Presse-toi à gauche !
Presse-toi à gauche ! propose à tous ceux et celles qui aspirent à voir grandir l’influence de la gauche au Québec un espace régulier d’échange et de débat, d’interprétation et de lecture de l’actualité de gauche au Québec...

Des États généraux du mouvement populaire et progressiste québécois !

Dans le sillage de l'intronisation présidentielle de Trump et de la cascades d'annonces brutales et chaotiques qu'il a depuis proférées, beaucoup d'entre nous auront pu expérimenter une sorte de stupeur ou mieux dit encore, d'état de "sidération" absolu. Comme si on se retrouvait soudainement devant quelque chose d'inoui : une inversion carnavalesque de toutes nos valeurs et coutumes, conduisant à ce que « le politiquement abject », avec ses grossièretés, son ressentiment et ses sourdes colères ou son racisme décomplexé, ait définitivement pris le pas sur « le politiquement correct » et son souci vertueux des apparences et des bonnes manières ; au point même d'être perçue par certains –comble de l'illusion—comme une véritable victoire sur les élites du monde globalisé !
3 février 2025
Peu d'entre nous, ont cependant fait ressortir les raisons profondes qui sont à l'origine d'un tel renversement, et surtout ont cherché à sonder les moyens qu'on pourrait mettre de l'avant pour en confronter les dangers, en déjouer les lubies mortifères. Comment se protéger de l'autoritarisme crasse et narcissique de tels individus, et surtout comment stopper la montée politique de la droite-extrême dont ils sont l'expression même, tout en redonnant au passage à la gauche —au camp des progressistes— la force collective qui lui manque dramatiquement pour inverser le cours de l'histoire présente ?
En toute lucidité, il faut pourtant le reconnaître : cette arrivée de la droite-extrême fascisante au gouvernement des USA comme sa présence aux portes du pouvoir dans bien des pays du monde (y compris au Canada), tiennent aussi à l'incapacité de la gauche institutionnelle à s'y opposer fermement, et plus particulièrement aux choix politiques entérinés par la vaste nébuleuse progressiste qui a eu pignon sur rue ces dernières années en Occident et a fini par se rallier –corps et âme— au capitalisme néo-libéral et à sa démocratie libérale de basse intensité.
Un malaise social grandissant
C'est ainsi que cette dernière s'est montrée incapable de saisir les conséquences funestes de l'épuisement du cycle d'expansion et de renouveau initié après la seconde guerre mondiale. Et qu'elle est passée à côté non seulement des inégalités socio-économiques qui n'ont cessé de déchirer en profondeur le tissus social, mais aussi du malaise grandissant qui s'installait dans de larges secteurs de la population à la suite des multiples crises qui, depuis le début du millénaire se sont amplifiées puis combinées les unes aux autres : économique, sanitaire, écologique, politique, culturelle, etc.
Incapable dans ce contexte, de contre-proposer aux sourdes inquiétudes collectives qui s'exprimaient chaque fois plus, un projet politique globalisant, positif et pacifiant, susceptible de contrecarrer le repli identitaire et les logiques du bouc-émissaire brandies par la droite, la gauche institutionnelle n'a pu opposer à l'extrême-droite montante qu'un front désuni, fragmenté, en tous points déconnecté des enjeux réels et des angoisses vécues de larges secteurs de la population.
En ce sens, il faut oser se le dire : comprendre ce qui nous arrive avec Trump, c'est aussi prendre acte de tout ce qui nous revient en propre —nous qui avons rêvé au Québec dans le sillage de la révolution tranquille à plus d'égalité sociale — et qui nous a conduit à nous retrouver en position défensive, enfermés plus souvent qu'autrement dans les seules logiques de l'indignation.
Il n'est pourtant pas trop tard pour réagir et nous montrer à la hauteur des formidables enjeux qui se dressent devant nous. Il est temps de rebondir, d'échapper tant au découragement qu'au cynisme ou encore au repli sur soi. Aux USA bien sûr, mais aussi au Canada et au Québec. Comme récemment l'écrivait Françoise David dans Le Devoir : « Opposons au défaitisme une mobilisation sociale et politique nationale, rassembleuse et forte (...) Ne nous contentons pas de peu. On n'est plus nés pour un p'tit pain ! ». En sachant.. cependant que cette mobilisation si nécessaire ne peut être —tant les défis qui se dressent devant nous sont vastes— que sociale et politique, le fait autant des mouvements sociaux que des courants politiques qui se reconnaissent de la gauche et de la lutte pour l'égalités sociale : syndicats, mouvements communautaires, mais aussi forces politiques de gauche.
Des États généraux ?
Pourquoi ne pas alors organiser au Québec des États généraux du mouvement populaire et progressiste québécois ? Des États généraux, pour nous donner les moyens depuis le progressisme, de comprendre ce qui est en train de nous bousculer si tragiquement, et pour nous permettre d'y faire face en nous mobilisant enfin autour de mêmes objectifs sociaux et politiques partagés. Car il ne suffit plus aujourd'hui de manifester devant le parlement afin de faire connaître en toute civilité nos mécontentements respectifs auprès des gouvernements en place. Il faut réapprendre à redevenir une force collective qui compte et puisse avoir enfin prise sur l'ordre des choses, peser en somme dans les batailles à venir !
N'est-ce pas en ces temps difficiles, ce à quoi nous devrions occuper nos efforts ?
Pierre Mouterde
Sociologue et essayiste
Québec, le 2 février 2025
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États-Unis : Trumpisme et fascisme

Trump est un fasciste et il y a clairement de nombreux fascistes dans ses collaborateurs. Outre Elon Musk et son salut nazi, on rappellera en particulier les pédigrées inquiétants d'individus comme Steve Bannon, Stephen Miller et Laura Loomer, entre autres. La situation est gravissime, il ne faut pas la banaliser. Cependant, les USA n'ont pas basculé dans LE fascisme. Ils risquent de le faire, nuance. Trump agira pour qu'un basculement de ce type survienne (ce qui ne signifie pas la répétition a l'identique du fascisme historique), mais il y a loin de la coupe aux lèvres.
Tiré d'Europe Solidaire Sans Frontières
28 janvier 2025
Par Daniel Tanuro
Le fascisme comme rupture
Le fascisme se caractérise par la destruction des droits démocratiques et l'atomisation sociale. Cela implique la destruction des mouvements sociaux, notamment des syndicats, la transformation de l'appareil judiciaire en instrument de la tyrannie du Chef et l'abolition de toute forme de liberté de la presse, de liberté d'expression en général et du droit de grève. On n'en est pas là.
Il faut éviter les raisonnements simplistes, ils mènent à des conclusions fausses. Par exemple : la démocratie bourgeoise est une fausse démocratie, qui dissimule la dictature du Capital. C'est exact, mais il n'en découle pas que le capitalisme produirait inévitablement le fascisme. Il n'en découle pas davantage qu'un candidat despote comme Trump pourrait faire passer facilement les USA de la démocratie bourgeoise au fascisme. Ce passage est un saut qualitatif , il requiert une rupture brutale.
La caractéristique clé du fascisme dans sa lutte pour le pouvoir (ce qui le distingue d'un « simple » coup d'État militaire) est qu'il opère cette rupture en s'appuyant sur un mouvement de masse extraparlementaire de la petite bourgeoisie et du lumpenproletariat, à l'aide de troupes de choc terroristes, mobilisées à grands renforts de mensonges, de haine et de démagogie nationaliste pseudo-socialiste.
Il saute aux yeux que tous ces éléments sont présents dans une certaine mesure dans le trumpisme : MAGA comme mouvement de masse, la démagogie sociale, le mensonge systématique, la haine, les Prou boys et Oath keepers comme bandes violentes. Le danger fasciste est donc très très réel, il faut insister la-dessus. Mais il faut insister aussi sur le fait que la rupture n'a pas eu lieu. Elle pourrait intervenir, elle n'est pas derrière nous.
Forces et faiblesses de Trump
Et elle n'aura pas lieu si facilement, cette rupture. On le voit dans les tempêtes de réactions indignées causées par le pardon général que Trump a accordé aux émeutiers impliqués dans l'attaque violente contre le Capitole, en janvier 2021. On le voit en particulier dans les réactions virulentes de juges qui ont dénoncé ce pardon et contesté catégoriquement que les bénéficiaires seraient prémunis contre toute reprise des poursuites.
Trump roule des mécaniques, mais il est plus faible qu'il n'y paraît. Il a dû renoncer à la nomination scandaleuse de Matt Gaez comme Attorney général (ministre de la justice). Un Américain sur 10 seulement soutient son choix de nommer Pete Hegseth ministre de la défense (trois sur 10 sont contre, et Hegseth a failli être écarté par le vote au Sénat !). MAGA est un mouvement de masse, mais pas (encore ?) un parti de combat discipliné, comparable à ceux d'Hitler ou de Mussolini.
Trump a évidemment des atouts : la Cour suprême dominée par ses partisans lui a donné l'immunité, le parti républicain est à sa botte, et les mouvements sociaux (qui avaient manifesté en masse contre sa nomination, en 2016-2017) semblent cette fois tétanisés, effrayés par l'ampleur de sa victoire. Trump exploite cette conjoncture pour donner l'impression d'une marche triomphale que rien ne peut arrêter. En réalité, les obstacles accumulés devant lui sont considérables. L'un d'eux est la contradiction béante entre les promesses populistes faites à la base MAGA, d'une part, et la réalité politique d'un gouvernement de kleptocrates et de milliardaires qui se fichent de ces promesses, d'autre part.
Cette contradiction entre populistes et milliardaires est typique du fascisme. Elle traversait aussi le parti nazi. Hitler l'a « résolue » en assassinant quelque deux cents dirigeants de l'aile fasciste-populiste, les chefs des S.A. (c'est « la nuit des longs couteaux », juin 1934). Mais à ce moment sa dictature était solidement établie depuis plus d'un an. Celle de Trump ne l'est pas. Or, le fossé entre MAGA et les milliardaires à commencé à s'ouvrir avant même l'inauguration, quand Bannon et Musk se sont violemment affrontés sur la question des migrant·es. L'historien Timothy Snyder pronostique l'approfondissement de ces tensions. Il a fort probablement raison. Petit exemple : un syndicat de flics qui a appelé à voter pour « la loi et l'ordre » rompt avec Trump suite a la libération des émeutiers qui ont piétiné « la loi et l'ordre » en attaquant le Capitole…
Stratégie du choc
La démocratie bourgeoise étasunienne est profondément corrompue par l'argent, mais elle est solidement enracinée dans un vaste réseau d'institutions et de contre-pouvoirs attachés aux principes constitutionnels. Dans ce contexte, il faudrait un choc majeur pour opérer une rupture décisive vers le fascisme. Hitler a établi son pouvoir absolu en tirant prétexte de l'incendie du Reichstag (27/2/33), un mois à peine après sa nomination comme chancelier. Trump cherche sans doute quelque chose de ce genre en décrétant l'état d'urgence contre « l'invasion » à la frontière, ou en menaçant le Panama. Mais sa base MAGA à voté pour lui essentiellement en espérant qu'il abaissera les prix des biens de consommation courante. La traque aux migrants (dont l'économie US ne peut se passer dans l'agriculture, la construction, la restauration) n'y contribuera pas, les tarifs douaniers non plus, au contraire !
La difficulté pour Trump est d'aller vite vers la dictature, avant que ses électeurs ne réalisent la supercherie, que le bluff de sa « stratégie du choc » se dégonfle et que les mouvements sociaux se réveillent. Leur passivité est en fait son plus grand atout. L'absence de luttes de masse encourage le grand capital à « oser le fascisme » à la Trump. Sans cette passivité, la lâcheté ignoble des élus républicains qui avalent sans broncher accorder le pardon aux émeutiers de janvier 2021 – qui avalent donc, en fait, sous-entendu que la tentative de coup d'État n'a pas eu lieu, et qui avalent en plus donner l'autorisation aux voyous fascistes de faire le coup de poing chaque fois que le Chef aura besoin d'eux ! – serait politiquement intenable.
On peut objecter que le grand capital US n'a pas besoin de bandes fascistes. Musk et Cie ne sont pas menacés par les luttes sociales, le syndicalisme est faible, la démocratie bourgeoise semble un bien meilleur moyen de servir leurs intérêts. Que veulent les grands patrons ? La relance des énergies fossiles, des investissements dans l'intelligence artificielle, une série de dérégulations… A priori, rien de tout cela ne semble requérir un régime fasciste… Alors, pourquoi le trumpisme, et dans quelle mesure est-il fasciste ? La question mérite d'être posée. Selon moi, le paradoxe s'éclaire quand on prend en considération le contexte de catastrophe écologique dans lequel l'impérialisme étasunien lutte pour sauver son hégémonie.
L'hégémonie à tout prix
C'est un fait : le capitalisme chinois est à ce point dominant dans le secteur des technologies « vertes » que les responsables politiques occidentaux, s'ils veulent respecter l'accord de Paris, n'ont d'autre choix que d'acheter chinois, donc de renforcer Pékin au détriment de l'impérialisme US. Inacceptable pour Trump-Musk. Leur riposte : garder l'hégémonie en misant à fond sur l'intelligence artificielle. Mais celle-ci demande d'énormes ressources énergétiques et la mainmise impérialiste sur quantité de ressources minérales. Donc le recours massif aux fossiles et le retour à la politique de la canonnière (Groenland, Panama…). Donc le climatonégationnisme et le mensonge systématique. Donc le mépris le plus absolu pour les menaces terribles que la catastrophe écologique fait peser sur la vie de centaines de millions d'êtres humains qui n'en sont pas responsables. Donc la haine de celles et ceux qui résistent, l'exaltation viriliste de la force comme moyen de garantir aux États-Unis leur « espace vital » (jusque sur Mars…) et la volonté de vassaliser l'Europe. La cohérence est assez nette.
Le projet Trump-Musk n'est pas « isolationniste ». C'est un projet radicalement, sauvagement impérialiste, pour l'hégémonie à tout prix. Son application cohérente, dans une perspective de long terme, nécessite un régime politique brutal et cynique, capable d'assumer impitoyablement une barbarie malthusienne sans précédent dans l'Histoire. Quelque chose dans le genre Netanyahou – dont Trump est un partisan inconditionnel – mais à l'échelle planétaire. Il s'agit de rompre avec les idéaux de justice, de démocratie, d'égalité entre tous les humains ; avec l'éthique humaniste, avec la rationalité des Lumières ; et même avec les valeurs morales des religions monothéistes. L'esprit de cette rupture hante le trumpisme. Il faut être reconnaissant à l'évêque de Washington, Marianne Budde, de l'avoir mis à nu, à sa manière, dans son plaidoyer public face à Trump.
Crier trop vite « le fascisme est au pouvoir » présente deux risques : le risque de voir des masses de gens se dire que « le fascisme », tous comptes faits, n'est pas si terrible qu'on le dit, d'une part ; et le risque de voir des gens plus conscients se dire que tout est foutu, voire se cacher de peur d'être emmenés dans un camp de concentration, d'autre part. Ces deux risques font précisément le jeu des fascistes.
No pasaran !
En même temps, la menace fasciste est très réelle, le trumpisme l'incarne et lui donne un terrible coup d'accélérateur mondial. Les fascistes progressent partout. Mais ils n'ont pas gagné. Ils peuvent être arrêtés. Pas par l'alliance avec la droite soi-disant « démocratique » à la Liz Cheney. Par la mobilisation de masse. Pour les droits démocratiques, les droits sociaux, contre le mensonge et les inégalités, contre le racisme, contre le soutien aux génocidaires, pour les droits des femmes et des personnes LGBT. Sans oublier la mère de toutes les batailles : la lutte pour la sauvegarde de la seule planète vivable du système solaire. La lutte contre les criminels capitalistes prêts à la faire crever pour sauver leurs profits et leur hégémonie.
Relevons la tête, soyons capables non seulement de dénoncer mais aussi d'analyser. Indignons-nous, mobilisons-nous, organisons-nous. No pasaran !
Daniel Tanuro
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Auschwitz, la faillite de l’idée du progrès et la réhabilitation de la dimension utopique du socialisme

Pourquoi republier un texte sur Auschwitz et sa signification, écrit en grec au siècle dernier ? Mais parce que, relu aujourd'hui, à une époque profondément marquée non seulement par le génocide des Palestiniens et la destruction de Gaza, mais aussi par le retour en force de la menace fasciste - et de la guerre - à l'échelle mondiale, incarnée par le duo Trump-Musk, ce texte prend une signification et une actualité accrues.
Car, comme le dit Ernest Mandel dans son très important écrit Prémisses matérielles, sociales et idéologiques du génocide nazi, souvent cité dans notre texte, «
Pour mieux combattre le néofascisme et le racisme biologique aujourd'hui, il faut comprendre la nature du fascisme d'hier. La connaissance scientifique est aussi une arme de combat et de survie de l'humanité, et non un exercice purement académique. Refuser d'utiliser cette arme, c'est faciliter l'avènement de nouveaux candidats assassins de masse, c'est contribuer à ce qu'ils commettent de nouveaux crimes. Expliquer les causes du fascisme et de l'holocauste, c'est renforcer le potentiel de rejet, d'indignation, d'hostilité, d'opposition totale et irréductible, de résistance et de révolte, contre la remontée toujours possible du fascisme et d'autres doctrines et pratiques de déshumanisation. C'est une œuvre de salubrité politique et morale élémentaire et indispensable ».
Véritable produit de notre temps et de son « modernisme » capitaliste, Auschwitz et sa machine industrielle-bureaucratique d'extermination massive d'êtres humains, nous interpelle en cette période charnière entre deux siècles pour au moins trois raisons principales :
(a) parce qu'il ne renvoie pas à un prétendu retour à des barbaries ancestrales ;
(b) parce qu'il constitue une rupture profonde dans la civilisation et dans la manière d'envisager l'idée de progrès ; et
(c) parce que ses leçons sont aujourd'hui - et continueront d'être - plus utiles et plus pertinentes qu'elles ne l'étaient il y a 55 ans.

Ainsi, si l'histoire se divise aujourd'hui entre un avant et un après Auschwitz, ceci est dû tant à « l'unicité » des chambres à gaz nazies qu'au fait que rien n'est plus pareil après elles. Si Auschwitz est à la fois « unique » et « moderne », ce n'est pas parce que d'autres manifestations de la barbarie humaine ayant fait encore plus de victimes (par exemple l'extermination massive et le génocide des populations indigènes du « Nouveau Monde » ou de l'Afrique par les conquérants et les colonialistes européens) ne l'ont pas précédé. En réalité, ce qui fait que Auschwitz ne ressemble à rien d'autre, qu'il n'est pas une simple répétition - peut-être encore plus meurtrière - des barbaries passées et, par conséquent, qu'il ne s'explique pas par une prétendue tendance « métaphysique » ou « innée » au retour à une autre époque (par exemple à ce Moyen Âge si vilipendé), c'est le fait qu'il aurait été impossible et impensable en dehors du capitalisme triomphant et de sa société bourgeoise !
DE LA RATIONALITÉ PARTIELLE À L'IRRATIONALITÉ TOTALE
Produit du monde occidental moderne et de son industrie développée, Auschwitz - selon Ernest Mandel - "fut une entreprise industrielle et non artisanale d'extermination. Voilà toute sa différence avec les pogromes traditionnels. Cette entreprise exigeait la production en masse du gaz Zyklon B, de chambres à gaz, de tuyauteries, de fours crématoires, de baraquements, de l'intervention massive des chemins de fer, sur une échelle telle qu'elle était irréalisable au XVIIIe siècle et dans la majeure partie du XIXe siècle, pour ne pas parler d'époques antérieures". Et Mandel poursuit : « Dans ce sens, l'holocauste est aussi (pas seulement, mais aussi) un produit de l'industrie moderne échappant de plus en plus au contrôle de la raison humaine et humaniste, c'est-à-dire de l'industrie capitaliste moderne propulsée par la concurrence exacerbée devenue incontrôlable ».
Mais, il y en a plus. Cette monstrueuse usine de mort a été rendue possible et a pu fonctionner dans cette période historique déterminée parce que seul l'État bourgeois développé lui a offert une autre de ses préconditions : la nécessaire mentalité bureaucratique, la « rationalité » quotidienne à courte vue de ses centaines de milliers d'exécutants directs et indirects. C'est à dire l'obéissance et la soumission aveugles au tout-puissant et « sacré » État-maitre, qui se traduisent par l'éventail bien connue d'attitudes allant de la autolimitation acritique de chaque individu à ses "devoirs" partiels et fragmentés (« je fais juste mon travail et tout le reste ne me concerne pas ») à la transformation des citoyens actifs en serviteurs involontaires de la doctrine « bon ou mauvais, c'est l'État » et mon pays...
Nous voici donc au cœur du monstre moderne puisque la question cruciale se pose légitimement à nous : si c'est bien notre époque qui a rendu Auschwitz possible, alors qu'est-ce qui nous garantit que nous n'assisterons pas à sa répétition ou même à quelque chose encore pire ? Malheureusement, la réponse est à la fois simple et tragique. Absolument rien ! Après Auschwitz, tout est désormais possible et nier cela catégoriquement ne peut que relever de l'irresponsabilité politique ! Ou, comme nous avertit Brecht : « Le ventre est encore fécond, d'où a surgi la bête immonde » !
Non, il ne s'agit plus seulement du monstre fasciste dont parlait Bertolt Brecht. Auschwitz n'est pas seulement l'exemple le plus extrême de la barbarie moderne. Dans son essence, il est avant tout une expression presque typique et exemplaire des tendances destructrices qui ont existé et continuent d'exister (et même, elles se développent toujours plus) au sein de nos sociétés bourgeoises à ce stade du capitalisme tardif. Si Auschwitz est à la fois une coupure et un symbole de l'ère capitaliste-impérialiste moderne, c'est parce qu'aucun autre « événement fondateur » de notre époque n'a mis en évidence aussi puissamment sa caractéristique dominante et sa contradiction suprême : la combinaison du rationalisme partiel le plus parfait avec l'irrationalisme total absolu. Le mariage de la plus grande rationalité des moyens avec la plus extrême irrationalité des fins !
Après tout, qu'est-ce que Auschwitz sinon cette « rationalité partielle mortifère » de l'organisation moderne du travail et de la technologie au service des objectifs les plus absurdes et les plus irrationnels, c'est-à-dire de l'entreprise cruelle et barbare d'extermination totale d'êtres humains uniquement parce qu'ils ont commis - en tant que Juifs et en tant que Tziganes - la « faute » ...d'exister ? Il ne s'agit même pas d'un objectif totalement « immoral », comme celui du Goulag stalinien, où des millions de Zek (prisonniers) ont été transformés en une force de travail trop bon marché pour la construction (forcée) de l'économie « socialiste ». Ici, nous sommes passés à un autre niveau de barbarie, qualitativement différent, qui ne peut s'expliquer ni par certains objectifs économiques des bourreaux, ni par leur haine raciste. Les Juifs, en tant qu'êtres humains condamnés exclusivement à l'extermination, ne peuvent évidemment même pas travailler comme esclaves, ni continuer à jouer le rôle de bouc émissaire que leur réserve l'antisémitisme traditionnel !
L'IDÉE DU PROGRÈS HISTORIQUE ET LA DESTRUCTION PLANÉTAIRE

« Indicible » et l'« impensable » d'Auschwitz ne se situent donc ni dans l'ampleur du crime odieux des nazis, ni dans les dimensions monstrueuses de leur antisémitisme, mais plutôt dans cette véritable cassure civilisationnelle, sans précédent dans l'histoire, qu'implique le mépris et l'abolition de fait de toutes les règles et tabous séculaires de la solidarité et de la coexistence les plus élémentaires des êtres humains. Étant donné le précédent d'Auschwitz (et d'Hiroshima), l'humanité peut affronter son avenir laissant la porte ouverte à toute éventualité, même celle de son anéantissement total !
Malheureusement, ce qui était autrefois une simple prémonition des plus perspicaces anatomistes de la réalité pitoyable d'aujourd'hui (Walter Benjamin, Léon Trotski, Ernest Bloch, ...) devient aujourd'hui plus ou moins un truisme qui tend à être adopté, même si c'est par fragments, par des millions de personnes dans tous les coins de la planète. Le dilemme de Rosa Luxemburg « socialisme ou barbarie » n'est plus d'actualité depuis longtemps, car nous vivons déjà dans la barbarie ! Par contre, un nouveau, encore plus tragique dilemme existentiel prend sa place, et est imposé comme inévitable : socialisme ou destruction de la planète et extinction de l'espèce humaine ! Maintenant, il ne s'agit plus « seulement » de la vague de génocides achevés ou inachevés qui déferle sur notre époque (Rwanda, Tchétchénie, Timor de l'est) et de l'épuration ethnique en ex-Yougoslavie, ni de l'horreur des 45 millions d'enfants du tiers-monde qui meurent tous les quatre ans de malnutrition et de manque de médicaments et d'eau potable, ni même de toute cette humanité martyrisée qui est sacrifiée sur l'autel de la maximisation effrénée du taux de profit. Il ne s'agit plus de tout cela, ni même de l'existence de la civilisation humaine, mais de quelque chose de plus, de qualitativement supérieur, de la destruction totale déjà promise et préparée par la cauchemardesque « irrationalité totale » capitaliste à l'air que nous respirons, à l'atmosphère, aux forêts, aux mers et aux terres que nous habitons, bref, à notre planète elle-même et aux hommes qui s'obstinent à y vivre !
Nouveaux problèmes, nouveaux dilemmes, nouveaux cauchemars universels qui bouleversent de fait les anciennes certitudes et les croyances traditionnelles. La première et la meilleure d'entre elles est la croyance aveugle dans l'inéluctabilité du progrès à laquelle l'espèce humaine serait « condamnée ». Alors que le vingtième siècle s'éteint, laissant derrière lui d'innombrables ruines matérielles et surtout spirituelles, il est aujourd'hui parfaitement justifié de constater, avec Daniel Bensaid, que « deux guerres mondiales, la barbarie des camps et du goulag, la croissance exponentielle des forces destructives ont depuis malmené ces croyances. L'effondrement des régimes bureaucratiques à l'Est, la prise de conscience que les ressources ne sont pas inépuisables et gratuitement offertes par la nature, le vertige devant les possibilités ouvertes par la biologie en matière de procréation ou de génie génétique, le brouillage des frontières entre la vie et la mort portent de nouveaux coups : les ailes d'ange du Progrès sont criblées de plomb ».
Oui, après tout, c'est l'idée même du long, linéaire et « inévitable » progrès historique de l'espèce humaine qui ne peut perdurer et doit être relativisée, voire fondamentalement révisée, à l'heure où la survie même de l'homme sur Terre est désormais en question, où « l'Apocalypse cesse d'être une vision prophétique pour devenir une menace tout à fait tangible ». Si à Auschwitz, ce sont les Juifs, les Tziganes, les homosexuels et quelques autres catégories d'« Untermenschen » (c'est-à-dire les « sous-hommes » auxquels les nazis refusaient tout statut humain) qui ont été offerts comme « matière première » à la machine dévoreuse d'êtres humains qui fonctionnait grâce à la coopération et à la convergence du racisme biologique, de la science-technologie moderne et de l'industrie capitaliste, maintenant c'est l'humanité tout entière qui est offerte comme cobaye pour l'expérimentation de l'énorme pouvoir destructeur que ce capitalisme tardif brutal a accumulé.
POUR LE SOCIALISME VISIONNAIRE DE LA NOUVELLE QUALITÉ DE VIE
Critique et révision de l'idée de « l'inéluctabilité du progrès », c'est aussi critique et révision d'un certain marxisme ! Un marxisme qui, même s'il cherche à remplacer la loi du profit par la satisfaction des besoins de l'humanité, "n'entend nullement bouleverser les fondements de la société identifiés à l'industrie, à la technique, à la science et au progrès ».
Jamais plus qu'aujourd'hui, ce marxisme déterministe, prosaïque et économiciste des « étapes » de l'évolution historique n'a été aussi irréaliste, inutile et surtout inefficace. Et jamais il n'est entré en collision aussi frontale avec le marxisme révolutionnaire émancipateur, visionnaire et humaniste qui ne se contente pas de « dépasser » la civilisation occidentale, mais cherche à renverser - ou plutôt à mettre à l'envers - le cours que cette civilisation occidentale a suivi pendant des siècles.
Il n'a donc rien à voir avec le marxisme vulgaire ankylosé qui dédaigne de voir le cours de l'histoire du point de vue des « perdants » qui sont condamnés ex-cathedra à n'être que... des « poussières de l'histoire » (comme c'était le cas autrefois, par exemple[u1] avec les Indiens « incivilisés » ou avec les petits peuples « historiquement arriérés », et bien plus récemment avec les ex-Yougoslaves ethniquement nettoyés ), et qui refuse obstinément de l'approcher à travers la possibilité d'une (imminente) catastrophe totale. Et bien sûr, rien à voir avec le marxisme bureaucratique de tant d'« épigones » qui croit toujours aveuglément à l'automatisme prétendument progressiste du développement des forces productives et à l'encore plus redoutée « domestication » de la nature (forcément hostile) par l'homme et la technologie « miraculeuse ».
Non, ce n'est pas un hasard si ce marxisme stalinien et social-démocrate « oublie » en permanence de proposer une vision stratégique, de réhabiliter l'utopie révolutionnaire, de proposer "une civilisation radicalement différente, une nouvelle qualité de vie, une nouvelle hiérarchie des valeurs, un autre rapport à la nature, des rapports d'égalité entre les sexes, les nations et les « races », des rapports sociaux de solidarité et de fraternité entre les peuples et les continents", un nouveau rapport radicalement différent (discriminations positives) entre le monde riche et le monde sous-développé. Et bien sûr, ce n'est pas un hasard - comme le souligne Bensaid - s'il adopte aveuglément « l'idée de progrès (qui) n'est que la forme plate, dévalorisée et embourgeoisée de cette capacité d'aller de l'avant, conduisant imperceptiblement à l'abandon de l'action politique au profit des automatismes techniques et marchands ».
Les dés sont jetés. La révolution ne peut plus être simplement - comme autrefois - « la locomotive de l'histoire », parce que rien ne justifie et n'impose sa nécessité historico-existentielle, autant que, plus que tout autre, elle seule doit tirer - comme le disait Walter Benjamin - le « frein d'urgence » qui arrête la course folle du train vers la destruction ! Désormais, le dilemme n'est plus le socialisme ou la régression de l'humanité. C'est le socialisme en tant que nouvelle civilisation ou la destruction de l'humanité ! Et qu'on ne vienne pas nous dire qu'il s'agit là d'une tâche extrêmement ambitieuse pour la révolution socialiste. N'oublions pas, en effet, que « on renonce d'abord à l'impossible, ensuite à tout le reste ».
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Proche-Orient. La paix selon Donald Trump : déstabiliser pour dominer

Donald Trump n'est pas un homme de paix. Il dessine un projet de nettoyage ethnique et de déstabilisation de la région.
Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
28 janvier 2025
Par Catherine Tricot
Un danger gigantesque point.
On commence à comprendre ce qu'est la paix selon Donald Trump. Certes elle ne passe pas par une d'intervention militaire américaine. Mais au proche Orient, il ne s'agit nullement de rétablir un ordre basé sur un accord entre les parties et le respect des droits des peuples. Pour Donald Trump, la paix entre Palestiniens et Israéliens ne relève ni d'un moyen ni d'un objectif pour le retour à une vie conjointe des deux peuples. Le président américain a tordu le bras au pouvoir Israélien pour que le cessez-le-feu soit signé. Mais il ne s'agit que d'une étape dans une autre perspective : celle d'une nouvelle dispersion du peuple Palestinien, de l'ampleur de celle de 1967. Il emploie le mot ordurier de « nettoyage » au sujet de la bande de Gaza. Donald Trump a évoqué samedi l'idée d'un plan visant à « faire le ménage », disant vouloir envoyer les Palestiniens de Gaza vers l'Égypte et la Jordanie.
Le Hamas et l'Autorité palestinienne ont évidemment rejeté et condamné ce projet. Mahmoud Abas déclare « le peuple palestinien ne renoncera pas à sa terre et à ses lieux saints. Nous ne permettrons pas que se répètent les catastrophes qui ont frappé notre peuple en 1948 et en 1967, (…) notre peuple ne partira pas ».
Dès dimanche, l'Égypte a refusé tout déplacement forcé des Palestiniens et a rejeté « toute atteinte à ces droits inaliénables, qu'il s'agisse de colonisation, d'annexion de terres, de dépeuplement de ces terres par déplacement, d'encouragement au transfert ou de déracinement des Palestiniens de leur territoire, que ce soit de manière temporaire ou permanente ». De son côté, la Jordanie qui accueille près de 3 millions de Palestiniens déplacés (plus de 25% du nombre d'habitants de la Jordanie, réfugiés avec de très faibles droits sociaux et sans droits politiques), a réaffirmé la position de son pays, celle d'une solution à deux États pour parvenir à la paix et son « rejet du déplacement forcé ». La Jordanie se fait pressante : « la résolution de la question palestinienne est une solution palestinienne : la Jordanie pour les Jordaniens et la Palestine pour les Palestiniens ». Le royaume de Jordanie pointe un enjeux qui apparait chaque jour de plus en plus central, celui de la redéfinition des frontières au Proche-Orient. Sont concernés : le Liban, la Jordanie, la Syrie et l'Égypte au travers du désert du Sinaï.
Donald Trump entend destiner Gaza à de mirifiques projets immobiliers en bord de méditerranée. Il veut affaiblir encore et encore les Palestiniens en les divisant physiquement, en rendant impossible leur capacité politique. Il veut les couper d'une mémoire ancrée dans les paysages, les villes et les maisons, leur mémoire matérielle, celle qui donne forme aux cultures. La Ligue arabe a raison de parler d'un projet de « nettoyage ethnique ».
L'enjeu est bien sur celui du devenir des Palestiniens en tant que peuple. Mais c'est aussi celui d'une région que Trump promet au dessein de Netanyahou. Ne vient-il pas de livrer les lourdes bombes demandées par le pouvoir d'extrême-droite israélien et retenues jusqu'alors par Biden ? Il apporte dès son arrivée son soutien aux suprématistes et nomme un ambassadeur de cette eau ?
Pour s'assurer qu'il n'y aura aucune résistance des pays arabes, il tord le bras à son meilleur allié, l'Arabie Saoudite et exige d'elle une baisse des cours du pétrole et qu'elle investisse 1000 milliards aux Etats-Unis comme il vient de le déclarer à Davos.
Trump ne veut pas la paix. Il veut inquiéter tout le monde pour le dominer.
Catherine Tricot
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Lettre ouverte en réaction à la hausse du salaire minimum

Plus tôt aujourd'hui, le ministre du Travail, M. Jean Boulet, annonçait que la prochaine hausse du salaire minimum sera de 0,35 $, le faisant passer de 15,75 $ à 16,10 $ dès le 1er mai. Illusion Emploi de l'Estrie et la Table d'action contre l'appauvrissement de l'Estrie (TACAE) dénoncent cette augmentation complètement déconnectée de la réalité des travailleuses et travailleurs en situation de précarité.
Une claque au visage
Selon le ministre du Travail, Jean Boulet, ce nouveau taux (16,10 $) permettrait d'atteindre un « bon équilibre » entre la préservation du pouvoir d'achat de ces travailleuses et travailleurs et la capacité de payer des PME. Mais dans quel monde vit-il ? Rappelons qu'en 2022, M. Legault a reconnu qu'il devait être difficile pour une personne de vivre avec un salaire horaire de 18 $. Trois ans plus tard, son gouvernement a le culot d'annoncer un salaire minimum en dessous de ce seuil et de nous dire que ça permet l'atteinte d'un « bon équilibre » ?!
Le Tribunal administratif du logement (TAL) vient de suggérer une hausse de loyer de 5,9%. Il s'agit de la plus importante hausse de loyer depuis 30 ans au Québec, qui viendra s'additionner aux hausses de loyer indécentes et à l'inflation galopante des dernières années. Ce sont les familles les plus vulnérables qui en paient le plein prix. Entre 2020 et 2024, le salaire minimum a augmenté de 20% alors que les loyers pour les logements disponibles ont augmenté de 44% à Sherbrooke pendant cette même période. L'augmentation du salaire minimum d'à peine 2,2% est définitivement plus proche d'une claque au visage que d'un « bon équilibre ».
Résultat : les personnes qui travaillent à temps plein au salaire minimum au Québec sont contraintes à vivre dans la précarité. Dans plusieurs cas, ces personnes doivent cumuler plusieurs emplois, avoir recours aux services des banques alimentaires ou simplement couper dans leurs besoins de base. Selon le Bilan-Faim 2024, le nombre de demandes d'aide auprès des banques alimentaires a augmenté de 55 % par rapport à 2021. Certains organismes en dépannage alimentaire, dont Moisson Estrie, sonnent l'alarme : la clientèle qui augmente le plus dans les demandes de services est celle des travailleuses et travailleurs à bas salaire ! Cette année, c'est une bénéficiaire sur 5 dans nos banques alimentaires qui ont un revenu de travail. Clairement, une décision comme celle du ministre Boulet maintient nos travailleuses et travailleurs à bas salaire dans la pauvreté et les force à avoir recours à nos banques alimentaires.
Année après année, nous voyons les populations en situation de précarité augmenter. Pendant ce temps, le fossé des inégalités ne cesse de se creuser et ce sont des ministres gagnant 230 000$ par année qui déterminent la situation financière des plus vulnérables de notre société. Le 2 janvier 2025, les PDG les mieux rémunérés de la province avaient déjà gagné l'équivalent du salaire annuel moyen (60 000$). Il faudrait presque deux ans à une personne au salaire minimum pour gagner ce que ces PDG font en une dizaine d'heures seulement.
Laisser des personnes vivre dans la pauvreté alors que d'autres monopolisent toutes les ressources est d'une violence inouïe, et cette violence s'intensifie et se perpétue par les constantes décisions politiques des gouvernements, dont celle de refuser d'adopter un salaire minimum décent.
Table d'action contre l'appauvrissement de l'Estrie (TACAE) et Illusion Emploi de l'Estrie

Manif du 26 janvier 2025 : « Israël doit être arrêté ! »

Un cessez-le-feu est actuellement en vigueur à Gaza, mais personne ne doit se leurrer quant à son caractère permanent.
Un cessez-le-feu est actuellement en vigueur à Gaza, mais personne ne doit se leurrer quant à son caractère permanent. Le premier ministre criminel et génocidaire israélien Netanyahou a déjà exprimé son scepticisme quant à la prolongation du cessez-le-feu au-delà de cette première phase de six semaines, et il reste à voir si même cette première phase sera mise en œuvre comme elle le devrait. Une fois les otages israéliens libérés par Hamas, il est fort probable que les criminels à Tel-Aviv bombardent Gaza à nouveau.
Entre l'annonce et le début de la trêve, le gouvernement israélien a tué des centaines de Palestiniens à Gaza et a étendu sa campagne de génocide à la Cisjordanie occupée, où des colons juifs zélotes soutenus par les forces d'occupation israéliennes ont assassiné des centaines de Palestiniens depuis des mois et se concentrent maintenant sur le massacre des Palestiniens dans le camp de réfugiés de Jénine avec l'aide des forces de sécurité de l'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, qui assume un rôle similaire à celui assumé par le gouvernement de Vichy lors de l'occupation allemande de la France pendant la 2e guerre mondiale.
Le nettoyage ethnique des Palestiniens n'a pas cessé, et il ne cessera pas à moins que les gouvernements occidentaux, y compris le gouvernement canadien, ne cessent d'armer et de financer le régime d'apartheid d'Israël.
Au cours des 15 derniers mois, le gouvernement israélien a détruit la plupart du système de santé de Gaza, les terres agricoles, l'accès à l'eau potable, des infrastructures et d'autres conditions nécessaires au maintien de la vie. Même si les Palestiniens de Gaza sont autorisés à reconstruire sans être bombardés, ils ne peuvent pas revenir aux conditions intolérables qui existaient avant octobre 2023, y compris les années de blocus illégal et déshumanisant de Gaza, un blocus ayant comme véritable objectif de voler le gaz naturel qui existe dans les eaux territoriales palestiniennes près de la côte de Gaza, ce qu''Israël fait depuis 2009.
La Cour internationale de justice a statué que le gouvernement israélien devait payer des réparations aux Palestiniens et mettre fin à son occupation illégale des territoires palestiniens, notamment Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est.
Pourtant Israël, cet état paria, continue d'agir dans toute illégalité avec impunité car des gouvernements tel que celui à Ottawa lui donne cette impunité et ainsi sont complices du génocide qui continue en dépit d'apparence du contraire.
Il faut arrêter Israël. Il faut cesser de lui envoyer des armes. Il faut désinvestir de cet état d'apartheid. Il faut que la Caisse de Dépôt et Placements du Québec désinvestisse des milliards qu'elle investit actuellement dans des compagnies liées à Israël ; il faut que le gouvernement du Québec ferme son bureau commercial à Tel Aviv, ce qui s'avère un soutien commercial au génocide ; il faut que le Fonds de Solidarité FTQ désinvestisse d'Israël car il le fait avec des fonds des Québécois et des Québécoises. Il faut que des clients de la Banque Scotia songent à changer d'institution financière, car Scotia a investi 500 millions dans la compagnie militaro-industrielle israélienne Elbit Systems qui fabrique ces drones qui détruisent des vies à Gaza. Il faut que le gouvernement du Canada cesse d'envoyer des armes à Israël. Il faut que les criminels à Tel Aviv qui gèrent ce génocide soient arrêtés et amenés à La Haye où ils seront jugés pour acte de génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité dont ils sont responsables.
Nos propres élus sont imputables pour toute action qu''ils entament qui s'avérerait un soutien au génocide et crimes de guerre d'Israël, en se rappelant du fait qu'il n'y a pas de prescription pour un acte du génocide, crimes de guerre ou crimes contre l'humanité, ni pour les auteurs de ces actes, ni pour ceux et celles qui les soutiennent.
Un dernier commentaire : il n'est pas antisémite de s'opposer à l'agression criminelle et inhumaine d'Israël ; c'est une obligation morale. Ne nous laissons pas détourner par un groupe au nombre restreint de manipulateurs qui se targuent de parler pour tous les Juifs du monde, et qui utilisent la diffamation de l'antisémitisme pour faire taire les critiques de l'apartheid israélien.
Justice avant tout. Vive la Palestine libre !
Bruce Katz est membre fondateur et co-président de Palestiniens et Juifs. PAJU est membre de la Coalition Québec Urgence. Palestine. (https://urgencepalestine.quebec/)
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Redonner le goût de Saint-Roch !

N'en déplaise aux jovialistes et aux porteurs de lunettes roses, Saint-Roch est malade. Très.
Déconcerté et dépossédé.
Voilà comment je me sens quand j'arpente ce centre-ville de Québec qui est le mien depuis plus de soixante ans.
J'ai beau nicher à un battement d'aile de l'endroit, je ne vais plus au Parc Jean-Paul L'Allier, ce véritable poumon urbain au cœur de la basse-ville, précieuse oasis de verdure et de fraîcheur où il faisait si bon respirer avant. Pire, moi, un inconditionnel de Saint-Roch, un ancien « bum » même, j'évite maintenant le parvis de l'église et j'ai beaucoup moins de plaisir à aller flâner entre les rayons de la nouvelle bibliothèque Gabrielle-Roy, si belle et si lumineuse soit-elle. N'en déplaise aux jovialistes et aux porteurs de lunettes roses, Saint-Roch est malade. Très.
Trop de pollution, d'îlots de chaleur et pas assez de canopée ; trop de chantiers et d'encombrements dans les rues et sur les trottoirs ; trop de commerces qui ferment et trop de franchises insipides qui prennent le relais en anglais : Uppercut barber shop, Holy choco, Midnight blue, Grizzly fuzz, etc. ; trop de peinturlurages et de gribouillages sur les murs des maisons et des édifices ; trop de crachats, de souillures et de cochonneries dans les allées, les plates-bandes et sur les bancs des espaces publics ; trop de délabrement, de cris, de hurlements et d'incivilités de toutes sortes. Trop de trop !
C'est comme si partout le laid voulait l'emporter sur le beau. L'immonde et l'avilissant sur le net et l'authentique. C'est comme un magma de décrépitude qui sourd des bas-fonds. Ça suinte et ça dégouline. Mon centre-ville est cassé et souffrant. Il étouffe. Il suffoque…
Mais au fait, qu'est-ce qui a tant changé depuis avant la pandémie ? Quel est cet éléphant dans la pièce que nous avons si peur de nommer et qui est venu bousculer l'ensemble ? Eh oui… Une population itinérante accrue, avec en prime la maladie mentale et la dépendance aux drogues bon marché. Un combo de comorbidité devenu un vortex de détresse humaine qui tourne et stagne au-dessus de la basse-ville et ses alentours ; un gros nuage noir qui enfume tout le reste... Flâner librement sur la rue, musarder et lécher les vitrines en toute quiétude, rêvasser devant la fontaine, les petites joies urbaines quoi.
La faute à qui tout ça ?
Un soir, cet été, au parc Jean-Paul L'Allier, en voyant un forcené décapiter rageusement un pauvre amélanchier avec un bâton de hockey, j'ai compris (sans nécessairement excuser le geste) qu'au fond, la colère et la violence de cet homme ne faisaient que refléter notre propre colère à nous, les « normaux » … Nous qui nous sentons de plus en plus impuissants, délaissés et résignés par la grosse machine d'état, le système de santé, les institutions et tous les services que le gouvernement n'est plus à même de nous fournir. Veut veut pas, normaux et poqués, nous sommes tous dans le même goulot d'entonnoir. Et ce n'est qu'en agissant ensemble que nous allons trouver moyen d'en sortir.
Cela dit, est-ce la faute aux itinérants, aux « multipoqués » et aux désaffiliés, si l'ambiance sociale s'est ainsi plombée en ville ? Est-ce leur faute s'il manque de logements sociaux, d'argent frais, de personnel et de locaux disponibles pour un ajout de centres de crise et de haltes chaleur ? Est-ce leur faute si les paliers municipaux et provinciaux mettent plus d'énergie à se crêper le chignon qu'à mener des actions pérennes et concrètes ? Leur faute, si pour des raisons d'austérité Legault et Carmant réduisent l'aide en santé mentale et poussent l'absurde jusqu'à fermer une institution aussi utile et bien implantée que le « 388 Saint-Vallier » dans Saint-Sauveur ?
Un projet à échelle humaine plutôt qu'une tour-hôtel de vingt étages
Certes, la Ville fait des efforts louables en matière d'itinérance et autres, le travail des organismes communautaires sur le terrain est toujours aussi admirable et l'implication citoyenne au centre-ville est remarquable. Mais ce n'est pas assez et la patience et la résilience d'un peu tout le monde ayant ses limites, il faudra beaucoup plus que ça pour tirer Saint-Roch vers le haut. Et beaucoup plus aussi que les sérénades sur la bienveillance et le serinage à n'en plus finir sur la cohabitation harmonieuse et tout le tintouin. L'élastique est étiré au maximum. L'heure est grave. Il faut un électrochoc majeur, un élément clé, un geste fort, quelque chose qui pourrait servir de liant aux actions concertées de « toute » la communauté. Quelque chose, une mesure d'envergure qui pourrait fort bien ressembler à ce que fut l'avènement du parc Jean-Paul L'Allier pour le renouvellement du vieux « Saint-Roch Plywood », au temps de la guerre des motards et de la morosité économique des années 90.
Un événement majeur donc, qui pourrait être n'importe quoi sauf le projet discordant et disproportionné de tour-hôtel de vingt étages des frères Trudel à l'Îlot Dorchester en basse-ville. On ne règle pas un problème en faisant de la fuite par en avant. Two wrongs don't make a right, n'est-ce pas ?
Et pour redynamiser le quartier, pour redonner le goût du centre-ville à tout le monde, pourquoi pas un projet de développement de l'Îlot Dorchester qui serait à échelle humaine et qui pourrait s'inspirer de celui que le regretté architecte et militant Marc Boutin avait présenté en 2015 ? Ça, ou n'importe quel chantier d'aménagement urbain majeur s'inspirant de ce que l'on s'apprête à construire à l'Îlot Saint-Vincent-de-Paul suite aux longues luttes de terrain des différents groupes et comités de citoyens locaux ?
Pour sûr, ça ramènerait Saint-Roch et son chien à la surface, et ça nous redonnerait le goût du centre-ville. Le goût de Saint-Roch.
Gilles Simard, auteur et citoyen de Québec.
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D’une Survivante à l’autre. . .

Impétueuse, l'œuvre d'une Québécoise de 86 ans qui est atteinte d'Alzheimer depuis dix ans. Éliette Anderson Rioux se considère une femme tout à fait ordinaire. Cependant, l'immense courage dont elle fait preuve tout au long de sa vie à combattre oppression et injustice, surtout celles subies par les femmes, démontre qu'elle est, en fait, une personne tout à fait extraordinaire.
Impétueuse rassemble son récit de vie, ses articles et ses poèmes. Des textes qui, par l'intensité de sa verve et de son écriture, nous interpellent.
L'histoire d'Éliette illustre ce qu'était, dans les années 1950, la vie au fin fond de la vallée de la Matapédia d'une famille québécoise tellement pauvre qu'ostracisée par curé et villageois. Et, aussi et surtout, elle illustre le parcours fort difficile mais tellement impressionnant d'une militante du féminisme au Québec, dénonçant l'injustice subie par toutes les femmes depuis des millénaires, et, en particulier, les lesbiennes.
De son enfance et adolescence dans un rang de la vallée de la Matapédia comme aînée de 13 enfants, et des mois après son arrivée à Montréal à 18 ans, Éliette nous parle de misères et humiliations, mais aussi de sa détermination à vivre et de sa curiosité pour le vivant. Après avoir vécu une dépression sévère à Montréal, la vie d'Éliette reprend sens, à travers sa démarche en thérapie et lorsqu'elle décide de recommencer ses études, interrompues à 12 ans, et qu'elle s'inscrit plus tard au Cégep. Elle se lance alors dans un militantisme féministe radical, en s'exprimant par poésie et rédigeant de nombreux articles percutants dans Les Têtes de pioche, le journal des femmes qu'elle cofondait avec d'autres militantes en 1976.
Ce texte a été publié en 1978, par une revue féministe française, « Sorcières ». Les éditrices françaises voulaient sortir un numéro spécial consacré à la littérature féministe québécoise. C'est dans ce cadre qu'Éliette a été sollicitée pour leur envoyer un texte. Elle a écrit un vibrant hommage à sa mère, plein de colère pour sa vie difficile et débordant d'amour filial.
Veille de Noël 1954, il n'y a plus de nourriture dans la maison. L'père veut pas descendre au village. Il est honteux, car le crédit que nous accorde le marchand en attendant le chèque d'allocations familiales dépasse de loin ce montant... Et c'est toi m'man, toi et moi. Toi enceinte pour la neuvième fois… moi avec mes quatorze ans. Nous deux ensemble dans la carriole tirée par la jument empruntée au voisin, qui nous dit :
« Ne la faites pas courir, car elle pourrait prendre froid en revenant. »
Huit miles à parcourir au pas, avec un froid de moins 20 degrés Fahrenheit, de vieilles couvertures pour nous protéger un peu. Nos narines se pincent, nos bouches se contractent, tous nos muscles raidis par l'effet de froidure, à peine osons-nous ouvrir la bouche, laissant passer quelques mots emportés par le vent.
Nous sommes parties vers sept heures et ce n'est qu'aux environs de minuit que nous sommes rentrées à la maison. Transies des pieds à la tête. Tout le long du trajet il nous avait fallu souffler dans nos mains et se frotter le nez et les joues pour empêcher les engelures. Nous avions obtenu la nourriture au prix d'une honteuse patience, et de l'humiliation encore une fois endurée pour que toute la famille puisse se nourrir. Nous étions des « presque mendiantes ».
Tu t'souviens comme on jasait sur notre compte, on les avait tous sur notre dos. Tout un village jasant sur nous autres. On pouvait quasiment dire que nous avions de
l'importance !
Seulement voilà, tout ça est passé, c'était en 54... Depuis il y avait eu certains changements à ta condition de servante. Tes neuf filles et tes trois garçons avaient grandi. Quelques-unes et uns firent comme les autres et se marièrent ! Les deux dernières demeuraient avec toi. Toi tu avais laissé tomber ton bonhomme… et tu t'en trouvais bien ! Jusqu'à ce 25 avril...
Écoute m'man, pourquoi t'es partie si vite ? J'savais que t'étais pas éternelle... mais j'arrivais pas à m'en faire une idée. C'est pour ça que lorsque je te rendais visite je n'osais pas te parler de certaines choses du passé. J'me disais que j'avais l'temps, plus tard, une autre fois... J'oubliais que si moi, j'avais l' temps, toi, c'était moins sûr ! pis ta vie me faisait mal. Ta vie te faisait mal. J'pouvais pas te poser des questions sur ce qui m'était arrivée à l'âge de neuf ans, tu t'rappelles le black-out que j'ai eu à ce moment-là ?
Dont je ne connais pas la raison et que toi seule en possédait le secret. Aujourd'hui c'est trop tard. T'as même pas eu l'temps de me dire bonjour : « Bonjour ma fille, j'm'en vas ailleurs… j'suis tannée d'être ici. » Tu devais être ben fatiguée car ça pas été une traînerie ! C'soir là, tu ne m'as pas parlé, tu m'as envoyé des petits signaux de détresse que j'n'ai compris qu'après.
Ce 25 avril 1977. Six heure trente du soir (déjà un mois hier !), assise sur le pied de ton lit, tu es tombée, foudroyée, fauchée, sans un mot, sans pouvoir dire ton mal... tu ne disais jamais ta souffrance m'man. J'ne suis pas allée t'voir c'soir-là, tu étais si présente, en moi, autour de moi. J'me suis assise sur le vieux sofa et j'ai pleuré en pensant à toi, à ta vie plus encore qu'à ta mort… ta mort c'est à moi qu'elle faisait mal. Ta vie c'est à toi qu'elle a dû faire mal.
Ta vie de femme, escamotée, volée par les autres. Tu n'étais qu'une grande peine ! Que je n'osais pas toucher… C'était tout renfermé là, au plus creux de toi, de ton cœur qui attrapait le plus gros des coups, cœur fatigué, stop, s'est arrêté. J'te sentais... la dernière fois que j't'ai vue j'me suis sentie inquiète. Nous avions soupé toutes les deux et nous avons jasé de choses et d'autres, ensuite nous avons regardé la télé, et comme d'habitude tu t'es endormie... Ton visage s'était détendu. J'pouvais voir toutes les marques, les petits sillons de souffrance autour des yeux et de la bouche.
Les soucis creusaient sur ton front des tirets pas effaçables. J'ai pensé : « M'man a l'air fatigué », et ça m'a pincé le cœur.
Après ce soir-là, je ne t'ai plus revue vivante… j'tai revue à cet endroit, tu sais, là où « ils font d'l'argent avec ceux qui meurent ! » Ça m'a révoltée. J'me suis dit : « Ils font d'l'argent avec nos vies de femmes et avec notre mort ! » Ça m'écœure. T'as vu, ils t'ont envoyé beaucoup d'fleurs… ben plus que quand t'étais en vie ! Y en a parmi eux qui t'aurais même pas fait cadeau d'un sourire, quand tu les rencontrais… Des qui t'ont même pas offert un peu d'chaleur, un peu d'compréhension, un peu d'aide durant tes années de misère de vie. Là, c'était pas pareil… « Faut faire semblant, pis ça paraît bien, pis ça occupe les regards, et les esprits ! » « Pis-c'est-ti-beau, elle a reçu beaucoup de fleurs, hein ! »
J'm'en sacre pas mal, j'suis sûre que toi aussi tu t'en sacres ben maintenant… si ça les amuse…
Moi je te regarde. Je te touche. Je te murmure des mots tout pleins de tendresse, pleins à ras-bord d'amour pour toi m'man. J'suis folle m'man, j'te caresse les mains, j'te communique ma chaleur, j'ai mal m'man... j'ai le goût de lâcher un grand cri, pour les faire partir… j'voudrais être seule avec toi. Tes mains, tes mains rondes de travail, jamais pour toi. Travail pour les autres, toujours. Gestes de toutes ces journées répétées, répétées jusqu'à la fin.
ILS ne t'ont pas joint les mains… une chance, j'les aurais pas laissé faire ! ILS n'avaient pas le droit ! j'tai regardée attentivement pour la dernière fois. Tu avais comme, un p'tit sourire... le sourire d'une femme satisfaite d'avoir stoppé ce cercle infernal de « la vie vécue pour les autres. » M'man tu es partie, emportant avec toi des grands bouts de ma vie.
C'est comme si on m'volait quelque chose. Ça fait mal en d'dans... ça tire de partout dans mon corps m'man. J'pleure en déjeunant, toute seule au bout de la table, les yeux regardant du côté où t'habitais. Larmes rondes, chaudes se déroulant lentement, suspendues un instant au bord des cils, au bout du nez. Larmes irrépressibles, incontenables.
J'ose te demander ton aide : « Aide-moi, j'suis une femme m'man, comme toi. Tu sais ce que ça veut dire, être une femme ! Tu sais c'que j'vis... c'que nous vivons toutes. Cette merde qui nous entoure, nous écrase, nous engloutit.
Alors aide-moi à continuer, car parfois j'en peux plus. V'là deux semaines, j'me traînais de désespoir, j't'ai demandé : « Viens m'chercher, j'serais ben avec toi, on se comprenait si bien toutes les deux. Pis j't'ai entendue, ta voix disait :
« Il faut vivre ma fille, vivre pour toi, ne fais pas comme moi ne te laisses pas faire. »
J'ai eu honte un peu, j'ai repris mon espérance de femme et je continue.
Si j't'écris tout ça aujourd'hui, c'est que c'est essentiel, nécessaire et vital pour ma vie.
Ça fait quelques jours que j'en avais envie, mais j'étais trop collée à ma peine. J'suis contente de t'avoir dit tout ça. Tu sais la rue Masson... cette rue où tu te rendais acheter tes provisions, ben à chaque fois que je m'y retrouve il me semble que je vais t'apercevoir, c'est plus fort que moi. J'te vois un peu partout.
L'autre jour, j'ai vu une femme qui t'ressemblait tellement que j'suis restée figée quelques instants. Ce n'était pas toi. Je ne te verrai plus. Je regarde les photos que j'ai de toi et je pleure. Depuis ta mort je me rends compte que je suis portée à regarder les femmes qui ont ton âge comme si j'voulais retrouver un peu de toi et aussi parce que leurs vies me rappellent la tienne.
Des vies de femmes sacrifiées, mutilées, oubliées, dont le regard me cogne comme un coup de massue sur la tête. Même lorsqu'elles rient, y a quelque chose qui sonne le fêlé… la fêlure enfouie au creux du corps, au plus creux du cœur. J'entends le bruit sourd, unique, universel de l'asservissement des femmes et j'ai peur. Ce grand silence de la vie de toutes les femmes parfois m'anéantit. J'oubliais de te dire que le matin quand on s'est retrouvé à l'église (toi qui ne voulais pas ça !) … le curé idiot comme peuvent l'être des curés… marmonnant ces inutiles prières, m'a fait sauter sur mon banc quand il a dit : « Accueillez dans la maison du Père votre servante ! »
J'pensais à toi placée à côté de nous et j' t'imaginais avec un grand rire rempli de moquerie et de révolte disant : « Ça va faire, j'ai eu assez d'vous torcher et de vous servir toute ma vie, vous pensez toujours pas que j'vas continuer l'autre bord, non. » Pis la maison du Père tu l'as assez vu… J'espère que t'as trouvé une maison de la Mère, ça serait légitime, hein m'man ! J't'ai assez jasé pour aujourd'hui, on s'reprendra une autre fois. Puisque maintenant on a tout not'temps. . J't'embrasse, à bientôt Antoinette, à la prochaine m'man. Ta fille Éliette qui a ben d'là difficulté à croire que c'est ben vrai que t'es plus là !
Éliette Rioux
Rioux Éliette. D'une survivante à l'autre. Sorcières : les femmes vivent, n°14, 1978. La jasette. pp. 32-34 ;
https://www.persee.fr/doc/sorci_0339-0705_1978_num_14_1_4295
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Amazon c’est du capitalisme sauvage !

Voici des extraits de l'article de Jim Stanford. Jim Stanford est un économiste de gauche qui travaille au Center for future work de Vancouver. Vous trouverez l'article intégral sur le site de Canadian Dimension . Traduction et extraits choisis par Jean-Pierre Daubois avec la permission de l'auteur.
Avec 30,000$ de profit estimé pour chacun de ses 45,000 employés canadiens,c'est évident « qu'on comprend » qu'Amazon n'a pas les moyens d'accepter qu'un syndicat demande de meilleurs salaires et conditions de travail. La décision d'Amazon de fermer ses 7 entrepôts au Québec c'est du terrorisme économique.
« Le terrorisme est défini comme un acte de violence, blessant généralement des innocents, un acte motivé par un objectif politique ou idéologique. »
« La vie des 1 700 travailleurs qui perdent leur emploi sera profondément affectée ; certains ne s'en remettront jamais. La douleur sera partagée par leurs familles et leurs communautés. »
« Ces travailleurs étaient clairement innocents dans la chaîne d'événements qui a conduit aux fermetures. Un syndicat a été formé et accrédité l'année dernière dans un entrepôt de Laval. Les travailleurs des six autres entrepôts sont des victimes collatérales dans la guerre d'Amazon contre la syndicalisation. »
« Le droit constitutionnel et le droit du travail canadiens reposent depuis longtemps sur le principe que les travailleurs doivent avoir la possibilité de se regrouper librement au sein de syndicats afin de pouvoir négocier collectivement avec leurs employeurs. Cela est nécessaire pour compenser, au moins partiellement, le déséquilibre inhérent au pouvoir entre les travailleurs et leurs employeurs surtout quand l'employeur est une multinationale toute-puissante. »
(…)
« Ce déséquilibre de pouvoir entre les travailleurs et les employeurs, commun à l'ensemble du capitalisme, est extrême dans le cas d'Amazon. Amazon est le deuxième plus grand employeur privé au monde : en 2024, l'emploi mondial a atteint plus de 1,5 million de travailleurs. »
(…)
« Amazon était motivée en partie pour éviter les augmentations des coûts de main-d'œuvre découlant d'un nouveau contrat à Laval (et, par la suite, dans d'autres sites). Mais son objectif principal était d'envoyer un message idéologique puissant et effrayant aux travailleurs de tous ses autres sites - pas seulement au Québec ou au Canada, mais partout - en attaquant 1 700 travailleurs innocents au Québec. Ne pensez même pas à réclamer de meilleurs salaires et de meilleures conditions. Nous vous ferons taire et nous détruirons votre vie. »
(…)
« Le jour même de l'annonce des fermetures au Québec, le cours de l'action d'Amazon a atteint le record historique de 235 $US. Cela implique une capitalisation boursière de 2,5 billions de dollars, également un record, qui place l'entreprise au quatrième rang mondial des entreprises les plus riches. Deux jours avant la fermeture, le président et principal actionnaire d'Amazon, Jeff Bezos, était assis au premier rang lors de l'investiture de Trump, applaudissant le manifeste antidémocratique de ce dernier (y compris ses menaces contre la souveraineté et le territoire du Canada et d'autres pays). »
« Dans les 80 jours qui ont suivi l'élection de Trump, la capitalisation boursière d'Amazon a augmenté de 20 % (soit 420 milliards de dollars américains). La part personnelle de 9 % de Bezos dans l'entreprise a gagné 36 milliards de dollars en valeur, ce qui fait qu'il vaut maintenant 210 milliards de dollars. La capitalisation boursière d'Amazon vaut désormais 1,6 million de dollars pour chacun de ses 1,5 million de travailleurs dans le monde, mais l'entreprise est déterminée à empêcher chacun d'entre eux de récupérer ne serait-ce qu'un peu de ce surplus capitalisé. »
« Amazon ne communique pas de données financières sur ses activités au Canada. Elle publie un « rapport d'impact » annuel qui vante ses bonnes actions et ne mentionne même pas les termes « revenus » ou « bénéfices ». Sur la base de la part supposée du Canada (calculée au prorata du PIB relatif) dans l'ensemble du segment nord-américain d'Amazon, j'estime que l'entreprise a généré plus de 700 000 dollars de revenus et 30 000 dollars de bénéfices d'exploitation pour chacun de ses 45 000 employés canadiens. »
(…)
« Les liens entre l'oligarchie américaine, le monopole des entreprises …, l'érosion de la démocratie et de la souveraineté et les attaques contre le niveau de vie des travailleurs sont on ne peut plus clairs. Les actions d'Amazon montrent clairement que les problèmes des travailleurs au Canada proviennent du pouvoir des entreprises, et non des faux boucs émissaires : le prix du carbone, l'immigration, en passant par le « wokeness » tel que propagés par la droite populiste. »
« Les fermetures d'Amazon constituent une attaque flagrante, cruelle et antidémocratique contre tous les travailleurs, qui exige une réponse forte de la part des syndicats et des mouvements sociaux dans toutes les régions du Canada. »
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Appel de Jim Stanford à la lutte pancanadienne contre Amazon

L'IRIS vient de publier en français la prise de position de Jim Stanford, renommé économiste de gauche, dans la revue Canadian Dimension où, fort à propos, il traite de « terroriste économique » l'entreprise Amazon qui vient de sauvagement fermer ses sept entrepôts et centres de distribution du Québec pour punir son peupletravailleur d'avoir syndiqué, à Laval, le premier et seul lieu de travail de l'entreprise au Canada.
Dans cet article, Stanford tout en soulignant le pouvoir exorbitant de monopsone vis-à-vis ses employé-e-s (et ses fournisseurs) montre la relative vulnérabilité d'Amazon due non seulement à la législation québécoise du travail par rapport à celles des ÉU et à maintes provinces canadiennes mais aussi sa dépendance à rester localisé au Québec pour servir sa clientèle, d'où sa stratégie du marteau-pilon pour fermer la porte à toute syndicalisation en traînée de poudre.
Pour y arriver à ses fins, dit-il, Amazon mise sur une myriade de sous-traitants embauchant des travailleur-se-s « à la tâche », donc difficile à syndiquer. Comme parades, Stanford propose « la certification [syndicale] automatique des soustraitants qu'Amazon prévoit embaucher » ou « à mobiliser la loi sur les décrets de convention collective du Québec. Il s'agit d'une disposition de longue date qui permet de négocier des conventions collectives (généralement par plusieurs employeurs et un ou plusieurs syndicats) et de les étendre à plusieurs lieux de travail dans une industrie ou une région spécifique. » La moindre des choses de la part des gouvernements, ajoute-il, serait de priver l'entreprise de toute subvention ou contrat.
Enfin, Stanford rappelle que l'alliance stratégique de Bezos (y compris son entreprise billionnaire) et de ses copains milliardaires avec Trump qui de son côté, aurait-il pu compléter, se livre à un terrorisme politico-économique vis-à-vis le peuple-travailleur surtout racisé étatsunien tout comme celui des pays dit alliés. Finalement, l'auteur appelle à « une réponse forte de la part des syndicats et des mouvements sociaux dans toutes les régions du Canada [et pourquoi pas aussi des ÉU]. » C'est certainement plus pertinent que les compréhensibles mais inefficaces réponses individuelles de boycott qui s'épuiseront rapidement. Stanford n'appelle pas à une réouverture des entrepôts et centres de distribution fermés. Cette revendication, en plus de paraître perdante dans un face-à-face compagnie mouvement syndical qui commence à peine à remonter la pente, permet difficilement la politisation de l'affrontement, ce que facilitent les suggestions de Stanford impliquant des modifications législatives.
Cette confrontation à l'encontre d'un géant nord-américain et mondial dépasse en effet la seule CSN — mais il faudrait son initiative — qui en plus d'être minoritaire au Québec même, et quasi absente en dehors, syndique principalement dans les secteur public. Voilà une chance inouïe d'unité pancanadienne. Même nordétatsunienne, du mouvement syndical et encore plus. Et il faudrait effectivement une « réponse forte » comme le dit Stanford ce qui commence sans doute par de grandes manifestations mais les dépassent. Ce qui alimenterait la colère sousjacente tout-à-fait nécessaire à la mobilisation de cette ampleur serait la combinaison de la lutte anti-Amazon à celle plus générale anti-Trump. Assurer la viabilité de cette combinaison nécessiterait cependant un approfondissement des revendications proposées par Stanford.
Pour reprendre les termes de la partie finale d'un article précédent, l'alternative au crypto-fascisme trumpien s'imposant au Québec et au Canada suite à leur dépendance financière et commerciale envers les ÉU, cristallisée par l'ACEUM, est la solidaire décroissance matérielle. Celle-ci coupe court tant au sauvetage des transnationales anciennes liées au traditionnel extractivisme pétro gazier de l'Ouest canadien qu'à celui des transnationales ascendantes du nouvel extractivisme toutélectrique-électronique des économies manufacturières et minières de l'Ontario et du Québec. Cette solidaire décroissance matérielle, qu'on peut abstraitement qualifié d'écosocialisme en y associant la planification démocratique balaie la prééminence du marché sous le joug du capital financier. Elle laisse toute la place aux services publics écoféminisés devant s'élargir au logement social écoénergétique, à généraliser à tout le monde, et au transport public à substituer à l'auto solo.
Amazon roule à la très matérielle consommation de masse, carburant à l'obsolescence programmée, qu'elle amplifie par ses promotions et à l'abus de l'individualisation du transport des marchandises qu'elle généralise. En plus de réclamer seulement la seule syndicalisation et réglementation du secteur de la distribution des marchandises — ne faudrait-il pas exiger le retour du monopole de Poste Canada banquerouté par le secteur privé ! — pourquoi ne pas réclamer aussi que les gouvernements imposent à Amazon une amende salée, et même une taxe compensatoire, pour financer le recyclage de ses ex-employés dans les services publics qui en ont rudement besoin. Après tout, Amazon ne renonce à aucune vente. C'est là un privilège, ce n'est pas un droit, qui se paie.
Marc Bonhomme, 1er février 2025
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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