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Budget 2024-2025 – Discours M. Haroun Bouazzi (député de Québec solidaire - Maurice-Richard)

Budget 2024-2025 – Discours de M. Haroun Bouazzi (député de Québec solidaire - Maurice-Richard). Discours prononcé le 14 mars 2024. Vidéo produit par le service d'information de l'Assemblée nationale.
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Transition énergétique : au gouvernement de « changer d’attitude »

Des groupes environnementaux et des groupes citoyens locaux dénoncent les méthodes nuisibles du gouvernement du Québec en matière de développement industriel et s'inquiètent de ce qu'elles impliquent pour le respect de la réglementation environnementale et des mécanismes de consultation publique. Le projet Northvolt n'en est que le plus récent exemple.
Les groupes réitèrent leur demande d'assujettir le projet au processus d'évaluation environnementale, qui comprend la tenue d'un BAPE pour l'ensemble du projet de méga-usine de batteries, afin de rétablir la confiance du public et de répondre à ses nombreuses et légitimes questions.
Dans le contexte des récentes révélations, ils s'inquiètent aussi de l'intention du gouvernement, telle que récemment communiquée par le ministre de l'Environnement, de revoir les modalités du BAPE.
D'ailleurs, selon un récent sondage Pallas, la méthode du gouvernement afin de développer la filière batterie inquiète aussi la population. 62% se dit « préoccupé » ou « très préoccupé » par les conséquences du développement de la filière batterie sur les arbres, les milieux humides, les terres agricoles et les cours d'eau québécois.
Une tendance lourde et nuisible
Au-delà de Northvolt, les groupes s'inquiètent particulièrement du fait que cette tendance du gouvernement à affaiblir la réglementation environnementale et limiter les occasions de consulter le public ne date pas d'hier et semble au contraire prendre de la vitesse. De plus, les groupes réitèrent l'importance de respecter les droits des peuples autochtones et notamment leur droit au consentement libre, préalable et éclairé.
« On s'attarde récemment à Northvolt, mais nos différentes organisations ont dénoncé de nombreux autres projets partout au Québec dans les dernières années. Des projets qui ont profité de raccourcis et assouplissements permis par ce gouvernement », affirment les groupes environnementaux, dont Équiterre, la Fondation David Suzuki, Greenpeace, Nature Québec et la Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec), citant entre autres la Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure adoptée en 2020 pour la relance post-pandémique et qui est toujours en vigueur.
Danger pour la transition et le dialogue social
Nos organisations soutiennent et œuvrent toutes à accélérer la transition énergétique, mais rappellent que celle-ci doit s'opérer de manière cohérente et dans le respect des lois.
« Les moyens choisis pour la transition énergétique ne doivent pas contribuer à empirer la crise en détruisant les milieux naturels ou agricoles à grande valeur économique, sociale et écologique : des milieux stratégiques qui se font de plus en plus rares et qui sont d'une grande valeur pour la santé et la sécurité de la population », estiment les groupes.
« Il faut cesser de faire du clientélisme et prendre des décisions à la pièce. Il faut cesser d'employer une approche non concertée et axée sur les gains à courte vue. À terme, cette façon de faire a le potentiel de nuire plus qu'aider la transition en polarisant et limitant le dialogue social », concluent-ils.
Respecter des processus démocratiques et prendre le temps de bien faire les choses contribuera à rétablir la confiance du public. Il offrira aussi une meilleure prévisibilité, tant pour la population que pour les promoteurs dont les projets, s'ils sont environnementalement, socialement et économiquement acceptables, se verront ultimement améliorés par le respect de ces processus.
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Budget du Québec 2024 : un prélude à l’austérité

Eric Girard déposait aujourd'hui son 6e plan budgétaire, un budget « exigeant et responsable » selon le ministre des Finances. Après les baisses d'impôt de 2023-2024 et dans un contexte de ralentissement économique, le déficit qui accompagne le budget de 2024-2025 ouvre la voie à des coupes budgétaires qui pourraient venir aussi tôt que l'an prochain.
12 mars 2024 | tiré du site de l'IRIS
https://iris-recherche.qc.ca/blogue/etat-finances-publiques-et-secteur-public/budget-quebec-2024/
Cadre budgétaire
Les revenus s'élèveront à 150,3 G$ en 2024-2025 et les dépenses à 157,6 G$, dont 9,7 G$ iront au service de la dette. Toutefois, comme le gouvernement prévoit aussi une « provision pour éventualités » de 1,5 G$ et versera 2,2 G$ au Fonds des générations, le déficit s'élèvera à 11,0 G$, soit 7,0% des dépenses.
Ce résultat n'étonne pas étant donné le ralentissement économique qu'a connu l'économie québécoise. Le PIB n'a augmenté que de 0,2% en 2023 et de 0,6% en 2024, et la croissance prévue en 2025 est de 1,6%. Une partie de ce déficit est par ailleurs creusé par les intérêts que le gouvernement paie sur sa dette, lesquels ont augmenté à la faveur des hausses du taux directeur pratiquées par la Banque du Canada entre mars 2022 et juillet 2023.
Dans ce contexte, le gouvernement reporte le retour à l'équilibre budgétaire en 2029-2030 (un plan précis sera déposé dans le cadre du budget 2025-2026). Pour y parvenir, la CAQ mise, pour hausser ses revenus, sur la croissance de l'économie et réitère son proverbial objectif de réduire l'écart avec l'Ontario à moins de 10% d'ici 2026, et de l'éliminer à l'horizon 2036.
Pour diminuer ses dépenses, le gouvernement propose d'« optimiser l'action de l'État » à travers différentes mesures qui ne rapporteront que 86,2M$ en 2024-2025, mais 2,9G$ sur 5 ans, dont une révision des aides fiscales aux entreprises de 1G$ durant cette période. Le gouvernement amorcera par ailleurs au printemps 2024 un « examen des dépenses gouvernementales », qui portera tant sur les dépenses fiscales que sur les dépenses des ministères et organismes gouvernementaux.
S'il apparaît opportun de faire le ménage dans les aides fiscales offertes aux entreprises et aux particuliers, l'ambition du gouvernement de réduire son déficit en coupant dans les dépenses des ministères et des organismes gouvernementaux n'augure rien de bon pour les services à la population, qui se remettent à peine du choc de la pandémie, et ce même si le gouvernement insiste sur le fait que les services à la population ne seront pas touchés. Un tel exercice – que le gouvernement a qualifié lors de sa présentation du plan budgétaire de « beaucoup plus large » et « non négociable » – s'apparente d'ailleurs à celui qu'avait fait les libéraux de Philippe Couillard et qui avait donné lieu à des mesures austéritaires dont les effets se font encore sentir.
De plus, cette fixation sur les dépenses permet au ministre des Finances de faire oublier les allègements fiscaux consentis depuis l'arrivée au pouvoir de la CAQ et qui privent le gouvernement d'importants revenus. En effet, la réduction du taux d'imposition des contribuables en 2023-2024 (1,85G$ en 2024) combinée avec l'uniformisation de la taxe scolaire en 2020-2021 (720M$ en 2024) et le congé fiscal pour les grands investissements (158M$ en 2024) représentent une somme annuelle manquante équivalant à 2,7G$ en 2024.
Éducation et santé
Le gouvernement se félicite des nouvelles dépenses prévues pour l'éducation, l'enseignement supérieur, la santé et les services sociaux, qui s'élèvent à 1,1G$ en 2024 2025. 222,5M$ sont entre autres prévus pour assurer le maintien et la qualité des soins et des services aux aînés, dont 116,2M$ pour les services de soutien à domicile ; 180,9M$ pour soutenir la réussite des élèves, dont 150,5M$ vont au soutien des élèves en difficulté pour le retour en classe ; 79,5M$ pour assurer l'attraction et la rétention du personnel scolaire ; et 34,5M$ pour promouvoir la réussite aux études supérieures.
Étant donné l'état actuel des services publics, autant dire que le gouvernement ne fait qu'assurer le minimum requis pour maintenir les services qui sont déjà en très mauvais état. Par exemple, nous avons calculé que les dépenses dans le système d'éducation doivent augmenter d'au moins 7 % pour suivre la croissance des coûts et le budget 2024-2025 prévoit une hausse de 7,6%.
Du côté de la santé et des services sociaux, la croissance des dépenses est de 5,3%, soit une augmentation de 2,7G$. Cela reflète le résultat des négociations avec le secteur public, mais également quelques nouveaux programmes. Parmi les 360,0 M$ que le gouvernement ajoute afin « d'améliorer l'accès aux soins et aux services et à accroître la fluidité hospitalière », la moitié sera consacré à accélérer le virage numérique du réseau de la santé, ce qui inclut l'utilisation accrue d'intelligence artificielle (IA). Cela s'accorde bien avec le rapport que présentait récemment la firme de consultation McKinsey. Au contraire, une étude de l'IRIS de novembre dernier permettait de voir l'immaturité du secteur de l'IA en santé, et les dangers de dérives associés aux conflits d'intérêts et au manque de transparence.
De plus, bien qu'aucune somme ne soit associée à la mesure, le budget mentionne également que le financement axé sur le patient sera étendu à la médecine, à l'urgence, à la néonatalogie et à la dialyse. En d'autres mots, le gouvernement ouvre la porte à un financement public pour des services de santé privés, comme il l'a fait en 2016 pour les chirurgies avec les cliniques Chirurgie Dix30 inc., et Centre de chirurgie Rockland MD et Groupe Opmédic. Ce choix est problématique. D'un côté, le gouvernement souhaite abolir le recours aux agences privées (car il reconnaît que les déficits actuels des établissements publics de santé sont en bonne partie causés par l'explosion des coûts du personnel de ces agences). De l'autre, il persiste sur la voie de la privatisation des services (chirurgies, mini-hôpitaux privés). Pourtant, les données disponibles pour la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec montrent que le coût des chirurgies réalisées en cliniques privées tend à être plus élevé que dans les établissements publics.
Environnement
Tandis que le Plan québécois des infrastructures (PQI) bonifie de 10% les sommes allouées au réseau routier pour la période 2024-2034, les investissements en infrastructure de transport collectif ne sont augmentés que de 0,29%. Ce faisant, le gouvernement approfondit le déséquilibre des investissements en transport, la part attribuée au transport collectif représentant 28 % contre 72% pour le réseau routier.
Le gouvernement annonce par ailleurs la fin graduelle des subventions à l'achat d'un véhicule électrique. Une stratégie réfléchie de transfert modal de la voiture vers le transport en commun se serait assurée d'investissements conséquents en transport collectif à titre de nouvel incitatif à une mobilité plus durable.
Lors de son point de presse, le ministre des Infrastructures Jonatan Julien concluait : « les choix en matière d'infrastructures sont alignés avec les priorités du gouvernement ». Le seul mérite de la stratégie de la CAQ en matière de financement du transport est ainsi sa clarté : le gouvernement ne cache pas son désintérêt envers le transport collectif alors qu'aucune nouvelle source de financement n'est prévue pour combler les déficits des sociétés de transport en commun du Québec. En dégageant de nouvelles sources de revenus telles qu'une contribution des entreprises – par exemple, en région parisienne, les entreprises de plus de 10 salariés financent 48% de l'exploitation réseau –, le gouvernement pourrait s'éloigner du principe d'utilisateur-payeur et favoriser le recours au transport collectif.
Par ailleurs, les mesures pour remédier à la crise écologique brillent par leur absence. Les annonces en environnement se limitent à un maigre 20,8 M$ et sont toutes affectées à l'adaptation aux changements climatiques : SOPFEU, soutien aux sinistres, parcs naturels et gestion de la faune.
Le plan pour une économie verte (PEV) est pour sa part bonifié de 3%, pour s'établir à 9,3 G$ pour la période 2024-2029. Le PEV renferme la stratégie de la CAQ en matière de transition écologique. La mise en œuvre de cette transition devra donc se contenter de 1,86 G$ par année, ce qui représente environ 1% des dépenses totales de l'État québécois.
Pour le gouvernement de la CAQ, la crise écologique se réduit à une conjoncture économique favorable que le Québec doit saisir pour rattraper l'Ontario sur le plan de la richesse. Le fonds Capital ressources naturelles et énergie, destiné à la filière batterie à l'exploitation minière, est en ce sens bonifié de 500 M$ et atteint désormais 1,5 G$. Dans la mesure où l'Agence internationale de l'énergie prévoit que 90% des batteries produites dans le monde en 2030 propulseront des voitures individuelles, et moins de 3,5% des autobus, ces investissements ne vont que permettre le retour en force de l'industrie automobile au Québec et alimenter une politique industrielle de courte vue.
Dans les 4 dernières années, le Québec a diminué en moyenne ses émissions de GES de 0,75 mégatonne par année. Or, pour parvenir aux objectifs de réduction de GES fixés pour 2030, le rythme moyen de réduction annuel devra augmenter d'un facteur de 4 et atteindre 3,25 tonnes par année. Avec seulement 1,86 G$ par année affecté au PEV, ce scénario de réduction de GES est tout simplement irréaliste. Tout indique que la CAQ rejoindra les gouvernements précédents qui ont failli à remplir les objectifs climatiques du Québec.
Économie et revenus
L'obsession du gouvernement Legault à « rattraper le niveau de richesse » de l'Ontario teinte à nouveau ce budget. Des dizaines de petites mesures totalisant 441,4M$ en 2024-2025 (1,9G$ sur 5 ans) sont prévues afin d'appuyer la croissance de l'économie. Les secteurs de la construction et de la foresterie sont les plus grands bénéficiaires cette année, tout comme le gouvernement lui-même qui investit pour « poursuivre l'accélération de la transformation numérique gouvernementale ». Si l'on peut mettre en doute la pertinence de certaines mesures (par exemple celle visant le secteur aérospatial en contexte de lutte aux changements climatiques ou la faiblesse du soutien au secteur agricole), c'est surtout l'idée même de rattrapage qui doit être remise en perspective.
Dans une récente publication, nous avons montré que lorsqu'on compare le pouvoir d'achat (plutôt que le PIB par habitant), les Québécois·es ont des revenus équivalents à ceux des Ontarien·ne·s. Nos calculs permettent aussi de conclure qu'à structure industrielle égale, la productivité du travail est plus élevée au Québec qu'en Ontario. Or, une des particularités du tissu industriel québécois est l'importance du secteur public, où travaillent une majorité de femmes. Les dépenses dans ce secteur contribuent à la vigueur de l'économie, ce que le gouvernement néglige toujours de dire.
Par ailleurs, le ministre Girard était particulièrement fier d'annoncer la fin de la disparité de traitement pour les personnes invalides de plus de 65 ans qui voyaient leurs revenus diminuer considérablement lorsque leurs prestations d'invalidité s'arrêtaient. À partir de janvier 2025, ils pourront bénéficier d'une pleine rente de retraite grâce à la marge de manœuvre financière du Régime des rentes du Québec (RRQ). Cela se fera donc à coût nul pour le gouvernement. Bien que les personnes touchées aient de quoi se réjouir, après des années de mobilisation, elles devront attendre encore plusieurs mois avant de voir leurs revenus s'améliorer et devront donc continuer de vivre dans la précarité.
Logement
Les mesures visant à « favoriser l'accès au logement » s'élèvent à 196,7M$ en 2024-2025. De cette somme, 60,3M$ servent à poursuivre l'aide offerte dans le cadre du programme Allocation-logement et 85,5M$ sont consacrés à maintenir le parc de logements sociaux. Le gouvernement continue autrement dit d'asphyxier le secteur du logement social à un moment où les ménages à faible revenu sont aux prises avec des hausses importantes de loyer qui en poussent plusieurs à la rue. Notons qu'un montant de 1,5M$ est censé servir à accroître le parc de logements étudiants.
Ce déficit d'investissements dans les logements dits hors marché privé est conséquent avec l'approche du gouvernement Legault depuis son arrivée au pouvoir. En effet, le nombre de logements sociaux, communautaires et abordables a augmenté beaucoup moins rapidement depuis que la CAQ est en poste, passant d'une hausse annuelle moyenne de 2130 entre 2006 et 2018, à 1394 entre 2018 et 2022 selon les données de la Société d'habitation du Québec.
Petite enfance
Pour les services de garde, aucune somme supplémentaire n'est prévue cette année, tandis que 18M$ sont prévus en 2025-2026. On peut ainsi déduire que le gouvernement maintient sa stratégie axée sur les subventions aux garderies privées plutôt que la création de CPE. Or, en ne créant pas de réelles nouvelles places, les conversions n'ont pas eu d'effet sur le nombre d'enfants en attente. La liste s'est allongée en 2023 pour atteindre 35 549 enfants en attente en décembre, selon les données rendues disponibles par le ministère de la Famille.
…
En somme, alors que plusieurs s'inquiètent face à l'ampleur du déficit que prévoit le budget de 2024, c'est surtout les mesures à venir, qui risquent de priver durablement le Québec des moyens de surmonter la crise écologique et d'améliorer la qualité de vie de la population, dont il faut se méfier.
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L’incontournable besoin d’une réforme en profondeur de notre système d’éducation

On le répète ad nauseam, notre système d'éducation est en piteux état. Il y a même un consensus dans la population à ce sujet. Aussi, depuis au moins 2016, de nombreuses voix ont réclamé la tenue d'un nouvelle Commission Parent 2.0 (en référence à la Commission royale d'enquête sur l'enseignement dans la province de Québec de 1961 à 1964) ou des États généraux sur l'éducation, comme ceux de 1995-1996.
18 mars 2024
Une demande répétée depuis 2016
Parmi elles, le chroniqueur Normand Baillargeon, les sociologues de l'éducation Guy Rocher et Claude Lessard, le politologue Jean Bernatchez, l'éminent chercheur en éducation Maurice Tardif, l'éthicien Guy Bourgeault, le philosophe Georges Leroux, le blogueur et enseignant Sylvain Dancause, le Parti Québécois, Québec Solidaire, des organisations comme Profs en mouvement, L'école ensemble, la Fédération des professionnelles et professionnels de l'éducation du Québec, la Fédération autonome de l'enseignement, la Fédération des éducateurs physiques du Québec et des centaines d'autres personnes individuellement ou collectivement. Debout pour l'école n'est jamais intervenu sur cette question, jugeant cette demande peu réaliste vu la conjoncture, mais ne s'en est jamais expliqué non plus. Il est temps de réagir à cette demande.
Un non ferme de la part du premier ministre, dont l'éducation est soi-disant la priorité
En juin 2019, le premier ministre a répondu clairement qu'il n'organiserait rien de semblable, le temps était à l'action. Comme c'est son parti qui est au pouvoir et qui le sera peut-être encore (qui sait ?) durant quelques années, au moins jusqu'en oct. 2026 (30 mois), on ne peut rien attendre de ce côté. À moins que, sous la pression, avec une visée électoraliste, en 2026, il accepte cette demande. Mais alors on peut être convaincu qu'il verra à contrôler le processus s'il est encore au pouvoir. Alors que faire ?
Le Rendez-vous national sur l'éducation !?
Debout pour l'école s'est plutôt engagé, après avoir mené des consultations sur les priorités pour améliorer grandement notre système d'éducation (de février à juin 2024), à produire un Livre blanc citoyen et à le diffuser pour y obtenir des adhésions (partielle ou totale), puis organiser sur cette base un vaste Rendez-vous national coalisant des centaines d'organisations et de personnes (représentant environ ½ million de personnes) pour imposer au gouvernement de mettre en œuvre les priorités dégagées dans le Livre blanc par les citoyennes, citoyens et organisations y adhérant.
À la rencontre du Comité directeur de Debout pour l'école, fin janvier 2024, ce projet a été quelque peu remis en question et il fut décidé de poursuivre la réflexion sur comment changer le rapport de forces entre les forces progressistes en éducation et le pouvoir politique pour lui imposer la nécessité d'une réforme en profondeur. Nous en sommes encore là et les discussions doivent se poursuivre.
Quant à moi, il m'apparait de plus en plus irréaliste que Debout pour l'école réalise ce coup de force d'imposer au gouvernement d'organiser une réflexion d'envergure sur l'éducation qui aboutirait à de solides solutions en particulier sur nos priorités. Nous n'avons ni les énergies militantes suffisantes, ni la crédibilité assurée hors des milieux progressistes, ni même le leadeurship du monde de l'éducation. Nous devons donc dès maintenant penser la réalisation de l'exigence d'une réforme en profondeur de notre système de concert avec les organisations et personnes les plus impliquées dans ce projet et trouver la formule adaptée à la conjoncture politique des deux prochaines années.
Trouver la bonne formule : démocratique et sérieuse
D'abord, selon Guy Rocher et Claude Lessard, afin de mener le travail nécessaire pour réformer en profondeur notre système, il faut trouver une formule organisationnelle garante de sérieux, de professionnalisme et de transparence non contrôlée par le pouvoir politique, quel qu'il soit, mais en particulier par celui de la CAQ. De telles formules existent : Claude Lessard (ex-président de Conseil supérieur de l'éducation) a examiné des options possibles (voir Annexe 1) dont des États généraux citoyens.
Compte tenu de la dissolution par la CAQ du Conseil supérieur de l'éducation pour l'éducation obligatoire, on pourrait demander à chacun des cinq centres de recherche en éducation réunissant des centaines de chercheurs dans les divers domaines de l'éducation de s'investir dans ce travail en dégageant, par exemple, pendant deux ans deux chercheurs qui seraient rémunérés par l'État [1]. Une douzaine de personnes pourrait proposer, en prenant en compte les priorités dégagées dans la consultation de Debout pour l'école, des réformes sur des enjeux précis et les modalités pour qu'elles soient mises en place au cours des cinq-six prochaines années. Ne pourrait-on aussi s'inspirer des conférences de consensus faites par le CRETEC ?
En admettant qu'on trouve un modèle organisationnel répondant aux critères ci-dessus, il faudra réunir un nombre important d'organisations et de personnalités pour exiger du gouvernement le soutien technique et le financement nécessaire pour effectuer ce travail.
Les élections étant en octobre 2026, le début de 2026 serait un bon moment pour faire connaitre cette exigence et avoir l'aval du gouvernement caquiste (par calcul électoraliste), étant donné que le PQ veut qu'une commission d'enquête soit mise sur pied et en fera la promotion. On pourrait aussi tenter de convaincre les trois partis d'opposition (PLQ, PQ, QS) qui se sont prononcés sur la nécessité d'une réforme majeure, de se mettre ensemble pour l'exiger et même de faire partie de la coalition.
Rendre publique notre requête : quand, qui et comment ?
Il faut trouver le bon moment pour rendre publique cette exigence et les bonnes organisations et personnes pour la soutenir (je mets une liste préliminaire de personnes à l'annexe 2).
L'essentiel pour l'instant est de voir 1) si la démarche que je propose à titre personnel ici est réaliste et si comme organisation on est prêt à la promouvoir ; 2) si oui, en discuter avec les principaux partenaires possibles (nos ex-partenaires de PÉ et ceux des divers secteurs avec lesquels les membres du CD sont en contact au cours de l'année 2025 et déterminer ensemble le moment où la diffusion de cette exigence sera la plus pertinente et la façon de le faire.
En conclusion
Devant l'ampleur et la complexité des problèmes qui affectent notre système d'éducation, Debout l'école ne peut envisager seule d'exiger une réforme majeure du système et d'obtenir l'aval du gouvernement pour le soutien financier et technique. Aussi l'année 2025 devra être consacrée à travailler à diffuser notre Livre blanc citoyen et ce faisant à recueillir des appuis à cette proposition et ce faisant à obtenir des appuis nationalement et régionalement pour y arriver. Ce qui n'est pas rien. On fera le point en 2026 et décidera alors de la suite du travail. [2]
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[1] En particulier les centres suivants :Centre de recherche en éducation et formation relatives à l'environnement et à l'écocitoyenneté (Centr'ERE) - Centre de recherche et d'intervention sur l'éducation et la vie au travail (CRIEVAT) - Centre de recherche et d'intervention sur la réussite scolaire (CRIRES) - Centre de recherche interuniversitaire sur la formation et la profession enseignante (CRIFPE) -Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ)
[2] Ce texte a reçu un accueil favorable de M. Parazelli (retraité UQAM), Simon Viviers (CRIEVAT), Marc-André Éthier (CRIFPE), Stéphane Allaire (CRIRES), Lucie Sauvé (Centr'ERE), Jean Bernatchez (UQAR). Chantal Pouliot (CRIRES), Claude Lessard (ex- CRIFPE-Ude M) et de Réal Bergeron (UQAT), de M-C. Paret (retraitée UdM), Christiane Blaser (U Sherbrooke) et de Michel Girard.

Éducation : N’oublions les humains derrière le palmarès

Nous le disons depuis des années : une école n'est pas une usine à fabriquer des diplômés ! C'est un milieu de vie où l'instruction s'incarne en différents visages. La classe est un écosystème bien particulier. Le ministre tente de mettre de l'avant une équation voulant que la qualité d'une école, d'une cohorte ou d'un prof soit directement reliée aux résultats de ses élèves ; cette perception est trop simpliste et relève d'une vision comptable et corporatiste à l'image du secteur des affaires qui ne colle pas à la réalité sur le terrain.
Soyons clairs : nous ne sommes pas contre la collecte et l'utilisation de données pour améliorer le réseau scolaire ! Il est important, pour parvenir à des décisions éclairées, qu'elles soient basées sur des informations fiables et utiles. Ce que le « tableau de bord » présenté hier par le ministre Drainville entend réaliser va cependant beaucoup trop loin.
Nier le facteur humain
D'abord, si on en croit le ministre Drainville, les données utilisées permettraient, à terme, d'identifier des classes ou même des élèves « à risque de décrochage » afin de fournir aux profs ciblés des « services » qui permettraient à leurs élèves de « vivre de la réussite ». Il s'agit d'une attaque frontale à l'autonomie professionnelle des profs québécois, qui pourraient voir leur enseignement perturbé par de l'ingérence non sollicitée qui viendrait nier leur expertise et leur expérience au profit de « bonnes pratiques » ou de « recettes » prétendument efficaces. Les enseignantes et les enseignants pourraient se retrouver dans des situations où ils doivent constamment prouver et objectiver leurs actions. Des actions qui, très souvent, ne peuvent être mesurées ou quantifiées parce qu'elles impliquent un facteur humain qui ne se mesure pas et que les simples données ne peuvent expliquer.
De plus, il importe de ne pas écarter des facteurs encore plus importants pour la réussite des élèves, soit les conditions de pauvreté et de l'insuffisance des ressources.

Les dérives de la compétition entre les écoles
L'idée de mettre en compétition des écoles les unes avec les autres pour une position dans un soi-disant « palmarès », basé notamment sur les résultats des élèves, ouvre la porte à des larges dérives de manipulation des résultats pouvant avoir des conséquences négatives sur les profs mais, surtout, sur les élèves. L'évaluation ainsi que leurs résultats à ces dernières ne sont pas des récompenses ou des punitions. Il s'agit de diagnostics factuels de ce qu'ils savent ou non, de ce qu'il leur reste à apprendre, à acquérir, pour obtenir peut-être un jour un diplôme qui vaut plus que le papier sur lequel il est écrit.

Pour un gouvernement qui se targue de suivre les bonnes pratiques en gestion, le projet de tableau de bord du ministre en oublie un principe phare : la loi de Goodhart, qui stipule que « lorsqu'une mesure devient un objectif, elle cesse d'être une bonne mesure. » Si le ministre croit que les directions, ou d'autres intervenants, vont se retenir de triturer les résultats scolaires afin de mieux paraître dans le grand palmarès national, c'est qu'il vit dans un monde bien éloigné du plancher des vaches... Rappelons au passage les nombreuses interventions qu'a dû faire la FAE au fil des années pour que cesse le « gonflage des notes » par les directions d'établissement.
Finalement, le tableau de bord du ministre Drainville ouvre la porte à la création de ghettos scolaires, où des parents se verraient mis devant le choix déchirant d'envoyer leurs enfants dans leur école de quartier où les résultats – selon les indicateurs sélectionnés par le ministère – sont mitigés, ou de déménager à quelques coins de rue où telle autre école se positionne mieux dans le sacro-saint palmarès officiel. Certes, cette situation se voit déjà dans certains milieux, mais le projet du ministre ne pourra faire autrement que d'en généraliser la pratique.
Renier les principes fondateurs de l'école publique
Il y a quelque cinquante ans, nous nous sommes collectivement dotés d'un système d'éducation public qui s'appuyait sur des principes de base auxquels nous croyons toujours : l'égalité des chances, l'accessibilité universelle, la gratuité, et l'éducation comme instrument d'émancipation.
De placer, officiellement et publiquement, des écoles, des classes ou des enseignantes les unes contre les autres avec un classement digne d'une ligue sportive témoigne d'un gouvernement qui renie ces principes fondateurs et dont l'utilitarisme avoué en question d'éducation est déplorable.
Écoutez l'entrevue de Mélanie Hubert à Radio-Canada.
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Santé Québec Inc.

Le 9 décembre 2023, le gouvernement de la CAQ a forcé l'adoption du projet de loi 15 du ministre de la Santé, Christian Dubé, et ce, sans l'appui d'aucun des député-es des trois groupes d'opposition de l'Assemblée nationale. Cette mégaréforme, d'une ampleur jamais vue, s'impose au réseau public de la santé et des services sociaux, notamment avec la mise en place de l'agence Santé Québec.
Tiré de Le point syndical. Illustration d'Alain Reno
Cette nouvelle agence de gestion, pilotée de Québec, constituera l'ultime fusion de l'ensemble des établissements de santé et de services sociaux du Québec. Le projet de loi 15, parmi les plus massifs de l'histoire, n'apporte pourtant aucune réponse réelle aux enjeux de l'heure du système de santé, qu'il s'agisse du manque d'accessibilité, des pénuries de personnel ou de la privatisation croissante du réseau.
À terme, Santé Québec deviendra le plus gros employeur au Canada, avec ses 350 000 salarié-es. Il faut le dire : il s'agit là de l'aboutissement d'une logique de centralisation ayant guidé presque tous les ministres qui ont précédé Christian Dubé. Depuis 2005, tous les établissements ont vécu des fusions à plusieurs reprises pour former des ensembles toujours plus grands. Chaque vague a mené à des prises de décisions de plus en plus éloignées du terrain, à une déshumanisation des soins et à une dégradation des conditions de travail du personnel. Difficile de voir comment on pourra améliorer la façon de faire des relations de travail en poussant cette même logique à l'extrême !
Des « top guns »
Christian Dubé doit annoncer prochainement l'identité des personnes qui seront nommées à la tête de Santé Québec. Le ministre a déjà évoqué qu'il souhaitait pour cela recruter des « top guns », sans plus de détails. Les médias d'information nous ont appris que ces personnes bénéficieront effectivement de salaires de « top guns » semblables à ceux du secteur privé. On sait aussi que les 350 000 membres du personnel ne font pas partie de cette élite aux yeux du ministre, qui ne leur réserve à peu près aucune place au sein des instances décisionnelles.
Réforme dénoncée
La réforme Dubé est dénoncée de plus en plus fortement non seulement par le personnel et par les syndicats, mais également par les organismes communautaires, par de nombreux médecins et par plusieurs experts du milieu. Parmi les grandes préoccupations : la privatisation des soins et des services qui se généralise.
Plus les années passent, plus la marchandisation de la santé et des services sociaux se présente comme un fait accompli au Québec. Le ministre Dubé ne s'en cache pas : la CAQ entend élargir encore davantage les recours au secteur privé. Cela aggravera immanquablement les pénuries de personnel dans le secteur public, non seulement parce que les conditions de travail n'y sont pas aussi avantageuses, mais aussi parce que les cas plus lourds et plus compliqués seront toujours traités dans le secteur public. D'ailleurs, si une complication survient en clinique privée lors d'une opération « simple », ce sont toujours les hôpitaux du secteur public qui sont appelés à prendre la relève. breux médecins et par plusieurs experts du milieu. Parmi les grandes préoccupations : la privatisation des soins et des services qui se généralise. Plus les années passent, plus la marchandisation de la santé et des services sociaux se présente comme un fait accompli au Québec. Le ministre Dubé ne s'en cache pas : la CAQ entend élargir encore davantage les recours au secteur privé. Cela aggravera immanquablement les pénuries de personnel dans le secteur public, non seulement parce que les conditions de travail n'y sont pas aussi.
En asphyxiant les services publics au nom du néolibéralisme et de l'austérité budgétaire, les gouvernements ont stimulé la création d'un marché privé parallèle et par le fait même, d'un système à deux vitesses qui prend de l'ampleur. À présent, celles et ceux qui en ont les moyens se voient trop souvent offrir des soins et des services non médicalement requis pendant que d'autres sont forcés d'attendre leur tour, au prix d'une possible dégradation de leur état de santé.
La fausse solution du privé
La recette est connue… En laissant dépérir le secteur public, le privé finira par s'imposer comme une voie rendant inéluctable le développement de services à deux vitesses. N'est-ce pas exactement ce que prône le ministre Dubé ? Au lieu de tout mettre en œuvre pour que le secteur public remplisse entièrement sa mission, Christian Dubé déclarait en point de presse, le 9 décembre 2023 : « On s'est engagé dans le projet de loi no 15 à ce qu'une personne qui, par exemple, ne serait pas capable d'être servie ou soignée dans un délai raisonnable pour une chirurgie, [puisse être envoyée] ailleurs dans le réseau ou même au privé. »
En 2024, la CSN entend déployer tous ses efforts pour contrer ce glissement dangereux vers la privatisation, car le privé est déjà plus présent que jamais dans le réseau.
À l'heure actuelle, la première ligne – l'accès aux services – est largement contrôlée par l'entreprise privée, notamment par des médecins-entrepreneurs, voire par des entrepreneurs tout court. Bien qu'il soit couvert par l'assurance-maladie, le modèle des groupes de médecine familiale ne fonctionne pas. Malgré les réformes et les sommes investies depuis des décennies, trop de Québécoises et de Québécois n'ont toujours pas accès à un médecin de famille ni à des services d'urgence mineure les soirs, les nuits ou les fins de semaine. Sans compter qu'un nombre grandissant de médecins choisissent de se désaffilier complètement de l'assurance-maladie pour offrir leurs services uniquement à celles et à ceux qui ont les moyens de se les payer.
Cette situation contribue évidemment aux problèmes des urgences publiques sur lesquelles doivent se rabattre les citoyennes et les citoyens qui n'ont pas de solution de rechange, en soirée et durant la nuit. Ces urgences débordent et les hôpitaux manquent de capacité pour accueillir dignement les patientes et les patients. De nombreux lits y sont occupés par des personnes qui attendent de pouvoir être admises en hébergement de longue durée… parce qu'il manque aussi de places dans les CHSLD publics. Ces établissements doivent de surcroît composer avec des personnes nécessitant de plus en plus de temps de soins. Ils se trouvent d'autant plus sous pression que les services publics en soutien à domicile sont insuffisants. Pourtant, ils sont bien moins dispendieux que l'hébergement…
« Pour la CSN, la plus grande erreur des 40 dernières années a été de confier un rôle toujours plus grand au secteur privé. Pour un vrai changement en santé et dans les services sociaux, il faut mettre fin à cette logique du profit et concentrer tous les efforts à la reconstruction de services publics solides », insiste David Bergeron-Cyr, vice-président de la CSN.
Ce qu'en pense vraiment la population
Au cours de l'automne dernier, la Commissaire à la santé et au bien-être, qui devrait être le chien de garde du réseau public, tenait des groupes de discussion organisés par l'Institut du Nouveau Monde sur l'avenir du système de santé. La consultation doit mener à un rapport qui sera présenté au ministre Dubé. La marchandisation des soins et des services y était abordée sans aucun complexe. On demandait aux participantes et aux participants « d'investir » ni plus ni moins que de l'argent Monopoly dans les différentes priorités d'action afin de déterminer lesquelles sont les plus prometteuses.
Sans aucun doute, il sera très intéressant de consulter le rapport qui découlera de cette consultation, car pour une claire majorité de personnes, la trop grande place déjà occupée par l'entreprise privée dans le secteur fait partie du problème.
La présidente du Conseil central du BasSaint-Laurent–CSN, Pauline Bélanger, a pris part à l'exercice, à titre de citoyenne. « J'espère que le ministre Dubé va être informé de ce qui s'est dit à Rimouski. J'entrais dans la salle un peu à reculons en m'attendant à y trouver des gens plutôt favorables à la privatisation. Or, ça m'a carrément redonné espoir ! Ce que la population veut vraiment n'a rien à voir avec ce que la CAQ dit qu'elle veut. Même les plus jeunes se montraient fortement attachés au réseau public. Le consensus qui s'est dégagé à Rimouski, c'était d'élargir la couverture publique aux soins dentaires et oculaires, de rendre les soins plus humains et d'améliorer les conditions de travail du personnel. »
Le président du conseil central de l'Outaouais, Alfonso Ibarra Ramirez, a pris part au même exercice, à Gatineau. « J'ai hâte de voir le rapport final. À quoi va-t-il servir ? Ça a été un bon exercice citoyen. Bien que la discussion se soit déroulée dans un cadre très défini basé sur des questions dirigées, à la fin des échanges, il était clair que les citoyennes et les citoyens de notre région ne souhaitent pas mettre la privatisation de l'avant. Au contraire, ce qui en est ressorti, c'est un fort attachement au système universel, accessible et gratuit ainsi que la nécessité d'élargir le rôle des CLSC publics et d'améliorer le financement des groupes communautaires. »
Voir les résultats d'un récent sondage sur la privatisation dans le texte intitulé En santé, le privé, c'est non en page 14.
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Abattoirs : Le grand démantèlement d’Olymel

Olymel, le géant québécois de la transformation des viandes, a procédé à la fermeture de six usines en 2023 : un véritable carnage qui affecte plus de 1500 employé-es et qui frappe de plein fouet plusieurs communautés, dont celles de Princeville et de Vallée-Jonction.
Tiré de Le point syndical. Photo : aul-Émile Turmel et Richard Lessard, deux travailleurs de l'usine Olymel de Vallée-Jonction habitant la région. "2023 a été l'une des pires années au Québec pour les travailleurs du secteur de la transformation du porc."
« Moi je vais avoir 67 ans, mais je n'étais pas prêt à arrêter de travailler tout de suite. J'aimais mon travail, j'aimais ce que je faisais, j'aurais continué. Ça me fâche de m'être fait sortir avant d'avoir pu moi-même décider de partir. » Richard Lessard a travaillé 50 ans chez Olymel Vallée-Jonction. Pour lui et pour le millier de travailleuses et de travailleurs de cet abattoir beauceron, la fermeture définitive, le 21 décembre dernier, fut tout un choc. Alain Nolet, le doyen de l'abattoir de Vallée-Jonction, cumulait 52 ans de service. « On avait pris l'habitude d'entendre parler de fermeture chaque fois qu'on négociait une convention collective. Mais là, on est restés bête. Ça m'a beaucoup surpris. J'ai passé ma vie là. » Son collègue, Paul-Émile Turmel, ne s'explique pas la décision d'Olymel. « Personne ne comprend pourquoi on a fermé l'abattoir de Vallée-Jonction. Jusqu'à la fin, la productivité de l'usine dépassait 90 % de sa capacité. »
L'usine de Vallée-Jonction faisait vivre toute une région. À cet effet, le président de la Fédération du commerce–CSN, Alexandre Laviolette, est éloquent : « Si une usine de la taille de celle de Vallée-Jonction avait fermé à Montréal, c'est comme s'il y avait eu 70 000 pertes d'emplois. » Pour François Proulx-Duperré, secrétaire général du Conseil central de Québec Chaudière-AppalachesCSN, cette fermeture est une tragédie pour les syndiqué-es et leur famille, et pour toute la Beauce également. « On n'en voit plus, des fermetures de 1000 personnes, c'est énorme. » Les 300 employé-es de l'usine Olymel de Princeville ont subi le même sort que leurs collègues de Vallée-Jonction : une fermeture précipitée, celle-là en novembre dernier. Ceux-ci craignaient cette fermeture en raison des mauvais investissements de l'entreprise, de la pénurie de main-d'œuvre et de l'effondrement du marché chinois qui absorbait tout le porc d'Olymel. Steve Houle est président du syndicat de l'usine. « Actuellement, 30 à 40 % des travailleurs de Princeville se sont replacés. Certains sont retournés aux études, mais les emplois disponibles, sur rotation sept jours sur sept, sont peu attrayants. Ce ne sont pas les mêmes conditions qu'on avait. »
La mauvaise réputation de l'entreprise n'est plus à faire. Au fil des ans, Olymel a multiplié les attaques pour réduire à néant les syndicats, multipliant les lock-out, imposant des réductions salariales et congédiant des officiers syndicaux. Pour Alexandre Laviolette, l'entreprise n'est pas seulement hostile aux travailleuses et aux travailleurs, mais elle est aussi mauvaise gestionnaire. « Dans un marché en dents de scie comme celui du porc, Olymel a toujours eu une stratégie d'acquisition trop agressive, notamment avec l'achat de toutes les autres usines qui lui ont coûté trop cher. Chaque nouvelle acquisition a mené à des fermetures par la suite. Cette fois-ci, l'élastique lui a pété en pleine face et ce sont les employé-es qui en subissent les conséquences. »
La CSN continue aujourd'hui d'appuyer toutes les personnes mises à pied, nous dit François Proulx-Duperré. « On va accompagner les gens jusqu'au bout, on ne veut laisser personne derrière, les activités du syndicat se poursuivent. On aide aussi les travailleurs étrangers temporaires et les choses avancent bien. » Même si le marché de l'emploi est encore favorable, bien des gens mis à pied devront redoubler d'efforts pour trouver des emplois avec des avantages et des salaires comparables.
L'histoire retiendra que ce sont les batailles acharnées des syndiqué-es CSN de Vallée- Jonction et de Princeville qui ont permis d'améliorer les conditions de travail de tous les employé-es d'Olymel et du secteur de la transformation des viandes au Québec.
* Pour en savoir plus sur l'historique du travail dans les abattoirs d'Olymel, consultez Des héros et des héroïnes de la classe ouvrière à l'adresse suivante : fc-csn.ca/journal-dec23
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Les politiques de l’Alberta jettent de l’huile sur le feu de la crise climatique

Le gouvernement a choisi de ne pas s'attaquer aux dégâts polluants, mais à l'industrie florissante des énergies renouvelables.
14 mars 2024 | tiré de Rabble.ca | Photo : La première ministre de l'Alberta, Danielle Smith (Photo : Alberta Newsroom/Flickr).
L'Alberta est confrontée à unegrave sécheresse, à des pénuries d'eau et à une saison des feux de forêt qui commence maintenant en février ! Tous les scientifiques crédibles et les organisations réputées qui étudient le climat ont fourni des preuves indiscutables que les choses vont empirer en Alberta et dans le monde si nous ne passons pas rapidement des combustibles fossiles aux énergies renouvelables.
Dans un monde plus sain, ceux que nous élisons pour nous diriger feraient tout leur possible pour éviter la catastrophe. Mais nous vivons dans un monde où les considérations économiques à court terme – principalement liées à l'augmentation de la richesse d'une petite minorité – ont la priorité sur tout, y compris notre survie en tant qu'espèce.
En Alberta, cela signifie qu'il faut soutenir le pétrole, le gaz et le charbon et entraver le développement des énergies renouvelables. Quel que soit le parti au pouvoir, le soutien à l'industrie des combustibles fossiles et les attaques contre ceux qui appellent au changement persistent.
La province est marquée par l'exploitation des sables bitumineux, les mines de charbon, le forage et l'infrastructure pétrolière et gazière. Elle est jonchée de puits de pétrole et de gaz orphelins et abandonnés. Le gouvernement a choisi de ne pas s'attaquer aux dégâts de la pollution, mais à l'industrie florissante des énergies renouvelables. Il veut également que les contribuables paient pour nettoyer les anciens puits de pétrole et de gaz qui relèvent de la responsabilité légale de l'industrie.
Au début du mois d'août 2023, le gouvernement de l'Alberta a imposé un moratoire sur tous les nouveaux grands projets d'énergie renouvelable. Il a récemment annoncé de nouvelles réglementations pour les énergies renouvelables, dont certaines sont conçues pour protéger les « les vues de paysages vierges » et les terres agricoles. C'est important, mais lorsque les règles ne s'appliquent qu'aux projets d'énergies renouvelables et non aux opérations de charbon, de gaz et de pétrole beaucoup plus dommageables, polluantes et inesthétiques, il est difficile de les prendre au sérieux. Les règles interdiront également une grande partie de la province aux projets d'énergies renouvelables.
Il impose également une taxe de 200 $ sur les véhicules électriques pour « aider à tenir compte de l'usure des routes et compenser la taxe sur le carburant que les propriétaires de véhicules électriques ne paient pas » (dans une province où de nombreuses personnes conduisent des camions et des VUS lourds et énergivores). Le gouvernement a même envoyé une délégation à la conférence sur le climat de l'année dernière à Dubaï pour promouvoir les combustibles fossiles.
Rien de tout cela n'a même de sens économique. Le monde se tourne rapidement vers les énergies renouvelables, créant un boom économique et de l'emploi, et les développements des combustibles fossiles risquent de devenir des « actifs complètement dévalorisés ».
Sur cette question et sur plusieurs autres, le gouvernement de l'Alberta semble suivre le mouvement MAGA des États-Unis. L'ancien président Donald Trump a déclaré que la première chose qu'il ferait s'il était réélu serait « Drill, baby, drill ».
Ce serait une chose si les compagnies pétrolières tenaient compte de leurs propres recherches et commençaient à changer de cap. Mais ils n'ont pas fait grand-chose, voire rien, pour changer les choses, tout en blâmant les autres pour la crise climatique et en consacrant d'énormes ressources à minimiser ou à nier les preuves, y compris les recherches de leurs propres scientifiques.
Dans une interview accordée à Fortune, le PDG d'ExxonMobil, Darren Woods, payé 35,9 millions de dollars américains en 2022, a rejeté les appels à investir davantage dans les énergies renouvelables, car cela ne correspondrait pas à la « capacité du géant pétrolier à générer des rendements supérieurs à la moyenne pour les investisseurs ». Il a également tenté de rejeter la responsabilité de ne pas s'être attaquée à la crise climatique sur le public, en déclarant : « Les personnes qui génèrent ces émissions doivent être conscientes de ces émissions et en payer le prix. »
Il est triste et horrifiant que beaucoup de gens se soucient si peu de l'humanité qu'ils nous mettraient tous en danger juste pour accumuler des richesses obscènes. Leur argent et leur pouvoir signifient qu'ils sont également en mesure d'influencer ou de contrôler les politiciens et les gouvernements, les politiques éducatives, les tribunaux et les médias. Ceux qui protestent contre les destructions meurtrières sont persécutés et arrêtés, tandis que les responsables des dommages sont dépeints comme des piliers de la prospérité de la société.
Même les gouvernements qui semblent comprendre les crises climatiques et autres crises environnementales et qui ont de bonnes politiques pour y faire face se rangent du côté de l'avidité de l'industrie pour la survie humaine. C'est pourquoi l'argent des contribuables canadiens paie pour un pipeline qui ne devrait pas être construit pendant une crise climatique et dont les coûts sont passés de 4,5 milliards de dollars canadiens à environ 31 milliards de dollars canadiens.
Des gouvernements comme celui de l'Alberta illustrent la nature systémique du problème. Nous devons changer la façon dont nous valorisons tant le travail et les emplois que la nature et les biens et services qu'elle nous fournit. Les politiciens et les gouvernements doivent donner la priorité aux preuves scientifiques plutôt qu'à la cupidité des entreprises et aux résultats des élections à court terme. Ils devraient travailler pour nous, et non pour des sociétés égoïstes, leurs propriétaires et leurs dirigeants.
David Suzuki est scientifique, animateur, auteur et cofondateur de la Fondation David Suzuki. Rédigé en collaboration avec Ian Hanington, rédacteur principal et rédacteur en chef de la Fondation David Suzuki.
Pour en savoir plus, rendez-vous sur davidsuzuki.org.
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L’imposition de visas aux Mexicain.nes : une violation des droits humains – CTI et CDHAL

Déclaration concernant l'imposition d'un visa canadien aux Mexicaines et aux Mexicains
Suite à l'augmentation du nombre de citoyen.nes mexicain.es qui demande l'asile au Canada, le Gouvernement canadien a réimposé l'obligation de visa d'entrée depuis le 29 février sous la pression des États-Unis et du Gouvernement du Québec. Cette mesure aura un impact sur les personnes en quête d'un refuge et d'une nouvelle vie.
13 mars 2024 | tiré du Journal des alternatives
https://alter.quebec/limposition-de-visas-aux-mexicain-nes-une-violation-des-droits-humains-cti-et-cdhal/
Deux réseaux de défense des droits humains, le Centre des travailleuses et des travailleurs immigrant.es (CTI) et le Comité pour les droits humains en Amérique latine, ont initié un appel et demandent aux organisations sociales et aux individus de signer une déclaration contre cette récente mesure. Ils soulignent la responsabilité du Canada dans la crise économique, sociale et de sécurité mexicaine, d'autant plus que le Mexique est l'un des partenaires commerciaux du Canada dans le cadre de l'Accord de libre-échange nord-américain.
La déclaration considère notamment que
l'imposition de visas est une violation directe de la Déclaration universelle des droits humains. Elle ne contribue pas à garantir l'équité entre les personnes de différentes nationalités. Au contraire, elle accroît les inégalités et les conditions de vulnérabilité de milliers de personnes. La demande d'asile est un droit humain et les gouvernements des pays qui peuvent offrir des conditions de sécurité et de vie digne devraient mettre en œuvre des politiques publiques qui garantissent un transit digne à travers les frontières, sans mettre en danger la vie des personnes.
C'est pourquoi les groupes à l'initiative de la déclaration et ceux et celles qui l'appuient invitent le Gouvernement canadien à annuler l'obligation de visa pour les Mexicaines et les Mexicains.
Pour prendre connaissance de la déclaration en français (liens pour les autres versions à venir)
Pour soutenir et ajouter son nom ou le nom d'une organisation
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En Roumanie, pas d’exploitation minière sur un site classé par l’Unesco

La société Gabriel Resources réclamait 6,1 milliards d'euros de dommages et intérêts au gouvernement roumain pour avoir suspendu son projet de développement minier dans les Carpates.
Tiré de L'Humanité
* L'affaire remonte à 1999. La firme canadienne avait obtenu une licence d'exploitation de mines d'or dans la région, près du village de Rosia Montana, mais son projet avait été suspendu en 2013, après des manifestations géantes pour protester notamment contre l'utilisation de cyanure pour extraire l'or.
Gabriel Resources avait l'intention d'extraire des tonnes d'or et d'argent, endommageant au passage quatre massifs, l'essentiel des vestiges romains compris. En 2016, la Roumanie avait déclaré le site comme étant d'intérêt historique, évitant ainsi son exploitation. En 2021, l'Unesco le classe au patrimoine mondial. Il abrite, en effet, d'anciennes mines d'or romaines et des galeries minières vieilles de deux mille ans.
Au bout d'une longue bataille judiciaire, le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements ( Cirdi ) – un groupe d'arbitrage de la Banque mondiale – a rejeté les demandes d'indemnisation de la société canadienne.
*****
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Accroitre la participation syndicale des femmes : un pari réussi ?

En 1974-1975, 66 % des membres de la Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ) sont des femmes, mais leur taux de participation aux instances n'est que de 16 %. Si le pourcentage de représentation des femmes s'est amélioré au fil des décennies au sein de l'organisation – devenue depuis la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) – des défis persistent.
Tiré de Ma CSQ cette semaine.
La sous-représentation des femmes pousse la CEQ à créer, en 1974, une équipe-conseil constituée de 9 femmes pour soutenir la négociation du secteur public. Cette équipe a le mandat de recenser les situations de discrimination et d'exploitation vécues par les travailleuses du secteur de l'enseignement, et de sensibiliser les membres à la condition des femmes dans le cadre de la négociation.
Puis, en 1976, afin de mieux comprendre ce qui freine les femmes à participer aux instances de la Centrale, le comité Laure-Gaudreault (ancêtre du comité d'action féministe de la CSQ), en collaboration avec l'Université du Québec à Montréal et l'Université de Montréal, lance une vaste enquête auprès des membres féminines des syndicats affiliés, recueillant un peu plus de 8 000 témoignages.
Pour expliquer leur non-participation aux instances, les répondantes évoquent plusieurs raisons, dont la double tâche d'épouse et de mère, la priorité donnée au travail ou encore l'absence de conviction syndicale. Fait intéressant, l'analyse des réponses permet de cerner l a principale entrave à la participation des femmes : la prise de parole en public.
Non, « les absentes n'ont pas tous les torts »
Le comité Laure-Gaudreault publie les résultats de cette enquête sur le militantisme féminin dans le document Les absentes n'ont pas tous les torts… On y apprend que les exigences de la vie syndicale sont peu compatibles avec la réalité des femmes et qu'il existe d'autres obstacles à leur participation, dont la culture de confrontation.
Pour le comité, il apparait important que les personnes syndiquées, la Centrale ainsi que ses instances fassent tout en leur pouvoir pour augmenter la participation des travailleuses à tous les niveaux. Les constats tirés de cette enquête serviront d'assise pour la poursuite des travaux sur le sujet.
Le célibat, une condition favorable ?
Au cours des années 1980, la CEQ mène une autre enquête afin de brosser, cette fois, le portrait type de la militante et du militant. On constate que le célibat semble être une condition favorable aux activités militantes des femmes, qui disposent par conséquent de plus de temps. Des écarts salariaux importants sont aussi mis en lumière : 74,7 % des militants gagnent un revenu de 30 000 $ par année, alors que seulement 46 % des militantes atteignent un tel salaire.
Des facteurs sociaux généraux – comme le manque de conscientisation face aux oppressions que les femmes subissent, la socialisation qui ne les prépare guère à un rôle ni à un engagement politique et social et la division genrée du travail – enrayent la participation syndicale des femmes. L'enquête révèle cependant un autre obstacle : la structure de la CEQ et de ses syndicats affiliés reproduit le schéma « patriarcal » à l'intérieur même de l'organisation, notamment par la planification inadéquate des horaires et la charge de travail considérable que représente l'implication syndicale.
La prise de parole en public demeure également, comme lors de l'enquête précédente, la limite que les femmes peinent à surmonter dans leur implication syndicale.
Cette enquête donne lieu à l'adoption, au Congrès de la CEQ de 1984, à de nombreuses recommandations qui, au cours de la décennie suivante, feront l'objet de mesures intégrées au Programme d'accès à l'égalité syndicale (PAES).
La gouvernance démocratique au cœur des réflexions féministes
C'est donc en 1990 que le Congrès adopte une résolution en faveur du PAES. Le comité Laure-Gaudreault amorce une enquête statistique, indispensable à l'instauration d'un tel programme. Ce portrait des effectifs, intitulé La CEQ, c'est mon genre, est présenté au Congrès de 1992 et la déception est palpable : après des années de militantisme, les objectifs ne sont toujours pas atteints.
Le taux de représentation des femmes n'excède en aucun cas 50 % dans les instances de la CSQ. Elles ne détiennent que 40 % des postes au conseil exécutif et 41 % au conseil général.
Un recentrage s'impose
En se basant sur la discrimination systémique, le Congrès de 1994 adopte le premier plan d'action pour l'égalité syndicale. Il compte 60 mesures pour contrer les barrières à la participation des femmes.
Le PAES a été bonifié au fil du temps. Depuis 2006, par exemple, la composition des comités repose sur la présence féminine. En 2018, le comité offre aux syndicats des outils pour faciliter l'implantation d'un PAES dans leur milieu. Des actions continuent d'être posées pour sensibiliser et aider les syndicats à parvenir à une représentation proportionnelle des femmes dans nos instances syndicales.
Accroitre la participation des femmes, un pari réussi ?
Plusieurs ont décrit le PAES comme une inaccessible étoile, car l'objectif de représentation n'est pas encore atteint, et l'opposition aux postes réservés aux femmes ou aux mesures encourageant leur primauté demeure. Malgré ces critiques, les statistiques démontrent que les femmes prennent davantage leur place au sein de la Centrale.
En 1988, Lorraine Pagé est élue à la tête de la CEQ, devenant ainsi la première femme présidente d'une centrale syndicale au Québec. Depuis, trois autres femmes ont été élues : Monique Richard (2000 à 2006), Louise Chabot (2012 à 2018) et Sonia Ethier (2018 à 2021).
La règle accordant la préséance aux femmes dans les comités, introduite en 2006, a eu un effet positif : la représentation féminine s'est maintenue ou améliorée dans la presque totalité des comités, passant de 47,5 % en 2006 à 57,5 % en 2018.
Devant les défis qui persistent, le travail se poursuit pour démystifier les freins à la participation des femmes. Des outils continuent d'être élaborés et des mesures implantées pour accroitre leur présence dans les instances de la Centrale.
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Action féministe : La naissance d’un comité, la reconnaissance d’une lutte

En amont des célébrations du 50e anniversaire du comité d'action féministe de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), qui auront lieu le 21 mars prochain, Ma CSQ cette semaine, vous fait découvrir un pan de l'histoire du mouvement féministe au sein de la Centrale. Découvrez comment est né ce comité de femmes.
Tiré de Ma CSQ cette semaine.
Lors du 22e Congrès de la Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ), devenue depuis la CSQ, de nombreuses discussions, entourant les enjeux d'oppression vécus par les femmes donnent naissance à un mouvement féministe au sein de la Centrale. L'année suivante, un groupe de militantes de la région de Montréal se forme et poursuit les réflexions. Lors du 23e Congrès, en 1973, de nombreuses recommandations sont adoptées, reconnaissant la nécessité de mener cette lutte spécifique et de doter la CEQ d'un comité de la condition des femmes.
Un départ effervescent
C'est lors d'une rencontre du bureau national de la CEQ, en novembre 1973, qu'a lieu l'élection du premier comité Laure-Gaudreault (CLG). Composé initialement de cinq femmes, il tire son mandat des recommandations adoptées au Congrès de la CEQ et de son plan d'action.
Dès sa création, le comité travaille à la mise sur pied d'équipes locales de la condition des femmes et à la constitution d'un réseau de responsables. À la fin de la première année de son mandat, il compte 40 équipes locales, chacune constituée en majeure partie d'enseignantes, mais également, pour certaines d'entre elles, de ménagères, de secrétaires, d'infirmières ainsi que de travailleuses d'autres types d'emploi.
Tout est à faire pour joindre le plus grand nombre de personnes afin de les sensibiliser à la lutte pour la libération des femmes. Le maintien du réseau et l'atteinte d'une représentation de l'ensemble des groupes de la CEQ demandent des efforts constants de la part du CLG. Au bilan déposé au Congrès de 1980, le réseau compte une cinquantaine de comités locaux de partout au Québec.
Des demandes trop revendicatrices ?
Des bilans du CLG sont déposés au conseil général ainsi qu'à chacun des congrès de la CEQ. Ces rapports contiennent presque inévitablement des demandes de la part du comité. De plus, à chaque congrès, celui-ci doit prendre la décision de renouveler ou non le mandat du CLG.
En 1976, les comités d'action politique élaborent, lors d'une session nationale, une série de considérants s'opposant aux propositions faites par le CLG. Ce que l'on comprend de ces considérants, c'est que la spécificité que l'on reconnaît à la lutte des femmes dérange. Il ne s'agit pas là d'un enjeu propre à la CEQ, mais bien d'une lutte que de nombreuses féministes de l'époque doivent mener afin de faire reconnaître que la lutte des femmes est un combat spécifique et particulier.
Une équipe-conseil des femmes à la négociation
Le 4 octobre 1974, une équipe-conseil des femmes à la négociation est mise sur pied afin de donner suite à la recommandation adoptée au 24e Congrès CEQ.
Cette équipe-conseil est composée de neuf femmes qui assurent la représentation de l'ensemble des composantes de la CEQ ainsi que des membres du CLG. Elle a comme mandat de participer activement à la négociation, afin de mettre en lumière les discrimination et d'exploitation spécifiques aux femmes travailleuses de l'enseignement et de sensibiliser l'ensemble des syndiqués sur la condition féminine, qui est devenue l'une des quatre grandes priorités de cette négociation.
Solidaires
Si un élément ressort des luttes des femmes de l'époque, et encore de celles d'aujourd'hui, c'est cette volonté de tisser des liens entre elles afin de porter haut et fort leurs revendications communes. Bien qu'elle soit présente avec divers groupes de femmes sur des enjeux spécifiques, cette solidarité s'impose presque d'elle-même avec les comités traitant de la condition des femmes des deux autres centrales syndicales, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ).
En 1977, de nombreuses rencontres informelles ont déjà eu lieu entre les comités de la condition des femmes de la CEQ, celui de la CSN et celui de la FTQ. Cependant, le CLG croit qu'il est nécessaire de formaliser cette solidarité et d'inviter les centrales à explorer la mise sur pied d'un comité permanent intercentrales de la condition des femmes. La CEQ lance cette invitation à laquelle la CSN et la FTQ répondent positivement. C'est ainsi que le Comité Inter-Centrales (CIC), connu aujourd'hui comme l'Intersyndicale des femmes, est officiellement né, en 1977. La FTQ ne demeure que 2 ans au sein du CIC, mais d'autres syndicats se joignent au groupe dès 1979.
Un comité durable et un nom à son image
C'est au Congrès de 1980 que le comité Laure-Gaudreault propose de réviser son nom afin de mieux refléter le travail accompli par les militantes. Dorénavant, le CLG s'appelle le comité de la condition des femmes (CCF).
En 1982, le CCF s'établit durablement grâce à une résolution importante adoptée par le conseil général : « Que les statuts prévoient dans les pouvoirs du conseil général l'obligation de créer et de maintenir un comité de la condition des femmes. »
En 2023, le conseil général adopte le nouveau nom du comité, soit le comité d'action féministe de la CSQ.
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Présentation du mémoire de la FTQ-Construction sur le projet de loi 51

Ce mardi 12 mars, Éric Boisjoly (directeur général), Arnold Guérin (président) et Me Claude Tardif (procureur), étaient présents à la commission parlementaire afin de présenter notre mémoire sur le projet de loi 51, qui vise la modernisation de la Loi R-20, régissant l'industrie de la construction.
« Où le ministre adresse-t-il la rétention de la main-d'œuvre ? Il n'y a rien dans ce projet de loi pour s'assurer de la rétention de la main-d'œuvre. Où sont les mesures pour l'employabilité des femmes ? […] Les statistiques de la Commission de la construction du Québec le prouvent ; les gens qui rentrent dans l'industrie sans formation quittent l'industrie dans les cinq ans à venir. Dans le fond, on a créé un panier plein de trous, on rentre des gens, mais on ne les retient pas dans notre industrie. La modernisation de la Loi R-20 passait aussi par la planification des travaux. Où, dans le projet de loi, parle-t-on de planification des travaux ? […] On a un problème d'attraction, de rétention et de qualification, ce sont toutes des choses qui ne sont pas adressées dans le projet de loi. Pour nous, c'est inacceptable » - Éric Boisjoly.
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La présidente Bruske du CTC à tous les ordres de gouvernement : montrez votre soutien aux travailleurs et mettez en œuvre la loi anti-briseurs de grève immédiatement

Pour protéger les travailleurs et rétablir l'équité à la table de négociation, nous avons besoin d'une loi anti-briseurs de grève rigoureuse dans chaque province ou territoire.
Le 27 février, alors que les parlementaires de tous les partis votaient à l'unanimité en faveur du projet de loi C-58, qui interdirait les travailleurs de remplacement, 239 membres d'Unifor en Nouvelle-Écosse ont déclenché une grève. Le jour même, en fin de journée, l'employeur, le CN, a fait appel à des briseurs de grève. Bien qu'il s'agisse d'un milieu de travail régi par la loi provinciale, ce dossier devrait faire l'objet d'une attention de la part de tous les politiciens.
« J'ai déjà entendu que des travailleurs sont parfois en situation de conflit direct lors d'une grève, ce qui menace leur sécurité et leurs moyens de subsistance. L'horrible événement qui s'est produit dans le Nord de l'Ontario il y a moins de deux semaines en est un exemple terrifiant. Cela ne devrait jamais arriver », déclare Bea Bruske, présidente du Congrès du travail du Canada.
On fait appel aux briseurs de grève, parfois appelés travailleurs ou travailleuses « de remplacement », pendant un lock-out ou une grève pour qu'ils occupent les emplois des membres habituels du personnel. Le recours par les employeurs à des briseurs de grève—qui oppose des travailleurs ou travailleuses désespérés les uns aux autres—porte atteinte au droit de grève des travailleurs, aggrave les conflits de travail et intensifie l'hostilité sur les lignes de piquetage – menaçant la sécurité de ces travailleurs et de leurs communautés.
Le Québec dispose d'une loi anti-briseurs de grève depuis plus de 45 ans et la Colombie-Britannique depuis 30 ans. Ces lois, et le projet de loi fédéral anti-briseurs de grève, non seulement raccourcissent les arrêts de travail, mais réduisent les effets dommageables de l'utilisation des briseurs de grève qui attise les conflits et rétablissent l'équité à la table de négociation.
De plus en plus de travailleurs des secteurs privé et public se tournent vers leurs syndicats pour qu'ils les défendent et exigent mieux. Des employeurs et des gouvernements.
« Les travailleuses et travailleurs savent qu'il n'est pas facile de faire du piquetage. Et que la présence de briseurs de grève dans certains endroits est très réelle. Cela augmente le stress des travailleurs lorsqu'ils doivent prendre des décisions pour eux-mêmes, leur famille et leur communauté. C'est pourquoi il est essentiel d'en venir à une loi anti-briseurs de grève au niveau fédéral », ajoute madame Bruske.
Les travailleuses et travailleurs de la Nouvelle-Écosse, comme ceux de toutes les provinces et de tous les territoires, ont le droit de s'attendre à ce que leurs droits constitutionnels à la négociation collective et à faire la grève soient protégés, sans la menace toujours présente du recours à des briseurs de grève qui prolongent les arrêts de travail et suscitent de longs conflits désespérés et destructeurs.
Tout comme les travailleurs non syndiqués, les travailleurs syndiqués ont vu chuter leurs salaires en raison de la crise actuelle de l'abordabilité.
Les travailleuses et travailleurs ont vu leur pouvoir d'achat fondre, car leurs salaires ne suivent pas l'inflation tandis que les riches PDG annoncent d'énormes profits. Pendant ce temps, les membres de leur personnel sont obligés de faire appel à des banques alimentaires parce qu'ils n'ont pas les moyens de faire leur épicerie au magasin où ils travaillent.
« J'ai rencontré des travailleuses et travailleurs qui m'ont dit qu'avant de penser à faire du piquetage, ils doivent calculer leurs finances. Et en ces temps économiques incertains et difficiles, ce n'est pas une décision à prendre à la légère », ajoute madame Bruske. « Ce sont des discussions à prendre en famille à savoir s'ils peuvent se permettre d'accepter l'offre insignifiante de l'employeur ou s'ils sont prêts à aller en grève. Et soyons honnêtes, parfois c'est l'employeur qui prend la décision pour eux et les met en lock-out. »
Pendant ce temps, des politiciens comme Pierre Poilievre prétendent être un ami des travailleurs. Depuis des mois, il est totalement muet sur sa position quant à l'interdiction des briseurs de grève tout en continuant à faire des remarques vides de sens et à scander des slogans insignifiants.
« Si Pierre a vraiment changé d'avis et tient véritablement à appuyer les droits des travailleurs, peut-être devrait-il envoyer une note de service à ses homologues provinciaux de la Nouvelle-Écosse et de l'Ontario dès que possible », indique madame Bruske.
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Projets de maisons d’hébergement à l’arrêt : Le silence du gouvernement caquiste précipite les services vers un point de rupture

Une semaine après avoir interpellé le Premier Ministre suite à l'abandon de projets de développement de maisons, les associations de maisons d'hébergement demeurent sans réponse, abandonnées par un gouvernement qui s'était pourtant engagé en 2021 à ouvrir ces nouvelles places. Face à ce silence indigne, les partis d'opposition ont pris la parole ce matin en point de presse pour soutenir les trois associations et réclamer avec elles la création d'un programme de financement spécifique qui tienne compte des réalités et besoins des victimes de violence.
« En tirant la plug sur les projets annoncés, le gouvernement démontre son désintérêt pour la violence conjugale. Le Québec compte déjà quatre féminicides depuis le début de l'année. Faudra-t-il qu'une autre femme soit tuée aux mains de son partenaire pour que le dossier remonte dans la pile des priorités ? » se désole Maud Pontel, coordonnatrice de L'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape.
Dans une déclaration expéditive, la ministre de l'Habitation, Madame Duranceau, laisse entendre que les projets coûtent trop cher et que l'on doit respecter la “capacité de payer” de l'État. « Qu'en est-il de la capacité du gouvernement de François Legault à respecter ses engagements ? » ajoute Maud Pontel.
Des services proches du point de rupture
Depuis la pandémie, les demandes de service dans les maisons d'hébergement pour femmes victimes de violence ne cessent de croître. L'une des solutions convenues avec le gouvernement était l'ouverture de nouvelles places en maisons d'aide et d'hébergement et de nouvelles unités en maisons de deuxième étape.
« Or au moment où les maisons d'aide et d'hébergement affichent un taux d'occupation de plus de 100% dans la dernière année et où les maisons d'hébergement de 2e étape doivent refuser 58% des demandes faute de places, la Société d'habitation du Québec bloque des projets priorisés en 2021. La main droite ne semble pas savoir ce que fait la main gauche » s'insurge Louise Riendeau, coresponsable des dossiers politiques en Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.
La ligne d'urgence SOS Violence conjugale nous informait cette semaine que, faute de disponibilité dans les ressources, elle n'avait pas pu référer les demandes d'hébergement dans 45% des cas. Cela représente 17 demandes par jour auxquelles les travailleuses ne peuvent « Le continuum de services en violence conjugale est proche du point de rupture. Est-ce que le gouvernement sera responsable de son effondrement ? » renchérit Louise Riendeau.
Régler l'incohérence des programmes pour permettre la mise en sécurité
Il est essentiel de rappeler que les fonds alloués à ces projets étaient destinés à la construction et aux services. Trois ans plus tard, il est légitime de se questionner : où est passé l'argent que le gouvernement s'était engagé à investir pour protéger des vies ? Au 11 mars 2024, 2 648 femmes ont contacté SOS violence conjugale, dont 1 187 n'ont pas pu être orientées vers un hébergement. Ces femmes, avec ou sans enfants, ont courageusement demandé de l'aide. En raison du manque de cohérence gouvernementale, ces femmes et leurs enfants restent dans une situation de vulnérabilité inacceptable.
Nous avons des pistes de solutions et nous devons collectivement agir rapidement. Nous demandons qu'un mandat clair soit donné dans les plus brefs délais afin de débloquer les projets actuellement à l'arrêt, mais aussi afin que des actions concrètes et réalistes soient mises en place pour que les femmes et les enfants victimes de violence aient réellement droit à la sécurité.
Les député.e.s de l'opposition réagissent
« Encore une promesse caquiste brisée. Les besoins sont immenses et des milliers de femmes se font toujours refuser de l'hébergement, faute de places. Elles se voient alors forcées de retourner dans des situations extrêmement précaires. Lorsqu'une victime demande de l'aide, celle-ci doit être disponible immédiatement. On parle de vies de femmes et de leurs enfants. La ministre de l'Habitation, elle, parle de capacité de payer. Pour elle, combien vaut la vie d'une femme ? »
– Brigitte Garceau, députée libérale de Robert-Baldwin et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine
« Il est inacceptable que des projets de maisons d'hébergement soient mis en danger, alors qu'il y a eu plus de 50 féminicides depuis 2020. Deux projets en Abitibi-Témiscamingue risquent de tomber à l'eau, alors que les organismes ont travaillé d'arrache-pied pour qu'ils voient le jour. On ne peut pas se permettre que d'autres femmes tombent sous les coups de leurs conjoints faute de places dans les maisons d'hébergement. La ministre a le pouvoir de changer les choses pour que ces maisons sortent de terre. Elle doit agir rapidement ! »
– Ruba Ghazal, députée de Mercier et responsable solidaire en matière de condition féminine
« Le gouvernement a fait des annonces en grandes pompes, il a dit vouloir agir en réponse à la hausse de la violence et du nombre de féminicides et a promis que l'argent serait disponible, notamment pour les maisons d'hébergement de 2e étape. Le milieu communautaire s'est mobilisé pour agir en conséquence et a développé des projets. Plusieurs organismes se retrouvent maintenant face à un blocage. Le gouvernement doit respecter ses engagements. Les investissements doivent être faits de sorte que les ressources d'hébergement soient construites pour mieux protéger les femmes et les enfants victimes de violence. »
– Joël Arseneau, député des Îles-de-la-Madeleine et porte-parole du Parti Québécois en matière d'Habitation
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Lettre ouverte | Justin Trudeau, féministe ? Pas pour des milliers de travailleuses

En 2024, le programme d'assurance-emploi canadien ne protège toujours pas les travailleuses qui perdent leur emploi durant ou après leur congé de maternité. Ce refus d'accorder une protection en cas de chômage aux nouvelles mères perpétue les iniquités vécues par les femmes sur le marché du travail. Déjà frappées par une perte d'emploi, ces femmes s'appauvrissent encore davantage en étant privées d'assurance-emploi, du seul fait qu'encore aujourd'hui, elles assument les responsabilités familiales de façon disproportionnée.
Une injustice reconnue par le politique
Dès 2009, le Parti libéral du Canada, alors dans l'opposition, demandait au gouvernement Harper de corriger cette aberration. Rien ne fut fait. Ni par les conservateurs, ni par les libéraux depuis leur retour au pouvoir en 2015. Las d'attendre une réponse politique à ce problème criant, le Mouvement Action-Chômage de Montréal a entrepris en 2018 un recours en justice afin de faire déclarer inconstitutionnelles les dispositions de la Loi sur l'assurance-emploi responsables de cette discrimination.
En 2022, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale a donné raison aux six travailleuses à l'origine du recours en indiquant clairement que la loi discriminait les femmes : « [Si] une femme perd son emploi pendant son congé de maternité et parental, elle n'a plus de protection. Elle doit donc se fier à ses économies ou au revenu de son conjoint. Cela maintient les femmes dans la pauvreté et dans un lien de dépendance. C'est considérer les revenus des femmes comme un salaire d'appoint qui ne mérite pas la même protection [à l'assurance-emploi]. »
Malgré une reconnaissance unanime du problème, le gouvernement libéral a décidé de ne pas modifier la loi et a même porté en appel la décision. La saga judiciaire se poursuit encore aujourd'hui, et la Cour d'appel fédérale du Canada tranchera sur le dossier d'ici quelques mois.
Mettre fin à la partie de ping-pong
Rappelons qu'il y a à peine deux ans, la ministre chargée du dossier, Carla Qualtrough, déclarait publiquement ne pas encore savoir « comment on va l'aborder ou dans quel ordre on va régler tout cela ». « Mais j'y travaille. C'est ma principale préoccupation », avait-elle fait valoir. Questionné sur ce dossier en février dernier à la Chambre des communes, son successeur, Randy Boissonnault, a plutôt déclaré qu'il n'interviendrait pas tant que la question serait devant les tribunaux.
Le Mouvement Action-Chômage de Montréal et les signataires de cette lettre demandent au gouvernement Trudeau d'agir et de légiférer au lieu de laisser le dossier s'enliser dans une éternelle bataille judiciaire. Il est possible de régler ce problème rapidement en ne modifiant que quelques articles de la Loi sur l'assurance-emploi.
Le Parti libéral du Canada reconnaît cette injustice flagrante, tout comme le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique. Le gouvernement fédéral a donc les appuis nécessaires en Chambre pour faire adopter ces changements législatifs mineurs, qui soulageraient chaque année des milliers de travailleuses discriminées et appauvries.
À défaut, son inaction soulève une question fort légitime : son féminisme en est-il un de façade ?
Source : Jérémie Dhavernas
L'auteur est responsable des services juridiques au Mouvement Action-Chômage de Montréal. Il cosigne ce texte avec une trentaine d'organisations :
1. Pierre Laliberté, commissaire des travailleurs et travailleuses à la Commission de l'assurance-emploi du Canada ; 2. Fédération des femmes du Québec (FFQ) ; 3. Confédération des syndicats nationaux (CSN) ; 4. Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) ; 5. Centrale des syndicats du Québec (CSQ) ; 6. Centrale des syndicats démocratiques (CSD) ; 7. Unifor Canada ; 8. Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) ; 9. Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) ; 10. Fédération autonome de l'enseignement (FAE) ; 11. Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) ; 12. Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi (MASSE) ; 13. Réseau québécois de l'action communautaire autonome (RQ-ACA) ; 14. Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ) ; 15. Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec (MEPACQ) ; 16. Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) ; 17. Regroupement des organismes en défense collective de droits (RODCD) ; 18. Mouvement Action-Chômage de Trois-Rivières ; 19. Regroupement des sans-emploi de Victoriaville ; 20. Action-Chômage Côte-Nord ; 21. L.A.S.T.U.S.E. du Saguenay ; 22. Action-Chômage Kamouraska ; 23. Action populaire Rimouski-Neigette ; 24. Mouvement des chômeurs et chômeuses de l'Estrie ; 25. Regroupement de défense des droits sociaux de Drummond ; 26. Association de défense des droits sociaux (A.D.D.S) de la Rive-Sud ; 27. Comité chômage de l'est de Montréal ; 28. Action dignité Lanaudière ; 29. Centre des travailleurs et travailleuses immigrants.
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Northvolt : Là, ça suffit !

La Convergence populaire se joint à la mobilisation grandissante qui exige une évaluation sérieuse par le BAPE du projet Northvolt. Nous partageons l'indignation et la méfiance de la population dans le dossier des actions du gouvernement pour permettre l'arrivée de cette méga usine, et son lot de questions bien légitimes.
Montréal (Tiohtià:ke), 15 mars 2024
Un projet structurant de cette ampleur aura nécessairement des conséquences, tant sur le plan social que sur le plan environnemental, qu'il nous faut bien évaluer. La vie des gens et celle de toute la biodiversité qui habitent ce territoire qu'on nomme le Jardin du Québec en seront bouleversées. Les enjeux sont trop importants pour laisser la CAQ imposer une vision peu réjouissante de notre avenir, sans consultation.
GROS PROJET : BAPE COMPLET !
– - -
Le gouvernement s'apprête à jouer à la roulette avec nos impôts et ce qui nous reste de milieux humides dans la Montérégie pour permettre le développement d'une nouvelle filière industrielle. L'investissement majeur qu'on se propose de faire et ses effets structurants pour la société de demain méritent en soi une analyse serrée, appuyée sur des données indépendantes. C'est ce que nous permet le BAPE
Ce qu'on apprend des agissements de François Legault et de ses sbires au sujet de Northvolt n'arrête pas de nous surprendre tant ils sont choquants. La mobilisation grandissante de la population est le reflet d'un besoin criant pour des institutions démocratiques solides, le BAPE offrant un modèle à suivre quand vient le temps de
prendre des décisions importantes qui nous concernent toustes.
Nous avons de bonnes raisons de nous inquiéter.
Le projet repose sur deux mythes tenaces : le premier aimerait nous faire croire que la croissance économique est bénéfique à la société. Les quarante dernières années de néo-libéralisme nous ont prouvé le contraire. L'écart entre les riches et les pauvres n'a cessé d'augmenter et la notion de bien commun peine à faire sa place au sein même
de nos gouvernements ; le second soutient que l'électrification de notre parc automobile suffira pour réduire assez de GES et éviter la catastrophe. Rien n'est moins sûr, surtout quand on se fait bassiner de publicités encourageant notre appétit insatiable pour des véhicules toujours plus gros. Nous aurons tôt fait de revenir à la case départ.
Nous nous apprêtons à poser des gestes qui vont à l'encontre de ce que les rapports environnementaux et les études scientifiques nous enjoignent de faire : destruction de milieux humides, et du coup, de refuges abritant des espèces menacées, pourtant protégées légalement ; procédés industriels polluants qui menacent nos sources d'eau
potable et l'air qu'on respire ; une chaîne de production qui se déploie à l'échelle internationale et où l'approvisionnement en matières premières se fait sur la base de l'extractivisme, une pratique colonialiste outrancière qui vise à extraire les ressources de manière intensive jusqu'à leur épuisement, laissant les communautés gérer les
problèmes sociaux et la dégradation de leurs milieux de vie dans son sillage.
Le gouvernement s'engage pourtant tête baissée dans ce méga-projet. Il est même prêt à laisser Northvolt, une entreprise privée au profil peu reluisant l'a-t-on appris, dicter nos choix de société pour ne pas manquer cette occasion d'affaires. On se croirait tout droit retourné.es à l'ère Duplessis. Ce n'est certainement pas en suivant les vieilles recettes de la vision affairiste de M. Legault, celles-là même qui nous ont mené.es au mur, que nous réussirons à changer la donne. L'évolution rapide des changements climatiques ne nous laisse pas le temps de tergiverser. Vivement la révolution, tranquille, ou non.
La meilleure voie à prendre sera celle de la cohérence de nos actions. Pour y arriver, il faudra convenir ensemble du monde que nous voulons et du chemin à prendre. La population québécoise s'est exprimée récemment : elle souhaite que les impacts sur l'environnement aient préséance dans nos décisions économiques. Avons-nous besoin
d'ajouter que les décisions économiques devraient nous aider à faire face aux crises sociales qui nous assaillent de toutes parts ?
La mobilité est certainement un enjeu prioritaire puisque c'est ce qui structure notre vie collective. Pour réduire son empreinte, la science nous incite à investir sans délai dans l'organisation des transports collectifs efficaces, qu'ils soient électriques ou non, et à réaménager nos villes pour favoriser des milieux où on favorise les circuits courts et où on prend nos décisions à l'échelle locale.
Nous aurons besoin d'une grande conversation publique pour cheminer non pas vers une transition illusoire mais vers une véritable transformation qui mènera à la sobriété énergétique et à la décroissance.
En 2024, nous ne pouvons accepter qu'un projet de développement puisse voir le jour sans évaluation du BAPE, d'autant quand il s'agit d'un ‘gros' projet comme on se plaît à qualifier celui de Northvolt.
Vivement, des états généraux sur notre avenir énergétique !
Pour la Convergence populaire, la base de la discussion est claire : La planète n'est pas à vendre !
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Qui doit changer d’attitude au Québec ?

Le premier ministre dit qu'il faut changer d'attitude au Québec. Pour une fois, je suis d'accord avec lui. Mais ce sont le gouvernement et les possédants qui doivent changer d'attitude. Le réchauffement planétaire en cours qui cause les changements climatiques et les extrêmes météos ne seront pas résolus en continuant de faire du
développement économique comme nous l'avons toujours fait.
tiré de GMob-GroupMobilisation , le 2024-03-15 06:33
Illustration : Antonio Huerta
Jacques Benoit,
Co-rédacteur du Plan de la DUC
Membre de Gmob
Transition énergétique avec Northvolt, dites-vous ? Voici ce qui est une véritable transition…
C'est justement ce développement qui nous a conduits au bord du précipice où nous sommes.
Les crises climatiques ne sont pas des occasions d'affaires. Pour réduire nos émissions de GES, il faut réduire tout ce qui les cause, à savoir notre (sur)consommation de ressources en général, et d'énergie en particulier.
Il faut cesser de développer, il faut RÉDUIRE !
Mais pour notre gouvernement, réduire, c'est réduire les espaces démocratiques, comme le BAPE, réduire nos droits à comprendre et s'informer, pour libérer de toute entrave, de toute règle, le pouvoir du marché et des affaires. Des batteries d'auto produites avec de l'énergie verte, mais qui devront être rechargées par une électricité produite par des centrales au charbon, au gaz, au pétrole ou au nucléaire, comme c'est le cas dans la majorité des pays dans le monde, ne vont pas nous sortir des fossiles, ni de la catastrophe climatique dans laquelle nous nous enfonçons, bien au contraire.
Refuser que le projet Northvolt comme bien d'autres ne soit soumis à une évaluation du BAPE ne sert qu'à une chose : soutenir et développer au plus sacrant le marché, les affaires, y compris l'industrie fossile, au détriment du climat, de l'environnement et de la biodiversité. Et empêcher que la population ait l'information nécessaire pour prendre les difficiles, mais nécessaires décisions.Alors oui, M. Legault, il faut changer d'attitude au Québec. VOUS devez changer d'attitude, pour que nos enfants et nos petits-enfants aient une possibilité d'avenir.
Et peut-être les vôtres aussi…
Publié également le 9 février dans Le Soleil, le Nouvelliste, le Quotidien, la Voix de l'Est et la Tribune.
Signez la pétitionpour la tenue d'une enquête du BAPE avant l'implantation de l'usine de batteries Northvol
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Jour du dépassement : cette année, c’est pour le 15 mars

Aujourd'hui, le 15 mars, marque le Jour du dépassement du Canada. 🌎 Cela signifie que nous avons épuisé toutes les ressources que notre planète peut régénérer en une année, si toutes les personnes habitant la Terre consommaient au même rythme que celles du Canada. Il faudrait 5.1 Terres pour soutenir ce mode de vie à l'échelle mondiale.
Cette année, le Jour du dépassement Canadien survient près de quatre mois avant la date prévue du Jour du dépassement mondial. ⌛
Le Jour du dépassement, créé par l'ONG Global Footprint Network=AZXrXUYDvwaiOMZIgnCii9qSE1TMaG7nB5xj_LPhP-6N7T-T6SaoqSubBXAivvwQcNfQu__X4e47yJUBCVvONINrk30TRJwKkCB7J0nATXCo91MGlwdw49k28oZ3AUpRVsZe1hol8IDn5IrEhyxYcU_Kzzgna8EO_d1hXMMrnuEiMieHuzYSmtjcRbXoXce9aKHu3RU6gcBGDB2ladbUsf7M&__tn__=-]K-y-R], nous offre une occasion de réfléchir à l'impact de notre consommation en termes de "journées perdues". Cette réflexion nous encourage à trouver des solutions pour "gagner" des jours, comme le prône le mouvement #MoveTheDate=AZXrXUYDvwaiOMZIgnCii9qSE1TMaG7nB5xj_LPhP-6N7T-T6SaoqSubBXAivvwQcNfQu__X4e47yJUBCVvONINrk30TRJwKkCB7J0nATXCo91MGlwdw49k28oZ3AUpRVsZe1hol8IDn5IrEhyxYcU_Kzzgna8EO_d1hXMMrnuEiMieHuzYSmtjcRbXoXce9aKHu3RU6gcBGDB2ladbUsf7M&__tn__=*NK-y-R]. ♻️🗓️
"Même si notre planète est limitée, les possibilités humaines ne le sont pas."
Le pouvoir des possibilités des solutions climatiques déjà existantes s'oppose au Dépassement : elles sont disponibles et ont la capacité de passer à l'échelle. ✍️ Global Footprint Network identifie cinq domaines de transformation à long terme, reposant sur l'action collective et individuelle : la planète, les villes, l'énergie, l'alimentation et la population. 🌱✨
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Des artistes demandent un cessez-le-feu à Gaza à la 96ème Cérémonie des Oscars

Lors de la Cérémonie des Oscars 2024, la demande pour un cessez-le-feu à Gaza a fait l'objet de plusieurs prises de parole et de position. Le 10 mars 2024 se déroulait la 96ème Cérémonie des Oscars, à Los Angeles. Dans la rue et du côté des lauréats, la demande pour un cessez-le-feu à Gaza a été au coeur des prises de parole et de position.
Par l'Agence Média Palestine, le 14 mars 2024
photo Manifestation sur Sunset Boulevard à Los Angeles, le soir des Oscars 2024.
Des centaines de manifestants, coordonnés notamment par ‘Workers For Palestine' et ‘SAG-AFTRA for a ceasefire', ont bloqué une grande partie d'Hollywood pendant la cérémonie de tapis rouge des Oscars. À quelques minutes du début de la cérémonie, la salle de bal est inhabituellement vide alors que les invités d'honneur se voient forcés d'accéder à pied à la cérémonie, se retrouvant ainsi en retard et nez-à-nez avec les manifestants.
Les manifestants ont fermé le Sunset Boulevard entre Vine Street et La Brea Avenue. Ils ont défilé dans la rue avec des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Pas de récompense pour le génocide » et ont conduit des bus scolaires couverts de drapeaux palestiniens.
Le prix du meilleur film étranger a été décerné à « La zone d'intérêt », de Jonathan Glazer, un film plongé dans l'Holocauste qui suit le quotidien du commandant du camp d'Auschwitz Rudolf Höss, et de sa famille dans leur maison situé en bordure du camp de concentration où plus d'un million de personnes sont mortes durant la Seconde Guerre Mondiale. Le film de Glazer, élaboré en collaboration avec le Mémorial et Musée d'Auschwitz-Birkenau, s'intéresse aux manières dont on peut lutter contre la déshumanisation, tant à l'époque qu'aujourd'hui. Lors de son discours, le réalisateur a adressé ce message concernant la situation à Gaza :
« Les choix de ce film ont été faits pour nous faire réfléchir et réagir dans le présent, pas pour qu'on se dise dans quelques années 'regardez ce qu'ils ont fait', mais pour qu'on se dise maintenant 'regardez ce qu'on fait'. Notre film montre là où a pu mener la déshumanisation la plus terrible. Et cela a forgé notre passé et notre présent. Aujourd'hui, nous nous tenons devant vous comme des hommes qui refusons que notre judéité et l'Holocauste soient instrumentalisés par une occupation qui a mené à une guerre impliquant tant d'innocents. Qu'il s'agisse des victimes du 7 octobre en Israël ou de celles des attaques incessantes qui se déroulent à Gaza, elles sont toutes des victimes de cette déshumanisation. »
Le film de Glazer avait d'ailleurs été programmé dans le cadre d'un ciné-club du collectif juif décolonial Tsedek, qui avaient ensuite été annulés suite à des pressions externes. Le réalisateur du film a tenu a adresser un message de soutien au collectif : « Au nom de la liberté de pensée et d'expression, nous soutenons le droit du collectif juif Tsedek ! de diffuser et discuter le film ‘La Zone d'intérêt'. Comme nous, ils condamnent les meurtres et l'oppression en cours des civil-es innocent-es à Gaza et dans les territoires occupés, comme celui des civil-es innocent-es tué-es et pris-es en otage le 7 octobre en Israël. Leur position n'est pas antisémite ». Une nouvelle programmation du film dans le cadre du ciné-club Tsedek sera bientôt prévue.
Sur le tapis rouge, plusieurs célébrités portaient également le pin's rouge d'« Artists for a Ceasefire », notamment les acteurs du film multi-nominé ‘Pauvres Créatures' Ramy Youssef et Mark Ruffalo, ou encore la chanteuse Billie Eilish. Le pin's symbolise un soutien au peuple palestinien et un appel au cessez-le-feu immédiat et permanent. Quand Ramy Youssef a été interviewé sur la raison pour laquelle il a choisi de porter ce pins lors de la cérémonie, il a répondu :
« Nous demandons un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza. Nous appelons à la paix et à une justice durable pour le peuple de Palestine. C'est un message universel : Arrêtons de tuer des enfants. Cessons de tuer des enfants. Ne participons pas à d'autres guerres. Personne n'a jamais regardé la guerre en arrière et pensé qu'une campagne de bombardements était une bonne idée. Le fait d'être entouré de tant d'artistes qui sont prêts à prêter leur voix, la liste ne cesse de s'allonger. Beaucoup de gens vont porter ces pin's ce soir. Il y a beaucoup de têtes parlantes dans les journaux télévisés, ici c'est un espace de cœurs parlants. Nous essayons d'envoyer un grand message à l'humanité. »
Les acteurs du film de Justine Triet primé à la catégorie du meilleur scénario ‘Anatomie d'une chute', Swann Arlaud et Milo Machado-Graner, ont eux porté un pin's arborant le drapeau palestinien.
Après près de 160 jours de bombardements israéliens sur la bande de Gaza, Israël a assassiné plus de 31 341 Palestiniens depuis le 7 octobre, dont au moins 12 300 enfants, et a blessé plus de 73 134 personnes.
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« Le domaine des artistes, c’est l’art, pas la politique ! »

Justine Triet a reçu l'Oscar du meilleur scénario original pour Anatomie d'une chute après de nombreuses péripéties, marquées par un discours mémorable à Cannes l'an dernier contre la retraite à 64 ans. On lui reproche, comme à d'autres avant elle, d'être trop politique. Puisque ça ne semble pas évident pour tout le monde, retour sur quelques bases.
Tiré du blogue de l'auteur.
« Son discours n' avait rien à faire dans ce contexte de cinéma », « Qu'elle reste dans son rôle » ou « Qu'elle fasse de la politique alors, pas du cinéma ! » sont des commentaires récurrents de la prise de parole de Justine Triet l'an dernier lors du festival de Cannes. Et ce n'est ni la première ni la dernière fois que cela arrive.
Judith Godrèche a eu le même type de réactions aux Césars de cette année, souvenons-nous de celles à l'encontre du documentariste aujourd'hui député François Ruffin à ceux de 2017. C'est une rengaine : le cinéma et la politique seraient deux choses séparées.
Plus généralement, l'art et la politique seraient séparés. En tant qu'auteur, j'avoue avoir du mal à envisager par quel chemin on peut arriver à penser ainsi.
Créer, c'est militer
Quand on crée, on prend la parole. Par principe, cela signifie qu'on considère qu'elle vaut quelque chose. C'est politique. On refuse la position du sujet, de l'objet, on revendique au minimum celle de l'observateur. Parfois même celle de l'acteur.
Dans notre France actuelle, les hiérarchies sont bien présentes et de nombreuses personnes considèrent que leur parole est illégitime, inintéressante et inutile. Et quand ce n'est pas cela qui nous limite, ce sont directement des affirmations partagées massivement. Comme celles d'un Président de la République qui déclarait dans une gare qu'il y a ceux qui réussissent et « ceux qui ne sont rien ». Se mettre en avant, s'affirmer et s'exprimer, c'est donc déjà un acte militant.
Mais créer, c'est aussi agir dans un contexte de production. Dans l'émission Soft Power de Lex Tutor, on apprend chaque vendredi à quel point ce contexte est important pour la culture et ceux qui la font. Doit-on accepter ou refuser les subventions ? Et pour les publicités et les sponsors ? Quel rôle donne-t-on à celles et ceux qui travaillent avec nous ? Aux plateformes ? Aux intelligences artificielles ? Sur quel média s'exprime-t-on ? Sous quelle forme ? Si on choisit d'avoir une communauté, quel pouvoir doit-elle avoir sur notre travail ?
Chaque artiste doit se placer sur toutes ces questions dans l'intervalle confortable entre une rémunération suffisante et les valeurs et messages qu'il ou elle porte. Les compromis sont souvent nécessaires et aucune œuvre n'échappe au monde qui vit autour d'elle.
Cela signifie aussi que quand on devient créateur, on a une vie professionnelle de créateur. Des expériences, des aventures et des combats d'artistes. On aurait tort de s'en priver pour inspirer nos propres travaux. À ce degré là, on milite pour conserver ou changer notre environnement et nos conditions de travail. Notamment au sein de nos créations. Toute œuvre parle de l'art en général, de ce qu'il est au moment où il est décrit ou dénoncé, de comment il se fait ou ne se fait pas, de ses limites et de ses permissions.
J'irai même plus loin.
Créer, c'est répondre
J'ai commencé mon aventure d'auteur dans le monde de la fanfiction quand j'étais adolescent. J'ai lu des récits alternatifs des mondes d'Harry Potter, de Star Wars, de Digimon ou de Death Note et me suis parfois risqué à écrire dedans moi-même.
La première question que je me pose alors est : qu'est-ce que je souhaite écrire ? La première réponse, la plus simple, est d'essayer de reproduire et de développer une partie de ces univers qui me plaisent. De faire dans ce style. Dans cet esprit.
Le choix de l'œuvre de départ est déjà politique. Les grandes sagas sont privilégiées dans mon esprit car elles ne dévoilent qu'une partie assez minime de leur univers, laissant ainsi un champ libre à mon imagination. Mais dans ma jeunesse, il y avait aussi Matrix, Le Seigneur des Anneaux ou le Monde de Narnia. J'ai eu beau lire, regarder et aimer ces sagas, jamais je ne m'y suis aventuré dans mes écrits. Le champ des possibles m'y paraissait plus restreint, moins accueillant aussi. Question d'affinités. Parce que la création, même dans ces cadres de dérivés de fiction, doit permettre de se déployer soi et ses problématiques.
Le développement de l'univers que je choisis est donc une réponse. Une réponse à l'œuvre, à ses manques, à ses oublis, à ses aveuglements. Ce qui signifie en fait une relecture de cette œuvre par mes obsessions, qui ne sont pas celles de l'autrice ou de l'auteur originel. Ces oublis, ce sont des oublis selon moi. Des manques dans ce qui, moi, m'intéresse. C'est donc infiniment personnel. Et partager le travail qui en résulte s'en retrouve infiniment politique.
Depuis, j'écris de la fiction en général et tout un tas d'autres choses. Pourtant, j'ai tendance à me dire que tous mes travaux sont des fanfictions : les codes choisis sont bien plus larges, les inspirations plus nombreuses, mais tout ce que j'écris est une réponse. Créer est une critique, une réponse à d'autres créations et au monde.
Quand j'écris une romance pour le recueil de nouvelles Qui Sème l'Été, je réponds à toutes les romances que j'ai pu lire et à certains présupposés qui ne me conviennent pas. Quand j'écris Mauvais Élève qui raconte mon parcours dans l'éducation nationale, je décris évidemment l'application de certaines politiques, mais j'y raconte mes émotions en réponse à un militantisme que je trouve trop méfiant envers celles-ci. Quand j'écris une vidéo sur l'état déplorable des logements en France, je réponds à un silence médiatique tout en rendant hommage au travail de la fondation Abbé Pierre.
Et je ne suis pas le seul. Star Wars est une réponse à la guerre du Vietnam. Digimon remplace les créatures animales et végétales de Pokémon par des programmes dans un monde virtuel. Harry Potter à l'école des sorciers propose une manière de briser la barrière entre les genres fantasy et fantastique. Toutes ces œuvres sont des réponses à des créations préexistantes dans lesquelles on déploie ensuite ses propres obsessions.
Ironiquement, commenter, c'est déjà créer
Je ne connais pas d'étape dans la création qui ne soit pas le résultat d'un choix, et qui n'ait donc pas d'implication politique.
À mon avis, qui est plutôt un doigt mouillé qu'un baromètre, ce discours de séparation absolue entre cérémonie artistique et discours politique est d'abord dû à une société qui met des barrières partout : entre les scientifiques et les littéraires, entre les jeux d'enfants et les loisirs adultes, entre le spectacle et le monde (qu'il décrit ou dénonce pourtant). Nous gagnerions tous à davantage de transversalité et à moins d'exclusions automatiques.
Mais l'inconcevabilité d'un art apolitique me rend tout de même très perplexe. Est-ce possible de voir, de lire, d'écouter sans rien déceler qui gratte un peu ? Est-ce possible même de vouloir créer quelque chose qui ne suscite aucune discussion ?
Face à cet embarras, j'ai trouvé une réponse. Une histoire insuffisante mais confortable. Je crois que ces commentaires ne sont pas sincères.
Je pense et je me convainc de plus en plus que les personnes qui prétendent vouloir séparer l'art de la politique sont en réalité très imbus de leur pouvoir sur les réseaux sociaux. Un pouvoir précisément très politique.
Elles sont d'ailleurs contredites par toutes celles et tous ceux qui commentent sous les mêmes vidéos des « Bravo ! », « une prise de parole courageuse ! » ou des « enfin du bon sens ! ».
Tout se passe comme si on ne souhaitait séparer de la politique que l'art qui nous déplaît ou les prises de parole en désaccord avec nos engagements. Les deux positions antagonistes coexistent dans une forme de lutte pour un surcroît d'approbations, pour être repris ailleurs, pour engager une polémique qui va dépasser les seuls espaces d'expression libre. Finalement, en disant ne pas vouloir faire de politique, ces gens en font quotidiennement. Et je peine à croire qu'ils ne s'en aperçoivent pas.
La spécialité du « deux poids, deux mesures » que le monde politique pratique en permanence semble maintenant reprise par des internautes anonymes sinon conscients de leur positionnement politique, du moins bien au courant de leur potentiel pouvoir de nuisance.
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Aya Nakamura et les JO : quand la France exporte son racisme

Aya Nakamura est l'artiste française la plus connue à l'étranger. Ces tubes viraux on pu faire le tour du monde notamment « Djadja », « Copine »... Ce choix n'est pas le fruit du hasard, cette artiste connaît un succès à l'international et fait le show. C'est ce que l'on attend lors d'un événement de cette envergure.
Tiré du blogue de l'autrice.

Aya Nakamura aux JO : un choix questionné
Les internautes sont conscients du choix stratégique fait pour “redorer” le blason de la France après les nombreuses polémiques racistes et islamophobes. Une femme noire pour l'ouverture des JO en France, quel pays progressiste ! Mais rapidement cette nouvelle ouvrira un spectacle raciste et misogyne. Pour illustrer cette annonce, un média a utilisé une photo de… Naomi Campbell au côté de Brigitte Macron ou des internautes français utilisent une photo de Megan Thee Stallion, artiste américain, pour dénoncer le manque de classe de la chanteuse française.
Confondre deux personnes racisés n'est pas une simple erreur : les personnes racisées ici les femmes noires n'ont pas le droit à leur individualité. Cela est aussi constaté par la psychologue Racky KA-SY :
- “Refuser de reconnaître l'autre comme un être unique et distinct des autres [...], nier son identité et ne pas le considérer comme l'humain qu'il est, c'est de la déshumanisation.”
Nous parlons également de l'homogéneisation exo-groupe c'est-à-dire que nous voyons les groupes différents de nous comme homogène d'où le fait de les confondre, ce regard reste fondé sur des idées reçues et stéréotypes. À contrario, l'hétérogéneisation endo-groupe permet de distinguer les personnes du groupe auquel nous appartenons. Il y a tout de même un certain rapport de domination qui s'instaure à travers ce regard porté sur l'autre.
Ce choix est remis en cause car il est considéré que la chanteuse n'est pas légitime pour représenter la France. Femme noire, issue d'un quartier populaire avec un style entre la pop, le R&B, le hip-hop et l'afrobeat… Au final un style très en vogue, un mélange et un renouvellement qui enflamment les pistes du monde entier. Certain.e.s se questionnent, peut-on ne pas aimer ce choix et ne pas être raciste ?
L'identité française : le mépris de classe et le racisme ?
Pour ses réfractaires, Aya Nakamura ne représente pas la France, ses chansons, son image ne collent pas. Nous avons pu avoir des propositions comme Michel Sardou, Patrick Bruel, Jean-Jacques Goldman ou encore Véronique Sanson… Si ce sont des grands noms de la chanson française, est ce qu'en 2024 ils ont la visibilité d'Aya Nakamura ? Et surtout est-ce vraiment pertinent dans le cadre des JO ? Il y a tout de même une volonté à parler au monde entier donc mettre une artiste internationale reste un choix cohérent. Le problème reste le racisme qui découle de cette annonce.
“ Y a pas moyen Aya, ici c'est Paris pas le marché de Bamako” voici ce que l'on peut lire sur la bannière d'un crépuscule d'extrême droite pour contester cette décision. À partir de là, est-ce que les débats parallèles comme ses tenues ou ses paroles ont de l'importance ?
La chanteuse subit de la misogynoir depuis le début de sa carrière. La misogynoir est un concept de la chercheuse Moya Bailey voulant mettre en lumière l'expérience particulière du racisme et de la misogynie que vivent les femmes noires. Comme le fait d'être les comparer à des hommes noirs quand leur physique ne répond à certaines injonctions (comme le fait de ne pas porter de maquillage ou d'avoir un corps musclé), les considérer comme des femmes colériques et agressives. À cela s'ajoute du mépris de classe car elle joue une musique qui n'est pas légitime si nous reprenons les théories bourdieusiennes du champ musical.
Les commentaires revenant assez souvent sont : “elle ne représente pas la France”, “elle est vulgaire”, “des textes qui ne sont pas écrit en français”... La musique peut avoir plusieurs formes. Nous avons des musiques à textes avec un message profond comme nous avons des musiques plus légères qui conviennent aux espaces festifs. Chanter du Edith Piaf n'est en rien un sacrilège, nombreux sont les artistes reprenons des titres de la variété française dans des genres tout à fait différents, c'est aussi ça la magie de l'art.
Racisme, misogynie, mépris de classe, les éditorialistes français se surpassent afin de contester ce choix qui n'a pas été acté. D'autres se voit surpris du manque de réaction du président qui n'avait pas hésité à prendre la parole pour défendre Gérard Depardieu. Même reproche à Rachida Dati qui avait pu promouvoir la musique dite urbaine argumentant sur le mépris de classe et la dimension artistique et politique du rap
“Mais je vous dois quoi en vrai ? Que dalle !”
La réponse de l'artiste a pu faire parler. Afin de répondre à la banderole raciste la chanteuse a pu tweeter :
- “Vous pouvez être racistes mais pas sourds. C'est ça qui vous fait mal ! Je deviens un sujet d'État numéro 1 [..] mais je vous dois quoi en vrai ? Que dalle !”
Forcément nous avons eu le droit à la fameuse gratitude que nous devons avoir surtout en tant que personne racisées, j'ai pu aborder cette question suite à la polémique autour d'Omar SY l'an dernier. Par son travail et son parcours, la chanteuse a pu se faire une place avec un succès international tout en subissant tous les jours des attaques sur son physique, sa couleur de peau, sa vie privée…. mais comme j'avais pu le préciser les personnes racisées devraient être plus reconnaissantes que le reste de la population. "Grâce à la France vous avez pu avoir du succès", il y a clairement une dimension raciste derrière cela et pour illustrer cette vision nous pouvons reprendre des propos tenus sur Sud Radio au sujet de la journaliste Rokhaya Diallo :
« Sans la France madame Diallo serait en Afrique avec 30kgs de plus, 15 gosses, en train de piller le mil par terre et d'attendre que Monsieur lui donne son tour entre les 4 autres épouses.
Des propos violents au niveau de la banderole de l'extrême droite. Pouvons-nous commencer à questionner l'aisance avec laquelle il est permis de tenir des propos d'une telle violence sous prétexte de la liberté d'expression ?
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Appel pour la VIème Rencontre écosocialiste internationale

Les 9, 10 et 11 mai 2024, la VIème Rencontre écosocialiste internationale et la Ière Rencontre écosocialiste Latino-Américaine et Caribéenne se tiendront à Buenos Aires.
Tiré de Gauche anticapitaliste
13 mars 2024
Par Collectif
Appel pour la VIème Rencontre écosocialiste internationale
La VIème Rencontre écosocialiste est la première à se tenir en Amérique Latine et dans les Caraïbes (Abya Yala), et s'inscrit dans la lignée des précédentes Rencontres organisées en Europe. Elle cherche à alimenter les débats sur la base de l'accumulation des constructions antérieures. L'objectif est de passer des dénonciations et des luttes défensives à la construction d'une stratégie globale pour affronter les causes structurelles générées par la marchandisation et la déprédation capitaliste et pour avancer vers un modèle de société qui n'est pas gouverné par les profits des entreprises et d'autres groupes d'intérêt, mais plutôt en termes de besoins sociaux en équilibre avec la nature et dans une perspective éco-féministe et anti-raciste.
La réunion comprendra des panels, des ateliers, des plénières et des espaces d'échange entre les collectifs, les activistes et les organisations en lutte afin d'avancer collectivement vers un agenda et un programme de lutte pour l'écosocialisme. Afin d'arriver à la réunion avec des contributions et des lignes de travail définies, nous organisons des activités en ligne qui peuvent être suivies via notre chaîneYouTube.
Nous comprenons que la diversité qui nous caractérise en tant qu'organisations de défense des biens communs et de lutte pour un monde sans exploitation est notre plus grande force, c'est pourquoi nous invitons tout le monde à participer aux groupes de travail et surtout à la construction de notre programme, qui sera l'axe organisateur des débats que nous voulons avoir dans ce moment historique. La construction est ouverte aux collaborations et nous vous encourageons à participer organiquement à cette instance afin d'avancer dans les discussions qui nous semblent indispensables.
La Rencontre aura une instance hybride, au moins pour les débats principaux, afin de faciliter la participation de celleux qui ne peuvent pas être présent·e·s en présentiel. Toutes les informations seront diffusées par le biais de nos réseaux et de notre liste de diffusion, et toute personne intéressée peut demander l'accès à la liste en cliquant sur le lien suivant :https://groups.google.com/g/6encuen...
Afin d'encourager et de donner de l'espace à tous les points de vue intéressés par la construction d'un horizon écosocialiste, nous recevons des contributions telles que des textes et/ou d'autres matériaux qui seraient intéressants pour socialiser avec le collectif qui participera à la Rencontre. Vous pouvez envoyer votre contribution par email : 6encuentroecosocialista@gmail.com ou par les réseaux de messagerie au numéro +541135648839.
Nous commençons à élaborer le programme de la Rencontre. Nous souhaitons que ce programme reflète les propositions des différents collectifs qui seront présents. Nous vous invitons à nous envoyer vos propositions et à participer aux réunions du groupe de travail programmeà travers ce lien. Nous avons déjà plusieurs axes thématiques, tels que l'écoféminisme, le militarisme, le syndicalisme, l'extractivisme et la stratégie et la construction écosocialiste.
L'objectif de la 1ère Rencontre Ecosociale d'Amérique Latine et des Caraïbes est de donner une continuité aux débats écosociaux à partir des territoires et des enjeux de la région, et il est proposé de poursuivre avec une seconde Rencontre qui se tiendra à l'occasion de la COP 30, qui aura lieu au Brésil l'année prochaine. Afin de construire le processus de la 2ème Rencontre, le Réseau Brésilien des Ecosocialistes a proposé de faciliter et de promouvoir les échanges nécessaires à la formation d'une coordination large et diversifiée de collectifs et d'activistes en vue de l'organisation de la 2ème Rencontre à Bethléem.
Dans cet Appel pour les VIèmes Rencontres, nous aimerions compter sur la signature d'organisations et/ou d'individus qui souhaitent contribuer à la diffusion et à la construction de l'initiative, pour lesquelles nous partageons notre Appel. Nous sommes en train d'organiser la logistique pour recevoir tout le monde de la meilleure façon possible, nous demandons donc à celleux qui souhaitent participer aux activités de remplir notre formulaire d'inscription.
Le contexte dans lequel nous devons organiser cet événement depuis l'Argentine est celui de l'avancée d'une extrême droite qui vise à détruire les droits gagnés par les syndicats, les féminismes et les organisations qui ont lutté – et continuent de lutter – pour plus de démocratie et une meilleure démocratie, en affrontant les dictatures et les projets néolibéraux.
Cependant, tout ce scénario nous appelle également à construire des horizons possibles à partir des luttes sociopolitiques et écologiques d'en bas et de gauche. Aujourd'hui, plus que jamais, l'Argentine et l'Amérique latine ont besoin du soutien et de la solidarité internationalistes. C'est pourquoi nous comptons sur la présence de nombreux·euses camarades pour un débat fraternel.
Afin de rendre la Rencontre possible, nous demandons aux organisations, collectifs et individus qui peuvent et/ou veulent collaborer financièrement de le faire à travers le compte suivant. Nous pourrons ainsi commencer à préparer les espaces et garantir le transport, l'hébergement et la nourriture des camarades, ainsi que l'équipement nécessaire pour les transmissions en ligne.
IBAN ES25 1491 0001 2221 7799 8321
BIC TRIOESMMXXX
Titre : ASOCIACIÓN ANTICAPITALISTAS MOVIMIENTO POR EL PODER POPULAR (ASSOCIATION ANTICAPITALISTE POUR LE POUVOIR POPULAIRE)
Concept : Contribution VI Rencontres écosocialistes
Nous vous attendons à Buenos Aires !
Toutes les infos sur le site alterecosoc.org
Premières signatures
Anticapitalist Resistance / Anticapitalistas – España / Articulação Nacional das Mulheres Indígenas Guerreiras da Ancestralidade – Brasil / ATTAC Argentina / CADTM – AYNA/ Centelhas (PSOL) – Brasil / CLATE – Argentina / Climaximo – Portugal / Corriente Política de Izquierda (CPI) – Argentina / EcosBrasil / Ekologistak Martxan – País Vasco / ESK sindikatua- País Vasco / Extinction Rebellion South Africa / Gauche anticapitaliste – Belgique / Groupe écosocialiste de solidaritéS – Suiza / Grupo Iniciativa Ecosocialista en Chile / Gune Ekosozialista – País Vasco / Heñói – Paraguay / Huerquen Comunicación – Argentina / Insurgência (PSOL) – Brasil / Internacional de Servicios Públicos (ISP) / Jauzi Ekosoziala – País Vasco / La Cultural de la Costa – Argentina / LAB – País Vasco / Marabunta – Argentina / Marcha Plurinacional de los Barbijos – Argentina / Movimento Pela Soberania Popular na Mineração (MAM) – Brasil / Multisectorial Paren de Fumigarnos – Santa Fe – Argentina / Museo del Hambre – Argentina / Nouveau Parti Anticapitaliste – Francia / Nuestramérica – Argentina / Observatorio Petrolero Sur – Argentina / Plataforma América Latina y el Caribe Mejor Sin TLC / Poder Popular – Argentina / Propuesta Sur – Argentina / Rebelião Ecossocialista – Brasil / Rede Brasileira de Ecossocialistas – Brasil / Setorial ecossocialista del PSOL – Brasil / SolidaritéS – Suiza / Steilas sindikatua – País Vasco / Subversión – Argentina / Subverta (PSOL) – Brasil / Transnational Institute (TNI) / Yasunidxs – Ecuador
Adrian Ruiz / Alejandro Horowicz / Alfonso Caño Reyero / Andoni Louzao Bustamente / Andrea Leonett / Arlindo Rodrigues / Aude Martenot / Beatriz Rajland / Cecília Feitosa / Cecilia Piérola / Christine Poupin / David Fajardo / Eduardo Giesen / Endika Perez Gomez / Evelyn Vallejos / Fernando E. Tecuatl / Fernando Gonzaléz Cantero / Flavio Serafine / Francisca Fernández Droguett / Gabriel Casnati / Gabriel E. Videla / Hugo Milito / Iñaki Bárcena / Iñaki Uribarri / Iñigo Antepara / Iratxe Álvarez Reoyo / Iratxe Delgado Arribas / Ivan Moraes / Janilce Magalhães / Javier Aguayo / Javier Echaide / Jeanne Planche / Joana Bregolat / João Camargo / Joaquin Vega Padial / José Manuel Gutiérrez Bastida / José Seoane / José Seoane / Juan Tortosa / Julio Gambina / Licia Garcia / Listado de personas / Luciana Ghiotto / Lucien Durand / Manuel Gari / Marcos Filardi / María Elena Saludas / Mariana Souza / Marije Etxebarria Ezpeleta / Mario Bortolotto / Marisa Castro Delgado / Martin Lallana / Martín Mosquera / Mauricio Cornaglia / Mauricio Laxe / Michel Loẅy / Moira Millan / Natalia Chaves / Nathalie Delbrouck / Ollivier de Marcellus / Professor Túlio / Renan Dias Oliveira / Renato Roseno / Ritxi Hernández Abaitua / Rodrigo Andrade / Sabrina Fernandes / Sara Ibáñez Ortega / Sébastien Beltrand / Sébastien Brulez / Sergio Abraham Esparza / Sergio Esparza / Steven Tamburin / Talíria Petrone / Tamara Perelmuter / Tárzia Medeiros / Teo Frei / Tom Kucharz / Tomi Etxeandia Egidazu / Vanessa Dourado / Yayo Herrero
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Leila Alaoui, made in India

Paris. Quartier du Marais. Jeudi, 7 mars 2024. La Galeria Continua expose une série d'oeuvres inédites de Leila Alaoui. L'artiste, en résidence à Chennai, ancienne Madras, en Inde, témoigne de la condition ouvrière dans les usines de textile.
PAR MUSTAPHA SAHA.
Elle installe durant l'été 2014 un studio mobile avec projecteurs, déflecteurs, toile de fond noire Le cadre se décontextualise. Les trois cents travailleuses, revêtues de saris magnifiques, défilent devant son objectif. Aucune sélection préalable. Se nouent spontanément des liens d'empathie. Chaque séance est un moment d'amitié. Les gestes, les postures, les allures se ritualisent. Des silhouettes fines, droites, impassibles. Des peaux hâlées par le soleil et le vent. Des regards profonds. Un immense panneau décline trente gros plans de mains, des mains indélébilement marquées par le dur labeur, striées de cicatrices, rugueuses, noueuses. Des mains parfois effilées de jeunes filles. Des mains quelquefois veineuses, trahissant un âge avancé. Des mains nues découvrant leur innocence. La communauté féminine d'une obscure région tamoule acquiert, par la magie de l'art, une impressionnante visibilité.
En cette année 2014 où Leila Alaoui réalise son reportage photographique, une étude du Centre de recherche sur les entreprises multinationales (SOMO) et du Comité néerlandais pour l'Inde (ICN) souligne les conditions inhumaines de travail dans les filatures du Tamil Nadu. Des employées de tous âges travaillent six jours par semaine, du matin au soir, pour des salaires dérisoires. Les femmes sont incitées à quitter leur village par des promesses alléchantes. Elles se retrouvent esclavagisées. Les cadences infernales ne laissent aucun répit. Beaucoup des travailleuses sont hébergées dans des résidences misérables appartenant aux entreprises. Les gérants et les superviseurs, exclusivement des hommes, intimident, menacent, apeurent, profèrent des insultes et des injures. Les contrôles systématiques, les pressions permanentes, les chantages au licenciement au moindre retard entraînent une lourde pathologie professionnelle, maladies respiratoires, affections vésicales et rénales, problèmes cardiaques, lombalgies, fatigues chroniques, crises d'angoisse, dépressions.
Les usines d'habillement sous-traitent au profit des marques occidentales. La mondialisation est synonyme de délocalisation. Les enseignes de confection ne se soucient guère du fonctionnement interne de leurs fournisseurs, des violations des droits humains. Les carences de sécurité sont partout criantes. Les drames se succèdent. Les fabriques sont des cimetières de la mode jetable, du surconsumérisme effréné. Les vêtements et les chaussures usagés s'évacuent dans les pays du sud. Les marques d'ultra fast fashion rabaissent sans limites les petits prix. Les produits bon marché s'acculement dans des décharges monstrueuses. Selon le rapport 2020 de Climate Chance, l'industrie du textile est responsable d'un tiers des rejets de microplastiques dans l‘océan.
L'exposition est aussi une invitation à découvrir la culture tamoule. Les grands formats de Leila Alaoui suggèrent les architectures domestiques où certaines ouvrières évoluent au quotidien, les vérandas sur la rue avec des tuiles sur poteaux de bois, les cours intérieures, les arrière-cours, les thalvarams surnommés « les rues qui parlent ». Les façades offrent des extensions publiques, des passages toiturés au service des piétons, des bancs maçonnés pour les visiteurs et les pèlerins. La rue s'homogénéise avec juxtaposition d'appentis, de corniches, de pilastres, de colonnes ornées, de parapets sculptés. Une atmosphère retrouvée dans la scénographie de l'exposition, salles désenclavées, vétustés esthétiquement exploitées.
Les Tamouls, vivant majoritairement dans l'Etat du Tamil Nadu, principalement des indous, comptent également des minorités chrétiennes et musulmanes. Une culture millénaire, diversitaire. Une langue ancienne, riche d'un formidable patrimoine littéraire. Une musique antique, dite carnatique, codifiée quatre siècles avant l'ère chrétienne, essentiellement basée sur l'improvisation. Les architectures dravidiennes, les temples rocheux, les grottes sacrées, les stupas, les mosquées, les palais, les bas-reliefs, les arches monumentales, toranas. La vallée de l'Indus est la plus immémoriale des civilisations urbaines, avec la Mésopotamie et l'Egypte pharaonique. Les styles accompagnent l'évolution du bouddhisme. Révolution iconographique il y a deux mille ans, le Bouddha est représenté, pour la première fois au Gandhara, sous forme humaine. Les techniques de construction se perfectionnent avec les royaumes hindouistes du sud à partir du huitième siècle. Les temples en pierre se substituent aux édifices excavés. Plus tard, les architectures indo-musulmanes et mogholes.
Les dynasties tamoules antiques, protectrices des lettres et des arts, archivistes, édificatrices d'architectures somptueuses, entretiennent des relations diplomatiques avec Athènes et Rome. Une relation grecque anonyme du premier siècle, Periplus Maris Erytraei, Le Périple de la mer Erythrée, énumère les exportations indiennes, poivre, cannelle, nard, perles, ivoire, soie, diamants, saphirs, écaille de tortue. Au sixième siècle, les Pallava érigent le premier empire. La construction de vastes temples, fastueusement décorés, s'accélère. Des sages tamouls fondent le mouvement bhakti, composante essentielle de l'indouisme, préconisant l'amour pur et l'oubli de soi. Cinq voies balisent sa pratique, le jnâna yoga, yoga de la connaissance, le karma yoga, voie de l'action consacrée, le raja yoga, exercices physiques et spirituels, le tantra yoga, rites magiques et la discipline personnelle. Les Chola renversent les Pallava au neuvième siècle. Les invasions musulmanes prennent la relève à partir du quinzième siècle. Deux siècles plus tard, les puissances européennes établissent des colonies. Français, britanniques, portugais, néerlandais introduisent des styles européens, des dômes gothiques, des tours d'horloge victoriens. New Delhi s'enorgueillit de ses monuments Art déco. La Grande-Bretagne domine tout le sous-continent jusqu'à l'indépendance de 1947.
L'art tamoul est surtout un art religieux. La peinture de Tanjore apparaît au neuvième siècle. Le support est une pièce d'étoffe recouverte d'oxyde de zinc. L'image est polychrome. Elle peut être ornée de pierres semi-précieuses, brodée de fils d'or et d'argent. Le style d'origine est repris avec des techniques adaptées dans les fresques religieuses. Les sculptures de pierre et les icônes de bronze, de l'époque Chola notamment, sont des contributions majeures au patrimoine de l'humanité. Cet art se caractérise par des lignes douces et fluides, des détails traités avec une infinie minutie. Ni préoccupation d'exactitude ni souci de réalisme dans l'éxécution des portraits. Un art archétypal.
Flotte dans l'air de l'exposition une empreinte d'indigo, couleur apaisante, relaxante, envoûtante. Chromatique de la méditation, de l'intuition, de l'inspiration, de la création, de la conscience profonde. La haute résolution accentue l'effet hypnotique. L'indigo, pigment végétal issu des feuilles et des tiges de l'indigotier, était, dans les temps anciens, un produit de luxe. Les grecs et les romains l'appelaient l'or bleu. L'indigo, réintroduit dans les pays occidentaux au quinzième siècle par des marchands arabes, est prisé par les hippies pacificistes et la contre-culture californienne. Il imprègne de sa légende jusqu'aux Bleu jeans. Nous baignons toute l'après-midi dans un espace hors-temps, une ambiance hiératique peuplée de déesses.
Octobre 2014. Je fais la connaissance de Leila Alaoui à l'occasion de l'événement Le Maroc contemporain à l'Institut du Monde Arabe où nous sommes tous les deux exposants. Je présente des peintures sur toile, des portraits de figures de proue de la littérature marocaine, Driss Chraïbi, Edmond Amran El Maleh, Mohamed Leftah. Leila Alaoui montre Cossings, Traversées, une installation vidéo immersive, en triptyque, sur des migrants subsahariens clandestins, plongés dans un environnement hostile, collectivement traumatisés. Le pseudo-paradis européen se révèle une utopie problématique. Elle évite judicieusement la corde sensible. Portraits statiques, paysages abstraits, voix-off. La démarche anthropologique rejoint mon travail sociologique en recherche-action. Nous avons quelques conversations philosophiques. Elle me pose des questions sur Mai 68, sur le cinéma de Jean Rouch, sur la théorie rhizomique de Gilles Deleuze et Félix Guattari, sur des événements historiques qu'elle aurait voulu avoir vécus, sur des intellectuels qu'elle aurait voulu avoir connus. Elle me paraît assurer une relève crédible. Elle élabore des méthodologies originales, des techniques novatrices. Elle me tient informé de ses projets artistiques, toujours motivés par des raisons solidaires. J'apprécie sa soif intellectuelle, son énergie créative. Je lui consacre une chronique, après sa disparition tragique en juin 2016, intitulée Leila Alaoui ou l'ombre de l'absente. Dans l'édifice prestigieux de la Maison Européenne de la photographie de Paris, une photographie en noir et blanc de Leila Alaoui en guise d'hommage. Terrible contraste avec le rayonnement de son sourire. Remonte des tréfonds de l'être l'insurmontable sentiment d'impuissance. Que dire face à la perte irremplaçable d'un joyau de la terre ?
Mustapha Saha
Sociologue, artiste peintre.
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« Aid state : elite panic, disaster capitalism, and the battle to control Haiti »

L'État d'Haïti est au bord de l'effondrement : des groupes armés ont envahi le pays, de nombreux responsables gouvernementaux ont fui après l'assassinat du président Moïse en 2021, des réfugiés ont désespérément embarqué sur des bateaux pour rejoindre les États-Unis et l'Amérique latine, et l'économie est sous le choc des séquelles, de catastrophes, tant d'origine humaine que naturelle, qui ont détruit une grande partie des infrastructures d'Haïti.
« Aid state : elite panic, disaster capitalism, and the battle to control Haiti » by Jake Johnston, St Martin's Press. Published 18/03/2024. 384 pages. ISBN/Ean 1250284678 / 9781250284679. £18.74 £24.99
Tiré de Browns Books.
Traduction Google+a.c.
Comment une nation fondée sur la libération - un peuple qui s'est révolté avec succès contre ses colonisateurs et ses esclavagistes - est-elle arrivée à un tel précipice ? Dans « Aid State », Jake Johnston, chercheur et écrivain au Center for Economic and Policy Research, révèle comment les objectifs des capitalistes américains et européens ont réasservi Haïti sous prétexte de l'aider.
Pour l'Occident, Haïti a toujours été un endroit où la main d'œuvre est bon marché, où les politiciens sont dociles et où les profits peuvent être réalisés.
Au cours de près de 100 ans, les États-Unis ont cherché à contrôler Haïti avec une police d'occupation, des militaires et des forces de maintien de la paix, ainsi qu'avec des dirigeants triés sur le volet, censés réprimer les soulèvements et protéger les intérêts des entreprises.
Les tremblements de terre et les ouragans n'ont fait que nuire davantage à un État déjà décimé par le complexe industriel "humanitaire". Basé sur des années de reportages sur le terrain en Haïti et d'entretiens avec des hommes politiques aux États-Unis et en Haïti, des responsables de l'ONU et des Haïtiens qui luttent pour leur vie, leur foyer et leur famille, « Aid State » est un livre de témoignage qui bouleverse les consciences.
Image for Aid state : elite panic, disaster capitalism, and the battle to control Haiti
Une suggestion de lecture de : André Cloutier, Montréal, Québec, 17 mars 2024*
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Adresse inaugur@le pour une revue

Les tambours de guerre du FNL vietnamien annonçaient une incroyable nouvelle : les envahisseurs n'étaient pas invincibles. Partout, ou presque, les campus s'enflammaient, l'insubordination ouvrière se répandait comme une traînée de poudre, le vieux monde était bousculé, Paris, Mexico, Berlin, Berkeley, Turin et Prague ne faisaient plus qu'un.
Tiré d'Entre les lignes entre les mots.
C'était il y a longtemps
La jeunesse, celle des facs et celle des usines, secouait la vieille société, les hiérarchies, les pouvoirs de droit divin, la propriété inaliénable, le patriarcat, les bureaucraties prédatrices et liberticides. Les murs prenaient la parole et les barricades ouvraient des voies insoupçonnées.
Désordre climatique dans le monde de Yalta, le cycle des saisons en fut perturbé. Le printemps fut tchécoslovaque et, en France, Mai dura jusqu'en juin. En Italie, Mai fut rampant et l'automne chaud. Dans les années qui suivirent, tout avait semblé possible à Santiago et à Lisbonne qui s'était couvert d'œillets.
Le fond de l'air était rouge et le souffle long de la révolution mit à mal la propriété privée des moyens de production, la morale établie, les rapports sociaux sexués, les divisions ethniques et les partis uniques. Il y eut de la contestation et de la subversion, des grèves et des conseils ouvriers, des expropriations et de l'autogestion, des livrets militaires brûlés, des batailles pour les droits civiques, des combats pour l'égalité et la libération des femmes, l'émergence nouvelle de l'écologie et, à une échelle inconnue jusque-là, d'un raz-de-marée féministe. Les libertés inabouties ou trahies étaient à portée de main et la chienlit éclaboussait les pères fouettards et les gardes-chiourmes.
Le monde pouvait changer de base : il apparaissait désormais possible de se réapproprier le contrôle des mécanismes de la vie en société. La démocratie pouvait être sans bornes et ne plus s'arrêter ni à la porte des entreprises ni aux frontières pas plus que dans les quartiers et les relations entre les peuples.
C'est aujourd'hui
Le monde a changé. Le printemps fut brisé à Prague et à Santiago, étouffé à Lisbonne. Un silence de mort est retombé sur la place Tienanmen. Mais le Mur de la prison « soviétique » s'est effondré libérant à la fois un espace pour la liberté et un continent entier aux prédateurs. L'emprise des multinationales sur le monde ne connaît plus guère de limites. Les impérialismes ont désormais de nombreux visages. De même que la barbarie. La planète brûle des prédations que la civilisation capitaliste lui inflige. Le monde est lourd du péril de la guerre de tous contre tous. Le fond de l'air est sombre, parfois même brun. Les fascismes du 21e siècle ne portent pas que des chemises noires.
Demain est pourtant déjà commencé
Cela fait plus d'un demi-siècle que d'aucuns avaient annoncé que la « civilisation était à un carrefour ». Il fallait choisir un itinéraire qui passait par des politiques démocratiques qui mettent au service du plus grand nombre ce que permettaient les progrès sociaux, culturels, scientifiques, technologiques et humains. Les chars russes, ceux qui pensaient que le bilan était « globalement positif », ceux qui se sont adaptés et accommodés et bien sûr ceux qui étaient partisans de la liberté du renard dans le poulailler en ont décidé autrement.
La civilisation est désormais au bord du gouffre : les forces du capital, celles des impérialismes et des sous-impérialismes, celles des barbaries et celles des fascismes sont à l'offensive sur la planète. Une planète qui brûle.
Quant aux forces émancipatrices, elles ont souvent fait, en partie, ce qu'elles ont pu mais elles se sont également souvent égarées dans diverses impasses dont les noms figurent sur les cartes comme autant d'obstacles à éviter : « campisme », « avant-gardisme », « substitutisme », « étatisme », « sectarisme » , « autoritarisme », « relativisme » et bien d'autres encore.
Alors oui, il faut en sortir. D'où l'idée d'une revue
Une de plus, direz-vous. C'est vrai. Cependant son titre se veut un clin d'œil à l'Association internationale des travailleurs de Marx et Bakounine et un appel à la mise en place d'un outil international et internationaliste de réflexion, de partage et d'échanges.
Le projet que vous avez sous les yeux paressait dans divers tiroirs. Il attendait un déclic. Celui-ci est venu d'outre-Atlantique avec le texte « Pour une gauche démocratique et internationaliste » rédigé par Ben Gidley, Daniel Mang et Daniel Randall, que nous avons été plusieurs à signer en répondant ainsi à leur appel et que nous publions en page 5 de ce numéro 00. C'est un texte qui met les pieds dans le plat et qui appelle au renouvellement des pratiques et des idées afin de rester fidèles à ce pour quoi nous combattons depuis des décennies : nous sommes attaché·es à une vision et à une pratique révolutionnaire où la démocratie, l'auto-organisation, l'autogouvernement – sous toutes leurs formes – sont au cœur du projet. Non la démocratie comme abstraction mais la démocratie comme objectif. Non l'internationalisme comme abstraction mais l'internationalisme comme pratique.
L'ambition est claire : faire renaître la capacité à discuter et à élaborer ensemble pour que s'ouvre – à la lumière de nos expériences multiples qui se sont souvent frottées les unes aux autres – une large discussion pour faire de la révolution une utopie concrète, pour permettre des synthèses, pour conserver et transmettre la mémoire des luttes, des expériences, des révolutions, pour contribuer à la socialisation des opprimé·es et des exploité·es.
Alors oui, une revue mondiale qui mette en place les conditions d'un échange mondial et qui donne accès « au plus grand nombre » à l'archipel des articles et des textes participant de cette recherche d'une issue à la crise du projet émancipateur.
Une revue pour explorer l'internationalisme et la démocratie
Sa « base politique » sera articulée autour des thématiques suivantes : émancipation du travail, autogouvernement, autodétermination, autogestion, auto-organisation, féminisme et genre, révolution, renversement/dépassement du capitalisme, alternatives, droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, démocratie socialiste, reconversion industrielle pour une production socialement utile et écologiquement soutenable, refus du campisme et lutte contre tous les impérialismes et sous-impérialismes…
Une revue singulière composée de « cahiers » comportant des textes et articles piochés sur les sites et revues du monde, une sorte de plateforme, de hub où se croiseront les réflexions, selon un dispositif à construire et sans autres lignes directrices que de permettre l'échange et la lecture.
Une revue qui ne fera volontairement aucune concurrence aux publications papier ou internet existantes, bien au contraire, qui agira pour les mettre en synergie.
Une revue qui évitera les polémiques de seconde zone ou les textes étroitement politiciens.
Un projet ouvert en construction permanente.
Télécharger le n°0 au format PdF : Adresses inaugurales n°0
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Vous trouverez ci-joint le numéro 00 de notre revue.
Nous écrivons dans l'éditorial : « L'ambition est claire, faire renaître la capacité à discuter et à élaborer ensemble pour que s'ouvre, à la lumière de nos expériences multiples qui se sont souvent frottées les unes aux autres, une large discussion pour faire de la révolution une utopie concrète, pour permettre des synthèses, pour conserver et transmettre la mémoire des luttes, des expériences, des révolutions, pour contribuer à̀ la socialisation des opprimé·es et des exploité·es. »
Certes, le projet formulé est ambitieux, mais il nous oblige. Nous pensons qu'il faut prendre des initiatives simples et rapides si nous ne voulons pas que l'« Appel pour une gauche démocratique et internationaliste » ne se transforme en une simple pétition.
Nous pourrions nous rencontrer pour faire connaissance, échanger sur les conditions d'un possible débat et jeter les bases d'une discussion organisée autour de nos objectifs communs.
Aussi, nous prenons l'initiative d'inviter les signataires qui le peuvent à se réunir à Paris courant mai. Un prochain courrier précisera le rendez-vous.
Bien sûr, cette réunion ne s'oppose pas aux réunions mondiales zoom envisagées autour de thèmes définis. Au contraire. Elle s'inscrit dans la perspective de faciliter les échanges entre nous.
Merci de faire parvenir à l'adresse de la revue vous remarques et votre avis concernant cette rencontre en mai à Paris.
Pour nous écrire : Adresses.la.revue@gmail.com
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Pourquoi la bifurcation écologique est incontournable

L'économiste Cédric Durand et le sociologue Razmig Keucheyan ont joint leurs réflexions pour imaginer les voies possibles vers une planification écologique afin d'arrêter la destruction des écosystèmes.
13 mars 2024 | tiré de politis.fr | Illustration : Comment bifurquer. Les principes de la planification écologique, Cédric Durand et Razmig Keucheyan, La Découverte/Zones, 256 pages, 20,50 euros.
https://www.politis.fr/articles/2024/03/cedric-durand-ramzig-keuchian-comment-bifurquer-pourquoi-la-bifurcation-ecologique-est-incontournable/
Bien que toutes les personnes raisonnables sachent parfaitement que la crise environnementale menace et mène à la possible destruction de tous les êtres vivants, humains compris, les décisions prises par nos dirigeants politiques, industriels ou technocrates supposés travailler sur le sujet ne sont toujours pas à la hauteur de « l'impasse dans laquelle nous nous trouvons ». Et si la question environnementale est paradoxalement omniprésente dans le débat public, les indicateurs écologiques sont aujourd'hui tous au rouge.
Devant cette impuissance, ou plutôt cette non-volonté de changer de voie pour sauvegarder notre environnement, les deux auteurs de cet essai novateur, l'économiste Cédric Durand (université de Genève) et le sociologue Razmig Keucheyan (université Paris-Cité), se sont d'abord penchés sur les raisons de cette absence de réactions et de modifications du développement économique planétaire, en dépit de l'évidence des destructions en cours. Mais leur livre est surtout une analyse du chemin qu'il est impératif de suivre pour « bifurquer ».
« Limite fondamentale »
Bifurquer vers un autre monde s'impose en effet sans traîner, soulignent les deux chercheurs, puisqu'il est certain que « le monde du capitalisme industriel, productiviste et consumériste n'est pas compatible avec la préservation des écosystèmes vivables pour les humains ». Depuis 2008 et la dernière grande crise du système capitaliste, les États ont dû « dissiper cette illusion – pour ceux qui étaient encore sous son emprise – de la vertu régulatrice des marchés ». Et donc intervenir, les économies étant depuis largement sous perfusion publique.
La crise du covid-19 n'a fait que confirmer ce processus, celui d'une « 'étatisation' des mécanismes de marché », en phase avec un projet néolibéral qui, loin de réduire le pouvoir des États, s'emploie à s'en servir pour mieux protéger et développer les intérêts des marchés et des grandes entreprises productivistes, extractivistes, consuméristes, voire spéculatrices. Pourtant, « le cœur du problème actuel réside dans la crise environnementale » et « les solutions de marché à cette crise ne fonctionnent pas ».
Le capitalisme n'a d'autre boussole que le profit, et il n'investira que s'il en escompte un.
Cette crise, insiste les auteurs, se heurte à une « limite fondamentale », quand bien même le marché s'emploierait à « limiter » les destructions de l'écosystème : « Le capitalisme n'a d'autre boussole que le profit, et il n'investira que s'il en escompte un. » Et de souligner que « 'l'anarchie de la production' – la concurrence entre capitaux privés – empêche que les investissements nécessaires à la bifurcation écologique soient collectivement hiérarchisés et réalisés ».
Ce système, datant de plus de deux siècles, voire trois, n'a que trop duré, car on sait désormais qu'il nous mène à une impasse, empêchant la perpétuation même de nos existences. [1] « Nous n'avons pas le temps d'attendre. » Il y a urgence et « il nous faut un plan », s'exclament les auteurs. Leur livre se veut donc « une enquête sur les mondes possibles : ceux que l'on pourra conserver et ceux auxquels il faudra renoncer ».
Puisque le modèle de la croissance illimitée et de la centralité du PIB est clairement celui qui nous conduit à l'extinction prochaine de notre planète. Cette planification à laquelle appellent les auteurs est double : d'un côté, un « calcul écologique » inéluctable pour stopper les destructions des écosystèmes et assurer notre survie ; de l'autre, l'organisation d'un « espace démocratique » ou « processus de discussion » sur le devenir économique de nos sociétés, l'un et l'autre irrémédiablement liés.
L'importance de gagner le soutien des classes populaires.
Les difficultés politiques seront immenses, ne serait-ce qu'entre centralisation des impératifs écologiques et économiques et décentralisation politique capable de promouvoir une expérimentation institutionnelle de prise de décision au plus près des besoins humains et de la nature. Car « la planification écologique joue sur deux tableaux : côté pile, le calcul écologique ; côté face, la politique des besoins ».
Une planification indissociable de l'exigence d'un renouveau démocratique et donc de la constitution politique d'un « bloc social-écologique » soutenant un tel changement institutionnel et programmatique. Cela ne se fera pas sans mal puisque « travail et capital sont fracturés selon des lignes transclasses en fonction de l'intensité carbone des secteurs dans lesquels ils s'inscrivent ». Et de souligner l'importance de gagner le soutien des classes populaires à la planification écologique. Qui « sera sociale ou ne sera pas ».
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[1] On ne saurait trop recommander, sur cette question vitale, la lecture du magistral essai écoféministe de la philosophe Émilie Hache, De la génération. Enquête sur sa disparition et son remplacement par la production, La Découverte.
Trump : La voie/voix du hors-État
Il peut s'avérer surprenant de constater à quel point la justice étasunienne semble être hypnotisée par les cas de déviance de l'ex-président, monsieur Donald Trump, qui pourtant cumule les mises en accusation pour des méfaits dont la culpabilité entraînerait normalement une sanction, en songeant surtout à l'attaque contre la démocratie et son symbole par le biais de son influence1.
Cette situation troublante mérite certes une attention et impose une réflexion qui doit aller au-delà d'une critique voulant que la justice utilise la règle du deux poids, deux mesures en fonction de la personne à l'endroit de qui des accusations pèsent. Car, il faut l'avouer, la logique veut qu'une personne qui a commis une faute reçoive une punition conséquente, bien sûr à condition d'avoir démontré hors de tout doute la faute en cause, ce qui engage forcément plusieurs nuances. Attardons-nous alors à l'une d'entre elles.
La loi du plus fort
À un certain moment de l'humanité, la hiérarchie humaine au sein d'un groupe ignorait les préceptes de la morale afin de suivre une loi fort simple : celle du plus fort. Nous pouvons présumer que la force physique et la ruse (ou force de l'esprit) régnaient donc en roi et maître. Or, la conscience et divers désirs contribuèrent à des modifications, voire à moderniser cette loi originelle de façon à garantir une meilleure cohésion de groupe. En instaurant une morale, il est alors devenu possible d'établir des règles ou des lois du vivre ensemble, supposant à la rigueur des obligations et des interdits à respecter, mais aussi des privilèges en tant que droits et libertés en vue d'un certain équilibre.
Cependant, à ces règles – subalternes – s'impose toujours la loi du plus fort qui échappe à ce registre ou plutôt réaffirme son hégémonie dans la mesure où elle ne fait pas la distinction entre un défenseur des lois et un hors-la-loi. Lorsque deux groupes se rencontrent, les plus forts d'entre eux – en puissance, en richesse ou en capital social et symbolique, non plus obligatoirement en termes de force physique – s'offrent un respect mutuel avant de s'affronter, s'il y a lieu. Plus souvent qu'autrement, des ententes tacites ou formelles assurent la coexistence des groupes sur des terrains spécifiques, voire même communs, jusqu'au moment où un déséquilibre survient et exige à l'un des plus forts de s'imposer.
Dans un contexte de loi, tout en sachant que la loi du plus fort a préséance, la coexistence d'hommes et de femmes qui respectent les lois et d'autres dits et dites hors-la-loi est assurée dans une forme de conclusion binaire dépassant la seule idée de la dichotomie du fort et du faible, puisque, tout compte fait, la vraie moralité qui découle de la loi du plus fort provient du besoin de trêve ou de compromis entre les plus forts eux-mêmes dans le but d'éviter leur anéantissement.
Des hors-États
En songeant au monde dans lequel nous évoluons, la notion d'État apparaît dans une connotation politique, juridique, géographique/territoriale, économique et sociale (incluant les communautés, les cultures et les religions) à travers laquelle les lois participent au maintien de son équilibre et mode de fonctionnement ; autrement dit, à l'ordre aspiré. Si à l'intérieur de ses frontières cette dynamique s'exerce, force est de considérer également quelques règles venant régir les relations avec d'autres États. Ces lois internationales lorsque brisées entraînent des sanctions contre le ou les États fautifs, mais le tout peut dégénérer en guerre dans un retour inéluctable à la loi du plus fort avec toute la splendeur de la barbarie qu'elle peut occasionner.
En revanche, il existe un pendant, voire l'envers de la médaille, qui suggère la présence d'un hors-État, toujours actif avec ses adeptes, à savoir une sorte de monde à la fois parallèle et interdépendant à celui de l'État, et ce, autant à l'intérieur qu'à l'extérieur des frontières nationales. Or, cette réalité binaire s'exprime dans des extrêmes dont la zone médiane s'élargit en de multiples nuances, dans la mesure où le citoyen ou la citoyenne ordinaire peut aussi bien fréquenter l'un que l'autre, consommant les produits des deux mondes qui n'en forment qu'un seul. Néanmoins, la personne qui respecte les lois et celle qui se veut hors-la-loi connaissent la ligne ou cette frontière à franchir pour passer d'un côté à l'autre, à savoir cette zone intermédiaire remplie de permissions sous-entendues. Cette forme de limite assure un équilibre des instances (ou un ordre pour éviter trop de désordre), toujours dans une certaine mesure. Imaginons un instant la possibilité d'une équivoque par laquelle une limite ou frontière différente serait établie avec des vérités alternatives davantage appréciées par la population d'ensemble, forçant ainsi la main des plus forts à redéfinir leur entente.
Pour un autre registre
Ces précédentes réflexions nous amènent vers le registre employé par l'ex-président étasunien, monsieur Donald Trump, qui a compris le pouvoir d'une idée capable de se transformer en une idéologie grâce à laquelle une vision inédite du sens de l'existence devient réalisable, ce qui signifie également une autre façon de désigner la vérité. Chose certaine, les insatisfactions de la population étasunienne, voire plutôt d'une frange visiblement réfractaire au respect des lois, servent de mobile à l'apparition d'une voie de sortie vers le hors-État qui stimule d'ailleurs l'imaginaire dans une recherche de la liberté maximale, une valeur étasunienne fondamentale. Par conséquent, les attaques contre monsieur Donald Trump par les lois accentuent automatiquement un plus grand appui envers lui par ce mouvement qui le supporte, alors que ce dernier incarne le nouvel État espéré : le hors-État.
Par un étrange paradoxe, les États-Unis, fiers de leur État, ont engendré des êtres profitant de leurs valeurs et de leurs richesses, mais provoquant en même temps leur déséquilibre graduel vers le hors-État, dont un représentant continue d'animer une volonté dont plusieurs personnes et groupes se sentent interpellés. Pour rétablir l'ordre dans le désordre, alors que les lois ne suffisent plus, la solution consiste à un éventuel combat entre les plus forts de la nation.
Conclusion
Même au sein de notre civilisation, la loi ancestrale du plus fort continue de dominer et aide à comprendre plusieurs incohérences à nos systèmes jugés moralement bons. La justice étasunienne tergiverse sur le cas de monsieur Donald Trump, parce qu'elle le reconnaît comme un fort et qu'il incarne une voie comptant de nombreux et nombreuses adeptes. Par contre, le hors-État ne signifie pas l'absence de lois, mais plutôt une façon différente de les considérer, sinon de nouvelles ou semblables avec d'autres nuances. N'oublions toutefois pas que pour résoudre un problème, comme le dirait monsieur Albert Einstein, il importe d'utiliser des idées différentes de celles qui l'ont créé.
Guylain Bernier
Note 1 : Par définition, l'influence équivaut à dire « A – intentionnellement ou non – “fait voir” à B son intérêt là où il ne l'aurait pas placé dans cette relation. De sorte que B va, de lui-même, adopter une attitude ou un comportement appropriés (sic), c'est-à-dire, négativement, sans obligation […] » (Braud, 1985, p. 352). Ainsi, l'influence aurait un pouvoir de séduction, de manière à ce que l'individu influencé perçoive un avantage à la subir. Dans le coffre à outils de l'influence se trouvent donc la persuasion, la manipulation et l'autorité.
Référence
Braud, P. (1985). Du pouvoir général au pouvoir politique. Dans M. Grawitz & J. Leca (Dir.), Traité de sciences politique. La science politique, science sociale. L'ordre politique (Tome I) (pp. 335-394). Paris, France : Presses Universitaires de France.
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Le Nouveau Parti Démocratique du Québec : l’inconnu dans la maison
Dans le précédent numéro de Presse toi à gauche (édition du 12 au 18 mars), j'abordais sommairement et trop partiellement les raisons de l'insuccès persistant du parti au Québec. J'y confondais plus ou moins le NPD fédéral et son "petit frère" provincial. Il importe de bien les distinguer l'un de l'autre et de relater plus précisément l'évolution du parti au Québec.
Le Nouveau Parti démocratique du Québec a été fondé en 1963 par des syndicalistes, ceux de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) et par des militants francophones du Parti social démocratique du Québec, une petite formation de gauche. Il formait donc à ses débuts la section québécoise du NPD fédéral et le demeurera jusqu'en 1988. À ce titre, il a participé aux scrutins fédéraux et provinciaux. À celui, fédéral de 1965 par exemple, il est allé chercher 12% des voix au Québec ; en 1968, 7%. Il exerçait ses activité exclusivement comme antenne du parti frère fédéral dans la "Belle province". Le Parti socialiste du Québec (PSQ) lui, proche du NPD, se chargeait de défendre la social-démocratie dans le cadre provincial, conformément à l'entente conclue avec le NPD d'Ottawa en 1963. Mais le PSQ "s'évapora" vers 1968.
Il faut dire qu'en cette époque farouchement nationaliste qui voyait la montée en puissance du mouvement souverainiste (fondation du Rassemblement pour l'indépendance nationale en 1960 et surtout celle du Parti québécois en 1968), la conjoncture n'était guère favorable pour un parti de centre-gauche fédéraliste.
Le Nouveau Parti démocratique du Québec consacra donc l'essentiel de ses énergies à la politique fédérale au cours des années 1970 et au début de la suivante. Il négligea la question nationale québécoise et insista plutôt sur une meilleure répartition de la richesse produite. Mais une bonne partie de la gauche se rallia au Parti québécois qui offrait le double avantage de promouvoir l'émancipation nationale du Québec et une forme de social-démocratie, du moins en théorie. La personnalité charismatique de René Lévesque y était pour quelque chose.
S'en rendant compte et pour ne pas abandonner tout le terrain de la politique provinciale "de gauche" au Parti québécois, le NPDQ y a fit quelques timides incursions, par exemple un petit nombre de candidats aux élections de 1970. Par la suite, il ne présenta plus de candidats aux scrutins provinciaux.
Les néodémocrates n'avaient rien d'inspirant pour l'électorat, en particulier les jeunes. Quelques chefs furent élus (comme Raymond Laliberté, ancien syndicaliste et président de la Corporation des enseignants du Québec de 1971 à 1973, Henri-François Gautrin de 1973 à 1979) mais non seulement leur personnalité était plutôt terne, mais ils ne comprenaient pas l'attrait de l'idéal souverainiste auprès d'une importante fraction de la jeunesse. Le parti tenta une nouvelle expérience électorale en 1976 mais subit un nouvel échec.
Toutefois, malgré tout influencée par l'ambiance très nationaliste de cette époque, le parti milita pour la reconnaissance du droit à l'autodétermination du Québec, ce qui influença à son tour une partie des membres du grand frère fédéral, mais que le congrès fédéral rejeta en 1977. Cependant. le congrès revint sur sa décision en 1983 et affirma le droit du Québec à l'autodétermination. Il devint ainsi le premier parti fédéral à affirmer cette reconnaissance.
Au milieu des années 1980, la direction du parti provincial jugea qu'il existait un vide au Québec. À l'époque, le gouvernement péquiste de René Lévesque se trouvait discrédité par l'échec du référendum de mai 1980 et surtout par les politiques budgétaires très restrictives imposées sans préavis par le cabinet Lévesque de 1981 à 1985. On estima donc au sein des cercles néodémocrates que le temps était peut-être propice pour détrôner le Parti québécois. Le NPDQ résolut donc de dédoubler sa mission : tout en demeurant une section provinciale du NPD fédéral, il s'investit sur la scène politique provinciale.
À partir de 1984, on procéda donc à une tentative de relance, non sans un certain succès : un nouveau chef, Jean-Paul Harney, ex député du NPD à la Chambre des Communes de 1972 à 1974 et surtout en 1985, la mise sur pied officielle de la nouvelle version du NPDQ qui occupa dès lors tout le champ politique, tant provincial que fédéral. Ce parti "relooké" présenta des candidats aux scrutins provinciaux de 1985, 1989, 1994 et 1998 avec divers succès mais dans tous les cas très modestes.
Au plan constitutionnel, pour se mettre en phase avec l'importante frange nationaliste et profiter de la mise en veilleuse de l'option souverainiste par le successeur de René Lévesque, Pierre-Marc Johnson, il affirma aussi son rejet de la Loi constitutionnelle de 1982. Il défendit cette position lors du scrutin de 1985. Il bénéficia aussi de la croissance du nombre de ses membres, ce qui n'en n'a pas fait pour autant un parti de masse comme l'avait déjà été le Parti québécois dans les années 1970.
Lors des élections fédérales de 1988, il recueillit 14% des votes au Québec. Dans les sondages, il grapillait de 10% à 17% des intentions de vote en 1987-1988. Il connut même une pointe de 22% en octobre 1987 à égalité avec le Parti québécois, quelques semaines avant le décès de René Lévesque.
En avril 1989, lors d'un congrès d'orientation, il adopta le principe d'une rupture des liens structurels avec les NPD fédéral. Par la même occasion, le parti y réaffirma sa position de 1985 sur le droit à l'autodétermination du peuple québécois Assortie d'une nouvelle association politique avec le Canada. Il concentra donc désormais tous ses efforts sur la scène politique provinciale. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, cette rupture ne scandalisa pas la direction du parti à Ottawa, vu que les divergences de vues entre les deux ailes créaient souvent des frictions entre elles. L'année suivante, le retour au pouvoir de péquistes sous Jacques Parizeau diminua encore sa marge de manoeuvre.
"À quoi bon appuyer un petit parti indépendantiste alors qu'un grand parti souverainiste vient de conquérir une majorité parlementaire ?" durent se dire bon nombre d'électeurs et d'électrices péquistes. En tout cas, le NPDQ ne recueillit à cette occasion que 1% des votes.
En 1995, le NPDQ devint (ou redevint) le Parti de la démocratie socialiste ; retour en un sens à la période 1963-1968. Il appuya bien sûr le OUI à la souveraineté en octobre 1995, mais on peut douter de son influence sur le résultat de ce nouveau référendum.
Le 7 septembre 2002, il intégra la coalition de l'Union des forces progressistes (UFP) pour se fondre ensuite dans Option citoyenne en 2006. (Précisons qu'il ne se fonde pas dans Option citoyenne mais fusionne avec pour devenir QUébec Solidaire : Presse toi à gauche) Il n'exista plus de 2006 à 2014.
À la suite du succès inattendu du NPD en 2011, des militants et militantes envisagèrent de relancer de relancer le parti sur la scène politique provinciale, mais sans la souveraineté.
Il fut donc "refondé" le 30 janvier 2014 et son chef intérimaire était Pierre Ducasse, ancien bras droit de Jack Layton au Québec. À l'élection partielle de Louis-Hébert du 2 octobre 2017, il n'alla chercher que 1.3% des voix. Le 21 janvier 2018, Raphaël Fortin fut élu chef de la formation, poste qu'il conserve encore. Au scrutin de 2018, le parti présenta 59 candidats sur 125 comtés mais il ne recueillit que 0.5% des suffrages. En 2022, il n'aligna aucun candidat. Il est totalement absent de la scène publique.
Voilà dans les grandes lignes l'histoire du NPD au Québec. S'il a fait acte de présence depuis 1963, celle-ci ne se révéla guère significative. Il n'a jamais réussi à s'imposer. La conjoncture a souvent joué contre lui, mais même cet élément défavorable ne peut tout expliquer. Il n'a même pas su profiter des rares périodes positives qui se sont présentées à lui, comme ce fut le cas durant la décennie 1980. Au plan fédéral, il a du affronter la concurrence des libéraux fédéraux, et au provincial, celle du Parti québécois. Le retour au pouvoir du parti souverainiste en 1994 lui a porté un coup fatal. Même la tentative de relance de 2014 ne lui a pas permis de se relever.
L'explication fondamentale à tous ces échecs ne réside-t-elle pas en définitive dans l'incapacité persistante de ce parti à se brancher sur une idéologie nationale franchement québécoise ?
Jean-François Delisle
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La Question palestinienne et le marxisme

Dans une brochure claire et concise, notre camarade Joseph Daher prolonge un exercice déjà entamé dans un long article publié dans Contretemps en 2021 : définir une stratégie politique réaliste pour l'émancipation du peuple palestinien, à partir d'une perspective révolutionnaire et ancrée dans les réalités de la région.
Tiré de NPA 29
La brochure permet de sortir la tête de la situation immédiate. Un apport salutaire face à la situation catastrophique à Gaza, qui paraît ne jamais avoir de fin. D'abord, parce qu'elle réinscrit la question de la résistance palestinienne et del'État colonial et d'apartheidqu'est Israël dans l'histoire longue et dans les processus politiques régionaux. Ensuite, parce qu'elle médite les erreurs et impasses stratégiques des luttes passées et actuelles. Enfin, parce qu'elle projette la réflexion dans le temps long et à l'échelle régionale.
La question palestinienne et le marxisme vise à renforcer la solidarité pour la lutte de libération et d'émancipation du peuple palestinien en s'appuyant sur quelques principes : le droit des peuples à la résistance face à un régime d'apartheid et de colonisation, y compris armée, sans le confondre avec le soutien aux perspectives politiques des différents partis politiques palestiniens.
Mais aussi la centralité de la défense des droits fondamentaux comme le droit au retour, le droit à l'autodétermination, la fin de l'apartheid, de l'occupation et de la colonisation, la complète égalité des droits entre Palestinien·nes et Israélien·nes. Et le soutien à la campagne internationale du mouvementBoycott Désinvestissement Sanctions (BDS).
Développement inégal et combiné
L'ouvrage permet d'identifier une ligne stratégique réaliste pour la cause palestinienne. Réaliste parce qu'elle s'appuie sur une lecture matérialiste et historique, mais aussi parce qu'elle pense les erreurs du passé et la situation actuelle. Une ligne qui ne se cache pas les difficultés : ainsi l'auteur n'élude pas l'analyse de la faiblesse de la classe travailleuse palestinienne et l'intérêt économique bien compris de la classe travailleuse israélienne, comme son soutien idéologique à son État.
Il en analyse les fondements : l'émergence d'une économie juive qui s'appuie sur les structures coloniales britanniques. Une économie dite « socialiste » mais en réalité à caractèrecolonial et ethno-racial, organisée dans l'alliance entre un syndicalisme juif et l'Organisation sioniste (OS) sous le slogan « terre juive, travail juif, produit juif ». Avec comme résultat un développement inégal et combiné entre l'économie palestinienne et israélienne ; la première étant maintenue dans un état de dépendance par rapport à la seconde, subissant une dynamique de « dé-développement ».
Daher invite donc à penser le problème non pas comme celui de la couleur politique des dirigeant·es israélien·nes, mais comme un « processus de colonisation continue » qui organise les rapports entre les deux populations.
Daher défait également toute attente envers les principales forces politiques palestiniennes : le Hamas affirme une politique réactionnaire d'islamisation de la société gazaouie et s'allie avec des régimes autoritaires comme l'Iran, le Qatar ou la Turquie. Simultanément, ce mouvement « ne considère pas les masses palestiniennes, les classes ouvrières régionales et les peuples opprimés comme des forces susceptibles d'obtenir leur libération » et défend une économie basée sur le capitalisme et le libre marché.
Joseph Daher rappelle à ce titre que la petite bourgeoisie est la « base sociale historique du fondamentalisme islamique », que ce « projet réactionnaire n'offre aucune solution aux sections de la paysannerie et des salarié·es » qu'il gagne et que pour lui « la lutte des classes est donc considérée comme une chose négative ». De son côté, l'Autorité Palestinienne est définitivement décrédibilisée par sa collaboration avec la puissance occupante.
Vers l'auto-organisation par en bas
Ce qui constitue le caractère paradoxal de sa proposition est qu'elle est aussi implacablement réaliste qu'elle semble lointaine, voire inatteignable. Mais c'est l'horizon stratégique que défend Joseph Daher : la seule stratégique réaliste de libération est une « stratégie révolutionnaire régionale (…) qui passe par l'établissement d'un État démocratique, socialiste et laïque dans la Palestine historique, avec des droits égaux pour les peuples palestinien et juif, au sein d'une fédération socialiste à l'échelle du MOAN. »
C'est-à-dire que les Palestinien·nes doivent construire une « nouvelle direction politique engagée dans l'auto-organisation par en bas » et des alliances avec les forces socialistes et émancipatrices de toute la région.
On regrettera toutefois que cette direction stratégique ne soit pas étayée de quelques propositions politiques de court et moyen terme. L'auteur peine à proposer des pistes où se concrétise la ligne stratégique défendue. Gageons que cela soit l'objet d'une seconde brochure !
vendredi 8 mars 2024, Guillaume Matthey solidaritéS
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