Presse-toi à gauche !

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Multinationales - Olivier Petitjean, Ivan du Roy

17 février, par Les Éditions de la Découverte — , ,
Qu'on consomme leurs produits, qu'on admire leurs marques ou qu'on dénonce leurs pratiques, les multinationales sont omniprésentes dans nos vies. Mais les connaît-on vraiment ? (…)

Qu'on consomme leurs produits, qu'on admire leurs marques ou qu'on dénonce leurs pratiques, les multinationales sont omniprésentes dans nos vies. Mais les connaît-on vraiment ? Quand sont-elles apparues ? Comment sont-elles devenues si puissantes ?

https://www.editionsladecouverte.fr/multinationales-9782348077074

LIRE UN EXTRAIT

Ce livre, associant chercheurs et journalistes, offre une fresque historique et critique inédite sur ces entreprises qui ont contribué à façonner le monde dans lequel nous vivons. Des premiers câbles télégraphiques sous-marins aux géants du Web, de IG Farben au pesticide RoundUp, de Rockefeller à Elon Musk, des " républiques bananières " au lobbying intensif, il retrace leur montée en puissance progressive jusqu'à nos jours. À travers des dates emblématiques, des épisodes-clés et des portraits, il montre comment leur expansion découle de choix économiques et politiques, mais aussi juridiques, techniques, financiers ou culturels.

L'histoire des multinationales épouse celle des relations entre États, des conflits et des grandes crises. Elle suit de près la trajectoire des changements technologiques, que ces entreprises ont contribué à orienter et accélérer. Elle accompagne la mutation de nos vies quotidiennes, à travers l'avènement d'une société de consommation de masse puis du tout-numérique. Elle est aussi l'histoire de la transformation de notre environnement naturel, de l'extraction des matières premières, de la production d'énergie à une échelle toujours plus importante, jusqu'à engendrer des menaces inédites.
L'histoire des multinationales est donc notre histoire.

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Les prophètes de L’IA de Thibault Prévost

17 février, par Dan Israel — ,
Trumpisme, biais racistes et menace écologique : « L'IA n'est pas une technique, c'est une idéologie » 19 janvier 2025 | tiré du site de Lux Éditeur Pour l'observateur (…)

Trumpisme, biais racistes et menace écologique : « L'IA n'est pas une technique, c'est une idéologie »

19 janvier 2025 | tiré du site de Lux Éditeur

Pour l'observateur critique des technologies Thibault Prévost, la victoire de Trump coïncide avec le moment où les milliardaires de la Silicon Valley imposent l'intelligence artificielle dans les sphères politiques et économiques. Avec des racines idéologiques communes.

Journaliste (il est notamment chroniqueur pour le site Arrêt sur images), observateur critique des technologies numériques, Thibault Prévost est l'auteur du récent livre Les Prophètes de l'IA (Lux éditeur), où il explique pourquoi les promoteurs de l'intelligence artificielle (IA) sont aussi ceux qui alertent sur la menace qu'elle ferait peser sur l'humanité.

[…]
Lisez la suite ici.

Dan Israel, Mediapart, 19 janvier 2025

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Comptes rendus de lecture du mardi 18 février 2025

17 février, par Bruno Marquis — , ,
La peur du peuple Francis Dupuis-Déri J'ai lu de nombreux bouquins de Francis Dupuis-Déri, un de nos intellectuels que j'apprécie beaucoup. « La peur du peuple » est un (…)

La peur du peuple
Francis Dupuis-Déri

J'ai lu de nombreux bouquins de Francis Dupuis-Déri, un de nos intellectuels que j'apprécie beaucoup. « La peur du peuple » est un essai fouillé sur la « démocratie directe » – la véritable démocratie en fait, celle de l'agora. Dupuis-Déri nous y présente la lutte entre l'agoraphobie et l'agoraphilie politiques, soit entre la haine et l'amour de la démocratie (directe), en décrivant les arguments et les manœuvres des deux camps. Le peuple, dont nous faisons partie, a-t-il la capacité de s'autogouverner ? Doit-il être gouverné par une élite pour que triomphe le bien commun ? Peut-on parler de démocratie si le peuple ne s'assemble pas pour exprimer et incarner sa volonté politique ? Un essai éclairant et agréable à lire. Une travail remarquable...

Extrait :

En effet, il est pour le moins curieux de conclure que le régime électoral est l'équivalent moderne de la démocratie (directe), simplement parce que celle-ci serait impossible dans la modernité. Cette prétendue impossibilité devrait nous mener à conclure que nous ne vivons pas en démocratie. Mais plusieurs préfèrent affirmer qu'un régime électoral, c'est finalement comme la démocratie (directe), voire mieux encore selon les principes de la démocratie. C'est comme si, ne pouvant avoir de carrés, nous disions que les cercles sont non seulement des carrés, mais que les cercles sont même plus carrés que les carrés, et que les carrés sont dans les fait une menace aux seuls vrais carrés, les cercles.

Les sacrifiés de la bonne entente
Luc Bouvier

Ce très intéressant bouquin raconte l'histoire des francophones du Pontiac. Au début de sa colonisation, dans la première moitié du 19e siècle, le Pontiac est une terre plus ou moins réservée à la population anglophone. Tranquillement, en raison de l'industrie forestière, les francophones s'y installent. Dans les années 1950, la population d'origine française devient majoritaire, mais l'anglicisation fait des ravages. Deux institutions vont assurer cette assimilation des francophones : l'école et l'église. L'institution scolaire, gérée majoritairement par des commissaires irlandais, refuse d'offrir un enseignement français selon le poids démographique des francophones, allant jusqu'à appliquer dans ses écoles le règlement 17 du gouvernement de l'Ontario. Elle permet de la sorte l'anglicisation de générations de francophones. L'église a également travaillé à assurer la suprématie de la langue et de la culture anglaises dans le Pontiac. Sous la gouverne de l'évêque ontarien de Pembroke, le clergé n'offre la plupart du temps qu'un ministère de langue anglaise aux francophones et combat toute initiative qui leur serait favorable. J'aime l'histoire, et particulièrement la nôtre, et j'ai beaucoup aimé ce bouquin.

Extrait :

Cette anecdote résume toute l'histoire des relations entre francophones et anglophones, officiellement marquées du sceau de la bonne entente. C'est cette histoire, cachée et niée, autant par la communauté anglophone que francophone mais pour des raisons bien différentes - que raconte ce livre. Cette histoire, c'est aussi celle de la plupart des minorités francophones à travers le Canada qui vivent sous la camisole de force du bon-ententisme.

Les Frères Karamazov
Fiodor Dostoïevski
Traduit du russe

Plusieurs personnes ont raconté avoir tout lu ou presque tout lu les romans de Dostoïevski à une certaine époque de leur vie. Ce fut entre autres le cas de l'historien Roger Blanchette. « Les Frères Karamazov » est le dernier roman de ce très grand écrivain russe et son meilleur de l'avis de plusieurs. Je dois aussi admettre que c'est un de ses bons romans, et probablement le plus abouti, même si je lui ai préféré « L'idiot ». « Les Frères Karamazov » est un long drame familial, dans lequel le père, plutôt odieux, finit assassiné, et qui tourne autour de trois frères, ses fils Dimitri, Ivan et Aliocha. Derrière ce qui ne ressemble plus guère à un roman policier, ce sont les interrogations sur la raison d'être de l'homme, sur la misère, sur l'orgueil, sur l'innocence aussi, qui se jouent dans cette Russie, peu après les réformes de 1860.

Extrait :

Alexéi Fiodorovitch Karamazov était le troisième fils d'un propriétaire foncier de notre district, Fiodor Pavlovitch, dont la mort tragique, survenue il y a treize ans, fit beaucoup de bruit en son temps et n'est point oubliée. J'en parlerai plus loin et me bornerai pour l'instant à dire quelques mots de ce « propriétaire », comme on l'appelait, bien qu'il n'eût presque jamais habité sa « propriété ». Fiodor Pavlovitch était un de ces individus corrompus en même temps qu'ineptes – type étrange mais assez fréquent - qui s'entendent uniquement à soigner leurs intérêts. Ce petit hobereau débuta avec presque rien et s'acquit promptement la réputation de pique-assiette : mais à sa mort il possédait quelque cent mille roubles d'argent liquide. Cela ne l'empêcha pas d'être, sa vie durant, un des pires extravagants de notre district. Je dis extravagant et non point imbécile, car les gens de cette sorte sont pour la plupart intelligents et rusés : il s'agit là d'une ineptie spécifique, nationale.

S'indigner, oui, mais agir
Serge Mongeau

J'ai rencontré Serge Mongeau il y a de nombreuses années lors d'un salon du livre. Ça avait été fort agréable. C'est un homme aimable, humain et sans prétention. Celui que l'on nomme en fait le père de la simplicité volontaire au Québec poursuit dans ce petit essai de moins de cent pages sa défense du bien commun, de l'environnement et de la justice. Même s'il nous y donne l'heure juste sur la situation dans le monde, il ne baisse pas lui-même les bras. Il nous incite bien plutôt à faire la même chose en vivant vraiment en adéquation avec les valeurs que nous défendons. Parce que c'est en incarnant le changement que l'on amène le changement…

Extrait :

Il y a, dans notre société, beaucoup de réalités que je trouve inacceptables : les inégalités sociales croissantes, l'absence d'une véritable démocratie, la destruction de la nature et la détérioration de l'environnement, pour ne nommer que celles-là. Je ne suis pas seul à penser ainsi ; je fais partie de cette grande famille de la gauche qui, tout au long de l'histoire moderne, s'est préoccupée du bien commun. Nous rêvons, nous discutons, nous écrivons, nous mettons sur pied des organisations, nous militons...

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Chine / Etats-Unis : où nous mène le nouveau cycle de guerre commerciale ?

15 février, par Hubert Testard — , , ,
La Chine et les Etats-Unis donnent l'image de deux boxers sur un ring parvenus au 12ème round de leur combat sur les sanctions commerciales, entamé par Donald Trump en 2018 et (…)

La Chine et les Etats-Unis donnent l'image de deux boxers sur un ring parvenus au 12ème round de leur combat sur les sanctions commerciales, entamé par Donald Trump en 2018 et poursuivi à la Maison Blanche par Joe Biden sur les hautes technologies. Ils se connaissent bien et ils ont préparé leurs tactiques réciproques. Les 10% de droits de douane appliqués par Trump à partir du 4 février et les contremesures chinoises du 10 février ne sont qu'une première salve destinée à établir le rapport de force. Il faut s'attendre à des accords provisoires et à de nouveaux rebondissements qui ne règleront probablement rien pour le déficit commercial américain.

Tiré de Asialyst
7 février 2025

Par Hubert Testard

Lion et Dragon combattants, peinture iranienne du XVIIIe siècle de Muhammad Baqir, Metropolitan Museum of Art à New York. DR.

Le Chine est depuis le 4 février le seul pays touché par les sanctions commerciales annoncées par le président américain depuis sa réélection. Le Mexique et le Canada ont obtenu un répit de 30 jours qui pourrait conduire à des accords durables si les concessions faites permettent à Washington d'en faire un triomphe médiatique. L'Europe est menacée, sans savoir encore de quoi.

Dans le cas de la Chine la négociation s'annonce plus complexe. Car elle a en arrière-plan des enjeux géopolitiques, comme le rôle que pourrait ou non jouer le président chinois Xi Jinping dans la recherche d'une issue à la guerre menée par la Russie en Ukraine, économiques avec l'avenir de l'application chinoise controversée TikTok aux Etats-Unis, ou technologiques avec le contrôle de l'« empire du milieu » sur les terres rares et les métaux critiques.

Les sanctions américaines ne mordent pas pour le moment

Les 10% de droits de douane décrétés par Trump ne sont pas une bonne nouvelle pour une économie chinoise en plein marasme et confrontée à l'atonie de la demande intérieure. Mais ce n'est pas une catastrophe. Le yuan a perdu 4% de sa valeur face au dollar depuis le mois d'octobre dernier, et près de 13% depuis deux ans. Le billet vert s'envole comme toujours en période d'incertitude, et l'impact réel des droits de douane a de bonnes chances d'être inférieur au taux annoncé.

Par ailleurs l'inflation en Chine est très faible. L'indice des prix à la production dans l'industrie a perdu 2% de sa valeur entre décembre 2022 et décembre 2024 alors que cet indice a progressé de 5,4% aux Etats-Unis sur la même période. La décision prise par Trump ne fait en réalité que rétablir l'équilibre des prix relatifs sur un an (qui se calculent en combinant inflation et variations de change) et ne suffit pas à compenser le renforcement de la compétitivité prix de l'industrie chinoise sur deux ans.

Une des annonces de Washington aura un impact plus immédiat. Il s'agit de la suppression des exemptions de droits de douane sur les petits colis. Cette décision va pénaliser les grands du e-commerce chinois au profit notamment d'Amazon. Sans doute une première rétribution après le ralliement de Jeff Bezos lors de la campagne électorale américaine.

Les contremesures chinoises ont un impact sectoriel limité mais stratégique

Les décisions annoncées par Pékin ne sont pas globales. Elles consistent à surtaxer à hauteur de 15% les exportations américaines de charbon et de gaz naturel liquéfié (GNL), et de 10% les machines agricoles, les grosses cylindrées automobiles et les camionnettes. Certaines restrictions à l'exportation ou l'inscription de nouvelles entreprises américaines sur la « liste noire » chinoise complètent le dispositif.

Les exportations américaines de GNL vers la Chine ne représentent que 2,3% de leurs ventes mondiales, et moins de 4% des importations chinoises. C'est un peu différent pour le charbon, où le marché chinois capte 11% des exportations américaines (mais seulement 2,5% des achats de charbon par Pékin). Il sera facile pour les deux pays de compenser la réduction éventuelle du volume d'échanges de GNL en se tournant vers d'autres destinations. Ce sera plus difficile pour Washington en ce qui concerne le charbon. L'année 2024 avait été une très bonne année pour les ventes américaines de charbon vers le marché chinois – avec une progression de plus de 70% -, et le choc des droits de douane pourrait briser cette progression.

Globalement les mesures annoncées sur l'énergie ne portent que sur 5% des ventes américaines vers la Chine. Les autres sanctions décidées par Pékin ont un impact encore plus ciblé. Celles portant sur l'automobile vont pénaliser Ford et GM pour un volume global assez faible, sans affecter Tesla qui produit ses modèles à Shanghai.

La décision potentiellement la plus dangereuse pour les Etats-Unis est l'allongement de la liste des métaux critiques soumis à des restrictions à l'exportation. Après les annonces faites en décembre 2024 sur le gallium (qui vise le marché des semi-conducteurs), cette liste s'étend désormais à un groupe d'alliages rares et de métaux critiques (tungstène, tellurium, bismuth, molybdène…). Des métaux qui ont une fonction clé dans les chaînes de valeur industrielles de l'électronique, l'aéronautique ou des voitures électriques.

Quelle est la suite du film ?

Lors de la première guerre commerciale initiée par Donald Trump contre la Chine à partir de mars 2018, les sanctions américaines avaient progressé en plusieurs étapes : des droits de douane sur les panneaux solaires, les machines à laver, l'acier et l'aluminium entre janvier et mars, une surtaxe de 25% pour 50 milliards de dollars de produits exportés par la Chine en avril, et de nouvelles annonces en juillet avec une surtaxe de 10% portant sur 200 milliards de dollars de produits.

Pékin avait réagi rapidement par des sanctions équivalentes. Les négociations pour un accord commercial global ont commencé au mois de mai 2018. Après diverses péripéties et des compromis partiels les deux pays sont parvenus à un accord global intitulé « Phase One » le 15 janvier 2020.

La phase actuelle a été qualifiée par le président américain de « première salve. » Ce qui veut dire que d'autres mesures vont probablement être prises après analyse des contre-mesures chinoises tandis que les deux pays entament des négociations. Les objectifs de Donald Trump ne sont pas d'une clarté limpide. Il a surtout mis en avant la question du fentanyl, une drogue de synthèse qui tue des dizaines de milliers d'Américains chaque année, qui a déjà donné lieu à un accord bilatéral entre Xi Jinping et Joe Biden en novembre 2023, avec des résultats semble-t-il insuffisants. Il mentionne le déficit bilatéral en termes généraux, alors qu'il évoque des secteurs précis comme l'acier ou les semi-conducteurs quand il s'agit de protéger globalement l'industrie américaine.
Il faut s'attendre à une nouvelle succession d'annonces, de contre-annonces et d'accords partiels ou globaux dans les prochains mois, à un rythme probablement soutenu car le président américain veut aller très vite sur tout.

Comment réduire les déséquilibres commerciaux des deux pays ?

Le problème de Donald Trump n'est pas seulement la Chine. Le déficit de la balance des paiements du pays est global et structurel. Il dépasse 2% du PIB du pays chaque année depuis vingt-cinq ans. Ce déficit ne résulte pas d'un complot mondial mais tout simplement d'un excès de consommation et d'une insuffisance d'épargne, qui limite l'investissement et donc l'offre de produits américains sur le marché intérieur.
C'est exactement l'inverse dans le cas de la Chine, qui souffre d'une insuffisance de la consommation intérieure et d'un excès d'épargne. Le taux d'épargne brute chinois atteint plus du double du taux américain depuis vingt ans. Il explique les excédents commerciaux permanents du pays.

Source : Banque Mondiale.

Si le bon sens l'emportait, chacun des deux pays travaillerait à rétablir un meilleur équilibre entre l'épargne et la consommation. Des discussions sur ce sujet ont d'ailleurs eu lieu dans le passé entre les experts économiques des deux administrations, à une époque où Washington avait une vision des équilibres macro-économiques.

Le protectionnisme de Trump peut conduire à une réduction du déficit américain, mais ce sera probablement par une hausse de l'inflation et une baisse de la croissance, ce qui n'est clairement pas l'objectif. Par ailleurs freiner les exportations chinoises ne sert pas à grand-chose si dans le même temps les investisseurs chinois ne sont pas les bienvenus aux Etats-Unis et ne peuvent pas contribuer à une relance de la production industrielle nationale.

Par Hubert Testard

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La montée de la droite, le Canada, le Québec et la classe ouvrière

11 février, par André Frappier — ,
L'arrivée de Donald Trump à la présidence des États-Unis a bouleversé la situation politico-économique mondiale. Ses décisions ont un impact important sur la politique et sur (…)

L'arrivée de Donald Trump à la présidence des États-Unis a bouleversé la situation politico-économique mondiale. Ses décisions ont un impact important sur la politique et sur l'économie canadienne ainsi qu'une déstabilisation de la question de la souveraineté au Québec.

C'est au Québec que le « sentiment d'affection profonde » envers l'Unifolié s'est le plus propagé, près d'une personne québécoise sur deux se dit fière d'être canadienne avec un taux de 58%, une augmentation de 13 % depuis décembre dernier.

Il nous apparaît dans ces circonstances imprtant de clarifier d'une part le sens de la lutte de libération nationale contre l'État impérialiste canadien et d'autre part la lutte de la classe ouvrière, seule capable de mettre fin à la montée de l'extrême droite et à apporter les solutions à la crise tant sociale qu'environnementale.

La lutte de libération nationale est une lutte historique qui a pris forme contre l'oppression de l'État canadien. L'oppression nationale du Québec est le maillon faible de l'État impérialiste canadien et dans cette mesure la lutte pour l'indépendance doit être une lutte pour un changement de société, démocratique, sous contrôle social où les grandes entreprises doivent être nationalisées. Cette lutte se fait en solidarité avec les progressistes du Reste du Canada (ROC) qui ont tout intérêt à un changement de société ainsi qu'avec les peuples autochtones pour la réappropriation de leurs droits ancestraux.

Notre défi est de lier ces luttes aux luttes sociales de la classe ouvrière du Reste du Canada dans une stratégie commune avec les nations autochtones. Nous sommes la seule force qui peut apporter une solution à la crise politique et environnementale. C'est une lutte pour la solidarité internationale des peuples. Ce ne sont certainement pas les banquiers, le monde des affaires et les politicien-es qui défendent des politiques néolibérales qui y parviendront. Leurs solutions seront toujours au détriment de la classe ouvrière et de l'environnement.

Quelles alternatives politiques ?

Les prochaines élections fédérales prendront donc une grande importance dans un contexte où le mot d'ordre semble être "sauvons le Canada". Le Parti libéral du Canada (PLC) est en remontée et se présente comme le rempart contre la droite trumpiste et, par conséquent, la nécessaire alternative aux Conservateurs. Mark Carney semble la figure dominante pour remplacer Justin Trudeau. Ce dernier a affirmé être ouvert aux projets de pipelines et, comme sa rivale Chrystia Freeland, mettrait fin à la taxe carbone. Il s'est aussi engagé à réduire la taille de la fonction publique et à baisser les impôts. Il promet que s'il devient premier ministre, le Canada atteindra la cible de 2 % du PIB en dépenses militaires en 2030. Il a aussi promis de faire passer à la trappe la hausse des impôts sur le gain en capital que les Libéraux ont pour l'instant seulement repoussé. On comprend qu'il cherche à prendre le terrain des conservateurs.

Avec un programme et une attitude qui ressemblent à Trump, la forte montée des Conservateurs devient maintenant un incitatif à ne pas voter pour eux.

Le NPD semble le seul parti qui n'est pas néolibéral et pour lequel on peut voter. Mais ses positions mitigées ne sont pas inspirantes.

Le Bloc québécois, quant à lui, partage les mêmes positions néolibérales que le PLC. Ses politiques identitaires et anti-immigrations rebutent un grand nombre de personnes et ne sont pas très loin de celles des Conservateurs. De surcroît ce parti ne peut pas structurellement aspirer au pouvoir. Il se donne le rôle de paver la voie à l'Indépendance du Québec et travaille en tandem avec le Parti Québécois avec qui il partage les mêmes politiques néolibérales et identitaires. Paul St-Pierre Plamondon se voit probablement déjà premier ministre lorsqu'il a affirmé que le Canada a été un mauvais voisin avec les États-Unis : « le Canada et le Québec ont été « des mauvais voisins » sur la question de l'immigration illégale et le trafic de fentanyl à la frontière ».

L'offensive de Trump

Les barrières économiques qu'imposeront les politiques tarifaires de Trump seront reportées essentiellement sur la classe ouvrière, mais à cause de la dynamique du fonctionnement des industries et du rôle des gouvernements tant fédéral que provinciaux de se plier à la logique entrepreneuriale, ne pourront que conduire au rétrécissement de l'État social avec pour conséquence les coupures dans les services publics, la baisse des salaires et la détérioration des conditions de travail.

Si nous n'offrons pas d'alternative à la classe ouvrière, elle suivra forcément les forces néolibérales qui, de capitulation en capitulation devant la droite, désarmeront la classe ouvrière et la laisseront au final sans force de résistance face à la droite et l'extrême droite. C'est l'histoire du mouvement ouvrier.

Il n'y a aucune réponse rationnelle à donner à Trump, son discours n'est que de la falsification et de la propagande haineuse et dépolitisantes. Trump libère les criminels d'extrême droite et se débarrasse des personnes qui ont un sens démocratique.

Notre force repose sur la politisation, sur la mobilisation. Il faut s'adresser à la population et particulièrement aux progressistes américains et construire la mobilisation avec eux. Il faut aussi défaire le mythe du Canada, le beau pays qu'on doit défendre. Ce pays est contrôlé au final par les multinationales, les minières, les papetières, les compagnies forestières, les pétrolières et les consortiums financiers.

Le ministre fédéral des finances vient d'indiquer qu'il va falloir rendre l'industrie plus compétitive. Il envisage la possibilité de leur accorder des baisses d'impôts et de réduire la taille des services publics.

Le Conseil du Patronat du Québec (CPQ) propose quant à lui de réduire l'impôt sur les bénéfices des sociétés de 15 à 12%, voire 10 % au fédéral et de 11,5 à 10 % au provincial.

C'est la réponse patronale au fait que le président Trump veut abaisser le taux d'impôt fédéral américain de 21 à 15 %. Avec ces changements annoncés, le taux combiné moyen tournerait ainsi autour de 19,5 % pour les entreprises manufacturières. C'est beaucoup moins qu'au Québec qui afficherait un taux d'impôt des sociétés combiné fédéral-provincial à 26,5%. Les entreprises canadiennes devraient faire à une concurrence fiscale américaine et elles ne seraient plus à armes égales pour y faire face.

Les multinationales, ces intouchables qui échappent au financement

Selon les données de 2016 de Statistique Canada, moins de 1 % des entreprises au Canada étaient des multinationales. Bien qu'elles ne représentent qu'une petite partie du nombre total d'entreprises, les multinationales ont eu un impact important sur l'économie canadienne. Ces entreprises employaient un Canadien sur quatre et possédaient 67 % du total des actifs des secteurs financier et non financier. Les multinationales ont également généré plus de revenus et détenu plus d'actifs dans presque toutes les industries canadiennes. De plus, en tenant compte de leur taille, les multinationales étaient généralement plus profitables que les entreprises qui œuvrent uniquement sur le marché canadien. La majorité des filiales de multinationales canadiennes se trouvent aux États-Unis, où se trouvent 58.3 % de sociétés mères et 49,9 % des filiales.

Si on ne prend que l'exemple des compagnies minières, une enquête du vérificateur général Renaud Lachance conclut qu'entre 2002 et 2008, 14 entreprises minières exploitantes n'avaient versé aucune redevance. ( Voir, W. Sacher et A. Denault Paradis sous terre, Les Éditions Écosociété, 2012 )

Seul le combat paiera

Ce n'est que la pointe de l'iceberg. Il n'est pas difficile de comprendre que la pression de Trump, sans compter celle de l'extrême droite mondiale, aura pour conséquence une offensive en règle contre le mouvement ouvrier, contre les syndicats, les salaires, les conditions de travail. Cela aura un impact sur les services sociaux, comme la santé et l'éducation, qui sont déjà dans la mire de nos dirigeants politiques.

En outre, il n'y a pas de solution viable dans une consigne de vote aux élections fédérales qui arrivent bientôt. Le PLC est en remontée suite aux interventions de Justin Trudeau qui donnent l'impression d'un certain gain ou à une sorte de répit face à l'offensive de Trump. Cela peut sembler encourageant face à Poilievre qui voguait vers une victoire assurée. Mais, appuyer le PLC, c'est appuyer un parti néolibéral au service des entreprises et des multinationales, qui nous conduira inévitablement vers des offensives antiouvrières induites par les politiques de Trump.

En deuxième lieu, si nous ne construisons pas d'alternative de classe et si nous ne mettons pas de l'avant, l'analyse politique anticapitaliste qui y est liée, cela nous empêchera de construire une résistance (à tout le moins) et une analyse politique progressiste.

Le plus important dans la période antisociale qui s'annonce c'est de politiser, de construire des mouvements de résistance, d'allier les différents secteurs populaires afin de construire un rapport de force. Si nous n'allons pas dans cette direction, nous laisserons les leaders de l'establishment (les Libéraux en l'occurrence) prendre la direction du terrain politique et imposer leurs perspectives qui auront pour effet de nous désarmer, nous laissant sans perspective.

La crise capitaliste non résolue a engendré la montée de la droite et de l'extrême droite. Il n'y aura pas de solution cosmétique ou de moindre mal. Nous n'avons pas su, tant au niveau national qu'international, construire une alternative politique de gauche. La planète est maintenant en péril, la crise climatique ne cesse de s'accentuer.

Pour Trump, la question ne se pose simplement pas. Mais l'extrême droite européenne développe d'autres stratégies qui peuvent s'avérer dangereuses. Elle s'attaque désormais aux changements de mode de vie qu'imposent des politiques environnementales. Selon cette vision, les mesures de protection du climat seraient un moyen supplémentaire pour les élites urbaines d'avoir un plus grand contrôle sur la population. L'idée, c'est d'opposer le bon sens de la terre, du paysan, contre l'idéologie urbaine bobo. En France, par exemple, Marine Le Pen promet dans son programme d'abroger des segments entiers du Pacte vert, comme l'interdiction de la vente des véhicules neufs à essence en 2035 ou le règlement sur la restauration de la nature, et souhaite imposer un moratoire sur l'éolien et le solaire.

Cela pourrait devenir le cas au Québec également si nous n'y portons pas attention. En effet, Le Parti conservateur d'Éric Duhaime (PCQ) exige que le gouvernement du Québec fasse marche arrière sur l'interdiction de la vente de véhicules à essence dès 2035 et demande la mise en place d'un moratoire sur cet enjeu.

La division régions et centres urbains peut potentiellement se révéler un écueil, si nous ne trouvons pas de revendications unificatrices. Le plan de transport proposé par Québec solidaire lors de la campagne électorale de 2022 en était un exemple. Ce plan écologique proposait l'établissement d'un système de transport en commun unifié, interrégional et à faible coût. Ce plan a malheureusement été mis de côté. Son financement, proposé lors de la campagne électorale, ciblait la classe moyenne et ne visait pas les multinationales qui ne paient pas ou peu d'impôt. Cela a provoqué un tollé et stoppé la montée de QS.

Selon le dernier sondage, QS est passé en dessous du PCQ d'Éric Duhaime. Il est plus que temps de revenir à des revendications qui ciblent les vrais dirigeants de l'économie, les grandes entreprises, qui nous amènent dans un gouffre.

L'heure est maintenant pour nous de construire la mobilisation populaire, d'unir les forces de la gauche au niveau international afin de pouvoir poser une politique et un discours alternatif. La construction d'une alternative ouvrière pancanadienne respectant le droit à l'autodétermination du Québec et des nations autochtones doit être notre priorité.

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Femmes. Une révolution permanente

11 février, par La rédaction du Monde diplomatique — , ,
Manière de voir, n° 198, décembre 2024 - janvier 2025 Pour consultation cliquer ici Du Chili à l'Iran, des studios de Hollywood au procès des viols de Mazan, les femmes se (…)

Manière de voir, n° 198, décembre 2024 - janvier 2025

Pour consultation cliquer ici

Du Chili à l'Iran, des studios de Hollywood au procès des viols de Mazan, les femmes se soulèvent dans le monde entier. Ce nouveau Manière de voir, « Femmes. Une révolution permanente », explore la décennie #MeToo, ses déclinaisons et ses conséquences à l'échelle planétaire.

• De grandes plumes – Gisèle Halimi, Geneviève Fraisse, Mona Chollet… et des reportages au cœur des luttes
• Droit à l'avortement, congé-paternité, inégalités salariales : des cartes et des graphiques pour comparer les pays
• Une bande dessinée originale de Salomé Lahoche

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Échos de l’âme : un hommage à Jacques Roumain

11 février, par Chantal Ismé — , ,
Pour commémorer les 80 ans marquant la disparition en 1944 du penseur, homme politique, romancier et poète, Jacques Roumain, une série d'activités politique et culturelles ont (…)

Pour commémorer les 80 ans marquant la disparition en 1944 du penseur, homme politique, romancier et poète, Jacques Roumain, une série d'activités politique et culturelles ont été réalisées à Montréal. Il s'agissait de mettre en exergue l'apport tant sur la scène politique que dans la littérature Ayitienne de cet homme vaillant fauché trop tôt. Jacques Roumain est mort à 37 ans.

Sur le plan politique, la Coalition Haïtienne au Canada contre la Dictature en Haïti (CHCDH) en collaboration avec Yves Sanon a organisé au mois de décembre un cercle de lecture avec ses membres, sur son roman phare, Gouverneur de la Rosée et son œuvre politique Analyse schématique 32-24, co-écrit avec ses camarades dont Étienne Charlier et Christian Beaulieu. Une quarantaine de militantes et militants tant de la diaspora et en Ayiti ont revisité le programme de société proposé par Roumain et ses camarades, mais surtout la vision qui a influencé tout un pan de la gauche ayitienne pendant des décennies. L'exercice consistait de partir de ces premières pierres de la gauche en Ayiti pour analyser la situation actuelle dans un continuum.

Sur le plan culturel, trois événements complémentaires ont eu lieu dans le cadre du mois de l'histoire des noir.e.s.

Un plongeon dans la poésie de Jacques Roumain a été réalisé par l'organisme KEPKAA dans le cadre d'une conférence magistralement présentée par le musicologue Claude Dauphin le 2 février 2025 à la Maison de la Culture du Plateau Mont-Royal. Une exposition d'art visuel, Échos de l'âme, dont il sera question principalement ici, chapeauté par la Maison d'Haïti à la TOHU le 5 février 2025 et enfin un concert de musique classique Le deuil des roses qui s'effeuillent conçu par David Bontemps, le 6 février 2025 à la salle Pierre-Mercure de l'UQAM.

La Maison d'Haïti, dans le cadre de cette exposition unique a mis en lumière l'inspiration profonde que l'œuvre poétique de Jacques Roumain a pu exercer sur l'art pictural et visuel. Il s'agit d'une idée première de Ralph Maingrette qui a eu l'initiative de transposer sur des canevas et à travers des prismes de lumière, les mots phares et l'essence de l'œuvre poétique de Roumain. Les contacts avec les artistes ont permis, grâce au travail de l'équipe de la Maison d'Haïti (des membres : de son CA, de la direction et de son personnel) de poursuivre avec la démarche amorcée par Monsieur Maingrette, débouchant sur la poétique de ces oeuvres de très belle facture. Soulignons cependant le travail de Marjorie Villefranche et en particulier Dominique Mathon, véritable cheville ouvrière de la réalisation de cette exposition.

Le vernissage de Échos de l'âme, dont le discours d'introduction a été fait par l'autrice, a été honoré de la présence de la direction de la Tohu, Monsieur Benoit Mathieu, Directeur de l'Administration ; Madame Pascale Bélanger, Directrice de la Programmation ; Monsieur Luc Savard, Directeur adjoint de la programmation culturelle et loisirs ; Madame Éliane Bélec, Chargée des expositions et du patrimoine et son dynamique équipe dont l'infatigable Andras Csazar qui a travaillé de manière acharnée pour l'accrochage, pièce maîtresse dans la création de l'ambiance. La TOHU par son symbolisme est un cadre privilégié, idéal pour la concrétisation de cette aventure rejoignant la nature écologique, artistique et humaine des œuvres de Roumain.

Roumain personnage emblématique incontournable de la pensée Ayitienne a indéniablement une grande influence sur plusieurs générations de conceptrices et de concepteurs Aytien.ene.s et même au-delà. Son œuvre littéraire, roman et poésie ne saurait être dissociée de sa pensée et son engagement politique résolument de gauche. Et pour cause, Jacques Roumain fonde le Parti communiste Ayitien alors qu'il n'a que 27 ans.
Tout et toute artiste cherche à exprimer l'indicible, à capter cette essence fugace qui relie au monde, à l'histoire, aux racines. Jacques Roumain, à travers sa poésie vibrante et sa vision humaniste, a su, avec une rare puissance, transmettre cette même quête de sens et de beauté.

L'œuvre de Roumain trouve écho dans la lutte, la résilience, l'amour de la terre et des êtres (hommes et femmes), tout en nous invitant à revisiter notre condition humaine, à repenser nos rapports à la nature, à la société et à l'histoire. Ses mots résonnent, tantôt comme un appel à la solidarité, tantôt comme un cri de résistance face à l'injustice et à la domination. C'est ce que les artistes réuni.e.s dans cette exposition ont cherché à rendre lisible à travers leurs toiles, leurs photos : la richesse symbolique, l'intensité émotionnelle de l'œuvre de Roumain et la manière dont ses mots se transforment en formes et en couleurs.
Sans se consulter les sources d'inspirations s'entrecroisent et se chevauchent comme dans une quête mémorielle du départ pour mieux renaître. Intemporelle, la vision créatrice de Roumain imbriquée dans son analyse sociétale, révèle les mêmes iniquités qui perdurent sous d'autres formes.

Chaque tableau, chaque œuvre, chaque teinte, chaque touche de lumière présente dans cette exposition est un hommage à cet immense poète et à l'univers qu'il a su créer. En plongeant dans ses vers, ces artistes ont réussi à traduire une atmosphère, une émotion, une vision du monde. Ces œuvres ne sont pas seulement des représentations visuelles, mais bien des invitations à la réflexion, à la contemplation, à la découverte ou la redécouverte de l'œuvre de Jacques Roumain, sous un angle inédit et créatif.
Les titres évocateurs sont des imbrications d'un passé-présent pourtant non passéistes.
Cette exposition est une invitation à plonger dans cet univers de couleurs et de symboles, à laisser voguer l'imagination et vagabonder les sens. Ressentez, ressentez à travers ces images les échos de la poésie de Roumain.

Les artistes : Iris (Geneviève Lahens), Léonel Jules, Oski Awoyo (Olivier Vilaire), Peddy Multidor, NOU (Stéphane Martelly) et Valérie Gassien sont ceux et celles qui ont contribué à cette exposition et qui, par leur travail, ont permis de faire vivre cette rencontre entre la poésie, la peinture, la photographie. Il est souhaité que cette expérience les marquera, les interpellera, et suscitera le désir de découvrir ou de redécouvrir l'œuvre de Jacques Roumain sous un jour nouveau.

L'exposition a été rehaussée et enrichie par des présentoirs grâce au prêt généreux de fonds d'archives du directeur général du CIDHICA, Monsieur Frantz Voltaire. Ainsi des livres et des photos inédites de Jacques Roumain ont pu être déployés.

Le vernissage fut un moment où toutes les personnes présentes ont pu célébrer ensemble l'art, la poésie, l'engagement et la beauté intemporelle de l'œuvre de Jacques Roumain ainsi que le talent indéniable des artistes peintres et photographe.

Cette exposition se poursuit à la Tohu jusqu'au 9 mars 2025. Je vous invite donc à prendre le temps d'aller vous immerger dans chaque œuvre et surtout de laisser libre cours à vos émotions face à ces créations.

Chantal Ismé
Membre du CA de la Maison d'Haïti
Les photos proviennent du site de la Tohu : Échos de l'Âme : hommage à Jacques Roumain - Tohu

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Mois de l’histoire des Noirs : luttes antiracistes et luttes ouvrières, même combat !

11 février, par Félix Cauchy-Charest — , ,
Deux facettes de l'histoire du Québec passent trop souvent sous silence : l'apport du mouvement ouvrier dans le développement de la société contemporaine et la place des (…)

Deux facettes de l'histoire du Québec passent trop souvent sous silence : l'apport du mouvement ouvrier dans le développement de la société contemporaine et la place des personnes noires dans notre histoire collective1. Toutes les deux font pourtant partie intégrante de ce qui a mené au Québec d'aujourd'hui et elles sont intrinsèquement liées.

Tiré de Ma CSQ.

Les premiers syndicats noirs au Québec

Dès 1915, au cœur de notre histoire ouvrière, les porteurs de wagons-lits du Canadien Pacifique (CP), chargés de veiller au confort des passagers, fondent une mutuelle de protection. Celle-ci offre un soutien financier aux porteurs et à leur famille en cas de maladie ou de décès. Cette initiative est l'œuvre de Thomas Morgan O'Brien, un porteur noir montréalais. À une époque où 90 % des travailleurs noirs étaient employés par les chemins de fer, cette avancée représentait un changement majeur.

Malheureusement, à cette période, les statuts de plusieurs syndicats de métier limitaient l'adhésion aux hommes blancs. Heureusement, le mouvement syndical a considérablement évolué depuis. D'ailleurs, lors du conseil général de la CSQ de décembre 2024, les personnes déléguées de la CSQ ont voté en faveur de la création d'un comité de relations interculturelles.

Inspirations croisées : syndicalisme et luttes antiracistes

Aux États-Unis, le mouvement des droits civiques s'est inspiré du mouvement ouvrier et l'a inspiré et nourri en retour. Forcément, ils partagent les mêmes idéaux de justice, d'égalité et la conviction que chaque individu mérite dignité et respect.

Au Québec, la première vague d'immigration haïtienne, au début des années 1960, se compose principalement d'intellectuels et de membres de la classe moyenne haïtienne. Elle coïncide avec une période de forte effervescence dans les mouvements de gauche québécois. Trouvant des points communs dans les luttes de classe et l'anti-impérialisme, ces militantes et militants haïtiens participent certainement à façonner le syndicalisme que l'on connaît aujourd'hui et jettent les bases de la solidarité ouvrière internationale du mouvement ouvrier québécois.

Par la suite, la présence de nouveaux migrants haïtiens issus de la classe ouvrière dans des secteurs moins bien protégés, comme l'industrie du textile, le travail domestique ou encore l'industrie du taxi, place les projecteurs sur l'intersectionnalité entre le combat pour des conditions de travail justes et celui contre la discrimination et le racisme.

Cette intersectionnalité s'incarne parfaitement dans la grève des chauffeurs de taxi haïtiens de 1983, menée par l'Association haïtienne des travailleurs du taxi, qui protestent contre la ségrégation raciale dans l'industrie et les conditions de travail injustes des chauffeurs.

Cette lutte contribue à désinvisibiliser le racisme dans l'espace public et favorise une prise de conscience à long terme de l'importance de militer pour une société québécoise plus inclusive.

L'apport des organisations communautaires et des militantes noires

Il ne faut pas non plus passer sous silence la vigueur et la contribution des organismes de la communauté haïtienne, dirigés la plupart du temps par des femmes, au mouvement communautaire québécois : éducation populaire, organisation de défense des travailleuses domestiques, luttes féministes, etc. »

La contribution des militantes et militants noirs trouve encore écho dans le débat public aujourd'hui et sert de pilier à de nombreuses luttes qui demeurent d'actualité. Les valeurs de solidarité, d'égalité et de justice qui animent le mouvement syndical doivent continuer d'être mises de l'avant dans la lutte contre le racisme et les discriminations.

En ce Mois de l'histoire des Noirs, prenons le temps de reconnaître l'héritage de ces combats et de réfléchir à la façon dont les syndicats peuvent encore aujourd'hui être des acteurs du changement pour une société québécoise plus inclusive et équitable.

1- Soulignons que des 4 200 esclaves recensés en Nouvelle-France dans les années 1600, 1 400 étaient des personnes noires. Les Britanniques en ont fait venir plus de 3 000 après la conquête. Ces esclaves étaient exploités dans les hôtels et les tavernes, dans les organisations religieuses, chez des marchands et même au sein de l'armée. Ce n'est qu'en 1834 que le gouvernement britannique a aboli la pratique.

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« Casser les syndicats »

11 février, par Martin Gallié, Elsa Galerand, Francis Dupuis-Déri — , ,
Il y a beaucoup de monde, ému et en colère, à l'Assemblée générale mensuelle du Conseil Central du Montréal Métropolitain CSN, en ce mercredi 29 janvier 2025. Cela fait huit (…)

Il y a beaucoup de monde, ému et en colère, à l'Assemblée générale mensuelle du Conseil Central du Montréal Métropolitain CSN, en ce mercredi 29 janvier 2025. Cela fait huit ans, jour pour jour, qu'au cours de l'attaque terroriste à la Mosquée de Québec, six personnes ont été assassinées par un militant d'extrême droite.

6 février 2025

Donald Trump vient d'être réinvesti à la présidence des États-Unis. Il a déjà annoncé son plan d'annexion du Canada ; lancé, par décrets, sa chasse aux « millions et millions d'étrangers criminels » et coupé des milliards de dollars d'aides publiques destinées aux pauvres, aux femmes, aux minorités LBGTQI+, aux personnes handicapées, aux États-unis comme dans le reste du monde. Il s'est aussi ouvertement attaqué aux travailleurs et aux travailleuses, en particulier aux fonctionnaires du gouvernement fédéral. Ses complices, des multimilliardaires comme lui et le grand patronat jubilent et s'accaparent davantage encore les ressources publiques.

Nombreux·ses sont celles et ceux qui se demandent si le Québec va résister face à cette vague réactionnaire, raciste et antisyndicale. Le Premier ministre du Québec continue de cibler les étranger·ères pour justifier son incompétence et l'effondrement des services publics. Et alors qu'Amazon vient de licencier 4 500 personnes pour faire comprendre à tous et toutes ce qu'il en coûte de tenter de se syndiquer, François Legault déclare « [u]n, le Canadien a encore gagné. Deux, je n'ai pas bu de jus d'orange ce matin ». Enfin, comme le rappelle la Présidente du CCMM-CSN dans son mot d'ouverture, les souverainistes du Parti Québécois appuient ouvertement la politique de Trump en matière d'immigration. Et dans ce contexte des plus décourageants, la gauche est complètement inaudible.

Pourtant, la grande salle du siège social de la deuxième centrale syndicale du Québec est pleine, à 18h. C'est la première fois depuis plus d'un an. 80, peut-être même 90 personnes, dont une dizaine debout appuyées sur les murs, sont présentes. Et l'ambiance est émouvante, chaleureuse et bien plus dynamique que lors des Assemblées de l'an passé. Cette fois-ci, à 21h30, la salle, encore remplie, scande « Solidarité ! Solidarité ! Solidarité ! ». Après plus de trois heures et de nombreuses interventions de travailleurs et travailleuses « crinqué·es », on vibre encore au son des « On lâchera pas ! On lâchera rien » ; « On es-tu pépés ! ouais ! ouais ! ». et on se sent porté par diverses manifestations de solidarité « on est avec vous », « lâchez pas ; il peut pas rouler la business sans vous ! » On a chaud au coeur, dans cette assemblée en colère, prête à faire front contre un patronat qui parait plus déterminé que jamais.

Car les travailleurs et les travailleuses en lutte en ont beaucoup d'« écoeurentries patronales » à partager aujourd'hui. Ce patronat québécois se montre tout aussi décomplexé et déterminé que celui de nos voisin·es à bloquer les salaires, augmenter le temps de travail, supprimer le paiement des heures supplémentaires, détruire les pensions de retraite, se retirer du financement des assurances collectives, dresser les travailleurs et travailleuses les unes contre les autres, celles et ceux qui ont la nationalité canadienne contre les migrant·es.

Difficile de nier l'attaque frontale du patronat contre « l'exception québécoise » et ses quelque 39% de syndiqué·es. Comme le souligne une vice-présidente du CCMM-CSN, comment ne pas voir une volonté de « casser les syndicats » et de briser, par là, l'un des derniers remparts contre la droite dure, sinon extrême, au Québec.

Lock out contre 600 travailleuses et travailleurs à l'Hôtel Reine Elisabeth de Montréal – 2 mois .

Une quinzaine de représentant·es des travailleuses et des travailleurs de l'Hôtel Reine Elizabeth s'approchent les premier·es de la tribune. Comme à l'accoutumée, la salle se lève et les applaudit. Une porte-parole du syndicat, connue pour sa longue expérience militante, notamment au sein du CCMM, prend la parole, visiblement très émue.

« Je n'ai jamais cru que ce serait mon tour, que je serais ici, dans cette position.
J'ai participé à de nombreuses instances à la CSN, j'ai longtemps participé au CCMM et le moment le plus touchant pour moi c'était toujours quand j'entendais les grévistes et les lockouté·es ; je ne supportais pas... Mais je n'ai jamais cru que ce serait un jour mon tour. Aujourd'hui, ça fait 79 jours qu'on a été mis·es en lock out ».

Tandis que de nombreux hôtels ont signé des conventions collectives depuis le début des négociations coordonnées que mène la CSN dans le secteur de l'hôtellerie, la direction du Reine Elisabeth ne veut rien lâcher pour améliorer les conditions de travail des préposées aux chambres. Au contraire, elle veut faire un exemple contre un syndicat qui a conquis, en 40 ans de luttes et à coup de nombreuses grèves, l'une des conventions collectives les plus « enviables… peut-être la meilleure en Amérique du Nord », explique un intervenant au micro. C'est ce que « l'employeur ne supporte pas » : « il a congédié la secrétaire du syndicat », et « il mène une guerre personnelle en multipliant les suspensions ».

Et cet employeur, c'est la compagnie immobilière Ivanhoé Cambridge qui appartient à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), soit le « mandataire de l'État » qui gère les cotisations de retraites des Québécois·es . En fait, « de vrais voyous », selon un conseiller syndical : « [s]i vous saviez le nombre de briseurs de grève qu'ils mobilisent, ils se foutent des lois ces gens-là, même si c'est public ».

Désormais, le « modèle d'affaire » c'est le recours à des agences de placement. Mais « les agences de placement c'est un cancer, ça crève les gens » ajoute un autre travailleur de l'hôtellerie au micro. « Les agences ce sont des briseurs de grève ; ils travaillent dans l'hôtel en ce moment » rapporte un autre. « Les agences, nous on n'en veut pas et c'est pour ça qu'on est dehors, c'est pour ça qu'on est sur les lignes de piquetage » explique une gréviste.

Et la porte-parole du Reine Elisabeth de conclure :

« Je veux souligner quelque chose qui m'a touchée… le point qui me touche le plus c'est l'immigration. Je suis née dans un petit pays, (…), je suis arrivée au Québec dans les années 1980 d'un petit pays. Et dès les premiers pas, malgré l'hiver que je déteste, j'ai aimé ce pays. Mais aujourd'hui, le phénomène populiste me fait peur ; ma crainte c'est que j'entends au sein même de mon syndicat des discours qui sont très semblables à ceux de Trump … et je voulais le souligner aujourd'hui ».

Une résolution est alors adoptée à l'unanimité, appelant à la solidarité et aux dons.

Lock out des 50 salariés de Demix/Béton provincial - 2 mois

Deux représentants de l'entreprise Demix s'approchent à leur tour de la tribune. Ils sont en lock out depuis le 5 décembre 2024. De nouveau, la salle se lève et scande « Solidarité ! »

L'un des deux représentants, encore ému par les interventions précédentes, nous dit :

« Je suis intimidé par les grosses foules… Face au patron, c'est pas pareil ».

Son nouveau patron, c'est un « oligarque de Matane, André Bélanger », propriétaire de Béton Provincial, la plus importante entreprise canadienne dans l'industrie du béton. (2600 employés, 115 usines, une centaine de carrières et de gravières et une cimenterie…). Demix est l'une de ses usines, basée à Longueuil. Le syndicat représente une cinquantaine d'employés, principalement des chauffeurs de bétonneuse, tous des hommes. En avril 2024, Béton Provincial a acquis l'entreprise. En septembre de la même année, la convention collective est arrivée à échéance.

Après avoir fait trainer les négociations, le nouvel employeur a finalement « offert » aux travailleurs : 1) d'abolir sa contribution au REER collectif, soit une diminution de 5.5% du salaire ; 2) de réduire sa contribution aux assurances collectives (de 100% à 50%) ; 3) une convention de sept ans et des augmentations salariales de 0% les deux premières années et de 2% les suivantes ; 4) une prime de 0.5$ de l'heure ; et, pour finir et couronner le tout, 5) de « couper le temps supplémentaire et de supprimer le temps double le dimanche. Et ils veulent ramener le temps de travail sur 6 jours alors que c'était de cinq jours jusqu'à présent. C'est un recul de plus de 20 ans en arrière ».
Fin novembre, le syndicat s'est doté d'un mandat de grève :

« on s'était voté 10 jours de grève à prendre de manière aléatoire. Finalement, on n'a pas pris une seule journée (…) Le 5 décembre, je suis rentré chez nous à 7h du soir, j'étais avec ma femme. Pan. Courriel : lock out ».

Ainsi, juste avant les fêtes, « l'employeur nous prive de l'Assurance-chômage… on se retrouve sans rien ; il y a des gars avec leurs familles, y pouvaient plus suivre, ils ont trouvé une autre job… mais nous on lâche pas, on tient la ligne ». Le représentant poursuit et raconte :

« quelques jours après le déclenchement du lock out, juste avant Noël, on a tous reçu une lettre d'André Bélanger, qui disait qu'il offrait une dinde pour Noël à tous les employés. Mais on n'en voulait pas d'sa criss de dinde ! ».

Un conseiller syndical intervient : la Convention chez Demix est l'une des meilleures dans le secteur du béton. Selon lui :

« c'est pour ça que l'employeur veut faire un exemple il veut les casser, c'est ça le plan de match. Mais y va pas les casser…. Le patron, il a oublié que ce sont des gars qui se lèvent à tous les jours à 4 h du matin pour livrer le béton. Il a pas compris qu'il avait tous ces gars-là… ce sont des tough, que sur les lignes de piquetage ça y va et qu'y aura pas de recul. Quand les gars vont retourner dans le camion, la tête haute, c'est le boss qui va dire “pardon monsieur” ».

Une résolution est adoptée à l'unanimité, appelant à la solidarité et aux dons.

Mobilisation dans les Centres de la petites enfance – 13 000 employées

Une représentante syndicale, seule, s'approche de la tribune. Elle est membre du CPE de Montréal-Laval. On entend le « so-so-so » de la salle.

Elle nous explique que les travailleuses des CPE sont sans convention collective depuis plus d'un an et demi, soit depuis le 1er avril 2023. Le gouvernement fait délibérément trainer les négociations. Les 13 000 travailleuses affiliées à la CSN, 80% des employées dans le secteur, revendiquent principalement un allègement de la charge de travail, une augmentation salariale et des primes pour les régions éloignées.

Pour le moment, les travailleuses ont adopté 5 jours de grève à prendre au moment jugé opportun. Une seule journée de grève a été prise, à ce jour, le 23 janvier 2025.
« Il y a eu une forte couverture médiatique… mais le patron n'a pas modifié son angle d'attaque… Il est sur l'offre initiale ». En revanche, le gouvernement Legault a offert des « avancées à la CSQ », l'autre centrale syndicale présente dans le secteur, « comme quoi… il veut casser la CSN ».

Il n'a rien changé non plus dans son attitude, paternaliste, arrogante et méprisante :

« Au niveau du ton, à la table de négociation, ils commencent par dire « « au moins on ne vous propose pas de recul ; on pourrait vous donner rien », c'est cette ambiance-là à la table de négo ».

Une deuxième journée de grève a été prise le 6 février . À suivre donc…

Une résolution de solidarité et d'appel aux dons est votée à l'unanimité : « solidarité ! solidarité ! solidarité ! ».

Amazon. 4 500 emplois supprimés à la suite d'une campagne de syndicalisation.

Finalement, cinq travailleurs d'Amazon montent à la tribune. Là encore la salle se lève et plus fort encore que les fois précédentes : « Solidarité ! Solidarité ! Solidarité ! ».

L'un des représentants prend la parole, il a l'air jeune, très ému, sa voix tremble :

« Merci tout le monde. Merci pour la solidarité. Beaucoup d'émotions… Mercredi, je me suis réveillé comme 3 500 personnes, en apprenant qu'Amazon nous crissait dehors et attaquait le mouvement syndical québécois au grand complet. C'est pas vrai que c'est 1 700 personnes. Avec les osties de sous-traitants, c'est 3 500 personnes à la rue ».

Il s'arrête. La salle l'applaudit. Il reprend :

« S'cusez.… Amazon ferme parce que 250 employé·es ont décidé de se tenir debout, de simplement s'organiser dans un entrepôt où il y avait un accident par jour, qui sont pas déclarés. Anyway ! On voulait plus se faire traiter comme des machines, on voulait le respect… juste ça c'était inacceptable pour cette multinationale-là… »

La salle applaudit :

« Malgré les larmes que j'essaie de retenir, l'heure n'est pas aux larmes, l'heure est au combat. À la chope je me fais demander tous les jours : C'est quand la manif, c'est quand la grève ? On va pas se laisser faire… on va se mobiliser ».

Et enfin, il appelle au boycott mais surtout à l'unité des luttes et des syndicats :

« Je salue le boycott… En fait, je vous encourage à appuyer toutes les mobilisations pour résister à la tyrannie… c'est pas vrai qu'au Québec on va casser le mouvement syndical. Arrêtez d'acheter à ces criss de tabarnac-là. Ultimement, si on veut gagner contre ces criss de tabarnac-là, contre ces osties d'Américains-là… s'cusez, mais c'est ensemble, tous les syndicats ensemble…. Alors oui, prenez vos actions individuelles mais c'est le mouvement ensemble qui a la balance du pouvoir… Icit, on boycott et j'espère vous voir bientôt dans la rue avec nous ».

Les interventions qui suivent saluent le courage des travailleurs et des travailleuses, soulignent le caractère historique de cette lutte en Amérique du Nord. « Avec 3 500 personnes mises à pied pour empêcher la syndicalisation… on n'est pas capables de trouver de précédent dans l'histoire du Québec », lance un conseiller syndical. Dans tous les cas, cette lutte va marquer le mouvement ouvrier, « peut-être même qu'elle sera dans la même page d'histoire que l'emprisonnement des dirigeants syndicaux » en 1972. Effectivement, « Installer le premier syndicat dans Amazon et négocier une Convention, ça demandait un courage exceptionnel ! ». Alors, « On va leur crisser une volée et on va les sortir du Québec. Solidarité ».

D'autres intervenant·es appellent à soutenir le boycott, à lancer des procédures judiciaires contre Amazon et à augmenter les dons d'appui au Centre des travailleurs et travailleuses migrantes (CTTI), comme au Mouvement action chômage (MAC) qui sont en première ligne pour répondre aux besoins des licencié·es.

Enfin, une conseillère syndicale raconte, au sujet de la première assemblée syndicale chez Amazon.

« À l'assemblée, les gens avaient peur. Ils avaient très peur. Il y avait des femmes… Il y avait plein d'immigrantes. Je suis allée voir l'une d'elles… et la première chose qu'elle m'a dite : « Mais le boss, il va nous mettre dehors ! ». Et moi je lui ai répondu « mais non ! On a des lois au Québec… ».

Une résolution est adoptée qui appelle au boycott de la multinationale et qui accorde un don de 7 500 dollars au CTTI et au MAC .

Une manifestation contre Amazon est prévue à Montréal le samedi 15 février.

Francis Dupuis-Déri, membre du SPUQ
Elsa Galerand, membre du SPUQ
Martin Gallié, membre du SPUQ

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Le texte a été rédigé à partir des notes prises par MG lors du CCMM-CSN

Amazon abandonne le Québec, voulant frapper fort et créer une onde de choc parmi les travailleurs du monde entier

11 février, par Mostafa Henaway — , ,
Le géant du monde des affaires craignait une « percée » après que des travailleurs québécois se soient syndiqués, mettant à leur portée la première convention collective au (…)

Le géant du monde des affaires craignait une « percée » après que des travailleurs québécois se soient syndiqués, mettant à leur portée la première convention collective au monde.

Tiré de The Breach

traduction Johan Wallengren
Jeudi 23 janvier 2025 / DE : Mostafa Henaway

Amazon a un message pour son armée de travailleurs précaires dans le monde entier : osez vous syndiquer et vous serez punis.

Après avoir échoué à faire dérailler une campagne de syndicalisation historique au Québec, Amazon met maintenant un terme à toutes ses activités dans cette province, privant près de 2000 travailleurs de leur emploi.

Cette contre-offensive est une tentative éhontée de punir les travailleurs de la province qui ont failli accomplir ce que beaucoup de gens considéraient impossible. En mai 2024, environ 300 travailleurs de l'entrepôt de Laval ont réussi à se syndiquer - une première historique au Canada -, et ce malgré deux années de tactiques antisyndicales, d'intimidation et de surveillance. Qui plus est, ils étaient sur le point de devenir les premiers travailleurs d'Amazon au monde à obtenir une convention collective.

Pour Jeff Bezos, le patron d'Amazon, il ne s'agit pas seulement d'écraser les travailleurs de Laval et leur syndicat, mais de s'attaquer directement à l'ensemble de la classe ouvrière mondiale. Ce précédent s'inscrit dans une offensive de plus en plus vaste des entreprises et de la classe capitaliste, qui s'efforcent de remettre les travailleurs à leur place en recourant à des mesures d'austérité et en lançant des attaques contre les mouvements de revendication ouvrière.
Ici, au Québec, le déménagement d'Amazon laisse 1700 travailleurs - dont beaucoup d'immigrants, d'étudiants internationaux et de personnes avec des familles - sans emploi dans un contexte de hausse du chômage et d'aggravation de la crise du coût de la vie.

Pendant ce temps, l'oligarque de la technologie Bezos continue d'amasser une richesse inimaginable, sa fortune dépassant aujourd'hui les 200 milliards de dollars.

Amazon redoutait une « percée » pour les travailleurs du Québec

La présence d'Amazon au Québec a été brève, mais marquée de bout en bout par un mouvement de résistance des travailleurs.

L'entreprise a ouvert son premier centre d'exécution des commandes à Lachine en 2020 et a rapidement essaimé en ouvrant sept installations dans différentes régions du Québec. À l'hiver 2022, les travailleurs de l'entrepôt de Lachine ont lancé la première campagne prolongée pour améliorer les conditions de travail. Amazon a réagi en recourant à des tactiques antisyndicales, notamment en faisant pression sur les travailleurs pour qu'ils ne signent pas de cartes syndicales. Ces manœuvres ont par la suite été déclarées illégales dans un jugement du tribunal du travail du Québec.
La campagne menée par le groupe de travailleurs n'a pas abouti à l'accréditation syndicale, mais en mai 2024, il y a eu une percée dans l'installation de Laval - le premier entrepôt d'Amazon à avoir réussi à se syndiquer au Québec et au Canada.
Cette victoire a été obtenue de haute lutte. En tant qu'organisateur syndical ayant travaillé un certain temps comme travailleur infiltré dans cet entrepôt, j'ai vu de mes propres yeux l'exploitation, la surveillance et l'incessante intimidation antisyndicale d'Amazon à l'œuvre.

Le cas de Laval se différencie des autres campagnes de syndicalisation menées en différents endroits du monde par une disposition du code du travail québécois qui n'a pas son équivalent ailleurs : à partir du moment où un syndicat existe, l'employeur est légalement tenu de conclure une première convention collective avec celui-ci. Si les négociations entre les parties achoppent, le différend est soumis à l'arbitrage.

Les travailleurs de Laval étaient donc dotés d'un outil puissant non disponible dans d'autres territoires.
Aux États-Unis, par exemple, les travailleurs d'Amazon à Staten Island - dont la victoire syndicale historique a inspiré les travailleurs du monde entier - restent sans contrat, et cela fait plus de deux ans que cela dure. Amazon n'a même pas daigné se présenter à la table des négociations.

Une première convention collective à Laval aurait représenté une avancée majeure pour les travailleurs d'Amazon du monde entier et une potentielle source d'inspiration pour plus de 1,5 million d'employés. Cela aurait créé un précédent que l'entreprise cherchait désespérément à éviter.

Amazon a déclaré que sa décision de quitter le Québec était motivée par les coûts et la rentabilité, et non par l'activité syndicale. Or, cette société a depuis longtemps fait passer sa position dominante sur le marché avant ses bénéfices. Et elle a toujours été encline à exercer ce pouvoir monopolistique pour écraser les droits des travailleurs, même si cela impliquait de sacrifier des gains financiers à court terme.

Les véritables motifs de la récente manifestation d'intentions du géant sont clairs : il s'agit d'une campagne agressive conçue pour « frapper fort et créer une onde choc » en vue non seulement de mettre au pas les travailleurs d'ici, mais également d'envoyer un message intimidant aux travailleurs de l'ensemble de ses installations dans le monde.

Les mesures prises par Amazon au Québec, annoncées deux jours seulement après que Jeff Bezos et d'autres oligarques du secteur technologique se sont tenus aux côtés de Donald Trump lors de son investiture, sont emblématiques d'une tendance dangereuse.

Alors que des pans de plus en plus importants de notre économie sont contrôlés par de riches entreprises et les oligarques qui les dirigent, c'est l'avenir de notre démocratie qui se joue dans la lutte pour les droits des travailleurs.
Notre solidarité et notre capacité de réaction pèsent lourd dans la balance actuellement. Ce n'est pas le combat de quelques-uns, mais une lutte pour chacun de nous.

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