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Fonderie Horne : la ville au coeur de cuivre

Le verdict est tombé à Rouyn-Noranda le 15 août dernier : les émissions d'arsenic dans l'air de notre ville seront tolérées jusqu'à cinq fois au-dessus de la norme prévue par (…)

Le verdict est tombé à Rouyn-Noranda le 15 août dernier : les émissions d'arsenic dans l'air de notre ville seront tolérées jusqu'à cinq fois au-dessus de la norme prévue par la Santé publique. L'échéancier de cinq ans ne prévoit aucune cible intermédiaire précise pour contraindre Glencore à abaisser ses rejets toxiques dans l'air d'ici là. Les Rouynorandien·nes, décidément, devront boire la coupe jusqu'à la lie.

Il y a une chose que les gens de l'extérieur ont du mal à comprendre. Parler contre la fonderie, c'est parler contre Rouyn. C'est une vérité que chacun ici sent au fond de soi dès sa naissance. Les employé·es de la fonderie sont vos ami·es d'enfance, votre oncle ou tante, votre voisin·e ou votre fille ou fils. On ne médit pas contre les siens et on évoque encore moins la mort de ce qui nous a donné la vie.

Malgré le plan annoncé de réduction des émissions toxiques de la fonderie, certain·es s'écrient déjà bruyamment et refusent le compromis. Les positions se crispent de nouveau. On s'apprête à rejouer bientôt la grande scène tragique qui traverse toute notre histoire : ce n'est pas la première fois que la fonderie divise notre communauté. On regarde alors au fond de soi comme dans le puits noir d'une ancienne mine. On ne sait jamais ce qui risque d'en remonter.

Les luttes se mènent ici dans une douleur coupable. Même les allié·es de la fonderie sont rongé·es sourdement par le doute. Les militant·es finissent par se taire, agacé·es de s'entendre eux·elles-mêmes radoter. Mais les forces de l'immobilisme, elles, n'ont jamais cessé de piocher à la même inépuisable veine.

Parler contre la fonderie, c'est parler contre Rouyn.

Cette croyance remonte au temps de nos grands-parents, que l'on a pourtant enterré·es, encore jeunes, depuis très longtemps déjà au Cimetière Notre-Dame. C'est une idée vieille et ennuyeuse comme la pluie (acide), et peut-être même plus vieille que les cheminées, que l'on dit pourtant éternelles. C'est une idée, en somme, très vieille, trop vieille peut-être.

Entendez-vous la rumeur…

Des citoyen·es influent·es déclarent publiquement qu'ils et elles prendront la clé des champs, loin des nuages oranges, au Témiscamingue, là où les prés sont calmes et où il fait bon respirer. D'autres en sont encore à aiguiser leurs armes. La plupart regardent en retrait et ne savent plus très bien comment juger de la situation. Bien des gens se demandent, et non sans raison, si la réputation de notre ville n'est pas entachée durablement. La fracture va en augmentant.

Depuis peu, les bannières Facebook claquent au vent des réseaux comme les drapeaux noirs de la piraterie. Le nouveau slogan publicitaire de la ville, Douce Rebelle, est subverti par une formule ironique qui en choque plusieurs : Douce Poubelle. À Val-d'Or, Amos ou Ville-Marie, des voix plus lointaines s'élèvent pour faire entendre leur solidarité. La ville fourmille de journalistes sur lesquel·les on trébuche maintenant à tous les deux coins de rue. Les un·es évoquent la fermeture de l'usine comme s'il s'agissait d'un dépanneur et les autres nous parlent de la disparition complète d'un quartier, et avec lui les lieux chers à notre enfance. Les citoyen·nes alternent entre la stupeur et le découragement.

Rouyn donne à voir sa douleur publiquement. Certain·es estiment que là c'est un manque de dignité. Des Mères au Front portent un écusson vert taillé en cœur – vert comme la couleur du cuivre rouillé – et s'adressent à la mairesse en la tutoyant. Leurs filles et leurs fils sont blotti·es contre elles, inquiété·es par l'agitation. Les enfants se demandent pourquoi leurs mères pleurent. Elles sont venues parler pour la jeunesse, pour tout ce que le monde pourrait devenir.

Un militant écologiste de la première heure se prend la tête entre les mains et croit revivre un cauchemar alors qu'on évoque un appui gouvernemental dans la modernisation de la fonderie. Des médecins s'inquiètent de la prévalence potentielle de maladies aux noms imprononçables devant une assistance qui fait des yeux ronds. Une femme âgée qui a vécu toute sa vie dans le quartier Notre-Dame, adossée contre l'usine métallurgique, témoigne, à une assemblée entière, avec une simplicité qui arrache des larmes. Sa santé est compromise et elle ne veut pas mourir en sachant que les tout-petit·es pâtiront encore de la qualité de l'air.

On entend ici toutes sortes de choses dernièrement, des choses édifiantes et des plus regrettables. Notre parole s'emporte comme la rivière qui rompt son embâcle. Les débordements sont à prévoir. Mais c'est surtout à une formidable leçon de mobilisation sociale à laquelle nous ont convié·es les citoyen·nes de Rouyn-Noranda. Ceux et celles qui parlent aiment leur ville suffisamment pour transgresser un interdit qui les fait souffrir eux·elles aussi.

Parce que parfois, parler contre la fonderie, c'est aussi parler pour Rouyn.

Le soleil s'est levé sur Rouyn

Depuis les premiers signes du printemps, quelque chose en nous cherche à naître. Notre mobilisation devient le tremplin d'une nouvelle fierté. Les villes jumelles ont renfilé leur robe des plus beaux jours. Notre indignation prend parfois la forme soudaine de l'espoir. On nous écoute de très loin. On s'enorgueillit de voir notre communauté debout et agissante. On dit maintenant partout que les gens de Rouyn ont beaucoup de courage. La multinationale est forcée de nous regarder en face. Il faudra apprendre dorénavant à nous respecter.

Notre lutte n'est pas encore terminée, mais nous voici à nouveau engagé·es dans la bataille de l'essoufflement. Notre cœur est plus large et notre sang plus oxygéné que jamais. Avec l'été qui rayonne, on respire en tout cas un air franchement plus sain. C'est celui du droit à parler enfin, et pour nous-mêmes, de ce qui nous inquiète depuis très longtemps.

Photos : une enfant tenant un tambourin lors d'un rassemblement à la Place de la Citoyenneté à Rouyn-Noranda ; un placard portant les mots « Les écocidaires ont des noms et des adresses » est modifié afin d'en faire une menace contre les militant·es écologistes à Rouyn-Noranda ; des femmes affichent un air déçu lors du conseil de ville de Rouyn-Noranda ; coucher de soleil sur le lac Osisko et la fonderie Horne à Rouyn-Noranda (Marie-Raphaëlle Leblond).

Disséquer la « sensibilité » nationaliste conservatrice

17 juin 2024, par David Sanschagrin — , , ,
Le schisme identitaire : Guerre culturelle et imaginaire québécois a été écrit par la vedette montante du nationalisme conservateur québécois, Étienne-Alexandre Beauregard [1]. (…)

Le schisme identitaire : Guerre culturelle et imaginaire québécois a été écrit par la vedette montante du nationalisme conservateur québécois, Étienne-Alexandre Beauregard [1]. Si sa thèse est faible et friable, le livre demeure toutefois intéressant, car il expose les travers du débat actuel sur l'identité.

L'ouvrage s'inscrit dans la mouvance identitaire droitiste qui, malgré la forte diffusion de ses idées dans les médias et au sein du gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ), sous-estime constamment son pouvoir, ce qui nourrit sa posture victimaire. Les remerciements de ce livre constituent une véritable cartographie de cette mouvance, dont font partie Mathieu Bock-Côté et son maître à penser, Jacques Beauchemin.

L'hégémonie et la guerre culturelle

Beauregard mobilise le concept d'« hégémonie » du philosophe marxiste Antonio Gramsci pour avancer que de 1960 à 1995 existait une hégémonie néonationaliste promouvant la vision du Québec de Lionel Groulx, comme « État-nation du sujet unitaire francophone ». Cet État aurait comme missions « la survie culturelle de la nation francophone » et l'atteinte du destin naturel du Québec : l'indépendance.

Les propos de Jacques Parizeau attribuant la défaite référendaire de 1995 à « l'argent et des votes ethniques » auraient ouvert l'ère d'une hégémonie libérale, « où toute affirmation nationale est désormais suspecte de racisme et d'exclusion. » Elle serait promue par des élites intellectuelles et politiques, et axée sur le fédéralisme trudeauiste, les droits individuels et le multiculturalisme postnationaliste. Depuis l'arrivée de la CAQ au pouvoir en 2018, une contre-hégémonie propose « un nationalisme fermement ancré dans le désir de durer. Promettant sans honte une loi sur la laïcité et une baisse des seuils d'immigration, Legault parlait pour le Québec francophone, le Québec des banlieues, celui dont j'étais issu et que je souhaitais plus que tout pérenniser grâce à mon engagement politique. »

Depuis 2018, selon Beauregard, nous serions en pleine guerre culturelle entre deux camps irréconciliables où se jouerait le destin de la nation. Les « nationalistes » s'appuieraient sur une « éthique de la loyauté » envers la nation et son noyau historique canadien-français. Les « multiculturalistes » défendraient une « éthique de l'altérité », valorisant la diversité en soi et l'effacement national.

Beauregard propose donc une vision asociologique de l'hégémonie comme domination d'un ensemble statique d'idées et de valeurs sur l'histoire et la société. Il omet que l'hégémonie gramscienne est une domination de classe dynamique, qui se renouvelle grâce au contrôle de l'économie, de l'État et des institutions culturelles. La conception culturelle de l'hégémonie de Beauregard est en phase avec le « gramscisme de droite », développé par l'extrême droite intellectuelle française à partir de 1973. Celle-ci promouvait une guerre culturelle afin de s'opposer à la domination des idées de gauche, d'imposer des valeurs conservatrices et de préparer la prise du pouvoir [2]. Enfin, il partage aussi leur conception « naturelle » de la nation ainsi que leur méfiance envers les droits de la personne et la diversité culturelle.

Libéralisme et nationalisme au Québec

Contrairement à ce qu'affirme Beauregard, avant 1995, on n'observe pas d'unanimité idéologique au Québec, et après 1995, on ne voit pas d'hégémonie antinationaliste.

Le libéralisme et le néonationalisme étaient bien présents au Parti québécois (PQ) et au Parti libéral du Québec (PLQ) avant 1995, mais le premier était souverainiste, le second fédéraliste, et ils ne s'entendaient pas sur la protection du français. Néanmoins, ils partageaient une vision ouverte et inclusive de la nation, défendaient les droits des individus et des minorités et ont bâti un État social moderne. Ils ont aussi reconnu la diversité constitutive du Québec.

Quant au nationalisme culturel conservateur, il se manifeste bien avant 2018. Dès 2006, Mario Dumont attaquait les minorités religieuses, qui minaient les valeurs « communes » avec des accommodements « déraisonnables ». Depuis, l'immigration et la diversité sont perçues comme des problèmes culturels. Au pouvoir en 2012, le PQ a proposé une Charte des valeurs, reprenant la carte identitaire, à défaut d'un véritable projet politique.

De grands sensibles

Ce livre est caractéristique du discours nationaliste conservateur, dont il a tous les travers.

Les nationalistes conservateurs, comme Beauregard ou Bock-Côté, font fi de la sociologie historique et ne proposent pas de véritable « pensée ». Ils mettent plutôt en scène leur « sensibilité » et compensent la faiblesse de leurs idées par des néologismes. En effet, la « pensée » a des exigences rationnelles plus élevées : se confronter honnêtement aux faits ainsi qu'aux perspectives avancées par les autres. La pensée existe de manière dialectique, relationnelle. Elle est le contraire de l'enfermement sentimental et idéologique.

Au départ, il y a donc le « sentiment » que des forces maléfiques et élitistes complotent contre « nous », veulent effacer « notre » mémoire longue et « notre » culture pour « nous » assimiler. Pour arriver à leurs fins, ces forces ont recours aux droits individuels, à l'immigration et la diversité ethnoculturelle. La « raison » arrive ensuite pour justifier ce « sentiment », en s'appuyant sur une lecture biaisée et révisionniste de l'histoire.

Pour cette mouvance, la nation québécoise est « naturalisée » et équivalente à la majorité culturelle canadienne-française. Constamment menacée, elle doit être protégée, justifiant des mesures et des discours mesquins envers les minorités, dont les revendications de droits seraient des attaques antidémocratiques envers la nation. Il relève alors de l'évidence d'affirmer qu'« au Québec, c'est comme ça qu'on vit », comme s'il y avait unanimité et une seule bonne façon de concevoir la nation. Comme si la majorité était homogène, monolithique, alors que l'on sait très bien qu'elle aussi est plurielle aux plans culturel, économique et politique. Il n'y a pas de test de loyauté et il n'y a pas qu'une seule appartenance légitime à la nation québécoise, telle qu'essentialisée par la droite identitaire.

Enfin, cette dernière se réclame du débat démocratique, mais l'évacue et voit toute critique de leur « sensibilité » comme une preuve de censure, critique qui sera brandie sans nuance et de façon polarisante sur toutes les tribunes, afin de s'indigner des méchantes élites multiculturalistes. Et, à la question « qu'est-ce que la nation québécoise et son devenir ? », elle ne conçoit qu'une seule bonne réponse, la sienne. Toute déviation de cette trajectoire serait aliénation, aplaventrisme et déloyauté.

En décrivant la reconnaissance de la diversité ethnoculturelle et la protection des droits de la personne comme des attaques élitistes envers la majorité culturelle, les nationalistes conservateurs ciblent les minorités comme ennemies de la nation et minent les institutions démocratiques qu'ils prétendent défendre face au « gouvernement des juges ».

Démocratie et majorité

La démocratie doit en effet être comprise comme un équilibre complexe entre pouvoir collectif de la majorité et droits des individus et des minorités. La démocratie ne peut pas être la pure expression d'une majorité immuable, auquel cas elle ne serait que tyrannie. Elle ne peut pas représenter que les intérêts d'une petite nation conservatrice rabougrie et revancharde, ce « Québec francophone des banlieues ».

La démocratie est un moyen pacifique de trancher les conflits politiques et d'arbitrer différents intérêts, afin de trouver un modus vivendi acceptable. Elle ne s'arrête pas aux élections, elle continue de vivre dans les débats publics, par l'action des mouvements sociaux, par des revendications de droits. C'est démocratiquement que l'Assemblée nationale a adopté la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, en 1975. Plutôt que de critiquer les droits de la personne en soi, c'est une critique de l'État canadien et des juges qu'il nomme qui devrait être faite.

L'héritage de la Révolution tranquille

En lieu et place d'un vrai projet politique, la droite identitaire alimente l'idée d'une guerre culturelle qui est dommageable pour le vivre-ensemble et met sur la sellette les minorités culturelles. Elle reproduit un scénario classique (aux États-Unis, en France, etc.) où des acteurs politiques voient la nation comme une majorité culturelle traditionnelle menacée par les minorités, les élites multiculturalistes et les droits de la personne. Cette politique de la peur et du ressentiment mène ensuite à la haine et au rejet de l'autre, vu comme ennemi existentiel au sein de la société.

Une petite nation culturelle inquiète qui se replie sur elle-même est très loin de l'idéal de la Révolution tranquille d'une grande nation inclusive qui propose, avec confiance, un projet politique inspirant et égalitaire. Plutôt que de revenir au cul-de-sac de l'idéologie de la survivance culturelle, il faut retrouver l'esprit d'audace, de générosité et d'ouverture qui animait les révolutionnaires tranquilles.


[1] Étienne-Alexandre Beauregard, Le schisme identitaire. Guerre culturelle et imaginaire québécois, Montréal, Boréal, 2022, 282 pages.

[2] Pierre-André Taguieff, « Origines et métamorphoses de la nouvelle droite », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, n° 40, 1993, pp. 3-22.

David Sanschagrin est politologue.

Illustration : Ramon Vitesse

L’inquiétante propagation du mensonge

17 juin 2024, par Claude Vaillancourt — , , ,
Des histoires complètement fantaisistes se transforment en réalité pour certain·es. Ce phénomène qu'on aurait voulu croire en voie de disparition revient en force. Le mensonge (…)

Des histoires complètement fantaisistes se transforment en réalité pour certain·es. Ce phénomène qu'on aurait voulu croire en voie de disparition revient en force. Le mensonge reste un moyen particulièrement efficace pour saboter la démocratie ou pour l'empêcher de s'épanouir, d'où la nécessité de bien comprendre sa mécanique.

Trois cas récents, hypermédiatisés et très différents, en Russie, aux États-Unis et aux Philippines, ont montré à quel point la régression est profonde et à quel point la vieille stratégie de propager d'immenses tromperies a de beaux jours devant elle. Et cela à une époque où l'information vraie est plus accessible que jamais.

L'invention d'un régime néonazi en Ukraine par la Russie, dans le but de justifier son invasion, ne cesse de stupéfaire, tant par l'énormité de cette affabulation, par l'ampleur de sa diffusion et par les menaces contre les personnes qui ne veulent pas y croire. Elle rappelle les pires moments du régime stalinien, alors qu'on multipliait les condamnations sous les prétextes les plus fantaisistes. Dans les deux cas, les contrevérités sont diffusées par une dictature qui a le pouvoir de faire passer des vessies pour des lanternes et de réprimer durement les sceptiques. La propagande officielle russe d'aujourd'hui semble aussi improbable que l'invasion territoriale qu'elle justifie, inquiétant vestige de l'esprit de conquête territoriale des siècles précédents. Même dans un pays aussi fragile que la Russie, une pareille régression paraissait encore impensable quelque temps avant le début de la guerre.

Aux États-Unis, le grand mensonge diffusé par Donald Trump selon lequel on lui aurait volé la victoire aux dernières élections est cru par un public bien ciblé, important tout de même, composé essentiellement de partisans de l'ex-président. Ici, la croyance est reliée à un intérêt partisan, celui de délégitimer l'élection de Joe Biden en dépit du verdict démocratique, si bien qu'il devient difficile de savoir si cette croyance est bien réelle ou si elle découle d'un calcul cynique et d'extrême mauvaise foi, basé sur le principe selon lequel la fin justifie les moyens. La persistance de cette fabrication, en dépit de l'absence de faits pour la soutenir, étonne tout même envers et malgré tout. La patiente et précise déconstruction du grand mensonge de Trump par la Commission du 6-janvier envoie du plomb dans l'aile à cette mystification, mais au moment d'écrire ces lignes, il est difficile de savoir quelles en seront les conséquences chez celles et ceux qui prétendent y croire.

La victoire électorale du fils de Ferdinand Marcos aux Philippines, malgré les extractions et les violences du régime de son père, chassé du pouvoir par son peuple las de trop de corruption, n'a pas manqué d'en laisser plusieurs estomaqué·es. Pourtant, le retour du clan Marcos a été planifié depuis plusieurs années, par une stratégie de révision mensongère de l'histoire de ce régime honni : il s'agissait tout simplement de présenter les années Marcos comme un âge d'or, une période de prospérité économique, biffant du paysage toutes les violences contre le peuple et les opposants au régime, inventant en outre une histoire d'or hérité d'une famille royale et qui mettrait le clan richissime des Marcos à l'abri de toute corruption. De toute évidence, une grande partie de la population des Philippines y a cru puisque Marcos Jr a été élu avec une majorité confortable.

Mensonge et relations publiques

Ces trois histoires révèlent la perméabilité de très nombreuses personnes aux récits les plus fantaisistes, sous de fortes pressions propagandistes, à l'avantage de très grands intérêts et une réelle difficulté à s'en défendre. Mais le mensonge peut aussi être proféré par des gouvernements qui ne semblent pas extrémistes et qui, grâce à une apparente modération, réussissent à duper leurs populations et même leurs alliés. N'oublions pas que deux des plus grandes guerres déclenchées par les États-Unis ont trouvé leur justification par de très grands mensonges : de fausses attaques de torpilleurs nord-vietnamiens contre des destroyers américains ont offert un prétexte pour déclarer la guerre sans s'empêtrer dans les formalités démocratiques habituelles ; le gouvernement de George W. Bush a quant à lui prétendu qu'il existait des armes de destruction massive en Irak afin de justifier une invasion qui déstabilisera une importante région du monde pendant des années.

Edward Bernays, auteur du célèbre essai Progaganda (1928), a bien montré comment les relations publiques contribuent à conditionner les publics, tant pour les gouvernements que les grandes entreprises. Leurs expert·es peuvent se permettre de fabriquer des faussetés qui seront gobées par les populations en les propulsant dans la sphère publique par de vastes campagnes dans les médias (et si nécessaire, dans des publications scientifiques). Dans son dernier roman, Temps sauvages, Mario Vargas Llosa montre, de façon très documentée, comment le remplacement d'un gouvernement démocratique par une dictature au Guatemala pendant les années 1950 a été justifié par la pure invention d'un ennemi communiste, en suivant un plan mené par Bernays [1].

Les théories de Bernays ont sûrement fait le plus de dommages par une utilisation particulièrement subtile du mensonge. L'idée n'est plus de mentir effrontément, d'inventer des histoires fantaisistes, mais de mettre en doute des faits scientifiquement admis. Ce qui est faux n'est plus un discours en tant que tel, mais une controverse sur un sujet scientifique. On crée un débat allant à l'encontre du consensus scientifique, en faisant croire que ce consensus n'existe pas vraiment. Les fabricants de cigarettes ont ainsi financé des campagnes qui remettaient en cause les méfaits du tabac sur la santé. En créant l'incertitude sur ces effets nocifs, elles ont réussi à faire retarder de plusieurs années une réglementation efficace contre ce produit, un retard qui a causé au passage des millions de morts. La compagnie ExxonMobil a quant à elle subventionné généreusement le mouvement climatosceptique, alors qu'elle connaissait très bien les effets dévastateurs du réchauffement climatique, faisant perdre ainsi d'irremplaçables années à la transition écologique.

Juifs, francs-maçons, jésuites

Dans Le cimetière de Prague, Umberto Eco s'intéresse à des aspects importants de la diffusion des grands mensonges : qui les fabrique ? Dans quel but ? Comment procède-t-on pour y arriver ? Le romancier se penche sur une période particulièrement fertile en ce qui concerne l'invention de fausses nouvelles, quoique plutôt méconnue : la fin du XIXe siècle en France (mais aussi, de façon plus large, en Europe). Ce foisonnement de théories du complot naissant d'un peu partout rappelle inévitablement ce qui est aujourd'hui véhiculé dans les réseaux sociaux.

Dans ce roman, qui présente une galerie de propagandistes ayant tous réellement existé, à l'exception du personnage principal, Eco montre bien à quel point la fabrication de mensonges et la propagation de la haine occupaient une place importante dans le paysage intellectuel. Une recherche rapide nous permet de constater que les livres antisémites, ceux ciblant les francs-maçons ou les jésuites, accusant tant de personnes de pratiques les plus invraisemblables, allant des rites sataniques à des projets de domination mondiale, remportaient des succès auprès d'un large lectorat. Des livres comme La conquête du monde par les Juifs d'Osman Bey, La France juive d'Édouard Dumont ou Essai sur l'inégalité des races humaines d'Arthur de Gobineau, étalant plus précisément un racisme anti-juif démesuré, ont exercé une influence qui s'est poursuivie jusqu'à la chute du Troisième Reich.

Parmi les grandes fumisteries mentionnées dans le roman, Eco nous rappelle l'œuvre de l'un des maîtres du genre, Augustin Barruel, qui s'en est pris au rôle des jacobins pendant la Révolution française. Sous sa plume, ces derniers cachent un groupe puissamment organisé par des athées et des francs-maçons, dont l'esprit complotiste, s'en prenant à la France noble et catholique, provient d'aussi loin que de l'extermination de l'ordre des Templiers au Moyen-Âge. Ceux-ci, se maintenant dans les ordres maçonniques, sont revivifiés par les Illuminés de Bavière, un groupe propageant, en vérité, les valeurs philosophiques des Lumières. Mais dans le délire de Barruel, ce groupe est transformé en complotistes omnipotents, infiltrant les principales sociétés secrètes.

Eco accorde aussi beaucoup d'importance à l'affaire Léo Taxil. Celui-ci était un complotiste anticlérical qui fera un virage radical pour devenir l'inventeur d'une fable très sophistiquée accusant les francs-maçons de satanisme. Cette fabrication, provoquant un grand bruit à l'époque, se retournera finalement contre les éléments les plus conservateurs de l'Église lorsque le canular, impliquant des personnalités inventées, sera exposé au grand jour : ces catholiques rigides s'étaient trop réjouis de cette histoire invraisemblable et avaient ainsi révélé leur crédulité. Cette affaire n'est pas sans ressemblances avec la diffusion des théories de QAnon dont les adeptes répandent l'idée selon laquelle leurs adversaires politiques, principalement démocrates, commettent des crimes sataniques, pédophiles et cannibales.

Eco s'intéresse surtout aux Protocoles des Sages de Sion, œuvre de propagande de la police tsariste, publiée en 1905, mais qui sera largement diffusée à partir des années 1920, présentant ni plus ni moins qu'un plan juif, soi-disant écrit par des sages, pour conquérir le monde. Ce texte, qu'écrit dans le roman le personnage principal [2], est l'un des libelles de propagande raciste aux plus fortes répercussions, continuant à trouver des adeptes même aujourd'hui.

Le grand mensonge d'une domination mondiale juive, qui serait paradoxalement effectuée par un peuple soi-disant inférieur, a mené à la catastrophe de l'Holocauste, comme quoi les idées de quelques exaltés possédés par la haine, par le plaisir pervers de manipuler les autres et par une folle paranoïa peuvent se transmettre aisément et avancer très loin. C'est ce chemin d'abord étroit et d'apparence assez tranquille, puis menant aux pires abominations, qu'a voulu nous faire parcourir Umberto Eco dans Le cimetière de Prague. L'auteur rappelle, si nécessaire, que lier la haine à des théories du complot ne sera jamais inoffensif.

Des contrevérités en excellente santé

L'ampleur et la très grande propagation des contrevérités aujourd'hui surprennent, alors que l'on connaît plus que jamais les méfaits de cette dangereuse stratégie pour faire avancer un programme politique. On a plusieurs fois expliqué les raisons de la grande diffusion des hypothèses les plus invraisemblables, bien que ces éclaircissements ne semblent jamais entièrement satisfaisants : le développement des réseaux sociaux qui donnent une importante chambre d'écho aux propos les plus fantaisistes ; un manque de confiance aux médias traditionnels ; la libéralisation du secteur de l'information qui ouvre la voie à la parole des démagogues, source de profit pour les entreprises médiatiques ; l'immense capacité de surveillance offerte par l'industrie numérique particulièrement profitable aux régimes autoritaires ; un affaiblissement du système éducatif qui a cessé de valoriser le développement de l'esprit critique.

Même si les mensonges politiques peuvent survenir de partout, il n'en reste pas moins que leur relance aujourd'hui provient essentiellement de l'extrême droite qui en tire d'immenses avantages. On constate la grande efficacité de cette stratégie : elle assure des victoires politiques majeures en simplifiant les enjeux, en donnant des explications commodes qu'on peut implanter par un matraquage médiatique et par leur bonne circulation dans les réseaux sociaux, tout cela adressé à des populations déconcertées devant les effets négatifs de la mondialisation et rendues plus vulnérables à la suite des confinements nécessités par la COVID-19.

Pour les progressistes, ces mensonges posent un défi très particulier et difficile à relever. En de pareilles circonstances, le débat politique ne peut plus avancer par le raisonnement, l'argumentation bien développée et le recours à des sources crédibles d'information. L'adversaire politique nourrit de croyances et de fabulations le public dont il cherche à obtenir l'appui. Lutter contre des croyances est certes beaucoup plus difficile que débattre, et de nombreux·euses militant·es progressistes restent déconcerté·es et mal préparé·es pour faire face à cette puissante stratégie de l'extrême droite. Mettre en lumière les mystifications et révéler la vérité, quoique toujours indispensables, ne semblent plus suffisants. Ainsi faudrait-il penser à développer une façon nouvelle de combattre l'implantation du mensonge dans certains esprits, entrevoir des voies de contournement, creuser du côté de la psychologie, bref, développer des outils inusités devant cette charge qui ne cesse de marquer des points.


[1] Lire à ce sujet « Les temps sauvages » de Jacques Pelletier et « Des interventions brutales » de Claude Vaillancourt dans le numéro 92 d'À bâbord !

[2] Eco a profité du fait que les historiens ne s'entendent pas sur l'auteur et sur l'origine même du document pour en donner la paternité à son antihéros.

Illustration : Elisabeth Doyon

États-Unis : tueries de masse et complotisme

17 juin 2024, par Nathalie Garceau — , ,
La fusillade dans une école primaire d'Uvalde au Texas le 24 mai dernier ne manque pas de rappeler la tuerie de Sandy Hook et le rôle des figures de proue des théories (…)

La fusillade dans une école primaire d'Uvalde au Texas le 24 mai dernier ne manque pas de rappeler la tuerie de Sandy Hook et le rôle des figures de proue des théories complotistes aux États-Unis. Quel pouvoir détiennent ces vedettes complotistes, et quels sont les échos au Canada ?

Peut-être avez-vous vu sur les réseaux sociaux les fameux vidéos dénonçant les mesures sanitaires ou encore clamant que le vaccin contient des puces qui permettront au gouvernement de suivre tous nos mouvements en tout temps. Galvanisés par des dizaines de supporteur·euses, certain·es complotistes se sont même retrouvé·es en prison pour avoir harcelé et menacé de mort François Legault. [1]

Pourtant, ces théories ont toujours existé, fortement liées à des événements d'actualité comme l'assassinat de JFK ou l'élection de Barack Obama. Parmi les plus farfelues, notons les fameux extraterrestres enfermés à Area 51, l'installation hautement secrète de l'armée de l'air américaine au Nevada. On peut aussi penser à celle des reptiliens, ces extraterrestres à la physionomie de lézard déguisés en humain avec l'objectif secret de contrôler la planète en acquérant des pouvoirs politiques et financiers.

Les plus troublantes de ces théories sont malheureusement liées à des événements tragiques : les tueries de masse. Le 14 décembre 2012, un jeune adulte pénètre dans l'école primaire Sandy Hook et tue 26 personnes, dont 20 enfants. Quelques jours plus tard, les premières hypothèses complotistes font surface sur Internet : le massacre était un événement planifié par l'administration Obama pour confisquer les armes à feu ; les enfants sont des acteurs ; il y avait un deuxième tireur ; les Illuminati sont responsables… Il n'en fallait pas plus pour que l'animateur conservateur et complotiste Alex Jones reprenne ces idées farfelues sur son site web et sur ses multiples plateformes de diffusion.

Qui est Alex Jones ?

Né en 1974, il lit à l'adolescence son premier livre de nature complotiste sur les banquiers mondiaux qui contrôleraient la politique américaine. C'est une révélation qui le guidera tout au long de sa carrière médiatique. Il fait ses débuts à la télévision publique de la ville d'Austin au Texas où il discutera abondamment de la théorie du Nouvel Ordre mondial [2]. En 1996, Alex Jones décide de se consacrer à la radio et sera même nommé l'un des meilleurs animateurs de radio d'Austin. Très politisé, il consacre de grands pans de son émission à attaquer des membres éminents de la politique américaine comme Bill Clinton et à prôner un retour aux valeurs religieuses.

Renvoyé de la station de radio, Alex Jones décide de se tourner vers Internet et fonde Infowars, un site web qui deviendra un pilier dans la propagande complotiste en ligne. Il y anime une émission de radio qui sera éventuellement diffusée sur plus de 100 stations à travers les États-Unis ainsi que sous format vidéo. Sa plateforme rejoint des millions de personnes et devient une véritable porte d'entrée pour les extrémistes de tous genres ; il reçoit régulièrement Stewart Rhodes, leader des Oath Keepers, une organisation de type « milice » voulant défendre la constitution américaine contre une soi-disant tyrannie. Soulignons que de nombreux membres des Oath Keepers ont participé à l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021 ; ceci explique peut-être cela.

De Sandy Hook à Uvalde

Après la tuerie de Sandy Hook en 2012, Alex Jones clame sur ses multiples plateformes que celle-ci est en fait un canular. Selon lui, les enfants et leurs familles sont des acteur·rices qui ont été engagé·es pour créer une opération policière de type false flag. Ce terme est utilisé pour décrire une tactique de déguisement de l'identité ou un motif d'opération militaire. Les adeptes du complotisme croient que des forces puissantes (Le Nouvel Ordre mondial ?) organisent ce type d'événement tragique en dirigeant la responsabilité sur une personne ou un groupe dans le but d'atteindre des objectifs politiques comme le contrôle des armes à feu. En plus de cette affirmation ridicule, Alex Jones n'hésite pas à clamer que personne n'est mort lors de cet événement malheureux.

La propagande de l'animateur entraînera une foule de conséquences fâcheuses ; des parents d'enfants tué·es seront harcelé·es par téléphone et courriel ; accusé·es de participer à un canular, des personnes oseront même leur demander de prouver que leur enfant est vraiment mort. Un de ces parents, Lenny Pozner, dont le fils Noah a été tué à Sandy Hook, décidera de s'attaquer aux théories du complot sur le web. En 2014, il fonde le HONR Network, un regroupement de volontaires qui participent au signalement et à la suppression des publications haineuses et complotistes reliées aux tueries de masse sur les réseaux sociaux. En 2018, Lenny Pozner ainsi que sept autres familles de victimes de la tuerie décident de poursuivre Alex Jones pour diffamation. Ce dernier sera condamné en avril 2022 à verser des dommages et intérêts aux familles des huit victimes.

Récemment, la tuerie d'Uvalde au Texas n'a pas fait exception. Les théoriciens du complot ont saisi l'occasion pour affirmer que le massacre des enfants était un canular mis en place par le gouvernement pour promouvoir un meilleur contrôle des armes à feu. De plus, ils ont propagé de fausses informations sur l'identité du tireur, affirmant qu'il était un immigrant illégal ou encore une personne transgenre. Bien sûr, Alex Jones ne se gêne pas pour partager ces publications mensongères.

Des effets bien réels

Avec l'ancrage de ces théories en lien avec les tueries de masse dans l'imaginaire populaire, principalement par l'entremise des réseaux sociaux, quelles conséquences cela a-t-il sur les victimes de ces événements tragiques ? Revenons à Lenny Pozner, le père de Noah, abattu à Sandy Hook. Militant de longue date s'opposant aux théories du complot, il se fait constamment harceler, que ce soit en ligne ou au téléphone ; ses adresses résidentielles et celles de ses proches ont été publiées sur Internet ; on l'a accusé d'être un acteur payé par le gouvernement ; il s'est fait menacer de mort. Aujourd'hui, il vit caché et doit constamment changer de logement pour ne pas être trouvé. Malgré tout, il continue son combat et vit en permanence avec le deuil de son fils et la peur d'être traqué par un zélé complotiste.

Au Canada, le candidat au leadership du Parti conservateur du Canada Pierre Poilievre côtoie des complotistes et des figures notoires de l'extrême droite. Par ailleurs, les nombreuses manifestations contre les mesures sanitaires (comme le siège d'Ottawa) et l'engouement quasi sectaire devant certains théoriciens du complot nous ont montré que le phénomène ne se concentrait pas seulement aux États-Unis. Même le Québec n'est pas épargné : selon un sondage Léger réalisé en avril 2021, 23 % des Québécois·es croient qu'il existe un gouvernement mondial qui contrôle le monde, 18 % croient qu'il existe un projet secret en lien avec le Nouvel Ordre mondial et 13 % sont persuadés qu'il existe un complot juif à l'échelle planétaire [3]. Face à cet enjeu, nous avons le devoir de trouver collectivement des solutions pour éradiquer ce phénomène : c'est notre santé mentale collective qui en dépend.


[1] « Conseil général de la CAQ à Trois-Rivières : François Amalega arrêté deux fois ce week-end », Radio-Canada, 15 novembre 2021. En ligne : ici.radio-canada.ca/nouvelle/1840020/arrestations-francois-amalega-bitondo-conseil-general-caq-trois-rivieres-shawinigan. Louis-Samuel Perron, « Menaces de mort contre François Legault. Le complotiste Pierre Dion condamné à 30 jours de prison », La Presse, 23 juin 2022. Disponible en ligne.

[2] Théorie selon laquelle une élite secrète conspire pour gouverner le monde via un seul gouvernement mondial et autoritaire, mettant ainsi fin à la souveraineté des nations. La série X-files a fait de cette théorie un pilier majeur de son univers.

[3] Sondage Léger : baromètre des théories du complot populaires au Québec », Le Journal de Montréal, 19 avril 2021. Disponible en ligne.

Nathalie Garceau est animatrice du podcast Solidaire.

Illustration : Elisabeth Doyon

Avortement : le Canada, un modèle ?

Le 24 juin 2022, la Cour suprême des États-Unis renverse l'arrêt Roe v. Wade de 1973 qui protégeait le droit à l'avortement. Quelle est la situation au Canada ? Cette (…)

Le 24 juin 2022, la Cour suprême des États-Unis renverse l'arrêt Roe v. Wade de 1973 qui protégeait le droit à l'avortement. Quelle est la situation au Canada ?

Cette décision survient alors que les États-Unis connaissent, depuis plusieurs années, un recul spectaculaire en matière de droit à l'avortement. Prenons le cas de l'Alabama qui, en 2019, avait voté une loi pour rendre l'avortement légal uniquement en cas d'anomalie létale du fœtus ou de risque vital pour la personne enceinte. L'avortement est donc illégal dans tout autre contexte, y compris en cas de viol ou d'inceste, sous peine d'emprisonnement pour le·la patient·e et le·la praticien·ne. Cette loi était, jusqu'alors, la plus restrictive du pays, mais n'était qu'un exemple parmi d'autres : uniquement en 2019, 28 États font passer plus de 300 lois visant à restreindre l'accès à l'avortement. Elles étaient majoritairement des lois dites « Heartbeat Bills », c'est-à-dire des « lois de battement de cœur » : l'avortement était illégal à partir du moment où il y avait un battement de cœur, donc à environ six semaines de grossesse. Or, six semaines, quand on ne cherche pas activement à tomber enceinte, c'est très souvent le temps que cela prend pour réaliser qu'une grossesse est en cours. D'un point de vue légal, si on compte les listes d'attente éventuelles ou encore le temps de recherche d'un médecin qui autorise la procédure, ce qui est exigé de certains États, l'avortement devenait quasiment impossible. Néanmoins, ces lois, bien que votées, pouvaient être renversées grâce à l'arrêt historique de Roe v. Wade. Aujourd'hui, c'est terminé. La dernière barrière de protection a été supprimée.

Depuis l'annonce de la Cour suprême, de nombreux discours médiatiques ont comparé les États-Unis au Canada. Le Canada est alors dépeint de manière très favorable vis-à-vis de son voisin du Sud. Pour autant, cette propension à chanter les louanges du Canada est surtout révélatrice de l'ignorance globale concernant les inégalités qui existent en matière d'accès à la justice reproductive. Au Canada, le droit à l'avortement a été décriminalisé tandis qu'aux États-Unis il a été légalisé. Il s'agit d'une différence majeure en matière de protection. Légaliser signifie d'autoriser l'avortement sous certaines conditions. Si ces conditions ne sont pas respectées, il y a criminalisation. Or, si une loi met en place des conditions drastiques, cela revient dans les faits à rendre l'accès à l'avortement impossible. C'est ce qu'illustre notamment le cas des « Heartbeat Bills ». Au Canada, en 1988, le droit à l'avortement a été décriminalisé avec la décision Morgentaler. Ce qui signifie qu'il est interdit de poursuivre en justice une personne ou un médecin pour avoir pratiqué un avortement. Il est important de noter que la Cour suprême canadienne a également déclaré le fœtus comme n'ayant aucune personnalité juridique. Enfin, le·la géniteur·rice ne peut s'opposer à la décision d'interrompre la grossesse de la personne enceinte. Ce contexte juridique fait du Canada l'un des pays où le droit à l'avortement est parmi le mieux protégé au monde et donc, théoriquement, là où c'est le plus improbable de le renverser.

Décriminaliser sans rendre accessible

Maintenant – et c'est là que le bât blesse –, qui dit droit à l'avortement théorique, ne dit pas pour autant accessibilité en pratique. Depuis des années, des associations de défense du droit à l'avortement tirent la sonnette d'alarme sur le sujet. Des barrières d'accès à l'avortement existent bel et bien au Canada, et elles entravent l'exercice de ce droit. Notamment, parce que l'avortement est traité comme un acte médical comme un autre, chaque province est libre d'en encadrer différemment l'accès. Par exemple, au Nouveau-Brunswick, seuls les hôpitaux sont financés, tandis qu'en Ontario toutes les cliniques ne sont pas entièrement financées, ce qui a été dénoncé comme contraire à la loi selon des associations de défense de droit à l'avortement. Dans ce contexte, la procédure peut être accessible uniquement dans le réseau privé, ce qui pose une barrière économique. De plus, les distances géographiques sont telles que, si seul un établissement offre la procédure pour toute une région, recevoir l'acte médical peut devenir un véritable périple d'organisation. Cela, c'est avant même de prendre en considération l'attente d'accès aux services. La différence d'option est d'ailleurs drastique entre les zones urbaines et les zones rurales, tandis que les localités du Nord sont parmi les moins bien desservies dans tout le pays.

À cela s'ajoute le désengagement public autour de l'avortement. Les groupes de défense peinent à recevoir du financement, tandis que collectivement l'impression de droit acquis se traduit par une perte de mobilisation active. Or, les associations dénoncent depuis quelques années l'augmentation du nombre de groupes antiavortements qui eux disposent de plus de fonds provenant notamment du secteur privé. Certains sont même étroitement liés à des groupes homologues aux États-Unis. Particulièrement bien organisé, le milieu anti-choix ouvre des cliniques d'accompagnement ou encore des lignes d'écoute. Sous le couvert de conseils aux personnes enceintes, iels diffusent des discours antiavortements en jouant sur les mythes qui entourent la grossesse ou encore sur les procédures médicales et la culpabilité des personnes appelantes. Ces mêmes groupes font du lobbyisme politique auprès d'élu·es canadien·nes pour rouvrir le débat sur l'avortement. Des député·es ont même déjà publiquement déclaré leurs intentions de le faire.

Une question de justice reproductive

Enfin, gardons en tête que le droit à l'avortement fait partie, de manière plus globale, du droit à la justice reproductive. Toutes les communautés ne sont pas affectées de la même manière par le manque d'accessibilité, au même titre que toutes les communautés n'ont pas les mêmes droits à disposer de leur corps. Par exemple, des membres issu·es des communautés autochtones ont subi des procédures de stérilisation forcée. Une histoire pour laquelle justice ou même reconnaissance n'a toujours pas eu lieu. De plus, les enfants des communautés autochtones continuent d'être placés en familles d'accueil à un rythme si effréné que des organismes de défense parlent d'un nombre de séparations des familles plus élevé qu'à la période des pensionnats. L'acte médical que représente l'avortement, tout comme l'existence de la contraception, c'est aussi une histoire d'instrumentalisation des corps noirs et racisés. Il s'agit de technologies développées dans d'atroces souffrances et dans le non-respect de la vie d'autrui, notamment des personnes noires mises en esclavage ou encore des personnes issues des communautés pauvres des territoires du Sud global. À cela s'ajoute le fait que les risques de complications de grossesse et d'accouchement sont directement liés aux conditions de traitement médical saturé par le racisme systémique. Enfin, la décision d'avoir des enfants ou non se réduit pour beaucoup à une impossibilité économique. L'enjeu de classe rejoint ainsi celui de race, de genre, mais aussi de capacitisme, puisqu'une partie de la population se voit, encore aujourd'hui, privée du choix d'avoir des enfants sous prétexte de normes eugénistes.

Par conséquent, l'actualité états-unienne constitue certes un développement désastreux pour les droits de toute personne à disposer de son corps, mais faire l'éloge du Canada, c'est ignorer tout le travail qui reste à faire en matière de justice reproductive. C'est également passer sous silence tout un contexte colonial qui produit d'innombrables violences envers de multiples communautés minorisées. Enfin, c'est participer au mythe d'une Amérique du Nord idéale typique de protection des droits, ce que contredisent les centaines d'années de son histoire. Le Canada n'est certes pas les États-Unis, mais cela ne suffit pas à en faire un modèle. La barre n'est pas si basse.

Illustration : Elisabeth Doyon

EN SAVOIR PLUS

Dans le numéro 92 d' À bâbord !, Mat Michaud a fouillé la question de l'accès à l'avortement. Il a d'abord rencontré Marie-Eve Blanchard, cofondatrice des Passeuses, pour aborder les obstacles à l'accès à l'avortement au Québec, et s'est aussi entretenu avec Valérie Tremblay et Sylvie O'Connor du Centre des Femmes de Forestville pour aborder les difficultés d'accès aux services qui sont particulières à la Côte-Nord.
« Avortement : un droit encore à défendre », À bâbord !, no 92, 2022, p. 14
« Accès difficile à l'avortement », À bâbord !, no 92, 2022, p. 52

LUTTER POUR LA DIGNITÉ – Le combat des chauffeurs de taxi haïtiens dans les années 1980

17 juin 2024, par Archives Révolutionnaires
Au début des années 1980, le ressac des luttes sociales, la crise économique et le triomphe politique d’une droite dure entraînent un renouveau de l’exploitation des (…)

Au début des années 1980, le ressac des luttes sociales, la crise économique et le triomphe politique d’une droite dure entraînent un renouveau de l’exploitation des travailleur-euse-s et des divisions au sein de la classe ouvrière. À Montréal, les chauffeurs de taxi d’origine haïtienne[1] subissent des violences redoublées de la part de leurs employeurs et le racisme de nombreux collègues blancs. Rapidement, ces chauffeurs haïtiens s’organisent afin de lutter pour leurs droits, jusqu’à l’explosion de l’été 1983[2].

À partir de la fin des années 1950, l’instauration de la dictature de François Duvalier en Haïti force de nombreuses personnes à l’exil, dont plusieurs intellectuel-le-s et militant-e-s de gauche qui s’installent à Montréal. Au départ, le gouvernement canadien accueille surtout des professionnel-le-s, une situation qui change vers 1972 afin de combler un manque de main-d’œuvre peu ou pas qualifiée dans différents secteurs. Dans les années suivantes, la communauté haïtienne de Montréal est présente dans les domaines de l’éducation et de la santé, mais aussi dans les manufactures et dans l’industrie, par exemple à la fonderie Shellcast, ainsi que dans le domaine du taxi. Cette communauté participe aux luttes de l’époque, qu’elles soient culturelles, politiques ou ouvrières. Malheureusement, avec la décomposition des mouvements de gauche et l’imposition graduelle d’un néolibéralisme intransigeant, les travailleur-euse-s haïtien-ne-s se trouvent de plus en plus isolé-e-s, ouvrant la porte aux attaques patronales et racistes. C’est particulièrement le cas pour les chauffeurs de taxi, un « métier de crève-faim »[3].

Le taxi, « poubelle de l’emploi »

Depuis son apparition au début du XXe siècle, le métier de chauffeur de taxi est très difficile. Coincés entre la situation de travailleurs indépendants ou le monopole de compagnies voraces (dont Taxi Diamond et Murray Hill), les chauffeurs doivent travailler plus de 12 heures par jour, souvent sept jours par semaine, sans sécurité d’emploi. Malgré les luttes des années 1960, menées notamment par le Mouvement de libération du taxi (MLT)[4], les conditions ne sont guère meilleures dans les années 1970, et s’aggravent à nouveau avec la crise économique du début des années 1980. Au Canada, le taux de chômage atteint 12 % en 1983, nuisant fortement à la capacité de négociation des travailleur-euse-s, surtout des plus précaires. De nombreux chauffeurs de taxi indépendants font faillite ou se trouvent obligés de travailler pour les compagnies. Les propriétaires de flotte en profitent pour diminuer les salaires, tout en encourageant les rivalités entre les chauffeurs, notamment selon un principe racial. Les chauffeurs haïtiens subissent une double violence économique et symbolique, tout en étant confrontés au racisme grandissant de plusieurs collègues.

BANQ, Fonds Serge Jongué

Lutter contre un système raciste

De 1978 à 1982, le nombre de chauffeurs d’origine haïtienne à Montréal passe d’environ 300 à plus de 1 000. Pour faire face aux avanies de l’époque, ils créent l’Association haïtienne des travailleurs du taxi (AHTT) en mars 1982, dont le premier geste marquant est de porter plainte auprès de la Commission des droits de la personne du Québec (CDPQ) pour « discrimination raciale dans l’industrie du taxi à Montréal ». Une enquête publique est lancée dès l’été, qui durera plus de deux ans, et qui démontre la structuration raciste du monde du taxi à l’époque. Ainsi, dix des quinze compagnies montréalaises de taxi ont des pratiques indiscutablement discriminatoires, notamment en refusant d’embaucher des chauffeurs noirs, en les licenciant les premiers ou en leur attribuant les zones et les horaires les moins payants. Ces stratagèmes permettent aux compagnies de maximiser leurs profits et entretiennent les divisions entre chauffeurs blancs et noirs, nuisant à leur potentielle coalition. Le racisme fait doublement l’affaire des gros propriétaires qui peuvent aussi s’appuyer sur une négrophobie sociale plus large. Quant à la question du racisme de plusieurs chauffeurs blancs, Antonin Dumas-Pierre analyse bien la situation : « L’agressivité à l’égard du compagnon de travail noir est une réaction commode qui permet d’économiser les frais d’une lutte contre ceux qui font de tous les chauffeurs des crève-la-faim. »[5]

En parallèle des travaux de la CDPQ, les travailleurs haïtiens du taxi appellent à boycotter l’aéroport de Dorval, régi depuis avril 1982 par un nouveau système imposant le paiement d’une redevance annuelle de 1 200 dollars pour pouvoir y travailler et un quota de chauffeurs. Des manifestations sont aussi organisées afin de mettre la pression sur les propriétaires de flotte et le gouvernement. Le 28 juin 1983, avec l’appui de la Ligue des Noirs du Québec (LNQ), les chauffeurs se rassemblent devant le Palais de justice de Montréal (rue Saint-Antoine). En juillet, ils manifestent devant le siège social de la Coop de l’Est dans le quartier de Montréal-Nord, une corporation qui refuse d’embaucher des chauffeurs noirs. En août, ces derniers participent à une grande manifestation dénonçant le racisme dans l’emploi et l’éducation, ainsi que le harcèlement policier au Québec. Ces mobilisations portent fruit, alors que la question du racisme systémique dans le taxi et dans la société québécoise fait les manchettes durant tout l’été, provoquant une véritable « crise du racisme ». Pourtant, le combat se poursuit afin de traduire cette visibilité en gains concrets pour les travailleurs d’origine haïtienne.

Un taxi à Montréal (1982). Image Radio-Canada.

Quelques victoires, et quelques luttes encore à mener

Une première étape est franchie en novembre 1984 lors du dépôt du rapport final de la Commission d’enquête qui reconnaît et documente le racisme structurel dans le milieu du taxi[6], en imposant notamment une amende à la Coop de l’Est. En mars 1985, un « comité de surveillance » est mis sur pied, alors que la création du Bureau du taxi de Montréal (BTM) en 1986 consolide les acquis des chauffeurs, en mettant en place des mesures diminuant l’hégémonie des compagnies de taxi et leur pouvoir discrétionnaire sur les chauffeurs, dont ceux issus de l’immigration. Mais ces gains sont partiels puisque le cadre légal mis en place tend à individualiser le problème du racisme tout en se montrant frileux à trop empiéter sur le sacro-saint droit des propriétaires de gérer leur flotte à leur guise. Le manque de structures permettant aux chauffeurs de s’organiser collectivement pour défendre leurs intérêts demeure un obstacle important pour lutter contre les discriminations et l’exploitation économique. En somme, les luttes des chauffeurs haïtiens ont rompu le silence autour des violences racistes qu’ils subissaient et ont débouché sur un cadre légal plus avantageux, mais n’ont malheureusement pas permis une réorganisation du monde du taxi qui aurait brisé le cercle de l’isolement et de la pauvreté des chauffeurs.

Quarante ans plus tard, il est important de se rappeler le combat des travailleurs haïtiens du taxi, le contexte dans lequel ils ont lutté et les stratégies qu’ils ont développées. Nous devons être sensibles au fait que les crises économiques demeurent un contexte de réajustement pour les capitalistes et que les propriétaires, comme ce fut le cas dans les années 1980, profitent de ces moments pour réimposer des conditions d’exploitation abusives aux travailleur-euse-s et s’attaquer aux organisations ouvrières. Dans ce contexte, le racisme est un outil de prédilection pour paupériser et diviser. La seule réponse à de telles situations de crise et de racisme demeure l’auto-organisation, sur le modèle par exemple de l’AHTT. Par contre, il demeure essentiel que de tels groupes soient en mesure de forger des alliances larges, tout en luttant sur les plans économiques et politiques. De tels résultats n’ont guère pu être obtenus dans le contexte difficile des années 1980, suivant le paradoxe selon lequel les situations les plus accablantes nécessitent les organisations les plus fortes. Puisque les crises du capitalisme sont cycliques, il faut nous préparer et garder nos communautés mobilisées pour la lutte contre les exploiteurs et pour l’égalité.

Archives du CIDIHCA

Notes

[1] Le masculin est employé pour désigner les chauffeurs de taxi, quasi exclusivement des hommes à l’époque.

[2] Cet article est la version en ligne, avec images, d’un article paru dans le numéro 97 de la revue À Bâbord !

[3] À ce sujet, voir WARREN, Jean-Philippe. Histoire du taxi à Montréal, Montréal, Boréal, 2020.

[4] À ce sujet, voir : https://archivesrevolutionnaires.com/2019/05/04/mouvement-de-liberation-du-taxi/

[5] Cité par WARREN. Histoire du taxi, page 286, note 34.

[6] Le rapport final de l’Enquête sur les allégations de discrimination raciale dans l’industrie du taxi à Montréal comprend trois volumes qui détaillent tous les aspects de ce racisme structurel.

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Alors qu'il n'avait pas daigné aborder la question des immigrants temporaires lors de la consultation sur la planification pluriannuelle de sa politique migratoire, le gouvernement Legault cible les travailleurs et les travailleuses migrantes temporaires comme la source de tous les maux de la société québécoise.

La réalité de l'immigration dans le monde d'aujourd'hui

« Les migrations constituent un phénomène propre aux sociétés humaines, mais qui ont pris des formes différentes à différentes périodes de l'histoire. À l'heure où les conflits se multiplient, où les inégalités et l'exclusion sociale atteignent des sommets et où l'environnement se dégrade à grande vitesse, il est totalement illusoire d'imaginer que les flux migratoires baissent ou diminuent. » [1]. Ces situations du sud global sont les résultats et les conséquences d'une politique de pillage.

La situation internationale actuelle provoque le déplacement de populations où se concentrent les conflits (Asie, Afrique et Proche-Orient) et où la misère est le lot d'une bonne partie de la population (Amérique centrale et du Sud). Si ce sont les pays du Sud qui accueillent une bonne partie des migrant-es, l'Europe et l'Amérique du Nord reçoivent une bonne partie des populations qui se déplacent.

La montée des migrations s'explique par le fait que des personnes ne trouvent pas la possibilité de vivre dignement là où elles se trouvent. Si on ajoute aux causes économiques et sociales les conséquences de la crise climatique sur les déplacements des sociétés humaines, l'attitude la moins réaliste est celle du refus de se préparer et de planifier les déplacements de population qui s'annoncent.

Une politique de l'immigration choisie pour les besoins du capital

La réponse des dirigeant-es des pays du Nord a été de limiter l'immigration à celle choisissant de répondre aux besoins économiques des entreprises et à l'accueil parcimonieux des demandeur-euses d'asile d'une part et de transformer leurs pays en véritables forteresses contre les immigrant-es qui ne correspondent pas aux normes satisfaisant aux besoins du capital. Les dirigeant-es politiques de ces pays ont cherché à couvrir ces politiques antihumanistes par une démagogie relevant de la xénophobie et du racisme.

La politique migratoire de la CAQ s'est toujours inscrite dans des orientations néolibérales

La politique migratoire de la CAQ vise non seulement à un arrimage serré de l'immigration avec le marché du travail, mais surtout à répondre de plus en plus étroitement aux besoins des entreprises. Elle a visé à favoriser l'immigration en région, ce qui a plus ou moins fonctionné car 85% des immigrant-es s'établissent dans la grande région de Montréal.

Si les demandeur-euses d'asile ne sont pas sous leur responsabilité, le gouvernement de la CAQ trouve que le Québec reçoit trop de ces réfugié-es par rapport aux autres provinces et souhaite un rééquilibrage à ce niveau. Mais il souhaite également que le gouvernement fédéral établisse des critères plus restrictifs pour diminuer l'accueil de réfugié-es. Le gouvernement Legault veut diminuer le nombre de réfugié-es que reçoit le Québec.

Il souhaite faire de la connaissance du français une condition de l'acceptation de personnes demandant l'immigration permanente. Mais il souhaite aussi maintenant que cette exigence touche également les travailleurs et travailleuses temporaires.

Le gouvernement de la CAQ a toujours utilisé la crainte de l'immigration pour se créer une rente électorale

Aux élections de 2018, la CAQ à proposé de réduire les seuils d'immigration (permanente) à 40 000 personnes par année. Ce parti a défendu qu'il fallait augmenter la part de l'immigration économique choisie aux dépens du regroupement familial et de l'immigration des demandeur-euses d'asile. Pour s'assurer de la réalisation de ces objectifs et faire la preuve de son nationalisme, il a demandé le transfert de tous les pouvoirs en immigration dans les mains du gouvernement du Québec.

Aujourd'hui, il reprend la même chanson. Alors qu'il est responsable d'une bonne partie de la politique migratoire et de la situation des personnes migrantes, il veut faire du gouvernement fédéral le responsable de la montée de l'immigration des travailleurs et travailleuses temporaires, alors qu'il a été lui-même le principal responsable de cette politique qui visait à répondre aux besoins de certains secteurs de l'économie. C'est son gouvernement qui a laissé se développer une immigration de travailleurs et de travailleuses temporaires dont les droits et la protection sociale ne sont pas au rendez-vous dans les secteurs des travaux agricoles, dans l'hôtellerie, la restauration, la transformation alimentaire, la construction et le commerce de détail. Cette politique a assigné ces travailleurs et travailleuses migrantes à un segment surexploité et précarisé du marché du travail [2]

Ces travailleurs-euses temporaires sont l'objet d'une exploitation éhontée. Ils vivent des conditions de travail difficile. Ils sont souvent liés par leur permis de travail à un patron particulier qui peut jouer de leur statut pour les menacer de les retourner dans leur pays d'origine. Leur statut ne leur permet pas d'aspirer à une résidence permanente et ils sont privés de droits fondamentaux. Comme personnes souvent racisées, ils et elles subissent des discriminations raciales.

Legault place la responsabilité des problèmes de la société québécoise sur les dos des personnes migrantes

« Quand on n'est plus capable de loger des familles, quand on n'est plus capable de scolariser des enfants, quand on n'est plus capable d'avoir accès à des services de santé, qu'on n'est plus capable de freiner le déclin du français, on est dans une situation d'urgence », a dit M. Legault. [3]

Ce sont des propos irresponsables. Le premier ministre Legault fait un lien entre l'immigration et à peu près tous les dossiers imaginables comme l'affirmait la députée de Québec solidaire, Christine Labrie. Le trop grand nombre d'immigrant-es serait responsable de la crise du logement, de la pénurie d'enseignant-es, des difficultés d'accès aux services de santé ou de garderies. Même le développement de l'itinérance aurait pour cause le nombre de personnes migrantes en territoire québécois. Et sans doute que le nombre de personnes migrantes serait aussi la cause du déclin du français. Ce sont là des propos démagogiques qui simplifient la réalité des problèmes, rend plus difficile d'identifier les sources véritables des problèmes et bloque les voies de leur dépassement.

Cette démagogie contre les personnes migrantes les plus précaires, permet au premier ministre d'escamoter les problèmes véritables comme la concentration de la richesse, le sous-investissement en santé et en éducation, une offre de logements qui ne répond pas aux besoins de la population, l'inflation liée à la volonté des monopoles de faire le maximum de profits en haussant les prix, le refus des plus riches de payer leur juste part, l'urgence de se mobiliser contre la crise climatique, etc.

Les discours des partis d'opposition

Le PLQ n'a qu'une préoccupation. Défendre une politique d'immigration choisie pour répondre aux besoins du patronat. Pour ce qui est de l'élargissement des droits des demandeurs-euses d'asile ou de l'amélioration des conditions de travail de travailleurs et travailleuses temporaires, cela n'entre pas dans le cadre de ses réflexions. Ce parti ne se préoccupe pas de la régularisation des sans-papiers. Car l'existence de ces derniers permet d'offrir au patronat une main-d'œuvre sans droits.

Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon avait tenu à plusieurs reprises des propos faisant des personnes migrantes les causes des problèmes de la société québécoise.

Aux dernières élections québécoises, il s'était montré le plus résolu sur la limitation des seuils pour l'immigration permanente à 35 000 personnes par année.

Durant la dernière campagne électorale, Québec solidaire n'a malheureusement pas rompu avec une vision utilitariste et nationaliste d'une politique migratoire. Il a proposé essentiellement de mettre en place une série de mesures pour favoriser l'installation des personnes migrantes en région. On aurait pu s'attendre à une critique de l'ensemble de la politique du gouvernement Legault en immigration et à une rupture avec la logique utilitariste brimant les droits des personnes migrantes, mais tel n'a pas été le cas. Il a joué le jeu de la nécessité d'un quota. Le moins que l'on puisse dire, c'est que QS s'est positionné en deçà des revendications de nombre d'organisations communautaires et syndicales et n'a pas rompu avec la logique des seuils.

En janvier dernier, Québec solidaire rentrait dans le jeu de stigmatiser le trop grand nombre d'immigrant-es. 528 000 immigrants temporaires c'est trop, a déclaré Gabriel Nadeau-Dubois [4] Dénoncer les conditions de vie et de travail qui leur sont faites est une chose, mais viser leur nombre sans préciser le chemin de leur régularisation en est une autre. À ce niveau également, des débats sérieux devront être menés dans Québec solidaire.

Donner une réponse humaniste aux migrations

Les migrations vont se faire. Les politiques migratoires ne peuvent se résumer à des politiques basées sur l'immigration choisie. Mais il faut éviter les migrations clandestines qui feront qu'une partie significative de la population se retrouverait sans papiers et sans droits, à la merci des décisions arbitraires des autorités et des patrons.

Pour éviter cela, il faut ouvrir les frontières et réguler l'immigration à partir de constats précis : la migration est une richesse et le contrôle des frontières est inefficace et contre-productif. L'ouverture des frontières ne signifie pas que les flux migratoires ne sont pas régulés, mais que cette régulation se fait à partir des conditions et des principes qui affirment que les immigrant-es sont une richesse et que fermer les frontières est inefficace et inhumain. Ces personnes sont un apport au niveau économique, social et culturel, car elles sont porteuses d'une diversité qui enrichit la société qui les accueille.

En somme, il faut défendre l'égalité des droits : droit de s'installer durablement, de travailler, de recevoir un salaire égal pour un travail égal, d'acquérir la nationalité et de voter.

Adopter une telle attitude, c'est faire primer les droits de la personne sur les besoins du capital et dépasser une immigration conforme aux seuls intérêts des grandes entreprises. Agir ainsi, c'est empêcher que se développe une population d'étranger-ères de l'intérieur avec toutes les paniques identitaires qui s'y rattachent. Face aux crises qui taraudent la planète et qui provoqueront une accélération des migrations, il faut prendre le problème à bras le corps et le faire dans une perspective radicalement humaine.

Des revendications concrètes pour opérationnaliser ces orientations :

Toute une série de revendications a été avancée par les organisations syndicales, populaires et antiracistes. Nous n'en mentionnons ici que quelques-unes. Elles indiquent la voie des luttes concrètes qu'il faut mener pour que la liberté de circulation et d'installation puisse se concrétiser. Il faut :

• arrêter les expulsions et les emprisonnements des immigrant-es
• régulariser les sans-papiers pour éviter de bâtir des couches surexploitées de personnes sans droits à l'intérieur du Québec
• mettre fin aux permis de travail fermés
• adopter des mesures facilitant l'accès à la résidence permanente
• élargir l'accueil de réfugié-es et la réunification familiale.

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[1] Olivier Bonfond, il faut tuer TINAN, 200 propositions pour rompre avec le fatalisme et changer le monde, Édition du Cerisier, 2017, p. 311

[2] Marie-Hélène Bonin, Le Québec, de terre d'accueil à club privé, Nouveaux Cahiers du Socialisme, no.27, hiver 2022

[3] Hugo Pilon-Larose, La Presse, 10 juin 2024

[4] François Carabin, La Presse canadienne, 25 janvier 2024

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Le consensus médiatique à la suite du Conseil national de Québec solidaire tenu du 24 au 26 mai dernier à Jonquière est que la crise interne du parti est résorbée alors que le porte-parole masculin et chef parlementaire, Gabriel Nadeau-Dubois, en est sorti gagnant en faisant adopter sa ligne « pragmatique » visant à faire de QS « un parti de gouvernement ».

Or, si l'aspect spectaculaire de la crise interne, fait de déclarations et lettres dissidentes dans les médias, est terminé, la réalité est qu'une dissidence vocale et bien organisée s'est non seulement exprimée au CN mais a réussi à obtenir des gains mineurs qui sont autant de balises à partir desquelles la lutte interne se poursuivra contre l'orientation dite « pragmatique ».

Dissidence organisée et vocale

Il faut se rappeler que la crise interne a éclaté le 29 avril avec la démission fracassante et publique de la porte-parole féminine, Émilise Lessard-Thérien, soit moins de quatre semaines avant la tenue du CN. La crise a pris toute une autre tournure quand le chef parlementaire deux jours plus tard a lancé un ultimatum à l'effet que QS devait adopté une posture pragmatique afin de devenir « un parti de gouvernement » ou bien il pourrait reconsidérer son parcours politique. [1] Un tollé public et interne s'en est suivi durant lequel on a pu observer l'émergence de trois réseaux de dissidence dans le parti. Un premier constitué autour de la Commission nationale des femmes (CNF) accusant le chef parlementaire d'avoir centralisé le pouvoir autour de sa personne et d'avoir muselé sa co-porte-parole ainsi que l'ex députée Catherine Dorion. Un deuxième réseau provenant de militants et militantes des régions très fortement déçus du départ d'Émilise. Et finalement, un réseau de gauche voulant faire de QS un parti anti-capitaliste, démocratique et proche des mouvements sociaux.

Or, le défi était de coordonner ces divers réseaux pour que s'exprime de façon cohérente l'opposition à l'orientation prônée par le chef parlementaire. Ce défi était de de taille car la direction du parti a refusé obstinément de tenir un débat ouvert sur la stratégie du parti forçant les discussions sur un terrain qu'elle avait balisé elle-même soit la Déclaration de Saguenay et la proposition de réécriture du programme du parti. La stratégie adoptée par la dissidence a été de recadrer la Déclaration de Saguenay pour qu'elle ne soit plus le socle d'un nouveau programme, telle que le désirait la direction, mais plutôt la synthèse d'une tournée de régions sans incidence programmatique. Quant à la refonte du programme, la dissidence a réussi à éliminer les mots « modernisation » ou « réécriture » pour y substituer le terme de « réactualisation ». Ce sont là de modestes gains, qui du point de vue externe ou des médias apparaissent très limités, mais leur signification est ailleurs. C'est à l'interne qu'il faut mesurer leur impact.

Quatre terrains de lutte

Pour la première fois depuis trois ans un courant d'opposition articulé et public s'exprime à l'encontre de la stratégie de recentrage politique électoraliste, et de personnalisation autour du porte-parole masculin, que pratique la direction du parti. Au lieu de ressortir aigrie et déçue du dernier Conseil national, la dissidence, bien au contraire, désire se préparer à mener une lutte de lignes prolongée au sein de Québec solidaire.

Quatre terrains de luttes s'ouvrent devant ce courant d'opposition. Le premier terrain est celui de la campagne pour le choix d'une nouvelle porte-parole féminine de QS qui s'annonce dès septembre. Ce sera l'occasion idéale pour rappeler les critiques formulées tant par Émilise que Catherine Dorion portant sur la centralisation du pouvoir autour de GND et du muselage des voix féminines dissidentes, et pour exiger l'égalité en fait de la porte-parole féminine avec le porte-parole masculin. Certaines militantes veulent soulever à cette occasion l'idée de l'alternance homme-femme afin que la nouvelle porte-parole féminine soit la représentante du parti au débat des chefs lors de la prochaine campagne électorale.

Le deuxième terrain est celui de la refonte du programme. Bien que la direction tentera par tous les moyens à limiter et circonscrire ce travail à des comités ou instances qu'elle peut contrôler, la dissidence doit au contraire proposer des lieux de débats larges et démocratiques, se tenant dans toutes les régions, afin que les membres à la base et les sympathisants puissent participer à ce processus. Sur le fond de la question, alors que nous savons fort bien que la direction cherche à éliminer les références au dépassement du capitalisme ainsi qu'au propositions de nationalisations, il faudra formuler nos propres propositions de réactualisation du programme afin de renforcer son caractère de rupture avec le système actuel.

La troisième piste de travail est la modification des statuts devant être discutée au congrès de novembre prochain. Il faut s'assurer que les mécanismes démocratiques et participatifs de QS soient renforcés et non amoindris par la vision d'un parti centralisé et dominé par son aile parlementaire, que l'on tentera de nous imposer.

Et finalement, le quatrième terrain de lutte portera sur l'organisation interne de la dissidence afin qu'elle puisse s'exprimer tant dans les structures de base du parti (associations locales et régionales, réseaux militants) que les comités de travail nationaux (commission politique, commission des femmes) avec comme objectif d'être fortement représentée dans les futurs congrès et conseils nationaux. Un élément important sera l'articulation de la vision politique (anti-capitaliste, féministe, écologique et démocratique) de cette dissidence afin qu'elle puisse s'exprimer de façon cohérente et gagner des appuis au sein de QS.

D'ores et déjà nous pouvons affirmer que l'opposition actuelle présente quelque chose de nouveau dans Québec solidaire. Alors que par le passé, les débats intenses qu'a connu le parti portaient sur des questions particulières comme les alliances électorales avec le PQ, la position sur la loi 21 et notre vision de la laïcité ou bien la fusion avec Option Nationale, la lutte actuelle porte sur la stratégie globale de Québec solidaire. Au centre du présent débat est la question brulante de l'avenir du parti. Sera-t-il une formation électoraliste, social-démocrate, orientée vers la gouvernance du système actuel ou bien un authentique parti des urnes et de la rue, proche des mouvements sociaux et des classes populaires, voulant transformer en profondeur et radicalement la société québécoise ? Une authentique lutte de lignes est engagée dans Québec solidaire.

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[1] Voir l'entrevue avec Gabriel Nadeau-Dubois publiée par Radio-Canada le 1er mai 2024, https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2069414/gabriel-nadeau-dubois-avenir-quebec-solidaire

Video de la manifestation de la Coalition du Québec URGENCE Palestine du 8 juin 2024

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Laval dans les cauchemars de Jeff Bezos

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Hydro-Québec, base de notre indépendance

11 juin 2024, par Martine Ouellet, Robert Laplante — , ,
Samedi le 8 juin dernier, le Mouvement Québec Indépendant organisait une conférence sur la politique énergétique du gouvernement de la CAQ. « Aujourd'hui on assiste à un (…)

Samedi le 8 juin dernier, le Mouvement Québec Indépendant organisait une conférence sur la politique énergétique du gouvernement de la CAQ. « Aujourd'hui on assiste à un mouvement inverse où s'accélère le processus de privatisation de notre production électrique. Alors que la question de l'indépendance revient à l'avant-scène politique en vue de l'élection de 2026, peut-on faire l'indépendance en continuant ainsi de dilapider notre principale richesse naturelle ? Poser la question c'est y répondre. »

Nous avons retenu deux présentations : celle de Robert Laplante qui a brossé l'historique du « processus de privatisation et qui en a souligné les impacts négatifs majeurs » et celle de Martine Ouellet qui a mis « en évidence le front de résistance en train d'émerger actuellement en faveur du maintien d'Hydro-Québec sous le contrôle public. »

Nous publions ci-dessous les fichiers audios de ces deux interventions :
      • Robert Laplante

      • Martine Ouellet

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Northvolt : Les citoyen.nes s’organisent

11 juin 2024, par Comité Action Citoyenne - Projet Northvolt — , ,
Le Comité Action Citoyenne - Projet Northvolt, un groupe de citoyennes et citoyens bénévoles ayant à cœur, comme vous tous, de protéger la SANTÉ, la VIE et le VIVANT, vient de (…)

Le Comité Action Citoyenne - Projet Northvolt, un groupe de citoyennes et citoyens bénévoles ayant à cœur, comme vous tous, de protéger la SANTÉ, la VIE et le VIVANT, vient de lancer une campagne de sociofinancement. Notre objectif est de recueillir 20 000$.

2024/06/05 | Par Collectif

Les fonds serviront dans un premier lieu à ce que des prises d'échantillons citoyens, sous la supervision d'un expert, soient faites selon les méthodes scientifiquement reconnues et que ces échantillons soient analysés par un laboratoire indépendant, afin que l'entreprise et le gouvernement n'aient d'autre choix que de reconnaître les résultats.

Cette levée de fonds vise aussi la création d'un fonds générationnel pour assurer une surveillance citoyenne pour la santé et le bien être des générations à venir, car cette surveillance citoyenne devra avoir lieu sur une base continuelle pour de nombreuses décennies

Dans un deuxième temps ces fonds serviront à consulter un avocat spécialisé en droit municipal afin de savoir exactement comment et pourquoi le droit fondamental à un référendum nous a été enlevé et comment nous pouvons être assuré.es que les décisions présentes et futures dans le projet en cours, suivent les procédures normales et surtout légales. Nous voulons aussi obtenir les avis légaux nécessaires pour que la démocratie de notre société soit respectée et protégée.

Nous avons besoin de votre soutien afin de protéger notre source d'eau potable. Pour contribuer, cliquez ici.

https://www.gofundme.com/f/un-appel-du-coeur-pour-la-sante-et-le-respect-de-nos-droits?qid=38b0920f26def70e432c1a901

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