial et leurs publications.

Signataires

Bruno Amable, Économiste
Éric Aunoble, historien
Étienne Balibar, Philosophe, Université de Paris-Nanterre
Laurent Baronian, Économiste, enseignant-chercheur au CEPN
Jean Batou, Historien, auteur
Philippe Bazin, Artiste
Marc Belissa, Maître de conférences émérite Paris Nanterre
Judith Bernard, Enseignante et metteuse en scène
Vincent Berthelier, Maître de conférence en littérature
Alain Bertho, Professeur émérite d'Anthropologie
Michel Biard, Historien
Jacques Bidet, Philosophe
Alexia Blin, Directrice de coll
Patrick Bobulesco, Libraire du Point du Jour
Stéphane Bonnéry, Professeur en sciences de l'éducation à l'Université Paris-VIII
Saliha Boussedra, Docteure en philosophie
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Occuper le monde : vers le plus grand mouvement international jamais connu ?

4 juin 2024, par David Lhotellier — , ,
Des occupations partout. En quelque deux semaines, le mouvement étudiant lancé aux États-Unis s'est répandu dans le monde, prenant une ampleur encore inédite. Au point que la (…)

Des occupations partout. En quelque deux semaines, le mouvement étudiant lancé aux États-Unis s'est répandu dans le monde, prenant une ampleur encore inédite. Au point que la liste des universités mobilisées semble impossible à tenir : il y a eu, à l'heure où nous écrivons ces lignes, des occupations ou tentatives d'occupations dans des dizaines de pays, sur tous les continents (1). Et en Belgique, bien sûr, dorénavant dans toutes les grandes universités du pays : ULB et VUB, Gand, Anvers, Leuven, Liège, Louvain-la-Neuve.

Tiré de Gauche anticapitaliste
20 mai 204

Par David Lhotellier

Dans certains pays, les autorités tentent la méthode douce ; dans d'autres, elles répriment frontalement. Mais quelle que soit le degré de violence, les recettes sont les mêmes : faire passer les étudiant∙es pour une minorité radicalisée, et les accuser d'antisémitisme, voire de soutien au terrorisme.
La Palestine est-elle le nouveau Viêtnam ?

Le propre des mouvements de solidarité internationale, c'est qu'ils sont durs à lancer, étant donné la difficulté de s'intéresser à ce qui se passe à l'autre bout du globe (on aurait bien sûr aimé voir des mobilisations semblables pour soutenir les peuples ukrainien, iranien, syrien, yéménite, soudanais, congolais ou encore mapuches) ; mais qu'une fois démarrés, rien ne les arrête, et certainement pas les frontières. Jamais encore un mouvement ne s'était propagé aussi vite dans autant de pays : si l'on veut chercher une comparaison sensée, la seule qui vienne en tête concerne sans doute mai 1968, dont on oublie souvent qu'il a en réalité commencé le 22 mars, par une occupation en soutien à des étudiants arrêtés lors d'une manifestation contre la guerre au Viêtnam. Rares mais puissantes, ces déflagrations rappellent aux militant∙es révolutionnaires une vérité dont on pourrait, le reste du temps, douter : frapper et s'organiser ensemble, à l'échelle internationale, est tout à fait possible, et c'est certainement le seul moyen de faire vaciller une classe capitaliste qui, elle, n'a aucun mal à se jouer des frontières quand ça l'arrange.

Frapper et s'organiser ensemble, à l'échelle internationale, est tout à fait possible, et c'est certainement le seul moyen de faire vaciller une classe capitaliste qui, elle, n'a aucun mal à se jouer des frontières quand ça l'arrange.

Les étudiant∙es, généralement bien connecté∙es et souvent mobiles, ont toujours eu une longueur d'avance dans ce domaine. Mais pour créer des rapports de force plus puissants, il faut bien sûr des mobilisations plus larges : en 1968, ce sont effectivement les étudiant∙es qui ont lancé les premières étincelles, mais les victoires n'ont été arrachées que quand dix millions de travailleur∙ses se sont mis∙es en grève. Toutes proportions gardées, le mouvement aujourd'hui en cours présente des signes d'un tel effet d'entraînement : depuis octobre, les manifestations ont atteint des proportions gigantesques dans de nombreux pays, et les quartiers populaires sont fortement mobilisés contre un impérialisme qu'ils perçoivent (à raison) comme l'autre visage du racisme d'État auquel ils font face à domicile. Et dans le reste de la société, la colère qui couve comme des braises depuis sept mois se matérialise de plus en plus par des actions spontanées et inattendues, comme la grève de la VRT durant la prestation de la candidate israélienne à l'Eurovision. À quand une grève générale contre l'impérialisme ?

On en parle à l'AG

En attendant, les étudiant∙es occupent leurs universités. Et c'est déjà pas mal.

Certes, par rapport à une grève, la capacité d'une telle mobilisation à bloquer des flux financiers, et à faire pression sur telle ou telle entité en l'attaquant par le portefeuille, est assez limitée. Mais ce sont des mobilisations visibles, symboliquement fortes, et ce n'est pas rien, vu la dépendance d'Israël à son softpower et à ses soutiens diplomatiques. Et surtout, elles donnent aux occupant∙es un espace pour s'organiser – et du temps, là où le rapport de forces permet le blocage des cours et l'annulation des examens.

La question clef est alors de savoir si elles seront utilisées comme telles, si elles pourront être le point de chute d'un mouvement tourné vers l'extérieur, ou bien si elles se refermeront sur elles-mêmes, pensées comme une fin en soi et plus comme un outil de lutte. C'est ce qui a tué, entre autres, la mobilisation étudiante de 2018 en France, qui avait pris une forme comparable : alors que la moitié des universités du pays étaient bloquées, les manifestations se sont vidées et, progressivement, plus personne n'a vu d'intérêt à se joindre aux occupations en-dehors des personnes qui les habitaient de manière permanente. Et le gouvernement a finalement pu cueillir les dernier∙es d'entre elleux après avoir joué l'usure. Rester tourné∙es vers l'extérieur, ne pas voir l'occupation comme une fin en soi : voilà le mot d'ordre à garder en tête. Car il faut dire que la tentation est forte.

Il faut se figurer l'ambiance : ces lignes sont écrites dans la salle où ont lieu d'ordinaire les conseils d'administration de l'ULB, sur une immense table ovale. Le design, sobre et chic, est à des années-lumière de nos auditoires délabrés. Mais le lieu, désormais tapissé de drapeaux palestiniens et d'affiches reprenant des slogans décoloniaux, féministes ou révolutionnaires, a été converti en une salle d'étude silencieuse, où les étudiant∙es mobilisé∙es qui en ont besoin révisent leurs examens. Et, la nuit, elle sert de grand dortoir – les JAC ont installé leurs matelas au milieu, dans la découpe centrale de la table. Ailleurs dans le bâtiment, on trouve une chambre non-mixte, un garde-manger, une salle de prière pour les pratiquant∙es de diverses religions… et bien sûr l'auditoire dans lequel, tous les jours, se tiennent les assemblées générales, où se discutent aussi bien l'orientation stratégique du mouvement que l'organisation de la vie en communauté sur place.

Le double sens du mot « occupation » amène régulièrement à des situations étranges. Alors qu'il était jusque-là utilisé, dans de nombreux slogans, en référence à l'occupation des territoires palestiniens par l'État d'Israël, il est devenu en même un mot porteur d'émancipation, lorsqu'il fait référence à la forme prise par la lutte. À travers « l'occup' », les étudiant∙es se réapproprient un lieu qui a bien souvent été, pour elleux, un lieu de violence et de domination. La notion de propriété privée s'efface sans même qu'on le remarque : chacun∙e garde évidemment son téléphone, son sac de couchage et sa brosse à dents (autant de biens pour lesquels il y a une évidente notion de propriété d'usage), mais il ne viendrait à personne l'idée que le stock de pommes apporté par le voisin devrait appartenir à quelqu'un, ou que telle personne pourrait priver telle autre du droit de s'y servir, autre que la communauté des occupant∙es toute entière, réunie en assemblée générale, ou l'une de ses émanations. En nous obligeant à nous organiser nous-mêmes, l'occupation ouvre une parenthèse dans le capitalisme, et une fenêtre sur un possible après.

Il ne s'agit pas de faire croire que c'est un petit paradis. La pratique de la démocratie directe nécessite un long apprentissage, qui nous manque à tou∙tes cruellement : cela peut rendre les assemblées générales longues, les processus décisionnels peu efficaces, même si nous progressons un peu chaque jour. L'occupation constitue aussi un formidable lieu de libération de la parole, ce qui est salvateur, mais jette en même temps une lumière crue sur la souffrance et les oppressions qui traversent notre société – et qui ne s'arrêtent pas à nos murs, même si elles y sont activement combattues.

Ce mouvement a le potentiel d'obtenir une réelle victoire face à l'État d'Israël, en l'isolant grâce au boycott académique, culturel, diplomatique et économique

Pas facile tous les jours, mais indubitablement émancipatrice : l'occupation est une petite révolution. Et comme toutes les révolutions, elle se propage ou elle meurt. Ce mouvement a le potentiel d'obtenir une réelle victoire face à l'État d'Israël, en l'isolant grâce au boycott académique, culturel, diplomatique et économique ; et en même temps, de redessiner considérablement les rapports de forces et le savoir-faire militant dans tous les pays où il se déploie, en donnant un nouveau souffle aux organisations et aux perspectives révolutionnaires. De là à aboutir à une révolution mondiale, nous n'y sommes peut-être pas encore. Mais nous aurons au moins fait un petit pas de plus sur ce chemin vers un monde nouveau, où les frontières, l'impérialisme, le colonialisme, l'extrême droite et le génocide auront été renvoyés à leur place : dans les poubelles de l'Histoire.

Crédit photo : Université populaire de Bruxelles (Gauche anticapitaliste (CC BY-NC-SA 4.0)
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Notes

1. Une carte interactive des mobilisations est donnée dans cet article (en castillan) : https://www.elsaltodiario.com/palestina/universidades-salamanca-rioja-se-suman-300-acampadas-genocidio

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La fin de la croissance économique approche

4 juin 2024, par Jean-Marie Harribey — , ,
Le réveil risque d'être brutal car le rêve de la croissance économique infinie s'évanouit. La chose est entendue maintenant aussi bien dans certains cercles hétérodoxes (pas (…)

Le réveil risque d'être brutal car le rêve de la croissance économique infinie s'évanouit. La chose est entendue maintenant aussi bien dans certains cercles hétérodoxes (pas tous hélas !) que dans ceux plus orthodoxes (pas beaucoup encore !). On fait le point ici sur deux séries de travaux qui rompent avec la doxa dominante qui tend à faire accroire à un capitalisme vert sous la dénomination d'une croissance verte.

Tiré d'À l'encontre.

1. Vers la postcroissance[1]

Un demi-siècle de capitalisme néolibéral a poussé à l'extrême les deux contradictions qui lui sont inhérentes : la dévalorisation de la condition du travail, pourtant seule source de la valeur, et la dégradation de la nature, les deux ensemble conditions de la richesse, selon les mots de William Petty et de Karl Marx[2]. Ces deux contradictions jumelées mènent à l'épuisement des gains de productivité du travail d'un côté et au réchauffement climatique et à l'épuisement de la biodiversité de l'autre. Les choses sont claires : poursuivre le rêve de l'accumulation infinie est une impasse. Au moins trois livres qui viennent d'être publiés remettent en question de nouvelle manière le dogme de la croissance économique éternelle.

Il faut donc prendre acte que le débat sur la post-croissance est posé. Sans tomber dans une chimère comme celle de la croissance verte ou dans une décroissance uniforme sans transition. Post-croissance a un sens s'il s'agit de sortir de la logique du capitalisme que la croissance sert : bannir le critère du taux de profit devient la priorité et non pas en finir avec l'indicateur PIB. C'est la croissance de ce dernier qui est une illusion, ce n'est pas le PIB lui-même qui donne la somme des revenus bruts annuels produits dans l'économie. Aussi, c'est le sous-titre du livre de l'économiste britannique du développement Tim Jackson, Post-croissance (Actes Sud, 2024) qui est important : Vivre après le capitalisme.

Une institution-clé doit être mise en œuvre pour amorcer ce passage : la planification écologique. Mais plusieurs conditions doivent être réunies. D'abord, l'instauration d'un débat démocratique pour décider des besoins à satisfaire prioritairement. Ensuite, dresser des comptabilités matières sur les ressources disponibles et à sauvegarder. Mais là se loge la principale difficulté : la comptabilité « en nature » ne se substitue pas à la comptabilité monétaire, comme le croient l'économiste Cédric Durand et le sociologue Razmig Keucheyan dans Comment bifurquer, Les principes de la planification écologique (La Découverte, 2024). Dans une économie post-capitaliste, où subsistera une division du travail importante, il faudra comptabiliser l'amortissement des équipements, les consommations intermédiaires de matières premières et d'énergie et les salaires. Les prix seront donc nécessaires, même si leur mode de fixation ne découlera pas exclusivement du marché parce qu'ils seront, au moins partiellement, administrés.

Et cela n'a rien à voir avec l'illusion de ce que les économistes libéraux appellent « capital naturel » auquel il faudrait donner un prix, comme si la nature avait une valeur économique intrinsèque. Cette idée trop fréquemment colportée par les mouvements écologistes, croyant bien faire, est le leitmotiv des institutions internationales comme l'ONU, la Banque mondiale, cette dernière cherchant à se disculper d'avoir diligenté les politiques productivistes. Cette notion de capital naturel est parfois reprise par des experts tout à fait conscients de la nécessité de la planification, tels les économistes Michel Aglietta et Étienne Espagne dans Pour une écologie politique, Au-delà du Capitalocène (Odile Jacob, 2024), mais en oubliant le caractère incommensurable des écosystèmes à quoi que ce soit de produit par l'Homme, c'est-à-dire qui est inestimable[3].

2. Le changement climatique fera baisser la production

Une étude du National Bureau of Economic Research (NBER), menée par Adrien Bilal et Diego R. Känzig, respectivement de l'Université de Harvard et de l'Université Northwestern, évalue l'impact macroéconomique mondial du changement climatique[4]. Prenant à rebours les évaluations traditionnelles aboutissant à chiffrer à hauteur de seulement à 1 à 3 % la réduction de la production mondiale à cause d'une hausse de 1 °C de la température mondiale, ils aboutissent à des impacts « six fois plus importants », c'est-à-dire 12 % de produit brut mondial en moins au bout de six ans.

Notes : La figure montre l'évolution de la température moyenne mondiale, calculée à partir des données d'anomalie de la température mondiale et de la climatologie correspondante de la NOAA, dans le graphique de gauche, et l'évolution du PIB réel mondial par habitant (en 2017 USD) calculée à partir des données PWT dans le graphique de droite.

Bilal et D.R. Känzig, p. 9

Notes : La figure montre les réponses impulsionnelles du PIB réel mondial par habitant à un choc de température mondial, estimées sur la base des dates de récession retenues par la Banque mondiale (note 2 p. 12)). La ligne continue est l'estimation ponctuelle et les zones ombrées foncées et claires sont les intervalles de confiance de 68 et 90 %, respectivement.

Bilal et D.R. Känzig, p. 13.

Comment ces auteurs parviennent-ils à une évaluation bien plus pessimiste que les études antérieures, notamment celle fameuse de Nordhaus[5] ? Parce qu'ils étudient l'impact d'une hausse de la température moyenne mondiale au lieu de celui des hausses de températures locales, c'est-à-dire dans un pays ou une région donnés. Ils expliquent :

« Nous étudions l'impact de ces chocs sur la probabilité d'événements météorologiques extrêmes, tels que des températures extrêmes, des vitesses de vent extrêmes et des précipitations extrêmes. […] Les chocs thermiques locaux entraînent une augmentation du nombre de jours de chaleur extrême. Cependant, les chocs thermiques mondiaux entraînent une augmentation nettement plus importante du nombre de jours de chaleur extrême. Le contraste est encore plus marqué pour les précipitations extrêmes et la vitesse extrême du vent : les chocs de température globale prévoient une forte augmentation de leur fréquence, ce qui n'est pas le cas des chocs de température locale. Ces résultats sont cohérents avec la littérature géoscientifique : la vitesse du vent et les précipitations sont des résultats du climat mondial – par le biais du réchauffement océanique et de l'humidité atmosphérique – plutôt que des résultats de la distribution locale des températures. Étant donné que les événements climatiques extrêmes sont connus pour causer des dommages économiques, l'effet différentiel des chocs de température mondiaux par rapport aux chocs de température locaux sur les événements climatiques extrêmes peut expliquer les effets économiques beaucoup plus importants des chocs de température mondiaux. »[6]

L'étude de Bilal et Känzig a le mérite d'anticiper ce qu'il se passerait si l'élévation de la température atteignait 2 °C, voire 3 °C en 2100. Dans ce dernier cas, à cause des effets cumulatifs, le produit brut mondial baisserait de 50 % par rapport à ce qu'il aurait été sans changement du climat.

Notes : La figure montre la dynamique de transition de notre modèle estimé dans le cadre de notre scénario où le monde se réchauffe de 3°C au-dessus des niveaux préindustriels d'ici 2100. Les lignes continues bleues représentent la dynamique de transition lorsque nous estimons le modèle sur la base des chocs de température mondiaux, ainsi que les intervalles de confiance à 68 % (bleu ombré). Les lignes bleues en pointillé représentent la dynamique de transition lorsque nous n'utilisons que les dommages causés à la production par les chocs de température mondiaux. Les lignes rouges en pointillé représentent la dynamique de transition lorsque nous utilisons uniquement les chocs de productivité estimés en fonction des chocs de température locaux, ainsi que les intervalles de confiance à 68 % (en rouge ombré). Intervalles de confiance basés sur 1000 tirages bootstrap de production, de capital et de température.

Bilal et D.R. Känzig, p. 40.

Mesuré en termes de bien-être, l'impact du changement climatique est considérable, même en ne prenant en compte que la consommation qui baisserait autant que la production :

« Cette baisse substantielle de la consommation se traduit par une importante perte de bien-être. Le graphique (e) montre que l'impact du changement climatique sur le bien-être équivaut à une perte de bien-être de 31 %, en pourcentage équivalent de consommation. Cette perte de bien- être dépasse l'impact sur la consommation, car les ménages ne tiennent pas compte des baisses futures de la consommation, mais les valorisent également. Comme la température continue d'augmenter, le bien-être continue de diminuer et atteint une perte de 52 %. Nos résultats indiquent que l'impact du changement climatique est considérable. En termes de bien-être, le coût du changement climatique est 640 fois supérieur au coût des cycles économiques, ou dix fois supérieur au coût du passage des relations commerciales actuelles à une autarcie complète. Ce qui est peut-être le plus frappant, c'est qu'en termes de production, de capital, de consommation et donc de bien-être, le changement climatique est comparable, en termes d'ampleur, à l'effet d'une guerre majeure sur le plan national. Cependant, le changement climatique est permanent. Ainsi, les pertes liées à la vie dans un monde avec changement climatique par rapport à un monde sans changement climatique sont comparables au fait de mener une guerre majeure au niveau national, et ce pour toujours. »[7]

Parmi les facteurs qui expliquent la perte de production et de bien-être, il y a l'augmentation considérable du coût social du carbone qui est de l'ordre de « 1056 dollars par tonne de dioxyde de carbone (tCO2) […] six fois supérieure à la limite supérieure des estimations existantes »[8]. Si la température augmentait de 5 °C en 2100, la perte de bien-être atteindrait plus de 60 %[9].

Certes, le modèle d'impact du changement climatique à travers le monde de Bilal et Känzig est bâti sur une fonction de production Cobb-Douglas avec une productivité totale des facteurs (c'est-à-dire ici le progrès technique) dépendant du temps, fonction dont on connaît les graves limites. Ce qui, peut-être, permet au chef économiste de TotalEnergies, Thomas-Olivier Léautier, de déclarer : « Cette étude permet de réconcilier la littérature économique néoclassique avec la vision des scientifiques »[10].

Le chef économiste de TotalEnergies aurait dû lire attentivement les auteurs :

« Enfin, notre article alimente le débat de longue date sur la question de savoir si les modèles d'évaluation intégrée sont bien adaptés pour représenter le coût du changement climatique (Nordhaus, 2013 ; Stern et al., 2022). Notre article démontre que ces modèles ont historiquement produit des coûts faibles du changement climatique non pas tant parce qu'ils reposaient sur des bases incomplètes, mais plutôt parce qu'ils étaient calibrés sur des dommages économiques qui ne représentaient pas l'impact total du changement climatique. »[11]

L'étude de Bilal et Känzig vient à point nommé au moment où l'Union européenne défait le modeste Pacte vert qu'elle venait d'adopter, au moment aussi où le gouvernement français se réjouit de la diminution des émissions de gaz à effet de serre en France de 5,8 % en 2023, en oubliant de comptabiliser les émissions importées, et au moment enfin où le gouvernement fait voter à l'Assemblée nationale une loi sur l'agriculture qui envoie à la poubelle toute considération environnementale à la grande satisfaction de la FNSEA. La croyance en la possibilité d'une fuite en avant perpétuelle relève de l'aveuglement sinon du cynisme de classe. (Article publié sur le blog de Jean-Marie Harribey « L'économie par terre ou sur terre ? » le 29 mai 2024, blog d'Alternatives économiques. Nous profitons d'indiquer ici l'ouvrage de Jean-Marie Harribey qui doit paraître en août, En quête de valeur(s), Editions du Croquant)

Notes

[1] Cette première partie a été en largement publiée dans Politis, n° 1808, 2 mai 2024.

[2] K. Marx, Le Capital, Livre I, 1867, Œuvres, Paris, Gallimard, La Pléiade, tome I, 1965, p. 998-999.

[3] Recension de ces livres sur ce blog. Sur le caractère inestimable de la nature et des services écosystémiques, voir J.-M. Harribey, La richesse, la valeur et l'inestimable, Fondements d'une critique socio-écologique de l'économie capitaliste, Les Liens qui libèrent, 2013, en libre accès ; et dans En quête de valeur(s), Paris, Éd. du Croquant, 2024.

[4] A. Bilal et D.R. Känzig, « The macroeconomic impact of climate change : Global vs local temperature », WP 32450.

[5] William D. Nordhaus, « An Optimal Transition Path for Controlling Greenhouse Gases », Science, vol. 258, 20 november 1992, p. 1316-1319.

[6] A. Bilal et D.R. Känzig., p. 44-45.

[7] Ibid, p. 40-41.

8] Ibid, p. 5.

[8] Ibid, p. 5.

[10] Propos rapportés par Anne Feitz, « Le réchauffement climatique freinera la croissance nettement plus que prévu », Les Échos, 28 mai 2024.

[11] A. Bilal et D.R. Känzig, p. 7.

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L’alimentation et la crise climatique

4 juin 2024, par GRAIN — ,
Il est impossible de lutter contre la crise climatique sans repenser la manière dont nous produisons et consommons les aliments. Le système alimentaire, responsable de plus (…)

Il est impossible de lutter contre la crise climatique sans repenser la manière dont nous produisons et consommons les aliments. Le système alimentaire, responsable de plus d'un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre, est un facteur clé du changement climatique, mais en subit également les conséquences : les populations sont confrontées à des difficultés croissantes dans la pratique de l'agriculture, de l'élevage et dans l'accès à l'alimentation.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Il faut de toute urgence transformer nos systèmes alimentaires pour nous adapter. Mais pour ce faire, il faut bien comprendre quel est le problème et quelle est la solution.

Dans cette nouvel article, GRAIN désigne les coupables et les solutions en matière d'alimentation et de crise climatique.

Alimentation et crise climatique : quel est le problème ? Quelle est la solution ?

Le système alimentaire industriel est l'un des facteurs clés du changement climatique : Le système alimentaire industriel est responsable de plus d'un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre. La majeure partie de cette pollution provient de l'élevage intensif de bétail pour la viande et les produits laitiers, de l'énorme gaspillage de nourriture, de notre dépendance au commerce mondial plutôt qu'aux aliments d'origine locale, de l'accaparement des terres et de la déforestation pour l'expansion de grandes plantations, et de l'utilisation massive de pesticides et d'engrais chimiques [2].

L'alimentation est un pouvoir : Ce n'est pas la faute des agricultrices et des agriculteurs. C'est celles des entreprises. Ce sont elles qui gèrent le système alimentaire industriel en fonction de leurs propres intérêts financiers. Non seulement les lois, réglementations et subventions renforcent le système alimentaire industriel, mais en outre l'influence des entreprises sur les gouvernements et les agences internationales conduit à l'inaction en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les entreprises agroalimentaires ont recours au greenwashing et à de fausses solutions telles que les « compensations » pour se créer de nouvelles sources de revenus tout en sapant les vraies solutions que sont l'agroécologie et la souveraineté alimentaire.

La géographie de l'injustice : La plupart des émissions de GES liées à l'alimentation proviennent de pays où l'agriculture est dominée par des exploitations productrices de viande et de produits laitiers et par des grandes plantations de cultures d'exportation, comme le soja, le maïs hybride et le palmier à huile. Le Brésil, les États-Unis ou la Nouvelle-Zélande en fournissent des exemples. Ces territoires produisent des excédents qui alimentent la surconsommation de viande et d'aliments transformés, souvent par le biais du commerce international, tout en détruisant les systèmes alimentaires locaux et sains par l'accaparement des terres ou le dumping. Ce système est enraciné dans le colonialisme et perpétué par les accords dits de libre-échange, à tel point que le commerce représente aujourd'hui 20% des émissions liées à notre alimentation. Les exploitations agricoles industrielles représentent plus de 70% des terres agricoles et de l'eau utilisées dans le monde, alors qu'elles ne nourrissent que 30% de la population mondiale [2].

Des répercussions plus vastes : Le système alimentaire industriel est également l'une des principales causes de l'effondrement de la biodiversité, de la diminution et de la pollution des nappes phréatiques, de la dégradation des sols, de la déforestation et de l'exploitation de la main-d'œuvre. Il est une source majeure de problèmes de santé causés par les pesticides et la consommation d'aliments ultra-transformés. Et comme ce système est structuré de manière à générer des bénéfices pour les entreprises, on peut constater que des centaines de millions de personnes souffrent de la faim, alors même qu'on enregistre d'importants excédents alimentaires par ailleurs. Jour après jour, les entreprises étendent leurs activités et leurs marchés en détruisant et en criminalisant les systèmes alimentaires locaux, en empêchant les communautés d'utiliser leurs propres terres, leur eau, leurs semences et leurs pratiques traditionnelles et en les évinçant de leurs territoires. Elles laissent les populations à la merci d'investisseurs qui, depuis leurs lointaines salles de conférence, décident de ce qui est cultivé et de qui reçoit la nourriture. Les conséquences de cette situation s'aggravent à mesure que la crise climatique exerce une pression croissante sur la production alimentaire mondiale [3] [4].

La solution réside dans la souveraineté alimentaire : Nous pouvons lutter contre le changement climatique en nous attaquant à la principale source d'émissions liées à l'alimentation, tout en veillant à ce que les populations aient un accès suffisant à des aliments nutritifs et à ce que les communautés puissent conserver leurs moyens de subsistance. En ce qui concerne la viande et les produits laitiers, nous devons mettre fin à l'élevage industriel à grande échelle et passer à des systèmes de production locaux et diversifiés qui fournissent à la population une quantité modérée de viande et de produits laitiers, en utilisant des sources d'alimentation locales. Nous pouvons réduire le gaspillage alimentaire et les kilomètres alimentaires en créant des liens plus directs entre les personnes qui produisent et celles qui consomment, en démantelant les accords de libre-échange et en veillant à ce que les réglementations et les politiques soutiennent les systèmes de production et de commercialisation agroécologiques gérés par les paysans et paysannes et qui les protègent contre le dumping des importations. Ces mesures, ainsi qu'un contrôle accru des territoires par les communautés, permettront également de freiner la déforestation. Enfin, nous pouvons éliminer progressivement les engrais chimiques grâce à une transition massive vers des pratiques agroécologiques qui renforcent la santé des sols et y maintiennent le carbone [5].

L'agroécologie paysanne dès maintenant : Des preuves scientifiques montrent que l'agroécologie est mieux à même d'assurer la sécurité alimentaire et la nutrition des communautés dans la plupart des régions du monde que les stratégies de type « révolution verte »[6]. Ceci se traduit par un ensemble d'initiatives : rotations et mélanges de cultures, production végétale et animale intégrée, agroforesterie, intrants organiques, semences adaptées aux conditions locales, connaissances traditionnelles et bonnes stratégies de gestion des sols et de l'eau. Mais l'agroécologie est bien plus qu'un ensemble de techniques. Il s'agit d'une approche du travail agricole et de l'approvisionnement alimentaire ancrée dans le territoire, les connaissances et la culture. Elle doit être dirigée par les paysans et paysannes afin que le pouvoir et la vision restent entre les mains des petites exploitations, en particulier des femmes.

Confier le contrôle aux communautés : La lutte contre le changement climatique dans et à partir de nos systèmes alimentaires doit garantir que les communautés ont le contrôle de leurs territoires et que ce sont les producteurs et productrices alimentaires, et non les entreprises, qui définissent les politiques. De nombreuses initiatives sont actuellement prises par des mouvements sociaux, parfois soutenus par les autorités publiques, pour nous faire avancer dans la bonne direction. Les actions visant à briser la domination des entreprises dans les différents maillons de la chaîne alimentaire, à renforcer les marchés locaux, à redistribuer les terres, à créer des réserves alimentaires et des systèmes de sécurité sociale alimentaire, à démanteler le régime commercial actuel, à promouvoir les systèmes de semences paysannes et à donner des moyens d'action aux personnes travaillant dans le secteur agroalimentaire sont autant d'étapes cruciales. En fin de compte, seul le contrôle communautaire des ressources, des systèmes et des connaissances nous permettra de disposer de systèmes alimentaires résilients face au changement climatique et fondés sur la justice.

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[1] C. Costa et al. « Roadmap for achieving net-zero emissions in global food systems by 2050 », Scientific Reports, 12, 15064, 2022 :
https://doi.org/10.1038/s41598-022-18601-1 ;
UNEP, « Driving finance for sustainable food systems : A roadmap to implementation for financial institutions and policy makers, » avril 2023 :
https://www.unepfi.org/publications/driving-finance-for-sustainable-food-systems/
[2] ETC Group, « Small scale farmers and peasants still feed the world », janvier 2022 :
https://www.etcgroup.org/files/files/31-01-2022_small-scale_farmers_and_peasants_still_feed_the_world.pdf
[3] Groupe international d'experts sur les systèmes alimentaires durables, « De l'uniformité à la diversité : Changer de paradigme pour passer de l'agriculture industrielle à des systèmes agroécologiques diversifiés », 2016 :
https://ipes-food.org/_img/upload/files/Uniformiteala%20Diversite_IPES_FR_Full_web.pdf
[4] Forbes' Global 2000.
[5] Xiaoming Xu et al., « Global greenhouse gas emissions from animal-based foods are twice those of plant-based foods », Nature Food (2), 2021 :
https://www.nature.com/articles/s43016-021-00358-x ;
Jingyu Zhu, « Cradle-to-grave emissions from food loss and waste represent half of total greenhouse gas emissions from food systems », Nature Food (4), 2023 :
https://www.nature.com/articles/s43016-023-00710-3 ;
Mengyu Li et al., « Global food-miles account for nearly 20% of total food-systems emissions » Nature Food (3), 2022 :
https://www.nature.com/articles/s43016-022-00531-w ;
Stefano Menegat et al., « Greenhouse gas emissions from global production and use of nitrogen synthetic fertilisers in agriculture », Scientific Reports, 2022 :
https://www.nature.com/articles/s41598-022-18773-w
[6] Guy Faure et al, « What agroecology brings to food security and ecosystem services : a review of scientific evidence », Desira-Lift, février 2024,
https://agroecology-coalition.org/wp-content/uploads/2024/02/DeSIRA-LIFT-Knowledge-brief4-Scientific-Evidence-for-Agroecology.pdf

https://grain.org/fr/article/7131-nouvelle-affiche-sur-l-alimentation-et-la-crise-climatique

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Comment aider les petits États insulaires ?

4 juin 2024, par Michel Gourd — ,
Victimes de l'utilisation mondiale des énergies carbonées, les petits États insulaires en développement cherchent désespérément la manière de faire comprendre au reste de la (…)

Victimes de l'utilisation mondiale des énergies carbonées, les petits États insulaires en développement cherchent désespérément la manière de faire comprendre au reste de la planète que leurs économies et même leurs survies sont en jeux dans la lutte au changement climatique.

Le 20 mai, un gigantesque iceberg de 380 kilomètres carrés appelé A-83 s'est détaché de la banquise en Antarctique. C'est le troisième événement de ce type au cours des quatre dernières années dans cette région. La perte continue de glace en Antarctique est une preuve tangible que le réchauffement climatique entraîne l'élévation du niveau de la mer. Les petits États insulaires sont en première ligne de ces impacts dévastateurs. Ce vêlage mettait donc la table pour la 4e Conférence internationale sur les petits États insulaires en développement (SIDS4), qui s'est tenue à Antigua-et-Barbuda du 27 au 30 mai. Son thème était, « Tracer la voie vers une prospérité résiliente ». Plus de 4000 participants et une vingtaine de dirigeants et ministres de plus de 100 pays s'y sont ainsi réunis. Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres a dénoncé lors de cette rencontre une situation obscène ou ces petits États insulaires en développement payaient pour la compétition entre les grandes économies et la soif de profits des industries fossiles.

En première ligne des crises mondiales

Il y a une quarantaine de petits États insulaires en développement (PEID) membres des Nations Unies. Une vingtaine d'autres sont associés à des commissions régionales [EN]. Principalement situées dans le Pacifique, l'Atlantique, les Caraïbes, la mer de Chine et l'océan Indien, ils totalisent environ 65 millions d'habitants, sur moins de 0,5 % de la surface du globe. Bien qu'ils contribuent à moins de 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ils n'en sont pas moins en première ligne des crises mondiales créées par le changement climatique qui menacerait les trois quarts de leurs récifs coralliens. Non seulement les ouragans, les inondations et les sécheresses les touchent de manière disproportionnée, mais la montée du niveau de la mer pourrait même en faire disparaître plusieurs tels les archipels Tuvalu, de Nauru, des Kiribati, les îles Marshall et les Maldives.

Réduire les émissions de carbone

Le programme d'action adopté à Antigua-et-Barbuda met en lumière que les efforts de ces États insulaires seront vains sans une action urgente pour augmenter le financement climatique et mettre en œuvre l'Accord de Paris. La présidente des Îles Marshall, Hilda Heine, a déclaré lors de la rencontre qu'il fallait un changement radical dans la volonté politique, en particulier de la part des pays les plus développés du G20, de réduire les émissions de carbone. « C'est le début d'un sprint de 10 ans et nous espérons qu'il n'y aura pas de frein sur cette voie de la résilience partagée », a mentionné la Vice-secrétaire générale, Amina J. Mohammed, qui a affirmé que les perspectives de développement se sont détériorées ces quatre dernières années pour ces États insulaires. « Sans le soutien total de la communauté internationale, les conséquences pourraient être de très vaste portée pour eux ».

Une situation catastrophique

Non seulement ces pays disparaissent lentement sous les eaux, mais le Secrétaire général des Nations Unies a affirmé lors de cette rencontre que l'architecture financière mondiale actuelle, qui n'est pas à la hauteur des attentes des pays en développement en général, l'est encore moins pour eux. Croulant sous les dettes, l'économie de plusieurs de ces petits États insulaires tournerait à vide en raison des conséquences du changement climatique. Une partie d'entre eux sont de plus exclus de l'aide internationale et des prêts préférentiels des banques de développement, car classés comme pays à revenu intermédiaire ou supérieur. La conséquence en est donc qu'ils doivent payer davantage pour le service de leur propre dette qu'ils n'investissent dans leurs soins de santé et l'éducation, nuisant ainsi à leur développement.

Mobiliser la justice internationale ?

Le Tribunal international du droit de la mer a émis le 21 mai dernier un avis consultatif sur le changement climatique et le droit international. Dans cet avis unanime, les membres de ce Tribunal ont confirmé la relation entre la mer et le climat. C'est la Commission des petits États insulaires sur le changement climatique et le droit international (COSIS 2), qui a soumis cette demande en décembre 2022. Elle voulait clarifier les obligations des États parties à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM) au sujet du changement climatique. Ce tribunal a conclu que les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans l'atmosphère constituaient une pollution du milieu marin. Les États parties à la CNUDM auraient donc des obligations de diligence élevée pour prendre toutes les mesures nécessaires afin de réduire, maîtriser et prévenir la pollution marine due aux émissions de GES. Ceux-ci devraient aussi s'efforcer d'harmoniser leurs politiques à ce sujet.

La Cour européenne des droits de l'homme, avait rendu en avril un jugement contraignant contre la Suisse qui aurait manqué à son obligation de mettre en œuvre des mesures suffisantes pour lutter contre le changement climatique. Ces cours internationales, et d'autres qui sont actuellement saisies à ce sujet, pourront-elles apporter plus de justice et de protection pour ces petits pays insulaires qu'ils n'en ont eu jusqu'à maintenant ?

Michel Gourd

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