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Black like Mao. Chine rouge et révolution noire (Partie I)
Publié pour la première fois en 1999 dans la revue Souls, l’article de Robin Kelly et Betsy Esch explore l’impact de la Révolution chinoise sur les mouvements radicaux afro-américains du 20e siècle. Les auteurs montrent comment ces militant·e·s se sont réapproprié, tout en les adaptant à leur réalité, les principes maoïstes afin d’élaborer leur propre programme de lutte. Les idées de Mao ont proposé un modèle alternatif, non-occidental, de la révolution socialiste, incitant ainsi les militant·e·s noir·e·s à revendiquer leur autodétermination et leur autonomie, des groupes d’autodéfense armée de Robert Williams à la poésie marxiste-léniniste d’Amiri Baraka. La traduction originale de l’article provient de la revue Période.
Robin Kelley et Elizabeth Esch
Traduit de l’anglais par Lamia Dzanouni
« Nous sommes à l’ère de Mao Zedong, l’ère de la révolution internationale, et la lutte des Africains-Américains pour la liberté fait partie intégrante d’un mouvement invincible ayant une portée mondiale. »
Robert Williams, 1987[1]
Il semblerait que le président Mao, au moins d’un point de vue symbolique, jouisse d’un regain de popularité dans la jeunesse. Son image et ses idées se retrouvent systématiquement dans une multitude de contextes culturels et politiques. The Coup, un groupe de hip-hop célèbre de la baie de San Francisco, a inscrit Mao Zedong au panthéon des héros noirs radicaux et a ainsi placé la lutte pour la liberté des Noirs dans un contexte international. Dans une chanson intitulée simplement « Dig it » (1993), The Coup a désigné ses membres comme « les damnés de la terre », il a invité son public à lire Le Manifeste du parti communiste, et a évoqué des icônes révolutionnaires comme Mao Zedong, Hô Chi Minh, Kwame Nkrumah, H. Rap Brown, le mouvement des Mau Mau du Kenya et Geronimo Ji Jaga Pratt. D’une manière typiquement maoïste, le groupe s’est emparé de la plus célèbre citation de Mao et l’a fait sienne : « Nous sommes conscients que le pouvoir [est] au bout du Glock (nickel plated)[2]. » Même si les membres de The Coup n’étaient même pas nés à l’apogée du maoïsme noir, « Dig it » renferme l’esprit du maoïsme à l’égard du monde colonial au sens large – un monde qui englobait les Africains-Américains. À Harlem, à la fin des années 1960 et au début des années 1970, il semble que tout le monde possédait un exemplaire des Citations du Président Mao Tsé-Toung, plus connu sous le nom de « Petit Livre rouge »[3]. De temps à autre, les partisans du Black Panther Party pouvaient être aperçus en train de vendre le Petit Livre rouge au coin de la rue, ce qui était une manière de collecter des fonds pour le parti. Il n’était pas rare de voir se promener un jeune noir radical dans la rue habillé comme un paysan chinois – exceptées bien sûr la coupe afro et les lunettes de soleil.
Comme l’Afrique, la Chine était en mouvement. L’impression générale se dégageait que les Chinois soutenaient les Noirs dans leur lutte. En réalité, c’était plus qu’une impression : la population noire appelait réellement à la révolution au nom de Mao, tout comme au nom de Marx et Lénine. D’innombrables radicaux noirs de cette époque considéraient la Chine – un peu comme Cuba, le Ghana ou même Paris – comme le pays où une vraie liberté pouvait être acquise. La Chine n’était pas parfaite, mais c’était beaucoup mieux que de vivre dans le ventre de la bête. Lorsque la dirigeante des Black Panthers, Elaine Brown, visita Pékin à l’automne 1970, elle fut agréablement surprise par ce que la révolution chinoise avait réalisé pour améliorer la vie de la population. « Jeunes et vieux donnaient spontanément des témoignages émouvants, comme les baptistes convertis, à la gloire du socialisme[4]. » Une année plus tard, elle revint avec l’un des fondateurs des Black Panthers, Huey Newton, qui décrivit son expérience en Chine comme la source d’« une sensation de liberté – comme si un grand poids avait été ôté de mon âme et que je pouvais être moi-même, sans avoir à m’en défendre ou faire semblant, ni même à m’en expliquer. Je me sentais complètement libre pour la première fois de ma vie – complètement libre parmi mes semblables[5] ».
Plus d’une décennie avant que Newton et Brown mettent le pied sur le sol chinois, W.E.B. Du Bois considérait la Chine comme l’autre géant endormi s’apprêtant à mener les gens de couleur dans la lutte mondiale contre l’impérialisme. Il s’y était rendu pour la première fois en 1936 – avant la guerre et la révolution – au cours d’une visite prolongée en Union soviétique. De retour en 1959, alors qu’il était illégal de se rendre en Chine, Du Bois découvrit un nouveau pays. Il fut frappé par la transformation de la Chine, en particulier par ce qu’il perçut comme une émancipation des femmes, et fut convaincu que la Chine conduirait les pays sous-développés sur la route du socialisme. « Après de longs siècles, la Chine », dit-il à un auditoire de communistes chinois qui assistaient à la célébration de son quatre-vingt-onzième anniversaire, « s’est dressée sur ses pieds et a bondi en avant. Afrique, lève-toi et tiens-toi debout, parle et pense ! Agis ! Tourne le dos à l’Occident, à l’esclavage et à l’humiliation des cinq cents dernières années et contemple le soleil levant[6]. »
Les Noirs radicaux virent la Chine comme le phare de la révolution du Tiers-Monde et la pensée de Mao Zedong comme un véritable jalon de cette trajectoire révolutionnaire. Ce fut le résultat d’une histoire complexe et passionnante impliquant littéralement des dizaines d’organisations et couvrant une grande partie du monde – des ghettos de l’Amérique du Nord à la campagne africaine. Par conséquent, le récit qui suit ne prétend pas être exhaustif[7]. Nous avons néanmoins entrepris d’explorer dans cet article l’impact de la pensée maoïste, et plus généralement celui de la République populaire de Chine, sur les mouvements radicaux noirs des années 1950 jusqu’au moins le milieu des années 1970. Nous explorerons également la manière dont le nationalisme noir radical a façonné les débats au sein des organisations maoïstes et « anti-révisionnistes » aux États-Unis. Notre postulat est que la Chine a offert aux radicaux noirs un modèle marxiste « de couleur », ou tiers-mondiste, qui leur a permis de contester une vision blanche et occidentale de la lutte des classes – un modèle qu’ils façonnaient et refaçonnaient en fonction de leurs propres réalités culturelles et politiques. Bien que le rôle de la Chine ait été contradictoire et problématique à bien des égards, le fait que les paysans chinois, à la différence du prolétariat européen, aient mené une révolution socialiste et défini une position distincte de celle des camps américain et soviétique dans la politique mondiale, dota les radicaux noirs d’un sens plus profond de l’importance de la révolution et du pouvoir. Enfin, Mao ne démontra pas seulement aux Noirs du monde entier qu’ils ne devaient pas attendre des « conditions objectives » pour faire la révolution ; son insistance sur la lutte culturelle a elle aussi profondément orienté les débats autour de la politique et des arts noirs.

La Longue Marche
Quiconque est familier avec le maoïsme sait que celui-ci n’a jamais constitué une idéologie à part entière destinée à remplacer le marxisme-léninisme. Au contraire, il a plutôt marqué un tournant s’opposant au « révisionnisme » du modèle soviétique post-stalinien. La contribution effective de Mao à la pensée marxiste résulta directement de la révolution chinoise de 1949. Mao insista sur le fait que la puissance révolutionnaire de la paysannerie ne dépendait pas du prolétariat urbain. Cette idée était particulièrement attrayante pour les radicaux noirs sceptiques à l’idée d’avoir à attendre des conditions objectives pour commencer leur révolution. L’idée que le marxisme peut être (doit être) remodelé en fonction des exigences temporelles et géographiques est centrale dans le maoïsme, de même que l’idée que le travail pratique, les idées et le leadership découlent du mouvement des masses et non d’une théorie abstraite ou résultant d’autres luttes[8]. En pratique, cela signifiait que les véritables révolutionnaires devaient posséder une volonté révolutionnaire pour l’emporter. L’importance de la notion de volonté révolutionnaire ne saurait être sous-estimée, en particulier pour ceux appartenant à des mouvements isolés et attaqués de tous côtés. Armés de la théorie adéquate, de l’attitude éthique appropriée et de la volonté, les révolutionnaires, dans les termes de Mao, peuvent « déplacer des montagnes[9] ». Peut-être est-ce pour cela que le dirigeant communiste chinois Lin Biao écrivit dans la préface des Citations : « Une fois que les larges masses se sont approprié la pensée de Mao Zedong, celle-ci devient une source inépuisable de force et une bombe atomique spirituelle d’une puissance infinie[10]. »
Mao et Lin Biao reconnaissaient que la source de cette « bombe atomique » se trouvait dans les luttes des nationalistes du Tiers-Monde. À une époque où la guerre froide contribua à faire émerger le mouvement des non-alignés – avec la réunion des dirigeants du monde « de couleur » à Bandung, en Indonésie, en 1955 tentant de tracer une voie indépendante vers le développement – les Chinois espéraient mener les anciennes colonies sur la voie du socialisme. Soutenus par la théorie de Lin Biao de la « nouvelle révolution démocratique », ils dotèrent non seulement les luttes nationalistes d’une valeur révolutionnaire, mais ils tendirent aussi la main plus spécifiquement à l’Afrique et aux personnes de descendance africaine. Deux ans après la rencontre historique de Bandung des nations non-alignées, la Chine créa l’Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques. Mao non seulement invita W.E.B. Du Bois à fêter son quatre-vingt-dixième anniversaire en Chine après qu’il a été déclaré ennemi public par l’État américain, mais, trois semaines avant la grande marche à Washington de 1963, il publia également une déclaration critiquant le racisme américain et inscrivant le mouvement de libération africain-américain dans la lutte mondiale contre l’impérialisme. « Le fléau du colonialisme et de l’impérialisme, déclara Mao, a émergé et prospéré avec l’esclavage des Noirs et le commerce triangulaire, et il disparaîtra avec l’émancipation complète du peuple noir[11] ». Une décennie plus tard, le romancier John Oliver Killens fut surpris par le fait que plusieurs de ses livres, ainsi que des œuvres d’autres écrivains noirs, avaient été traduits en chinois et étaient largement lus par les étudiants. Partout où il alla, semblait-il, Killens rencontra de jeunes intellectuels et des travailleurs « extrêmement intéressés par le mouvement noir et par la manière dont l’art et la littérature des Noirs reflétaient ce mouvement[12]. »
Leur statut de personnes de couleur fut un puissant levier politique dans la mobilisation de la population africaine et de leurs descendants. En 1963, par exemple, les délégués chinois à Moshi, en Tanzanie, affirmèrent que les Russes n’avaient rien à faire en Afrique parce qu’ils étaient blancs. Les Chinois, de leur côté, étaient perçus non seulement comme faisant partie du monde de couleur, mais aussi comme non complices de la traite des esclaves. Bien sûr, la plupart de ces déclarations avaient pour fonction de favoriser la formation d’alliances. En réalité, il y avait des esclaves africains à Guangzhou au XIIe siècle et des étudiants africains en Chine communiste se plaignirent d’être victimes de racisme. En effet, après la mort de Mao, des conflits raciaux sur les campus universitaires se produisirent plus fréquemment, notamment à Shanghai en 1979, à Nanjing en 1980, et à Tianjin en 1986[13]. En outre, la politique étrangère chinoise envers le monde noir reposait plus sur des considérations stratégiques que sur un engagement réel pour le Tiers-Monde révolutionnaire, en particulier après la scission sino-soviétique. La position antisoviétique de la Chine entraîna des décisions de politique étrangère qui ébranlèrent finalement sa réputation auprès de certains mouvements de libération africains. En Afrique australe, par exemple, les Chinois soutinrent des mouvements qui disposaient également du soutien du régime d’apartheid sud-africain[14].
Pourtant, les idées de Mao trouvèrent encore un public parmi les radicaux noirs. Bien que les projets maoïstes aux États-Unis n’aient jamais eu autant de partisans que les partis communistes identifiés comme soviétiques dans les années 1930, ils prirent racine dans ce pays. Et comme les cent fleurs, ils se sont épanouis en une mosaïque confuse de voix radicales toutes apparemment en guerre les unes contre les autres. Sans surprise, la « question noire » était au centre de leurs débats sur la nature de la lutte des classes aux États-Unis : Quel rôle jouera la population noire dans la révolution mondiale ?

La révolution noire mondiale
Peuples du monde, unissez-vous et vainquez les agresseurs américains et tous leurs chiens errants. Peuples du monde, soyez courageux, osez vous battre, défiez les difficultés et avancez par vagues successives. Alors le monde entier appartiendra au peuple. Les monstres de toutes sortes doivent être détruits.
Mao Zedong « Déclaration pour soutenir le peuple du Congo contre l’agression des États-Unis[15] » (1964)
Une révolution hante et est sur le point de submerger l’Afrique, l’Asie, l’Amérique du sud, l’Amérique centrale et l’Amérique noire.
Revolutionary Action Movement, The World Black Revolution[16]
Le maoïsme aux États-Unis ne fut pas importé de Chine. Pour les maoïstes formées dans la Vieille Gauche, il trouvait plutôt son origine dans les révélations de Khrouchtchev au XXe Congrès du Parti communiste d’Union soviétique (PCUS) en 1956, qui suscitèrent un mouvement anti-révisionniste au sein de la gauche pro-stalinienne. À la suite des débats au sein du Parti communiste des États-Unis d’Amérique (CPUSA), plusieurs organisations émergèrent et s’engagèrent à ramener les communistes vers le camp stalinien ; c’est notamment le cas du Provisional Organizing Committee (POC, 1958), de Hammer and Steel (1960), et du Progressive Labor Party (PLP, 1965)[17].
Le PLP, une émanation du Progressive Labor Movement fondé trois ans plus tôt, avait initialement été dirigé par d’anciens communistes qui pensaient que les Chinois avaient adopté la bonne position. Insistant sur le fait que les travailleurs noirs étaient la « force révolutionnaire clé » dans la révolution prolétarienne, le PLP attira quelques militants noirs éminents comme John Harris à Los Angeles et Bill Epton à Harlem. Epton était devenu en quelque sorte une « cause célèbre » après qu’il a été arrêté pour « anarchie criminelle » pendant les émeutes de 1964[18]. Deux ans plus tard, le PLP aida à organiser une grève des étudiants afin de créer un programme d’études noires (black studies) à l’Université d’État de San Francisco. Dans le même temps, sa Commission Black Liberation publia un pamphlet intitulé Black Liberation Now! qui tentait de replacer toutes ces rébellions urbaines dans un contexte mondial. Toutefois, en 1968, le PLP abandonna son soutien au nationalisme « révolutionnaire » et conclut que toutes les formes de nationalisme étaient réactionnaires. Du fait de son fervent antinationalisme, le PLP s’opposa à l’affirmative action et aux groupes noirs et latinos au sein des syndicats – positions qui ébranlèrent les relations du PLP avec les militants de la communauté noire. De fait, les rapports entre le PLP et la Nouvelle Gauche en général furent altérés en partie à cause de sa critique du Black Panther Party et du mouvement étudiant noir. Les membres du PLP furent exclus du groupe Students for a Democratic Society (SDS) en 1969 avec l’appui de plusieurs groupes nationalistes radicaux, y compris les Panthers, les Young Lords et les Brown Berets[19].
Mais les partis marxistes-léninistes-maoïstes à prédominance blanche n’étaient pas la principale source d’inspiration de la gauche noire d’inspiration maoïste. La plupart des radicaux noirs de la fin des années 1950 et du début des années 1960 avaient découvert la Chine par l’intermédiaire des luttes anticolonialistes en Afrique et de la révolution cubaine. L’indépendance du Ghana en 1957 était un événement qu’il y avait lieu de célébrer, et l’assassinat parrainé par la CIA de Patrice Lumumba au Congo suscita des protestations de la part de tous les milieux activistes noirs. La révolution cubaine et le célèbre séjour de Fidel Castro à l’Hôtel Thérésa de Harlem lors de sa visite à l’ONU offrit au peuple noir l’exemple d’un socialiste avéré qui avait tendu solidairement la main aux personnes de couleur dans le monde entier. En effet, des dizaines de radicaux noirs non seulement défendirent publiquement la révolution cubaine, mais se rendirent à Cuba dans le cadre de groupes tels que le Fair Play for Cuba Committee[20]. Un de ces visiteurs était Harold Cruse, lui-même ex-communiste encore attaché au marxisme. Il croyait que les révolutions cubaine, chinoise et africaine pourraient revitaliser la pensée radicale dans la mesure où elles avaient démontré le potentiel révolutionnaire du nationalisme. Dans un essai provocateur publié dans le New Leader en 1962, Cruse écrivit que la nouvelle génération était attentive à l’ancien monde colonial du fait de ses dirigeants et de ses idées, et que parmi ses héros il y avait Mao :
À cette époque, ils avaient déjà érigé un panthéon de héros modernes – Lumumba, Kwame Nkrumah et Sekou Touré en Afrique, Fidel Castro en Amérique latine, Malcom X, le leader musulman, à New York ; Robert Williams dans le Sud ; et Mao Zedong en Chine. Ces hommes semblaient héroïques aux yeux des Africains-Américains non pas en raison de leur philosophie politique, mais du fait que c’étaient d’anciens colonisés qui avaient obtenu leur indépendance totale ou parce que, comme Malcolm X, ils avaient osé regarder la communauté blanche en face et lui avaient dit: « Nous ne pensons pas que votre civilisation vaille la peine qu’un homme noir essaie de s’y intégrer ». Cela, pour de nombreux Afro-Américains, était un geste de défi réellement révolutionnaire[21].
Dans un autre essai, publié dans Studies on the Left en 1962, Cruse était plus explicite encore sur le caractère global du nationalisme révolutionnaire. Il faisait valoir que les Noirs aux États-Unis faisaient l’expérience d’un colonialisme interne et que leurs luttes devaient être considérées comme faisant partie du mouvement anticolonialiste mondial. Il écrivit que « l’incapacité des marxistes américains à comprendre le lien entre les Noirs et les peuples colonisés du monde est la source de leur incapacité à développer des théories qui auraient de la valeur pour les Noirs aux États-Unis. » Selon lui, les anciennes colonies étaient l’avant-garde de la révolution, et à la pointe de cette nouvelle révolution socialiste se trouvaient Cuba et la Chine[22].
Les révolutions à Cuba, en Afrique et en Chine avaient eu un effet similaire sur Amiri Baraka, qui, une décennie et demie plus tard, fonda la Revolutionary Communist League d’inspiration maoïste (RCL). Marqué par sa visite à Cuba et l’assassinat de Lumumba, Baraka commença à publier des essais pour un nouveau magazine intitulé African Revolution publié par le dirigeant nationaliste algérien Ben Bella. Comme l’expliquait Baraka :
L’Inde et la Chine avaient obtenu leur indépendance officielle avant le début des années 1950 et, au moment où les années 1950 prenaient fin, il y avait de nombreuses nations africaines indépendantes (mais avec des degrés divers de néocolonialisme). Le ghanéen Kwame Nkrumah avait arboré l’étoile noire sur la Présidence d’Accra, et ses discours et la notoriété de ses actes constituaient un puissant encouragement pour les gens de couleur à travers le monde. Lorsque les Chinois firent exploser leur première bombe atomique, j’écrivis un poème disant, en effet, que, pour les peuples de couleur, le temps avait recommencé[23].
C’est peut-être la carrière de Vicki Garvin qui incarnait le mieux la matrice Ghana-Chine. Garvin était une militante fidèle qui avait fréquenté les cercles de la gauche noire de Harlem pendant la période d’après-guerre. Élevée dans une famille ouvrière noire de New York, Garvin passa ses étés à travailler dans l’industrie textile pour compléter le revenu familial. Dès ses années de lycée, elle s’impliqua dans le mouvement contestataire noir, soutint les efforts d’Adam Clayton Powell Jr. pour obtenir de meilleures rémunérations pour les Africains-Américains de Harlem et pour créer des clubs d’histoire noire dédiés à la constitution de ressources documentaires. Après avoir obtenu une licence en sciences politiques au Hunter College de Northampton, elle traversa les années de guerre en travaillant au National War Labor Board et continua en jouant un rôle d’organisation au sein du United Office and Professionnal Workers of America (UOPWA) et en étant directrice de recherche nationale et co-présidente du Pair Employment Practices Committee. Pendant les purges d’après-guerre de la gauche dans le CIO, Garvin fut une voix puissante de protestation et une critique acerbe de l’échec de l’organisation du CIO dans le Sud. En tant que secrétaire exécutive de la section de New York du National Negro Labor Council et vice-présidente de l’organisation au niveau national, Garvin établit des liens étroits avec Malcolm X et l’aida à organiser une partie de son voyage en Afrique[24].
Garvin rejoignit l’exode intellectuel noir de Nkrumah au Ghana, où elle séjourna d’abord avec la poétesse Maya Angelou avant de s’installer dans un logement à côté de celui de Du Bois. Elle passa deux ans à Accra, entourée de plusieurs intellectuels et artistes noirs notoires, y compris Julian Mayfield, l’artiste Tom Feelings et le caricaturiste Ollie Harrington. En tant que militante ayant enseigné l’anglais de conversation aux noyaux diplomatiques cubain, algérien et chinois au Ghana, il aurait été étonnant qu’elle ne développe pas une perspective internationale approfondie. Ses conversations avec Du Bois au cours de ses derniers jours au Ghana ne firent que renforcer son internationalisme et suscita son intérêt pour la révolution chinoise. En effet, grâce à Du Bois, Garvin obtint un emploi de « correctrice » des traductions en anglais de la Peking Review et un poste d’enseignante à l’Institut des langues étrangères de Shanghai. Elle resta en Chine de 1964 à 1970, tissant des liens entre la lutte pour la liberté des noirs, les mouvements indépendantistes africains et la révolution chinoise[25].
Pour Huey Newton, futur fondateur du Black Panther Party, la révolution africaine semblait moins décisive que les événements à Cuba et en Chine. En tant qu’étudiant à Merritt College au début des années 1960, il lut un peu d’existentialisme, commença à assister à des réunions parrainées par le Progressive Labor Party et soutînt la Révolution cubaine. Sans surprise, Newton commença à dévorer la littérature marxiste. Mao, en particulier, fit sur lui une impression durable : « Ma conversion était achevée une fois que j’avais lu les quatre volumes de Mao Zedong pour en apprendre plus sur la Révolution chinoise[26]. » Ainsi, bien avant la fondation du parti du Black Panther Party, Newton s’imprégna des pensées de Mao Zedong ainsi que des écrits de Frantz Fanon et Che Guevara.
Mao, Fanon et Guevara voyaient tous clairement que le peuple avait été spolié de ses droits inaliénables et de sa dignité, non pas par une philosophie ou par de simples mots, mais sous la menace des armes. Il avait été victime d’un hold-up orchestré par des gangsters, et même d’un viol ; la seule façon pour lui de regagner sa liberté était de répondre à la force par la force[27].
La volonté des Chinois et des Cubains de « répondre à la force par la force » contribua également à rendre ces révolutions attrayantes pour les radicaux noirs à une époque où prédominait la résistance passive non violente. Bien sûr, cette période comportait son lot de luttes armées dans le Sud, avec des groupes comme les Deacons for Defense and Justice et Gloria Richardson’s Cambridge qui défendaient les manifestants non violents lorsque cela s’avérait nécessaire. Toutefois, la personnalité qui incarnait le mieux les traditions noires d’autodéfense armée était Robert Williams, un héros de la nouvelle vague d’internationalisme noir dont l’importance rivalisait presque avec celle de Malcolm X[28]. Ancien marine américain disposant d’une formation militaire avancée, Williams acquit sa notoriété en 1957 en formant des groupes d’autodéfense armés à Monroe, en Caroline du Nord, pour lutter contre le Ku Klux Klan. Deux ans plus tard, la déclaration de Williams – proclamant que les noirs devaient « répondre à la violence par la violence », celle-ci étant le seul moyen de mettre fin à l’injustice dans un Sud non civilisé – conduisit à sa suspension en tant que président de la section Monroe de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP)
La rupture de Williams avec la NAACP et son plaidoyer ouvertement en faveur de l’auto-défense armé le poussa encore plus à gauche, dans la sphère du Socialist Workers Party, du Workers World Party, et de certains membres de l’ancien CPUSA. En 1961, à la suite d’accusations d’enlèvement montées de toutes pièces et d’un mandat d’arrêt fédéral à son encontre, Williams et sa famille furent contraints de fuir le pays et de demander l’asile politique à Cuba. Au cours des quatre années qui suivirent, Cuba devint la base de Williams pour promouvoir la révolution mondiale noire et élaborer une idéologie internationaliste qui embrassa le nationalisme noir et la solidarité avec le Tiers-Monde.

Le Revolutionary Action Movement
La fuite de Williams à Cuba inspira en partie la création du Revolutionary Action Movement (RAM). Dans l’Ohio vers 1961, les membres noirs de Students for a Democratic Society (SDS), ainsi que des militants du Student Non violent Coordinating Committee (SNCC) et du Congress of Racial Equality (CORE) se réunirent en petit comité pour discuter de l’importance du travail de Williams à Monroe et de son exil. Dirigé par Donald Freeman, étudiant noir de la Case Western Reserve à Cleveland, le noyau dur du groupe était une organisation, nouvellement formée et composée d’étudiants du Central State College à Wilberforce, se faisant appeler Challenge. Les membres de Challenge furent particulièrement marqués par l’essai de Harold Cruse, « Revolutionary Nationalism and the Afro-American[29]», qui fut largement diffusé parmi les jeunes militants noirs. Inspiré par l’interprétation que faisait Cruse de l’importance mondiale de la lutte pour la libération des Noirs, Freeman espérait transformer Challenge en un mouvement nationaliste révolutionnaire semblable à la Nation of Islam, mais en utilisant les tactiques d’action directe de la SNCC. Après un long débat, les membres de Challenge décidèrent de dissoudre l’organisation au printemps 1962 et formèrent le Revolutionary Action Committee (RAM, appelé à l’origine « Reform » Action Movement afin de ne pas effrayer l’administration de l’université), avec pour principaux dirigeants Freeman, Max Stanford, et Wanda Marshall. Quelques mois plus tard, ils se relocalisèrent à Philadelphie, commencèrent à publier un journal bimensuel appelé L’Amérique noire et un bulletin d’information intitulé RAM Speaks ; leur projet fut alors de bâtir un mouvement à l’échelle fédérale qui fût défini par le nationalisme révolutionnaire, l’organisation de la jeunesse et l’auto-défense armée ; ils recrutèrent plusieurs militants de Philadelphie, y compris Ethel Johnson (qui avait travaillé avec Robert Williams à Monroe), Stan Daniels et Playthell Benjamin[30].
Le RAM représenta la première tentative sérieuse et durable de la période d’après-guerre pour marier le marxisme, le nationalisme noir et l’internationalisme du Tiers-Monde au sein d’un programme révolutionnaire cohérent. Selon Max Stanford, le RAM « tenta d’appliquer la pensée marxiste-léniniste de Mao Tsé-toung » aux conditions du peuple noir et « théorisa le fait que le mouvement de libération noire aux États-Unis faisait partie de l’avant-garde de la révolution socialiste mondiale[31]. » Outre chez Robert Williams, de jeunes militants du RAM cherchèrent leur orientation politique auprès d’un certain nombre d’anciens communistes noirs qui avaient été expulsés pour « gauchisme », « nationalisme bourgeois » ou encore avaient quitté le parti à cause de son « révisionnisme ». Ce groupe d’aînés comptait dans ses rangs Harold Cruse, Harry Haywood, Abner Berry, et la « Reine Mère » Audley Moore. Moore allait devenir l’une des principales mentors du RAM sur la côte Est, formant ses membres à la pensée nationaliste noire et au marxisme. La maison de la Reine Mère, qu’elle-même appelait affectueusement le Mont Addis-Abeba, servit pratiquement d’école pour toute une nouvelle génération de jeunes radicaux noirs. Elle avait fondé l’African-American Party of National Liberation en 1963, qui forma un « gouvernement provisoire » avec Robert Williams comme premier ministre en exil[32]. Des membres du RAM se tournèrent également vers les légendaires ex-trotskystes James et Grace Lee Boggs de Détroit, anciens camarades de C.L.R. James, dont les écrits marxistes et panafricanistes eurent une profonde influence sur les membres du RAM ainsi que d’autres militants de la Nouvelle gauche[33].
En se développant, le RAM élargit son public à d’autres régions du pays, mais continua à rester semi-clandestin et très peu structuré. À l’instar du African Blood Brotherhood des années 1920 ou du groupe d’intellectuels radicaux qui avaient publié Studies on the Left, le RAM apporta une contribution à la lutte qui se situait bien plus sur le plan de la théorie que sur celui de la pratique. Dans le Sud, le RAM trouva un public, petit mais significatif, à l’Université de Fisk, terrain de formation de nombreux militants du SNCC. En mai 1964, par exemple, les membres du RAM tinrent la première Conférence étudiante afro-américaine sur le nationalisme noir sur le campus de Fisk[34]. Dans le nord de la Californie, le RAM fut principalement une émanation de la Afro-American Association. Fondée par Donald Wardon en 1962, la Afro-American Association était composée d’étudiants de la University of California à Berkeley et de Merritt College – dont beaucoup, comme Leslie et Jim Lacy, Cedric Robinson, Ernest Allen et Huey Newton, allaient jouer un rôle important en tant qu’intellectuels-militants radicaux. À Los Angeles, le président de la Afro-American Association était un jeune homme nommé Ron Everett, qui par la suite changea de nom pour Ron Karenga et fonda plus tard la US Organization. La Afro-American Association se forgea rapidement une réputation de groupe d’intellectuels militants prêts à débattre avec n’importe qui. En mettant au défi les professeurs, en débattant avec des groupes tels que la Young Socialist Alliance et en donnant des conférences publiques sur l’histoire des Noirs et la culture, ces jeunes hommes firent forte impression sur les autres étudiants ainsi que sur la communauté noire. Dans la baie de San Francisco, où la tradition des tribunes d’orateurs improvisées était morte dans les années 1930, à l’exception des campagnes individuelles menées par le Civil Rights Congress dirigé par les communistes au début des années 1950, la Afro-American Association était la preuve vivante qu’une culture intellectuelle militante dynamique et visible pouvait exister à nouveau.
Pendant ce temps, le Progressive Labor (PL) avait commencé à financer des voyages à Cuba et avait recruté plusieurs étudiants noirs radicaux dans la baie de San Francisco pour aller de l’avant. Parmi eux il y avait Ernest Allen, un étudiant de Merritt College transféré à l’université de Berkeley qui avait été renvoyé de la Afro-American Association. Élevé au sein de la classe ouvrière d’Oakland, Allen faisait partie d’une génération de radicaux noirs dont l’insatisfaction à l’égard de la stratégie de la résistance passive non violente du mouvement des droits civiques le rapprocha de Malcom X et des mouvements de libération du Tiers-Monde. Il n’est donc pas étonnant qu’Allen ait découvert le RAM à la faveur de son voyage à Cuba en 1964. Les compagnons de voyage d’Allen comprenaient un contingent de militants noirs de Détroit : Luc Tripp, Charles (« Mao ») Johnson, Charles Simmons, et General Baker. Tous étaient membres du groupe d’étudiants Uhuru, et allaient jouer par la suite un rôle clé dans la formation du Dodge Revolutionary Union Movement (DRUM) et de la League of Revolutionary Black Workers. Fait étonnant, Max Stanford était déjà sur l’île, en visite chez Robert Williams. Sur le chemin de leur retour aux États-Unis, Allen et le groupe de Détroit se chargèrent de développer le RAM. Allen s’arrêta à Cleveland pour rencontrer des membres du RAM alors qu’il traversait le pays en bus pour rentrer à Oakland. Armé de numéros du magazine Crusader de Robert Williams et de documents produits par le RAM, Allen revint à Oakland avec l’intention de renforcer la présence de RAM dans la baie de San Francisco.
Ne comptant jamais plus de quelques personnes ─ telles Isaac Moore, Kenn Freeman (Mamadou Lumumba), Bobby Seale (futur fondateur du Black Panther Party), et Doug Allen (le frère d’Ernie) ─ le groupe avait établi une base à Merritt College via le Soul Students Advisory Council. La présence intellectuelle et culturelle du groupe se ressentait pourtant largement. Allen, Freeman, et d’autres fondèrent une revue appelé Soulbook: The Revolutionary Journal of the Black World qui publiait de la prose et de la poésie dont l’orientation pouvait être qualifiée de nationaliste noire de gauche. Freeman, en particulier, était très respecté parmi les militants de RAM et largement lu. Il incita constamment les membres de RAM à considérer la lutte des noirs dans un contexte mondial. Les éditeurs de Soulbook développèrent également des liens avec les radicaux noirs de la Vieille gauche, particulièrement avec l’ancien communiste Harry Haywood, dont ils publièrent les travaux dans un des premiers numéros[35].
Bien que le RAM en tant que mouvement n’ait jamais connu la renommée et la publicité accordées à des groupes comme le Black Panther Party, son influence dépassa largement ses effectifs ─ un peu comme l’African Blood Brotherhood (ABB) quatre décennies plus tôt. En effet, comme l’ABB, RAM resta largement une organisation clandestine qui consacra plus de temps à faire de la propagande communiste à travers ses travaux intellectuels qu’à vraiment s’organiser. Des leaders comme Max Stanford s’identifièrent aux paysans rebelles chinois qui avaient conduit le Parti communiste à la victoire. Ils s’approprièrent la célèbre expression de Mao: « Quand l’ennemi avance, nous reculons, quand il se repose, nous le harcelons, quand il se fatigue, nous attaquons, quand il recule, nous le poursuivons[36] ». Ils appliquèrent la pensée de Mao presque à la lettre, en prônant l’insurrection armée et s’inspirèrent directement de la théorie de Robert Black sur la guérilla dans les zones urbaines aux États-Unis. Les leaders du RAM étaient intimement convaincus qu’une telle guerre n’était pas seulement possible, mais qu’elle pouvait être remportée en quatre-vingt dix jours. La combinaison du chaos de masse et de la discipline révolutionnaire était la clé de la victoire. Le numéro d’automne 1964 de Black America prédisait l’Armageddon :
« Les hommes et femmes noires dans les Forces armées déserteront et en viendront à rejoindre les forces de la libération noire. Les Blancs qui prétendent vouloir aider la révolution seront envoyés dans les communautés blanches pour diviser celles-ci, lutter contre les fascistes et faire échouer les efforts des forces contre-révolutionnaires. Ce sera le chaos partout et avec l’interruption des communications de masse, des mutineries éclateront en grand nombre dans tous les secteurs du gouvernement des oppresseurs. Le marché boursier chutera ; Wall Street s’arrêtera de fonctionner; des émeutes déchireront Washington. Les fonctionnaires courront partout – courront pour sauve leur vie. Les George Lincoln Rockefeller, Kennedy, Vanderbilt, Hunt, Johnson, Wallace, Barnett, etc., seront les premiers à fuir. La révolution « frappera la nuit et n’épargnera personne » […] La révolution noire fera usage du sabotage dans les villes, frappant d’abord les centrales électriques, puis le transport et fera la guérilla dans les campagnes du Sud. Avec des villes rendues impuissantes, l’oppresseur sera désarmé[37]. »
La révolution était clairement perçue comme un travail d’homme, puisque les femmes figuraient à peine dans l’équation. En effet, l’un des faits marquants de l’histoire de la gauche anti-révisionniste est le degré auquel elle est restée dominée par les hommes. Bien que Wanda Marshall ait été l’une des membres fondatrices du RAM, elle n’occupait aucun poste de direction à l’échelle nationale en 1964. En dehors de la promotion de la création de « ligues de femmes », dont l’objectif était « d’organiser les femmes noires qui travaillent dans les maisons des Blancs », le RAM resta relativement silencieux sur l’émancipation des femmes.
L’orientation masculine du RAM est très liée au fait que ses dirigeants se voyaient comme des guérilleros urbains, les membres d’une variante entièrement noire de l’Armée rouge de Mao. Tous les membres du RAM ne se percevaient pas de cette façon, mais ceux qui se reconnaissaient comme tels étaient profondément attachés à une éthique révolutionnaire que Mao avait établi pour les cadres de son propre parti et pour les membres de l’Armée populaire. Nous remarquons cela très clairement dans le « Code des Cadres » du RAM, un ensemble de règles de conduite extrêmement didactiques que les membres devaient adopter comme un mode de vie. Voici quelques exemples :
Un révolutionnaire nationaliste possède le plus grand respect pour toutes les formes d’autorité au sein du parti.
Un révolutionnaire nationaliste ne peut être corrompu par l’argent, les honneurs ou par quelque autre bénéfice personnel.
Un révolutionnaire nationaliste n’hésitera pas à subordonner son intérêt personnel à celui de l’avant-garde, [sans] hésitation.
Un révolutionnaire nationaliste maintiendra le plus haut niveau de moralité et ne prendra jamais plus qu’une aiguille ou un bout de fil aux masses – les Frères et les Sœurs maintiendront le plus grand respect l’un pour l’autre et n’abuseront ni ne profiteront jamais les uns des autres à des fins personnelles – et sous aucun prétexte ils ne mésinterpréteront la doctrine du nationalisme révolutionnaire[38].
Les analogies avec Les citations du Président Mao Tsé-Toung sont frappantes. Le dernier exemple provient directement d’une des « Trois grande règles de discipline » de Mao qui exhorte les cadres à « ne prendre aucune aiguille ou bout de fil au peuple. » Altruisme et dévouement complet aux masses forment un autre thème prédominant des Citations. Encore une fois, les comparaisons sont notables : « Jamais et nulle part », déclarait Mao, « un communiste ne placera au premier plan ses intérêts personnels, il les subordonnera aux intérêts de la nation et des masses populaires. C’est pourquoi l’égoïsme, le relâchement dans le travail, la corruption, l’ostentation, etc. méritent le plus grand mépris, alors que le désintéressement, l’ardeur au travail, le dévouement à l’intérêt public, l’effort assidu et acharné commandent le respect[39]. »
L’accent mis par le maoïsme sur l’éthique révolutionnaire et la transformation morale, en théorie du moins, résonnait avec les traditions religieuses noires (et avec le protestantisme américain de façon plus générale) et, comme la Nation of Islam, les maoïstes noirs prêchaient la retenue, l’ordre et la discipline. Il est bien possible qu’évoluant au beau milieu d’une contre-culture qui liait des éléments hédonistes et l’usage de drogues, une nouvelle vague d’étudiants radicaux issue de la classe ouvrière trouva l’éthique maoïste attrayante. À son retour de Chine, Robert Williams ─ père fondateur du RAM à de nombreux égards ─ insista pour que tous les jeunes militants noirs « entreprennent une transformation personnelle et morale. Il y a besoin d’un code révolutionnaire strict, d’une éthique morale. Les révolutionnaires sont des forces de la droiture[40]. » Pour les révolutionnaires noirs, la dimension morale et éthique de la pensée maoïste était centrée sur la notion de transformation personnelle. C’était une leçon familière que Malcom X et (plus tard) George Jackson appliquèrent : l’idée que chacun peut avoir la volonté révolutionnaire de se transformer. (Ces récits sont presque exclusivement masculins malgré le nombre croissant de mémoires écrits par des femmes noires radicales). Que les membres du RAM aient vécu selon les principes du « Code des cadres » ou non, l’éthique maoïste servit en fin de compte à renforcer l’image laissée par Malcom X en tant que modèle révolutionnaire.
Le programme en douze points du RAM appelait à la création d’écoles de la liberté, d’organisations nationales d’étudiants noirs, de clubs de tir, de coopératives agricoles noires ─ pas seulement pour le développement économique, mais aussi pour préserver « les forces de la communauté et la guérilla » ─ et d’une armée de libération composée de jeunes et de chômeurs. Le RAM mettait l’accent sur l’internationalisme, promettant un soutien aux mouvements de libération nationale en Afrique, en Asie et en Amérique latine ainsi que l’adoption du « socialisme panafricain ». Dans le même esprit que l’essai précurseur de Cruse, « Revolutionary Nationalism and the Afro-American », les membres du RAM se considéraient comme des sujets coloniaux luttant dans une « guerre coloniale interne. » Comme l’écrivit Stanford dans un document interne intitulé « Projects and Problems of the Revolutionary Movement » (1964), « la position du RAM est que l’Africain-Américain n’est pas un citoyen des États-Unis, privé de ses droits, mais plutôt un sujet colonial asservi. Cette position établit que les Noirs aux États-Unis forment une nation captive et réprimée et qu’ils ne combattent pas pour l’intégration dans la communauté blanche, mais pour la libération nationale[41] ».
En tant que sujets coloniaux disposant d’un droit à l’autodétermination, le RAM considérait l’Afro-Amérique comme membre de facto des nations non-alignées. Les membres du RAM s’identifiaient même à une partie du « monde de Bandung », allant jusqu’à organiser une conférence en Novembre 1964 à Nashville intitulée « The Black Revolution’s Relationship to the Bandung World ». Dans un article de 1965 publié dans le journal du RAM Black America, ses membres commencèrent à développer une théorie de l’« humanisme de Bandung » ou de l’« internationalisme révolutionnaire noir », qui faisait valoir que la bataille entre l’impérialisme occidental et le Tiers-Monde ─ plus que la bataille entre le travail et le capital ─ représentait la contradiction la plus fondamentale de l’époque. Ils lièrent la lutte pour la liberté des Africains-américains à ce qui se passait en Chine, à Zanzibar, à Cuba, au Vietnam, en Indonésie et en Algérie, et inscrivirent leur travail dans la stratégie internationale maoïste consistant à encercler les pays capitalistes occidentaux et à défier l’impérialisme. Après 1966, la notion d’« humanisme de Bandung » fut entièrement écartée et remplacée par celle d’« internationalisme noir ».
Cet « internationalisme noir » fut précisément défini dans une brochure très audacieuse de trente-six pages publiée par le RAM en 1966, intitulé The World Black Revolution. Plus ou moins calqué sur Le Manifeste du Parti communiste, ce pamphlet sympathisait vivement avec la Chine à la fois contre l’Occident capitaliste et l’Empire soviétique. « L’émergence de la Chine révolutionnaire a commencé à polariser les contradictions de caste et de classe dans le monde, à la fois dans le camp de la bourgeoisie impérialiste et dans celui de la bourgeoisie européenne communiste-socialiste[42]. » En d’autres termes, le cas de la Chine révélait et renforçait les contradictions entre les peuples coloniaux et l’Occident. Rejetant l’idée que la révolution socialiste émergerait dans les pays développés d’Occident, le RAM insistait sur le fait que la seule véritable solution révolutionnaire était la « dictature du sous-prolétariat noir à l’échelle mondiale à travers la révolution noire mondiale ». Bien entendu, les auteurs ne travaillaient pas avec les définitions actuelles : le RAM utilisait la notion de « sous-prolétariat » pour inclure tous les peuples de couleur en Asie, Amérique latine, Afrique et ailleurs : « sous-prolétariat noir » était simplement synonyme de « monde colonial ». La Chine menait une lutte féroce pour défendre sa propre liberté. À présent, le reste du monde « noir » devait prendre la relève.
Le sous-prolétariat noir n’a qu’un seul moyen de se libérer du colonialisme, de l’impérialisme, du capitalisme et du néocolonialisme ; il faut détruire complètement la civilisation (bourgeoise) occidentale (les villes du monde) à travers une révolution noire mondiale et établir une dictature révolutionnaire noire mondiale pouvant mettre fin à l’exploitation de l’homme par l’homme et bâtir le nouveau monde révolutionnaire[43].
Pour coordonner cette révolution, le RAM appelait à la création d’une International noire et d’une « Armée populaire de libération à l’échelle mondiale ».
Malgré son nationalisme véhément, The World Black Revolution conclut que le nationalisme noir était « vraiment internationaliste ». Ce n’était qu’en démolissant le nationalisme blanc/pouvoir blanc que la libération de tous pouvait être accomplie. Ce n’était pas seulement les frontières nationales qui seraient gommées par la « dictature du sous-prolétariat noir », mais aussi « la nécessité d’un nationalisme agressif[44] ». C’était une déclaration assez remarquable étant donné les racines sociales et idéologiques du RAM. Mais plutôt que de représenter une position unifiée, cette déclaration reflétait les tensions diverses qui ont perduré dans l’histoire du RAM : d’un côté, les nationalistes estimant que les révolutionnaires devaient d’abord se battre pour la nation noire et construire le socialisme indépendamment du reste des États-Unis ; de l’autre, les marxistes révolutionnaires comme James et Grace Boggs désireux de savoir qui gouvernerait la nation « blanche » et ce que signifierait une telle présence pour la liberté noire. Ces derniers rejetèrent également les efforts visant à ressusciter la thèse de la « nation noire » ─ l’ancienne ligne communiste pour laquelle les individus dans les États à majorité noire du Sud (la « Black Belt») devaient faire sécession avec l’Union fédérale. Les partisans de Boggs soutinrent que la véritable source du pouvoir résidait dans les villes, pas dans la Black Belt rurale. En janvier 1965, James Boggs démissionna de son poste de chef idéologique.
Après des années d’existence en tant qu’organisation clandestine, le RAM, dans une série de « révélations » parues dans les journaux Life[45] et Esquire[46], fut identifié comme l’un des principaux groupes extrémistes « conspirant contre “les petits Blancs” » Le groupe « Peking-backed » (Soutien à Pékin) fut considéré non seulement comme armé et dangereux, mais aussi comme « particulièrement versé dans la littérature révolutionnaire ─ de Marat et Lénine à Mao, Che Guevara et Frantz Fanon. » (La branche de Harlem du Progressive Labor Party répondit à ces articles avec un pamphlet intitulé, The Plot Against Black America, qui faisait valoir que la Chine ne finançait pas la révolution, mais qu’elle donnait un exemple de révolution par son anti-impérialisme fervent. Le pamphlet insistait sur les causes réelles de la révolte noire qui puisaient ses racines dans les conditions de vie dans les ghettos)[47]. Il n’est pas
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Entretenir l’optimisme de la volonté

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Nous vivons des temps sombres. Dans de nombreux pays, des gouvernements autoritaires, voire fascistes, prennent le pouvoir, comme c'est notamment le cas aux États-Unis, notre puissant voisin du sud. Ce gouvernement par et pour les milliardaires s'annonce d'une brutalité jamais vue depuis des décennies.
Cette communion entre les Zuckerberg, Bezos et autres barons voleurs de la techno d'une part, et le réseau de l'extrême droite européenne et latino-américaine d'autre part, est moins étonnante qu'il n'y paraît. Certes, par le passé, les élites de ces entreprises technologiques ont pourtant prétendu avoir des sympathies pour le parti démocrate et une certaine forme de progressisme. Mais les masques sont aujourd'hui tombés : on voit se déployer une convergence paisible entre un modèle de société fondé sur la hiérarchie raciale, la binarité des genres et l'exploitation de classe et l'idéologie accélérationniste, extractiviste et techno-fasciste cultivée depuis longtemps à la Silicon Valley.
Le deuxième mandat de Trump s'annonce bien différent du premier. Les médias et les grandes entreprises libérales semblent cette fois-ci beaucoup plus conciliantes avec les stratégies des républicains. Dès les premiers jours de sa présidence, les politiques d'Équité, Diversité et Inclusion, critiquées depuis des années (par la droite, mais aussi à l'occasion par la gauche), ont fait l'objet d'un nombre de décrets important. Ainsi, ces programmes se voient interdits tant au niveau de la fonction publique fédérale américaine que dans l'armée. À l'inverse, les personnes trans sont directement ciblées par ces nouvelles mesures discriminatoires.
Dans ce contexte, les multinationales américaines ne se soumettent pas simplement à Trump : elles participent à cette reconfiguration du pouvoir, y voyant des avantages économiques. Le capitalisme, même celui en apparence « diversitaire » ou « woke », s'accommode bien de la montée du fascisme.
Qu'advient-il des subjectivités militantes dans ce contexte si difficile ? Les espaces pour se rencontrer, qu'ils soient numériques ou même physiques, semblent se rétrécir. On observe une migration importante vers différents réseaux sociaux, et par là-même une fragmentation des solidarités. Notre rapport au monde devient une expérience de plus en plus solitaire, et donc anxiogène. Combien de temps peut durer ce repli sur soi ?
S'il est vrai qu'il faut prendre soin de sa santé mentale et s'offrir les repos et ressourcements nécessaires, l'isolement et le déni ne peuvent pas être bénéfiques à terme. Face aux crises et aux assauts, la solidarité et l'action demeurent des ressources puissantes, tant pour les collectivités que pour les individus. Les forces de gauche doivent resserrer les rangs, mettre de côté les querelles de chapelle et lutter pour les droits des personnes déjà marginalisées, contre qui la violence ne fait que croître.
Il importe aussi de ne pas se contenter de résister aux attaques et de bloquer des reculs. Nous devons continuer de faire vivre les propositions radicales et émancipatrices, qui seules peuvent ultimement nous sortir de l'emprise de cette haine et de cette répression.
Antonio Gramsci disait qu'il faut savoir conjuguer le pessimisme de la raison et l'optimisme de la volonté. Gramsci savait de quoi il parlait, puisqu'il s'était lui-même confronté à l'un des initiateurs du fascisme, Benito Mussolini. Plus que jamais, il nous faut entretenir cet optimisme de la volonté. Pour sa part, Angela Davis référait récemment à Martin Luther King en disant que « face aux déceptions finies, nous avons besoin d'espoir infini ». L'espoir n'est pas de la naïveté : il est cet horizon qui nous permet de garder le cap au milieu des plus violentes tempêtes.
Couverture : Ramon Vitesse
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Sommaire du numéro 103

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Travail
Retour sur les grèves du secteur public de 2023 : Vers une renaissance syndicale / Émile Lacombe
Dossier Noir de l'Assurance‑Chômage 2024-2025 / Entrevue avec Roxane Bélisle
Les limites de « l'entreprise citoyenne » / Thomas Collombat
Environnement
(Re)devenir écologiste / Quentin Lehmann
Sortie des cales
Feux en Californie. Une recette bien humaine du désastre / Jade Almeida
Santé
Pas de profit sur la maladie ! / Entrevue avec Réjean Leclerc
Regards féministes
Petit éloge de la bravoure / Kharoll-Ann Souffrant
Observatoire des luttes
Animal Liberation Front : La clef de voûte du Green Scare aux États-Unis / Ève Lynn Smollett
Mémoire des luttes
Max Chancy, militant et pédagogue socialiste / Alexis Lafleur-Paiement
Culture numérique
Le fédivers, un réseau social libre et résistant / Entrevue avec Evan Prodromou
Mini-dossier : L'éthique du care, partout, tout le temps !
Coordonné par Isabelle Bouchard, Alexia Leclerc, Selena Phillips-Boyle et Angelo Soares
Le care dans tous ses états / Entrevue avec Agnès Berthelot-Raffard
Le capitalisme à son apogée / Premilla Nadasen
Des obstacles importants / Entrevue avec le RÉCIFS (Regroupement, Échanges, Concertation des intervenantes et des formatrices en social)
Trans care. Se rendre « lisibles » pour se faire soigner / Emilie Morand et Patrick Martin
Dossier : À ras bord !
Coordonné par Louise Nachet et Ramon Vitesse. Illustrations : Ramon Vitesse
Être freegan : Vivre des rejets de la société de consommation / Simon Paré-Poupart
Mercier-Hochelaga-Maisonneuve : Au front pour la salubrité / André Philippe Doré
Les chimères de l'économie circulaire / Louise Nachet
Un monde jetable… / Simon Ian
Bombance et « déchets » alimentaires / Ramon Vitesse
Libérer le Nord du nucléaire / Entrevue avec Brennain Lloyd.
La récupération au service de la solidarité sociale / Entrevue avec François, membre-utilisateur de la Coop Les Valoristes
Élections municipales 2025 : Tendre vers le zéro déchet / Jean-Yves Desgagnés
Coup d'œil
Syrie, mémoire d'un printemps / Nicolas Lacroix
International
Palestine, Liban, Syrie : Réflexions diasporiques / Youssef al-Bouchi
Élections aux États-Unis et ailleurs dans le monde : Ce qui a changé / Claude Vaillancourt
L'éveil d'une nouvelle gauche au Mexique : Un mouvement progressiste indépendant gagne en force / Alexy Kalam et Daniel Arellano Chávez
Culture
Des livres militants pour une édition engagée / Entrevue avec Antoine Deslauriers et Alexis Lafleur‑Paiement
Recensions
À tout prendre ! / Ramon Vitesse
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À ras bord !

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À la fois omniprésents et invisibles, tout comme les travailleur·euses qui s'occupent de les ramasser, les déchets ne sont pas un effet secondaire déplorable et indésirable du capitalisme. Au contraire, ils sont le signe de sa domination. Un élément constitutif et nécessaire d'un système qui dépend de la création continue de surplus. La surproduction, l'obsolescence programmée, la création de besoins imaginaires ou le gaspillage sont autant de phénomènes mortifères qui semblent indéboulonnables au sein de nos sociétés.
Les déchets sont souvent traités comme un problème d'ordre technique. Une question de gestion. Il s'agit au contraire d'un problème profondément politique, ancré dans des enjeux de justice, d'inégalités sociales et environnementales, de racisme et de violence. Les impacts grandissants des dépotoirs, décharges et usines polluantes touchent encore de manière disproportionnée les communautés les plus marginalisées. Hors des centres urbains, les vastes territoires autochtones, autrefois perçus dans l'imaginaire colonial comme des espaces immaculés, sont parsemés par les dépotoirs toxiques de l'extractivisme forestier, fossile ou minier.
Pourtant, à l'image de l'effondrement de la biodiversité, l'enjeu des déchets semble avoir perdu en visibilité au sein des luttes écologiques au profit de la lutte contre les changements climatiques. De manière ironique, la popularité de la pratique du recyclage, largement adoptée dans les habitudes des Québécois·es, contribue à détourner notre attention des coûts élevés de la fabrication des biens que nous consommons et jetons, tout en nous procurant une bonne conscience.
La trajectoire du mouvement pour le recyclage, né dans les années 1970, est emblématique de l'impasse actuelle. Afin d'empêcher le développement de politiques et de lois contraignantes, les industriels ont réussi à imposer des « solutions » qui définissent les consommateurs individuels, et non les producteurs, comme les principaux responsables de la dégradation de l'environnement. Au lieu d'aspirer à des changements structurels, nous sommes toutes et tous enjoints à « faire notre part », à changer nos modes de vie, nos habitudes d'achats, au lieu de nous organiser collectivement pour lutter à la source contre la pollution et le gaspillage.
50 ans plus tard, nous produisons toujours plus de déchets, lesquels représentent une importante source de profits pour l'industrie du recyclage, largement privatisée. Malgré le caractère rassurant des expressions « durable », « réutilisable » ou « biodégradable », la majorité des déchets continuent à être brûlés, enfouis, déversés dans les océans ou exportés dans des pays du Sud global. La complexité des produits électroniques rend les processus de recyclage coûteux, inefficaces, voire impossibles. Les mouvements visant la décroissance, le zéro déchet ou la réparation, quant à eux, restent encore des mouvements de niche ou prompts à retomber dans les écueils de la consommation engagée individuelle. Les angles morts du recyclage et sa cooptation actuelle par les industriels et les pouvoirs publics nous poussent ainsi à nous questionner sur les manières de renforcer les luttes sociales et environnementales en cours et à venir, au Québec, au Canada et dans le monde ; dans un contexte morbide d'accélération des ravages du capitalisme.
Bien au-delà des ressources et de l'environnement, le capitalisme gaspille nos vies en tant qu'individus, en tant que communautés. Certains groupes tout entiers (réfugié·es, itinérant·es, chômeur·euses chroniques) sont traités comme autant d'indésirables à repousser loin de nos villes, voire de nos frontières. Contre la marchandisation, la dévalorisation et la jetabilité de nos vies, de nos corps, de nos relations et de nos imaginaires, d'autres horizons sont possibles.
Ce dossier réunit des points de vue différents, mais souvent complémentaires, dans leur manière de comprendre cette thématique complexe. Un espace éclectique de réflexions, de propositions, de luttes et même de poésie.
Dossier coordonné par Louise Nachet et Ramon Vitesse, illustré par Ramon Vitesse
Avec des contributions de Jean-Yves Desgagnés, André Philippe Doré, François de la Coop Les Valoristes, Simon Ian, Brennain Lloyd, Louise Nachet, Simon Paré-Poupart et Ramon Vitesse
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Démarche artistique de Ramon Vitesse
Pour illustrer la question des déchets j'ai d'abord jonglé avec l'idée de pochoir graffiti de rue… Puis, le collage s'est imposé avec la volonté de travailler avec de la récup'. Avec une pile de Le Devoir, la technique de papier déchiré a été préférée pour l'utilisation des doigts en visant une découpe imparfaite en « dentelle ». Pour évoquer le fatras des poubelles, ajouter d'autres approches était tentant ; il y a aussi des aquarelles et une encre en stylo bille !
Publication des résultats 2024 du Fonds jeunesse du Journal des Alternatives

Lancement du numéro 103

Le collectif de rédaction de la revue À bâbord ! vous invite au lancement de son numéro 103 ayant pour titre de dossier « À ras bord ! ».
L'événement se déroulera à la libraire Zone Libre (262 Rue Sainte-Catherine Est, Montréal) le mercredi 2 avril 2025 à partir de 18h.
Entrée libre, bienvenue à toutes et à tous !
L'événement se déroulera à la libraire Zone Libre (262 Rue Sainte-Catherine Est, Montréal) le mercredi 2 avril 2025 à 18h00. Les prises de parole commenceront à 18h30.Il y aura une présentation du dossier par les coordonnateurs·rices du numéro : Ramon Vitesse et Louise Nachet.
S'ensuivra la prise de parole de plusieurs des auteurs·rices du dossier.
Il y aura aussi une exposition réalisée par Selena Phillips-Boyle à partir des photos prises pour illustrer le mini-dossier sur l'éthique du care. Le mini-dossier sur le care a été coordonné par Isabelle Bouchard, Alicia Leclerc, Selena Phillips-Boyle et Angelo Soares.
Pour consulter l'événement Facebook, c'est ici.
Voici un petit extrait de la présentation du dossier principal : « À la fois omniprésents et invisibles, tout comme les travailleur·euses qui s'occupent de les ramasser, les déchets ne sont pas un effet secondaire déplorable et indésirable du capitalisme. Au contraire, ils sont le signe de sa domination. Un élément constitutif et nécessaire d'un système qui dépend de la création continue de surplus. La surproduction, l'obsolescence programmée, la création de besoins imaginaires ou le gaspillage sont autant de phénomènes mortifères qui semblent indéboulonnables au sein de nos sociétés. »

Capitalisme et confédération – Compte-rendu de lecture
En 1968, l’historien Stanley B. Ryerson faisait paraître son livre Unequal Union, une œuvre de synthèse sur l’histoire du Canada. L’ouvrage, traduit en français sous le titre Capitalisme et confédération en 1972, a récemment été republié chez M Éditeur avec la collaboration de trois membres du collectif Archives Révolutionnaires. L’auteur du présent compte-rendu, quant à lui, n’a pas été impliqué dans cette réédition, mais nous offre sa propre appréciation de l’ouvrage en regard des enjeux contemporains.
Un texte de Nicholas Bourdon
Stanley B. Ryerson (1911-1998) est issu d’une famille de la bourgeoisie torontoise. Il fait cependant le choix de militer au sein du Parti communiste du Canada (PCC) et en faveur des masses laborieuses au début des années 1930. Sa formation intellectuelle lui permet de gravir rapidement les échelons et d’occuper un rôle dirigeant au sein du parti dès les années suivantes. L’implication de Ryerson au sein du PCC sera cependant marquée de soubresauts alors que les contextes international et national l’amènent à remettre en question les positions du parti. D’une part, il est profondément affecté par le Printemps de Prague en 1968. D’autre part, son attachement à l’autodétermination du Québec et le rejet du nationalisme « petit-bourgeois » par le PCC l’amènent à se distancer de celui-ci : la rupture sera définitive en 1971. À partir de ce moment, il s’investit davantage dans le milieu académique, notamment à l’UQAM où il est professeur à partir de 1970. C’est avec la volonté d’élucider et de comprendre le nationalisme québécois qu’il se lance dans la rédaction de ses deux ouvrages historiques majeurs : The Founding of Canada en 1960 et Unequal Union en 1968. Ce dernier ouvrage sera traduit en français par André d’Allemagne sous le titre Capitalisme et confédération en 1972 et publié aux éditions Parti Pris. La dernière réédition de cet ouvrage datant de 1978, M Éditeur a cru bon republier cette œuvre phare de l’historiographie canadienne en 2024, afin de la rendre accessible aux plus jeunes générations. En effet, ce livre est riche de contenu sur l’évolution politique et socio-économique du Canada au XIXe siècle dans une perspective marxiste.
Dans son premier chapitre, Ryerson nous présente son objectif, soit d’accorder autant d’importance aux phénomènes socio-économiques qu’aux phénomènes nationaux. L’auteur entend offrir une analyse matérialiste et marxiste de l’histoire du Canada tout en soulignant les revendications nationales du peuple canadien-français. Dans les chapitres 2 à 7, le contexte, le déroulement et les conséquences des insurrections du Bas et du Haut-Canada de 1837-1838 nous sont présentés synthétiquement, tout en offrant un niveau de détail suffisant pour intriguer et intéresser le lectorat. L’analyse de Ryerson sur ces événements est originale sur plusieurs plans, notamment en précisant la composition sociale du camp révolutionnaire, ainsi que celui des autorités coloniales. On constate aisément une analyse inspirée de la lutte des classes où les élites bourgeoises et le haut clergé se rangent systématiquement du côté des autorités coloniales, alors que la petite bourgeoisie et les masses ouvrières et paysannes se soulèvent majoritairement contre le régime britannique. L’auteur souligne également l’interrelation entre les revendications démocratiques et économiques des insurgés. De plus, Ryerson nous indique schématiquement les distinctions entre les ailes modérées et radicales du mouvement. En ce qui concerne le Bas-Canada, la révolution est présentée comme le fruit d’une affirmation nationale accompagnée de revendications politiques démocratiques incarnées par la devise : « Notre langue, nos institutions, nos lois ». Finalement, l’auteur prend également le soin de fournir une analyse rigoureuse des événements révolutionnaires dans les deux Canadas en établissant les causes principales de leur échec.
Dans les chapitres 8 et 9, les conséquences immédiates de la répression violente des mouvements révolutionnaires dans les années suivant l’adoption de l’Acte d’Union en 1840 sont abordées. L’auteur présente les mobilisations populaires comme une des causes primordiales de l’obtention du gouvernement responsable en 1848. Le blocage occasionné par le contexte colonial limitant le développement des institutions représentatives ainsi que celui d’une industrie locale insuffisamment développée prend une place importante dans la réflexion. Ensuite, les Canadiens français ne peuvent prétendre à un réel Home Rule à ce moment, puisque l’autonomie n’a été consentie qu’au moment où ceux-ci représentaient une minorité démographique dans la colonie, témoignant de l’aspect national de cette lutte. Les événements à l’échelle du monde et de l’Empire britannique ont également contribué à faire plier les autorités en faveur du gouvernement responsable, notamment avec l’arrivée massive d’immigrants irlandais victimes de la famine, la recrudescence du mouvement chartiste vers 1847-1848 dans un contexte de crise économique et, finalement, la vague révolutionnaire du printemps 1848 en Europe.

Dans les chapitres 10 à 14, l’évolution industrielle du Canada est abordée sous l’angle de la transition du féodalisme au capitalisme dans les colonies britanniques en Amérique du Nord. Sans surprise, le système seigneurial au Bas-Canada est présenté comme le principal frein à la libération d’une main-d’œuvre paupérisée permettant la transition vers un capitalisme industriel dans la colonie. C’est en 1854 que ce vestige semi-féodal est aboli par les autorités coloniales, ce qui concorde selon l’auteur avec une accélération de l’industrialisation du Canada dans les années 1850 et 1860. Un autre facteur important du développement du capitalisme au Canada est la construction des chemins de fer grâce à un appui étatique important. L’ambivalence des élites canadiennes face à leur voisin du sud, les États-Unis, prend également une place importante autour de quatre points d’analyse : la pénétration économique étasunienne au Canada, l’expansionnisme étasunien, le mouvement annexionniste au Canada et le libre-échangisme entre les deux pays. D’un côté, le puissant voisin est un symbole de progrès économique, mais, de l’autre côté, il limite le développement d’un capitalisme canadien. La bourgeoisie canadienne naissante est prise entre deux feux.
Dans les chapitres 15 à 17, la volonté d’unir les différentes colonies britanniques en Amérique du Nord occupe la place principale. L’union est présentée par les élites canadiennes comme une solution pour éviter l’absorption par le puissant voisin étasunien, une façon de développer plus aisément le réseau du chemin de fer entre les colonies britanniques et d’étendre les rails de l’Atlantique jusqu’au Pacifique. Ces élites considèrent que cela favoriserait le développement capitaliste et industriel. Par contre, les autorités métropolitaines sont initialement opposées à tout projet d’union des colonies allant plus loin que le Canada-Uni de 1840 qui avait pour but de minoriser politiquement les Canadiens français. Cela s’inscrit dans une tradition de « diviser pour mieux régner ». Ce n’est que par réalisme que les Britanniques changeront leur position sur l’unité des colonies après la guerre de Sécession (1861-1865), devant la menace d’une invasion étasunienne du Canada. Malgré l’opposition initiale de la métropole, les milieux d’affaires canadiens-anglais réussissent à former une coalition pro-union qui tient le coup face à l’instabilité politique et ministérielle. MacDonald et Galt, représentants des milieux d’affaires canadiens-anglais, forment une telle alliance avec les réformistes du Canada-Ouest (Brown) ainsi qu’avec les élites économiques et cléricales canadiennes-françaises (Cartier). La réticence des Maritimes est un autre élément posant problème, qui sera réglé par des pressions politiques et économiques importantes sur celles-ci dans les années 1860. L’auteur souligne aussi avec brio l’antidémocratisme inhérent aux « Pères de la Confédération » qui voient dans le suffrage universel un mal pour la société.
Dans les chapitres 18 et 19, Ryerson aborde la place des Canadiens français et des Métis dans le contexte de l’union fédérale. Pour les premiers, la question d’un « pacte » entre les peuples francophones et anglophones est centrale. Fidèle à son habitude, Ryerson adopte une position mitoyenne entre les deux grandes écoles historiographiques sur le sujet. Sa position se résume ainsi : un « pacte » est établi entre Cartier et MacDonald avant les réunions de Québec et de Charlottetown sur les bases du futur régime fédératif. Celui-ci octroie certains pouvoirs locaux aux gouvernements provinciaux, ce qui permettrait de facto une autonomie limitée au Québec sur les questions culturelles et linguistiques. Cependant, l’auteur soulève les limites du nationalisme traditionnel et conservateur des élites canadiennes-françaises qui ne voulaient pas d’un régime binational, perçu comme trop radical et républicain. En ce qui concerne les Métis, leurs mobilisations sont présentées comme une véritable affirmation de la souveraineté des peuples des Plaines menant à la création du Manitoba en 1870. Sans la résistance des Métis à l’autorité canadienne dans l’Ouest, aucune concession n’aurait été accordée en faveur de leurs revendications. Le gouvernement MacDonald approchera d’abord le problème par une apparente conciliation et de nombreuses intrigues, par manque de moyens militaires, mais optera finalement pour la confrontation qui aura raison des membres du gouvernement provisoire des Métis qui seront emprisonnés ou bien poussés à l’exil. Ce tour de force permet aux colons anglophones de s’imposer démographiquement dans la province.

Dans le dernier chapitre, Ryerson revient sur le développement parallèle de deux mouvements nationaux principaux au Canada (les nationalismes canadien-anglais et canadien-français), ainsi que sur le mouvement ouvrier et prolétarien, afin de conclure en étayant à nouveau sa thèse principale. À cet effet, l’évolution du Canada est principalement caractérisée par deux collectivités nationales dans une situation inégalitaire et coloniale en défaveur de la nation canadienne-française. Selon l’auteur, ce développement national est parallèle au développement du capitalisme industriel qui voit également l’émergence d’une classe prolétarienne embryonnaire. Il conclut que le projet d’union fédérale, fait par et pour les élites bourgeoises des deux collectivités nationales, n’a jamais réussi à inclure la majorité, soit les classes travailleuses. L’auteur affirme clairement que l’égalité réelle devra passer par la fin du monopole de la propriété privée de la classe bourgeoise au détriment de la majorité, ainsi que par la reconnaissance formelle du principe d’autodétermination des peuples composant le Canada.
Pour conclure, l’ouvrage Capitalisme et confédération de Stanley B. Ryerson constitue une excellente synthèse de l’histoire politique et socio-économique du Canada au XIXe siècle. L’auteur ne s’en cache pas, il défend une approche marxiste pour interpréter les événements de l’histoire canadienne, tout en y intégrant la question nationale. Cela constitue l’élément le plus fort et le plus riche de l’ouvrage. Un autre élément intéressant et original de ce livre est la capacité de l’auteur à rattacher les événements proprement canadiens au contexte international. Par exemple, Ryerson lie habilement les mouvements insurrectionnels du Canada au mouvement chartiste en métropole, ou encore, il aborde avec justesse l’expansion impérialiste britannique pour l’accès au Pacifique dans le but d’obtenir un débouché commercial vers la Chine. En effet, ce livre est rempli de bonnes intuitions, peu abordées dans l’historiographie de son époque, qui ont permis à des recherches subséquentes d’approfondir ces thèmes effleurés par Ryerson. On pense notamment au lien avec le mouvement chartiste qui offre les bases d’une interprétation des insurrections canadiennes dans le contexte des révolutions atlantiques.
Cependant, ces intuitions, bien qu’intéressantes, ne sont pas suffisamment développées et sont lacunaires à certains égards. L’ouvrage concentre plutôt ses réflexions, comme annoncé, sur l’interrelation entre les revendications d’autonomie politique et les revendications nationales, ainsi que sur le développement du capitalisme canadien. Pour ce dernier sujet, l’interprétation est intéressante et bien défendue, mais reste majoritairement statistique et se cantonne à l’interprétation classique du développement industriel permis par un surplus de main-d’œuvre paupérisée et par « l’accumulation primitive du capital ». À mon avis, il aurait été intéressant d’explorer davantage d’autres formes de subsistance du mode de production féodal que le régime seigneurial, comme les corporations de métier. Une autre critique récurrente de l’ouvrage est son traitement des premiers peuples. Ryerson a eu le flair de les inclure dans son narratif, mais ceux-ci sont souvent présentés comme de simples victimes du régime colonial et capitaliste. L’auteur les relègue donc inconsciemment à un rôle passif dans l’histoire. Le chapitre sur les Métis constitue une belle tentative de l’auteur de ne pas reléguer les Autochtones à ce rôle, mais celui-ci manque de profondeur et n’est pas tout à fait convaincant quant aux autres nations présentes dans les Prairies.
Cela n’en fait pas un mauvais livre pour autant puisqu’il a ouvert la porte à plusieurs réflexions qui ont été explorées et élucidées par les générations subséquentes. Capitalisme et confédération reste, à mon avis, un ouvrage essentiel et incontournable pour comprendre et s’initier, sur des bases solides, à l’histoire canadienne.

Photo de couverture : Adrien Hébert, Les charbonnages (c. 1928)

Réseau militant intersyndical de QS/Résolutions pour le Conseil national du 5-6 avril 2025

Voici trois résolutions adoptées en AG par le RMI en vue du Conseil national de Québec solidaire le 5 et 6 avril prochain.
- La première propose de mettre à l'OJ le lancement d'une campagne politique pour un front uni contre la droite.
- La deuxième est une résolution d'urgence pour accentuer l'appui aux licenciés d'Amazon.
- La troisième est une résolution d'urgence en appui aux mobilisations contre le PL 89 brimant le droit de grève.
Solidairement,
Roger Rashi
Pour le comité de coordination du Réseau militant intersyndical
1. Face à la montée de l'extrême droite, de l'austérité et de l'antisyndicalisme Lançons une riposte unitaire et populaire
Considérant que le projet de loi 89, dit « Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out », proposé par le gouvernement caquiste, brime le droit de grève, constitue l'une des pires attaques contre le mouvement syndical québécois depuis plus de 40 ans et vise à affaiblir la riposte ouvrière et populaire aux attaques patronales et gouvernementales,
Considérant que la fermeture par AMAZON de ses sept entrepôts au Québec afin d'empêcher la syndicalisation de ses employé-es démontre tout le mépris de cette multinationale américaine, dont le patron Jeff Bezos est un proche allié de Donald Trump, envers la classe ouvrière québécoise et nos lois du travail,
Considérant que le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral vont profiter de la guerre commerciale déclenchée par l'administration Trump pour accroitre les mesures d'austérité, renforcer leurs politiques d'appui aux grandes entreprises et accentuer les reculs au niveau environnemental,
Considérant que lors du 8 mars dernier, un mouvement de groupes sociaux et communautaires, tel que Mères au front, s'est mis en marche pour protester contre la montée de l'extrême droite et de la misogynie, et qu'au courant de l'année qui vient des actions de la Marche mondiale des femmes s'organiseront à travers le monde,
Considérant que les politiques agressives, chauvines, racistes et intolérantes de l'administration Trump favorisent la montée de l'extrême droite -ici et dans le monde- ; briment les droits des femmes, des minorités, et des peuples ; aggravent les tensions géopolitiques et multiplient le danger de guerre,
Nous proposons
– que Québec solidaire appuie résolument par une campagne publique, tant au parlement que dans la rue, les mobilisations sociales en cours et favorise leur convergence dans un front uni des luttes contre l'antisyndicalisme, notamment du projet de loi 89, l'austérité et l'extrême droite.
– que le lancement d'une telle campagne publique contre le vent de droite est la meilleure façon de mobiliser nos membres, d'activer nos structures régionales et locales et d'accroitre notre appui populaire.
– que cette proposition de lancer une campagne publique pour une riposte unitaire et populaire soit mise à l'ordre du jour et discutée lors du Conseil national du 5 et 6 avril prochain.
(Résolution adoptée comme ajout au Cahier de propositions du CN 5-6 avril 2025)
2. Résolution d'urgence en appui aux licenciés d'Amazon
Il est proposé que Québec solidaire :
Appuie énergiquement la campagne de boycottage publique et institutionnelle d'Amazon,
Appuie la revendication des travailleurs-euses licenciés exigeant un an d'indemnités de la part d'Amazon,
Exige le remboursement par Amazon de toutes les subventions accordées par le gouvernement,
Exige que, dans l'éventualité d'un jugement du tribunal administratif du travail contre Amazon, la compagnie délinquante soit interdite d'opérer sur le territoire québécois.
3. Résolution d'urgence en appui aux mobilisations contre le projet de loi 89 brimant le droit de grève
Il est proposé que Québec solidaire :
Continue de dénoncer sans arrêt le projet de loi 89 et toutes les formes de recul que tente d'imposer la CAQ au droit de grève et aux droits des travailleurs et travailleuses,
Appuie les mobilisations qui seraient lancer dans le cadre d'une campagne contre ce projet de loi profondément anti-démocratique et antisyndicale
À Khiam, la mémoire de l’occupation israélienne sous les bombes
L’impact de l’arrivée de Costco à Rimouski : enjeux et perspectives

Critique percutante de Donald Trump et Elon Musk

Critique percutante de Donald Trump et Elon Musk par le représentant du Connecticut John Larsen. Le 14 mars 2025. Traduction et sous-titres, Ovide Bastien.
Note : John Barry Larson (né le 22 juillet 1948) est un homme politique et homme d'affaires américain. Il est représentant des États-Unis pour le 1ᵉʳ district congressionnel du Connecticut depuis 1999. Ce district est centré sur la capitale de l'État, Hartford. Membre du Parti démocrate, Larson a présidé le caucus démocrate de la Chambre des représentants lors des 111ᵉ et 112ᵉ congrès des États-Unis.
Il y a 5 jours, le représentant John Larson (D-CT) a critiqué Elon Musk et a houspillé ses collègues républicains après que le témoignage de Musk a été bloqué avant une audition du Comité des voies et moyens de la Chambre des représentants le 12 mars 2025.
Auteur de cette note : Henry Zeris
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Quand la barbarie s’attaque à la liberté : L’incendie criminel de Radio Télévision Caraïbes

Dans la nuit du 12 au 13 mars 2025, un acte d'une brutalité révoltante a frappé Haïti en plein cœur. Radio Télévision Caraïbes (RTVC), l'un des plus grands bastions de la presse haïtienne, a été réduit en cendres par des criminels armés. Un crime de plus dans un pays plongé dans le chaos ? Non. Une attaque méthodique contre un symbole. Car toucher à la presse, c'est frapper au visage de la démocratie, c'est signifier à une nation que la vérité n'a plus sa place et que le silence doit régner.
Cet incendie n'est pas un simple fait divers ; c'est une déclaration de guerre contre la liberté d'informer. Il s'inscrit dans une longue série de tentatives visant à bâillonner la presse haïtienne, à instaurer un climat de terreur où les journalistes ne sont plus que des cibles à abattre. Que signifie encore l'État de droit si les médias, censés être son quatrième pouvoir, sont traqués et détruits sans que personne ne réponde de ces actes ?
Quand le silence devient complice
Face à cette attaque d'une violence inqualifiable, une question demeure : où est l'État ? Où sont les forces de l'ordre censées protéger les institutions essentielles au bon fonctionnement de la démocratie ? Depuis des années, Haïti s'enfonce dans une insécurité galopante, où les gangs imposent leur loi pendant que les autorités se contentent de discours creux et d'appels au calme.
L'inaction des pouvoirs publics face à l'escalade de la violence n'est plus une simple défaillance. Elle est devenue une forme de complicité passive. En laissant des bandes armées incendier des médias, assassiner des journalistes, kidnapper des citoyens et terroriser la population, l'État haïtien abdique. Il prouve qu'il n'a plus ni l'autorité ni la volonté de garantir la sécurité de ses propres institutions.
Ce drame dépasse largement les murs de Radio Télévision Caraïbes. Il pose une question fondamentale : peut-on encore parler d'un État haïtien, ou ne sommes-nous plus qu'un territoire livré à la loi des plus forts ?
RTVC : un symbole que l'on ne peut réduire en cendres
Depuis des décennies, Radio Télévision Caraïbes est bien plus qu'une station de radio et de télévision. Elle est un espace de débat, de vérité, de résistance. Elle a été le témoin des heures sombres du pays, des soubresauts politiques, des révoltes et des espoirs d'une nation qui refuse de sombrer.
Réduire ses locaux en cendres, c'est tenter de réduire au silence cette voix qui dérange, qui interroge, qui informe. Mais l'histoire nous l'a appris : les flammes ne suffisent pas à éteindre la vérité. Le feu qui a ravagé RTVC ne pourra jamais consumer l'engagement de ses journalistes, ni la mission qu'ils incarnent. Car un média n'est pas seulement un bâtiment, c'est une idée, un engagement, une lutte. Et tant qu'il y aura des Haïtiens prêts à défendre la liberté de la presse, RTVC renaîtra.
L'heure de l'engagement national
Aujourd'hui, plus que jamais, il est temps d'agir. La communauté nationale et internationale ne peut pas rester spectatrice de la descente aux enfers d'Haïti. Il est impératif que des mesures immédiates soient prises pour protéger les journalistes, pour garantir leur sécurité et pour assurer que des attaques comme celle contre RTVC ne restent pas impunies.
Les citoyens haïtiens doivent aussi prendre conscience de l'enjeu. Défendre la presse, ce n'est pas seulement défendre des journalistes. C'est défendre le droit de savoir, le droit de comprendre, le droit de choisir son avenir. Accepter la destruction d'un média aujourd'hui, c'est accepter qu'un jour, ce soit au tour de la société tout entière d'être bâillonnée.
La presse vivra, la vérité triomphera
L'incendie de Radio Télévision Caraïbes est une blessure profonde pour Haïti, mais elle ne doit pas être un coup fatal. Elle doit être un signal d'alarme, un cri de révolte, un appel à la mobilisation. Car un pays sans presse libre est un pays sans avenir.
Les criminels ont incendié RTVC, mais ils n'ont pas éteint l'esprit de résistance qui anime ceux qui, chaque jour, risquent leur vie pour informer. L'histoire l'a prouvé maintes fois : la vérité finit toujours par triompher. Reste à savoir si nous aurons, collectivement, le courage de la défendre avant qu'il ne soit trop tard.
Smith PRINVIL
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Femmes et filles en Haïti, entre lutte pour la dignité et protection des droits

En Haïti, la situation des femmes et des filles est devenue une urgence humanitaire, marquée par une violence croissante des gangs armés, une insécurité généralisée et une pauvreté de plus en plus aiguë. Elles sont souvent les principales victimes dans ce contexte de crise, subissant des violences physiques, sexuelles et psychologiques. La montée des kidnappings et des exactions perpétrées par des groupes armés aggrave encore leur vulnérabilité.
La question se pose alors : comment garantir leurs droits et leur dignité dans un environnement aussi difficile ?
Novia Augustin : « Les femmes haïtiennes, des héroïnes invisibles »
Dans une interview exclusive avec Marc Arthur Alexandre et Smith Prinvil, Novia Augustin, diplomate, avocate et militante engagée pour les droits des femmes, a livré un éclairage essentiel sur cette situation désastreuse, tout en formulant des recommandations concrètes.
La violence systémique contre les femmes et les filles
Pour Novia Augustin, Présidente de Refuge des Femmes d'Haïti (Ref-Haïti) également Présidente de la FEDOFEDH, la violence à l'égard des femmes haïtiennes n'est pas seulement une question de criminalité ordinaire, mais un phénomène systémique qui perdure malgré les appels à l'aide. Elle explique :
« Les femmes et les filles subissent une double oppression : celle des gangs et celle d'un système judiciaire qui reste défaillant. Les violences sexuelles, l'exploitation et les abus physiques sont monnaie courante. Beaucoup de femmes sont prises dans des situations d'esclavage moderne, utilisées comme monnaie d'échange dans les conflits entre gangs. »
Elle souligne que, malheureusement, ces violences restent largement impunies, car les victimes n'ont ni la possibilité ni la confiance de porter plainte, souvent par peur de représailles ou à cause du manque d'infrastructures adéquates pour les protéger.
La nécessité d'un changement radical
Lors de l'entretien, Novia Augustin a insisté sur la nécessité d'un changement radical dans la gestion de cette crise, à commencer par une réforme profonde du système judiciaire. Elle a exprimé son désaveu des mesures qui, selon elle, ne vont pas au cœur du problème :
« Il est impératif d'avoir une réponse collective, coordonnée et d'urgence. Les autorités doivent déployer un dispositif plus solide pour protéger les femmes et les filles. Il faut des lois sévères, des tribunaux spécialisés et des formations pour les forces de l'ordre sur les questions de genre et de violence. L'impunité doit cesser. »
Elle a également souligné la nécessité d'une coopération entre les ONG, la communauté internationale et les autorités haïtiennes pour aider les victimes à accéder à la justice et à des ressources de soutien.
Les femmes en première ligne de la résistance
Malgré la dureté de la situation, Novia Augustin a salué le courage et la détermination des femmes haïtiennes qui luttent quotidiennement pour survivre et garantir un avenir meilleur à leurs enfants. À l'occasion de la commémoration de la Journée Internationale des Droits de la Femme, elle a souligné leur rôle essentiel dans la résistance face à la violence :
« Les femmes haïtiennes sont des héroïnes invisibles. Elles sont au cœur de la résilience nationale. Malgré tout, elles continuent de se battre pour leurs familles, leurs communautés et pour leurs droits. Leur force est un moteur qui doit nous inspirer à agir pour leur sécurité et leur autonomie. »
Elle a également appelé à une plus grande reconnaissance de leur rôle dans la société haïtienne et a réaffirmé l'importance de leur donner plus de pouvoir et de ressources pour qu'elles puissent jouer un rôle plus visible dans le processus de reconstruction du pays.
Des recommandations concrètes
Novia Augustin a formulé plusieurs recommandations pour améliorer la situation des femmes en Haïti :
1. Renforcer les mécanismes de protection des femmes : Mise en place de refuges sécurisés et de lignes d'urgence accessibles.
2. Accroître les programmes de sensibilisation sur la violence basée sur le genre et former les forces de l'ordre à la gestion de ces cas.
3. Promouvoir l'autonomisation économique des femmes : Créer des programmes d'accès au financement et à la formation professionnelle pour les femmes.
Conclusion : Une lutte qui doit se traduire en actions concrètes
Pour Novia Augustin, la situation des femmes haïtiennes n'est pas une fatalité. La clé réside dans un engagement collectif fort, tant au niveau national qu'international, pour mettre fin aux violences, garantir l'accès à la justice et offrir un avenir digne à ces femmes et filles qui, chaque jour, luttent pour leur survie et leur dignité.
Elle conclut sur un appel à l'action :
« Les femmes haïtiennes ne demandent pas la charité, elles demandent leur droit à vivre en paix et à réaliser leur potentiel. Il est temps de les soutenir dans cette lutte pour la justice et la dignité. »
En cette Journée Internationale des Droits de la Femme, Novia Augustin a su transmettre un message puissant : les femmes haïtiennes, malgré les obstacles immenses, sont des forces vives essentielles à la société haïtienne. Son appel à l'action, à la solidarité et à la justice résonne comme un impératif pour garantir un avenir où chaque femme, en Haïti et ailleurs, peut vivre dans la dignité, la sécurité et l'égalité des droits. La détermination des femmes haïtiennes, saluée par Mme Augustin, est plus que jamais un moteur de changement pour le pays et pour le monde
La militante des droits humains a également rendu hommage aux femmes de la diaspora haïtienne, qui jouent un rôle crucial dans la promotion des droits des femmes et dans la solidarité internationale. Elle a souligné l'importance d'une action collective à l'échelle mondiale pour soutenir les droits des femmes, en particulier dans les pays en développement comme Haïti, où les inégalités de genre sont exacerbées par la crise politique et sociale.
Smith PRINVIL
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Comptes rendus de lecture du mardi 18 mars 2025


Tenir tête aux géants du web
Alain Sauliner
J'avais lu « Les barbares numériques » du même auteur, que j'avais beaucoup aimé, il y a quelques années. « Tenir tête aux géants du web » nous offre aujourd'hui une précieuse mise à jour sur la mainmise grandissante des géants du web (GAFAM et nouveaux venus) sur nos institutions, nos systèmes sociaux, nos communications, nos données personnelles et nos vies. C'est une œuvre fouillée qu'il vaut franchement la peine de lire, surtout pour les plus jeunes, les 14 à 35 ans. J'ai particulièrement aimé les sections sur l'impact environnemental de ces médias sociaux et des nouvelles technologies qui y sont liées, surtout avec l'émergence de l'intelligence artificielle, sur leurs impacts sur nos cultures minoritaires, en particulier sur le plan linguistique, et sur la propagation des valeurs d'extrême droite, de la haine, de la désinformation et de la mésinformation auxquelles elles ont ouvert les vannes.
Extrait :
L'actuel débat public sur l'immigration au Québec m'horripile. On accuse les migrants de tous les maux alors que ce qui influence le plus le coeur de notre identité culturelle, ce sont les géants américains du web, les géants de l'écoute en continu, Amazon, Apple, Netflix, Disney+, YouTube et d'autres encore, comme les entreprises de la télévision connectée.

Manuel d'autodéfense intellectuelle
Oeuvre collective
Le Monde diplomatique publiait en septembre dernier son fameux « Manuel d'autodéfense intellectuelle », un petit ouvrage consacré à l'histoire et aux méthodes d'autodéfense dont je vous recommande vivement la lecture. Des historiens et chercheurs en science sociale y déconstruisent d'abord une foule d'idée reçues : Churchill, soldat de la liberté ; la gauche adore les islamistes, le peuple a élu Hitler ; l'Occident défend les droits humains ; l'antisionisme équivaut à l'antisémitisme ; faire l'Europe, c'est faire la paix ; l'extrême droite, rempart contre le terrorisme ; etc. Puis, ils nous fournissent une boîte à outils pour nous aider à porter un regard critique sur le passé et à interpréter les événements en cours.
Extrait :
L'effort de guerre contre les nazis assèche l'économie de l'Empire britannique, qui, pour compenser, absorbe toutes les ressources agricoles du sous-continent indien. La disette emporte des millions de personnes. À Londres, le premier ministre reste indifférent à leur sort.

Aux quatre chemins
Yvan Lamonde
J'ai le sentiment qu'on est toujours passé un peu vite, dans nos cours et manuels d'histoire, sur cette période importante et révélatrice de notre histoire nationale que constituent les événements de 1837 et 1838. Yvan Lamonde nous en dresse ici un tableau éclairant à travers de quatre figures marquantes de l'époque : Louis-Joseph Papineau, Étienne Parent, Louis-Hyppolite La Fontaine et Cyrille-Hector-Octave Côté. D'un côté, celui de Papineau et Côté, en rupture avec le régime colonial britannique, qui ne visait à moyen ou long terme que notre assimilation ; de l'autre, Parent, puis La Fontaine, passant de compromis en compromis, jusqu'à la compromission. J'en ai appris beaucoup, je dois l'admettre, sur Parent et La Fontaine, personnages controversés qui occupent une grande place dans ce livre.
Extrait :
Le deuxième projet d'Union, concocté dans le secret par des marchands de Montréal en 1822, déclenche une prise de conscience irréversible chez Papineau, au Parti canadien et chez des Canadiens même, comme on nomme encore à l'époque les descendants des colons de la Nouvelle-France. Avec ce projet, il ne s'agit plus d'angliciser, de protestantiser les francophones catholiques ; la visée est plus radicale : unir le Haut et le Bas-Canada de façon à ce que le plus rapidement possible les Britanniques de la colonie prennent le contrôle de la Chambre d'assemblée, y deviennent majoritaires. Outre le pouvoir impérial du Colonial Office et le droit de véto du gouverneur, les Britanniques ont alors aussi recours au blocage par le Conseil législatif nommé par le gouverneur, Conseil qui doit entériner les lois votées par les députés élus, mais qui, précisément, refuse de les approuver. Une mobilisation civique délègue John Neilson et Papineau à Londres pour aller dénoncer le caractère non démocratique de ce projet d'Union méconnu du Parlement britannique.
L'automne du Patriarche
Gabriel García Márquez
Traduit de l'espagnol
Ce roman nous raconte la vie d'un dictateur sans âge dans un quelconque pays d'Amérique latine. On y retrouve le rythme entraînant de García Márquez, tout en virgules, dans une critique burlesque et impitoyable d'une dictature fictive, mais inspirée de la fuite du dictateur vénézuélien Marcos Pérez Jiménez en République dominicaine, puis aux États-Unis. Une satire éclairante !
Extrait :
Il vit le brasier allumé sur la Place d'Armes pour brûler les portraits officiels et les lithos de calendrier qu'on trouvait partout et à toute heure depuis le début de son régime, et il vit passer son propre corps qu'on tirait et qui laissait sur le pavé une traînée de décorations et d'épaulettes, de boutons de dolman, d'effilochures de brocard, une passementerie d'agrafes, de glands de sabre, de jeux de cartes, et les dix soleils tristes de roi de l'univers, maman, regarde dans quel état ils m'ont mis, disait-il, en sentant sur sa propre chair l'ignominie des crachats et des pots de chambre de malades qu'on lui vidait dessus au passage du haut des balcons, horrifié à l'idée qu'il pourrait être dépecé et digéré par les chiens et les charognards au milieu des hurlements délirants et du tonnerre de la pyrotechnie pour ce carnaval de ma mort.
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Gaza, entre resilience et nouvelles invasions des colons !

Le mouvement de l'extrême Droite israélienne, mené par Daniella Weiss, 79 ans, passe à l'offensive pour la construction d'autres colonies dans la Bande de Gaza. Cela se matérialise à l'heure où la trêve du cessez le feu est violée. A Paris, c'est Olivia Zémor d'EuroPalestine qui a appelé à la mobilisation, ce samedi 15 mars 2024.
De Paris, Omar HADDADOU
Dans un Monde nappé de domination bestiale, constellé de compromissions, de curée inextinguible putride vers le minerai et l'espace territoriale, des voix s'étranglent pour dénoncer le crime contre l'Humanité, la violation du Droit international, la spoliation de la ressource par des Puissances nourries de Capitalisme sauvage et d' injustices annexionnistes.

Avant d'en venir à la quintessence de la manifestation parisienne en soutien à la Résistance de Gaza, menée, sans éloge aucun, avec bio, par ce bout de femme, ô combien intrépide et laborieuse, qu'est la Présidente de France Palestine, Olivia Zémor, il y a lieu de donner du relief a cette déclaration scandaleuse de la cheffe du Mouvement Nachala, Daniella Weiss qui œuvre, selon une source française, avec détermination pour « la Recolonisation de la Bande de Gaza ». A la tête de ce courant de réoccupation, elle est, d'après l'organe public français, aux commandes de l'essentiel des manifestations de l'extrême Droite messianique et sioniste, coordonnées ces derniers temps à la frontière de la bande de Gaza.
Tel un Empereur à la fibre expansionniste en quête de territoires abondants vulnérables, elle se gonfle d'orgueil de faire main basse sur la terre des Gazaouis (es) : « Si je passe un coup de fil, il y aura 7 colonies ce soir ! »,
La carte des territoires occupés déployés sur la table de la salle à manger, elle colorie les terres et Kibboutz colonisés récemment et celles à conquérir dans les prochains jours. Des plans ficelés, en guise de pied de nez à la Communauté internationale et au Palais de Paix de la Cour Internationale de Justice (CIJ).
Pour Daniela Weiss, l'attaque du 7 octobre a été l'élément déclencheur pour passer à l'acte :
« Vous voyez les points rouges ? Ce sont 21 colonies. Gaza sera un territoire juif d'ici une génération. Depuis le 7 octobre, nous avons le devoir de jeter les Arabes en dehors de Gaza ! Les Arabes dehors, les Juifs à l'intérieur ! C'est à quoi je travaille ! Nous sommes prêts à partir maintenant. Avec 500 familles, c'est plus de 2000 personnes ! ».
Dans cette dynamique de violence barbare, approuvée par Trump et le tristement désillusionné Macron et son fantasme de l'Europe de la Défense (Un gouffre financier sur le dos du contribuable), une question reste en suspens : Que fera Netanyahou, une fois tous (es) les otages récupérés ?

A l'heure où nous couchons ces lignes, Tsahal affirme avoir mené plusieurs frappes sur les combattants dans la bande de Gaza.
A Paris, la mobilisation de ce samedi, Place du Châtelet, c'est Olivia Zémor, Présidente de Euro Palestine (arrivée la première sur les lieux ) qui était à la manœuvre pour donner du souffle au rassemblement. Teinté au vitriol, son discours s'attaque d'emblée aux responsables de la tragédie à Gaza dont le bilan des victimes frôle les 46 000 : « Pas une vie ! Pas un euro pour leur guerre ! Israël casse- toi ! La Palestine n'est pas à toi ! » lance-t-elle à la foule, persécutée par un froid polaire. Et de reprendre : « A vos interdictions, nous disons : Mobilisation ! Libérez les 10 000 otages palestiniens ! Nous sommes tous des soignants (es) de Gaza ! De sales guerres, on n'en veut pas ! »

Des intervenants (es) se sont relayés pour lever le voile sur le génocide - photos à l'appui – perpétré contre le peuple palestinien, les arrestations arbitraires, la torture, les sévices infligés et la violation des lieux du culte pendant le ramadhan.
Puis la voix d'Olivia d'entonner : « De Paris à Gaza, le fascisme ne passera pas ! Ghetto de Gaza, ghetto de Varsovie, plus jamais ça ! Et vive la Résistance ! du Peuple palestinien ! ».
Comment espérer la Paix quand des chefs d'Etat tels Macron et Trump, se disputent la suprématie, ne jurant présentement que pour la hausse du budget militaire. Couver un conflit, n'est autre que faire tourner une économie de guerre et gagner en influence stratégique.
En France, la Gauche accuse le Premier ministre de trahison suite à son refus de ratifier l'âge de départ à la retraite à 62 ans.
Le Président français s'est accointé avec Van der Leyen pour casser la tirelire du Peuple et débourser 800 milliards d'euros pour réarmer l'Europe !

Poutine aura bien allumé les Européens, au propre et au figuré !
O.H
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Les menaces de Trump, les défis du Canada

L'ancien Premier ministre canadien Pierre Trudeau a dit un jour que la relation entre le Canada et les États-Unis ressemblait à une souris qui dormait avec un éléphant : « "Peu importe à quel point la bête est amicale et d'humeur égale, si je peux l'appeler ainsi, on est affecté par chaque tressaillement et chaque grognement. » - Citation de Jonathan Malloy, Inside Story , 13 juillet, 2018.
21 février 2025 / tiré de Socialist Project
https://socialistproject.ca/2025/02/trumps-threats-canadian-challenges/
Le président américain Donald Trump a sonné la charge : le Canada devrait être le 51e État, peut-être pourrait-il l'annexer légalement, le tenir certainement responsable de ses échecs en tant que garde-frontières, pour permettre aux personnes indésirables de se précipiter aux États-Unis et de permettre aux nantis de fournir un important marché de la consommation aux États-Unis. Plus encore, Trump a "Trump a affirmé que les dépenses du Canada pour son armée forcent les États-Unis, en tant que défenseur de tout ce qui est bon et sacré, à supporter un fardeau injuste.
Cela a poussé toutes sortes de Canadien-nes à se concentrer sur certaines vérités. Pas de nouvelles vérités, bien sûr. Les Canadien-nes sont conscients du fait qu'économiquement, ils ont toujours été étroitement intégrés aux marchés américains, une réalité qui s'est encore renforcée après la conclusion de l'ALENA (Accord de libre-échange nord-américain), accords contre lesquels les nationalistes se sont battus bec et ongles, une opposition qui s'était estompée en 2020, lorsque la renégociation de ces accords commerciaux a conduit à leur remplacement par l'ACEUM (Accord Canada-États-Unis-Mexique). Les Canadien-s ont toujours compris qu'ils sont le partenaire junior dans bon nombre de ces relations et que, trop souvent, le terme « partenaire » embellit la réalité. Ils sont conscients du fait que cet enchevêtrement économique et cette subordination rendent très difficile pour le Canada d'agir en tant que pays politiquement souverain.
Les Inquiétudes du Canada
Ces inquiétudes toujours présentes ont été ravivées par Trump. Les Canadien-nes fiers veulent éviter une érosion accrue de leur indépendance. Ils cherchent des compromis, un adoucissement face à l'assaut brutal des États-Unis. Beaucoup soulignent l'absence de preuves à l'appui des affirmations de Trump selon lesquelles les soi-disant échecs du Canada ont un impact négatif significatif sur les États-Unis (comme le fait de signaler que la quantité de fentanyl provenant du Canada est infime par rapport au volume de drogue de contrebande). D'autres le critiquent pour sa croyance erronée selon laquelle l'imposition de tarifs douaniers a un sens économique et soulignent que cela nuira finalement aux États-Unis eux-mêmes. D'autres encore rappellent aux États-Unis à quel point les Canadien-nes ont été de bons amis et alliés tout au long de l'histoire et que d'autres pays moins fiables, comme le Mexique, devraient être la cible des tarifs (comme l'a soutenu le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford). Et nombreux sont ceux qui appellent à des représailles calculées et débattent de la meilleure façon de répondre, que ce soit par des contre-tarifs ou par des interdictions d'exportation.
Cette prise de conscience renouvelée du fait que le territoire que nous appelons le Canada n'a jamais résolu tous les obstacles à son émancipation économique et politique, et qu'il ne peut se permettre de sombrer davantage dans un statut de vassal, est à saluer. Même si c'est l'affirmation arrogante par Trump de la puissance américaine, plutôt qu'une introspection spontanée, qui a rappelé aux Canadien-nes l'inachèvement de leur projet d'établir un pays véritablement indépendant et souverain, elle remet à l'ordre du jour une lutte endormie. Cette lutte vise à rejeter la logique des rapports de production capitalistes, l'accent mis sur le caractère sacro-saint de la propriété privée, la liberté des contrats individuels et l'idéologie qui les accompagne, celle de l'anti-collectivisme. C'est un combat pour délégitimer le mantra selon lequel nos relations sociales devraient privilégier l'intérêt personnel individuel comme moteur du bien-être. Beaucoup d'entre nous défendent ces idées alternatives depuis longtemps, mais leurs efforts pour les concrétiser sur le territoire que nous appelons le Canada ont été atténués, marginalisés, justement parce que nous avons été si profondément intégrés à l'économie et aux compréhensions politiques des États-Unis.
Se Détacher des États-Unis ?
Les Canadien-nes doivent oser envisager de prendre leurs distances – économiquement, politiquement et socialement. Ils doivent commencer à découpler leur économie de celle des États-Unis. Ce n'est pas une mince affaire. Pour amorcer ce processus, ils doivent se convaincre mutuellement que l'idée politique selon laquelle le capitalisme est la seule voie pour assurer le bien-être du plus grand nombre est non seulement fausse, mais aussi dangereuse, car elle est la principale raison pour laquelle les peuples du monde sont confrontés à une crise écologique d'une ampleur existentielle. En bref, nous devons être prêts à nous considérer comme des abolitionnistes du capitalisme et des promoteurs du socialisme. Nous devons commencer par réimaginer notre système politique comme une entité distincte, nécessitant que ses principaux fondateurs – les peuples autochtones, les Québécois et les Anglo-Canadiens – parviennent à un consensus fondé sur une politique visant le bien commun de tous, tout en respectant l'autonomie relative de chaque groupe dans sa propre quête de ce bien commun.
Aussi impossible que cela puisse paraître, avec Trump ayant incité les gens à agir, le moment doit être saisi. Si ce n'est pas le cas, il est certain que Trump et ses successeurs obtiendront ce qu'ils veulent : plus de nos ressources, plus de notre complicité dans les projets impérialistes, les guerres et le pillage des États-Unis, une plus grande adhésion à un système de relations sociales fondé sur l'inégalité croissante, la satisfaction de la cupidité et la destruction de l'environnement. Mais nous devons être honnêtes avec nous-mêmes. Il existe de puissantes raisons pour lesquelles nombre d'entre nous pourraient ne pas vouloir saisir cette mince opportunité que cette crise provoquée par Trump nous offre. Le chemin vers une société meilleure est semé d'embûches.
Inévitablement, l'appel général à la résistance, aux représailles, à tenir tête au voisin oppresseur, s'inscrit dans le cadre séduisant du nationalisme et de la fierté patriotique. Les partis politiques traditionnels en profitent déjà : ils se positionnent comme les véritables leaders de la lutte nationaliste et patriotique. Cette posture sera renforcée alors que, par coïncidence, deux élections majeures approchent, durant lesquelles on peut s'attendre à ce que chacun de ces partis mette en avant sa fermeté dans l'obtention de concessions de la part de Trump, l'ennemi juré de tout ce qui fait du Canada un pays enviable. De nombreux Canadiens, révoltés par les États-Unis, s'allieront à l'un de ces partis dans l'espoir qu'ils tiennent certaines de leurs promesses. Ce qui risque de disparaître rapidement de la vue, c'est le fait que tous ces partis et leurs alliés dans les médias et les cercles d'opinion, et surtout la classe capitaliste canadienne elle-même, ont été et semblent toujours désireux d'être intégrés à l'économie américaine. En effet, nombre des déclarations de ces faiseurs d'opinion vantent les avantages d'un bloc économique commun, dans lequel les tarifs douaniers ne jouent qu'un rôle insignifiant.
De plus, tous ont accepté les notions fondamentales de la primauté de la propriété privée (demandez aux peuples autochtones) et d'une société basée sur l'individualisme (demandez aux syndicats les difficultés à promouvoir la collectivisation ou aux ONG les attaques toujours plus intenses contre le salaire social). En bref, lorsque ces partis traditionnels – et leurs partisans dans les médias traditionnels, les cercles intellectuels et les grandes entreprises – exigent que les Canadien-nes se tournent vers eux pour servir d'avant-garde à un mouvement de résistance, ils ne sont pas susceptibles de remettre en question la logique de la pensée et de l'action impérialistes américaines. Au mieux, ils se concentreront sur le retour des États-Unis à une position moins agressive, moins punitive dans leurs relations avec leurs partenaires subordonnés. Malheureusement, leur posture de nationalistes féroces peut rallier le soutien de nombreux Canadien-nes qui, pour le moment, sont suffisamment en colère pour envisager des réponses plus radicales. Les puissances en place, celles qui nous ont poussés à occuper la position de dépendance que nous occupons dans le bloc économique américain, sont susceptibles d'étouffer tout mouvement en faveur de changements plus radicaux. Elles sont susceptibles de guider les revendications transformatrices de la classe ouvrière vers des ports plus sûrs en obtenant quelques concessions, quelques compromis, ou du moins, en se battant dur pour les obtenir et, ce faisant, en consolidant la légitimité d'un système de relations sociales qui permet à une classe de dominer une autre. Nous devons être conscients de ce danger et en atténuer l'impact en disant la vérité.
Nous devons clairement indiquer que les partis traditionnels et leurs alliés nous demandent de croire en quelque chose qui n'est pas vrai. Implicite dans l'idée que nous sommes tous sur la même longueur d'onde lorsqu'il s'agit de considérer le pays que nous appelons le Canada comme une entité souveraine est la notion erronée que notre pays est un lieu où prévaut une sorte de cohésion sociale et politique. La classe sociale et notre histoire fondatrice disparaissent de notre champ de vision. Ces défenseurs du statu quo affirment que, bien que des différences existent entre individus et groupes, il existe un ensemble solide de liens, sociaux/culturels/historiques et économiques/politiques, qui nous unissent et soutiennent, de manière globale, une uniformité d'objectifs et d'aspirations. C'est pourquoi ces forces politiques prétendent qu'elles défendent – et se battent pour – une forme concrète de nationalisme existant que l'on peut qualifier de distinct. Cela est manifestement faux.
Trois peuples distincts
Tous les Canadien-nes savent qu'il existe au moins trois peuples bien distincts occupant le territoire que nous appelons le Canada : les peuples autochtones, les Québécois-es et les Anglo-Canadiens. Au sein de chacun de ces groupes, on observe d'autres différences, mais, dans l'ensemble, il s'agit de groupes clairement distincts ayant des histoires et des cultures différentes. Ils occupent des positions distinctes et inégales en termes d'influence politique et économique au sein de l'ensemble de la nation. Ces groupes vivent avec des tensions non résolues découlant de leurs passés et de leurs réalités présentes. Il est illusoire de parler d'une identité canadienne unique ou d'un projet national canadien distinct dans l'état actuel des choses. Ceux qui prétendent défendre le nationalisme canadien en ignorant cet ensemble fondamental de tensions nationales non résolues risquent d'adopter une position par défaut. Ils auront tendance à argumenter et à rechercher des résultats qui correspondent à ce qu'ils perçoivent comme étant dans l'intérêt du Canada. Cet intérêt sera défini en référence à la répartition actuelle du pouvoir économique, politique et idéologique, une situation qui a maintenu les peuples autochtones et les Québécois avec beaucoup moins d'autonomie, beaucoup moins de contrôle sur les manières particulières dont ils souhaiteraient vivre et, bien sûr, la classe ouvrière sous la domination du capital.
Cela indique qu'un des éléments constitutifs d'un mouvement cherchant à exploiter l'intimidation inspirée par le phénomène MAGA pour formuler des revendications transformatrices pourrait bien être la reconnaissance d'un État fédéral où les groupes fondateurs jusqu'ici marginalisés obtiendraient beaucoup plus d'autonomie sur leurs propres affaires. La lutte contre l'impérialisme américain pourrait devoir inclure des efforts pour corriger les injustices historiques. Dans le langage de certains défenseurs lors des débats de Charlottetown [1992], le Canada deviendrait une entité beaucoup plus démocratique s'il adoptait une constitution asymétrique à trois nations. Les difficultés liées à l'ouverture de cette boîte de Pandore sont évidentes. Mais les bénéfices pourraient en valoir la peine. Une telle lutte permettrait de remettre en question la position dominante actuelle, largement soutenue par le capital anglo-canadien, selon laquelle le credo du marché concurrentiel et dérégulé fait partie intégrante du pays que nous appelons le Canada.
D'un point de vue culturel, le Québec a montré à certaines occasions une préférence pour un modèle de gouvernance valorisant la cohésion des communautés autour de valeurs communes héritées du passé. Les peuples autochtones, bien que désormais beaucoup plus fragmentés qu'autrefois, ont historiquement privilégié une prise de décision fondée sur un consensus collectif. Ces deux approches de départ, bien qu'elles ne soient pas dominantes, rejettent le modèle préféré des États-Unis, profondément ancré dans la pensée et les actions de la classe dirigeante et des élites politiques et idéologiques du Canada. Ces deux approches remettent en question la subordination de la classe ouvrière. Le renforcement d'idées et d'idéaux contrastés, par des composantes nouvellement légitimées de l'entité nationale, offrirait une base non seulement pour résister, mais aussi pour rejeter la poursuite du modèle américain des relations capitalistes de production. Il serait alors plus facile d'accomplir ce qui doit être fait, à savoir échapper à l'enchevêtrement économique – et donc politique et idéologique – tissé par l'araignée en chef, Trump, ainsi que par ses prédécesseurs et successeurs.
Cette échappatoire ne sera pas facile. Elle exige de repenser la manière dont nous allons assurer le bien-être collectif et aborder des problèmes qui ne peuvent être contenus par des frontières, tels que les atteintes à l'environnement, la mobilité financière et les capacités de l'intelligence artificielle. Bien qu'il n'existe pas de solutions évidentes, il est impératif d'essayer.
Réinventer un Nouveau Canada
Nous devons nous battre avec ardeur pour renforcer et enrichir l'économie du soin. Nous devons protéger nos ressources des capitalistes étrangers et nationaux afin de bâtir notre propre infrastructure respectueuse de l'environnement, pour offrir un abri à tous ceux et celles qui en ont besoin. Nous devrons conquérir le contrôle des grandes industries. Nous devons accepter que les peuples autochtones aient le dernier mot quant à l'utilisation des ressources de leurs terres ancestrales ; une simple consultation ne suffit pas. Nous devons restituer à la sphère publique ce qui lui a été volé par la déréglementation, la privatisation et les modèles de partenariats public-privé. Nous devrons nous battre pour que les travailleurs et travailleuses contrôlent les immenses fonds auxquels ils contribuent pour assurer leur propre sécurité, mais qui sont actuellement gérés par des institutions financières et des employeurs qui les utilisent pour servir leurs intérêts capitalistes, bien trop souvent au détriment des travailleurs.
Cette liste incomplète est déjà intimidante, et bien d'autres enjeux restent à traiter. Tout aussi complexe est la question de savoir comment rassembler une masse critique d'alliés et comment élaborer des stratégies pour engager l'action face à ces immenses défis. C'est difficile, certes, mais ce qui est clair, c'est que l'angoisse suscitée par Trump, cette impression que nous n'avons plus aucun contrôle sur rien, nous offre un moment où le grand public pourrait être convaincu qu'un mouvement pour un changement radical a du sens. Nous devons tenter de saisir cette opportunité. Je ne dispose d'aucune épée pour trancher le nœud gordien des idées et pratiques dominantes, soutenues par la classe capitaliste canadienne et ses partisans, mais j'ai le sentiment que si nous nous contentons de suivre les partisans du compromis et de l'apaisement, nous nous retrouverons dans une situation encore pire, en tant que société et en tant que peuples.
Nous devons réimaginer un Canada capable de produire des biens et des services répondant aux besoins de la population. Nous devons rejeter la maximisation du profit comme moteur de production. Nous devons saisir cette opportunité, aussi mince soit-elle, non seulement pour atténuer les souffrances que Trump nous promet, mais aussi pour démontrer qu'il s'appuie sur un système qui a sapé notre contrôle sur nos vies, notre aspiration à la démocratie et au respect de tous, notre désir de trouver un sens à notre existence en servant l'ensemble de la société plutôt que nos seuls intérêts individuels. Il est rare que les socialistes soient confrontés à une situation où les capitalistes révèlent avec une brutalité aussi flagrante leur indifférence envers les êtres humains. Le mépris grossier de Trump pour les subtilités du débat nous donne l'occasion de dire : « Assez. Essayons quelque chose de nouveau, quelque chose d'humain. »
Harry Glasbeek est professeur émérite et chercheur principal à la faculté de droit Osgoode Hall de l'Université York. Ses derniers livres sont Class Privilege : How law shelters shareholders and coddles capitalism (2017), the follow-up,Capitalism : a crime story(2018), and Law at Work : The Coercion and Co-option of the Working Class(2024), publié par Between the Lines, Toronto.
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Une société pro-climat du soin et du lien est la société qui se libère du chantage commercial et annexionniste de Trump

Comme on l'a constaté dans mon dernier article, l'imbrication commerciale du Canada et du Québec dans l'économie étatsunienne est profonde suite à une trentaine d'années de « libre-échange », avec comme héritage le capitalisme néolibéral. Soudainement Trump le jette aux orties pour une tentative de néofascisation des ÉU et du monde. En résulte un brusque retour au vieil impérialisme annexionniste d'antan maintenant que les ÉU n'ont plus les moyens d'être le gendarme du monde. De leur bastion nord-américain, les ÉU cherchent à bâtir l'improbable alliance néofasciste avec la Russie sur le dos de l'Europe larguée, en commençant par l'Ukraine, pour isoler la Chine.
La porte est ainsi ouverte à une guerre tarifaire qui peut aboutir à une capitulation annexionniste du Canada si elle est menée jusqu'au bout et rapidement. Quant à la superficielle résistance patriotique canadienne, elle a ses limites surtout au Québec mais aussi face au fort régionalisme de l'Ouest. C'est davantage le coût économique pour certains affairistes étatsuniens, et aussi pour le peuple des ÉU au prorata de sa mobilisation, qui peut freiner Trump. Mais mieux aguerri et préparé qu'en 2016 et faisant face à moins de résistance institutionnelle et populaire qu'alors, Trump semble vouloir ignorer pour l'instant le signal de la dégringolade des indices boursiers. À voir la suite des choses. Quant au Québec et au Canada, à eux de se libérer de l'emprise du Moloch par une société du soin et du lien.
De l'assurance-chômage au sirop d'érable en passant par le pétrole et l'électricité
La première ligne de défense populaire, à court terme, réside dans un programme d'assurance-chômage, dit assurance-emploi, bonifié comme l'avait promis le gouvernement Trudeau dès son premier mandat, promesse jamais tenue. Rappelons que « [l]es organisations syndicales ont déjà souligné que seulement 40 % des chômeurs se qualifient pour toucher des prestations. » Ce n'est pas le BS qui va faire vivre son homme et encore moins sa femme. De leur côté, les entreprises frappées, surtout manufacturières, — presque toutes le sont ou le seront directement ou indirectement ne serait-ce que vis-à-vis un marché atrophié — ont beau chercher éperdument une nouvelle clientèle, le monde entier sera en stagnation ou récession ou tout au moins en recul. Tous les pays par leur commerce, investissements et placements sont liés comme jamais par le marché mondial. En ce qui concerne les entreprises québécoises s'ajoute l'obstacle de la grande distance même par rapport aux autres provinces nonobstant le renforcement de la déréglementation de la mobilité des produits, des services et de la main-d'œuvre entre provinces. La proximité de l'Ontario (et l'importance relative de sa population) génère 60% du commerce interprovincial du Québec par rapport à seulement 10% pour la Colombie britannique.
Les importations québécoises venant des ÉU sont lourdement lestées par le secteur du transport routier, soit une part de plus de 40 % en voitures, camions, pneus, produits pétroliers, à peine contrebalancée par l'exportation d'un peu de camions et sans compter l'importation de pétrole et gaz albertains. Parmi le reste desimportations il faut compter une gamme de produits alimentaires, dont des fruits et légumes hors saison, et de la machinerie (toutes les statistiques de cet article proviennent de la publication Le commerce extérieur du Québec, Le calepin, Édition hiver 2025). Par contre, les exportations du Québec vers les ÉU sont plus diversifiées bien que l'électricité, brute ou sous forme d'aluminium brut compte pour environ 12 %, et seront plus importantes dans l'avenir avec la mise en marche des contrats fermes d'exportation d'électricité brute vers New-York et la NouvelleAngleterre. Le secteur de l'avionnerie contribue également à hauteur de 12 % mais est contrebalancé de moitié par des importations du même secteur. Pour les reste, le Québec exporte beaucoup de ressources naturelles semi-transformées ou transformées en produits de basse technologie tirées de la forêt (bois de construction, papier, pâte). de son sous-sol (cuivre, or) et de son sol (soja, porc… sirop d'érable).
L'éléphant dans la pièce, grand oublié médiatique, l'immense fuite de capitaux
À noter que si le Québec exporte hors Québec l'équivalent de 47 % de son PIB dont un peu plus de 20 % aux ÉU, l'apport de ces exportations à l'économie ne compte que pour 30 % étant donné l'importation de composantes. C'est vrai en particulier pour l'avionnerie mais aussi pour l'aluminium (bauxite). C'est donc dire que l'apport économique des ressources naturelles plus ou moins transformées est relativement plus important qu'il n'y paraît. Si les grands médias se concentrent sur le commerce avec les ÉU, il ne faut pourtant pas oublier le bilan (le stock cumulé à distinguer des flux annuels) des investissements internationaux disponible seulement pour le Canada :

Alors que ce bilan net (actif moins passif) était négatif en 2015, il est devenu très positif depuis lors s'élevant à rien de moins que 1640 milliards $ à la fin de 2024 soit l'équivalent de près de 2.5 ans de formation de capital brut du Canada. On ne peut que constater une gigantesque fuite des capitaux canadiens vers les ÉU. Comme quoi le Canada re(devient) scieur de bois et porteur d'eau. Toutefois le Québec l'était (et le reste sans doute) moins que le Reste du Canada contrairement aux préjugés populaires comme François Moreau l'avait démontré dans son livre « Le commerce extérieur du Québec » en 1988. Cette réalité amène Trump à utiliser les tarifs pour récupérer ce qui reste de manufacture sophistiquée (véhicules, avions). Mais pourquoi diable l'acier et l'aluminium ce qui punit peut-être davantage les entreprises des ÉU et leurs travailleurs… à moins que le but non avoué ne soit que Canada devienne, en entier ou en morceaux, le 51e état.
Sur la base de cet état des lieux que faire pour combattre l'assaut annexionniste « économique » de la fascisante présidence étatsunienne dans l'optique de l'urgente édification d'une société pro-climat du soin et du lien sur la base d'une solidaire décroissance matérielle tel que développée dans mon dernier article ? La première grande tâche est certainement d'arrêter net et de rapatrier cette saignée monstrueuse de capitaux au service de l'impérialisme étatsunien dont le trumpisme révèle les vrais couleurs particulièrement en Palestine et en Ukraine.
Faut-il ajouter que cette tâche cruciale exigera non seulement la mise au pas du secteur financier mais aussi le contrôle des flux de capitaux internationaux ce qui aussi signifie interprovinciaux dans le cadre du « Nouveau Québec » Solidaire. Ce « Nouveau Québec » pourrait alors non seulement obtenir l'appui du peuple du Canada anglais mais aussi l'entraîner derrière lui. Le peuple-travailleur ne s'en tirera pas sans la socialisation, c'est-à-dire la nationalisation – démocratisation, des banques et autres institutions financières de sorte à recycler l'épargne nationale, fruit du labeur populaire mais usurpée par le grand capital, vers la construction de cette société du lien et du soin.
La clef de voûte anti-Trump du commerce avec les ÉU est de bannir l'auto-solo
La dépendance commerciale envers les ÉU commande comme tâche clef de voûte dans ce domaine de bannir la combinaison auto(VUS)-solo et hydrocarbones en supprimant chacun des deux termes. Ce rejet anti-Trump a pour vertu supplémentaire de couper court au nouvel extractivisme du capitalisme vert dont l'auto-solo électrique est un pillier. On aboutit inéluctablement à un système de transport en commun électrifié prenant possession du réseau routier. En résulte de se dispenser de coûteux métros et trains aériens exigeant maints éléments importés. Ce transport public se combine avec le transport actif dans le cadre de la proximité des fonctions urbaines parsemées d'espaces verts. Faut-il rappeler que le Québec dispose d'usines pouvant fabriquer des moyens de transport en commun potentiellement de qualité supérieur à ceux fabriqués en Inde pour le REM.
L'électricité requise pour le transport aux dépens des hydrocarbures ne justifie nullement une orgie de nouvelles centrales hydrauliques et de nouveaux champs d'éoliennes dont plusieurs composantes doivent être importées. L'alternative est le recyclage de l'électricité des bâtiments rénovés ou construits éco-énergiquement avec panneaux solaires d'appoint pour une consommation énergique (quasi)-nulle. Cette rénovation écoénergétique — la plus grande partie des matériaux de construction est ou peut être fabriquée au Québec ou au Canada — supprime en même temps les hydrocarbures nécessaire à la climatisation tant des bâtiments résidentiels non chauffés à l'électricité que ceux institutionnels et industriels.
La libération du fardeau de l'importation des hydrocarbures et des véhicules privés donne à la balance commerciale du Québec une marge de manœuvre pour absorber une baisse substantielle des exportations vers les ÉU à cause des tarifs trumpiens. Nulle nécessité non plus de s'endetter vis-à-vis le capital financier international pour financer un déficit de la balance des paiements, Les exportations du secteur de l'avionnerie (et de l'armement), surtout les jets privés de Bombardier, ont tout intérêt à être sacrifiées pour réduire des gaz à effet de serre et le militarisme.
Les employé-e-s de ces usines pourront se recycler dans la fabrication de moyens de transport collectif sans trop de problèmes. Les employé-e-s des raffineries et même des pâtes et papiers — sacrifier du bois debout pour du papier, surtout du papier-journal est un comble de pollution énergivore — seront avantageusement recyclés vers la rénovation de bâtiments, la fabrication de matériaux de construction et la reforestation. Ces exportations perdues vers les ÉU, surtout celles issues des ressources naturelles qui peuvent être davantage transformées, peuvent faire l'objet d'échange avec le reste du Canada, le Mexique et l'Europe quitte à ménager avec eux des ententes commerciales dans un esprit d'échange égal.
L'alimentation non-carnée libère l'agriculture à la fois des GES et de Trump
Le commerce interprovincial de produits et services du Québec est à peu près équilibré malgré une appréciable importation de pétrole albertain. On note un échange conséquent de produits alimentaires et du sous-sol et de services informatiques. Toutefois gare aux énergivores fermes de serveurs, produits importés des ÉU, surtout pour une intelligence artificielle boostée aux hormones par la désinformation des GAFAM.
Une réduction substantielle de l'alimentation carnée, l'autre pilier de la réduction des GES avec celle des hydrocarbures, favoriserait une drastique reforestation absorbant du gaz carbonique — 80% des surfaces cultivées servent à l'alimentation animale. Cette réduction minimiserait aussi tant le commerce interprovincial qu'international des produits alimentaires et maximiserait leurs circuits courts d'approvisionnement. Même si ce n'est pas vis-à-vis les ÉU, la production alimentaire pose le défi des travailleurs temporaires venus surtout du Mexique et du Guatemala. Une juste solution, passant par leur syndicalisation, fait appel à une combinaison de leur permanence citoyenne et de la participation de la jeunesse au travail agricole, surtout maraîcher, incluant dans un cadre scolaire.
Tâches anti-Trump irréalisables quand fin du mois s'oppose à fin du monde
On aura compris que l'ensemble de ces tâches est incompatible avec une économie dont la raison d'être est la maximisation de la rentabilité des entreprises. Sa conséquence attendue, soi-disant prospérité, est la croissance, l'alpha et l'oméga des politiques gouvernementales. Dans ce cadre, les services publics sont des charges à austériser et à charcuter pour les privatiser et ainsi les récupérer dans la sphère capitaliste. Pour enfoncer davantage le clou, cette récupération se fait aux dépens de la fiscalité (PPP, sous-traitance) afin d'en supprimer le risque ce qui transforme le profit en rente.
Ces services privatisés, sauf pour les riches, seront ainsi toujours soit réduits à l'os soit inexistants au prorata de la résistance populaire. Au revers de la médaille, l'accumulation capitaliste, conséquence inévitable de la rivalité entre capitaux imposant la maximisation du profit, développe le marché privé de la consommation de masse. Ses deux mamelles en sont le logement privé, dont la forme la plus matériellement prolifique est la maison individuelle, et l'auto/VUS solo toutes deux abondamment financées par les banques. Ainsi le peuple-travailleur se trouve prisonnier de l'endettement. La fin du mois en devient une entrave à la lutte contre la fin du monde.
Une société du soin et du lien dont le socle est la décroissance matérielle se situe aux antipodes du capitalisme néolibéral en voie de fascisation. Ce capitalisme devient incapable de maintenir la croissance nécessaire au maintien du profit moyen des capitaux rivaux qui s'accumulent. La majorité du peuple-travailleur des pays du Nord a besoin avant tout de services publics peu propices aux gains de productivité et générant une forte résistance à leur privatisation. La majorité travailleuse des pays du Sud est trop pauvre pour s'enliser rentablement dans la consommation de masse ce qui d'ailleurs accélérerait la course folle vers la terreétuve.
Le secret de la lutte anti-Trump et anti-GES est la mobilisation du secteur public
La rupture anticapitaliste s'impose. La dictature de l'Argent, sous un vernis démocratique formel de plus en plus mince et transparent, doit céder la place à la planification démocratique à défaut de la céder au néofascisme. D'autant plus que le capitalisme vert entrave la reproduction du peuple-travailleur à coups de superaustérité afin d'essayer en vain de rétablir le métabolisme de la nature à coups de géo-ingénierie. De la défense syndicale et citoyenne des services publics et de la nature (Stablex, Northvolt, Ray-Mont Logistique) émerge une démocratie à la base en vue d'une société écologique. Ajoutons-y l'accroissement des services communautaires populaires dramatiquement sous-financés. La multiplication des initiatives agricoles, dont les jardins communautaires et les PME maraîchères sont les prémisses économiques de cette nouvelle société écologique. Ces initiatives à la base appellent cependant une coordination au sommet dans un esprit de solidarité et exigeant la maîtrise de l'épargne nationale. Cette planification démocratique devrait être un point majeur du programme Solidaire… lequel point tarde à apparaître.
Les écologistes auraient intérêt à être au rendez-vous de l'inévitable prochaine mobilisation des travailleuses et travailleurs des services publics. La grève de 202324, malgré ses importantes défaillances, fut une des plus importantes au Canada et aux ÉU durant ces années. Cette grève était à la confluence des luttes syndicales, féministes et écologiques. Mais peu en était conscients surtout en ce qui concerne la dimension écologique. Plus le caractère écoféministe des grèves du secteur public devient une évidence, plus déterminée et profonde sera la volonté combative des grévistes, plus large sera la solidarité populaire. C'est d'ailleurs pour prévenir ce danger que la CAQ, dans le sillage trumpiste, tente à la mode fédérale de pratiquement foutre à terre le droit de grève avec le projet de loi 89. Le grand rendezvous sera, souhaitons-le, plus tôt qu'on le pense. Ce sera possible en autant que le peuple-travailleur ne demeure pas sidéré par la peur du trumpisme et paralysé par la fausse solution de la guerre tarifaire et, en ce qui concerne les GES, et par les fausses solutions des véhicules privés électriques et de la filière batterie.
Marc Bonhomme, 17 mars 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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MAD

Depuis le 20 janvier, l'administration Trump veut imposer des tarifs douaniers sur tous les biens en provenance du Canada en violation directe de l'Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) qu'il a lui-même signé. Selon le Premier ministre Trudeau, ce serait une stratégie du président Trump visant à affaiblir le Canada économiquement en vue de l'annexer comme le « 51e État ». D'accord, le Canada est loin d'être parfait, mais de là à accepter béatement de tomber sous la tutelle de Trump…
Regarder les nouvelles en provenance du bureau ovale peut donner le tournis. Un jour des tarifs de 10 %, le lendemain c'est 25 %, puis c'est remis au 2 mars, et peut-être au 2 avril.[1] Les marchés financiers ne savent plus où donner de la tête ![2] L'économie d'un continent n'est pas la salle de jeu d'un enfant gâté qui ne sait pas ce qu'il veut. À le regarder, on a l'impression de voir un enfant de 4 ans qui trépigne durant une violente crise de nerfs mettant la patience des parents à rude épreuve alors qu'il crée un joyeux bordel en vidant son coffre à jouets.
Le Président annonce des tarifs douaniers de 25 % sur l'industrie automobile, qu'il met lui-même sur « pause » pendant 30 jours dès le lendemain. Les citoyens, les travailleurs et les investisseurs veulent de la stabilité ET connaître les règles du jeu économique.[3] Il faut rappeler que ce sont les consommateurs AMÉRICAINS qui vont payer la facture des tarifs de Mr. Trump alors que ce sont les consommateurs canadiens qui payeront les contre-tarifs inévitables. Le plan de Mr. Trump d'imposer des tarifs sur les biens que les Américains achètent du Canada et du Mexique fera inévitablement augmenter les prix. C'est « un pari risqué alors que les consommateurs sont irrités par l'inflation et que les électeurs ont reporté le Républicain au pouvoir dans l'espoir qu'il abaisserait les prix. »[4]
Cette guerre tarifaire ne fera que des perdants. Le Wall Street Journal, que personne ne peut qualifier de « média d'extrême gauche », affirme que ce gâchis est « The Dumbest Trade War in History » (la guerre commerciale la plus idiote de l'histoire).[5] Pendant la guerre froide entre l'ex-URSS et les États-Unis, la stratégie du MAD (« mutual assured destruction », ou DMA « destruction mutuelle assurée » ou « équilibre de la terreur » en français) était en place.[6] N'oublions pas que l'acronyme anglais « MAD » correspond au mot qui désigne la folie.[7] Aucun protagoniste n'était assez fou pour démarrer une guerre atomique car lui aussi avait la certitude qu'il serait anéanti ! Malgré quelques « frousses », cette politique du MAD a évité une conflagration nucléaire.
L'inflation et/ou la récession seront inévitables dans les deux pays ! La folie trumpienne serait-elle un cas de « mutual assured economic destruction » (destruction économique mutuelle assurée) ? Notre dilemme, c'est qu'il ne faut jamais lécher les bottes d'un « bully ».
Gérard Montpetit
le 12 mars 2025
1] https://www.ledevoir.com/economie/852841/quels-droits-douane-trump-sont-vigueur-ou-mis-pause ?
3] https://www.ledevoir.com/opinion/editoriaux/851737/editorial-regne-deraison ?
5] https://www.wsj.com/opinion/donald-trump-tariffs-25-percent-mexico-canada-trade-economy-84476fb2
6] https://en.wikipedia.org/wiki/Mutual_assured_destruction ;
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89quilibre_de_la_terreur
7] https://www.britannica.com/topic/mutual-assured-destruction
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Les scientifiques debout contre l’obscurantisme, aux États-Unis comme en France

En réaction aux attaques de Donald Trump contre la science, des chercheurs du monde entier manifestent le 7 mars. Un mouvement d'ampleur pour bâtir une science loin des « régimes totalitaires ».
Tiré de Reporterre
10 mars 2025
Par Vincent Lucchese
Les scientifiques contre-attaquent. Vendredi 7 mars, une marche pour défendre la science est organisée à Washington et dans des dizaines de villes aux États-Unis, par le mouvement Stand Up for Science(Debout pour les sciences). Celle-ci est relayée dans de nombreux pays, dont la France.
L'initiative est une réaction à la brutale offensive contre la recherche lancée par l'administration Trump depuis le 20 janvier et son investiture à la présidence des États-Unis. Coupes budgétaires et licenciements massifsdans les institutions et laboratoires de recherche, suppression de données scientifiques, censure et filtre idéologiquedes financements… La violence de l'attaque a pris de court la communauté des chercheurs.
« Il y a eu un moment de sidération aux États-Unis, témoigne Olivier Berné, astrophysicien au CNRS et co-initiateur en France de la mobilisation Debout pour les sciences. Mes collègues là-bas n'osent plus s'exprimer, ils ont peur, ils ne s'attendaient pas à être attaqués à ce point-là. »
Nommer la menace totalitaire
Les multiples mobilisations prévues le 7 mars doivent permettre de dépasser ce marasme. « Des chercheurs s'organisent au niveau fédéral et à l'international, de manière spontanée et populaire. Ce mouvement est le premier et le seul grand mouvement de contestation aujourd'hui aux États-Unis », dit Olivier Berné.
Le premier objectif est de mettre des mots sur le basculement en cours. « Obscurantisme », « mise en application littérale et affolante de la dystopie orwellienne », « attaques d'une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale », disent les divers textes de collectifs de scientifiques.
« C'est du négationnisme scientifique d'extrême droite »
« On vit un moment illibéral, avec des méthodes faisant penser à des régimes totalitaires. Même si l'on n'a pas envie de sortir ce mot tout de suite, il faut attendre de voir la réaction des contre-pouvoirs, des États fédérés, de la justice, des mobilisations dans la rue », commente Emmanuelle Perez Tisserant, historienne spécialiste des États-Unis, également initiatrice de la mobilisation en France. Et d'ajouter : « Mais lorsque Trump menace de couper les financementsaux universités qui autoriseraient des manifestations, cela fait clairement penser à de l'autoritarisme, voire à du fascisme. »
Toutes les sciences ne sont pas logées à la même enseigne : les sciences sociales, les travaux sur les discriminations ou sur le genre notamment, et les sciences de l'environnement, climat et biodiversité en tête, sont les cibles privilégiées.
Lire aussi : « Femme », « climat »... Trump interdit des mots dans les articles scientifiques
« Ils cherchent à museler ou supprimer les sciences les plus critiques : celles qui alertent sur les inégalités sociales ou l'urgence écologique, et montrent qu'un changement radical de société est nécessaire », dit Odin Marc, chercheur en sciences de la Terre au CNRS, membre de Scientifiques en rébellion et du collectif scientifique toulousain Atécopol, les deux organisations soutenant la mobilisation. Il affirme : « C'est du négationnisme scientifique d'extrême droite et une dynamique de criminalisation des lanceurs d'alerte, scientifiques et au-delà. »
L'Europe sur la même pente glissante
L'appel aux chercheurs et aux citoyens à descendre massivement dans la rue vise aussi à alerter sur l'ampleur des conséquences de ces attaques contre la recherche, et à leurs répercussions mondiales. Sur le climat, par exemple, les études et les données étasuniennes sont cruciales pour la recherche mondiale, via notamment les observations de la Nasa ou le travail de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA).
Or, cette dernière vient d'être victime d'une vague de licenciements massifs, tandis que Katherine Calvin, scientifique en chef de la Nasa, a été interdite de participer à une réunion du Giec, dont elle est coprésidente d'un groupe de travail.
Des scientifiques manifestent depuis plusieurs années contre les politiques qui ne sont pas à la hauteur de la crise écologique. Ici, lors d'une action des Scientifiques en rébellion à Montpellier (Hérault), le 15 octobre 2022. © David Richard/Reporterre
« Les données produites par les États-Unis sont étudiées dans le monde entier. Leur suppression ou restriction d'accès serait catastrophique. Cela montre notre très forte dépendance aux États-Unis et le besoin de repenser une forme d'autosuffisance dans la production des savoirs en Europe », dit Olivier Berné.
Ce qui suppose, a fortiori, que l'Europe ne suive pas le chemin des États-Unis. C'est l'autre signal d'alarme lancé par les chercheurs : « Ce qui se joue aujourd'hui aux États-Unis pourrait bien préfigurer ce qui nous attend si nous ne réagissons pas à temps », écrivent des scientifiques dans une tribune au Monde, qui appellent à rejoindre la mobilisation du 7 mars.
Les attaques frontales contre la science, et celles politiques et médiatiques, se multiplient aussi chez nous, en reprenant la rhétorique trumpiste : face à une crise, casser le thermomètre (ou les scientifiques) plutôt que de remettre en cause le modèle dominant. En France, sur l'écologie, le gouvernement comme l'extrême droite s'en sont pris brutalementces derniers mois aux institutions scientifiques ou aux agences relayant les messages de la recherche.
Une mécanique délétère qui vise toute tentative de discours divergeant. « On le voit encore avec la décision de justiced'annulation du chantier de l'A69 [entre Toulouse et Castres]. Plusieurs journalistes ou élus s'en sont pris aux juges ou à la rapporteuse publique avec la même stratégie que Trump : décrédibiliser toute parole qui n'est pas la leur, quitte à inonder le débat de contre-vérités », souligne Odin Marc.
Bâtir une science ni fasciste ni capitaliste
La menace est aussi plus insidieuse. Elle passe par les politiques de destruction des moyens publics de la recherche depuis des décennies. « On sous-finance depuis vingt ans l'université. Des postes disparaissent chaque année au CNRS et il y a de moins en moins de financements par étudiant. Ce désengagement de l'État de la production de connaissances, c'est l'autre versant de cette pente glissante dans laquelle nous sommes engagés », prévient Olivier Berné.
Le collectif Scientifiques en rébellion dénonce également la multiplication des partenariats public-privé, les financements par projet au cas par cas, l'application d'une politique sélective « darwinienne » dans la recherche selon les performances des équipes, qui privilégie les gros projets et une science utilitariste, au service de l'industrie. En 2024, un rapportpublié par un groupe de chercheurs alertait sur l'emprise croissante des intérêts privés sur la recherche publique en France. L'époque étant aux cures d'austérité drastiques, cette dynamique pourrait encore s'accélérer.
« Réclamer la liberté académique n'a pas de sens si on ne lui donne pas de budget. Sinon, la recherche est obligée de se lier à des intérêts privés. Il faut protéger la science du politique, en sécurisant son budget et en inventant des mécanismes pour qu'elle soit davantage en phase avec les besoins de la société », plaide Odin Marc.
Conventions citoyennes, forums citoyens et autres modalités d'interaction font partie des pistes avancées par Scientifiques en rébellionpour associer la société civile aux orientations de la recherche. « Protéger la science passe aussi pour nous par une critique de ses dérives actuelles. Il faut un vrai renouveau des relations entre science et société, pour que la production de connaissances soit vraiment au service de la démocratie et des nécessaires transitions écologique et sociétale », dit le chercheur.
Ce lien avec les citoyens est d'autant plus urgent à consolider face à la vague trumpiste. « Ce qui m'inquiète le plus, c'est qu'un certain nombre de nos concitoyens ne conçoivent pas les libertés académiques comme un bien à défendre, relève Emmanuelle Perez Tisserant. Un discours populiste qui gagne du terrain considère la recherche publique comme un repère de privilégiés. Il faut mieux défendre et formuler notre vision d'une science comme bien commun, comme savoir critique qui échappe à l'injonction de rentabilité économique. Sinon, ce sera toujours trop facile de couper les financements. »
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Livre à paraître : Mode jetable | 25 mars

Entre gaspillage et surproduction, gros plan sur une industrie qui joue sur nos impulsions d'achats.
Le livre *Mode jetable *du spécialiste des médias numériques Philippe Gendreau paraîtra en librairie le 25 mars prochain.
Un percutant essai, accessible et punché, qui cherche à attirer l'attention sur l'industrie de la mode jetable (*fast fashion) *qui
exploite, pollue et vole (nos données personnelles, les concepts des artistes, etc.), tout en sauvant les apparences. Mais, le prix environnemental et humain de la mode jetable n'est pas rose.
Il s'agit du 8e essai dans la collection Radar <https://ecosociete.org/livres/colle...> (15 ans +) chez
Écosociété. Le deuxième de l'auteur qui a écrit le premier titre de la collection : *GAFAM, le monstre à cinq têtes. *
*À propos du livre*
En cette période d'insécurités économique et écologique (pour ne nommer que celles-là), il est plus que jamais pertinent de réfléchir à nos habitudes de consommation. Il est bien évident que tout le monde n'a pas les moyens de s'habiller chez les grands designers québécois, et encore moins de « magasiner comme un-e milliardaire » (Slogan de Temu), ainsi les vêtements
à faible coût et à notre porte en un clic sont attrayants. C'est sans parler de la publicité et des différentes tactiques de vente à pression que nous subissons dès que nous sommes actif·ves sur les réseaux sociaux. Il faut acheter vite, sans trop réfléchir, et pour toutes les occasions.
Avec *Mode jetable, *Philippe Gendreau dévoile ce qui se passe dans les coulisses des grandes entreprises de mode, en montrant notamment comment les progrès du marketing en ligne les ont rendues encore plus redoutables.
Il brosse le tableau d'une industrie qui produit (et gaspille !) sans limite dans des ateliers de misère (sweatshop) où l'on dévore le coton, le polyester, qui utilisent des litres d'eau et de colorants, sans se soucier de la santé des personnes qui y travaillent.
L'auteur ne cherche pas à nous culpabiliser, il pense simplement qu'il faut connaître ce qu'il a derrière un chandail à 10 dollars, livré le lendemain. Il démontre comment notre surconsommation est programmée, souhaitée, mais il croit en notre capacité à faire bouger les choses.
Il n'est plus possible de fermer les yeux sur les dégâts de cette industrie, démodons-nous.
*À propos de l'auteur *
Philippe Gendreau enseigne aux adolescent·es depuis plus de 30 ans. Il a créé un cours d'éducation aux médias afin d'aiguiser le sens critique des élèves face à l'omniprésence et l'influence des médias. Il est l'auteur de *Gafam, le monstre à cinq têtes*, paru dans la collection Radar. Mode jetable est son second essai.
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SAUVER HYDRO. Notre avenir énergétique en jeu, un essai percutant de François Perreault aux Éditions Somme toure. En librairie le 25 mars.

Un essai percutant sur l'avenir de notre patrimoine énergétique et sur l'influence nuisible du gouvernement auprès d'Hydro-Québec.
SAUVER HYDRO Notre avenir énergétique en jeu
de
François Perreault
Essai
Collection _Manifestement_
En librairie le 25 mars
Un essai percutant sur l'avenir de notre patrimoine énergétique et sur l'influence nuisible du gouvernement
auprès d'Hydro-Québec.
Les lecteurs de _Sauver Hydro_ seront nombreux, souhaitons-le, à adhérer à l'urgence d'un débat qu'il nous faut tenir en tant que détenteurs d'un patrimoine énergétique unique au monde, Hydro Québec. L'objectif est ici de mobiliser le plus grand nombre à nous faire tous entendre, afin d'amener le gouvernement à reconsidérer ses investissements démesurés et incertains dans une filière batterie. Le déséquilibre entre l'offre et la demande d'électricité qui en résultera ne peut en effet qu'accroître la pression sur notre réseau, aux réserves de puissance affaiblies. En réponse à la priorité de décarboner le Québec, le gouvernement crée donc un besoin en électricité au-delà de nos moyens. Dans ce scénario, une précarité
énergétique accélérée par plus encore que les seuls changements climatiques devient probable. À cette perspective, François Legault répond simplement qu'il faut doubler la capacité de production d'Hydro.
La mainmise politique sur Hydro-Québec ne date certes pas d'hier, mais depuis son élection en 2018, le gouvernement de la CAQ a redoublé d'efforts pour influencer l'autonomie de la société dans les recommandations et les choix de ses experts et des professionnels pour maintenir et améliorer son réseau.
L'auteur
Professionnel de la communication, François Perreault a d'abord prati-qué le journalisme successivement au quotidien _La Presse_, à Radio-Canada et au réseau CTV. Il a aussi été courriériste parlementaire à Ottawa. Puis, pendant plus de vingt ans, conseiller auprès de nombreu-ses grandes sociétés canadiennes et étrangères, il a géré pour elles des enjeux stratégiques dans des secteurs d'activité variés. Plus tard, dans le cadre de la _Commission d'enquête fédérale sur le programme des commandites_, il a agi à la fois comme responsable de la commu-nication et porte parole du président l'Hon. John Gomery.
Depuis 2006, il est auteur et écrivain public.
EXTRAIT – Sauver Hydro
« Notre situation énergétique actuelle est précaire et résulte
malencontreu-sement du manque de planification de nos gouvernements actuels
et passés. […] Avec si peu d'écoute et de transparence, le premier
ministre met en jeu le pire scénario, celui selon lequel nous pourrions
trop tard être à court de moyens pour corriger ses erreurs et recouvrer
une sécurité énergétique. […] Mauvaise foi, mauvaise volonté ou tout
simplement incompréhension du secteur énergétique, peu importe les
motifs, il faut nous faire entendre dans une consultation collective en
s'assurant de la participation d'experts et de parties prenantes. Ce
document est en partie le résultat de rencontres avec des observateurs,
des analystes du domaine de l'énergie qui ont bien voulu partager leurs
vues sur les défis d'une transition énergétique. Je me dois également
de remercier le syndicat des spécialistes et professionnels
d'Hydro-Québec de m'avoir guidé dans la recherche de documents
publics pertinents qui m'ont permis d'aller au cœur des enjeux. Je
souhaite enfin que la lecture de ce document puisse éveiller l'intérêt
du plus grand nombre et susciter la volonté de s'impliquer. Mon but
serait alors atteint. Il en va après tout de notre qualité de vie en tant
que société. »
François Perreault
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Pas d’illusions En bons fascistes, Trump et ses amis violeront droit international et toute règle établie !

Quand au début du siècle, le grand écrivain américain Philip Roth réécrivait l'histoire de son pays avec son extraordinaire roman « Complot contre l'Amérique », en faisant élire président des Etats-Unis le légendaire aviateur pronazi Charles Lindbergh à la place de Franklin Roosevelt, probablement il ne pouvait pas imaginer que la réalité politique de l'Amérique d'aujourd'hui présenterait plus que des similitudes avec celle décrite dans son livre.
12 mars 2025 | tiré du site entre les lignes entre les mots | Le dessin est de Sonia Mitralia
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/03/12/pas-dillusions/#more-91656
Un livre d'une fiction politique qualifiée pourtant alors de « cauchemardesque », se déroulant 85 ans plus tôt, en 1940 ! Car bien prophétique le roman de Roth l'est quand il fait élire un Lindbergh promettant, comme Trump, la paix. Ou quand une fois au pouvoir, ce même Lindbergh s'empresse de faire ce qu'est en train de faire Trump avec Poutine : conclure un pacte de non-agression avec Adolphe Hitler...tandis qu'il prend comme ministre à tout faire un nazi notoire, le grand capitaliste constructeur de voitures Henry Ford, là où Trump a pris un autre capitaliste également constructeur de voitures, Elon Musk...
C'est comme si les démons d'un passé qu'on croyait enterrés, continuent à hanter notre présent. Et cela pas seulement grâce aux intuitions géniales de Philip Roth. Mais aussi et surtout en raison du passé et de la formation idéologique de ceux qui sont à la fois les têtes pensantes et la garde rapprochée de Trump : le triumvirat de Elon Musk, Peter Thiel et David Sachs ainsi que leur protégé, le vice-président J.D. Vance. Moins connu que Musk, David Sachs a été nommé par Trump « czar en charge de l'Intelligence artificielle et des cryptomonnaies », c'est-à-dire de deux secteurs plus que névralgiques de son administration, tandis que Peter Thiel qui peut se targuer d'avoir « découvert » et senti le premier le potentiel de Trump, a formé idéologiquement, a financé et a propulsé sur la scène politique J.D. Vance, avant de l'imposer comme vice-président de Trump.
Évidemment, le contenu des professions de foi et des actes de ces messieurs suffiraient amplement à les qualifier de néonazis. D'ailleurs, ils s'évertuent eux-mêmes à poser en racistes et suprématistes convaincus et en soutiens et propagandistes de tout ce qu'il y a de néofasciste et surtout de néonazi de par le monde. Toutefois, c'est leur passé commun de sud-africains blancs, partisans enthousiastes de l'apartheid et grandis dans des milieux ouvertement nostalgiques du Troisième Reich, qui éclaire bien plus que les sanctions punitives de Trump contre l'Afrique du Sud, en raison de très timides mesures en guise de cette réforme agraire que ses gouvernements successifs n'ont jamais entrepris après la chute de l'apartheid. (1) En réalité, il éclaire la profondeur et la solidité de leurs convictions néonazies. Par exemple, Peter Thiel, le plus formé et influent de trois, a grandi à Swakopmund, une petite ville de l'actuelle Namibie, peuplée de blancs d'origine allemande, qui fêtaient chaque année jusqu'à récemment l'anniversaire... de Hitler et se saluaient dans les rues avec des...Heil Hitler décomplexés !
Alors, ceci étant dit on ne peut que constater qu'on est devant une garde rapprochée de Trump qui brille par ses références clairement nazies et pas du tout en présence des simples « provocateurs » et autres « fous » et « farfelus » ou même des « milliardaires aux idées confuses », comme le prétendent nos médias qui n'arrivent toujours pas à résoudre le prétendu « mystère » des saluts nazis de Elon Musk ! Ce constat n'est pas dépourvu des conséquences terriblement importantes et...effrayantes. D'abord, il fait la lumière sur les agissements présents et à venir, prétendument « chaotiques » et « incompréhensibles| de ce même Trump, leur donnant un sens qui reste caché tant qu'on essaye de les interpréter comme de simples variantes extrémistes de politiques néolibérales et autoritaires qu'on a connu par le passé. Et ensuite, il donne la mesure de la menace mortelle pour l'humanité que représentent les projets et les ambitions du tandem Trump-Vance et du trio maléfique de leur garde rapprochée !
Pour l'instant, une chose est sûre : après les grands chambardements de deux premiers mois de cette seconde présidence de Trump, les Etats-Unis d'Amérique ne sont plus le pays que le monde connaissait depuis la fin de la Première Guerre mondiale en 1918 ! Et vu que ces Etats-Unis font depuis plus d'un siècle, la pluie et le beau temps du monde entier, c'est ce monde qui se réveille aujourd'hui changé radicalement, métamorphosé et profondément angoissé par des lendemains désormais indéchiffrables !
Inutile de chercher la logique de ces « grands chambardements » de la seconde présidence de Trump à l'aide des habituels outils analytiques. Ce qui donne un sens à l'actuel processus de destruction de la grande démocratie (bourgeoise) nord-américaine ainsi qu'à l'avalanche de décrets présidentiels plus ou moins « incompréhensibles » et déconcertants qui l'accompagnent, c'est qu'ils servent tous un projet qui s'en fout éperdument des règles établis par les lois, les constitutions ou le droit international. Alors, le plus tôt comprennent nos gauches cette vérité première, le mieux sera pour elles et pour le monde entier...
C'est ainsi que ce qui rapproche et même unit des partis ou des dirigeants politiques à première vue assez différents, comme par exemple Trump, Poutine ou Netanyahu n'est pas nécessairement et en premier lieu la communauté de leurs intérêts géostratégiques, impérialistes et autres. C'est surtout et avant tout la communauté de leurs projets profondément antidémocratiques, racistes, obscurantistes, suprématistes, militaristes et violents. Et cette communauté idéologique rapproche non seulement les grands mais aussi les « petits » dirigeants autoritaires et antidémocratiques comme par exemple, le président Serbe Aleksandar Vucic, un fidele de Poutine, qui est devenu un grand pourvoyeur d'armes d'Israel de son ami Netanyahu : sa Serbie vient en 2024 d'augmenter de...3000% ses exportations d'armes vers cet Israël accusé de génocidà Gaza durant cette meme année.(2)
Mais attention. La communauté idéologique des projets et des ambitions de Trump, de Poutine, de Modi ou de Netanyahu ne signifie pas du tout que ces dirigeants et leurs régimes sont « condamnés » à coexister pacifiquement, à se faire la paix en partageant le monde entre eux. En réalité, c'est tout le contraire. Des régimes comme ceux de Trump ou de Poutine et de leurs clones idéologiques, mènent tôt ou tard à la guerre y inclus entre eux. À des guerres « fratricides » comme par exemple, celle qui a été évitée de peu au dernier moment en 1934 entre le fascisme italien et le nazisme allemand, quand Mussolini a envoyé urgemment 200.000 de ses soldats à la frontière autrichienne pour empêcher son ami Hitler d'annexer l'Autriche, à l'époque sous influence italienne !...
Alors, mesurons en toute priorité l'extrême gravité de la situation, et agissons en conséquence. Car la condition indispensable pour combattre efficacement son ennemi est de savoir ce qu'il est et ce qu'il a l'intention de te faire...
Notes
1. Voir notre article Quand l'Afrique du Sud des attentes trahies, trahit aussi son héros Dimitri Tsafendas ! : https://www.cadtm.org/Quand-l-Afrique-du-Sud-des-attentes-trahies-trahit-aussi-son-heros-Dimitri
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