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Lassé·es de l’absence de leadership, les Palestinien·nes aspirent à l’unité politique

Cet article, rédigé par Fatima AbdulKarim, une journaliste basée en Cisjordanie, offre des éléments d'information particulièrement éclairants, en partie inédits, et, pour la plupart, ignorés des médias mainstream, sur les processus politiques en cours au sein du Fatah et de la population palestinienne de Cisjordanie qui traduisent une forte volonté de démocratisation et de dépassement de la fragmentation actuelle du mouvement national palestinien, en particulier de la division entre le Fatah et le Hamas.
Tiré du site de la revue Contretemps.
Il informe également des discussions qui se mènent au niveau diplomatique au sujet de l'avenir du territoire de Gaza et du rôle joué par une Autorité palestinienne démonétisée et impuissante. Il permet également de comprendre les motivations qui ont poussé Israël à assassiner, le 2 janvier dernier, le numéro deux du Hamas, Saleh al-Arouri, puis, le 8 janvier, l'un des chefs militaires du Hezbollah, Wissam Tawil, interrompant ainsi les négociations en cours autour des propositions égyptiennes, qui prévoyaient un cessez-le-feu, l'échange de prisonniers et d'otages et le maintien d'un contrôle palestinien de la bande de Gaza.
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Depuis les attaques du 7 octobre menées par le Hamas contre le sud d'Israël, la Cisjordanie occupée a connu un regain de violence et d'instabilité. Au cours des trois derniers mois, alors que l'attention du monde se portait sur la bande de Gaza et que les bombardements israéliens se poursuivaient, les soldats israéliens et les milices de colons ont tué plus de 300 Palestinien·nes en Cisjordanie, dont plus de 80 enfants, tandis que plus de 4 000 Palestinien·nes ont été arrêté·es.
Les colons ont également intensifié leur harcèlement et leur violence à l'encontre des Palestinien·nes dans une tentative calculée de s'emparer de leurs terres, déplaçant de force au moins 16 communautés isolées au cours des dernières semaines. Le territoire reste soumis à un strict verrouillage, jalonné de points de contrôle militaires qui empêchent les Palestinien·nes de se déplacer entre les villes et les villages.
Pour de nombreux·ses Palestinien·nes, le sentiment d'absence totale et d'inaction de la part de leurs propres dirigeants est tout aussi paralysant que l'étau de l'occupation qui se resserre. L'Autorité palestinienne (AP), dirigée par le président Mahmoud Abbas, s'est contentée de condamner timidement les escalades et les punitions collectives d'Israël, sans avoir la capacité réelle de les affronter.
Cela est devenu particulièrement évident à la suite d'une incursion de deux jours des forces israéliennes dans la ville de Jénine, au nord de la Cisjordanie, le mois dernier, qui a effectivement transformé la ville en un « mini Gaza », comme l'ont rapporté de nombreux habitants. Cette opération a été accompagnée de plusieurs autres raids militaires dans d'autres villes de Cisjordanie au cours des dernières semaines, notamment Tubas et Tulkarem.
Quelques jours avant l'assaut israélien sur Jénine, Mustafa Sheta, directeur du théâtre de la liberté de la ville, a déclaré à +972 magazine que les habitant·es de Jénine se sentent abandonné·es, surtout lorsque tous les regards – y compris les leurs – se tournent vers Gaza. « L'AP est silencieuse. Elle ne nous rassure pas et ne panse pas nos plaies », a-t-il déclaré. Sheta a été arrêté par les forces israéliennes lors de l'opération de Jénine et envoyé à la prison de Megiddo où il passera six mois en détention administrative – c'est-à-dire un emprisonnement sans inculpation ni procès.
Le sentiment exprimé par Mustafa Sheta est confirmé par un récent sondage réalisé par le Centre Palestinien de Recherche et d'Enquêtes Politiques (PCPSR) en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Selon les résultats du sondage, le soutien au Hamas a bondi à 44 % parmi les Palestinien·nes de Cisjordanie, alors qu'il n'était que de 12 % en septembre. Le soutien à Abbas, à son parti, le Fatah, et à l'AP a considérablement diminué : plus de 90 % des personnes interrogées demandent la démission du président, tandis que le soutien à la dissolution de l'AP – près de 60 % en Cisjordanie et à Gaza – n'a jamais été aussi élevé dans un sondage du PCPSR.
Le mécontentement croissant de l'opinion face au silence assourdissant de l'AP face aux bombardements effrontés d'Israël sur Gaza, à l'intensification des raids dans les villes de Cisjordanie et à l'assassinat de hauts dirigeants palestiniens s'ajoute à des années de frustration face aux accusations persistantes de corruption, à l'incapacité de l'Autorité palestinienne à payer ses employés et au sentiment qu'elle est de plus en plus déconnectée de la vie de ses administrés. Plus que jamais, le sentiment que l'AP n'a plus aucune raison d'être est très fort.
Ainsi, pour de nombreux·ses Palestinien·nes, les dirigeants actuels ne sont pas en mesure de représenter les aspirations et les préoccupations de la population, ce qui les empêche de prendre des mesures significatives pour mettre fin à la guerre actuelle contre Gaza et faire progresser leur lutte dans son ensemble. Beaucoup insistent sur le fait qu'il est impératif qu'une nouvelle direction dirige ses actions sur les besoins urgents de la population, et qu'elle affirme l'initiative palestinienne autonome dans la cacophonie des discussions sur le « jour d'après ». L'Autorité palestinienne et ses dirigeants font cependant tout ce qu'ils peuvent pour rester au centre de ces plans élaborés par d'autres.
Fin du statu quo
Depuis le 21 octobre, les raids militaires israéliens à Jénine sont devenus routiniers, avec des incursions quasi toutes les nuits et des affrontements avec les combattants de la résistance basés dans le camp de réfugiés. Sur les quelque 500 Palestinien·nes tué·es en Cisjordanie au cours de l'année 2023 – le nombre annuel le plus élevé depuis la seconde Intifada – au moins 137 étaient originaires de Jénine. Mais à part sa rhétorique de condamnation et ses appels à la protection internationale, la destruction massive de la ville n'a pas poussé l'Autorité palestinienne à prendre des mesures.
Parlant de la situation à Jénine avant le raid de deux jours, Mustafa Sheta a déclaré que « les habitants du camp sont complètement dépassés par les incursions militaires nocturnes » qui laissent les réfugié·es déjà épuisé·es encore plus endeuillé·es et leurs infrastructures dans des conditions de plus en plus difficiles.
- « Nous ne savons pas quand cela se terminera », déplore-t-il. « L'armée affirme que l'opération vise à déraciner la résistance du camp, mais ce n'est pas un objectif réaliste. Ils ne peuvent pas anéantir la résistance d'un peuple opprimé – les meurtres entraînent des meurtres, et la violence entraîne la violence ».
Au milieu de cette tempête, les Palestinien·nes ressentent le coût du vide de leadership qui affecte leur action politique depuis des années. Ashraf Ajrami, analyste politique et écrivain, a critiqué l'approche actuelle de l'AP, qu'il qualifie d'« impuissante et dépourvue de légitimité populaire ». Il a noté que, lors d'un événement dédié aux prisonnier·ères politiques palestinien·nes libéré·es en échange des otages israélien·es pri·es par le Hamas le 7 octobre, le ministre de l'AP chargé des affaires des prisonniers, Qadura Faris, a été conspué par les participant.es.
Ashraf Ajrami accuse les dirigeant·es de l'AP, en particulier les proches du président Abbas, de faire comme si de rien n'était face à la catastrophe de Gaza. Il a souligné l'absence de mobilisation significative en Cisjordanie pour soutenir Gaza, d'autant plus que l'AP s'est déjà mobilisée à d'autres occasions, notamment en envoyant 40 pompiers et 8 camions pour aider à éteindre les incendies de forêt près de Haïfa en 2016.
Malgré ses critiques à l'égard du Fatah et du Hamas, Ajrami estime qu'il est possible d'aller de l'avant en créant une commission technocratique indépendante qui interviendrait pendant une période de transition, à la fois pour reconstruire Gaza et pour ouvrir la voie à des élections. Il souligne que le moment actuel est une opportunité potentiellement unique, affirmant que le monde est enfin réellement intéressé par la création d'un État palestinien : « La solution des deux États, basée sur les paramètres politiques établis par la communauté internationale, est sérieusement abordée pour la première fois depuis [le président américain Bill] Clinton ». Mais pour saisir cette opportunité, a-t-il souligné, il faut que les dirigeant·es changent radicalement d'approche.
« Nous avons besoin d'une personnalité capable d'unir le peuple »
Le sentiment général est qu'une personnalité politique largement respectée est nécessaire pour sortir de cette paralysie. Dans un petit café rempli de fumée de cigarette à Al-Bireh, une ville proche de Ramallah, Abu Othman, un client palestinien, a exprimé le point de vue de beaucoup : « Nous ne pouvons pas continuer à nous demander quelle est la suite avec les dirigeants actuels. Nous avons besoin d'une figure comme Abou Ammar », a-t-il déclaré en faisant référence à Yasser Arafat, le défunt dirigeant palestinien. « Quelqu'un qui puisse unir les gens malgré leurs différences ».
Le leader le plus en vue est Marwan Barghouti, prisonnier politique et leader historique du Fatah qui, selon le récent sondage du PCPSR, battrait à la fois Abbas et le leader du Hamas Ismail Haniyeh si des élections avaient lieu aujourd'hui. Devenu célèbre en tant qu'étudiant militant pendant la première Intifada, Barghouti a fini par s'impliquer dans la branche armée du Fatah, la Brigade des martyrs d'Al-Aqsa. Il a été arrêté par Israël au cours de la seconde Intifada [en avril 2001] et un tribunal militaire l'a condamné à cinq peines de prison à vie pour sa participation à des attaques contre des Israélien·nes.
Derrière les barreaux, Barghouti est resté actif dans le mouvement des prisonniers·ères et dans la politique palestinienne au sens large, publiant des articles et des déclarations qui soulignent la nécessité d'une réconciliation nationale. Souvent surnommé le « Mandela de la Palestine » [également du fait de la durée exceptionnelle de leurs séjours en prison, 27 ans pour Mandela, près de 23, à ce jour, pour le leader palestinien], Barghouti a conservé un large soutien populaire en tant que futur leader du mouvement national.
En raison de l'emprisonnement de Barghouti, certain·es Palestinien·nes se tournent également vers des personnalités établie·es au sein de l'AP en tant que leaders potentiels. Mahmoud Aloul, vice-président du Fatah depuis 2018, est considéré comme l'un de ces candidats.
Emprisonné et déporté de Cisjordanie en Jordanie après la guerre de 1967, Aloul est revenu en Palestine en 1995 dans le cadre des accords d'Oslo en tant que conseiller clé d'Arafat, qui l'a ensuite nommé gouverneur de Naplouse, poste qu'il a occupé pendant 10 ans et qui lui a valu une réputation d'homme du peuple. Laissant derrière lui son passé militaire, Aloul s'est fait l'avocat de la résistance populaire, notamment en organisant des manifestations et en boycottant les produits israéliens. Il supervise aujourd'hui les branches locales du Fatah en tant que chef de la Commission pour la mobilisation et l'organisation du parti.
Dans un modeste bureau ouvert au public, il est assis autour d'une longue table couverte de cahiers, de stylos, de ses lunettes et de son téléphone portable. Conscient de la gravité des conséquences de la guerre Israël-Gaza, il a déclaré à +972 magazine : « La priorité actuelle n'est pas de défendre l'AP ou de se l'approprier. La priorité est de regagner la confiance du peuple palestinien dans sa lutte pour la liberté. Cette guerre est dirigée contre l'ensemble de la nation palestinienne – le génocide à Gaza et les tueries et destructions quotidiennes en Cisjordanie ».
Tout en reconnaissant l'impact de la division Fatah-Hamas sur le peuple palestinien, il poursuit :
- « Ce que je ressens personnellement, c'est que nous sommes en train de “tricoter le mauvais panier” lorsque nous parlons de la popularité des factions. La priorité devrait être la vision qui empêche Israël d'assassiner les rêves de notre peuple … de surmonter toutes les menaces qui pèsent sur les décisions palestiniennes indépendantes. Nous déployons de gros efforts pour mettre fin à cette [division] », ajoute-t-il, sans plus de précisions.
- « C'est pourquoi nous faisons de notre mieux pour renouer le contact avec la population et créer une atmosphère propice aux élections – c'est ce dont nous avons besoin », poursuit-il. « Personne ne prétend que la situation est rose ; il y a beaucoup de choses que nous devons rectifier, en particulier nos relations avec notre peuple ».
Mahmoud Aloul s'est adressé au public palestinien par le biais de messages vocaux enregistrés et publiés sur sa page Facebook officielle le 13 octobre et le 8 novembre, dans lesquels il soulignait que la priorité des dirigeants palestiniens devrait être de mettre fin à l'agression israélienne à Gaza et en Cisjordanie. Dans son deuxième enregistrement, Aloul a exposé la voie à suivre pour les dirigeant·es palestinien·es : une position unifiée de l'OLP [Organisation pour la Libération de la Palestine] incluant le Hamas et le Jihad islamique, tous deux extérieurs à l'organisation. Des plans seraient en cours d'élaboration en vue de discussions sérieuses sur un tel accord d'unité.
Mais de nombreux·ses Palestinien·nes veulent plus qu'un nouvel accord élitiste. Fadi Quran, un militant politique de 35 ans, estime qu'une initiative palestinienne nouvelle et inclusive est nécessaire pour transcender les factions divisées. Pour compléter ces changements politiques au sommet, Fadi Quran envisage un mouvement populaire, semblable à la première Intifada, dans lequel les gens peuvent également participer au travail politique à partir de la base :
- « L'énergie est là, le soutien public est là et les idées sont là. Il suffit de les organiser. Il y a une décentralisation, les gens commencent à créer leurs propres réseaux d'action. Il faut espérer que cela continue à se développer et puisse donner naissance à quelque chose ».
Les scénarios diplomatiques pour le « jour d'après » à Gaza
Au cours des dernières semaines, des représentant·es des gouvernements des États arabes, notamment des Émirats arabes unis, du Qatar et de l'Égypte, ainsi que des États-Unis, du Royaume-Uni, des membres de l'Union européenne et d'Israël se sont réuni·es à huis clos pour envisager divers scénarios d'après-guerre pour Gaza, selon des sources diplomatiques au fait de ces discussions. On relève l'absence dans ces délibérations de tout engagement direct avec l'Autorité palestinienne ou le Hamas .
Les diplomates qui ont parlé à +972 magazine sous couvert d'anonymat ont expliqué que les scénarios envisagés penchaient vers la création d'une nouvelle entité administrative, excluant expressément le Hamas, qui est désigné comme une organisation terroriste par les États-Unis et l'UE. L'AP, dirigée par le Fatah, a fait l'objet de nombreuses critiques et qualifiée de corrompue et d'antidémocratique.
Les sources diplomatiques ont décrit diverses propositions pour le « jour d'après » qui ont été discutées lors de ces réunions, et qui visent toutes à assurer une transition pacifique vers une direction démocratiquement élue tout en permettant la réhabilitation de Gaza. Il existe un large consensus en faveur d'une période de transition au cours de laquelle une certaine force serait formée pour gouverner le territoire après la fin de la guerre et jusqu'à ce que des élections puissent être organisées. Cette force, selon ces sources, serait principalement composée de membres de l'appareil de sécurité palestinien et de personnalités reconnues de la communauté palestinienne.
Il est également question de réduire la taille de la bande de Gaza en créant une zone tampon militaire israélienne le long du « corridor de Philadelphie » – un territoire qui longe la frontière entre Gaza et l'Égypte – qu'Israël insiste aujourd'hui pour contrôler. L'Égypte ne s'est pas opposée, pour l'instant, à cette idée.
Une proposition égyptienne en trois étapes pour mettre fin à la guerre, connue localement sous le nom d'« initiative égyptienne », gagnait du terrain ces dernières semaines, avant d'être déclarée morte à la suite de l'assassinat du chef adjoint du bureau politique du Hamas, Saleh al-Arouri, à Beyrouth le 2 janvier.
L'initiative, soutenue par les médiateurs qataris, prévoyait la fin progressive des hostilités, en commençant par une trêve temporaire qui permettrait la libération des otages israélien·nes en échange des Palestinien·nes détenu·es dans les prisons israéliennes, et conduisant finalement à un cessez-le-feu permanent. Elle envisageait également un changement de leadership à Gaza, de sorte que le Hamas ne gouverne plus la bande de Gaza, mais ne mentionnait pas l'Autorité palestinienne.
Le comité exécutif de l'OLP, présidé par Mahmoud Abbas, a publiquement rejeté l'initiative, la semaine dernière, dans sa forme initiale. Bassam al-Salhi, membre du comité, a déclaré à +972 magazine que l'instance dirigeante de la centrale palestinienne se concentrait principalement sur « un cessez-le-feu immédiat et un cadre pour une voie politique globale visant à mettre fin à l'occupation, après quoi nous pourrons aborder les questions intérieures, y compris l'unité, les réformes et les élections. Nous n'avons aucune garantie que la communauté internationale reconnaisse les résultats des élections que nous organisons sur la base de ce que nous avons vu en 2006 », a-t-il ajouté.
En coulisse, cependant, l'AP a reçu une bouée de sauvetage : un haut responsable du Fatah a déclaré à +972 magazine que l'Égypte lui avait assuré que le rôle de l'AP dans le processus de transition était admis par toutes les parties sans qu'il soit nécessaire de l'expliciter.
L'AP a alors demandé un amendement à la proposition, que l'Égypte a accepté, pour qu'un gouvernement d'unité nationale soit établi par le biais d'un accord de réconciliation entre les factions palestiniennes, plutôt que par un organe technocratique. Les responsables de l'AP craignaient que ce dernier scénario ne permette le retour d'opposants personnels d'Abbas, tels que Mohammed Dahlan, basé à Abu Dhabi, et l'ancien représentant de l'OLP, Nasser al-Kidwa, le neveu de Yasser Arafat.
Considérant cette initiative comme un moyen de rester dans le jeu, et cherchant ainsi à garder les Etats-Unis de son côté, l'AP a également demandé des ajouts à la proposition en ce qui concerne les réformes de ses mécanismes de gouvernance, de sécurité, de justice et d'administration. Les responsables états-uniens avaient clairement fait savoir à l'AP qu'il s'agissait là de leurs exigences, de même que l'idée de recycler une force de sécurité de l'AP qui serait responsable de la sécurité dans la bande de Gaza après la guerre. L'Égypte semblait être favorable à ces changements, avant que les pourparlers ne soient interrompus après l'assassinat d'al-Arouri.
À la lumière de ces discussions, l'AP a publiquement souligné son attachement aux principes démocratiques, plaidant en faveur d'élections nationales libres et équitables pour déterminer la représentation. Lors de ses rares apparitions publiques – largement critiquées – depuis le 7 octobre, Mahmoud Abbas a réaffirmé que l'AP était prête à prendre en charge la gouvernance de Gaza et a souligné que la reprise des négociations en vue d'une solution à deux États demeurait une priorité.
La position officielle d'Abbas repose sur trois piliers : l'arrêt de l'expulsion des Palestiniens de Gaza hors de l'enclave, la reprise du contrôle total de la Cisjordanie et de la bande de Gaza sous l'égide de l'OLP (à laquelle s'ajouteraient le Hamas et le Jihad islamique), et le lancement d'un processus de paix global. Les observateurs affirment que, dans les conditions actuelles, aucun de ces plans n'est réaliste.
Pour Quran, ces paroles creuses de la part des dirigeants palestiniens, sans légitimité politique ni pouvoir pour les soutenir, démontrent la nécessité d'une approche plus globale pour restaurer l'agence palestinienne. Nous sommes arrivés à un moment où les Palestiniens disent : « Nous voulons être représentés. Nous voulons que notre politique soit inclusive et nous voulons des gens compétents », a-t-il déclaré. « En avançant vers notre libération, nous commencerons à créer l'unité ».
*
Fatima AbdulKarim est une journaliste palestinienne indépendante basée à Ramallah (Cisjordanie). Outre +972 magazine, dont elle une contributrice régulière, elle collabore à plusieurs grands médias internationaux, dont le Wall Street Journal, The Nation et The Guardian.
Cet article a été publié le 4 janvier 2024 sur le site israélien judéo-arabe +972 magazine. Traduction par Contretemps.
Illustration : State Department photo by Ron Przysucha / Domaine public.
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Deuxième Assemblée générale annuelle de Presse-toi à gauche !
Le 13 avril, une quinzaine de personnes de Québec ont participé à la deuxième Assemblée générale annuelle de Presse-toi à gauche ! Après deux ans de travail motivé par la volonté enthousiaste d'ouvrir un espace journalistique national de réflexion et discussion pour la gauche québécoise en marche, quel bilan tirer ? Et surtout, vers où aller pour avancer ?
Bilan
Si l'on demeure toujours bien loin du rêve de ce journal national de gauche en format papier dont le Québec progressiste pourrait tant bénéficier, Presse-toi à gauche ! tire néanmoins un bilan positif de ces deux premières années. Car PTAG, c'est tout de même aujourd'hui près de 2000 articles parus sous la plume de plusieurs centaines de collaborateurs et collaboratrices, près de 600 visites quotidiennes sur son site, et plus de 1 200 abonnéEs web qui reçoivent la mise à jour maintenant bi-hebdomadaire de son site. De plus, PTAG peut se targuer d'avoir un impact non négligeable sur les débats en cours au sein de Québec solidaire, ce qui est certainement un apport démocratique bienvenu et salutaire en ces années importantes de formation de ce jeune parti politique. Une bonne tape dans le dos s'impose donc, pour accompagner la volonté renouvelée de poursuivre l'aventure.
Mais pour autant, les difficultés de l'entreprise ne sauraient être éludées. Parmi les défis les plus pressants, on note celui d'augmenter (encore et toujours) la participation trop largement minoritaire des femmes, celui de faire connaître davantage un journal qui peine à trouver notoriété hors du milieu relativement fermé de la gauche progressiste et militante, et aussi, celui de passer d'un journalisme encore trop exclusivement d'opinion, vers un journalisme d'enquête et plus directement informatif. Par ailleurs, est-ce une banalité d'indiquer qu'à PTAG comme ailleurs, on se heurte au même reflux militant que l'on peut observer partout au Québec, à la fin de cette vague qui avait, depuis le Sommet des Amériques, stimulé un renouveau progressiste au Québec culminant notamment en 2006 avec la création de Québec solidaire ? Ici comme ailleurs, les énergies sont rationnées, et l'intérêt public se fait frileux pour les propositions progressistes, ce qui n'aide en rien l'expansion d'un projet exigeant comme celui de PTAG…
Perspectives
Qu'à cela ne tienne, les membres de PTAG ! ont procédé à l'adoption de statuts pour PTAG ! (qui est devenu récemment une OSBL en règle), et renouvelé la composition des comités d'organisation et de rédaction. Une série de mesures, visant à répondre aux défis auxquels PTAG ! fait face, ont également été adoptées. On y retrouve l'adoption d'une plate-forme comme base politique du journal, une proposition d'identification et de mise en réseau des collaborateurs et collaboratrices de PTAG !en fonction de leurs compétences et intérêts, et celle de la mise en branle d'un plan de financement et de visibilité pour Presse-toi à gauche ! L'élargissement de l'équipe de PTAG !, tant en termes numériques qu'en terme d'une participation accrue de gens d'autres régions que celle de Québec, est également dans la ligne de mire.
Au final, il apparaît que la survie et le développement de Presse-toi à gauche ! passera, ici encore, par un travail patient et systématique de construction et d'implication. Ne doit-on pas, comme on le faisait remarquer avec humour, attacher une veste un bouton à la fois ? Gageons qu'en ce dimanche ensoleillé d'avril, les participants et participantes à cette assemblée générale auront tout autant été inspiré-es à retrousser leurs manches, en prévision du travail – et du soleil – qui se pointe à l'horizon !

Définition du genre : lancement d’un débat

Nous sommes déçus que l'American Anthropological Association (AAA) et la Société canadienne d'anthropologie (CASCA) aient choisi d'interdire le dialogue scientifique lors de l'importante conférence conjointe, intitulée « Transitions », qui se tiendra à Toronto en novembre.
Tiré de Entre les lignes et les mots
Chères Drs. Ramona Pérez and Monica Heller
Notre session, « Let's Talk About Sex Baby : Pourquoi le sexe biologique reste une catégorie analytique nécessaire en anthropologie », a été acceptée le 13 juillet 2023 après que la proposition ait été « examinée par les présidents de programme des sections de l'AAA ou par le Comité scientifique de la CASCA ». Entre le moment de cette acceptation et la réception de votre lettre datée du 25 septembre 2023, personne de l'AAA ou de la CASCA n'a contacté les organisateurs pour leur faire part de ses préoccupations. Ainsi, nous sommes tous choqués que l'AAA et la CASCA aient annulé la session en raison de la fausse accusation selon laquelle « les idées ont été avancées de manière à causer du tort aux membres représentés par les Trans et les LGBTQI de la communauté anthropologique ainsi qu'à la communauté dans son ensemble ». Etant donné la gravité de l'allégation, nous espérons que, plutôt que de la garder secrète, l'AAA et la CASCA partageront avec ses membres et avec nous-mêmes la documentation sur les sources exactes et la nature de ces plaintes, ainsi que la correspondance qui a conduit à cette décision.
Nous sommes perplexes quant au fait que l'AAA / CASCA adopte comme position officielle que conserver l'usage des catégories de sexe biologique (par exemple, mâle et femelle, homme et femme) revient à mettre en péril la sécurité de la communauté LGBTQI. La présentation de notre session, rédigée par Kathleen Lowrey, reconnaît que tous les anthropologues n'ont pas besoin de faire la différence entre le sexe et le genre. L'un des résumés exprime explicitement la crainte que le fait d'ignorer la distinction entre le sexe et l'identité de genre ne porte préjudice aux membres de la communauté LGBTQI. Dans « No bones about it : skeletons are binary ; people may not be » (Il n'y a pas de doute : les squelettes sont binaires ; les gens ne le sont pas forcément), Elizabeth Weiss écrit : « Dans le domaine de la médecine légale, cependant, les anthropologues devraient travailler (et ils le font) sur les moyens de garantir que les squelettes découverts soient identifiés à la fois par leur sexe biologique et leur identité de genre, ce qui est essentiel compte tenu de l'augmentation actuelle du nombre de personnes en transition de genre. »
Kathleen Lowrey a joué un rôle clé dans la constitution du panel des intervenants et dans la définition du thème qui nous rassemblait. Notre équipe réunissait des femmes diverses, dont l'une est lesbienne. En plus de présenter trois domaines de l'anthropologie, elle comprenait également des anthropologues de quatre pays et s'exprimant en trois langues – il s'agissait d'un panel international préoccupé par l'invisibilisation des femmes.
L'anthropologue espagnole Silvia Carrasco avait prévu de présenter des données sur « l'oppression, la violence et l'exploitation fondées sur le sexe » et sur la difficulté d'aborder ces questions lorsqu'on tourne le dos au sexe biologique. Le résumé de l'anthropologue britannique Kathleen Richardson mettait l'accent sur les disparités matérielles entre les sexes dans l'industrie technologique, que l'on gomme en comptant les hommes qui s'identifient comme transgenres comme des femmes, plutôt qu'en faisant entrer davantage de femmes dans le secteur. L'anthropologue canadienne francophone Michèle Sirois devait présenter un compte-rendu ethnographique des manières dont « les féministes québécoises se sont organisées pour documenter, clarifier et s'opposer à l'industrie de la maternité de substitution qui exploite les femmes et qui se cache sous le couvert de l'« équité » et de l'« inclusion » », et dans laquelle les politiques de maternité de substitution qui exploitent les femmes pauvres sont cyniquement présentées comme libératrices.
Votre suggestion selon laquelle notre session compromettrait d'une manière ou d'une autre « l'intégrité scientifique du programme » nous semble particulièrement grave, car la décision de jeter l'anathème sur elle ressemble beaucoup à une réponse anti-scientifique à une campagne de lobbying politisée. Si notre session avait été autorisée à poursuivre ses travaux, nous pouvons vous assurer qu'une contestation animée aurait été accueillie favorablement par les membres du panel et qu'elle aurait même pu survenir entre nous, étant donné que nos propres engagements politiques sont divers. Au lieu de cela, votre lettre exprime l'espoir alarmant que l'AAA et la CASCA deviennent « plus unifiées au sein de chacune de nos associations » afin d'éviter de futurs débats. Plus inquiétant encore, à l'instar d'autres organisations telles que la Society for American Archaeology, l'AAA et la CASCA ont promis qu' « à l'avenir, nous entreprendrons un examen approfondi des processus associés à l'approbation des sessions lors de nos réunions annuelles et nous inclurons nos dirigeants dans cette discussion ». Les anthropologues du monde entier trouveront à juste titre glaçante cette déclaration de guerre contre les divergences et la controverse scientifique. Il s'agit d'une profonde trahison du principe de l'AAA qui consiste à « faire progresser la compréhension humaine et à appliquer cette compréhension aux problèmes les plus urgents du monde ».
Sincèrement
Kathleen Lowrey (Associate Professor at University of Alberta)
Elizabeth Weiss (Professor at San José State University ; Heterodox Academy Faculty Fellow)
Kathleen Richardson (Professor at De Montfort University)
Michèle Sirois (Présidente de PDF Québec)
Silvia Carrasco (Professor at Autonomous University of Barcelona)
Carole Hooven (Associate, Department of Psychology, Harvard University ; Senior Fellow, American Enterprise Institute) – celle-ci devait participer, mais n'a pas pu le faire en raison d'un imprévu
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Définition du genre : un débat

Nous écrivons afin de soutenir la décision de l'American Anthropological Association de retirer la session « Let's Talk About Sex, Baby » de la conférence annuelle. La session elle-même émet un certain nombre d'affirmations qui vont à l'encontre d'une grande partie des connaissances scientifiques établies dans le domaine de l'anthropologie biologique et, plus généralement, de la biologie de l'évolution, en lançant de vagues insultes au concept de genre, sans le définir de manière significative.
Tiré de Entre les lignes et les mots
Examinons quelques-unes d'entre elles :
Bien que certains se soient concentrés sur le titre de la session, ce qui nous intéresse ici porte seulement sur la manière dont le titre assume une position erronée au vu des connaissances scientifiques.
Les participants de la session proposent un concept de « sexe biologique » qui s'oppose à celui de « genre » sans définir l'un ou l'autre terme.
La session suggère que le « genre » est en train de remplacer le « sexe » en anthropologie. C'est faux, car un travail massif s'effectue actuellement sur ces termes, leurs interactions et leurs nuances, à travers l'anthropologie socioculturelle, biologique, archéologique et linguistique.
Dès le premier résumé de présentation, les auteurs utilisent des termes dépassés tels que « identification du sexe » plutôt que celui scientifiquement plus précis d'« estimation du sexe ».
Le résumé de la session, ainsi que plusieurs des résumés individuels partent implicitement du principe que le sexe constitue un concept biologique binaire, une idée rejetée par l'anthropologie biologique et la biologie humaine actuelles, et très contesté par la biologie contemporaine.
La plupart des résumés individuels reflètent des griefs basés sur les hypothèses erronées décrites ci-dessus.
En tant qu'anthropologues travaillant dans le domaine de l'anthropologie biologique et de la biologie humaine, nous sommes conscients que les définitions du sexe peuvent être établies à partir de la forme de la ceinture pelvienne, des dimensions crâniennes, des organes génitaux externes, des gonades, des chromosomes sexuels, etc. Le sexe, en tant que descripteur biologique, n'est binaire dans aucune de ces définitions. Chaque jour, des personnes naissent avec des organes génitaux non binaires – nous avons tendance à appeler intersexes les personnes qui appartiennent à ce groupe. Chaque jour, des personnes naissent avec des chromosomes sexuels qui ne sont pas XX ou XY, mais X, XXY, XXXY et d'autres encore. Il en va de même pour les gonades. De plus, une personne peut avoir des organes génitaux intersexués mais pas de gonades intersexuées, des chromosomes intersexués mais pas d'organes génitaux intersexués. Ces différences corporelles illustrent les variations considérables observées dans la physiologie sexuelle chez les vertébrés. Au-delà de l'homme, l'orang-outan adulte se présente sous trois formes. S'agit-il d'un sexe binaire ? Des pourcentages significatifs de nombreuses espèces de reptiles présentent des organes génitaux intersexués. Sommes-nous encore en train d'essayer de qualifier le sexe de binaire ? Le binaire limite les types de questions que nous pouvons poser et, par conséquent, le champ d'application de notre science.
En tant qu'anthropologues et biologistes humains, nous savons également que la façon dont les gens choisissent de nommer le sexe à travers les organes génitaux, les gonades et les gènes est souvent prescrite par la culture et, comme le démontre ce panel, souvent politisée. De plus en plus, de nombreux chercheurs, y compris dans le domaine des sciences biologiques, cherchent à comprendre ensemble le sexe et le genre, en reconnaissant leur imbrication intrinsèque. Par rapport à l'approche traditionnelle en biologie évolutionnaire humaine, la reconnaissance de l'intrication du sexe et du genre offre une vision plus réaliste, bien que plus complexe, à partir de laquelle il est possible de poser des questions sur l'évolution de l'homme, et potentiellement sur d'autres espèces, et d'y répondre. Comme l'écrit Anne Fausto-Sterling, « peu d'aspects du comportement adulte, des émotions, de la [sexualité] ou de l'identité peuvent être attribués purement au sexe ou purement au genre », parce qu'aucune de ces qualités n'est fixée au cours d'une vie et parce que « les structures sexuées modifient la fonction et la structure biologiques », considérer que le genre et le sexe sont enchevêtrés est une manière productive d'avancer.
Le domaine de l'anthropologie, et de l'anthropologie biologique en particulier, a tendance à résister aux arguments universels en faveur de la compréhension des êtres humains dans toutes leurs variations. Par conséquent, non seulement l'idée d'un binaire biologique pour un phénomène tel que le sexe constitue une affirmation excessive qui ignore les preuves, mais elle va à l'encontre des fondements empiriques les plus élémentaires de notre domaine. Comprendre la variation biologique humaine signifie résister aux normes culturelles autour du sexe, au lieu de les renforcer comme les auteurs de la session l'ont fait ici. Le genre/sexe se noue atour du développement conjoint de l'anatomie, de la physiologie, des hormones et de la génétique dans un contexte socioculturel fluide comprenant l'identité, les rôles et les normes, les relations et le pouvoir. Le genre/sexe reconnaît que la culture s'empare de la variation biologique de base, la façonne et peut l'accroître.
Les personnes non binaires, trans ou queer, et/ou celles qui occupent des catégories sexuelles autres que « mâle » ou « femelle », ont existé dans toutes les sociétés humaines et tout au long de l'évolution de l'humanité. Ce qui caractérise les catégories de sexe et de genre humaines, c'est qu'elles ne sont ni simples, ni binaires, qu'elles sont toujours influencées par les croyances culturelles de leur époque et qu'elles évoluent. Continuer à travailler sur la base de ces hypothèses réfutées revient à travailler dans la pénombre, à passer à côté de la plus grande partie du tableau et à ne pas s'engager dans une anthropologie scientifique rigoureuse, empiriquement fondée et pertinente.
Agustin Fuentes (Princeton University)
Kathryn Clancy (University of Illinois)
Robin Nelson (Arizona State University)
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Les profs mettent au premier plan la qualité de l’école publique

De dire haut et fort le président du Syndicat de l'enseignement de la région de Laval (SERL-FAE) qui a rejeté à 68 % l'entente de principe conclue avec Québec, que ses membres sont « restés fidèles aux positions qu'ils avaient au moment de la grève générale illimitée. Lorsqu'on se promenait sur les lignes de piquetage, les gens nous parlaient de la composition de la classe, des conditions de travail, des conditions d'apprentissage des élèves, de l'école publique dans son ensemble. […] Le gouvernement a décidé que lorsqu'il ne pouvait pas donner les services nécessaires, il allait donner une prime en argent aux enseignants. Ce n'est pas ça qui va rendre les conditions de travail meilleures… » (Marie-Ève Morasse, Les profs de Laval sont restés « fidèles » à leurs revendications, dit leur syndicat, La Presse, 19/01/24).
Tout est dit. Reste à gagner la bataille du rejet de la ratification ce qui n'est pas une mince affaire quand on considère la course à obstacles qui suivra, le cas échéant. L'acceptation de l'entente de principe par une courte majorité, dont une par la peau des dents, des deux autres syndicats de la FAE ayant voté est certes crève-cœur. Cependant un syndicat de la CSQ (Lanaudière), comme Laval, l'a fortement rejeté alors qu'un autre (Estrie) ne l'a ratifiée que par une majorité moindre que celle de la victoire du ‘non' au référendum de 1995. Malgré certaines ratifications fortes, surtout de la partie salariale quand les votes étaient scindés, rien n'est perdu. Plusieurs militantes de la FSSS-CSN ne sont pas enchantées de la hausse salariale de base qui risque de ne même pas égaler l'inflation. D'autant plus que du côté santé, la FIQ résiste aux demandes de « flexibilité » de la CAQ, ce qui a obligé les représentantes du petit syndicat de la CSQ regroupant les mêmes corps d'emploi à rejeter à la quasi-unanimité l'entente de principe sans même perdre son temps à la soumettre aux membres.
La bureaucratie syndicale, de connivence avec la CAQ, pensait avoir réussi à faire passer l'amère pilule par ses négociations secrètes puis des ententes tenues secrètes jusqu'à la tenue des assemblées générales de ratification — heureusement les médias grâce à de pertinents coulages ont pu casser cette procédure anti-démocratique — et par l'arrêt des grèves justifié par le temps des Fêtes. Comme le chantait Joël Denis en 1971, « c'ta pas encore fait, non non non ». Et si ça passe, il risque d'y avoir pas mal de démissions si ce n'est une crise paroxysmique. Encore plus, si la CAQ se laissait aller à la tentation de la loi spéciale en cas de non-ratification.
Pourrait poindre à l'horizon la défiance de 1972 avec cette fois une série de blocages de la délétère circulation des marchandises comme la FAE l'a fait le 21 décembre dernier (La Presse canadienne, Des enseignants en grève ont bloqué des accès aux ports de Montréal et de Québec, Le Devoir, 21/12/23) durant sa grève générale illimitée (GGI) qui a duré près d'un mois. Cette GGI était la bonne stratégie mais en Front commun que l'a FAE a boudé par corporatisme syndical, même combatif, alors que n'importe quel militant syndical sait que l'union fait la force et bloque les manœuvres patronales en autant qu'il y ait un fonctionnement démocratique. Cette bourde a permis à la CAQ de diviser pour tenter de peinturer dans le coin FAE et FIQ grâce aux tergiversations du Front commun.
Il n'est pas trop tard pour se reprendre si Québec solidaire met cartes sur table
Il n'est pas trop tard pour se reprendre. Si le « top gun » de la santé est payé plus cher les deux premières années pour mettre en place la malencontreuse centralisation à la mode albertaine du système de santé, on ne voit pas pourquoi la CAQ ne pourrait pas dégager un budget supplémentaire, et faire payer les banques et consorts pour ce faire, afin d'attirer par des primes les profs, infirmières, spécialistes et personnel de soutien manquants. Dans cette deuxième ronde, il serait plus facile de mobiliser l'appui populaire tant par une coordination de toutes et tous qu'en mettant l'emphase sur le rehaussement de l'éducation et de la santé publiques comme but explicitement recherché.
Ce brusque tournant est-il possible sans intervention musclée d'une inexistante gauche syndicale organisée ? Le spontanéisme a ses limites. On ne blâmera jamais assez la gauche dite anticapitaliste qui a fait semblant d'organiser une gauche syndicale depuis une dizaine d'années sinon plus, pour laisser dégénérer cette tentative en une série de conférences et table-rondes, parfois utiles, dont la dernière en date invitait une majorité de bureaucrates. L'aile parlementaire Solidaire n'a pas manqué la facilité de se faire prendre en photos sur les lignes de piquetage (Québec solidaire,[[PHOTOS] Les porte-parole de Québec solidaires des enseignantes et des enseignants en grève, 5/12/23). Maintenant, aujourd'hui, sans tarder, son intervention est indispensable pour appeler au rejet de l'entente de principe, pour inviter à des assemblées générales intersyndicales de toutes et tous ensemble, afin d'exiger une reprise des négociations et même au besoin une réouverture de la convention collective. Le parti de gauche de l'Assemblée nationale qui a une audience de masse, qui s'est fait damer le pion par le PQ faute de vision stratégique, saura-t-il rompre son alliance implicite avec la bureaucratie syndicale ?
Marc Bonhomme, 20 janvier 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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Déclaration d’écrivain.e.s francophones : « Nous ne pouvons pas nous taire » - Pour Gaza

« Nous ne pouvons pas nous taire et avons l'obligation morale de dénoncer les massacres en cours contre le peuple palestinien, avec le soutien actif ou la complicité de la plupart des États occidentaux. » Un ensemble d'écrivaines francophones, en joignant leurs voix à celles des femmes palestiniennes et israéliennes qui œuvrent pour la paix, dénoncent la situation à Gaza et demandent un cessez-le-feu immédiat.
Tiré du blogue des signataires.
« Si vous n'êtes pas atterré.e.s par ce qui se passe à Gaza
Si vous n'êtes pas bouleversé.e.s jusqu'au plus profond de votre être
Alors il y a quelque chose qui ne va pas dans votre humanité »
Révérend Mundher Isaac, pasteur assistant à l'église luthérienne de Bethléem, sermon de Noël, décembre 2023.
Trois mois après les crimes contre l'humanité commis par le Hamas le 7 octobre 2023 lors de son attaque contre le territoire israélien, que nous condamnons sans réserve aucune, la riposte d'Israël s'est avérée être un carnage révélant des buts de guerre allant bien au-delà de « l'élimination du Hamas ».
Le bilan en pertes civiles palestiniennes dans la bande de Gaza s'élève à plus de 30 000 morts, majoritairement des femmes et des mineurs (70%) selon le rapport établi par Euro-Mediterranean Human Rights Monitor (Euro-Med) pour la Cour Pénale Internationale et pour les Nations Unies, daté du 27 décembre 2023, qui tient compte dans ce chiffre d'une estimation du nombre de victimes ensevelies sous les décombres.
Les habitants de Gaza sont soumis, non seulement aux bombardements incessants de l'aviation israélienne et de son armée de terre qui a envahi l'enclave, mais aussi à la privation d'eau, de nourriture et de soins. Le bombardement des hôpitaux et l'implacable blocus qui empêche la quasi-totalité de l'aide de parvenir à sa population, ainsi que le déplacement forcé de plus de 85% des Gazaouis vers le Sud de l'enclave également pilonné sans relâche fait dire à tous les observateurs internationaux qu'un nettoyage ethnique de la bande de Gaza est en cours, accompagné de pratiques relevant clairement d'une intention génocidaire[1].
La gravité extrême de cette situation ainsi que les déclarations de membres du gouvernement Netanyahou préconisant la poursuite de la guerre et un déplacement massif de la population gazaouie hors de son territoire, ont conduit le 29 décembre 2023 l'Afrique du Sud à déposer une plainte devant la Cour Internationale de Justice (CIJ), accusant l'État d'Israël de violer la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide.
Pretoria invoque « les droits et les obligations de l'Afrique du Sud » de prévenir le génocide et « de protéger les Palestiniens de Gaza de la destruction ». La plainte de l'Afrique du Sud ne sera toutefois prise en compte qu'au terme d'une longue procédure. Or pour Gaza chaque jour sans cessez-le-feu, sans eau, sans nourriture, sans aide humanitaire, est une journée de vies perdues, brisées, de souffrance, d'horreur.
Nous ne pouvons pas nous taire et avons l'obligation morale de dénoncer les massacres en cours contre le peuple palestinien, avec le soutien actif ou la complicité de la plupart des États occidentaux. À l'instar de toutes les organisations mondiales de défense des droits humains et en joignant nos voix à celles des femmes palestiniennes et israéliennes qui œuvrent pour la paix, nous exigeons un cessez-le-feu immédiat et sans conditions et l'arrivée de toute urgence d'une aide humanitaire massive à la hauteur des besoins.
Signataires
Abomo-Maurin Marie-Rose (Cameroun)
Achour Amina (Maroc)
Alie Marijosé (Martinique)
Anselmo Marielle (France)
Ba Dicko Safiatou (Mali)
Bel Haj Yahia Emna (Tunisie)
Bessis Sophie (Tunisie)
Bourrel Anne (France)
Bouvet de la Maisonneuve Fatma (Tunisie)
Cadier Florence (France)
Carpenter-Latiri Dora (Tunisie)
Cusset Catherine (France)
Desautels Denise (Canada)
Devi Sort Ananda (Maurice)
Diallo Ba Fatimata (Sénégal)
Dupré Louise (Canada)
El-Masri Maram (Syrie)
Essalmi Nadia (Maroc)
Feki Hella (Tunisie)
Fournier Danielle (Canada)
Fréchette Carole (Canada)
Jacquot Martine (France/Canada)
Gauvin Lise (Canada)
Granjon Elisabeth (France)
Lazlo Viktor (Martinique)
Makhlouf Georgia (Liban)
Catherine Marceline (Martinique)
Masset Marie-Christine (France)
Monette Madeleine (Canada)
Octavia Gael (Martinique)
Oumhani Cécile (France)
Rakotoson Michèle (Madagascar)
Régimbald Diane (Canada)
Serraj Loubna (Maroc)
Tadjo Véronique (Côte d'Ivoire)
Tauil Leila (Maroc)
Wihelmy Audrée (Canada)
Zouari Fawzia (Tunisie)
[1] Les termes de « crime contre l'humanité » et de « génocide » sont définis par la Cour Pénale Internationale (en français : Elements-des-crimes.pdf (icc-cpi.int))
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L’impunité israélienne fait monter les tensions régionales

Depuis le début de la guerre d'Israël contre la bande de Gaza à la suite de l'action armée du Hamas le 7 octobre, les tensions régionales n'ont cessé de s'intensifier sans se transformer (encore) en guerre ouverte et directe. Face à la violence de l'armée d'occupation israélienne soutenue par ses alliés impérialistes occidentaux, les risques d'embrasements régionaux beaucoup plus meurtriers ne cessent de croître.
Hebdo L'Anticapitaliste - 689 (04/01/2024)
Par Joseph Daher
Crédit Photo
Tasnim News Agency - Saleh al-Arouri
L'État israélien a notamment intensifié ses bombardements et attaques contre le Liban et en Syrie ces dernières semaines. Le 25 décembre 2023, au sud de Damas, des missiles israéliens ont assassiné le général de brigade Razi Moussavi, un important commandant de la Force Qods, branche des opérations étrangères et unité d'élite des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique d'Iran. Les dirigeants iraniens ont promis une réponse à cet assassinat.
Des risques d'embrasement du côté du Liban
Néanmoins, les risques les plus importants sont au Liban et en particulier après l'assassinat par l'armée d'occupation israélienne, dans une attaque dans la banlieue sud de Beyrouth le 2 janvier 2024, de Saleh al-Arouri, le numéro 2 du bureau politique du Hamas et l'un des commandants de sa branche militaire, les Brigades al-Qassam. Deux autres responsables du Hamas, Samir Fandi et Azzam al-Akraa, ainsi que quatre autres affiliés au mouvement mais aussi à la Jamaa Islamiya libanaise, ont également été tués dans cette attaque.
Le dirigeant du Hamas Arouri était installé au Liban depuis 2018. Emprisonné à deux reprises, il a passé une douzaine d'années dans les geôles israéliennes avant d'être libéré en avril 2010. Il était l'un des interlocuteurs privilégiés du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Jusqu'à maintenant, le Hezbollah, de même que son soutien iranien, ne souhaitait pas un engagement militaire trop important et coûteux contre Israël. L'organisation libanaise s'est limitée à être un « front de pression » contre Tel-Aviv, comme exprimé à plusieurs reprises par Hassan Nasrallah.
Les attaques israéliennes ont néanmoins déjà causé la mort de 140 membres du Hezbollah entre le 8 octobre 2023 et début janvier 2024. Les frappes aériennes et de drones de l'armée d'occupation israélienne sur les villages du Sud-Liban ont également poussé plus de de 64 000 personnes à se déplacer vers des régions plus « sûres » et endommagé de vastes étendues de terres agricoles, ainsi que des habitations. Cependant cet assassinat du dirigeant palestinien Arouri dans la banlieue sud de Beyrouth risque d'accroître encore davantage de manière dangereuse les tensions entre le Liban et Israël, avec une réaction très probable du Hezbollah dans les prochains jours.
En mer Rouge, les houthis contre les forces armées des États-Unis
De même, du côté du Yémen, les tensions augmentent entre le mouvement politique et armé yéménite des houthis et les forces armées des États-Unis. Depuis le 7 octobre, les houthis ont en effet multiplié les attaques en mer Rouge contre des navires qu'ils estiment « liés à Israël », en solidarité avec les PalestinienNEs. Face à cette situation, au début du mois de décembre, une force navale multinationale a été mis en place par les États-Unis afin de protéger les navires de la mer Rouge, par laquelle transite 12 % du commerce mondial. Le 31 décembre 2023, dix militants houthis ont été tués en mer Rouge après que l'armée américaine a affirmé avoir coulé trois de leurs navires en réponse à des attaques contre un porte-conteneurs d'un transporteur danois. Il s'agit de la première frappe meurtrière contre les houthis depuis que les États-Unis ont annoncé la mise en place de la force navale multinationale. En plus de ces mesures, Washington a imposé des sanctions visant les circuits de financement des houthis, ciblant plusieurs personnes et entités au Yémen et en Turquie qu'ils jugent impliquées dans ces financements.
Tandis que la guerre génocidaire contre la bande de Gaza ne cesse pas, tandis que les dirigeants du gouvernement israélien ont annoncé que la guerre contre la bande de Gaza allait se poursuivre « tout au long » de l'année 2024, l'impunité israélienne est une menace permanente pour les classes populaires régionales et ne cesse d'accroître les dangers d'une guerre régionale.
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Pour le rejet des ententes entre la CAQ et les bureaucraties syndicales

Il faut écouter l'entrevue du Midi-Info (15/01/24, 12h43) avec une enseignante du quartier Saint-Michel à Montréal pour comprendre pourquoi elle-même et, selon ses dires, ses collègues de son école, suite à une réunion tâtant le pouls de chacune et chacun, penchent pour le rejet de l'entente de principe de la FAE à moins de l'accepter « par désespoir » comme elle le dit. Le salaire négocié n'est pas à la hauteur de leur formation universitaire et de leur responsabilité ajoute-elle. Elle aurait pu préciser que s'il compensera peut-être pour l'inflation — la formule compensatrice des trois dernières années est bloquée à seulement 1% de plus — dont celle de 2022 à retardement, il n'y aura rien pour le rattrapage. L'accentuation de la crise climatique et sans doute des guerres n'augurent rien de bon au sujet du contrôle de l'inflation. Et on est encore très loin d'égaler la rémunération globale des personnes salariées des autres secteurs publics qui au départ était supérieure de près de 23%.
Selon l'enseignante, là où le bât blesse ce sont pour les améliorations sectorielles pour lesquelles la FAE attendait beaucoup. Il ne faut pas oublier que dans le Grand Montréal syndiquée à la FAE, les conditions d'enseignement sont généralement plus difficiles qu'ailleurs pour cause de milieux plus pauvres, d'immigration plus importante nécessitant l'apprentissage du français et, last but not least, d'un écrémage plus important qu'ailleurs par les écoles privées. Premièrement, les personnes aidantes dans les classes ne seront pas les spécialistes requises pour lesquelles il n'y a pas d'engagement même au bout de la longue convention collective de cinq ans, pas plus que pour la création de nouvelles classes allégeant le fardeau de celles existantes. Affirmer qu'il est impossible maintenant d'y remédier n'excuse pas le fait de ne pas s'engager concrètement pour les années suivantes et n'est pas effacer par un bonus compensatoire qui ne règle rien de conclure l'enseignante. Sans compter, ajoute l'enseignante, que l'aide escomptée même déficiente nécessite un pointage complexe difficilement atteignable.
Côté santé, c'est moins clair. Mais les négociations avec la FIQ traînent en longueur parce qu'en plus de l'offre salariale inadéquate elle ne veut rien savoir de la « flexibilité » exigée par la CAQ dans la cadre de la prise en mains du secteur santé par les « top guns ». Ce qui laisse entendre que le Front commun a avalé la pilule en retour de compensations monétaires additionnelles pour les quarts difficiles et les types d'emploi où l'écart avec le marché était criant. Faut-il aussi comprendre que côté éducation le Front commun ait aussi fait preuve de flexibilité ce qui serait moins problématique pour la CSQ syndiquant hors les plus difficiles grands centres urbains ? Il faut donc comprendre que la CAQ a su non pas jouer les syndicats hors Front commun contre celui-ci mais l'inverse allant jusqu'à instaurer une politique de retour en classe acceptable pour mieux faire passer l'amère pilule. Réalisant la manœuvre, si elles le réalisent, les syndiquées du Front commun sauront-elles faire preuve de solidarité en rejetant le corporatisme de leurs directions syndicales ? Prendre cinq semaines pour voter l'entente sent à plein nez la volonté manipulatoire de la bureaucratie syndicale qui veut bien encadrer toutes ces assemblées.
Si cette entente de principe passe, cette pseudo victoire féministe, dixit Le Devoir, laissera le même goût amer de statuquo amélioré que la soi-disant victoire du printemps érable de 2012. Le fond de l'air dégagera la même odeur nauséabonde d'occasion ratée sans aucun autre relais qui pointe à l'horizon. Cette défaite stratégique, car c'est bien de cela qu'il s'agit, laissera le peuple québécois, et encore plus son prolétariat, face au grand vide existentiel de la prolifération des guerres sur fond d'un emballement de la crise climatique que se hâtera de combler la montée de l'extrême-droite fascisante qui menace cette année aux États-Unis et peu après au Canada. Plus que jamais, s'impose un nouveau 1972,
Marc Bonhomme, 15 janvier 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca
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Ne sautons pas trop vite aux conclusions…

Au moment où nous écrivons les lignes qui suivent, les membres des syndicats affiliés aux quatre organisations syndicales qui forment le Front commun CSN-CSQ-FTQ-APTS ainsi que les membres de la FAE amorcent en assemblée générale, à partir du 15 janvier, l'étude des ententes de principe survenues aux tables sectorielles et à la table centrale.
Ce processus s'échelonnera jusqu'au 25 janvier à la FAE et au 19 février 2024 pour le Front commun. Les salarié.e.s syndiqué.e.s qui sont représenté.e.s par la FIQ, le SPGQ et le SFPQ n'ont, de leur côté, rien de concret à présenter à leurs membres. Ce n'est donc pas avant quelques semaines encore qu'il sera possible d'entreprendre un véritable bilan de la présente ronde de négociation et d'identifier qui a réussi à obtenir les concessions souhaitées ou à négocier les compromis recherchés.
Tant et aussi longtemps que la négociation n'est pas terminée, avec la totalité des 600 000 salarié.e.s syndiqué.e.s des secteurs public et parapublic, il est un peu trop tôt pour parler de « victoire » d'une des deux parties négociantes sur l'autre. Ceci étant dit, il est quand même possible d'identifier un certain nombre d'aspects qui caractérisent l'entente de principe survenue le 28 décembre 2023 à la table centrale du Front commun, principalement sur les enjeux intersectoriels (c'est-à-dire le monétaire et le salarial).
Sur certains aspects de l'entente du 28 décembre 2023
Il y a belle lurette qu'une proposition de contrat de travail comportant minimalement une augmentation salariale de 17,4% sur 5 ans n'a pas été convenue entre le gouvernement du Québec et la grande majorité des salarié.e.s syndiqué.e.s des secteurs public et parapublic. Depuis la ronde des décrets de 1982, ce qui a été imposé unilatéralement par l'État-patron ou négocié entre le gouvernement du Québec et les organisations syndicales dans les secteurs public et parapublic n'a pas servi de modèle dans le secteur privé. L'époque où le secteur public pouvait revendiquer être une locomotive pour le secteur privé s'est interrompue en 1979. À partir de ce moment, les employeurs privés et l'État employeur ont décidé de remettre en question brutalement certains acquis syndicaux. Avec pour résultat que les augmentations salariales obtenues dans les secteurs public et parapublic du Québec, au cours des quarante dernières années, ont, la plupart du temps, été inférieures à l'inflation. Des années 2003 à aujourd'hui, les augmentations paramétriques ont oscillé entre 0 à 2% par année. Il faut donc rappeler ici que le 17,4% d'augmentation salariale minimale pour la période couverte d'avril 2023 à mars 2028 est encore, pour plusieurs personnes, en deçà du 21% (1) d'augmentation offerte aux policières et aux policiers de la SQ et très loin du 30% d'augmentation que les député.e.s se sont accordé.e.s pour l'année 2023 seulement. Pour ce qui est de la clause de protection du pouvoir d'achat, soit 1% pour chacune des trois dernières années d'application de la convention, personne ne peut affirmer quoi que ce soit à son sujet. Qui peut prédire avec exactitude le taux d'inflation en 2026, en 2027 et en 2028 ? Ni vous ni moi. Elle est, par contre, plus généreuse que ce qui était prévu face à l'inflation dans l'entente de principe de 2010. Point à la ligne.
Il est par contre exact d'affirmer qu'il y a, dans l'entente de principe du 28 décembre 2023, des employé.e.s syndiqué.e.s qui auront droit à des augmentations salariales supérieures à 17,4%. Certain.e.s obtiendront des primes allant jusqu'à 15% de plus. D'autres se voient offrir un pourcentage d'augmentation supplémentaire. Pourquoi un tel traitement différencié ? Il faut en effet attirer et recruter de nouvelles et de nouveaux employé.e.s dans les secteurs public et parapublic, mais qu'en est-il de la rétention du personnel expérimenté ? Qui paye pour ces augmentations différenciées ?
L'entente de principe qui circulera dans les assemblées générales au cours des prochaines semaines prévoit également des améliorations au RREGOP, l'obtention d'une 5ième semaine de vacances après 19 années d'ancienneté (plutôt que 25), une bonification des contributions de l'employeur aux assurances. Les ouvriers spécialisés et les psychologues auront droit à une prime de 10 à 15% pour les premiers et une majoration de salaire de 10% pour les seconds. Ce qui est bien, mais il y en a combien qui ne toucheront qu'entre 17,4% ou un maximum de 20,4% sur 5 ans si l'inflation ne parvient pas à être jugulée ?
Ce que les membres auront probablement en tête quand elles et ils participeront à leur assemblée générale
Bref, devant une telle entente de principe en provenance de la table centrale ce sera à tout un.e. et chacun.e. de décider si cela répond à ses attentes et à ses intérêts. Il en ira de même devant le contenu des ententes sectorielles dont les détails de plusieurs n'ont pas encore été dévoilés. La question qui habitera les 420 000 membres du Front commun et les 66 500 membres de la FAE se résume minimalement à ceci : les dispositions des ententes sectorielles et de la table centrale permettent-elles ou non d'améliorer les conditions de travail et de rémunération dans les services publics ?
Conclusion
Il appartient aux salarié.e.s syndiqué.e.s concerné.e.s par ces ententes de décider si celles-ci vont enfin contribuer à améliorer l'état des services publics et si elles vont favoriser le recrutement de nouvelles et de nouveaux salarié.e.s et encourager la rétention du personnel expérimenté. De plus, il appartient à ces personnes de décider si à leurs yeux l'entente de principe va permettre ou non de les protéger adéquatement face à l'inflation et si elle autorise d'envisager un véritable début de rattrapage salarial avec les autres services publics ?
La présente ronde de négociation était une occasion d'amorcer un coup de barre en faveur d'un redressement des services publics. Il est trop tôt pour juger de la portée véritable de ce qui sera soumis aux salarié.e.s syndiqué.e.s. Ce ne sera qu'à terme, c'est-à-dire le 31 mars 2028, qu'il sera possible de dégager l'ensemble des gains ou des pertes qui accompagnent la présente entente de principe. D'ici là, évitons de sauter trop vite aux conclusions.
(1) Selon La Presse et Radio-Canada, l'entente de principe de 21% négociée entre le gouvernement du Québec et l'Association des policiers provinciaux du Québec (APPQ) prévoyait des hausses salariales totales de 5 % en 2022, 3 % en 2023, 7 % en 2024, puis 3 % en 2025 et 2026. Cette entente a été rejetée à un peu moins de 60%.
Ces pourcentages se décortiquaient de la manière suivante :
Pour 2022 : 3% en rattrapage et 2% en augmentation du salaire de base ;
Pour 2023 : 1% en rattrapage et 2% en augmentation du salaire de base ;
Pour 2024 : une prime nationale de l'ordre de 3% plus 2% en rattrapage et 2% en augmentation du salaire de base
Pour 2025 : une prime nationale de l'ordre de 1% plus 2% en augmentation du salaire de base
Pour 2026 : une prime nationale de l'ordre de 1% plus 2% en augmentation du salaire de base
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2008554/surete-quebec-sq-augmentations-salariales?fbclid=IwAR26oh-76ZYpR0fP4iA-ThCVP1nxJ6tiL3B-YdiZburWpau1GTdAXGz3Pis. Consulté le 16 janvier 2024.
Yvan Perrier
15 janvier 2024
14h40
yvan_perrier@hotmail.com
Aparté : Psychodrame social et droit de grève
Il y a dans l'actualité des personnes qui qualifient la ronde de négociation que nous vivons en ce moment de « psychodrame social » et qui demandent une révision du régime de négociation en ce qui a trait au volet portant particulièrement sur le droit de grève. Pour ces personnes, le nombre de participant.e.s au vote doit être plus élevé. Mieux le vote devrait se tenir électroniquement. Ces pourfendeurs des droits démocratiques des syndiqué.e.s observent, par contre, un silence complice devant le mode de scrutin qui permet au gouvernement présentement en place à Québec d'obtenir une députation majoritaire à l'Assemblée nationale à partir d'une minorité des suffrages. Est-il nécessaire de rappeler que le gouvernement Legault n'a obtenu, le 3 octobre 2022, que 1 685 573 votes sur un nombre d'électeurs et d'électrices inscrit.e.s qui s'élevait à 6 302 789, soit à peine un peu plus qu'un électeur ou électrice sur 4 (26,7%). Avec un tel score, François Legault est parvenu à faire élire 90 député.e.s sur 125 (72%). À quand une véritable réforme du mode de scrutin ?
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Le gouvernement Legault, un modèle d’affaires qui n’a rien à voir avec la lutte aux changements climatiques

Davantage d'extraction minière, davantage de production d'énergie électrique, éolienne ou solaire, davantage d'investissements industriels gourmands en ressources minières et énergétiques dans une filière vouée à la transformation du parc automobile, le tout sous le contrôle de multinationales étrangères. Voilà, en somme, le modèle économique que cherche à imposer le gouvernement Legault. Ce modèle n'a rien à voir avec les objectifs de réduction des gaz à effet de serre (GES) et de réduction des dépenses en ressources et en énergie, nécessaires pour faire face à la crise climatique. Le projet de loi promis par le ministre Pierre Fitzgibbon cherchera sans doute à ouvrir la voie aux entreprises privées non seulement pour la production d'électricité, mais aussi pour donner la possibilité à ces entreprises de vendre leur production à des clients commerciaux et industriels. C'est là un modèle économique écocidaire contre lequel nous devons nous mobiliser.
Avec le développement de la filière batteries, le boom minier risque de conduire à la destruction de territoires
Dans le domaine minier au Québec, l'intervention de l'État a été marquée au coin du laisser-faire économique. Les différents gouvernements se sont donné comme tâche de favoriser et de protéger les entreprises privées d'exploitation minière sans se préoccuper des citoyen.nes et de leur environnement. L'exploitation minière au Québec se distingue par une triple dépossession. La première est une dépossession matérielle des ressources par les entreprises privées. La seconde est une dépossession politico-écologique par la privation d'un pouvoir de décision citoyen et étatique sur le contrôle et les modalités de l'exploitation des ressources minières. La troisième est une dépossession économique par la spoliation des bénéfices fiscaux, les redevances des minières étant restées très petites par rapport aux revenus que ces entreprises ont pu tirer de leurs activités. [1].
Le Québec dispose de minéraux stratégiques (cobalt, coltan, cuivre, graphite, lithium, zinc, nickel) et de terres rares. Depuis quelques mois, on a assisté à la prolifération de demandes de claims miniers sur le territoire du Québec, facilitée par la Loi des mines qui donne tous les droits aux minières et aux spéculateurs. On compte désormais (en 2022) plus de 20 000 titres miniers dans sept régions du sud du Québec, dont 7 674 titres miniers dans trois régions du sud-est du Québec en date de novembre 2022 : Estrie (1 739), Bas-Saint-Laurent (1 242) et Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine (4 693). [2].
Les projets d'exploitation minière grugent les terres agricoles et cela ne fait que commencer à cause de la recherche des minerais stratégiques particulièrement le graphite dans le sud du Québec. [3]. La Commission pour la protection des terres agricoles du Québec a accordé 100 % des demandes d'exploration des minières en milieu agricole, 97 % des projets d'infrastructures liés au transport et à la production d'électricité et 99 % des demandes d'implantation des parcs éoliens sur les territoires agricoles. [4]
La multiplication des claims par les minières en territoires citoyens montre que les droits des minières ont préséance sur les plans d'aménagement des territoires des villes et des Municipalités Régionales de Comté (MRC). Le développement des mines et des entreprises par les multinationales risque de se faire aux dépens du contrôle citoyen sur leur territoire. "Laisser libre cours aux principes dévastateurs du free ming fait couler le risque immense de voir se multiplier les cas de contamination des réserves d'eau potable qui en dépendent. Il nous faut écouter davantage la volonté des populations locales et développer de meilleurs mécanismes de protection de nos milieux humides et hydriques avant, ou en dépit de l'émission de titres miniers." (Rébecca Pétrin, directrice générale d'Eau secours. [5] Le cas de Northvolt est exemplaire à cet égard. Alors que cette entreprise a été arrosée par des milliards en argent public, le premier ministre Legault a affirmé que cette compagnie n'aurait pas à passer par une procédure environnementale impliquant un examen du BAPE. [6] Le gouvernement refusait par là d'évaluer les effets d'ordre climatique, l'incidence sur la santé publique et les conséquences sur les milieux naturels et la biodiversité.
Cette montée d'un extractivisme sans balise vise à répondre aux besoins des entreprises multinationales que le gouvernement Legault cherche à attirer par des subventions qui se comptent maintenant en milliards de dollars. Il n'est donc pas question pour ce gouvernement de réduire les demandes en énergie en priorisant l'efficacité énergétique. Dans une démarche de prophétie autoréalisatrice, il crée la perspective d'une pénurie d'énergie électrique, suite à des projets de croissance à tout prix laissés aux mains des multinationales.
Contre la privatisation d'Hydro-Québec
Malgré les dénégations du ministre Fitzgibbon, la perspective d'une privatisation totale ou partielle d'Hydro-Québec est dans les plans du ministre de l'Économie et de l'énergie et du PDG d'Hydro-Québec. Cette privatisation ne prendra sans doute pas la forme de la vente d'une partie d'Hydro-Québec aux entreprises privées, mais le secteur privé est appelée à occuper une place de plus en plus importante dans la production de l'électricité. Déjà la production des énergies renouvelables (éoliennes et solaires) qui est appelée à se développer rapidement se fait par des entreprises privées multinationales. On pouvait lire dans le Manifeste pour un avenir énergétique juste et viable publié en novembre dernier, cet avertissement : « Nous nous opposons fermement à toute tentative de privatisation d'Hydro-Québec ou de ses actifs. Hydro-Québec est un patrimoine stratégique et doit rester sous contrôle public. Nous rejetons toute forme d'érosion de cette institution, cruciale pour le bien-être collectif, au profit du privé. »
Les syndicats d'Hydro-Québec affiliés au SCFP ont d'ailleurs lancé une campagne publique pour mettre en garde contre toute volonté de privatisation de la société d'État. Le développement de la filière-batteries soutenu par les gouvernements fédéral et provincial exigera beaucoup d'électricité et le ministre Fitzgibbon, a ouvert la perspective d'autoproduction d'électricité par les entreprises privées dont les surplus pourraient être revendus à Hydro-Québec. La porte est grande ouverte aux projets privés de production et de transports d'électricité, comme celui de TEX, en Mauricie. [7]
Le gouvernement du Québec et les entreprises sont engagés dans une véritable course au développement de la filière batteries et du développement de l'extraction de nouvelles richesses minières. Ils sont prêts à procéder et à exclure toute consultation véritable et surtout à refuser de donner un quelconque pouvoir aux citoyennes et citoyens des régions qui sont impactés par leurs décisions et particulièrement aux peuples autochtones. La prétention à décarboner le système énergétique n'est qu'une couverture sur une exploitation encore plus irresponsable des ressources et sur le refus de toute stratégie de sobriété énergétique.
L'augmentation de la production électrique, argumentent les François Legault, Pierre Fitzgibon ou Michel Sabia, est essentielle au nouvel essor de la croissance. Le plan Sabia, ce nouveau plan d'Hydro-Québec prévoit la construction de grands barrages hydro-électriques et l'accélération du développement des industries éoliennes et solaires par les multinationales. Le développement de petites centrales nucléaires est même envisagé par le PDG d'Hydro-Québec.
Le mépris gouvernemental de la consultation et du pouvoir citoyen
Que ce soit pour la Fonderie Horne à Rouyn-Noranda, pour l'aluminerie d'Arvida, pour le Port de Québec ou enfin pour l'usine de Northvolt, le gouvernement Legault est plus que conciliant sur les dépassements des normes environnementales par les entreprises. C'est plus de 89 entreprises polluantes que le gouvernement autorise à déroger à la loi. [8] Il se heurte ainsi, comme l'a montré un sondage Léger d'août 2022, à la population du Québec dont le consentement est exigé à hauteur de 78 % pour toute nouvelle exploitation minière. 75% de la population voudrait interdire tout projet minier dans les zones touristiques et 89% souhaiterait interdire tout rejet des déchets miniers dans les lacs, rivières et milieux écologiques sensibles. La Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine a demandé au gouvernement d'interdire cette pratique, mais le gouvernement est jusqu'ici resté sourd à ces demandes. Le gouvernement de la CAQ va jusqu'à autoriser des mégas projets en dépit des études du BAPE qui leur identifient des lacunes et va même jusqu'à se passer des études du BAPE.
Le gouvernement du Québec se moque du nécessaire consentement des populations locales qui seront impactées tant par l'exploitation minière que par de grands projets industriels. Il prétend tenir compte des droits des peuples autochtones, mais ce ne sera que notre mobilisation et notre solidarité qui permettront la reconnaissance de ces droits.
Le gouvernement de la CAQ dit avoir l'oreille des pouvoirs et de la finance et avoir une vision d'hommes d'affaires. C'est pourquoi, il refuse de réformer la loi sur les mines, d'écouter les doléances des Nations autochtones et des municipalités et de donner la priorité concernant l'aménagement du territoire au pouvoir citoyen. Appeler à la collaboration avec un tel gouvernement ne peut que déboucher sur un vain attentisme. Ce sont ses intentions écocidaires qu'il faut remettre en cause non seulement en parole, mais dans les luttes concrètes qui seront nécessaires pour bloquer ce gouvernement irresponsable et les profiteurs qu'il soutient. La mobilisation unitaire contre le projet de loi que doit présenter le ministre Pierre Fitzgibbon sera essentielle pour défendre la majorité populaire contre les intentions prédatrices du capital d'ici et d'ailleurs.
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[1] Laura Handal Caravantes, L'histoire d'une triple dépossession, in Dépossession, Mines, L'histoire économique du Québec contemporain, Lux, 2015, pp-107-172
[2] Coalition pour que le Québec ait meilleure mine Boom minier dans le sud-Ouest du Québec : un an plus tard, l'invasion se poursuit
[3] Étienne Leblanc, Les limites d'une économie électrifiée, Radio-Canada, 30 septembre 2023
[4] Thomas Gerbet, La filière batteries menace le territoire agricole, Radio-Canada, 23 septembre 2023
[5] Coalition pour que le Québec ait meilleure mine, 101 idées pour que le Québec ait meilleure mine : La population invitée à se prononcer, 4 juin 2019
[6] Radio-Canada, Un BAPE pour Northvolt : « Ça ne s'applique pas », dit Legault, 29 septembre 2023
[7] Communiqué du SCFP-FTQ, Campagne publique contre la privatisation d'Hydro-Québec, 8 janvier 2024
[8] Thomas Gerbet, Voici les 89 entreprises polluantes que Québec autorise à déroger à la loi, Radio-Canada, 17 aaût 2022