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Entre l’OLP et le Hamas, les chaises musicales de la troisième voie palestinienne

Cette réflexion m'a été inspirée par la lecture du texte d'Adam Shatz publié le 31 octobre par Orient XXI et intitulé « Gaza, Les pathologies de la violence [1] » et de la réponse que lui a faite le 8 novembre Abdaljawad Omar sous le titre « Les pathologies de l'espoir dans la guerre pour la Palestine [2] ». Elle prend surtout pour point de départ la réplique de A. Omar qui, se saisissant de l'approche faite par Shatz de la violence anticoloniale, tente de la dépasser en dessinant à grands traits les objectifs stratégiques qu'elle sert. A. Omar conteste une approche de la violence exercée par la résistance palestinienne le 7 octobre en tant que phénomène épuisant tout son sens dans ses seules modalités, supposées d'ailleurs sans aucune certitude, et relevant de ce fait d'un simple jugement fondé sur les critères de la « normalité » et de la « pathologie ».
Tiré d'Algeria-Watch.
Il relève que Shatz propose « trois grands énoncés polémiques : « les pathologies vengeresses » des Israéliens et des Palestiniens « reflétant les mêmes instincts primordiaux » ; une critique de « la « gauche décoloniale », qu'il accuse de fermer les yeux sur les « crimes » commis par les colonisés et de se réjouir de manière puérile de la mort des civils » ; « l'utilisation d'analogies historiques » rapprochant les événements du 7 octobre avec « un épisode oublié de la guerre de libération algérienne : la bataille de Philippeville ».
Une négation de la rationalité de la violence révolutionnaire
A propos des événements de Skikda (ex. Philippeville) du 20 août 1955, Shatz écrit :
« Encerclé par l'armée française, craignant de perdre du terrain au profit des politiciens musulmans réformistes favorables à un règlement négocié, le Front de libération nationale (FLN) lança alors une attaque féroce dans la ville portuaire de Philippeville et ses environs. Des paysans armés de grenades, de couteaux, de gourdins, de haches et de fourches massacrèrent — parfois en les éventrant – 123 personnes, principalement des Européens, mais aussi un certain nombre de musulmans. Pour les Français, ces violences étaient purement gratuites, mais dans l'esprit des auteurs de ces actes, il s'agissait de venger les massacres à Sétif, Guelma et Kherrata de dizaines de milliers de musulmans par l'armée française, appuyée par des milices de colons, après les émeutes indépendantistes de mai 1945 ».
Réfutant la comparaison du 7 octobre avec le 20 août 1955, A. Omar réplique que « l'objectif principal de la bataille de Philippeville était de cibler les civils, et supposer que c'était l'objectif principal du 7 octobre revient à ignorer les faits ».
Dans cet échange d'interprétations, il est clair que Shatz n'invoque le 20 août algérien que pour appuyer la thèse de la vengeance qu'il développe à propos du 7 octobre, alors que A. Omar ne réfute la comparaison que pour écarter l'idée de vengeance à propos du 7 octobre. Moyennant quoi, tous les deux font une appréciation erronée des motifs et des enjeux du 20 octobre 1955 et retiennent en substance que l'insurrection visait les civils européens.
Or, cet accord sur le récit du 20 août constitue en lui-même une adhésion objective à la lecture coloniale de la violence révolutionnaire pendant la guerre d'Algérie mais aussi, potentiellement, une caution apportée par les deux auteurs à la lecture stigmatisante de la violence des colonisés que l'on applique actuellement selon les mêmes standards aux événements du 7 octobre. C'est dire que, en acceptant l'idée de Shatz selon laquelle l'ALN avait visé les civils, A. Omar, malgré ses dénégations, concède en creux que la grille de lecture vaut pour le 7 octobre.
On peut en effet observer que la surenchère actuelle focalisant sur un 7 octobre voué par le Hamas à des « atrocités contre les civils » est en train d'être gravée en temps réel dans le marbre de l'histoire et que cette version risque de n'en être plus jamais effacée, exactement de la même manière que l'histoire du 20 août 1955 demeure à jamais dans la mémoire sélective et révisionniste des Français celle du massacre de 123 civils européens.
C'est donc une erreur aux conséquences théoriques et pratiques graves que A. Omar commet, préoccupé qu'il est de disculper les combattants palestiniens, en concédant que l'insurrection du 20 août était une attaque contre les civils.
Il est en effet contraire à la réalité et nuisible à la représentation des luttes de libération nationale de considérer que la violence mise en œuvre puisse être stratégiquement plus ou moins rationnelle dans un cas que dans l'autre.
L'instinct de vengeance primaire est absent de l'insurrection du 20 août autant que de l'attaque du 7 octobre. Mais, comme il n'existe un semblant d'accord entre les deux auteurs que sur les motivations du 20 août, A. Omar s'opposant à Shatz sur les motivations du 7 octobre, il nous faut d'abord examiner les éléments qui réfutent leur lecture sinon identique du moins convergente du 20 août.
La dimension stratégique de l'insurrection du 20 août 1955
La seule part de vérité que l'on peut déceler dans l'affirmation de Shatz selon laquelle l'insurrection du 20 août avait pour moteur la volonté populaire de venger les massacres du 8 mai 1945, réside au mieux en ceci que c'était là un argument de mobilisation tout trouvé parmi d'autres pour le chef de la zone 2 de l'ALN, Zighout Youssef. On aurait pu supposer qu'il en fût autrement si les masses paysannes s'étaient révoltées de manière spontanée et anarchique. Tous les rapports de l'époque indiquent le contraire : l'initiative avait été prise par l'ALN et la population, sommairement armée, était rigoureusement encadrée par des djounouds dans les assauts qu'elle a lancés dans plusieurs villes de la région. Zighout poursuivait de ce fait un objectif stratégique lié à l'actualité de la lutte lancée le 1er novembre 1954 et non pas un dessein associé au passif sanglant de mai 1945. Sans qu'il soit nécessaire de s'attarder sur ce point qui a été suffisamment exploré par les historiens, il suffit de rappeler que, d'une part, il voulait remédier à l'isolement dans lequel se trouvaient les combattants de la zone 2 dans un contexte où l'armée de libération n'était pas encore structurée au niveau national, que, d'autre part, l'armée d'occupation s'efforçait d'empêcher toute jonction que l'ALN tenterait avec des milieux influents de la population algérienne et que, enfin, les couches paysannes, dépossédées par la colonisation et potentiellement favorables à la lutte, échappaient encore à son encadrement. C'est ce statu quo, que le 1er novembre n'avait pas ébranlé, qu'il fallait faire évoluer. L'objectif de Zighout était en définitive foncièrement rationnel, à la fois militaire et politique.
Et cela devait se confirmer, dans l'exécution, par le fait que l'attaque contre les civils ne constituait pas l'essentiel de l'action qui ne les a visés qu'en tant que composante des centres de colonisation, agricoles et industriels (notamment la mine de pyrite d'El Hallia), alors qu'étaient visés simultanément les bases et cantonnements des forces de la répression : le camp militaire d'El Khroub et les locaux de la police de Skikda furent entre autres lieux le théâtre de combats acharnés.
C'est une insurrection contre la colonisation, civile et militaire, c'est-à-dire contre le système colonialiste dans son essence et dans sa logistique militaro-policière, qu'a connue le 20 août 1955. Les attaques ont été planifiées pour donner tout son sens à l'objectif de lutte armée de libération nationale. Et, si des civils européens en ont été victimes, ce fut au prix du sacrifice consenti au centuple par les masses algériennes. L'implication des deux populations civiles devait d'ailleurs porter le message que la guerre de libération ne pouvait être qu'une guerre totale, avec la certitude déjà acquise que l'ALN et le peuple n'avaient pas d'autre choix que d'être dans le même camp pour faire pièce à la solidarité organique existant entre les colons et l'armée française qu'avait illustrée la coordination entre les militaires et les milices civiles dans les exactions de mai 1945. S'il y a bien un lien entre les événements de 1945 et ceux d'août 1955, comme le soutient Shatz, il ne tient nullement du désir de vengeance mais de l'expérience tirée par la société et les combattants algériens.
Cette expérience ne laissait d'ailleurs aucun doute sur le fait que la répression colonialiste serait terrible et elle le fut (12.000 personnes massacrées, des villages et des douars entièrement rasés). Mais les historiens s'accordent à considérer que les objectifs de l'insurrection furent atteints. Comme le relève Gilbert Meynier, « désormais le peuple était solidaire d'une ALN qui avait gagné en prestige. Le FLN représentait légitimement le peuple ; et le mythe de l'intégration avait volé en éclat [3] ».
Telle est la juste appréciation des objectifs et des acquis de l'insurrection du 20 août qui nous permet de réfuter l'appréciation qui en est faite par Shatz et par A. Omar, l'un, par assimilation, dans sa volonté d'étayer sa thèse du mobile irrationnel de l'attaque du 7 octobre, et l'autre, par différentiation, dans son intention de soutenir le contraire.
Un déficit de sens historique
Tous deux pêchent ainsi par simplification et par un déficit commun de sens historique que dénote le fait qu'ils semblent s'accorder à dire que « la bataille de Philippeville » est « un épisode oublié de la guerre de libération algérienne ».
Pour en revenir à notre propos sur l'opération Déluge d'Al Aqsa, il convient de relever toute la différence qui existe entre les deux approches. Alors que celle de Shatz épuise son propos dans l'examen des mobiles, celle d'A. Omar tente de s'approfondir par l'exploration des aspects tactique et stratégique.
L'auteur est beaucoup plus affirmatif dans l'interprétation qu'il propose du dispositif tactique et ce, après avoir mis en doute la version israélienne de l'attaque qui la représente comme une expédition barbare dirigée contre les civils et qui est reprise sans recul critique par Shatz :
« Les informations disponibles, écrit-il, permettent de supposer que l'opération du 7 Octobre avait trois objectifs tactiques principaux : capturer des soldats israéliens en échange de prisonniers, obtenir des informations ou des armes à partir des nombreuses bases militaires israéliennes et faire en sorte qu'aucune force policière ou militaire ne puisse facilement nettoyer et reprendre l'enveloppe de Gaza (ce qu'elle ferait probablement en négociant les otages qu'elle détient dans les colonies situées à l'intérieur de l'enveloppe de Gaza) ».
S'agissant de l'aspect stratégique de l'opération, il s'inscrit en faux contre l'analyse résolument nihiliste de Shatz mais sans en tirer des perspectives suffisamment affirmées. Il écrit :
« Pourquoi une attaque contre le nerf principal d'Israël – sa dissuasion et sa puissance militaire – ne conduirait-elle pas à une leçon d'humilité qui pourrait ouvrir d'autres voies pour une nouvelle solution politique ? Si de telles perspectives semblent lointaines dans le feu de l'action et des intentions génocidaires d'Israël, c'est la bataille réelle sur le terrain qui décidera de l'avenir ».
Ainsi suggéré sur le mode interrogatif, l'enjeu stratégique évoqué est par ailleurs formulé d'une façon qui trahit l'hésitation de l'auteur entre le plan militaire et le plan politique. Et il est évident que le seul test d'évaluation qui vaille se situe au niveau politique : quel profit attendre de l'attaque qui soit suffisamment important pour que se justifient tant soit peu les sacrifices qu'elle ne pouvait manquer d'exiger de la population de Gaza ?
• Omar effleure la réponse à cette question sans paraître vraiment s'en aviser dans un paragraphe précédent sa formulation : ayant exprimé le jugement sommaire qu'il porte sur l'insurrection du 20 août pour contester toute similitude qu'elle aurait avec le 7 octobre, il nuance son propos en écrivant plus loin que « l'une des conséquences les plus importantes de la bataille de Philippeville a été de mettre fin aux perspectives d'un mouvement de « troisième voie » qui liait les Arabes algériens aux colons français ». Ce faisant, il restitue en partie à l'événement une dimension stratégique qu'il avait d'abord niée, même s'il laisse ainsi entendre que cette « conséquence » a été obtenue sans avoir été préalablement pensée, c'est-à-dire comme une prime fortuitement ajoutée à l'objectif recherché qui était selon lui de « viser les civils ». Mais, de toutes façons, il ne concède à l'insurrection du 20 août ce résultat stratégique que pour mieux opposer la conjoncture politique algérienne à la situation actuelle en Palestine puisqu'il ajoute : « En Palestine, cette troisième voie a pris fin il y a deux décennies, devenant une coalition très faible soutenue par quelques organisations de défense des droits de l'homme et des voix minoritaires en Israël ».
• Et je crois que c'est là qu'il commet une erreur conséquente sur la situation palestinienne actuelle qui l'empêche d'apercevoir les enjeux politiques de l'opération du 7 octobre [4].
La 3e voie palestinienne : une menace en cours de réalisation avancée
Il existe en effet bel et bien en Palestine la menace, en cours de réalisation avancée, que le mouvement national succombe à une captation opérée par une troisième voie. Ce qui distingue cette problématique en Palestine par rapport aux précédents historiques des luttes de libération nationale, et notamment le précédent algérien, c'est que, d'une part, la résistance a semblé avoir conjuré ce risque relativement tôt lorsque le Fatah avait dégagé la cause palestinienne de la gangue stérile du conflit israélo-arabe en 1968, mais que, d'autre part, la trajectoire de la résistance qu'il a menée par la suite sous l'enseigne de l'OLP l'a conduit à partir de 1988 [5] et surtout des accords d'Oslo de 1993 à un terrible reniement.
Les accords de paix, précédés de la concession à Israël de 78% du territoire historique, ont en effet fourvoyé la résistance palestinienne dans un arrangement combinant à la fois le renoncement à la résistance et le retour sous la tutelle arabe, notamment celle de l'Égypte et de la Jordanie, dont les mobiles étaient de faire d'une Palestine pacifiée le prétexte et le point d'appui d'une stratégie de coopération économique régionale ayant Israël, avec sa technologie et sa puissance industrielle, pour pivot central.
Les accords d'Oslo ont doublement affaibli l'OLP :
– D'une part, en la reconnaissant comme l'unique représentant du peuple palestinien, Israël l'a isolée à la fois de la résistance intérieure qui avait été l'âme de la première intifada et des Palestiniens de la diaspora. Alors que cette même reconnaissance de l'OLP par l'ONU et la Ligue arabe en 1974 avait achevé de fermer la porte à toute troisième voie, sa confirmation par Tel Aviv allait au contraire entraîner dans une telle voie alternative l'organisation présidée par Arafat elle-même, débordée peu à peu par une résistance qui lui était extérieure. Israël a pu d'ailleurs compter sur les penchants monopolistiques de la direction de l'OLP rentrée de l'exil pour atteindre cet objectif. Après avoir offert aux Israéliens un désarmement du mouvement national empêchant tout retour à la résistance (en tournant la page de l'action violente et en s'engageant à sanctionner tout contrevenant), Yasser Arafat n'a pas hésité à abroger la charte palestinienne au prix d'un noyautage autoritaire du conseil national palestinien qui en a adopté les amendements en avril 1996. L'isolement du Fatah au sein de la résistance à laquelle il appartenait encore formellement fut consommé en 2005 lorsque Mahmoud Abbas conclut un cessez-le-feu avec Israël pour mettre fin à la seconde intifada. Le Hamas, le jihad Islamique ainsi que des factions de l'OLP ont alors résolu de poursuivre la lutte.
– D'autre part, les accords d'Oslo ont été conçus par les Israéliens, qui ont largement imposé leurs vues, comme un instrument de neutralisation de la cause palestinienne en la dissolvant dans une perspective de coopération régionale avec les États arabes. A cet égard, alors qu'ils occultaient les questions politiques épineuses de la reconnaissance de l'État palestinien et de l'arrêt de la colonisation des territoires occupés, ces accords ont détaillé dans deux des protocoles économiques annexes qui les accompagnaient une vision d'un nouveau Moyen-Orient économique et financier qui semblait mieux faite pour appâter les oligarchies arabes de la région que pour satisfaire les revendications palestiniennes.
Oslo, prélude à la normalisation israélo-arabe
George Corm a parfaitement analysé cette duperie à laquelle les États les plus industrialisés du G7, la Ligue arabe et les pays islamiques étaient conviés à prendre part. Prenant pour prétexte le projet d'investir dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, l'initiative avait pour dessein d'articuler une coopération israélo-arabe qui servirait les intérêts des Etats et rendrait irréversible la présence israélienne dans les territoires de 1967. De sorte que les accords d'Oslo furent le cheval de Troie d'une tentative de remodelage de la région qui anticipait, sur le plan économique, les plans que George W. Bush tenterait la décennie suivante d'imposer par la force des armes et dans une approche globale incluant le politique.
La frénésie qui s'était saisie à l'époque des milieux d'affaires est aujourd'hui oubliée. Mais il est bon de rappeler que toute une série de rencontres avaient été alors organisées dans une euphorie qui ne devait pas tarder à faire long feu : à la Banque mondiale à Washington, dans plusieurs capitales européennes ; mais aussi à Jérusalem où s'est tenue une « business conference » avec une forte participation arabe, au Maroc. Le célèbre forum de Davos lui-même devait accueillir Shimon Perez et Yasser Arafat, venus discuter business [6].
Ainsi, les accords d'Oslo n'ont pas seulement fait renier à l'OLP son engagement originel d'être le pôle dynamique de la résistance, ils ont converti ses instances dirigeantes en structures bureaucratiques chargées de garantir la « paix » nécessaire à la marche des affaires et de gérer la manne financière qu'elles recevaient en contrepartie de ses parrains arabes et occidentaux.
Parallèlement, le Hamas, issu des rangs des frères Musulmans, amorçait une trajectoire inverse qui devait le conduire de ses positions piétistes et attentistes initiales, qui lui avaient valu les faveurs d'Israël, à un engagement dans l'action armée amorcé à la faveur de la seconde intifada. Cédant à la suprématie de l'OLP, il devait ensuite accepter de s'intégrer dans le processus d'Oslo et de participer pour la première fois aux élections de 2006. Mais la victoire qu'il y a remportée devait paradoxalement le marginaliser définitivement, du fait du désaveu et du boycott des puissances occidentales qu'elle lui a valus en même temps que de la guerre civile dans laquelle elle l'a entraînée contre le Fatah [7].
Depuis lors, le nouveau paysage palestinien n'a fait que s'enraciner avec une division à la fois géographique et politique des deux principaux acteurs de la scène palestinienne : Gaza insurgée sous la férule du Hamas et la Cisjordanie livrée à la colonisation massive sous la supervision du gouvernement israélien et sous les yeux d'une Autorité palestinienne impuissante sinon complice.
La boussole qui indique habituellement dans des conflits analogues la position respective des deux protagonistes principaux et de la troisième voie alternative qui viendrait se mêler au jeu s'en est trouvée déréglée dans la mesure où c'est un véritable jeu de chaises musicales qui a fini par assigner aux deux organisations palestiniennes leurs places effectives.
Dans le même temps, la géopolitique régionale était elle-même profondément remaniée sous l'effet combinée de l'invasion de l'Irak et de la guerre syrienne qui ont redessiné les alliances nouées autour de la question palestinienne. Alors que les accords d'Oslo n'en finissaient pas d'étendre leurs effets « normalisateurs » aux États arabes qui appuyaient l'Autorité de Ramallah, notamment à la faveur des ralliements suscités par les accords d'Abraham, l'Iran s'affirmait dans son rôle de soutien au Hamas à Gaza en coordination avec l' « axe de la résistance » animé essentiellement par le Hezbollah.
C'est à partir de cette géographie locale et régionale qu'on peut décrypter les intentions stratégiques de l'opération du 7 octobre. L'adhésion annoncée de l'Arabie Saoudite au processus de normalisation allait rompre l'équilibre existant entre les factions palestiniennes, favorisant d'une manière qui pouvait s'avérer décisive la troisième voie que l'OLP, à travers le Fatah qui y prédomine, avait fini par incarner, à rebours de son histoire militante. La cause palestinienne était sur le point de disparaître sur le terrain et dans une reconfiguration régionale défaitiste. En Cisjordanie, l'autonomie était appelée à se limiter à une auto-administration subordonnée à Israël sur un micro-territoire constamment rogné par la colonisation, alors qu'à Gaza une résistance résiduelle était contenue par des raids récurrents de l'armée israélienne en attendant l'éradication du Hamas et le nettoyage ethnique qui ne pouvait manquer de l'accompagner.
Le 7 octobre et la position intenable de l'Autorité palestinienne
Il n'est donc pas douteux que l'opération « Déluge d'al Aqsa » a été pensée pour aboutir à une redistribution générale des cartes aux différents niveaux où elles se répartissaient :
1°- Frapper Israël au cœur de son territoire par une action militaire qui constitue une première depuis 1948 afin d'attester que son invulnérabilité n'était qu'un mythe auquel avait souscrit le défaitisme arabe. Et, à cet égard, l'acharnement d'Israël à affirmer que l'attaque ne fut qu'une action terroriste visant à massacrer, violer et mutiler la population civile s'avère de moins en moins payant, en dépit de la propagande qui le soutient ;
2° – Provoquer par contagion, et devant l'ampleur de la répression, un sursaut de la résistance en Cisjordanie avec pour objectif primordial de susciter une dissidence au sein des appareils de l'Autorité palestinienne et une remise en cause des accords d'Oslo ;
3° – Entraver le processus de normalisation dans la région dont la source et la justification se trouvent précisément dans ces accords ;
4° – Last but not least, mettre en échec l'offensive terrestre de l'armée israélienne à Gaza pour réhabiliter les vertus de la résistance par les armes.
L'attaque du 7 octobre est de ce fait bel et bien, quoi qu'en pense A. Omar (pour ne rien dire de l'interprétation erronée de Shatz), une opération destinée à faire barrage à une troisième voie, telle que sa menace doit être comprise dans le contexte spécifique palestinien. Il s'agit de contrer le retour de l'OLP dans le giron de régimes arabes convertis à la normalisation tel qu'il s'est amorcé à la fin des années 1980, dans un mouvement qui a annulé le chemin parcouru par l'organisation de Yasser Arafat depuis 1968 quand elle s'était arrachée à la tutelle de régimes bravaches et velléitaires.
Le pari n'est pas gagné d'avance. Les critères définissant les intérêts stratégiques des États arabes semblent avoir été durablement modifiés par la multiplication des conflits et des enjeux des deux dernières décennies au cours desquelles la question palestinienne a perdu la place prépondérante qu'elle y occupait. Le Hamas n'arrive pas à faire oublier aux Égyptiens qu'il est issu des Frères Musulmans ni aux Syriens qu'il s'est opposé à eux pendant la guerre civile de la dernière décennie. La tiédeur des positions exprimées au sommet de Ryad le 11 novembre dernier, la tacite confiance maintenue à Israël par les États normalisateurs, en dépit des massacres qui se poursuivent à Gaza, et même la réserve d'un pays comme l'Algérie à l'égard du Hamas [8] sont autant d'indices que celui-ci a du mal à mobiliser autour de lui. Les États arabes semblent attendre que l'éviction de Netanyahu et de ses soutiens d'extrême-droite ramène au pouvoir des partis qui approuvent le projet américain de remettre en selle les accords d'Oslo et l'Autorité palestinienne. Ils ont définitivement décidé que leur intérêt était là et certainement pas dans une relance de la résistance à l'occupation.
Dans un tel contexte, le Hamas ne peut incarner à lui seul la résurrection de la résistance. Voilà pourquoi la partie se joue essentiellement en Palestine où l'OLP et surtout le Fatah qui la domine ne peuvent désormais continuer aussi facilement à enfoncer la tête dans le sable.
Khaled Satour, décembre 8, 2023
Notes
[1] https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/gaza-pathologies-de-la-vengeance,6829
[2] Publié d'abord en anglais sur mondoweis sous le titre Hopeful pathologies in the war for Palestine : a reply to Adam Shatz. La traduction française est accessible sur le site d'Algeria Watch : https://algeria-watch.org/?p=89687
[3] Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN, 1954-1962, Paris, Fayard, 2002, p. 281.
[4] Il convient de préciser à ce stade de la réflexion que j'entends ici le concept polysémique de troisième voie par référence à l'option prise depuis 1968 par l'OLP de mener une résistance armée contre Israël mais aussi à partir de la conviction que la cause palestinienne n'a pas d'autre choix si elle veut se réaliser en État indépendant. Dès lors, la 3e voie est celle qui fournirait à Israël le partenaire palestinien susceptible de faire échec à cet objectif. Sur un plan plus global, se pose la question de la forme de réalisation de cet objectif (solution à deux États ou État démocratique sur l'ensemble de la Palestine historique) que je n'aborderai pas. Aussi bien, ne discuterai-je pas l'approche faite par Edward W. Said sous le titre Israël-Palestine, une troisième voie. Voir le Monde diplomatique d'août 1998 : https://www.monde-diplomatique.fr/1998/08/SAID/3925
[5] Le 15 novembre 1988 à Alger, Yasser Arafat annonçait la création de l'État palestinien sur 18% du territoire historique, avec Jérusalem pour capitale, ce qui constituait une reconnaissance d'Israël. Ce fut le préliminaire aux accords d'Oslo.
[6] Georges Corm, Le Proche-Orient éclaté, T. 2, 1956-2012, Gallimard, 2012, pp. 762 et s.
[7] Sur la trajectoire du Hamas, lire l'entretien avec Tareq Baconi publié par le site contretemps le 23 novembre 2023 sous le titre Le Hamas dans le mouvement national palestinien : une mise en perspective historique.
https://www.contretemps.eu/hamas-mouvement-national-palestinien-historique/?fbclid=IwAR0JAZyicFkkkbdWPjX4362vdknzCU9VQFJDy2pE843UDS2BsSR0sBKlIOg
[8] L'interdiction signifiée le 28 novembre à Abderrazak Makri, ancien leader du MSP, parti algérien de la mouvance Frères Musulmans, de quitter le territoire algérien pour se rendre auprès des chefs politiques du Hamas à Doha, en est un indice très significatif. https://www.jeuneafrique.com/1510461/politique/en-algerie-interdiction-de-sortie-du-territoire-pour-abderrazak-makri/
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Yémen, des centaines de milliers de manifestants

Ce vendredi 12 janvier des dizianes de milliers de Yéménites ont pris les rues dans nombreuses villes du pays pour manifester contre les attaques anglo-américaines sur leurs terres et en soutien à la Palestine, après que les États-Unis et le Royaume-Uni aient fait pleuvoir une centaine de missiles sur des infrastructures militaires et aériennes au Yémen la nuit même.
Tiré de MondAfrique.
La colère règne au Yémen, et vendredi des chants pro-palestiniens et anti-américains ont retenti dans les rues du pays, et particulièrement dans la capitale Sanaa, où des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés. Les attaques anglo-américaines, qui avaient pour objectif d'éliminer des dirigeants Houthis, sont survenues après que le groupe rebelle religieux ait attaqué des navires de fret en mer rouge, point de passage d'un grand nombre de vaisseaux commerciaux, et donc d'une suprême importance. Ces attaques houthies, qui ont fortement perturbé le commerce mondial, ont été conduites au nom du soutien aux Palestiniens, qui subissent les bombardements israéliens. Les houthis sont soutenus par l'Iran, ennemi juré d'Israël et des États-Unis.
Vendredi, les Yéménites ont réagi au quart de tour. Le déluge de missiles avait eu lieu à l'aube, et en l'espace de quelques heures la masse avait investi les rues. Au menu, des drapeaux palestiniens et yéménites géants, des chants en soutien à la Palestine, et la défiance envers les États-Unis, exemplifiée par le classique moyen-oriental qui consiste à brûler des drapeaux états-uniens.
Des promesses de représailles
Le porte-parole Houthi a annoncé, dans une déclaration, que “l'agression criminelle” des américains et britanniques “ne sera pas sans réponse et sans punition”. Il continue, “Cette agression brutale ne découragera pas le Yemen dans sa position de support envers le peuple palestinien.”Dans la rue, la détermination régnait aussi. D'après les dires d'un manifestant, « Nous n'avons pas peur de l'aviation américaine ou britannique. Cela fait neuf ans que nous sommes bombardés et une nouvelle attaque n'est pas nouvelle pour nous ».
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Gaza. ces journalistes qu’on assassine.

Paris. Mercredi, 10 janvier 2024. Ils sont surarmés de caméras, d'appareils photo, de micros, de stylos, de blocs notes. Ils sont journalistes, reporteurs, correspondants, envoyés spéciaux. Les derniers témoins du génocide sioniste à Gaza. Ils sont les cibles prioritaires de l'armée israélienne.
Samedi, 6 janvier 2024. Deux roquettes provoquent la mort, dans leur voiture à Khan Younes, dans le sud de Gaza, de deux journalistes, Hamza al-Dahdouh, fils de Waël al Dahdouh, chef du bureau d'Al Jazeera, et Moustafa Thuraya, vidéaste pigiste à l'Agence France-Presse. Une éradication systématique du journalisme. Un crime de guerre à grande échelle. Un massacre sans fin. Une extermination totale. La chaîne internationale Al-Jazira demeure le dernier témoin. La famille de Waël al-Dahdouh, journaliste palestinien et chef du bureau de la télévision qatarie à Gaza, est décimée. Il est la voix des damnés de la terre sainte. Il n'a quitté l'antenne ni après l'assassinat, 25 octobre 2023, de son épouse, de sa fille de sept ans, de son fils de quinze ans, de son petit-fils d'un an et demi, ni après avoir été blessé le 15 décembre 2023 aux côtés de son collègue Samer Abou Daqqa tué sur le coup, ni après le meurtre de son fils aîné, Hamza al-Dahdouh, journaliste, vingt-sept ans. Il déclare : « Hamza était tout pour moi. Alors que nous, les palestiniens, nous sommes pleins d'humanité, les sionistes sont emplis de haine meurtrière ». Il couvre jusqu'où bout les événements dans sa ville natale, Gaza, réduite en cendres, avant de transférer ses bureaux et ses équipes à Rafah. Il compense la conscience absente d'un monde livré aux manipulations politiques et médiatiques.
Dimanche, 17 décembre 2023. Une tribune signée par deux cents journalistes sonne désespérément l'alarme. « Chaque jour, nos consœurs et confrères palestiniens se mettent en danger pour documenter la situation et informer le monde sur la situation à Gaza. Le Comité pour la protection des journalistes, qui tient des statistiques depuis 1992, signale que les derniers mois représentent la période la plus meurtrière pour les journalistes dans un conflit. C'est la plus grande atteinte à la liberté de la presse et d'expression jamais observée. Dans l'horreur qui étreint Gaza, les journalistes palestiniens sont en première ligne. Les violations contre la liberté́ de la presse commises par la machine de guerre israélienne ne sont pas nouvelles, à l'exemple de l'exécution de Shireen Abu Akleh le 11 mai 2022 à Jénine en plein reportage. Nous dénonçons, par ailleurs, l'asymétrie de la compassion à l'œuvre dans les médias français, justifiant l'injustifiable, et la partialité́ de la couverture médiatique, qui occulte la réalité́ de la guerre coloniale en cours. Nous dénonçons le fait que des journalistes soient sanctionnés et censurés dans leurs rédactions lorsqu'ils ne font pas preuve de complaisance par rapport à la version de l'armée israélienne. Nous apportons tout notre soutien au journaliste Mohammed Kaci, désavoué par la chaîne TV5 Monde pour une interview jugée trop critique. Le relai biaisé des événements, la minimisation de la colonisation, la dédramatisation des carnages israéliens sont une faillite journalistique et morale. La stratégie israélienne réduit au silence les populations civiles, détruit les infrastructures des médias. Notre rôle n'est pas de relayer la propagande militaire. Notre rôle est d'informer, de rapporter les faits réels ».
A Gaza, les écoles se transforment en charniers d'enfants, les maternités en cimentières de nouveaux nés. Des corps écrasés par les chars gisent dans les décombres. L'apocalypse dans toute son horreur. Les puissances occidentales apportent leur aide militaire inconditionnelle à l'armée sioniste. Elles garantissent son impunité dans le Conseil de Sécurité de l'Onu. Les journalistes palestiniens ne meurent pas de balles perdues et de dommage collatéraux. Ils sont expressément frappés pour empêcher toute documentation écrite, photographique, audiovisuelle. Ils ne sont plus visés individuellement par un sniper. Des missiles téléguidés exterminent plusieurs reporters à la fois. Selon le Syndicat des journalistes palestiniens, soixante maisons de journalistes, vingt-quatre stations de radio, soixante trois bureaux de médias ont été détruits. Le 9 octobre 2023, un raid de l'aviation anéantit le district de Rimal abritant le bâtiment Hiji et plusieurs médias. Le rédacteur en chef Saeed al-Taweel du site Al-Khamsa News, les correspondants Mohammed Sobboh et Hisham Alnwajha de l'agence de presse Khabar, sont tués.
Audrey Azoulay, directrice générale de l'Unesco publie un communiqué de protestation : « Je déplore la mort des journalistes Saeed Al-Taweel, Mohammed Sobboh et Hisham Alnwajha. Je demande une enquête indépendante pour déterminer les circonstances de cette tragédie. Les journalistes couvrant des situations de conflit doivent être protégés en tant que civils, conformément au droit international humanitaire et à la résolution 2222/2015 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la protection des journalistes, des professionnels des médias et du personnel associé dans les situations de conflit ». Toujours en octobre 2023, le journaliste Assaad Shamlakh est liquidé avec neuf membres de sa famille par une frappe aérienne de leur demeure à Sheikh Ijlin. En novembre 2023, la journaliste Alaa Taher Al-Hassanat et le photojournaliste Mohammed Moin Ayyash sont éliminés de la même manière avec plusieurs de leurs proches. La terrorisation sioniste atteint parfois son objectif. Le dimanche 7 janvier 2024, Anas El Najar, correspondant du China Media Group annonce l'abandon de sa mission : « Ma couverture journalistique s'arrête là. Inutile de transmettre des informations de terrain à une planète qui n'a aucune humanité, aucun empathie ».
L'Organisation danoise International Media Support pointe ce conflit comme le plus funeste des conflits depuis un siècle, 83 journalistes morts à Gaza en deux mois, 71 morts pendant la guerre d'Irak en trois ans, 69 journalistes morts pendant la Seconde Guerre mondiale en six ans, 63 journalistes morts pendant la guerre du Vietnam en vingt ans. Le Syndicat des journalistes palestiniens dénombre 109 reporters délibérément abattus en trois mois. Le Comité de protection des journalistes, basé à New York, confirme globalement ces chiffres, 72 palestiniens, 4 israéliens, 3 libanais. Les journalistes étrangers sont interdits d'accès sur le territoire palestinien ou soumis au contrôle permanent de l'armée israélienne. Quand un journaliste gazaoui meurt, il n'y a personne pour le remplacer. Personne ne peut s'exposer à une mort certaine. La journaliste Ayat al-Khadour dénonce l'utilisation de bombes au phosphore blanc et de bombes thermobariques : « Les occupants israéliens larguent des bombes au phosphore blanc sur la zone de Beit Lahia, des bombes sonores effrayantes. La situation est terrifiante ». Elle ajoute : « Cela pourrait être ma dernière vidéo ». Peu de temps après, le lundi 20 novembre 2023, elle tombe sous un bombardement. L'utilisation de bombes au phosphore blanc, fournies par les Etats Unis, est confirmée par le Washington Post daté du 11 décembre 2023. L'origine américaine des obus est vérifiée par Human Rights Watch. Les mêmes codes de fabrication apparaissent sur des obus au phosphore blanc alignés à côté de pièces d'artillerie israéliennes dans la ville de Sderot, près de la bande de Gaza, sur une photo prise le 9 octobre 2023. L'armée sioniste veut, à tout prix, rendre sa guerre invisible au prix d'une monstrueuse boucherie. Les fake-news, l'intelligence artificielle, la peste internétique brouillent les pistes.
Mustapha Saha
Sociologue
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Parce qu’il ne veut pas de témoins de ses crimes, Israël tue méthodiquement les journalistes qu’il ne peut faire taire !

Aucun criminel ne veut de témoins de ses crimes. Et Israël non plus, bien sûr. C'est pourquoi il fait tout ce qu'il peut pour pouvoir commettre ses crimes à Gaza - et dans les Territoires occupés - loin des projecteurs. Et il le fait de plusieurs façons à la fois :
Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
12 janvier 2024
Par Yorgos Mitralias
• En interdisant aux journalistes étrangers d'entrer dans la bande de Gaza, dont il contrôle toutes les entrées.
• En menaçant ceux qui sont restés à Gaza pour qu'ils la quittent immédiatement s'ils ne veulent pas mourir.
• En assassinant méthodiquement, systématiquement et en priorité ceux qui persistent pour faire leur travail de journaliste.
• En faisant pression et en menaçant de les qualifier d'« antisémites » les journalistes intègres de par le monde pour qu'ils utilisent comme seules sources d'information sur ce qui se passe au Moyen-Orient uniquement celles de l'armée israélienne et du gouvernement israélien.
• En forçant, avec la coopération active des autorités étatiques et d'autres soutiens dans le monde, les médias d'autres pays à utiliser une certaine terminologie interdisant des mots et des expressions tels que ...« escalade de la guerre » ou même « stop the war » !
Mais il y a aussi une suite, puisque depuis quelques semaines, nous assistons -au niveau mondial- à la mise en application d'une nouvelle forme de manipulation de l'information par Israël et ses complices internationaux : le black out, le silence journalistique total sur les « actions » de l'armée israélienne à l'encontre de la population palestinienne. La raison en est évidente : telle est l'ampleur de ses crimes, tel est le choc et la répulsion qu'ils provoquent presque partout, telle est désormais l'inefficacité de ses « arguments » et de sa propagande, qu'Israël et ses soutiens dans le monde entier jugent apparemment préférable de faire « oublier » leur guerre et de ne plus en parler au quotidien ! C'est ainsi que l'on voit, par exemple, des médias qui, pendant deux mois, ont consacré leur première page au bain de sang de Gaza, ne disant - soudainement et... comme par magie - pas un mot ou couvrant la question de manière succincte et sur leurs toutes dernières pages... remplaçant systématiquement les rivières de sang de Gaza par des reportages sur des crimes crapuleux et autres faits divers d'un intérêt plutôt médiocre.
L'effet de ce black-out de l'information se fait déjà sentir : la guerre et, avec elle, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis par Israël font désormais partie de la routine quotidienne ou tendent à être oubliés. C'est sans doute le plus grand, le plus dangereux et le plus cauchemardesque « exploit » de Netanyahou et de ses bourreaux, car il nous accoutume “à un monde ressemblant de plus en plus à une jungle où règne uniquement le droit du plus fort et où sont « permises » les pires atrocités contre les plus faibles !” (1)
Et tout cela dans l'indifférence générale, et sans la moindre réaction des syndicats des journalistes de nos pays. Des syndicats qui ne semblent pas particulièrement émus par le fait que non pas un ou deux, mais... 110 collègues journalistes ont été tués ou plutôt assassinés, principalement à Gaza et dans les Territoires occupés, par l'armée israélienne et les colons israéliens, en seulement trois mois, dans ce qui est de loin le plus grand massacre de journalistes de l'histoire de l'humanité ! Vraiment, qu'attendent-ils pour descendre dans la rue et se mettre urgemment en grève de solidarité et de soutien aux collègues palestiniens, qui vivent et meurent dans l'enfer de Gaza, et qui demandent désespérément ce soutien et cette solidarité ?
Pourtant, Tim Dawson, secrétaire général adjoint de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), avait deja déclaré il y a trois semaines, « je ne pense pas qu'il y ait jamais eu autant de journalistes tués dans un conflit, quel qu'il soit. Il y avait environ 1 000 journalistes à Gaza au début de ce conflit. Bien que les chiffres diffèrent légèrement quant au nombre exact de morts, si entre 7,5 et 10 % d'entre eux sont décédés, il s'agit d'un chiffre extraordinairement élevé ». Et la présidente de la Fédération internationale des journalistes (600 000 membres dans le monde), Dominique Pradalié, avait ajouté :« Sur les terrains de guerre, des exactions peuvent être commises contre des journalistes de façon ponctuelle. À Gaza, elles sont systématiques. » ». Quant au vice-président de la même Fédération internationale des journalistes, le Palestinien Nasser Abou Bakr, après avoir dénoncé que les journalistes travaillant à Gaza et dans les Territoires occupés sont "régulièrement menacés de mort et reçoivent des appels et messages anonymes ou de militaires sur WhatsApp”, il a conclu comme suit ; « Chaque jour, je communique avec mes confrères encore sur place, je leur demande comment ils vont. Ils me répondent une chose : nous sommes toujours vivants. Ils attendent de mourir et se demandent qui sera le prochain. Mais ils insistent pour continuer leur travail. S'ils arrêtent, qui racontera et documentera les crimes de masse et le nettoyage ethnique que subit notre peuple ? Israël veut tuer les journalistes, qui sont les témoins de ses crimes ».
Bien entendu, ce n'est pas un hasard si la plupart des journalistes menacés, blessés ou tués travaillent pour la chaîne d'Al Jazeera, car c'est précisément cette chaîne de télévision internationale qui est constamment dans le viseur d'Israël, qui tente à tout prix de la faire taire. Pourquoi ? Mais, parce qu'Al Jazeera est la seule chaîne qui fait correctement son travail : elle informe directement et généralement « en direct », couvrant tous les développements et événements du Moyen-Orient - et pas seulement du Moyen-Orient - et donnant la parole à toutes les parties, même les plus odieuses. Ayant suivi la chaîne anglophone d'Al Jazeera sans interruption au cours des trois derniers mois, nous pouvons confirmer que nous y avons vu défiler aussi bien des représentants du Hamas que des ministres et des généraux israéliens, aussi bien des Américains et autres partisans de M. Netanyahou que ceux qui soutiennent les Palestiniens. En d'autres termes, nous avons constaté qu'Al Jazeera fait exactement ce que la grande majorité des médias, y compris bien sûr ceux de nos pays « libéraux », refusent de faire. Quant aux calomnies qui sont traditionnellement lancées contre elle, même par de nombreux « progressistes », à savoir qu'Al Jazeera serait le porte-parole des « Frères musulmans » ou... du Hamas, ce sont des mensonges aussi grossiers que ceux qui prétendent qu'Israël bombarde et tue sans discernement non pas des civils palestiniens, mais des « terroristes du Hamas ». Après tout, il serait pour le moins paradoxal qu'Al Jazeera soit... islamiste, obscurantiste et réactionnaire alors qu'elle critique durement toute manifestation d'antisémitisme et qu'elle soutient et promeut sans réserve les mouvements progressistes et antiracistes du monde entier, y compris ceux des Juifs des États-Unis et d'ailleurs qui manifestent quotidiennement réclamant un cessez-le-feu immédiat…
C'est donc parce que ce sont ses journalistes qui font que Al Jazeera soit si unique et précieuse en ces temps de barbarie où l'information objective devient une denrée de plus en plus difficile à trouver, que leur incroyable souffrance nous émeut et nous bouleverse encore plus. En effet, ce n'est pas seulement que 110 journalistes ont déjà été tués par l'armée israélienne. C'est aussi que les membres de leur famille, de leurs grands-parents à leurs petits-enfants et à leurs bébés, sont également tués avec eux, aussi en toute priorité ! C'est ce qui s'est passé, entre bien d'autres, dans la tragédie personnelle du reporter en chef d'Al Jazeera à Gaza, Wael Al-Dahdouh, qui a perdu dans trois bombardements israéliens successifs sa femme, sa fille, son fils cadet et son petit-enfant, ainsi que huit autres membres de sa famille. Puis, son cameraman qui est mort exsangue, les soldats israéliens n'ayant pas permis à l'ambulance de l'atteindre - alors qu'il était lui-même blessé - et enfin, son fils aîné, journaliste lui aussi ! Inutile de dire qu'il n'y a pas de mots pour décrire les sentiments du téléspectateur lorsqu'il voit quelqu'un, et cela s'est produit à plusieurs reprises, interrompre un journaliste d'Al Jazeera alors qu'il parle en plein direct depuis les décombres des innombrables bombardements israéliens, pour lui chuchoter à l'oreille que des membres de sa famille viennent d'être tués. Et de voir ce journaliste se pétrifier, devenir tout pale et avoir les larmes aux yeux... tout en continuant de faire son reportage, parlant de la mort des autres !
C'est donc à ces journalistes qui sauvent l'honneur du journalisme mondial, que les syndicats des journalistes de nos pays doivent d'urgence et en actes montrer leur solidarité, non seulement parce qu'ils leur en sont redevables, mais aussi parce que le salut et même la vie de ces journalistes héroïques dépend de notre soutien. Cependant, ce n'est pas seulement nos syndicats des journalistes mais toute l'opposition progressiste et les gauches qui doivent justifier leur raison d'être en soutenant le peuple palestinien martyrisé non pas en paroles mais par des actes. Comme par exemple, en soutenant activement la plainte sud-africaine pour génocide contre Israël, qui a commencé à être discutée à la Cour internationale de justice de La Haye. De quelle manière ? En mobilisant dans les rues et en faisant pression dans les Parlements sur leurs gouvernements pour qu'ils s'associent ou pour le moins soutiennent la plainte de l'Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice. Hic Rhodus, hic salta...
Yorgos Mitralias
Note
1. https://www.cadtm.org/Quand-Netanyahou-nous-accoutume-a-un-monde-inhumain-sans-droit-ni-regles-ou
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« Migration volontaire ou nettoyage ethnique » ?

Mouin Rabbani parle du plan d'Israël pour expulser les résidents.es de Gaza
Democracy Now, 3 janvier 2024
Traduction, Alexandra Cyr
Introduction : Mouin Rabbani, analyste politique néerlandais d'origine palestinienne soutien qu'Israël se sert de l'attaque du Hamas du 7 octobre dernier comme prétexte pour mettre en œuvre « sa vieille ambition » de sortir les Palestiniens.nes de Gaza. Il souligne que des hauts fonctionnaires israéliens ont commencé à proposer des déplacements de masse de civils.es vers l'Égypte et d'autres pays, presque aussitôt que la guerre ait commencé. Cela est en concordance avec les politiques sionistes datant d'avant la fondation d'Israël. Selon M. Rabbani, « le nettoyage ethnique, ou ce que les sionistes nomment les transferts est intrinsèque au Sionisme et fait partie des politiques israéliennes depuis ses tout débuts ».
M. Rabbani est adjoint rédacteur en chef de Jadaliyya et anime la balado diffusion sur Connections. Son dernier article est intitulé « The Long History of Zionist Proposals to Ethnically Cleanse the Gaza Strip ». Il a été publié par Mondoweiss.
Amy Goodman : Mouin Rabbani, en lien avec votre dernier article, les journaux israéliens rapportent que le Premier ministre, B. Netanyahu aurait déclaré à un groupe d'élus.es : « Pour ce qui est de l'immigration volontaire, (…) c'est vers cela que nous nous dirigeons ». Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ber Gvir, qui en passant a été trouvé coupable de terrorisme, a tenu des propos semblables : « L'encouragement à l'immigration est une solution que nous devons mettre de l'avant. C'est la solution correcte, juste, morale et humaine. J'ai souligné au Premier ministre et au nouveau ministre des affaires étrangères, que je félicite pour sa nomination, que le temps était venu de coordonner un projet de migration, un projet pour encourager les résidents.es de Gaza à immigrer ailleurs dans le monde. Soyons clairs, nous avons des partenaires dans le monde que nous pouvons appeler à l'aide. Il y a des gens dans le monde avec qui nous pouvons discuter de cette idée. Encourager l'émigration va nous permettre de ramener chez eux, les résidents.es des communautés près de Gaza et ceux et celles de la colonie de Gush Katif ».
A.G. : (…) Mardi, le Département d'État américain a émis un communiqué où il déclare être en désaccord avec les commentaires de M. Ben-Gvir et ceux de Bezalel Smotrich. Le Times de Londres, rapporte que des hauts fonctionnaires ont eu des échanges secrets avec la République démocratique du Congo et plusieurs autres pays sur la possibilité qu'ils acceptent des Paliestiniens.nes de Gaza sur leur territoire. Pouvez-vous nous parler de cette histoire, M. Rabbani ? Et aussi, que veulent-ils dire quand ils parlent « d'immigration volontaire » à Gaza. Parlez-nous aussi des pressions que subit l'Égypte pour qu'elle ouvre sa frontière aux habitants.es de Gaza.
Mouin Rabbani : Oui. Maintenant, l'immigration volontaire est présentée comme une émigration humanitaire. Autrement dit, nous faisons une faveur à ces gens en procédant au nettoyage ethnique à leur égard.
Je pense que le problème est aussi que beaucoup de gens associent le nettoyage ethnique des Palestiniens.nes avec l'extrême droite israélienne, les gens comme Ben-Gvir, Smotrich, Netanyahu et ainsi de suite. Mais ce que je voulais démontrer dans mon article qui est maintenant accessible sur Twitter et que j'ai publié plus tard sur Mondoweiss, c'est que le nettoyage ethnique, ou ce que les Sionistes nomment transferts, est intrinsèque au Sionismes et plus tard dans les politiques israéliennes envers les Palestiniens.nes et ce depuis les tout débuts.
Aussitôt qu'en 1895, Theodor Herzl, le fondateur du mouvement sioniste contemporain, a écrit : « organisons (l'envoie) de ces pauvres hors des frontières » et trouvons-leur du travail dans d'autres pays. Durant la période qui s'étend entre le mandat britannique et la fondation de l'État d'Israël en 1948, le mouvement sioniste a mis en place un comité des transferts équipé de termes de références très clairs ; il devait s'assurer que les expulsés.es ne pourraient jamais retourner en Palestine et pour cela il fallait détruire leurs villages et d'autres propositions de la sorte. La population de Gaza est composée aux trois quarts de Palestiniens.nes victimes de nettoyage ethnique en 1948. Depuis 1950, elle a aussi été la cible par Israël d'une réduction de sa population parce qu'il ne veut pas de tous ces réfugiés et toutes ces réfugiées à portée de vue pour ainsi dire de leurs anciennes demeures à sa frontière. Il y a eu un grand nombre de proposition et d'initiatives au fil des années pour atteindre ce but. À la fin des années 1960, un projet proposait d'évacuer 60,000 habitants.es de la bande Gaza vers le Paraguay. Mais, en contrepartie le Mossad a découvert qu'il n'avait plus les moyens de poursuivre sa chasse aux Nazis réfugiés dans ce pays avec la protection du régime Stroessner. (Le projet est donc tombé à l'eau).
Je voulais vraiment vous démontrer que la politique la plus récente proposée par la frange la plus extrême de la politique israélienne, n'est pas exceptionnelle ; cela fait partie intrinsèque du Sionisme et des politiques israéliennes depuis les tout débuts.
A.G. : À la fin de votre article vous écrivez : « Malgré son importance la Nakba de 1948 n'a pas défait les Palestiniens.nes. Leur lutte s'est poursuivie depuis les camps de réfugiés.es, ceux de Gaza en première ligne. Il faudrait un niveau de stupidité à la Blinken pour penser que l'expulsion des Palestiniens.nes de Gaza produirait un autre résultat ». Parlez-nous de l'objectif de Netanyahu d'extirper le Hamas de Gaza. Qu'est-ce que cela veut dire au juste ? Quels sont les effets des victimes à ce point-ci soit plus de 22,000 personnes décédées ?
M.R. : Cela me ramène à la deuxième partie de votre précédente question à laquelle je n'ai pas répondu et qui porte sur les retombées de la présente guerre. Israël s'est rendu compte qu'il avait ainsi atteint au soutient inconditionnel des Occidentaux, des États-Unis et d'Europe en reprenant la vieille ambition de nettoyer la Bande Gaza de ses habitants.es palestiniens.nes.
Dès le 7 octobre, cette proposition a été mises de l'avant : déménager la population de Gaza vers le désert du Sinaï en Égypte. Cette idée a été endossée avec enthousiasme par le Secrétaire d'État américain, A. Blinken. Lors de sa première visite dans la région il a tenté de la faire adopter par les alliés arabes des États-Unis. Je pense qu'il devient une poule sans tête quand il s'agit du Proche Orient. Je pense qu'il s'attendait à entendre les alliés arabes des américains lui dire : « Comment pouvons-nous vous aider à aider vos amis israéliens » ? Au lieu de quoi il s'est frappé à un refus catégorique d'abord et avant tout de la part de l'Égypte.
Par la suite, les gouvernements américains et européens ont pris position contre les expulsions forcées de la Bande de Gaza ce qui a permis ce que nous voyons en ce moment : une campagne militaire israélienne dont le premier objectif est de rendre cet espace invivable et donc d'encourager les déplacements volontaires ou ce qu'ils nomment maintenant, humanitaires ; l'émigration pour accomplir le nettoyage ethnique. Je crois que ce que nous voyons en ce moment c'est un génocide. D'ailleurs le Tribunal international de justice de La Haie en jugera suite à la plainte de l'Afrique du sud en vue de l'application de la Convention contre les génocides. Et la Bande de Gaza est devenue inhabitable.
A.G. : Mouin Rabbani, nous devons nous arrêter ici. Je vous remercie.
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La machine sioniste de destruction massive menace le Liban à la suite de Gaza

Il y a deux semaines, nous estimions, à la lumière des éléments disponibles, que les forces d'occupation israéliennes cesseraient leur campagne intensive de bombardement ravageur au début de cette nouvelle année, pour passer à une « guerre de basse intensité » dont l'objectif serait de resserrer le contrôle sur la majeure partie du territoire de la bande de Gaza tombée sous leur emprise, d'éradiquer ce qui y resterait de résistance et de détruire le réseau de tunnels qui subsiste sous son sol (voir « Où va la guerre d'Israël contre Gaza ? », 20/12/2023). Lundi dernier, au premier jour de cette nouvelle année, le porte-parole officiel de l'armée d'occupation a annoncé le retrait de Gaza de cinq brigades, composées essentiellement de réservistes, dans ce qui a été interprété par les observateurs comme un premier pas vers le passage à une « guerre de basse intensité », comme l'ont promis les dirigeants israéliens à leurs soutiens extérieurs, les États-Unis au premier chef.
Tiré de Inprecor no 716 Janvier 2024
7 janvier 2024
Par Gilbert Achcar
La vérité est que, pour des raisons à la fois humaines et économiques, l'État sioniste ne peut pas continuer longtemps à mener une guerre de la même intensité que celle qu'il mène depuis le « Déluge d'Al-Aqsa ». En effet, Israël est un pays relativement petit, avec une population juive d'un peu plus de sept millions d'habitants, dont un million et demi d'hommes en âge de servir dans les forces armées (auxquels s'ajoutent un million et demi de femmes qui n'ont pas encore été engagées dans la guerre). Il ne peut pas continuer à mobiliser approximativement un demi-million de réservistes pendant une longue période, car cela constitue une lourde charge humaine sur le plan social et encore plus lourde sur le plan économique.
Jusqu'à la fin de l'année dernière, c'est-à-dire en moins de trois mois, la guerre a coûté environ 20 milliards de dollars, selon ce qu'a déclaré un ancien vice-gouverneur de la Banque centrale israélienne au Washington Post, soit un coût avoisinant le quart de milliard de dollars par jour, ce qui est énorme pour l'économie du pays. Le gouvernement sioniste estime que le coût total de la guerre, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a confirmé samedi dernier qu'elle durerait au moins un an, sera d'environ 50 milliards de dollars (soit environ un dixième du PIB d'Israël). Netanyahou et ses alliés de l'extrême droite sioniste d'autant plus déterminés à poursuivre la guerre à moindre intensité tout au long de cette nouvelle année qu'ils misent sur la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine de l'automne prochain. Ils sont convaincus que Trump leur donnerait le feu vert pour qu'ils achèvent la « seconde Nakba » en s'emparant définitivement de la bande de Gaza et en l'annexant. Tout en comptant sur le financement américain pour atténuer l'impact de la guerre sur leur économie, ils doivent en réduire le coût afin de pouvoir la poursuivre au cours des prochains mois comme ils l'entendent.
En même temps, cependant, le gouvernement sioniste planifie une deuxième campagne intensive de bombardement qui commencerait après que l'intensité des bombardements sur Gaza aura été réduite. Aux tout premiers jours de la nouvelle offensive israélienne, des rapports indiquaient que le ministre de la « Défense » sioniste, l'ancien général de division Yoav Gallant, membre du Likoud et rival de Netanyahou, avait souhaité qu'Israël attaque le Hezbollah au Liban en même temps que le Hamas à Gaza. Gallant est connu pour être un défenseur de la doctrine connue sous le nom de Dahiya [banlieue, en référence à la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah], appliquée pour la première fois lors de l'assaut israélien sur le Liban en 2006. Cette stratégie militaire consiste à riposter à quiconque menacerait la sécurité d'Israël d'une façon si radicale et si destructrice qu'elle constituerait une forte dissuasion. En tant que chef du commandement sud entre 2005 et 2010, Gallant a supervisé l'application de cette doctrine lors de l'attaque meurtrière de trois semaines contre Gaza à partir de la fin de l'année 2008.
L'été dernier, le ministre de la « Défense » sioniste menaçait de ramener le Liban à « l'âge de pierre ». C'était après avoir inspecté la zone des fermes de Chebaa, à la frontière libanaise, et y avoir aperçu une tente installée par le Hezbollah. Gallant avait alors déclaré : « Je mets en garde le Hezbollah et Nasrallah de ne pas commettre d'erreurs. Vous avez commis des erreurs dans le passé et vous avez payé un prix très élevé. Si, à Dieu ne plaise, une escalade ou une confrontation se produisait ici, nous ramènerons le Liban à l'âge de pierre ». Il avait poursuivi en répétant : « Je mets en garde le Hezbollah et son chef : ne faites pas d'erreur. Nous n'hésiterons pas à utiliser toute notre puissance et à détruire chaque mètre appartenant au Hezbollah et au Liban s'il le faut ». Il avait ajouté : « Lorsqu'il s'agit de la sécurité d'Israël, nous sommes tous unis ». Ces derniers mots répondaient à l'affirmation par le chef du Hezbollah qu'Israël était affaibli par sa crise politique.
La probabilité d'une nouvelle agression massive de l'État sioniste contre le Liban est donc devenue très forte. Le gouvernement israélien met le Hezbollah devant un dilemme en exigeant de lui qu'il retire ses forces militaires au nord du fleuve Litani, à quelque 10 km au nord de la frontière libanaise. S'il s'exécutait, le Hezbollah perdrait la face, tandis que s'il refusait d'obtempérer, il porterait la responsabilité d'une nouvelle agression dévastatrice contre le Liban, en particulier contre les zones où il est déployé. L'intervention limitée du Hezbollah dans le sillage du « Déluge d'Al-Aqsa » a donc eu un effet pervers, car le parti a manqué l'occasion de forcer Israël à s'engager dans une guerre intensive sur deux fronts, tandis qu'Israël menace aujourd'hui de se lancer dans un bombardement intensif du Liban, en le distinguant à son tour après avoir achevé son bombardement intensif de la bande de Gaza.
Traduit en français à partir de la traduction anglaise, faite par l'auteur sur son blog, de l'original arabe publié dans Al-Quds al-Arabi le 2 janvier 2024. Cet article a été écrit avant l'assassinat par Israël d'un haut dirigeant du Hamas à Beyrouth.
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Se moquer des Palestiniens et ridiculiser l’accusation de génocide portée contre Israël par l’Afrique du Sud

Aujourd'hui, 11 janvier, l'Afrique du Sud présente ses preuves à la Cour internationale de justice, accusant formellement Israël de commettre un génocide et demandant des mesures provisoires pour mettre fin à son attaque contre Gaza. (Pour lire le document complet présentant les preuves, allez ici https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20231228-app-01-00-en.pdf)
Ovide Bastien, professeur retraité du Collège Dawson
photo Serge d'Ignascio
Compte tenu de la tragédie humaine qui se déroule à Gaza depuis trois mois, cela est peu étonnant : 23, 357 Gazaouis tués, dont 9 600 enfants, 6 750 femmes, 100 médecins et 111 journalistes ; 8 000 portées disparus ; 59 410 blessés ; 70% de l'infrastructure détruite, dont 92 écoles et universités, 115 mosquées, 3 églises, et 350 000 maisons ; 23 hôpitaux et 53 centres médicaux rendus inopérants et parfois la cible d'attaques ; 103 ambulances prises pour cible, dont une le 10 janvier où quatre médecins et deux autres personnes à l'intérieur du véhicule furent tués ; 146 membres du personnel de l'ONU tués, soit le plus grand nombre dans un conflit depuis la création de l'ONU ; 1,9 millions de personnes - soit 85% de la population - obligées de se déplacer, parfois à plusieurs reprises, et maintenant confrontées à famine et épidémie, à cause du peu d'aide humanitaire permise par Israël à Gaza,...
Pourtant, certains se permettent encore, en plein génocide, de se moquer de la cause palestinienne ou de ridiculiser le geste courageux et tellement nécessaire que pose aujourd'hui l'Afrique du Sud.
« Il est certes injuste qu'une seule famille arabe soit obligée de se déplacer lors de la création d'Israël, » affirme dans son monologue le très populaire humoriste et commentateur politique étatsunien Bill Maher. « Oui, c'est vrai. Mais de tels déplacements dans l'histoire ne sont pas rares, ».
« Et personne ne sait mieux que les Juifs ce que signifie se voir expulser d'une terre.
« Les Juifs ont notamment été chassés de presque tous les pays arabes dans lesquels ils vivaient autrefois. Oui, fans de TikTok, le nettoyage ethnique se produit dans les deux sens (rires chez son auditoire). »
« Tout le monde cependant finit par trouver un compromis... Sauf, bien sûr, les Palestiniens. (...) Arafat s'est vu offrir 90 % de la Cisjordanie et a dit non. On devrait rappeler aux Palestiniens que leurs dirigeants et les idiots qui leur servent d'alliés sur nos campus ne leur font aucune faveur en entretenant le mythe Du fleuve à la mer. »
« Où pensez-vous qu'Israël va déménager ? Tenez-vous bien chers amis... nulle part ! (fort applaudissent chez son auditoire). »1
Lorsque je visionne sur YouTube ce monologue de Maher, remontent en moi colère et indignation. Et celles-ci ne font qu'augmenter lorsque, en plein milieu du monologue, apparaît soudainement une courte publicité ciblée - évidemment payée par Israël qui, depuis le 7 octobre, inonde de publicité les réseaux sociaux - où on voit le président de ce pays, Isaac Herzog, qualifier les Palestiniens d'animaux atroces :
« Nous sommes ici à Zaka afin de réaliser une œuvre sacrée, » affirme Herzog lors d'une cérémonie funéraire de soldats israéliens tués à Gaza. « Celle d'offrir à un être humain la dernière dignité. Ce que nos ennemis, ces animaux atroces, ont perdu de vue. Nous sommes ici pour montrer que nous sommes des êtres humains. Et, à ce titre, nous honorons le corps et l'âme de chacun de ceux que nous avons perdus. Nous les quittons et les accompagnons dans la dignité... »
Lorsque Norman Finkelstein, auteur de Gaza : An Inquest into its Martyrdom (2018), visionne ce même monologue de Maher, il réagit comme moi : incrédulité, indignation, et colère. Un Juif, dont la famille a été victime de l'Holocauste, Finkelstein a passé plus de quarante ans à enquêter sur le sionisme et la question palestinienne.
« Dans son humour de fort mauvais goût, surtout en plein génocide, Maher fait preuve d'une ignorance crasse, affirme Finkelstein.
« Dès sa création, le projet sioniste implique l'expulsion du peuple palestinien. J'en sais quelque chose, car mon doctorat portait précisément sur le sionisme. L'idée sioniste, « une terre sans peuple pour un peuple sans terre » n'est qu'une simple rationalisation pour justifier l'injustifiable. La Palestine n'était pas un territoire inhabité et les Palestiniens savaient que le projet sioniste les réduirait, au mieux à un statut de citoyens de seconde zone dans leur propre lieu de naissance, ou au pire aboutirait à leur expulsion. Les sionistes n'appelaient pas cela une dislocation mais un transfert. (...) C'est ainsi que 90 % de la population palestinienne, dans ce qui devenait en 1948 Israël, fut expulsée.
« Et, contrairement à ce qu'avance Maher dans son ignorance incommensurable, les Palestiniens ont fait de grands compromis, et cela depuis longtemps, poursuit Finkelstein. Dès 1976, l'Organisation pour la libération de la Palestine (OLP) soutenait la solution des deux États sur la base de la frontière de 1967. Elle soutenait le compromis. Elle avait renoncé à 80 % de la Palestine, le territoire qui est devenu Israël. Elle avait accepté d'avoir un État comprenant uniquement la bande de Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est.
« La question du retour des réfugiés palestiniens dans leur patrie restait, il est vrai, une zone grise. Cependant, même sur ce point, les représentants palestiniens avaient accepté de faire des compromis drastiques et colossaux.
« Les faits montrent clairement que les Palestiniens avaient déjà renoncé à l'idée d'un État unique Du fleuve à la mer.
« Cependant, Israël était tellement terrifié par l'idée d'un accord de paix impliquant l'abandon de Gaza et de la Cisjordanie, et qui serait évidemment soutenu par la communauté internationale, qu'elle inventait, en 1982, une excuse pour envahir le Liban. Pourquoi ? Parce que c'est là que se trouvait alors l'OLP. Israël voulait détruire l'OLP, non pas parce qu'elle était trop radicale, mais parce qu'elle était trop modérée.
« Au cours de cette guerre, rappelle Finkelstein, Israël a tué entre 15 000 et 20 000 Palestiniens et Libanais, dont la plupart étaient des civils. En fait, ce n'est qu'aujourd'hui, lors de la guerre de Gaza, que le nombre de victimes palestiniennes a dépassé celui de la guerre du Liban. »2
*************
Lorsque l'Afrique du Sud, qui elle aussi a longtemps souffert, comme le peuple palestinien, d'un système d'apartheid, dépose le 29 décembre dernier sa requête auprès de la Cour internationale de justice, accusant Israël de commettre un génocide, les Etats-Unis réagissent en cherchant à ridiculiser cette accusation.
Requête « sans fondement, contre-productive et totalement dénuée de toute base factuelle », déclare le porte-parole du Conseil national de sécurité des États-Unis, John Kirby.
Requête sans fondement (meritless), répète le Secrétaire d'État Antony Blinken, lors de sa visite en Israël le 10 janvier, se contentant d'affirmer qu'il y a beaucoup trop de civils tués à Gaza.
Sans fondement et dénuée de toute base factuelle ?
Quelle hypocrisie, on ne peut plus consommée, de la part d'un pays qui, depuis de nombreuses années, offre à Israël, dans sa longue histoire d'oppression des Palestiniens, un appui – politique, diplomatique, et, aussi et surtout, financier, en raison de presque 4 milliards par année ! Et qui connaît parfaitement bien les nombreuses déclarations, à la suite de l'attaque du Hamas le 7 octobre, de hauts placés en Israël, incluant du premier ministre Benjamin Netanyahou, où on qualifie les Palestiniens « d'animaux », où on affirme vouloir couper eau, nourriture, combustible, et biens médicaux à Gaza, où on exprime vouloir raser tout simplement Gaza, etc.
Quelle hypocrisie, de la part d'un pays, qui, comme chacun de nous, voit quotidiennement à la télévision le véritable carnage qui s'effectue à Gaza. Et aussi en Cisjordanie, où, dans la seule année 2023 mais surtout depuis le 7 octobre, des colons juifs appuyés par l'armée israélienne tuent – 483 – et blessent -1,769 - impunément des Palestiniens, accaparant souvent leurs terres et démolissant avec des bulldozers leurs maisons et même leurs routes ; où, depuis le 7 octobre, les militaires israéliens opèrent quotidiennement des raids, détenant et emprisonnant, sans possibilité de procès, de milliers de Palestiniens, souvent des adolescents.
Quelle hypocrisie de la part d'un pays qui se contente, jour après jour, de prier Israël de modérer son ardeur à tuer des civils et détruire massivement de l'infrastructure, et de permettre davantage d'aide humanitaire à Gaza. Du bout des lèvres, bien sûr... tout en continuant à faire parvenir régulièrement armes et munitions à Israël qui poursuit sans relâche sa répression brutale ! Tout en continuant à voter contre les motions de cessez-le-feu qu'adoptent dans l'Assemblée générale de l'ONU une écrasante majorité de pays ; tout en continuant à imposer son véto aux motions de cessez-le-feu qu'adoptent au Conseil de sécurité de l'ONU une écrasante majorité de ses membres !
Il n'est pourtant pas nécessaire d'avoir un doctorat pour comprendre qu'un simple appel téléphonique de Joe Biden à Benjamin Netannyahou suffirait pour mettre fin à cette guerre.
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La souffrance et l'oppression du peuple palestinien durent depuis plus de cent ans.3
Au début du vingtième siècle, alors que l'Angleterre gère la Palestine comme colonie, son ministre des Affaires extérieures, Arthur James Balfour, affirme clairement, en 1917, son approbation du projet sioniste dans ce territoire occupé. Les grandes puissances, affirme Balfour, se sont engagées en faveur du sionisme. Et celui-ci, « qu'il soit juste ou faux, bon ou mauvais, est enraciné dans des traditions séculaires, des besoins présents, et des espoirs futurs qui ont beaucoup plus d'importance que les désirs et préjugés des 700 000 Arabes qui habitent présentement cette ancienne terre. » Il n'est donc aucunement nécessaire, poursuit Balfour, « de consulter les habitants actuels du pays pour voir ce qu'ils veulent. »
En 1922, la nouvelle Société des Nations publie son Mandat pour la Palestine, qui officialise la gestion du pays par la Grande-Bretagne. Ce mandat non seulement reproduit mot pour mot le texte de la déclaration de Balfour de 1917, mais il va encore plus loin dans son appui du projet sioniste.
Dans le troisième paragraphe du préambule du mandat, seul le peuple juif est décrit comme ayant un lien historique avec la Palestine. Pas la population palestinienne qui est carrément majoritaire. Aux yeux des rédacteurs, l'ensemble de l'environnement du pays construit pendant deux mille ans, avec ses villages, sanctuaires, châteaux, mosquées, églises et monuments datant des périodes ottomane, mamelouke, ayyoubide, croisée, abbasside, omeyyade, byzantine et antérieures, n'appartient à aucun peuple, ou seulement à des groupes religieux amorphes. Il y a des gens, certes, mais ceux-ci n'ont pas d'histoire ou d'existence collective, et on peut donc les ignorer.
Dans tous les articles du mandat, on ne se réfère jamais aux Palestiniens en tant que peuple jouissant de droits nationaux ou politiques. Comme dans la déclaration Balfour, les mots "arabe" et "palestinien" n'apparaissent pas, et les seules protections envisagées pour la grande majorité des gens qui habitent déjà cette région concernent les droits personnels et religieux et la préservation du statu quo sur les sites sacrés.
L'article 7 du mandat prévoit une loi sur la nationalité pour faciliter l'acquisition de la citoyenneté palestinienne par les Juifs. Cette loi sera par la suite utilisée pour refuser la nationalité aux Palestiniens qui avaient émigré aux Amériques pendant l'ère ottomane et qui souhaitaient maintenant retourner dans leur patrie.
Ainsi, les immigrants juifs, quelle que soit leur origine, peuvent acquérir la nationalité palestinienne, alors que les Arabes palestiniens de souche qui se trouvent à l'étranger au moment de la prise de pouvoir par les Britanniques se la voient refuser.
En entraînant un afflux de colons juifs étrangers dont la mission est de s'emparer de la Palestine, le mandat rend la colonisation de la Palestine différente de celle de la plupart des autres peuples colonisés à cette époque. Au cours des années cruciales allant de 1917 à 1939, l'immigration juive imposée par le mandat se poursuit à un rythme soutenu. Les colonies établies par le mouvement sioniste le long de la côte palestinienne et dans d'autres régions fertiles et stratégiques servent à assurer le contrôle d'un tremplin territorial pour la domination (et finalement la conquête) du pays, une fois que l'équilibre démographique, économique et militaire a suffisamment basculé en faveur du peuple juif.
Il est peu étonnant que le mécontentement populaire à l'égard du soutien britannique aux aspirations sionistes se soit traduit par des manifestations, des grèves et des émeutes, avec une flambée de violence notamment en 1920, 1921 et 1929, chaque épisode étant plus intense que le précédent. Dans tous les cas, il s'agit d'éruptions spontanées, souvent provoquées par des groupes sionistes en train de montrer leurs muscles.
Les Britanniques n'hésitent pas à réprimer brutalement et avec la même sévérité les Palestiniens, que leurs manifestations soient pacifiques ou pas. En plus, ils enseignent aux Juifs colons leurs techniques de répression, leur fournissant un entrainement militaire intensif ainsi qu'une quantité considérable d'armes.
Grâce à l'aide britannique, les colons juifs qui arrivent en Palestine réussissent à construire la structure autonome d'un para-État sioniste. En outre, un secteur distinct de l'économie contrôlé par les Juifs est créé grâce à l'exclusion de la main-d'œuvre arabe des entreprises appartenant à des Juifs, sous le slogan "Avoda ivrit" (travail en hébreu), et à l'injection de capitaux véritablement massifs en provenance de l'étranger.
Au milieu des années 1930, bien que les Juifs constituent toujours une minorité de la population, leur secteur économique, largement autonome, est déjà plus important que celui appartenant aux Palestiniens.
La vague massive d'immigration juive provenant des persécutions du régime nazi en Allemagne fait passer la population juive en Palestine de 18 % du total en 1932 à plus de 31 % en 1939.
En 1936, le peuple palestinien se révolte massivement contre la domination britannique et son appui au projet sioniste. Cette révolte, qui durera jusqu'en 1939, est réprimée de façon brutale. L'Empire britannique fait intervenir une centaine de milliers de ses soldats, des escadrons de bombardiers, et tout l'attirail de répression qu'il a perfectionné au cours de plusieurs décennies de guerres coloniales. Les raffinements d'insensibilité et de cruauté mis en œuvre vont bien au-delà des exécutions sommaires. Pour la possession d'une seule balle, Shaykh Farhan al-Sa'di, un chef rebelle âgé de quatre-vingt-un ans, est mis à mort en 1937. En vertu de la loi martiale en vigueur à l'époque, cette seule balle est suffisante pour mériter la peine capitale, en particulier pour un guérillero accompli comme al-Sa'di. Plus d'une centaine de sentences d'exécution sont prononcées à l'issue de procès sommaires devant des tribunaux militaires, et de nombreux autres Palestiniens sont exécutés sur place par les troupes britanniques.
Lorsque les rebelles palestiniens tendent des embuscades à leurs convois et font exploser leurs trains, les Britanniques, furieux, attachent les prisonniers palestiniens à l'avant des véhicules blindés et des locomotives pour empêcher les attaques des rebelles, une tactique qu'ils avaient inaugurée dans un effort futile pour écraser la résistance des Irlandais pendant leur guerre d'indépendance de 1919 à 1921.
Les Britanniques démolissent des maisons des rebelles emprisonnés ou exécutés, ou des rebelles présumés ou de leurs parents ; ils détiennent de milliers de Palestiniens sans procès, et forcent à l'exil les dirigeants les plus importants.
Des tactiques que, malheureusement, leurs disciples militaires israéliens continuent à utiliser jusqu'à ce jour.
Bilan de cette grande répression britannique de 1936 à 1939 : de 14 à 17 % de la population palestinienne adulte masculine est tuée, blessée, emprisonnée ou exilée.
Notes
1. Norman Finkelstein Shreds Bill Mayer's Israel Defense, Breaking Points, publié sur YouTube le 22 décembre, 2023. Consulté le 3 janvier 2024.
2. Je me suis permis une certaine liberté en reproduisant et traduisant ces paroles de Norman Finkelstein. Je suis convaincu, cependant, que je reflète bien sa pensée. Lectrices et lecteurs pourront le vérifier en visionnant eux-mêmes, ici, ce que dit Finkelstein.
3. L'information dans cette section, et parfois des paragraphes entiers, proviennent presqu'exclusivement du livre de Rashid Khalidi, The Hundred Years' War on Palestine Henry, Holt and Company, 2020.
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L’Afrique du Sud amorce demain son plaidoyer à la Cour internationale de la Haye contre Israël sur le génocide à Gaza

Appel d'une nouvelle Coalition internationale pour mettre fin au génocide en Palestine (ICSGP) à appuyer l'action de l'Afrique du Sud
Tiré du Journal des Alternatives
Journal des Alternatives - Plateforme altermondialiste ,
États-Unis — La toute nouvelle Coalition internationale pour mettre fin au génocide en Palestine (ICSGP) a publié une lettre de soutien, qui en moins d'une semaine a été signée par plus de 800 organisations à travers le monde.
Outre les organisations initiatrices mentionnées ici, les organisations signataires représentent de vastes mouvements sociaux, notamment la Marche mondiale des femmes et l'Assemblée internationale des peuples, des mouvements dirigés par des Palestiniens et des mouvements de solidarité avec la Palestine, tels que la Fédération générale palestinienne des syndicats et le Réseau des ONG palestiniennes, ainsi que des groupes de défense des droits de l'homme et des groupes juridiques, des syndicats et des organisations religieuses de toutes les confessions.
« Il est important pour La Via Campesina (LVC) de soutenir l'initiative sud-africaine. Ce qui se passe en Palestine est une atrocité. En particulier, l'utilisation de la famine comme arme de guerre fait partie d'une stratégie de génocide que nous devons dénoncer. L'expulsion des populations paysannes et l'accaparement des terres à Gaza et en Cisjordanie font également partie d'une stratégie de nettoyage ethnique », a déclaré Morgan Ody, de la Confédération paysanne (France) et coordinatrice générale de LVC International.
La lettre de la coalition exhorte toutes les organisations signataires à « faire pression sur leurs gouvernements pour qu'ils déposent immédiatement une déclaration d'intervention en soutien à la plainte déposée par l'Afrique du Sud contre Israël devant la Cour internationale de justice afin de faire cesser les massacres dans les territoires palestiniens occupés ».
Jusqu'à présent, la Malaisie et la Turquie, ainsi que l'Organisation de la coopération islamique, qui représente 57 pays membres sur quatre continents, ont soutenu publiquement la plainte de l'Afrique du Sud. La Jordanie signale qu'elle a l'intention de franchir une étape plus importante sur le plan juridique en soumettant une déclaration d'intervention. Les membres de l'ICGSP travaillent en étroite collaboration avec un certain nombre d'autres pays qui sont en train de faire de même.
« La plainte déposée par l'Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice (CIJ) marque un tournant décisif qui met à l'épreuve la volonté mondiale de sauver les lois et les systèmes qui ont été conçus pour sauvegarder non seulement les droits de l'homme, mais aussi l'humanité elle-même » souligne l'avocate Américaine d'origine palestinienne Lamis Deek, cofondatrice de l'Alliance juridique mondiale pour la Palestine et de la Commission PAL sur les crimes de guerre.
Elle ajoute « Le génocide est le crime le plus élevé et aucun n'a été aussi publiquement documenté que le génocide israélien en Palestine. La sincérité de l'engagement des États à l'égard des principes des conventions de Genève et du génocide est désormais soumise à un examen approfondi. » Le moins que les États puissent faire est de soumettre des déclarations, afin de garantir à leur population — et à l'humanité — qu'ils n'ont pas perdu leur sens moral et qu'ils n'ont pas abdiqué leurs obligations en vertu du droit international.
Malgré les preuves évidentes des actes génocidaires commis quotidiennement par les forces israéliennes d'occupation, l'État d'Israël sollicite activement les pays pour qu'ils nient ses atrocités et dénoncent la plainte de l'Afrique du Sud. À l'heure actuelle, les États-Unis, l'un des principaux soutiens de l'État israélien qui a opposé son veto à trois résolutions appelant à un cessez-le-feu au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, sont les seuls à nier qu'Israël commet un génocide.
Edith Ballantyne, ancienne secrétaire générale et présidente internationale de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté, met en garde : « J'écris sur la base de mon expérience personnelle de plus de dix décennies, au cours desquelles j'ai traversé deux guerres mondiales et survécu au fascisme, avec la conviction absolue que la base du conflit doit être résolue de manière légale, politique et non violente comme seul moyen de parvenir à une paix permanente dont les peuples du monde ont désespérément besoin et qui est nécessaire à la survie de notre planète ». Elle ajoute : « La guerre génocidaire que le gouvernement israélien mène dans les territoires palestiniens occupés contre le peuple palestinien doit être arrêtée. J'invite tous les citoyens à demander à leurs gouvernements de respecter les principes de la Charte des Nations unies et du droit international, y compris les droits de l'homme et le droit humanitaire. »
Pour télécharger le texte de la lettre cliquez ici.
Pour accéder à la liste actualisée des signataires, cliquez ici.
La Cour internationale de Justice entendra l'affaire de l'Afrique du Sud contre l'État israélien les 11 et 12 janvier 2024
Les audiences seront diffusées en direct et en différé (VOD), dans les deux langues officielles de la Cour, le français et l'anglais, sur le site Internet de la Cour, ainsi que sur UN Web TV. Des extraits vidéo haute résolution et des photographies réalisées par le Greffe pendant les audiences seront mis à disposition gratuitement et libres de droit pour un usage éditorial (hors usage commercial) sur le site Internet (téléchargement disponible dans la rubrique Multimédia) et le compte X (anciennement Twitter) de la Cour (@CIJ_ICJ).
Appel à l'action les 11 et 12 janvier
L'ICSGP appelle les organisations qui soutiennent la lettre à se joindre à des actions de soutien à La Haye pendant l'audience et à organiser des rassemblements locaux et des veillées, y compris des expressions de gratitude et de solidarité aux ambassades d'Afrique du Sud, cette semaine.
De plus, elle invite toutes les organisations et les personnes à participer à une Intifada numérique mondiale sur les media sociaux X (Twitter), Instagram, Facebook, Tiktok et d'autres plateformes. Il faut partager des vidéos, des photos, des images et déclarations et d'autres formes de preuves et de témoignages qui prouvent qu'Israël a commis et continue de commettre le crime de génocide contre la population palestinienne de Gaza.
Pour nous assurer que le hashtag #EndIsraelsGenocide devient virale, nous devons publier en utilisant les mêmes hashtags à la même heure du jour. La campagne durera 2 heures et commencera en même temps que les audiences : Plaidoirie de l'Afrique du Sud : jeudi 11 janvier de 10 h à 12 h. Plaidoirie d'Israël : vendredi 12 janvier : de 10 h à 12 h. (Québec 04 h à 06 h)
Communiqué de la Cour internationale de Justice, 3 janvier 2024
Document de la Cour sur les procédures
À propos de la Coalition internationale pour mettre fin au génocide en Palestine (ICSGP)
Le 30 décembre, des personnes représentant d'un groupe d'organisations, y comprenant entre autres Black Alliance for Peace, l'Internationale progressiste, International Association of Democratic Lawyers, Réseau de solidarité avec les prisonniers palestiniens Samidoun, Ligue internationale des femmes pour la Paix et pour la Liberté (Section É.-U.), CODEPINK, la Coalition internationale Flottille de la liberté à Gaza, Popular Resistance (É.-U.), Veterans for Peace (É.-U.), l'Organisation mondiale contre la guerre, le militarisme et pour la paix (World Beyond War) et le Memorial Center Dr Martin Luther King Jr. (Cuba), nous sommes réunis avec l'urgence de soutenir les initiatives juridiques orientées à mettre fin au génocide perpétré par Israël à Gaza.
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Shlomo Sand : « Pas d’avenir pour un État juif sans les Palestiniens »
9 janvier 2024 | tiré de Mediapart | Vidéo en accès librese
https://www.mediapart.fr/journal/international/090124/shlomo-sand-historien-l-etat-juif-n-pas-d-avenir-sans-les-palestiniens
Trois mois après les massacres du 7 octobre et alors que le supplice de Gaza se poursuit chaque jour, entretien avec l'historien israélien Shlomo Sand qui publie « Deux peuples pour un État ? Relire l'histoire du sionisme » aux éditions du Seuil.

Des services aux élèves allophones

Le 22 décembre dernier, des parents ont organisé une manifestation de soutien aux professeur-e-s devant le parlement de Québec. Voici un des discours prononcé.
Je m'appelle Andrée-Anne et je suis enseignante de francisation. Aux yeux de notre gouvernement, je suis toutefois qu'un simple matricule, le matricule 32 440.
J'enseigne au CSS de la Capitale à l'école Dominique-Savio. Notre école est située en milieu défavorisé et multiculturel. Je suis celle qui est en charge d'accueillir les nouveaux élèves allophones. Je suis donc celle qui est témoin des étincelles dans les yeux des parents et des yeux des enfants lorsqu'ils arrivent à l'école. Je tenais à venir exposer les incohérences entre ce que le gouvernement dit et les faits qu'on constate sur le terrain, car l'écart est grand.
Pour commencer, vous souvenez-vous de cette fameuse phrase à saveur populiste : ‘'En prendre moins, en prendre soin'' ? C'est monsieur Legault qui nous a lancé cela lors de son premier mandat. J'aimerais beaucoup savoir que signifie ‘'en prendre soin'' dans le dictionnaire de notre gouvernement. Si on se définition du Larousse, la locution verbale ‘'en prendre soin'' veut dire s'en occuper, veiller sur lui ; y penser, faire en sorte que.
Dites-moi maintenant si on peut dire que le gouvernement prend soin des nouveaux-arrivants quand :
• Il les intègre, pour ne pas dire garoche, dans des classes régulières, sans service de francisation.
• Un élève qui arrive en cour d'année se voit refuser une place au sdg, car le service est déjà plein. Cela implique qu'un parent doive rester à la maison afin de faire dîner son enfant. On l'empêche d'assister à ses cours de francisation et à chercher un emploi.
• Un élève ayant vécu la guerre dans son pays d'origine se voit refuser le service de psychologie, car la psy doit, aussi bienveillante soit-elle, déjà assurer les suivis dans 3 écoles différentes.
• Est-ce que je peux dire que je m'occupe bien de mes élèves quand je suis rendue à 55 élèves suivis ?
• Est-ce que ma collègue titulaire peut dire qu'elle veille sur son élève allophone quand elle lui tend un iPad pour jouer sur Duolingo pendant les mathématiques parce qu'elle ne comprend pas ?
Malheureusement, face à nos demandes, le gouvernement fait la sourde oreille. À l'heure actuelle, à la table de négociation, l'ouverture de nouvelles classes d'accueil n'est pas envisagée par le gouvernement. À titre informatif, au CSS de la Capitale, il n'y a que 5 classes d'accueil. Aux PS, il n'y a aucune classe d'accueil. Pourtant, les besoins sont criants.
Le gouvernement profite du fait que les parents aient souvent une méconnaissance du système scolaire public et qu'ils ne parlent pas la langue. Difficile de demander quelque chose ou quand on ne maitrise pas la lague de la société d'accueil.
J'aimerais être capable de prendre soin de mes élèves dans leurs apprentissages du français et dans la découverte de leur nouvelle culture. Vous dites qu'un nouvel arrivant DOIT apprendre le français en 6 mois, faudrait peut-être leur fournir les bons outils. En prenant soin pour de vrai des nouveaux-arrivants, ceux-ci auront davantage le désir de connaître notre culture, de s'y intéresser et de s'y intégrer. Pour se faire, il faudra d'abord que la CAQ s'intéresse à eux.
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