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Pendant que les manipulateurs de l’opinion jappent, la FIQ maintient le cap !

27 août 2024, par Julie Bouchard — , , ,
Depuis le lundi 12 août, jour où nous avons marqué notre 500e jour sans contrat de travail en appelant le gouvernement à réagir, il semble que nous ayons suscité l'intérêt de (…)

Depuis le lundi 12 août, jour où nous avons marqué notre 500e jour sans contrat de travail en appelant le gouvernement à réagir, il semble que nous ayons suscité l'intérêt de divers charlatans de l'opinion ! Certaines déclarations ont provoqué une vive réaction de notre part, ainsi que de la vôtre. Les chroniques d'opinion ont leurs limites, surtout lorsqu'elles ne font qu'attiser un conflit déjà difficile. Il est grand temps que les paroles cèdent la place à des actions concrètes.

Chose certaine, nous ne nous laisserons pas ébranler par des discours cherchant à nous dépeindre comme intransigeantes ou capricieuses. Nos revendications sont légitimes, basées sur des faits concrets et une compréhension approfondie des enjeux actuels du réseau public, et non sur des opinions ou des interprétations biaisées.

D'ailleurs, affirmer que la FIQ n'est pas disponible pour négocier ou qu'elle entrave l'aide aux régions éloignées est non seulement complètement faux, mais également une manœuvre cynique de la part d'un gouvernement incapable de reconnaître ses propres échecs. La réalité, c'est que la FIQ est toujours prête à engager des discussions constructives avec le gouvernement, à tout moment, dans l'intérêt de ses membres et pour le bien du réseau de la santé publique. Il est grand temps que le gouvernement cesse de chercher des boucs émissaires et fasse preuve de responsabilité.

Cependant, si nous devons recourir à des moyens de pression cet automne pour nous faire entendre, nous n'hésiterons pas à le faire. Notre disponibilité à négocier ne signifie pas que nous accepterons des compromis qui mettraient en péril la qualité des soins, nos conditions de travail et notre expertise. Notre force repose sur notre unité et notre détermination. Gardons à l'esprit que notre combat se joue à la table de négociation, et c'est là que nous devons concentrer tous nos efforts.

Bientôt, les vents souffleront fort, très fort. Nous déploierons des moyens de pression qui perturberont et dérangeront pour soutenir nos revendications et faire avancer la négociation. Les provocations externes, aussi bruyantes soient-elles, ne doivent en aucun cas nous détourner de notre objectif.

Vous avez raison d'être indignées par des affirmations inexactes, injustes et dénigrantes envers nos professions. Je suis constamment préoccupée par la propagation d'informations ou de propos présentés comme des vérités absolues, souvent décontextualisés et incomplets. Bien que j'éprouve une forte envie de réagir et de corriger ces erreurs, je sais que ce n'est pas toujours la meilleure stratégie.

C'est pourquoi je tiens à clarifier, en tant que présidente de notre organisation, je choisis de ne pas m'engager dans une guerre de mots avec des intervenants extérieurs à notre négociation. Tout d'abord, il est essentiel de rappeler que notre priorité absolue reste et restera toujours la défense des conditions de travail des professionnelles en soins et, par extension, la qualité des soins offerts aux patient-e-s.

Je continuerai toujours à porter votre voix pour dénoncer ceux qui nous accusent d'être responsables de notre propre détresse. Nous faisons face à des conditions de travail extrêmement difficiles, aggravées par des années de décisions politiques qui ont compromis la sécurité des soins. Il est odieux de nous faire porter le chapeau pour une situation que nous n'avons pas créée.

Nous devons concentrer toute notre énergie sur cette négociation cruciale avec le gouvernement. Certaines batailles ne méritent même pas que nous y participions. Engager des conflits inutiles ne ferait qu'affaiblir notre réputation et compromettre nos négociations en cours, surtout lorsqu'il semble que la provocation soit l'objectif. Nous sommes au-dessus de ces petites manœuvres politiques. Notre priorité est d'obtenir un contrat de travail équitable, qui reflète la réalité et l'importance de notre expertise en tant qu'infirmière, infirmière auxiliaire, inhalothérapeute et perfusionniste clinique.

Chacune de nos interventions publiques est scrutée à la loupe, tant par le gouvernement que par des mercenaires du commentariat qui cherchent à affaiblir notre cause en exploitant leur tribune médiatique. Nous devons rester dignes et concentrées, car notre cause dépasse de loin leurs jeux électoralistes. Restons concentrées sur l'essentiel pour ne pas tomber dans le piège des débats stériles qui détournent l'attention des véritables problèmes à résoudre. Pendant que nous perdons du temps à réagir à ces distractions, le gouvernement, lui, s'offre un moment de répit. Ne leur offrons pas ce luxe. Maintenons la pression pour régler notre négociation.

Ce n'est pas en menant une guerre de mots dans les médias que nous atteindrons nos buts. Nos interventions médiatiques ont pour but de mettre en lumière nos revendications, de porter la voix de nos membres et d'informer la population, qui nous soutient, sur les raisons de notre lutte pour de meilleures conditions de travail et des soins de santé de qualité.

Je nous encourage donc à rester déterminées et à garder confiance en notre démarche. La force de notre cause repose sur la justesse de nos revendications et sur la solidarité de notre mouvement. Gardons ce cap !

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Le réseau de santé public sacrifié sur l’autel de l’indécision, juge la FIQ

27 août 2024, par Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) — , ,
Montréal, le 23 août 2024 — En repoussant à mars 2025 l'échéance pour abolir le recours à la main-d'œuvre indépendante dans les grands centres, la Fédération (…)

Montréal, le 23 août 2024 — En repoussant à mars 2025 l'échéance pour abolir le recours à la main-d'œuvre indépendante dans les grands centres, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec–FIQ estime que le ministre de la Santé, Christian Dubé, vient de prouver, une fois de plus, son incapacité à livrer les réformes qu'il clame haut et fort.

23 août 2024 | communiqué de la FIQ
https://www.fiqsante.qc.ca/le-reseau-de-sante-public-sacrifie-sur-lautel-de-lindecision-juge-la-fiq/

« La FIQ ne peut rester silencieuse face à ce recul qui trahit les engagements pris par le gouvernement. Rappelons que la première échéance fixée au 20 octobre 2024 devait marquer un tournant décisif pour enrayer cette dépendance toxique aux agences de placement. Il a été incapable de créer les meilleures conditions pour offrir des soins de qualité à la population et des conditions pour attirer, notamment en région, des professionnelles en soins. Aujourd'hui, les agences de placement sortent malheureusement gagnantes », exprime Julie Bouchard, présidente de la FIQ.

Depuis le début, la FIQ avertit que sans une amélioration des conditions de travail des professionnelles en soins fidèles au réseau public, celles qui travaillent pour les agences ne voudront pas revenir dans le réseau public. Le ministre Dubé a sous-estimé l'importance de mettre en place des moyens efficaces d'attraction, de rétention et de reconnaissance.

« Il est tout simplement honteux de faire porter l'odieux de ce report à la FIQ. Nous avons salué et soutenu l'objectif de se débarrasser de la MOI puisqu'elle représente une bataille que nous menons depuis des années. Il n'y a qu'une seule façon de ramener les professionnelles en soins des agences dans le réseau : améliorer les conditions de travail du réseau. Mais lorsque le gouvernement s'entête à ne pas vouloir mettre en place des solutions gagnantes pour y parvenir, les seules personnes responsables de cet échec sont celles qui prennent les décisions. », ajoute Julie Bouchard

Depuis trop longtemps, les professionnelles en soins alertent sur les effets néfastes de la main-d'œuvre indépendante : une rupture de la continuité des soins, une explosion des coûts et un épuisement exacerbé des équipes régulières qui gangrènent leur stabilité. Ce report n'est rien d'autre qu'un pansement sur une plaie béante, qui ne fera que prolonger l'hémorragie.

« Le report de cette échéance démontre l'incapacité du ministre Dubé à instaurer des conditions attractives et rétentives, surtout dans les régions éloignées, qui subissent les conséquences de ce recul. Bien que nous partagions le même objectif que le ministre — se libérer de la dépendance à la main-d'œuvre indépendante — il est aujourd'hui évident qu'il a échoué à créer les conditions nécessaires pour y parvenir. En repoussant cette échéance, le ministre Dubé révèle le manque de substance de ses ambitions. Si le gouvernement souhaite réellement améliorer les conditions de travail pour ramener le personnel des agences dans le réseau public, la FIQ sera prête à collaborer », conclut la présidente de la FIQ, Julie Bouchard.

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Programme des travailleurs étrangers temporaires : Le gouvernement Legault silencieux sur cette forme d’esclavage moderne

27 août 2024, par Confédération des syndicats nationaux (CSN) — , ,
François Legault annonçait ces derniers jours un gel de six mois pour l'octroi de permis de travail dans le cadre du volet à bas salaire du Programme des travailleurs étrangers (…)

François Legault annonçait ces derniers jours un gel de six mois pour l'octroi de permis de travail dans le cadre du volet à bas salaire du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) dans la région de Montréal. Disons les choses comme elles sont : cette annonce ne réglera rien.

François Legault annonçait ces derniers jours un gel de six mois pour l'octroi de permis de travail dans le cadre du volet à bas salaire du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) dans la région de Montréal. Disons les choses comme elles sont : cette annonce ne réglera rien.

Et peut-on vraiment tenir 3500 travailleuses et travailleurs œuvrant dans des conditions extrêmement précaires responsables de la crise de logement, du manque de personnel et de ressources dans les services publics et de la précarisation du français à Montréal, comme l'avance notre premier ministre ?

En effet, cette mesure ne vise que 3500 travailleurs temporaires puisque plusieurs secteurs, dont la santé, l'éducation et la construction, sont exemptés par ce gel. De plus, à la demande du Québec, depuis 2021, dans une majorité des professions qui ne seront pas touchées par ce gel, les employeurs du Québec n'ont aucune obligation de recruter localement ni aucun plafond de recrutement de travailleurs issus du PTET. Ainsi, un employeur pourrait recruter toute sa main-d'œuvre par le biais de ce programme !

Lors de son annonce, M. Legault n'a pas mentionné une seule fois les conditions de travail trop souvent déplorables auxquelles ces personnes font face.

Or, la situation actuelle est absolument intenable. Le nombre de travailleurs étrangers temporaires a explosé dans les dernières années. Il s'agit d'une main-d'œuvre vulnérable qui ne peut pratiquement pas faire valoir ses droits, des personnes vivant dans la menace constante de perdre leur permis de travail et d'être ainsi expulsé vers leur pays d'origine.

L'ONU sonne l'alarme
Le rapporteur spécial des Nations unies sur les formes contemporaines d'esclavage, Tomoya Obokata, est récemment venu à la conclusion que le PTET « alimente les formes contemporaines d'esclavage, car il institutionnalise les asymétries de pouvoir qui favorisent les employeurs et empêchent les travailleurs d'exercer leurs droits ». Le Conseil du patronat (CPQ) tente de minimiser le problème en soutenant dans une lettre ouverte publiée ces dernières semaines que les « situations conflictuelles demeurent une minorité au sein de l'ensemble des employeurs qui recourent à de la main-d'œuvre étrangère ».

Pourtant, les problèmes documentés par l'envoyé de l'ONU sont nombreux : périodes de pause limitées ; activités sortant du cadre contractuel ; horaires de travail excessifs ; versement partiel et confiscation de salaires ; violences physiques, psychologiques et verbales (voire exploitation et violence sexuelle dans certains cas chez les femmes) ; absence d'équipements de protection individuelle, notamment dans des conditions dangereuses ; confiscation de documents ; réduction arbitraire des heures de travail ; fraude, etc.

En somme, je ne dis pas que tous les employeurs sont mauvais, mais plutôt que le problème est systémique. L'organisme Justice Pro Bono affirmait d'ailleurs il y a quelques mois être submergé d'appels. C'est la même chose à la CSN.
Nous recevons de plus en plus d'appels de nos syndicats affiliés qui cherchent à défendre ces travailleuses et ces travailleurs. Le nombre de migrants temporaires qui déposent une demande pour faire reconnaître un mauvais traitement et ainsi obtenir un « permis ouvert pour travailleur vulnérable » est tellement important que les délais de traitement ont explosé. Devant l'ampleur du problème, ajouter des inspecteurs du travail est certes utile, mais cela sera insuffisant pour résoudre le problème.

Oui, les besoins de main-d'œuvre des entreprises sont importants, mais ils sont prévisibles. Contrairement aux « solutions » caquistes et à ce qu'avance le CPQ dans ses diverses réactions, l'heure n'est pas à la défense de ce programme. L'heure est à mettre de l'avant un autre moyen d'accueillir des personnes qui veulent travailler au Québec, sans avoir recours au système des permis de travail fermés.

Devant le constat accablant dressé par le rapporteur de l'ONU, les gouvernements doivent cesser de tergiverser et mettre fin à cette pratique inacceptable en planifiant mieux notre immigration économique, avec une lentille plus humaine.

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Déclaration sur le Défilé de la Fierté et sur la Journée Communautaire du 10 août 2024 : Réfutation d’une fausse narrative et demande de démission de Simon Gamache

27 août 2024, par Collectif — , ,
Tio'tia:ke/Mooniyang/Montréal, le 19 août 2024 – Ce communiqué vise à corriger le récit propagé par Fierté Montréal, le SPVM et les médias grand public concernant les (…)

Tio'tia:ke/Mooniyang/Montréal, le 19 août 2024 – Ce communiqué vise à corriger le récit propagé par Fierté Montréal, le SPVM et les médias grand public concernant les événements précédant et durant la Journée Communautaire du 10 août 2024 et le défilé de la Fierté ayant eu lieu le 11 août, et demander la démission de la direction de Fierté Montréal.

Photo Raphael Alexandre

Il s'agit d'une déclaration conjointe de Helem Montréal, Mubaadarat, Voix Juives Indépendantes Montréal (VJI) et de la Faction Anti Génocidaire et Solidaire (F.A.G.S.), affirmant notre position en tant que Queers de Conscience. Nous rejetons l'influence des entités sionistes, impérialistes, colonialistes et corporatives qui ont tenté de s'approprier nos luttes par le pinkwashing, l'homonationalisme et la corporatisation. La parade
sioniste corporative de Fierté Montréal, allant à l'encontre du véritable esprit de la Pride comme protestation ne sera pas faite en notre nom. Nous nous opposons fermement au génocide en cours en Palestine et à l'instrumentalisation de nos identités queers pour le justifier. Pas en notre nom.

Clarification des faits ;

Événements précédant le « festival » de Fierté Montréal

Depuis plusieurs mois, Helem, VJI et Mubaadarat, soutenus par Sapphix sont engagés dans des discussions avec Fierté Montréal, tentant de les inciter à dénoncer et à couper leurs liens avec les commanditaires et participants sionistes du Festival. Fierté Montréal a reçu une liste de 4 revendications, accompagnée de documentation soutenant chaque demande.

Malgré leur refus des quatre demandes, Fierté a exprimé qu'ils « essayaient » de trouver des voies légales pour exclure les groupes sionistes de la marche puisque certain·e·s de leurs membres ont tenu des propos allant à l'encontre des règlements
<https://cms.fiertemontreal.com/uplo...> de Fierté Montréal concernant la politique anti-discrimination et harcèlement. Rétroactivement, il appert évident que cela était en fait une
tactique pour faire taire notre coalition. Ce discours comme quoi ils travaillaient « avec nous » a été maintenu jusqu'au début du « Festival ».

Les vraies et uniques préoccupations de Fierté étaient de protéger leur image et leurs commanditaires, et non d' « amplifier les voix des communautés 2SLGBTQIA+ pour assurer leur représentation, leur inclusion et la reconnaissance de leurs droits dans la société. » Bien que leur site Web présente une déclaration claire de « mission, vision et valeurs », Fierté a manqué l'occasion de montrer une réelle volonté de mettre ces valeurs à l'épreuve.

Journée communautaire du 10 août 2024

Fierté s'était engagée à assurer la sécurité de Helem Montréal et Mubaadarat pendant les activités du festival. Lors de la journée communautaire du 10 août, ces groupes ont malheureusement été confrontés à des provocations racistes et islamophobes. Plus que 10 incidents étaient observés, l'un d'eux devant l'un des responsables de Fierté Montréal. Des
membres de Helem Montréal et Mubaadarat ont dû se mobiliser pour fournir
sécurité et solidarité les un·e·s envers les autres.

Jour du défilé

Fierté Montréal a permis aux groupes et commanditaires sionistes de défiler avec des drapeaux israéliens dans la marche, trahissant la confiance de la communauté et mettant en danger les personnes marginalisées.

Deux (2) actions indépendantes avec un (1) objectif commun : dénoncer le génocide en cours

Helem et Mubaadarat ont décidé de participer au défilé, donnant de la visibilité à l'existence des communautés LGBTQ+ SWANA et arabes, tout en attirant l'attention des participant·e·s sur le génocide en cours. VJI a collaboré avec ces deux groupes pour dénoncer le pinkwashing et démontrer la solidarité qui existe entre les communautés juives et arabes. Cette coalition a décidé de profiter de la minute de silence propre au défilé
pour mettre en place un die-in. Celui-ci incluait en trame de fond des bruits d'avions militaires et des voix de civils en pleurs alors que certains marcheur·euse·s s'étaient recouverts de peinture rouge avant de se coucher sur le sol - imitant ainsi une scène du quotidien des Gazaouis.

La F.A.G.S. a quant à elle perturbé le défilé avec un message clair : pas de fierté dans le génocide. Le groupe visait à exposer la mauvaise foi de Fierté Montréal, pour faire taire les critiques et éviter les perturbations. La F.A.G.S. était solidaire des organisateur·ice·s du die-in et des groupes communautaires tels qu'AGIR et AfroPride, leur permettant de
marcher. L'action ciblait spécifiquement les contingents sionistes et
corporatifs au sein du défilé.

Le plus long blocus a duré près d'une heure, arrêtant le contingent de Fierté Montréal. Réaffirmant l'esprit de la Fierté comme un acte de protestation radical, les manifestant·e·s ont tenu bon face aux abus verbaux et physiques de la part à la fois des policier·ère·s et des spectateur·ice·s sionistes.

Ces actions conjointes soulignent l'interconnexion des différentes formes d'oppression et de mouvements. Nous croyons de tout cœur que la libération queer ne peut être atteinte qu'avec une Palestine libre. Aucun·e de nous n'est libre tant que nous ne le sommes pas tous·tes.

Alors que le contingent de Helem Montréal, Mubaadarat et VJI a fait face à du harcèlement, des tentatives d'arrêter leur action, et une sécurité présente pour protéger l'image de Fierté, le contingent de la F.A.G.S. a quant à lui été victime d'une brutalité policière sévère. Le SPVM a physiquement agressé les manifestant·e·s, détruit des bannières et proféré des menaces. En réponse à ces abus et solidairement, des membres autonomes de Helem Montréal, Mubaadarat et VJI ont rejoint la démonstration de la
F.A.G.S., solidifiant ainsi le lien entre les deux actions - tactiques différentes, objectif commun. Puisque personne ne nous protège, nous nous protégeons nous même.

La F.A.G.S. : Les prétendues négociations et la brutalité policière

Lors de l'interruption occasionnée par la F.A.G.S., deux (2) membres du conseil d'administration de Fierté Montréal sont venu·e·s rencontrer les manifestant·e·s, promettant qu'un·e représentant·e de Fierté Montréal viendrait parler au groupe rapidement. Après une longue attente, aucun·e représentant·e n'est arrivé·e. Pendant ce temps, la présence policière s'est intensifiée. Après des mois d'aveuglement volontaire, de manipulation et de déshumanisation, il est devenu plus clair que Fierté Montréal se
souciait davantage de son image que de ce que la Pride devrait réellement signifier : protéger les vies et la sécurité des communautés marginalisées et minorisées.

Alors que nous nous sentions de plus en plus en danger, nous avons réalisé que les « négociations » de Fierté Montréal n'étaient qu'une tactique de retardement pour déployer plus de violence contre nous alors qu'ils redirigeaient le défilé. Pour la sécurité des manifestant·e·s, nous avons dispersé nos efforts. La police nous a suivis dans les rues et dans le métro, bien après la fin de notre action, prouvant encore une fois que les
efforts de sécurité de Fierté étaient dirigés contre nous et non POUR nous protéger.

Les affirmations de Fierté et du SPVM concernant une résolution pacifique sont des mensonges flagrants. Leurs actions démontrent une priorité accordée aux intérêts corporatifs plutôt qu'à la sécurité et au bien-être des personnes queers.

Nos revendications conjointes mises à jour

1.

Nous demandons des excuses publiques de la part de Fierté Montréal pour
avoir déployé des policier·ère·s violent·e·s contre nous, pour avoir déshumanisé notre communauté et pour avoir mis en danger les manifestant·e·s ainsi que les participant·e·s du défilé.
2.

Nous demandons le retrait immédiat des déclarations faites par Simon
Gamache le dimanche 11 août, affirmant que Fierté Montréal avait réussi
à négocier avec les manifestant·e·s et que la situation avait pu être
résolue pacifiquement.
3.

Nous appelons Fierté Montréal à mettre en œuvre un plan BDS. Se
dissocier de l'apartheid sioniste est réalisable, comme le montrent
d'autres festivals, comme Fierté dans la Capitale (Ottawa).
4.

Nous demandons la démission de Simon Gamache et de tous·tes celleux qui
sont complices de la violence perpétrée contre les contingents de la
F.A.G.S. et de Helem Montréal, Mubaadarat et VJI.
5.

Si des éditions futures de Fierté Montréal ont lieu, nous exigeons
qu'elles mettent en œuvre les revendications précédemment soumises par
Helem Montréal, Mubaadarat et VJI.

Le site web de Fierté affirme que leur objectif est de « mett[re] de l'avant leurs [de la communauté] luttes et leurs réalités auprès du grand public et des institutions », en déclarant qu'ils entendent « bâti[r] des ponts durables avec les communautés et [adapter leurs] actions et approches afin de mieux porter leurs revendications et leurs aspirations [de la communauté]. » Nous les appelons à mettre ces paroles en action.

Conclusion

Les événements des dernières semaines ont clairement remis sur la table l'urgence de réaffirmer la véritable essence de la Fierté : une célébration enracinée dans la résistance, la solidarité et la justice. Les actions de Fierté Montréal ont non seulement trahi l'esprit de la Fierté, mais ont également mis en danger les communautés marginalisées en priorisant les intérêts corporatifs au détriment d'un véritable sentiment de sécurité.

Notre position collective, englobant Helem Montréal, Mubaadarat, Voix Juives Indépendants et la F.A.G.S. démontre notre engagement indéfectible envers la justice intersectionnelle et la libération de tous les peuples opprimés. Nous appelons la communauté et donc toute personne se sentant interpellée par nos revendications à soutenir nos efforts pour que Fierté Montréal prenne la responsabilité de ses échecs.

En tant que Queers de Conscience, nous restons uni·e·s dans notre résolution : De L'Île de la Tortue à la Palestine, pas de fierté dans le génocide et aucun compromis en ce qui a trait à la justice. Notre mouvement continuera à défier le pinkwashing et l'exploitation de nos identités à des fins politiques tant qu'il le faudra.

Resources

Photos et documents
<https://drive.google.com/drive/fold...>

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Mon p’tit jus de batterie

27 août 2024, par Gérard Montpetit — , ,
Dans l'actualité, je viens de voir que la méga-usine de batteries Northvolt a demandé l'autorisation de prélever de l'eau de la rivière Richelieu et de l'y rejeter après usage (…)

Dans l'actualité, je viens de voir que la méga-usine de batteries Northvolt a demandé l'autorisation de prélever de l'eau de la rivière Richelieu et de l'y rejeter après usage

M. Benoit Charette,
Ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs

Monsieur le Ministre,

Dans l'actualité, je viens de voir que la méga-usine de batteries Northvolt a demandé l'autorisation de prélever de l'eau de la rivière Richelieu et de l'y rejeter après usage. Cela me préoccupe car l'eau de mon robinet provient de l'aqueduc géré par la Régie de l'aqueduc intermunicipale du Bas-Richelieu (AIBR). La prise d'eau de mon aqueduc est située à Saint-Denis, soit une vingtaine de kilomètres en aval de Northvolt.[1] De plus, lorsque le vent soufflera du sud-ouest, je serai dans le panache pour respirer le bouquet des arômes d'air qui provient de cette usine. J'avoue être choyé par cette charmante attention de Northvolt !

Radio-Canada nous apprend qu'en Suède, l'usine-soeur de Northvolt rejette, entres autres « du nickel, du cobalt et du lithium ». J'apprends également qu'au Québec, il n'existe actuellement « aucune norme qui encadre le niveau acceptable de ces substances dans l'eau potable. ». Comme si ce n'était pas assez troublant, le professeur Benoit Barbeau ajoute que le « lithium a des effets sur la santé mentale à des concentrations assez faibles ».[2] Monsieur le Ministre, je vous demande de me rassurer ! Est-ce que les nouvelles normes que votre ministère va rédiger seront assez sévères pour préserver la santé physique et mentale des habitants de la vallée du Richelieu ?[3]

Est-ce que la santé financière de la grande industrie doit avoir la priorité sur la santé des riverains ? Nous nous sommes posé cette question lorsque votre ministère a modifié les règles pour que Northvolt échappe à l'obligation légale d'être soumis à un examen public du BAPE. En effet, ce BAPE aurait répondu à de nombreuses questions dont celles au sujet des nouvelles normes requises pour connaître les niveaux acceptables de nickel et de lithium dans l'eau. Mais la nécessité d'une décision rapide et la facilité administrative ont incité votre gouvernent à un contournement des règles, malgré les demandes citoyennes.

Ces nouvelles normes que votre ministère doit établir respecteront-elles le principe de précaution en ce qui a trait aux quantités de contaminants tolérables dans l'environnement ? Si on se fie au précédent de la fonderie Horne à Rouyn-Noranda, votre gouvernement a haussé « la norme quotidienne de nickel de 14 ng/m3 à 70 ng/m3, et a adopté une norme annuelle de 20 ng/m3. » Ce changement de normes a suscité de vives critiques des 18 directions régionales de santé publique du Québec, du Collège des médecins du Québec et de l'Association québécoise des médecins pour l'environnement qui se sont, complètement opposés à l'augmentation des normes.[4] Radio-Canada nous apprend aussi qu'en 2021, avec ces normes « relaxes », la fonderie Horne a rejeté dans l'air de Rouyn-Noranda plusieurs contaminants, dont 36.5 tonnes d'arsenic, 97,4 tonnes de nickel, 6,4 tonnes de chrome et 39,4 tonnes de zinc.[5]

Par définition, des batteries sont fabriquées à partir de matériaux qui réagissent entre eux pour stocker de l'électricité, puis la transmettre sur demande.[6] À Rouyn-Noranda, vous avez écouté les doléances de Glencore et de ses lobbyistes pour permettre des normes complaisantes pour la compagnie. Et pour Northvolt, les normes de votre ministère seront-elles dictées par vos conseillers scientifiques ? Ou seront-elles dictées par les lobbyistes de la compagnie ? Votre ministère saura-t-il résister au chant des sirènes de l'industrie. Voyez-vous, Monsieur le Ministre, lorsque j'ouvre mon robinet, je ne veux pas boire un cocktail dont l'ingrédient principal est composé d'un p'tit jus de batterie.

Je vous remercie, Monsieur le Ministre, pour ces normes qui sauront sauvegarder notre santé.

Gérard Montpetit
Citoyen de La Présentation qui boit l'eau de l'AIBR
le 24 août 2024

1] https://www.ledevoir.com/environnement/818174/northvolt-planifie-activement-pompage-rejet-eau-riviere-richelieu

2] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2098192/northvolt-rejets-quebec-suede-nickel-lithium-riviere-richelieu

3] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2098604/northvolt-rejets-normes-environnement-quebec

4] https://plus.lapresse.ca/screens/04401fd9-ee9f-4d1f-b466-e552ab283084%7C_0.html

5] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1898316/fonderie-horne-contaminants-metaux-arsenic-nickel-plomb
6] https://pivot.quebec/2024/03/05/northvolt-assemblera-des-produits-chimiques-avec-un-impact-inconnu-sur-leau-du-richelieu/

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Plan d’adaptation aux changements climatiques

27 août 2024, par Aile parlementaire de Québec solidaire — , ,
QUÉBEC, le 22 août 2024 - Alors que le Québec vient de vivre un épisode d'inondations historiques, Québec solidaire exige le dépôt d'un Plan d'adaptation aux changements (…)

QUÉBEC, le 22 août 2024 - Alors que le Québec vient de vivre un épisode d'inondations historiques, Québec solidaire exige le dépôt d'un Plan d'adaptation aux changements climatiques d'ici la fin de l'année 2024. Ce plan devrait être financé par le rapatriement de la part du Québec des subventions fédérales envoyées aux pétrolières polluantes qui annulent les efforts des Québécois et des Québécoises.

« François Legault est sur le pilote automatique et ça m'inquiète. D'une catastrophe à l'autre, la CAQ n'apprend pas sa leçon. Nous ne sommes plus à l'étape des programmes à la pièce et de l'improvisation. Ça prend un véritable Plan d'adaptation aux changements climatiques pour préparer le Québec aux nouvelles réalités du climat », déclare Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de Québec solidaire.

Selon l'Institut Climatique du Canada, chaque dollar investi en adaptation des changements climatiques permet jusqu'à 15$ d'économies sur le long terme : « Le Québec doit avoir un vrai Plan d'adaptation aux changements climatiques rapidement. Ça permettrait de financer des mesures de prévention et d'agir de façon coordonnée en adaptation au lieu de se contenter d'éteindre des feux en espérant que ça passe. L'adaptation aux changements climatiques va nous coûter moins cher que d'attendre que ça nous pète dans la face ! La Colombie-Britannique a une stratégie d'adaptation climatique, pourquoi pas nous ! », affirme Alejandra Zaga Mendez.

Rapatrier l'argent envoyé aux pétrolières

Chaque année, il y a 15 milliards de dollars qui sont envoyés en subventions dans le pétrole et le gaz sale du Canada. Environ 3 milliards de dollars proviennent des taxes et des impôts des Québécois et des Québécoises.

« S'il est vraiment nationaliste, François Legault doit dire à Ottawa de fermer le robinet des subventions au pétrole sale ; rapatrier cet argent-là ; puis, l'investir dans l'adaptation aux changements climatiques pour soutenir notre monde face à la chaleur écrasante, aux feux de forêt puis aux inondations. Les taxes et les impôts des Québécois et des Québécoises, on ne veut plus que ça finance le pétrole et le gaz sale de l'Alberta, ça bousille tous nos efforts », déclare Gabriel Nadeau-Dubois.

Rappel d'un appel à la collaboration

En juin 2023, Gabriel Nadeau-Dubois avait interpellé les chefs des différents partis politiques à collaborer en leur offrant un rendez-vous transpartisan au sujet de l'adaptation aux changements climatiques et l'avenir du Québec. Il leur avait alors écrit ceci :

Nos formations politiques ont des stratégies divergentes en matière d'environnement, et nos cibles de réduction de gaz à effet de serre (GES) ne sont pas les mêmes. Toutefois, quel que soit le parti porté au pouvoir en 2026, les émissions de GES des dernières décennies nous ont déjà engagés dans un processus de changement climatique. Dans ce contexte, nous avons une responsabilité commune envers les Québécois et les Québécoises : faire de l'adaptation aux changements climatiques une véritable priorité nationale, au-delà des frontières partisanes.

Cette lettre est malheureusement restée sans réponse.

SOURCE Aile parlementaire de Québec solidaire

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« Art contre le génocide culturel au Kurdistan »

27 août 2024, par /kurdistan-au-feminin.fr — , ,
TURQUIE / KURDISTAN – Lisa Çalan, réalisatrice et l'une des artistes kurdes ayant fondé l'Initiative « Art pour la Liberté » a déclaré « Nous nous opposons aux politiques du (…)

TURQUIE / KURDISTAN – Lisa Çalan, réalisatrice et l'une des artistes kurdes ayant fondé l'Initiative « Art pour la Liberté » a déclaré « Nous nous opposons aux politiques du gouvernement qui tentent constamment de discipliner l'art et les artistes ».

Tiré de Entre les ligne set les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/08/17/art-contre-le-genocide-culturel-au-kurdistan/

« Nous voulons créer un espace où les artistes peuvent s'exprimer »
Les artistes luttent contre l'effacement culturel et la discipline de l'art par le régime AKP-MHP en créant l'initiative « L'art pour la liberté ». L'une des fondatrices, Lisa Çalan, a déclaré qu'il s'agissait de briser le climat de peur.

Il y a quelques jours, la création de l'initiative « L'art pour la liberté » a été annoncée à Amed. De nombreux artistes du Kurdistan et de Turquie ont rejoint l'initiative. L'une des fondatrices est Lisa Çalan.

Dans une interview accordée à l'ANF, elle a expliqué que la politique d'interdiction de l'art par le régime d'Ankara devenait de plus en plus dramatique. Elle a déclaré : « La principale raison de cette initiative est de donner une voix à tous les problèmes sociaux et de créer un espace où les artistes peuvent s'exprimer. »

Çalan a poursuivi : « Il y a quelques mois, nous avons publié la déclaration « Devenez une voix de la paix ». Cette déclaration a ensuite été signée par près de 700 artistes. Ces signatures nous ont motivés, en tant qu'artistes, à aller un peu plus loin. Le fait que des artistes qui étaient restés silencieux et en retrait pendant longtemps aient fait une déclaration avec leur signature et aient fait entendre à nouveau leur voix nous a donné l'idée de fonder cette initiative. Après cela, nous nous sommes réunis et avons agi. Nous avons décidé d'aller plus loin avec des artistes qui s'engagent dans l'art, qui veulent changer et transformer la société avec leur production et qui ont une conscience sociale. »

« Le régime voit le pouvoir de l'art et tente de le détruire »

Çalan a souligné qu'il ne pouvait être question de démocratie en Turquie et a ajouté : « Il existe un environnement antidémocratique dans le pays. Les gens sont intimidés et vivent dans la peur. En tant qu'artistes, nous avons voulu agir ensemble pour briser ce cadre et nous avons fondé l'« Initiative Art pour la Liberté ». L'art ne peut avoir lieu que dans un environnement libre. C'est pourquoi ce nom était très important pour nous. Presque toute notre vie est imprégnée d'isolement. Les films sont censurés, ou les cinéastes s'autocensurent pendant la production ; il devient de plus en plus difficile de publier des livres. C'est une politique de guerre. Elle nous a déjà isolés, et l'art est devenu un champ de production non libre. L'objectif principal de cette initiative est de donner une voix à tous les problèmes sociaux. Il s'agit de créer un espace où les artistes peuvent s'exprimer contre cette politique de guerre et d'intimidation. Il est très important pour nous d'élever la voix contre les nombreuses violations des droits. Non seulement au Kurdistan, mais dans toute la société turque, un état d'isolement s'est installé au cours des dix dernières années. C'est particulièrement vrai pour l'art. « Les systèmes et les gouvernements connaissent très bien le pouvoir de l'art et ont essayé de le détruire dès le début. Ils ont constamment puni les artistes. Aujourd'hui, de nombreux artistes sont en prison. La politique d'un gouvernement qui considère l'art comme si dangereux ne peut être stoppée que par la voix des artistes. »


« Notre voix contre le génocide culturel »

Lisa Çalan a évoqué les restrictions imposées à l'art dans le monde entier. Mais la situation est particulièrement pire en Turquie, a-t-elle déclaré, ajoutant : « La société est dépossédée de sa mémoire. Les formes d'action sont adaptées à la structure des médias virtuels. Une action a lieu et disparaît en un jour. Il est nécessaire de garder la mémoire vivante. Depuis dix ans, il y a un régime qui imprègne toutes les parties de la société. Il y a un régime qui ne nous laisse même pas respirer, et encore moins faire entendre notre voix. Il y avait autrefois un réseau de production en Turquie et au Kurdistan, même partiel. Mais malheureusement, on n'en parle plus aujourd'hui. Le régime a toujours essayé de discipliner l'art et les artistes. Nous résistons à cela. Nous ferons entendre notre voix quoi qu'il arrive. Il est nécessaire d'être la conscience de la société. Nous voulons aborder tous les sujets que nous considérons comme importants. Malheureusement, il y a un génocide culturel en Turquie. Nous continuerons notre travail pour l'empêcher. »

https://kurdistan-au-feminin.fr/2024/07/26/art-contre-le-genocide-culturel-au-kurdistan/

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Melenchon ostracisé, la France dans l’impasse !

27 août 2024, par Omar Haddadou — , ,
Grisée par les J.O, la France découvre la réalité de l'instant présent : Une crise politique profonde. Macron coupe court aux ambitions du Nouveau Front Populaire. De (…)

Grisée par les J.O, la France découvre la réalité de l'instant présent : Une crise politique profonde. Macron coupe court aux ambitions du Nouveau Front Populaire.

De Paris, Omar HADDADOU

Une crise à ne pas prendre par le bout des lorgnettes !Au Palais Bourbon on s'écharpe ad libitum.
Fort de son Pouvoir, Macron balaie l'option d'un gouvernement de gauche. Tollé et indignation au sein du Nouveau Front Populaire.

La curée au perchoir de l'Assemblée nationale, cadeau empoisonné ayant pris en otage le Premier ministre sortant Gabriel Attal pour la stabilité du pays, atomise la classe politique française.
Les masques tombent, dévoilant le jeu malsain des uns et la vassalité des autres. On en est aux compromissions et aux règlements de compte, au grand dam d'une Démocratie valétudinaire. En témoigne la semonce de Laurent Vaquiez (Les Républicains) à l'encontre de la France Insoumise de Mélenchon, l'accusant du « plus grand danger du pays ». Voilà pour l'ambiance !

Rappelons qu'en vertu de l'article 12 de la Constitution, Emmanuel Macron, garant du bon fonctionnement des institutions de la V République, avait osé la dissolution de ladite Assemblée le 9 juin 2024, motivée par la cristallisation du Rassemblement National (RN). Des élections législatives à deux tours sont alors convoquées en Juillet et aucun parti n'obtient la majorité absolue fixée à 289 sièges. Sièges de l'Assemblée nationale qui seront partagés entre le Nouveau Front Populaire (1ère force politique), le camp présidentiel et le Rassemblement national.

Depuis lors, la liquidation les affaires courantes est compromise par le choix du locataire de Matignon. Macron est désormais en proie à la quadrature du cercle ! Celle de former un gouvernement inclusif en conciliant et honorant les revendications des formations politiques (antagonistes) ayant apporté leur soutien pour déjouer la percée de l'Extrême droite. Mais en politique, la pulsion de prise du pouvoir ne recule devant aucune crapulerie ni scélératesse.

Le Parti de Bardella et Marine Le Pen (RN) a été reçu, hier, à l'Elysées par le chef de l'Etat dans le cadre des consultations qui se poursuivent dans la matinée de ce mardi 27 août (3 ème round) pour désigner un Premier ministre.

Toutefois, le coup de théâtre qui risque d'enfieller la situation, est la déclaration d'Emmanuel Macron (en guerre ouverte avec Mélenchon), hier, au nom de la « stabilité institutionnelle ». Ce dernier a écarté l'option d'un gouvernement du NFP, exhortant le PS, les Ecologistes et PCF à coopérer avec d'autres forces politiques.
Prenant acte du coup porté à La France Insoumise en tant que catalyseur du Nouveau Front Populaire, Mélenchon parle « d'une situation d'une exceptionnelle gravité » après la décision de l'exécutif d'évincer LFI du gouvernement.

Pour le Coordinateur national, Emmanuel Bompard, « c'est un coup anti-démocratique ». Quant à la Présidente de LFI, Mathilde Panot, elle promet une riposte d'envergure : « Si le Président s'entête dans son déni, nous engageons contre lui une procédure de destitution ! »

Victime d'une carence de vrais (es) poids lourds de la politique, la France reste chevillée dans la procrastination du choix idoine des dirigeants (es). Le risque du blocage du pays par les manifs à la veille de la rentrée sociale, reste prégnant !
O.H

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Après la défaite de l’extrême droite en France, nous avons plus que jamais besoin du féminisme

27 août 2024, par Glorieuses — , ,
Pour une fois, je me permets de commencer cette newsletter sur une note personnelle. Je tiens à remercier toutes les personnes en France qui ont voté contre l'extrême droite et (…)

Pour une fois, je me permets de commencer cette newsletter sur une note personnelle. Je tiens à remercier toutes les personnes en France qui ont voté contre l'extrême droite et son programme de haine, de peur et de division ce dimanche.

tiré de NPA 29

Comme beaucoup d'immigrant·es dans ce pays sans droit de vote, j'ai suivi ces dernières semaines de campagne en France avec un sentiment de terreur croissante : de la défaite de Macron aux élections européennes, à son pari risqué d'amener des élections législatives anticipées, au résultat dévastateur du premier tour où le Rassemblement National d'extrême droite a terminé en tête. J'ai fait ce que je pouvais : j'ai écrit, j'ai lu, j'ai manifesté,

j'ai tenté de tirer la sonnette d'alarme sur les risques d'un gouvernement d'extrême droite. Et hier soir, quand les premiers sondages ont été publiés à 20h et ont montré une victoire du Nouveau Front Populaire, j'ai ressenti de l'espoir pour la première fois. De l'espoir, du soulagement et de la gratitude envers mes voisin·es, mes ami·es, les personnes qui ne sont pas d'accord avec moi et celles qui le sont – envers toutes les personnes qui se sont mobilisées dans des proportions sans précédent pour dire non au racisme, à la xénophobie, à l'islamophobie, à l'antisémitisme, à l'homophobie, à la transphobie et à la misogynie du Rassemblement National.

Le combat est loin d'être terminé. Le Rassemblement National a fini troisième, mais il a gagné plus de 50 sièges de plus au parlement et recueilli les voix de plus de 8 millions de personnes. Le parti restera une force majeure en Europe, où il a de nombreux alliés d'extrême droite à travers le continent – des allié·es qui souhaitent interdire l'avortement et les transitions de genre, des allié·es qui ciblent les familles queer. Le racisme et la xénophobie décomplexés qui ont été déchaînés pendant cette campagne violente ici en France ne seront pas facilement oubliés.

Le front républicain français a une fois de plus triomphé, et j'en suis éternellement reconnaissante. Mais il reste encore du travail. L'extrême droite ne disparaîtra pas d'elle-même : la cheffe du Rassemblement National, Marine Le Pen, a déclaré que la victoire de son parti n'était “que différée”. Pour éviter une catastrophe à l'avenir, la France devra continuer à contrer l'extrême droite partout où elle se trouve. La lutte n'est pas encore terminée, et avec plus de femmes que jamais qui votent pour l'extrême droite, nous aurons besoin de réponses féministes dans les années à venir.

Heureusement, il y a des féministes partout dans le monde qui ont l'expérience de résister aux forces de l'extrémisme, et elles ont beaucoup à nous apprendre, où que nous soyons, et que nous puissions voter ou non. La semaine dernière, j'ai écrit à certain·es de ces activistes pour leur demander des conseils sur la manière de continuer à affronter l'extrême droite en France.

Debora Diniz connaît trop bien les dangers des forces d'extrême droite. Elle a reçu des menaces de mort pour avoir témoigné devant la Cour suprême du Brésil lors d'une audience sur la décriminalisation de l'avortement, et a été placée sous protection policière et finalement exilée à cause de son travail. Elle est considérée comme la première personne contrainte à l'exil sous le gouvernement de droite dure du Brésil, dirigé par Jair Bolsonaro, un politicien souvent comparé à Donald Trump.

Il y a deux leçons principales que je tire des moments difficiles de Jair Bolsonaro au pouvoir au Brésil. La première est la manière dont l'extrême droite fonctionne en répandant la peur, et comment cela peut paralyser le courage et la créativité féministes”, a-t-elle expliqué. Mais “nous ne pouvons pas changer des normes injustes par la peur.

La deuxième leçon est qu'il faut ignorer la fausse prophétie du retour de bâton contre les idées féministes”, a-t-elle ajouté. Les manifestations de masse au Brésil à la veille des élections sous le mot d'ordre ”Pas lui” rappellent la mobilisation féministe que nous avons vue dans les rues de France avant le premier tour des élections le mois dernier. “Le récit du retour de bâton est un récit qui tente de contrôler notre élan de mobilisation et de participation politique”, analyse la militante. Bolsonaro a perdu le pouvoir en 2022 face au candidat de gauche Lula da Silva.

La philosophe Marcia Tiburi a également quitté le Brésil en raison des menaces de mort de l'extrême droite, et a vécu en exil à Paris pendant les années Bolsonaro. “J'ai passé quatre ans en France à souffrir de la situation au Brésil et maintenant je suis au Brésil à souffrir de la situation en France,” déclare-t-elle. “Bolsonaro a laissé en héritage des horreurs et des personnages tout comme lui au sein du congrès national… Que la France ait réussi à stopper l'avancée de l'horreur hier est une chose à célébrer, mais nous devons rester vigilants.“

Nous aurons également besoin de construire des réseaux à travers l'Europe, d'après Zsofi Borsi, la cofondatrice de Lazy Women, un collectif né en Hongrie avec pour mission d'apporter des perspectives autres que celles d'Europe occidentale au discours féministe dominant. Dans son pays natal, le président d'extrême droite Viktor Orbán a fait passer des lois anti-LGBT et des restrictions sur les soins liés à l'avortement, tout en diabolisant les migrant·es. Son parti a rejoint un bloc d'extrême droite avec le Rassemblement National au parlement européen.

Que ce soit une ‘guerre' contre les immigré·es, George Soros, l'UE ou le genre, en Hongrie, la machine de propagande d'Orbán abreuve la population de différents ennemis, et détruit systématiquement la tolérance du public pour la diversité, et la société civile dans son ensemble”, raconte Zsofi Borsi. Avec les forces d'extrême droite s'unissant à travers l'Europe, elle dit que les féministes devront faire de même. “Construire des réseaux de solidarité entre les petites organisations féministes pour élever les voix des un·es et des autres localement et dans la région – où de nombreux pays voisins font face à des défis similaires – joue un rôle crucial.”

Depuis presque dix ans, les féministes d'Argentine sont des leaders mondiales qui ont réussi à transformer leur société pour le mieux. L'activiste Verónica Gago a été l'une des voix majeures du mouvement #NiUnaMenos qui a protesté contre les violences de genre à partir de 2015, et donné naissance à une nouvelle vague de discours féministes dans le monde, y inclus la “vague verte” qui a permis à de nombreux pays d'Amérique latine d'obtenir le droit à l'avortement. Mais l'élection récente en Argentine prouve que les victoires féministes ne peuvent jamais être prises pour acquises : en l'espace de quelques mois seulement, le président ultraconservateur Javier Milei a décimé nombre de ces droits durement acquis.

L'extrême droite au gouvernement, cela veut dire un recul absolu des conditions qui rendent possibles nos luttes”, a déclaré l'activiste et autrice argentine. “En tant que féministes, notre engagement est de lutter contre le fascisme de toute notre force. C'est ce que nous faisons ici. Il est aussi essentiel de renforcer les luttes transféministes. Nous devons continuer à nous organiser et, surtout, à construire et élargir nos alliances.

Ces dernières années, l'Inde a été témoin de la montée du nationalisme hindou et des idéologies d'extrême droite. Mais les dernières élections ont vu le parti nationaliste Bharatiya Janata du Premier ministre Narendra Modi perdre sa majorité parlementaire pour la première fois depuis 2014. Teesta Setalvad est une militante féministe, journaliste et fondatrice de Sabrang Trust et Citizens for Justice and Peace. Elle a longtemps milité pour les victimes des émeutes du Gujarat en 2002 et a été détenue pour son activisme par le gouvernement. “L'extrême droite dans différents pays, contextes et cultures présente une similarité étrange, voire effrayante”, a-t-elle remarqué. “Il est plus que temps de forger des alliances internationales.”

“L'Inde a vécu cela, l'a vu et en sort lentement (espérons-le), bien que marquée et blessée… Nous souhaitons bonne chance à nos sœurs en France alors que nous-mêmes luttons pour respirer un peu plus facilement tout en étant encore menacé·es par des nuages noirs en Inde.

Des millions de personnes en France, et celles qui nous regardent partout dans le monde, respirent un peu plus facilement aujourd'hui. Une fois de plus, l'extrême droite était aux portes du pouvoir. Une fois de plus, elle a été repoussée par une population qui a choisi l'espoir plutôt que la haine. Une fois de plus, les féministes ont montré la voie.

Dès aujourd'hui, la lutte continue, mais rappelons-nous : nous sommes plus nombreuses et nombreux qu'eux.

Megan Clement

https://lesglorieuses.fr/

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États-Unis - « La Convention du Parti démocrate ignore pour l’essentiel la question morale la plus pressante de notre époque : Gaza »

27 août 2024, par Natasha Lennard — , ,
Les prestations de la première nuit de la Convention nationale du Parti démocrate ont été impeccables. Les réactions aux discours tenus dans l'enceinte de la convention et (…)

Les prestations de la première nuit de la Convention nationale du Parti démocrate ont été impeccables. Les réactions aux discours tenus dans l'enceinte de la convention et aussi dans la fraction des réseaux sociaux libéraux [progressistes] ont été enthousiastes.

Tiré de A l'Encontre
23 août 2024

Par Natasha Lennard

Aux cris de « We love Joe », le président Joe Biden a accordé sa bénédiction d'homme d'Etat à sa future successeure, la candidate démocrate Kamala Harris. Hillary Clinton a parlé de briser le « plafond de verre ». Le sénateur Raphael Warnock (Géorgie), un pasteur baptiste, a prononcé un éloge vibrant selon lequel « un vote est une sorte de prière ». Et la représentante Alexandria Ocasia Cortez [New York, figure de la gauche démocrate et écartée de DSA pour son soutien à la politique de Biden face à Israël] a qualifié Donald Trump de « briseur de syndicats à deux balles » sous les acclamations de « AOC, AOC ».

La démonstration de l'unité du Parti démocrate était aussi parfaite qu'elle était sourde à ce qui est sans doute la question morale la plus urgente de notre époque.

Au-delà de clins d'œil, vous n'auriez pu saisir aucune mention effective de la guerre génocidaire qu'Israël, soutenu par les Etats-Unis, continue de mener contre les Palestiniens de la bande de Gaza.

Le fait que des dizaines de milliers de manifestant·e·s anti-guerre se soient rassemblés en solidarité avec les Palestiniens [devant la Convention réunie à Chicago], dès le matin du lundi 20 août, n'a pratiquement pas été mentionné à la convention lundi soir. Le silence a persisté alors que la campagne de Kamala Harris pourrait souffrir du prix de plus d'un demi-million de voix [1] dans des Etats clés, en particulier le Michigan, pour avoir refusé d'arrêter le flux d'armes à destination d'Israël.

Pendant que Biden parlait, un petit groupe de participants a déployé en silence une bannière sur laquelle on pouvait lire « Stop Arming Israel » (Arrêtez d'armer Israël). Prem Thakker, de Zeteo [organe de critique des médias dominants, animé entre autres par Mehdi Hasan], a rapporté depuis le United Center de Chicago que les chants « We Love Joe » des participants proches se sont alors renforcés. « Les lumières de la salle omnisports se sont alors éteintes et la bannière a été arrachée », a écrit Prem Thakker sur X.

Les quelques mentions fugaces ayant trait à la guerre, à Israël et à la Palestine dans les discours de lundi soir étaient insignifiantes et trompeuses, tout en dévalorisant les vies des Palestiniens par rapport à celles des Israéliens.

Alexandria Ocasio-Cortez a déclaré sous un tonnerre d'applaudissements : « Kamala travaille sans relâche pour un cessez-le-feu. » C'est peut-être vrai ou non, mais une telle approche trancherait avec le bilan de l'administration Biden-Harris. Depuis que Kamala Harris a accepté la candidature à la présidence, l'administration Biden-Harris a approuvé une vente d'armes à Israël pour un montant de 20 milliards de dollars, et cela sans aucune condition. Si c'est cela « travailler sans relâche » pour mettre fin aux combats, Kamala Harris n'est pas à la hauteur de la tâche proclamée.

Le fait que les appels au cessez-le-feu aient été chaleureusement accueillis dans le parterre de la convention pourrait être considéré comme un signe prometteur – une autre indication adressé à l'establishment démocrate qu'il existe un soutien populaire pour un cessez-le-feu permanent de la part du grand public. Mais c'est déjà le cas depuis longtemps. Il n'y a rien d'encourageant à applaudir un geste vide de sens en faveur de l'idée d'un cessez-le-feu, qui dissimule la complicité de l'administration dans la guerre.

Dans son discours, Joe Biden a fait un clin d'œil aux manifestations devant la Convention : « Ces manifestant·e·s dans la rue n'ont pas tort. Beaucoup d'innocents sont tués des deux côtés. » Pourtant, même ce clin d'œil a réussi à dénaturer les positions, établies de longue date, du mouvement de solidarité avec la population de Gaza.

Les manifestations contre la guerre de Gaza – qu'elles aient eu lieu au cours des dix derniers mois, cette semaine à Chicago ou par la présence de délégués « non engagés » (« uncommitted ») à la Convention – n'ont pas pour but de faire valoir que des innocents sont tués « des deux côtés ». Elles font partie d'une mobilisaton internationale contre le génocide et le nettoyage ethnique des Palestiniens par l'armée israélienne soutenue par les Etats-Unis.

Ce que veulent les manifestant·e·s

Plus tôt dans la journée de lundi, la DNC a accordé à la campagne « Uncommitted » un espace pour organiser une table ronde (forum) distincte consacrée à Gaza et aux droits de l'homme des Palestiniens. Selon les rapports, des centaines de personnes ont assisté et écouté les récits intolérables de médecins qui ont travaillé dans les hôpitaux dévastés de Gaza, où un grand nombre des patients qui arrivent sont des enfants mutilés.

La Dresse Tanya Haj-Hassan [membre de Médecins sans frontières], une chirurgienne américano-palestinienne qui a soigné des patients à Gaza, a raconté l'histoire d'un petit garçon qui avait perdu tous les membres de sa famille et qui a déclaré qu'il souhaitait mourir lui aussi parce que tous ceux qu'il aimait « sont maintenant au paradis ».

Tanya Haj-Hassan a expliqué que même les enfants qu'elle avait réussi à soigner et à faire sortir de l'hôpital risquaient de mourir à cause des bombardements, de la famine et de la déshydratation. Des « rapports alarmants » font état des premiers cas confirmés de poliomyélite infantile à Gaza.

Une autre participante, Hala Hijazi, s'est décrite comme une démocrate « de longue date » et « modérée », qui a travaillé comme collecteuse de fonds pour le parti, récoltant plus de 12 millions de dollars dans le passé. « Je suis ici parce que ma famille est morte », a-t-elle déclaré, expliquant qu'elle avait perdu plus de 100 membres de sa famille large au cours de l'offensive actuelle.

Hala Hijazi, qui siège au conseil d'administration du comité d'action politique pour les droits génésiques NARAL Pro-Choice California, a déclaré au public qu'elle se battait pour les libertés génésiques dans son pays, « mais que je ne pouvais pas aider les femmes de Gaza qui sont enceintes en ce moment ». Ces remarques étaient un rejet tacite des critiques selon lesquelles ceux qui poussent Kamala Harris à s'engager en faveur d'un embargo sur les armes sont des électeurs qui ne s'intéressent qu'à un seul sujet [la Palestine], négligeant d'autres domaines comme, par exemple, la menace qu'une deuxième administration Trump ferait peser sur les droits reproductifs aux Etats-Unis.

C'est pourquoi les organisateurs de la manifestation, les manifestant·e·s et les personnes concernées qui sont venus à Chicago ne se contenteront pas d'un forum mis à l'écart et d'un discours spécieux de la part des politiciens sur la scène principale. A l'heure actuelle, la plateforme de 92 pages du Parti démocrate ne mentionne pas un conditionnement des livraisons d'armes à Israël, et encore moins l'embargo sur les armes réclamé par les 30 délégués non engagés (uncommitted) et les plus de 200 groupes de la Coalition to March on the DNC (Coalition pour une marche sur la DNC).

Les spectacles de lundi soir n'ont pas donné l'impression que la campagne de Kamala Harris, certes rafraîchie et alimentée en émotions, changerait de cap sur la Palestine, se concentrant plutôt sur l'avortement, la menace autoritaire de Trump pour la démocratie et la protection des travailleurs et travailleuses. Dans un contexte de stricte politique interne, ce serait une bonne chose. Je pourrais moi aussi rire avec le réjouissant président des United Auto Workers (UAW), Shawn Fain, qui fait référence à une chanson du rappeur Nelly et traite Trump de briseur de grève [2]. Mais pas le même jour où, dans le même centre de la Convention, parmi d'autres horreurs, un chirurgien a décrit le traitement d'un enfant de Gaza dont le visage avait été arraché lors d'une frappe israélienne.

A l'heure d'une guerre génocidaire menée avec les armes, les dollars et le soutien diplomatique des Etats-Unis – une offensive militaire qu'un président américain pourrait sérieusement limiter –, la Convention nationale du Parti démocrate ne peut rester une sphère myope et fermée.

Alors que les débats se poursuivent jusqu'à jeudi soir, 22 août, les protestations [Coalition to March on the DNC] se multiplient et le désespoir s'intensifie. Si la campagne de Harris décide qu'elle peut gagner sans écouter, il n'y a pas lieu de s'en réjouir. (Article publié par The Intercept le 20 août 2024 ; traduction rédaction A l'Encontre)


[1] Selon Ben Samuels dans Haaretz du 22 août, « le Mouvement national non engagé [« uncommitted », qui refuse de voter démocrate à cause de la politique de l'administration Biden envers Netanyahou] représenté au sein de la DNC-Democratic National Convention par 30 délégués qui représentent eux-mêmes 700 000 votes de protestation contre la politique israélienne de l'administration Biden, était un enjeu d'importance au début de cette semaine ». (Réd.)
[2] Le président de l'United Automobile Workers, Shawn Fain, a pris la parole lors de la première nuit de la convention nationale du Parti démocrate 2024 à Chicago. Shawn Fain a cité le rappeur Nelly, disant « il commence à faire chaud ici », avant d'enlever sa veste pour montrer un t-shirt sur lequel était écrit « Trump est un briseur de grève ». (Réd.)

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Québec Solidaire : Le train de Gabriel Nadeau-Dubois déjà entré en gare

27 août 2024, par Yves Chartrand — ,
Comme membre de Québec Solidaire j'ai reçu cette semaine des informations préliminaires sur le congrès de novembre prochain qui sera EN MODE VIRTUEL si j'ai bien compris. Je (…)

Comme membre de Québec Solidaire j'ai reçu cette semaine des informations préliminaires sur le congrès de novembre prochain qui sera EN MODE VIRTUEL si j'ai bien compris. Je pensais déjà après le conseil national du printemps dernier que le train de Gabriel Nadeau-Dubois était sur le point d'entrer en gare et je me demandais s'il y avait moyen de le faire dérailler avant pour avoir une discussion franche et ouverte impliquant tous les membres sur l'avenir du parti avant l'étape de préparation du congrès, des pour ou contre les propositions qui y seraient présentées. Je me suis pour ma part essayé en demandant à la présidente de l'association locale de mon comté de tenir une assemblée générale spéciale en juin pour comprendre ce qui s'est passé au conseil national et se faire un idée sur le suite des choses avant la lancée de fin d'été vers le congrès. Sa réponse a été de m'inviter à prendre une bière avec d'autres membres…et alors que j'insistais en prenant cette bière elle m'a dit qu'elle en parlerait avec le comité de coordination, puis je n'ai plus eu de nouvelles depuis...

J'ai compris en recevant cette semaine les premières informations concernant le congrès de novembre qui portera sur les changements au statut que le train était déjà en gare, alors que ce congrès aurait pu être l'occasion de revenir sur le choix de notre co porte-parole masculin de plonger notre parti dans le pragmatisme électoraliste en jetant aux poubelles l'autre aspect de la mission de notre parti, soit sa présence dans la rue des villes et dans les rangs de campagnes. Du même coup c'est la victoire du cérébral avant tout masculin et la mise au rancart de la voie du coeur avant tout féminine incarnée par Catherine Dorion et plus récemment par Emilie Lessard-Therrien. Alors que pour moi le pragmatisme et le rêve, la folie et la fantaisie ne s'opposent par et ces deux composantes auraient pu continuer à se compléter représentées par deux co porte-paroles complémentaires, mais trop tard après le coup d'état de Gabriel Nadeau-Dubois et sa clique, et leur prise de contrôle du parti.

Je reviens sur le choix d'un congrès virtuel sans contact physique et affectif entre les délégués,es au congrès en l'absence de rencontres informelles et de délibérations en présence des humains en chair et en os. Il n'y a pas de plus merveilleuse façon de contrôler le déroulement d'un congrès chacun,e assis,e derrière un ordinateur à la merci des personnes qui ‘' dirigent ‘' le congrès vers un objectif déterminé d'avance.
Poutine ou Xi Jinping ne pourraient faire mieux.

Si je reviens à moi, comme notre parti devenu uniquement électoraliste tentant de ne fâcher personne et d'aller chercher le plus de votes en rêvant un jour de prendre le pouvoir, ne remettant plus en question le système capitaliste néolibéral mondial, il ne m'inspire plus et il ne me reste plus que de mettre ma carte du parti aux poubelles comme je l'ai fait avec celle de la SAQ qui ne m'inspirait plus... Comme je suis un fervent indépendantiste et ancien prisonnier de la Crise d'Octobre je vais peut-être retourner au Parti Québécois social-démocrate comme Québec Solidaire l'est devenu, pour rêver et peut-être réaliser l'indépendance du Québec, et dont le chef m'inspire plus que le nôtre. Je ne crois plus trop aux miracles, et vous ?

L’idée écologique et la philosophie - À la recherche d’un monde commun | À paraître le 3 septembre

27 août 2024, par Éditions Écosociété, Laurence Hansen-Løve — ,
Comment les philosophes ont-ils pensé la place de l'humain dans son environnement ? Des philosophes grecs aux écoféministes, un voyage captivant au cœur des fondements (…)

Comment les philosophes ont-ils pensé la place de l'humain dans son
environnement ? Des philosophes grecs aux écoféministes, un voyage captivant
au cœur des fondements philosophiques de l'écologie.

L'essai *L'idée écologique et la philosophie - À la recherche d'un monde
commun*, de la philosophe française Laurence Hansen-Løve, va paraître *en
librairie le 3 septembre.*

*En bref* : À l'heure du péril écologique, renouer avec la clairvoyance, la
prudence et l'esprit de responsabilité des plus grands philosophes, de
Aristote et Épicure à Hans Jonas et Günther Anders, est devenu notre
impératif et notre espérance.

Pour recevoir un exemplaire en service de presse, merci de me fournir
votre adresse postale en cas de télétravail.

*À propos du livre*

Pour de nombreux philosophes contemporains, la maîtrise de la nature est
devenue la source des multiples crises auxquelles nous sommes confrontés.
Mais il n'en a pas toujours été ainsi. Ils sont même plusieurs à avoir
applaudi et encouragé cette maîtrise au fil du temps, en séparant
artificiellement « nature » et « culture ». Pourtant, dès ses origines, en
tant que recherche de la vérité et de la sagesse et par sa condamnation de
la démesure, la philosophie fut doublement concernée par l'idée écologique.

Dans ce captivant voyage, Laurence Hansen-Løve remonte aux fondements
philosophiques de l'écologie. Elle montre l'importance des pensées antiques
de la sagesse contre l'hubris et de la représentation critique de la nature
qu'ont formulée nombre de philosophes à travers les âges (Aristote,
Spinoza, Rousseau, Thoreau, etc.). Un périple qui nous conduit jusqu'à nos
jours, avec l'essor de pensées résolument écologistes comme l'écologie
politique (Ellul, Charbonneau, Gorz, Næss, etc.), l'écoféminisme
(d'Eaubonne, Starhawk, etc.) ou la communauté terrestre (Mbembe).

À l'heure du péril écologique, renouer avec la clairvoyance, la prudence et
l'esprit de responsabilité des plus grands philosophes, de Aristote et
Épicure à Hans Jonas et Günther Anders, est devenu notre impératif et notre
espérance. Grâce à l'apport des philosophies matérialistes mais aussi
animistes ou panthéistes inspirées de penseurs de tous les continents, la
philosophie écologique contemporaine a partiellement renoué avec la sagesse
des Anciens. Celle qui nous invite à envisager la nature avec affection,
considération et bienveillance.

*À propos de l'autrice*

Laurence Hansen-Løve est professeure agrégée de philosophie et autrice de
nombreux ouvrages, dont *Planète en ébullition* (Écosociété, 2022), *La
violence. Faut-il désespérer de l'humanité ?* (Du retour, 2020) et *Cours
particulier de Philosophie*. Questions pour le temps présent (Belin, 2006).
Elle a aussi codirigé, avec Laurence Devillairs, *Ce que la philosophie
doit aux femmes *(Robert Laffont, 2024).

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La menace de l’ ultra-droite en France

27 août 2024, par Jacques Leclercq — ,
Jacques Leclercq, chercheur indépendant spécialiste des extrêmes politiques, dresse un état des lieux précis et actualisé de la mouvance radicale de l'extrême-droite. Outre (…)

Jacques Leclercq, chercheur indépendant spécialiste des extrêmes politiques, dresse un
état des lieux précis et actualisé de la mouvance radicale de l'extrême-droite.
Outre des rappels historiques, de nombreuses thématiques sont traitées, dont les projets
d'attentats, l'infiltration dans la police et l'armée, le mercenariat et trafic d'armes, les
condamnations prononcées par la justice, les dissolutions de structures ou l'activisme sur le
net.
Une étude objective et factuelle permettant de mieux cerner la dangerosité de ce courant.

Jacques Leclercq, 67 ans, est un ancien formateur. Il a publié dix ouvrages chez
L'Harmattan.

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L’évasion fiscale, toute une histoire

27 août 2024, par Attac — , ,
Nouveau livre d'Attac : L'évasion fiscale, toute une histoire *A paraître* 30 aout 2024 *Le nouveau livre d'Attac et de la dessinatrice VAP*, */L'évasion fiscale, toute une (…)

Nouveau livre d'Attac : L'évasion fiscale, toute une histoire
*A paraître* 30 aout 2024

*Le nouveau livre d'Attac et de la dessinatrice VAP*, */L'évasion fiscale, toute une histoire/ <https://adherez.attac.org/civicrm/m...> *,*sort en librairie le *30 aout*. En texte et en bande dessinée, cet ouvrage raconte l'histoire de l'évasion fiscale, décortique ses mécanismes avec humour et pédagogie et avance des pistes pour en finir avec ce fléau.*

*Le livre est d'ores et déjà disponible à la commande* *sur le site d'Attac <https://adherez.attac.org/civicrm/m...> *.

Présentation du livre

*À première vue, l'évasion fiscale apparaît comme une question bien éloignée de notre quotidien : une affaire de riches et de grandes entreprises, de pratiques obscures et complexes dans des îles lointaines et paradisiaques.
Et pourtant, cette question nous concerne toutes et tous ! Car les sommes évadées sont autant d'argent soustrait aux budgets publics, autant de moyens en moins pour nos services essentiels (santé, éducation…), ou encore pour faire face à la crise climatique.*

*En texte et en BD, avec pédagogie et humour, cet ouvrage décortique les mécanismes de ces pratiques scandaleuses, raconte l'origine et l'histoire de l'évasion fiscale, jusqu'aux affaires les plus récentes (SwissLeaks, Pandora Papers...), et revient sur les combats et mesures qui permettent, petit à petit, de la faire reculer – grâce, notamment, aux lanceurs et lanceuses d'alerte.*

*Ce livre avance également des propositions pour poursuivre la lutte contre l'évasion fiscale, qui doit s'appuyer sur des mobilisations citoyennes, la mise en place de réglementations efficaces et la création d'organismes de contrôle nationaux et internationaux. Pour que toute cette histoire ait une fin !*

**Vous pouvez* consulter ici <https://adherez.attac.org/civicrm/m...> *un extrait du livre.**

*VAP* est illustratrice et autrice de BD pour plusieurs revues et associations.

*John Christensen*, co-fondateur de Tax Justice Network, signe la postface du livre.

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Pourquoi la classe compte. Capitalisme, genre et conscience de classe

27 août 2024, par Norbert Holcblat — ,
« Pourquoi la classe compte », autrement dit pourquoi la structure de classe a des conséquences sur, non seulement, les champs « macros » (évolutions et affrontements sociaux (…)

« Pourquoi la classe compte », autrement dit pourquoi la structure de classe a des conséquences sur, non seulement, les champs « macros » (évolutions et affrontements sociaux et politiques) mais sur la conscience des individus et des groupes jusqu'aux rapports interindividuels.

Tiré de Inprecor 722-223 juillet-août 2024

Par Norbert Holcblat

Erik Olin Wright, Pourquoi la classe compte. Capitalisme, genre et conscience de classe

Cet ouvrage (paru initialement en 2000) du sociologue américain Erik Olin Wright (1947-2019) apporte un éclairage original et important à l'étude des classe sociales. Edité en français en 2024, il a été traduit et postfacé par Ugo Palheta. « Le mot de classe ne sera jamais un mot neutre aussi longtemps qu'il y aura des classes  » a écrit Pierre Bourdieu (1) ; la formule est juste même s'il peut paraître paradoxal de citer Bourdieu (dont la sociologie, aux apports indéniables, se différenciait du marxisme) au début d'un article consacré au livre d'un auteur qui, pour sa part, s'est durant la plus grande partie de son itinéraire, référé au marxisme tout en étant soucieux de le confronter inlassablement à la réalité.

Dans cet ouvrage, la démarche d'Olin Wright se différencie donc largement de celles de la plupart des chercheurs marxistes. Ceux-ci, comme il le note dans ses conclusions, « se fondent traditionnellement plutôt sur des méthodes historiques et qualitatives dans leurs recherches empiriques ». Cela, on le sait, a donné lieu à des travaux qui ont fait progresser la connaissance (2) . Olin Wright, pour sa part, utilise ici les méthodes de l'analyse quantitative (enquêtes par questionnaires) pour faire apparaitre en quoi la classe « compte » ou ne compte pas.

Dépasser l'analyse schématique

Mais, en préalable, il construit une structure de classe qui ne dérive pas des catégories de la population active construites, en France par exemple, par la statistique officielle (les PCS de l'INSEE en France) mais est fondée sur le marxisme et la place fondamentale des rapports de propriété et de l'exploitation (il se démarque ainsi d'autres d'analyses des classes, telles celles de Max Weber et de Bourdieu). Cela le conduit à opérer une première distinction, fondé sur la propriété des moyens de production, entre ceux qui ne peuvent subsister qu'en vendant leur force de travail et ceux qui détiennent un capital, eux-mêmes subdivisés entre capitalistes (au moins dix salariés), petits employeurs (2 à 9), petite bourgeoisie (1 au maximum).

Mais Olin Wright entend aussi et surtout analyser le conglomérat majoritaire que constituent les salariés sans adopter la solution habituelle qui consiste à regrouper dans une « classe moyenne » (parfois qualifiée de petite bourgeoisie) à géométrie et à fondements variables ceux qui ne peuvent être classés ni parmi les prolétaires ni parmi les bourgeois. Il souligne que s'en tenir au critère de la propriété des moyens de production « amène à positionner 85 à 90 % de la force de travail des pays capitalistes les plus développés dans une seule classe (la classe travailleuse). En un certain sens, cela reflète une vérité profonde concernant le capitalisme à savoir qu'une large partie de la population est séparée des moyens de production et doit vendre sa force de travail sur le marché du travail pour survivre. » Néanmoins, c'est insuffisant, « si l'on souhaite notamment que la structure de classe nous aide à expliquer la conscience de classe, la formation de classe et le conflit de classe ». Dans le schéma d'Olin Wright, la condition de salarié·e ne suffit pas à caractériser une seule position de classe. La « classe moyenne » salariée correspond à « un ensemble de positions liées au processus d'exploitation et de domination de manière contradictoire ».

Distinguer les classes sociales

Pour analyser le salariat dans sa totalité, il introduit donc deux types de distinctions : la place dans la hiérarchie et l'autorité d'une part, les qualifications d'autre part. Ainsi parmi les travailleurs « de base » non-encadrants, Olin Wright distingue trois positions selon le niveau de qualification : non qualifiés, qualifiés, hautement qualifiés. Il procède de même pour les cadres supérieurs et le petit encadrement. Cela le conduit à distinguer neuf catégories parmi les salariés. Olin Wright remarque que le schéma ainsi construit n'inclut pas, par exemple, les « capitalistes qui ne sont pas techniquement des “employeurs” », c'est-à-dire ceux qui vivent essentiellement de revenus du capital sans être eux-mêmes des patrons. Mais son objectif est d'abord de construire un schéma théorique apte à être utilisé dans des enquêtes quantitatives produisant des résultats comparables dans divers pays, enquêtes qui confirmeront ou infirmeront la solidité de ses hypothèses.

Olin Wright met l'accent sur l'importance d'étudier les différences et les similitudes entre les salariés non prolétariens et les prolétaires au sens strict. Les premiers, donc, occupant des « positions contradictoires au sein des rapports de classe », à la fois exclus de la propriété des moyens mais en même temps distincts – dans une mesure plus ou moins grande – de la « classe travailleuse ». Les réponses aux questionnaires permettent d'en appréhender certaines dimensions, notamment pour ce qui est de la vision du conflit capital-travail : la « classe travailleuse », qualifiée ou non, est toujours la plus anticapitaliste et l'encadrement supérieur hautement qualifié se rattache à la coalition idéologique bourgeoise. Par ailleurs, si le degré de sentiment anticapitaliste varie selon les pays dans la « classe travailleuse » (et semble dépendre de l'importance d'organisations ouvrières indépendantes), la classe bourgeoise est partout clairement pro-capitaliste, ce qui d'une certaine façon rejoint les observations de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot sur la bourgeoisie française comme classe consciente et mobilisée (3).

Penser la complexité

Il faut souligner qu'Olin Wright ne s'engage pas dans le modèle ternaire avancé par certains économistes ou sociologues comme Gérard Duménil et Dominique Lévy qui font de l'encadrement une classe sociale à part et n'excluent pas que « le capitalisme pourrait laisser la place à un nouveau mode de production post-capitalisme, dit “cadrisme”, dont la classe supérieure serait celle des cadres  » à moins que la lutte des classes populaires ne conduise à une alliance entre les cadres (ou certains membres de cette classe) et celles-ci (4). On peut penser que Olin Wright a eu raison de ne pas céder à ce type d'extrapolations, qui d'ailleurs n'est pas récent, tant parmi ceux qui ont pu se réclamer du marxisme comme James Burnham dans les années 1930 et 40 (5) que parmi des économistes ou sociologues non-marxistes comme d'une certaine façon John Kenneth Galbraith dans les années 1960 (6).

Dans sa postface, Ugo Palheta rappelle que certains attribuent souvent et hâtivement aux marxistes une forme de « réductionnisme de classe ». Ce travers a pu exister mais il n'est aujourd'hui en aucun cas général. En tout cas, il en innocente à raison Olin Wright. D'aucune matière, celui-ci ne soutient que la classe explique tout. S'il reconnait que le facteur racial n'est abordé que de manière sommaire dans son ouvrage (à propos des USA) et qu'il mériterait d'autres investigations, quatre chapitres du livre sont consacrés aux questions de genre.

On ne reprendra pas ici les débats actuels sur l'intersectionnalité qui mériteraient de longs développements. Sur ce point, on se bornera pour conclure à reprendre le titre de l'ouvrage : « la classe compte ». Et l'éluder conduit à des impasses, théoriques et politiques, comme le rappelle Jean-Marie Harribey dans un article récent de la revue du conseil scientifique d'ATTAC : « si l'exploitation du travail au sens du prélèvement de la plus-value par le capital ne résume pas la totalité des dominations dans la société, sans le concept d'exploitation d'une classe par une autre la société devient incompréhensible » (7).

Norbert Holcblat, le 10 mai 2024

Notes

1. Pierre Bourdieu, Questions de sociologie, éditions de Minuit, 1984-1982, qui poursuit assez justement « La question de l'existence ou de la non-existence des classes un enjeu de lutte entre les classes ».
2. Nous nous contenterons ici de deux références La formation de la classe ouvrière anglaise de E.P. Thompson (The Making of the English Working Class), Le Seuil, collection Points, 2012 (édition française la plus récente) et Les ouvriers dans la société française, 19e-20e siècle, de Gérard Noiriel, Paris, Le Seuil, collection Points, 2011 (édition la plus récente).
3. M. Pinçon & M. Pinçon-Charlot, Sociologie de la bourgeoisie, Collection « Repères », La Découverte, souvent réédité.
4. Gérard Duménil et Dominique Lévy ont exposé cette thèse dans de nombreux textes, voir notamment une interview à Contretemps « A propos de « La grande bifurcation ». Entretien avec Gérard Duménil et Dominique Lévy »
5. les managers. Plus tard, il devint un idéologue de l'impérialisme américain.
6. Pour ce dernier, auteur du Nouvel État industriel (1967), i l y a une forme de divorce entre la détention du pouvoir juridique (celui des actionnaires) et l'exercice réel du pouvoir par les managers, la technostructure qui a pour objectif la croissance à long terme de l'entreprise. Le néolibéralisme a asséné un coup fatal à cette hypothèse.
7. « L'invisibilisation des classes populaires ». Dans cet article plutôt polémique et avec différentes cibles mais argumenté, J-M Harribey déplore le développement exagéré à gauche d'un « fond de référence identitaire plutôt que de classe pour caractériser individus et groupes sociaux ».

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Le chemin qui mène à la paix est... l’apaisement

27 août 2024, par Jean-François Delisle — , , ,
Cette formule résume bien l'actuelle situation calamiteuse qui afflige Gaza et les Gazaouis. En effet, depuis des mois, on discute d'une trêve (toujours insaisissable) dans le (…)

Cette formule résume bien l'actuelle situation calamiteuse qui afflige Gaza et les Gazaouis. En effet, depuis des mois, on discute d'une trêve (toujours insaisissable) dans le conflit entre le Hamas et Israël.

Pour les Américains, il faudrait une trêve de six mois qui permettrait la libération des otages israéliens toujours détenus par le Hamas d'une part, et d'autre part de prisonniers palestiniens qui croupissent dans les sinistres prisons israéliennes. Le Hamas, lui, exige un cessez-le-feu permanent d'abord, suivi de l'élargissement des otages et des taulards palestiniens.

Pendant ce temps, le gouvernement Netanyahou continue de bombarder sans arrêt Gaza ainsi que ses opérations militaires au sol, multipliant ce qu'on appelle pudiquement les victimes civiles ; et ce, sans même mentionner la résistances croissante des Palestiniens et Palestiniennes en Cisjordanie, qui fait elle aussi l'objet de la répression israélienne. On craint, à tort ou à raison, un élargissement dangereux du conflit dans une bonne partie de la région du Proche-Orient, ce que redoute par dessus tout l'administration Biden.

Deux remarques s'imposent. L'une découle de l'autre. Tout d'abord, le gouvernement américain fait tout pour obtenir un cessez-le-feu, sauf le nécessaire : l'adoption de mesures de rétorsion contre son homologue israélien. Tant que le soutien financier et militaire américain au cabinet Netanyahou va se poursuivre, ce dernier ne verra aucun intérêt à assouplir sa position vis-à-vis du Hamas. C'est élémentaire. Biden et consorts ne l'envisagent même pas. Ils prétendent vouloir obtenir un cessez-le-feu (temporaire, répétons le, ce qui est inacceptable pour le Hamas) tout en fournissant armes et munitions à Tel-Aviv et sans s'engager sur le long terme. Cette politique complaisante durcit l'intransigeance de Netanyahou à l'égard de Gaza et nourrit le sentiment d'injustice des Gazaouis.

De toute manière, au mieux, si une trêve permanente s'établissait, cela signifierait le retour au statu quoi : Gaza redeviendrait une prison à ciel ouvert et le paupérisme continuerait d'y sévir, le tout à cause du blocus israélien.

Il faudrait plutôt procéder à l'inverse : un cessez-le-feu d'abord, suivi de négociations entre le Hamas et le gouvernement israélien. Dans une optique plus large, si on tient à régler enfin le conflit israélo-palestinien, il importerait d'engager des négociations décisives à ce sujet au plus vite après le règlement de la guerre Israël-Gaza.

Plusieurs observateurs et analystes craignent, à tort ou à raison, un élargissement du conflit à toute la région du Proche-Orient si l'affrontement Israël-Hamas perdure. En particulier. certains redoutent que Téhéran ne se dote de l'arme nucléaire pour faire contrepoids à l'État hébreu.

On ne peut souhaiter le pire, bien entendu. Mais il est permis aussi de se demander si le danger d'un tel élargissement ne forcerait pas Israël à entendre raison et par conséquent, à négocier enfin de bonne foi avec la Palestine. Tant que l'extrême-droite israélienne demeurera au pouvoir, on ne peut espérer aucun progrès dans les relations entre les deux nations.

La clé de la paix au Proche-Orient passe par la résolution du conflit israélo-palestinien. Elle ne réglerait pas tous les problèmes de cette zone, mais vu son importance symbolique auprès des populations arabes, elle contribuerait à l'apaiser. D'ailleurs, la sécurité de l'État hébreu emprunte le long chemin de son acceptation par ses voisins. Toutes les parties gagneraient à une paix durable entre ces deux entités, y compris l'Occident.

Jean-François Delisle

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Feux dans le monde : en 1 an, des émissions équivalentes à 22 fois celles de la France

27 août 2024, par Reporterre.net — ,
Une étude parue mercredi 14 août dans le journal Earth System Science Data, révèle que les incendies dans les milieux naturels ont provoqué à eux seuls l'émission de plus de (…)

Une étude parue mercredi 14 août dans le journal Earth System Science Data, révèle que les incendies dans les milieux naturels ont provoqué à eux seuls l'émission de plus de 8,6 milliards de tonnes de CO2 dans le monde entre mars 2023 et février 2024. Ce chiffre est en hausse de 16 % par rapport à la moyenne et représente l'équivalent de vingt-deux fois les émissions de la France en 2023.

12 août 2024 | tiré de reporterre.net

Selon l'étude State of wildfires, près de 3,9 millions de kilomètres carrés sont partis en fumée. Plus fréquents et plus dévastateurs, notamment à cause des sécheresses à répétition, ces feux ont ravagé des zones entières en Amazonie (Brésil, Bolivie, Pérou, Venezuela), à Hawaï ou encore en Grèce. Athènes a une fois de plus été léchée par les flammes cet été. « L'année dernière, des feux ont tué des gens, détruit des maisons et des infrastructures, causant des évacuations de masse, menaçant les sources de revenus et endommageant des écosystèmes vitaux », alerte aussi Matthew Jones de l'université d'East Anglia, l'auteur principal du rapport. « Ces incendies deviennent plus fréquents et intenses avec le réchauffement du climat, et à la fois la société et l'environnement en subissent les conséquences », déplore-t-il.

Les émissions provenant des incendies dans les forêts boréales du Canada ont été plus de neuf fois supérieures à la moyenne des deux dernières décennies, et ont contribué à près du quart des émissions mondiales liées aux incendies. « Plus de 232 000 personnes ont été évacuées au seul Canada, ce qui souligne la gravité de l'impact humain », insiste l'étude. D'autres régions ont particulièrement souffert, notamment en Amazonie.

Selon les auteurs, le changement climatique a augmenté la probabilité de conditions météorologiques favorisant ces feux. D'après leurs calculs, le réchauffement d'origine humaine a augmenté d'un facteur 20 au moins la probabilité de conditions météorologiques propices aux incendies dans l'Amazonie occidentale.

À l'avenir, les auteurs de l'étude tablent sur une probabilité renforcée de ces incendies si l'humanité persiste à émettre beaucoup de gaz à effet de serre. Rien n'est encore écrit. D'après une autre étude publiée dans le journal Nature Ecology & Evolution en juin, le nombre et l'intensité des feux de forêt extrêmes ont plus que doublé dans le monde depuis vingt ans, en raison du réchauffement climatique dû à l'activité humaine.

Nous avons eu tort.

Quand nous avons créé Reporterre en 2013, nous pensions que la question écologique manquait de couverture médiatique.

Nous nous disions qu'il suffirait que la population et les décideurs politiques soient informés, que les journaux et télévisions s'emparent du sujet, pour que les choses bougent.

Nous savons aujourd'hui que nous avions tort.

En France et dans le monde, l'écrasante majorité des médias est désormais aux mains des ultra-riches.

Les rapports du GIEC sont commentés entre deux publicités pour des SUV.

Des climatosceptiques sont au pouvoir dans de nombreuses démocraties.

France - Indexation des salaires : une mesure économique nécessaire

Jonathan Marie, membre du collectif d'animation des Economistes atterrés, enseignant-chercheur en macroéconomie à l'université Sorbonne Paris Nord, défend la nécessité de (…)

Jonathan Marie, membre du collectif d'animation des Economistes atterrés, enseignant-chercheur en macroéconomie à l'université Sorbonne Paris Nord, défend la nécessité de restaurer l'indexation des salaires, mesure portée dans son programme par le Nouveau Front Populaire.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Le Nouveau Front Populaire fait de l'indexation des salaires sur l'inflation l'une de ses mesures phares. D'un point de vue politique, cette promesse fait sens car la baisse du pouvoir d'achat est un des motifs du vote en faveur de l'extrême droite, bien que celle-ci n'ait effectué aucune proposition sérieuse pour la contrecarrer.

La promesse de l'indexation est importante : elle indique aux travailleurs que les augmentations futures des prix n'auront pas les mêmes conséquences négatives sur leur pouvoir d'achat que celles enregistrées depuis 2021.

L'indexation des salaires est-elle pour autant justifiée économiquement ?

Oui, dans la situation économique actuelle qui n'est pas celle des années 1970 : le pouvoir de négociation des travailleurs est affaibli. Cet affaiblissement s'est accompagné d'une diminution de la part des revenus du travail dans le PIB, aujourd'hui à un niveau historiquement faible. L'inflation récente a encore accru cette distorsion.

L'indexation fournit dès lors un filet de sécurité : le pouvoir d'achat lié aux revenus du travail serait stabilisé par l'indexation, un mécanisme légal et automatique, alors que les travailleurs ont progressivement perdu la capacité d'obtenir collectivement, par la négociation, des augmentations de salaires. En soutenant ainsi le pouvoir d'achat, l'indexation réduit les risques d'une récession économique, qui s'accompagnerait d'une augmentation du chômage. L'indexation généralisée limite aussi la smicardisation de l'économie française (le rattrapage au niveau du Smic de nombreux salaires du bas des grilles de rémunération, car le Smic est lui indexé) : la Dares a évalué à la fin de 2023 que 17,3% des salariés français étaient rémunérés au Smic, contre 12% en 2021 et 14,5% en 2022.

L'indexation est une mesure défensive : ce n'est pas elle qui provoque l'augmentation des prix. Il n'y a donc pas lieu de craindre une fameuse boucle prix-salaires. D'ailleurs, les économies européennes comme la Belgique, qui ont conservé contrairement à la France une indexation généralisée, n'ont pas connu de trajectoire inflationniste foncièrement différente depuis 2021 [1].

L'indexation se justifie aussi sur un horizon de plus long terme par le fait que l'inflation récente est due à des évènements externes, en particulier la difficile reprise de la production mondiale après la crise sanitaire et les évènements géopolitiques comme la guerre en Ukraine. Ces chocs de prix peuvent s'accompagner de boucles prix-profits, révélant que les plus grandes entreprises sont en mesure d'augmenter leurs profits.

L'inflation est surtout liée à la trop forte dépendance de nos économies à la globalisation. Cette dépendance excessive s'exprime aussi par les pénuries de médicaments, ou par les dégâts environnementaux liés aux transports des marchandises au long cours. Réduire la probabilité que de nouvelles vagues inflationnistes se produisent nécessite donc de relocaliser certaines activités et de limiter la dépendance aux matières premières importées (notamment énergétiques). Cette évolution doit se faire en articulation avec les impératifs écologiques. Elle requiert des investissements massifs, publics comme privés, qui doivent être financés. Pour cela, la politique monétaire de la Banque centrale doit être accommodante, menée de manière à limiter le niveau des taux d'intérêt directeurs. Or, la BCE a répondu à l'inflation récente en augmentant les taux d'intérêt, affaiblissant la possibilité de financer les investissements indispensables à la bifurcation. Elle veut freiner l'inflation par le ralentissement de l'économie : comme les salariés sont moins en mesure d'obtenir des hausses de salaires, à cause de la montée du chômage, les entreprises sont moins tentées d'augmenter les prix si la demande se trouve réduite. Mais les causes structurelles de l'inflation ne sont pas corrigées : de nouvelles augmentations des prix des biens importés provoqueront à nouveau des vagues inflationnistes !

Une telle politique monétaire serait justifiée, selon ses promoteurs, par le fait que l'inflation doit être combattue pour limiter les pertes de pouvoir d'achat. Mais si les salaires sont indexés, comme on l'a déjà écrit, les effets sur le pouvoir d'achat des travailleurs sont amortis et l'argument en faveur d'une politique monétaire qui génère de la stagnation économique et du chômage, et qui est contradictoire avec les financements des investissements écologiques, tombe.

L'indexation des salaires est alors aussi légitimée par le fait que c'est une mesure qui s'articule avec la bifurcation écologique qui requiert, pour être financée, une politique monétaire qui n'ait pas pour objectif de créer du chômage pour lutter contre l'inflation. La transformation de nos modes de production et de consommation pourrait générer ponctuellement des tensions inflationnistes qui ne doivent pas peser sur les salariés. Attaquer sérieusement les causes de l'inflation exige bien des mesures de réduction de la dépendance aux importations, pas une politique monétaire restrictive.

L'indexation des salaires est un outil légal de défense des revenus du travail. L'indexation des salaires est actuellement prohibée par le code monétaire et financier (voir les articles L.112-1 à L112-4). Modifier ce cadre règlementaire et légal pour indexer les salaires réduirait la capacité des dirigeants des entreprises à augmenter leurs profits au détriment des revenus du travail en cas de choc de coût sur les importations. Activer cette possibilité est nécessaire car l'inflation est toujours l'expression de rapports sociaux concernant la répartition du revenu. A fortiori dans les périodes de fortes turbulences économiques et sociales comme actuellement, le libre fonctionnement du marché n'est pas en mesure de stabiliser le pouvoir d'achat et de faciliter une répartition moins injuste socialement. C'est à la politique macroéconomique et sociale d'exercer cette fonction d'autant plus indispensable que, dans un monde soumis au changement climatique, l'inflation pourrait être durablement plus élevée que les niveaux auxquels on s'était habitué depuis les années 1990.

Pour maintenir le pouvoir d'achat des travailleurs et permettre le financement d'un réel engagement contre les dégradations environnementales, l'indexation des salaires est un instrument de la politique économique qui doit être activé et qui limitera les effets des contraintes de tous ordres que va imposer la nécessaire bifurcation écologique.

[1] Selon Eurostat, si en mai 2024 le taux d'inflation estimé par l'IPCH est de 4,9 % en Belgique contre 2,6 % en France comme dans la zone Euro, en moyenne depuis janvier 2022, l'inflation a été de 6,16 % en rythme annuel chaque mois dans la zone Euro pour 5,88 % en Belgique et 5,27 % en France.

https://blogs.mediapart.fr/les-economistes-atterres/blog/250624/indexation-des-salaires-une-mesure-economique-necessaire

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Discussion avec des militant·es pour la solidarité ouvrière entre les Etats-Unis et la Chine

L'idée de solidarité elle-même est relativement jeune, puisqu'elle est principalement issue de la révolution industrielle. Bien sûr, les communautés se sont soutenues (…)

L'idée de solidarité elle-même est relativement jeune, puisqu'elle est principalement issue de la révolution industrielle. Bien sûr, les communautés se sont soutenues mutuellement pendant la plus grande partie de l'histoire, mais le mot et la pratique de la solidarité telles que nous les concevons aujourd'hui sont un phénomène assez récent. Elle est née du sentiment que les gens sont tributaires les uns des autres, non seulement pour des raisons morales ou politiques, mais aussi pour des raisons économiques, grâce au développement du capitalisme.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Andrew Sebald : Merci à toustes d'être présent·es. Pouvez-vous nous parler de votre expérience en matière d'organisation des travailleurs en Chine ?

Ellen David Friedman : Je suis une syndicaliste à la retraite. J'ai travaillé pendant une cinquantaine d'années dans le mouvement syndical américain, mais j'ai aussi vécu et travaillé pendant dix ans en Chine. J'ai été poussée par un besoin impérieux d'essayer de comprendre ce qui se passait en Chine après l'« ouverture » de Deng Xiaoping dans les années 1990. J'ai également milité dix années durant au sein du mouvement ouvrier à différents niveaux. Aux États-Unis, je suis principalement engagée dans le cadre du site de Labor Notes, dont j'ai l'honneur d'être la présidente du conseil d'administration.

Je suis partie en Chine il y a environ vingt-cinq ans. J'étais motivée pour m'y rendre parce que j'étais une fervente partisane de la révolution chinoise. J'avais été impressionnée et fascinée par certaines des premières réalisations de la révolution, mais j'ai ensuite vu comment les choses ont évolué. J'ai constaté des virages terrifiants vers l'autoritarisme, la mise à l'écart de la classe ouvrière, etc. À ce moment-là, j'avais près de quarante ans d'expérience dans le mouvement syndical américain, dans divers secteurs, de l'industrie manufacturière à l'enseignement public. J'étais consternée par ce que le néolibéralisme avait provoqué dans ce pays : la perte de substance de nos syndicats qui abandonnaient toute référence au pouvoir des travailleurs, et leur virage vers le recours à l'État pour résoudre les contradictions du capitalisme. Pour moi, ce n'était pas une voie qui pouvait permettre d'avancer, et j'ai donc voulu voir quelque chose de différent.

Ce que j'ai vécu en Chine a coïncidé avec une période de libéralisation conduite par Hu Jintao et Wen Jiabao, au cours de laquelle les militants étrangers ont été tolérés dans des proportions notables. J'ai pu vivre et enseigner dans une université de Guangzhou, l'université Sun Yat-Sen, où j'ai créé un centre international de recherches sur le travail. Ce centre a été subventionné pendant quatre ou cinq ans et a permis de promouvoir les échanges de militants syndicaux. Beaucoup de gens affluaient en Chine, en particulier dans le delta de la rivière des Perles, qui était devenu « l'usine du monde ». Il y avait des milliers de grèves en permanence dans des milliers d'usines. C'était passionnant, et nous avons pu faire de ces situations des sujets de recherche. Il y a eu une brève période pendant laquelle nous pouvions à la fois mener des recherches et échanger avec les travailleurs directement sur le lieu de travail, en rencontrant les gens dans leurs dortoirs, dans leurs usines, dans des lieux publics, et organiser des formations et des stages pour les animateurs de ces mouvements. Des gens venaient du monde entier pour faire des recherches dans ce domaine. C'était très fructueux et passionnant.

Puis Xi Jinping est arrivé au pouvoir et les murailles se sont refermées sur nous. En 2013 ou 2014, notre centre a été fermé. Nous n'étions plus en mesure d'inviter des étrangers. J'ai été arrêté par la direction de la sécurité nationale et on m'a demandé de quitter le pays. Depuis 2015, j'essaie de trouver des moyens de créer une solidarité ouvrière entre les États-Unis et la Chine dans des conditions extrêmement difficiles.

Kevin Lin : J'ai commencé à m'intéresser aux questions de travail en Chine entre 2009 et 2010. Ces années ont été des moments importants dans l'histoire récente du monde du travail en Chine du point de vue de l'ampleur des luttes ouvrières. J'ai eu la chance d'être attiré par le mouvement ouvrier en Chine à une époque où il y avait des luttes ouvrières dynamiques.

J'ai terminé mon diplôme de premier cycle vers 2009 – 2010. Je lisais tous les jours des informations sur les dernières nouvelles du monde du travail en Chine, qu'il s'agisse des grèves, des réformes sociales ou des catastrophes. À cette époque, les relations au travail évoluaient rapidement et les luttes des travailleurs s'intensifiaient. Je faisais partie d'une génération de jeunes qui étaient attirés par le mouvement ouvrier chinois en raison de ces luttes. Une mutation des consciences s'opérait, les Chinois ne considérant plus les travailleurs migrants ruraux comme de simples victimes d'un système oppressif. C'est au cours de cette période, entre la fin des années 2000 et le début des années 2010, que la population a véritablement changé d'attitude, passant de la sympathie à la solidarité. Les Chinois ne se contentaient pas de plaindre les travailleurs migrants, ils voulaient les rejoindre dans leur lutte. C'est ce type de solidarité là qui a émergé au cours de cette période. C'est le type de solidarité auquel je crois aujourd'hui, au-delà de la sympathie de nature morale à l'égard des victimes de mauvaises conditions de travail.

Alex Tom : Je me décrirais comme un activiste et un organisateur de mouvements depuis plus de 25 ans. J'ai fait partie de la Chinese Progressive Association (CPA) à San Francisco pendant plus de 15 ans. La CPA, qui a vu le jour au début des années 70, a créé de nombreuses branches et sections dans tout le pays. La CPA a joué un rôle clé dans la communauté des immigrés chinois en réclamant la normalisation des relations entre les États-Unis et la Chine et en soutenant fermement la révolution chinoise. C'était une chose particulièrement difficile à faire dans Chinatown, qui à l'époque était principalement contrôlé par le Kuomintang (KMT).

Notre communauté a une tradition de coopération d'individu à individu qui fait partie de notre patrimoine. Il est également important de se rappeler que des travailleurs chinois vivaient et travaillaient aussi aux États-Unis, et que de nombreux fondateurs de la CPA étaient des travailleurs sans papiers. C'est important parce que nous voyons maintenant le potentiel d'organisation de la diaspora ici aux États-Unis.

De nombreuses scissions se sont également produites au sein de l'organisation au cours des cinquante dernières années. L'une des plus importantes a été provoquée par le massacre de la place Tiananmen. Notre organisation et d'autres sections du CPA ont décidé de soutenir les étudiants et les travailleurs. Tout le monde à gauche n'a pas défendu cette position, mais il y a eu incontestablement des militants de gauche et des organisations de masse qui l'ont fait. Ce clivage est très important car certains pensent que la diplomatie « de peuple à peuple » consiste à soutenir inconditionnellement les positions des gouvernements révolutionnaires. Mais nous devons continuer à garder les pieds sur terre et à travailler avec quiconque se fait l'expression des opinions des travailleurs, qu'elle soit au pouvoir ou non.

Lorsque j'ai commencé à travailler pour le CPA en 2004, j'ai rencontré Ellen et, plus tard, Kevin. La Chine entrait dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC), ce qui marquait une étape importante dans le processus de mondialisation. En 2005, nous avons ressenti le besoin de faire venir des travailleurs chinois, des étudiants et des jeunes des États-Unis pour protester contre la réunion annuelle de l'OMC qui se tenait cette année-là à Hong Kong. Alors que beaucoup considèrent les manifestations de Seattle en 2000 comme la grande percée du mouvement antimondialisation, pour de nombreux Asiatiques, ce sont les manifestations de 2005 à Hong Kong qui ont été déterminantes. C'était la première fois que les communautés d'immigrés chinois critiquaient ouvertement la mondialisation et se mobilisaient contre elle. Certains ont perçu cela comme un « dénigrement de la Chine » au sein de notre propre communauté et parmi nos propres membres. Bien sûr, cela a changé après que nous avons organisé une plus importante campagne de sensibilisation sur les conditions de travail en Chine et dans d'autres parties de l'Asie.

La CPA existe depuis bien des décennies et a connu diverses conjonctures politiques et diverses luttes idéologiques dans ses rangs. À la fin des comptes, c'est de cette manière que nous avons maintenu notre mission et nos valeurs, en nous efforçant de refléter la conscience du peuple. Ensemble, ils ont intégré la délégation de la WT-NO, qui comprenait plus de 40 dirigeant.e ;s de Los Angeles, Philadelphie, New York et d'autres villes des États-Unis.

Au cours de l'été 2010, le CPA a organisé une veillée commémorative devant le magasin Apple de San Francisco à la mémoire des travailleurs de Foxconn qui s'étaient suicidés. Foxconn est le plus grand fabricant d'électronique au monde et l'un des principaux fabricants de produits Apple. Les conditions de travail dans l'usine sont si dures pour les jeunes travailleurs que des dizaines d'entre eux ont tenté de se suicider, mais les nombreuses actions menées pour augmenter les salaires n'ont toujours pas permis d'améliorer les conditions de travail.

Andrew : Quelles sont les points communs entre les conditions de travail auxquelles sont confrontés les travailleurs américains et chinois ?

Ellen : Après m'être installée en Chine et m'être frottée à la complexité de ses strates sociales, j'ai réalisé que la Fédération des syndicats de Chine (ACFTU) est avant tout une instance gouvernementale plutôt qu'une organisation de masse représentant les intérêts de la classe ouvrière. Sous la pression du néolibéralisme, l'ACFTU, même si elle a une taille énorme et possède de nombreuses ressources, est devenue une organisation creuse et verticalisée, tout à fait éloignée des besoins de ses adhérent.e.s de base. Ceux et celles d'entre nous qui pensent que les syndicats devraient être des lieux où les travailleurs apprennent à se battre pour les intérêts de la classe ouvrière comprennent que les relations patronales-syndicales sont de nature conflictuelle. Mais cette conception est totalement absente au sein de l'ACFTU. Lorsque je suis retournée aux États-Unis, j'ai constaté des problèmes similaires dans bon nombre de nos syndicats. Bien entendu, tous les syndicats américains ne sont pas des coquilles vides, et la récente poussée syndicale a clairement révélé l'existence en profondeur d'un courant favorable à des réformes démocratiques. Toutefois, aux États-Unis comme en Chine, les dirigeants syndicaux ont tendance à être très dirigistes, conservateurs, bureaucratiques et à privilégier les bonnes relations avec les responsables politiques plutôt qu'avec les travailleurs. En Chine, toute initiative prise par des travailleurs de la base pour se regrouper de manière indépendante au sein des syndicats est sévèrement réprimée, et la perspective de syndicats dirigés de manière démocratique semble très lointaine.

Kevin : Au cours des vingt ou trente dernières années, le développement économique de la Chine s'est opéré par une industrialisation axée sur l'exportation. Des usines ont poussé partout en Chine, les travailleurs ruraux ont migré vers les villes et l'industrialisation à bas salaires et à faible niveau de qualification a été le moteur de l'économie chinoise. Le cœur des luttes ouvrières en Chine se trouvait au sein de la classe ouvrière industrielle. Ce n'était pas le cas des États-Unis à l'époque. À ce moment-là, le pays s'était déjà désindustrialisé au cours des vingt ou trente années précédentes. Je me souviens d'avoir participé à des réunions avec des délégations de travailleurs chinois et des activistes avec des syndicalistes américains, et les travailleurs américains, tout en exprimant leur intérêt et leur solidarité, avaient du mal à comprendre les luttes de la classe ouvrière chinoise parce que les Américains venaient principalement du secteur des services. Aujourd'hui, je pense qu'il y a de moins en moins de décalage entre les classes ouvrières américaines et chinoises. La Chine est en train de vivre le début de sa propre phase post-industrialisation, et de plus en plus de jeunes Chinois sont des cols blancs qui s'orientent vers les secteurs de la technologie et des services. Les travailleurs chinois sont de plus en plus nombreux à avoir une vision sombre de leur avenir, à l'instar de ce que les travailleurs américains ont pu ressentir il y a de nombreuses années.

Je pense que la meilleure façon pour les travailleurs de construire la solidarité est d'avoir des échanges d'expériences sur des situations concrètes. Bâtir la solidarité sur la base d'abstractions moralisantes n'est pas une démarche qui peut s'inscrire dans la durée, cela ne permet pas d'organiser efficacement les travailleurs. Maintenant que les classes ouvrières américaines et chinoises commencent à connaître des luttes de même nature, un espace est en train de se dessiner où elles pourront s'organiser ensemble.

Alex : J'aimerais ajouter à cela une anecdote personnelle. Dans notre délégation du WT-NO, nous avions des travailleurs de Chinatown, dont l'une avait travaillé dans le secteur de l'habillement pendant la révolution culturelle. Avant notre voyage, les membres de notre délégation éprouvaient un sentiment de fierté à l'égard de la Chine. Nous critiquions la mondialisation et ils nous disaient souvent que nous devrions être plus « dialectiques » à ce sujet. Même si la mondialisation peut avoir des effets néfastes, il était difficile de ne pas être patriote au regard de l'ascension fulgurante de la Chine sur la scène internationale. Lorsqu'ils ont visité la Chine, ils n'ont pu que constater le développement rapide et la modernisation de leurs villes d'origine. De nombreux membres de la délégation ont cru que nous mentions sur les conditions de travail des ouvriers, estimant que nous étions trop sensibles à la rhétorique anti-chinoise. Toutefois, peu de temps après, nous nous sommes rendus dans la zone économique spéciale (ZES) de Shenzhen et les membres de la délégation ont été choqués de constater à quel point les conditions de travail étaient mauvaises. L'ouvrière qui avait travaillé dans une usine de coton pendant la révolution culturelle a rappelé que son salaire minimum était beaucoup plus élevé que dans les usines de la ZES. Elle était scandalisée par le fait que les salaires étaient si bas.

Andrew : Y a-t-il eu d'autres initiatives importantes de solidarité ouvrière entre les États-Unis et la Chine au cours des dernières décennies ? En quoi peuvent- elles nous donner des indications sur les formes que prendra cette solidarité à l'avenir ?

Ellen : Depuis 20 ans que je mène ce travail, le point culminant de la solidarité entre les États-Unis et la Chine a été pour moi la grève des dockers de Hong Kong en 2013. C'est un petit groupe de grutiers qui a lancé la grève. Bien que peu nombreux, ils étaient hautement qualifiés, de sorte que lorsqu'ils cessaient de travailler, tout le reste s'arrêtait également. La grève s'est rapidement étendue. À Hong Kong, les deux syndicats étaient alors en conflit. L'un était la Fédération des syndicats de Hong Kong (HKFTU), étroitement associée à l'ACFTU du continent et traditionnellement plus docile. L'autre était la Confédération des syndicats de Hong Kong (HKCTU), favorable à la démocratie, qui a dû se dissoudre après la mise en œuvre de la loi sur la sécurité nationale en 2020. Tous deux étaient présents, mais le dynamisme des dockers associés à la HKCTU était si grand et si convaincant qu'il a rapidement gagné un large soutien extérieur. Des étudiant.e.s, des membres d'organisations socialistes et des militant.e.s d'autres syndicats se sont regroupés pour soutenir les dockers. La mobilisation de l'opinion publique à cette échelle était incroyable.

J'étais alors à Guangzhou, ce qui m'a permis de faire des allers-retours entre Guangzhou et Hong Kong pour suivre la grève. À mon retour aux États-Unis, nous avons organisé une tournée de conférences pour les dirigeants du syndicat des dockers. Ils ont commencé par prendre part à la conférence de « Labor Notes » en 2014, puis ils ont fait une tournée éclair destinée à obtenir le soutien des syndicats de dockers de la côte ouest. C'était assez intense, mais nous avons fait le tour de tous les ports de la côte ouest où le syndicat International Longshore and Warehouse Union (ILWU) est représenté. L'ILWU a une longue histoire de syndicalisme internationaliste, c'est l'un des rares syndicats américains à avoir cette tradition. L'ILWU a organisé des discussions avec ces militants à Los Angeles, Oakland, Tacoma, Portland et dans d'autres ports encore. Ils ont collecté beaucoup d'argent pour couvrir les frais de grève. Nous avons également rencontré plusieurs groupes affinitaires et communautaires, comme le CPA. On pouvait sentir que les situations comparables vécues par les travailleurs, même si leurs syndicats étaient différents, leur permettaient de comprendre tout ce qu'il y avait de semblable et de se rendre compte du pouvoir qu'ils avaient sur le mouvement mondial du capital. C'était très impressionnant.

Je dois dire que ce genre de chose est au-delà de ce que nous pouvons imaginer aujourd'hui. Nous devons faire preuve d'une grande modération dans nos appréciations et nos attentes en ce qui concerne les possibilités de contact entre travailleurs. À l'heure actuelle, toute personne qui arriverait de Chine et prendrait publiquement position en faveur du militantisme ouvrier serait en grand danger à son retour dans son pays. Inutile de dire que ces personnes veulent éviter de s'exposer à un tel danger, si bien que de tels scénarios ne se présentent pas à nous pour l'instant.

Alex : Dans le prolongement de ce qu'a dit Ellen, le fait d'organiser des échanges de travailleur à travailleur a modifié qualitativement notre base aux États-Unis, car beaucoup parmi eux avaient peur de s'exposer. Cependant, après avoir vu comment les dockers de Hong Kong ou de jeunes travailleuses s'étaient organisés, j'ai entendu certaines de ces mêmes personnes aux États-Unis dire : « Hé bien, s'ils peuvent le faire, nous pouvons le faire aussi ». Il se crée quelque chose de très fort lorsque les gens voient la réalité de la lutte et de la contestation en Chine.

Je tiens également à souligner que le travail organisationnel se poursuit en Chine. Cependant, comme l'a dit Ellen, il est important d'avoir une évaluation sobre de ce qui est possible en Chine. Il faudra peut-être des décennies avant que les conditions ne changent. Pour aller de l'avant, il faut bien évaluer le moment présent et penser l'importance de l'organisation de la diaspora. Il y a des centaines de milliers de Chinois expatriés parmi nous. Certains d'entre eux ont participé à des mouvements en Chine, et l'une des propositions que je fais au sein de la communauté américaine d'origine asiatique est de faire participer ces étudiant.e.s chinois.e.s à l'étranger au sein de nos mouvements et de nos communautés. Ils ont besoin d'un espace qui leur permette de bâtir et de développer des stratégies autour de questions politiques : le travail, les questions de souveraineté et de démocratie en Chine, le climat, le féminisme, et bien d'autres choses encore. Nous devons donc créer un espace de réflexion stratégique qui leur permette de lutter, de construire et d'établir des liens avec d'autres mouvements.

Kevin : Je voudrais conclure par quelque chose d'un peu plus abstrait. J'ai lu deux livres récemment publiés sur la question de la solidarité. L'un est Struggle and Mutual Aid in the Age of Working Solidarity (Other Press, 2023) de Nicholas Delalande, qui est une histoire de la Première Internationale. Ce livre relate comment des liens ont été tissés entre les classes ouvrières européennes et américaine afin de dépasser les frontières nationales et d'établir des relations profondes entre elles. L'autre livre est Solidarity : The Past, Present, and Future of a World-Changing Idea de Leah Hunt-Hendrix et Astra Taylor (Penguin Random House, 2024). Ce livre nous apprend que l'idée de solidarité elle-même est relativement jeune, puisqu'elle est principalement issue de la révolution industrielle. Bien sûr, les communautés se sont soutenues mutuellement pendant la plus grande partie de l'histoire, mais le mot et la pratique de la solidarité telles que nous les concevons aujourd'hui sont un phénomène assez récent. Elle est née du sentiment que les gens sont tributaires les uns des autres, non seulement pour des raisons morales ou politiques, mais aussi pour des raisons économiques, grâce au développement du capitalisme. L'idée est que nous devons être redevables les uns envers les autres sur le plan matériel pour nous soutenir mutuellement.

Cet aspect matériel est important car la Première Internationale a démontré que la solidarité consiste pour les travailleurs à arracher le contrôle de l'économie aux capitalistes et à l'État capitaliste. Le livre m'a fait réfléchir encore plus sur ce que signifie la pratique de la solidarité, et sur la façon dont elle a pu faillir ou sur les endroits où elle a échoué. La solidarité ne se manifeste pas seulement par des manifestations de soutien visibles ; elle se construit également à travers des traductions au quotidien, une compréhension profonde des luttes des uns et des autres, et l'établissement de relations à long terme. Ce sont les fondations solides sur lesquelles nous pouvons construire notre solidarité.

Ellen : tu as bien préparé le terrain pour un point que j'aimerais ajouter, Kevin. Lorsque nous sommes confrontés à des situations dans lesquelles de nombreuses personnes vivent en exil ou sont soumises à des contraintes incroyablement restrictives dans leur pays, nous pensons souvent que cet isolement constitue un obstacle majeur à la mise en place d'une forme matérielle de solidarité. La forme la plus cruciale de solidarité est celle où les gens continuent à développer un ensemble de valeurs et d'outils analytiques pour évaluer la réalité et pour s'engager dans une certaine perspective sur la durée, quelles que soient les conditions qui les entourent à un moment donné. J'en ai vu de beaux exemples. Lors de la dernière conférence de Labor Notes, il y avait des personnes du monde entier qui ont mis en pratique le syndicalisme démocratique, même dans des situations où elles étaient confrontées à des conditions de plus en plus restrictives. Nous constatons une formidable soif de pratiques radicalement démocratiques, qui ne se limitent pas au vote, mais qui permettent d'apprendre à se comporter les uns avec les autres de manière fondamentalement respectueuse. Ce mouvement de solidarité en matière de convictions et d'objectifs, qui se construit au-delà des distances, sera une forme de puissance durable et pérenne qui se développera à mesure que nous avancerons.

David Friedman, Alex Tom, Kevin Lin, Andrew Sebald
https://newpol.org/issue_post/activists-on-u-s-china-labor-solidarity/
Traduit pour ESSF par Pierre Vandevoorde avec l'aide de DeepL.
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article71713

Cina, la solidarietà sindacale internazionale
https://andream94.wordpress.com/2024/08/21/cina-la-solidarieta-sindacale-internazionale/

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Le genre et la classe ouvrière chinoise

27 août 2024, par Olia Shu, Zoe Zhao — , ,
Pour l'exposé d'aujourd'hui, je me concentrerai principalement sur les conditions des travailleuses et Olia parlera davantage de l'auto-organisation et des ONG. Une partie de (…)

Pour l'exposé d'aujourd'hui, je me concentrerai principalement sur les conditions des travailleuses et Olia parlera davantage de l'auto-organisation et des ONG. Une partie de la discussion s'appuiera sur mon propre travail de terrain en Chine pendant la pandémie.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Zoe Zhao

Pour comprendre les relations hommes-femmes dans la classe ouvrière chinoise d'aujourd'hui, nous devons d'abord examiner la manière dont les chaînes de production sont organisées. Au-delà des grandes usines, les petits ateliers familiaux sont les principaux fournisseurs des grandes plateformes de commerce électronique en Chine. Dans l'industrie chinoise du commerce électronique et de la mode rapide, qui est de plus en plus intégrée à la chaîne d'approvisionnement mondiale avec l'essor des deux plateformes chinoises d'achat en ligne Shein et Temu, ce modèle de production familiale s'est considérablement intensifié au lieu de s'affaiblir. Les bénéfices de Temu et de Shein sont plutôt bons. Cela s'explique en partie par le fait qu'elles intensifient la concurrence entre les petits ateliers et sélectionnent le fournisseur le moins cher, qui a également tendance à avoir des pratiques d'exploitation de la main-d'œuvre plus importantes.

De nombreux ateliers familiaux sont regroupés dans des villages urbains où le loyer et la nourriture sont abordables, et les travailleurs et les travailleuses vivent parfois à proximité de leur atelier, voire à l'intérieur de celui-ci. Le problème des ateliers familiaux est qu'ils sont plus susceptibles de refléter la division sexuée du travail existant dans les familles patriarcales traditionnelles. Par exemple, dans ces ateliers, les femmes ont tendance à s'occuper de la cuisine, des courses et de la lessive, tandis que les hommes effectuent des tâches plus lourdes, telles que l'utilisation et la coupe des « tables » (les grandes surfaces planes utilisées dans l'industrie de la confection pour disposer, mesurer et couper le tissu). Les études menées par Nellie Chu, de Duke, sur les ateliers de confection ont montré qu'en raison d'une oppression commune, les ouvrières de différentes régions sont plus susceptibles de se lier les unes aux autres et même de développer un sentiment de solidarité avec les femmes propriétaires d'usine, ce qui est très différent des ouvriers qui sont souvent séparés par leur ville d'origine. Les recherches menées par Lin Zhang, de l'université du New Hampshire, révèlent la marginalisation des tisseuses rurales dans le commerce électronique. Elles se situent au plus bas de la chaîne d'approvisionnement et peuvent à peine réaliser des bénéfices.

En règle générale, les professions féminisées sont moins bien rémunérées que les professions masculines. De nombreuses industries de services dans les zones urbaines, en particulier les plus récentes telles que les boutiques de thé à bulles, attirent de jeunes travailleuses qui veulent se rapprocher du mode de vie urbain ou qui sont rejetées par les usines. J'ai vu une offre d'emploi dans un salon de thé à bulles de Shenzhen à la fin de l'année 2020 qui indiquait 3800 RMB (environ 526 $) comme salaire de départ pour une nouvelle travailleuse, ce qui est beaucoup plus élevé que le salaire de base de Shenzhen Foxconn (2650 RMB) – mais n'offre pas de rémunération pour les heures supplémentaires comme le travail en usine. Par conséquent, le revenu net et les avantages sociaux sont inférieurs à ceux des usines. De nombreuses travailleurses du secteur des services s'expriment sur leurs conditions de travail sur les réseaux sociaux. En plus de décrire la nature laborieuse du travail, elles disent aussi que le revenu réel peut être bien inférieur à ce qui a été promis, car de petites erreurs peuvent entraîner des pénalités supplémentaires sur le salaire.

En raison de l'essor des plateformes numériques et de la baisse des salaires dans les usines et dans le secteur des services urbains, les travailleurs et les travailleuses des plateformes, comme les livreurs/livreuses de repas (plus de 13 millions de personnes à l'heure actuelle), occupent une part de plus en plus importante de la main-d'œuvre en Chine, tout comme dans la plupart des autres pays. En Asie, la livraison de repas sur plateforme est un travail essentiellement masculin. Toutefois, depuis la pandémie, le nombre de femmes livreuses a augmenté de façon spectaculaire au niveau national. Environ 10% des livreurs de repas en Chine sont des femmes, et ce pourcentage est plus élevé dans les grandes villes. Le groupe de recherche de Ping Sun a estimé que le pourcentage de femmes livreuses est passé de 9% en 2020 à plus de 16% e 2021. Autre fait intéressant, les femmes sont généralement plus âgées que les hommes, car beaucoup d'entre elles ont été licenciées du secteur traditionnel des services. Dans l'ensemble, les livreuses souffrent également d'un écart de revenus et d'un harcèlement accru de la part des clients et des autres travailleurs. Pour ces raisons, nombre d'entre elles ne rejoignent pas les groupes d'entraide en ligne organisés par les livreurs, qui constituent le principal mode de communication entre les livreurs en Chine.

Il existe également une division notable du travail en fonction du sexe entre l'économie des plates-formes virtuelles et celle des plates-formes sur site. Les femmes sont beaucoup plus susceptibles de travailler dans des secteurs virtuels tels que la diffusion en direct et le service clientèle en ligne. De nombreuses travailleuses considèrent le travail à distance comme une option plus sûre. Dans mes propres recherches, de nombreuses femmes reconnaissent que le harcèlement sexuel endémique est l'un des principaux facteurs qui les poussent à éviter les emplois de service sur site.

Une autre tendance connexe est l'absorption de la main-d'œuvre féminine rurale excédentaire dans les nouvelles chaînes d'approvisionnement. Les travailleuses qui rentrent chez elles dans les provinces intérieures telles que le Henan et le Gansu constituent une partie essentielle de l'industrie de l'étiquetage des données qui stimule la production mondiale d'IA. Les gouvernements locaux encouragent nombre de ces initiatives dans le cadre de campagnes de lutte contre la pauvreté. Compte tenu de la forte demande des entreprises mondiales d'IA, il est fort probable que ce travail « fantôme » sexué continue à se développer.

L'augmentation du travail journalier dans de nombreuses grandes villes est l'une des tendances les plus contradictoires de la féminisation du travail au cours de la dernière décennie. La plupart des travailleurs journaliers sont des travailleurs migrants masculins. Nombre d'entre eux ont renoncé à obtenir un emploi à long terme ou un salaire. Au lieu de cela, ils se rassemblent sur de nombreux marchés du travail, essayant d'obtenir des contrats pour un jour ou deux et de se reposer le reste de la semaine. De nombreux clips vidéo sur les médias sociaux, en particulier sur Douyin et Kuaishou, montrent de jeunes travailleurs masculins qui tentent de diffuser leur expérience du travail journalier.

Cependant, il existe une autre dimension sexuée du travail journalier. Malgré la représentation plus élevée des travailleurs masculins, les travailleuses sont surreprésentées dans les agences de travail : elles servent de médiatrices entre les travailleurs masculins et les entreprises qui les embauchent. La raison en est que les propriétaires des agences estiment que les femmes sont plus aptes à communiquer avec les hommes, et aussi, ce qui est intéressant, qu'ils peuvent donner l'illusion qu'il y a beaucoup de jeunes femmes à l'intérieur des usines. L'une de ces agences de placement porte même le nom de « Good Sisters Human Resource » !

La Chine souffre également du vieillissement de sa main-d'œuvre, et nous devons donc également tenir compte des relations hommes-femmes parmi les travailleurs et les travailleuses plus âgées. L'âge moyen de la population active dans les régions urbaines et rurales augmente rapidement. Une étude réalisée par Yige Dong, sociologue à l'université de Buffalo (SUNY), sur l'industrie manufacturière, montre que le pourcentage de jeunes travailleurs et travailleuses célibataires a diminué de manière significative. Alors que Foxconn recrute toujours des personnes de moins de 40 ou 45 ans, la proportion de ses employé·es de moins de 30 ans est passée de plus de 90% à 48%. Cela est particulièrement vrai pour les usines situées dans les provinces intérieures, car elles attirent des travailleurs et des travailleuses de la même province. Il est également plus difficile pour les personnes plus âgées de se mettre en grève ou de protester, car elles ont plus à perdre et plus de membres de leur famille à s'inquiéter. Les travailleurs et les travailleuses âgées sont confrontées non seulement à une détérioration de leur état de santé et à des maladies professionnelles, mais aussi, et surtout, à un marché du travail hostile. En règle générale, les femmes de plus de 50 ans et les hommes de plus de 60 ans ont peu de chances d'être embauchés.

Je terminerai par quelques exemples d'affiches d'embauche que j'ai observées dans un quartier populaire du district de Yangpu, à Shanghai, en 2021. La majorité des annonces d'embauche ne demandent que des femmes de moins de 40-50 ans, et de moins de 60 ans pour les hommes. L'une d'entre elles recherchait explicitement des « femmes âgées de 18 à 42 ans ». Lorsque j'ai tenté de soulever la question de l'inégalité salariale et de la discrimination fondée sur l'âge auprès d'une agence pour l'emploi, on m'a répondu que « les femmes âgées devraient être reconnaissantes de pouvoir encore travailler comme nounous et gardiennes d'enfants », et j'ai ensuite été exclue sans ménagement d'un groupe en ligne. Les travailleurs et travailleuses agées peuvent contourner la limite d'âge en achetant de fausses cartes d'identité sur le marché illégal. Cependant, de nombreux et nombreuses travailleuses migrantes paraissent plus âgées que leur âge réel en raison des années de corvée, et sont donc plus susceptibles d'être interrogées par la police.

Olia Shu

En m'appuyant sur les remarques de Zoe, je parlerai principalement de l'imbrication entre l'organisation féministe et l'activisme sur le lieu de travail. Bien sûr, le simple fait de s'intéresser aux travailleuses ne nous donnera pas une image complète de la dynamique de genre dans la classe ouvrière chinoise, mais leurs expériences constituent une partie essentielle de l'histoire lorsqu'il s'agit d'interroger la dynamique d'un système capitaliste structuré par le patriarcat. Il n'est pas surprenant que les femmes aient tendance à être plus marginalisées et vulnérables dans leur vie sociale et sur le marché du travail. Les femmes chinoises passent deux fois plus de temps que les hommes à effectuer des tâches domestiques non rémunérées, sont davantage victimes de harcèlement sur leur lieu de travail et sont moins bien payées. Bien qu'il existe d'importants documentaires et d'autres images sur l'organisation des travailleuses chinoises, comme We the Workers (2017) et Outcry and Whisper (2020), ils sont rarement abordés dans les grands médias chinois et ne reçoivent que peu d'attention de la part du public. Ils montrent des exemples d'organisation militante d'action par des travailleuses, mais je souhaite également attirer l'attention sur différents modèles nuancés d'organisation qui sont devenus de plus en plus courants à mesure que l'espace pour la mobilisation est devenu plus difficile, avec des conséquences plus graves de la répression de l'État. Seules des conditions très particulières permettent des manifestations de masse et d'autres confrontations avec la police et les employeurs.

Nous devons également prendre en considération les aspects moins tape-à-l'œil de l'organisation des travailleuses, qui sont essentiels à l'activisme sur le lieu de travail aujourd'hui. Les travailleuses plus âgées qui guident les plus jeunes, ou les travailleuses parlant le même dialecte dans la même région, s'organisent souvent en petits groupes pour se soutenir mutuellement. Ces espaces constituent des points de départ essentiels qui permettent aux travailleuses de comprendre et d'évoquer les griefs collectifs et de découvrir la confiance et l'autorité nécessaires pour se battre. Les travailleuses utilisent également les médias numériques pour s'enseigner mutuellement et faire circuler le droit du travail et d'autres outils institutionnels. Alors que certain·es avocat·es, étudiant·es, activistes et journalistes qui les soutiennent reçoivent souvent le plus d'attention après les actions de celles-ci, les travailleuses ordinaires sans plateforme sont souvent confrontées aux représailles les plus directes et les plus dures. De nombreuses travailleuseuse apprennent également à s'organiser et à utiliser la loi à leur avantage, même si beaucoup d'entre elles n'ont pas de casquette professionnelle.

Le Sunflower Service Center for Female Workers est un bon exemple de ce type d'auto-organisation des travailleuses. Quelques travailleuses ont créé le centre à Guangzhou en 2011, souhaitant collaborer pour fournir des services de garde d'enfants et organiser diverses activités récréatives et culturelles. Guangzhou comptait plus de cent mille travailleuses, et le centre a accueilli de nombreux événements culturels populaires et a attiré l'attention des médias locaux, recevant même des appuis officiels pour ces événements. L'un de ces événements invitait les travailleurs, hommes et femmes, à porter publiquement des chaussures rouges pour femmes afin de sensibiliser le public aux questions de genre sur le lieu de travail. Finalement, les travailleuses de Sunflower ont commencé à cultiver davantage de connaissances juridiques et de pouvoir collectif, et les travailleuses du centre se sont rapidement conseillées les uns les autres sur la manière de négocier avec succès avec les entreprises sur les questions de vol de salaire. La nouvelle de l'existence du centre a commencé à se répandre. À un moment donné, plus d'un millier de travailleuses qui avaient travaillé dans une usine locale de jouets pendant plus de 20 ans n'ont pas reçu l'intégralité de leur rémunération et de leurs prestations de sécurité sociale lorsqu'elles ont atteint l'âge de la retraite. Elles ont contacté le Sunflower Center, qui les a aidés à gagner un important procès la même année contre l'entreprise.

Ainsi, au début des années 2010, Sunflower a commencé à passer d'activités culturelles à des actions militantes, ce qui a finalement conduit à sa répression. Depuis l'affaire des travailleuses de l'usine de jouets, l'association a commencé à subir des pressions directes et indirectes de la part des autorités et d'autres acteurs pour qu'elle ferme ses portes. À un moment donné, le propriétaire a commencé à couper l'eau et l'électricité ; un autre matin, les organisatrices ont découvert que quelqu'un avait soudé leur porte métallique au cadre, de sorte qu'ils ne pouvaient pas l'ouvrir. Les autorités locales ont fini par poser un ultimatum aux représentantes du Sunflower Center : soit elles fermaient eux-mêmes, soit elles attendaient une notification officielle de fermeture. En 2015, elles ont été contraints de fermer.

Alors que l'organisation militante est devenue de plus en plus persécutée après 2015, certains centres pour les travailleuses ont continué à survivre et à travailler par des voies plus subtiles et créatives. Ding Dang, par exemple, est cofondatrice du Green Roses Center of Social Work, qui existe toujours à Shenzhen. Elle a commencé à travailler à l'âge de 14 ans et a dû abandonner l'école pour travailler afin de subvenir aux besoins de sa famille. Elle a quitté sa ville natale rurale de Gansu pour s'installer dans le centre urbain de Shenzhen, où elle a fait l'expérience de la situation difficile des travailleuses des grandes industries, ce qui l'a amenée plus tard à s'organiser. Après avoir lu et appris davantage sur le travail et les questions sociales dans un centre de travailleuses, elle a identifié le genre comme une préoccupation majeure qui a influencé ses conditions de travail et celles d'autres collègues féminines. Elle a découvert que six des dix membres de son groupe d'amies au travail avaient été abandonnées par leurs parents en raison de leur sexe. Elle a commencé à comprendre que les usines préféraient embaucher des femmes parce qu'elles pensaient que les travailleuses seraient plus faciles à gérer. Elle a remarqué que si beaucoup de ses collègues féminines étaient habituellement discrètes en public, elles partageaient ouvertement leurs pensées en privé. Elle a continué à encourager ses collègues à trouver des moyens de s'exprimer, en créant son magazine et d'autres formes de contenu public.

Le Green Roses Center of Social Work fondé par Ding organise des activités telles qu'un « spectacle de chant pour la fête des mères » et une « exposition de poésie Bread and Roses », axés sur les travailleuses, ainsi que diverses activités de garde d'enfants et d'entraide pour permettre aux travailleuses migrantes de mieux s'adapter à la vie citadine. Green Rose utilise aussi efficacement les plateformes numériques pour atteindre les travailleuses, notamment par le biais de leurs comptes publics sur WeChat, Weibo ou Xiaohongshu.

En effet, comme l'a mentionné Zoe, les plateformes numériques deviennent un outil d'organisation de plus en plus important pour les travailleuses chinoises. Les travailleuses militantes délaissent les journaux traditionnels, les magazines et les blogs en ligne au profit de modèles de reportage et d'expression plus décentralisés, comme les médias sociaux. Certaines produisent des contenus courts, tandis que d'autres produisent des bulletins d'information plus longs, des podcasts et des documentaires, tout cela pour trouver des moyens de contourner la censure imposée par l'État sur les médias sociaux chinois. Da Gong Tan, par exemple, mène des entretiens avec des travailleuses d'horizons divers, notamment des travailleuses domestiques d'usines locales et des travailleuses internationales diplômées aux États-Unis. Les enregistrements audio, l'utilisation de pseudonymes et les abonnements à des messageries privées sont autant de moyens de contourner la censure. Des blogs de travailleures comme Spicy Pepper ou Jianjiao Bu Luo diffusent et commentent des statistiques pertinentes, avec des graphiques montrant par exemple que les taux de natalité des femmes sont en baisse ou que les femmes migrent davantage vers les villes que les hommes.

Des conductrices de camion, comme Li Xin, ont lancé des blogs sur une plateforme appelée Kuai Shou pour attirer l'attention sur leurs conditions de travail. Li documente sa propre vie de conductrice de camion et de mère de deux enfants, qui se rend au travail avec son mari et ne peut rentrer chez elle qu'une fois tous les deux mois. De telles histoires attirent l'attention d'autres conductrices de camion et d'autres personnes sur les médias sociaux. Ainsi, de plus en plus de travailleuses s'appuient sur des plateformes numériques pour discuter de leurs conditions de travail. Certains cas attirent l'attention du gouvernement et sont cooptés dans des récits d'État qui glorifient leurs « sacrifices » sans faire grand-chose pour changer le soutien social et la sécurité à long terme des travailleuses. Par la suite, Li s'est davantage intégrée aux médias officiels, participant à un célèbre concours de chant, et a dû modérer son contenu pour éviter toute agitation, alors même qu'elle invitait d'autres camionneuses sur sa plateforme à parler de leurs conditions de travail, y compris le cas d'un travailleuse décédée dans un accident de la route. Il n'y a pas grand-chose d'autre qu'elle soit autorisée à exprimer en toute sécurité, à part le genre de sentiment avec lequel elle a terminé dans un récent vlog : « La réalité est cruelle, mais la vie doit continuer ».

Nous devons également nous rappeler que l'alphabétisation numérique et plus large n'est pas encore tout à fait courante parmi les travailleuses, et c'est pourquoi le travail clé de Green Rose et d'autres groupes de travailleuses consiste à concevoir différents types d'ateliers d'écriture et d'alphabétisation médiatique. Un cours d'alphabétisation apprend aux femmes comment les caractères écrits correspondent picturalement aux différentes parties du corps, ce qui leur permet de discuter de concepts généraux de bien-être, de santé et de soins maternels.

Je voudrais conclure en soulignant que la précarité des conditions de travail en Chine signifie qu'il n'existe pas de modèle unique pour l'organisation des travailleuses. Les militantes doivent naviguer dans des conditions difficiles pour rencontrer les gens là où ils sont, avec des ressources limitées et la menace constante de la répression.

Zoe Zhao est une chercheuse et une activiste qui s'intéresse aux intersections entre la technologie, le travail et les mouvements sociaux.
Olia Shu est une activiste qui s'intéresse aux alternatives au capitalisme et aux théories et pratiques de décolonisation.

https://newpol.org/issue_post/gender-and-the-chinese-working-class/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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Le virus fasciste et le risque de pandémie

27 août 2024, par Marti Caussa — , ,
Le capitalisme néolibéral pousse les régimes politiques vers des démocraties illibérales ou des autoritarismes réactionnaires, comme l'expliquent Miguel Urban et Jaime Pastor : (…)

Le capitalisme néolibéral pousse les régimes politiques vers des démocraties illibérales ou des autoritarismes réactionnaires, comme l'expliquent Miguel Urban et Jaime Pastor :

Des décennies de gouvernance néolibérale et ses crises dérivées, qui ont favorisé une culture politique profondément antidémocratique. Il reflète l'obsession incessante du néolibéralisme de limiter les sphères et les fonctions sociales des États, d'aligner l'action publique sur les intérêts des acteurs de l'économie privée, de remplacer la réglementation et la distribution par la liberté d'entreprise et de placer les droits de propriété au-dessus de tout autre droit fondamental. (…) C'est cette anti-politique (...) qui est à l'origine de l'autoritarisme qui imprègne toute la carte politique.

24 août 2024| tiré de Vientosur Le virus fasciste et le risque de pandémie | Article original en catalan

Dans ce texte, je propose une réflexion sur la question de savoir si, dans cette dynamique, certains éléments caractéristiques du fascisme classique sont modifiés et recombinés avec de nouveaux éléments, comme c'est le cas avec les souches modifiées d'un virus précédent, et affectent progressivement diverses parties des institutions et du corps social. Le danger est que la contagion s'accélère de telle manière (comme une pandémie) qu'elle provoque des changements substantiels et finisse par aboutir à une dictature brutale qui a suffisamment de similitudes avec le fascisme pour être considérée comme son héritière.

Dans une dynamique fasciste, il peut y avoir des étapes de contagion continue, mais lentes et relativement silencieuses, d'autres d'évolution accélérée et enfin un moment perturbateur important est nécessaire pour qu'un parti fasciste conquiert le pouvoir et se consolide.

Évidemment, nous ne sommes pas dans la situation des années 30 et aucun phénomène ne se répète de la même manière 100 ans plus tard. Le fascisme non plus. Ce que je propose de débattre, c'est de savoir si ces phénomènes de contagion d'un nouveau fascisme existent en Espagne, quel est leur degré de développement et comment ils peuvent être affrontés.

Naturellement, nous devons commencer par clarifier ce que je considère comme les traits caractéristiques du fascisme qui ont le plus grand potentiel de développement et d'opération dans la situation actuelle.

Le fascisme et les conditions de son développement

1 Le fascisme doit être compris comme une dictature dans laquelle l'appareil répressif – armée, police, justice, etc. – est renforcé par un mouvement de masse réactionnaire qui le complète par le bas, dans le but d'éliminer les organisations populaires existantes et de les remplacer par d'autres de montage et de contrôle au service des intérêts de l'État fasciste. Pour réduire les termes : le fascisme est qualitativement différent d'une démocratie abrégée, c'est une dictature ; Mais toutes les dictatures ne sont pas fascistes, pour l'être, elles ont besoin d'un mouvement de masse réactionnaire :

Une dictature militaire ou un État purement policier (...) n'a pas les moyens suffisants pour atomiser, décourager et démoraliser, sur une longue période de temps, une classe sociale consciente de plusieurs millions d'individus et empêcher ainsi toute relance de la lutte de classe la plus élémentaire (...) Pour cette raison, un mouvement de masse qui mobilise un grand nombre d'individus est nécessaire. Seul un tel mouvement peut décimer et démoraliser le rang le plus conscient du prolétariat par une terreur de masse systématique (...) et, après la prise du pouvoir, le laisser non seulement atomisé, à la suite de la destruction de ses organisations de masse, mais aussi découragé et résigné (Fascisme, Ernest Mandel, 1969).

Cependant, à l'intérieur de cette caractérisation du fascisme, il y a eu de nombreuses variantes en fonction du protagonisme et du moment où il est assumé par les différents acteurs nécessaires – en particulier l'armée et le mouvement de masse fasciste – de la manière dont le parti fasciste arrive au pouvoir et de la résistance qu'il rencontre pour le consolider. Le nazisme et le franquisme sont deux modèles extrêmes.

Dans le cas espagnol, le fascisme a pris la forme du franquisme, le rôle principal correspondait à l'armée, la façon d'arriver au pouvoir était un coup d'État militaire, et le parti fasciste (Phalange) était marginal avant le coup d'État et s'est développé et a été remodelé lorsque l'armée franquiste a gagné la guerre.

2. Une étape nécessaire et très importante dans les processus de contagion du fascisme est d'amener une partie de la population à développer un sentiment d'altérité, d'inimitié et même de haine envers l'autre, au point de le considérer comme digne de lui nier ses droits fondamentaux et de le réprimer. Et qu'un large secteur social est passif et consent à ces attaques. L'exemple typique est celui du nazisme à l'égard de la population juive.

Lorsque ce sentiment de haine envers un secteur social s'est réalisé, il est très facile de le propager à d'autres : dans le cas du nazisme, après la population juive sont venus les gitans, les homosexuels, les slaves, etc. Et il a fini par englober ceux qui n'étaient pas nazis : communistes, socialistes, démocrates,...

Il n'est pas vrai que les projets d'extermination nazis étaient réservés exclusivement à la population juive. La population tsigane a connu un taux d'extermination comparable à celui des Juifs. À long terme, les nazis voulaient exterminer une centaine de millions de personnes en Europe centrale et orientale, principalement des Slaves (« Prémisses matérielles, sociales et idéologiques du génocide nazi », Ernest Mandel, 1988).

Dans le cas espagnol, l'ennemi des années 1930 était, en théorie, la conspiration juive, maçonnique et bolchevique, mais il a rapidement été identifié aux organisations de la classe ouvrière, aux libéraux et aux nationalistes périphériques. Paul Preston a analysé ces origines de la haine dans le livre L'Holocauste espagnol (2011) :

L'idée de ce puissant complot international ---ou conspiration, l'un des mots favoris de Franco--- justifiait le recours à tous les moyens nécessaires à ce qui était considéré comme la survie de la nation (...)

L'idée que les gens de gauche et les libéraux n'étaient pas d'authentiques Espagnols et qu'ils devaient donc être détruits a immédiatement pris racine au sein de la droite (...)

José Antonio Primo de Rivera, bien qu'il ne soit pas antisémite, a également coïncidé en associant la gauche aux Maures (...) il interprète toute l'histoire de l'Espagne comme une lutte éternelle des Goths et des Berbères (...) l'incarnation de ce dernier était le prolétariat rural

3 Pour combattre violemment son ennemi social, le fascisme, il a besoin de construire une identité alternative qui dépasse et s'oppose aux divisions existantes dans la société et dans sa propre base. Historiquement, cette identité a été fondée sur un nationalisme ethniciste ou raciste. Dans le cas espagnol, il s'est combiné avec le fondamentalisme catholique.

Le nationalisme raciste était également un pilier fondamental pour justifier la conquête de l'Abyssinie par Mussolini ou l'invasion nazie de plusieurs pays européens et de l'URSS.

4 La préparation des conditions d'une dictature fasciste est lente et laborieuse, car il est nécessaire de créer les conditions d'un mouvement de masse déterminé à agir violemment contre une partie très importante de la population et à détruire ses cadres et ses organisations. Il a fallu créer un climat social favorable aux propositions fascistes, les faire pénétrer dans l'appareil d'État, les partis traditionnels, les normaliser et, même partiellement, les actions contre les secteurs populaires ont dû être acceptées, même passivement... Cette phase de préparation idéologique, politique et matérielle, que j'appelle contagion, Ugo Palheta et Omar Slaouti l'ont appelée fascisation :

« Le fascisme n'existe pas du jour au lendemain (...) ne peut surgir sans toute une étape historique d'imprégnation, à la fois idéologique et matérielle, mais une série de transformations qui modifient l'équilibre interne de l'État » (« Islamophobie, fascisation, racialisation », Viento Sur 193, juin 2024).

L'arrivée au pouvoir des partis fascistes, à la fois par un coup d'État et par des procédures parlementaires ou pseudo-parlementaires, représente un saut qualitatif et une forte accélération de toutes les attaques contre les libertés démocratiques et les organisations populaires, mais elle n'est consolidée que s'ils ne réagissent pas rapidement et de manière décisive. L'exemple le plus spectaculaire de la réaction populaire contre un coup d'État militaro-fasciste a été l'insurrection populaire du 19 juillet 1936, qui a réussi à la vaincre dans un premier temps dans la majeure partie de l'État espagnol.

5 La définition de l'ennemi à affronter, l'obtention d'un certain degré de consensus social dans les attaques contre celui-ci et l'affirmation de l'identité fasciste, sont les conditions préalables à une violence des secteurs de masse (nécessaire pour qualifier un régime de fasciste). Cela devrait aussi commencer progressivement, par tâtonnement. Si l'idéologie fasciste a pénétré le système judiciaire, la police et l'armée de manière significative, la violence peut d'abord être déléguée à ces appareils d'État, en les mettant sous pression par des manifestations ou des campagnes de rue. Lorsque la conjoncture a besoin d'un degré de violence plus élevé, l'émergence de gangs fascistes violents et massifs peut être très rapide.

6 Dans tous les cas, pour que le fascisme triomphe et puisse rester au pouvoir, il a besoin du soutien de la majorité du grand capital. Mais pour que ce soutien soit apporté, il est nécessaire qu'elle voie sa domination sérieusement menacée, car elle a l'expérience historique que la dictature fasciste peut acquérir une telle autonomie qu'elle finit par l'exproprier politiquement et la conduire au désastre, comme ce fut le cas de l'Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale.

La menace du grand capital ne reviendra pas au danger communiste tel qu'il était dans les années 1930 (bien que les groupes néofascistes et d'extrême droite d'aujourd'hui qualifient tous les gens de gauche de communistes). Mais c'est peut-être l'existence de mobilisations massives et continues qui, bien qu'elles n'aient pas de direction qui cherche à s'emparer du pouvoir politique, sont suffisantes pour déstabiliser gravement le système de domination et d'accumulation du capital.

La contagion fasciste est une réalité dans l'État espagnol et pourrait s'accélérer

7 La définition des ennemis à combattre radicalement est clairement définie par Vox et le PP (en particulier par le secteur radical représenté par Ayuso) : les migrants, en particulier les musulmans ; les nationalistes pro-indépendance ou pro-souveraineté ; les féministes et les personnes LGBTI ; les écologistes qui luttent contre le changement climatique ; les militants de la mémoire historique ; et un large éventail de ceux assimilés au communisme ou à l'indépendance : Podemos, les anarchistes et, à partir de la loi d'amnistie, les sanchistas :

[l'accord d'investiture avec ERC et Junts] génère une plus grande radicalisation du bloc de droite (...) Leurs qualifications des « concessions » faites par le PSOE comme un « coup d'État » à l'instar du 23F, de la « dictature », de l'« abolition de l'État de droit » ou de la « conspiration destituante » (FAES dixit d'Aznar), ajoutées au désormais classique « l'Espagne est brisée » et à celle de « gouvernement illégitime » (et maintenant « illégal » dans la bouche de Vox), ne sont pas compatibles avec le contenu réel de ces accords. mais ils favorisent un climat politique dans lequel les groupes les plus d'extrême droite et ouvertement néonazis, protégés par Vox et une partie du PP, acquièrent une notoriété qu'ils n'avaient pas atteinte jusqu'à présent (« La question catalane et la radicalisation croissante du bloc de droite », Pastor, Jaime, 11/11/2023).

8 Les composantes de base de l'identité fasciste sont également définies : l'anti-immigration, l'espagnolisme fondamentaliste, le blanchiment du franquisme, la défense du patriarcat, le négationnisme climatique, le néolibéralisme économique, le fondamentalisme catholique,...

9 Le climat de haine contre les secteurs à combattre s'est propagé, notamment grâce à d'importants médias, réseaux sociaux, sites web, etc., qui non seulement diffusent des idées, mais recourent aussi systématiquement à la diffusion de fausses nouvelles pour justifier les attaques contre les migrants, les personnes LGBTI, contre les cliniques qui pratiquent des avortements, le soutien à l'action policière contre le référendum du 1er octobre 2017 (Attrapons-les ! ), ...

Le glissement vers des positions réactionnaires d'un large secteur social a été favorisé par la dérive antidémocratique des gouvernements au pouvoir. Principalement par ceux du PP, mais aussi par ceux présidés par le PSOE. Ce dernier a normalisé des politiques xénophobes et racistes (avec le point culminant du massacre de Melilla en juin 2022), de graves coupes dans la démocratie (non-abrogation de la loi bâillon), le refus d'appliquer la justice universelle aux crimes du franquisme et, jusqu'à récemment, la répression contre le mouvement indépendantiste (collaboration à l'application de l'article 155 qui a supprimé l'autonomie de la Catalogne). De cette façon, il a contribué à la politique de la droite réactionnaire et du néofascisme qui a conquis les esprits avant qu'il ne puisse gagner aux urnes.

Le climat de haine n'aurait pas pu autant progresser sans la collaboration d'une partie de la justice qui n'a pas hésité à qualifier la désobéissance civile pacifique et massive du 1er octobre de rébellion militaire, en accusant les organisateurs des manifestations pacifiques de tsunami démocratique de terrorisme, en contestant la souveraineté du parlement espagnol en refusant d'appliquer la loi d'amnistie aux dirigeants du processus tout en bénéficiant généreusement à la police (51 des 105 personnes amnistiées à ce jour), et en recourant à la guerre juridique contre des ennemis politiques : Puigdemont, Arnaldo Otegi, Mònica Oltra, Pablo Iglesias, Irene Montero... Ces campagnes ont atteint le président du gouvernement, qui a été contraint de dénoncer la machine à argile, mais sans prendre la moindre action énergique pour y mettre fin et démocratiser la justice.

10. La survie de l'idéologie fasciste au sein de l'armée et de la police s'explique par le fait que le passage de la dictature à la démocratie s'est fait sans purger l'appareil d'État et protéger par la loi d'amnistie les responsables de crimes et de délits graves sous le régime franquiste. Dans le cas de l'armée, cette survie est périodiquement évidente à l'occasion de crises ou de conflits politiques : des manifestes de militaires de réserve (les seuls à pouvoir les signer) ont été publiés faisant l'éloge de Franco à l'occasion de son exhumation de la Vallée des morts ou appelant à la destitution de Pedro Sánchez suite à l'approbation de la grâce contre les personnes condamnées dans le processus. Dans le cas de la police et de la garde civile, on sait que des tortionnaires bien connus sous le régime franquiste ont continué à les remplacer, ont été promus, ont été décorés et n'ont pas été poursuivis pour crimes contre l'humanité, tant en Espagne que dans le procès argentin. C'est dans ce contexte que découlent les réalités actuelles : entre 2015 et 2016, la police patriotique, sur ordre du gouvernement PP, a espionné 69 députés de Podemos à travers les bases de données du ministère de l'Intérieur ; plus récemment, l'union Jusapol a sévèrement critiqué le gouvernement à la suite de la réforme (mais pas de l'abrogation) de la loi bâillon et du rapprochement des prisonniers de l'ETA avec le Pays basque ; et le syndicat de police SUP a signé un contrat avec l'ultra-entreprise Desokupa pour former 30 000 policiers.

11 Jusqu'à présent, la violence directe a été de faible intensité (elle s'est concentrée sur les migrants, les personnes LGBTI, les expulsions de la société Desokupa,...), en partie parce que le pouvoir judiciaire et la police ont fait la plupart du travail sous le couvert de lois antidémocratiques (comme la loi bâillon), à la fois à l'époque du gouvernement du PP et du PSOE (avec un rôle de premier plan du ministre Marlaska dans ce cas).

12 En Espagne, le parti néofasciste Vox a connu une croissance importante ces dernières années : 12,4 % des voix aux dernières élections législatives et 9,6 % aux élections européennes de 2024. Il n'est pas aussi fort que ses homologues italiens, néerlandais ou français, capable de gouverner ou ayant de bonnes chances de le faire, mais il a laissé derrière lui la phase où il ne servait que de chien renifleur pour la droite, testant quelles questions pouvaient acquérir un soutien populaire et commençant à les introduire dans l'agenda politique afin que le PP puisse ensuite les récupérer. Après les élections municipales et régionales de 2023, il a réussi à faire partie des gouvernements de coalition dans 5 communautés autonomes (Estrémadure, Aragon, Communauté valencienne, Castille-León et Murcie) et conditionne le gouvernement des îles par un pacte législatif. Le 11 juillet, Vox a rompu les pactes gouvernementaux avec le PP pour protester contre la décision de ce dernier d'accueillir un quota réduit de migrants mineurs non accompagnés, mais ils peuvent être réactivés.

Si la campagne juridique qui a dénoncé Pedro Sánchez était couronnée de succès et que le PSOE perdait la possibilité de former une coalition gouvernementale, l'alternative presque certaine serait un gouvernement du PP et de Vox (ou avec leur soutien). Dans ce cas, les politiques régressives augmenteraient considérablement parce qu'un bloc réactionnaire, conservateur, néolibéral et nationaliste espagnol serait consolidé, et qu'un parti néofasciste serait légitimé en tant que parti de gouvernement. À partir de là, avoir un gouvernement néofasciste majoritaire serait beaucoup plus facile, soit en raison de la propre croissance de Vox, soit parce que la composante fasciste qui continue d'incuber au sein du PP a pris le contrôle du parti ou l'a quitté pour en créer un nouveau.

La domination d'un parti fasciste sur le gouvernement central devrait avoir le soutien d'une partie décisive du grand capital. Pour l'instant ce n'est pas le cas, car la démocratie raccourcie actuelle lui suffit et lui permet d'évoluer davantage au rythme des principaux pays de l'Union européenne. Mais ils s'orientent aussi dans une direction inquiétante, comme l'expliquent Miguel Urbán et Jaime Pastor :

un autoritarisme post-démocratique se répand dans l'UE et ses États membres, avec des frontières de plus en plus perméables entre régimes libéraux et illibéraux (...)
Il n'est donc pas surprenant que l'extrême droite opte pour la voie réformiste au sein de l'UE (« Vers un despotisme oligarchique, technocratique et militariste », vent du sud 193, août 2024).

En réalité, les démocraties espagnole et européenne sont en mutation, tout comme le capitalisme néolibéral. Et si la tendance vers des régimes plus autoritaires semble claire, ni le point d'arrivée ni les rythmes ne peuvent être prédits. Mais il convient de se demander si dans cette mutation un fascisme du XXIe siècle, tel que nous l'avons présenté au début, peut trouver son opportunité. À mon avis, c'est le cas et le déclencheur le plus probable est la crise climatique. Comme l'a dit Phil Hearse :

La catastrophe climatique créera le genre de dislocation et de bouleversement social qui ne peuvent être contrôlés, du point de vue de la classe capitaliste, que par des dictatures autoritaires basées à leur tour sur des appareils militaro-policiers, et la tentative de mobiliser les masses sur la base du nationalisme, de l'identité ethnique ou du racisme. C'est ce que nous entendons lorsque nous parlons du fascisme moderne (« L'effondrement climatique menace d'apporter le fascisme et la guerre », 13/07/2023).

Naturellement, cette issue n'est pas certaine, tout comme dans les premiers stades de la propagation d'un virus modifié, il n'est pas possible de savoir s'il conduira à une pandémie, même si les effets néfastes sont vérifiables, et commencer à le combattre est le seul moyen pour les gens d'éviter de souffrir et que cela se termine par une pandémie.

13 La mobilisation sociale contre la contagion fasciste doit commencer dès maintenant. Il est nécessaire de lutter contre les agressions que subissent la classe ouvrière et les secteurs populaires, en particulier celles qui sont dirigées contre les personnes que la droite radicale et le néofascisme ont désignées comme ennemies. Nous devons unir la lutte de ceux d'en bas, qui sont l'immense majorité de la population, contre la petite minorité qui est la bénéficiaire des politiques d'exclusion sociale, d'austérité, de dégradation démocratique et de complicité avec les agressions impérialistes.

Face à la dynamique d'exclusion, nous devons exiger le respect scrupuleux de toute la législation internationale pour la protection des droits humains, en particulier aux frontières, et lutter pour imposer les droits de citoyenneté, sans exclusion, à toutes les personnes résidant sur le territoire de l'État espagnol.

Face à la montée de l'autoritarisme, il est nécessaire de lutter pour une véritable démocratie, dans son sens originel de pouvoir du peuple de décider de toutes les questions de la manière la plus directe et participative possible à tout moment, sans autre limite que les droits des individus et des minorités. Le droit de décider des droits des femmes et des personnes LGBTI face au fondamentalisme religieux et à la moralité réactionnaire ; décider des mesures nécessaires pour lutter contre l'urgence climatique contre les intérêts des multinationales ; le droit de décider des relations que les peuples et les nations de l'État espagnol veulent maintenir face au dogme de l'unité indissoluble de l'Espagne ; le droit de décider des mesures à prendre pour rechercher la vérité, la justice et la réparation pour les crimes du régime franquiste face à une loi d'arrêt complet telle que l'amnistie,...

Face à l'accumulation de richesses par les multinationales et à la pauvreté de plus en plus étendue et cachée des grands secteurs sociaux, il est nécessaire d'exiger la défense et l'extension des biens communs, sans crainte d'incursions dans la propriété privée des puissants. Il n'est pas vrai qu'il n'y a pas assez de ressources pour tout le monde, mais qu'elles sont détournées par une minorité qui, en plus, les utilise pour maintenir une forme de production qui nous conduit à une catastrophe climatique. Nous avons besoin d'un modèle de production alternatif basé sur des critères écologiques qui réduisent l'utilisation d'énergie et de matériaux et qui sont orientés vers la satisfaction des besoins humains fondamentaux, loin du consumérisme.

Face à la concurrence entre blocs impérialistes et à la multiplication des conflits et des guerres au nom des nationalismes identitaires ou de la civilisation occidentale, nous devons faire preuve de solidarité avec les peuples qui luttent contre toute forme d'impérialisme et pour une véritable coopération dans la lutte contre le changement climatique et pour la durabilité de la vie sur une planète habitable. Nous devons nous opposer à l'augmentation des dépenses militaires, au soutien de l'État espagnol ou de l'UE aux interventions militaires et aux guerres contre d'autres peuples, et, en particulier, au génocide du peuple palestinien perpétré par un État raciste et colonial, où le gouvernement et des parties importantes de la société sont infectés par le néofascisme.

23/08/2024

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La Via Campesina : Les catastrophes climatiques exigent une réponse globale et urgente ! Basta les fausses solutions !

27 août 2024, par Vía Campesina — ,
Face à une crise environnementale et climatique sans précédent touchant des pays comme le Brésil, l'Équateur, l'Uruguay, l'Argentine, le Kenya, la Tanzanie, l'Afghanistan, la (…)

Face à une crise environnementale et climatique sans précédent touchant des pays comme le Brésil, l'Équateur, l'Uruguay, l'Argentine, le Kenya, la Tanzanie, l'Afghanistan, la France, la Thaïlande, l'Indonésie, entre autres, sous forme de vagues de chaleur, de fortes pluies et d'inondations, La Via Campesina avertit sur les responsables et appelle à une solidarité internationale urgente et à une réponse concertée menée par des solutions populaires.

Tiré de NPA 29
LA TRAGÉDIE ANNONCÉE

De récentes étudesont révélé que la chaleur écrasante qui a frappé l'Asie et le Moyen-Orient fin avril, rappelant les intenses vagues de chaleur de l'année dernière, était 45 fois plus probable dans certaines régions du continent en raison du changement climatique provoqué par l'activité humaine. Au cours de cette période, des températures élevées se sont fait sentir dans de vastes régions d'Asie, s'étendant de Gaza à l'ouest – où plus de 2 millions de personnes sont aux prises avec des pénuries d'eau potable, des soins de santé inadéquats et d'autres besoins essentiels au milieu des frappes aériennes israéliennes en cours – jusqu'aux Philippines dans le sud-est. Également en Thaïlande, les vagues de chaleur détruisent les cultures et les terres paysannes. Les ressources en eau s'assèchent et les journées extrêmement chaudes rendent dangereux le travail des paysan·nes dans les champs en raison du risque d'insolation. En conséquence, de fortes pluies et d'énormes inondations ont atteint la province de Narathiwat dans la région profonde du sud de la Thaïlande en décembre 2023, provoquant les pluies les plus importantes des 50 dernières années. De nombreuses parties du continent ont connu des jours consécutifs avec des températures dépassant 40 degrés Celsius.

L'Organisation météorologique mondiale des Nations Unies et l'agence climatique de l'Union européenne, Copernicus, rapportent que l'Europe se réchauffe à un rythme deux fois plus rapide que les autres continents, avec une augmentation de 30 % des décès liés à la chaleur au cours des 20 dernières années. Ce réchauffement rapide frappe le plus durement les paysan·nes, qui luttent contre la sécheresse, les inondations et les pertes de récoltes.

Des températures océaniques supérieures à la moyenne provoquent une évaporation accrue, entraînant davantage de précipitations et d'inondations dévastatrices sur tout le continent. C'est évident en Allemagne, dans le nord de l'Italie, dans le centre de l'Angleterre et en Slovénie, où de fortes pluies ont entraîné d'importantes inondations. En France, le contraste est saisissant : le sud-est souffre d'une sécheresse sévère, tandis que le nord est confronté à des inondations dévastatrices. Les fausses solutions de l'agroibusiness, comme les mégabassines, aggravent ces conditions en monopolisant les ressources foncières et hydriques.

Les inondations qui ont submergé l'Afghanistan, le Brésil, le Burundi, le Kenya, la Thaïlande, l'Indonésie, certaines parties de la Tanzanie et de nombreux pays d'Europe sont également sans précédent. Bien que certains rapports les attribuent à l'oscillation australe El Niño (ENSO) et les considèrent comme un phénomène naturel qui se produit depuis des siècles, des rapports scientifiques ont révélé qu'un climat en réchauffement pourrait contribuer à une augmentation de la fréquence et de l'intensité du phénomène El Niño. Les impacts peuvent être importants au niveau régional. En Amérique centrale, El Niño entraîne des précipitations excessives le long des côtes des Caraïbes, tandis que les côtes du Pacifique restent sèches. Les précipitations augmentent sur les côtes de l'Équateur, la partie nord du Pérou et les zones sud du Chili. Les pays d'Afrique de l'Est connaissent également des précipitations excessives avec une intensité accrue en raison de l'aggravation du changement climatique.

L'Organisation mondiale de la santé prévient que3,6 milliards de personnes résident dans des zones vulnérables au changement climatique, ce qui pourrait entraîner 250 000 décès supplémentaires par an d'ici 2030-2050, principalement en raison de la malnutrition, du paludisme, de la diarrhée, du stress thermique et désormais des maladies transmises par les insectes, les moustiques et autres vecteurs. La contribution du changement climatique à l'escalade des maladies à transmission vectorielle dans les pays à revenu faible et intermédiaire d'Afrique, déjà lourdement grevés par de nombreuses disparités sanitaires et socio-économiques, est une préoccupation importante.

Les pays du Sud, déjà en proie à une dette sévère, ne disposent pas des ressources nécessaires pour répondre et s'adapter adéquatement à ces crises qui touchent principalement la classe ouvrière et les paysan·nes – qui souffrent également de mauvaises conditions de travail, de logements inadéquats et d'un accès limité aux soins de santé. Ces catastrophes représentent également un énorme risque pour la souveraineté alimentaire des territoires, poussant davantage de personnes dans l'extrême pauvreté et la faim. Les économies industrialisées riches qui ont créé ces crises ne sont toujours pas disposées à reconnaître leur responsabilité et à fournir les ressources et les capacités nécessaires aux pays du Sud.

L'AGROBUSINESS, L'EXTRACTIVISME ET LES MULTINATIONALES, AINSI QUE LEURS BANQUES, SONT LES PRINCIPAUX RESPONSABLES !

L'agrobusiness et l'extractivisme sont les principaux responsables de la crise, car les taux élevés de déforestation, l'accaparement des terres, la perte de biodiversité et la réduction de l'absorption des sols aggravent la crise environnementale et climatique. L'utilisation d'agrotoxiques qui détruit toute biodiversité et contribue au déséquilibre des précipitations, conjuguée au capitalisme financier, avec ses banques qui dominent le monde, et au système alimentaire industriel dominé par les grandes entreprises transnationales du Nord global, constitue les principaux moteurs du changement climatique, l'agrobusiness représentant désormais plus d'un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

L'industrie militaire du Nord global promeut les conflits armés pour vendre des armes et maintenir ses taux de profit, tandis que les guerres affectent directement nos écosystèmes et notre environnement, entraînant la mort de milliers d'êtres humains. Mettons fin à toutes les bases militaires étrangères, aux agressions et aux guerres !

La crise environnementale que le monde traverse va bien au-delà de la crise climatique et prend racine dans la manière dont le système capitaliste organise la relation entre les êtres humains et la nature. La production orientée vers le profit exploite à la fois les personnes et la nature, épuise les communs et met en péril la survie de l'humanité et de la vie sur la planète.

Les capitalistes, avec certains gouvernements, cherchent à accroître leurs profits en créant le système de crédit carbone, qui ne modifie en rien la réalité en termes de biodiversité ou d'émissions de gaz, mais génère des illusions en vendant l'oxygène des forêts. C'est une honte.

ALERTE DE LA VIA CAMPESINA !

Face à cette grave crise, La Via Campesina appelle les États et gouvernements à adopter des alternatives concrètes et résilientes pour les populations touchées. Elle insiste sur le fait que la lutte contre le changement climatique doit faire preuve de volonté politique, mais aussi garantir que les communautés aient le contrôle de leurs territoires, et non les multinationales. Il est urgent de changer le système et de transformer les systèmes alimentaires, en identifiant les responsables et leurs responsabilités, et en mettant en œuvre des solutions claires telles que la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Paysans (UNDROP), l'Agroécologie Paysanne et la Souveraineté Alimentaire, qui créent des conditions dignes, une alimentation saine et régénèrent la vie et la nature.

L'influence des entreprises sur les États, les gouvernements et les institutions multilatérales, qui entraîne une inaction climatique et un déni absurde malgré les preuves scientifiques établies, est inacceptable. Nous ne pouvons pas continuer avec des politiques publiques locales et mondiales inefficaces, en mettant en œuvre des lois, des traités, des règlements et des subventions qui consolident et renforcent le capitalisme, le système alimentaire industriel et leurs intérêts corporatifs.

DES SOLUTIONS RÉELLES, PAS DES FAUSSES SOLUTIONS !

Le discours du capitalisme vert et de l'agrobusiness sur une agriculture intelligente face au climat, présentée comme régénérative, ainsi que d'autres mécanismes comme les marchés de carbone et les solutions basées sur la nature, s'inscrit dans une stratégie de greenwashing. Ces fausses solutions, historiquement dénoncées par La Via Campesina lors des sommets de la COP, ont conduit à des échecs dans les processus liés aux COP climat et biodiversité au cours des dernières années et décennies, sous l'influence du marché et des entreprises multinationales.

La COP30 Climat de 2025 au Brésil et la CBD de septembre 2024 en Colombie doivent marquer un tournant radical. Sans cela, ces processus risquent de perdre toute crédibilité et légitimité. En particulier, la CBD et la COP30 doivent mettre au centre de leur agenda la réforme agraire et l'usage des terres, de l'eau et des territoires entre les mains des populations, au service de la production d'aliments et d'autres biens indispensables à la dignité humaine, et non entre les mains des entreprises multinationales répondant aux caprices des plus riches.

Les COP devraient servir à trouver des solutions claires, à élaborer des propositions et des alternatives au changement climatique en collaboration avec les pays et la communauté scientifique. Ces espaces, désormais pris d'assaut par le lobbying pour l'expansion des multinationales et l'accumulation de richesse en pleine crise climatique, doivent se débarrasser de ces acteurs néfastes et assumer leur responsabilité historique envers les peuples du monde.

La Via Campesina plaide depuis longtemps pour des solutions réelles qui incluent les paysan·nes, les peuples autochtones et les pêcheur·euses, qui sont les gardien·nes des terres, des forêts, des zones côtières et des océans. Nous avons longtemps exigé une réforme agraire complète et des politiques d'utilisation des terres dans les pays, et la restauration de la santé des sols grâce aux pratiques agroécologiques paysannes, ainsi que des législations nationales alignées sur l'UNDROP. Plus que jamais, nous devons adapter les villes et les zones rurales pour faire face à la crise climatique.

Il est urgent d'accorder des fonds aux communautés sous forme de subventions, et non de prêts, comme réparations pour la responsabilité historique dans la crise climatique. Les réparations devront soutenir les efforts communautaires de restauration des terres dégradées par la plantation d'arbres natifs, en particulier dans les zones où ces derniers ont été détruits.

Il est impératif d'établir des programmes de production agroécologique garantissant une augmentation de la production d'aliments sains en harmonie avec la nature.

Il est essentiel de promouvoir des formes de taxation prélevant au moins 2 % sur les fortunes des milliardaires (qui ne représentent que 3 000 familles), ainsi que d'établir un impôt universel sur les bénéfices des sociétés transnationales. Avec cela, il est nécessaire de créer un fonds mondial pour lutter contre la pauvreté, l'inégalité sociale et le changement climatique.

Ces outils promeuvent une transition juste pour les paysan·nes, et plaident pour des relocalisations de la production et de la consommation alimentaires, garantissant la souveraineté alimentaire et renforçant les économies rurales. Ancrés dans les principes de justice climatique globale, nous continuons à lutter pour des réparations pour la dette et l'injustice historiques. Tous les financements climatiques doivent être entre les mains des communautés (et non des banques !), doivent prendre la forme de subventions (et non de prêts !), et doivent prioriser à la fois l'adaptation et l'atténuation.

Nous constatons comment, dans ce système capitaliste, les conséquences du changement climatique prévalent dans la plupart des pays du Sud Global, touchant principalement ceux qui produisent tout et possèdent peu : les travailleur·euses vivant dans des endroits socialement vulnérables dans les villes, expulsés par la spéculation immobilière et les actions des États légitimant l'établissement d'entreprises et de communautés fermées dans les endroits les plus privilégiés. Ainsi, en plus des problèmes sociaux comme la faim, la pauvreté, le manque d'assainissement, la violence armée ou les problèmes environnementaux, ils doivent également endurer les problèmes environnementaux que d'autres ont générés.

La lutte pour la justice environnementale et climatique, à la fois localement et globalement, est urgente et doit devenir un champ de bataille afin que nous puissions progresser dans la construction de solutions réelles et véritablement efficaces qui abordent les problèmes environnementaux et sociaux engendrés par le capitalisme.

C'est pourquoi nous exhortons notre base sociale entière – les paysan·nes du monde entier, les travailleur·euses urbain·es, les migrant·es, les jeunes, les femmes et les diversités – à s'organiser et à mener des luttes massives pour mettre un terme à cette folie capitaliste qui pourrait conduire à la mort de tous les êtres humains. Nous payons déjà un lourd tribut, avec de nombreuses vies perdues chaque jour !

3 juin 2024

https://viacampesina.org/fr/

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Comment Israël a délocalisé ses activités polluantes en Palestine

Les zones industrielles israéliennes se dressent un peu partout en Cisjordanie occupée. Les communautés palestiniennes étouffent sous la pollution et la colonisation de leurs (…)

Les zones industrielles israéliennes se dressent un peu partout en Cisjordanie occupée. Les communautés palestiniennes étouffent sous la pollution et la colonisation de leurs terres. La ville palestinienne de Tulkarem est connue pour ses agrumes, son université et pour les affrontements qui ont lieu régulièrement entre de jeunes combattants palestiniens et l'armée israélienne. Pourtant, une autre guerre s'y déroule en silence : les habitants de Tulkarem meurent cinq fois plus du cancer que les autres Palestiniens.

Photo : Une décharge sauvage palestinienne à Farkha, près de la rivière Ein al-Matwi, créée à cause du refus des autorités israéliennes de construire une véritable déchetterie en zone C (sous contrôle israélien). Ici le 4 mars 2024. – © Philippe Pernot / Reporterre
Tiré de reporterre.net

La faute à la zone industrielle israélienne nommée ironiquement Nitzanei Shalom (« germes de la paix »), installée sur des terres confisquées à la ville depuis les années 1980 — et connue des Palestiniens comme « Geshuri », du nom de l'entreprise d'herbicides qui s'est installée la première dans le parc industriel. Onze usines chimiques l'ont rejoint au fil des années. Elles se dressent, grises, entre des murs ceints de barbelés et des tours de surveillance. Une présence oppressante pour les 90 000 habitants de Tulkarem.

« Ici, nous avons deux problèmes : l'occupation israélienne et Geshuri, dit en soupirant Ahed Zanabet, responsable local de l'ONG environnementale palestinienne Parc. Les déchets chimiques provenant des usines du parc industriel s'écoulent dans les zones agricoles palestiniennes sans traitement. » Production de peinture, pesticides, gaz naturel liquéfié (GNL), nettoyage des conduites de gaz avec de l'eau sous pression… Les industries sont toutes plus toxiques les unes que les autres.

« Nous avons une incidence élevée de cancers du poumon dus à la pollution de l'air et de maladies de la peau dues aux résidus présents dans les gaz. Nos sources sont également polluées par les eaux usées des colonies », explique Ahed Zanabet. Les agriculteurs sont forcés d'utiliser des serres pour protéger leurs fruits et légumes, mais celles-ci sont vite recouvertes d'une couche de poussière toxique. « Nous ne pouvons rien faire pour stopper Geshuri, si ce n'est aider les agriculteurs dont les terres sont contaminées », dit-il avec résignation.

Dumping social et environnemental

L'usine Geshuri a été déplacée de la ville israélienne de Netanya vers Tulkarem en 1982, à la suite de plaintes d'habitants israéliens à cause de la pollution — un exemple suivi par de nombreuses autres entreprises dangereuses, relocalisées en Cisjordanie. Aux Palestiniens d'en souffrir, alors. Comme le parc industriel de Nitzanei Shalom est situé le long de la « ligne verte », à la frontière, ses rejets toxiques peuvent vite être poussés par le vent vers Israël… « Mais lorsque le vent souffle d'est vers l'ouest, les industries cessent de fonctionner pour ne pas polluer les Israéliens », s'exclame Abeer al-Butmeh, ingénieure environnementale et coordinatrice de l'association écologiste palestinienne Pengon-Amis de la Terre.

Ce sont donc les Palestiniens qui souffrent de la pollution dans l'indifférence générale. « Nous avons essayé de nous mobiliser à plusieurs reprises, en organisant des campagnes, des manifestations, des visites sur le terrain pour les missions internationales et des activistes, explique-t-elle. Rien n'a changé. »

Les ouvriers qui travaillent dans ces usines, majoritairement palestiniens, sont en première ligne. « Ils constituent une main-d'œuvre bon marché, et souffrent de nombreux accidents du travail, en particulier à Geshuri pendant les incendies liés au gaz naturel, et de maladies respiratoires », explique Abeer al-Butmeh. Au terme d'une longue grève, ils ont réussi à obtenir le salaire minimum israélien en 2016, mais leurs conditions de travail n'ont pas changé pour autant.

Des « zones sacrifiées »

Nitzanei Shalom fait partie de la soixantaine de zones industrielles israéliennes implantées en Cisjordanie occupée, selon Abeer al-Butmeh (Human Rights Watch en recense vingt). Elles profitent parfois à des multinationales étrangères — allant à l'encontre du droit international, qui considère les colonies comme illégales.

« En Israël, les entreprises doivent respecter des normes environnementales et sociales, ce qui leur coûte de l'argent. Elles transfèrent donc leurs usines polluantes en Cisjordanie, où elles ne respectent que des normes minimales, voire aucune », explique l'activiste.

L'organisation des droits de l'homme israélienne B'Tselem nomme ces aires industrielles des « zones sacrifiées », sortes de mini-paradis règlementaires où règne l'arbitraire. « Israël exploite la Cisjordanie à son profit, en ignorant presque totalement les besoins des Palestiniens et leur nuit, ainsi qu'à leur environnement », note leur rapport. C'est donc d'une guerre économique invisible que souffrent les Palestiniens, en parallèle aux raids de l'armée et des colons, qui ont fait plus de 560 morts en Cisjordanie depuis le 7 octobre.

19 millions de m3 d'eaux uséesCe dumping social et environnemental se répète à l'échelle de toute la Cisjordanie, polluée par 145 colonies israéliennes industrielles ou résidentielles. En 2017, ces dernières rejetaient ainsi 19 millions de m3 d'eaux usées vers les terres palestiniennes. Reporterre a ainsi observé des rejets d'eaux usées et de déchets par des colons dans les communautés palestiniennes à Wadi Fukin (près de Bethléem), à Bil'in (à l'ouest de Ramallah), ainsi que dans la région de Selfit, encerclée par l'immense bloc de colonies d'Ariel.

Presque 40 000 colons se sont implantés sur plus de 120 000 km2 de terres palestiniennes confisquées, ainsi qu'une zone industrielle nommée Barkan, qui abrite pas moins de 120 usines. Selon les calculs de la municipalité de Selfit, rien qu'Ariel produit 900 000 m3 d'eaux usées par jour. Une grande partie — ou la totalité — s'écoule à quelques mètres de la source al-Matwi. Des études de la municipalité et d'universités révèlent des traces de matière fécale, mais aussi des nitrates issus des eaux usagées des colonies. Moustiques et sangliers prolifèrent, propageant des maladies et détruisant des écosystèmes anciens.

Si l'absence de déchetteries et de stations d'épuration palestiniennes contribue à la pollution, le problème principal reste l'occupation israélienne, qui refuse plus de la moitié des projets de traitement de déchets en Cisjordanie.

Tulkarem (Cisjordanie), reportage

https://reporterre.net/

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Blanchissement de carbone — La « nouvelle ruée vers l’Afrique » du Golfe

27 août 2024, par Adam Hanieh — ,
Au début du mois de novembre 2023, peu avant l'ouverture du sommet COP28 à Dubaï, une entreprise des Émirats arabes unis, jusqu'alors méconnue, a retenu l'attention des médias (…)

Au début du mois de novembre 2023, peu avant l'ouverture du sommet COP28 à Dubaï, une entreprise des Émirats arabes unis, jusqu'alors méconnue, a retenu l'attention des médias en annonçant qu'elle avait l'intention de conclure des accords fonciers en Afrique.

14 août 2024 | tiré du site du CADTM
https://www.cadtm.org/Blanchissement-de-carbone-La-nouvelle-ruee-vers-l-Afrique-du-Golfe

Des rapports laissent entendre que Blue Carbon [1], une société privée appartenant au cheikh Ahmed al-Maktoum, membre de la famille régnante de Dubaï, a signé des accords lui promettant le contrôle de vastes étendues de terres sur tout le continent africain. Ces accords porteraient sur une superficie étonnante de 10 % de la masse continentale du Liberia, de la Zambie et de la Tanzanie, et de 20 % de celle du Zimbabwe. Au total, la superficie de ces terres équivaut à celle de la Grande-Bretagne.

La société Blue Carbon avait l'intention d'utiliser ces terres pour lancer des projets de compensation des émissions de carbone, une pratique de plus en plus répandue dont les partisans affirment qu'elle aide à lutter contre le réchauffement climatique. Les compensations carbone impliquent la protection des forêts et d'autres projets environnementaux qui sont assimilés à une certaine quantité de « crédits » carbone. Ces crédits peuvent ensuite être vendus aux pollueurs du monde entier pour compenser leurs propres émissions. Avant d'entamer les négociations de cet énorme accord, Blue Carbon n'avait aucune expérience dans le domaine des compensations carbone ou de la gestion des forêts. Néanmoins, l'entreprise s'attendait à gagner des milliards de dollars grâce à ces projets.

Les ONG de défense de l'environnement, les journalistes et les militants ont rapidement condamné ces accords en les qualifiant de nouvelle « ruée vers l'Afrique » - un accaparement des terres au nom de la lutte contre le changement climatique. En réponse, Blue Carbon a insisté sur le fait que les discussions n'étaient qu'exploratoires et qu'il faudrait consulter les communautés et poursuivre les négociations avant d'obtenir une approbation formelle.

Indépendamment de leur statut actuel, les transactions foncières soulèvent des inquiétudes concernant l'expulsion des communautés autochtones et d'autres communautés locales pour faire place aux plans de protection des forêts de Blue Carbon. Dans l'est du Kenya, par exemple, le peuple autochtone Ogiek a été chassé de la forêt Mau en novembre 2023, une expulsion que les avocats ont associé aux négociations en cours entre Blue Carbon et le président du Kenya, William Ruto. Des protestations ont également suivi les négociations à huis clos du gouvernement libérien avec Blue Carbon, les activistes affirmant que le projet viole les droits fonciers des populations autochtones inscrits dans la loi libérienne. Des cas similaires d'expulsions de terres dans d'autres pays ont conduit le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, Francisco Calí Tzay, à demander un moratoire mondial sur les projets de compensation carbone.

Au-delà de leur impact potentiellement destructeur sur les communautés locales, les activités de Blue Carbon en Afrique indiquent un changement majeur dans les stratégies climatiques des États du Golfe. Comme l'ont montré les critiques, l'industrie de la compensation carbone existe essentiellement en tant que mécanisme d'écoblanchiment, ce qui permet aux pollueurs de dissimuler leurs émissions constantes derrière l'écran de fumée de méthodes trompeuses de comptabilisation du carbone, tout en offrant une nouvelle catégorie d'actifs rentables pour les acteurs financiers. En tant que premiers exportateurs mondiaux de pétrole brut et de gaz naturel liquéfié, les États du Golfe se positionnent désormais à tous les stades de cette nouvelle industrie, y compris sur les marchés financiers où les crédits de carbone sont achetés et vendus. Cette évolution reconfigure les relations du Golfe avec le continent africain et aura des conséquences importantes sur les trajectoires de notre planète qui se réchauffe.

Falsification des comptes et blanchiment de carbone

Il existe de nombreuses variétés de projets de compensation carbone. Le plus courant concerne les projets de déforestation évitée qui constituent la majeure partie des intérêts de Blue Carbon dans les terres africaines. Dans le cadre de ces projets, les terres sont clôturées et protégées contre la déforestation. Les sociétés de certification de compensation de carbone - dont la plus importante au monde est la société Verra, basée à Washington - évaluent ensuite la quantité de carbone que ces projets empêchent d'être libérée dans l'atmosphère (mesurée en tonnes de CO2). Une fois évalués, les crédits carbone peuvent être vendus aux pollueurs, qui les utilisent pour annuler leurs propres émissions et atteindre ainsi les objectifs climatiques qu'ils se sont fixés.

De prime abord attrayants - après tout, qui ne souhaite pas que de l'argent soit investi dans la protection des forêts ? ces systèmes présentent deux défauts majeurs. Le premier est connu sous le nom de « pérennité ». Les acheteurs de crédits carbone obtiennent le droit de polluer ici et maintenant. Pendant ce temps, il faut des centaines d'années pour que ces émissions de carbone soient réabsorbées de l'atmosphère, et il n'y a aucune garantie que la forêt restera debout pendant cette période. Si un incendie de forêt se produit ou si la situation politique change et que la forêt est détruite, il est trop tard pour récupérer les crédits de carbone initialement accordés. Cette préoccupation n'est pas seulement théorique. Ces dernières années, les incendies de forêt en Californie ont consumé des millions d'hectares de forêt, y compris des crédits achetés par de grandes entreprises internationales telles que Microsoft et BP. Compte tenu de l'incidence croissante des incendies de forêt due au réchauffement climatique, de tels résultats deviendront sans aucun doute plus fréquents.

Encore une fois, cette estimation dépend d'un avenir incertain, ce qui ouvre d'importantes possibilités de profit pour les entreprises qui certifient et vendent des crédits de carbone.

Le deuxième défaut majeur de ces systèmes est que toute estimation des crédits carbone pour les projets de déforestation évitée repose sur un scénario hypothétique : quelle quantité de carbone aurait été libérée si le projet de compensation n'avait pas été mis en place ? Une fois de plus, cette estimation dépend d'un avenir imprévisible, ouvrant des perspectives de profit considérables. En augmentant les réductions d'émissions escomptées dans le cadre d'un projet particulier, il est possible de vendre beaucoup plus de crédits carbone qu'il n'en faut. Cette possibilité de spéculation est l'une des raisons pour lesquelles le marché des crédits carbone est si étroitement associé à des scandales à répétition et à la corruption. En effet, selon le New Yorker, après la révélation d'une fraude massive au carbone en Europe, « le gouvernement danois a admis que quatre-vingts pour cent des sociétés d'échange de carbone du pays étaient des façades pour le trafic » [2].

Ces problèmes méthodologiques sont structurellement intrinsèques à la compensation et ne peuvent être évités. Par conséquent, la plupart des crédits carbone échangés aujourd'hui sont purement fictifs et n'entraînent aucune réduction réelle des émissions de carbone. L'analyste tunisien Fadhel Kaboub les décrit comme un simple « permis de polluer » [3]. Un rapport d'enquête datant du début de l'année 2023 a révélé que plus de 90 % des crédits carbone de la forêt tropicale certifiés par Verra étaient probablement fictifs et ne représentaient pas de réelles réductions de carbone. Une autre étude réalisée pour la Commission européenne a révélé que 85 % des projets de compensation mis en place dans le cadre du Mécanisme de développement propre des Nations unies n'ont pas permis de réduire les émissions. Une étude universitaire récente portant sur des projets de compensation dans six pays a quant à elle révélé que la plupart d'entre eux ne réduisaient pas la déforestation et que, pour ceux qui le faisaient, les réductions étaient nettement inférieures à ce qui avait été annoncé au départ. Par conséquent, les auteurs concluent que les crédits carbone vendus pour ces projets ont été utilisés pour « compenser près de trois fois plus d'émissions de carbone que leur contribution réelle à l'atténuation du changement climatique » [4].

Malgré ces problèmes fondamentaux - ou peut-être à cause d'eux - l'utilisation des compensations carbone se développe rapidement. La banque d'investissement Morgan Stanley prévoit que le marché vaudra 250 milliards de dollars d'ici 2050, contre environ 2 milliards de dollars en 2020, car les grands pollueurs utilisent la compensation pour sanctionner la poursuite de leurs émissions de carbone tout en prétendant atteindre des objectifs nets de zéro. Dans le cas de Blue Carbon, une estimation a révélé que la quantité de crédits carbone susceptibles d'être accrédités dans le cadre des projets de l'entreprise en Afrique correspondrait à la totalité des émissions de carbone annuelles des Émirats arabes unis. Cette pratique, qui s'apparente au blanchiment de carbone, permet de faire disparaître les émissions en cours du grand livre de la comptabilité carbone, en les échangeant contre des crédits qui n'ont pas grand-chose à voir avec la réalité.

La monétisation de la nature comme stratégie de développement

Pour le continent africain, la croissance de ces nouveaux marchés du carbone ne peut être isolée de l'escalade de la crise de la dette mondiale qui a suivi la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine. Selon une nouvelle base de données, Debt Service Watch, les pays du Sud connaissent la pire crise de la dette jamais enregistrée, un tiers des pays d'Afrique subsaharienne consacrent plus de la moitié de leurs recettes budgétaires au service de la dette. Face à ces pressions fiscales sans précédent, les prêteurs internationaux et de nombreuses organisations de développement encouragent fortement la marchandisation des terres par le biais de la compensation comme moyen de sortir de cette crise profondément ancrée.

L'African Carbon Markets Initiative (ACMI), une alliance lancée en 2022 lors du sommet de la COP27 du Caire, est devenue une voix importante dans ce nouveau discours sur le développement. L'ACMI rassemble des dirigeants africains, des entreprises de crédit carbone (dont Verra), des donateurs occidentaux (USAID, la Fondation Rockefeller et le Fonds pour la Terre de Jeff Bezos) et des organisations multilatérales comme la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique. Outre ses efforts pratiques pour mobiliser des fonds et encourager les changements de politique, l'ACMI a joué un rôle de premier plan dans le plaidoyer en faveur des marchés du carbone en tant que solution gagnant-gagnant à la fois pour les pays africains lourdement endettés et pour le climat. Selon les termes du document fondateur de l'organisation, « l'émergence des crédits carbone en tant que nouveau produit permet de monétiser l'importante dotation en capital naturel de l'Afrique, tout en l'améliorant » [5].

Les activités de l'ACMI sont profondément liées au Golfe. L'un des aspects de cette relation est que les entreprises du Golfe, en particulier les producteurs de combustibles fossiles, sont aujourd'hui la principale source de demande pour les futurs crédits carbone africains. Lors du Sommet africain sur le climat qui s'est tenu en septembre 2023 à Nairobi, au Kenya, par exemple, un groupe d'importantes entreprises émiraties du secteur de l'énergie et de la finance (connu sous le nom d'UAE Carbon Alliance) s'est engagé à acheter à l'ACMI des crédits carbone d'une valeur de 450 millions de dollars au cours des six prochaines années. Cet engagement a immédiatement confirmé que les Émirats arabes unis étaient le principal bailleur de fonds de l'ACMI. De plus, en garantissant la demande de crédits carbone pour le reste de la décennie, l'engagement des Émirats arabes unis contribue à créer le marché actuel, à faire avancer de nouveaux projets de compensation et à consolider leur place dans les stratégies de développement des États africains. Il contribue également à légitimer la compensation en tant que réponse à l'urgence climatique, malgré les nombreux scandales qui ont entaché le secteur ces dernières années.

L'Arabie saoudite joue également un rôle majeur dans la promotion des marchés du carbone en Afrique. L'un des membres du comité directeur de l'ACMI est la femme d'affaires saoudienne Riham ElGizy, qui dirige la Regional Voluntary Carbon Market Company (RVCMC). Créée en 2022 en tant que coentreprise entre le Fonds d'investissement public (le fonds souverain d'Arabie saoudite) et la bourse saoudienne Tadawul, la RVCMC a organisé les deux plus grandes ventes aux enchères de carbone au monde, en vendant plus de 3,5 millions de tonnes de crédits de carbone en 2022 et 2023. 70 % des crédits vendus lors de ces ventes aux enchères provenaient de projets de compensation en Afrique, la vente aux enchères de 2023 ayant eu lieu au Kenya. Les principaux acheteurs de ces crédits étaient des entreprises saoudiennes, au premier rang desquelles la plus grande compagnie pétrolière du monde, Saudi Aramco.

"Au-delà de la simple appropriation de projets de compensation en Afrique, les États du Golfe se positionnent également à l'autre bout de la chaîne de valeur du carbone : la commercialisation et la vente de crédits de carbone à des acheteurs régionaux et internationaux"

Les relations émiraties et saoudiennes avec l'ACMI et le commerce des crédits carbone africains illustrent une évolution notable en ce qui concerne le rôle du Golfe sur ces nouveaux marchés. Au-delà de la simple possession de projets de compensation en Afrique, les États du Golfe se positionnent également à l'autre bout de la chaîne de valeur du carbone : la commercialisation et la vente de crédits carbone à des acheteurs régionaux et internationaux. À cet égard, le Golfe apparaît comme un espace économique clé où le carbone africain est transformé en un actif financier qui peut être acheté, vendu et faire l'objet de spéculations de la part d'acteurs financiers du monde entier.

En effet, les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite ont tous deux cherché à établir des bourses du carbone permanentes, où les crédits carbone peuvent être achetés et vendus comme n'importe quelle autre marchandise. Les Émirats arabes unis ont créé la première bourse de ce type à la suite d'un investissement du fonds souverain contrôlé par Abou Dhabi, Mubadala, dans l'AirCarbon Exchange (ACX), basée à Singapour, en septembre 2022. Dans le cadre de cette acquisition, Mubadala détient désormais 20 % d'ACX et a créé une bourse numérique réglementée d'échange de carbone dans la zone franche financière d'Abou Dhabi, l'Abu Dhabi Global Market. ACX affirme qu'il s'agit de la première bourse réglementée de ce type au monde, et que les échanges de crédits carbone y débuteront fin 2023. De même, en Arabie saoudite, la RVCMC s'est associée à l'entreprise américaine de technologie de marché Xpansiv pour créer une bourse permanente de crédits carbone dont le lancement est prévu fin 2024.

Reste à savoir si ces deux bourses basées dans le Golfe seront en concurrence ou si elles donneront la priorité à des instruments d'échange différents, tels que les dérivés du carbone ou les crédits carbone conformes à la charia. Ce qui est clair, en revanche, c'est que les principaux centres financiers du Golfe s'appuient sur leurs infrastructures existantes pour établir une domination régionale dans la vente de carbone. Actif à tous les stades de l'industrie de la compensation - de la production de crédits carbone à leur achat - le Golfe est désormais un acteur principal des nouvelles formes d'extraction de richesse qui relient le continent africain à l'économie mondiale au sens large.

Garantir un avenir basé sur l'énergie fossile

Au cours des deux dernières décennies, la production de pétrole et surtout de gaz du Golfe s'est considérablement accrue, parallèlement à un déplacement important vers l'est des exportations d'énergie pour répondre à la nouvelle demande d'hydrocarbures de la Chine et de l'Asie de l'Est. Dans le même temps, les États du Golfe ont accru leur participation dans les secteurs en aval à forte intensité énergétique, notamment la production de produits pétrochimiques, de plastiques et d'engrais. Emmenées par Saudi Aramco et Abu Dhabi National Oil Company, les compagnies pétrolières nationales basées dans le Golfe rivalisent désormais avec les supergrands groupes pétroliers occidentaux traditionnels en termes de réserves, de capacité de raffinage et de niveaux d'exportation.

"Au contraire, à l'instar des grandes compagnies pétrolières occidentales, la vision du Golfe d'une production accrue de combustibles fossiles s'accompagne d'une tentative de s'emparer du lead des initiatives mondiales de lutte contre la crise climatique"

Dans ce contexte, et malgré la réalité de l'urgence climatique, les pays du Golfe redoublent d'efforts dans la production d'énergies fossiles, voyant tout l'intérêt de s'accrocher le plus longtemps possible à un monde centré sur le pétrole. Comme l'a promis le ministre saoudien du pétrole en 2021, « chaque molécule d'hydrocarbure sortira »[5]. Mais cette approche ne signifie pas que les États du Golfe ont adopté une posture de négation du changement climatique, la tête dans le sable. Au contraire, à l'instar des grandes compagnies pétrolières occidentales, la vision du Golfe d'une production accrue de combustibles fossiles s'accompagne d'une tentative de s'emparer du leadership dans les efforts mondiaux de lutte contre la crise climatique.

L'un des aspects de cette approche est leur forte implication dans les technologies à faible teneur en carbone, imparfaites et non avérées, telles que l'hydrogène et le captage du carbone. D'autre part, ils tentent d'orienter les négociations mondiales sur le climat, comme en témoignent les récentes conférences des Nations unies sur le changement climatique, COP27 et COP28, au cours desquelles les États du Golfe ont détourné les discussions politiques des efforts efficaces pour éliminer progressivement les combustibles fossiles, transformant ces événements en un peu plus que des spectacles d'entreprise et des forums de réseautage pour l'industrie pétrolière.

Le marché des compensations carbone doit être considéré comme faisant partie intégrante de ces efforts visant à retarder, à obscurcir et à entraver la lutte contre le changement climatique de manière significative. Grâce à la comptabilité carbone trompeuse des projets de compensation, les grandes industries pétrolières et gazières du Golfe peuvent poursuivre leurs activités habituelles tout en prétendant atteindre leurs soi-disant objectifs climatiques. La dépossession des terres africaines par les pays du Golfe est un élément clé de cette stratégie, qui permet en fin de compte d'entretenir le spectre désastreux d'une production de combustibles fossiles en constante accélération.

Traduction de l'anglais par Emmanuelle Carton (CADTM)

Source :https://merip.org/2024/07/laundering-carbon-the-gulfs-new-scramble-for-africa/

Adam Hanieh est professeur auprès du SOAS, University of London. Il est l'auteur, entre autres, de Money, Markets, and Monarchies : The Gulf Cooperation Council and the Political Economy of the Contemporary Middle East, Cambridge University Press, 2018 et Lineages of Revolt. Issues of Contemporary Capitalism in the Middle East, Haymarket Books, 2013.

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[2] Heidi Blake, “The Great Cash-for-Carbon Hustle,” The New Yorker, October 16, 2023.

[3] Katherine Hearst, “Kenya concedes ‘millions of hectares' to UAE firm in latest carbon offset deal,” Middle East Eye, November 5, 2023.

[4] Thales A. P. West et al., “Action needed to make carbon offsets from forest conservation work for climate change,” Science 381/6660 (August 2023), p. 876.

[5] “Africa Carbon Markets Initiative (ACMI) : Roadmap Report,” ACMI, November 8, 2022, p. 12.

La guerre n’a pas de visage de femme indigène

27 août 2024, par Marche mondiale des femmes — ,
La Marche mondiale des femmes du Mato Grosso do Sul dénonce publiquement les violences subies par les peuples Kaiowá et Guarani. La violence subie par les indigènes des zones (…)

La Marche mondiale des femmes du Mato Grosso do Sul dénonce publiquement les violences subies par les peuples Kaiowá et Guarani. La violence subie par les indigènes des zones reprises Yvyajere, Pikyxyn et Kurupa Yty, situées sur la terre indigène Panambi – Lagoa Rica à Douradina, MS, a récemment été rendue publique au niveau national et international.

Tiré de Entre les lignes et les mots

Il convient de noter que ces zones reprises constituent ce TI (territoire indigène), qui a déjà été délimité par la Fondation nationale pour les peuples indigènes (FUNAI) et n'a pas été conclu en raison du processus de judiciarisation. Cette action, perpétrée par les propriétaires terriens de la région, a empêché la poursuite de ce processus pendant plus d'une décennie.

Depuis la mi-juin 2023, les luttes des peuples Guarani et Kaiowá se sont intensifiées dans de nombreuses zones, dans les Tekoha déjà identifiées, en particulier dans le sud de l'État. Les Tekoha sont des territoires sacrés dans lesquels les rezadoras, nhandesy (anciens du savoir traditionnel), cultivent leurs connaissances ancestrales, liées aux plantes médicinales, aux soins du corps-territoire, pour les générations à venir et pour la reproduction de la bonne vie sociale de la famille élargie.

Nous comprenons que les femmes indigènes des régions reprises subissent la violence d'un champ de bataille, d'une guerre, d'un génocide orchestré par les propriétaires terriens ruraux. Cette violence se répète, avec des assassinats de dirigeants, des tortures et des expulsions. La violence contre les femmes, en particulier les Ñandesy, pour ce qu'elles représentent dans la communauté indigène, avec leur foi, leur mbaracá, leurs prières, leurs chants et leurs danses. Persécutées, acculées, brûlées par l'intolérance religieuse, les préjugés et la xénophobie à l'encontre de ces guerrières Ñandesy. Dans « La guerre n'a pas de visage de femme », Svetlana Aleksiévitch dépeint les actions des femmes soviétiques pendant la Seconde Guerre mondiale. L'autrice y raconte comment cette histoire est occultée, mais elle existe : les femmes se sont battues courageusement contre le fascisme.

Cette lutte se déroule sur des territoires ancestraux et l'État brésilien est en grande partie responsable de tout ce conflit dans le Mato Grosso do Sul. C'est l'État qui a expulsé les populations indigènes de leurs territoires au siècle dernier et depuis lors, il est resté inerte. Le gouvernement fédéral omet de régulariser la propriété foncière des territoires considérés comme sacrés par les Guarani et les Kaiowá. Ces peuples attendent le processus de régularisation depuis la Constitution fédérale (CEF/88). Le non-respect de la Constitution fédérale donne lieu à des violences qui mettent en danger la vie des personnes : hommes, femmes et enfants. Dans ce contexte, les femmes et les enfants indigènes sont cruellement exposés à la barbarie de l'agriculture.

Il faut vivre, il faut reproduire la vie au lieu d'attendre la bureaucratie étatique des territoires. Face à l'inertie et à l'omission de l'Etat, les Ñandesy doivent créer un pouls de vie : elles contribuent à la santé physique et spirituelle de leur peuple dans le processus d'auto-démarcation.

Les reprises sont des outils de la lutte indigène, fondamentaux pour l'existence d'un monde plus juste, plus égalitaire et plus fraternel. Les femmes Kaiowá et Guarani sont fondamentales dans ce processus de récupération des terres. Il s'agit d'un mouvement tout à fait légitime. Nous reconnaissons l'histoire des expulsions et des réserves, qui ont conduit à l'enlèvement de la vie des peuples indigènes, des femmes et des enfants indigènes, avec des crimes de haine, leur enlevant le droit à leur vie collective quotidienne dans leurs communautés.

La violence des propriétaires terriens est à la fois sexiste, patrimonialiste, physique et psychologique. Les vidéos de guerriers abattus d'une balle dans la tête, ensanglantés, découpés, montrent les actes que les éleveurs sont prêts à accomplir. Le Mato Grosso do Sul suit le modèle national de concentration des terres entre les mains de quelques familles et l'histoire de la spoliation des terres indigènes remonte à la compagnie Matte Laranjeira à la fin du 19e siècle, mais les « propriétaires de la terre » ne se rendent pas compte qu'il s'agit d'une terre indigène, une terre de soins, une relation symbiotique entre le corps des femmes et la santé du territoire.

Comme solution, l'État brésilien présente un calendrier, une action irresponsable qui continuera à permettre la guerre et l'offensive contre la vie des peuples indigènes. Les juges qui signent les saisies, les ministres du STF qui assouplissent l'inconstitutionnalité du cadre temporel, les politiciens qui signent les nouvelles lois qui apportent l'insécurité juridique aux peuples indigènes de ce pays sont en grande majorité des hommes et des blancs.

Contre le pouvoir de la plume, du jugement et du nouveau décret-loi : les Ñandesy avec leur mbaraca, avec une attention collective, pour la survie d'eux-mêmes, du collectif et de la terre !

Nous continuerons à marcher jusqu'à ce que nous soyons toutes libres !

Août 2024
Marche mondiale des femmes – MS
https://www.marchamundialdasmulheres.org.br/a-guerra-nao-tem-rosto-de-mulher-indigena/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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Les femmes sans terre construisent des territoires libres : 40 ans de lutte pour la réforme agraire au Brésil

27 août 2024, par Lucineia Miranda de Freitas — , ,
Le Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST) célèbre 40 ans de lutte et de mobilisation contre la violence sexiste dans les campagnes Tiré de Entre les lignes et (…)

Le Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST) célèbre 40 ans de lutte et de mobilisation contre la violence sexiste dans les campagnes

Tiré de Entre les lignes et les mots

Pour changer la société

Selon notre volonté

et participer sans avoir peur d'être une femme !

(Chanson tirée du recueil de chansons populaires féministes)

Dans le climat politique de résistance et de transformation sociale qui a imprégné l'Amérique latine des années 1970 et 1980, plusieurs instruments politiques de la classe ouvrière se sont formés au Brésil, dont le Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST). De même qu'il est impossible de concevoir cette résistance révolutionnaire sans tenir compte de l'importante participation des femmes au sein des différents fronts de lutte, il est également impossible de penser au 40e anniversaire du MST sans appréhender cette participation comme une construction qui se produit à travers différents espaces – depuis les occupations, l'organisation des « acampamentos » et des « assentamentos », au sein de la formation et jusque dans les instances.

Réfléchir au processus organisationnel du MST, c'est réfléchir au rôle significatif joué par les femmes et à la manière dont celles-ci ont réussi à peser à partir de la matérialité de la reproduction de la vie. Comme le dit Djacira Araújo dans son articleLes femmes sans terre abattent les clôtures et écrivent l'histoire : 40 ans du MST, « dès les premières occupations de terrains, la présence de femmes et d'enfants a eu un impact en termes de sensibilisation de la société au problème de l'exclusion et de la dépossession des familles sans terre, tout en faisant pression sur le gouvernement pour qu'il prenne des mesures face au niveau de violences auquel les grands propriétaires terriens et le lobby de l'agrobusiness pouvaient parvenir ».

La vie quotidienne dans les campements (acampamentos), bien que pleine de vie et d'espoir, reste aussi très précaire, avec pour conséquence d'augmenter la demande de travail de soins – historiquement attribuée aux femmes. Il faut nourrir tout le monde, s'occuper des enfants et les éduquer, soigner les malades et stimuler la résistance. Ces demandes quotidiennes de prise en charge de la vie orientent l'organisation des secteurs et permettent la formation de groupes et de collectifs, créant des espaces de dialogue, de partage de la vie quotidienne, de la vie privée, de l'absence et de la présence de la violence, et de l'importance d'être ensemble.

Cette lutte est couplée à une journée intense de travail domestique et productif, avec de la douleur et de l'espoir, au-delà de l'amour et du travail de première ligne dans lequel les femmes utilisent leur corps comme un outil pour contenir les conflits. Malgré cela, les réunions et autres espaces de décision restent des lieux auxquels peu de femmes parviennent à participer. À travers l'histoire de la participation politique des femmes, prendre la parole peut s'avérer un défi majeur. Le pantalon et le pull large n'ont pas toujours représenté leur choix, mais une sorte de code nécessaire pour être entendues et respectéesen tant qu'activistes,et non pas harcelées et désirées en tant qu'objet sexuel. De cette manière, les femmes ont construit leur place dans les espaces de formation et de prise de décision du Mouvement. Comme nous l'avons expliqué dans la brochure de formation A conspiração do gênero (La conspiration du genre), « le processus d'insertion des femmes dans les tâches de direction de l'organisation, ainsi que celui de leur reconnaissance en tant que sujets politiques dans la lutte pour la terre et la réforme agraire, n'a pas été facile et a exigé beaucoup de persévérance et de conspiration politique ».

En parallèle au travail interne, les femmes ont tissé des liens avec des femmes d'autres organisations de la classe ouvrière à la campagne et à la ville, comme l'Articulation nationale des femmes rurales, forgeant de nombreuses luttes pour l'extension des droits à la sécurité sociale, la santé publique, un nouveau projet d'agriculture populaire, la réforme agraire, une campagne de documentation et d'autres encore. Elles ont également mis en place une formation politique et idéologique féministe destinée aux différents niveaux de militantisme et à la base.

Dans les années 2000, ce processus de construction s'est soldé par la création du secteur Genre, qui a fait valoir l'importance d'impliquer l'ensemble du mouvement dans le débat sur les relations humaines, en soulignant le rôle de la violence patriarcale dans le maintien du système latifundiaire et le défi que représente la construction de nouvelles relations de genre, liées aux rapports de pouvoir. Ceci a permis de mettre à l'agenda collectif la question de l'autonomie financière des femmes, la lutte contre la violence domestique et la prise en charge des enfants. Ce débat très important a permis d'atteindre la parité dans les organisations du MST en 2006. La présence effective des femmes dans les instances nationales et régionales a élargi l'horizon politique de leur participation au mouvement.

Les années 2000 ont également marqué un retour à l'esprit combatif du 8 mars, Journée internationale de lutte des femmes, en tant que construction de la résistance des femmes travailleuses entendant le lien entre les dominations de classe et patriarcale. Comme l'explique Djacira, « la conscience acquise à travers les expériences de l'organisation permet aux femmes sans terre de se sentir partie prenante d'un projet plus large impliquant la classe ouvrière et qui doit encore être réalisé ; de se rendre compte que des événements considérés comme des « petites choses » font partie de la lutte plus large contre le capital ».

La construction et la participation aux journées de lutte, en particulier celles du mois de mars, ont permis de comprendre l'importance de l'auto-organisation des femmes. La mobilisation de 2006, au cours de laquelle les femmes se sont unies pour lutter contre le désert vert des monocultures d'eucalyptus d'Aracruz Celulose, a particulièrement mis en avant le féminisme en tant que pratique concrète pour affronter le capital, et le féminisme paysan populaire en tant que stratégie pour construire de nouvelles subjectivités et de nouvelles sociabilités dans une perspective internationale.

En tant qu'organisation issue des expériences historiques des peuples en résistance, le MST s'est très tôt engagé dans la construction de la solidarité internationale. Cela s'est fait à travers des instruments de lutte paysanne, avec la formation de la Coordination latino-américaine des organisations paysannes (CLOC) et de la Via Campesina, ainsi que par l'organisation de formations, d'échanges d'expériences et de brigades de solidarité. L'expérience des processus internationalistes a contribué à comprendre la relation organique entre le capital, le patriarcat et le racisme, qui est profonde et internationalisée. Une organisation internationale est nécessaire pour affronter et dénoncer les ravages de ce système sur les peuples ruraux.

Avec la participation des femmes paysannes, autochtones, habitantes des eaux et des forêts au débat sur le féminisme paysan populaire, nous avons également progressé dans notre compréhension des spécificités de cet impact sur les femmes dans l'interrelation entre corps et territoire. Le féminisme paysan populaire élargit notre stratégie politique, car nous nous focalisons sur les relations égalitaires et sur les processus d'émancipation humaine. Par ailleurs, nous nous engageons en faveur de l'agroécologie en tant que production en équilibre avec la nature et en tant que reconstruction de notre humanité. Au cœur de cet engagement politique se trouve le retour aux communs et la défense des biens communs, en cherchant à construire des territoires sans violence au sens le plus large.

La lutte des femmes pour le droit à la participation politique a contribué à façonner le MST, comme le dit Djacira lorsqu'elle explique que « la nature organique du MST n'est ce qu'elle est que grâce au regard féminin, qui a mis des thèmes profonds de l'existence humaine à l'agenda, tels que l'éducation, la santé, la prise en charge et soins des enfants, la lutte contre les oppressions de genre, la construction de l'agroécologie et de la souveraineté alimentaire. Dans une large mesure, ces questions ont conduit à la nécessité de repenser la structure politique de l'organisation, en mettant l'accent sur la création de nouveaux collectifs, secteurs, fronts et de nouvelles pratiques de formation ».

La participation des femmes a permis de réaliser que la lutte contre le patriarcat, le racisme et le capitalisme, dans toutes leurs expressions politiques et culturelles, fait partie de la lutte du MST et de la classe ouvrière. C'est pourquoi il faut être vigilant et combattre les dérives éthiques et morales du sexisme, du racisme, du fascisme et de l'exploitation de classe ; être vigilant pour créer des subjectivités réorientées selon des principes humanistes, féministes, antiracistes et socialistes.

Lucineia Miranda de Freitas, 28 mai 2024
Lucineia Miranda de Freitas est une dirigeante du secteur « genre » du MST.
Édition et révision par Bianca Pessoa
https://capiremov.org/fr/experiences/les-femmes-sans-terre-construisent-des-territoires-libres-40-ans-de-lutte-pour-la-reforme-agraire-au-bresil/

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Laura et Berthe Zúñiga : la lutte pour la justice pour Berta est immergée dans la lutte pour la justice pour le peuple Lenca

27 août 2024, par Berta Zúñiga, Bianca Pessoa, Laura Zúñiga — , , ,
Bertha et Laura Zúñiga sont membres du Conseil civique des Organisations populaires et autochtones du Honduras (Copinh) et filles de la militante écologiste féministe Berta (…)

Bertha et Laura Zúñiga sont membres du Conseil civique des Organisations populaires et autochtones du Honduras (Copinh) et filles de la militante écologiste féministe Berta Cáceres, assassinée en 2016. Depuis huit ans, des mouvements populaires au Honduras se battent pour que justice soit rendue à Berta.

Tiré de Entre les lignes et les mots

L'une des premières revendications du mouvement dès le début était l'enquête sur les commanditaires du crime. « Nous avons une très forte demande pour montrer qui sont les acteurs, ce qui se cache derrière le meurtre de ma mère, quels intérêts voulaient bénéficier du meurtre », explique Laura.

La pression exercée pour enquêter sur l'affaire a abouti à un procès en 2018 et à la condamnation en 2019 de huit hommes, dont sept étaient les auteurs du crime et David Castillo, qui a servi d'intermédiaire entre les commanditaires et les autres. Les huit avaient des liens avec l'entreprise responsable du projet hydroélectrique dénoncé par Berta et Copinh, le projet Agua Zarca, sur la rivière Gualcarque. Malgré le procès, les coupables n'ont pas encore été condamnés, ni les auteurs intellectuels tenus pour responsables. Pour cette raison, le Copinh maintient sa pression pour la justice.

Pour Bertha et Laura, l'enquête sur le meurtre de leur mère marque un changement dans la manière dont les enquêtes sur les crimes commis contre les défenseurs et les dirigeants locaux sont menées. Selon elles, le taux d'impunité des auteurs de crimes de toutes sortes est de 90% au Honduras. « Dans ce contexte, nous considérons cela comme une victoire populaire contre un système d'impunité », a déclaré Bertha. Elle affirme que « dans le système judiciaire, certaines parties fonctionnent et œuvrent pour la persécution des leaders sociaux et l'impunité des groupes économiques. C'était un crime dans lequel nous avons pu identifier la participation de structures de tueurs à gages, de structures militaires et aussi d'un groupe économique très puissant au Honduras, qui est la famille Atala Zablah ». La famille Atala Zablah est profondément liée aux secteurs extractifs en Amérique latine, et l'un de ses membres, Daniel Atala Midence, a reçu un mandat d'arrêt pour le cas de Berta.

Dans l'interview réalisée le 5 juin 2024, Bertha et Laura ont parlé de l'avancement de l'enquête et de la condamnation. L'interview a été menée collectivement par plus de 20 médias et organisations populaires alliées qui composent l'Alba Movimentos dans plusieurs pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Lisez la traduction de l'interview ci-dessous ou écoutez-la dans sa langue originale.

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Pourquoi la détermination de la peine est-elle retardée ou reportée si longtemps ?

Laura : Elle est reportée car de nombreux intérêts font pression pour qu'il n'y ait pas de confirmation de la peine. Cela est lié au fait qu'ils essaient de retarder et de boycotter le processus de justice pour ma mère. Nous savons que, même au sein de la magistrature, il y a tout un débat sur l'ingérence qui a lieu de la part de ce puissant groupe économique. Il nous appartient maintenant, en tant que mouvements populaires, de protéger ces condamnations et leur confirmation.

Quelle est l'attitude du gouvernement hondurien à l'égard de ce cas particulier ? Pensez-vous qu'elle contribue à la cause de manière favorable ou qu'elle crée des conditions plus favorables à l'impunité ?

Bertha : Justice pour Berta Cáceres était un thème de campagne du gouvernement de Xiomara Castro, notre présidente. Au sein du pouvoir exécutif, une pétition spécifique a été mise en place et nous pensons avoir progressé dans ce domaine. Il y a un élément très important : la question de la justice pour Berta continue de dépendre presque exclusivement du pouvoir judiciaire. Le pouvoir exécutif n'a pas formellement un niveau d'influence sur ces décisions. Jusqu'à présent, et très précisément sur la question de la résolution de ces peines, la Cour suprême de Justice n'a publié aucune communication publique. Je pense donc qu'il est très important que les organisations qui font partie d'Alba Movimentos puissent également mener des actions visant à garantir que le gouvernement maintienne la cohérence du discours et agisse pour le bien du processus de justice.

Quelles stratégies juridiques et politiques continentales peuvent être utiles dans cette phase dans laquelle nous nous trouvons maintenant ?

Laura : Nous avons fait appel à la Commission interaméricaine des droits humains sur les mesures de protection dont bénéficiait ma mère et dont bénéficient Copinh et les victimes dans cette affaire. L'une des choses que nous essayons de faire est de mettre en lumière, au niveau international, la négligence et le choix d'omettre les soins dont Berta Cáceres avait besoin. Il est également important de rester informé et, petit à petit, de briser le siège médiatique des médias hégémoniques, car cette affaire symbolise aussi le cas de nombreuses autres femmes qui ont défendu leurs territoires et qui ont fait face au système capitaliste patriarcal raciste.

Bertha : Au Copinh, nous avons défini quelques actions importantes, comme l'envoi de lettres à la Cour Suprême de Justice. Il ne s'agit pas nécessairement de personnes, d'organisations ou d'institutions dédiées au monde juridique du contentieux, mais d'organisations et de lettres générales, qui peuvent être remises directement à la Chambre pénale de la Cour suprême de justice. Toute action publique montrant une préoccupation est bonne, même les actions du gouvernement hondurien lui-même, puisqu'il s'agit d'un sujet de campagne.

Pour nous, il est très important que cela accompagne le processus organisationnel du Copinh et qu'il parvienne à donner de la visibilité à d'autres victimes qui ne sont pas directement liées à cette affaire, comme les peuples autochtones, les femmes assassinées et les défenseurs. Isolément, cela n'a pas non plus beaucoup de sens sans l'impact juridique sur l'approfondissement de nos propres capacités organisationnelles et le renforcement des propres messages de notre camarade Berta Cáceres au Honduras, à nos désirs de transformation, à la région au niveau continental.

Pensez-vous que, dans l'approche de la justice, il y a eu des progrès par rapport à la perspective de genre au cours de la période où l'affaire est en cours

Laura : Je crois que cela a également été un différend pour le Copinh de pouvoir aborder et démontrer au sein des institutions judiciaires comment une femme autochtone est agressée. Les questions de genre et de corps racialisés ont été abordées et je pense que cela a été une avancée, car il s'agissait d'une lutte dans laquelle des experts ont été amenés à enquêter sur la façon dont le tissu des communautés indigènes a été historiquement déchiré et comment ils ont cherché à détruire les communautés en attaquant spécifiquement une femme, ce qui est très différent de la façon dont les hommes sont attaqués.

En ce sens, je pense que le procès a également été un moment pour enseigner au système judiciaire hondurien comment aborder les femmes autochtones, les défenseures et les combattantes. Les médias hégémoniques cherchent à minimiser nos voix et cela a aussi à voir avec la minimisation de la diversité. Ils ont cherché non seulement à dire qu'il s'agissait d'un meurtre et rien de plus, mais aussi à dire qu'il s'agissait d'un « crime de jupe », une manière néfaste d'appeler féminicide et aussi de retirer l'élément de meurtre à une défenseure qui avait de nombreuses autres menaces et attaques.

Quelle est la situation actuelle de la lutte environnementale au Honduras et quels sont les principaux défis auxquels le mouvement environnemental est confronté en ce moment ?

Bertha : Malheureusement, le Honduras continue de figurer parmi les pays les plus dangereux pour la défense de la Terre Mère, des biens communs, de la terre et du territoire. Nous avons des cas très délicats dans notre pays, comme ceux de la région de Bajo Aguán, sur la côte nord, où de nombreux dirigeants sociaux ont été assassinés en toute impunité. Nous parlons toujours de l'articulation des groupes économiques dans notre pays. Bien qu'il s'agisse d'un cas emblématique qui a brisé toute la norme de ce qui se passe dans notre pays, il est important qu'il contribue d'une certaine manière à clarifier la situation d'autres personnes assassinées qui continue de se produire au Honduras.

Bien qu'il y ait une volonté de changement, ces structures criminelles restent intactes. Nous continuons d'essayer de lier la question financière et économique de la corruption à ce type de cas, car c'est très évident. Même la question des meurtres de femmes, des réseaux de traite et des féminicides reste une constante car la question de la justice est un défi. On finit par en savoir un peu plus sur la justice en interne. Vraiment, c'est quelque chose qui, pour le dire de manière populaire, vous donne des frissons, vous fait dresser les cheveux sur la tête. Il y a de nombreux intérêts politiques et économiques de toutes sortes.

Laura : En ce qui concerne les défis, je soulèverais cette question de l'impunité. Il est difficile de continuer la lutte au milieu de tant d'impunité et de tant de crimes. C'est aussi une lutte pour vraiment faire reconnaître les droits des victimes et des organisations. Historiquement, nous avons réussi dans un procès – le procès pour corruption et fraude impliquant Gualcarque – que le Copinh et le Conseil autochtone de la communauté de Rio Blanco soient considérés comme des victimes formelles. Cela ne s'était jamais produit dans notre pays.

De plus, bien sûr, nous devons rechercher la pleine reconnaissance des droits des communautés autochtones. Parfois, la question de l'environnement a été envisagée ou abordée de manière abstraite, comme si, là où il y avait un environnement, il n'y avait pas de communautés et donc pas de droits. Nous continuons à dire : nous protégeons 85% des réserves et des forêts de notre pays. Des mesures environnementales ne peuvent être prises sans tenir compte de nos droits en tant que communautés. Les lois ne nous considèrent pas comme des gestionnaires de zones protégées. Un dernier défi est de trouver de vraies solutions. Aujourd'hui, le capitalisme lui-même a fourni tellement de fausses solutions environnementales qu'il convainc même les membres du gouvernement. Il y a une grande bataille que nous devons mener pour trouver de vraies solutions à une crise environnementale et climatique qui a signifié une violation systématique des droits des sujets dont la responsabilité est de protéger cette nature et ces biens communs.

Laura : La lutte pour la justice pour Berta est immergée dans la lutte pour la justice pour le peuple Lenca. En ce sens, nous continuons à lutter pour que la rivière Gualcarque soit libre, car elle est actuellement en concession et fait donc partie des processus de corruption pour la concession de la rivière, puisque des personnes ont été condamnées, on découvre comment fonctionne l'extractivisme au Honduras et comment cette concession a également fonctionné illégalement. Les communautés Lenca organisées au Copinh continuent de revendiquer des droits qui leur ont été historiquement refusés. L'organisation reste active.

Édition par Bianca Pessoa
Traduit du portugais par Andréia Manfrin Alves
Langue originale : espagnol
https://capiremov.org/fr/entrevue/laura-et-berthe-zuniga-la-lutte-pour-la-justice-pour-berta-est-immergee-dans-la-lutte-pour-la-justice-pour-le-peuple-lenca/

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Le féminisme est une révolution : pour la souveraineté populaire et nos corps

27 août 2024, par Marche mondiale des femmes — ,
Voici la déclaration de la 3ème Rencontre Nationale du MMM « Nalu Faria », qui a réuni plus d'un millier de femmes du 6 au 9 juillet à Natal, Rio Grande do Norte Tiré de (…)

Voici la déclaration de la 3ème Rencontre Nationale du MMM « Nalu Faria », qui a réuni plus d'un millier de femmes du 6 au 9 juillet à Natal, Rio Grande do Norte

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/07/13/le-feminisme-est-une-revolution-pour-la-souverainete-populaire-et-nos-corps/

Renverser ce système avec force et rébellion, organiser les femmes sans perdre notre audace : rêver et lutter comme Nalu Faria ». C'est par ce chant que nous, militantes de la Marche Mondiale des Femmes, réunies à l'occasion de notre 3ème Rencontre Nationale, résumons le sens politique de notre mouvement. Nous voulons changer le monde en changeant la vie des femmes et notre stratégie pour y parvenir est l'auto-organisation dans tous les lieux où nous vivons, travaillons et agissons.

Les femmes organisées en féminisme populaire sont la tempête du patriarcat. Nous sommes des travailleuses de la campagne et de la ville, des femmes noires, des femmes aux sexualités diverses, des femmes lesbiennes et bisexuelles, des jeunes femmes, des femmes transgenres, des femmes quilombolas et indigènes, des femmes dans les syndicats et l'économie solidaire, des femmes âgées et des femmes handicapées. Nous sommes organisées dans un féminisme populaire qui est fort parce qu'il est construit au quotidien avec un programme politique qui nous organise et nous mobilise, un féminisme dans lequel nous avons toutes notre place.

Au Brésil et dans le monde entier, les femmes sont en première ligne de la résistance au fascisme. Les attaques contre nos corps et nos sexualités, la violence sous ses formes les plus extrêmes, ainsi que le renforcement du modèle familial hétéropatriarcal, augmentent la charge de travail face à la crise et à la précarité des conditions de vie.

Les attaques contre les femmes ne sont pas un écran de fumée : le conservatisme fait partie du néolibéralisme et est au cœur des actions de l'extrême droite. Ces dernières années, la mobilisation des femmes a été fondamentale dans la lutte contre Bolsonaro et dans la victoire électorale de Lula. Aujourd'hui, nous sommes en meilleure position pour organiser nos luttes, mais nous vivons une période de résistance et de confrontation avec l'extrême droite. Nous voyons et ressentons la misogynie à la radio, sur Internet et à la télévision, dans nos quartiers, nos communautés et nos territoires. Nous sommes convaincues que la force féministe organisée est capable d'imposer des défaites à l'extrême droite, comme les récentes mobilisations qui ont stoppé le traitement du projet de loi 1904.

Nous devons sortir de la résistance et construire une offensive féministe contre le conservatisme. Nous devons accroître la présence des femmes dans tous les espaces de décision politique, mais cela ne suffit pas. Nous devons accumuler des forces à l'intérieur et à l'extérieur du parlement et des institutions pour changer les structures et radicaliser la démocratie. Nous contestons la signification publique de l'État, nous luttons pour étendre les services publics et le droit à la santé et à l'éducation, aux soins et à l'alimentation, à l'eau et à l'énergie, ainsi qu'au logement.

Nous luttons pour des politiques immédiates qui changent les conditions de vie maintenant et qui créent les conditions pour des transformations structurelles. Nous nous engageons à construire une politique nationale de soins qui renforce la responsabilité de l'État en matière de soins et de reproduction sociale. Dans cette construction, nous voulons accumuler des forces pour rompre avec la dynamique de la division sexuelle et raciale du travail, afin de construire une économie dans laquelle la durabilité de la vie est au centre.

Le conflit du capital contre la vie au Brésil se manifeste par une exploitation et une expropriation accrues des corps, du travail, des vies et des territoires des femmes et de la classe ouvrière. La militarisation et la violence sont des instruments de ce conflit. La privatisation, la militarisation et le conservatisme vont de pair, comme le montrent les attaques contre l'éducation. Nous luttons pour la défense des biens communs et contre le pouvoir des sociétés transnationales.

Les entreprises transnationales personnifient le capital et avancent sur nos territoires. Nous dénonçons l'omission et la subordination de l'État aux intérêts des entreprises, comme dans le cas de la tragédie criminelle de Braskem. Au nom du climat, les entreprises transnationales s'approprient les biens communs et encerclent les territoires vitaux des peuples. Les complexes éoliens et solaires progressent, notamment dans les États du nord-est. Cette avancée sur les territoires suit la même logique que les projets miniers et de capitalisme vert : ils modifient les usages des terres et les modes de vie, en particulier des communautés indigènes et quilombolas, empêchent la libre circulation, augmentent le travail domestique et rendent les femmes malades. Il s'agit de processus violents qui aggravent la violence historique raciste et patriarcale à l'encontre des femmes.

Les propositions du capital sont de fausses solutions au changement climatique, car elles sont basées sur la logique de la poursuite de l'expansion de la demande d'énergie et de la pollution, cachée dans le discours de la neutralité carbone. Nous rejetons le maquillage vert et lilas de ce système, qui continue à détruire les biomes et à aggraver le racisme environnemental. La crise que nous vivons a de multiples dimensions et l'une d'entre elles est le climat. Les événements climatiques extrêmes sont déjà une réalité, comme les inondations dans le Rio Grande do Sul et la sécheresse en Amazonie. Sans la capacité d'organiser la solidarité, les impacts sur les populations seraient encore plus importants. Nous luttons pour la justice climatique, qui ne sera pas une réalité sans justice environnementale.

Les femmes indigènes et quilombolas nous ont appris que notre corps est notre premier territoire. Nous rejetons la logique de l'industrie pharmaceutique qui nous fragmente et nous rend malades au service des profits des mêmes entreprises transnationales qui vendent des médicaments et des pesticides.

Nous luttons pour que les femmes puissent vivre leur sexualité sans être soumises aux normes oppressives de l'hétéronormativité. Nous exigeons la légalisation de l'avortement et sa dépénalisation afin qu'aucune fille ou femme ne souffre, ne soit mutilée ou ne meure pour avoir décidé de ne pas poursuivre une grossesse non désirée. Nous dénonçons l'action du marché sur le corps des femmes, qui exploite et transforme le sexe en marchandise, la pédophilie en consommation et les corps en objets.

L'économie féministe est notre alternative et notre stratégie. Pour faire face au pillage de nos corps-territoires, de notre travail et de nos modes de vie, nous avons besoin d'une réforme agraire populaire, avec une production basée sur l'agroécologie. Les femmes construisent des alternatives concrètes dans leurs territoires, avec leurs connaissances, leurs technologies libres et leurs formes de communication populaire. Les jardins communautaires, les blanchisseries collectives, l'économie solidaire et l'agroécologie recousent d'autres formes de relations entre l'homme et la nature.

Nous luttons pour la souveraineté populaire, qui se compose de la souveraineté alimentaire, de la souveraineté énergétique, de la souveraineté technologique et de la souveraineté de nos corps. Nous affrontons l'impérialisme et ses mécanismes de domination, qu'il s'agisse de coups d'État, de sanctions ou de guerres. Nous ne nous arrêterons pas tant que le génocide du peuple palestinien n'aura pas cessé, tant que la Palestine ne sera pas libre, de la rivière à la mer. La solidarité et l'internationalisme féministe sont nos piliers et nos fils conducteurs.

En tant que mouvement de base, nous avons relevé le défi de poser le pied dans chaque municipalité, village, communauté et colonie. Et organiser un mouvement de femmes massif pour que le féminisme devienne un lieu d'attention, d'affection et, surtout, de lutte.

Nous nous engageons à partager les leçons du féminisme et à apprendre des femmes afin qu'ensemble, nous puissions construire une société de liberté et d'égalité. Guidées par l'espoir et la force collective d'un millier de femmes venues de 23 États du pays, nous réaffirmons que l'aube féministe commence chaque jour jusqu'à ce que nous soyons toutes libres.

Comme nous l'avons dit dans les rues de Natal, « le féminisme est une révolution ». Notre programme ne correspond pas au modèle de société du capital. Nous affirmons nos principes d'auto-organisation des femmes et d'alliances stratégiques avec les mouvements populaires. Nous avons appris de nos alliés et avons construit ensemble des processus anti-impérialistes et des luttes pour l'intégration des peuples. Nous affirmons le socialisme comme horizon de transformation, convaincues que sans féminisme, il n'y a pas de socialisme.

Nous continuerons à marcher jusqu'à ce que nous soyons toutes libres !

Nalu Faria présente !

Marche mondiale des femmes, 09 juillet 2024
https://www.marchamundialdasmulheres.org.br/feminismo-e-revolucao-por-soberania-popular-e-de-nossos-corpos-declaracao-do-3o-encontro-nacional-da-marcha-mundial-das-mulheres/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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Recommandations du rapport CESE Genre et transition écologique

27 août 2024, par Association Adéquations — , ,
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté en mars 2023 un avis et un rapport « Inégalités de genre, crise climatique, et transition écologique ». Ces (…)

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté en mars 2023 un avis et un rapport « Inégalités de genre, crise climatique, et transition écologique ». Ces travaux ont été présentés lors de l'atelier du 22 juin, organisé par Adéquations et Wide Autriche. On trouvera ci-dessous les recommandations du rapport.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/06/22/recommandations-du-rapport-cese-genre-et-transition-ecologique/

Le CESE formule un ensemble de préconisations articulées en six axes :

AXE 1 : Améliorer et visibiliser la connaissance et la recherche sur l'impact différencié des effets du changement climatique et de la dégradation de l'environnement sur les femmes et les hommes

1 – Intégrer dans les rapports du GIEC les études et données sexospécifiques disponibles relatives au climat
PRÉCONISATION #1
Demander au GIEC de produire, en vue de son 7ème rapport et pour les suivants, un rapport spécial qui synthétise la recherche internationale existante sur les impacts différenciés du changement climatique sur les femmes et les hommes, basé sur des données sexospécifiques et insistant sur le besoin de leur développement là où elles sont insuffisantes, afin de mettre en œuvre les objectifs du programme d'action de la conférence mondiale sur les femmes de Pékin et le plan genre de la CCNUCC

2 – Construire des politiques publiques relatives au climat et la transition écologique basées sur des données ventilées par sexes
PRÉCONISATION #2
Intégrer la dimension genrée dans l'étude d'impact préalable des projets et propositions de lois qui concernent la transition écologique et dans les évaluations de leur mise en œuvre, permettant de mieux appréhender leurs effets différenciés sur les femmes et les hommes. Renforcer les moyens du Service des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes (SDFE) et repenser sa place institutionnelle afin d'en faire le service public garant de l'évaluation genrée des législations de la transition écologique.

3 – Mieux identifier, pour la promouvoir, la place des femmes dans les métiers de la transition écologique, qu'ils soient verts ou verdissants
PRÉCONISATION #3
Compléter et adapter la nomenclature de l'ONEMEV afin de rendre plus pertinents les indicateurs genre des métiers verts et verdissants pour mieux identifier les métiers qui doivent impérativement se transformer et les leviers de cette transformation pour atteindre les objectifs de transition écologique.

4 – Construire la donnée publique permettant de mieux identifier les effets différenciés des dégradations de l'environnement et des catastrophes naturelles et industrielles sur les femmes et les hommes
PRÉCONISATION #4
Systématiser aux échelles internationale, nationale et locales, le recueil de données ventilées par sexe lors de l'évaluation des effets des dégradations environnementales et des catastrophes naturelles et technologiques dans les études d'impacts environnementales des projets publics et privés.

5 – Intégrer la dimension genrée et l'exposome dans la recherche publique en santé-environnement
PRÉCONISATION #5
Initier des programmes et projets de recherche pluridisciplinaire sur l'exposome qui accordent davantage de visibilité aux impacts différenciés de l'exposition aux dégradations environnementales entre les femmes et les hommes, notamment pour mieux les prendre en compte dans la reconnaissance des maladies professionnelles ; veiller à ce que les appels à projets et partenariats noués par l'agence nationale de la recherche, l'ANSES et le CNRS, prennent en compte la dimension genrée ; intégrer ces enjeux de recherche et d'évaluation scientifique par l'exposome dans le 5ème Plan national santé environnement (PNSE) 2025-2030

6 – Identifier les comportements différenciés des femmes et des hommes dans la production et la consommation pour diffuser les bonnes pratiques
PRÉCONISATION #6
Encourager la recherche sur le rôle différencié des femmes en tant que moteur du changement en faveur des modes de production et de consommation plus durables, recueillir des données factuelles sur la manière et les secteurs où les femmes ont déjà un effet positif sur l'action climatique et l'environnement afin d'identifier les bonnes pratiques, de les soutenir et de les généraliser.

AXE 2 : Développer la diplomatie féministe en matière de politiques environnementales et de développement durable

7 – Veiller à la sécurité des personnes déplacées, en particulier les femmes et les filles, victimes du changement climatique
PRÉCONISATION #7
Intégrer dans l'article L435-1 du Code de l'Entrée, du Séjour et du Droit d'Asile (CESEDA) relatif aux titres de séjours pour motifs humanitaires, une disposition reconnaissant que les risques climatiques, environnementaux et sanitaires du pays d'origine entrent pleinement dans les critères permettant la délivrance d'une carte de séjour temporaire pour raisons humanitaires ou motifs exceptionnels ; mettre en œuvre des mécanismes de contrôle dans les centres d'accueil des personnes déplacées ou migrantes pour éradiquer les violences à caractère sexiste et sexuelle, notamment le harcèlement que les femmes et les jeunes filles peuvent y subir.

8 – Évaluer la mise en œuvre des engagements internationaux de la France pour l'intégration du genre dans ses politiques climatiques et de protection de la biodiversité
PRÉCONISATION #8
Saisir la commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) d'une mission de contrôle de la mise en œuvre des engagements de la France en matière de droit à l'égalité femmes-hommes dans les plans nationaux climat et les stratégies nationales pour la biodiversité, conformément à ses engagements dans le cadre des « plans genre » de la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique – CCNUCC et de la Convention sur la diversité biologique – CDB.

9 – Revoir à la hausse les ambitions de la diplomatie féministe de la France et donner à celle-ci une dimension programmatique
PRÉCONISATION #9
Mieux définir, piloter et donner une dimension programmatique à la diplomatie féministe ; atteindre progressivement l'égaconditionnalité dans les politiques portées par le ministère des affaires étrangères à l'horizon 2025 et s'engager, conformément au plan d'action genre de l'UE, à ce qu'au moins 85% des financements d'aide publique au développement dédiés à l'adaptation au changement climatique visent également l'égalité de genre

10 – Aboutir à l'égaconditionnalité dans l'octroi des crédits dédiés aux investissements liés au climat et abonder le Fonds de soutien aux organisations féministes
PRÉCONISATION #10
Pérenniser et mieux doter financièrement le Fonds de Soutien aux Organisations Féministes (FSOF) et flécher les financements pour qu'émergent davantage de projets portés par des femmes ou comportant des enjeux de genre, notamment via les fonds intermédiés et permettre aux projets modestes de mieux accéder à ces financements en simplifiant les procédures d'attribution.

11 – Pérenniser la coordination de l'action internationale de la France en matière d'intégration du genre dans ses engagements internationaux climatiques et renforcer la formation et la participation des femmes aux négociations climatiques
PRÉCONISATION #11
Renforcer les moyens et pérenniser la mission de « Point focal » du ministère en charge de l'environnement et des questions climatiques, conformément aux engagements internationaux de la France ; promouvoir, soutenir et développer la formation et la participation des femmes aux négociations climatiques.

12 – Promouvoir la place des femmes dans la prévention et la résolution des conflits armés
PRÉCONISATION #12
Intégrer la thématique des femmes et du changement climatique dans le plan « Femmes paix et sécurité » et renforcer l'amélioration des conditions de vie des femmes dans les zones de conflits à travers l'aide humanitaire.

AXE 3 : Engager l'intégration croisée des politiques de réduction des inégalités liées au genre et des politiques environnementales nationales et locales

13 – Intégrer la dimension du genre dans la réforme des mécanismes de budgétisation et de fiscalité environnementale
PRÉCONISATION #13
Revoir les instruments budgétaires des investissements de la transition écologique ainsi que les instruments des fiscalités environnementale, énergétique et agricole, afin de prévenir et corriger leurs éventuels effets négatifs sur les femmes ; renforcer en particulier le critère genre dans les marchés publics des aménagements et équipements de la transition écologique.

14 – Intégrer la dimension de genre dans toutes les politiques de planification environnementale
PRÉCONISATION #14
Intégrer un indicateur des inégalités de genre et, plus globalement, de la justice environnementale dans les planifications environnementales nationales : les différents scenarios de transition écologique, la Stratégie française énergie-climat (SFEC), la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), le Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC), la Stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) et la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui devront être adoptés au premier semestre 2024, ainsi que dans leurs déclinaisons locales.

15 – intégrer le genre dans les études d'impact des grands projets publics et privés soumis, de par leurs risques, à évaluation environnementale
PRÉCONISATION #15
Ajouter la dimension genre au critère « population et santé humaine » de l'évaluation environnementale des projets nationaux et locaux, publics et privés, soumis à cette procédure (L121-1 III 1° du code de l'environnement), et s'assurer d'une analyse complète de ce critère en particulier pour les projets d'aménagement du territoire, d'infrastructures et d'équipements publics.

16 – Favoriser le croisement des thématiques genre et environnement au sein des collectivités territoriales
PRÉCONISATION #16
Intégrer la mixité et la lutte contre les inégalités de genre dans les politiques d'aménagement du territoire et les équipements publics et encourager les collectivités locales à créer des synergies entre les services chargés de la transition écologique et ceux chargés de promouvoir l'égalité femmes- hommes ou en instaurant des services transversaux.

AXE 4 : Faire s'engager davantage les acteurs et actrices privés et publics dans une transition écologique intégratrice des inégalités de genre à la la fois comme causes et comme effets croisés

17 – Identifier les données sexospécifiques dans les bilans carbone des entreprises
PRÉCONISATION #17
Modifier l'instrument « bilan carbone » des entreprises pour pouvoir identifier des données sexospécifiques, former les experts et expertes en bilan carbone aux questions de genre et accompagner techniquement et financièrement les entreprises s'engageant dans cet exercice.

18 – Mieux identifier et intégrer plus systématiquement le volet genre dans la prévention des risques sociaux au titre du devoir de vigilance des entreprises
PRÉCONISATION #18
Dans le cadre des plans de vigilance prévus au titre du « devoir de vigilance » des entreprises, développer les analyses des éventuels effets négatifs directs et indirects des activités économiques des grandes multinationales françaises, de leurs filiales et sous-traitants sur les femmes (en termes de santé, de conditions de travail, de sécurité comme de modification des espaces constituant des ressources dont elles ont la charge) ; porter l'inscription explicite de la question de genre dans le volet « droits humains et environnementaux » dans le cadre des négociations autour de la proposition de directive européenne prévoyant d'élargir cette obligation aux entreprises européennes.

19 – Mieux intégrer les problématiques d'égalité de genre aux sujets environnementaux de la RSE et de la RSO et promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes dans les entreprises
PRÉCONISATION #19
Décloisonner, avec l'aide de la plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociale et sociétale des entreprises de France Stratégie, les piliers environnement et égalité des politiques RSE/RSO des entreprises privées et publiques et de la fonction publique et promouvoir un comportement responsable des entreprises en matière d'égalité femmes-hommes.

20 – Généraliser dans toute structure employeuse l'intégration du genre dans les espaces du dialogue social où les sujets environnementaux sont débattus
PRÉCONISATION #20
Généraliser l'intégration du genre dans les informations débattues dans le cadre des attributions environnementales des espaces du dialogue social : comités sociaux et économiques (CSE), comités sociaux d'administration (CSA), comités sociaux territoriaux et comités sociaux d'établissements.

AXE 5 : Former, éduquer et renforcer la mixité des métiers verts et verdissants

21 – Intégrer la justice environnementale au prisme du genre dans l'éducation à l'environnement à l'école
PRÉCONISATION #21
Dans le cadre de l'enseignement scolaire et de la formation tout au long de la vie, intégrer au sein des modules d'éducation à l'environnement les questions d'inégalités de genre ; intégrer la thématique égalité dans le vademecum pour éduquer au développement durable à l'horizon 2030.

22 – Intégrer le genre et encourager la mixité dans l'évolution des activités liées aux métiers « verts » et « verdissants »
PRÉCONISATION #22
Renforcer la mixité des métiers « verts et verdissants » et la promotion des femmes aux postes à responsabilité dans ces métiers ; intégrer une dimension genrée dans les plans de transformation des secteurs d'activités les plus concernés par la transition écologique ; communiquer sur leur attractivité et sur les valeurs qu'ils peuvent donner à celles et ceux en quête de sens dans leur vie professionnelle

AXE 6 : Démocratie environnementale : permettre aux femmes d'être des actrices centrales des débats

23 – Instaurer progressivement la parité dans la représentation française aux instances internationales en matière de climat et d'environnement
PRÉCONISATION #23
Instaurer la parité dans la représentation française aux COP et dans les instances décisionnelles des mécanismes et fonds climat tels que le Fonds vert pour le climat (GCF), le Fond pour l'environnement mondial (GEF), le Fonds d'investissement pour le climat, le Mécanisme de développement propre (CDM) et le Fonds d'adaptation.

24 – Rendre les modalités de participation citoyenne plus inclusives
PRÉCONISATION #24
Adapter le temps du débat démocratique en tenant compte des contraintes pesant sur les femmes (horaires des réunions, gardes d'enfants…) ; initier de nouveaux espaces de participation plus favorables aux femmes (living Lab, tiers lieux, maisons de projet, etc.) ; développer des techniques égalitaires et innovantes (éducation populaire ; prise de parole alternée, ateliers non mixtes etc.) ; intégrer les outils permettant de suivre à distance les grands débats et d'y prendre la parole.

http://www.adequations.org/spip.php?article2665bona

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Le manque de femmes dans les instances de pouvoir mondiales entrave le progrès, selon une haute fonctionnaire de l’ONU

27 août 2024, par Ashifa Kassam — ,
Selon Amina Mohammed, la sous-représentation des femmes entrave la résolution des conflits et l'amélioration de la santé et du niveau de vie. Tiré de Entre les lignes et (…)

Selon Amina Mohammed, la sous-représentation des femmes entrave la résolution des conflits et l'amélioration de la santé et du niveau de vie.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/06/23/le-manque-de-femmes-dans-les-instances-de-pouvoir-mondiales-entrave-le-progres-selon-une-haute-fonctionnaire-de-lonu/

Le manque de femmes aux tables de décision dans le monde entrave les progrès en matière de lutte contre les conflits ou d'amélioration de la santé et du niveau de vie, a déclaré la femme la plus haut placée des Nations unies.

« Nous représentons la moitié de la population. Et ce que nous apportons à la table est incroyablement important et manque », a déclaré Amina Mohammed, secrétaire générale adjointe des Nations unies. « Je pense que c'est la raison pour laquelle la plupart de nos indices de développement humain sont si mauvais, pourquoi nous avons tant de conflits et nous sommes incapables de sortir des conflits. »

Depuis sa nomination en 2017, Mme Mohammed n'a cessé de s'élever contre la sous-représentation des femmes dans la politique, la diplomatie et même l'assemblée générale de l'ONU. Ses efforts ont permis de mettre en lumière le fait que les femmes restent reléguées aux marges du pouvoir dans le monde entier ; l'année dernière, la proportion mondiale de femmes législateurs s'élevait à 26,9%, selon l'Union interparlementaire suisse.

S'adressant au Guardian, M. Mohammed a déclaré que « la flexion des muscles et la testostérone » dominaient souvent les tables du pouvoir dans le monde.

« Je pense que cela changerait si les femmes étaient présentes à la table des négociations », a-t-elle déclaré.

Elle a rapidement reconnu que le monde avait connu une poignée de femmes dirigeantes qui n'avaient pas utilisé leur position pour plaider en faveur d'une plus grande paix ou d'une résolution des conflits.

« Il est vrai que nous voyons des femmes au pouvoir et qu'elles sont parfois à l'image des hommes », a-t-elle déclaré. Mais elle a estimé qu'il était injuste de juger les femmes sur une base individuelle alors qu'elles se trouvaient encore dans les limites d'un système dominé par les hommes. « Nous ne jugeons pas les hommes de cette manière ».

Ses remarques interviennent au cours d'une année où le nombre de personnes appelées à voter n'a jamais été aussi élevé, mais où les candidates sont nettement moins nombreuses. Sur les 42 pays où se tiendront des élections cette année, seuls quelques-uns ont des candidates ayant une chance raisonnable de l'emporter.

Au début du mois, l'Islande a élu l'entrepreneuse Halla Tómasdóttir à la présidence, tandis qu'au Mexique, la climatologue de gauche Claudia Sheinbaum est récemment devenue la première femme présidente du pays.

Alors que l'Islande a une longue tradition d'élection de femmes, Mme Mohammed a déclaré qu'elle avait été surprise par le Mexique, « où l'on peut avoir une communauté machiste, mais où l'on voit des femmes fortes accéder à la présidence ». « Et puis l'Europe, nous pensions qu'il y en aurait plus. Pourquoi n'y en a-t-il pas ? C'est un peu étrange, n'est-ce pas ?

Les analystes ont longtemps pointé du doigt une série de facteurs, allant de la montée en flèche des abus en ligne au harcèlement sexuel, pour expliquer la faible participation des femmes à la vie politique en Europe et au-delà. À l'approche des élections européennes, les défenseurs et les défenseuses des droits des êtres humains ont mis en garde contre la montée du soutien à l'extrême droite, qui pourrait se traduire par une diminution du nombre de femmes élues, ces partis ayant tendance à moins se préoccuper de l'équilibre entre les hommes et les femmes.

Mme Mohammed a mis en évidence une autre raison de la sous-représentation des femmes, en pointant du doigt les nombreuses parties de la société qui considèrent que les femmes au pouvoir « enlèvent de la valeur plutôt qu'elles n'en ajoutent », a-t-elle déclaré. « Nous devons changer cette mentalité. »

Cependant, lorsqu'il s'agit d'augmenter le nombre de femmes à ces tables, les décennies de lents progrès suggèrent que l'approche actuelle n'est pas à la hauteur, a-t-elle déclaré.

« Nous n'avons cessé d'envisager des solutions de fortune : mettre des femmes au pouvoir, mettre en place des mesures de discrimination positive. Et nous n'avons jamais fait le lien avec les femmes elles-mêmes pour qu'elles se constituent un électorat et qu'elles aillent voter », a-t-elle déclaré. « Nous devons donc d'abord avoir une conversation avec les femmes. Car si nous faisons cela pour les femmes, cela ne devrait-il pas être fait par les femmes ? Je pense que nous avons raté cette étape parce que nous avons pris le train du féminisme et de la parité… nous avons laissé la base derrière nous ».

Son appel à repenser les choses est soutenu par la situation de plus en plus désastreuse à laquelle sont confrontées de nombreuses femmes dans le monde. L'année dernière, le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a déclaré que les progrès mondiaux en matière de droits des femmes « s'évanouissaient sous nos yeux », citant l'effacement des femmes de la vie publique en Afghanistan et les nombreux endroits où les droits sexuels et reproductifs des femmes étaient réduits à néant. « L'égalité des sexes s'éloigne de plus en plus », a-t-il averti. « Si l'on s'en tient à la trajectoire actuelle, ONU Femmes la place à 300 ans d'ici.

Ashifa Kassam, correspondante pour les affaires de la Communauté européenne
https://www.theguardian.com/world/article/2024/jun/19/amina-mohammed-un-women-under-representation-at-global-tables-of-power
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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